Darth Hope
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L’Agonie des Krayt

A quoi bon s’en soucier si sa mère, la femme de sa vie, n’était plus de ce monde ?







La soupe avait comblé la faim grondant dans son ventre. Elle avait apprécié chacune des épices et des saveurs composant le plat traditionnel que l’on servait lors des hommages. Elle s’était souvenue avoir complimenté Ruth, ou Mercy, mais tout le reste n’était qu’un enchaînement flou, estompé par les effets d’un alcool insipide. Lloyd était parti. Il partait toujours, peu importe ce qu’elle faisait : s’énerver ou l’aimer ; il passait son temps à lui échapper comme une eau fuyante et elle se retrouvait asséchée. Elle finirait par s’y habituer, songeait-elle, l’esprit embué par une douce ivresse, de celle qui favorisait la résignation ou qui cultivait l’indignation.

Assise devant le grand feu, elle profitait de sa chaleur pulsante, sans se soucier des allées et venues autour d’elle. Personne ne faisait attention à Dana Shar. Elle était partie intégrante du décor et du clan. On avait vécu avec elle six semaines durant. On l’avait vu sourire, rire, s’énerver. Elle avait paru humaine, toute eachtrach qu’elle pouvait être. Soudain, une ombre la recouvrit et elle leva sa figure maquillée vers Lartokh accompagné de sa petite Tih.

- Ahem, fit-il en raclant sa gorge. Tih, elle voulait te donner quelque chose, mais elle osait pas faire ça toute seule.
- C’est vrai, Tih ?
- Oui ! C’était un cadeau pour tes bébés !

La jeune dévaronienne approcha de Dana et lui tendit une poupée faite de chiffons et de tissus colorés tressés les uns les autres, avec quelques coups d’aiguilles maladroits qui rafistolaient certaines parties entre elles. Au bras gauche de l’effigie, un anneau en fil de fer singeant un bracelet et Dana comprit que c’était elle, qu’on avait tenté de représenter ; comme en témoignaient ces cheveux noirs au sommet du crâne qui étaient des longs poils de bantha. Shar eut un sourire étrange, un mélange de joie et de tristesse. Enfin, la poupée était vêtue d’une robe rouge. Les doigts de la Sith se refermèrent sur le présent.

- Merci, c’est…très joli, dit-elle maladroitement.
- Tu pleures ? s’inquiéta Tih.
- Non, non…c’est les cendres de ce foutu feu, ça pique beaucoup trop les yeux.
- Faut se mettre plus loin alors ! suggéra Tih, du haut de sa grande sagesse d’enfant.
- Allez Tih, on embête pas plus Dana, faut que t’ailles finir ta soupe.

De nouveau seule, Dana caressa le doudou de ses pouces avant de le plaquer contre elle et de refreiner ses larmes insupportables qui inondaient ses yeux. Elle trouvait ça absurde. Une seule poupée. Elles auraient dû se la partager. C’était à la fois absurde et très douloureux. Depuis son accouchement, elle avait l’impression que ce n’était qu’une seule et même longue journée qui s’étirait à l’infini, infernale, cauchemardesque, entrecoupée de quelques pauses salvatrices : une étreinte dans une rivière, un baiser échangé avec un capitaine et puis, tout reprenait comme un cycle qu’il était impossible de briser et que le malheur alimentait. Et si elle survivait à cette longue, très longue journée de solitude, elle serait heureuse.






Zoraida était enfin apparue et tous les regards se tournaient vers sa silhouette matriarcale. Les oncles de Chechi en particuliers posaient sur elle une attention déférente alors qu’elle présidait leur table. Les mains toujours encombrées de la peluche à son image, Dana se rapprocha comme si elle avait été, elle aussi, appelée par Mamy Zora. A côté de cette dernière, Mercy tenait le bébé nouvellement né de Chechi dans ses bras fins. Mikh avait une mine sombre, des yeux toujours gonflés par des pleurs incessants et voir son propre enfant lui brûlait la rétine et le cœur. A quoi bon s’en soucier si sa mère, la femme de sa vie, n’était plus de ce monde ?

- Mes fils, déclara Zora vers Vaklu et consorts, J’ai pris une décision concernant l’enfant. Tout d’abord, nous l’appellerons Chanti, comme la mère de Chechi.

Il y eût des approbations silencieuses.

- Ensuite, elle vivra et sera élevée par Mercy dès qu’elle sera sevrée et ce, jusqu’à ce que Mikh trouve un jour une nouvelle épouse.

Le concerné quitta brutalement son siège et s’éclipsa d’un pas furieux vers les ténèbres de la plage, incapable d’en entendre plus. Une nouvelle épouse, alors qu’il enterrait à peine la sienne. Un jour. Un jour qui n’arrivera jamais. Dana poussa un soupir soulagé. Elle n’aurait qu’à nourrir encore un peu l’enfant et Mercy se chargerait courageusement du reste. Vaklu leva son verre en premier et les autres l’imitèrent, puis ils avalèrent d’une traite comme pour entériner la décision de la matriarche. Zoraida se rassit, entourée de ses fils et les discussions reprirent. La Sith en profita pour disparaître sur le sentier qui menait à l’orée de la forêt là où le sable du rivage nourrissait les racines des premiers arbres. Elle avait en tête l’emplacement de la tombe et souhaitait y déposer le présent de Tih pour qu’il accompagne ses jumelles.







Et elle croisa deux silhouettes à mi-chemin, dont l’une titubait un peu nécessitant que l’autre la soutienne. Puis, à la lueur des trois lunes que libéraient les nuages pluvieux, elle reconnut les cornes de Mumkin et les cheveux blonds de Lloyd. Elle accéléra le pas, incertaine.

- Lloyd ? Tout va bien ?
- Ouais, il a bu.
- Ok, je vais prendre le relais, déclara-t-elle en se rapprochant. Tu devrais y..retourner, Zoraïda a fait une déclaration concernant ta nièce. Elle va porter le prénom de ta maman, visiblement.

Le pilote déglutit péniblement et essuya ses yeux d’un revers de manche.

- Et Mikh a encore besoin de compagnie, j’pense qu’il a…
- Ca va, j’vais voir.
- Vous reveniez d’où comme ça ?

Mumkin lança un regard dépité vers le blond, les lèvres tremblotantes alors qu’il s’efforçait de conserver le silence à ce sujet.

- Je sais pas, fit-il avant de lâcher son patron. Bon ben, fais attention à lui.

Le dévaronien s’éloigna après un ultime regard appuyé vers Hope. Dans le dos Dana, les clameurs de la cérémonie résonnaient, comme un écho trop lointain et les lumières du feu et des fanaux vibraient dans le ciel nocturne. Elle porta ses prunelles lumineuses sur l’officier impérial.

- T’as encore défait ta chemise et tes mains sont sales, constata-t-elle. Si tu es fatigué, je peux te raccompagner à ta couchette.

Elle finit par lui tendre la petite poupée.

- C’est de la part de Tih, pour les jumelles, mais tu peux la garder, c’est…une poupée anti-cauchemars.

Comme la guirlande. Un gri-gri qui chassait tous les démons surgissant au creux de la nuit.








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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Elle a pas besoin d’entendre ces horreurs.





Le hapien prit la poupée et la regarda, hébété, comme s’il y avait quelque chose à comprendre qu’il ne saisissait pas. Puis ses yeux fouillèrent l’horizon autour de lui et accrochèrent un instant la silhouette de Mumkin qui disparaissait au loin.

- Mumkin aussi pense qu’j’suis un connard, gronda-t-il en titubant.

Il passa un bras autour des épaules de Dana. A demi pour l’étreindre, à demi pour pouvoir rester debout. Les effets de l’alcool s’abattaient subitement plus durement sur lui, à mesure qu’il réalisait qu’il fallait tout laisser tomber, au moins pour cette nuit. Ses traits s’étaient un bref instant déformés, trahissant la déception.

- Ils pensent tous qu’j’suis un connard, comme l’autre salope et sa bande de comédiens, là. Ils pensent que j’te fais du mal et qu’j’bois. Alors que j’bois pas !

Comme ils déambulaient doucement, comme un animal incertain à quatre jambes, le visage de Lloyd se peignit d’une moue contrite quand il trébucha, manquant de les emporter tous les deux.

- Bon ok, si, un p’tit peu. Mais sur Melantha j’bois pas, tu sais. Jamais. Pass’que le commandant est toujours en service. Comme l’Amiral Antra… L’Amiral Antraxara… Antraxèr… L’autre emplumé là. Ben comme il a dit.

Il haussa les épaules, puis son visage se tourna vers Dana, tandis que ses émeraudes à la dérive cherchaient un point d’ancrage, dans le désert de Ch’Hodos.

- T’sais qu’il a accepté ma d’mande de mentorat ? J’vais aller sur l’Egide normalement quelques semaines pour voir comment il travaille. Moi qui croyais avoir fait mauvaise impression. J’espère qu’il a pas dit oui juste à cause de Laduim. Moi j’le trouvais chouette, sans mauvais jeu d’mots. J’aim’rais bien que…

Il dériva un bref instant, sa main libre refermée sur la poupée, mais Dana l’aida à ne pas s’écrouler.

- Boah, il a sûrement dit oui juste pour ça, puis après il pens’ra que j’suis un connard, aussi.

Ils continuèrent à marcher un peu en silence. Les bruits du camp se rapprochaient peu à peu, et le feu était visible comme un phare au milieu de la nuit qui s’était mise à les envelopper. Le hapien s’arrêta pour regarder Dana. Une lueur de lucidité semblait être apparue dans ses yeux.

- J’ai dit à Mumkin que j’étais désolé. C’était pas terrible. Quand j’ai dit ça aussi, pour toi, pour nous. C’était nul aussi, en fait.

Il passa une main sur son visage, avant de l’enlacer.

- Vaut mieux qu’j’aille me coucher hein, je sais.

Il se retint de dire qu’il était désolé.









Lorsqu’ils parvinrent à leur roulotte, Dana et Lloyd s’immobilisèrent, tendus. Pendant que certains des convives continuaient à s’amuser sur la plage, Vaklu, Mumkin, Kinuux, Svan et Rilc se tenaient là devant leur petite caravane sombre, les bras croisés, fustigeant le hapien du regard. L’un d’entre eux avait allumé une torche pour les éclairer la flamme jetait des reflets inquiétants sur leurs visages suspicieux.

- Mumkin, raccompagne Dana à la fête. Elle a pas besoin d’entendre ces horreurs.

L’adrénaline fit battre en retraite les effets de l’alcool, et le hapien lâcha l’Inquisitrice, pris d’un mauvais pressentiment. Le pilote sortit du groupe et se planta devant Dana et Lloyd, toisant son patron d’un regard responsable, qui semblait dire : laisse-moi l’emmener, tu sais qu’j’ai raison. Le Sith se désolidarisa de Dana, la repoussant doucement vers Mumkin.

- Vas-y, souffla-t-il. Vas-y, c’est rien. On va juste discuter.

Les quatre hommes et Lloyd les regardèrent s’éloigner quelques instants, avant que Svan ne s’avançât doucement. Ses yeux s’étaient éclairés d’une lueur de triomphe. Mais les trois autres dévaroniens affichaient plutôt un air inquiet.

- Qu’est-ce que vous voulez, maintenant ?
- Lloyd. On m’a parlé de toi, et de tes petites manigances.
- Je manigance rien du tout.
- Mumkin m’a dit. Kashiina m’a dit. Et finalement, j’ai été voir Mamy Zora qui a été très déçue que tu aies pas abandonné ton projet même si tu savais que ça t’éjecterait du clan.

Le hapien blémit. Mais ses poings se fermèrent.

- J’suis prêt à me battre, contre vous tous, si c’est comme ça que vous voulez régler les choses.
- Non, non, non, Lloyd. Le Code fonctionne avec les membres du Clan, c’est-à-dire ceux qui le respectent. Et toi, tu l’as enfreint.
- Techniquement, pas encore. D’ailleurs, je vois pas de quoi tu m’accuses, dit subitement Lloyd avec une inspiration soudaine.
- Justement, Lloyd, intervint Kinuux, d’un ton plus posé que Svan. Avant de faire quoique ce soit, on veut connaître ta version. On peut accepter… Que tu aies certains défauts, mais ça ?
- Je vois pas de quoi vous parlez. Clairement vous avez décidé que j’étais coupable dans tous les cas, alors allez-y, faites ce que vous voulez, tabassez-moi ou bannissez-moi, pour ce que j’en ai à foutre.
- C’est bien simple, reprit Svan. Je vais te dire de quoi tu es accusé. Tu vas nous dire si c’est vrai. Et si c’est vrai, tu prends tes affaires, et tu t’en vas. Sur-le-champ.
- Certainement pas ! Sinon, j’emmène Dana.

Les dévaroniens sifflèrent de déception.

- Laisse-la en dehors de ça ! cracha Svan. Tu crois pas que tu lui as fait assez de mal comme ça ?!

Mais Kinuux posa une main sur l’épaule de l’humain pour le garder près de lui.

- Ecoute, Lloyd. Voilà ce qui va se passer. Tu dois dire au revoir à Dana. Si elle veut te suivre, elle te suivra. Mais les lois de notre camp nous interdisent de te garder plus longtemps avec nous si tu as ce… Ce projet en tête.

Vaklu acquiesça silencieusement derrière.

- Prends tes affaires et suis-nous, Lloyd.







Les trois dévaroniens conduisirent Lloyd sur la plage, à l’écart de la cérémonie, tandis que Svan était parti en courant récupérer Dana et Mumkin. Au loin, le hapien, dont les bras étaient chargés d’une boule de vêtements et d’autres objets maladroitement enfouis dans sa veste d’uniforme, apercevait Tih et Liam qui jouaient au bord de l’eau près du grand feu. D’autres silhouettes les entouraient, et on entendait des rires, inconscients de ce qui se tramait ici. Il n’avait le droit de dire au revoir à personne. Il essaya de se convaincre qu’il s’en fichait. Kashiina, Tih, Lartokh, Ruth, Liam auraient tôt faits de l’oublier. Ils s’affligeraient quelques instants de l’odieux être qu’il était en apprenant la nouvelle, puis ils le relègueraient au fond de leurs têtes, dans une boîte à mauvais souvenirs.

Mais quand Dana et Mumkin approchèrent, leurs regards atterrés dressés vers lui, il se sentit pitoyable. Pathétique. Ses bottes s’enfonçaient dans le sable et il lui semblait qu’il s’agissait d’un sable mouvant.

- Dana, Mumkin, merci de nous avoir rejoints. C’est avec beaucoup de peine, mais aussi beaucoup de déception que nous demandons à Lloyd de s’en aller pour le crime qu’il essaie de commettre, expliqua Vaklu.

Svan se tenait à ses côtés, les bras croisés. Il avait la décence de ne plus montrer son air triomphant, songea Lloyd. Kinuux et Rilc, eux, se tenaient prêt à intervenir si le hapien avait décidé d’être violent, mais ce dernier demeurait silencieux.

- Dana, on a accepté que tu lui dises au revoir, mais sache que son départ est obligatoire. Son projet nous attirerait une malédiction terrible.
- Alors c’est vrai ? demanda Mumkin directement à Lloyd, mais celui-ci resta silencieux.

Le pilote restait la bouche ouverte, dans une expression de dégoût.

- Lloyd, fit solennellement Vaklu. Nous te demandons de quitter définitivement le Clan de ton plein gré en reconnaissant ton crime pour que nous n'ayons pas à te bannir. Tu es accusé d'avoir essayé de voler le sang, et de déterrer une tombe. Tout cela dans le but abject…



















- … de ramener des morts à la vie.



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L’Agonie des Krayt

Il n’y avait qu’une trajectoire directe vers la mort, sans arrêt salvateur.







- J’étais au courant.

C’était faux. Elle était atterrée par la nouvelle, comme eux tous. Elle se doutait de quelle tombe il s’agissait maintenant qu’elle se souvenait avoir intercepté Lloyd et Mumkin sur le retour du chemin menant à la sépulture, plus la chemise défaite, les mains et les ongles salies de terre. Dana assemblait le puzzle morbide et l’image qui se constituait ne faisait qu’étirer encore cette journée infernale.

Cependant, un autre sentiment avait pris le dessus sur le dégoût ou la colère. Ils étaient une équipe. Elle, lui, contre le reste du monde. Le discours ivre du hapien sur la laborieuse route les menant au camp avait fini de la convaincre.

- Parce que c’est moi qui lui ai demandé de faire ça.

Les visages se déformèrent de stupeur et d’incrédulité. Avant que Lloyd n’eut l’idée de prononcer des mots idiots, elle enchaîna d’un ton ferme, malgré la fatigue qui saisissait brusquement son minois affligé.

- Je voulais revoir mes bébés. Je suis une sorcière. Les morts, je les réanime. Demandez à ce qui reste des Krayt, à Jyxo. J’ai ramené leurs morts à la vie. J’ai fait ça. Lloyd a fait que...accéder à ma demande, dans l’espoir de me rendre heureuse. Arrêtez. Juste. Arrêtez de le persécuter d’accord ? Je vais partir avec lui.
- Quoi ? Dana, attends c’est pas possible, intervint Svan, les yeux écarquillés.
- Je défendrai toujours Lloyd, insista-t-elle, l’expression figée dans une détermination sombre. C’est le père de mes filles, d’accord ? Si Chechi pouvait revenir là ce soir, qui d’entre vous dirait non hein ? Une petite fille ici a besoin de sa mère. Et une mère là (et elle se désigna d’un geste désespéré) a besoin de ses petites filles, ok ?
- C’est interdit.
- Et bien tant pis ! S’exclama-t-elle. Poussez-vous maintenant, je vais récupérer mes affaires.

Vaklu hésita, mais libéra finalement le passage pour permettre à Dana de disparaître dans la roulotte laissant un silence sordide s’installer après que la porte eût claqué. Elle profita d’être enfin à l’abri des regards pour glisser au sol, adossée contre la porte, couronnée de cet affreux rideau rose suspendu au hublot. Ce ne serait pas trois semaines de repos. Qu’avait-elle bêtement cru ? Qu’elle pourrait vivre trois semaines de sursis. Qu’elle pourrait se reposer ? Il n’y avait aucun repos pour les âmes seules et maudites, aucun sursis. Il n’y avait qu’une trajectoire directe vers la mort, sans arrêt salvateur. Elle rassembla sa raison, en recolla les morceaux épars pour se redresser.

La première chose qu’elle fit fût de de décrocher la photographie aimantée au petit frigidaire. Elle admira plusieurs secondes le cliché et se détourna. Elle débrancha son datapad du socle de l’holoprojecteur et réunît ses maigres possessions dans son caisson où elle aperçut quelques affaires pour bébés, que les femmes du clan avaient récoltées pour elle, juste avant la naissance. Des vêtements de seconde main pour tout petit bébé, quelques jouets, deux biberons d’occasion. Elle prit une profonde inspiration et masqua cette vision avec ses propres habits. Dont le grand t shirt noir qu’un capitaine lui avait prêté. Darth Runà avait peut être raison. Dana s’était sans doute menti à elle-même en s’imaginant une mère, une compagne alors qu’elle n’était qu’une étendue aride sur laquelle rien ne survivait. Rien n’avait les racines assez solides pour y grandir, pas même les offrandes répétées de Lloyd Hope. Et elle avait beau être en colère, rien ne changerait cette fatalité. Personne ne voudrait d’une mère Inquisitrice ou travailleuse au Lagon Noir, personne ne voudrait d’une tueuse d’enfants pour compagne. Personne ne voudrait de Dana Shar pour famille., à part Damaya. Mais Damaya était morte également. Tout était fini.

Elle referma le caisson et le souleva non sans jeter un dernier regard à l’intérieur de la roulotte désormais vide.

A l’extérieur les mêmes regards l’accueillirent, un peu consternés. Elle les affronta un à un, le port altier, l’allure digne d’une Sith et sa voix s’éleva de nouveau pour s’adresser à la fratrie des Serpents.

- Et il m’a pas achetée. Qu’on soit bien clair. Il me frappe pas non plus. Je suis pas une femme de ménage, je suis une Inquisitrice Sith. Une impériale. Une eachtrach.
- Qui t’a appris ce mot ? s’indigna Svan, tout blême. Non ! T’es pas une étrangère et...si tu pars, qu’est-ce que devient Chanti ?
- C’est vous qui avez décidé de l’affamer en nous bannissant. Débrouillez-vous avec du lait de bantha, ça fera l’affaire. Et c’était pas abject (dit-elle froidement vers Vaklu.) C’était juste la volonté d’un père de voir ses filles. Vous savez pas, oh vous savez pas ce que je serai capable de faire pour tenir mes petites filles dans les bras. Lloyd, je lui ai pas annoncé pour ma grossesse. Comment voulez-vous qu’il assume un truc dont il n’était même pas au courant !
- C’est vrai…osa confirmer Mumkin d’une voix petite et sombre. Elle lui avait pas dit.
- Quand je me suis réfugiée ici, il était pas au courant non plus. Pas parce que je le fuyais, mais parce que j’étais conne de penser que je pouvais m’en sortir sans lui. Et j’ai pas réussi sans lui, ça se voit non ? C’est lui qui me protège tout le temps. Vraiment, c’est moi qui devrais partir, c’est moi qui lui ai demandé de faire ça, de transgresser les règles. Voilà. C’est clair ? C’est moi la connasse dans l’histoire.

Elle n’ajouta rien de plus et engagea un pas calme vers le chemin menant à l’entrée du camp où traînait les motospeeders, mais Svan s’ébroua soudainement.

- Dana, non ! Tu peux pas faire ça. Tu peux pas partir.
- Votre décision est prise, dit-elle en s’arrêtant, les bras encombrés de son bagage.
- Nan, nan, on va..y’a sûrement un moyen de réparer ça. De…

Il chercha le regard de Vaklu qui observait la scène avec une grimace mitigée. Svan déglutit et revint à Shar, désespéré.

- Moi aussi, je pars, annonça une voix masculine.

Et tous les visages se tournèrent vers Mikh qui venait de sortir de l’ombre après avoir assisté à ce désastre familial.

- J’voulais faire revenir Chechi aussi, alors j’suis banni. Je comprends, Lloyd et Dana. Je sais exactement. Et j’aurais tout donné aussi.
- Quoi ? tonna Vaklu, complètement dépassé. Non ! Attendez, c’est du délire là. Vous déconnez, tous. Vous déconnez avec les règles du clan, vous..vous souciez même pas de ceux qui restent, c’est ça l’important. Mikh, retourne chez toi, on va s’occuper de toi. Quant à vous deux, reprit-il vers le couple de Sith. Faut que Mamy Zora décide clairement qui a transgressé ou pas.
- Pas la peine, articula Dana. Merci pour votre hospitalité, pour la nourriture, les couvertures chaudes, pour avoir pris soin de moi et de mes bébés. On est quitte, maintenant.

Elle dévia ses prunelles vers la plage, au loin. Elle aurait voulu adresser ses remerciements aux personnes qui le méritaient vraiment : Mercy, Ruth, Kashiina et tant d’autres.









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Lloyd Hope
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Dans cette folie, Dana s’était accrochée à lui comme elle l’était maintenant à son dos, pour il ne savait quelle raison.





Le hapien était resté interdit. Il avait suivi Dana des yeux, hébété. Il s’était attendu à ce qu’elle aussi l’insulte à demi-mot, à ce qu’elle aussi soit en colère, trouve son idée abjecte. Mais non, elle s’était mise à le défendre et il se sentit minuscule lorsqu’elle réapparut après avoir récupéré ses affaires dans la roulotte. Svan roulait des yeux scandalisés dans ses orbites, invectivait Lloyd du regard qui ne savait que répondre.

Et quelques instants plus tard, ils se dirigeaient tous les deux, en silence, vers la motospeeder tandis que les autres les regardaient partir, ahuris.










Ils fondirent dans la nuit, en silence. Le hapien sentait le vent devant lui battre son visage, presser sa veste contre son torse. Et derrière, il sentait l’étreinte de Dana accrochée, ses bras passés autour de sa taille. Plus il s’éloignait du camp, de ce lieu maudit où Dana avait éclaté en mille morceaux, plus il lui semblait que la température redescendait en son for intérieur. Que bientôt, il serait froid comme le marbre, à juger le type impulsif, sans réflexion, qu’il avait été depuis quelques jours.
La motospeeder grimpa le flanc d’une colline, que les trois lunes de Jabiim éclairaient faiblement, et le hapien ralentit l’allure en manœuvrant le véhicule, de façon à ce qu’ils s’immobilisent en travers de la route. Ils n’avaient quitté le camp des serpents que depuis un quart d’heure à peine, et au sommet de son promontoire, ils en devinaient les lumières qui se reflétaient au bord du lac. Lloyd contempla quelques instants ce paysage, ce village fait de bric et de broc qui avait poussé au milieu de nulle part, qui avait donné naissance à un pauvre dévaronien paumé, qui était devenu son pilote, qui l’avait ramené ici en compagnie d’une Inquisitrice. Il lui semblait que toute sa vie n’était qu’un château de cartes. Une série de coups de chance et de malchance. Et dans cette folie, Dana s’était accrochée à lui comme elle l’était maintenant à son dos, pour il ne savait quelle raison.
Le moteur de la motospeeder tournait toujours, et le phare jetait un faisceau lumineux dans les fougères qui se pliaient à chaque coup de vent.

- Merci, dit-il d’une voix rauque. Merci de m’avoir défendu.

Il lâcha les commandes du véhicule, pour attraper les mains de Dana disposées autour de lui.

- Est-ce que c’est que tu veux vraiment ? Partir loin de…

VVVZIIONG, VZIIIONG, VZZIIOOOONG !


Le hapien avait sursauté, serré les bras de Dana contre lui dans cette surprise soudaine. Trois motospeeders venaient de passer à côté d’eux à une allure folle. L’instant suivant, quatre autres motospeeders les frôlèrent encore, et cette fois-ci ils entendirent des drôles de cris rauques. Des silhouettes, en binômes, montaient les véhicules qui disparurent presque aussitôt dans la nuit, aussi vite qu’elles avaient surgi. Mais leurs phares traçaient un sillon lumineux en descendant la colline… droit vers le camp des Serpents.

Le silence enveloppa de nouveau les deux Sith, jusqu’à ce que Lloyd soudain lâchât un souffle de consternation.

- Les dragons, s’exclama-t-il. Dana, ce sont les dragons ! Ils vont… ils viennent se venger !

Le temps parut se suspendre un bref instant, et Lloyd pensa à Mumkin. Un pauvre pilote qui allait peut-être mourir parce qu’il avait croisé la route de Lloyd Hope et Dana Shar.
Le hapien activa brusquement les gaz de la motospeeder. Ils dérapèrent, envoyant des gerbes de sable autour d’eux en tournoyant, et brusquement le véhicule fondit de nouveau dans la nuit, en direction du camp des Serpents.








Au camp, on entendait déjà des cris, des tirs de blasters en tous sens. Une roulotte avait pris feu et éclairait la nuit comme une torche gigantesque tandis que les quelques dragons encore vivants, à l’exception de Jyxo qui n’était pas du groupe, avaient rassemblé les habitants sur la plage, près du grand feu qui crépitait encore. Les serpents se regroupèrent, pelotonnés, derrière quelques hommes qui avaient sorti leurs couteaux ; les seules armes qu’ils avaient toujours sur eux : Vaklu, Svan, Kalon, Rilc, Kinuux, Goshgosh et quelques autres. Mais leurs pauvres lames ne valaient rien face aux blasters et au fusil verpine pointés sur eux. Une dévaronienne au regard de braise sauta de sa motospeeder pour mieux les voir, tous, leur faire face.

- VOUS ETES DES TRAITRES ! hurla-t-elle, et Mamy Zora déjà se frayait un chemin pour aller au-devant des négociations.
- Vika ! Qu’est-ce que c’est que cette folie ?! Nous sommes des clans alliés, nous…
- ALLIES ?! LA MOITIE DE NOTRE CLAN EST MORT ! DECIME !
- C’était une erreur, c’était…

Mais Zoraïda ne put terminer sa phrase : la crosse du fusil verpine venait de s’écraser sur son masque en le brisant et la vieille dévaronienne s’effondra avec un gémissement de douleur. Aussitôt les serpents se regroupèrent autour d’elle, menaçant Vika de leurs couteaux mais Dùnx avait rejoint sa sœur et les mettait en joue.

- Vika a raison ! Nous vous avons épié. Les meurtriers sont revenus à votre camp, vous êtes leurs alliés, vous soutenez le carnage qu’ils ont commis chez nous !
- Non, cracha Svan. Nous les avons bannis ce soir même, ils ne reviendront pas, ils n’auraient jamais dû…
- C’est trop tard, Svan. Nos frères sont déjà morts par votre faute. Et rien de ce que vous pourrez dire ne les fera revenir. Notre clan s’éteindrait maintenant, si nous ne faisons rien. Nous n’avons plus d’avenir… Sauf si vous nous donnez le vôtre.
- Qu’est-ce que ça veut dire ?
- Vos enfants. Tous. Vous nous laissez les prendre. Et nous ne reviendrons plus jamais, nous partirons sans blesser personne.
- Quoi ?!
- JAMAIS ! cracha Mercy en sortant du groupe. Plutôt mourir que de laisser Dan entre vos mains de sauvages !
- Te tuer ne sera pas un problème, pétasse.

Il y eut soudain une cohue, des insultes fusèrent en tout sens et Dùnx tira en l’air pour rappeler tout le monde à l’ordre.

- Vous nous avez très bien entendus : soit nous prenons les enfants de force et vous mourez en essayant de nous en empêcher, soit vous les laissez partir avec nous et nous vous laissons la vie sauve.

Un silence étreignit la plage, illuminé seulement par le feu et les phares des motospeeders qui se reflétaient à la surface du lac. Et puis soudain, sur un signe de Vika, les dragons descendirent de leurs véhicules comme une nuée pour se jeter sur les enfants qu’ils apercevaient. Mercy se débattit follement pour empêcher que l’on prît Dan et Chanti, Lartokh et Svan se mirent à se battre en hurlant pendant que Kashiina et Ruth essayaient d’emmener Tih et Liam un peu plus loin, mais furent aussitôt interceptés par d’autres dragons qui abattirent sur elles la crosse de leur blaster avant de s’emparer des enfants. Il y eut des tirs, des cris. Lartokh s’effondra avec un cri de rage et de douleur quand un blaster lui grilla le genou. Et ses appels désespérés, rauques, se répercutaient dans la nuit : Tih, Tih, Tih.

La petite fille et Liam furent ceinturés et deux dragons s’emparèrent d’eux comme de vulgaires sacs. Ils grimpèrent sur une motospeeder et celle-ci démarra en trombe, les réacteurs illuminant d’un bleu sordide le sable autour d’eux, et le petit groupe s’enfuit.












Sur quelques mètres seulement : un sabre laser rouge sur une motospeeder arrivant en contre sens apparut devant eux et ils ne furent pas assez rapides pour l’éviter : celle-ci trancha la pointe de leur véhicule et la motospeeder ralentit et s’échoua pauvrement dans le sable, renversant son pauvre fardeau sur la plage avec des grognements. Mais déjà Lloyd accélérait pour rejoindre le grand feu, où l’on se battait encore. Derrière lui, nulle trace de Dana : il l’avait déposée à l’entrée du camp, pour pouvoir prendre l’ennemi en tenaille si nécessaire – ou qu’elle n’intervînt pas, si c’était possible, mais il ne se faisait pas d’illusion.

Il sauta au bas de sa motospeeder avant même que celle-ci soit tout à fait arrêtée et il attrapa le premier dragon qui lui tomba sous la main dans la mêlée : Dùnx. Il lui passa sa lame rouge et brûlante sous la gorge.

- STOP !

Les regards se tournèrent vers lui, les cris cessèrent.

- Stop ou celui-là est mort aussi.
- C’est lui ! cria Vika, les yeux plein d’une fureur insoutenable. Tu ne nous as pas assez tué, l’impérial ?! Tu vas me prendre mon frère aussi ? Si tu fais ça je te jure que…
- Lâchez les enfants, trancha le hapien d’une voix forte.

Les dévaroniens obéirent, malgré les cris de Vika.

- NON ! NON N’EN FAITES RIEN ! GARDEZ LES CE SONT NOS OTAGES !

Mais chacun tenait plus à la vie de Dùnx qu’à la capture de ces enfants. Vika tourna sur elle-même, soudain hystérique.

- BANDE DE LÂCHES ! VOUS LAISSER MENACER COMME CA PAR CELUI-LA MEME QUI…

Elle s’interrompit pour hurler un cri de rage.

- TRES BIEN ! EN CE CAS JE VAIS M’EN CHARGER MOI-MEME !

Vika remonta son fusil verpine sur son épaule et d’un geste rapide, visa le hapien et son frère, comptant bien qu’à cette distance, certes la balle traverserait son frère… mais aussi le torse de cet enfoiré d’impérial.









Le coup partit en même temps que Lloyd sentit une force soudaine le percuter de côté. Dùnx et Lloyd s’effondrèrent avec une troisième masse, leurs oreilles emplies de la détonation du fusil verpine. Le hapien sentit la morsure du sable contre son corps tandis que son arme s’échappait de sa main et que le corps de Dùnx amortissait une partie de sa chute.

Mais un cri de douleur retentit brusquement à ses oreilles, d’une voix qu’il connaissait bien.








Quand il parvint à retrouver ses esprits l’instant suivant, il put se retourner pour faire face, par terre, à l’autre dévaronien qui avait pris le tir à sa place, et dont l’épaule sanguinolente le faisait se tordre de douleur, gémir de souffrance tandis que l’une de ses cornes plantées dans le sable frémissait comme il frissonnait de souffrance.









- Mumkin !

Lloyd resta tétanisé, et ses mains pressèrent la blessure dans un réflexe incontrôlé – tout ce sang, il ne fallait pas qu’il s’en allât, et qu’allait-il faire sans pilote ?

Derrière lui, quelqu’un avait déjà ramassé le sabre laser et le leva au-dessus du hapien affolé, prêt à l’abattre en travers de sa gorge.



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L’Agonie des Krayt

L’averse s’abattait sur le rivage, comme si le ciel avait retenu son souffle le temps d’une rixe banal, entre deux clans rivaux.







Des crocs puissants déchiquetèrent la lumière et s’abattirent sur le bras qui tenait la lame pourpre. Son porteur illégitime hurla sa douleur sous les yeux ahuris de Dùnx et Vika. Un nexu venait de surgir et ses paires d’yeux flamboyantes brillaient comme un avertissement.

- Couché Luis.


La voix de Dana avait résonné sur ce bout de plage, surplombant les bruits de luttes et de souffrance. Sa silhouette émergeait des ombres que le feu ne réussissait pas à atteindre. Elle était aussi féline que la créature qu’elle contrôlait et entre ses lèvres charnues, une cigarra s’embrasait. Sa main caressa la Force et le sabre-laser se logea entre ses doigts. Luis aplatit son ventre contre le sable, continuant de mastiquer le bras qu’il avait arraché à un être trop téméraire. Le brave nexu avait patiemment attendu son heure, durant des semaines, écumant la jungle proche du campement, heureux de revenir à l’état sauvage, mais mélancolique de la présence de sa maîtresse. Une maîtresse à laquelle il avait répondu, dès qu’elle avait lancé l’appel de la Force à ses sens aiguisés.

- C’est impossible ! Dùnx t’a tué, enragea Vika.

Et le concerné ne réagissait pas, tétanisé par la terreur de cette vision revenant d’entre les morts. Il serrait son talisman et balbutiait des mots protecteurs à voix basse, les dents serrées.

- Je vais m’occuper de toi une bonne fois pour toute, connasse, déclara la dévaronienne en braquant son fusil Verpine sur l’Inquisitrice et le nexu se mit à éructer des grognements menaçants. Mais Dana ne bougeait pas. Une Shar ne fuyait pas. Jamais. Au contraire, elle soutenait la vision du visage déformé par la haine qui lui faisait face. D’un geste hystérique, Vika pressa la détente et le projectile fusa dans un bruit strident, fendant l’air comme une lame coupait du papier. Mais la Force et le Coté Obscur s’étaient déjà manifestés chez la Sith et érigèrent une protection qui dévia la trajectoire du tir. Ce dernier avait ricoché sur un bouclier fait de noirceur, de peine, de colère, du sang de ses propres filles et elle avait senti la Force répondre à cette passion. Assez pour ne plus amortir le choc, comme sur Khar Delba, mais pour le bloquer.

Vika écarquilla les yeux et ses prunelles vrillèrent dans un océan blanc.

- Prenez les enfants, et rentrez dans vos roulottes, dit-elle vers les Serpents. Ils n’ont pas besoin de voir la suite.

On hésita à obéir parce que les Krayts les tenaient toujours en joue, alors elle étendit la Force jusqu’à saisir les armes pour les jeter aux pieds des victimes qui se dépêchèrent de s’en emparer. Ruth et Kalon s’étaient soudainement précipités pour aider Zoraïda à se redresser, Mercy, Goshgosh et Svan s’étaient jetés vers Tih et Liam qui s’étaient tenus recroquevillés l’un contre l’autre dans le sable, près d’une motospeeder encore fumante. Vaklu et ses frères décidèrent de braquer les blasters « tombés du ciel » sur ce qui restait des dragons.

- Tu aurais dû rester dans ta tanière et lécher tes plaies, fit-elle froidement vers Vika. C’est ce que font les animaux.
- Je suis une dragonne ! S’insurgea-t-elle et elle arma de nouveau son fusil, les mains tremblantes. Va te faire foutre, sorcière.
- T’es tombé sur la putain de mauvaise sorcière, grogna Dana, emportée par la rage. T’es tombée sur la foutue descendante de Shar Dakhan et je vais pas te laisser t’en tirer comme ça.

Ses mots volaient en éclats dans l’air, se mêlant aux geignements de Mumkin et à la respiration saccadée de Lloyd qui tentait pauvrement de l’aider. Zoraïda observait la scène derrière son masque brisée, gardée par Ruth et son époux. Puisque personne ne semblait s’opposer, comme ce jour funeste sur Artorias où aucune voix ne s’était élevée contre l’horreur, l’Inquisitrice serra le poing pour compresser la Force et, à travers elle, enlacer la gorge de Vika. Au sol, Dùnx souhaita réagir, mais un tir de blaster éclaboussa le sable, près de ses pieds, le sommant de ne pas bouger. Vaklu l’avait en joue.

Un bruit sec brisa le silence de la nuit avant que Vika ne manque d’air. Elle s’effondra au sol, le cou brisé, exécutée sommairement par une Inquisitrice Sith. Dans cet acte cruel, il y avait un peu de normalité pour Dana ; son quotidien ressurgissait à travers cette violence brute et rapide. Personne ne parla et les prunelles sombres fixaient le pauvre corps de la jolie dévaronienne qui était morte, le fusil à la main. Dùnx sanglotait de rage, rampant vers la dépouille de sa sœur tandis que l’averse s’abattait sur le rivage, comme si le ciel avait retenu son souffle le temps d’une rixe banal, entre deux clans rivaux.

Dana s’approcha du frère endeuillé. Son ombre recouvrit le colosse et elle plaqua un talon impitoyable sur la nuque courbée de Dùnx.

- Tu as enfreint beaucoup trop de règles. J’étais la femme de Callum Krayt. Et Callum Krayt est mort, selon vos loi, je deviens la chef de clan. Et en tant que chef de clan, ceci est mon premier avertissement. Ta soeur était folle. Elle n'a pas hésité à te sacrifier, mais Mumkin a sauvé ta pauvre vie de merde.

Elle s’était détournée pour s’adresser aux survivants, jetant son mégot dans le sable.

- C’est moi, la dragonne. Allez répandre la nouvelle, chez les autres. Dîtes à Kraya que si elle refuse ce choix, je la soumettrai dans la mort. Comme j’ai soumis Vika et comme je suis prête à soumettre chacun d’entre vous. Alors ?

Ils se regardèrent puis avisèrent la jeune humaine en short noir, brassière sombre, cheveux librement portés et maquillage fatal. Ils contemplèrent le tableau qu’elle offrait, victorieuse et impitoyable ; ils virent Dùnx à genoux, ils virent Vika morte. Alors, ils acceptèrent, en silence, s’agenouillant les uns après les autres, pour accepter Dana Shar comme nouvelle cheffe, intimidés son aura, terrifiés par ses pouvoirs.








Quelques minutes plus tard, les motospeeders redémarraient. Lartokh et Mumkin avaient été conduits dans la roulotte sombre occupée par Lloyd avant son bannissement. Le pilote avait perdu connaissance, comme il avait perdu trop de sang et la fiancée de Svan s’était occupée de lui, aidée de Zoraïda. Hope gardait maladroitement les marches de ce sanctuaire improvisé, assis dessus, se rongeant les sangs pour son employé. Le parfum de Dana émergea à ses sens quand elle s’était rapprochée, accompagnée de Luis. Elle lui tendit son sabre-laser.

- Kraya viendra. Elle soignera Mumkin. Il va s’en sortir, je te le promets. Il mourra pas.

Elle attendit qu’il prenne l’arme pour s’emparer d’une cigarra, d’un briquet et se mettre à fumer, comme elle avait fumé des mois plus tôt, devant la même roulotte, avec les mêmes inquiétudes, s’inquiétant pour un Sith assez idiot pour se blesser en lui sauvant la vie. Elle prit une grande inspiration et se décida à le pousser un peu, pour se ménager une place sur les marches, collant son épaule à la sienne et admirant le reste du camp. Tih et Liam s’étaient remis à jouer avec d’autres enfants, entre les roulottes, sous les regards intenses des adultes du clan qui discutaient encore de cette incroyable soirée. De temps à autre, on jetait des œillades vers les Siths : y brillaient un peu de crainte, un peu d’admiration, un peu de reconnaissance peut-être. Tih avait encore des larmes aux coins des yeux qui contrastaient avec le sourire que les grimaces de Liam faisaient naître sur son visage enfantin. Dana souhaita s’arracher à cette vision sans y parvenir. Alors, elle pinça la cigarette plus fort entre ses lèvres, inspira plus profondément les toxines. Sur l’épaule d’un Vaklu nerveux, le fusil Verpine de Vika trônait.

- Pourquoi t’es revenu ? Pour Mumkin ? T’es revenu pour eux tous ? Même s’ils pensent que t’es un connard ?

Elle coinça la cigarra entre ses doigts délicats, ses doigts tueurs comme des griffes de dragon, et se pencha vers lui. De cette même main qui tenait la cigarette, elle remit en place le col de sa chemise, tâchée par le sang de Mumkin, elle frotta la tâche de son pouce, pensivement.






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- Toi aussi, c’est ça ?
- Quoi ?
- Non, rien.





- Mets-le là, voilà ! Redresse un peu sa tête. C’est bien.
- Et après ?
- C’est tout, je m’en occupe à partir de là.
- Je peux faire quelque chose ?
- Non.
- …





- Et là ?
- Quoi ?
- Je peux faire quelque chose ?
- Non, Lloyd, laisse-moi travailler.
- …
- Lloyd, sors. Tu me gênes.
- Toi aussi, c’est ça ?
- Quoi ?
- Non, rien.
- S’il te plaît. Dehors. Je m’occupe de Mumkin.






Et voilà comment il s’était retrouvé fichu à la porte de sa propre roulotte, les mains tremblantes, trempées de sang, assis sur les marches. Il avait eu un vertige. La présence de Dana à ses côtés lui avait permis de s’arrimer à la réalité, d’essayer de voir autrement que comme des fantômes les enfants qui jouaient à quelques pas d’eux. Au-delà des petites silhouettes animées, dévaroniens et humains leur jetaient des regards qu’il n’était pas capable de déchiffrer. Il s’était attendu à ce qu’on revînt lui demander de partir. Il refuserait. Il fallait aider Mumkin. Ses doigts jouèrent un instant avec son datapad ; fallait-il réveiller le docteur Chet ? Le temps que Melantha renvoie une navette avec du matériel médical, il faudrait de longues heures. En fonction de ce que dirait Kraya, il prendrait une décision.

- Pour Mumkin, grogna-t-il au bout d’un moment, le regard absent. J’en ai rien à foutre des autres.

Son visage s’était figé dans une expression sévère.

Il était peut-être un peu revenu pour Tih et Liam, aussi. Tih qui était trop jeune pour savoir ce qu’était un connard, Liam que les histoires d’adultes n’intéressaient pas, sauf peut-être celle de ce vaisseau gigantesque, suspendu quelque part au-dessus du ciel. Puis, ces deux-là grandiraient, on leur parlerait peut-être du patron de Mumkin, et ils penseraient comme leurs proches.
Et si les filles avaient grandi, auraient-elles pensé que leur père était un connard ? Cette pensée le plongea dans une contemplation morne de la plage.

- Seulement pour Mumkin, répéta-t-il plus fermement. Mon putain d’alien, comme tu l’appelais.

Il y avait longtemps qu’il n’avait pas entendu Dana désigner son pilote comme ça.

- Au fond, je sais que tu t’y es attachée aussi. Je vous ai entendus.

Il haussa les épaules, penaud. Sa voix avait sonné come un aveu. Après tout, il n’avait pas besoin de se souvenir des éclats de voix enjoués de la cabine voisine, à bord du Sans Visage, quand lui-même était au fond du gouffre. Les faits parlaient d’eux-mêmes : quand Dana avait eu besoin d’aide, pendant sa grossesse, elle avait demandé à Mumkin. C’était lui qui lui avait trouvé un foyer. Il avait peut-être touché son ventre, il avait sûrement su qu’il y en avait deux, que c’étaient des filles. Soudain il semblait à Lloyd que le dévaronien avait obtenu de l’Inquisitrice un privilège immense, pendant que lui avait été écarté. Il essaya tant bien que mal de se raisonner, mais il sentait les doigts de Dana près de son cou, sur son vêtement.

- Chaque fois que tu touches à mon col comme ça je pense à ce jour où…

Il ne termina pas sa phrase. Ses mots restèrent suspendus au bord de ses lèvres. Il sembla les ravaler en les pinçant, les avaler en déglutissant, tandis que ses yeux restaient braqués sur la scène qui se jouait devant eux. Tih et Liam se détachèrent du groupe d’enfants, car la petite dévaronienne s’était mise à pleurer et avait besoin des bras de son père. Liam s’assit à côté des deux dévaroniens, le visage entre les mains dans une mine boudeuse.

Soudain le hapien détourna son visage pour faire face à celui de Dana. Ses émeraudes semblèrent scruter les traits de l’Inquisitrice. Les mèches qui s’étaient plaqués sur son front, les marques de fatigue, la tâche sombre sur sa joue, les rougeurs qui ornaient un nez qui avait été brisé, une cicatrice qui fendait sa lèvre. Il cligna des yeux.

- J’ai tué ton mari, dit-il subitement. Enfin le deuxième.

Il y eut un silence, pendant lequel dans cette nuit sombre, éclairés par les lueurs qui provenaient de l’intérieur de la roulotte, leurs visages se faisaient face, et celui du hapien demeurait interdit.

- Je veux tuer le premier aussi.

Et tous les suivants, crois-moi.

- Laisse-moi faire ça si je peux pas… Si je peux pas ramener nos filles.

Soudain il détourna le visage, se dégagea sans le vouloir de la main de Dana, pour mieux passer ses propres mains dans sa nuque. Il sentait la chaleur chauffer son cou, la sueur perler subitement à la lisière de ses cheveux et de loin, il croisa le regard de Tih, dont les yeux remplis de larmes s’égaraient maintenant qu’elle était tendrement bercée par son père. Le visage du hapien se tordit en une moue de rancœur.

- J’voulais te faire… J’voulais te faire la surprise.

Il affronta de nouveau l’étendue dorée et une lueur absurde s’était allumée au fond des deux émeraudes.

- Je peux encore, si tu veux.

La lueur sembla s’éteindre l’instant suivant.

- Ou bien… Ou bien c’est le pire cadeau que j’aurais pu faire, c’est ça ? Le genre de truc où j’aurais dit après : « j’suis désolé » ?



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- Y’a qu’une seule solution pour les ramener à la vie.







- Arrête.

Elle s’était éloignée de lui, avait écrasé son mégot contre l’une des marches. Au-dessus de leurs têtes, la pluie battait inlassablement les dais tendus qui se gorgeaient d’eau mais ne ployaient pas. Le son de l’averse était semblable à des tambours de guerres lointains et les cris des enfants, les discussions animées des adultes, couvraient ce chant déprimant.

- Ca m’a rendu heureuse, t’as pas compris ? J’étais heureuse. Ce que toi et moi on a réussi à faire, même si on le voulait pas, même si c’était pas prévu. J’étais terrifiée au début, je…je comprenais pas. Et puis je les ai senti bouger. C’était…plus supportable qu’on soit séparé, parce que je les avais. Je les méritais certainement pas, j’me suis dis qu’elles devaient être tellement belles, parce qu’elles te ressembleraient et je les ai aimé chaque jour un peu plus. Mumkin…il les aimait déjà aussi, c’est pour ça…que je suis revenue aussi. Il…se préoccupait un peu de mes bébés, plus que Darth Runà, plus que…n’importe qui.

Elle avait l’impression que la pluie s’était soudainement déversée dans ses yeux. Elle n’aurait donc jamais fini de pleurer ses petites filles. C’était un puits béant dans lequel elle puisait tellement de chagrin et de rancœur. Elle voyait Lartokh embrasser le front de Tih, sécher ses larmes.

- Elles m’auraient posé des questions sur leur père et je leur aurais dit la vérité. Qu’il se battait pour l’Empire, qu’il risquait sa vie comme il l’avait risqué pour moi. Qu’il faisait tout son possible. Je leur aurais dit que…tu tenais à elles. Ca les aurait rassuré la nuit, ça aurait peut-être calmé leurs pleurs, je sais pas.










Plus loin, Tih ne pleurait plus. Elle enlaçait Liam, singeant maladroitement l’étreinte que Lloyd et Dana échangeait sur ces petites marches. Le garçon avait les joues rouges et regardait ailleurs, mais se laissait faire sous le regard dun Lartokh qui s’était étendu sur un transat proche pour soulager son genou blessé. Kinuux avait allumé une cigarra et s’était lancé dans une discussion animée avec Rilc qui se mettait à rire de temps à autre. Et ces conversations, ces rires, ne trompaient personne. Tous les cœurs étaient serrés d’inquiétude pour Mumkin.

- Et oui, tu pourras tuer Akusha, reprit-elle doucement, laissant une main délicate s’égarer contre la joue hapienne. Mais…avant qu’il expire, je veux qu’il souffre. Et…je veux que tu lui racontes, comment tu m’as pris chez Rhysode, comment tu as été mon bourreau, qu’il comprenne que le vrai Sith, c’est toi. Et que je me soumettrai à aucun autre dans cet Empire que le Capitaine Lloyd Hope, auquel j’appartiens et qui m’appartient aussi.

Son souffle échouait à l’oreille de Hope, comme un appel à la guerre qui devait combler le soldat affamé en lui.

- Et…(un sourire se dessina sur ses lèvres maquillées) tu es un peut-être un loup, je suis peut-être ta petite louve enragée, mais je suis également une dragonne, prête à réduire à feu et à sang tous ceux qui toucheraient à un seul de tes cheveux. Que ce soit pour les arracher, ou pour les caresser.

L’avertissement était clair, pour lui aussi.





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Lloyd Hope
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La galaxie ne serait plus qu’un grand échiquier sur lequel la coincer, elle et sa bande de comédiens.





Les doigts du hapien marquaient déraisonnablement la peau à nu de l’Inquisitrice tandis qu’il avait refermé ses bras sur elle, sur son bien, sa propriété, comme disait Svan. Son corps s’était tendu contre elle, rigide tandis qu’il l’avait plaquée contre son torse. La main du hapien s’était égarée dans les cheveux de Dana quand il avait veillé à ce que le visage de l’Inquisitrice s’enfouît dans son cou, comme s’il avait voulu la cacher là au reste du monde, et pourtant ses yeux semblaient guetter ce monde qui les entourait, comme s’il s’était caché derrière elle, transi de peur, ou comme si au contraire il la protégeait, loup féroce et blessé.

- Il souffrira, dit-il à voix basse.

Lloyd se souvenait soudain des hématomes qu’il avait découvert, lors d’une nuit de tendresse qui n’aurait dû être qu’à eux, mais qui avait été hantée par le spectre d’Akusha.

- Oh, il souffrira.

Il serait méthodique. Et il ferait souffrir chaque être qui avait fait du mal à Dana sur le chemin de cette grossesse, car chacun d’entre eux avait joué sa part dans l’incapacité de son corps à préserver la vie de leurs filles. Après Akusha, il réfléchirait à comment atteindre la mercenaire. La galaxie ne serait plus qu’un grand échiquier sur lequel la coincer, elle et sa bande de comédiens.








- Tu crois qu’c’est vrai ?

Mercy tenait Dan dans ses bras en se balançant d’un pied sur l’autre pour le bercer. Le petit garçon s’était endormi, l’une de ses joues rebondies écrasées contre l’épaule de la jeune femme, qui n’avait pas pu le lâcher depuis ces moments horribles où on avait failli lui arracher son enfant. A côté d’elle, assise, sur les marches d’une autre roulotte, Ruth veillait sur l’enfant de Chechi, pelotonnée dans un panier rempli d’une couverture qui faisait office de landau.

- De quoi tu parles ? fit Ruth à voix basse pour ne pas éveiller les enfants endormis.
- Que c’est elle qui lui a demandé de... D’essayer de les ramener à la vie. Les mecs étaient furieux, ils auraient voulu tirer ça au clair, à ce que m’a dit Goshgosh...

Ruth lâcha un soupir agacé.

- Quelle importance ? Que ce soit l’un ou l’autre, regarde-les.

Les yeux des deux femmes convergèrent vers les deux silhouettes enlacées au pied de la roulotte où Mumkin était toujours aux mains de Kashiina. Mercy essayait de voir ce qu’il y avait de particulier dans cette scène. A part le sang des mains de Lloyd, leur attitude intime, elle ne voyait qu’un couple ordinaire. Elle haussa les épaules.

- Quoi ? Ils ont juste l’air de s’aimer.
- Précisément, commenta Ruth. Nos hommes ont paniqué. Ils ont eu peur de pas contrôler Llord suffisamment. Faut qu’on s’en mêle, Mercy.
- J’arrête pas d’essayer de m’en mêler. Mais ils m’écoutent pas !
- Ils vont être obligés. Ils écoutent Dana, et encore plus maintenant qu’elle est la cheffe des dragons.
- J’en reviens toujours pas, de ça, fit Mercy en secouant la tête. Mais enfin, je sais pas ce que ça va changer pour nous.
- On devrait dire à Mamy Zora de les influencer, de nous associer à certains conseils, au moins. Ou quand ça concerne ce genre de sujets.
- Pfff... Tu sais ce que Zoraïda pense de moi, depuis la naissance de Dan.
- Que tu es courageuse mais que tu aurais dû naître avec des cornes vu comment tu as la tête aussi dure qu’une dévaronienne ?

Les deux femmes pouffèrent en échangeant un regard complice.








Derrière Lloyd et Dana, la porte de la roulotte s’ouvrit. Soudain, toutes les discussions s’éteignirent, et on regarda la jeune femme. Le hapien se leva, emportant Dana dans son mouvement sans la lâcher, comme s’il avait eu peur qu’elle profitât de cette diversion pour s’enfuir. Mais le visage de Kashiina était reposé et elle descendit les marches avec lassitude.

- J’ai fait ce que j’ai pu. Il respire... Maintenant il n’y a plus qu’à attendre et à prier, commenta-t-elle.

Elle se tourna vers Lloyd et Dana, sembla se perdre brièvement dans la contemplation de leur posture emmêlée.

- Merci Kashiina, dit soudain Zoraïda, s’attirant les regards des humains comme des dévaroniens par son ton plus respectueux que d’ordinaire envers la jeune femme. Je vais faire un rituel de bon présage. Que ceux qui veulent participer s’approchent du feu.

La femme au masque brisé, qu’elle gardait sur elle comme un trophée, une preuve de survie, s’en alla vers la plage, où à quelques mètres de là le grand feu s’élevait toujours, crépitant dans la nuit. Kalon venait d’y jeter quelques bûches. Tout le monde se mit à suivre Zoraïda, sauf Dana et Lloyd, figé dans leur enlacement. Tout le monde s’en était presque allé quand Mercy et Ruth s’attardèrent.

- Plus on est, plus le rituel a de chances d’influencer le sort, dit Mercy en s’approchant d’eux.

Le hapien lui lança un regard suspicieux.

- Je dois rester près de Mumkin, désolé. Dana peut y aller si elle veut.
- Dana, peut-être que... ton animal de compagnie peut surveiller la roulotte ? Ça va prendre que quelques minutes !

- Je suis pas la bienvenue, on vous a pas dit ?

Mercy fit la moue, mais Ruth s’avança d’un pas pour se planter devant Dana et Lloyd d’une manière un peu autoritaire.

- Bien sûr que si, vous êtes la bienvenue tous les deux. Vous êtes revenus pour sauver nos enfants. On se fiche de ce que la douleur a pu vous faire dire ou faire comme bêtise. Vous êtes peut-être des... des Sith, ça empêche pas qu’vous pleurez comme tout le monde.
- Et Mumkin, il serait content de savoir que vous avez fait le rituel pour lui.
- Et on s’occupe de Svan et des autres, enchérit encore Ruth.
- Allez s’il vous plaît, venez !

Lloyd lâcha un soupir. Il finit par acquiescer avec lassitude.










Le hapien avait passé un bras autour de la taille de Dana, et il refusait de la lâcher. Devant le grand feu, qui léchait leur corps d’une chaleur bienvenue, il était arrimé à l’Inquisitrice. S’il la lâchait, il savait qu’il serait à la dérive, que ses pas l’entraîneraient dans une course folle, que ses poings s’écraseraient sur les troncs des arbres ou bien ses doigts s’échoueraient dans la terre qu’il essaierait de creuser, encore.

Autour du feu, tous les membres du clan étaient réunis en un large cercle. Le rituel consistait à jeter au feu l’une de ses possessions, à l’offrir en sacrifice pour échanger avec les dieux des serpents un peu de vie à conserver dans le corps de Mumkin.

Lorsque ce fut son tour, Lloyd sortit de sa poche les petites fioles. C’était la seule chose qu’il avait gardé sur lui tout ce temps. Il les écrasa entre ses doigts, et le verre fit couler son sang dans sa paume meurtri, avant qu’il n’en jette les débris dans les flammes. L’instant suivant, il se replaçait derrière Dana, posait sa joue contre les cheveux carmins de l’Inquisitrice tandis que ses yeux restaient posés sur ce qui restait des fioles, que le feu n’avait pas le pouvoir de détruire. Il respirait le parfum, les épices et l’odeur musquée de Luis sur le corps de l’Inquisitrice. Autour d’eux, on faisait des commentaires, on chantonnait doucement un air mélancolique. Et le hapien continuait à se cacher contre Dana, tout son corps collé au sien.

- Je me disais, se mit-il à chuchoter à l’oreille de Dana. Peut-être qu’elles… Peut-être qu’elles vivent, dans un monde parallèle. Dans un monde où…

Le hapien pinça les lèvres, les serra entre ses dents à sentir le sang perler doucement à l’intérieur de sa bouche, insinuer un goût de métal.

- Dans un monde où leur père a su les protéger, dit-il d’une voix minuscule.

Il dissimula son visage dans les boucles rousses, pour éviter de se donner en spectacle devant les dévaroniens qui parfois leur jetaient des coups d’œil. Sa vue se brouilla comme les émeraudes étaient subitement noyées de larmes.

- C’était pas ta faute, Dana. C’était pas ta faute.

Il répétait ces mots, comme un écho à ce qu’elle avait dit dans la jungle, sur le fait qu’elle n’avait pas pu les garder en vie. Non, ce n’était pas de la faute de Dana. Elle les avait fabriquées pour lui, et on les lui avait volées. En faire de nouveaux ne pourrait pas remplacer les deux petits corps qui gisaient profondément dans le sable, parce que leur père les y avait mises.

- Et j’irai tuer les responsables, gronda-t-il entre des larmes de fureur. Ils souffriront, Dana. Tu verras comme ils souffriront.






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Darth Hope
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L’Agonie des Krayt

Les vaisseaux, les planques






Elle verrait.

Et pour le moment, elle était perdue dans la contemplation du Grand Feu qui devenait le ventre de dieux invisibles auprès desquels les Serpents cherchaient secours en cette période trouble. Dana se remémorait avoir admiré les mêmes flammes colorées des années auparavant, quand sa soeur aînée était morte rt que Darth Tiamat avait érigé un bûcher pour en éradiquer toute trace. En décalage, perdue dans la vaste arborescence de ses pensées, Shar songea qu'elle aurait dû réagir ce jour-là, empêcher que tout ne parte en fumée, récupérer des preuves. Cela lui parut soudain comme une évidence au milieu de cette réalité amère qui lui avait fait oublier Damaya tant de fois. Mais maintenant qu'elle avait l'impression d'être arrivée au bout de toute chose, réfugiée dans les bras de H., pleurant la mort de leurs improbables progénitures, la paix laissait entrevoir le mensonge. Des preuves. Mais des preuves de quoi au juste ? Qu'avait-elle récupéré de son aîné si ce n'était un vieux datapad encombré de souvenirs d'enfance.

- J'ai pas répondu à ta question tout à l'heure, chuchpta-t-elle et le son bas de sa propre voix l'arracha à ses lointaines réflexions. Non. Je saigne plus depuis que le docteur Chet m'a soigné.

Avec du foutu kolto synthétique de merde, qualité impériale, qu'elle avait dû recevoir par intraveineuse, en supplément des calmants, de la transfusion de sang. Il avait réparé en quelques heures, ce que les herbes de Kashiina auraient mis des jours à soigner. Devant cette évidence, Dana éprouva encore de la culpabilité. Même si ce n'était pas sa faute comme le prétendait Lloyd contre ses cheveux écarlates, elle avait fait ce choix d'accoucher ici dans cet ersatz de famille. Un choix qui avait peut-être condamné leurs filles. Et ne pas savoir si la technologie de Kaas City aurait pu les sauver la rendait malade.

Les flammes dansaient dans l'or de ses poubelles où elles se répercutaient en milliers de lueurs chaudes, moqueuses, avides. Il valait mieux accepter que les responsables devaient être punis. Maxence en particuliers. Akusha, sans aucun doute. Orcus, très certainement méritait également un châtiment.

- Elles étaient déjà là quand Jared Ashar m'a attachée dans mes quarties, souffla-t-elle comme une réflexion à voix haute qui, soudain, lui faisait prendre conscience de la gravité de certains actes. Quand tu as tué Jaden, elles devaient l'être aussi, toutes, toutes minuscules.Une nuit, ca suffira pas Lloyd. La tendresse. Il va falloir plus qu'une nuit.

Parce qu'elle était dévastée à chaque fois qu'elle traversait une minute de deuil en plus. Discrètement elle prit au piège l'une des mains de Lloyd dans la sienne et lui fit quitter sa taille pour la remonter le long de son abdomen. Elle sentir les doigts du hapien labourer sa peau chauffée par le feu. Elle le guida, comme une charmeuse de serpent contrôlait sa créature jusqu'a ce qu'il passe sous le tissu brodé de sa brassière, qu'il devine à l'aveugle les lettres ancrées sur l'arrondi de son sein doux.

- Je vais devenir folle.

Non, elle l'était vraiment.


Un grondement sourd vibra au sol, agitant l’air et le sable sous leurs pieds. Les têtes se levaient vers le ciel à la fois nuageux et étoilé pour voir apparaître une structure ténébreuse aux angles acérés. Un vaisseau spatial. Liam écarquilla les yeux et fut le premier à s’exclamer, plein d’admiration. La taille de l’engin dépassait d’une fois et demi celle du Sans-Visage et des lueurs blanches s’en échappait tandis que les projecteurs de l’appareil braquaient leur faisceau puissant pour balayer le rassemblement sur la plage. Aucune trace d’armement. Le cœur de Dana fit un bond dans sa poitrine.

- C’est Kraya.

Les vaisseaux, les planques.


Le vaisseau s’était posé à des centaines de mètres du campement, près des prairies à Bantha, loin des rives du lac. De son arrière-train métallique, des foreuses avaient jailli pour fondre dans la terre meuble et humide. Et une partie du monstre métallique s’enfonça dans le sol. Le vent de Jabiim s’était levé et battait impitoyablement les hublots et la coque externe. La pluie ne tarderait visiblement pas. Après un bruit strident, une passerelle ouvrit le ventre de l’appareil et des silhouettes débarquèrent tandis que les Serpents avaient accouru, blasters à la main vers la zone d’atterrissage. Dana avait lâché Lloyd à regret pour les accompagner, prête à tuer, encore.

Jyxo tenait dans ses bras un petit enfant, de quelques mois à peine. Il avait l’air dur et fermé. A ses côtés Kraya posaient des yeux rougis par les larmes sur le « comité d’accueil ». Tirée à quatre épingles dans sa combinaison médicale, elle avait relevé sa chevelure claire au sommet de sa tête et portait un foulard noir autour de sa gorge gracile. Derrière eux, ce qu’il restait des dragons : des visages de dévaroniens et d’humains aux traits tirés par la fatigue, par l’incertitude. Zoraïda se détacha des siens pour aller à l’encontre de la femme.

- Nous devons parler, déclara courageusement Kraya, ravalant ses larmes de colère et de tristesse.
- Nous parlerons, décida Zora, mais pas maintenant.
- Suis-moi, ordonna Dana tout en jetant un regard à Jyxo. Le reste des dragons, ne quittent pas ce vaisseau ou je leur ferai regretter.

Kraya fit un signe vers le cousin de Mumkin et avança pour suivre l’Inquisitrice qui avait déjà commencé à allumer une cigarra et la sœur de Callum n’eût qu’à suivre la fumée translucide traçant une voie vers une roulotte, vers un pilote blessé.














Une heure plus tard, Kraya quittait le chevet de Mumkin. Elle n’accorda aucun regard à Lloyd Hope, l’ignorant royalement. Elle s’adressa plutôt à Dana et Zoraïda :

- Il va s’en tirer. Les premiers soins apportés ont été bons. J’ai du matériel, dans le vaisseau, pour accélérer sa guérison, rapporta-t-elle d’une voix éteinte, le regard cerné de fatigue.
- Allons parler, ponctua la matriarche et elle fit un signe vers Vaklu.

Dans la roulotte de la vieille doyenne, Shar continuait de fumer. Installée à côté de la dévaronienne, sur un fauteuil aux coussins brodés de motifs fleuris, elle dardait ses yeux dorés sur Kraya qui leur faisait face, toute pâle, un Vaklu silencieux dans son dos.

- Tu as reçu la nouvelle ? lança Dana en se pencha pour se débarrasser de cendres dans un petit bol.
- Tout à fait, belle sœur, confirma-t-elle d’une voix amère et blanche. Tu es la nouvelle cheffe du clan Krayt, félicitations. Mais je présume que Zoraïda ne t’a pas dit pourquoi t’avoir offert le thé pour te fiancer avec mon frère.
- Non, cette vieille folle me cache tellement de choses.
- Eh oh…un peu de respect, grogna Vaklu avant que Zora ne lui fasse signe de se taire.
- Callum était condamné. Il avait contracté une maladie que je n’arrivais pas à guérir, qui avait déjà décimé une partie des nôtres. Il est venu chercher une femme pour pouvoir lui succéder et accessoirement lui offrir une descendance capable d’assumer ensuite le futur des Krayt. Il a pensé aux Serpents car, Jyxo a toujours été loyal et que notre alliance était solide, enfin, je le croyais. Je présume que Zoraïda répugnait à ce que l’une de ses « filles » marie un mort en sursis dans un clan à l’agonie.
- Des suppositions, souffla Zoraïda, un peu lasse.
- Oh oui bien sûr, persiffla Kraya. Quand, vous, les clans itinérants de Jabiim erriez sur ces terres pluvieuses, sans but, nous les Krayt on construisait des vaisseaux pour itinérer dans l’espace, apprendre. La science, Zoraïda. Pas de magie, pas de superstitions à la con.
- Et vos pérégrinations spatiales vous auront apporté la mort et le malheur, comme cette épidémie inconnue, comme Vollen. Nous avons voulu vous aider.
- Et donc. Qu’est-ce que prévoit, la cheffe pour l’avenir des Krayt ?

Dana inspira profondément sur sa cigarra, emplissant ses poumons d’une toxine acide et apaisante.

- Remonter dans ce vaisseau et partir. Pour des coordonnées que je vais vous donner. Mais, il va falloir prendre de la crème solaire. Là où vous allez, le soleil tape fort. On va vous préparer tout ce qu’il faut pour ce long voyage. Et tu seras porteuse d’un message.
- Un message ?
- Un message pour Hélios. En attendant, aucun Krayt n’approche du campement ou je l’exécute moi-même.
- Il faut savoir, ironisa froidement Kraya. T’es une dragonne ou un serpent ?

L’Inquisitrice se redressa et écrasa son mégot au fond du bol en céramique.

- Ni l’un, ni l’autre, belle-sœur. Je suis une louve enragée.
















La nuit avait bien avancé. Les familles avaient regagné leur roulotte pour un repos mérité, pour panser des blessures superficielles ou invisibles. Vaklu et d’autres hommes organisaient des rondes dans le campement et aux alentours pour s’assurer qu’aucun Krayt n’aurait l’idée un peu folle de prendre une revanche absurde, mais les dragons semblaient dormir dans leur tanière comme l’avait ordonné leur cheffe. Assise sur les marches d’une roulotte familière, Dana admirait une nouvelle cigarette se consumer, devant ses yeux. Elle entendit Lartokh au loin grogner après sa petite fille qui tardait à le rejoindre pour l’heure du bain et du coucher. Elle n’avait pas retrouvé Lloyd, avait supposé qu’il était au chevet de Mumkin à l’intérieur, alors elle s’était assise là, comme le gardien d’un sanctuaire et philosophait absurdement. Callum Krayt était mourant. Son destin était le trépas quoiqu’il advenait. Kraya n’avait donc pas réclamé de vengeance…en considérant qu’elle pensait Dana Shar coupable, mais elle n’avait pas l’air de croire en la magie.

Un parfum familier arriva à ses narines et elle leva son minois vers Mercy qui lui tendait un bébé emmitouflé dans des couvertures chaudes. Chanti avait faim. Chanti avait toujours faim, de toute façon. Elle ouvrit les bras et réceptionna le petit être contre elle. Il lui suffit de relever sa brassière sombre et donner accès à son sein. Le bébé ne tarda pas à s’y accrocher et Dana tut une grimace derrière une bouffée de cigarette.

- Tu peux aller te reposer Mercy, finit-elle par dire alors que la jeune femme demeurait plantée là.
- Euh, t’es sûre ? Tu vas savoir comment la faire roter ?
- Ouais, à peu près. Va te reposer, je te dis.
- Bon, ok. Mais si ça va, tu viens me la déposer, concéda-t-elle avant de filer dans la pénombre de la nuit.

Il commençait à rafraîchir depuis que la pluie avait cessé et que la brise humide continuait de courir sur les rives du lac. Dana se conforta sur les marches et abaissa les prunelles vers le petit visage aux joues rebondies qui s’abreuvait.

- T’as pas l’air au régime hein ? souffla-t-elle avant de remettre un peu les couvertures sur l’épaule de l’enfant, attendrie.












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L'Agonie des Krayt


Bien sûr, elle devait penser à leurs filles. Bien sûr, il y pensait aussi.





- Aïe aïe aïe… ouh la la la.

Allongé sur la couchette, une grimace de souffrance déformant ses traits déjà habituellement laids, Mumkin porta ses doigts à son épaule, tripota doucement le bandage. Kraya l’avait aussi doté d’une attelle qui rendait sa posture inconfortable, mais qui empêchait que les os ne fussent trop malmenés. Toute son articulation était touchée et il avait eu beaucoup de chance de ne pas avoir une artère perforée dans cet impact puissant.

- Touche pas trop. Moins tu bouges, mieux ça vaudra pour un bon bout de temps.

Le hapien était assis sur la couchette d’en face, le visage posé entre les mains, coudes appuyés sur les genoux, à observer son pilote. Mumkin ouvrit les yeux, regarda Lloyd en biais pour éviter de tourner la tête.

- Ça va compter comme un accident de travail ça ? Non parce que là j’vais pas pouvoir piloter demain.
- Ah ça, non, tu vas pas piloter avant quelques semaines, si tu veux mon avis. Qu’est-ce que t’es pas prêt à faire pour avoir de bonnes excuses pour pas bosser, franchement.

Les lèvres du dévaronien s’étirèrent, d’abord par un sourire d’amusement, puis de nouveau dans une grimace de douleur.

- Bon, vu qu’tu plaisantes, j’suppose qu’aucun gamin a été pris.
- Tu te souviens pas ?
- Non, le dernier truc dont je me rappelle, c’est d’avoir vu passer Luis. J’ai rêvé ou Luis était là ?
- Nan, il était bien là. Il est toujours là d’ailleurs. Il attend derrière la porte pour venir te dire bonjour.

Mumkin laissa échapper un petit rire. Lloyd en profita pour enchaîner.

- Dana a… Elle a tué Vika.

Le visage du dévaronien se figea dans une expression de surprise atterrée.

- Sérieux ?
- Oui. En même temps, Vika était prête à sacrifier son frère pour me tuer. Du coup, Dana s’est imposée comme la cheffe des dragons, elle leur a ordonné d’envoyer leur médecin, Kraya, pour te soigner. D’où…
- L’attelle. Ouais, je me disais aussi que Kashiina avait pas ce genre de matériel.
- Voilà.

Le silence s’installa quelques instants. Le hapien s’était redressé pour mieux frotter ses mains dans une expression de réflexion, tandis que Mumkin fixait le plafond de la roulotte, ses yeux un peu globuleux écarquillés dans une attente étrange, comme s’il savait que Lloyd finirait par dire quelque chose, qu’il lui fallait juste du temps. A l’extérieur, on entendit quelques voix. Le vent secouait parfois doucement la roulotte, et les grigris que quelqu’un avait suspendu au-dessus de la couchette de Mumkin se balancèrent avec de légers tintements de perles.

- Mum, je voulais te dire, j’apprécie ce que tu as fait même si… Faut plus jamais que tu refasses ça.

Le dévaronien s’efforça de tourner un peu son visage vers le hapien.

- De quoi tu parles ?
- Me sauver la vie, au risque de perdre la tienne.
- Oh, ça.
- Ouais.
- Tu l’aurais fait pour moi.
- C’est différent, c’est un peu mon métier d’être dans des combats. J’m’en tire pas trop mal, en général. Mais toi, à quelques millimètres près, tu serais mort.
- Je rêve où tu m’engueules ?
- Tu rêves pas. C’est pour pas que tu recommences. Mum, j’suis sérieux. J’ai…

Lloyd s’humecta les lèvres, passa une main dans sa nuque en regardant ailleurs.

- J’ai réellement besoin de toi en pilote, pas en chair à canon. Laisse Dana et moi faire ce genre d’actes stupides, ok ?

Mumkin grogna un assentiment. Le hapien prit une soudaine inspiration, comme s’il était pressé. Ou qu’il fallait en profiter, tant qu’il était sur sa lancée.

- Et aussi, j’ai eu sincèrement de la peine que tu sois si dévasté pour… Pour ta sœur. C’était con de te lancer ça à la figure au milieu de mon n’importe quoi habituel. J’savais juste pas quoi dire, alors...

Les yeux du dévaronien roulèrent dans leurs orbites.

- T’es vraiment gênant, quand tu t’y mets.
- Ouais. Désolé.

Mumkin tourna de nouveau la tête pour essayer d’échanger un regard embarrassé. Puis il soupira.

- Patron, t’as creusé la tombe de ma sœur. Y avait rien besoin de dire de plus.

Lloyd acquiesça doucement. Un poids s’envolait de sa poitrine, mais il ne l’aurait pas admis ouvertement.








Lorsque le hapien sortit de la roulotte, son datapad à la main, il trouva sur les marches une Dana à la brassière relevée, un bébé dans les bras, pressé contre sa poitrine. Il était impossible de ne pas penser, encore, que cet enfant qu’elle allaitait aurait pu être l’une de leurs deux filles. Mais il déglutit en s’asseyant à ses côtés, tâchant de faire taire ces pensées qui n’allaient plus nulle part. Il regarda un instant les cheveux de Dana cascader sur ses épaules. Une mèche était fichée derrière l’oreille de l’Inquisitrice, et il se dit que s’il n’y avait eu toutes ces blessures, toutes ces marques, s’il n’y avait eu tous leurs souvenirs affreux, elle aurait pu ressembler à une mère comme il y en avait à travers toute la galaxie.

Lloyd soupira, agita doucement le datapad qu’il tenait entre les mains.

- Mauvaise nouvelle. J’ai reçu un message du Major Arboghast. Celui que tu voulais allumer, tu t’rappelles ? Il m’informe que deux hommes ont été blessés gravement dans un exercice.

Ses prunelles rencontrèrent un bref instant l’étendue dorée, et il essaya de ne pas afficher de mine de type « je suis désolé ».

- Ça veut dire qu’il faut que j’y retourne. Une navette viendra me chercher demain. Mumkin ramènera le Sans Visage quand il ira mieux, d’ici… D’ici trois semaines à peu près, je suppose.

Il pinça les lèvres, essayant de ne pas ressentir de nouveau cette pointe de jalousie qui l’animait parfois, quand il pensait à son pilote et à sa louve.

- Il pourra t’amener où tu voudras, après ton temps de repos. Sur Melantha… Ou ailleurs.

Le feu sur la plage au loin s’était éteint. Les serpents l’avaient laissé mourir, comme il ne semblait qu’il n’y avait plus rien à fêter ou pleurer, qu’il fallait reprendre le fil de la vie malgré ce qu’on avait failli perdre pour les uns, malgré ce qu’on avait réellement perdu pour les autres. Lloyd laissait son regard dériver sur l’horizon du lac, et soudain cette nuit où Dana et lui avaient failli s’y noyer lui paraissait si lointaine. Et s’ils étaient effectivement morts, cette nuit-là ? S’ils s’étaient noyés au fond de l’eau, dans cette étreinte, son corps pressé contre celui de Dana, aurait-ce été si insupportable ?

- J’aurais aimé rester plus longtemps, dit-il pensivement, mais je suppose qu’il va falloir que tu subisses trois semaines de tendresse condensées en une nuit, du coup.

Lloyd baissa les yeux sur l’enfant qui tétait toujours, et ne put empêcher une légère grimace d’animer son visage.

- Bon, je vais préparer ton bain le temps que tu te débarrasses de ce parasite qui est en train de baver sur mon nom.

Il émit un dernier grognement en se levant, et il disparut entre les roulottes, d’un pas qu’il s’efforçait de garder léger.








Ruth avait eu la gentillesse de lui indiquer une roulotte libre, que son propriétaire acceptait de leur louer pour la nuit, pour qu’on pût laisser Mumkin se reposer tranquillement. Elle était désuète, comme toutes les roulottes. Les tissus arboraient des couleurs pastel, passées par des années de pluie et de soleil, mais un bac à l’arrière y était aménagé, caché entre de grands draps clairs. Une lanterne décorative et une guirlande colorée jetaient des lumières festives sur ce havre réservé à la propreté.

Quand Dana apparut enfin entre les voiles, le hapien avait rempli le bain d’une eau tiède, en mélangeant de l’eau bouillante des casseroles et de l’eau fraîche. C’était loin d’être du grand luxe – rien ici ne l’était, mais il avait pu trouver des huiles parfumées dans la roulotte pour donner le change.

- Bienvenue aux thermes de Jabiim, commenta Lloyd en se relevant après avoir vidé deux dernières marmites dans le grand contenant.

Il laissa choir les ustensiles, qui tintèrent contre le sol, pour s’approcher de Dana. Il avait retiré ses bottes pour rester pieds nus, et s’était débarrassé également de son tshirt, laissant voir le bandage qui serrait encore son bras, et les quelques cicatrices anciennes ou récentes que leurs aventures avaient laissé sur lui comme des marques indélébiles.

- Tu m’excuseras, j’ai oublié mon collier d’esclave, ma princesse. Mais je prendrai tout autant soin de toi, si tu me laisses faire.

Le hapien passa ses mains dans le dos de l’Inquisitrice pour mieux qu’elle s’approchât de lui, et déposa doucement un baiser sur ses lèvres, dont l’une était fendue. Et tandis qu’il l’embrassait, ses mains tâtonnèrent jusqu’à trouver les attaches de la brassière, afin d’en libérer le buste de Dana. Il détacha ses lèvres quand le vêtement tomba à terre, avant de s’attaquer tranquillement à son short, soutenant calmement le regard doré, la mine sérieuse.

- Et même si tu me laisses pas faire, d’ailleurs.

Il dut se baisser pour faire descendre le short sur les cuisses de l’Inquisitrice, emportant avec lui le sous-vêtement qui dissimulait les parties encore meurtries de la louve. Ce faisant, il déposa un baiser sur son ventre, un autre au creux de sa peau, entre son bas ventre et sa cuisse. Un dernier sur le genou, tandis qu’il libérait Dana de ses bottines.








Bien sûr, elle devait penser à leurs filles. Bien sûr, il y pensait aussi. Bien sûr, leur peine était si immense qu’elle lui donnait l’impression d’être en train de jouer une comédie absurde, hors de propos. Mais rien ne pourrait les soigner si facilement. Alors, il s’appliquait à oublier le malheur et la mort, à se concentrer sur l’élégance de la nuque de Dana, sur l’odeur des huiles parfumées qui se mariaient avec la couleur de ses cheveux alourdis par l’eau tiède, sur la sensualité de ses lèvres, sur les courbes qu’il voyait à travers les vaguelettes créées par ses mouvements appliqués.


- Quand la dragonne se sentira suffisamment propre et détendue, je la porterai dans son lit, et je l’y bercerai jusqu’à ce qu’elle s’endorme, chuchota-t-il près de son oreille. Qu’est-ce que t’en dis ?

Il déposa un baiser dans son cou, tandis que ses émeraudes vigilantes guettaient l'expression du visage de Dana, alertes, attentives comme un loup aurait amadoué sa proie.



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Alors seulement, elle s’était décidée à rejoindre son loup pour former une meute à deux.







Il restait encore des couche-tard, comme les membres du conseil du clan. Ils s’étaient réunis dans la roulotte de Zoraïda, pressés les uns contre les autres dans cet espace étroit et encombré. Vaklu jetait des regards suspicieux par-delà une petite fenêtre qui donnait une vue sur le grand vaisseau des Krayt à des centaines de mètres de là. De la lumière en jaillissait timidement. Seul Lartokh manquait à l’appel, occupé avec sa petite fille. Kalon s’ébroua comme il le put et prit la parole en premier :


- Mamy Zora. Mère. Faut que tu tranches clairement pour ces deux-là.

Des murmures d’approbations fusèrent dans les bouches et Zoraïda, les contemplait. Son masque brisé était posé sur la table devant elle, et chacun pouvait voir son visage meurtri.

- Je regrette le temps où votre père, Vashek, était encore de ce monde.

Un silence déférent suivit la mention honorable du patriarche, le grand-père de Mumkin, le père de bons nombres d’entre eux. Zora caressa la tête de l’un de ses immenses serpents, enroulés à ses pieds.

- Ils font partie de la famille de Mumkin, et Mumkin est notre famille, déclara-t-elle calmement. Ecoutez-moi bien, tous. Dans notre clan ceux qui enfreignent les lois sont considérés comme des moins que rien.

On approuva avec respect cet adage, mais elle n’avait pas terminé :

- Cependant, ceux qui abandonnent les leurs sont pires que des moins que rien.
- Comment ça ? osa Svan, clignant des yeux.
- Lloyd et Dana sont revenus, pour Mumkin. Sans doute pour les enfants. Ils ont enfreint les lois, mais ils n’ont pas abandonné le clan. Vashek aurait les aurait considérés comme des vrais serpents et c’est ce que je considère qu’ils sont. Tout comme Jyxo reste un serpent. Un serpent n’abandonne jamais un autre serpent. Nous sommes tous liés par le sang, par l’esprit de famille, c’est comme ça que nous avons toujours vécu, et survécu. Ils apprendront à se soumettre aux lois, avec le temps.
- Bon, Mamy Zora a tranché, fit solennellement Vaklu, et elle a raison. Le clan passe avant tout le reste et ces deux-là, aussi….bizarres qu’ils sont, ils font partie du clan depuis que Mumkin les a ramenés.
- Va falloir s’excuser chez Lloyd, annonça sagement Kinuux.

Un nouveau silence approuva cette marque d’humilité.

- Voici la liste que Dana m’a remise, dit Zoraïda en tendant un vieux datapad vers Vaklu, de choses à rassembler demain pour le départ des dragons.
- Où vont-ils ?
- Loin d’ici, sur un autre monde où le soleil règne en maître, tout le temps. J’ai vu dans les cartes que ce monde avait donné naissance à Dana et que son père y était roi. Une fois les choses rassemblées, Kraya les mènera là-bas, Jyxo a décidé de rester avec eux. Et vous, vous reprendrez les affaires.




Dana avait rendu Chanti à sa tutrice légitime après un rot pénible et de rigueur. La petite avait régurgité un surplus de lait dans le creux de l’épaule de sa « nourrice » et l’Inquisitrice s’en était débarrassée avec une petite moue dégoûtée sous le sourire amusé de Mercy. Derrière elle, dans la roulotte sans dessus-dessous de Goshgosh, Dan gazouillait paisiblement sur un grand lit double, et son père cornu le surveillait d’un œil terrible tandis qu’il remuait pauvrement le contenu d’une casserole sur le feu – obligé qu’il était par l’humaine de s’occuper de certaines tâches ménagères quand il était au campement. Il posait un regard paternel sur son fils et marmonnait qu’ils avaient bien du malheur d’être nés mâles dans l’entourage de Mercy et cette dernière le reprenait, disant qu’elle avait tout entendu. Dana avait fini par les laisser à leur intimité et se retrouver devant une roulotte fermée. Alors seulement, elle s’était décidée à rejoindre son loup pour former une meute à deux.



Dans le bain, cajolée par des dizaines de caresses, couvée par le regard émeraude d’un prédateur qui ne partageait ni son territoire, ni sa chasse, ni sa proie, elle se sentait aussi vulnérable que la bergère face au loup. Elle avait poussé soupir sur soupir, exprimant son bien-être soudain et le fait qu’elle aurait souhaité n’être à aucun autre endroit de cette Galaxie qu’ici, entre ces draps blancs, dans cette baignoire de fortune, sous les lèvres brûlantes de Lloyd Hope. Cependant, elle n’arrivait pas totalement à chasser de son esprit que demain, il partirait et ses entrailles se tordaient de contrariété à cet impératif.








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Des rideaux pâles laissaient filtrer la lumière des trois lunes, à quelques centimètres de leurs visages.












- … et ils vont s’en sortir comme ça, parce que personne n’a rien osé dire contre les propos de Mamy. Et Kinuux a même dit qu’il faudrait aller s’excuser auprès de Lloyd. Non mais tu te rends compte ?!

Svan avait allumé une cigarra, qu’il fumait à peine, occupé qu’il était à donner toutes ces explications à Kashiina, devant la roulotte où Dana avait mis au monde ses deux enfants morts. La jeune femme avait retiré ses chaussures et se prélassait sur une chaise en buvant une tisane aux odeurs épicées. Elle fronça un moment les sourcils, s’efforça de se réchauffer les doigts sur sa tasse brûlante.

- Dana dit que c’était son idée, je suis sûr qu’elle a menti pour le protéger. Et pour le fait qu’il est violent avec elle, il l’a reconnu quand on était en conseil avec lui, je te jure !

Kashiina leva les yeux au ciel et soupira.

- Svan… Dana est une grande fille. Si elle avait voulu se cacher de Lloyd, Mumkin aurait jamais ramené son patron ici.
- Désolé, mais Mumkin est con quand il s’y met, alors c’est pas une preuve. Je te dis qu’elle ment pour le protéger !
- Oui, peut-être. Et après ? Zoraïda a raison. Ça prouve qu’ils sont des nôtres, ce qu’ils sont capables de faire pour se protéger l’un l’autre. Et s’il était si terrible que ça, il en aurait voulu à Dana d’avoir perdu les enfants. A la place, il a juste été complètement paumé et il était prêt à les ramener. Il était juste prêt à n’importe quoi parce qu’il savait pas quoi faire, et elle avait sûrement pas envie de le perdre aussi après avoir perdu ses enfants. C’est difficile de les juger pour ça, Svan. On sait pas comment on aurait réagi à leur place.
- Tu vois ? Tu recommences, t’es prête à lui donner les dieux des serpents en personne comme si c’était lui la victime, tout ça juste à cause de sa génétique de charmeur, ce qui en soi est déjà malsain. On en parle jamais de ses origines hein ? Il paraît que les hapiens sélectionnent les enfants, les suppriment sur des critères de beauté. Alors un hapien Sith, qui reconnaît qu’il est violent, personne s’inquiète ? Elle est juste aveuglée ! Je suis certain qu’il la manipule, elle est prise au piège, je te dis, elle…

Svan interrompit sa tirade, ayant cru entendre quelque chose. En effet, un second gémissement lascif leur parvint, plus prononcé que le précédent. Kashiina fut soudain secouée d’un rire silencieux, et elle dissimula son sourire derrière une main pudique.

- Ah oui, dis donc, pouffa-t-elle, qu’est-ce qu’elle a l’air de souffrir !
- Non mais j’te jure ! Aucune discrétion alors qu’ils sont pas mariés.
- Depuis quand tu prônes la chasteté avant le mariage ? rétorqua-t-elle en haussant un sourcil narquois.
- Non mais quand même ! En plus dans son état…
- En parlant de mariage, le coupa Kashiina. Il serait peut-être temps qu’on parle de l’organisation du nôtre.

Svan grogna en se remettant à fumer.

- Ouais, ouais. J’ai juste pas la tête à ça en ce moment, tu comprends ?
- Tu as la tête à quoi ?

Il haussa les épaules, essaya d’ignorer le bruit lointain d’une éclaboussure.

- A la survie du clan. Toutes ces attaques… Et Mamy Zora vieillit. Je sais pas où on va comme ça.

Kashiina acquiesça gravement, puis elle se leva après avoir vidé les dernières gouttes de sa tasse. Elle repoussa la chaise pour dégager la porte de la roulotte et grimpa à l’intérieur. Elle se retourna un bref instant pour gratifier Svan d’un regard espiègle.

- Hé bien si maintenant tu considères que la chasteté avant le mariage compte, tu m’excuseras, je dois attendre que mon fiancé se décide à trouver le temps de se marier avec moi. D’ici là, bonne nuit de ton côté.
- Hé ! Attends !

Mais la porte de la roulotte s’était déjà refermée devant Svan, qui laissa échapper un gros soupir. Comme une cerise sur le gâteau, un nouveau gémissement, plus intense, se fit entendre. Il jeta sa cigarra au sol avant de s’éloigner en grommelant entre ses dents.









Dans le bain, les corps des deux Sith avaient fini par céder. Leurs jambes étaient restées entremêlées, et leurs fluides s’étaient mélangés à l’eau tiède, qui refroidissait. Ils étaient restés longuement silencieux, la tête de la louve reposant sur l’épaule de son loup. Peu à peu, il leur avait semblé que le camp tout entier les avait oubliés, comme plus aucun bruit ne provenait de l’extérieur, et que les lumières s’étaient peu à peu éteintes. Alors Lloyd avait fini par s’efforcer de se lever pour s’extraire du bain, emmenant Dana à sa suite. Il entoura l’Inquisitrice d’une serviette sèche et la frictionna doucement pour effacer l’humidité de sa peau, avant de la faire basculer dans ses bras pour mieux la porter jusqu’à la roulotte.

Quelques instants plus tard, à l’intérieur, il avait déposé Dana sur une couchette, avait terminé de la sécher avant de s’essuyer lui-même. Il déplia un drap, s’appliqua à l’étendre sur l’Inquisitrice comme pour masquer ce corps aux courbes qui semblaient l’appeler sans cesse, avant de se glisser dessous à son tour. Ils se retrouvèrent ainsi, étendus et serrés parce qu’il n’y avait pas vraiment de place pour deux, et un bras du hapien reposait en travers de la poitrine de l’Inquisitrice. Ses doigts jouaient avec une mèche de cheveux carmins, encore mouillée. La tête de Lloyd reposait sur un oreiller, ses yeux pensifs absorbés dans la contemplation du profil de Dana, et il n’avait aucune envie de dormir. Il avait voulu être tendre, mais sans savoir ce que cela voulait réellement dire, alors, il se contenta de déposer un baiser à la naissance de la nuque de l’Inquisitrice, comme il l’avait fait, si longtemps auparavant, sur une plage à quelques pas d’ici.

- Tu voulais me dire quoi ? chuchota-t-il comme il voyait que les paupières de Dana n’étaient pas fermées. Tu es tombée… ?

Un silence accueillit sa question. Il se retourna un bref instant, le temps d’éteindre la petite lumière, et ils furent soudain plongés dans l’obscurité. Lloyd reprit sa position initiale, chercha à tâtons la mèche avec laquelle il jouait sur le drap pour en reprendre possession. Il se remit à contempler le profil de Dana, qui se découpait désormais dans la pénombre. Des rideaux pâles laissaient filtrer la lumière des trois lunes, à quelques centimètres de leurs visages.

- … tombée bien bas en fricotant avec un hapien déloyal ? Ou… tombée de haut en te rendant compte qu’il était pas de sang noble ? Ou bien, tombée dans son piège qui s’est refermé sur toi et duquel tu pourras plus jamais sortir ?

Il déposa un doigt sur ses propres lèvres, faisant mine de réfléchir intensément.

- Ou tombée du lit, ça je sais, tu le fais aussi sur le Sans Visage, je t’ai entendue. C’est pour ça qu’il faut dormir dans la couchette du capitaine avec lui, par sécurité.

Il sourit, puis soudain se redressa sur un coude en fronçant les sourcils, pour pouvoir la regarder dans les yeux.

- Tombée sur des choses compromettantes sur le Sans Visage ? J’avais pas réalisé que du coup Mumkin et toi aviez voyagé sans moi. Ce qui me fait penser à…

Il s’humecta les lèvres, baissant soudain son regard incertain. Le Sans Visage, ces derniers temps, n’avait fait que lui rappeler des instants cruels. Il y avait passé tant de temps de sa vie. Son vaisseau avait été un refuge, le seul endroit où il pouvait à peu près dormir, où personne ou presque ne mettait les pieds à part Mumkin, jusqu’à ce qu’une Inquisitrice débarque dans leur vie, et que sa couchette soit éclairée d’une guirlande rouge, et qu’il y pleure comme un enfant abandonné.

- T’as fait quoi du kimono ?

Les deux émeraudes cherchaient de nouveau l'étendue dorée, une lueur désemparée les faisant subitement s'écarquiller.

- Tu l'as jeté ?



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En fait, elle se mentait à elle-même.









- Je voulais dire un truc absurde dans ce genre-là, ouais, rétorqua-t-elle avec un léger sourire moqueur mais ses yeux trahissaient autre chose. Dans cette tempête de tendresse, elle avait été emportée, elle avait failli lui confesser ce qu’elle ressentait depuis toutes ces années, qu’elle n’avait jamais verbalisé, ni devant un miroir, ni devant lui, ni devant qui que ce soit. Un frisson agita son derme palpitant que le drap recouvrait et elle se conforta contre lui, se ménageant un nid confortable, absorbant sa chaleur.

L’évocation du kimono lui fit froncer les sourcils subitement et elle se redressa à son tour, sur un coude, pour lui faire face, le provoquer, son minois à quelques millimètres seulement du sien. Et la louve était prête à montrer des crocs.

- Tu veux dire celui que t’as jeté dans la cabine invitée en mode on se débarrasse d’un encombrant ?

Une moue boudeuse froissa ses traits, puis elle se laissa finalement retomber sur l’oreiller et fixa le plafond avec intensité comme si elle pouvait y déchiffrer les bons mots. Son cœur se contractait douloureusement au souvenir de ce carton qu’elle avait aperçu à son réveil sur le Sans-Visage, d’où débordait un peu de soie rouge. Elle aurait aimé brûler le vêtement avec la photographie, avec la guirlande, qu’il s’envole en fumée que plus jamais il ne puisse lui être jeté à la figure comme il l’avait été ce jour-là.

- Ben je l’ai récupéré, souffla-t-elle finalement en lui jetant un regard amer. Et quand je dors dans la cabine du capitaine, il m’en chasse. Je ferai plus cette erreur. C’est moins douloureux de tomber du lit et de s’écraser la gueule par terre que d’être rejetée tout entière, ok ?

Sa voix était tendre, malgré les reproches.

- Lloyd, appela-t-elle soudainement et ses prunelles dévièrent vers celles du hapien, cherchèrent le vert familier dans toute cette pénombre. Merci.

Sous le tissu qui les recouvrait, ses doigts rampèrent jusqu’à la main de Hope qu’elle enlaça dans la sienne, tendrement. Dans l’obscurité de la nuit, on distinguait encore cette marque foncée sur sa joue, qui s’étalait comme un lac difforme et sa cicatrice blanche, à la lèvre, ressemblait à un croissant lunaire qui surplombait cette étendue. Toute sa figure, tant de fois meurtrie, n’était qu’un tableau de ce qu’ils avaient traversé.

- Je sais pas comment le dire en fait, alors merci. Ca va si tu repars demain.

Ca n’allait pas du tout.

- Darth Runà m’a généreusement octroyé trois semaines de repos, je vais surveiller Mumkin et…me reposer.

En fait, je vais prendre un transport satunda prochain, jusqu’à l’astroport et je retournerai sur Kaas City. Mais elle n’était pas prête à l’inquiéter alors qu’il allait retourner à sa nouvelle vie. Elle avait envie qu’il ne se soucie plus de ce que pourrait devenir Dana Shar. Elle n’avait plus envie d’être un encombrant. Elle ne s’octroierait aucun repos, se reposer n’avait plus de sens maintenant que ses jumelles n’étaient plus là.

- Mumkin te ramènera le Sans-Visage, après ça et je serai là, sourit-elle.

Elle mentait. En fait, elle se mentait à elle-même. Elle se racontait des histoires auxquelles elle n’avait pas droit. Aller sur le Melantha, sous la protection de Lloyd Hope, ne se soucier que de le satisfaire. Elle souhaitait croire à cette histoire-là ; elle avait le désir de la vivre, alors elle ajouta :

- J’irai sur Melantha, comme tu me l’as demandé y’a quelques jours. Je veux que tu me montres cette dernière femme de ta vie, dans ses moindres recoins intimes. T’es un Sith, un commandant, personne…t’empêchera d’avoir ton Inquisitrice à bord, hein ?

La réalité était plus dure. Darth Runà ne permettrait jamais une telle extravagance. Ellemenacerait de mettre ses avertissements à exécution, l’Inquisition retrouverait Mat’aenna, la ramènerait dans ses geôles et Dana. Oh, Dana serait priée de presser la détente et d’exécuter la twi’lek et on rapporterait à Lloyd comment elle avait froidement exécuté sa compagne de toujours, celle pour qui il avait survécu à des années infernales. Mais ses doigts disaient tout autre chose tandis qu’ils s’entremêlaient régulièrement à ceux du hapien, tendres et sincères.

- J’ai appris à coudre, je broderai l’écusson de ta frégate sur ta veste impériale, promit-elle. Et…

A son tour, elle le surplomba, perchée sur un coude et ses boucles écarlates balayaient les traits du Sith, comme un rideau de soie colorée.

- Je veux que tu m’invites à la prochaine cérémonie, je t’obligerai pas à danser, je resterai un peu loin, pour te regarder dans ton bel uniforme de Capitaine et pour applaudir. Je serai fière ou quelque chose comme ça. Je chanterai Melantha. Qu’est-ce que t’en dis ? C’est peut-être pas assez Sith, mais qu’est-ce que j’y peux, je suis un peu ratée, j’suis un peu comme ça.

Il irait aux grandes cérémonies, celles réservées aux officiers, aux commandants Sith. Les lumières étincelantes de milliers de néons précieux heurteraient sa chevelure blonde, son visage parfait, découvriraient les profondeurs de ses yeux émeraudes. Il y aurait peut-être Mat’aenna, ou peut-être qu’il serait seul. Dana, durant ce temps, se vautrerait dans la boue et la sueur, pour exécuter le sale boulot, quelque part dans l’ombre. Elle continuerait à se salir les mains, de s’enfoncer un peu plus dans l’Obscurité. C’était ce qui l’attendait dans la réalité morose de sa vie d’Inquisitrice et d’apprentie Sith.

- Est-ce que je suis moins jolie, moins ton genre avec cette horrible et moche trace de blaster sur ma figure ? Tu sais…avant, j’avais pas de cicatrices. J’étais vraiment jolie, à ce moment-là. C’était avant Korriban, mais tu dois pas t’en souvenir.







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Un écrin pour un joyau.





Lloyd se laissait bercer par le son de la voix féminine, envoûtante, ses yeux émeraudes posés sur les lèvres qui remuaient à chacun des mots. Sa respiration s’était ralentie et s’il avait fermé les yeux, le sommeil l’aurait pris plus paisiblement, peut-être, qu’il ne l’avait fait depuis des années. Mais malgré la fatigue des derniers jours, il voulait garder les yeux ouverts, il voulait voir les lunes de Jabiim les bénir tous les deux de leur lumière pâle et discrète. Il avait l’impression que Dana et lui étaient sur un radeau qui dérivait, qu’ils avaient échappé à la noyade après des heures à suffoquer dans l’horreur, à craindre d’être ensevelis vivants sous le sable avec leurs deux filles. Il lui semblait même sentir parfois le radeau balloté par des remous, à cause des mille créatures qui les guettaient encore, juste en dessous, mais ce n’était que le vent, qui agitait parfois légèrement la roulotte.

- J’en dis que ça sonne beaucoup trop parfait pour être vrai, murmura-t-il.

Sa voix basse s’était enrouée. Le bout de ses doigts jouaient toujours avec la mèche carmine et il fronça un instant les sourcils en regardant la tâche sombre dont Dana parlait, sur sa joue.

- On s’est pas connus avant Korriban, protesta-t-il, incertain.

Ce n’était pas possible, de toute façon : avant Korriban, il était la majeure partie du temps dans la République pour plusieurs années, et avant ça, quand il avait rejoint l’Académie, Dana devait avoir quoi… Neuf ou dix ans, au maximum.

- Et tu es pas jolie, désolé de te l’apprendre. Tu es glorieuse. Et magnifique. Comme une princesse. C’est pour ça que les serpents et les dragons te respectent. Ils voient ça, chez toi.

Et lui, qu’avait-il vu ? Et quand ? Il ne savait plus très bien. Il avait vu des marques dans le cou d’une Inquisitrice à l’arrière d’un pub. Il avait entendu un Croc qui lui avait glacé le sang en haut d’un immeuble. Il avait senti les frappes invisibles de Darth Runà lors de ses invectives contre son apprentie, dans un manoir. Pourquoi était-ce ce qui lui avait permis de voir Dana ? Il ne le savait pas. Tout ce que son cerveau lui servait dès qu’il était loin d’elle, de toute façon, c’était ce fichu canon de blaster inséré entre les lèvres féminines et un coup de pied dans ce ventre où logeaient deux invisibles petites filles.

Le visage du hapien avait paru se fermer un instant mais en rencontrant l’étendue dorée il sembla être rappelé à la réalité et il eut un bref sourire en coin.

- Et moi… Moi j’en ai beaucoup trop vu pour pouvoir oublier, et beaucoup trop goûté pour pouvoir renoncer, mon addiction. Surtout avec ce kimono que j'aimerais bien remettre dans ma cabine, avec la femme qu'il y a dedans le plus vite possible.

Comme pour ponctuer ses propos, Lloyd rapprocha son visage de celui de Dana et ses lèvres se pressèrent contre la cicatrice, la forçant à rabattre sa tête sur l’oreiller. Il respira son air, chercha de l’oxygène dans sa bouche, chercha à boire ce que la langue de Dana voulait bien lui offrir, quelques instants. Il en profita pour l’entourer davantage de ses bras, la serrer contre lui, emmêler ses jambes aux siennes comme si leur corps avait pu fusionner.

Ils se figèrent ainsi, et le baiser se tarit, le visage du hapien au-dessus de celui de l’Inquisitrice, et quand il rouvrit les yeux ils se faisaient toujours face. Il était redevenu sérieux.

- J’ai pas voulu te virer de ma couchette, je croyais que tu m’avais quitté, grommela-t-il. D’ailleurs, ajoute-ça à la liste des interdictions. Interdiction de quitter la couchette du capitaine pour une autre couchette, interdiction de quitter le capitaine pour… n’importe quoi d’autre.

Mais sa voix n’était pas si ferme que lorsqu’il avait fait la liste de ce qu’il ne voulait pas, dans la jungle, au cours de sa tentative désespérée pour faire d’elle sa prisonnière définitive. Il avait été trop brusque, trop entier. Il avait appris qu’il faudrait jouer plus finement. Construire un écrin pour un joyau, nuit après nuit. Qu’il n’y ait plus de Callum, plus d’Aarian, plus de Raidun, plus de Svan, plus personne d’autre que lui.

Soudain il ferma les yeux, posant son front dans le cou de Dana et son corps se détendit, échoué, à demi sur celui de l’Inquisitrice.

- Dis-moi encore comment tu m’accompagneras aux cérémonies, comment tu t’accrocheras à mon uniforme, comment tu chanteras Melantha, souffla-t-il. Comment tu feras des trucs pas très Sith juste pour moi.



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Parfaitement compatibles. .










Elle admira quelques longues secondes les traits lunaires du capitaine, cherchant des mots pour compléter son histoire, mais au travers de ses prunelles vertes, elle apercevait déjà ce qu’elle devait conter. Un sourire lui échappa, déformant sa cicatrice pâle et elle ancra ses doigts tendres dans la chevelure blonde, invitant Lloyd à se reposer contre elle, à ne pas pas quitter la chaleur de son cou palpitant de vie. Elle avait envie de lui dire qu’il n’avait pas assez goûté, pas assez vu. Elle souhaitait qu’il la goûte encore, toujours, qu’il la voit tout le temp, à jamais.

-J’aurais une robe de la couleur de tes yeux, débuta-t-elle d’une voix qui n’était qu’un chuchotement. Émeraude. J’aurais voulu avoir encore ce bracelet que tu avais fabriqué ici, ya longtemps. Je l’aimais beaucoup ce bracelet, il aurait été parfait. Je voudrais pas d’autres bijoux que lui. Je partagerai un verre avec toi, mais un seul...parce que t’es un alcoolique.

Et son sourire se répercutait dans ces mots.

- Puis après, toi dans ton bel uniforme et moi dans ma robe émeraude, on irait dans ta cabine. C’est là que je chanterai Melantha, pendant que tu deserreras ton col que j’aurais ajusté trop de fois au cours de la cérémonie. Ya que toi qui entendra ma chanson. Melantha, elle chante que pour son officier, il paraît. On boira encore un verre ensuite. Puis y’aura plus d’uniforme, plus de robe. On passera une nuit de débauche et de tendresse.

Elle prit une profonde inspiration, veillant à ne pas gêner le confort du Sith dont le souffle ruisselait chaudement le long de sa gorge alors qu’il respirait paisiblement, étendu sur elle, dans cette minuscule couchette qui avait bien voulu les accueillir cette nuit. De sa main libre, elle pinça le bord du drap et le remonta davantage sur les épaules de Lloyd, avec l’appréhension absurde qu’il puisse avoir froid.

- Ce verre de vin artorien que tu m’as proposé ya presque un an sur le Sans Visage, avant Artorias, j’ai vraiment envie d’y goûter. Pas dans ton crâne bien sûr et sans vinsha.

Le silence prit le pas sur la voix basse de Dana. Elle dévia sa figure vers la fenêtre de la roulotte et les reflets lunaires furent capturer dans L’or de ses prunelles. Le poids chaud du hapien sur elle la réconfortait et lui offrait un sentiment de sécurité. Elle avait l’impression agréable qu’il ne pourrait rien lui arriver en sa présence et elle souhaitait se noyer dans cette sensation confortable.

- Tu te rappelles vraiment pas alors ? Avant Korriban, le soir au Lagon Noir ? Demanda-t-elle avec une pointe d’embarras, le coeur pincé de déception.

Autre silence et on entendait la respiration fuyante et régulière du loup. Elle fronça les sourcils et pencha la tête du mieux qu’elle put pour l’observer, découvrant ses yeux clos aux longs cils blonds, son air endormi, sa joue remontée sous son oeil alors qu’il avait conforté sa tête contre le sein gauche de Dana, ses lèvres endormies veillant sur son propre nom. Ses doigts dessinèrent une caresse dans la chevelure claire et elle se laissa aller contre l’oreiller. Elle était épuisée aussi, mais dormir, c’était précipité une nouvelle séparation. Alors elle combattit le sommeil de toutes ses forces et continua de parler.

- Je t’avais pas quitté. Faut que tu saches, que j’suis pas vraiment une louve. C’est....j’ai pas brisé mes chaînes comme toi. En fait, j’suis pas aussi forte que toi, c’est pour ça. C’était toujours moi qui perdais les combats à l’Académie ou qui me faisais fracasser le visage. Runà elle a encore ma laisse et j’ai un collier invisible autour du cou, un truc que....c’est pas possible d’en venir à bout avec un tournevis ou un peu de bricolage. Elle....m’a ordonné de te laisser partir, sur Astroballe. J’avais pas le choix, je pense pas l’avoir un jour. C’est pas grave. C’est dans l’ADN Shar de se sacrifier pour une cause plus grande. Alors voilà, faut que tu saches que je veux pas que tu me quittes non plus.


Ses pensées ne se coordonnaient plus correctement et le sommeil menaçait donc de remporter cette manche. Elle finit par soupirer puis ferma les yeux, régulant les battements soudainement effrénés de son coeur pour les mettre au diapason de Hope. Qu’étaient-ils l’un pour l’autre finalement ? La réponse avait-elle seulement de l’importance ? Il y avait Lloyd Hope, il y avait Dana Shar. Ils allaient comme les deux faces d’une même médaille. Le reste ne comptait plus. Elle avait souvent de H. quand la vie ne l’avait pas encore complètement brisé, quand il restait un espoir pour elle de retrouver le meurtrier de Damaya Shar. Elle s’était vue rendre justice à sa sœur aînée, puis épouser H. par n’importe quel moyen. Elle avait conçu son avenir ainsi. Mais elle n’avait pas retrouvé le Jedi responsable de la perte de Damaya. A la place, elle avait trouvé le Sith, elle ne l’avait pas épousé, probablement qu’elle ne se marierait jamais avec. Tant de choses avaient changé. Mat’aenna était apparue et Dana avait expérimenté le chagrin, la résignation. Elle n’était plus si naïve, plus depuis son passage chez les Lames Rouges qui avait achevé ce qui demeurait de l’adolescente en elle.

Ses bras entourèrent les épaules couvertes du hapien et elle le pressa doucement contre elle avant d’accepter que le sommeil n’arrache définitivement la victoire.




















Elle avait connu sa première vraie nuit de repos depuis son accouchement. Un repos que son corps acceptait de bonne grâce, brisé par chacune des limites qu’on lui avait imposé de franchir. Il lui semblait que la Force n’avait cessé de résonner dans l’obscurité de son sommeil, la Force de Lloyd en particuliers, son âme emmêlée à la sienne comme l’étaient leurs corps nus. Parfaitement compatibles.

Le réveil la cueillit avec sa maladresse habituelle. Le soleil teintait l’intérieur de la roulotte de coloris pastel, filtrant à travers les tentures amincies par l’usure. Elle bascula sur le côté, son coeur loupa un battement alors qu’elle s’apprêtait à chuter au sol, mais des bras l’avaient cueilli aussi rapidement et elle avait évité la collision. Ses yeux encore un peu endormis rencontrèrent ceux bien éveillés de Lloyd Hope et elle se mit à rougir de gêne parce qu’elle était encore tombée, parce qu’elle était nue et que lui portait déjà son uniforme. Il l’aida à se relever et elle passa une main dans sa propre chevelure, délayant ses boucles emmêlés par le sommeil. De son autre bras, elle tira le drap de la couchette et l’enroula autour de ses courbes. La pudeur n’avait pas provoqué ce geste absurde, simplement le besoin de sentir leurs parfums mélangés sur ce tissu tiède, seul témoin de leur tendresse.

- Si...ahm, si t’attendais que je me réveille pour me dire au revoir, et bien c’est...c’est apprécié, lâcha-t-elle en se rasseyant sur le petit lit. Un pauvre sourire émergea sur sa figure blessée.

Dehors quelques clameurs annonçaient que le campement s’était réveillé. Parfois, des rires d’enfants frôlaient la roulotte qui les hébergeaient. Des éclats de voix adultes ne tardaient pas à suivre. On demandait aux petits de laisser les poulets tranquilles. Dana se pinça les lèvres et se releva pour se rapprocher de lui, drapée de sa robe de fortune. Ses doigts s’appliquèrent à arranger le col de l’uniforme du capitaine de Melantha, parce qu’il était hors de question qu’il se présente à sa fonction avec un col défait et qu’elle avait envie de prendre soin de lui.

- C’est absolument pas comme la dernière fois, ok ? Pas d’adieu. On se reverra.








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Lloyd Hope
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Un bracelet, un magnétophone, un petit mot.





Le hapien avait rouvert les yeux avant l’aube, éveillé par il ne savait déjà plus quel rêve sordide. Il écouta longuement la respiration apaisée de Dana, profitait de la sensation de chaleur et de douceur que leur peau l’une contre l’autre lui procurait, se rappelait les derniers mots que l’Inquisitrice avait prononcé. L’avait-on jamais bercé ainsi, avec de si jolies histoires ?
Au-dehors, le camp était parfaitement silencieux. Alors, quand les premières lueurs de l’aube éclairèrent les roulottes, il sortit du lit avec précaution, remontant le drap jusqu’aux épaules de Dana avant de quitter la roulotte à pas de loups.

Il avait récupéré ses quelques vêtements, laissés au bord d’un bain dont l’eau était devenue froide, mais n’avait pas enfilé sa veste, qu’il avait laissée sur les marches de la roulotte. Puis il rassembla les quelques objets qui lui appartenaient et qu’on avait sorti de la motospeeder, pour former un paquetage où entre autres, son datapad côtoyait son sabre laser et son comlink. Enfin, comme personne n’était encore levé dans le camp, il en profita pour s’éloigner, longeant la plage, en direction de la forêt.








- J’ai… J’ai un truc sur ma frégate.

Sa voix avait à peine porté dans le vent. Jabiim déversait encore, comme une vieille habitude, quelques gouttes fines qui striait la peau du hapien, fonçait son tshirt, s’insinuait entre ses mèches blondes. Il était à genoux devant le petit monticule de terre et ses yeux fixaient la pierre plate qu’il avait dressé au-dessus de l’emplacement. La pierre était désespérément vide de la moindre inscription.

- Je vous le ramènerai, dit-il d’une voix blanche. Pour que… Pour que vous ayez… Quelque chose.

Il pencha la tête sur le côté, les yeux absents.

- Quelque chose qui était vrai, précisa-t-il. Et ils… Ils veilleront sur vous. Ok ?

Personne ne lui répondit. Ses yeux tombèrent sur ses propres mains, où il serrait un petit objet, et il se décida à s’en séparer. Il se pencha pour déposer l’objet au pied de la pierre.

- Je reviendrai. Faites attention à votre mère, en attendant. Soyez sages, mes petites... mes petites filles.

Sur ces derniers mots sa voix se serra et il ravala ses larmes en se relevant, avant de s’éloigner à pas vifs, comme si l’air frais pouvait l’aider à faire comme si de rien n’était.

Au pied de la tombe, une petite poupée resta assise, adossée contre la pierre sans inscription, à fixer le paysage qui s’étalait devant elle, comme un témoin.








Quand il était revenu au camp, on avait sorti les poulets. Goshgosh fumait déjà de l’herbe de jash, assis sur les petites marches de sa roulotte, tandis que Ruth était occupée à laver des draps dans un bac à côté de la sienne. Les fenêtres des roulottes étaient ouvertes et on entendait, ci et là, le tintement des tasses de café, le grésillement des holonews que l’on captait à peine. Lloyd se hâta d’enfiler sa veste d’uniforme, la poitrine serrée d’appréhension, avant d’aller retrouver sa petite louve, qui endormie et manquant de tomber de sa couchette, n’avait plus l’air si enragée que ça.

Il pinça les lèvres en la serrant contre lui.

- Plus jamais d’adieu, murmura-t-il.

Du bout de deux doigts, le hapien saisit un pan de drap qui couvrait l’Inquisitrice et arracha doucement cette robe improvisée, qui s’écrasa au sol pour la laisser nue. Alors il l’enlaça de nouveau, ses mains traçant lentement une caresse tendre tandis qu’il la serrait de nouveau contre son uniforme. Et il se mit à l’embrasser, d’un baiser qui n’était pas un adieu, mais une promesse de ce qu’il adviendrait d’elle, quand le Sans Visage l’amènerait à la rencontre de Melantha.






Il aimait quand elle était nue et lui non. Il se sentait privilégié.











Une navette s’était posée à proximité du camp dans la matinée, et le hapien l’avait rejointe au pas de course avec son petit paquetage sous le bras. Il était parti sans dire au revoir aux serpents. Qu’aurait-il dit, de toute manière ? Il leur avait déjà dit ce qui comptait : il les avait menacés s’ils touchaient à un cheveu de Dana, à une corne de Mumkin. Il n’y avait rien de plus à dire. Il se figurait qu’à part Tih, personne ne serait triste qu’il ait disparu aussi subitement.

Il n’eût pas le temps d’y réfléchir. A peine eût-il posé le pied sur Melantha, une heure plus tard, que les officiers affluèrent, pour lui parler de tel problème, pour lui faire le compte-rendu de telle opération, pour lui rappeler que telle instance attendait une réponse. Ses quelques jours d’absence semblaient s’être transformés, sur la frégate, en une longue file interminable de problèmes à résoudre, d’individus à rencontrer, de décisions à prendre.









La journée fut longue. Dans l’espace, il n’y avait plus vraiment de jour et de nuit. Il ne savait combien d’heures s’étaient écoulées lorsque, se frottant les yeux, il éteignit l’écran de son bureau et annonça à Subol qu’il serait indisponible quelques heures. Il retourna dans la cabine du commandant, hagard, et il sembla la traverser sans la voir. Il jeta ses affaires en travers d’une console, pour aller droit vers le bureau qui jouxtait la couchette, et ouvrit un tiroir.

Les trois objets s’y trouvaient toujours depuis qu’il les avait mis là : un bracelet, un magnétophone, un petit mot. Il s’en empara et alla s’asseoir sur son lit. Ses yeux parcouraient la lettre, qu’il connaissait déjà pourtant par cœur, dans l’espoir d’y déceler un indice nouveau.

Je et elle, nous aurons toujours un œil sur toi. Les Djiilo. Les Cartels.

Ton vaisseau dérive.


Il laissa retomber le mot sur ses genoux. Le bracelet sentait toujours l’alcool. Ses doigts caressaient lentement les corps entortillés des serpents. De son autre main, il actionna le petit appareil et la voix d’une Inquisitrice désespérée s’en échappa. Il connait aussi chaque mot. Comme chacune de ses phrases plantait une lame dans son cœur, lui rappelait qu’elle avait été heureuse, qu’il était devenu pour elle supportable d’être séparée de lui. La frustration se mêlait à la haine, au désespoir. L’enregistreur pourrait éternellement diffuser la voix de Dana : quand l’appareil serait obsolète, quand il ne serait plus possible de le recharger, quand les bandes seront trop usées pour diffuser quoi que ce fût, la voix de Dana resterait vivide et cinglante, dans ses entrailles, dans sa tête. Il se repasserait tout cela en boucle, pendant le temps qu’il faudrait.

Et il réfléchirait de son misérable intellect.

- Oh, mon vaisseau va continuer à dériver, t’en fais pas, souffla-t-il comme pour lui-même. Je vais tellement dériver jusqu’à toi, ma pauvre Max.

Il se laissa tomber en arrière, et resta étendu sur la couchette, tout habillé. Il lui semblait encore sentir la main de Dana arranger son col. Une main qu'il avait failli perdre, à cause d'elle.




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