Ubarhy Naash
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Le monde s’était à nouveau s’assombrit, je n’entendis même pas si Torhyn avait répondu à mon appel tant le coup de fatigue était grand. Ma vision d’horreur d’Obélias se perdit dans l’obscure alors que je fermais les yeux, la respiration forte et toujours entrecoupée de toux.

Un mouvement dans la chambre me tira d’un sommeil que je devinais trop court pour mon corps fatigué, ouvrant mollement les yeux pour voir mon tendre amant et mon ancienne amie s’agiter à mon chevet.

- Tu es bien revenu, murmurais-je à l’intention de mon compagnon en souriant faiblement.

Il avait posé une main qui semblait glaciale sur mon front, déferlant une vague de fraîche bienvenue calmant momentanément le mal de tête qui ne s’était pas dissipé avec mes cauchemars. En réponse à cette main guérisseuse, mon visage se détendit alors que mes yeux bleus se perdaient dans les siens, sans réflexion, juste m’imprégnant de sa présence.

Pourtant, cet instant de paix me fut arracher par des griffes étrangères qui me soulevèrent du lit pour m’amener je ne sais où. Le moelleux du matelas fut remplacé par une surface dure ô combien inconfortable pour ma coiffe, mais l’idée de résister ne me passa même pas à l’esprit. Alors que nous quittions l’hôtel, mes yeux restèrent fixés sur les lumières incandescentes du plafond suivant notre course. Une, deux, trois… Ces soubresauts éclairaient mon visage pâle malgré l’ocre de ma peau, un sourire flottant sur mes lèvres, ayant comme oublié le monde en observant les lucioles géantes scintiller au-dessus de ma tête.

Avais-je dormi? Impossible de le savoir, ma seule certitude, c’était que je venais de sentir un pincement au bras qui m’avait ramené à la réalité en une profonde inspiration. Désorienté, je constatais le décor tout à fait nouveau qui m’entourait. Les douces lucioles au feu jaune avaient laissées place à des néons blancs stériles. J’étais dans un lit moins confortable que celui de l’hôtel, mais tout de même descend, et de grands rideaux immaculés avaient été dressés devant les murs de la chambre. J’avais jeté un coup d’œil rapide à la pièce, mais l’endroit n’avait guère d’importance que mon cher compagnon qui m’y accompagnait. Il était à mon chevet, comme s’il ne l’eut jamais quitté, observant les machines qui berçaient notre cocon de leur lugubre mélodie.

D’une chanson à une autre, c’est un petit homme rond qui pénétra dans la pièce pour s’enquérir de mon état et celui de Torhyn. Il avait l’air gentil avec ses petits yeux bruns et ses sourcils relevés trahissant un air soucieux. Mon amant lui chanta la tragédie ayant mené à ma contamination et, ayant repris quelques de mes capacités cognitives, je fus surpris de la véracité de ses propos. Évidemment, il avait occulté les détails les plus gênants, mais tout de même, d’en révéler autant sur les expériences d’Obélias me mettait mal à l’aise. D’ailleurs, le docteur Zerbin ne manqua pas de se stupéfier de l’inaction des forces de l’ordre face à la menace qu’avait été notre bourreau. Or, et je constatais encore l’action de maître, Torhyn apportant une justification toute trouvée pour se tirer de la situation qui était au final parfaitement chorégraphié; sauver les apparences. Un langage qui sembla parler à notre hôte qui fut vite convaincu d’étouffer l’affaire.

Parlant d’étouffer, une nouvelle quinte de toux me secoua à m’en faire grimacer, ma gorge irritée et mes poumons souffrants des violentes contractions. Alors que j’allais porter ma main à ma bouche, je remarquais que quelque chose gênait mes mouvements… Ce quelque chose étant un long tube transperçant mes chairs pour remonter vers une poche de liquide transparent. L’espace d’une seconde, j’eus l’instinct d’arracher ce corps étranger, mais je me ravisais à la dernière seconde en tentant de me rassurer quant à la nécessité d’un tel dispositif. À bien y réfléchir, c’est ce qu’avais pratiqué mon cher ami sur Klyffa lorsque nous étions à l’hôtel, ça ne pouvait pas être bien méchant… Je détournais néanmoins les yeux, ne supportant pas la vue de l’aiguille fichée au-dessus de mon poignet.

- Il a raison, tu devrais te reposer, confiais-je à mon amant lorsque notre invité se fut éclipsé. Tu as veillé sur moi et Klyffa toute la nuit, j’ai besoin de toi en forme… Que ferais-je sans mon tendre docteur?

J’avais esquissé un sourire alors que Torhyn rapprochait une chaise de mon lit, ne me cachant pas que ma dernière phrase était on ne peut plus vraie. Que ferais-je sans mon tendre docteur? Chassant la question de mon esprit, je me reconcentrais sur le doux visage de mon compagnon qui s’était vu affublé de cernes bien plus notables que ce à quoi j’avais été habitué.

- Je sais que je ne suis pas vraiment en position de m’inquiéter, mais ça me rassurerait que tu t’assoupisses. *Kof* En plus, *Kof!* je ne t’ai jamais surpris à dormir, ça me prouverait que ce n’est pas un droïde qui se cache sous ton beau visage.

Et vu comment il aimait les droïdes, la remarque me fit sourire de plus belle malgré mes toussotements. Je me sentais mieux -pas tant pour ma respiration- depuis mon arrivée à l’hôpital, du moins, mes visions s’étaient estompées et c’était déjà du progrès. Abdiquant à la demande, mon cher docteur se résigna finalement à se laisser aller aux bras de Morphée calé dans son fauteuil à côté de moi. Il parti vite vers les songes d’ailleurs, je pu constater ses traits se détendre, ses épaules se relâcher, son visage devenir paisible. Je me trouvais privilégier de pouvoir à mon tour veiller sur son sommeil, c’était une marque de confiance et surtout un certain instinct protecteur se voyait satisfait par ce simple constat.

Admirant le contour se son visage, son nez, ses lèvres, ses cheveux rebelles s’étant échappés du joug de son chignon, mon cœur s’en vit réchauffé. Il était beau, mon amant, mais pas seulement. Sa respiration était lente, profonde, régulière, comme les gouttes d’eau chutant des feuilles après un orage. Ses poumons à lui aussi étaient souffrants, je ne pouvais qu’imaginer comprendre ce qu’il avait vécu, la douleur qu’il avait subie et cette puissante impuissance de ne rien pouvoir y faire. À cette pensée, ma main vint tendrement s’emmêler aux cheveux de mon bel ami comme pour protéger son sommeil.

Et puis... quand m’étais-je endormi? Avais-je seulement pu apercevoir le filet de sang entachant la pâle neige du visage de mon amant pour aller mourir dans le noir de sa barbe?

Torhyn Lokred
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L’obscurité la plus totale m’entourais. J’ignorai où je me trouvais. Mais soudain j’entendis une plainte.

- Ryden ! Ryden sauvez-moi ! Tout cela est à cause de vous ! Ryden !!

Cette voix…je la connaissais. C’était celle de Chani ! Des profondeurs des ténèbres apparue une chambre de décontamination. Chani était dedans, sous la forme d’une Rakghoule. Elle me suppliait de la sauver. C’était impossible…les Rakghoules, à ma connaissance, ne parlaient pas ! Soudain les flammes s’élevèrent tout autour d’elle. Je me précipitais, tambourinant contre la vitre, tentant de la briser. Mais rien n’y fit. Chani brulait vive et se consumait dans un torrent de flammes et de souffrances. Ma plus belle création partait en fumée et j’étais incapable de l’aider.

- Non ! Pas ça !


**

Combien de temps m’étais-je assoupi ? Je ne saurai le dire. Je m’éveillais en sursaut m’exclamant :

- Non ! Pas ça !!

Il me fallut quelques secondes pour comprendre que j’étais dans la chambre d’Ubarhy, dans la clinique privée…Et que je venais de faire un cauchemar tiré de mes souvenirs d’antan. La situation face à Obélias sans doute. Heureusement je ne pensais pas avoir réveillé mon chère Togruta. Je soupirai, et me dirigeais vers la salle de bain pour me débarbouiller un peu le visage. J’avais un mal de tête terrible, et je me sentais épuisé. Mais qu’importait. Devant le miroir, je fronçais les yeux en voyant du sang séché sous mon nez…souillant ma barbe. Mes saignements étaient décidément intempestifs ces derniers temps. Je me nettoyais dans le lavabo, mais en me redressant je fus pris d’un vertige…J’eus l’impression, quelques secondes, d’avoir comme des mouches lumineuses passant devant mes yeux. Je secouais la tête, me retenant contre le mur…

Heureusement cet étourdissement ne dura pas. Je pris une profonde inspiration et quittais la chambre non sans avoir vérifié les constantes de mon ami. Tout semblait aller au mieux de son côté. Je cherchais le docteur Zerbin dans les couloirs. Soudain ma vision se troubla. Je me retins à nouveau contre un mur…Ma poitrine me faisait souffrir. Je sentais ma tension pulser jusque dans mes tempes…Je secouais la tête avant de m’effondrer au sol. J’entendis vaguement au loin un cri :

- Docteur Lokred !

Puis je sombrais dans l’inconscience. Autour de moi on s’afférait. Zerbin qui venait de me voir tomber avait appelé des secours.

- Vite !! Chariot de réanimation !

Les infirmières et internes avaient fait au plus vite et au mieux. Quand je fus tiré d’affaire Zerbin donna ses instructions me concernant avant de gagner la chambre où était Ubarhy. Son visage était grave. Il n’avait jamais envisagé que je puisse devenir un patient à mon tour.

- Naasha ? Je…comment allez-vous ? Je…je suis désolé de vous apprendre que Torhyn est souffrant. Il est actuellement inconscient…Hrem…il a fait un arrêt cardiaque…Mais nous l’avons ramené, je l’ai envoyé en imagerie médicale. On va faire quelques examens et le transférer ici.

**

Je m’éveillais d’un sommeil profond…sans rêve. Du moins je ne m’en souvenais pas. Je m’étais encore assoupi ? Décidément…J’étais allongé cette fois. Je fronçais les sourcils en découvrant que j’étais dans un lit d’hospitalisation, sous perfusion, et raccordé à un moniteur de surveillant…Et on m’avait placé dans la chambre d’Ubarhy. Je grognais en me redressant…arrachant cathéter et sonde de surveillance. Un bip de détresse s’illumina sur le monitoring que j’éteignis. Mais le bruissement de tissus dans le lit à coté du mien m’indiqua que mon amant s’était réveillé. Je me tournais vers lui, un franc sourire sur mon visage fatigué :

- Désolé, je ne voulais pas te déranger. Comment tu te sens ?

La porte de la chambre s’ouvrit et Zerbin entra :

- Torhyn !! Vous…ha…vous êtes réveillé.

- Je vais bien, pas d’affolement.

- Non vous n’allez pas bien ! Vous avez fait un arrêt cardiaque !

-Ce n’est pas grave…j’ai connu pire.

- La peste soit de votre foutu entêtement ! Pourquoi vous ne m’écoutez pas !

- Mais je vous écoute très cher.

- Pourquoi ne m’avez-vous pas dit votre état ? Je ne vous aurai pas laissé prendre tant de risque, je vous aurai obligé à vous reposer !

- Mon état ne regarde que moi…

Il tenait un datapad dans la main et le secoua devant Ubarhy et moi :

- Avez-vous seulement idée de ce que vous avez ? Avez-vous seulement conscience de…

- Allons, calmez-vous Zerbin, il n’y a pas lieu de pani…

- Vous êtes mourant ! finit-il par hurler d’un coup. Je soupirai, esquissant un léger sourire…avant de tourner les yeux vers Ubarhy… Zerbin s’était radouci, il paraissait surpris de mon calme. Vous saviez ?

- Bien entendu…je le sais depuis longtemps.

Une fatalité avec laquelle je vivais depuis que j’avais compris mon sort funeste sur Kohlma…








Ubarhy Naash
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- Naasha ? Je…comment allez-vous ?

Je venais de me réveiller d’un profond sommeil aux mots d’un inconnu. Arraché des bras de Morphée que j’avais si patiemment attendu, je grommelais mon mécontentement en ouvrant les yeux pour découvrir qui avait osé troubler mon précieux repos. Je reconnu de suite le petit docteur qui avait plus tôt discuté avec Torhyn pour mes soins, ses mêmes yeux noisette toujours cernés de sourcils inquiets. Mais là, plus que d’habitude, il semblait agité et mal à l’aise ce qui m’incita à ravaler ma mauvaise humeur de principe pour mieux porter attention à ce qu’il avait à dire.

- Je vais bien merci. Que se passe-t-il?

- Je…je suis désolé de vous apprendre que Torhyn est souffrant. Il est actuellement inconscient…Hrem…il a fait un arrêt cardiaque…

Mon sang ne fit qu’un tour. Instinctivement je regardais autour de moi, comme cherchant ses yeux azures, mais mon amant avait effectivement disparu. La peur au ventre, mon estomac se noua sous le choc de la nouvelle. Torhyn était souffrant. N’avait-il pas déjà assez souffert avec ses poumons? Avant que je n’aie eu le temps de faire état de mes inquiétudes, Zerbin cru bon de me rassurer.

- Mais nous l’avons ramené, je l’ai envoyé en imagerie médicale. On va faire quelques examens et le transférer ici.

- Et comment il va? Il va s’en sortir?

- Il est encore trop tôt pour se prononcer, les examens nous en diront plus sur son état. Mais ne vous en faites pas, il est entre de bonnes mains. Nous avons pu agir à temps. Cependant, il semble que Torhyn soit un homme qui ne connaît pas le repos… pour qu’il se remette au mieux, il faudra peut-être insister pour qu’il reste au lit.

J’acquiesçait à la recommandation du docteur qui pris congé alors qu’un voyant s’activait sur son bracelet. Or, je n’avais pas autant d’autorité sur mon doux ami… J’allais devoir redoubler d’inventivité pour qu’il daigne se laisser soigner, chose que je savais d’office qu’il aurait en horreur. Je méditais ainsi sur cette nouvelle tornade d’informations pour tenter de mieux m’y retrouver.

Il fallut au moins deux heures et vingt toux avant que mon amant ne me soit retourné. Des infirmiers s’étaient occupés de le brancher à mille machines, installer son lit au côté du miens assez près pour que je puisse le toucher à ma demande. Puis, nous nous retrouvions seuls. Lui assoupit, moi inquiet. Son visage semblait aussi blême que les draps le recouvrant, les cernes et quelques rides s’étaient creusés en vallons asséchés sous ses yeux, je soupirais en passant délicatement ma main sur sa joue. Mon tendre ami, il te faudra rester sage. Comme si sa seule présence avait réussi à calmer mes angoisses, je fermais les yeux à mon tour, glissant dans les limbes entre repos et éveil.

L’agitation dans le lit d’à côté me tira de mes somnolences. Un bip strident agressa mon ouïe alors que je me tournais vers mon compagnon qui s’était redressé, tubes et fils qu’il avait soigneusement arraché de son corps en mains.

- Tu es sérieux?

Mon cher ami s’était retourné vers moi l’air de rien, son minois d’ange contrastant avec l’implacable preuve de sa désobéissance qu’était la mise hors tension de la machine criant son mécontentement.

- Désolé, je ne voulais pas te déranger. Comment tu te sens ?

- Torhyn, tu me fais un arrêt cardiaque et tu ose me demander à moi comment je me sens? Et remet les tubes à leurs places! J’y connais rien en médecine mais je suis certain que ce n’était pas là pour faire joli!

Mon ton entre l’exaspération et la frustration témoignait de mon abyssale impuissance face à mon tendre docteur qui de toute façon allait faire à sa tête. Cependant, le docteur Zerbin entra en toute trombe dans la chambre sans laisser le temps à mon compagnon de répondre. S’en suivit un dialogue surréaliste entre le patient calme répondant à son collègue à la limite de l’arrogance et le docteur presque excédé tentant de lui faire comprendre la gravité de sa position. Finalement, le pauvre Zerbin n’y tenant plus tonna la fatidique annonce.

- Vous êtes mourant!

- Mourant? Répétais-je incrédule en me tournant vers mon amant qui n’avait rien perdu de sa sérénité.

Lui croisa mon regard, confirmant le verdict avec l’air paisible de celui qui a déjà huilé son cercueil. Je restais interdit alors que le ton de notre hôte redescendait sans que l’atmosphère en soit moins tendue. Finalement, Zerbin se frotta le front en soupirant avant de s’avancer pour constater que mon amant s’était défait des principaux dispositifs que son équipe s’était évertué à mettre en place.

- Docteur Lockred, vous devriez respecter le travail de vos collègues et vous laisser faire. Votre état est sérieux, vous n’accomplirez rien à vous entêter à résister. Tous les résultats d’analyse ne sont pas encore tomber, mais en attendant rendez-vous un service et reposez-vous. Il avisa les tubes arrachés du regard avant de conclure. Un infirmier est à votre disposition si vous souhaitez reprendre votre traitement. Il avait visiblement compris qu’il était inutile de tenter de restreindre mon compagnon.

Le petit bougre nous laissa finalement seuls, comprenant que nous avions beaucoup à nous dire suite au verdict médical.

- Alors tu es mourant? Soufflais-je après une seconde de silence. Tu m’as dit que tu étais en rémission de tes poumons, pas que ta santé se consumait à petit feu. J’avais posé ma main sur la sienne, enveloppant sa pâleur entre mes doigts élancés. Et *Kof!* Zerbin a raison, ça n’est pas pour te nuire qu’ils t’ont donné un traitement. Tu devrais suivre tes propres dictons et te laisser soigner, même si c’est contre ta volonté…

Torhyn Lokred
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Ils étaient inquiets ? Réellement ? Je n’avais pas l’habitude de tant de considération. Surtout venant de la part d’une personne qui avait connaissance d’une partie de mes méfaits. Je n’avais pas non plus pour habitude à obéir en ce qui concernait le domaine médical. J’étais bien meilleur que n’importe quel autre médecin dans cette clinique. Le diagnostic je le savais depuis longtemps et le traitement…il était simple. Il n’y en avait pas. Pas encore du moins. J’y travaillais.

J’avais hoché poliment du chef avant que Zerbin ne nous laisse finalement seul. Ubarhy avait pris ma main. Ses quintes de toux enflammaient ses poumons et sa trachée. Je savais ce qu’il ressentait, quelles devient être ses douleurs. Je connaissais tout cela. Mon regard s’était fait tendre, et ma main libre était venue se poser sur son front. Je me libérais doucement de son emprise, et m’écartais pour prendre un thermomètre à infrarouge. Je le dirigeais vers le jeune Togruta. J’eus une légère grimace.

- Ta fièvre remonte. Si elle ne baisse pas je demanderai qu’on te donne un antalgique.

Finalement je revins vers Ubarhy…soupirant. Je lui devais quelques explications.

- Mes poumons ne sont plus un problème. A présent qu’ils sont artificiels, ils fonctionnent très bien pour l’heure. Mais vois-tu, le gaz que l’Empire a gentiment déversé sur mon peuple ne s’est pas contenté de mes poumons…Il a affecté tout mon corps. Et je meure à petit feu depuis des années. Il n’y a aucun traitement pour le moment. Seulement des moyens de repousser l’échéance. Voila ce sur quoi je travaille depuis que j’ai conscience de mon état. Je tente de mettre au point un moyen de me guérir. Si tant est que cela puisse être possible. Ce n’était pas que j’étais défaitiste, mais le temps s’écoulait et je ne progressais guère. Si tu savais…tout ce que j’ai fait jusque là pour tenter d’enrayer le processus. Mais mes organes faiblissent…Cela dit je ne suis pas en sucre. Je suis encore capable de faire bien des choses. Mais je me sens faiblir doucement, quoi que je fasse.

Je savais que ma seule chance de survie reposait sur mes recherches de la Peste Rakghoule. Combinées à la Sorcellerie Sith, j’étais sûr de trouver une solution. La mutation…voila la clé. Obliger mon corps à muter pour se soigner. Mais quand on usait de sorcellerie il y avait toujours un prix à payer. Mais j’étais prêt à cela.

- Ne t’inquiète pas…fis-je en allant en direction d’un tiroir que j’ouvris. Je n’ai pas l’intention de ne rien faire. C’est juste que ce sont des recherches complexes. Défier la mort n’est pas chose aisée. Je sortis un cathéter dans son emballage. Je n’avais pas besoin d’infirmiers pour me rebrancher. Je gagnais mon lit et m’y assit. Je cherchais une veine…et je piquais au niveau de mon poignet. Le reste fut enfantin. Je rallumais le monitoring. Je ne suis pas suicidaire…mais je n’ai pas l’habitude qu’on prenne soin de moi. Je me cache depuis des années…Je ne suis pas en odeur de Sainteté sous mon autre nom. Et mes recherches sur la Peste Rakghoule effraient. Quand je te disais que mes collègues sont d’une étroitesse d’esprit. Cela a toujours été. D’aucuns pensent que j’ai récolté les fruits de mes méfaits. Mais je vois les choses de manière bien plus prosaïque…Ma planète a été assujettie par l’Empire…et j’ai subi les conséquences du génocide qu’ils ont perpétré. C’est aussi simple que cela.

En un sens il était normal que ce soit leur magie démoniaque qui me permette de survivre non ?





Ubarhy Naash
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Comment rester fâché face à des yeux aussi doux? Torhyn avait retrouvé sa chaleur, je comprenais qu’il n’allait pas tenter de se défiler de mes questions, mais le professionnalisme avant tout. À mon grand damne, il avait écarté mes questions pour venir toucher mon front avec délicatesse pour prendre ma température, sa main comme toujours d’un froid polaire rencontrant les dunes de sable rouge.

- Antalgique? Enfin, peu importe, je comprends que je reste ton patient avant celui de Zerbin et que toi tu te considères docteur largement avant patient, mais j’aimerais que tu m’entre dans la confidence. Et que tu te repose aussi. Mais grimpons la colline avant de vouloir toucher la lune, dis-moi ce qui te ronge.

Je le laissais faire ses manœuvres pour confirmer son diagnostic en terminant ma phrase d’une inquiétude manifeste. Malgré l’urgence plus brûlante que ma fièvre de savoir en quoi mon cher ami était souffrant, je savais bien que lui n’allait pas céder son rôle de médecin à la première petite attaque cardiaque venue.

Finalement, il accéda à ma requête. C’était donc le gaz de l’Empire qui avait empoisonné ses chairs et lui tentait de trouver un moyen de se guérir. Une vague de tristesse passa dans le bleu de mes yeux à la mention de l’inéluctable, j’imaginais bien qu’on ne pouvait pas remplacer son corps en entier, le mal était trop profond et le sablier ne cesserait jamais son avancée. Or, la consolation n’était pas son objectif, non, il était trop grand pour ça, lui visait le miracle. Et pas le genre de miracle qui nous tombe dessus par hasard, le miracle créé de minutie et de travail acharné, le miracle construit de main d’homme, le miracle tenant plus du sacrifice que de la bonté de foi du Shili’neh grriva.

Lorsque mon amant mentionna tout ce qu’il avait pu faire pour tenter de percer les secrets de la vie qui s’arrachait petit à petit à son âme, je repensais aux mots empoisonnés d’Obélias. Les expériences de Ryden sur les êtres conscients, une fois sa vie en jeu, de quoi était il capable? Combien de vie étaient passées à trépas entre ses tendres mains que je caressais? Et avait-il seulement arrêté? Autant de questions auxquelles je ne souhaitais pas forcément de réponse, heureuse vie ont les ignorants. Ceci étant, si j’avais un jour le courage de le confronter quant à ses expériences, j’allais exiger toute l’histoire. Quitte à savoir, j’allais me jeter à pieds joints dans les abysses pour comprendre comment et pourquoi chaque paroi avait été façonnée comme elle l’était. Or, je n’étais pas encore prêt pour ce grand plongeon et le Torhyn que j’avais en face de moi me convenait largement.

- Ne t’inquiète pas…

- Facile à dire.

- Je n’ai pas l’intention de ne rien faire. C’est juste que ce sont des recherches complexes. Défier la mort n’est pas chose aisée.

- J’entends bien... mais attend, tu vas vraiment te planter cette aigu- je m’arrêtais net et détournais les yeux alors que mon amant se tripotant le poignet enfonça le cathéter dans une de ses veine -oui, évidemment que tu vas vraiment te planter l’aiguille dans le bras tout seul. À quoi ais-je pensé? Un frisson me parcourut l’échine alors que je grimaçais à ce geste d’un banal déconcertant pour mon compagnon qui lui n’avait pas fait de cas de la procédure.

Lui termina son récit alors que j’osais retrouver son regard, constatant qu’il avait fini de ‘’s’installer’’ aux machines reprenant leur calme litanie. La vie de Ryden surgi à nouveau, mais vu ma résolution de ne pas vouloir en apprendre davantage pour le moment, je gardais les informations dans une boîte de Pandore au coin de mon esprit. Or, je pouvais bien me réjouir de la petite victoire qu’il m’avait conféré; il s’était rebranché au dispositif médical et avait consenti à se coucher dans le lit à côté de moi. Ce n’était pas rien! Comme en récompense, je m’étais redressé pour lui offrir un doux baiser sur la joue.

- Et bien il est grand temps de casser tes habitudes… Tu verras, qu’on prenne soin de toi, tu ne pourras vite plus t’en passer. J’avais repris un ton un peu plus léger malgré la gravité de la discussion. Peut-être pour me rassurer, assurément pour me rassurer, mais je n’allais pas le réduire à une petite chose fragile et pleurer sur son sort. Ce n’est pas ce qu’il aurait souhaité. Je comprends mieux ton état. Toutes ces révélations ne me laissent pas indifférent, mais je sais qu’il n’y a pas grand-chose qui te freineront dans tes plans pour te guérir. Une quinte de toux enflamma ma respiration et coupa mon élan, me recroquevillant quelques secondes sur moi-même avant d’offrir à mon cher ami un petit sourire entendu et de poser ma main sur son torse. De te savoir funambule au-dessus du gouffre de la mort m’attriste et m’inquiète… Je ne peux pas m’empêcher de m’en faire pour toi.

Dans cette partie de Sabacc que nous avions entamer dès notre rencontre, jouant de ruse et de détours, Torhyn avait mené la partie d’une main de maître. Je l’avais suivi, remporté quelques mises pour mieux en perdre, et me voilà à dévoiler mes cartes d’un sourire résigné; L’Idiot du Sabacc.

Torhyn Lokred
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Quel instant étrange. C’était moi le médecin, c’était moi qui devais soigner l’infection terrible qui affectait Ubarhy. Et à présent, j’étais moi-même rattrapé par ma propre condition physique déplorable.

- Et bien il est grand temps de casser tes habitudes… Tu verras, qu’on prenne soin de toi, tu ne pourras vite plus t’en passer.

Je ne savais que penser. Je souris :

- Je me souviens…il y a longtemps. Ma mère s’occupait de moi quand j’étais souffrant, ou envahis par de sombres et tristes émotions. Mais c’était il y a des années.

Mes pensées volèrent vers He’Thu, ne m’avait-elle pas protégé finalement ? Elle m’avait extirpé des décombres suite à l’explosion de Kohlma, elle m’avait sauvé…et elle avait promis de m’aider à trouver un traitement. Sans oublier le piano…En un sens elle prenait soin de moi. Et que dire d’Absalom ? De Seigneur Sith à craindre, il était devenu en quelque sorte mon mécène…puis mon ami. Les amis s’entraidaient non ? Bien que je ne fusse pas sûr d’être en mesure de lui rendre ses bienfaits.

- Je comprends mieux ton état. Toutes ces révélations ne me laissent pas indifférent, mais je sais qu’il n’y a pas grand-chose qui te freineront dans tes plans pour te guérir.

Un éclat scintilla dans les yeux. Comme une lueur de détermination :

- C’est un fait. Je ne reculerai devant rien pour tenter de guérir. Quel qu’en soit le prix, et peu importe les moyens…seule la finalité importe.

Sa main se posa sur mon torse alors qu’il était secoué d’une violente quinte de toux.

- De te savoir funambule au-dessus du gouffre de la mort m’attriste et m’inquiète… Je ne peux pas m’empêcher de m’en faire pour toi.

Il s’inquiétait pour moi ? Malgré toutes mes compétences, toutes mes facultés, je ne décelais aucun mensonge, aucun artifice. Il était sincère ? Après tout ce qu’il venait d’apprendre sur mon compte ? C’était une première ! Je me sentais presque démuni, moi qui me targuais d’avoir toujours un coup d’avance. Il venait de jouer la carte du sentimentalisme, et je m’étais laissé prendre. Un coup si simple, et je n’avais rien vu venir. Je posais ma main sur la sienne, pour ensuite enserrer ses doigts. Je fermais les yeux, savourant l’instant.

- Merci…fis-je dans un souffle. Merci de ne pas me fuir malgré tout. Seuls ceux qui sont comme moi restent en général. Mais toi…je dois avouer que tu me surprends. Tu n’as pas l’air d’être du même acabit que moi. Tu es jeune et…je ne dirai pas innocent, mais une certaine pureté se dégage de toi. Et tu ne me rejette pas…Ce n’est pas banal. Je souriais, il se pourrait que je m’habitue à ta présence et à ce que tu t’occupes de moi. Je respirais calmement, alors que mon doux ami toussait à nouveau. Il se recroquevillait sur lui-même à chaque quinte. Laisse la toux venir, n’hésite pas à expectorer le mal. C’est un réflexe normal de vouloir limiter l’action, voir se retenir. Il ne faut pas. Laisse le mouvement se faire. Je sais ce que c’est. On dit que tousser aide à faire sortir. Mais je n’ai pas l’impression que tes bronches soient prises. C’est une toux sèche n’est-ce pas ? Le médecin n’était jamais bien loin. Et s’il s’inquiétait pour moi, j’étais moi-même préoccupé par son état. J’avais fini par me redresser doucement sur le côté pour l’observer. Décris-moi ce que tu ressens.

Un infirmier entra avec des plateaux repas.

- C'est l'heure du souper.

- Je n'ai pas faim. Il faudrait que vous vérifiez sa temp...

- Monsieur Lokred, le Docteur Zerbin a dit que vous deviez reprendre des forces. Donc il faut manger.

Je le foudroyais du regard en répliquant sèchement:

- Se pourrait-il que j'ai perdu mon titre de médecin en l'espace de quelques heures? Ne vous méprenez pas, ce n'est pas parce que je suis dans ce lit d'hôpital qu'il faut m'infantiliser comme n'importe quel patient. Quand vous vous adressez à moi c'est "docteur" et non "monsieur". Et je mangerai quand bon me semblera. Est-ce clair ? Enfin vous allez faire ce que je vous dit si vous ne souhaitez pas que je m'occupe de votre cas quand je serai rétabli. Vous allez faire votre travail...

J'avais désigné Ubarhy, je ne m'étais nullement apaisé et je soutenais le regard de cet infirmier impudent. J'étais malade, certes, mais je n'avais rien perdu de ma superbe, ni mon arrogance.




Ubarhy Naash
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J’avais misé gros sur ce coup. Un jeu dangereux et pourtant, moi qui croyais voir poindre la fin de la partie, la surprise dans les yeux de mon amant m’indiquèrent un tout autre dénouement. L’Idiot avait fait son travail avec une efficacité surprenante, j’étais soulagé de ne percevoir aucune malice chez mon tendre compagnon qui esquissa finalement un sourire entendu, la surprise passée. Une joie chaude me caressa en constatant que mon accès de sentiments ne connaissait pas de méprise de mon cher compagnon. Même, il accepta ma main en la couvrant de la sienne, une marque d’affection qui fini de m’apaiser. Et que dire de ses mots à la douceur n’ayant d’égal que le plus précieux des miels?

- Merci… Merci de ne pas me fuir malgré tout. Seuls ceux qui sont comme moi restent en général. Mais toi…je dois avouer que tu me surprends. Tu n’as pas l’air d’être du même acabit que moi. Tu es jeune et…je ne dirai pas innocent, mais une certaine pureté se dégage de toi. Et tu ne me rejette pas…Ce n’est pas banal. Il se pourrait que je m’habitue à ta présence et à ce que tu t’occupes de moi.

- Ça me touche, vraiment, soufflais-je en lui rendant son sourire. Je reconnais humblement que je ne suis pas des génies de cette galaxie, mais je me complet du bonheur permis par l’ignorance. Je caressais la main de mon compagnon du pouce, rigolant de son insinuation de pureté. Difficile de dire que je suis pur par contre… J’ai bien des vices, mais je t’accorde que la vie ne m’a pas encore teinté de gris et de morosité *Kof!*.

Lorsque mon amant me conseilla de laisser la toux venir sans me retenir, je m’aperçus que j’étais effectivement recroquevillé sur moi-même. En bon élève, j’hochais la tête d’un petit sourire coupable. Je me sentais soudainement fatigué, prenant un certain temps à réfléchir lorsque Torhyn me demanda de décrire ce que je ressentais.

- Ce que je ressens? Et bien comme tu dis je ne sens pas ''d'humide'' dans ma gorge, c’est comme si… hmm… C’est comme si des milliers de fourmis aux pattes de braises ardentes se promenaient dans mes poumons. Et à chaque toux, j’imagine ma gorge comme un sol désertique qui craque, qui se fend. Je passais ma main libre sur mon front à l’image du désert que je venais de décrire, le mal de tête faisant presque parti du décor à ce point. Hmf c’est pas bien scientifique ce que je viens de te décrire…

C’est à ce moment qu’un inconnu entra avec des repas, ce dernier sermonnant mon cher ami sur l’obligation de manger. Erreur. Encore heureux qu’il n’ait pas été un droïde, je n’aurais pas donné cher de ses boulons. Torhyn remis l’infirmier à sa place avec sa condescendance toute naturelle. Je soupirais doucement, mi amusé, mi découragé par l’impétuosité de mon amant malgré sa condition. Or, l’infirmier ne fit pas de cas de ces menaces et déposa les plateaux sur les tables d’appoints de part et d’autre de nos lits.

- Très bien, docteur, alors vous vous contenterai de manger froid. Vous ne pourrez pas vous plaindre que la nourriture est mauvaise en bonne âme et conscience.

Je sentais de mon lit mon tendre amant bouillir de colère. L’infirmier flegmatique obtempéra cependant et alla inspecter mes moniteurs avant de prendre ma température. Il émit un petit ‘’Hmm.’’ avant de griffonner quelques notes sur son datapad.

- Excusez-moi, *Kof* *Kof* quelque chose ne va pas? Demandais-je poliment au garçon à l’instar de mon compagnon qui devait réfléchir à comment l’étrangler avec les tubes à perfusion. C’est qu’il n’était pas très bavard et je n’allais pas rechigner qu’on éclaire un peu ma lanterne quant à mon état.

- La fièvre n’a pas descendu, je vais en informer le docteur Zerbin. Et sans demander son reste l’infirmier s’éclipsa.

Je refermais les yeux en entendant la porte se fermer. Un sourire béat s’était fiché sur mes lèvres. Je soufflais alors à mon amant quelques mots en me perdant peu à peu dans le vague.

- Charmant garçon. Et toi tu penses t’habituer à ce que je m’occupe de toi? Gare à toi! M’esclaffais-je d’un air vaporeux dont on distinguait tout de même l’espiègle. Je suis un vrai tyran, tu verras quand je te demanderai *kof* de faire la vaisselle comme tu auras refusé de prendre un droïde domestique *Kof* *Kof!*. Parti dans des rêveries éveillées, mon sourire n’en fut que plus grand en voyant la scène se matérialisant devant mes yeux. Un soleil radieux passait par la fenêtre…

Torhyn Lokred
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- Un crétin oui…avais-je grommelé, de mauvaise grâce. Sa remarque sur le fait que je me retrouverai possiblement à faire la vaisselle me surpris. J’avais ouvert des yeux grands comme des soucoupes, avant de finalement me mettre à rire. Je préfère encore faire la vaisselle que d’avoir une de ces foutues casseroles ambulante et parlante dans les pattes. J’ai déjà dû collaborer avec deux de ces boites de conserves pendant près de deux ans…j’ai eu ma dose pour un moment. Je ne supporte pas les droïdes. C’est depuis toujours, c’est viscéral. Je reconnais leur utilité, mais compte tenue de ma spécialité médicale, inutile de te faire un dessin de pourquoi je ne les aime pas. Et c’est une chance, mon nouvel employeur ne les apprécie guère non plus. Il ne me force pas à travailler avec. Contrairement au précédent…que je soupçonne d’avoir fait exprès de me mettre des mécaniques comme assistant d’ailleurs.

Comment aurais-je pu dire à Darth Oracci qu’elle aille au diable avec ses deux bougres de robots ? Mais outre le fait qu’elle avait dû trouver cela fort amusant de me confier ces deux droïdes, elle s’assurait également que je ne renoue pas avec mes anciennes pratiques et ainsi courir le risque que je m’en serve comme cobaye pour mes expériences. La seule chose que j’aurai pu leur faire aurait été de me servir d’eux comme cible mouvante lors de mes entrainements de tir. Mais Mee ne m’’aurait pas laissé détériorer du matériel.

Absalom était d’une autre trempe. Plus respectueux des désirs de ses hommes, et de leurs caractères. Et malgré tout, je ne le respectais pas moins que Darth Oracci. Bien au contraire. Là où cette dernière m’avait dompté par la crainte et les menaces, c’était par la négociation et le charme qu’Absalom traitait. Ce qui n’était pas pour me déplaire. D’ailleurs…à présent que j’y songeais…il me manquait. Profondément. Ho je n’étais pas en situation désespérée, mais son absence avait laissé une sorte de vide, aussi petit soit-il, pour l’heure. Un vide, que même la tendre présence d’Ubarhy ne pouvait combler. Etait-ce un des pouvoirs obscurs du Sith qui lui conférait cette attractivité ? Ou tout simplement le fait que j’avais fini par m’attacher à lui plus que je ne l’aurai cru ? Je ne saurai le dire.

Je chassais ces pensées…inutile de me tourmenter davantage. Je songeais aux dernières paroles d’Ubarhy…un petit sourire sur mon visage :

- Si tu peux être un vrai tyran, sache que je fais un bien piètre domestique. Cela ne sied pas à mon égo. Et il a été fort malmené pendant longtemps. Je ris. Cela dit, rien ne m’empêche de retourner une situation à mon avantage…Nouveau rire alors que je tâchais de me redresser. Bon…voyons ce…heu…ce repas. J’avisais l’espèce de bouillis de céréales qu’ils m’avaient servi. De quoi remplir, que dis-je, plâtrer mon estomac en deux cuillérées. Je testais une petite portion du bout des lèvres. C’était, bien entendu, froid, et après l’avoir gouté, je grimaçais. Ils osent appeler cela de la nourriture…Sérieusement…même un rat-womp n’en voudrait pas…

Zerbin fit irruption dans la chambre. Il eut un sourire satisfait de me voir au lit et rebranché. Mais il posa sur Ubarhy un regard teinté d’inquiétude.

- Votre fièvre ne descend pas.

- Antalgique ?

- Nous lui en avons déjà donné. Je ne crains qu’une seconde vague ne soit à craindre…

- C’est ce que je craignais, fis-je doucement…avant de finalement transmettre à Zerbin ce qu’Ubarhy m’avait dit un peu avant d’une manière très poétique au sujet de ses symptômes : céphalées, poumons atteints, une toux non productive et douloureuse.

- Oui…Il va falloir surveiller votre état…Mais que cela ne vous empêche pas de vous reposer Torhyn…Nous sommes sur le qui-vive.

Il avait pointé un doigt accusateur sur moi ; j’eus une moue boudeuse. Comme si j’étais un enfant.

- Nous allons changer de molécule pour le traitement. Peut-être cela sera-t-il plus efficace.

- Augmentez la dose aussi.

- Mais…nous sommes au maximum de ce qu’une femelle Togruta peut endurer.

Je soupirai…Je ne voulais pas trahir le secret d’Ubarhy, ce n’était pas à moi à le faire. Mais j’insistai :

- Faites ce que je dis. Et ne vous inquiétez pas pour ces questions de résistance.

Zerbin haussa les épaules…

- Vous êtes si…si…si…

- Si quoi ?

- Obtus ! Il se tourna vers le jeune Togruta : comment faites-vous pour le supporter lui et son fichu caractère ! Je savais les corelliens butés, mais vous explosez tous les clichés mon cher Torhyn.

Je ricanais doucement, s’il savait que je n’étais pas originaire de Corellia…mais d’ailleurs. Il comprendrait surement ce qui me rendait si borné…comme bien des gens de mon peuple. Et la Force savait si les Lorrdiens pouvaient être chauvins.





Ubarhy Naash
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Quel rire magnifique il avait. Le soleil passant à travers les volets teintait d’or et de nuit le visage souriant de mon tendre compagnon. Accoudé à la table, je l’écoutais me raconter ses déboires avec les droïdes qu’on lui avait collé, d’un air amusé, à m’imaginer sa moue boudeuse face à ce qu’il considérait des tas de fer malcommodes. Pour ma part, les droïdes ne me faisaient ni chaud ni froid, donc son refus catégorique de s’en encombrer ne m’avait pas choqué. Même, j’y avais trouvé là un bon levier de négociation lorsque Torhyn se faisait un peu trop absent…

Ha, quelle était belle et simple notre vie! Quand mon amant m’avoua être piètre domestique dû à son égo, mon sourire n’en fut que renforcé. Oui, j’avais bien remarqué que son égo était tenu en divin chez lui. Et pas pour rien, d’ailleurs, il avait vraiment un esprit hors du commun, vif, puissant, si bien qu’il en négligeait même le sommeil. J’allais devoir tenter de le motiver à retrouver Morphée un peu plus souvent. Tâche plus difficile qu’il n’y paraissait comme il gardait sa liberté précieusement et que je ne comptais pas la lui enlever.

- Ne t’inquiète pas, je trouverai bien un moyen de te motiver. J’avais soufflé ces mots les yeux perdus au ciel, la voix parsemée de sous-entendus. Or, quand il commenta la piètre qualité de la nourriture, je pris un ton indigné. Ce n’est pas bien gentil de critiquer ma nourriture comme ça! Je sais que je ne suis pas tout à fait un cordon bleu, mais quand même je fais des efforts…

Sur la table devant nous trônait des brochettes de viandes, quelques fruits et une tasse de café long, noir, sans sucre. Ma déception était grande qu’il n’apprécie pas le repas que je nous avais préparé, croisant les bras sur ma poitrine. Ma poitrine me faisait mal d’ailleurs, mes inspirations se faisaient plus douloureuses, ma respiration un peu plus sifflante. J’avisais le regard interloqué de mon compagnon, comme si mes mots ne faisaient aucun sens, puis je cru percevoir une pointe d’inquiétude. Était-ce si surprenant que je m’offense de ses mauvaises grâces sur mon souper?

- Obtus !

Je sursautais en me tournant vers la voix inconnue troublant ma vision. Qui était l’intru dans ma demeure?

- Comment faites-vous pour le supporter lui et son fichu caractère ! Je savais les corelliens butés, mais vous explosez tous les clichés mon cher Torhyn.

Mes yeux hagards trouvèrent ceux du docteur Zerbin. Ha oui, le docteur Zerbin, Torhyn l’avait invité?

- Deux caractères atypiques vont de pair. *Kof* C’est vrai que Torhyn est un peu borné à ses heures, mais en apprenant à le connaître on découvre un homme plein de charme. Prenez place, asseyez-vous docteur, vous avez dû faire long voyage…

- Long voyage? Son regard à lui aussi avait changé. Qu’avaient-ils donc à me dévisager ainsi? Il s’était finalement retourné vers mon amant. Vous ne m’aviez pas mentionné les délires dans ses symptômes.

- Les délires? Qui délire?

- Sa fièvre est de 41 degrés. Il m’avait totalement ignoré! Le docteur prit une pause hésitante avant de poursuivre, j’ajusterai la dose comme vous l’avez suggéré. Cependant, votre compagne prend-t-elle des médicaments ou autre substance pouvant interférer avec le traitement?

- Zerbin, c’est moi qui délire? Je m'agitais, irrité par le traitement du silence que je subissais. Pourquoi être entré dans ma maison sans cogner d’abord? Et *Kof* quelle impolitesse *kof* *kof* que de ne pas me répondre!

Torhyn Lokred
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Ok…il délirait totalement. Celle-là je ne l’avais pas vu venir. Zerbin tournait en rond, il voulait bien changer la molécule, mais il était pris dans les questionnements d’Ubarhy, et l’éthique obligeait à prendre en compte ce que le jeune togruta disait. Sans rien ajouter, je m’étais levé pour gagner un tiroir. Je pestais après ces damnés tuyaux sur lesquels je dus tirer pour atteindre mon but. Je saisis une seringue que je remplis. Zervin tentait d’expliquer la situation à Ubarhy. Mais rien n’y faisait, mon fiévreux amant était perdu dans les méandres de la folie.

- Torhyn ? Que faites-vous ? Vous n'allez pas... me demanda Zerbin en me voyant revenir armé de de la seringue. Je ne répondis pas, et plantais mon « arme » sans vergogne directement dans le cou de mon ami malade sous les yeux de mon collègue horrifié. Que…que faites-vous ?

- On perd du temps. Elle a trop de température. Il faut la sédater. Que lui donniez-vous jusque là ?

- Un inhibiteur de la neuraminidase classique par voie orale.

- Il faut changer la molécule…

- Intra-veineuse ?

- Oui…et comme je vous le disais, chargez la dose.

- Bon…Mais il aurait été préférable d’avoir son aval pour….

- La patiente était délirante…et elle est actuellement inconsciente…

- Oui…mais cela est de votre fait.

- S’il vous plait…Je n’ai fait que la soulager…Le reste n’a pas d’importance.

- Je n’aime pas ces méthodes…

- J’en prends la responsabilité.

- C’est votre compagne après tout…

- Exactement…

Il soupira et bipa un infirmier pour qu’il adapte le traitement qui allait être ajouté à la perfusion déjà en place sur Ubarhy.

- Bon…nous allons la surveiller. Elle va dormir un moment, vous devriez vous reposer également.

J’acquiesçais et regagnais mon lit pour tenter de trouver un semblant de repos.


**


J’étais entouré de ténèbres, où étais-je ? Je ne saurai le dire. Soudain une voix s’exclama :

- Gaz…Du GAZ ! Les conduites d’aération !

Une horrible odeur si caractéristique empli mes poumons. Les volutes nefastes emplissaient ma cage thoracique, brulant, ravageant tout sur son passage. Mes yeux piquaient, ma gorge était en feu, mes poumons me faisaient souffrir, je chancelais, toussant, haletant. Autour de moi cétait la débandade dans les tunnels lorrdiens, puisque c’était là que je me trouvais. Des hurlements, des gémissements, des suppliques, alors que la masse grouillante des miens tentait d’échapper à l’inévitable.

Je me trainais tant bien que mal, tentant de trouver de l’air…mais c’était peine perdue. Je sentis un gout ferreux dans ma bouche, et bientôt des expectorations sanglantes vinrent souiller le sol. J’avais le sentiment que ma cage thoracique allait exploser…J’essayais d’appeler, de toute mes forces. Mais aucun son ne sortait de ma bouche. J’allais être sauvé…c’était ainsi que cela devait se passer. Les Jedis…c’était eux qui m’avaient extirpé de là. Mais j’avais beau attendre, personne ne venait.

Non…Je ne pouvais pas mourir ! Je ne devais pas ! J’avais encore tant de choses à faire !

Je sombrais alors que l’oppression que je ressentais se faisait de plus en plus forte. Dans un dernier élan de rage, je rampais toujours. Je ne me rendrais pas sans résister !

- Torhyn ! Réveillez-vous ? Tout va bien ! C’est un cauchemar ! Torhyn !

Je me redressais soudainement, prenant une profonde inspiration de mes poumons synthétiques. Je réalisais que j’étais dans la chambre de la clinique, Zerbin me tenait, il semblait proccupé. Je tournais la tête vers Ubarhy qui dormait toujours.

- Ca va…murmurai-je.

- Vous vous débattiez avec quoi ?

- Rien d’important.

- Cela a-t-il un rapport avec votre état de santé ? J’ai eu les derniers rapports de vos analyses. Cela ne fait que confirmer ce que je vous ai déjà dit.

- Rien de nouveau sous le soleil, fis-je avec un sourire. Et Naasha ?

- La fièvre est en chute. Mais j’ignore quelle dose vous lui avez collé, mais elle dort du sommeil du juste. Il me tendit mon datapad : je vous ai envoyé les données pour vous.

- Vous ne m’apprenez rien Zerbin. Je sais ce dont je souffre.

- Allez-vous me dire ce qu’il s’est passé pour que vous vous retrouviez dans cet état ?

- J’ai été exposé à des substances nocives. Cela a commencé par mes poumons…Et maintenant…

- Maintenant c’est votre cœur qui faiblit.

- C’est gênant…

- Vous ne pourrez pas remplacer tous vos organes Torhyn…

- Je sais. Et ce n’est pas mon objectif.


**


Enfin j’avais été débranché de ces damnées machines. J’avais récupéré et pour l’heure ma vie n’était plus en danger. De même pour Ubarhy. Le traitement en intra-veineuse avait été plus efficace. Il avait fini par émerger du sommeil dans lequel je l’avais sciemment plongé. Restait à voir ce dont il se souvenait. Nous allions bientôt pouvoir sortir de cette clinique privée. L'état de mon jeune amant n'était plus préoccupant.






Ubarhy Naash
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- Mademoiselle Naasha, vous souffrez d’une forte fièvre, vous êtes dans…

- Je suis dans ma maison! Regardez autour de vous Zerbin!

- Non, vous êtes hospitalisée sur Ralltiir. Revenez à vous Naasha, Torhyn est là pour vous.

- Oui, parce qu’on est chez nous! J’avais à nouveau coupé le docteur qui ne voulait rien comprendre.

- Naasha s’il vous plaît calmez-vous. Nous allons devoir ajuster votre traitement comme vous vous trouvez à l’hô-pi-tal. Je dois savoir si vous prenez des médicaments avant de… Torhyn ? Que faites-vous ? Vous n'allez pas...

Torhyn? Où était passé mon cher ami? Je n’eus pas le temps de le trouver qu’une vive sensation de froid parcouru mon cou pour se disséminer dans mes veines. J’entendis un bourdonnement, puis une sensation de picotement aux extrémités avant de tourner de l’œil et de m’affaisser dans mon lit. Mes illusions furent ainsi conquises par les ombres.

**

Une lueur, un plafond. J’étais dans une maison, la même qui avait habité mes délires avant que je ne plonge dans les ténèbres. Or, cette fois mon amant avait été exclus de ma vision. À sa place, Shonaam, ma chère petite sœur, était assise à la table. La dernière fois que je l’avais vue elle avait sept ans et demie, à présent elle devait avoir pas loin de douze ans. Quatre ans déjà que j’étais parti… mais au lieu de me sauter dans les bras l’enfant m’avait accueilli avec une moue boudeuse.

- C’est moi que tu devais marier.

Je restais un instant interdit. Les yeux saphir de ma sœur se remplirent de larmes, ses sourcils froncés faisant presque se toucher les tatouages couvrant son front.

- Papa l’a dit que c’est moi que tu devais marier! Et toi tu m’as promis de revenir et de ne plus jamais, jamais me quitter!

- Shonaam, tu ne comprends pas…

- Non je comprends pas! T’as pas le droit de partir avec un étranger! Je vais le dire à maman!

- Je ne pars avec personne Sho! Je ne partais effectivement avec personne. Torhyn... j'avais bien développé quelque chose pour lui, mais de là à dire que j'allais tout quitter pour ses beaux yeux était un peu fort. Enfin, j'appréciais beaucoup sa présence et je serais ravi que nos chemins ne s'écartent pas aussi vite qu'ils s'étaient croisés, mais de là à dire que je voulais le marier... Enfin, on était bien considérés comme compagnons de vie pour l'heure, mais ça n'allait pas durer. Ça n'allait pas durer... Et je vais tenir ma promesse, repris-je finalement en chassant mes idées vagabondes, je vais revenir je te le jure. Et maman sera fière de moi.

Ma vision devint trouble à ces mots, le visage de ma sœur se fondant dans ses larmes, mes paroles n’ayant pas su consoler son cœur fragile et pur. Le mien s’était resserré dans ma poitrine, mais alors que j’allais appeler ma sœur à revenir pour la réconforter, je rouvris subitement les yeux dans le vrai monde.

La lumière blanche, le lit d’hôpital, le chant des moniteurs, j’étais bien dans ma chambre de confinement sur Raaltiir. Et… que c’était-il passé au juste? Torhyn m’avait demandé de lui décrire mes symptômes, puis… je m’étais endormi? Confus, je tournais les yeux pour remarquer que mon compagnon était toujours à mon chevet, mais avait troqué sa civière contre un fauteuil. Il n’était plus branché sur aucune machine non-plus, ce qui ajouta à mon trouble.

- Torhyn? Tu n’es plus malade? Enfin, je veux dire, tu t’es remis de ton trouble cardiaque? Il avait meilleure mine que dans mes souvenirs au moins, c'était ça de pris. J’ai dormi longtemps? J’ai l’impression d’être tombé dans l’inconscience d’un coup, mais je dois avouer me sentir beaucoup mieux. Ma gorge brûle encore, mais la toux et le mal de tête semblent s’être calmés. De dormir un peu a dû aider…

- Ha! Naasha vous êtes réveillée! Le docteur Zerbin venait de faire une entrée triomphante dans notre chambre en agitant son datapad. J’ai une bonne nouvelle, vous pourrai avoir votre congé d’ici quelques heures. Le traitement… choc du docteur Torhyn a été d’une efficacité foudroyante. Votre fièvre s’est dissipée, vos constantes sont normales, la seule précaution à prendre est de rester en isolement pour éviter de contaminer la population. Le petit bougre s’était tourné vers mon compagnon à ces mots. Je ne vous ferai pas l’insulte de vous réapprendre votre art Torhyn, mais s’il s’agit d’une souche ayant subi des mutations comme vous me l’avez expliqué il faut impérativement prendre toutes les précautions nécessaires. Si vous le désirez vous pourrez prendre des prélèvements que j'irai faire analyser dans mes laboratoires pour suivre le potentiel de contagion. Puis il se tourna une ultime fois vers moi, tout professionnel qu’il était. Si vous êtes d’accord Naasha, bien entendu.

Torhyn Lokred
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Les précautions dictées par Zerbin étaient fondées. D’autant plus qu’à notre sortie, nous avions pu voir sur les holonews la découverte du corps de notre cher Obélias :


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Flash Info



[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]


Alertés par une inhabituelle inactivité dans la demeure de la famille Snively. Les forces de l’ordre ont fait une découverte macabre ce matin : trois corps dans un sous-sol aménagé en une sorte de laboratoire. Il s’agit d’une twi-lek inconnue, le majordome de la maison et le dernier représentant de la famille Snively : Obélias. Les premières constatations, et les témoignages déjà collectés montrent que le jeune Obélias, médecin de son état, se livrait à des expériences illégales pour faire avancer la science comme il le disait. Il semblerait qu’il ait utilisé cette Twi-lek et son majordome comme cobayes avant de finalement se donner la mort. Une enquête est en cours.


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Aussi, lorsque nous pûmes enfin quitter la clinique, ce fut pour retourner à l’hôtel en quarantaine pour Ubarhy, convalescence pour moi. Ce qui ne m’empêchais pas d’aider Zerbin à surveiller le virus. Ce qui mettait mes nerfs à rude épreuve. Il m’appelait régulièrement pour me faire parvenir les derniers résultats.

- Mais enfin puisque je vous dis que cette quarantaine est devenue superflue…Comment ? Les mutations ? Mais il n’y a pas eu de mutation ! Plait-il ? Encore trois jours de confinement ?! Mais…c’est complètement inutile. Comment ça je ne dois pas discuter ? Plus de tests ! Allez au diable avec vos tests Zerbin ! Je sais que vous faites ça par acquis de conscience à cause des holonews…Je ne suis pas stupide ! Je…mais…Me reposer !!! Je ne me suis jamais autant reposé de toute ma vie ! Ca ne m’a pas rendu aimable ?! Mais…ne raccrochez pas ! ZERBIN !!

Hé bien si, il avait raccroché ! D’un geste j’envoyais valser le communicateur et ce qui se trouvais sur le bureau où j’étais assis, laissant éclater ma colère :

- Besporyadok! Ya sobirayus' ubit' yego! (Bordel ! Je vais le tuer !) avais-je hurlé dans un lorrdien inné. Mais pour qui se prend-il ? Il croit pouvoir me donner des ordres ? A moi !? *A nous ! Il nous dénigre !* Cette souche c’est moi qui l’ai créée ! Je l’ai vue à l’œuvre sur des spécimens ! Je la connais mieux que personne ! *Des Twi-leks et des Togrutas que nous avons sciemment infectéspour tester le vaccin* Et cette espèce de…de… *con ?* petit être, de médecin de bas étage qui ne voit pas plus loin que le bout de son museau pense m’expliquer les bases de l’infectiologie !? A MOI !!?? *Il faut le punir !* S’il avait, ne serait-ce que la plus petite idée de qui je suis, il n’oserait même pas me parler comme il le fait ! *Tuons-le ! Je peux t’aider ! Laisse-moi faire Ryden.*

Je soupirais, réalisant que cette colère qui m’animait était inutile. Je me laissais choir sur la chaise, laissant ma tête reposer dans une de mes mains, accoudée sur le bureau. M’énerver ainsi ne servait à rien, surtout que je ne pouvais même pas hurler sur Zerbin, et encore moins le tuer…du moins pas encore ! En tant que chercheur-associé rattaché au nom des Thorn d’Hapès, je ne pouvais pas agir avec impulsivité. Et encore moins à découvert. J’avais promis à Absalom que sa mère n’aurait pas à craindre mes bévues d’antan, risquant d’entacher leurs renommées. Ma frustration était pourtant si grande ! Comme toujours je devais faire profil bas, faire preuve de patience, pour tout ! Aussi bien trouver une solution à ma situation, mais aussi pour gagner en renommée en tant que médecin…à défaut de pouvoir user de mon véritable nom.

Tout à mes déboires, j’en avais oublié que je n’étais pas seul, et qu’Ubarhy était derrière moi, alerté par mon éclat de voix, il était venu de la chambre, vers la pièce qui servait de salle commune, bureau dans notre location.







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Nous étions de retour à l’hôtel, une fois que le docteur Zerbin eut donné son accord à ce que nous quittions sa clinique. Ce n’était pas pour me déplaire, à peine avions-nous passé une journée dans cette salle d’isolement que je me sentais suffoquer entre les quatre murs blancs. Bien que je troquais une cellule pour une autre, au moins la chambre de l’hôtel avait une fenêtre et un lit confortable…

Évidemment, j’avais l’interdiction formelle de quitter ladite chambre comme le virus courait toujours dans mon corps et Torhyn avait été affecté à ma garde. Ceci étant, j’avais deviné qu’il s’agissait là plus d’un prétexte pour que mon cher ami se repose que pour vraiment veiller sur moi, comme je n’avais de symptômes que des quintes de toux s’amenuisant de jours en jours. J’avais repris du mieux, beaucoup de sommeil et une bonne compagnie m’avaient remis sur pied, mais je remarquais que pour sa part, mon compagnon s’impatientait dans sa cage. Il faisait acheminer mes prélèvements tous les matins pour que Zerbin les examine, mais le docteur était difficile à satisfaire ce qui n’avait de cesse d’irriter son homologue. Encore quelques jours, encore quelques jours, puis quelques jours de plus, le petit bonhomme repoussait à chaque communication un peu plus notre date de libération.

Mon amant s’était fait plus distant au fil des frustrations, plus taciturne, passant des heures sur son datapad à suivre en parallèle le symposium auquel il participait maintenant à distance et les résultats quant à mon infection. Cette vision m’attristait, me sentant coupable de le garder cloîtrer avec moi et de voir notre lien pâtir de ce blocage. Au moins acceptait-il toujours de me laisser le coiffer, moment que je gardais précieusement pour tenter de renouer et de lui faire oublier notre prison. D’ailleurs, armé de sa brosse, j’étais sur le point de le rejoindre pour notre session matinale de coiffure quand j’entendis mon doux ami éclater de colère. Je compris sans mal que Zerbin en était la cause, découragé d’avance en sachant pertinemment qu’il appelait pour dire que nous devions rester confiné ‘’encore quelques jours’’.

- … Allez au diable avec vos tests Zerbin ! Je sais que vous faites ça par acquis de conscience à cause des holonews…Je ne suis pas stupide ! Je…mais…Me reposer !!! Je ne me suis jamais autant reposé de toute ma vie ! Ça ne m’a pas rendu aimable ?! Mais…ne raccrochez pas ! ZERBIN !!

J’étais resté dans l’embrasure de la porte, n’osant pas pénétrer l’antre de mon cher Torhyn qui irradiait de rage. Je me félicitais de cet instinct de survie qui m’avait animé, comme il ne fallut qu’une fraction de seconde pour qu’il fasse voler tout ce qu’il y avait à sa portée. Mon inquiétude en fut plus grande encore qu’il vociférait à lui-même des paroles pleines d’une violence que je ne lui connaissais pas. C’était la première fois où je constatais pleinement le feu bouillant dans ses veines. Lui qui avait un naturel pourtant si doux… cynique, borné, imbu de lui-même et antipathique à ses heures, mais doux. J’étais inquiet autant pour lui que pour moi, j’avais appris à mieux le connaître au cours de cette poignée de jours en intense proximité, mais je ne savais pas encore l’étendue de quoi il était capable. Oserait-il s’en prendre à moi? Ou à n’importe quelle pauvre âme ayant l’imprudence de se trouver sur son chemin lors de ses éclats de colère?

Quand mon amant se laissa retomber sur son siège, je pris cependant mon courage à deux mains pour aller affronter la hargne de l’Akul à bras-le-corps. J’avançais lentement dans la salle, annonçant ma venue avec toute la douceur du monde.

- J’en comprends que mes tests ne sont pas encore satisfaisants? Je soupirais pour lui signifier que je partageais son désarroi, passant une main qui se voulait réconfortante sur son bras. En vrai, si Zerbin n’est pas content des résultats, mais que tu juge qu’il n’est plus dangereux de sortir… qu’est-ce qui nous empêche de tricher un peu? Nous avions été sage et jouer selon les règles avait ses limites. Après tout c’est toi l’expert, et en infectiologie, et en ce qui concerne le virus en question. J’avais toujours été très bon élève, pour apaiser ses tourments, je connaissais maintenant quelques techniques efficaces.

Ma main sur son bras remonta doucement sur l’épaule de mon amant pour mieux redescendre sur son torse, me lovant dans son dos en pressant mon buste contre ses omoplates affaissées. Je me faisais aussi affectueux que possible pour tenter d’endiguer l’incendie, l’un de mes lekkus frôlant sa barbe impeccable.

- Et je me sens très bien aujourd’hui. Ma gorge ne me fait plus mal, mes poumons non-plus, je me sens comme neuf. Ton désarroi est légitime, une petite sortie ne peut pas être si terrible. Ma voix était tentatrice, j’étais également excédé de tourner en rond dans la même pièce. S’il nous permettait ce petit écart, je pensais sincèrement que ça allait nous être bénéfique à tous les deux. Ou alors, soufflais-je finalement tout près de son oreille, je peux te proposer de te divertir… de quelque manière que ce soit. Que ta frustration se transforme en quelque chose de plus profitable.
Torhyn Lokred
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La douceur et la tendresse dont il faisait preuve à mon égard en cet instant étaient presque touchantes. Je venais d’exploser et il tentait de me détendre. Est-ce que cela fonctionnait ? Peut-être bien.

Je soupirais de nouveau, avant de finalement me laisser aller en dénouant mes cheveux pour lui laisser le champ libre. Il proposait que nous fassions l’école buissonnière en quelque sorte. Filer en douce pour profiter un peu du soleil de Raltiir et transgresser les règles établies par Zerbin. Des règles devenues ridicules…

- Tes résultats ne sont pas encore concluants. Cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas bons. Juste, qu’ils ne peuvent déterminer que tout danger est totalement écarté. Bon sang…s’est tellement stupide…Zerbin tremble depuis que les corps chez Obélias ont été découverts. Il craint qu’il y ait un possible rapprochement, et qu’on vienne hurler au risque de contamination. Je le soupçonne presque de craindre que cela n’ait une répercussion sur sa carrière plus qu’un risque réel. J’eus un geste de dédains avec un petit « tsss » qui en disait long sur ma façon de penser. Il a surtout peur que je ne l’aie mis dans la panade en faisant appel à lui suite à ce qui est arrivé chez Obélias. J’aurai dû me douter qu’il n’aurait pas les épaules assez solides. Tu vois c’est exactement cela le problème. Cela a toujours été cela…Les gens sont incapable de voir plus loin que le bout de leur nez. Dès que le vent tourne, aussitôt, ils s’enfuient…ou pire ils retournent leurs vestes. Je grimaçais de mépris en sifflant les dernières paroles…Pathétiques…Ils sont tous pathétiques. Et couards…désarmés à la moindre difficulté. Comment veux-tu que les choses bougent. J’ai l’impression de revivre les mêmes conneries que par le passé. Devoir me dresser contre les mêmes types d’imbéciles. Des gens comme Zerbin n’ont jamais eu besoin de trimer. Ils n’ont jamais eu besoin de tout faire pour prouver aux autres qu’ils méritent ce qu’ils ont.

J'avais eu une gestuelle très expressive alors que je venais de déblatéré tout ceci. Tantôt pointant dans le vide une évidence invisible, d'autre fois en levant les mains au ciel , ou en envoyant valser rageusement un objet imaginaire comme pour chasser une pensée peu mémorable. J’étais très certainement rude avec Zerbin, mais j’étais en colère. Et donc injuste…et cynique. Mais puisque mon passé avait ressurgi, il était accompagné de ce qui allait avec : les souffrances que j’avais enduré depuis ma plus tendre enfance. Le désir d’un enfant de briller aux yeux de son renommé de paternel. Puis l’accumulation de frustrations dues à mes échecs tant sur le plan sentimental que professionnel…Tout ceci allait ensemble. Je passais négligemment mes doigts dans ma barbe en songeant à tout cela.

- Quel genre de père as-tu, ou as-tu eu, toi ? La question était survenue d’un coup…sans prévenir…puis finalement je secouais la tête. Ne te sens pas obligé de répondre. Mes deux mains s’abattirent sur les accoudoirs du fauteuil où j’e me trouvais : tu sais quoi ? T’as raison. On va prendre l’air. J’ai l’impression que je vais étouffer malgré mes deux poumons artificiels. Où veux-tu qu’on aille ? C’est toi qui as été malade, et c’est un peu de ma faute. Alors tu choisis. Et…je ne dis pas non à la ta deuxième proposition comme suite du programme une fois rentré… Surprends-moi…

J’avais levé les yeux vers lui, un sourire espiègle fiché sur mon visage. J’avais retrouvé ma douceur…Pour l’instant.








Ubarhy Naash
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Quand Torhyn dénoua ses cheveux, je pris avec plaisir ce signe d’une petite victoire et me redressa non sans poser un furtif baiser sur sa joue. Brosse en main, je commençais à coiffer mon bel ami avec délicatesse et une adresse que je n’aurais jamais cru acquérir. J’avais eu amplement le temps de pratiquer ceci dit.

Il m’expliqua alors les raisons ayant poussé ce bon Zerbin à nous isoler encore quelques jours, passant de mes tests dans une zone grise à la paranoïa du docteur quant à la macabre découverte chez Obélias.

- De nous garder enfermer dans une chambre d’hôtel ne nous fait pas disparaître pour autant, renchéris-je à l’évocation de la crainte du docteur quant à la contamination et à la peur de se retrouver mêler à l’histoire de notre précédent geôlier.

- Tu vois c’est exactement cela le problème. Cela a toujours été cela…Les gens sont incapable de voir plus loin que le bout de leur nez. Dès que le vent tourne, aussitôt, ils s’enfuient…ou pire ils retournent leurs vestes.

Alors que les passions s’enflammaient, les gestes rageux de mon amant eurent pour conséquence de me faire perdre ma maîtrise de ma brosse qui se ficha dans un nœud. Je vis la tête pleine d’orages de mon compagnon se faire légèrement tirer vers l’arrière, ce qui m’arracha une grimace.

- Ne gesticule pas trop, sinon je ne me rends pas responsable du temps que mon opération prendra… Quoi qu’on n’a pas l’air bien pressé de ce que j’ose comprendre.

Ma tentative de détendre l’atmosphère ne fit malheureusement pas mouche, Torhyn s’agitant d’autant plus qu’il crachait du venin en maudissant Zerbin, sa carrière, ses efforts et tous ses pairs tant qu’à y être. Je n’allais pas m’amuser à défendre le petit bougre même si la sentence de mon cher amant fut extrême, je comprenais sa frustration et entendait dans ses mots des blessures du passé. Des blessures appartenant à Ryden, osais-je croire, bien cachées sous sa nouvelle identité, qui n’avaient jamais eu le temps de cicatriser comme la frêle pousse privée de soleil.

- Quel genre de père as-tu, ou as-tu eu, toi ?

La question me pris de court, mais lorsqu’il m’indiqua que je n’avais pas besoin de répondre, je secouais doucement la tête en souriant.

- Non non, ne t’inquiète pas, ce n’est pas un sujet tabou. Je pris tout de même un instant pour réfléchir. Autant les souvenirs de ma précieuse mère étaient vivides, autant ceux de mon père se voyaient plus flou et imprécis à force de distance. J'ai eu, enfin, j'ai un père… comment dire… à l’amour au moins aussi grand que son désarroi à mon égard. Il m’aimait d’une façon que je ne voulais pas être aimé. Il ne m’a jamais regardé que par ses yeux de mâle, espérant de moi que je grandisse dans ses pas de chasseurs plutôt que dans les jupes de ma mère. Mais il a toujours été très doux dans ses gestes, ce sont ses yeux qui plantaient des poignards de déception. J’avais gardé de l’amertume de ces regards que père portait sur moi. En fait, de son visage, ce n’étaient que ses iris dont j’avais le souvenir clair. Enfin, soupirais-je avec une pointe d’amusement doucereux, je peux comprendre que je n’étais pas tout à fait… ce à quoi il s’était attendu quand on m’a sorti du ventre de ma mère en lui promettant un garçon.

Non, il n’avait jamais compris. Ni mon lien fusionnel avec maman, ni mon refus d’appartenir à son sexe. Après mon départ, j’avais compris que j’avais pu être cruel avec lui en coupant les ponts, mais n’avais-je pas eu raison de m’isoler d’un mal sourd me faisant souffrir? Je m’étais évertuer à tenter de lui montrer ma voie et jamais il n’avait voulu entendre, jusqu’à se détruire lui-même par orgueil de ne pas vouloir céder à mes suppliques et celles de maman. Au final, il avait récolté les fruits qu’il avait semé.

Finalement, mon tendre ami décida d’écouter la voix de la tentation et accepta notre petite escapade. Un sourire franc se dessina sur mes lèvres, retrouvant ma bonne humeur comme lui retrouvait sa douceur.

- Hmm.. où aller? J’ai peut-être une idée. Klyffa m’avait parlé d’une source chaude un peu en périphérie du centre-ville. C’est un bel établissement où il y a plusieurs types de bains, qu’elle m’a dit. Une fois mon travail de coiffeur terminé, je passais devant mon amant l'air songeur. Si on ne pense pas de croiser de tes collègues du symposium, je pourrais me risquer à sortir en tant qu’Ubarhy pour faciliter notre entrée.

Les sources thermales, en voilà un luxe dont je rêvais depuis fort longtemps. La vapeur, l’eau pure et chaude sur ma peau et l’odeur subtile des huiles végétales. Quoi de mieux pour retrouver son bien-être après avoir été enfermé tantôt dans un donjon et tantôt dans un hôpital?

Torhyn Lokred
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Le récit d’Ubarhy sur les attentes de son père le concernant sonnaient comme une ritournelle à mes oreilles. J’eus un faible sourire, me contentant d’hocher la tête. Puis :

- Une source d’eau chaude ? murmurai-je doucement. Voila qui est intéressant. Je posais ma main sur la peau de mon visage : j’espère qu’ils ont une formule soin de beauté…avec tout ce qui s’est passé dernièrement, ma peau est toute chiffonnée. J’ai l’impression d’avoir pris dix ans…Je refuse de faire mon âge. J’avais fait déjà beaucoup d’effort pour paraitre plus jeune que je ne l’étais. Ce n’était pas pour me laisser aller un moindre coup de fatigue. Quant à mes collègues du symposium…on s’en fou, même si on en croiserait…le tue le premier qui tenterait une réflexion…Je réalisais subitement que j’étais un tantinet extrême dans mes propos. Je précisais doucement : enfin façon de parler… (ou pas)

Compte tenue de ce qu’il avait appris à mon égard ces derniers jours, je ne doutais pas qu’Ubarhy risquait de prendre au premier degré (à juste titre cela dit). Et après mon accès de colère du l’instant…je ne voulais pas qu’il ait peur de moi.

- C’est décidé ! Allons profiter de ces sources chaudes.

J’avais opté pour une tenue décontractée afin de ne pas attirer l’attention avec mon sempiternel costume trois pièces. J’avais l’air d’un touriste. Mes cheveux furent relevés en un chignon négligé, des lunettes de soleil, et boum ! Le parfait petit bourgeois qui va prendre bon temps avec son mec.

C’est donc avec une dégaine des plus décontractée, mains dans les poches – on ne changeait pas les bonnes habitudes – que nous nous présentâmes au lieu indiqué par l’amie Twi-Lek d’Ubarhy. Nous fûmes accueillis par une hôtesse mirialane fort jolie et très peu vêtue.

- Bienvenue au Vagues à l’âme messieurs. Que puis-je pour vous ?

- Bonjour, je me penchais légèrement pour lire son nom brodé en fil argenté sur son petit haut noir très échancré, Mécéline, quel prénom charmant ! Le vert monta à ses joues, la manière de rougir des gens de cette espèce. Je faisais jouer mes doigts sur le comptoir où je m’étais légèrement appuyé : nous aimerions profiter des bienfaits de votre remarquable établissement.

- Bien entendu monsieur ?

- Lokred, docteur Torhyn Lokred. Et voici mon compagnon.

- Hooo…vous êtes docteur ?

- En repos…mais oui.

- Oui, il faut se ménager avec un tel métier…Hé bien justement, les sources chaudes sont le meilleur moyen de se détendre.

- Formidable ! Faites-vous des soins de la peau ?

- Bien sur Docteur ! Je vous réserve un rendez-vous ?

- Quelle délicieuse enfant ! Faites donc ! Je me tournais vers Ubarhy : et toi ? Souhaites-tu en faire un aussi ?

- Nous avons des tarifs pour les couples.

- C’est parfait ! Nous aurons besoin de maillots de bains ainsi que serviettes, peignoirs, enfin la totale. Nous n’avions pas prévu de venir ici initialement. Mais vous nous avez été chaudement recommandé.

- Ho ! Mais il n’y a pas de souci Docteur. Tout est compris dans le forfait que vous avez choisi.

- A la bonne heure. Vous êtes une perle…

A nouveau elle « rougit » avant de nous tendre les cartes d’accès à nos vestiaires et les nécessaires de bain. Il ne nous fallut pas longtemps pour nous préparer et…enfin gagner les bassins chauds. J’entrais dans le premier avec bonheur…En un clin d’œil je me détendis au contact de l’eau…

- Sur Lorrd nous avions aussi des sources chaudes. C’est une planète glaciale…couverte de neige et de givre. Les sources chaudes étaient une bénédiction. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas profité à nouveau de leurs bienfaits…même si ce n’est pas sur ma planète. Nous avons un peu de temps avant les soins. Nous allons pouvoir en profiter. Finalement cette Klyffa aura servi à quelque chose…

Une petite pique gratuite à l’encontre de la Twi-Lek que nous avions sauvée et qui ne m’avait guère fait bonne impression. Je repérais un coin tranquille que j’indiquais à Ubarhy…personne dans le bassin, nous étions tranquille.

Dans une position lascive, je repensais aux propos de mon amant sur son père…sans crier gare, comme sortant d’une longue hésitation, je me risquais à lui rendre la pareille :

- Par rapport à ce que tu as dit tout à l’heure…Je n’ai pas été une grande source de fierté pour mon père non plus. C’était un brillant neurochirurgien reconnu. Quand je lui ai dit que je ne voulais pas devenir chirurgien, ni même faire médecine, il est entré dans une colère noire. Je me destinais à des études plus historiques. IL a fallu la douceur de ma mère pour l’apaiser. Grace à sa sagesse nous avions trouvé un compromis : j’étudierai les maladies du passé. Il a accepté de me laisser faire mes études sur Coruscant. Je soupirais et un petit sourire amusé se dessina sur mes lèvres fines : tu sais le plus drôle ? Malgré mes « tares » comme ils les appelaient, je sais qu’il m’aimait…au moins autant que moi je l’aimais. Quand j’ai compris que je devais faire médecine, il était trop tard. Il est mort avant la fin de mes études...

Bien entendu je ne précisais pas comment il était mort…qui avait mis fin à ses jours…Mon action était légitime à mes yeux, je l’avais fait par amour…Mais pour la majorité des gens de cette galaxie, le parricide était un crime terrible…Et je songeais qu’Ubarhy, tout ouvert d’esprit qu’il pouvait être, n’était pas prêt à entendre cela.







Ubarhy Naash
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Dès l’instant où j’eu mentionné mon idée de sortie, je vis les yeux de mon tendre ami s’illuminer d’envie. Heureux d’avoir visé juste, un sourire amusé à son commentaire sur sa peau ‘’toute chiffonnée’’, je ne pu m’empêcher de répliquer.

- Pour le moment je serai ton remède rajeunissant sur pattes! On dit que la jeunesse se distribue entre les couples ayant un écart d’âge. Je pris une seconde pour me rapprocher et inspecter les traits, certes fatigués mais ô combien délicats, de mon amant. Et il y a des indices, mais personnellement je ne te donnerais pas un âge vénérable. Suite à ma très profonde et très sérieuse analyse de ton minois, je te donnerai hmmm… six ans! Six ans de plus que moi.

Un baiser taquin sur sa joue plus tard, mon compagnon reprit une mine plus sérieuse en considérant ma proposition de sortir en tant qu’Ubarhy. Sa réaction ferme et tout protecteur qu’il était élargi mon sourire. Tuerait-il pour des mots qui m’auraient blessé ou tuerait-il pour son honneur bafoué? Réflexion inutile qui tourna une seconde dans ma tête, ramenant à la vie le spectre d’Obélias, avant que je ne l’en chasse en ne tenant, au final, pas trop à savoir la réponse.

**

Nous étions arrivés aux sources en parfaits citadins, perdus dans la masse, seuls mes montrals nous faisant un peu dénoter du décor. Lui avait opté pour une tenue décontractée de sortie, moi pour mes sempiternels vêtements amples en abandonnant à l’hôtel mes prothèses. Cela faisait bien longtemps que je m’étais ainsi promené sans apparats ni maquillage. Enfin, à l’exception de mon baume à lèvre blanc duquel je ne me séparais jamais, la petite touche d’Atropa me donnant le courage de sortir ainsi. Parce que je n’étais pas tout à fait à mon aise en ce moment, gardant un œil sur les gens passant dans la rue en priant pour ne reconnaitre personne. Malgré les bons mots de Torhyn, je ne souhaitais vraiment, mais alors vraiment pas croiser l’un de ses charmants collègues du symposium. Autant lui se foutait de leurs jugements, autant je vivais plutôt mal avec l’idée des commérages. Néanmoins, à ma grande joie, le trajet fut sans encombre et plutôt court.

Comme à son habitude, mon compagnon prit les devants et commanda avec toute sa courtoisie et politesse nos entrées auprès de la demoiselle à l’accueil. Il avait le tour pour faire rougir ces dames, un jeu qui m’amusait aussi et qui me détendit du coup de stress que j’avais vécu entre notre chambre et les bains. Lorsqu’il me demanda si je voulais profiter ses soins du visage offerts, la réponse tomba comme une évidence.

- Je t’accompagnerai avec plaisir, répondis-je en souriant doucement.

Je me rendis alors compte que je m’étais quelque peu éclipsé derrière mon galant ami, me faisant discret, en sécurité dans son ombre. De quoi changer assez radicalement de mes performances sur scènes et de mon entregent en tant que Naasha, mais voilà, la timidité m’avait gagné comme je sortais de mes habitudes.

Nous avions finalement gagné les vestiaires pour enfiler les maillots qu’on nous avait fourni: Un espèce de short bleu poudre ne seyant pas du tout le teint de ma peau ni ma morphologie svelte. J’écourtais donc au minimum le temps passé à l’air libre dans ce vêtement alourdissant un peu plus ma gêne, gagnant les bains aussi vite que le panneau ‘’ne pas courir’’ me le permettait. M’engouffrant dans l’eau jusqu’au menton, je pu finalement savourer le picotement agréable de ma peau se réchauffant et les volutes de vapeur emplissant agréablement mes poumons.

Il n’y avait personne, que nous dans ce cocon de chaleur, la douce voix de Torhyn finissant de m’apaiser. Il me parlait de sa planète, me parlait de lui, le banal de la conversation m’était d’autant plus gratifiant que peut-être pour une rare fois je ne le sentais ni méfiant, ni calculateur. Mon amant me parlait comme à… un amant justement, une complicité que je lui rendait avec plaisir. Je ne relevais même pas la pique à l’encontre de Klyffa, la fille déjà bien loin de mon cœur depuis notre dernière altercation.

- Lorrd est bien différent de Shili. Je crois qu’au mieux j’ai déjà croisé du givre, mais m’imaginer la neige couvrant le paysage comme les herbes couvrent les prairies, ce doit être magnifique. Je me rapprochai de mon compagnon et sorti légèrement de l’eau pour m’accouder au rebord du bassin, torse contre la pierre tiède. Le problème avec la neige c’est qu’elle ne vient pas sans le froid… et j’ai froid très très vite. Je m’imaginais un instant sur sa planète de glace et un frisson me parcourut l’échine juste à y penser. Sur Shili aussi il y a des sources thermales, mais de toutes celles que j’ai visité, aucune ne sentait aussi bon qu’ici! Il ne doit pas y avoir de souffre dans les environs, l'odeur ne me manque pas.

Un petit silence s’installa après mes mots. Intrigué, je me retournais vers mon cher docteur qui semblait en grande réflexion. La suite me surprit d’autant plus qu’il reprit sur le ton de la confidence, me parlant d’un père qu’il avait aussi eu en déception. Je comprenais bien ce qu’il me rapportait, ses maux rejoignant les miens, mais lui n’allait pas avoir la chance du pardon.

- Je suis désolé pour ton père… et pour ton peuple entier. Mon épaule alla toucher la sienne. J’espère que tu n’as pas trop de regrets par rapport à des attentes que tu n’as pas pu combler. Souvent c’est la peur qui engendre les plus grandes émotions, ton père devait avoir peur pour toi. Chez nous on dit que les âmes retournent au Shili’neh grriva comme il les a fait naître. Si tu prêtes attention, peut-être sentiras-tu une chaleur spéciale dans les caresses du vent un de ces jours et… tu sauras.

J’offris un sourire compatissant à mon tendre compagnon avant de reprendre, sur un ton tout aussi doux.

- Je suis heureux que tu me confie un peu de ton histoire. Je ne pensais pas que deux êtres aussi différents que nous pouvaient finalement avoir été modelés sur des principes similaires. Puis, le plus naturellement du monde, je m’éloignais gracieusement du bord du bassin pour venir à la rencontre du bel homme m’accompagnant. Comme il était assis, je passais mes jambes de part et d’autre de ses cuisses et le pris délicatement dans mes bras. J’apportais sa tête contre mon torse, passant mon nez dans ses cheveux que j’avais soigneusement brossés. Je comprends ce que tu as vécu. Moi aussi mon père m’aimait, sinon il ne se serait pas autant évertué à tenter de me changer… mais sache que la personne que tu es devenu est aussi digne d’amour que celle que tu as sacrifié. Je fermais les yeux un instant, humant son parfum avant de doucement soupirer. Je ne suis pas encore prêt à tout entendre, de ce que tu as pu faire et ce que tu compte faire dans le futur. Prends ces mots comme la naïve expression de celui qui veut encore croire en la beauté du monde.


Torhyn Lokred
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- Oui…Lorrd est magnifique. Certes, il y fait froid, mais c’est une question d’habitude. Et nous autres Lorrdiens avons l’habitude des conditions extrêmes…Un peuple habitué à s’adapter. J'ignore tout de ton monde. En dehors de ce que j'ai pu y lire vaguement...Ou des rares personnes s'y étant rendu avec lesquelles j'ai pu deviser.

Je soupirais, savourant l’instant de béatitude dans lequel je me trouvais. Cette eau chaude, et une bonne compagnie. Les propos de mon doux ami cette croyance du peuple de Shili me firent un drôle d’effet. Un cours instant je me figeais…Qu’est-ce que mon père aurait pensé de moi ? Il n’aurait surement pas apprécié que je poursuive mes travers, mais surtout que je bafoue l’éthique.

- Il est bien mieux où il se trouve. Il ne voit pas ce que Lorrd est devenue. Ce que la Galaxie est devenue…Ce que moi je deviens. C’est mieux pour lui.

J’avais mis fin à ses jours pour tout ceci justement. Pour éviter qu’il ne vive comme un légume, sans aucune garantie d’amélioration. Pour qu’il ne s’en veuille pas d’être devenu un poids pour notre famille, et ainsi lui épargner la honte. Mais aussi pour moi…pour que je ne sois plus ce fils caché dans l’ombre de son père. J’avais commis ce meurtre pour me libérer du carcan que sa seule présence m’imposait depuis ma plus tendre enfance. J’avais eu soif de liberté et j’avais saisi cette opportunité.

Ubarhy s’était rapproché de moi, pour ne pas dire très rapproché. Quelques secondes après je m’étais retrouvé dans ses bras. Ma tête reposant contre son torse, son visage dans mes longs cheveux sombres. J’écoutais battre son cœur et je sentais le soulèvement de sa cage thoracique à chacune de ses respirations. Comme une douce berceuse. Selon lui, j’avais le droit d’être aimé…Etait-ce seulement vrai ? Il ne voulait pas savoir…savoir ce que j’avais fait. Quel mal on prétendait que j’avais commis. Alors n’était-ce pas une illusion ? Je souris tristement…

- Le Bien…le Mal…c’est une question de point de vue non ? Qui peut affirmer qu’une chose est vraiment bonne ou mauvaise ? Ceux qui commettent ce que la morale réprime, ne sont-ils pas mués par de bonnes intentions ? C’est un questionnement qui a déjà fait couler bien de l’encre et usé bien des matières grises. C’est peine perdue. Je soupirais…celui ou celle qui m’aimera s’il existe – devra accepter ce que je suis, ce que je fus, et ce que je serai. Il ou elle devra accepter ce que j’ai fait…et ce que je suis prêt à faire pour survivre et poursuivre ma quête. Sans quoi, cet amour ne sera qu'un fantasme...ou pire une imposture.

Au creux de mon esprit, caché au milieu des ténèbres, une silhouette apparue…se révélant à mon esprit. Il était beau, auréolé de lumière…A mes yeux il était le seul à comprendre mes actes et à ne pas me juger pour ce que j’avais fait. Lui n’aurait pas peur de moi…Mais je savais que cela ne serait pas possible. C’était moi qui ne le méritais pas. Je ne lui arrivais pas à la cheville. Absalom Thorn était trop parfait en tout point pour que je puisse un jour songer qu’il ait des vues sur moi. Nous étions amis…c’était tout.

Ubarhy quant à lui jouait les naïfs…mais je le sentais plus proche de moi comme il l’avait si bien dit un peu avant. Mais pas assez. Il manquait quelque chose…l’expérience sans doute ? Possible…mais ira-t-il dans la même direction que moi ? Quand bien même...il y avait trop de paramètres. Ma conclusion tomba comme un couperet:

- Je ne suis pas quelqu'un que l'on aime...


Notre conversation fut interrompue quelques instants plus tard:

- Docteur Lokred ? fit une voix au dessus de nous. Je levais les yeux vers deux superbes spécimens mâles Raltiiriens.

- Ouiii ? Fis-je en me redressant

- C’est pour les soins.

- Ho…déjà ?

- Vous pourrez revenir vous baigner ensuite. Je m’appelle Zeph je vais m’occuper de vous et voici Emir pour votre ami. Si vous voulez bien nous suivre ?

J’eus un regarde gourmand à l’intention d’Ubarhy dans le genre « non mais tu as vu ces mecs ! ». Car oui, ils n’étaient pas repoussant à regarder…du-tout ! Bien au contraire. Je soupçonnais l’établissement de jouer sur le physique parfait de ses employés. Nous les suivîmes en direction d’une salle à l’ambiance tamisée. Une musique relaxante sortait de nulle part tandis que des effluves d’encens chatouillaient nos narines. Un rideau était tendu au centre de la pièce, permettant à deux personnes de suivre les soins dans la même pièce. Deux tables comme celles qu’on trouvait en auscultation, mais bien plus confortables, étaient disposées de part et d’autre de la tenture. Zeph me fit signe de m’installer tandis qu’Emir guida Ubarhy. Alors que je prenais place j’en profitais pour détailler un peu plus le bel apollon à ma disposition.

Zeph était grand et avait le teint légèrement hâlé. Ses yeux vert sublimes avaient dû faire chavirer bien des cœurs. Ses cheveux étaient coupés cours et une barbe de quelques jours venait sculpter son visage harmonieux. Il aurait du sang Hapien cela ne m’étonnerait même pas ! Emir était d’un tout autre genre.






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Ubarhy Naash
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Embaumé de son parfum comme de l’accueil de ses bras, les mots de mon amant se muèrent en une triste mélopée dont il connaissait les paroles par cœur. Le dilemme de la moralité et de la vertu je le connaissais bien aussi, d’une manière plus couarde, plus hypocrite que ce que je savais de mon tendre ami. Là où lui avait agis frontalement pour arriver à ses fins, quitte à devenir criminel et assassin, moi je n’avais pas de sang sur les mains, que des cris horrifiés pour bercer mes convictions. Non, je n’avais pas tué Obélias, pas de ma main, mais n’avais-je pas assenti à son trépas là où j’aurais pu raisonner son bourreau?

Quant à ses questions d’amour, je fermais les yeux en le serrant un peu plus contre moi. Un fantasme, une imposture une illusion… Qu’est-ce qui avait bien pu le laisser si amer de relations? En y réfléchissant, la première réponse me parut comme une évidence; mener une double vie impliquait de tromper l’œil comme l’âme, de quoi en décourager plus d’un. Mais il n’y a pas que les mensonges qu’on conte aux autres, il y a ceux que l’on fini par croire nous-même. Et n’étais-je pas moi-même un mirage? Quoi de mieux pour le conforter dans ses pensées que les mots soigneusement choisis d’une escorte? De celui qui a à gagner de le tenir ainsi tout prêt, peu importe la sincérité de sa tendresse.

- Je ne suis pas quelqu'un que l'on aime...

En imposteur, j’avais été délicatement remis à ma juste place. Sans rancune, non, j’étais habitué à ça. Malgré le pincement de mes lèvres, je posais un doux baiser sur les cheveux de mon cher compagnon. De ces même lèvres, j’extirpa un peu de ma calme puissance sommeillant sur le blanc artifice de leurs galbes. J’aurais tant aimé répondre, chimère luttant pour vivre dans la parole, mais il était temps de quitter ses bras.

- Enchanté Zeph, fis-je en relevant les yeux, tout sourire, vers le jeune homme ayant tué le mirage. Je rendis son signe de tête à Emir en libérant Torhyn de mon joug, m’écartant de lui l’air de rien.

J’avais attrapé le regard désireux de mon cher ami, bien-sûr, mais de réponse je n’eus qu’un sourire convenu à offrir. Pendant notre marche, j’eus tout le loisir de détailler le dos du garçon qui allait s’occuper de moi. Il devait être un peu plus grand que moi avec des muscles taillés au couteau, comme de ces statues de pierre imitant les héros du passé. Cheveux en cascade dorée, yeux noisette et barbe saillante, il devait inspirer nombre de filles et de garçon le charisme du mâle alpha. Je reluquais le svelte Zeph du coin de l’œil alors qu’il disparaissait derrière un damné rideau avec mon amant. J’avais joué de mal chance aujourd’hui…

- Allongez-vous sur le dos, la table a été adaptée à vos lekku. Oh, il n’était pas vilain Emyr, mais je me méfiais de ces grands muscles dans un travail aussi délicat qu’était la manipulation de mon précieux visage. Je suis spécialiste des appendices des proche humains, il vous faut simplement vous détendre à présent.

- Ne me faites pas trop de belles promesses, je suis exigeant, soufflais-je en souriant sur l’air de la rigolade.

Non je n’aimais pas vraiment les corps ainsi coupés, mais je devais admettre que sa voix profonde et suave avait de quoi charmer. Alors je fermais les yeux, projetant sur lui une image plus désirable, laissant mon corps à disposition sans en perdre mon attentive veille. À l’affut de tout mouvement mal placé, de toute pression un peu trop forte, je n’abdiquais que partiellement au soin qui m’était donné. J’entendais chuchoter de l’autre côté du voile, de petits murmures alors que j’opérais le silence.

Cependant, une fois la séance terminée, je du admettre qu’Emyr tout musclé qu’il était n’avait pas manqué de douceur. Il avait été bon professionnel et je le remerciais sincèrement lorsqu’il nous raccompagna aux bains

- Oh, avez-vous profité des bains privés? S’enquérit Emyr.

- Des bains privés?

- Ah oui c’est Mécéline qui est à l’accueil, pardonnez la elle est nouvelle, renchérit Zeph, mais oui dans le forfait couple vous avez droit à un bain privé. Comme il s’agit de zones isolées, les maillots sont optionnels.

- Intéressant, soufflais-je avec un air taquin malgré le cruel manque de sous-entendu de nos hôtes. Et bien soit, nous n’allons pas nous priver d’un si beau privilège.

C’est sans broncher que nos deux garçons nous menèrent devant une porte de bois clair donnant sur une petite salle au centre de laquelle trônait un bassin circulaire fumant. Des serviettes blanches nous y attendais déjà, accrochées sur la branche d’un petit arbre tordu aux feuilles depuis longtemps perdues.

- Si vous avez besoin de quoi que ce soit, ajouta Emyr, n’hésitez pas à nous le faire savoir. Bonne détente messieurs.

Ils avaient pris congé sur ces mots, refermant la porte de bois en retournant le petit panneau ‘’Occupé’’ pour qu’aucune âme ne nous importune.

- Bon et bien je ne sais pas pour toi, mais je ne regrette pas de pouvoir enlever ce… sublime maillot bleu poudre. J’envoyais un coup d’œil amusé à mon tendre ami. Même si je n’étais que mirage, je n’allais pas gâcher notre proximité si ardemment obtenue par orgueil. Je m’étais fait à l’idée de toute façon.

D’un naturel très peu pudique, je notais tout de même que c’était la première fois ou Torhyn allait me voir vraiment entièrement nu. Était-ce une pointe de stress qui montait? Étant médecin, j’avais sans doute peur qu’il me trouve une maladie sur la peau, m’étais-je dit. Puis finalement, n’admettant pas la gêne d’un mouvement que j’avais fait des dizaines de fois, j’enlevais le fameux maillot bleu poudre qui tomba disgracieusement sur le sol de céramique.

Pourtant, je savais ce que j’avais peur de craindre. Un détail auquel je n’accordais même pas une pensée pour un coup d’un soir, mais qui devenait plus intime maintenant que je connaissais mon interlocuteur. Puisque du pilier et des roches, ne restait plus que le pilier. Les roches avaient laissé leur place à un vide, à la cicatrice en canyon d’un pâle rose sur l’ocre de ma peau. Je ne la trouvais pas bien jolie, ma cicatrice toute zébrée ayant été recollée par le feu, mais au moins elle avait la décence d’une certaine discrétion que l’absence d’un organe n’avait pas l’élégance d’avoir.

- Je ne savais pas comment te l’amener autrement, murmurais-je nerveusement. Ne t’inquiète pas, je ne suis pas malade, ce n’est rien de grave, tu sais, c’est ce genre de cicatrice qui est un peu gênante à avoir mais qui, au fond, ne change pas grand-chose comme il n’y a pas de raison de vraiment s’en faire et que tu sais que le carrelage est magnifique tout en losanges avec les jolies petites fleurs…

Torhyn Lokred
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- Vous êtes donc médecin ? me demanda Zeph en commençant les soins.

- En effet…pourriez-vous insister sur des effets anti-âges, liftant, et illuminant je vous prie. Je veux effacer ces traits fatigués...

- Bien entendu, le client est roi. Nous pourrons même vous proposer une gamme de masques et crèmes pour poursuivre les soins chez vous.

- Hmmm...

Je profitais donc de cette séance de bien-être avec un grand plaisir. Les mains de Zeph semblaient magiques tant il était à la fois doux et ferme quand il était nécessaire. Je ressortais de là avec l’impression d’avoir une peau tout neuve, surtout sur mon visage. Nos deux masseurs nous expliquèrent que nous pouvions profiter de bains privés ! Bien entendu que nous étions intéressés.

Une fois seuls, mon amant ne mis pas longtemps avant de se dévêtir entièrement. J’avais noté une sorte d’hésitation, mais au final il avait été plus rapide que moi à ôter nos maillots de bain pour nous mettre à l’aise. Des corps nus j’en avait tellement vu dans l’exercice de la médecine. Il n’avait pas à avoir peur de le faire devant moi…Mais je compris la raison quand il se tourna vers moi. Je ne posais aucun jugement dans mon regard, plutôt une forme d’interrogation médicale…Que voulez-vous je suis curieux de nature. Que lui était-il arrivé pour qu’il ait de tels stigmates ? Il était trognon en m’avouant ne pas avoir su comment amener la chose. Quoi de plus parlant que de faire voir ? Il semblait quelque peu gêné toutefois. Avec un doux sourire, je m’étais approché de lui et posé une main chaleureuse sur son épaule :

- A chacun ses cicatrices. Elles sont les témoignages de nos souffrances, et nous transforment en quelque sorte.

La mienne traçait une ligne droite au niveau de ma cage thoracique. Une coupure nette faite au scalpel, et parfaitement bien suturée qui avait merveilleusement bien cicatrisé. Je m’écartais quelque peu et entrais dans l’eau du bassin privé. Elle était chaude, comme je l’aimais. Je fis signe à Ubarhy de me rejoindre.

C’était la première fois que je pouvais le regarder totalement nu. Il était charmant. Avec sa peau couleur ocre, ses traits fins pour ceux d’un mâle de son espèce, tout son corps était dessiné avec élégance. Si nous avions tant de points communs, nous étions d’apparence si différente. Ma peau, qui fut autrefois hâlée, était d’une blancheur presque morbide. Sans doute à cause de ce mal qui circulait dans mes veines. Mes cheveux et ma barbe noirs, aux mèches grisonnantes par endroit, tranchaient violemment avec mon derme d’albâtre. Ma musculature que j’avais autrefois tant entretenue avait fondue. J’étais sec et grand, mais bien moins imposant qu’avant. Certes j’avais, à nouveau, la possibilité de reprendre mes exercices quotidiens, mais nous étions loin du compte. Ce corps qu’était le mien n’était plus que le vestige de qu’il fut autrefois…respirant de vie et de santé.

Je ne pouvais m’empêcher, en dehors du fait d’apprécier ce que je voyais, analyser comme tout bon médecin qui se respectait. Et sans y prendre garde j’inspectais chaque partie de son corps…Des Togrutas, j’en avais étudié un certain nombre durant mes recherches. Je les connaissais relativement bien. Finalement, je secouais la tête et lui demanda :

- Pardonne ma curiosité, qu’est-il arrivé ? Tu n’es pas obligé de répondre…ou du moins tu peux dévier de la vérité…même si je risque de m’en rendre compte.

J'eus un clin d'oeil entendu. Il mentait bien, et était habile, mais le sujet pouvait le mettre mal à l’aise, ou du moins lui faire baisser sa garde. Sans oublier qu’en tant que médecin j’étais apte à savoir si ce qu’il me racontait était réalisable médicalement parlant ou non… Mais qu’importait…je voulais juste entendre le son de sa voix. Dos contre les mosaïques du bassin, j’avais posé mes bras sur les rebords et je me laissais aller, savourant la tranquillité, la caresse de l’eau…et le timbre de voix de mon ami.






Ubarhy Naash
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Alors que je m’enfonçais inexorablement dans ma gêne, le rouge se devinant sur mes joues, la main salvatrice de mon cher ami vint me cueillir en planche de salut. Je lui rendis son sourire en passant une main distraite sur mon lekku. Je savais que je n’avais rien à craindre de Torhyn, le jugement n’ayant jamais été caractéristique chez lui, mais sa bienveillance m’était toujours aussi rassurante. Fidèle à ses habitudes de bon gentleman, sa douce réponse sur ses propres cicatrices me fit baisser les yeux vers son torse balafré.

- Oui tu as raison, et je n’en ai pas vraiment honte de ma cicatrice, juste que ton œil avisé saura reconnaître un travail… disons approximatif de la chirurgie.

Je savais que j’allais piquer la curiosité de mon interlocuteur à ces mots, bien que ce n'en était pas l’objectif. Avant de poursuivre, j’allais rejoindre mon amant dans l’eau chaude, m’y callant jusqu’aux épaules pour chasser les frissons qui m’avaient gagné à ainsi pavaner nu comme un vers. Le regard de mon compagnon ne me gênait pas le moindre du monde, autant la révélation m’avait provoqué un certain malaise, autant de me faire analyser une fois les cartes sur la table ne me dérangeait nullement. Comme lui avait sans doute vu des dizaines de corps en tant que médecin, moi j’avais eu des dizaines d’yeux m’ayant admiré, reluqué, découpé. Son regard à lui avait cela d’agréable qu’il respectait son objet, justement, soucieux de ne pas me plonger dans un trop grand inconfort. D’ailleurs, j’en profitais aussi pour satisfaire ma propre curiosité et détailler un peu plus ce que son sempiternel costume trois pièces tentait de cacher.

- Pardonne ma curiosité, qu’est-il arrivé ? Tu n’es pas obligé de répondre…ou du moins tu peux dévier de la vérité…même si je risque de m’en rendre compte.

- Tu es tout pardonné. J’eus un petit sourire à son commentaire sur ma possibilité de mentir qu’il avait repris de nos premières conversations. Je n’ai rien à cacher sur cette histoire, par contre elle n’est pas très joyeuse. Torhyn avait hoché la tête, m’enjoignant à continuer si tel était mon désir. Comme il semblait disposé à écouter mon récit sans que le temps ne nous gêne, j’allais le lui raconter fidèlement. Ça remonte à un peu plus de quinze ans, quand j’étais encore un jeune enfant sur Shili…

~

- Non je veux pas!

La voix criarde d’un jeune Ubarhy en colère venait de tonner dans la hutte. Je devais avoir six ans, vêtu d’une jolie robe à la couleur du sable les bras croisés, défiant un père à bout de patience.

- Ubarhy, pour la dernière fois, ce n’est pas un choix que je te donne. Tu vas enfiler une tenue convenable et tu vas me suivre. Papa doit aller chasser et j'ai promis à ta mère-

- Non non non! Je veux pas me changer, je veux pas aller avec toi et je veux pas chasser! L’exaspération avait succombé à la frustration dans les yeux de mon père, mais je ne bougeais pas d’un poil. Aujourd’hui c’est le grand rituel. Maman a tout préparé pour moi, c’est ma journée et je veux pas partir.

- Le grand rituel… avait maugréé mon père d’un ton que je n’avais pas su déchiffrer avant de reprendre après une profonde inspiration. Écoute, que tu le veuilles ou non on doit aller à la chasse et plus tu t’obstine à me retenir ici, plus on va rentrer tard. Si tu ne veux pas le manquer, ton grand rituel, il va falloir que tu t’habille.

D’un œil suspicieux, j’avais pesé le pour et le contre dans ma tête de gamin avant de céder de mauvaise grâce à l’injonction de mon paternel. Oui, le rituel était tout ce à quoi je pouvais penser depuis plusieurs semaines, de la seconde ou j’étais éveillé à mon dernier écrin de conscience avant de m’endormir. Et c’était peu dire, j’en rêvais même la nuit. Cette cérémonie m’obsédait. Maman avait tout organisé, elle m’avait promis que j’allais enfin renaître sous mon vrai jour, que mes prières allaient être exaucées.

J’étais petit, mais je savais déjà que quelque chose ne tournait pas rond chez moi. Plus je grandissais, plus je ressemblais à mon père ce qui m’horrifiait, tant l’éloignement de l’image de ma mère m’étais insupportable. Au moins, maman savait. Elle était ma confidente, mon alliée dans un monde qui ne voulait pas me comprendre. Après s’être aperçu que ma seule inclusion dans le très fermé cercle des danseurs spirituels n’était pas assez pour chasser mon mal de vivre, elle avait pris les choses en main pour que mon vœu le plus cher devienne réalité; que je cesse de vivre dans un corps étranger et que jamais plus on ne me voit comme un mâle.

Or, comme je l’appréhendais, la chasse fut longue, interminable, et il faisait nuit noire quand nous avions regagné le village. Quand nous étions entrés dans notre hutte, personne ne nous y attendait. Maman n’était pas là et mon excitation chancela comme la bougie dans la tempête.

- Tu vois, avais soupiré mon père, on est arrivé trop tard, maman est partie. Si tu avais obéi plus vite, tu aurais pu aller à ton rituel…

Il s’était tourné vers moi, comme surpris de ne pas se faire interrompre à grands cris. Je m’étais emmuré de silence, les sourcils froncés, indomptable.

- Tu l’as fait exprès… Tu savais, et tu as fais exprès de me faire rentrer tard. Je n’avais pas levé les yeux vers lui, ma colère ne pouvant mieux s’exprimer que par mon calme sourd, comme le subtil tremblement de terre provoquant le tsunami. Je ne te parlerai plus jamais.

C’est à ces mots que son regard sembla s’adoucir, mais peut-être par fierté, il avait sèchement répliqué.

- Ces histoires de rituel ce n’est pas bon pour toi. Tu es très bien comme tu es et à force de côtoyer des sorcières ta mère va te rentrer des idées folles dans le crâne.

- Si elles sont des sorcières, je vais les supplier qu’elles te jettent un mauvais sort.

J’avais murmuré ces mots, tout bas, presque comme une prière. Lorsque les yeux de mon père s’écarquillèrent avant de se sévir, je le pris de vitesse et sorti en courant de la hutte. Je fuyais, fuyais sa voix, fuyais sa colère, fuyais sa peur, fuyais ses espoirs. Je ne m’arrêtais que quand ma poitrine me força à reprendre mon souffle, les poumons en feu, la sueur perlant sur mon front. Je ne l’entendais plus, ni sa voix, ni sa colère, ni sa peur, ni son désespoir. J’étais seul avec la lune et la montagne, m’écroulant à son pied, déchiré par ce rituel que j’avais tant attendu qui m’avait été enlevé.

Il devait être minuit quand je me fis réveiller par la voix bercée de lumière de ma mère. Confus, j’avais ouvert les yeux pour découvrir son visage irradiant de beauté penché au-dessus de moi.

- Maman! Tu m’as trouvé… Le rituel! On peut encore faire le rituel?

- Il est déjà commencé mon cher enfant.

Elle était toute souriante et délicate, mon cœur se remplit d’une joie immense à ces mots. Père n’allait pas pouvoir m’enlever ce privilège! Jamais! Alors que j’allais lui sauter dans les bras, je remarquais que je n’étais pas libre de mes mouvements. En fait, j’avais poings et pieds liés par des cordelettes sur lesquelles avaient été tissées des pierres faisant miroiter la lueur d’un feu et de la lune. Une inquiétude monta dans mes yeux alors que je tentais de me tortiller pour me défaire de ces liens, mais maman posa une main rassurante sur mon épaule.

- Ne bouge pas bel enfant, ce sera bientôt fini. J’ai tout préparé pour ce rituel de renaissance, tu verras mon amour, je suis là pour te protéger.

- Mais pourquoi je suis attaché maman?

- Ça fait parti du rituel mon chéri. Ça fait si longtemps que tu m’en parle, que tu attends ce moment… Je m’assure simplement que tout soit parfait.

- Naasha, les bougies et le Marukki Strri sont prêts. Je tournais la tête vers la femme qui accompagnait maman, remarquant sa présence. C'était Lulwha, une des ainée du visage, une prêtresse toute ridée qui prenait soin de moi quand mes parents quittaient la maison. Elle était habillée tout de blanc, le tissu traditionnel enveloppant son corps comme celui de ma mère. Cependant, là où maman était sereine, la vieille Lulwha semblait… inquiète. Tu es certaine de ce que tu t’apprête à faire chère amie? Elle lança un regard vers moi, son unique œil vert effleurant les miens comme elle l’avait fait tant de fois. Ce n’est encore qu’un bambin…

- C’est précisément pour ça qu’il faut agir aujourd’hui, avait repris ma mère en allant chercher la bouillie de plantes qui avait bien mijoté sur le feu.

Le Marukki Strri, la caresse des ancêtres, j’allais pouvoir en boire? D’habitude c’était une boisson réservée aux prêtresses pour leur permettre de se connecter au Shili’neh grivva, je me sentais privilégié d’y avoir droit pour mon rituel. En toute confiance, j’avais cessé de m’agiter. Je regardais simplement ma mère de mes grands yeux innocents, buvant la boisson malgré son goût fort et amer lorsqu’elle porta la coupelle à mes lèvres alors que la doyenne faisait tourner bougies et encens autour de nous.

Et puis… tout devint flou. J’avais chaud, très chaud, je suais à grosse gouttes alors que mon corps s’engourdissait. Les voix se faisaient plus lointaines, mon esprit s’étouffait dans la brume qui s’était infiltrée dans ma tête, mais mes yeux, eux, restaient grands ouverts. Je ne sentais plus ni mes doigts ni mes pieds, mais j’avais au centre du corps comme une boule de feu qui allait me consumer, me brûlant le ventre. Je tentais d’avertir maman que quelque chose n’allait pas, mais ma bouche refusait de s’ouvrir.

Après, tout se passa à la fois très vite et à la fois à une infini lenteur. Lulwha coupa mes vêtements de chasse, me laissant nu sans que je ne puisse réagir, puis une grande ombre se pencha au-dessus de moi. J’étais tétanisé par la peur, ce qui se trouvait devant moi… un Akul. Grand, terrible, mais il avait un pelage immaculé au lieu de son habituelle teinte orangée. Je voyais ses grandes dents argentées, effilées, meurtrières, prêtes à me dévoré vivant. Mais ce n’est pas une dent qui se jeta sur moi, c’était une grande griffe d’argent, longue et pointue, une griffe chauffée à blanc.

- Non. Je ne veux plus. Maman j’ai peur… J’ai peur! Arrivais-je à articuler dans toute ma terreur, mais il n’y avait plus rien à faire.

La griffe, non, la lame s’enfonça dans ma peau au bas-ventre en une sensation horrible, comme si mon corps allait exploser, comme si la mort elle-même avait léché mon âme. À ce moment, aucun chant ni incantation n’avait pu étouffer mes cris, aucune bougie ni encens n’avaient pu cacher l’odeur affreuse de la chair mutilée.

~

- … et après je ne sais plus trop. J’ai dû tomber dans les pommes. Je n’ai pas marché pendant une semaine, mais maman a bien pris soin de moi. Père n’avait pas voulu me voir durant presque un mois, mais c’était mieux comme ça. Je relevais mes yeux clairs vers ceux de mon amant qui m’avait sagement écouté, un sourire flottant sur mes lèvres. Mais tu sais c’est moi qui ai demandé ce rituel. Et au final c’était un mal pour un bien. Évidemment je ne suis pas devenu une femme, mais j’ai cessé de grandir comme un homme. C’était ma décision, le processus n’était pas très joyeux, mais j’étais prêt à tous les sacrifices…

Torhyn Lokred
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J’avais écouté son récit avec toute la bienveillance possible. J’admirais le jeune homme pour ce qu’il était…Je respectais le fait qu’il soit attaché à son peuple, ainsi qu’à ses coutumes. Difficile de renier totalement d’où nous venons. Finalement je lâchais un petit soupire et je soufflais doucement :

- Mon pauvre ami…comme tu as dû souffrir. Je tâchais de cacher ma révulsion pour ce genre d’antiques us qui s’avéraient finalement être basées sur de vieilles superstitions. Combien mettaient leurs vies en danger pour ce genre de pratiques ancestrales ? En tant que médecin, je ne pouvais cautionner cela. Il est heureux que tu n’aies aucune séquelle autre que l’ablation en elle-même. Comme tu l’as dit, la cicatrice est loin d’être propre. Je ne suis pas chirurgien, mais je sais les maux qui peuvent se cacher dans la moindre plaie, la moindre petite entaille, même involontaire. Et l’infection, si elle n’est pas traitée, peut devenir mortelle…C’est donc une bonne chose que tu t’en sois sorti…Tu n’es pas devenu une femme, certes, mais tu es devenu autre chose. Tu es devenu toi. Et tu t’en sors très bien. Je ne pouvais lui avouer pleinement que c’était une bonne chose qu’il soit un homme. Car sans doute ne lui aurai-je pas accordé autant d’attention et d’affection. Les femmes…avaient tendance à vite me décevoir. Elles étaient perfides et viles. Vénales, elles ne reculaient devant rien pour parvenir à leurs fins, quitte à réduire en miette le cœur des autres. Le mien s’était brisé par le passé à cause d’une femme. Jamais je n’avais oublié, jamais je n’avais pardonné. Nouveau soupire…mes doigts pianotaient dans le vide sur la pierre du rebord du bassin contre lequel je me trouvais. Ubarhy m’avait déjà dit : vouloir être comme sa mère…Toi aussi tu as une relation particulière avec ta mère. Elle doit être du même acabit que la mienne. Prête à tout pour sauver son enfant. Il semblerait que le seul amour qui soit digne de confiance en ce bas monde soit celui de nos mères. Quoi qu’on fasse, on reste leurs tendres enfants…leurs petits anges…J’eux un faible sourire, et mes yeux semblaient se noyer dans ceux de mon doux ami…comme si je voulais m’y perdre. Je secouais la tête au bout d’un long moment, brisant le silence. J’eus un petit rire nerveux : ha…haha…voila que je fais dans le dramatique sentimental. Ce n’est pas mon genre.

J’avais eu un geste de la main pour qu’il s’approche de moi. Je me sentais soudainement pris d’une grande lassitude. Il avait répondu à mon appel et mes doigts étaient entrés en contact avec la peau de son bras. Avec douceur je l’avais attiré à mes côtés pour mieux lover ma tête sur son épaule. J’avais saisi tendrement une de ses mains pour jouer avec à la surface de l’eau. Tantôt nos doigts de mêlaient, tantôt je le libérais…j’observais ce petit instant jusqu’à finalement lui demander :

- Combien de temps souhaites-tu encore rester avec moi ? Le symposium se termine aujourd’hui…Nous devrions avoir sous peu les résultats finaux de tes analyses. J’avais emprisonné sa main dans la mienne. Alors…combien de temps penses-tu que nous pouvons profiter de cette situation et continuer à jouer ces rôles qui semblent nous avoir dépassés désormais ? Car soyons honnêtes…nous n’étions plus liés par ce contrat initial…Nous étions lié d’une autre manière. Liés par l’adversité…Mais aussi par les révélations qui avaient été nécessaires. Combien de temps Ubarhy allait-il tenir encore en ma compagnie ? Combien de temps allait-il lui falloir avant qu’il ne prenne la fuite ? Combien de temps avant qu’il ne cesse de se cacher derrière sa naïveté aveuglante et qu’il réalise le monstre que j’étais ? J’avais finalement délié mes doigts des siens…je me contentais de garder sa paume contre la mienne, à la surface de l’eau, avant de laisser nos mains dériver, l’une à l’opposé de l’autre. Je fermais les yeux, comme pour fuir cette réalité qui nous guettait. Nous avons tous des buts dans la vie. Nous poursuivons tous des quêtes…tu connais mon secret…peu de gens peuvent se targuer d’en savoir autant sur moi tout en restant en vie… Tu sais ce que je recherche. Alors…quel est ton but. Tu es resté évasif sur ce point. Après quoi cours-tu…Ubarhy ?





Ubarhy Naash
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J’avais noté une pointe de reproche quant au rituel, mais je m’attendais à ce qu’il trouve l’évènement assez barbare. Enfin, moi-même j’aurais opté pour quelque chose d’un peu plus doux si j’en avais eu la chance, or je ne pouvais me résoudre à en vouloir à celles qui n’avaient fait qu’exaucer mon souhait. Hochant la tête au point commun que mon amant avait mis à jour, notre grande dévotion envers nos mères, un nouveau sourire nostalgique étira mes lèvres. Puis, à son curieux petit instant de gêne, la nostalgie se mua en amusement.

- Tu as bien raison, je pense aussi que l’amour d’une mère est ce qu’il y a de plus pur. Lorsque mon tendre ami me fit signe de m’approcher, je répondis à son appel avec plaisir. Malgré l’eau chaude dans laquelle nous étions plongés, je me senti me réchauffer d’autant plus lorsqu’il posa sa tête contre mon épaule, ma main s’unissant à la sienne naturellement. Je fermais les yeux quelques secondes, le nez dans ses cheveux entre lune et nuit, savourant l’écrin de paix qui nous avait été octroyé avant de murmurer. Et ton sentimentalisme est légitime, ne te sent pas vulnérable de l’exprimer.

- Combien de temps souhaites-tu encore rester avec moi ?

C’est dans ces moments que le retour à la réalité est le plus brutal, même si les mots pour le rappeler sont d’une infini délicatesse. Je gardais les yeux fermés quelques instants, Torhyn faisant état de la fin tacite du contrat que nous avions établi malgré son importance plus symbolique que réelle à présent. Je pris une grande inspiration en réfléchissant à l’inévitable dilemme qui avait pourtant trouvé le moyen de s’occulter à mon esprit depuis notre rencontre. Bien sûr, nous avions vécu une histoire mouvementée, mais ce n’était pas dans mes habitudes d’être ainsi pris de court.

- Je ne sais pas, avais-je finalement soufflé alors que mon cher ami s’était délié de ma main à mon grand regret, est-ce à moi d’en décider?

Parce qu’à vrai dire nous n’avions effectivement plus de raison externe de rester ensemble, mais qu’en était-il de notre volonté propre? Pas que je comptais le suivre au bout du monde pour le restant de mes jours, j’avais encore une quête à poursuivre… D’ailleurs, parlant de quête, mon amant emboîta le pas de ma réflexion. Il m’avait demandé, en quelque sorte, pourquoi je courrais le monde. Étrange comme toutes les ficelles s’étaient tressées pour m’amener à ce sujet; mon identité, l’amour d’une mère et mon âme vagabonde.

- Mon but… tu vas rire, mais je ne sais pas encore tout à fait ce que c’est. En fait, ma mère m’a envoyé en mission. Je pris une seconde pour chercher mes mots, tentant de rendre mes prochaines explications aussi claires que possible malgré le flou dans lequel je baignais moi-même. Je suis à la recherche de quelque chose de très ancien lié au Shili’neh grriva qui a été volé à mon peuple il y a une trentaine d’années, l’œil de Corvala. Mais plus je le cherche et moins je le trouve. J’ai déjà retourné l’holonet de fond en comble, je n’ai rien découvert à son sujet. J’eus un petit sourire en pensant à l’abstrait de mon objectif. Donc en résumé je cours désespérément après un fantôme dont j’espère retrouver la trace avant de mourir. Je penchais légèrement la tête vers l’arrière à ces mots. Tu t’imagines si je mourrais avant d’atteindre mon but? Loin de ma tribu et de mes terres, seul, m’éteindre comme si je n’avais jamais existé en n’ayant accompli que ce que m’eut permis le trésor convoité entre mes cuisses. Cette phrase, je me la répétais presque tous les jours. Elle était source de ma plus grande angoisse, de disparaître sans que personne ne sache. M'imaginer que ma mère et ma sœur attendent mon retour année après année jusqu’à ce que leurs espoirs meurent à leur tour mais sans que jamais ils n’aient la délivrante certitude de mon échec m'effrayait plus que le trépas lui-même.

Torhyn Lokred
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-Est-ce à moi d’en décider ?

Qu’il était naïf…s’en était touchant. Un doux sourire avait illuminé mon visage devant cette candeur. Il continuait de se voiler la face. Je songeais qu’il avait fini par se prendre d’affection pour moi au titre que moi à son égard. Et à présent qu’il savait que je n’étais pas le bon et gentil docteur dont on puise rêver, il refusait de comprendre qu’il ne supporterait pas ce que je suis au fond de moi. Dans un souffle j’enfonçais un peu plus le couteau dans la plaie que j’avais déjà ouverte :

- J’ai bien peur que oui…

Je sous entendais par là que ce ne sera pas moi qui prendrai la fuite…Mais bien lui. Quand il ouvrira les yeux, il prendra ses jambes à son cou. Comme bien des autres l’ont fait avant lui. Mais en attendant, il s’agissait de profiter un peu encore de ce moment de bien-être.

- L’œil de Corvala ? Qu’est-ce que c’est ? Quelque chose de précieux j’imagine pour qu’on vous l’ait dérobé. Mais…je m’interroge, pourquoi est-ce toi qu’on envoie ? Pourquoi t’expose-t-on à un tel périple qui peut être tellement dangereux ? Toi qui es encore si jeune…Je ne remettais pas vraiment en doute ses capacités…quoi que…mais je trouvais cela quelque peu…étrange d’envoyer un enfant à la recherche d’un voleur. Je repensais alors aux us et coutumes dont nous avions précédemment parlé. A moins qu’il n’y ait autre chose ? Un rituel ou autre tradition à laquelle tu dois répondre ?

Car Ubarhy, tout dégourdi qu’il pouvait être, était loin d’avoir les compétences et les ressources nécessaires pour une telle quête. Il n’avait rien trouvé sur l’holonet, ce n’était pas une surprise.

- Ce qu’il faut se demander c’est pourquoi a-t-on volé cela…La raison du vol induit forcement la suite. Est-ce par appât du gain ? Fierté d’avoir accompli ce vol ? Ou par volonté de collectionner les pièces rares ?



**

Dans la clinique privée, un jeune interne avait hélé son supérieur :

- Docteur Zerbin ? Les résultats complémentaires sont arrivés.

- Ha ? Merci…envoyez-les sur mon datapad.

- C’est déjà fait.

Zerbin le remercia et s’enferma dans son bureau pour consulter tout cela au calme. Il commença par la jeune Naasha. Il paraissait satisfait de sa lecture et un sourire soulagé vint éclairer son visage fatigué. Ces derniers jours avaient été plus qu’éprouvants. Entre le symposium et le risque de contagion du jeune Togruta, sans oublier Torhyn…Ce fut justement le dossier de son collègue qu’il ouvrit pour lire les derniers relevés. Il soupira…comment un homme dans la fleur de l’âge pouvait-il être dans un tel état de délabrement ? Que lui était-il arrivé ? Ce n’était pas une maladie génétique. Il avait plus l’air d’un empoisonnement lent. Un détail lui sauta soudainement aux yeux. Ses poumons…ils étaient synthétiques ? Pourquoi ne pas avoir placé des poumons humains ?


**


Partager ce moment avec Ubarhy avait été très instructif pour moi. Il s’était finalement mis à nu – dans tous les sens du terme – se révélant jusque dans son intimité. Et enfin je savais ce qui l’avait poussé à quitter le giron familial. Voila qui était des plus intéressants.

Nous étions retournés à l’hôtel avec le sentiment d’être sur un petit nuage. Cela faisait souvent cette impression lorsqu’on sort d’un spa. Nous venions à peine d’arriver que mon comlink s’était manifesté.

- C’est Zerbin, il veut me parler. Je déposais un baiser sur le front du jeune Togruta : je ne serai pas long.

Zerbin m’avait donné rendez-vous à la clinique. J’avais pris mon sac à bandoulière, vérifiant qu’il ne manquait rien. Après un voyage en taxi j’avais fini par arriver à ma destination. C’était la fin de journée, une partie du personnel était déjà parti. Restaient ceux de garde.

- Vous vouliez me voir ?

- Oui Torhyn…j’ai reçu les résultats de votre compagne. Tout est parfait.

- Ce n’est pas une surprise. Je vous l’avais dit.

- J’ai…également fouillé un peu sur vous.

- Vraiment ? Une ombre était passée sur mon visage. A titre officiel ?

- Non…un détail avait retenu mon attention. Pourquoi des poumons synthétiques ? Même dans l’urgence, les organes humains sont assez répandus. Je croisais les bras, un petit sourire en coin, vous auriez dû recevoir des poumons par la suite, mais vous n’êtes même pas inscrit sur la liste des demandeurs d’organes. Vous avez donc quelque chose à cacher.

- J’avais du travail, ce n’est que partie remise avant que…

- Vous savez…je suis infectiologue…mais j’ai un double cursus…en génétique. Je fronçais les sourcils. J’ai pris sur moi de regarder plus en détail vos prélèvements…Vous n’êtes pas de Corellia comme vous le disiez….

- Voyons c’est ridicule je…

- Vous êtes…d’ailleurs. Et voyez-vous certaines pièces du puzzle que vous représentez. Vous savez tant de choses sur la Grippe Twi-lek. Vous saviez tant de choses sur la mutation Togruta…Vous connaissez le docteur Martins et vous vous êtes retrouvé chez Obélias Snively qui avait des admirations et des pratiques douteuses…J’aurai du comprendre plus tôt…C’est vous ce scientifique avec lequel Martins travaillait. Et votre maladie…c’est à cause du gaz n’est-ce pas ?

Je devais bien reconnaitre qu’il me bluffait. J’applaudis avec un grand sourire.

- Alors là…bravo Zerbin. J’aurai dû me douter qu’un esprit aussi brillant que le votre était en mesure d’avoir une telle capacité de déduction. Et moi j’ai été imprudent par affection pour cette Togruta. Soyez sûr qu’on ne m’y reprendra plus. Il m’observait avec étonnement. Quelle est la suite du programme ? demandais-je joyeusement.

- Vous…vous êtes si…si….

- Génial ? Bien entendu. Mais c’est tout le problème avec le génie. Il n’est pas toujours reconnu à sa juste valeur. Alors…vous ne m’avez pas répondu cher ami, quelle est la suite du programme ? Dois-je m’inquiéter ?

- Je vous retourne la question.

Je me levais, il eut un geste de recul.

- Allons, fis-je doucement, nous sommes entre personnes civilisées. Je ne vais pas vous frapper ou vous attaquer. Avez-vous parlé de tout ceci à quelqu’un ?

- Non…je voulais vous voir avant.

- Je vois. Vous êtes intelligeant…Vous attendez quelque chose de moi ?

- Vous avez l’oreille d’une des meilleures généticiennes de notre époque. Je suis sûr que nous pourrons trouver un terrain d’entente ?

- Evidemment…


**

J’étais revenu deux bonnes heures plus tard auprès d’Ubarhy. Un grand sourire sur les lèvres :

- Excellente nouvelle, la quarantaine est levée. Nous sommes libres comme l’air. Je levais devant lui un sac plastique : du coup je suis passé dans un restaurant prendre des plats à emporter, et de l’alcool. Je ne bois pas généralement mais bon. Certes on aurait pu y aller, mais…j’ai eu l’égoïsme de vouloir t’avoir encore un peu pour moi seul. J’ai pris de la viande de qualité qui devrait te plaire. Mais si tu préfères sortir, on peut.

Je rayonnais littéralement, comme soulagé.




Ubarhy Naash
Ubarhy Naash
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Alors Torhyn voulait que ce soit moi qui décide à quand nous séparer? Cruelle décision qu’il me laissait entre les mains. Pas que je n’étais pas capable de faire de choix, mais j’avais appris à bien vivre en suivant le désir de mes hôtes et, bien que mon tendre ami soit un hôte d’exception, on ne défaisait pas de vieilles habitudes si vite. Le contrat, obéir, se plier, ça avait quelque chose de réconfortant en soi. Être libre est terrifiant, comme de nager au milieu d’un océan de possibilités où chaque décision doit être assumée dans son entière responsabilité par un seul petit être ne se sentant pas compétent pour posséder autant de pouvoir. J’avais peur de bien des choses, s’en était une de plus; assumer des choix pris de mon seul chef. Cruelle, cruelle décision… Face mon visible tiraillement, mon amant ne profita pas de ma tourmente et me laissa le temps de mijoter sur le sujet en évoquant plutôt sa curiosité quant à mon but.

- Je n’en sais pas encore grand-chose de cet artefact, seulement des légendes et de vieux écrits que ma mère m’a transférés pour me guider. En effet, l’œil de Corvala n’était pas un objet de notoriété publique, loin de là. J’étais toujours aussi embêté en tentant de répondre aux questions de mon compagnon. Ce que je peux te dire c’est que c’est un objet fortement lié, voir nourri par l’énergie de la planète, le Shili’neh grriva, comme j’ai mentionné tout à l’heure. D’après moi c’est cette connexion à une énergie primaire qui est la cause principale du vol. Ma mère m’a dit que de garder cet artefact secret au plus grand nombre avait été une méthode pour le protéger, mais visiblement cette technique a ses limites. Elle est la seule à connaître l’existence de l'oeil de Corvala dans mon village, ma mère fait parti d’un conseil de Y’gritii, qu’on peut grossièrement traduire par shaman je pense, en charge de son maintien.

C’était bien compliqué à expliquer tout ça. Mais bon, Torhyn avait l’air de saisir les enjeux malgré le brouillard. Quant à sa question sur l’envoi d’une jeunesse sans compétence particulière pour telle quête, j’eus un petit sourire dépité.

- Et pourquoi c’est moi qui ai été envoyé, j’avoue que je n’en suis pas certain moi-même. Je n’ai pas tout à fait la fibre du héro, c’est une décision assez surprenante je te le concède. En fait je pense que c’est plutôt le hasard -ou la destinée appelle ça comme tu veux- qui m’a envoyé aux trousses de ce fantôme. Je suis le premier enfant de ma mère, elle m’a confié cette mission comme je suis la chair de sa chair, un prolongement de sa personne. Il y a aussi eu l'implication de visions et d'appels du Shili’neh grriva, mais je ne saurais pas comment t’expliquer les pouvoirs qui ont été mis en branle pour arriver à cette conclusion. J’haussais légèrement les épaules à ces mots, comme désolé que le destin ai fait tomber le sort d’une si périlleuse mission entre des mains aussi impertinentes que les miennes. Ce n’était pas un choix rationnel, si tu me demande mon avis, mais j’ai confiance en ce que ma mère a vu et je sais que je suis guidé par des forces qui me dépassent. Je ne dirais pas que je suis un élu, je n’en voulais pas de cette grande quête, mais on ne choisi pas toujours. Jamais je n’aurais quitté ma famille si ce n’avait été de cet appel du destin que je ne me sens franchement pas outillé à répondre.

Héro, élu, je n’avais pas tout à fait la gueule de l’emploi. Si ce n’avait été de l’inextricable besoin de maman, j’aurais volontiers laissé la gloire de cette mission capitale à une autre âme pour reprendre mon existence anonyme auprès des miens.

**

Malgré le sérieux de notre dernière conversation, nous retrouvâmes l’hôtel plus léger que nous y étions entrés par les bienfaits des eaux thermales et des massages. Nous étions aussi tous deux libres de quelques gros secrets, de quoi décomplexer un peu nos rapports. Et il fallait croire que nous avions le sort en bonne grâce, comme quelques minutes seulement après notre retour à notre chambre, Zerbin se manifesta pour convoquer mon amant à sa clinique. En sages élèves, ne restait qu’à prétendre ne jamais avoir quitté notre chambre pour éviter de se faire gronder par le docteur. Un jeu d’enfant.

- Bonne chance avec Zerbin, j’espère qu’il usera d’un peu plus de tact que dans vos derniers échanges…

**

Lorsque mon cher ami quitta la chambre, je sautais dans la douche, remis un peu de rouge à lèvre saupoudré d’Atropa sur ma lèvre inférieure et passa de longues minutes à finement maquiller mon visage. Je n’avais pas oublié les mots de mon compagnon avant notre départ pour le spa… Pour la suite du programme, surprends-moi, qu’il m’avait confié. Il n’allait pas être déçu!

J’étais assis sur le lit avec Ronchon sur les genoux quand Torhyn revint de son escapade. Il avait fallu beaucoup de temps avant que le rongeur méfiant n’accepte de se faire flatter. J’avais la dentition du prédateur, c’était bien normal, mais à force de patience j’avais réussi à convaincre le petit mammifère de mes intentions pacifiques. Enfin, de la patience et des biscuits secs qui avaient franchement aidé à la réussite de cette mission diplomatique. Je caressais avec toute ma délicatesse le pelage immaculé du petit rat qui sauta de son perchoir dès qu’il vit son maître revenir de son interminable périple, moi l'accueillant de mon plus charmant sourire.

- Excellente nouvelle, la quarantaine est levée. Nous sommes libres comme l’air. Je levais les mains au ciel en signe de victoire, cette bonne nouvelle me libérant d’un poids. Du coup je suis passé dans un restaurant prendre des plats à emporter, et de l’alcool. Je ne bois pas généralement mais bon. Certes on aurait pu y aller, mais…j’ai eu l’égoïsme de vouloir t’avoir encore un peu pour moi seul. J’ai pris de la viande de qualité qui devrait te plaire. Mais si tu préfères sortir, on peut.

Quelle adorable égoïsme.

- Non c’est parfait, on peut bien profiter de notre victoire à deux! Je reluquais en salivant le contenu du sac de courses de mon compagnon, une douce odeur me titillant les narines. Charmante attention que tu as eu, j’apprécie beaucoup le détour que tu as fait… et un petit verre ou deux ça ne fera pas grand mal.

Le sourire de mon amant était contagieux, sa bonne humeur me faisant presque hausser un sourcil d'ailleurs. Vu sa dernière altercation avec Zerbin, je ne pensais pas que d’aller le voir allait le rendre si heureux. Pourtant, je ne souhaitais pas casser son entrain avec trop de questions et pris sa main libre pour l’entrainer dans notre chambre.

J’avais eu le temps de me changer depuis son départ, enfilant une chemise de lin blanche et une longue jupe noire partant de mes côtes jusqu’à lécher mes chevilles nues. Je n’avais pas mis mes prothèses, abandonnant cet attribut féminin au profit d’un maquillage soulignant les contours délicats de mon visage. Mes yeux azurs halés d’un gris sombre révélaient la discrète élégance de mes cils épais. J’avais également dosé l’Atropa pour que mes pupilles ne soient que légèrement dilatées et n’inquiètent pas trop mon tendre docteur. Je jouais de mes traits androgynes comme le virtuose jouait de son piano.

- Assieds-toi maintenant, dis-je d’un ton enjoué en amenant mon amant à sa chaise, je prends le relais. J’avais récupéré le sac pour en placer le contenu sur la petite table qui était à notre disposition; Une bouteille de vin, une flasque de whisky, une troisième bouteille au contenu transparent dont la marque ne me disait rien et quelques plats au fumet délectable qu’il ne restait qu’à savourer. En quête des verres, je retournais la chambre de fond en comble pour finalement trouver des coupes cachées dans le coin d’une commode et nous servir la boisson désirée. Je levais finalement mon verre après m’être assis au côté de mon galant ami. À notre rétablissement!

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