Darth Hope
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L'Agonie des Krayt

Dans le secret d’une roulotte à peine éclairée, on se lançait des regards éteints.








- On est arrivé ?
- Ouais ! souffla Mumkin en sautant hors de la navette-speeder pour en faire le tour et décharger les affaires de l’Inquisitrice. Le conducteur besaslisk lâcha un rot purulent avant de se détourner, sans même prendre le temps de quitter le siège conduceur où il était enfoncé :
- Bon, tous les satunda à…
- Ca va, on sait ! maugréa le dévaronien qui aidait maintenant Dana à débarquer du véhicule.


A quelques mètres en contrebas au bout d’une route mal entretenue, le campement des Serpents s’étendait comme une étoile colorée et par-delà ses dais et le toit de ses nombreuses roulottes, un lac scintillant sous la lumière grise de Jabiim. Dana soutenait son ventre devenu lourd et imposant. Après cette longue à travers l’Empire, qui avait duré des jours, elle prenait enfin la mesure qu’elle devait se reposer, prendre soin de ses bébés, loin des tumultes de l’Inquisition, des guerres, du danger. C’était une pause, une occasion de regagner sa tanière pour lécher ses plaies en toute sécurité. Dans leur dos, la navette-speeder démarra dans un bruit de pétarades annonçant des pannes à venir. Ensemble, le duo dévala la route, s’engouffra dans le nid et attirait sur son chemin de nombreux enfants, des animaux domestiques. Mumkin portait les caissons de la Sith à bout de bras, s’essoufflant et tentant de chasser les poules qui s’empressaient de caqueter autour de ses jambes.

- MUMKIN EST REVENU ! hurla Liam qui sauta contre Dana, l’étreignant de ses bras de grand enfant. Tih sautillait derrière lui et quand ils atteignirent enfin le centre du campement, de nombreux visages familiers s’étaient rassemblés. Parmi eux, le masque élégant de Mamy Zora et le visage rayon d’une Chechi que la grossesse comblait.
- B’jour Mamy Zora, grimaça le dévaronien en déposant lourdement les bagages.






















- Nan, nan je reste pas, affirma le cornu en buvant son premier verre d’alcool d’une traite. J’ai juste conduit Dana, j’dois repartir mais j’reviendrai pour l’accouchement de Chechi, c’est quand déjà ? Dans six mois ?
- Deux mois ! se renfrogna son beau-frère qui le resservait déjà en alcool.
- Oh le bantha…
- Bon, tu repars satunda alors, confirma Vaklu. C’est dommage, tu vas rater le retour de Jyxo.
- Quoi Jyxo ? Mais nan, tu me fais marcher ?
- Nan, il revient pour affaires, avec quelques gars des Krayt.
- Affaires ? Bah…Goshgosh sait pas aller chez eux pour s’en occuper ? J’dois pas te rappeler la dernière fois que y’a eu des Krayt ici hein ?
- Ca va, on gère, insista Vaklu. Ils viennent pas pour ce genre d’affaires. Ils ont des problèmes et cherchent une alliance pour leur chef.
- On va leur vendre une femme ?! dit Mumkin les yeux étrécis. J’te rappelle comment ça a fini la dernière fois ?

Un silence religieux s’installa autour de la petite table, dans la pénombre de la roulotte. Ils étaient tous collés les uns aux autres à cause du manque de place. Rilc claqua sa langue contre son palais, étouffant une insulte.

- On leur vend pas, rectifia l’aîné en fustigeant le pilote d’un regard avertisseur. Ca s’appelle sceller une alliance. Jyxo sera leur garant, il est de la famille. Ecoute, on est pas assez nombreux et eux non plus. En plus, les Saphirs, ils ont réussi à absorber le clan des Pluies, c’est l’une des plus grosses communautés itinérantes et ils sont ennemis des Krayt, tu comprends ou pas ? Y’a ptetre une guerre qui se prépare, faut qu’on assure nos arrières, il en va de notre business. En plus, les autorités impériales, ces temps-ci elles sont sur les dents, y’a déjà eu plusieurs descentes dans des clans.
- Ok, ok, non mais ça va, admit Mumkin qui en était maintenant à son troisième verre. Mais pas d’entourloupe avec Dana ? J’dois vous rappeler que le patron a failli m’ouvrir en deux pour des conneries avec elle la dernière fois.
- Bah, il sait qu’elle est là ?
- Eeeh, pas exactement. Bon si vous voulez tout savoir, elle a pris la fuite voilà. J’pense qu’ils se sont séparés mais moi, c’est pas mes affaires.

Quelques-uns secouèrent la tête et l’alcool coula de nouveau dans les verres des uns et des autres. On se mit à boire à la santé du futur petit de Chechi, du retour de Jyxo. L’honorable Jyxo, et le héros qui avait réussi à s’emparer d’une femme dragonne, sans se faire dépecer.








- T’inquiète pas, Mumkin nous a tout dit, tu peux rester autant que tu veux, déclara Ruth qui aidait Shar à ranger ses affaires.

Ruth avait aménagé sa roulotte. Depuis le départ de Mercy qui avait épousé Goshgosh entre temps, elle avait libéré une place conséquente, assez pour aménager un grand lit dans le fond de la pièce où les deux lits superposés trônaient auparavant. Elle y dormait avec Kashiina mais il y avait largement l’espace pour une troisième personne. Au-dessus des oreilles aux broderies colorés, la fenêtre de la roulotte était ouverte et lassait entrer une brise rafraîchissante, car avec l’humidité de Jabiim les températures pouvaient devenir étouffantes à l’intérieur.

- Alors, le père est..Llord, c’est ça ?
- C’est compliqué.
- Bah moi je ne trouve pas, c’est bien lui qui a glissé enfin…son..tu sais quoi, tu sais où.
- Oui, mais je veux dire…il n’y a que moi et mes bébés maintenant. Je vais les élever seule ou un truc comme ça.
- Je vois….mh, tu pourrais peut-être leur trouver un père ici, déclara sagement Ruth en lui servant un verre d’eau parfumé aux herbes apaisantes.
- Ce sera pas nécessaire.
- Tu devrais t’allonger maintenant, cette…route en navette-speeder à moitié délabré, ça a dû secouer tes bébés comme pas permis, dors un peu.
- Ouais…merci.

Dana n’avait pas prévu de plan particulier. Elle se disait qu’elle donnerait naissance à ses deux bébés, qu’elle leur laisserait quelques mois pour grandir, être robustes et retournerait sur Dromund Kaas. Elle louerait peut-être un appartement ou quelque chose s’apparentait à un foyer, elle engagerait une domestique pour s’occuper de ses enfants quand elle travaillerait pour l’Inquisition. Et après, peut-être, elle les ramènerait sur Ch’Hodos. Elle se laissait aller dans la literie confortable, soupirant ses rêves et ses appréhensions, caressant son ventre. Deux princes pour Ch’Hodos, ou deux princesses.




Quelques jours plus tard, alors que Mumkin était déjà reparti, une agitation peu commune tira Dana Shar du sommeil. La matinée était déjà bien avancée et elle fronça les sourcils. Elle se dépêcha de sortir du lit, d’enfiler un grand châle autour de ses épaules frêles, pour cacher sa petite tenue de nuit. Ses pieds nus s’enfoncèrent dans la terre meuble de Jabiim et elle suivit le fil des clameurs vers le rivage où on avait dressé des dais, comme un jour de fête. Un rassemblement d’une dizaine de personnes faisait un bruit important ; elle reconnut Vaklu, Rilc, Kalon, Ruth, Mamy Zora et de parfaits inconnus ; quoique ce dévaronien cornu lui disait quelque chose : un air de famille avec Mumkin, sans doute un cousin. Il accompagnait deux hommes. Le premier était âgé, son visage marqué était surplombé de deux cornes dévaroniennes mais il était bien différent de ceux du clan des Serpents, notamment parce qu’il avait une haute stature et beaucoup de cicatrices sur le visage. Son compagnon semblait plus jeune, moins abimé par l’âge et les combats et il était humain.

- Dana ! s’exclama soudainement Ruth en la voyant, mais qu’est-ce que tu fais-là et dans cette tenue !

L’humain inconnu se détourna en même temps que tous les autres et avisa la jeune femme à la longue chevelure flamboyante et au visage pâle drapée dans un grand châle bariolé. Et elle était comme une apparition dans la matinée pluvieuse de Jabiim, le derme coloré par les reflets des tentures étendus au-dessus de leurs têtes.

- J’ai entendu du bruit, c’est comme un genre de réflexe.
- Allez viens, tu vas attraper froid, déclara Ruth en passant un bras autour des épaules de l’Inquisitrice pour la guider en direction du campement.
- Qui sont ces hommes ?
- Ils sont du clan Krayt, c’est une longue histoire, ils sont là pour affaires. Tu devrais être en train de dormir ! C’est pas sérieux.
- Le clan Krayt ? répéta Dana. C’est pas…c’est pas là qu’est le cousin de Mumkin, Jyro ?
- Jyxo, oui, répondit Ruth en pressant le pas. Il a épousé la sœur du dévaronien avec toutes ces cicatrices sur le visage. Ils doivent discuter de trucs importants.
- Et l’humain ?
- C’est leur chef, dit rapidement la doyenne alors qu’elles arrivaient à sa roulotte. Bon, repos maintenant. Et ça suffit les questions. Je vais te préparer un truc à manger, tu dois mourir de faim.




























Puis les semaines avaient passé, sans qu’elle ne revoit, ni n’entende parler des Krayt. Elle avait appris à lâcher prise, à ne plus se réveiller en sursaut dès qu’un bruit extérieur envahissait son sommeil. On l’avait accueilli à bras ouverts, exceptée Mamy Zora qui ne lui adressait la parole, ni ne la croisait. Dana avait appris des chants, et on lui avait montré de quoi occuper ses mains et son esprit sans se fatiguer : elle n’aurait jamais pensé être capable de faire un truc aussi absurde que de la couture ou de la broderie. Parfois, elle s’installait sur un siège, près du rivage et devait simplement surveiller une poignée d’enfants un peu turbulents. Et elle se demandait si les siens seraient aussi agités.


Un châle élégant retenait sa chevelure écarlate qui captait les rares rayons solaires de Jabiim en cet après-midi nuageuse. La lumière du soleil perçait des trouées à travers la couche de nuages sombres et traversait les dais étendus au-dessus du campement des Serpents. On pouvait apercevoir la plage et le lac immense à la surface sombre et paisible. Allongée dans son lit, Dana palpait constamment son ventre rond, désespérée. Ses gestes froissaient le tissu léger de sa tunique de nuit. Elle était à la recherche d’un choc, d’une sensation infime, car il n’y avait plus eu d’agitation dans son corps depuis quelques jours auparavant. Parfois, elle se réveillait en sursaut la nuit, pensant sentir un coup, mais ce n’était qu’un rêve, une impression fantôme et fugace qui s’éteignait dès qu’elle ouvrait les yeux.










BANG.












BANG.










Deux coups contre la porte de la roulotte. Dana eût à peine le temps d’émerger qu’on défonçait la porte. Des silhouettes sombres, qui lui parurent flous derrière ses yeux encore endormis, surgirent à l’intérieur, lui empoignèrent les bras pour la tirer du lit sans ménagement, la faire chuter au sol. Une poigne s’arrima dans sa chevelure et elle fut traînée dehors. A l’extérieur, l’air frais du matin la vivifia et elle comprit avec horreur qu’autour d’elle, des femmes criaient, des enfants pleuraient. Elle distinguait enfin les uniformes impériaux qui saccageaient le campement pour en faire sortir les familles. Les quelques hommes qui n’étaient pas partis la veille pour affaires avaient résisté en vain. Ils étaient maîtrisés au sol, menottés et impuissants, face à la tragédie. Des fusils blasters étaient braqués sur leurs têtes ensanglantées par les coups. Les soldats les avaient tous rassemblés au centre du campement, Mamy Zora y compris qui était agenouillée au milieu de femmes, non loin de Dana.

Mercy hurla quand un militaire lui arracha le petit Dan des bras. Le cœur de Shar se mit à éclater dans sa poitrine. Elle voulut bouger mais la poigne gantée dans ses cheveux tira davantage pour la maintenir en respect. L’Inquisitrice avait l’impression de vivre un cauchemar éveillée, d’être de l’autre côté du miroir, dans le camp des exécutés. Cette sensation la terrifiait. Mercy ne s’arrêtait pas de crier, suppliant qu’on lui rende son bébé mais on la fit taire d’un coup de pied en plein ventre. Enfin, un officier se dégagea des tuniques noires impériales pour s’avancer parmi tout ce petit monde :

- Je suis le Colonel Vollen, des services spéciaux de leurs Excellences Sith (il faisait référence au Conseil Noir), se présenta-t-il d’une voix claire.

Il n’était pas très grand, mais dans la force de l’âge pour un humain. Les services spéciaux, se questionna Dana, ça voulait dire quoi. Les renseignements ? Elle eut un vertige. Les mots du colonel s’emmêlèrent dans des sons incompréhensibles qui semblaient lui provenir d’un autre monde. Elle leva les yeux vers le dais jaunâtre dont les fils lui parurent flou. Elle entendit Sa vision redevint claire, les paroles froides de l’officier percutèrent ses oreilles, comme un brusque retour à la réalité.

- Il y a quelques jours, on m’a appris que vous avez accueilli un fugitif chez vous. Callum, chef du clan Krayt , accusé pour de nombreux délits dont…propagande anti-impériale, recèle de marchandise illégales, anti-impériales, meurtre au premier degré d’un officier impérial.
- Attendez ! cria Dana. Je suis Inquisitrice, lâchez-moi.

Il sembla la considérer dans le silence soudain que son cri avait provoqué.

- Et vous êtes ?
- Dana Shar, de l’Inquisition Sith.

Elle aurait aimé utiliser la Force, mais son corps expérimentait une telle fatigue ces temps-ci, qu’elle peinait à rassembler son don en suffisance. Plus la grossesse avançait, plus la Force l’abandonnait, comme une eau fuyante, pour se réfugier dans son ventre et tenter de protéger la vie qu’elle abritait.

- Parfait, on va commencer l’interrogatoire par vous.

Il se dirigea d’un pas ferme vers elle, la gifla et l’empoigna par le bras pour la redresser sèchement.

- Surveillez-les. Celui qui essaie de s’échapper, tuez-le.
- Oui, mon Colonel.
- A nous deux, jolie Inquisitrice, ricana-t-il en la traînant vers le rivage.

Elle résista en vain. La force brute de l’homme était plus grande. Elle trébuchait, peinait à suivre le rythme qu’il lui imposait le long du rivage et comprit soudain qu’il se dirigeait vers la forêt. Il ne s’enfonça pas bien loin dans la végétation sombre. Il plaqua Dana contre le premier arbre venu et elle s’appuya sur l’écorce rugueuse, essoufflée et pantelante, récupérant sa respiration.

- Où est Callum ? fit-il dans son dos et elle entendit le son d’une ceinture que l’on débouclait. Elle se mit à paniquer.
- Vous faîtes une ERREUR !

La Force tressaillit à peine : elle aurait pu soulever une feuille avec, mais pas le repousser ou l’attaquer.

- Je vais te faire regretter cette descente ! hurla-t-elle subitement, folle de rage.
- L’allure d’une dame, les paroles d’une catin. Je choisis la catin, déclara-t-il sombrement en se plaquant à elle, pour retrousser sa tunique de nuit d’une main avide. Tu parleras pendant

Elle s’agita pour résister, mais il saisit sa chevelure rousse et lui cogna le front contre le tronc, dans un choc qui faillit lui faire perdre connaissance. Des larmes d’impuissance et de colère affluèrent à ses yeux dorés alors qu’elle le sentait prêt à la faire sienne. Elle ferma les paupières et rien ne vint. Un mouvement avait jailli des branchages et une silhouette s’était abattue sur l’officier, libérant Dana. Cette dernière se dépêcha de rajuster sa tunique et se détourna pour reconnaître l’humain qu’on lui avait présenté comme le chef de clan des Krayt. Il avait une chevelure sauvage et claire qui s’agitait alors qu’il administrait plusieurs coups au visage de Vollen, jusqu’à le plonger dans l’inconscience. Il se redressa et admira Dana.

- Il faut pas rester ici. Retourne au campement.
- Toi ? Mais qu’est-ce que tu fais là et…
- Je vais faire diversion pour chasser les soldats loin d’ici, lâcha-t-il avec désinvolture en soulevant le Colonel pour le jeter par-dessus son épaule.


Le pas de Dana était chancelant, elle longeait le rivage hagard et brisée par la souffrance. Entre ses jambes fébriles, sa chemise de nuit était humide et collante. Une tâche sombre s’étendait sous son ventre rond : un mélange de sang, de liquides maternels qui s’échappaient de son corps. Au campement, les soldats avaient battu en retraite quand Callum avait surgi, le corps de leur officier en otage. Il avait « emprunt » l’une des motospeeder des Serpents et les impériaux l’avaient pourchassé vers l’Est. Kashiina avait encore des marques de coups sur la figure et elle soignait pourtant les quelques hommes d son clan qui avaient vaillamment tenté de s’opposer à ce contrôle brutal. Ruth réconfortait Mery, sur les marches de sa roulotte quand elle aperçut l’Inquisitrice revenir, blafarde, les mains pleines de sang alors qu’elle avait tenté de retenir tout ce liquide qu’elle perdait.

- Dana ! se précipita-t-elle en la prenant par les épaules. Tu perds les eaux, viens…Kashiina !
- Ruth…je…
- Shhh…shh ça va aller…
- Je vais mourir ?
- Non, bien sûr que non….allez, viens…ça va bientôt commencer.


















Etendue sur une couche défaite, Dana ressemblait à une poupée aux membres désarticulés. Elle gisait sans un bruit, les yeux clos et les joues pâles. Une tunique blanche froissée était retroussée sur ses cuisses écartées. Le sang maculait son derme suant et tâchait les draps clairs. C’était une tradition chez les Serpents, chaque femme devait mettre bas dans une literie immaculée afin de mesurer la quantité de sang expulsée lors de l’accouchement et de prévenir les cas de délivrance ; un mot qui cachait la terrible réalité de la mort en couche, souvent provoquée par des hémorragies abondantes. Dans le secret d’une roulotte à peine éclairée, on se lançait des regards éteints.

Les cris de l’Inquisitrice avaient résonné une bonne partie de la nuit, comme une supplique adressée aux trois lunes de Jabiim. Elle avait fait de son mieux, encouragée par Ruth et Kashiina qui l’avaient prise en charge dès les premières contractions survenues au coucher du Soleil. Shar n’avait jamais ressenti une douleur plus intense que celle qui avait déchiré ses entrailles et brisé son bassin. Elle n’aurait jamais pensé que donner la vie rapprochait autant de la mort et elle avait cru mourir à chaque poussée. Des heures plus tard, le calme régnait.

Plus de hurlements féminins. Pas un cri innocent. Aucun pleur. Juste le corps abîmé d’une mère que la souffrance avait réduite au silence. Elle divaguait, agitée par une légère fièvre et ses paupières frémissaient. Assise à ses pieds, sur le bord de la couchette, Ruth retenait ses larmes, un petit corps recroquevillé dans ses bras aux centaines de bracelets colorés. En face d’elle, Kashiina terminait d’envelopper une autre forme chétive dans une couverture, après l’avoir lavée et séchée.

- Dana…souffla Ruth d’une voix douce et triste. Dana…ce sont deux petites filles.
- Deux…filles…répéta la Sith, incapable de bouger, les muscles endoloris, mais un sourire tendre hantait ses lèvres.
- Oui…déclara la brune en déposant la première tout près de Shar.

Kashiina se pencha pour placer à ses côtés, le deuxième bébé. Les deux êtres minuscules avaient les yeux clos, le derme légèrement bleuté et ils étaient immobiles. La mère déposa sur eux un regard inquiet, passant le bout de son index contre l’une des joues rebondies et encore tières.

- Elles…ne bougent pas…
- C’est parce que…(Ruth adressa une œillade déchirante à Kashiina qui secoua la tête). Parce qu’elles ne sont plus de ce monde, Dana. Elles sont….elles ne respirent pas.

Sur les deux petits fronts, quelques mèches claires et blondes s’éparpillaient. Dana plaqua son nez contre ces visages éteints et tellement fragiles, huma le parfum de ses bébés qui refroidissaient de minute en minute.

- Elles ont froid…il faudrait, plus de couverture…
- Dana, reprit Ruth, les yeux embués de larmes. Dana, là où elles sont maintenant, elles n’ont plus besoin de couverture.

Dana passa un bras tremblant autour de ses progénitures pour les ramener contre elle.

Que devenait-on quand on accouchait de morts-nés ? Dana Shar pouvait-elle se qualifier de mère alors qu’elle n’entendrait jamais la voix de ses deux enfants, ni ne croiserait leurs prunelles dont elle ignorerait la couleur. Ses réflexions l’empoisonnaient alors qu’elle aurait voulu les presser contre elle pour toujours, les ramener en son sein, leur promettre de les garder en elle plus longtemps, de les protéger jusqu’à ce qu’elles soient capables de venir au monde, pleines de vie et fortes. Son doigt caressa les lèvres violacées de la première née. Elle arrivait déjà à les distinguer, malgré leur ressemblance parfaite ; c’était un peu comme un secret entre elles. Dana saurait toujours qui est l’une, qui est l’autre.

- Dana…il faut leur dire adieu…
- Je crois qu’elles ont faim, non ? demanda la Sith en levant ses yeux fatigués vers les deux femmes. L’étendue dorée était voilée d’une fièvre délirante.
- Ruth, elle a perdu beaucoup de sang.
- Je sais mais…il faut lui laisser le temps d’encaisser le choc…
- On a pas le temps, elle risque de….

De l’extérieur leur parvinrent des clameurs d’échauffourées. Ruth fit signe à sa protégée de veiller sur Shar et quitta la roulotte. A peine eût-elle refermer la porte, descendu la petite volée de marche qu’elle aperçut un rassemblement que les candélabres obsolètes du campement éclairaient. Vaklu et Kalon empoignaient une silhouette familière par les bras, pour l’empêcher d’accéder à la caravane et l’humaine fronça les sourcils. Mumkin était planté à côté avec son air désolé et il faisait des gestes pour tenter quelque chose.

- Llord ?! Mais…Kalon, qu’est-ce que vous faîtes ?!
- On l’empêche de défoncer la porte de ta roulotte bordel !
- Mais vous êtes complètement fous ! s’exclama Ruth, exaspérée soudainement. C’est quoi cette agitation…Dana a besoin de repos et….elle ne va pas bien ! la dernière chose qu’il manquait c’était évidemment une bagarre devant la roulotte où elle encaisse sans doute le choc le plus douloureux de toute sa vie !
- Quoi le choc ? émergea Svan du lot après avoir donné une dernière taloche à l’arrière du crâne de Lloyd, comme un avertissement. Mais Vaklu et Kalon ne démordaient pas.
- Les…bébés ont pas survécu, avoua-t-elle les yeux maintenant emplis de larmes.

La mauvaise nouvelle calma tout le monde. Sous la stupeur, Vaklu et Kalon lâchèrent l’hapien d’un seul coup.








CSS par Gaelle




Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Ils l’avaient salué selon les codes de la Marine Impériale, et il leur avait rendu leur salut solennel.





- Mum…

Dans le cockpit du Sans Visage, le hapien s’était subitement levé du siège de copilote, dans lequel il avait veillé, seul, dans une pénombre tranquille. Ils étaient restés longuement en orbite de Dromund Kaas, à cause de fichus retards dans les contrôles de cahiers des charges des chantiers navals, mais soudain le visage pâle de Lloyd s’était peint d’un ébahissement inattendu. Il eut le réflexe de se pencher pour mieux y voir, collant presque son nez au transparacier pour mieux distinguer les formes qui se découpaient dans l’espace noir autour de la planète-capitale de l’Empire.

- MUM ! MUM VIENS VOIR !! cria-t-il.

Dans son dos, quelqu’un grommela, puis les pieds traînants du dévaronien se rapprochèrent. Il contourna Lloyd, et à son tour regarda ce qu’il y avait à voir.

- Oooh, fit Mumkin religieusement.

Sous leur nez, une forme immense s’approchait, emplissant leur champ de vision comme un bâtiment majestueux : une proue longue et effilée, d’immenses pans de métal étincelants, immaculés, et une poupe massive où l’on devinait, sous des appendices volumineux, les batteries de canons redoutables. Et plus le vaisseau se rapprochait, plus immense il paraissait. Le Sans Visage paraissait être si minuscule qu’une coque de noix flottant dans l’espace et menaçant d’être englouti par l’une des excavations du bâtiment colossal.

- C’est elle, souffla Lloyd. C’est Melantha.

Le nez du cornu alla du vaisseau au hapien, et du hapien au vaisseau.

- Elle est… Heu… Sympa, hésita Mumkin.
- Tu rigoles ? Elle est magnifique.
- Mmh, ouais.

Lloyd décrocha enfin ses yeux de la frégate pour regarder le dévaronien à ses côtés, qui visiblement ne partageait pas tant que ça sa fascination.

- Tu te rends pas compte ?? Elle fait plus de trois cent mètres de long pour cent quatre-vingt de hauteur. HUIT canons à ions, Mum ! Y’a plus d’un millier de gens qui vont être là-dedans ! Dont des escadrons de chasseurs !
- Ah ouais, c’est sûr, c’est impressionnant. T’es sûr que tu vas t’y retrouver ? Non parce que quand tu rentres bourré t’as du mal à trouver ta cabine tout seul sur le Sans Visage alors là-dedans…

Le hapien colla ses poings sur ses hanches, mais il n’était pas fâché.

- Vas-y accouche.
- Quoi ?
- C’est quoi, le problème ?
- Nan mais rien.

Lloyd sourit. Sous ses cornes inclinées, Mumkin lui jeta un regard susceptible. Le patron souriait pas souvent habituellement, mais en ce moment, c’était encore plus suspect.

- C’est vrai, j’ai oublié un truc. Attends-moi là.

Le dévaronien prit un air plus dégagé pour regarder Lloyd sortir du cockpit.

- T’as oublié quoi ? demanda-t-il en élevant la voix pour qu’elle porte dans la coursive.

Mais le hapien ne répondit pas tout de suite. Il avait disparu dans sa cabine quelques instants, où s’entassaient quelques cartons pleins. Puis il revint dans le cockpit avec un petit objet dans les mains, qu’il présenta sous le nez du pilote.

- Tiens regarde, c’est l’écusson de Melantha.

Le morceau de tissu épais et rigide, grand comme la paume d’une main, représentait le symbole de la Marine Impériale, en rouge sur fond noir, au centre duquel était brodé le nom de la frégate. Une petite épingle permettait de fixer l’écusson.

- Ah ouais, sympa, grommela Mumkin.

Mais le hapien avait toujours sourire aux lèvres, et il s’occupa d’accrocher l’écusson à la poitrine du dévaronien.

- Qu’est-ce que tu fais ?
- Ben, j’ai oublié de te dire, toi aussi t’as reçu une promotion.
- Hein ?
- Ouais, t’es le pilote de la navette personnelle du commandant de Melantha.

Après avoir accroché et arrangé l’écusson, Lloyd tapota l’épaule de Mumkin, dont les yeux étaient devenus ronds comme des billes.

- Attends, pour… Pour de vrai ? Je… Je viens avec toi et tout ?
- Pour de vrai, confirma le hapien. T’auras même un badge pour accéder à des zones dans lesquelles seuls les proches du commandant peuvent entrer, et à bouffer gratuitement tous les jours. Félicitations.

Il y eut un silence, et soudain le visage du dévaronien se fendit d’un large sourire, qui courait d’une oreille à l’autre – affreux à voir, et pourtant réjouissant, d’une certaine manière.

- J’pourrai manger au mess ?? Genre avec les femmes officiers et tout ?
- Heu… Ben avec les officiers tout court, ouais.
- OUAIS ! MERCI !!

Mumkin enlaça subitement Lloyd en lui bloquant les bras avec un petit rire étrange et lui colla un gros bisou sur la joue. Le hapien supporta cette effusion de joie avec une grimace dégoûtée.

- Ouais par contre tu fais plus jamais ça.
- Ouais ouais pardon, fit le dévaronien en lâchant son patron, qui s’essuya la joue d’un revers de manche.
- A bord de Melantha faudra me vouvoyer, hein. Pas d’embrassade, pas de blague douteuse, pas de… Enfin en fait si tu peux éviter d’ouvrir la bouche en présence de qui que ce soit ce sera parfait. Et tes cargaisons douteuses, c’est terminé.
- Terminé ? Hé mais comment j’vais…
- Ton salaire va être mieux, t’auras plus d’excuse. Non, je rigole pas, Mum. Pas à bord de mon vaisseau, je vais devoir donner l’exemple. Je serai intransigeant, ok ?

Le dévaronien haussa les épaules.

- C’est pas faux.












Quelques jours plus tard, le hapien avait débarqué à bord de la frégate flambant neuve, en uniforme de cérémonie, où il avait été accueilli par toute une batterie d’officiers propres sur eux. Beaucoup d’humains, mais aussi d’autres espèces. Ils l’avaient salué selon les codes de la Marine Impériale, et il leur avait rendu leur salut solennel, avant qu’il fût emmené faire le tour complet du bâtiment.

Passer en revue des troupes, serrer des mains, étudier et réétudier des plans, compulser des rapports, écouter chaque membre de l’équipe de commandement se présenter, visiter des locaux techniques et écouter la présentation de chaque équipement, aller faire du sport avec les soldats pour leur montrer que même le commandant de bord faisait sérieusement ses séances, passer sa visite médicale d’aptitude, programmer les manœuvres d’entraînement, faire ses rapports à l’Etat Major, prendre un café avec l’un ou avec l’autre, apprendre à connaître son équipage, expliquer et réexpliquer l’importance de chacun à bord, l’importance de rendre Melantha opérationnelle le plus rapidement possible.

Et chaque soir, s’écrouler sur la couchette de sa cabine, sans avoir même suffisamment d’énergie pour se traîner jusqu’à son bureau où un droïde avait laissé des provisions, et se réveiller quelques heures plus tard dans la même position, le corps fourbi, le visage voilé par la fatigue, et se relever, prendre une douche.

Recommencer. Passer en revue des troupes, serrer des mains, étudier des plans, compulser des rapports, écouter les officiers, visiter des locaux, courir, planifier les manœuvres, enregistrer ses rapports, prendre un café avec l’un ou l’autre, expliquer, réexpliquer.

Les jours s’écoulèrent subitement à une vitesse folle.














Enfin, une vitesse folle…

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… pas pour tout le monde. Mumkin s’ennuyait ferme. Le Sans Visage était stationné dans l’une des baies d’atterrissage, où le ballet des chasseurs qui sortaient et entraient chaque jour avait rapidement lassé le dévaronien. Il n’avait pas vu le patron depuis le premier jour, et était bien décidé à faire la tronche à l’occasion, mais souvent il compulsait l’holonet sur son datapad et ne pouvait s’empêcher d’envoyer des images humoristiques à Lloyd en s’esclaffant dans le petit cockpit. Mais très vite tout redevenait calme dans le petit habitacle et il soupirait.
Il n’y avait plus de nexu, plus de droïde, et il ne trouvait pas la compagnie des soldats très amusante. Il avait bien essayé de draguer une ou deux officiers, mais dès qu’il annonçait fièrement qu’il était le pilote du commandant de bord, elles n’arrêtaient pas de lui poser des questions ou de faire des remarques au sujet du hapien. Le capitaine Hope par-ci, le capitaine Hope par-là, bref, la pêche était mauvaise.

Mais il bouffait gratuitement, et il gagnait deux fois son précédent salaire. Alors, il rêvassait au cadeau qu’il allait pouvoir offrir à Chechi avec tout cet argent, pour fêter la naissance de son bébé.

Qui s’appellerait peut-être Mumkin.













- … dont la capacité a été utilisé à 88%, ce qui est bien en deçà de nos tentatives précédentes, et qui n’est pas conforme à la doctrine de l’Etat Major. En revanche, les délais cette fois ont été respectés, à part pour l’unité d’artillerie beta, expliquait un kel dor du nom de Chea Utuzz à travers son masque respirateur.

Comme les autres officiers autour de la table de réunion, le kel dor avait la mine fatiguée. Au-dessus de la table noire à la surface élégante, trônait une carte holographique où de minuscules symboles se déplaçaient en clignotant, jetant des lueurs bleues et rouges sur les visages. En plus du hapien et du kel dor, trois humains, une zabrak et un duros : l’équipe rapprochée de Lloyd, qu’il apprenait encore à connaître. S’ils étaient si épuisés, ce n’était pas tant qu’ils avaient mal dormi ; c’était qu’ils n’avaient pas dormi du tout. Ils venaient de réaliser une manœuvre de vingt-deux heures consécutives, et les résultats n’étaient pas totalement au rendez-vous. L’équipage, lui, pouvait organiser des rotations pendant leurs manœuvres qui leur permettaient de se ménager des temps de pause et de sommeil, mais pour les membres du commandement, il n’y avait pas de repos possible.

Le hapien se laissa aller dans son fauteuil, passant une main dans ses cheveux en soupirant. Derrière lui, de longues baies donnaient sur le pont de commandement, où s’affairaient techniciens et enseignes.

- On manque d’entraînement, conclut-il dans un grognement acerbe. Qu’est-ce qu’elle a, à la fin, l’unité beta ?
- Je vais aller me renseigner, mon capitaine, claironna Narih.

Emia Narih avait près d’une quarantaine d’année, le teint mat, les cheveux noirs et courts et le visage volontaire, la voix tranchante. Le grain de beauté au coin de son œil était la seule chose qui adoucissait son visage sévère.

- Bien, lieutenant.
- Les délais, ce n’était pas tant le problème, enchaîna Nande, le plus vieux d’entre eux, dont les tempes grisonnantes et le crâne dégarni attestaient d’une expérience importante. Les délais ça se travaille avec le temps. Mais ce problème de charge énergétique est anormale, on perd la même quantité sur chaque canon. Il n’est pas exclu que cela puisse être un défaut à l’assemblage.

Lloyd fronça les sourcils.

- Les canons ont tous été vérifiés avant la sortie des chantiers navals, remarqua-t-il. Cela paraît hautement improbable.
- Je peux faire ordonner aux unités techniques de faire une révision complète et de mesurer toutes les tensions des différents modules, pour essayer de comprendre d’où cela peut venir, répondit Utuzz avec un air contrit, mais ils l’ont déjà fait la semaine dernière.
- Non, non, laissez tomber. C’est inutile. Il faut qu’on réfléchisse. Qu’on compare les données avec un appareil similaire. Lieutenant Subol, Melantha est la seconde d’une série de six frégates. Vous pouvez me retrouver les cinq autres, savoir si elles sont en service et me mettre en relation avec chacun des commandants ?
- Bien sûr, mon capitaine, acquiesça le duros en pianotant sur son datapad. D’ailleurs, je suis navré de devoir vous passer ce message hors de propos, mais votre… Hum… Monsieur Mumkin vient de m’envoyer un message. Il dit que c’est une urgence, qu’il vous a envoyé quelque chose.

Le hapien porta la main à sa poche pour en extraire immédiatement son datapad. Il avait effectivement reçu des messages, mais habituellement le dévaronien lui envoyait des bêtises et il ne prenait guère le temps d’y répondre. Lorsque ses prunelles se posèrent sur les mots qui illuminaient l’écran, son visage se décomposa. Il s’humecta les lèvres, hésitant. Les officiers échangèrent des regards incertains. Lloyd posa brusquement son datapad à plat sur la table avant de se redresser pour croiser les mains devant lui.

- Bon, vous avez bien travaillé. Les troupes également. Dites-le-leur. Nous venons de faire six semaines consécutives de manœuvres et d’entraînement, avec des progrès importants malgré ce problème persistant. Tout le monde a besoin de se reposer et tant que je n’aurai pas des réponses plus documentées, ça ne sert à rien de refaire des tentatives à part nous épuiser et gaspiller les consommables inutilement. Donc : on fait une pause. Soixante-douze heures off pour le groupe des opérations.

Les officiers parurent se détendre.

- Vous pouvez disposer, annonça-t-il, et il se leva avant eux pour quitter la pièce d’un pas rapide.

La porte coulissa immédiatement à son approche et il disparut dans un couloir. Les officiers restants attendirent quelques instants, avant que Narih ne laissât échapper un long sifflement de délivrance.

- Oooouuuuh, on l’aura bien mérité, celle-là. Je vais dormir vingt-quatre heures d’affilée, je vous jure.
- Pfeuh, ce n’était rien ça, lieutenant. Vous verrez, lors des batailles, vous serez bien plus épuisée que cela. J’ai fait des batailles qui ont duré plus d’une semaine, à ne pas pouvoir fermer l’œil plus de trois heures de suite !
- En attendant, il est pas très théâtral, pour un Sith. Quand on n’y est pas arrivé, la première fois, je m’attendais à… J’sais pas.
- Ouais, ben c’est pas moi qui vais m’en plaindre. Les têtes qui tombent pour un oui ou pour un non, j’ai jamais vu l’intérêt.
- On verra si y’a pas des têtes qui tombent le jour où on aura un vrai ennemi en face. D’ici là, je s’rais vous, je me méfierais.

Tout le monde parut d’accord avec cette dernière remarque, et les officiers se dissipèrent à leur tour.







- MUM !

Le hapien avait couru jusqu’à la baie d’atterrissage A4, où le Sans Visage détonait avec sa forme atypique au milieu des chasseurs proprement alignés. La passerelle était ouverte et Lloyd était entré à l’intérieur comme une tornade.

- MUM ? T’ES OU ?
- Là, là !

Le dévaronien émergea de la coquerie, un pot de crème à la main.

- Bonjour monsieeuuuur… Comment vous vous appelez ? J’peux vous renseigner ? singea-t-il en traversant la coursive pour rejoindre le hapien.
- Fais pas l’con, c’est quoi cette histoire de dragons et de descente impériale ? Que fout Dana sur Jabiim ?!
- Ben, c’t’une longue histoire, elle avait b’soin d’un endroit tranquille et, tu sais comme on est dans le Clan, on est accueillant avec la famille, alors Dana c’est pas vraiment de la famille mais en même temps, vu qu’toi t’en fais un peu partie et qu’tu l’as engrossé, bon, j’pouvais pas refuser…
- Viens-en au fait, Mum ! s’insurgea Lloyd en élevant la voix.
- Ben les faits, c’est qu’il faut qu’j’y aille tout de suite, parce qu’apparemment y’a eu une descente, et qu’un colonel s’en serait pris à Dana pendant qu’elle accouchait, et Mamy Zora craint qu’il puisse y avoir des représailles…
- Elle accouche ??

Le dévaronien leva les yeux au ciel en avalant une bouchée de glace.

- Ben… Oui, c’est ce qui arrive à la fin d’une grossesse, Lloyd.

Mumkin passa devant le hapien pour rejoindre le cockpit. Les moteurs du Sans Visage étaient déjà en route, Lloyd sentait la vibration de l’appareil sous ses pieds. Il suivit le dévaronien qui s’installait déjà dans le fauteuil de pilotage.

- Donc bref, j’y vais tout de suite, leur donner un coup de main, on sait jamais, ils pourraient revenir, et je veux vérifier que Chechi va bien mais tu m’as dit qu’il faut que je prévienne quand je m’en vais, alors voilà, j’te préviens. Tu veux que je dise un mot à Dana pour toi ?
- Nan.

Lloyd s’était pris la tête entre les mains et il quitta le cockpit.

- BEN, « FELICITATIONS », CA POURRAIT ETRE BIEN QUAND MEME ! cria Mumkin pour couvrir les moteurs et que le hapien pût l’entendre depuis la passerelle. J’SAIS QU’T’ES OCCUPE AVEC TON NOUVEAU JOUJOU M’ENFIN CE SERAIT PLUS POLI DE…

Mais il s’interrompit car il entendit la passerelle se refermer avec un Clong caractéristique. Mumkin soupira bruyamment.

- Bon ben j’improviserai comme d’habi…
- J’viens avec toi. Démarre.

Le dévaronien posa son pot de glace sur le tableau de bord avant de se retourner. Lloyd revenait dans le cockpit, blême.

- T’es sûr ?
- On est à peine à quelques parsecs on peut y être en quoi ? Six heures ?
- Ouais, à peu près, c’est un coup de bol qu’on soit dans le secteur de Tion parce que…
- DEMARRE BORDEL !
- Oui oui bon ben ça va…

Le hapien se laissa tomber dans le fauteuil du copilote avec un soupir, avant de se frotter les yeux. Le Sans Visage décolla avec son bourdonnement si familier, et il parut se jeter hors de Melantha dans l’espace noir. Le cockpit s’assombrit, silencieux tandis que Mumkin, concentré entrait les paramètres de vol. Soudain, après des semaines à courir dans un bâtiment immense à parler à mille et une personnes, il était là de nouveau, dans un minuscule cockpit, en compagnie d’un dévaronien pas très professionnel.

- Alors, elle est si sexy que ça, cette Melantha ? fit le pilote au bout d’un long moment.

Comme Lloyd ne répondait pas, Mumkin tourna vers son patron sa mine interrogative.

Le hapien s’était avachi dans le fauteuil et dormait à poings fermés.








Il avait eu l’impression qu’il avait à peine fermé les yeux quand le dévaronien l’avait réveillé. Il avait froissé son uniforme, et des cernes alourdissaient ses yeux, mais le souvenir des explications confuses de Mumkin suffisait à animer son esprit embrumé. Il avait payé pour louer deux motospeeders depuis l’astroport, puis ils s’étaient jetés dans le paysage de Jabiim, dont les couleurs étaient un peu différentes des quelques sept ou huit mois qui s’étaient écoulés depuis sa dernière visite au camp des serpents. Mais le hapien n’avait de préoccupation que leur destination. Il leur fallut parcourir quelques centaines de kilomètres dans une fin de nuit claire, parsemée de gouttes fraîches qui s’abattaient sur leurs visages, s’insinuaient dans les cheveux du hapien, dégoulinait doucement sur ses vêtements inadaptés à une telle virée.

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L’aube était en train d’éclaircir le ciel d'un rose éclatant quand enfin, il reconnut la forêt, le lac, la route défoncée, le camp aux roulottes groupées. Les motospeeders s’arrêtèrent à l’entrée du camp en jetant des gerbes de sable, comme l’un et l’autre s’empressaient de descendre. Le hapien courut dans le camp, le sang battant à ses tempes, Mumkin sur ses talons qui lui criait quelque chose qu’il n’entendait plus, et pourquoi une telle panique, soudain ? Il ne le savait pas lui-même. Il avait la sensation d’une catastrophe imminente – n’aurait-il pas dû dire à Dana d’abandonner cette folie ? Revoir Dana, c’était déjà une folie. Mais cette agression, cette descente, ces nouvelles l’avaient brusquement jeté dans une agitation fébrile, une émotion brute qu’il avait cru avoir commencé à effacer de sa vie après des semaines à s’immerger dans le travail – mais à la moindre annonce, il avait accouru.

- Hé !

Vaklu et Rilc attrapèrent Lloyd par les épaules pour l’arrêter, quand le hapien cherchait dans tous les sens, à la recherche de la roulotte, cette roulotte-là, pourquoi ne la trouvait-il plus ?

- Laissez-moi passer ! Il faut que j'vois Dana !

Il essaya de se dégager mais les deux dévaroniens tinrent bon avant d’être aidés subitement par une nuée d’autres personnes. Lloyd reconnaissait les visages, mais il n’avait pas la tête à cela.

- Wow wow wow, on se calme, l’impérial ! s’exclama Vaklu d’un ton autoritaire. Dana, on s’en occupe, elle a aucun compte à te rendre !
- Quoi ? Mais de quoi vous parlez, laissez-moi passer, putain ! Je veux savoir, ils l’ont frappée ?
- Parce que ça t’inquiète, maintenant ?! Et t’étais où, hein, pendant sa grossesse ?

Le hapien tourna la tête vers l’humain qui avait parlé. Svan. Il essaya de se dégager, prêt à attraper l’humain par le col pour lui faire comprendre qu’il se mêlait de ce qui ne le regardait pas, mais son agitation fut vite maîtrisée. Même Lartokh était là pour l’empêcher de bouger, et dans un entremêlement de bras et de cornes, le hapien se démenait inutilement.

- MAIS QU’EST-CE QUI VOUS PREND BORDEL !

Soudain, la porte de la roulotte s’ouvrit à la volée, et Ruth émergea. Lloyd se tourna vers elle, comme les autres.















Et comme les autres, il entendit.
















Soudain, plus personne ne le retenait. Mais Lloyd était calme. Ou plutôt, il était statufié. Il regardait Ruth, son visage triste, ses lèvres qui venaient de dire… Les bébés ont pas survécu.

Il y eut un long silence. Le hapien était devenu livide. Le camp des serpents ne lui avait jamais paru si gris. Il sentit ses jambes le porter jusqu’aux trois petites marches métalliques, mais Ruth ne s’écarta pas tout de suite. A travers ses larmes, elle sembla le jauger du regard.

- Je veux la voir, fit Lloyd d’une voix blanche.

Alors elle acquiesça en silence, et s’écarta pour le laisser passer, juste après que Kashiina soit sorti à son tour.












Au fond de la roulotte, Dana était étendue. Ses cuisses nues baignaient dans le sang, et cette vision fut un nouveau choc. Lloyd s’accrocha à une étagère comme il sentait ses jambes se dérober sous lui.

Tout ce sang. Si rouge. Et le visage de Dana. Si blanc. Et les deux formes minuscules, empaquetés et immobiles, contre elle.

Un instant, il fut tenté de faire demi-tour. De fuir. Il ne savait pas pourquoi. C’était juste plus simple de gérer les problèmes d’une frégate.

Mais il resta là, plusieurs longues, très longues secondes.

Puis il s’avança dans la minuscule roulotte, les yeux fixés sur l’Inquisitrice, son Inquisitrice qu’il avait juré de ne plus revoir, sa princesse de Ch’hodos qui avait voulu un héritier, qui avait croisé le mauvais mâle.

Zoraïda s’était trompée, tout simplement. Le malheur et la mort, ce n’était pas Dana qui l’apportait. C’était lui.




Il se laissa glisser à genoux, et ses yeux ne pouvaient quitter le spectacle affreux. Pour la première fois de sa vie, lui semblait-il, il ne savait pas du tout ce qu’il fallait faire. Il voyait les fins cheveux blonds sur les fronts qu’une teinte trop froide avait envahi. Il voyait les grands yeux de Dana qui semblaient attendre.
Les mains de Lloyd s'animaient en tremblant, ramassaient des linges, les ramenaient contre les cuisses de Dana en regardant à peine ce qu'il faisait, égaré, essuyant dans des gestes absents et fébriles, comme s'il avait pu arrêter une hémorragie, changer le cours des choses. Mais ses mains ne savaient pas mieux que lui ce qu'il fallait faire. Pas cette fois. Elles étaient comme déconnectées, indépendantes de sa volonté, parce que le cerveau de Lloyd était ailleurs, ou plutôt, il était épinglé par les prunelles qui avaient rencontré les siennes.

- Y’en… y’en avait deux ? demanda-t-il bêtement.









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Darth Hope
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L'Agonie des Krayt

C’était comme un autre monde, une dimension hors du temps, hors de l’espace, entre le rêve et le cauchemar.







- Ce connard d’impérial ! Éructa soudainement Svan en brisant le silence. On devrait lui arracher la tête !
- Eh oh doucement ! s’insurgea Mumkin d’une petite voix.

Svan se rapprocha de lui, l’attrapa sèchement par le col de sa combinaison de pilote. Lartokh s’interposa, il y eut des exclamations.

- Ca va, on se calme !
- J’vous avais dit qu’avoir des Krayt ici nous apporterait des emmerdes ET BEN VOILA ! souffla Mumkin reniflant brusquement et se frottant le nez d’un revers de la manche pas très élégant.

Le jeune humain se détourna d’un pas furieux vers Kashiina dont il saisit le visage meurtri d’une poigne ferme pour l’obliger à le tourner vers Mumkin, vers tous les autres. La belle Serpent se contentait de fixer le dévaronien sans broncher et il se rendit compte qu’elle était de la même trempe que Dana, à vous regarder droit dans les yeux même que ces derniers portaient des blessures crasseuses et purulentes de souffrance.

- C’est ça le vrai visage des impériaux Mum’ ! Ils nous massacrent pour un oui, pour un non, et ils battent nos femmes et les violent ! C’est ce que tu veux pour Chechi ?! Ton patron fait pas exception à la règle !
- Ca suffit Svan ! s’emporta Ruth, le visage encore baigné de larmes. C’est pas le moment de…
- Et ça le sera quand ?! cria Svan en relâchant la brune. Quand ils reviendront et qu’ils auront réduit cet endroit en cendres ?! J’compte pas les laisser faire ! Et ce qu’ils ont fait à Kashii, ce qu’ils ont fait à Dana….j’compte pas laisser ça impuni. Les représailles, elles doivent venir de nous !
- T’es complètement fou ! lâcha Mumkin, angoissé et il prit à parti Vaklu Lartokh et les autres qui ne disaient rien, qui se contentaient d’un silence inquiétant, plein d’approbation pour les paroles de Svan.















Entre les murs de la roulotte plongée dans la pénombre de l’aube dont la luminosité colorée traversait la fenêtre pour auréolée Dana, meurtrie sur sa couche, les clameurs de la dispute avaient à peine percé. C’était comme un autre monde, une dimension hors du temps, hors de l’espace, entre le rêve et le cauchemar. Le rêve d’avoir enfin ses bébés, ceux qu’elle avait finalement attendus avec impatience. Le cauchemar de les perdre à tout jamais. Dana tremblait. Réanime-les. Toutes les deux. Disait la voix froide de Darth Runà dans son esprit traumatisé et désorienté. Réanime-les. Réanime-les. Réani….

- Y’en… y’en avait deux ?

Elle entendit la voix de Lloyd Hope avant de le voir, car jusque-là ses prunelles avaient croisé les siennes, mais elle avait été ailleurs, complètement choquée. Faisait-il partie du rêve ou du cauchemar ? Venait-il soigner ses bébés ? Venait-il les lui arracher ? Le corps de Dana eut un mouvement imperceptible, à peine un tressaillement. Elle avait bougé l’une de ses jambes.

- Oui…deux filles..

Sa propre voix sembla lui parvenir d’un lieu irréel et plein de douleur. Le goût pâteux dans sa bouche, l’amertume qui se glissait dans toutes les fissures de son âme brisée furent des saveurs insupportables. En répondant, en articulant d’un souffle cette réponse, elle avait plongé dans la réalité, percuté sa surface comme on heurtait une eau à la surface dure et qu’on se rompait les os d’un coup avant de s’enfoncer dans des profondeurs noires et glaciales, alourdi par une agonie mordante. Elle entrouvrit les lèvres et sa bouche forma un cri étranglé. Elle plaqua sa figure contre les deux bébés inertes, bientôt raides, déjà froids. Elle paniqua de les sentir encore froid, de constater qu’ils ne se réchaufferait pas, quoiqu’elle fasse. Elle cria encore, comme un animal désespéré. Elle criait et étouffait le son de sa voix contre les couvertures qui ne servaient à rien autour de ces petits corps chétifs aux paupières closes.

- Revenez…souffla-t-elle entre deux sanglots qui s’étaient mis à rythmer ses cris. Revenez chez maman…je vais..faire attention, revenez…

Elle suppliait et dans un gémissement de douleur se recroquevilla pour former une boule sur le lit, pour intégrer ses deux bébés dans cette boule de chair et de sang. Dana n’avait qu’une envie : que ses bébés vivent, ou qu’elle meurt avec eux. Elle n’avait plus les idées claires. Il y avait ce sang qui continuait de couler entre ses cuisses, qui menaçait à tout instant de la délivrer. Il y avait ses pleurs qui jaillissaient enfin de ses yeux dorés pour inonder les visages inanimés des morts-nés. Bientôt, l’épuisement induite par l’accouchement ne lui permit plus de crier, de pleurer et elle hoqueta. Son attention se tourna vers Lloyd Hope qui n’avait pas disparu, qui n’était donc pas une hallucination qui avait surgi en ce moment terrible et à qui elle aurait parlé pour ne pas perdre définitivement la raison.

Elle écarta un peu la couverture qui recouvrait l’aînée, dévoilant une main minuscule aux doigts translucides. Elle glissa son pouce dans ce petit poing fermé.

- Elles sont tellement petites. Je leur ai pas beaucoup donné à manger….murmura-t-elle vers le hapien. Elles sont….tellement fragiles…

Elle pencha son visage, déposa ses lèvres contre cette main tout juste formée. Sous ses lippes maternelles, elle aurait dû sentir la chaleur d’un derme familier, mais il n’y avait qu’une peau glacée et cette sensation la mortifia. Dans un mouvement tendre, elle remit la couverture en place, même si sa fille n’avait plus besoin de couverture là où elle était.









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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Un jouet cassé. Des jouets cassés.





Deux filles.

Les mots avaient résonné dans sa boite crânienne tandis que Lloyd contemplait ces deux minuscules choses. Voilà, il avait failli être père. Il avait failli les aimer comme un fou, elles aussi, et les conduire à leur perte. C’était peut-être mieux ainsi. Qu’elles ne connussent pas le malheur et la mort, qu’elles n’en eussent jamais conscience.
Dana se recroquevillait sur elles et le hapien soudain parut se rendre compte de son environnement. Des cris provenaient de l’extérieur, des odeurs de sang, de sueur et des produits confectionnés par Kashiina emplissaient la roulotte. L’aube commençait à éclaircir la pièce malgré les rideaux vieillots suspendus devant les vitres et surtout, il voyait Dana. Il voyait ses yeux hébétés, sa peau blanche et marquée, ses gestes fébriles, le tremblement de ses lèvres. Elle n’était pas dans son état normal. Elle était brisée. Un jouet cassé. Des jouets cassés.

Le hapien laissa échapper un râle, il ne savait pas pourquoi. Mais soudain ses mains s’activèrent, soudain elles savaient quoi faire et il passa ses mains autour des deux bébés, en agrippant les couvertures et il tira doucement.

Bien sûr, elle résista. Il s’humecta les lèvres, cessant un instant d’essayer de les lui enlever.

- Dana… Je vais m’en occuper, dit-il d’une voix rauque. Dana, lâche.

Il recommença à tirer et il lut l’horreur dans les yeux de l’Inquisitrice. Lloyd fit non de la tête, et il tira plus fort. Dana n’avait pas l’énergie de résister contre lui, de toutes façons.

- Lâche ! supplia-t-il.

Et il les lui arracha d’un geste sec. Il pressa les deux enfants contre son torse, de façon à faire disparaître leurs visages, qu’elle ne puisse plus les voir, et il se releva en chancelant, les linges humides et chauds contre lui.

- Je vais m’en occuper, je te dis, répéta-t-il d’une voix blanche, et il tituba pour se détourner et quitter la roulotte.






Quand il sortit au-dehors, dans les voix qui se chamaillaient encore, et qu’il apparut chargé de ce fardeau insolite, tout le monde se tut. Il s’immobilisa sur les marches à regarder les mines effarées, déconfites, colériques, craintives. Qu’est-ce qu’ils avaient tous à le regarder comme ça ? Il ne comprenait plus rien. Il avait l’impression que le monde entier le regarder porter ses enfants morts, que le monde entier attendait qu’il fît quelque chose, le jugeait pour ce qu’il n’avait pas fait, ce qu’il avait permis qu’il arrivât.
Mais personne ne dit rien. Le temps paraissait comme suspendu dans les couleurs de l’aube. Aux fenêtres des roulottes voisines, des visages étaient apparus. Souvent des visages aux yeux très ronds, aux bouches minuscules, aux joues rebondies. Des enfants. Pourquoi étaient-ils tous là, aussi, à vivre ?

Puis, on entendit un cri qui provenait de l’intérieur de la roulotte, et tout le monde sembla se réveiller brusquement.

- Qu’est-ce que tu fais l’impérial ?!
- Allez la tenir, il faut qu’elle reste couchée.
- Dana !
- Elles sont vraiment mortes, vous avez bien vérifié ?

Le hapien serra les enfants contre lui d’une seule main pour saisir le bras de Ruth avec une fermeté qui la fit sursauter.

- Va la tenir, il faut qu’elle reste couchée.
- HE ! LACHE-LA IMMEDIATEMENT !
- Ça va, ça va Svan, c’est bon, je vais…
- Lâche ma femme l’impérial !

Mais Lloyd ne paraissait pas entendre les tons menaçants, ni voir les hommes qui se rapprochaient, les poings serrés. Ruth se hâta de se dégager de sa main.

- On se calme ! cria-t-elle. Je vais m’occuper de Dana. Si c’est pour vous dire des horreurs, éloignez-vous ! Dana n’a pas besoin d’entendre ça !

Elle remonta à l’intérieur de la roulotte et Kashiina s’empressa de suivre. Les dévaroniens et les quelques humains s’étaient rassemblés mais ils se tenaient à une distance de quelques pas. Comme si les mots de Ruth infusaient encore même si on entendait les sanglots de Dana, ou bien comme si les bébés dans les bras de Lloyd étaient comme un bouclier, ou bien la marque d’un mauvais sort que personne n’oserait toucher.

- Qu’est-ce que tu vas faire maintenant, hein, Lloyd Hope ? le provoqua Svan, le visage rouge de couleur. Tu vas la tabasser pour avoir tué tes enfants ?! C'est le genre d'hommes que tu es !
- Non, dit-il, hébété. Je vais les enterrer.
- C’EST TON PUTAIN D’EMPIRE QUI LES A TUES ! cria Svan, et sa voix échauffa les esprits comme un cri de guerre.

Les hommes se rapprochèrent, Mumkin couinait quelque chose d’incompréhensible et le hapien restait là, ahuri, à ne rien comprendre, étaient-ils menaçants ou se faisait-il des idées ? Il fallait qu’il aille creuser, c’était tout.

Le hapien comprit subitement la menace quand quelqu’un le bouscula brusquement de côté et qu’il trébucha pour se maintenir debout. Quelqu’un d’autre essaya d’attraper les bébés et il resserra sa prise en reculant.

- Lâche-les ! On s’en occupera nous, des funérailles !
- Ouais, t’étais où quand ils ont attaqué ? Quand les femmes avaient besoin d’aide, t’étais où ?
- On va leur faire payer, on fera payer ça à chaque putain d’impérial !
- On…

Soudain il y eut un crissement et une lumière rouge, et le groupe se dispersa brusquement autour du hapien, dont le sabre laser vrombissait le long de son corps. De ses yeux fous, il parcourait cette assemblée insolite, ces visages connus, ces visages qui avaient été familiers ou bienveillants, pour la plupart, et que désormais il était prêt à découper.

- Mais allez-y, dit-il froidement. Faites donc. Venez.

Mais personne ne lui répondit.

- VENEZ ! hurla-t-il, et sa fureur déforma un instant ses traits, rendus plus rouges encore par la présence de son arme levée devant lui comme il les menaçait. CA SE REGLE COMME CA LES CONFLITS CHEZ VOUS NON ?!

Il fit un mouvement circulaire comme pour les désigner tous et les serpents s’écartèrent de quelques pas encore. Malgré leur crainte de cette arme, cependant, ils étaient prêts à se battre, à se jeter sur lui comme un seul homme dès qu’il engagerait le combat. Le temps sembla se suspendre, comme le calme s’étirait avant la tempête.













- Laissez-le enterrer ses enfants.

Tous les visages se tournèrent vers le masque de Zoraïda. La femme paraissait plus petite qu’avant. Ou bien, elle avait toujours été si petite, mais sa voix avait porté, produisant leur impact dans l’esprit de chacun d’entre eux. Par réflexe face à cette surprise, le hapien avait pointé sa lame vers elle, mais elle n’en parut ni étonnée, ni craintive.

- Laissez-le passer.
- Mais…
- Svan. On laisse un homme enterrer ses défunts.

Svan se tut, serrant les mâchoires, mais finalement il baissa les yeux. Les autres parurent subitement moins agressifs, incertains. Lloyd en profita pour marcher d’un pas raide, son sabre toujours en main. Il passa entre Mumkin et Lartokh sans leur accorder un regard, et il marcha en direction de la forêt, seul.










Ses genoux s’enfonçaient dans le sol humide. Lloyd grattait la terre de ses doigts nus, et le sol sableux s’insinuait sous ses ongles, mordait sa peau qui s’écorchait à force de ratisser les cailloux tranchants. Malgré l’humidité, à chaque fois qu’il évacuait une poignée, du sable coulait au fond du trou pour le remplir de nouveau et il lui sembla qu’il s’était lancé dans une tâche infinie. Il accéléra ses gestes avec un cri de rage.

Il s’était arrêté à la lisière de la forêt, non loin de la plage, à un endroit qui donnait une vue sur le lac, où l’on pourrait voir les trois lunes de Jabiim se refléter. Le soleil perçait de rayons blafards entre les voiles d’une bruine qui avait trempé son uniforme et les mèches de ses cheveux gouttaient sur son front.

Il voulait creuser profond, pour que les enfants ne fussent pas déterrés par une bête sauvage. Ni par autre chose. Qu’on ne pût les atteindre.

Au bout d’un long moment, ses doigts saignaient et son corps grelottait, suant et pourtant glacé, mais il se laissa enfin aller séant en terre, le souffle court, à contempler le trou. Son regard alla jusqu’au deux petites formes sur lesquelles il avait refermé le linge pour qu’elles ne subissent pas la pluie sur leurs petits visages inanimés. Il lui fallut un long moment pour réussir à se décider, à les saisir l’une après l’autre et les déposer au fond du trou. Puis il se pencha au-dessus, pour les regarder longuement.

Deux petits paquets.

Il aurait voulu pleurer, mais il n’avait pas de larmes pour ça. Alors il laissa faire la pluie, avant de commencer à repousser la terre dans la tombe.

- J’ai essayé de vous prévenir, fit une voix dans son dos, mais il ne se retourna pas, obnubilé par sa tâche.

Zoraïda s’approcha à pas lents derrière lui, et il voyait son ombre s’étirer près des arbres à la périphérie de son champ de vision, mais il voulait continuer à remettre de la terre, à la tasser petit à petit, enterrer le plus possible des souvenirs immondes, des erreurs odieuses. Enterrer le malheur et enterrer la mort.

- Maintenant, il est trop tard, poursuivit-elle de sa voix rocailleuse comme un désert. Vous n’êtes plus la bienvenue dans ce camp. Il vous faut partir, Lloyd Hope.

Le hapien cessa soudain sa tâche ingrate. Un petit monticule de terre était formé devant lui, mais ce n’était pas terminé, il en fallait encore, et il fallait aussi marquer l’endroit d’une pierre ou d’autre chose, mais cela attendrait. Il se releva pour faire face à Zoraïda, et le visage fou de rage, s’approcha d’elle pour pointer un doigt sur la poitrine de la vieille femme.

- Partir ?! Et la laisser avec vous ?! cria-t-il. Elle n’aurait jamais dû être ici, elle aurait dû être dans un PUTAIN D’HOPITAL, dans le monde CIVILISE, où une échographie aurait peut-être pu permettre de les sauver, où elle aurait été prise en charge CORRECTEMENT.
- Personne n’a demandé à Dana de venir, c’est elle qui a fait ce choix.
- Evidemment, persifla-t-il en se détournant.

Il marcha sans but, d’un pas énervé. Souleva une pierre, la laissa retomber, une grande branche, ça ne ferait pas l’affaire non plus. Finalement, une grande pierre plate. La Force l’aida à la soulever et il grogna en la rapportant près de la tombe, avant d’essayer de la fixer sur la tranche. Il batailla plusieurs minutes, à creuser pour l’insérer et la fixer, sous l’œil masqué de Zoraïde, qui ne s’était pas laissée impressionner.

- Je peux vous obtenir de lui dire au revoir. Mais ensuite, si vous ne partez pas, je ne pourrai pas retenir les serpents longtemps. Ils sont furieux. Vous n’avez pas défendu l’honneur de votre famille, en étant absent pour elle.
- JE N’AI AUCUNE FAMILLE ! hurla-t-il de nouveau, et d’un geste rageur il enfonça plus profondément la pierre pour qu’elle tînt debout.

Alors il se redressa pour faire face à Zoraïda de nouveau.

- Je n’ai jamais demandé ni à avoir ces enfants, ni à me mêler de vos histoires de clan ! Je l’ai fait pour Mumkin, et pour Dana, alors qu’ils savent bien que je ne PEUX PAS être le membre d’une FAMILLE. Vous dites que vous savez, mais vous n’avez rien fait pour les empêcher, rien fait pour les détourner ! lui cria-t-il.

Zoraïda secoua doucement la tête. Dans la brise, sa robe ample flottait comme un drapeau de mauvaise augure.

- Quand la peine sera moins forte, murmura-t-elle, vous y réfléchirez de nouveau.

Et elle le laissa là. Il se remit à genoux pour consolider le monticule de terre.










Quand il revint au camp, sale et humide, les doigts plein de sang, il ne savait pas combien de temps s’était écoulé depuis qu’il était parti. Au moins une heure, peut-être plus. Sur la plage, quelques personnes s’étaient regroupées, sans animation. Le hapien s’était débrouillé pour les contourner de loin, ne souhaitant croiser personne.

Il avait pensé à retourner directement au motospeeder et à partir, comme le lui avait conseillé Zoraïda. Après tout, ne serait-ce pas plus simple pour Dana ? Mais il ne pouvait pas. Il s’inquiétait pour elle. Peut-être qu’il devrait la prendre avec lui, l’emmener sur le Sans Visage, la ramener sur une planète où on s’occuperait d’elle dans un vrai centre hospitalier.

Lorsqu’il arriva, hagard, devant la roulotte où Dana avait donné naissance à leurs deux filles maudites, il s’arrêta un instant devant les trois petites marches. Il hésitait encore quand Kashiina soudain ouvrit la porte. Elle parut surprise, puis avisa son état, avant de baisser les yeux avec une mine éteinte. Elle referma derrière elle pour pouvoir lui parler à voix basse.

- Lloyd… Il faut que t’ailles lui parler. Zoraïda nous a dit que tu allais partir. Mais pour qu’elle fasse son deuil, il faut… Il faut que tu ailles la voir. Je lui ai administré quelques herbes pour la douleur et l’angoisse mais… ça n’a pas beaucoup d’effet, vu son état.

Le hapien la regarda, interloqué.
Aller la voir ? Oui, oui, c’était pour cela qu’il était là. Mais qu’est-ce qu’il allait dire ? Je suis désolé ? Il l’avait déjà dit tant de fois, et ça ne changeait rien, ça ne réparait rien.

- Ruth et Zoraïda parlent à Svan et aux autres. C’est… La situation est compliquée. Quand ils reviendront, ils ne voudront probablement plus que tu restes seul avec elle alors… Je te laisse juste quelques minutes. Dépêche-toi.

Elle s’écarta vivement pour le laisser passer. A gestes fébriles le hapien ouvrit la porte et s’engouffra dans la roulotte, avant de refermer derrière lui.

Il fit quelques pas pour s’approcher de la couchette, la bouche entrouverte, hagard.

- Je les ai enterrées, dit-il comme ça, de but en blanc.




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Darth Hope
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L'Agonie des Krayt

La paix à laquelle elle avait aspiré ces derniers temps n’était qu’un mensonge.







- Dana ? Dana !

Ruth observait la figure inconsciente de la Sith avec anxiété. Elle arrachait les draps, les changeait comme elle pouvait, malgré ce corps lourd étendu sur le ventre. Entre les jambes de Dana, Kashiina grimaçait de concentration. Peep, le petit droïde de compagnie éclairait d’une lampe torche les chairs ensanglantées afin qu’elle puisse soigner avec le plus de précision possible. L’Inquisitrice continuait de perdre du sang mais en quantité moindre. La jeune femme repérait les zones hémorragiques, compressait avec du linge trempé dans une macération d’herbe aux propriétés coagulantes et cicatrisantes. Elle n’avait pas de technologie de pointe à sa disposition, mais concentrait un savoir important de traditions médicales que les itinérants avaient développé au fil du temps grâce aux connaissances de la nature.

- Elle respire encore, constata Ruth d’un ton soulagé. Ca…se passe bien en bas ?
- Les saignements sont moins importants, mais toujours présents, répliqua Kashiina. Je vois des endroits qu’il va falloir suturer.
- Et bien, cela tombe bien tu as toujours été la plus douée en couture, sourit Ruth avec tendresse pour détendre l’atmosphère pesante.

Kashiina releva sa figure couverte de bleus vers son aînée et cette dernière remarqua les cernes ; les plaies violacées là où les poings de soldats impériaux s’étaient abattus. Elle sentit son cœur se rompre dans sa poitrine et s’humecta les lèvres.

- Je vais le faire Kashiina, dit-elle finalement. Tu devrais te reposer, te soigner.
- Je suis contente, souffla la belle brune en commençant à préparer l’aiguille stérilisée et le fil organique. Je suis contente de pas pouvoir donner la vie quand je vois ça. J’ose pas imaginer. J’ose pas imaginer ce que c’est que de porter une vie en soi pendant tant de mois et d’accoucher de la mort. Dana….elle parlait souvent depuis son arrivée, elle posait des questions.

Elle fronça les sourcils, demanda à Peep de diriger le faisceau de la lampe sur un point précis et commença à enfoncer l’aiguille. Le corps de la Sith tressaillit de douleur et depuis son inconsciente, elle gémit. Ruth lui attrapa la main et caressa tendrement son front pour lui promettre que tout se passerait bien.

- Elle avait peur d’être une mauvaise mère. Je la voyais observer Mercy avec Dan, comme si elle s’imprégner de ses gestes pour les copier. Personne lui a dit quoi faire…si ses bébés mourraient, expliquait Kashiina tout en se focalisant sur les soins apportés.
- Parce que personne ne sait quoi faire dans ces moments-là, soupira Ruth. C’est pas arrivé depuis longtemps dans le clan. Espérons que ça arrive plus jamais.
- Ce monde est fou…

Et l’aînée remarqua des larmes pudiques et dignes rouler sur les joues de Kashiina qui, enfin, se délestait des émois de la journée : la descente des autorités impériales, l’horreur d’être battue par des hommes concupiscents parce que sa beauté avait forcément attisé des pulsions primaires, l’accouchement éprouvant, les morts-nés, l’état préoccupant d’une mère qui n’en sera jamais une alors que la nature lui avait pourtant offert tout ce qu’il fallait.





De l’accouchement ne restaient plus que la tunique entachée de Dana et sa figure pâle, aux grands yeux désorientés. Ruth l’avait confortablement installée dans des nouveaux draps, faisant disparaître le sang, le souvenir de la souffrance qui déchirait pourtant encore ses chairs. Elle avait installé des coussins dans le dos de la convalescente pour la conforter dans une position qui la soulagerait, semi-assise, tout en lui expliquant qu’il ne fallait plus bouger, qu’il fallait désormais attendre que son corps expulse les reliquats de ce qu’elle avait couvé durant toutes ces semaines. Et quand Lloyd Hope était revenu, les prunelles éteintes de Dana se levèrent sur lui et ses oreilles fatiguées l’écoutèrent.

Il les avait enterrés dans le grand désert qu’était sa propre vie. Un désert où rien ne poussait, rien ne survivait. Elle subissait le choc inverse, le revers du traumatisme, tout cet amour qu’elle avait ressenti ces dernières semaines venait de faner et les restes de ce sentiment formait un terreau desséché au creux de son ventre encore un peu rebondi sous les draps.

- Qu’est-ce que j’ai cru?

Au départ sa voix n’était qu’un souffle chevrotant et parfaitement perceptible. Parler était rude, douloureux. C’était un effort insurmontable, elle n’avait pas l’énergie, mais elle craignait davantage le silence maintenant que le Sith était présent à quelques pas du lit où elle trônait avec des allures de reine déchue.

- Que je pourrais être une mère ? C’était une putain d’illusion.

La paix à laquelle elle avait aspiré ces derniers temps n’était qu’un mensonge.

- Je suis une meurtrière, une Inquisitrice Sith. Je tue les enfants, je les mets pas au monde. Ils meurent même dans mon ventre. Je serai toujours comme ça. Je serai toujours seule. J’ai aspiré à des espoirs absurdes, une famille ? Je me réveille et il n’y a que la mort. C’est ça la réalité.

Bien qu’elle articulait avec difficulté, la colère émergeait d’entre ses lèvres gercées et blafardes.


- Tu vas me dire que t’es désolé, mais me dire que t’es désolé ca fera pas revenir nos bébés. Parce que t’es le père. Parce que j’ai été naïve en pensant que tu les protégerais aussi. Mais t’avais pris le pari qu’ils devaient pas exister dès le départ. Lloyd Hope la voie de la raison. prêt à me dire qu’il est désolé mais qu’il avait raison. Qu’il fallait pas les garder. (L’ironie de son ton était aussi mordante que le deuil qui l’enlaçait froidement) C’est facile de prendre cette décision là quand on les sent pas bouger en soi, quand c’est pas une partie de soi. C’est juste une partie de toi que t’as accidentellement laissé en moi et c’était à moi de faire le sale boulot, de supprimer cette partie, d’effacer ça. T’inquiète pas. J’ai bien compris que le sale boulot il est pour moi, et que t’avais une compagne, une carrière, un grade.

Elle prit une pause parce qu’elle devait respirer et gérer la douleur qui perturbait toujours son bassin et brûlait l’intérieur de ses cuisses, mais elle n’en avait pas terminé. Son discours reprit aussi, comme un torrent déversait ses flots furieux dans un tout petit lit de pierres et de fange.

- Nos bébés sont morts. Ils...auront eu aucune chance. Qu’est-ce que je leur aurais offert comme vie ? J’ai plus envie...j’ai plus envie d’être autre chose qu’une machine à faire le sale boulot, jusqu’à ce que le sale boulot me fauche. C’est comme ça que finissent tous les monstres dans mon genre. C’est comme ça que je dois vivre, que je dois mourir. Je suis pas comme Mercy ou Ruth. Je suis pas Mat’aenna. Je suis pas un jouet cassé, je suis brisée en millions de morceaux. Chaque jour je les compte et je perds le compte et je deviens dingue.

Sa respiration s’était précipitée et elle ravala un sanglot amer qui avait éclaté dans sa gorge. Elle avait beau scruté Lloyd, elle percevait péniblement l’humidité de la pluie, mais aucune trace de pleurs. Il n’avait pas les yeux rougis et aucune larme n’avait tracé de sillon de sel blanc sur ses joues maculées de terre. Il avait enterré leurs enfants comme il avait enterré ceux des autres, dans la complète indifférence et ça faisait tellement mal à Dana. Les jumelles auraient mérité au moins un père capable de pleurer sur leur tombe.


- J’ai cru qu’il y avait autre chose avec toi, puis avec nos bébés. C’était une illusion, c’était un manque cruel de foi dans le Côté Obscur. Il n'y a que là que j’ai ma place. Je dois devenir forte, toujours plus forte, c’est ma vie, c’est le destin dans lequel on m’a jeté. Tous les jours depuis l’Académie, depuis bien avant l’Académie, je me suis raccrochée à toi. T’étais ma seule porte de sortie. Même si...sur cette putain de porte y’avait mille verrous à la con, j’étais prête à m’attaquer à chacun d’entre eux, j’étais prête à repousser les limites de la Galaxie pour trouver les clés, pour sortir. Finalement, je me suis juste perdue un peu plus. J’étais ridicule ok ? A essayer de m’accrocher, à ressentir toute cette compassion que je paie aujourd’hui, que j’ai payé avec mon sang et avec ma chair. Ya un trou en moi maintenant. Et ce que je voyais pas, c’était que je brisais un verrou et dix autres se créaient. C’est ce que Runà a voulu me faire comprendre que c’était vain, inutile, indigne d’une Sith. Que c’était une entreprise vouée à l’échec et je me suis obstinée. Même quand j’étais à un foutu battement de coeur de mourir, j’essayais de trouver les clés, de briser les verrous. Je me berçais d’illusions, je me disais que ce qu’il y avait derrière ces portes valait tous ces sacrifices. Maintenant, je n’ai plus aucune issue. J’ai juste la solitude, le froid, la peur et la douleur. Nos bébés sont partis, ils sont morts. Ils ont été tués par les poings de mercenaires, par des lames d’assassins, par des mains décharnées, j’étais seule contre tout ça. Complètement seule. J’aurais juste voulu mourir et que nos bébés survivent.

Elle se tut et détourna sa figure vers un mur où des plantes rampantes dessinaient des arabesques, comme des serpents de verdure. Elle prit une grande inspiration qui broya ses tripes. Il y avait une telle tension en elle. Finalement, elle ferma les paupières un court instant.

- C’était tes filles, peu importe la décision ou le choix que t’avais pris. T’étais le seul à me toucher à…t’épancher comme ça en moi. Quand je l’ai su, j’ai compté les semaines, les mois. Ca pouvait être que toi. De tous les hommes, c’était toi. Elles auraient connu le nom de leur père en tétant mon sein. C’est…

L’épuisement l’empêcha de poursuivre. Elle n’avait plus d’énergie. Elle était faible de tout ce sang qui avait fui son corps, emportant la vie, laissant place à la mort. Elle en était malade. Malade de colère, de chagrin, de rancœur. Elle en voulait à Lloyd, elle en voulait à Rhulom, à Maxence, à Orcus, à Runà. Mais elle en voulait surtout à elle-même. Elle ne s’était jamais autant détestée.








- Laissez-moi entrer ! cria Mercy, les bras encombrés par son bébé.

Elle tambourinait comme une possédée à la porte de la roulotte de Vaklu. On lui répondit de dégager, mais elle insista.

- Je vais enfoncer cette putain de porte ! GOSH' ! J’vais utiliser la tête de bélier de ton gamin pour ça ! Alors OUVRE !

Un silence, un peu d’agitation. Les verrins de la porte grincèrent quand elle s’ouvrit. Mercy avait un air déterminé, Ruth et Kashiina la suivirent quand elle s’engouffra dans le petit espace saturé de fumée et d’odeur d’alcool. Il y avait Kalon et Svan collé l’un contre l’autre, puis Vaklu, Kinuux Lartokh, Rilc, Mumkin et Goshgosh. Toute la sainte trinité, ironisa-t-elle, sauf qu’ils étaient vachement nombreux. Les leaders des Serpents, le conseil de Mamy Zora, ceux qui géraient les affaires.

- Pas de femme lors des réunions de famille, bordel ! s’insurgea Vaklu. Goshgosh, tu te fais mener par les cornes ou quoi ?

Le concerné jeta un regard noir à son épouse et renifla bruyamment avant de terminer son verre d’alcool.

- Vous êtes sérieux ? Vous allez mettre LLord dehors ? Le bannir ? Alors qu’il avait sauvé Liam, qu’il avait sauvé Dana, la paix..
- C’est pas tes affaires Mercy ! s’énerva Svan en frappant du poing sur la table autour de laquelle ils étaient réunis.
- FIGURE-TOI QUE SI !

Et Dan se mit à hurler, en pleurant.

- C’est un putain d’impérial ! Un gars sans honneur, t’as vu comme il traite sa femme ?!
- Alors ahem c’est pas vraiment sa femme….tenta pauvrement Mumkin, la tête rentrée dans les épaules.
- Il était où ? tonna Kalon.
- ET VOUS ? VOUS ETIEZ OU ?! hurla-t-elle. T’étais OU Goshgosh quand ils m’arrachaient notre fils des bras ? Et toi Svan, t’étais où quand ils voulaient violer Kashiina TA fiancée et toi Kalon…quand on battait ta fille et qu’on menaçait ta femme ? Oh mais vous êtes les hommes (singea-t-elle avec de faux grands airs) Vous….gérez les affaires…vous en êtes si fiers, vous quittez le campement et vous vous revenez….comme Llord a quitté et est revenu. Vous valez pas mieux que lui. En fait, c’est carrément l’un des vôtres ! Si vous le bannissez. Je m’en vais.
- QUOI ? s’étrangla Goshgosh.
- Je m’en vais aussi, affirma Ruth en défiant Kalon d’un regard ferme.
- Et moi aussi, renchérit Kashiina.
- En fait, toutes les femmes sont prêtes à partir, avec leurs enfants, les roulottes. On apprendra à se défendre.
- Voilà, les bonnes femmes complètement folles, s’indigna Rilc.
- Tu veux tenter ? Bien. Parfait, signa Mercy alors que son bébé pleurait toujours.

Elle tourna les talons. Kalon frappa sur la table et se releva. Il était blême, la prunelle vacillante.

- OK. Qu’est-ce que tu veux ?
- Llord reste, c’est l’un des nôtres, il a signé avec son sang, vous vous rappelez. Il a enfreint aucune règle, c’est un parfait Serpent. Il s’occupait de ses affaires et sa femme, comme tu dis, était ici comme nous toutes. En attendant, aucun de vous n’a assuré.

Kalon et Vaklu échangèrent une œillade silencieuse. Le dévaronien et l’humain se confrontèrent de longues secondes et Vaklu prit finalement la parole :

- Accordé. Mais change de ton, si on quitte le campement pour nos petites affaires, c’est pour que vous puissiez manger et être bien. D’accord ? Maintenant dehors. Les femmes. Ne. Sont. Pas. Autorisés. Lors des conseils de famille.

Mercy releva le menton, défiant tous ces hommes avec un petit air fier, mais au fond d’elle, elle tremblait parce que ce coup de poker avait failli lui coûter sa famille.

- Très bien alors…on vous pardonne. Mais on apprendra quand même à se défendre seules. Pour quand…vous partez pour qu’on puisse manger. fit-elle avec sarcasme.

Elles quittèrent alors et les pleurs de Dan s’éteignirent à l’extérieur. Kalon poussa un immense soupir, se prenant le crâne entre ses mains, désabusée. Vaklu secoua la tête et se rassit, se servant de l’alcool.

- C’est pas croyable. De vraies vipères.
- Même si Callum était pas arrivé, les impériaux auraient eu aucune chance, prophétisa Goshgosh en secouant la tête.
- Et on fait quoi pour Lloyd alors ? demanda amèrement Svan.
- Bah c’est l’un des nôtres c’est vrai.
- Soit on est un Serpent, soit on est un Impérial, trancha le jeune homme.
- Et ben on peut ptetre s’estimer heureux d’avoir un impérial de notre côté nan ? s’avança Mumkin. C’pas juste un impérial, c’est un Sith. Comme Dana. Ils vont régler la situation.
- Vollen avait pas l’air au courant pour Dana, d’après Callum, elle a pas échappé aux coups et…
- Ouais, ça va. Mais en même temps, elle ressemble plus à une Serpent qu’à une Sith, c’est normal. Mais je pense qu’il vaut mieux avoir Lloyd avec nous que contre nous nan ?
- On vote. Pour le bannissement de Lloyd Hope ?

Svan leva deux doigts, l’air renfrogné et cracha par terre en remarquant que seul Rilc l’avait suivi dans cette décisio.

- Contre le bannissement de Lloyd Hope ?

Toutes les autres mains se dressèrent.





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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Tout allait bien.





Après le long monologue de Dana, il n’y avait eu que le silence.

Pour une raison qu’il ne s’expliquait pas, Lloyd pensait à cet enregistrement, qu’il avait réécouté quelques fois, à bord de Melantha, aux rares moments libres qu’il avait eu dans sa cabine. L’enregistrement qu’il avait reçu avec le petit mot et le bracelet aux serpents. Parmi tout ce qu’elle avait dit sur Nar Kaaga, il avait cru qu’il ne pouvait y avoir pires reproches. Il s’était trompé. Le pire, Dana venait de le lui dire.

Il resta longtemps debout, tout sale alors que les draps ici étaient propres et frais, que quelqu’un avait entrouvert certaines fenêtres pour qu’un air agréable se mélangeât aux encens fleuris. Et il était donc une porte sale et verrouillée, bien incapable de laisser sortir un mot adéquat. Une porte de son genre n’avait rien à faire dans une roulotte comme celle-ci.

Au bout d’un long moment, comme Dana ne lui accordait plus un regard, il fit demi-tour et sortit.









Il ne savait plus très bien comment il s’était retrouvé assis au milieu de la route qui conduisait à la roulotte de Goshgosh, mais le cousin de Mumkin lui avait dit de se lever, d’aller à la plage. Comme il ne bougeait pas, le cul dans la boue, le dévaronien avait appelé son cousin pilote à la rescousse, qui s’était chargé de tirer le hapien par l’épaule pour le forcer à se lever. Mumkin lui avait raconté un truc sur le fait que le conseil du clan s’était réuni, qu’il fallait qu’il gardât un œil sur Svan et Rilc, mais qu’en dehors de ça tout allait bien, il pouvait rester un peu, finalement.

Tout allait bien.

Mumkin avait fait monter Lloyd dans la roulotte que l’on réservait à la famille de passage, non sans adresser des sourires pas très honnêtes autour de lui sur le chemin pour rassurer ceux qui craignaient que le Sith ne sortît encore son arme. Les membres du clan s’inquiétaient à raison de ce qu’un Sith armé et fou de rage ou de peine était sûrement plus dangereux qu’un Sith tout court qui confectionnait des bracelets à l’effigie des serpents. Le regard sur le hapien avait bien changé, mais lui-même ne s’en rendait pas compte. Lloyd se laissa conduire, et Mumkin finit par lui trouver des vêtements propres, et les empila sur une couchette – celle-là même, songea-t-il, où Dana l’avait chevauché, l’allumant quand il essayait de lui dire de ne pas être tendre avec lui.

- Mais je l’avais prévenue, dit-il à voix basse.
- Hein ? Nan mais tu vas te laver, là, y’a une bassine à l’arrière, tu te nettoies et tu te changes. Après, tu nous rejoins sur la plage. Faut pas que les haines se cristallisent, faut que le clan te voit toujours comme un membre alors tu vas venir manger avec nous, tout ça. D’accord ?
- Et Dana, alors ?
- Nan mais Dana, les femmes s’en occupent, elle peut pas bouger là, mais elles lui apporteront à manger, t’inquiète pas pour ça.
- Mais elle me déteste.

Mumkin dansa d’un pied sur l’autre, gêné.

- Mais non, mais non, dit-il.
- Mais si.
- Bon, j’t’attends sur la plage, ok ?

Le dévaronien s’enfuit de la roulotte sur la pointe des pieds, comme un voleur s’évaderait d’une maison vide. Une fuite par les fenêtres ouvertes, puisque les portes étaient verrouillées.









Quand Mumkin, quelques minutes plus tard, débarqua sur la plage, une longue table était déjà pleine de convives. Les serpents mangeaient souvent ensemble. Ils partageaient presque tout, dans cette petite vie isolée. Mamy Zora prédisait en bout de table, et une petite dizaine d’autres personnes s’étaient jointes à elle. Quand quelqu’un quittait son siège, un autre arrivait pour prendre sa place, et ainsi il y avait toujours quelqu’un avec qui manger et discuter.
Mais l’atmosphère, cette fois, était glaciale. Mumkin trotta jusqu’à une chaise vide, et il se laissa tomber à côté de Ruth. En face de lui, Goshgosh lui lança un regard interrogateur, et le dévaronien lui répondit par un bref mouvement de tête affirmatif avant de s’intéresser à la tablée.

- Alors, heu… Comment va Chechi ? J’l’ai pas encore vue…

Il y eut des regards échangés.

- Elle va bien, fit Ruth avec un petit sourire, soulagée de pouvoir aborder un sujet plus optimiste. Elle va sûrement accoucher bientôt aussi.
- Mais ça se passera sûrement très bien, intervint immédiatement Kashiina, les présages ont été très bons pour elle.

Zoraïda confirma d’un mouvement de tête. Les hommes acquiescèrent, rassurés.

- Cool, elle vous a dit, au fait ? Elle hésitait à l’appeler Mumkin, si c’est un garçon.

Toute la tablée s’esclaffa bruyamment, au moment où le hapien apparaissait entre les roulottes pour descendre jusque sur la plage. Alors les rires se turent. Le pilote se retourna pour suivre les regards, et posa les yeux sur Lloyd. Il était dans le même état qu’un peu plus tôt : sale et humide.

- Mais ! J’t’avais dit de te laver et qu’après tu viendrais…

Mais Ruth posa sa main sur le poignet du dévaronien pour lui intimer de se taire.

- C’est pas grave, il a peut-être faim maintenant. Tiens, tu peux prendre ma place, Llord, j’ai fini.

Mais le hapien n’eut l’air d’avoir rien entendu. Il se planta à côté de la table pour faire face à Kashiina, qui leva des yeux hésitant vers lui.

- C’est la faute des impériaux ? aboya-t-il.
- Qu… Quoi ?

A côté d’elle, Svan repoussait lentement sa chaise, prêt à faire le tour de la table pour faire reculer le hapien si besoin.

- Si y’avait pas eu l’attaque des impériaux, elles seraient vivantes ou pas ? demanda-t-il sans ambages.
- C’est-à-dire que… C’est possible, fit prudemment Kashiina. Il y a encore, quoi… Deux semaines, on les sentait bouger dans son ventre, donc… C’est très possible.
- Ok.

Et il resta planté là à la regarder, les yeux ardents et vides à la fois.

- Qu’est-ce que tu veux, l’impérial, cracha Svan, tu viens bouffer ou tu viens mater ma fiancée ?

Lloyd parut se rendre compte de la présence de l’humain et le considéra un instant.

- Vous avez les noms ?
- Qu’est-ce que ça peut te foutre, maintenant ?
- Colonel Vollen, des services spéciaux, qu’il a dit, intervint Vaklu, l’air mauvais. Mais les krayt ont fait cavaler toute son escouade, on sait pas où ils sont.
- Qui sait ?
- Les dragons, ils doivent savoir.
- Ils sont où, ces dragons ?
- Heu, Lloyd, qu’est-ce que tu comptes faire ? Parce que là, tu vois, la situation est un peu complexe avec les dragons justement et…
- Je vais les tuer.

Il y eut un moment de gêne. Puis Ruth essaya de s’approcher du hapien. Elle tendit la main vers lui, mais n’osa pas poser sa paume sur son bras.

- Voyons, c’est… Llord, il faut se reposer, hein, c’est pas une solution, là, tout de suite…
- Ils sont où, les dragons ? répéta le hapien en la regardant.

Ruth déglutit, et elle se tourna vers les autres, comme pour appeler à l’aide.

- Ils sont itinérants, c’est compliqué de les trouver, expliqua Vaklu.
- Mais mon cousin Jyxo… commença Mumkin, mais il fut interrompu par des « ccchhhuuut ! » véhéments.
- Quoi, ton cousin Jyxo ?
- Nan, nan, rien.

Le hapien attrapa Mumkin par le col pour le faire lever de sa chaise et soudain il y eut des cris, des menaces. Svan et Rilc les premiers agrippèrent le hapien pour le faire lâcher tandis que les autres récupérèrent Mumkin. Il y eut une confusion et Svan et Rilc parvinrent à faire chuter Lloyd dans le sable. Mais avant que ça ne dégénère, Mumkin était déjà en train d’essayer d’attirer Svan en arrière.

- Attendez, ‘tendez ! laissez-le ! Il est du clan, après tout, on l’a pas banni, il a le droit de savoir !

A la table, seule Zoraïda était restée assise et regardait la scène d’un œil acéré. Tous les autres étaient levés, et on aidait Svan et Rilc à se relever, on leur intimait de se calmer.

- Il a raison, fit Goshgosh.
- Mon cousin Jyxo, reprit Mumkin comme personne ne protestait cette fois-ci. Il a intégré leur camp. Mais ils font des… Des affaires spéciales.
- Je me fous de leurs affaires, je veux savoir ce qu’ils ont fait de cet enfoiré et de son escouade, grogna le hapien en se remettant debout à son tour.
- Ouais, ben, je pourrais te mettre en contact avec lui, pour qu’il te donne un point de rendez-vous et te livre les infos. Le problème, c’est qu’ils aiment pas trop trop les impériaux, tu vois. Même pas du tout. Ils comprendraient pas trop, tu vois…
- Ils te buteraient volontiers, intervint Svan pour traduire le propos tortueux de Mumkin.
- Ben, t’as qu’à dire que j’suis quelqu’un d’autre. Tiens, un certain Vance Hickpens, pilote mercenaire, un copain à toi qui a sa petite vengeance personnelle à mener et…
- Non, Lloyd.

Le ton de Kalon avait été sec, faisant taire tout le monde.

- C’est tout le clan qui a été attaqué. Il y aura une vengeance, mais ça ne sera pas ta vengeance personnelle. Le clan entier va s’organiser pour aller les attaquer et tu participeras si tu veux. En attendant, tu t’assois et tu manges, ou tu vas te laver. Bref tu es au clan, ici, tout Sith ou impérial que tu es. Donc le deal est simple : soit tu te plies à la vie du camp, soit tu repars sur ton grand vaisseau, pour laisser du temps à tout le monde d’aller mieux, et Dana en particulier, qui n’a pas besoin que tu rajoutes des idioties à son histoire déjà rendue terrible par les derniers évènements.

Lloyd affronta Kalon du regard, près à lui répondre, mais il pinça les lèvres, se retenant. Subitement, il tourna les talons et s’éloigna pour remonter vers les roulottes d’un pas pressé. Mumkin soupira, et tout le monde repartit se rasseoir à table. En passant, Svan donna une petite tape derrière le crâne de Mumkin.

- Comment tu te laisses traiter par lui ?!
- Nan mais, il est pas comme ça d’habitude…
- Tu plaisantes, la dernière fois qu’il est venu il t’a menacé de te tuer. Comment tu peux travailler pour des types comme ça ?

Le pilote fit la moue et fit mine de s’intéresser à son assiette pendant que Svan regagnait sa place, lui aussi.

- Et franchement, quand t’as ramené Dana, tout le monde a vu les marques qu’elle avait, sur le visage en plus. Encore plus qu’avant. C’est odieux.
- Nan mais ça c’est…
- MAIS ARRETE DE LE DEFENDRE PUTAIN ! IL A RIEN A FOUTRE ICI ! IL EST LA JUSTE PARCE QU'IL A UNE PUTAIN DE GUEULE D'ANGE ET QUE LES BONNES FEMMES VOIENT PAS SA VRAIE NATURE A CAUSE DE CA !

Mumkin intimidé plongea le nez dans son assiette. Ils continuèrent tous à manger en silence.









Ce ne fut que plusieurs heures plus tard qu’on donna l’alerte : Lloyd était parti. Il avait repris sa motospeeder, et n’avait rien laissé derrière lui.

Il avait fait son choix.



CSS par Gaelle

Darth Hope
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L’Agonie des Krayt

C’était ce qui faisait d’elle une vraie Sith.







Dana fixait la porte de la roulotte, les yeux dans le vague. Une porte que Lloyd Hope avait franchi dans un sens ; un sens unique. Voilà, il ne reviendrait plus jamais. Ses jumelles ne reviendraient plus jamais non plus. Elle se retrouvait à la merci d’elle-même, de sa solitude, et à ses pieds, des millions de morceaux gisaient : des éclats de son âme, de ses aspirations, de ses espoirs. Le sommeil avait fini par l’emporter jusqu’au soir où une présence l’avait réveillé. Le masque de Zoraïda se figea dans son champ de vision et Shar se redressa un peu. La vieille doyenne portait un plateau composé d’un bol de bouillon tiède et d’une purée de légumes froide. Elle déposa le repas sur les cuisses de la Sith et s’installa au bord du lit.

- J’ai pas faim.
- Tu as passé plus de six semaines ici. Je t’ai observé. Tu n’as enfreint aucune règle. Tu étais comme n’importe quelle femme de ce camp.
- Laissez-moi, j’ai juste envie de crever. Vous pouvez comprendre ça, vieille folle ?!
- Ce que je veux dire, insista calmement Zora en se relevant. C’est qu’en l’absence de Lloyd, c’est le meilleur de toi-même qui émerge. J’avais prédit ce drame, quand tu as tiré les cartes.
- Vous me dégoûtez, s’insurgea-t-elle en balayant d’un revers de la main le plateau qui alla cogner le mur proche. Bol et assiette se fracassèrent, déversant leur contenu odorant.
- Il est parti. Nous lui avons proposé de rester ici, et de nous aider contre Vollen. Il a choisi de partir.
- Ouais, il est capitaine de frégate maintenant. Il fait son taff, expliqua-t-elle avec amertume. Oubliez-le. Je vais vous aider contre Vollen. Quand je me serai rétablie, je vais éventrer ce chien. Il a fait une grave erreur.

Puis elle grimaça subitement, se penchant en avant pour encaisser une douleur soudaine à l’abdomen.

- Les femmes Serpent ne combattent pas.
- Je suis….
- Mais les dragonnes si, la coupa Zoraïda d’un ton franc. Si tu deviens une Krayt, tu pourras chasser Vollen.
- Devenir une….Krayt ?

La doyenne observa les dégâts de la colère de l’Inquisitrice au travers de son masque impeccable avant de sortir, sans un mot de plus. Dana se laissa glisser le long du tas de coussins qui la soutenaient et ferma les yeux. Tout le monde avait commis de graves erreurs. Vollen pour l’avoir agressée. Lloyd pour l’avoir, une fois de plus abandonnée. Elle-même, pour avoir absurdement accepté une grossesse. Et toutes les erreurs se payaient. Il suffisait juste de faire patiemment la file à la caisse et d’attendre son tour. D’ici là, on pouvait faire les comptes, rassembler sa petite monnaie et ses gros billets, anticiper l’addition et enfin, contrôler une dernière fois son panier d’erreurs. La concernant, il y en avait un paquet. Elle devrait peut-être faire crédit à la vie, comme toujours.










A l’aube suivante, les propulseurs d’une motospeeder lancée à toute vitesse soulevaient des gerbes de boues. La pluie avait enfin cessé après toute une nuit à tomber ; c’était comme si les cieux avaient finalement accepté de sécher leurs larmes, mais ces dernières avaient déposé sur ce coin de Jabiim une pellicule crasse et humide. Au travers de lunettes de précisions, une silhouette observait ce nuage de boue et d’énergie. Perchée sur un promontoire de pierres à l’orée d’une jungle comme il en existait tant sur la planète, elle dessina un sourire carnassier sur son visage et décrocha la lanière d’un fusil de précision qui pendait à son épaule dénudée. Elle prit son temps, la bouche occupée par une cigarra se consumant lentement. Elle ferma un œil, le chien du fusil s’aligna sur la trajectoire du conducteur de l’engin, son doigt caressa la gâchette. Il lui fallut retenir sa respiration. Faucher des cibles mouvantes requérait une concentration infernale.

Clic.


Le projectile jaillit : une petite bille métallique qui s’embrasa à une vitesse subsonique.

Et il traversa le bras droit de la cible. L’élan du choc propulsa le conducteur au sol tandis que le véhicule poursuivait une trajectoire fantôme et rectiligne.

- En plein dans le mile.
- Bien joué, Vika, sourit Callum qui émergeait dans son dos, accompagné d’un dévaronien dont les cicatrices striaient un faciès démoniaques. Allez, Dùnx, allons récupérer notre ami l’impérial.
- Beau tir soeurette, clama Dùnx avant d’entamer la descente du promontoire.
- Vous direz à Jyxo que c’moi qui l’a abattu hein ! sinon il m’croira pas !

Mais ils ne l’entendaient déjà plus ; tout au plus ils jetèrent une dernière œillade vers la silhouette de Vika, dont les grands yeux en forme d’amandes lançaient des éclairs de fierté. Et cette suffisance accentuait sa beauté sauvage. Ses cheveux cascadaient en volutes de jais sur ses épaules à la teinte halée. Rien ne pouvait laisser penser qu’elle était dévaronienne, si ce n’était ce petit air exotique qui la différenciait d’une humaine lambda.

Callum se pencha au-dessus de leur victime dont le bras était pour le moment hors-service à cause d’une percée sanglante. Il observa la chevelure blonde, l’uniforme souillé par la boue, maculé de terre, les traits fatigués par des heures de routes à travers les paysages de Jabiim. Son acolyte se pencha et décrocha le sabre-laser qui pendait à la ceinture du Sith.

- On a bien fait d’utiliser le verpine, constata froidement Callum après avoir remarqué ce détail. Il attrapa son fusil-blaster et planta ses prunelles vertes dans celle du hapien. Emeraude contre émeraude. L’ombre du chef Krayt s’étendait sur le blond, lui cachant la lumière du soleil. Bienvenue sur le territoire des dragons, pauvre con. On t’a suivi à la trace et à l’odeur, comme le sale bantha impérial que t’es.

Et il lui asséna un coup de crosse assez violent pour l’assommer.





Trois jours avaient passé depuis le funeste accouchement. Dana acceptait de manger en petite quantité. Elle saignait encore, mais les pertes n’étaient plus de nature à engager son pronostic vital. Elle avait pu quitter le lit, faire quelques pas dans la roulotte, se refamiliariser avec ses propres muscles. Parce qu’elle était isolée, elle avait concentré ses forces sur des petits exercices banaux. Son ventre n’avait plus l’arrondi d’une maternité raté, elle avait éjecté les derniers traces de ce qui aurait fait d’elle une mère et elle se préparait à redevenir l’Inquisitrice ratée, la pomme pourrie du lot. Elle avait décidé que compartimenter ne suffirait plus. Il fallait enterrer, loin, creuser, profondément. Il fallait se débarrasser de tous ces sentiments superflus. Il fallait faire confiance au Côté Obscur, s’abandonner à lui. La méditation s’imposait quand son corps n’avait plus l’énergie nécessaire pour bouger. Elle condensait la Force, lévitait et empruntait tous les sentiers qui l’avaient déjà menée au Côté Obscur de la Force, jusqu’à être le cœur de l’Obscurité pour ne plus connaître la peur. Plus jamais. Elle serait le destructeur de ce monde qui ne lui avait rien donné, que ses enfants ne connaîtraient jamais. Elle serait le feu de la haine. L’univers entier se prosternerait devant elle. Elle s’engageait dans l’Obscurité, elle découvrirait la vraie vie. Dans la Mort de toute lumière.

C’était ce qui faisait d’elle une vraie Sith. C’était ce qui enterrerait les traumatismes, les souvenirs, comme il avait enterré ses bébés. C’était comme ça qu’il avait toujours réglé les problèmes, comme un chien qui enterrait ses os dans l’espoir de ne plus se rappeler leur odeur, de ne plus les retrouver.


A la fin du troisième jour, elle avait quitté la roulotte d’un pas chancelant et elle s’était mise à courir sur le rivage. Deux mètres après le début de sa course, elle s’effondra, face contre terre, le souffle haletant, le ventre en feu comme son front luisant de fièvre. Elle avait crié de rage, avait tenté de se redresser, avait couru trois mètres et avait chuté de nouveau.

- DANA ! hurla Ruth qui courait depuis le campement, sa robe volait autour de ses jambes galbées. Dana qu’est-ce que tu fais ?!

Ruth dérapa dans le sable, attrapa le bras de l’Inquisitrice pour l’aider à se relever. Le treillis que l’Inquisitrice portait était souillé de sang au niveau des cuisses.

- T’es pas prête encore, t’es complètement dingue, on retourne à la roulotte.

Mais l’Inquisitrice se dégagea d’un geste sec, essoufflée.

- Je dois rentrer au plus vite, avec la tête de Vollen.
- Il se passe quoi ?! intervint la voix affolée de Mumkin qui dévalait la plage à son tour, suivi de Mercy.
- Dana a décidé de faire un footing, trois jours après avoir accouché ! Et tout ça pour décapiter quelqu’un, charmant hein ?
- Dana…Sérieux…
- Et quoi ? répliqua Shar en fustigeant Mumkin.
- Bref. Mamy Zora a demandé à te voir, annonça la rouquine.






La roulotte de Zoraïda n’avait pas changé depuis sa dernière visite. La doyenne trônait sur son siège ouvragé, derrière un bureau encombré de bric et de broc mystiques et parfois moins (comme l’attestaient la présence de datapad compilant des données de comptabilité. Les affaires.) Ses yeux orageux décrivaient le couple face à elle. A l’éclairage des lampes à énergie, Callum admirait le derme de Dana Shar couvert d’une sueur à la fois maladif et induite par l’effort. La transpiration faisait briller le nacre de cette peau palpitante, soulignant la douceur d’une courbe s’échappant du décolleté d’un débardeur sombre. Et Dana contemplait le chef Krayt, sa chevelure indomptée dont il était difficile de définir la couleur : blonde, rousse ? Mais ses yeux verts lui refilaient la nausée. Il possédait une musculature développée sous ses habits d’itinérants qu’il arborait avec une désinvolture teintée de fierté.

- Callum est le chef des Krayt. Et le principal ennemi de Vollen.
- T’es l’ennemi de Vollen ou de l’Empire, questionna sèchement Dana.
- J’avais aucun souci avec les impériaux avant que Vollen se ramène, répondit-il rapidement. Je pourrais rajouter sa manière peu gentleman de te traiter dans ma longue liste de grief à lui faire payer mais….je sens que t’es une eachtrach qui est du genre à aimer se venger elle-même.
- Une quoi ?
- C’est un mot des tribus itinérantes pour désigner une étrangère, traduit sobrement Zoraïda.
- Pourquoi je suis là exactement ? s’impatienta Dana en lorgnant vers la masquée, fatiguée.
- Mon clan est vulnérable. Nous n’avons pas les moyens de faire face à de futures descentes des autorités impériales ici. Peu importe où nous irions, Vollen restera une menace sérieuse. Puisque nous ne pouvons combattre aux côtés des Krayt, nous leur avons proposé une alliance. Une Serpent pour le roi des dragons.

Dana ne répondit rien. Elle repoussa sa chaise et se leva, prête à quitter les lieux sans même un commentaire, mais Callum lui saisit le poignet.

- C’est ce que tu voulais, la tête de Vollen. Le prix à payer est simple. Tu deviens une Krayt et tu peux te battre.

Elle se dégagea d’un geste brusque et plaqua ses mains à plat sur le bureau pour se pencher vers la doyenne.

- Je suis une putain d’Inquisitrice Sith, articula-t-elle, le ton menaçant. Si je veux récupérer une tête, j’ai pas besoin de payer.
- C’est dommage alors. Je serai obligé d’exécuter un complice de Vollen que j’ai recueilli dans le désert y’a trois jours.

Zoraïda et Callum échangèrent une œillade entendue.

- Qu’est-ce que ça peut me foutre ?
- Il disait s’appeler comment déjà…Lloyd, je pense.
- Lloyd ? Lloyd ! Vous m’aviez dit qu’il était parti, vieille bique !
- Il a fait le choix de quitter le clan, de rejoindre les impériaux. Il s’est donc soumis aux lois des régions hostiles de Jabiim et de ses itinérants. Il porte le même uniforme que Vollen.

Dana balaya tous les objets présents sur le bureau d’un geste enragé, furieuse. Elle sentait son cœur battre à tout rompre et elle avait chaud. Le décor exotique de la roulotte tangua devant ses yeux à la vision instable. Elle était encore affaiblie. Ses pensées s’emballaient. Elle avait des hallucinations due à sa fièvre, à l’hémorragie qui avait repris. Elle percevait Luis Raidun émerger des ombres de la roulotte. Il se rapprochait d’elle et murmurait à son oreille. Et soudainement, tout devenait plus clair. Elle devait savoir si le clan Krayt cachait un réseau de résistance, ou si Vollen était corrompu.

- D’accord. Je deviens une Krayt.

Mais ses jambes cotonneuses ne la soutenaient plus et elle sentit son esprit basculer dans les ténèbres. Callum se pencha en avant pour récupérer sa nouvelle fiancée dans les bras. Il la souleva doucement.

- Ca se passera bien, promit-il vers Zoraïda. Tu m’assures que c’est bien la femme qui a défait ce connard de Darren Saphir.
- C’est bien elle.











Le soleil se couchait au campement des Krayt, en pleine cœur de la jungle sombre. Pas de roulottes, pas de dais colorés : il n’y avait que des tentes et des constructions en dur qui couraient dans les arbres, faites de bois et de feuillage. La communauté des Krayt n’était pas bien grande et comptai une trentaine d’individus qui se déplaçait tous les mois d’un point à un autre. Il fut un temps où les Krayt formaient un clan puissant, assez pour rivaliser avec les Saphir. Ils avaient eu la richesse, le respect, la crainte qu’ils induisaient chez leur adversaire. Mais ils avaient chu et de tous les clans de Jabiim, ils étaient ceux qui baignaient dans l’illégalité la plus dangereuse. On les décrivait comme des âmes cruelles et sans honneur qui se vendaient aux plus offrants.

Quand Callum était rentré, les siens avaient tourné ses yeux vers lui, à la lueur des fanaux plantés à même la terre meuble de la forêt. Le jeune homme portait une femme inconsciente dans les bras. Il se dirigeait vers une structure qui avait éventré les arbres et autour de laquelle les tentes avaient été dressées. Cette structure : ombre d’acier immense était l’épave d’un vaisseau spatial de la taille du Sans-Visage échoué au cœur d’une végétation qui l’avait gardé jalousement au fil des ans. Callum était également passé devant une cage à barreaux énergétiques, directement reliée aux générateurs du vaisseau et de nouveau, l’émeraude avant affronté l’émeraude ; le temps d’une seconde. Un sourire s’était peint sur les lèvres du chef de clan qui finit par disparaître dans la structure.

















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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Ici personne ne juge qui que ce soit sur son passé. Si tu as le courage de te battre, alors tu as le courage d’être une dragonne.





La douleur avait été fulgurante. Le tir de verpine, puis la chute du motospeeder. Il avait roulé sur plusieurs mètres, persuadé que son bras était déchiqueté, à gémir de souffrance, sans se rendre compte de la chance folle qu’il avait eu de ne pas se rompre le cou. Puis il y avait eu ce coup de crosse, et tout était devenu obscur.












- Mmpfff… Aaah.

Le réveil au son des va et viens des motospeeders. En plus de la douleur, Lloyd avait soif. Il avait crié, étendu à même le sol inconfortable couvert de branches et de cailloux, et une dévaronienne à la peau et aux cheveux sombres était apparue avec un large sourire, de l’autre côté des barreaux. Elle ne les désactiva qu’un bref instant, le temps de lui tendre un gobelet. Mais au lieu de le laisser s’en saisir pour boire, elle le porta près de son visage, et quand le hapien essaya de se redresser pour tendre les lèvres, elle lui jeta le contenu à la figure. Il éructa tandis qu’elle riait à gorge déployée.

- Connasse, grommela-t-il en s’essuyant le visage de sa main valide, non sans grimacer de douleur.
- Y’a pas d’quoi. Si t’as soif, ou si t’as mal et que tu veux quelque chose pour apaiser ça… Ben t’as qu’à te mettre à genoux et me supplier. C’est comme ça que ça se passe, ici.
- Tu rêves.
- On verra. J’m’appelle Vika. Comme ça, tu sauras qui appeler quand tu seras prêt à supplier à genoux.

Vika se releva et le laissa là. Lloyd la regarda partir entre les constructions grises et sordides abritées par les arbres. Le cadre était beaucoup moins joli que celui des serpents – ou alors, c’était la douleur qui lui faisait voir tout en noir : les toits étaient délabrés, certains murs étaient parsemés d’anciens tirs de blasters et les arbres hauts laissaient peu passer la lumière du jour. Tout en plus y paraissait humide : l’air était lourd et chaud, les feuilles au sol recouvraient un sol vivant, où les insectes couraient joyeusement, et le hapien sursauta quelques fois en sentant sur sa peau où à travers ses vêtements de longs mille-pattes se frayer un chemin dans sa cellule. Il avait hérité de piqûres qui le démangeaient, mais chaque mouvement était douloureux. Le repos était presque impossible. Il avait tenté d’utiliser la Force, mais il se sentait nauséeux, et il soupçonnait les dragons de lui avoir injecté quelque chose pour le garder calme, amenuisant ses capacités de sensitif. Mais il avait bien l’intention de ne pas révéler sa nature de Sith et de réussir à négocier avec quelqu’un pour obtenir l’information qu’il cherchait.

La journée passa sans qu’on lui adressât la parole. Il s’était redressé pour s’adosser au mur, à tenir son bras endolori, sur lequel quelqu’un avait réalisé un bandage dans un tissu minable. On lui avait bien sûr retiré sa veste d’uniforme, dans laquelle se trouvait entre autres son comlink. Vika revint le soir et comme le matin, elle lui demanda de supplier pour à boire et à manger, de supplier pour des médicaments. Il l’insulta encore, elle lui jeta encore l’eau à la figure.
Mais le lendemain matin, après une nuit de souffrance, de périodes de sommeil entrecoupés de réveils affolés, il avait commencé à s’inquiéter sérieusement. Il avait de la fièvre. Il tremblait, suait. Les arbres aux feuillages épais et verts lui semblaient rosir à chaque fois qu’un vertige l’affectait. Soit sa blessure était en train de s’infecter, soit il y avait dans ce lieu quelque chose d’hallucinogène. Alors, quand Vika se montra, son gobelet d’eau à la main, son autre main poing serrée sur la hanche, un petit sourire aux lèvres, il se rapprocha des barreaux en la suppliant du regard.

- Alors, prêt à se soumettre ?
- Ça va, ça va, gémit-il. Ok, je t’en supplie. Donne-moi quelque chose, ma blessure s’infecte et je… J’ai soif. S’il te plait, Vika ?

Le sourire de Vika s’élargit.

- Mais qu’il est mignon, quand il veut.

Elle lui tendit le gobelet et le hapien s’en empara, l’avalant d’une traite. Vika récupéra immédiatement l’objet entre les barreaux.

- Bon, je t’en ressers un, avec un médicament cette fois dedans. Un antibiotique. Mais ils coûtent cher. T’en auras qu’un par jour.
- Ok. Mais écoutez, j’peux pas rester. Je… J’ai un genre de vaisseau qui m’attend, c’est important. Et je sais… Je sais qu’vous cherchez un impérial, et justement…
- Hop hop hop, ralentis. Ton vaisseau, tu peux te le mettre où j’pense, t’es pas au club Vaynai, ici. T’es prisonnier, mon mignon. T’es vivant que parce que le chef, il dit que vu le nombre de barres que t’as sur ta veste, tu dois coûter cher. Et en ce moment, ça tombe bien, on est un peu sans ressource, alors tout ce qui a de la valeur, on prend.

Le hapien laissa échapper un soupir, avant de grimacer de douleur. Son bras ne voulait plus lui laisser de répit. Il haleta avant d’essayer de se concentrer de nouveau sur la dévaronienne, mais il voyait trouble, et il n’était pas sûr de bien comprendre.

- Ecoute, c’est vrai, je vaux cher, probablement. Mais surtout, je suis pas copain avec le colonel Val… Fol… Vollen. Vollen ? Bref, celui avec qui vous vous êtes battus l’autre jour.

Vika s’accroupit soudain pour voir le hapien de plus près, intéressée.

- Sérieux ?
- Oui, je le cherche. En fait, je vous cherchais, d'abord.
- C'est plutôt nous qui t'avons trouvé, pour le coup.
- Pour que vous me disiez où il est, poursuivit Lloyd sans relever la remarque. Parce que je veux le buter, moi aussi. Je suis de votre côté. Vous n’aurez plus de problèmes avec l’Empire, enfin plus pour ce que vous avez fait jusqu’à aujourd’hui, si vous me donnez ce coup de main là, ok ?

Vika haussa les épaules. Elle considéra le gobelet, pinça les lèvres.

- J’sais pas pourquoi je devrais te croire. De toute façon, le chef est pas là. Quand il rentrera, tu lui raconteras tout ça, et on verra à ce moment-là.

Lloyd soupira.

- Il rentre quand ?
- Demain soir, je pense. Allez, fais pas cette tête, je vais te chercher ton médicament.







Le médicament avait calmé la douleur. Il avait aussi complètement ensuqué le hapien, qui gisait au fond de sa cellule, amorphe. On lui avait glissé des fruits entre les barreaux magnétiques, qu’il avait à peine goûté. Il n’avait qu’un seau pour faire ses besoins, sans intimité, et Vika ne cessait de traîner devant les barreaux avec son fusil. Il aurait payé cher un peu de vraie solitude, et aussi l’accès à son comlink, mais la dévaronienne avait refusé net la moindre requête. Elle lui avait demandé en riant s’il savait se servir de sa langue, auquel cas elle pourrait réfléchir, alors il était retombé dans un silence morne, ruminant que sa frégate entière allait l’attendre en se demandant où il était passé, que Vollen était probablement déjà loin, que Dana devait le détester encore plus d’être parti.
Peut-être qu’il n’aurait jamais dû venir sur Jabiim. Il s’était mis à croire absurdement que s’il n’était pas venu, peut-être auraient-elles survécu.








- HE !!

Il s’était relevé à la hâte pour s’approcher des barreaux, dont la chaleur magnétique le forçait à se maintenir à plus de dix centimètres s’il ne voulait pas risquer de se brûler. Callon ne se retourna même pas après lui avoir jeté son regard entendu.

- HE ! hurla Lloyd encore une fois. VOUS NE POUVEZ PAS LA FAIRE PRISONNIERE ! VOUS N’AVEZ PAS…

Il étouffa un grognement de douleur. Vika venait de lui envoyer la crosse de son fusil dans la mâchoire.

- Laisse le chef tranquille. Il viendra te parler quand il aura le temps.
- Mais c’est important ! décréta le hapien hors de lui, se tenant toujours le bras dont le bandage avait rougi. Cette femme est en convalescence, si vous la traitez comme moi sa vie sera en danger et…

Vika avait éclaté de rire.

- Décidément, les impériaux sont encore plus absurdes que ce que je pensais. Est-ce que c’est une spécialité des officiers de ton rang ? La traiter comme toi, n’importe quoi. C’est la fiancée du chef. Elle sera traité comme une petite reine, ici.

Le hapien arrondit les yeux.

- La… La fiancée ? Mais… Vous l’avez enlevée ?
- Non. Tu nous prends pour des sauvages ?

Callum était reparu, déchargé de son fardeau. Il croisait les bras sur sa poitrine, un petit sourire fier aux lèvres. Il fit un signe bref à Vika, qui lança une dernière œillade narquoise à Lloyd avant de s’éloigner. Callum attrapa un tabouret, qu’il posa devant les barreaux, et s’assit en se penchant vers le hapien. Mais celui-ci s’était tu, contemplant des émeraudes presque semblables aux siennes. Callum était plus jeune que lui, c’était évident. Il était visiblement aussi en meilleure santé – pas de cernes qui trahissaient la fatigue, un teint tanné par le soleil doux de Jabiim et des crépitements qui faisaient pétiller ses yeux, qui trahissaient son amour de la vie et des surprises propres à l’adrénaline du danger.

- Alors alors, fit doucement Callum. Tu connais ma fiancée ?

Lloyd était devenu mutique. Il ne savait pas que répondre. Il voulait en savoir plus. Il n’était pas là pour ça. Le sourire de Callum s’élargit.

- Elle a accepté de devenir mon épouse, pour qu’on puisse aller combattre Vollen.
- Quoi ?!

C’était sorti tout seul, cette fois.

- Non. Elle est malade. Et fatiguée. Et si vous ne m’aviez pas blessé autant, j’aurais pu y aller avec vous. On n’en aurait fait qu’une bouchée.
- Mmh, mmh, acquiesça pensivement Callum.

L’humain sortit un petit fruit de sa poche et un couteau, et il commença à le peler d’une main habile, tout en réfléchissant visiblement. Les fanaux à proximité jetaient des lueurs chaudes sur le visage facétieux de Callum.

- Oui, Vika m’a raconté, que c’était ça que tu voulais. Enfin perso je me demandais ce que foutait un officier seul au milieu du désert. T’as une belle veste. Je pense que je vais la garder. Arracher le sigle de l’Empire, bien sûr, y faire broder un dragon dessus et…
- Fais c’que tu veux de ma veste et des symboles de l’Empire, je m’en tape. Je veux juste la peau de Vollen.
- Les impériaux sont pas censés s’entretuer pourtant ?
- Ils étaient pas censés s’en prendre au clan des Serpents non plus.
- Ah.

Callum mangeait pensivement.

- Bon. J’y réfléchirai. J’ai déjà ma petite idée. Mais on pourra rien faire avant après-demain. Puisque demain, c’est mon mariage. Et je compte bien en profiter.

Lloyd blêmit.

- Dé… Déjà ? Mais…

Mais quoi ?

- T’es aussi blanc qu’un mort, l’impérial. On t’a donné des médocs ?

Le hapien acquiesça en déglutissant.

- Bon. Faut qu’tu survives. Si tu m’es utile, je réfléchirai à ce que je ferai de toi, si je serai clément ou pas.

Et sur ces mots, Callum se leva. Il avala le dernier morceau de fruit, avant de jeter le noyau dans la cellule de Lloyd.










Le hapien ne dormit pas de la nuit. Il était assis au fond de sa cellule, à tourner et retourner la situation. S’il avait eu ses deux bras valides, il aurait creusé pour s’enfuir, mais ce n’était pas possible. Il imagina utiliser la Force pour tuer les membres du camp, mais il ne pourrait jamais les tuer tous et on aurait tôt fait de comprendre que c’était lui, et on l’abattrait d’un tir de fusil verpine. Il ne pouvait donc que négocier sa sortie.



















Quand il fermait les yeux, de toute façon, quelqu’un mettait le canon d’un blaster dans la bouche d’une Dana éventrée, entre les cuisses desquelles deux bébés morts le regardaient de leurs yeux verts et accusateurs.





















Au matin, il s’éveilla en sursaut, au son de percussions folles. La journée était déjà avancée et son cœur se mit à battre à tout rompre, surpris par le bruit, par les allées et venues. Soudain, des tentes avaient été pliées, donnant plus de visibilité. Les fanaux étaient déjà allumés, et de l’encens emplissait l’air tandis que des individus apportaient de grandes tiges sèches qu’ils entassaient au centre de la clairière sur laquelle le hapien avait vue. Les conversations allaient bon train, on s’entraînait sur ces percussions, on lançait des cris joyeux. Bientôt, on jeta une allumette dans cette pyramide d’herbes sèches, et un feu immense illumina la clairière, en même temps qu’une épaisse fumée était emportée dans le ciel, dont des cendres retombaient parfois en déposant une odeur de paille consumée.

Lloyd regardait tous ces préparatifs d’un œil morne, quand Vika vint se planter devant lui.

- La grasse mat’ est finie ?
- Vous allez pas vous faire repérer avec une fumée pareille ?
- On se permet des feux qu’une fois par an, pour le mariage le plus important de l’année. Nous gâche pas notre plaisir. T’as mal ?
- Avec un trou à la place du biceps, et un bandage pas changé depuis trois jours, tu crois quoi ?
- Ben tu sais ce qui te reste à faire. Sois un mignon petit impérial.
- T’es obligée de faire ça ?
- Pas du tout. Mais toi oui, si tu veux bouffer et boire, et survivre.

Lloyd laissa un gros soupir. De sa position assise, il bascula sur ses genoux en grommelant.

- Je te supplie de me donner à boire et le médicament.
- Pas à manger ?

Il haussa les épaules.

- Faut que tu manges aussi. Sinon tu nous serviras à rien.
- Bon ben, à manger aussi alors.
- Supplie.
- Je t’en supplie.
- Tu supplies qui ?
- Je t'en supplie Vika.
- C’est un bon petit impérial, ça.

Après lui avoir donné son gobelet, elle passa la main entre les barreaux pour lui gratter les cheveux dans une imitation d’un geste affectueux. Il s’écarta pour retourner au fond de sa cellule, où il s’avachit de nouveau contre le mur.

Les préparatifs se poursuivirent une bonne partie de la journée. Des odeurs de cuisine emplirent les lieux, faisant se tordre le ventre du hapien, mais il avait déjà mangé tous les fruits qu’on lui avait donné et ce n’était guère suffisant. Parmi les décorations, on avait installé des guirlandes faites de boules d’herbes sèches et de morceaux de métal. C’était loin des couleurs flamboyantes du camp des serpents ; c’était plus rustique, du fait main, sur place. Probablement les dragons ne pouvaient-ils pas se charger, à cause de leur vie itinérante, d’objets inutiles comme des éléments décoratifs. Alors toute la journée, ils avaient fabriqué tous les jolies ornements dont on ne se servirait qu’une seule fois, pour cette occasion spéciale : le mariage de Callum et Dana, dont tout le monde parlait déjà. Elle contrôle les loups, disait-on, et elle est revenue d’un sacrifice des saphirs. Elle possède la magie des rois, et elle a accepté d’épouser le chef de clans.
Lloyd entendait ces commentaires, regardait d’un air sombre les deux fauteuils immenses qu’on dressait non loin du feu, devant une table que l’on garnissait de mets délicieux, et se mentait. Dana ne pouvait pas faire ça.

Mais soudain, il y eut une accalmie parmi l’assemblée qui terminait les préparatifs. Du vaisseau échoué, Callum surgit, dans une tenue blanche, étincelante. Ses bras musculeux dépassaient d’un tshirt clair et dans ses bras, il tenait l’Inquisitrice comme une princesse. Elle-même vêtue d’une longue robe blanche recouverte de perles, et dans ses cheveux une couronne de fleurs la faisait paraître une princesse locale. Elle avait dû être maquillée, car son visage rayonnait ; des lèvres rouges magnifiques, des yeux soulignées de noir qui révélaient l’étendue dorée qu’elle posait sur cette scène étrange, qu’on avait montée rien que pour eux deux. Le hapien fit la moue et roula de côté avec un grognement.

Il était subitement bien décidé à rester étendu là sur le flanc, à contempler les insectes se promener sous ses yeux devant un mur, en tournant le dos à cette mascarade.







- Alors Dana, je sais pas comment t’as vécu… avant ici. Et avant les Serpents.

Callum avait déposé l’Inquisitrice sur l’un des deux fauteuils. Tout autour d’eux, la fête avait réellement commencé. Les percussions s’affolaient, on dansait. Une femme passa un collier de fleurs sur les épaules de Callum, avant d’en faire de même avec Dana, afin qu’on reconnût les mariés du soir. Ce n’était pourtant pas difficile : ils étaient si beaux, comparés aux autres qui portaient leur tenue habituelle, mais qui mettait un point d’honneur à commencer à s’amuser sérieusement. Certains commençaient à utiliser des grandes piques pour faire rôtir des morceaux de viande. Callum était resté debout, posant son coude sur le dossier du siège de Dana pour pouvoir lui parler de plus près.

- Mais ça n’a plus d’importance. Ici personne ne juge qui que ce soit sur son passé. Si tu as le courage de te battre, alors tu as le courage d’être une dragonne.

Il se redressa pour aller chercher deux verres rempli d’un liquide rouge comme le sang, qui sentait une légère odeur d’alcool sucré. Il lui tendit l’un des deux verres, puis trinqua doucement avec elle, lui accordant un regard doux, séducteur.

- Mais j’aimerais savoir ce que tu aimes. Pour que tu sois heureuse parmi nous. Après ta vengeance, je veux que tu sois une femme comblée. Être la femme du chef de clan comporte un certain nombre de devoirs, mais je suis sûr que tu t’en sortiras très bien. Tu sais comment je le sais ? Je t’ai vue, hier. Essayer de courir alors que tu viens à peine de… Enfin, on m’a raconté, en substance. J’ai vu que tu avais un courage fou.

Il plissa les yeux, se rapprocha d’elle et trempa les lèvres dans sa boisson.

- Oh, je sais, reprit-il. On ne se connait pas encore, tu es juste venue pour tuer Vollen. Ça aussi, ça fait partie des raisons pour lesquelles je t’ai voulue. C’est l’état d’esprit d’une dragonne. Et je sais que tu ne vas pas beaucoup penser à nous avant d’avoir eu la peau de ce chien d’impérial. Malheureusement, on a perdu Vollen. Il y a eu une grande chasse, l’autre jour. Ils se sont terrés dans les collines du nord, ils doivent y être encore. J’ai un plan, figure-toi. On va les piéger.

Callum s’écarta, et de la main qui tenait son verre, désigna vaguement une direction en face d’eux ; la cage.

- Tu vois le prisonnier, là-bas ? C’est un impérial, un officier avec beaucoup de jolies barrettes sur sa veste. Il vaut sûrement cher ; Vollen ne laissera pas passer un type de cette catégorie. On va s’en servir comme appât. On va tendre une jolie embuscade. On envoie le message selon lequel on livre ce type en échange de ma liberté. On leur donne rendez-vous dans les montagnes, là où on pourrait préparer un joli guet-apens parce qu’on connaît mieux le terrain qu’eux. Ils vont voir l’officier, et quand ils vont descendre pour le cueillir, on les élimine tous.

Sur ses derniers mots, le ton de Callum s’était durci. Son regard émeraude s’était embrasé et son souffle s’était rapproché de celui de Dana. Il y avait dans ce regard une convoitise, mais aussi une retenue. Callum savait qu’il ne consommerait pas le mariage ce soir ; qu’en l’état, ce n’était pas possible pour son épouse. Mais il comptait bien gagner son estime, pour que, lorsqu’elle serait réparée, elle s’offrit à lui d’elle-même. Il sourit et s’écarta subitement.

Autour d’eux, les percussions avaient ralenti en un rythme lancinant. Les danses s’adaptaient, langoureuses. Vika avait attrapé un jeune homme par le cou et flirtait ostensiblement. Callum posa son verre sur l’accoudoir de son fauteuil, avant de tendre la main à Dana.

- Tu ne peux pas courir, pas encore tout à fait. Mais tu peux m’accorder une danse de quelques instants ? Nos corps mettront du temps à s’apprivoiser, on peut commencer en douceur. Qu’est-ce que tu en penses ?



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L’Agonie des Krayt  

C’était une observation qui lui avait sauté aux yeux quand ils étaient sortis de leur tanière







Callum avait conduit Dana au cœur du vaisseau abandonné. Il avait traversé plusieurs coursives dans le silence le plus absolu et il marchait lentement, comme s’il n’y avait pas la moindre urgence. Il atteignit l’infirmerie de bord dont les néons pâles indiquaient son fonctionnement. Les Krayt avaient réussi à connecter le vaisseau à des générateurs extérieurs qu’ils avaient aménagés dans la salle des machines après les avoir subtilisés ci et là. Les « affaires ». Pas de plantes médicinales ou de traditions ancestrales pour guérir les plaies ; les dragons tenaient à la technologie qu’ils avaient hérité de leurs premiers aïeuls et s’étaient targués d’avoir été le clan le plus sophistiqué de Jabiim, avant qu’il ne chute. Le chef posa le corps inconscient de l’Inquisitrice sur le med-pod et plaça un masque à oxygène sur sa figure qui semblait endormie. D’un coin de la pièce, une ombre rousse émergea, la taille cintrée dans une vieille combinaison médicale. Ses traits humains étaient réhaussés par deux grands yeux en amande d’une couleur sage et elle avisa l’inconsciente.

- C’est la eachtrach dont tu nous as parlé ? demanda-t-elle en se rapprochant avec précaution.
- Ouais, elle s’appelle Dana. Tu vas pouvoir la soigner ?
- Oh, cher frère, je pourrais ramener un mort à la vie, se targua-t-elle avec amusement avant d’enfiler des gants chirurgicaux.
- Ne rigole pas avec ça Kraya, fit soudainement l’humain, la mine sombre. Ou alors, ramène-moi tous ceux qui sont tombés par la faute de nos ennemis.
- Laisse-moi seule alors, je vais voir ce que je peux faire avec si peu de matériels et de réactifs.  









Spoiler:





En plein milieu de la nuit, Dana s’étai éveillée en sursaut au milieu d’une couchette étroite, dans l’espace exigu d’une cabine. Sa vision brouillée lui fit halluciner une guirlande écarlate au-dessus de sa chevelure emmêlée, mais après une mise au point, quand tout devint clair, elle comprit que cette pièce étroite n’avait rien en commun avec la cabine du capitaine. Elle grimaça en s’asseyant d’un geste trop brusque et porta une main à son ventre, soupirant. Elle remarqua des traces de perfusions sur ses mains et ses bras dénudés. Sa mémoire mit du temps à émerger. Zoraïda. Cette vieille salope l’avait encore vendue. Enfin, pouvait-on appeler ça une vente quand on avait accepté soi-même d’être une vulgaire monnaie d’échange. C’était un sacrifice nécessaire, pensa-t-elle, pour atteindre Vollen, pour atteindre ce mystérieux chef des dragons. Tout le monde y avait trouvé son compte. Sauf elle.

- Bon réveil belle-sœur ! s’amusa une voix féminine dans le système de comlink de la cabine. Il va falloir te préparer maintenant. Je t’ai donné une dose d’antidouleur et de calmant, ce qu’il faut pour endormir une dragonne blessée, alors tu vas pouvoir profiter de la plus belle journée de ta vie. Y’a une robe sur le bureau…

Dana détourna sa figure pâle vers le bureau en question et découvrit les perles qui reluisaient dans la pénombre.

- Et du maquillage. Enfin tout ce qu’il faut pour te transformer en princesse. Fais un effort. D’habitude, la mariée est pas sensée s’occuper elle-même de ces choses mais…on est un peu en sous-effectif tu vois.


Et Kraya raccrocha. Il n’eût bientôt plus que l’écho des vieux générateurs à carburant qui secouaient à peine la tranquillité du vaisseau. Elle aurait aimé être sur le Sans-Visage, comme avant. Elle déglutit péniblement en chassant ces pensées vaines qui lui remémoraient à quel point elle aurait voulu que ses filles puissent connaître les ronronnements des réacteurs sages du Sans-Visage, qu’elles puissent s’en bercer. Qu’elles découvrent la vue sur le vide depuis le hublot de la cabine du capitaine et être veillée par la lueur vermeille d’une guirlande qui avait le pouvoir de chasser les cauchemars. Dana soupira et se dépêcha d’attraper la robe d’un mouvement sec avant de se réfugier dans la salle d’eau.








Elle avait accouché et quelques longues, très longues heures plus tard elle fêtait son propre mariage, sans savoir ce qui avait pu lier ces deux événements. Les 72h écoulées n’avaient été qu’une journée étirée, entrecoupée de siestes qui ressemblaient vaguement à des nuits sans repos ni sommeil. Malgré les soins apportés par la technologie dont disposaient précieusement les dragons, Dana se sentait faible. Son corps se remettait lentement, mais elle n’était pas certaine que son esprit survive encore à une telle folie. Elle avait reformé la glace, trop épaisse par endroit, trop fragile à d’autres. Elle s’était trop précipitée pour que gèle la surface de son coeur, et sous la couche glaciale, elle voyait les corps de ses deux bébés flotter au gré d’un courant cruel, avant d’être emportés dans les profondeurs où Luis Raidun et les frères Ashar reposaient et les attendaient. Alors, elle voulait briser la glace à s’en fracturer les phalanges, pour plonger ses mains et récupérer ses deux filles, les ramener vers l’air libre, vers sa poitrine maternelle qui n’avait demandé qu’à les aimer mais ses doigts saisissaient le vide et l’eau fuyante. Et elle devait se rendre à l’évidence, la glace serait toujours fissurée. Depuis que Lloyd Hope l’avait fracassée en la percutant avec une violence trop tendre.


Ses prunelles dorées n’avaient pas quitté la cage et elle aurait voulu se délecter de ce spectacle, profiter de la sensation que justice était faite : qu’il était prisonnier comme elle le fut sur Artorias et qu’elle avait le contrôle, qu’elle était le centre de l’attention, qu’elle pourrait dire un mot pour qu’il bascule dans l’Enfer le plus total, mais Callum lui parlait et elle se rendait compte que c’était elle la prisonnière. Elle ne ressentait rien d’autres que les battements turbulents de son cœur à chaque fois qu’elle pensait percevoir Lloyd bouger dans cette cage immonde. Puis, le chef Krayt emplit son champ de vision et elle aperçut cette main tendue.

- J’en pense que ça manque de femmes, ici.

C’était une observation qui lui avait sauté aux yeux quand ils étaient sortis de leur tanière. Depuis les bras de Callum, elle avait contemplé le campement « en fête », n’avait croisé que des visages humains et dévaroniens aux traits masculins. Seule Vika avait paru comme une anomalie ; elles et quelques rares autres femmes. Alors elle avait compris ce que Kraya avait sous-entendu par : « On est en manque d’effectifs. » Était-ce ce qui avait poussé Callum à se mettre en quête d’une compagne ?

- Tu es une bonne observatrice, eachtrach.

Elle aurait dû détester qu’il l’appelle ainsi, mais d’une part c’était vrai : elle était une étrangère. D’autre part, ce mot sonnait davantage comme un surnom affectif qu’une insulte méprisante. Elle eut un sourire contrit et se décida enfin à glisser sa main dans celle de son fiancé. Les mains de ce dernier apprivoisèrent le corps féminin de Dana lors de cette danse lascive, en explorant chaque courbe à portée et elle dut retenir son souffle de nombreuses fois, écartant les souvenirs traumatisants de Luis Raidun tandis que ces doigts inconnus chutaient contre ses reins, froissant le tissu léger de sa robe, ou remontaient le long de son abdomen jusqu’à l’arrondi d’un sein voilé. Il touchait, comme il admirait, comme si c’était la première fois qu’il voyait une femme d’aussi près. Elle avait senti le souffle tiède de Callum courir sur ses lèvres fardées d’un rose pétillant. Elle avait levé les yeux, avaient croisé une étendue émeraude qui…l’espace d’une seconde devenait celle de Lloyd Hope. Alors elle l’embrassa, comme elle aurait souhaité embrasser le capitaine, ne prenant pas garde que ce n’était pas le même vert, pas le même goût. Et le chef de clan, enhardi par cette sensation qu’elle le réclamait, n’y tint plus. La retenue faillit céder mais des éclats de voix les obligèrent à se détacher l’un de l’autre

- Jyxo arrête !

Mais le dévaronien, leva son poing de nouveau et l’abattit avec une force rageuse sur l’homme qui s’était permis de danser un peu trop langoureusement avec Vika, son épouse. Callum quitta la présence sulfureuse de Dana pour se précipiter, furieux. Il retint le bras de l’époux lésé au moment même où il s’apprêtait à porter un coup fatal. Vika avait plaqué une paume fébrile contre ses lèvres, cachant sa stupeur.

- Jyxo, calme-toi, ce gars est presque mort.

Et Jyxo, à défaut de frapper, cracha sur le corps meurtri de sa victime. Le spectacle se déroulait à quelques pas de la cage dans laquelle Lloyd était retenu.

- Amenez-le chez ma sœur, ordonna Callum avant d’être obéi. Des bras soulevèrent l’inconscient et le transportèrent jusqu’au vaisseau. Qu’est-ce qui te prend ?! Un dragon ne chasse pas un autre dragon ! Les femmes se partagent ici !
- Ouais ben, c’est pas comme ça que ça fonctionne de là où je viens ! J’ai un honneur, merde ! se défendit le dévaronien.

Callum l’attrapa par le col quand Dana s’avança.

- Ca veut dire quoi….les femmes se partagent ? lâcha-t-elle sèchement.
- Ah oui, ricana Jyxo. Est-ce que tu vas partager ta femme ?
- C’est différent pour moi, tu le sais.
- BEN VOYONS ! s’écria-t-il en se dégageant avant de claquer autoritairement des doigts vers VIka. Allez on rentre, dépêche-toi.
- Rentrer ? Mais…
- Ecoute-le Vika. Allez vous reposer près de votre petit.

La musique, le repas, les chants, les danses reprirent de plus belle. Dana remarqua que l’alcool semblait couler à flot et elle analysa cette donnée avec attention. Les Krayt prenaient un risque stratégique démentiel : celui d’être repéré, par ce grand feu qu’ils avaient allumé, celui d’être cueilli le lendemain, incapables de se défendre car ivres morts. Cela lui donna une idée.

- J’ai soif, fit-elle vers Callum.
- Je vais t’apporter..
- Non. Dans ta cabine, je veux qu’on boive tous les deux, souffla-t-elle en se collant à lui pour le faire reculer vers le vaisseau.





Les trois lunes de Jabiim dominaient le ciel nocturne. Le feu avait perdu en intensité et des silhouettes éparses ronflaient ou décuvaient péniblement autour. La fête s’était terminée dans un chaos immense et le campement n’était désormais plus qu’une vaste foire éteinte et seules les clameurs de la faune nocturne retentissaient dans les alentours. Autour de la cage de l’hapien, un mouvement rôdait, discret. Peut-être que c’était un prédateur de la nuit, soucieux de se remplir le ventre, mais il y avait des cibles plus accessibles qu’un homme conscient et enfermé. Un grésillement plus tard et la grille énergétique sauta, plongeant le Sith dans une semi-obscurité.

Dana pénétra la cage à pas de loup et s’agenouilla près de la silhouette allongée du blond. Elle posa une main sur son épaule et il tressaillit. Les lueurs argentées des triplés lunaires auréolaient la chevelure ardente de l’Inquisitrice que sublimaient toujours une couronne de fleurs. Son maquillage était intact, mais elle portait une veste impériale. Une veste de capitaine de frégate, aux nombreuses barrettes. Et la veste était ouverte, offrant le tableau de courbes à peine cachée par des sous-vêtements d’un blanc immaculé, et ses jambes étaient galbées dans des jarretières blanches qui contrastaient avec le noir de la veste. Elle déposa un sac à ses côtés.

- Lloyd..

Ils n'avaient qu'un court moment avant que le camp se réveille. Elle avait laissé Callum au creux de sa couchette, ivre et endormi. Lloyd put sentir les doigts de l’Inquisitrice courir dans sa chevelure à la blondeur sale.



















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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


L’amertume lui emplit la bouche.





- Hunf !

Il avait inspiré brutalement, éveillé en sursaut, transpirant. Un bref instant, la douleur, le visage accusateur de Dana, les insectes qu’il imaginait grouiller dans ses vêtements, son nom murmuré, tout cela s’était agglutiné à un cauchemar odieux, d’une teneur semblable à ce qu’il vivait habituellement, et il haleta en essayant de se redresser à la hâte. Il jeta des regards affolés à la présence, essaya de reculer, et son dos heurta la paroi du fond de la cellule. Il grogna de douleur, son bras n’ayant pas apprécié le choc.

- Da… Dana ? C’est toi ?

Ses yeux s’habituaient doucement à l’obscurité. Sa veste, les cheveux flamboyants. Les sous-vêtements.

Les souvenirs de la soirée affluèrent. Il l’avait vue. Une ou deux fois, il n’avait pu s’empêcher, il s’était brièvement retourné pour jeter un coup d’œil, espérant tomber sur la scène d’une Dana atterrée, ou autre chose. Mais il l’avait vue danser, il l’avait vue embrasser ce Callum, ce chef de clan.

L’amertume lui emplit la bouche. Il resta silencieux, cependant. Rien de ce qu’il voulait dire ne valait la peine d’être dit. Rien de ce qu’il aurait pu dire n’aurait pu avoir la moindre valeur par rapport à ce qui s’était passé quelques jours plus tôt. Il déglutit. Sa main valide agrippa le sac pour le rapprocher de lui. Il l’ouvrit d’un geste sec, avant d’y plonger la main pour le fouiller, fébrile.

Quelques fruits, quelques barres vitaminées, des petits pains ou ce qui y ressemblait, une bouteille d’eau. Des boites de médicaments… Son sabre.

Il se pencha, fouilla encore, puis il abandonna. Ses yeux se relevèrent vers la figure de la Sith. Il faisait de gros efforts pour garder son masque de neutralité, mais ses mâchoires étaient serrées, et des petites rides soucieuses s’étaient formées entre ses sourcils.

- Heu… Merci. Mais j’ai… Je vais avoir besoin de mon comlink.

Il s’humecta les lèvres, son regard descendit le long du cou de Dana, s’attarda sur sa veste.

- C’est… Il est dans la poche intérieure, là.

Dans un autre temps, qui lui semblait si lointain, il se serait servi lui-même. Il aurait attrapé Dana par les pans de cette veste pour l’attirer jusqu’à lui, se foutant de ce qu’il était blessé, se foutant de ce qu’ils pourraient être repérés. Il l’aurait fait grimper sur ses genoux, il aurait été cherché son comlink avec les dents parce que ses mains auraient été trop occupées le long de ces courbes.

Mais cet univers-là était fini. Dana portait ces sous-vêtements pour un autre. Désormais, il ne pouvait plus la toucher. Elle méritait mieux. Méritait-elle Callum ? Certainement pas. Callum était plus jeune, mais c’était un animal tout comme lui. Le hapien le voyait dans ses gestes, ses yeux, et de toute façon la perspective qu’elle pût se donner à un autre était insupportable. Dana ne méritait personne, parce que personne n’était à la hauteur.

Elle avait fini par trouver le comlink dans la poche intérieure, et elle le lui tendit. Il le prit du bout des doigts, prenant garde à ne pas frôler sa peau, avant de s’efforcer de ramener ses jambes contre lui pour basculer à genoux et se relever. Alors il entreprit de contourner Dana, pour aller vers la sortie, chargé de ce sac, son comlink dans sa main. Mais il s’arrêta à l’entrée, et se retourna, mais il regarda le sol entre eux.

- Si tu ne veux pas avoir de problème avec ton… Ton… Il se mordit la lèvre. Ton mari.

Ton deuxième mari, du coup, parce qu’un seul ne suffisait pas.

- Tu devrais vite retourner auprès de lui et te délester de cette veste.

Il osa enfin relever son regard jusqu’à l’étendue dorée. Dans la nuit, les émeraudes glaciales affrontèrent le soleil de Ch’Hodos, puis il se détourna et s’enfuit.








Il arrima rapidement le sac à l’arrière d’une motospeeder. Les clés étaient sur le contact. Les dragons n’avaient pas été assez prudents. Trop confiants. Déjà, cette fumée, c’était un miracle qu’il n’y ait pas encore eu de descente de leur ami Vollen après pareille erreur. Le hapien retira son tshirt, le laissant juste attaché par le col et glissant la manche sous l’avant-bras de son membre blessé pour en faire une écharpe de fortune. Ça ne tenait pas vraiment mais s’il voulait utiliser sa main libre sans être trop embêté, il ne pouvait rien faire d’autre. Il s’arrêterait une fois qu’il serait assez loin pour confectionner quelque chose d’un peu mieux.

Et subitement, deux minutes plus tard, il était prêt à s’enfuir. Il suffisait de monter sur la motospeeder, et voilà.

Il se retourna vers le camp. Quelques fanaux étaient encore allumés, mais le feu central n’était plus qu’un tas de cendres rougeoyants.

Subitement, il revint vers l’intérieur du camp au pas de course. Dana avait déjà quitté la cage mais il aperçut le brillant des épaulettes de son uniforme à l’entrée d’une tente et il se rua vers elle. Il l’attrapa par le bras et la tira en arrière pour l’empêcher d’entrer, puis pour l’écarter vers la sortie du camp. Elle résista un peu et il la lâcha quand il jugea que plus personne ne pouvait les entendre pour lui faire face.
La forêt bruissait autour d’eux, des oiseaux nocturnes secouant parfois étrangement les feuilles. Le hapien regarda encore sa veste, ce qui se tramait en-dessous.

- Viens avec moi. Tu vas quand même pas te vendre à ce type pour de vrai, tu as pas besoin de lui pour ta vengeance. Je peux le faire moi, je peux…

Il s’interrompit, son visage se figea dans une expression de colère.

- Ne fais pas ça, dit-il subitement autoritairement. Parce que…

Parce que t’es une Inquisitrice impériale, parce que ta vie est pas ici, parce que Callum ne te désire pas pour qui tu es réellement, parce que tu es fragile en ce moment, parce que sur Dromund Kaas il y aura de quoi te soigner mieux qu’ici, parce que ton maître t’attend. Des arguments, il y en avait plein, putain. Mais aucun n’était honnête. Il serra les dents.

- Parce que je veux pas ! éclata-t-il, amer.



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L’Agonie des Krayt

Les pétales de fleurs exotiques qui couronnaient sa tête s’étaient aplatis, alourdis par l’humidité et ses cheveux trempés coulaient sur la veste impériale







Face à lui, elle était atterrée. Elle avait failli y retourner, pour de bon. Elle avait failli ne plus prononcer son nom quand des lèvres étrangères auraient parcouru son corps. Elle aurait enfin trouvé le courage de ce genre de sacrifice pour mener à bien ses objectifs inquisitoriaux. Elle avait presqu’atteint le niveau maximum de résilience et de résignation. Maintenant, elle était figée dans la trajectoire de ce regard émeraude, comme un animal était piégée dans les phares d’un landspeeder. Elle éprouvait de la fascination, mélange d’une crainte absurde et d’une admiration irraisonnable. Enfin, ses mains bougèrent et elle attrapa les pans de sa veste pour les ramener autour de son corps fébrile et ne répondit rien.






La motospeeder avait manqué de faire une embardée dans la végétation luxuriante de la jungle. Une nuée d’oiseaux avait jailli des branchages à l’approche du rugissement des moteurs lancés à toute vitesse. Dana avait remarqué, depuis la scelle arrière où elle était assise en amazone, que le bras de Lloyd était blessé et qu’il peinait à maîtriser le véhicule de sa seule main, déséquilibré par leurs deux poids. Elle-même était fatiguée, mais elle se pencha en avant, pressant son corps contre le dos du hapien et elle tendit son bras pour compenser, arrimant sa main au guidon. Sa joue s’échouait sur l’épaule du Sith et elle inspira son parfum familier : la sueur, le sang, les reliquats d’un gel douche. Elle fit de son mieux, jusqu’à ce que le moteur manque d’énergie et que l’engin s’arrête et qu’ils tombèrent tous les deux sur le sol, à l’image de deux âmes pathétiques.

- Tu peux pas continuer avec ton bras dans cet état, laisse-moi voir, dit-elle avec une fermeté relative.

Elle avait ramené le sac près d’eux et avait aidé le capitaine à s’asseoir, dos contre un immense tronc d’arbre. Agenouillée devant lui, elle s’était penchée pour défaire avec précaution le bandage sale qui avait contrôlé l’hémorragie. La blessure n’était pas belle à voir ; et les médicaments avaient peut-être chassé le spectre de l’infection, mais rien n’était gagné. Elle se mordit la lèvre inférieure pour retenir une remarque qui aurait paru trop tendre, et s’appliqua à chercher dans le sac, le matériel précieux qu’elle avait subtilisé à l’infirmerie de bord avant de s’enfuir. Une bouteille d’alcool fort et des compresses stériles. Elle renversa le breuvage de fête sur le biceps blessé, ignorant les geignements de douleur soudains qui échappèrent aux lèvres de Lloyd. Et elle nettoya, racla la chair morte, les croutes de sang. Heureusement, la balle avait traversé.

- J’ai pas de bandage…déplora-t-elle, subitement paniquée.

En s’agitant, ses doigts frôlèrent ses propres cuisses et elle eut comme une illumination brute, un éclair de lucidité qui la tétanisa une courte seconde. Celle d’après, elle défaisait ses jarretières blanches et enroulait le tissu soyeux autour du biceps de Hope, concentrée. Ses gestes étaient un peu maladroits alors qu’elle n’avait pas de connaissance particulière en médecine, mais elle avait l’impression d’avoir l’habitude de réparer Lloyd comme en témoignait le souvenir d’une jambe mordue par un nexu, dans une soute, dans un certain vaisseau. Elle serra fermement le tout.

Il s’était mis à pleuvoir depuis leur trajet. Les pétales de fleurs exotiques qui couronnaient sa tête s’étaient aplatis, alourdis par l’humidité et ses cheveux trempés coulaient sur la veste impériale. Dana lui présenta alors un médicament, l’un des antalgiques et des antibiotiques que Vika avait bien daigné lui donner une fois par jour et elle tendit également la bouteille où il restait un fond d’alcool. Pendant qu’il s’administrait cette médication de fortune, elle le contemplait. Elle ne savait très bien ce qui lui passait par la tête en admirant autant. Elle lui avait tant reproché et elle lui en voulait encore, mais il ne l’avait pas laissé remonter. Il avait tenu cette promesse-là. Il souhaitait venger leurs bébés. Il avait décidé d’être leurs pères, même si elles étaient mortes. Du moins, c’était comme ça que Dana interprétait l’attitude du capitaine. Elle se rendait compte qu’elle avait perdu ses enfants, mais que le père était en vie et elle ne souhaitait pas le perdre.

- Callum m’a dit que Vollen avait un camp de base opérationnel dans les montagnes. Il voulait que tu serves d’appât.

Elle leva sa figure vers le ciel, pour distinguer l’une des lunes de Jabiim entre les branchages fournis et ténébreux de la jungle. L’aube ne poindrait pas avant quelques heures encore et ils n’avaient pas l’habitude de s’orienter dans une forêt aussi dense. La pénombre nocturne risquaiet de les perdre, ou de les mener droit dans la gueule d’un prédateur inconnu ou dans les lianes empoisonnées d’une plante carnivore. Mieux valait se reposer, attendre que les médicaments agissent. Elle plongea sa main dans le sac et en sortit ce que les dragons appelaient un pain de fruits. C’était une pâte faite à partir de racines et de fruits qu’ils modelaient et faisaient cuire dans des moules sur un feu. Elle en brisa un morceau, hésita et se pencha pour l’apporter à sa bouche. Il sembla hésiter également mais sitôt que la bouchée disparut entre ses lèvres pâles, celles de Dana suivirent. Elle s’était saisie du souffle de Hope, l’emprisonner aux creux de ses lippes rebondies et maquillées. Elle avait clos ses yeux, avait grimpé sur lui, malgré la douleur récente. Elle repoussait les limites, parce qu’un feu s’était réveillé en elle et menaçait de tout brûler.

Une minute plus tard, elle écartait à peine son minois, la respiration courte, le souffle suspendu à celui du capitaine.

- J’ai de la peine, murmura-t-elle. J’ai de la peine d’avoir perdu nos bébés. J’ai de la peine que tu m’aies abandonnée. Je sais que j’devrais pas. Les Siths n’en ont pas. J’en suis peut-être pas une.

Elle laissa courir un silence, luttant contre la facilité que serait recourir à un autre baiser; noyer ses lèvres contre les siennes, y perdre son souffle à tout jamais.

- Si tu veux pas, je le ferai pas.

On aurait pu croire qu'elle faisait allusion à ce qui venait de se passer, à son audace absurde de l'avoir embrassé, mais elle parlait de Callum, de se vendre à un autre, de l'aveu amer qui avait éclaté dans la bouche de Lloyd : Parce que je veux pas.





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Lloyd Hope
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Il avait une liste longue comme le bras.





Son cœur s’était mis à battre à tout rompre dans sa poitrine. Ce baiser.

Lloyd s’était laissé embrasser, presque pétrifié, mais ses lèvres avaient répondu, son corps s’était tendu. Il aurait voulu la saisir mais il s’était retenu. Et quand elle s’était écartée, il était resté suspendu à son souffle, les lèvres entrouvertes, comme abasourdi. Puis enfin il parut se reprendre, s’humecta lèvres rapidement, comme s’il avait voulu les remettre en état, effacer toute trace d’absurdité. Puis il souffla, contrarié.

- Mmh.

Ce n’était qu’un grognement. Un grondement de gratitude, ou peut-être de mécontentement. Les yeux du hapien se perdaient sur le corps de l’Inquisitrice, mais il déglutit, s’efforça de se raisonner. Franchement, comment tu peux même y penser. Il passa une main sur son visage pour en essuyer la sueur et le reste ; tout ce qui s’y était déposé depuis quelques jours. Il entendait Mumkin lui dire qu’il aurait mieux fait de se laver.

Mumkin.

Il fouilla sa poche, soudain, enclencha le comlink pour le porter à ses lèvres.

- Mumkin. Mumkin ?

Il y eut un silence. Lloyd croisa le regard de Dana.

- Muuuum. Réponds.
- AAAAAH LLOYD, rugit la voix désespérée du dévaronien.
- Ah. Heu, Mum, qu’est-ce qui t’arrive ?
- ECOUTE C’EST PAS MA FAUTE JE TE JURE.
- Hein ?

Le hapien se redressa brusquement en fronçant les sourcils. Dana fit mine de se relever, mais d’un regard, il essaya de lui intimer de rester avec lui en lui adressant un regard péremptoire.

- De quoi tu parles, Mum ?
- J’te jure j’ai cherché mon datapad partout, j’voulais te contacter DIRECT et pas attendre, j’t’assure, j’ai même pensé à retourner au vaisseau et d’ailleurs oui oui j’allais faire ça, j’allais aller au vaisseau, pour pouvoir t’envoyer un message mais pas moyen de retrouver mon datapad et…
- Ouais, ça va, c’est moi qui l’ai, ton datapad.
- Hein ?
- Ouais.
- Mais… Comment ça, c’est toi qui l’as ?
- Ben j’te l’ai pris, voilà. Tu vas me dire c’est quoi ton putain de problème ou non ?
- C’est…

Silence. Mumkin prit une toute petite voix coupable.

- C’est Dana. Ils l’ont emmenée pour la marier à un dragon. Mais c’est consenti. Enfin moyen consenti j’crois j’sais pas trop. Alors j’sais que normalement t’es plus avec et tout, maintenant t’as l’autre, mais comme avant tu disais…
- Mumkin, grogna le hapien atterré, évitant cette fois le regard de Dana.
- … que j’devais la surveiller au cas où, ben…
- J’ai pas dit surveiller
- Bref voilà j’voulais te prévenir avant mais t’inquiète elle est partie depuis quelques heures hein, pas grand-chose, ahem, genre trois-quatre heures, ou peut-être un tout petit peu plus…
- Mum, je suis avec elle .
- Ah, tu veux dire, l’autre ? Sérieux ? Tu l’as ramenée sur Jabiim ?
- Hein ? Non, je veux dire je suis avec Dana, là tout de suite.
- Oh.

Lloyd eut une moue consternée.

- Ah ben… C’est cool…
- Ouais, elle est là depuis hier soir. Trois-quatre heures, hein ? Elles sont longues les heures sur Jabiim, petit con.
- Ah nan mais sérieux, c’est parce que j’ai couru partout depuis qu’elle est plus là j’te jure j’étais trop stressé moi et du coup j’ai pas vu le temps passer et…
- Bon, on est paumés dans la jungle et on a plus d’essence. J’vais t’envoyer nos coordonnées, si tu peux venir nous rejoindre avec du carburant.
- Ouais bien sûr. Mais genre, maintenant ? Il fait nuit, là.
- Ouais mais bon, les heures sont vachement longues sur Jabiim apparemment alors tu te bouges le cul, histoire de pas arriver dans trois-quatre heures.
- Ok patron.

Le hapien laissa retomber sa main le long de son corps avec un soupir et le comlink roula à ses côtés. Il leva les yeux vers Dana, qui était toujours près de lui et dont il devina le visage s’être un peu refermé. Soudain il se redressa pour passer son bras valide autour du corps de l’Inquisitrice pour la rabattre contre lui, sur lui. C’était contrariant de ne pas avoir sa force habituelle, mais il en avait suffisamment pour la maintenir le visage dans son cou, son épaule féminine appuyée contre son torse nu, prisonnière. Les yeux de Lloyd se portèrent au-delà de l’engin asséché, sur la jungle sombre. Il prit une brève inspiration.

- Je veux pas que tu embrasses d’autres types et que tu te frottes à eux, comme ça, annonça-t-il un peu froidement. Je veux pas non plus que tu t’occupes autant de moi quand c’est de toi dont on devrait s’occuper. Et je veux pas que tu te mettes en danger pour cette vengeance ni d’ailleurs pour des boulots de merde. Je veux pas que tu dises que tu vas y laisser ta peau, parce que t’as pas le droit ça non plus. Et je veux pas que tu me dises pas quand t’as besoin d’aide, ou de protection.

Ah, si elle était prête à ne pas faire tout ce qu’il ne voulait pas qu’elle fît, parfait : il avait une liste longue comme le bras.

- Et je veux pas non plus que tu retires ta veste quand Mumkin sera là. Rien que de voir tes jambes, il va tourner de l’œil et ça va me saouler.

Le hapien expira un soupir agacé, qui souleva un bref instant sa poitrine, où le poids de l’Inquisitrice s’échouait. Oh, elle pouvait bien se débattre, il la tenait bien. Il pinça les lèvres, à guetter la jungle de son regard mécontent.

- Et oui, c’est pas juste, je suis gonflé. J’suis totalement d’accord. Mais voilà, c’est comme ça.

Il retomba dans un silence irascible.





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. Pourquoi tu fais pas comme les autres Siths, pourquoi tu prends pas juste ce que tu convoites ?!







Elle s’était débattue, par réflexe, parce que cette étreinte ne lui disait rien qui vaille et les mots n’avaient fait que confirmer son appréhension. Elle fronça les sourcils et il pouvait sentir la poitrine de Dana se soulever par saccade irrégulières et précipitées alors qu’elle expérimentait de nouveau l’incompréhension et la colère.

- Que…quoi ?! souffla-t-elle, après une autre tentative pour se libérer, mais sa main valide avait serpenté jusqu’à sa nuque pour la contraindre à l’immobilité.

Alors, elle plia son bras pour saisir les doigts qui pressaient sa peau, emmêlés à sa chevelure flamboyante et les arracha à elle avec difficulté. Elle conserva le poignet du hapien entre ses phalanges furieuses et broyait l’articulation de ses maigres forces, le geste tremblant. Elle ne s’était pas attendue à cette réaction. Elle lui avait avoué sa peine, avait confessé être son alliée et c’était tout ce qu’il avait trouvé à répondre.

- Tu penses pas qu’il y a plus important ? Que…

Elle recula un peu, espérant qu’un peu de distance l’aide à rétablir un fil de pensée cohérent mais tout arrivait d’un coup, comme les eaux d’un barrage qui s’était effondré sur lui-même. Elle réussit à se redresser et tituba en s’éloignant de lui avant de lui tourner le dos, tendue. Elle commença à se débarrasser rageusement de la veste impériale qu’elle jeta au sol de toutes ses forces. Les rayons lunaires caressaient son derme par intermittence ; ombre, lumière, ombre lumière, au gré de la brise qui agitait les feuillages. Il pleuvait toujours et les gouttes de l’averse, filtrées par la végétation en hauteur commencèrent à ruisseler sensuellement le long de ses courbes. Soudain, elle fit volte-face et pointa vers lui un doigt accusateur :

- Je devrais faire tout ça, en échange de QUOI au juste ?! Tu avais dit…que si j’avais besoin de tendresse un jour, j’avais qu’à en demander. Et quand je te demande, c’est ça ta réponse.

En quelques pas, elle se retrouva près du sac, elle se pencha à la hâte, ignorant la douleur, l’épuisement. Le désespoir et la déception étaient le moteur de ses actions et rien ne lui semblait actuellement plus douloureux. Elle avait attrapé le sabre-laser entre ses doigts humides et fébriles.

- Alors, oui c’est complètement gonflé. Si c’est que tu veux pas, et que c’est ce que je dois pas faire, alors tu devrais réfléchir. Ce que tu exiges de moi, c’est ce qu’on exige d’une compagne ! Mais, tu ne veux pas que je sois une ! Qu’est-ce que tu veux donc ?! Si je ne peux être ni ta compagne, ni celle des autres ?! Je suis censée être quoi ? Parce que sinon, on peut acheter une vitrine pour ta frégate et j’peux m’enterrer dedans !

Elle commença à marcher dans une direction puis revint sur ses pas, toujours furieuse, mais la colère lui allait bien. Elle figeait ses traits dans une beauté à la fois brute et digne qui révélait ses ascendances royales et perdue au milieu de la jungle, elle ne s’en rendait pas compte.

- Je pars pour les montagnes.

Nouveau pas pour s’éloigner.
Nouveau retour.

Elle pointa la garde du sabre-laser vers lui :

- Ne t’avise pas de me suivre ou je contrôlerai ton esprit pour t’envoyer à l’autre bout de la Galaxie, ok ? Dis à Mumkin de te ramener sur ta frégate. Abandonne-moi encore une fois, c’est ce qu’on fait avec les poupées. Après on se rappelle qu’elles existent et on vient les récupérer pour les mettre de côté, c’est ça ?

Elle lâcha un soupir révolté et alla récupérer la veste dans la boue, se pencha si bas qu’elle put lui offrir un spectacle de quelques secondes sur le panorama de sa croupe ronde. Elle se dépêcha ensuite de renfiler la veste, dans un esprit de contradiction étrange.

- Mais tu sais, finit-elle par abréger avec une résilience sincère et un ton amer. Je vais faire tout ça.

Finalement elle se rapprocha de lui et laissa tomber le sabre-laser aux pieds du hapien.

- Mais si tu veux pas que j’embrasse d’autres types, t’as qu’à m’embrasser toi. Si tu veux pas que je m’occupe autant de toi, t’as qu’à t’occuper de moi. Et si tu veux pas que je me mette en danger, t’as qu’à me protéger. Pourquoi je devrais te dire ce qui est évident ?! Tu vois bien que j’ai toujours besoin d’aide et de protection. De ton aide. De ta protection. Pourquoi tu fais pas comme les autres Siths, pourquoi tu prends pas juste ce que tu convoites ?! Et si tu veux pas que je retire cette veste, parce que c’est comme ça, t’as qu’à dire à Mumkin de pas me mater. Mais tu le feras pas, hein. C'est pour ça que y'a des Luis Raidun.







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Si public il y avait, celui-ci était terré, silencieux devant l’ardeur de cet animal sauvage inhabituel.





Lloyd avait regardé le sabre laser tomber à ses pieds, les yeux agrandis par l’indignation avant de relever vers elle son visage atterré. Il resta un bref instant sans voix. C'est pour ça que y'a des Luis Raidun. Elle était sérieuse ?! Il ouvrit la bouche pour répliquer, la referma en une moue amère. Dana faisait déjà demi-tour, et le hapien se hâta de se remettre sur ses jambes. Son bras était toujours douloureux, mais la plaie cette fois-ci bien bandée limitait un peu les contractions involontaires, et donc les douleurs supplémentaires. A la lueur des lunes, il la voyait à peine, mais tout lui paraissait beaucoup trop Dana, beaucoup trop allumant, et il se demanda si elle le faisait exprès.

- Pourquoi tu devrais me dire ?! Mais parce que je suis con, voilà, s’exclama-t-il en écartant les bras d’impuissance. Je comprends pas c’qui est évident. J’savais même pas qu’tu voulais de la tendresse, là, à l’instant. Comment j’peux savoir que tu veux que j’t’embrasse quand tu dis que j’suis une porte insensible ? Comment j’pourrais savoir que tu veux que j’te protège quand tu me dis tout le temps de rester à l’écart ? Là, à l’instant, tu viens encore de me dire de te laisser tranquille !

Le hapien s’interrompit un bref instant, attendit que Dana se retournât mais comme elle s’obstinait à lui tourner le dos, il en fit le tour à quelques enjambées pour se placer devant elle, le visage penché pour faire face à celui de l’Inquisitrice. Ses yeux jetaient du venin, tout ce venin accumulé depuis des jours pendant qu’il avait ruminé dans sa cage, pendant qu’elle se mariait, notamment. Ses éclats de voix firent s’envoler des oiseaux au-dessus de leur tête quand il reprit sur un ton offensé.

- J’ai jamais dit que je voulais pas qu’tu sois ma compagne ! J’ai juste dit que moi – il planta son index dans sa poitrine – j’suis pas foutu d’être un compagnon, tu as vu ce qui est arrivé à Mat’ ?! Tu as oublié ce qui est arrivé sur Nar Kaaga parce qu’on t’a associée à moi ? C’est ça que tu veux ? Ben moi c’est ce que je voulais PAS pour toi ! Crois-moi j’ai essayé mais visiblement je PEUX PAS être un compagnon, et je PEUX PAS être un père comme j’ai PAS PU être un fils ! Je t’ai déjà dit ça, je t’ai déjà dit qu’avec moi rien ne survit, mais tu t’en fiches, tu dis que j’ai pas été là pour les protéger mais j’essayais de vous protéger de moi-même !

Ses traits s’étaient figés dans une grimace âpre. Comme Lloyd avait crié, Dana avait reculé d’un pas, mais il se détourna de toute façon.

- ET J’AI MEME PAS REUSSI ! hurla-t-il à la forêt, comme s’il y avait un public.

Mais si public il y avait, celui-ci était terré, silencieux devant l’ardeur de cet animal sauvage inhabituel. Le hapien serra son crâne entre ses deux mains, malgré la douleur de son bras endommagé, et se mit à faire les cent pas. Au bout d’un moment, il tituba, laissant retomber les bras le long de son corps et revenant vers Dana. Il l’attrapa par les bras, et sa main valide serra le coude de Dana avec force. Il lui faisait peut-être mal. Hé bien qu’elle ait mal, qu’elle sache qu’il n’avait pas parlé juste pour l’agacer : non, il ne la laisserait pas embrasser ces hommes, ni risquer sa vie bêtement, ni toutes les autres choses qu’il avait dites et tant pis s’il ne comprenait rien au reste et s’il était injuste. Il n’était pas l’époux de Melantha : il n’était pas là pour la fidélité, l’avenir heureux et les nombreux enfants, car pour cela il aurait fallu être quelqu'un. Ce qu'il était, ce qui restait de ce qui jadis aurait eu être un homme, cet être animal était forgé pour les hurlements à la lune et les crocs à montrer pour défendre la meute. Il rôderait autour de Dana, il la mordrait s’il le fallait pour qu’elle restât dans le périmètre qu’il avait défini, celui de son territoire. Il n’était pas l’époux, il était le loup de Melantha.

Malgré ces résolutions sévères, quelque chose dans son regard, qui affrontaient l’étendue dorée, était de l’ordre de la prière irraisonnable, de l’idolâtrie passionnée.

- Et j’suis désolé, glapit-il. Mais… Mais t’as pas voulu que… J’te le dise. T’as fait comme si j’en avais rien à foutre, alors que… Alors que c’est pas vrai.

A la serrer si fort, il ne savait pas lui-même s’il était en train de la menacer ou de la supplier.

- J’en avais pas rien à foutre, pas du tout. Sinon, je serais pas venu sur cette planète qui me rappelle que toi, tout le temps. A chaque putain de grain de sable de ces plages, quand j’ai creusé, je pensais à toi ; chacune de ces putains de lune, à chaque fois qu’elles se montrent, je pense à toi dans l’eau, et à chaque putain de fois je pense à comment tout ça a fini sur Khar Delba. A comment j’ai appris que tu m’avais pas dit pour… pour… elles ! A comment à la place, tu m’as dit qu’il y avait plus d’équipe, que t’avais cru que ça aurait pu marcher, sous-entendu que t’y croyais plus maintenant ! Et après tu te maries avec un autre mec, et tu t’étonnes que ça m’emmerde. De tout ce dont tu parles, j’en avais pas rien à foutre même si je piges rien à rien !

Il la rapprocha d’elle, comme s’il avait eu peur qu’elle essaie de se dégager encore, qu’elle essaie de s’enfuir encore.

- Alors comme je pige rien à part que t’essaies de te faire tuer et que j’ai pas été là pour te protéger, ben oui, voilà, j’vais t’interdire de faire n’importe quoi, quitte à être ton enfer, parce que…

Subitement il la lâcha, mais pour mieux saisir doucement le visage de l’Inquisitrice entre ses deux mains. Il avait mal à la douleur le fit un bref instant grimacer sans qu’il s’en rendît compte, mais déjà il était de nouveau concentré, les yeux écarquillés, sur les lèvres de Dana, les yeux de Dana, les petites marques récentes sur sa peau, les cernes, la lisière de ses cheveux, les longs cils, tout ce minois cueilli entre ses mains. Soudain sa voix n’était plus qu’une murmure, un souffle.

- Parce que… Après ce qui s’est passé, là-bas. J’pourrais pas creuser ta tombe, Dana.

Il fit non de la tête en pinçant les lèvres.

- J’y arriverai pas. Autant creuser la mienne. Autant m’enterrer moi-même avec nos filles.

Nos filles. Dans sa propre bouche, les mots avaient une réalité toute autre. Un ancrage. Il avait eu des enfants. Elles étaient mortes, déjà. Mais Dana et Lloyd, ça avait fait quelque chose. Il en avait le vertige. Toi et moi on a fait des filles. C’était possible, ça ? Qu’il eut fait ça ? Et que ce soit déjà fini, déjà mort, déjà derrière eux ? Comment était-il censé faire si après ça elle le rejetait encore ? Non, elle ne pourrait. Il l’interdirait, comme le reste. Ses yeux s’agrandirent, laissant les émeraudes sans ancrage, comme flottant à la surface d’un océan qui menaçait à tout instant de l’engloutir.

- Demande-moi tout ce que tu veux, mais demande-le. Demande-le. C’est con une porte, t’sais. Faut lui expliquer.

Comme elle ne répondait pas tout de suite, soudain il eut peur qu’il fût trop tard, qu’elle eût déjà pris sa décision, qu’il avait raté ce moment de tendresse qu’elle avait demandé et que c’était sa dernière chance qu’il n’avait pas saisie. Son visage s’était peint d’une déception par anticipation, mais les émeraudes toujours surnageaient, parce qu’il y avait encore un espoir. Il lâcha son visage pour passer ses bras autour d’elle et la serra contre lui. C’était une prison comme il y en avait eu d’autres, et son cœur battait à tout rompre de ne pas savoir si cette fois elle se débattrait ou non.

- J’m’occuperai de toi, dit-il d’une petite voix égarée. Viens là. Reste avec moi. J’vais m’occuper de toi, ok ?

Il la contemplait toujours, espérant un signe d’assentiment, un signe d’accord, n’importe quoi. Son souffle était court, comme si l’angoisse lui subtilisait ses ressources, et son visage ne savait plus quel masque afficher.

- J’me serais occupé d’elles, si t’avais voulu.

Le hapien sembla perdu. Il n’avait plus d’argument. Il posa son front contre celui de l’Inquisitrice, pour réchauffer l’émeraude au plus près de cette étendue dorée, comme un dernier espoir.

- Si t’avais voulu de moi.




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Ses cicatrices de guerrière sith : celle qui striait ses lèvres, celle qui courait sur un coin de son front et les nombreuses, invisibles tellement elles étaient profondes ; si profondes qu’elles creusaient son âme.







- Lloyd…articula-t-elle contre lui.

Elle prit une grand inspirant, les yeux clos. Front contre front, comme ce jour terrible sur un toit de Kaas City où leurs corps battus par la pluie devaient poursuivre une folle épopée pour survivre. Sa main agrippa la nuque du hapien d’un geste hésitant, elle ne résistait plus. Elle rapprocha encore ses lèvres des siennes, mais la peur avait saisi son cœur et elle n’osa rien d’autre que respirer l’air qu’il expirait.

- On sera toujours une équipe.

Elle avait encore beaucoup de choses à dire, à répondre, mais tous les mots qui se présentèrent à son esprit lui semblèrent superflus et inutiles. Peut-être que ce n’étaient pas les bons mots, ou que les mots manquaient, ou qu’ils n’existaient tout simplement pas.

- Tu t’en es occupé, tu les as enterrées, j’aurais jamais eu le courage.

Sa main glissa sur l’épaule du blond, chuta le long de son torse dans une caresse pleine de gratitude et remonta.

- J’aurais jamais pu le faire, j’aurais…j’allais devenir folle. Mais c’est pas grave.

Et quand elle ouvrit finalement les yeux, ses prunelles ensoleillées absorbèrent toute l’étendue verte qui se présentait à elle, flottante et profonde à la fois. Elle attendait qu’il soit apaisé, qu’il n’essayât plus de la retenir au moment où elle voudrait reculer. Alors, elle se détacha de lui avec une lenteur hésitante et se résigna à boutonner la veste, faisant disparaître son corps, rendant son apparence moins provocante, moins féminine. Elle arracha la couronne de fleurs qui cintrait si joliment sa tête à la chevelure ardente et se servit d’un élastique ornant son poignet pour relever ses cheveux. Elle les attacha de manière à dégager sa figure pâle, à mettre en valeur ses cicatrices de guerrière sith : celle qui striait ses lèvres, celle qui courait sur un coin de son front et les nombreuses, invisibles tellement elles étaient profondes ; si profondes qu’elles creusaient son âme.

Elle tendit sa paume ouverte en direction du sabre-laser et la Force attira l’arme entre ses doigts déterminés.

- Je t’emprunte ça. J’ai été inconsciente. J’ai voulu tant de choses. Peut-être les mêmes choses que Damaya a voulu. J’suis fatiguée, sourit-elle et ses cernes attestaient effectivement de son épuisement général. Les médicaments administrés par Kraya ne feraient bientôt plus effet. Elle sentait le sang couler à nouveau. Kashiina l’avait prévenu à ce sujet : elle perdrait encore beaucoup de sang ; durant des jours, des semaines. Et comme tu l’as vu, je suis pas Mat’aenna. Mais je pense sincèrement que t’as besoin d’une compagne, même si tu peux pas être un compagnon. Melantha c’est ton territoire mais pas ta tanière. Tu devrais réessayer, avec Mat’aenna. Arrêter toute cette folie. Avoir un endroit où panser tes plaies, où les choses auraient un autre sens. Y’a rien qui est juste dans ce monde. Tu te souviens, ce jour où on a sauvé Liam. T’as dit des choses, tellement pertinentes. Je sais pas comment t’as su pour Liam, mais t’es un peu comme lui non ? T’as besoin qu’on s’occupe de toi.

La pâleur avait gagné sa figure et le maquillage ne suffisait plus à camoufler les traces de faiblesse que la pluie s’était évertuée à dévoiler. Elle appuya son épaule contre un arbre.

- Quand j’étais au camp des Serpents, j’ai bien observé, on m’a montré comment faire. On a essayé de m’expliquer quoi faire pour nos filles. J’ai tenté sur le petit de Mercy, j’ai…j’étais complètement perdue, et je désespérais de me dire qu’avec deux, je m’en sortirai jamais, mais j’étais prête. J’avais….prévu de louer un appartement…

Pas d’acheter, car personne n’avait d’économies pour elle et, le peu qu’elle avait réussi à gagner était parti pour éponger une dette contractée par Mumkin.

- Pour pas que Runà accomplisse son plan sordide de garder nos filles dans son manoir atroce. Et si t’avais voulu. Si t’avais voulu venir voir à quoi elles ressemblaient, je t’aurais laissé faire. Mais le plus débile c’est que j’ai jamais réfléchi à des prénoms. Mais ne dis plus ça, que t’essayais de nous protéger de toi-même, c’est faux, c’est une excuse. C’était de Maxence, des créatures d’Orcus, de Vollen qu’il fallait nous protéger, pas de toi. Quand tu courais récupérer Mat’aenna, sans réfléchir, j’étais à la merci à de ces trucs répugnants, mais je t’en veux plus. Parce qu’en fait, Kedrod a raison. Une Inquisitrice de mon rang, elle doit pouvoir se protéger elle-même. Je te disais de rester à l’écart mais je désirais ardemment que tu sois à côté, que tu me protèges. Toutes ces fois où je t’ai dit de rester à l’écart, je faisais que t’appeler, de toutes mes forces, pour te demander de l’aide, parce que tu es le seul en qui j’ai confiance.

Elle se détacha de l’arbre, essaya de mettre un peu d’ordre dans sa tête alors qu’elle rangeait le sabre dans l’une des poches externes de la veste. Elle réfléchissait à un plan, mais toutes ses tentatives de raisonner étaient parasitées par la présence de Lloyd Hope. Elle prit appui sur l’écorce rugueuse pour se donner de l’élan et lancer quelques pas en direction du hapien. Ses mains coururent le long de ses bras, rétablissant le contact.

- Quoique tu veux que je sois pour toi, je veux l’être aussi. Je veux être là, dans la tanière du loup. (Ses doigts caressèrent le bandage de fortune) Panser tes plaies. (Elle attrapa sa main valide et la guida contre sa poitrine, par-dessus le tissu sombre de la veste où il put sentir la courbe féminine se dessiner) Te satisfaire. (Son pouce pressa une caresse fugace sur les lèvres pincées du Sith.) Appelle-ça comme tu veux. Une compagne, une équipière, une Sith ratée…ou ne l’appelle pas si ça n’a pas de nom. Tu as le choix d’accepter ma requête, ou de me dire que c’est pas ce que tu veux, que….tu me désires pas, que t’es pas blessé.

Autour d’eux, la forêt s’était calmée. Malgré leurs éclats de voix, leur position n’avait pas été dévoilée. Ils s’étaient assez éloignés du camp des Krayt. Ces derniers devaient encore dormir ou décuver depuis un profond coma artificiel. Elle se demandait quelle serait la réaction de Callum au petit matin. Serait-il furieux ? Penserait-il qu’elle était de mèche avec Vollen ? Penserait-il que Lloyd avait enlevé sa toute nouvelle femme ? Mumkin devait être en route. Combien de kilomètres les séparaient du clan des Serpents ? Pourraient-ils seulement y retourner sans qu’un Callum enragé n’y paraisse et dans son sillage furibond, Vollen et sa troupe de meurtriers et de violeurs. Il faudrait pourtant choisir une direction, car l’existence était ainsi rythmée de d’embranchements empruntés qui dessinaient une route sinueuse, pleines d’embûches douloureuses.







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Le satisfaire. Son corps y aurait encore droit.





La tension était retombée subitement, le laissant fébrile mais avide de ces petits gestes dont elle le gratifiait. Lloyd avait eu si soif, si soif d’elle, de ses lèvres, de son corps sous ses mains, de la chaleur de son souffle. Il la pressa contre lui, la conquit subitement en apposant ses lèvres sur celle de Dana, déviant ensuite contre sa joue tandis que son corps s’éveillait à son contact. L’une des mains du hapien glissa sur la cuisse dénudée de l’Inquisitrice, sous sa veste, et sa bouche glissait dans son cou pour un assaut humide et insatiable.

Le satisfaire. Son corps y aurait encore droit. Sa malédiction, cette addiction terrible. Il ne pourrait y résister. Il pressa plus fort, mais bientôt il s’immobilisa, le visage enfoui dans le cou de Dana, les bras refermés sur cette petite poupée qu’on l’accusait à tort de vouloir mettre en vitrine : elle était pour lui, à lui, et s’il avait pu il ne l’aurait montrée à personne, comme un secret jalousement gardé. Il se souvenait de la première fois où il avait ressenti cette jalousie déraisonnable : à bord de l’Egide, où des centaines d’officiers l’avaient contemplée, où il avait soudain réalisé qu’il l’avait considérée comme une pierre précieuse qu’il avait trouvé, lui, le premier, et comment cette pensée était absurde, et simultanément absolue.

Lloyd restait immobile, réfugié dans ces souvenirs, dans l’odeur de l’Inquisitrice. Il ne pouvait pas aller plus loin sans craindre de ne pouvoir s’arrêter ensuite. Il était peut-être une porte, mais une porte qui avait vu beaucoup de sang. Et tout ce sang entre les cuisses de Dana signifiait qu’il allait falloir être patient. Il pouvait faire ça.

- Je laisserai plus jamais tous ces monstres t’approcher ou te toucher, plus jamais. Et tu vas guérir, tu vas… Je vais m’occuper de toi jusqu’à ce que tu sois plus en mille morceaux, et je te dévorerai chaque nuit jusqu’à ce que tu oublies tous les Luis Raidun.

Il se redressa pour que leurs visages puissent se faire face, de nouveau. Son regard était de nouveau soucieux, habituel, mais il avait encore le souffle court de cette panique et ce désespoir qui l’avaient étreint quelques instants plus tôt, dont elle l’avait sauvé. Il parut se souvenir de quelque chose, et se sépara d’elle.

- Attends, viens, lui dit-il.

Le hapien l’emmena d’une main vers un arbre, où il s’adossa en s’asseyant, avant de lui faire signe de venir près de lui. Une fois qu’elle aussi s’était laissée choir à ses côtés, il se pencha pour ramasser les jambes de l’Inquisitrice et les ramener contre lui, tandis qu’avec un bref souffle de douleur il passait son bras blessé autour d’elle, pour le passer sur ses épaules et l’entourer tout entière. Sa petite boule de Sith, à réchauffer contre lui, sa joue contre le cuir chevelu de Dana, comme il l’avait fait sous un pont, des mois et des mois plus tôt.

- Là. Mumkin va mettre sûrement quelques heures. Repose-toi.

Sa main dont le bras n’était pas trop douloureux passa doucement le long des jambes de Dana, s’arrêta sur ses genoux avant d’aller se poser sur la joue de Dana. Du bout du pouce, il caressa la cicatrice sur la lèvre de l’Inquisitrice, dans un geste familier.

- Tu… Tu viendras avec moi, sur ma frégate ? Tu y serais en sécurité, quand tu es pas en mission. C’est beaucoup plus confortable que le Sans Visage.

Et je t’aurais constamment à l’œil.

- J’ai… J’ai plein de choses à te montrer, de Melantha. Des trucs techniques qui t’intéresseront pas du tout, mais je serais content si tu voyais ça. Elle est… Magnifique, à sa manière.

Il cessa son geste, songeant qu’il devait la laisser dormir. Un drôle de silence se prolongea, qui n’en était pas tout à fait un. Maintenant qu’ils étaient calmes, la jungle avait décidé d’émettre à nouveau ses sons étranges, fait de caquètements, de grésillements, de froissements. Une légère bise secouait les branches, mais Lloyd et Dana se tenaient chaud.

- Je… J'ai pas l'intention de réessayer, avec Mat’aenna. J’ai… ça marchera pas.

Il avait murmuré, d’un souffle tremblant, avant de se mordre la lèvre. Puis il prit une brève inspiration. Les verrous. Il ne devait plus tout fermer, tout rendre inaccessible. Alors il étalerait ça là, elle en ferait ce qu’elle voudrait.

- Mon maître. Un jour, il m’a fait étrangler et tuer une esclave qui lui ressemblait beaucoup. Après ça, je n’ai plus été capable de la toucher. Je sais pas pourquoi. L’horreur a pris la place du désir, du jour au lendemain. A l’époque… On a vraiment essayé, pourtant. Mais c’était devenu humiliant. De se mettre à chialer comme un gosse devant une femme que t’aimes à chaque fois qu’elle… qu’elle essaye d’être intime.

Le hapien soupira. Ses yeux erraient sur la veste d’uniforme, celle qui allait si bien à l’Inquisitrice, sur ses jambes où les brûlures de l’entraînement au sabre laser avait laissé des traces. Mais ses pensées étaient à ce qu’il était en train de dire.

- Au début j’ai même cru… J’ai même cru que je pouvais plus faire ça avec personne, qu'à chaque fois je penserai qu'à ça, tout le temps. Et quand j’ai pu, il y avait quand même toujours ce spectre, ces images parasites. Alors j’ai fait n’importe quoi. Avec n’importe qui. Et sous n’importe quelle emprise.

C’était absurde. Un gosse paumé. Comme Liam. Personne ne s’était occupé de lui. Dans tous ces moments d’intimité glauque, il n’avait jamais trouvé la tendresse. Il avait erré, sans pouvoir jamais dire les gestes qui lui manquaient, sans pouvoir jamais montrer le trou qui béait dans son être.

- Jusqu’à ce que t’arrives, et que mon corps décide que voilà, avec toi, ce serait parfaitement compatible. Et parfaitement indispensable, aussi.

Il haussa les épaules, avant de venir poser sa tête un peu plus bas, pour loger son front contre la joue de Dana et fermer les yeux. La fatigue gagnait du terrain. Il essayait de s’inquiéter des alentours, mais qui les trouveraient au milieu d’une jungle, si loin de tout ? Mumkin, peut-être. Mumkin trouverait son patron avec son inquisitrice dans ses bras, et c’était peut-être bien comme ça.



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L’Agonie des Krayt

Il venait encore d’interrompre la partie à un moment décisif.







Les révélations auraient dû la soulager. Elles n’avaient fait que brasser ses appréhensions tandis que son cerveau fatigué interprétait tous ces nouveaux mots qui, ensemble, formaient une longue ligne d’aveux incertains. Alors, elle devait cette compatibilité au hasard. Simplement. Un effet papillon sordide avait conduit Lloyd Hope à la désirer. Son corps avait décidé. L’horreur avait un jour chassé le désir. Hope n’avait jamais été acteur de la perte, ni du regain. Dana aurait dû accepter ces confessions qui marquaient la confiance que le hapien lui portait. Elle aurait dû se contenter de ce que le présent offrait : une parfaite compatibilité. Un arrière-goût de chagrin demeurait. S’il savait à quel point, elle l’avait désiré, depuis toutes ces années, sans que Runà n’influe dans l’équation, sans que ce soit son propre corps qui décide du jour au lendemain. Elle comprenait qu’ils ne seraient jamais sur un pied d’égalité. Lloyd, sensible au hasard, se laisserait sans doute porter par d’autres horreurs un jour, par d’autres choix faits par son simple corps d’homme.

Le contact du front blond contre sa joue pâle avait chassé les doutes et elle soupirait doucement.

- Quand j’aurais oublié, tous les Luis Raidun. Il faudra que tu me dévores la nuit, et aussi le jour. Tout le temps. Tu






Un vrombissement assourdissant éclata dans l’air. De nouvelles nuées d’oiseaux perturbés quittèrent l’obscurité des feuillages. Une motospeeder dérapa près du couple et le moteur s’arrêta soudainement de rugir pour laisser la voix de Mumkin grincer :


- Oh pardon ! s’exclama-t-il avec de grands yeux prêts à tourner alors que Dana s’écartait de Lloyd en s’humectant les lèvres, fustigeant l’alien d’un regard noir. Le pilote jeta un coup d’œil à son patron qui avait encore son pantalon bien en place sur ses hanches, mais dont la ceinture défaite laisser comprendre qu’il venait encore d’interrompre la partie à un moment décisif. Bon, ben je suis là !
- On avait remarqué, lâcha-t-elle sèchement en poussant un soupir.

Les prunelles de Mumkin dégringolèrent le long des jambes nues de Dana qui dépassaient d’une veste impériale un peu trop grande pour elle. Et le long de ses cuisses, de fines traînées écarlates.

- Euh ça va ? Tu saignes nan ?
- Sans blague, tu comptes aussi me donner la couleur du ciel ?
- Bah là il est no….eh ! s’indigna-t-il en comprenant où elle voulait en venir. Bon, j’ai les bidons de carburant.

Il descendit de son véhicule et détacha les bidons en question.

- J’vous juuuuuuuuuuuure, reprit—il après s’être dirigé vers l’autre motospeeder. J’ai chronométré, deux heures, trente sept minutes. J’ai roulé comme un fou, heureusement que y’avait pas de barrage impérial, moi j’vous l’dis mais de toute façon à un moment, faut quitter la route et traverser…la jungle. Mais en fait…euh, en fait, il s’est passé quoi avec Callum ? Il est au courant que…Dana se balade en forêt avec un autre type ? Enfin… « « se balade » », moi j’aurais plutôt dit autre chose qui risque de pas lui plaire, si vous voyez c’que j’veux dire.

L’un de ses yeux tenta de se fermer dans un simulacre de clin d’œil qui ne réussit qu’à le faire grimacer et à l’enlaidir davantage. Dana leva les yeux au ciel.

- T’as vu Jyxo sinon ? fit-il vers Dana, tout en terminant de remplir le réservoir de leur motospeeder.

Il avait un ton détaché et une allure décalée qui contrastaient totalement avec la nuit que le couple de Sith venait de vivre. Ses gestes étaient habiles, malgré ses doigts pleins de cambouis et de carburant.

- Bon, termina-t-il le ton soudainement très sérieux. Mamy Zora elle a dit que vous pouviez pas revenir pour le moment, ça mettrait Callum en colère. Alors elle a eu une idée. On va chez Vollen. Attendez…j’ai pris des notes parce que franchement, j’ai rieeeen compris.

Il fouilla dans les poches de sa combinaison de pilote et réussit à en extirper une petite boulette de papier qu’il défroissa avant de la porter devant ses yeux plissés et concentrés, une expression consternée sur le visage du genre : « Oh putain, c’est pas facile de me relire)

- Alors…vous allez chez Vollen parce qu’avec vous êtes….(Il rapprocha le papier de son regard) des impériaux…enfin des Siths y’a marqué. Parce qu’en fait, mon S il ressemble à un Z, c’est la galère. Vollen sera obligé de vous accueillir…et vous pourrez…régler tout ça. Après quand tout est réglé vous serez les bienvenus chez vous, dans le clan des Zer…Serpents ! Voilà !
- Vollen est dans les montagnes et on comptait lui rendre visite de toute façon.
- AAAH j’ai oublié un truc ! reprit-il en tapotant le bas de son bout de papier ignoble. Mamy Zora te dit (et il se tourna vers Lloyd) que ce serait vachement plus simple si tu disais officiellement que c’est ta femme, voilà. Comme ça, elle sort un peu du marché tu vois. Elle vaut chère.
- Attends, c’est de moi que tu parles comme ça ? J’suis un bantha qu’on vend dans une foire aux bestiaux là ?
- Nan mais faut pas l'prendre comme ça, ce sont les traditions. Bref, Lloyd, moi j’suis d’accord avec Mamy. Sérieux, au moins sur Jabiim faudrait que ce soit un peu officiel, même si c’est pas vrai, vous faîtes genre semblant et y’a plus de problèmes. Parce que y’a…

Il commença à compter sur ses doigts et perdit le compte

- Beaucoup de clans itinérants sur Jabiim, en fait. C’est la proximité avec l’espace Hutt qui a fait ça, enfin j’vais pas te refaire toute l’histoire mais voilà, même s’ils sont différents y’a quand même une tradition commune un genre de…gros code. Et si à chaque fois faut aller chercher Dana chez chacun d’entre eux, pfouuuu, on aura jamais fini, patron là. Et toi ! j’veux dire ton Excellencité (se rattrapa-t-il en rentrant un peu la tête dans les épaules par peur des représailles) Si Lloyd le dit clairement, c’pas pour aller se marier dans son dos, eh. En fait clà sur l'papelard, clairement, d'après mes notes, Mamy Zora elle m'a dit : "Mariez-vous sur Jabiim"
- Hein ?! s’exclama-t-elle.
- Je fais que dire…ce que Mamy Zora m’a dit d’vous dire, moi j’suis que le messager, j’vous jure sinon j’me mêle pas vous savez, hehe. Mais bon, ça pourra être l’occasion d’une petite fête quoi...A voir après votre petite affaire avec Vollen et tout






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- Ah bon ? Je viens pas avec vous ?





- Non, grogna sèchement Lloyd. Non.

Le hapien se relevait après avoir doucement repoussé Dana. Il remit à la hâte sa ceinture avec des gestes agacés, avant de rejoindre Mumkin pour pointer un doigt sur lui.

- Tu diras à Grand-Mère Maquerelle qu’elle va arrêter TOUT DE SUITE de se mêler de nos vies et que la prochaine fois que je la vois essayer ou même PENSER à vendre Dana à qui que ce soit, je lui fais bouffer ses serpents un par un.

Le hapien alla à l’arrière de la motospeeder, fouilla le sac arrimé au véhicule, tout en continuant son monologue irrité.

- En plus, j’ai déjà eu cette conversation avec elle ! s’emporta-t-il. Ça fait trois fois qu’elle essaie de me vendre l’une de ses gamines, et je lui ai dit que si Dana avait pas de famille ici elle avait moi et qu’à partir de là personne devait y toucher et que le reste m’intéressait pas !

Il sortit un datapad du sac qu’il jeta à Mumkin. Le dévaronien le rattrapa de justesse de sa main libre.

- Ouais, ouais, bah, moi j’ai rien dit hein, si j’avais su, tu penses bien que j’serais intervenu ! Mais bon, faut comprendre le clan aussi. Vu qu’t’étais pas là les derniers mois, et qu’après l’accouchement t’es parti, ben, y’en a qui disent qu’après un truc pareil, si tu te mariais pas avec, c’est que t’assumais pas que t’aies pu donner ce genre de résultat et que tu t’enfuyais pour faire porter la faute à Dana.

Le hapien se pétrifia en fixant Mumkin, les yeux agrandis par l’indignation.

- QUOI ? Qui a dit ça ?

Mumkin parut gêné. Il montra l’une des ses paumes pendant que de l’autre main, il refermait le réservoir du motospeeder volé aux dragons.

- Oh, je sais plus, tu sais moi, les racontars, tu sais c’que j’pense, et puis bon…
- C’est Svan ?
- Ouais.
- Ah ouais.

Lloyd parut subitement raisonnable. Il secoua la tête en un signe affirmatif, poings sur les hanches.

- Bon ben je vais pas m’ennuyer quand on va revenir au clan dis donc.

Il regarda Mumkin ranger les deux bidons. Le dévaronien jetait parfois un coup d’œil vers Dana, très bref, mais dès qu’il vit le regard de Lloyd il grimaça un sourire innocent.

- Alors on y va quand ? C’est quoi notre plan ?
- Notre ? Toi tu rentres chez les Serpents.
- Ah bon ? Je viens pas avec vous ?
- Non, tu vas dire une connerie et tout faire foirer. En plus, tu pourrais être reconnu. Tu rentres, tout de suite. Nous aussi, on va y aller. Cette jungle me dit rien, et les dragons risquent de se mettre à nous chercher.
- Bon bon, d’accord, fit Mumkin, mais il ne paraissait pas si déçu que cela. Bon ben, amusez-vous bien, hein !

Sur ce, Mumkin remonta sur son véhicule. La motospeeder se mit à vrombir dès qu’il alluma les gaz et des traînées de lumière illuminèrent un instant la clairière quand il partit en trombe. Le hapien le regarda s’éloigner, avant de se tourner vers l’Inquisitrice. Elle était toujours assise au pied de l’arbre dans sa tenue indécente. Lloyd serra les dents et se dépêcha de retourner près d’elle. Il s’accroupit pour passer son bras valide dans le dos de Dana et la soulever tant bien que mal sans trop solliciter sa blessure. Dans la nuit, leurs silhouettes emmêlées se déplacèrent jusqu’au motospeeder, que les lunes de Jabiim éclairaient d’une façon qui rappelait à Lloyd cette fois où il avait eu peur de ne pas savoir résister, quand il l’avait vue trempée, dans sa tunique translucide, au bord d’un lac.














Quand la motospeeder emprunta la route sinueuse qui grimpait dans les montagnes, une aube fraîche se levait sur le relief. Les lunes de Jabiim avaient déjà disparu, laissant place à un brouillard blanc et humide, dans lequel se découpait des récifs d’une couleur orange exotique. La végétation était clairsemée, et la faune paraissait inexistante. Des éboulements couvraient parfois une partie de la route, semblant indiquer qu’il n’y avait pas, ou presque pas de passage dans cet endroit que la topographie rendait difficile.

Le hapien ralentit l’allure. Dana était toujours au creux de son torse, à l’aider de temps à autre à redresser les commandes, quand le bras blessé de Lloyd faiblissait. L’un et l’autre frissonnaient dans ce paysage que la longue nuit avait refroidi, et ils n’osaient séparer leurs corps pour préserver la chaleur qu’ils avaient conservé en se serrant ainsi.

- Bon, il reste plus qu’à se faire trouver une seconde fois… En espérant qu’ils soient moins brutaux que les dragons.

Ils poursuivirent longuement sur le chemin sinueux, à se demander si Vollen n’avait pas déjà tout simplement pris la fuite. Le sable formait des nuages poussiéreux sur leur passage et ils finirent par atteindre un plateau vaste que l’ombre de l’un des sommets assombrissait en partie. Le hapien porta le véhicule jusqu’au bord du plateau, où le soleil lui paraissait plus intense. Il s’y arrêta et quand les moteurs du motospeeder furent coupé soudain le silence reprit ses droits. Maintenant qu’ils étaient immobiles, la vitesse ne pressait plus contre eux cet air humide et leur derme pouvait commencer à se réchauffer sous ces rayons timides. Le soleil se levait à leur gauche au-dessus d’un vaste paysage vallonné, en partie dévoré par les tâches sombres que formaient les forêts, ou creusé par des étendues parfaitement lisses, des lacs sombres. Le hapien entourait Dana de ses bras et il posa son menton sur son épaule, comme pour contempler avec elle ce paysage qui avait vu, des mois plus tôt, cette nuit où l’Inquisitrice avait suivi le hapien, au son d’un code absurde, pour se faire dessiner sur le ventre, et partout.

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Ils restèrent silencieux quelques minutes.

- T’as pas répondu, pour la frégate, fit-il au bout d’un long moment, à voix basse.

Il la serra davantage contre elle, tandis qu’il attendait sa réponse, une étreinte qui était peut-être moins de la tendresse que de la possession. Lui laisserait-il vraiment le choix, de toute façon ? Ses bras, ses mains refermées sur elle, étreignant doucement le tissu, semblaient dire que si elle disait non, il ne la lâcherait pas, de toute façon.

Le hapien sursauta quand des vrombissements surgirent derrière eux, à l’unisson. Dana et lui se retournèrent d’un même mouvement, pour voir arriver une dizaine de motospeeders montés par des uniformes noirs, des casques à l’effigie de l’Empire. Les soldats étaient deux par véhicule, à l’exception de celui qui se rapprocha pour s’arrêter le plus près d’eux. Celui-là ne portait pas de casque, et sa chevelure claire, soignée, surmontait un visage encore tuméfié d’une récente rixe. Lloyd reconnut immédiatement, sur sa poitrine, le grade de colonel. Alors que les motospeeders se stationnaient en arc de cercle, empêchant toute retraite, le hapien descendait du véhicule. Il prit le temps de plonger la main dans le sac pour en sortir son sabre laser, juste histoire d’avoir une preuve de ce qu’il allait avancer.

Lorsque tous les moteurs furent coupés, le silence revint. Les impériaux restaient sur leurs véhicules et certains avaient sorti des armes à énergie plasma, menaçants.

- Colonel Vollen, je présume, lança le hapien.
- J’ai cru voir un uniforme, fit l’impérial pour toute réponse, en désignant Dana du menton.
- Oui, c’est le mien. Lloyd Hope. Capitaine de frégate. Et Sith.
- Je vois. Et elle ?
- Dana Shar, Inquisitrice Sith. Mais je pensais que vous la connaissiez déjà ? Elle était prisonnière dans un camp au sud d’ici et elle m’a dit que vous y aviez fait une descente avant d’être… balayés par un petit clan de pacotille.

La bouche du colonel Vollen se déforma en un mauvais rictus.

- Vous êtes bien informés. La Marine n’a pas plus urgent à faire, en ce moment, que de traîner ici ?
- Disons que je suis en permission. J’étais venu récupérer… Le hapien se retourna un bref instant, croisa le regard de Dana, avant de faire face à Vollen de nouveau. … cette Inquisitrice. Mais j’ai rencontré quelques déboires avec les locaux.

L’impérial considéra un instant les deux Sith, non sans lorgner quelques instants sur le sabre-laser.

- Ça ne m’étonne pas. Ce sont des vandales, finit-il par grogner brusquement.
- Ecoutez, j’ai besoin d’avoir un refuge pour quelques jours et aussi de contacter ma frégate. Mes hommes m’attendent, il faut que je puisse leur dire que je suis retardé. Où se trouve votre base ?
- Loin à l’est. Nous sommes en mission spéciale, en ce moment. Mais nous avons établi un campement, à quelques centaines de mètres, depuis lequel on surveille la route, c’est comme ça qu’on vous a repérés. On peut vous donner accès à une communication sécurisée, mais ensuite, il vous faudra repartir vite. Nous chassons un gang dangereux, vous ne serez pas en sécurité longtemps avec nous.

Lloyd acquiesça.

- Pas de problème.








Le campement était discret, réduit à l’essentiel. Des tentes au tissu de la même couleur que le sable orange qui recouvrait les récifs étaient dressées et disparaissaient presque totalement de la vue dès que l’on était à plus d’une dizaine de mètres. Des caisses moins aisément dissimulables formaient des tables, des rangements. Quelques hommes supplémentaires montaient la garde, et tous regardèrent d’un œil intéressé le duo de Sith arriver, escorté du reste de l’escouade. Sur la route, Lloyd n’avait pas quitté Vollen des yeux, mais ce dernier ne s’était pas retourné. N’avait-il pas reconnu Dana, ou prenait-il le pari de faire en sorte que celle-ci n’évoquât pas ce qui s’était passé entre eux en pensant que le hapien n’était pas au courant ? Toujours était-il que dès qu’ils étaient arrivés, il avait ordonné que l’on montât une tente supplémentaire. Les hommes s’exécutèrent avec une parfaite obéissance pendant que le hapien discutait avec un jeune zabrak en charge des communications. Celui-ci lui remit un holocommunicateur doté d’une antenne en lui expliquant le protocole de cryptage. Vollen, nerveux, allait d’un bout du campement à l’autre. Quand il revint vers le duo, il considéra une énième fois la veste d’uniforme sur Dana avec un reniflement désagréable.

- Vous appelez votre navire et ils viennent vous chercher immédiatement ?

Lloyd grimaça une moue contrite en se retournant.

- Je crains que ça n’aille pas si vite. Ma frégate se trouve actuellement près de l’Amas de Tion. Elle ne pourra arriver que demain, probablement. Puis ensuite il faut qu’ils envoient une navette… Ah, et puis, on est épuisés, nous avons parcouru ces paysages toute la nuit pour semer nos poursuivants, un vrai labyrinthe. Merci pour la tente, du coup. Vous servez le repas à quelle heure ?

Vollen toisa le hapien avec une mine dépitée.

- On va vous refiler des rations aussi, mais il faudra vous serrer la ceinture, nous n’avons avec nous que le strict minimum.
- Pénurie de rations ? C’est étonnant, le secteur est bien desservi par la logistique de la Marine, justement…
- Oui oui, s’empressa de rétorquer le colonel, mais en opération spéciale, je fais toujours en sorte que nous voyagions léger.
- Je vois.
- Reposez-vous, alors.
- Merci.

Dana et Lloyd rejoignirent la petite tente qui venait d’être dressée pour eux sous un ciel qui s’était éclairci. Un vent frais balayait les montagnes, faisait danser les pans de la tente de mouvements irréguliers. Ils se courbèrent l’un après l’autre pour entrer dans le minuscule espace : il n’y avait de la place que pour les deux couchettes qui avaient été dressées et une pauvre caisse les séparant, et on ne pouvait rester debout. Le hapien tira sur le fil qui maintenait le pan de tente ouverte pour qu’ils eussent un peu d’intimité. La tente se retrouva plongée dans la pénombre, mais la lumière s’infiltrait par des interstices. Dana s’était déjà assise sur l’une des couchettes, et le hapien s’accroupit devant elle. Ses mains se portèrent sur la veste et il la déboutonna doucement.

- Il doit déjà être en train de chercher à vérifier mon identité. On n'a pas beaucoup de temps, mais tu peux te reposer un peu. Je vais me débrouiller pour interroger ses hommes, dit-il à voix basse. Je veux savoir si ce Vollen s’est détaché pour mener ses opérations dans son coin pour des affaires personnelles, où s’il est vraiment là aux ordres de l’Empire. Et s’il est bien aux ordres du bon Empire, pas celui de Ramken. En fonction, on verra si on lui règle son compte à lui ou à toute la troupe.

Il fit glisser la veste le long des bras de Dana pour l’en libérer. Dessous, elle était toujours dans ses sous-vêtements blancs, que sa chevelure écarlate rendait plus tapageurs, et en posant ses yeux sur son corps il laissa échapper un soupir rêveur. Il la repoussa doucement pour qu’elle s’allonge, et tira de la caisse une couverture, qu’il étendit sur elle. Il la borda comme on aurait dissimulé un trésor, jusqu’au cou, avant de s’agenouiller pour être à son niveau. Il croisa les bras au bord de la couchette, déposa son menton sur ceux-ci sans cesser de regarder le maquillage qu’il avait lui-même dilué autour de ses lèvres, quelques heures plus tôt. Il libéra une de ses mains pour caresser la cicatrice qui fendait la lèvre inférieure de Dana, les yeux dans le vague, avant d’arrêter pour poser cette même main sur le bas-ventre de Dana, à travers la couverture. Son regard suivit, et il sembla hésiter un instant, mal à l'aise.

- Tu as encore beaucoup mal ?



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L’Agonie des Krayt

Le monde entier se liguait contre eux







- Non, mentit-elle vers lui, les lèvres frémissantes d’un sourire contrit.

Elle avait encore mal. A l’intérieur, à l’extérieur. Le simple souvenir d’avoir accouché arrachait ses chairs qui guérissaient lentement, mais comment lui expliquer ça. Il ne pourrait jamais comprendre ce genre de souffrance, cette impression d’être un animal qui mettait à bas et dont le seul instinct était de ne pas périr, de ne pas écraser ses nouveau-nés en les rejetant dans ce monde atroce. Ce serait avoué qu’elle avait échoué. Alors, elle n’avait qu’à répondre un mensonge, qu’elle n’avait plus mal, même si sentir la main de Lloyd Hope contre son ventre désormais plat lui crevait un cœur déjà en charpie. Sous cette paume masculine, des semaines plus tôt, sa peau se tendait encore sous des coups timorés de petites filles qu’elle avait eu hâte de rencontrer.

- Je suis pas mourante et…je vais pas me reposer pendant que tu prends des risques avec…(Elle baissa la voix à son tour, soucieuse.) Vollen et ses corbeaux à la con.

Dana plissa les yeux et se redressa sur un coude pour rapprocher leur visage. Elle sondait les deux billes émeraudes qui vacillant dans un océan blanc, bordé de ils blonds. Le mouvement entraîna la couverture dont le tissu dévala le buste de l’Inquisitrice.

- C’est ok pour ta frégate. Tu dois être le seul capitaine de la Marine Impériale à vouloir qu’un Inquisiteur vienne fourrer son nez dans son vaisseau.

Le souvenir du capitaine Iani Chaos dérangea un moment le fil de ses pensées. Elle se souvenait avoir déteste vivre à bord du Lightbreaker. C’était pas seulement l’angoisse de se trouver au cœur d’une bulle d’acier dont la moindre percée pouvait priver d’air et geler les poumons, c’était l’impression de solitude, l’impossibilité de fuir ou de changer d’air. Il fallait affronter les regards craintifs, suspicieux, jour après jour et Chaos avait été un homme insipide, presque transparent. En fait, elle n’avait été qu’un fantôme dans les couloirs du croiseur, arpentant sans cesse le même chemin, tournant en rond comme un animal affamé. La mission d’Artorias avait été, quelque part, une véritable libération.

- Tu me montreras, les trucs techniques…

Elle se mordilla la lèvre inférieure et glissa ses yeux dorés vers le torse de Lloyd, pensive.

- Et je visiterai ta cabine.

Ses doigts effleurèrent le biceps blessé où le tissu soyeux de sa lingerie bandait maladroitement une blessure qu’elle avait reconnu.

- La même arme que le mercenaire pervers de Khar Delba. De vrais outils à tuer les Siths, déplora-t-elle en serrant les dents.


Le monde entier se liguait contre eux. Elle avait la sensation qu’ils ne vivraient jamais, qu’il faudrait sans cesse surnager dans une mer emplie de requins. Elle ne comptait plus le nombre d’ennemis qu’ils avaient ou qu’ils auraient à l’avenir. Les ennemis de Lloyd Hope devenant les siens et inversement. Elle retint son souffle, prête à capturer celui du hapien mais un mouvement près de leur tente l’en dissuada. D’un geste lent, elle remonta la couverture pour s’en couvrir à moitié.

- Vollen…murmura-t-elle en surveillant les ombres qui, parfois, glissaient sur les parois de la tente. Il m’a reconnu et j’ai pas vu l’ombre d’une crainte dans son regard de merde. Il assume avoir attaqué une Inquisitrice en toute impunité. J’ai jamais vu ça dans l’armée. Y’a qu’un Sith pour s’attaquer à un Inquisiteur. Soit il en est un, ce dont je doute…soit….il est protégé par un Sith de rang supérieur, tu comprends ? Quelqu’un prêt à le couvrir. A dissimuler les exactions qu’il peut mener ici en toute impunité. Chez les Serpents il…il m’a dit être au service du Conseil Noir, enfin c’est ce que j’ai compris.

Une grimace d’inconfort figea les traits de son minois et elle fronça les sourcils pour se concentrer sur son analyse.

- Il est fort possible qu’il ai menti, ouais. Que ce soit un putain de traître. Ca voudrait dire que y’a un mouvement de dissidence renégate sur Jabiim. Mais entre nous, ça n’a aucune importance. Ok ?

Elle rejeta lentement la couverture et ses courbes apparurent, teintées de cette lueur orangée qui filtrait à travers le tissu épais de la tente.

- Il a tué nos bébés, souffla-t-elle calmement. Il pourrait être Bekhaar en personne que je lui arracherai la tête.

Sa main plongea dans la chevelure blonde, ses doigts saisirent quelques mèches, s’ancrèrent dans le cuir chevelure du Sith et elle l’invita à venir plus près, à fusionner leurs souffles fuyants.

- Et tu seras là pour le tenir, quand je ferai ça. Hors de question que tu restes à l’écart, ok ? chuchota-t-elle. Je…

Elle planta ses prunelles dans les siennes, sacrifia l’or à l’émeraude pour lui révéler tout le désir, toute la haine, toute la passion qui mordaient son âme.

- Je ferai tout ce que tu veux…je résisterai pas.

Dans les iris verdoyantes de Hope, elle revoyait les paysages nocturnes de Jabiim défiler et l’aube chasser les trois lunes. Un souvenir de plus qu’il venait de dessiner dans sa mémoire meurtrie par le chagrin récent. Elle avait plongé profondément dans un lac de désespoir. Il l’avait suivie et l’avait attrapée avant qu’elle ne disparaisse pour toujours, dans la folie, dans les bras de Callum, dans les jungles humides de Jabiim. Pas de monture blanche pour le prince charmant, ils laissaient ça aux Jedis. Une motospeeder à la mécanique obsolète, les ronronnements de son moteur entre ses cuisses fébriles aux tâches écarlates, les muscles d’un hapien raidi de fatigue et de désir contre ses courbes fragiles et l’horizon à perte de vue, une route sans fin. Puis une halte, une tente, un lit, un blond au chevet d’une princesse complètement paumée ; comme sur Dathomir.

Un vieux dicton des populations itinérantes de Jabiim disait que la faim chassait le loup du bois. Il se pourrait bien qu’une faim étrange avait chassé le loup du Melantha. Un appétit dévorant pour une proie aux cheveux flamboyants et au regard félin.







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Lloyd Hope
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L'Agonie des Krayt


Le clan des dragons célébrait un mariage. Ils ont fait de sacrés festivités, juste sous votre nez.





Leurs souffles étaient de nouveau si intimement entremêlés, et le hapien s’approcha encore de quelques millimètres, juste assez pour que leurs lèvres s’effleurent à peine. Sa respiration s’était doucement accélérée, tandis que ses yeux un instant repus de la vision de ces courbes qui débordaient sous un soyeux tissu blanc acculaient maintenant les prunelles dorées de l’Inquisitrice.

- Je le préparerai juste assez pour que tu puisses le terminer, en ce cas, souffla-t-il, et le bout de sa langue traça lentement une ligne sur la lèvre inférieure de l'Inquisitrice tandis qu'il fermait les yeux.

Ses mains glissèrent dans le cou de Dana, remontèrent autour de son visage, et il la tint ainsi le temps que leurs lèvres se joignent, se pressent, le temps que leurs langues se retrouvent et se mélangent, le temps d’une minute. Juste une minute.

Puis Lloyd s’en sépara en la repoussant doucement. Son visage était redevenu sévère.

- Mais. Pour l’instant je prends pas de risque, je vais juste discuter un peu. Alors, tu peux te reposer tranquillement. Ce sera plus crédible.

Il la considéra un instant dans sa couchette et un doute passa sur son visage. Finalement, juste avant de s’en aller, il lui remit en place la couverture jusqu’au cou.







- Le communicateur est prêt mon capitaine, annonça le soldat à son arrivée, avec une certaine déférence.

Comme il s’y était attendu, enfiler sa veste d’uniforme lui acquérait une influence plus aisée auprès des hommes de Vollen. Le soldat était très jeune ; c’était un humain aux yeux clairs et à la bouche fine et gercée. Il fronçait les sourcils sous son casque noir, qui semblait lui tenir chaud. Tous les deux se tenaient près d’une petite antenne qui surplombait deux caisses empilées, à l’air libre. Dans le camp, les soldats vaquaient à leurs occupations, qui avaient l’air de consister principalement en la surveillance des alentours à l’aide de jumelles adaptées.

- Donnez-moi la fréquence ? fit le jeune soldat.
- Je vais entrer les coordonnées moi-même, ne vous en faites pas. Je me débrouille, fit Lloyd et, joignant le geste à la parole, il tendit la main pour récupérer le petit dispositif.
- Ah… Bien, comme vous voudrez, mon capitaine.

Il lui remit le communicateur, puis le hapien le regarda longuement. Jusqu’à ce que le soldat comprît qu’il devait être laissé seul, alors il s’excusa avant de filer.

Lloyd s’était réfugié dans une tente voisine à l’antenne, le fil lui permettant d’aller jusqu’à cet endroit, pour glaner un peu de pénombre avant de voir l’hologramme. La communication n’était pas d’excellente qualité. Mais elle était suffisante pour que le hapien put vaguement discerner les contours d’un duros en uniforme, qui sembla écarquiller les yeux, pour le peu que le hapien en voyait.

- Mon capitaine ! Nous commencions à nous inquiéter, vous… Avez-vous essayé de nous joindre ?
- Bonjour Lieutenant. Non, je n’ai pas réussi à vous joindre avant. Ecoutez, je suis sur Jabiim, la situation y est un peu compliquée. J’ai été capturé par un gang local, une histoire ridicule. J’espère que les hommes n’ont pas eu le temps de faire courir une quelconque rumeur sur mon absence.

Le duros secoua négativement la tête.

- Le capitaine Nande et moi-même avons pris l’initiative d’émettre que vous aviez juste un retard sur une mission confiée par le Conseil Noir. Les permissions sont terminées, les hommes se sont remis au travail. Le lieutenant Narih a déjà lancés les équipages sur quelques exercices de routine, et le lieutenant Utuzz enquête toujours sur cette problématique de charge énergétique.

Le hapien acquiesça un bref instant, avec un léger soupir de soulagement.

- C’est parfait, lieutenant Subol. Votre proactivité à tous m’est précieuse. Je vais devoir vous faire patienter quelques jours supplémentaires, cependant. Dites à Nande que je veux que vous ralliez le secteur Phelleem, cela me permettra de vous rejoindre plus rapidement.
- Aucun problème, mon capitaine. Est-ce que je continue de vous envoyer les rapports d’activité sur votre datapad ?
- Oui, bien sûr. Et aussi, ajouta Lloyd, non sans se rapprocher quelque peu du dispositif pour pouvoir parler plus bas, vous pouvez faire une petite recherche pour moi ?
- Bien sûr, mon capitaine.
- J’ai rencontré ici un certain colonel Vollen. Vous pourriez me trouver tout ce qui vous est possible sur lui dans les fichiers de l’armée ? Et aussi, son affectation précise et les derniers rapports d’opération de sa compagnie.
- Entendu, mon capitaine. Sur ce dernier point, je doute qu’on m’y donnera accès, cependant. Je n’ai pas les accès pour la branche terrestre de nos armées. Mais j’essaierai quand même. Je vous envoie tout cela dès que possible.
- Merci beaucoup, lieutenant. C’est terminé pour moi.
- Reçu.
- Pour l’Empire.
- Pour l’Empire.

Lorsque la communication se coupa, le hapien se laissa aller un instant en arrière, pensif. Ce dont il aurait eu besoin, à cet instant, ç’aurait été du pouvoir de Darth Laduim lui-même. Mais le temps que le twi’lek pût être joint, il serait déjà trop tard. De plus, contacter directement le Conseil Noir, si jamais on le surprenait, mettrait certainement tout le camp en émoi, surtout si Vollen prenait effectivement ses ordres directement de celui-ci. Et puis, il restait la possibilité que Vollen fut effectivement aux ordres de Laduim, auquel cas ce dernier n’apprécierait guère de voir Lloyd, non seulement en dehors de sa frégate, mais en plus sur le point de faire rendre gorge à l’un des siens.

Lloyd soupira avant d’éteindre l’holocommunicateur et de quitter la tente.






- Alors ? Votre frégate arrive ?

Dès qu’il l’avait vu approcher, le colonel Vollen s’était raidi. Il était penché au-dessus d’une caisse avec deux de ses hommes et en approchant, le hapien comprit qu’ils étudiaient une carte. Lloyd contourna la caisse pour se mettre à côté d’eux, s’intéressant passivement à la topographie représentée sur le papier usé.

- Moui, fit-il, évasif. Elle m’a pas l’air toute neuve, votre carte.
- Les cartes officielles et dématérialisées ne nous indiquent pas les repaires habituels des clans itinérants, grogna Vollen. Vous partez quand ?
- Je ne sais pas, mon vaisseau a une avarie technique, ça risque de prendre du temps, mentit Lloyd. Intéressant, ça, pour le positionnement des clans. Je peux vous aider à localiser les fameux dragons, si vous voulez, j’y étais encore hier soir. Mais bon, ils ont dû déjà se déplacer…

L’un des deux soldats qui accompagnaient Vollen releva subitement le nez.

- Vous sauriez les placer sur la carte ? questionna-t-il avec précipitation, sous l’œil agacé de son supérieur.
- Oui, approximativement, estima le hapien. Vous n’avez pas vu une grande fumée, hier soir ?
- Si, si, elle se situait par ici, nous l’avons notée au crayon mais comme on ne savait pas exactement…
- Hé bien c’était là. Le clan des dragons célébrait un mariage. Ils ont fait de sacrés festivités, juste sous votre nez. Si j’avais su que vous étiez si proches… Nous aurions pu nous coordonner pour une frappe définitive…

Le soldat poussa un soupir de découragement, tandis que le colonel Vollen pinçait les lèvres.

- Ecoutez, capitaine… Comment déjà ?
- Hope.
- Capitaine Hope. Je prends mes ordres directement du Conseil Noir. Je n’ai pas besoin que vous vous immisciez dans notre stratégie.
- Oh, mais je cherche juste à être utile. Je connais un peu le terrain et les coutumes locales, ce n’est pas la première fois que je m’y trouve. J’ai même des infiltrés.

Il y eut un silence.

- Des… Des infiltrés ?
- Oui.
- C’est-à-dire.
- Des gens qui vivent dans ces clans et qui travaillent pour moi.

Vollen parut hésiter un bref instant, mais finalement son visage sceptique sembla se fermer.

- Nous n’avons pas besoin de cette aide, capitaine Hope. Vous devriez vous reposer.
- C’est ce que je fais, là. Je prends l’air. Je vous assure, je suis resté enfermé pendant trois jours, je suis bien à me promener à l’air libre.

Le colonel toisa Lloyd une nouvelle fois, raide.

- Comme vous voudrez, concéda-t-il. Mais vous m’excuserez, j’ai des appels importants.
- Bien sûr, je ne voudrais pas vous empêcher de conduire votre opération.

Vollen s’en alla en martelant le sable de ses bottes sombres, et il disparut sous sa tente personnelle, qu’il avait isolée à deux bonnes dizaines de mètres du reste du camp. Le hapien sourit pour lui-même, avant de s’intéresser aux deux soldats, qui faisaient semblant de s’être absorbés dans la contemplation de la carte. Lloyd croisa les bras, et finalement s’assit sur une caisse voisine, dans une posture nonchalante.

- Vous avez perdu beaucoup d’hommes, depuis… Le début de cette opération ?

Les deux soldats le regardèrent, se consultèrent l’un et l’autre. Un léger vent jouait dans les cheveux du hapien, et le ciel s'éclaircissait un peu plus, les forçant tous les trois à froncer les sourcils pour se protéger pauvrement de la luminosité trop intense.

- Cinq, mon capitaine, fit finalement l'un des soldats à voix basse.
- Ah, quand même.

Silence embarrassé.

- Mes condoléances.
- Merci mon capitaine.
- Bon, j’espère que vous aurez vite fini, alors. Après tout, ce ne sont que de petits clans indépendants. Face à l’Empire, ils seront écrasés en quelques jours, non ?
- C’est que… Ils connaissent mieux le terrain que nous, expliqua son camarade. Ils se déplacent sans cesse, nous avons beaucoup de difficultés à les localiser. Ils font beaucoup d’actions de sabotage et plusieurs fois, ils nous ont pris en tenaille…
- Plusieurs fois ?! s’indigna le hapien.
- Hem, oui.
- C’est désolant, grogna Lloyd. Alors qu’avec quelques contacts dans ces clans, et un visuel du terrain en temps réel retransmis d'une frégate… Enfin bon, je ne vais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas.

Il haussa les épaules, secoua une dernière fois la tête d’un air navré, avant de laisser les deux hommes plantés là, pour continuer à faire tranquillement le tour du camp, à l'affût de quelques rations à rapporter dans sa tanière, notamment. A bien y réfléchir, la créature qui l'y attendait était peut-être plus louve qu'il était loup. Il arpentait le camp comme un rôdeur, son esprit dérivant paresseusement vers les souvenirs des crocs de la louve qui avait couru le long de son ventre, jusqu'entre ses jambes, quelques heures plus tôt.

Plus il y pensait, plus il devenait lui-même animal, à rôder entre les tentes, à humer l'air car la faim tenaillait son ventre, à songer à ce que la louve promettrait en échange de quelques rations à se mettre sous la dent.



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L’Agonie des Krayt

Et elle revit les yeux verts d’un enfant sur Artorias, qu’elle condamnait, que tout le monde condamnait. Son propre enfant.







Dana avait tenté de trouver un repos relatif, s’endormant, se réveillant à intervalles irréguliers. L’agitation du campement la berçait ou l’empêchait de se reposer. Elle avait fini par quitter la couchette et tourner en rond. Elle se prit la tête entre les mains, rabattant quelques mèches rebelles en arrière, laissant ses doigts glisser le long de sa couette haute, nerveuse. Une douleur sourde pulsait dans ses entrailles et elle saignait encore. Elle sentait le sang tiède imbibé l’intérieur de ses cuisses et souiller le tissu blanc de sa lingerie. Soudain, elle arracha la couverture à la couchette et essaya d’éponger le liquide écarlate, agacée, mais elle ne faisait qu’étaler un peu plus, comme si elle peignait une œuvre sanglante. Elle finit par abandonner l’idée de se nettoyer et se précipita vers la caisse qu’elle ouvrit à la hâte. Elle en extirpa une autre couverture qu’elle jeta au loin, et brassa le fond du caisson, sans rien dénicher d’intéressant. Sa propre odeur lui retourna l’estomac : un mélange désagréable de sueur, de sang. Ce parfum animal imprégnait sa peau, formant une pellicule invisible et la ramenait à une condition primaire et instinctive. Elle avait faim. Elle avait soif. Elle avait sommeil.

Ses yeux se braquèrent soudain sur les pans de la tente qui formaient une porte de fortune ; une mince barrière entre elle et l’extérieur. Lui dire de se reposer était une façon de la laisser à l’écart. Elle grogna une désapprobation et quitta la tente, sans se soucier de sa tenue, de sa nudité, sans aucune considération pour sa pudeur à laquelle elle n’avait jamais tenu. On avait tellement désacralisé son corps, on l’avait déjà malmené, on se l’était approprié avec ou sans sa permission ; elle avait l’impression que ce n’était plus qu’une enveloppe abimée, sans valeur, qui ne valait plus la peine d’être préservé – enlaidi par les cicatrices du temps et de la souffrance.

Les soldats de Vollen tâchèrent de détourner le regard pour vaquer à leurs occupations, mais certains d’entre eux risquaient une œillade parfois curieuse, parfois appuyée. A l’ombre des casques ou des visières, on contemplait le galbe de ces cuisses féminines colorées de rouge, ou la courbe arrondie d’un sein logé dans une dentelle blanche et on suivait le mouvement de balancier des hanches de Dana qui marchait d’un pas déterminé ainsi que la danse de sa couette haute qui battait l’air. On contemplait en silence, sans oser approcher ou commenter. L’Inquisitrice s’apprêtait à foncer vers la tente décentrée, qui paraissait être celle du colonel, mais autour des silhouettes noires s’étaient réunies autour d’un Vollen au visage grave et satisfait. Elle accéléra le pas avant d’apercevoir une chevelure blonde. Lloyd l’avait repérée, leurs prunelles s’étaient accrochées, avaient confondu leurs teintes, mais des cris en provenance du regroupement les forcèrent à emprunter la même direction.


Fermement campé sur ses deux jambes, le colonel avait croisé ses mains dans son dos et observait un dévaronien à la figure tuméfiée, agenouillé devant lui, les poignets attachés devant lui, entourés de soldats impériaux.

- Il a rien voulu dire, Colonel, tonna une femme brune, aux galons de sous-officier. Son chignon en partie défait dépassait de sa casquette noire, dans une allure peu protocolaire. Elle avait les manches de son uniforme remontées au-dessus des coudes et ses phalages étaient maculées de sang. C’était donc elle qui avait abattu ses poings sur la figure du prisonnier.
- On l’a chopé en contrebas, ajouta un militaire. Sûrement un éclaireur.

Dana reconnut immédiatement les habits et la dégaine de Jyxo, malgré le sang, les plaies boursoufflées qui déformaient son visage. Vollen poussa un soupir exaspéré et dégaina son blaster d’officier supérieur.

- Cette vermine ne nous est d’aucune utilité.

Et ses yeux remontèrent vers la Sith. Il lui tendit l’arme. Une dizaine de mètres les séparaient.

- Mais l’Inquisition va nous en débarrasser, un traître de moins.

Shar serra ses poings si fort qu’elle s’en blessa l’intérieur des paumes, et son cœur battait fort, vite. Elle avait l’impression que sa respiration devenait incontrôlable. Elle se vit, comme dans un rêve, avalé la distance qui les séparait. Jyxo avait levé ses yeux vers elle tandis qu’elle s’emparait de l’arme, que Vollen glissait sur elle un regard indécent. La réalité percuta ensuite son esprit. Le vent qui frappait les hauteurs lui glaça le derme, les éclats de voix des soldats explosaient à ses oreilles alors que ce n’étaient que des clameurs lointaines, l’odeur de Jabiim encombrait ses narines. Elle se retourna sèchement et pointa le canon entre les deux cornes du cousin de Mumkin. Elle défia ses iris, n’y déchiffra aucune crainte. Et elle revit les yeux verts d’un enfant sur Artorias, qu’elle condamnait, que tout le monde condamnait. Son propre enfant. Une folie lui fit dévier le canon et elle pressa la détente.

Le tir heurta la sous-officier en pleine tête sous les regards écarquillés des autres soldats. La figure de Vollen se déforma de rage alors que le corps de sa lieutenant tombait au sol. Elle avait encore les yeux ouverts, fixés vers le ciel, la bouche entrouverte de stupeur et tout ce sang qui s’échappait de son front brûlé par le plasma souillait désormais la terre cuivrée des montages.

- Je savais que tu n’étais pas une Inquisitrice, mais une traîtresse, comme eux tous, constata le colonel.

Une dizaine de blaster la mirent en joue, mais elle ne voyait que le meurtrier de ses bébés. Sa fureur avait formé des œillères.

- Tu veux me pousser à BOUT ? C’est ça ? s’écria-t-elle en agitant le blaster. Je suis une putain d'Inquisitrice Sith ! J’ai pas de compte à rendre, je tue QUI JE VEUX !

La Force répondit à sa colère et elle la fit vibrer autour d’elle pour arracher les armes aux poings des Impériaux. Vollen recula d’un pas, mais elle attirait déjà l’un de ses hommes à l’aide de la télékinésie, comme si elle avait jeté un lasso invisible autour de sa gorge et l’avait tracté jusqu’à elle et elle le tira, jusqu’à ce que le chien de son propre blaster cogne la gorge du soldat. Il geignit une supplique. Vollen ne disait plus rien, crispé.

- Non ? fit-elle. Alors, on va faire les choses à ma manière et à la manière du Capitaine Hope.
- Hors de question, répliqua le colonel.

Le sang jaillit de la gorge de son subordonné. Le tir avait fusé dans un son visqueux et le militaire s’effondra, agonisant dans un gargouillis atroce, s’étouffant avec son propre sang. Il convulsa quelques secondes avant de s’immobiliser dans la mort. Vollen affrontait toujours les prunelles de Dana. Horrifiés et enragés, les autres soldats se dépêchèrent de ramasser leurs blasters à terre, mais Vollen leur ordonna de ne pas intervenir d’un geste autoritaire. Il dirigea son attention sur Lloyd.

- Capitaine Hope, déclara Vollen, vous êtes un homme de raison. Rappelez votre chienne à vos pieds, avant que tout cela ne dégénère. Et je ferai en sorte de ne pas remonter cet incident déplorable au Conseil Noir.

Dana tremblait, de froid, de chaud, de rage. Elle clignait des yeux pour se concentrer sur les menaces représentées par les soldats, prête à user de la Force à nouveau.






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L'Agonie des Krayt


Laduim allait lui tomber dessus en moins de temps qu’il n’en fallait pour remonter sur sa frégate.





Le hapien regardait la scène d’un air sombre, les bras croisés, mâchoires serrées comme il maîtrisait sa colère. Néanmoins, il s’approcha d’un pas tranquille, comme s’il avait voulu mieux voir Vollen.

- Justement, en parlant du Conseil Noir. Et si vous nous disiez plus exactement de qui vous prenez vos ordres ? Parce qu’il se trouve que moi aussi, je suis en lien direct avec eux et je n’ai jamais entendu parler de vous, persifla le hapien.
- Comme si j’allais vous donner un nom.
- Il vaudrait mieux pour vous, sinon ma chienne risque de vous faire sauter la cervelle.

Un léger vent soufflait sur le plateau, décoiffait le colonel dont la sueur luisait sur son front. Malgré la terreur, cependant, ses yeux restaient déterminés, braqués sur le hapien et sur l’Inquisitrice, à tour de rôle.

- Ne faites pas l’imbécile, capitaine Hope. Si vous travaillez pour le Conseil Noir, vous savez bien qu’ils ne permettront pas les querelles intestines, surtout en ce moment. Vous mettriez le feu aux poudres, et celui qui me donne ses ordres demanderait au vôtre de vous abattre pour rétablir la justice ; vous savez comment ils sont.
- Encore faudrait-il qu’ils sachent ce qu’il s’est passé ici, rétorqua calmement Lloyd.
- Oh, mais ils n’auront qu’à vous sonder si je disparais : j’ai déjà déclaré votre présence ici.
- Quoi ?!

L’enflure. Laduim allait lui tomber dessus en moins de temps qu’il n’en fallait pour remonter sur sa frégate. Lloyd avait avancé un peu plus, près à parler de plus près à Vollen, quand soudain un trait de blaster vola à quelques centimètres devant ses yeux, passant entre son visage et celui de l’impérial. L’instant suivant, une véritable pluie s’abattait sur eux et plusieurs impériaux s’effondrèrent, raide mort, tandis que Vollen se jetait à terre en espérant se protéger. Le hapien se jeta sur Dana pour la renverser. Ils touchèrent terre d’un même mouvement. Lloyd étouffa un hoquet de douleur comme son bras se réveillait à ce choc, mais rapidement il recouvrit l’Inquisitrice de son corps tandis que le sable se soulevait en volutes autour d’eux, comme d’autres traits de blaster s’écrasaient sur le sol, les caisses. Il y eut quelques cris, le hapien entendit des soldats essayer de se lever, d’autres tomber à leur tour et en quelques secondes, la tente du colonel était complètement trouée.

Quelques secondes plus tard, l’assaut sembla cesser aussi vite qu’il avait commencé. Le hapien releva la tête, haletant. Le nuage de poussière était déjà soufflé, et révélait ce qui restait autour d’eux : une tente déchiquetée, des cadavres au sol. Jyxo était allongé au sol, guettant comme eux la prochaine attaque, mais rien ne se produisit. Lloyd se redressa vivement pour se mettre à genoux.

- Merde, où est Vollen ?!

Il fouilla l’endroit du regard, se retourna. En vain.

- Vollen s’est enfui !

Lloyd se mit debout, fit un tour sur lui-même en espérant trouver la silhouette de l’impérial, mais c’était peine perdue : le camp était couvert de poussière et les chemins qui s’en éloignaient s’égaraient dans les montagnes entre les rochers, disparaissant à leur vue. Le hapien fit volte-face pour fustigea l’Inquisitrice toujours à terre, et toujours en sous-vêtements.

- Putain Dana, qu’est-ce qui t’a pris ?! Je t’ai dit que je voulais parler aux soldats d’abord, histoire de pas faire un carnage inutilement, et je t-AAAH !

Ses yeux s’écarquillèrent en même temps que le cri sortit de sa gorge. Une douleur fulgurante venait de lui transpercer la cuisse et il s’écroula au sol avec un geignement de souffrance. Il porta ses mains à sa jambe, où déjà le sang s’écoulait abondamment : il avait un trou rouge qui n’était pas sans rappeler…

- J’vais finir par faire de toi un homme-tronc, l’impérial !

… un tir de verpine.

Les motospeeders venaient de déraper tout autour d’eux, braquant blasters et vibrodagues tandis que certains des dragons déjà sautaient à terre pour se dépêcher. Trois soldats impériaux étaient encore en vie et ils leur attachèrent vivement les mains dans le dos pendant que Jyxo se relevait avec un cri de joie. Vika se précipita sur lui lorsqu’elle se rendit compte que son visage était tuméfié.

- Aaaah, bande de cons ! les insulta Lloyd. J’vous avais dit que…

Mais le hapien ne put terminer sa phrase, il venait de recevoir un coup de pied en plein visage. Callum venait d’arriver, le visage tordu par la colère. Il se pencha aussitôt pour attraper le hapien par le col et lui parler face contre face.

- Ta gueule, l’impérial. D’abord, tu me voles ma femme, ensuite, tu la ramènes à l’ennemi qui a essayé de la violer, et finalement, tu sauves Vollen alors que ma petite dragonne était à deux doigts de se venger ?
- Quoi ? N…
- On t’a parfaitement vu ! tonna Callum. Ma femme avait son blaster pointé sur lui, et si t’étais pas intervenu pour le sauver, il serait mort à cette heure-ci !

Lloyd lui cracha du sang au visage, et Callum répondit par un coup de tête qui fit craquer le nez du hapien. Il retomba en arrière avec un râle, et ses mains se portèrent à son visage cette fois couvert de sang.

- Aaah… Mais c’est pas ta femme ! gémit-il en se recroquevillant au sol.

Callum secoua la tête en un signe négatif, sous les yeux des autres dragons qui observaient la scène… Ou l’Inquisitrice dans sa tenue – ou son absence de tenue – hors du commun. Leur chef soupira avant de regarder Dana à son tour.

- Trouvez-lui une couverture, ordonna-t-il, et ligotez-moi cet enfoiré.

Les dragons s’activèrent. Dès qu’on lui apporta l’une des grandes toiles qui servaient de couverture dans les tentes, Callum se hâta de la passer autour des épaules de Dana. Il lui frictionna tendrement les épaules, pendant qu’au sol, Vika avait posé un genou sur la poitrine de Lloyd pour le maintenir à terre.

- Mais laissez-moi putain, puisque je vous dis que j’étais contre Vollen ! Et la touche pas, ordure, elle est à moi !
- Arrête de contrarier le chef et de nous mentir, fit Vika en lui passant des menottes rudimentaires. T’as vu l’état dans lequel elle est ? Même un impérial traiterait pas sa femme comme ça !
- Mais c’est pas vrai !

Il ne put rien ajouter d’autre : Vika lui enfonçait un chiffon dans la bouche.



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L’Agonie des Krayt

Une autre planque. Un autre vaisseau.







L’état de choc. Combien de fois Dana avait-elle expérimenté cette sensation ? Après les tremblements, le froid engourdissait l’extrémité des membres et l’air manquait, menant à une hypoxie désagréable. On avait l’impression d’étouffer sous le manque d’oxygène. La première fois, Dana avait vécu l’état de choc après sa rencontre avec Orzak, sur Korriban, quand Lloyd Hope état intervenu pour lui éviter une mort certaine. Depuis cette expérience, elle avait développé une claustrophobie handicapante. Puis, les autres états de choc s’étaient enchaînés. Chez les Lames Rouges. Chez Luis Raidun. Chez Maxence des Djiilo. Sur Jabiim. Et le choc paralysait ses pensées, les encarcanait dans un étau de colère ; une colère dirigée contre Vollen, contre Lloyd Hope, contre Callum Krayt alors qu’en réalité, la seule personne vers laquelle elle concentrait toute cette colère était elle-même.

Si elle avait dit quelque chose pour défendre Hope, elle ne s’en souvenait plus. Du trajet qui l’avait conduite vers une autre planque du dragon, elle n’avait aucun souvenir. Tout n’avait été qu’une suite d’idées, de sons et d’images flous. L’état de choc ressemblait ) un pilotage automatique qu’engageait le cerveau et Dana Shar s’était laissé guider, comme un automate parce que son instinct de survie avait primé, parce que c’était l’ultime verrou avant la folie et la perdition. Elle s’était réveillée d’un mauvais songe dans une coquerie, semblable à celle du Sans-Visage. Une autre planque. Un autre vaisseau.

- Est-ce que…t’as une cigarra ? demanda-t-elle, la bouche pâteuse.

Sans qu’elle ne s’en rappelle, Callum lui avait enfilé une de ses larges chemises, assez large pour en faire une robe très courte, mais plus décente que ses sous-vêtements de mariée. Il secoua la tête et écarta les mains.

- Non, mais Dùnx va te trouver ça, répondit-il en faisant un signe silencieux vers le dévaronien à la carrure monstrueuse.
- Ok, fit-elle, le regard dans le vague, les prunelles soutenues par des cernes prononcées.
- Est-ce..est-ce que cet enfoiré d’impérial t’a touché ? Pas Vollen, l’autre.
- Oui, répondit-elle en toute honnêteté.

Callum se redressa d’un coup et envoya son pied dans une caisse de provision qui se renversa avec fracas. Il tenta ensuite de se maîtriser, inspirant profondément, mais la rage bouillonnait dans ses veines.

- J’vais lui faire payer.
- J’ai pas résisté, articula-t-elle calmement.
- Que…quoi ? Tu dois pas être bien, je vais dire à Kraya de…
- J’ai dit, le coupa-t-elle en levant ses yeux vers lui pour lui faire constater tout son sérieux. Que j’ai pas résisté.

Un silence accompagna l’expression atterrée qui peignit les traits du chef de clan. Il revint sur ses pas et se pencha sur la table, frappant son index à la surface :

- T’es en train de me dire que…ma femme, s’est offerte sciemment à un autre homme.
- Les femmes se partagent, répéta-t-elle sans émotion.
- Seulement entre dragons ! s’exclama-t-il. Et comment t’as pu faire ça, dans ton état ?! Dire que je te préservais, c’est pas pour que ce conna…
- Avec ma bouche, je l’ai embrassé, décrit-elle sur le même ton monocorde, comme si elle lisait conscieusement une recette de cuisine, étape par étape. Je suis descendue plus bas et…
- Stop, l’interrompit-il, le visage déformé par le chagrin et la fureur. Je t’interdis de me dire ça. On va dire que…le choc, le traumatisme, t’ont fait perdre la tête, d’accord ? Tu vas te reposer. Et on va chasser Vollen.
- Pourquoi moi ? Sur le millier de femmes qu’a Jabiim.
- Tu as dit oui, lui rappela-t-il en ignorant la question. T’as dit oui et c’est tout ce qui importe.
- Uniquement pour me venger de Vollen. Les enfants dans mon ventre, ceux qu’il a tués. Leur père, c’était Lloyd.

Callum écarquilla les yeux. Il pinça ses lèvres, sembla encaisser cette révélation comme on absorbait un coup bas. Il ne répliqua pas et sortit d’un pas enragé, bousculant Dùnx au passage. Le cornu haussa les épaules et vint jeter un paquet de cigarras et un briquet devant Shar. De ses doigts fébriles, elle ouvrit la petite boîte, extirpa avec précaution une cigarette pour la coincer entre ses lèvres au rouge à lèvres défait. Elle avait l’air d’une louve qui revenait de la chasse, les babines écarlates à force d’avoir déchiqueté ses proies. Un déclic résonna dans la coquerie désaffectée et elle approcha la flamme de sa figure. Allez, approche que j’t’allume. La première bouffée la fit tousser, mais les vieilles habitudes reprirent le dessus et bientôt, les toxines du tabac envahirent ses poumons, calmèrent sa nervosité.















- Ouvre, ordonna froidement Callum.

Vika désactiva les barreaux d’un geste sec et l’homme s’engouffra dans ce qui ressemblait à une cellule. Ils n’étaient plus en extérieur comme dans la planque précédente. Ils se terraient dans les entrailles d’un grand vaisseau à la carcasse abandonné aux pluies de Jabiim, à moitié ensevelie dans une autre jungle, de l’autre côté des montagnes. Hope était menotté, bâillonné, mais cela n’empêcha pas le Krayt de foncer sur lui pour lui administrer un coup de poing en plein figure. Ses yeux verts lançaient des éclairs de haine.

- J’vais pas te tuer tout de suite. Je vais te faire crever à petit feu. Si t’as un peu de chance, je te laisserai en vie, et tu quitteras Jabiim à tout jamais. Une Jabiim libre. Et si…t’as la moindre idée, concernant une fuite, ou concernant ma femme, je te ferai connaître pire que la mort.
- Callum….intervint Vika. Calme-toi.
- La ferme, Vika, souffla-t-il avant d’abattre de nouveau ses phalanges dans la figure du hapien. Si tu comptes pas m’aider à le dérouiller, alors casse-toi.
- Oublie pas qu’on a besoin de lui. Il sait sans doute où se trouve Vollen. C’est lui l’objectif oublie-pas.

Il attrapa Hope par le col et le plaqua au fond de la cellule.

- Vous, les impériaux, vous me dégoûtez. Je l’ai sauvée de Vollen. Il allait la prendre contre un arbre, et il l’aurait tué. Alors, j’crois pas. J’crois pas qu’elle ai accepté sciemment de revivre un truc comme ça avec toi, ni avant, ni après. T’as quelque chose à dire peut-être ?

Callum plongea ses doigts dans la bouche de Lloyd pour lui arracher le chiffon des dents.








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L'Agonie des Krayt


Jusqu’à ce que tu sois prêt à te flinguer pour un Empire.





Le hapien toussa dès que le chiffon fut extrait de sa bouche, et il ne put répondre immédiatement. Du sang dégoulinait le long de son menton et de sa gorge, et Vika s’était contentée de lui faire une compresse à travers son pantalon pour sa blessure à la jambe. Mais cette fois-ci, pas de médicament, pas d’anti-douleur. Callum lui administra un nouveau coup de poing dans la tempe et Lloyd vit danser la cellule autour de lui. Combien de prisons ? Combien d’entre elles à penser à Dana Shar, pour pouvoir s’évader intérieurement, pouvoir oublier la douleur et la peur de mourir ?

- Alors dis-moi ! fit Callum un peu plus fort. C’est vrai ce qu’elle a dit ? Qu’elle se serait offerte à toi ?!

Le hapien inspira une goulée d’air, froide et douloureuse.

- J’t’ai déjà dit, balbutia-t-il. C’est pas ta femme, c’est la mienne, évidemment qu’elle s’est offerte à moi, et bien avant qu’elle sache même que t’existes.

Il reçut un nouveau coup, dans le ventre cette fois-ci, et il se tordit de douleur. Mauvaise réponse. Cette situation. Recevoir des coups parce qu’on le pensait avoir touché à Dana Shar, cela lui rappelait Artorias. S’il avait su, alors, jusqu’où cette Inquisitrice lui ferait aller. Combien il allait encaisser pour elle. Et pourtant…

- Et si tu savais, ce que je m’suis fait plaisir !

Callum vit rouge. Il lui enfonça brutalement son poing dans le ventre, une nouvelle fois, avec un cri de rage. Lloyd se tordit en deux de nouveau, suffoquant. Il haleta, le temps de reprendre sa respiration. Et dès qu’il le put, il parla de nouveau.

- J’lui ai même fait tatouer mon nom sur la poitrine, t’as pas vu ? s’exclama-t-il et du sang dégoulinait toujours de sa bouche, de son nez. C’est écrit Hope !

Nouveau coup, dans la figure cette fois. Des gouttes de sang maculèrent le sol. Le hapien se sentait doucement défaillir. Il ne savait pas très bien pourquoi il en rajoutait autant. Ses yeux s’étaient remplis de larmes de douleur. Il hoqueta en reprenant la parole, alors même que Callum n’avait rien demandé.

- Et elle est encore plus impériale que moi, figure-toi ! Et tu sais ? Tu sais ce qu’elle fait ?

Sa voix était devenue un peu plus aiguë. Il essayait de se redresser un peu, mais à chaque mouvement, chaque tressaillement, il lui semblait qu’on lui arrachait la jambe. Alors il se contenta de reprendre sa respiration, de chercher des yeux le dragon qui fulminait. Ce dernier avait retroussé ses manches et se penchait de nouveau pour rapprocher son visage de celui du hapien.

- Sa spécialité, c’est de rendre fous les hommes comme toi et moi, de faire en sorte qu’ils se consument de désir, de frustration, de rage, jusqu’à ce que tu sois prêt à te flinguer pour un Empire, jusqu’à ce que tu sois prêt à conduire des milliers d’hommes à la mort rien que pour gagner une bataille. Tout ton clan, s’il le faut, tu les tueras rien que pour elle ! Rien que pour son Empire !
- TA GUEULE ! FERME-LA ! hurla Callum, et il se releva pour l’assener de coups de pied.
- Alors… Jabiim libre ? Laisse-moi rire. Jabiim est impériale ! cria Lloyd entre deux coups. Le sol que tu foules est impérial, tes tentes de pacotille, tous les fruits qui y poussent et que tu manges, tout ça c’est impérial. Tu es impérial.

Le hapien avait basculé sur le flanc. Il n’essayait pas de se protéger. Il entendait les cris d’un Callum enragé, mais sa vision s’était brouillée et il ne voyait plus d’où venaient les coups, il les encaissait, la joue pleine de sang écrasée contre le métal froid du sol.

- Et si tu l’es pas encore, elle te le fera devenir, chuchota le hapien. C’est trop tard. Chaque parcelle de toi sera impériale.

Il ne sut plus s’il reçut d’autres coups. L’inconscience l’avait brusquement emporté.







Vika avait fini par intervenir. Elle avait attrapé Callum par les épaules, l’avait tiré en arrière en criant qu’il ne fallait pas, qu’il allait le tuer si ce n’était pas déjà fait. Elle avait jeté un regard affolé au tas sanguinolent qu’était devenu le hapien, avait attiré son chef hors de la cellule avant de la refermer, et Callum était parti en frappant les murs.

Une demi-heure plus tard, Vika était retournée près de Jyxo. Elle s’était assise au bord de la couchette, atterrée, et deux autres dévaroniens, dont Dùnx, la regardaient, attablés à quelques pas de là. La pièce était toute petite ; c’était un ancien bureau du vaisseau qui avait été réaménagé avec du mobilier de fortune, et où on pouvait encore activer localement l’énergie nécessaire à l’éclairage des lieux ; des néons jaunes et oranges, qui jetaient sur la figure des quatre dévaroniens des lueurs lugubres. Vika déglutit. Elle venait de leur raconter la scène, et de leur répéter certains propos du hapien.

- J’pense qu’elle est… Un genre de sorcière, dit-elle à voix basse en serrant les poings sur ses genoux, frissonnante.

La dévaronienne était du genre courageuse, à ne pas se laisser impressionner par les adversaires musclés et encore moins les propos intimidants. Mais les sorcelleries, les malédictions… C’était autrement plus pervers, et elle se sentait démunie contre cela.

- J’ai jamais vu Callum dans cet état. Encore moins pour une… vulgaire femme qui tient à peine debout, souffla-t-elle. Aussi belle soit-elle, ça ne justifie pas une telle crise. Je crois que l’impérial dit vrai ; c’est un genre d’ensorceleuse. Et il a dit… Il a dit que Callum serait bientôt prêt à nous sacrifier tous pour l’Empire, à cause d’elle.

Les dévaroniens s’échangèrent des regards inquiets.

- C’est comme a dit Mamy, grogna Jyxo, elle apporte la malédiction.
- Mamy ?
- Mamy Zora, c’est la matriarche des Serpents. Mes cousins m’ont raconté : quand elle est arrivée au Clan, y’a plusieurs mois, Mamy a tout de suite senti qu’elle était maudite, et dangereuse. Alors, elle a essayé de la refiler aux Saphirs ; ils ont failli tout perdre à cause d’elle. Leur Temple hérité des Sith a été complètement détruit et des hommes sont morts à cause d’elle. Du coup, elle est revenue au camp. Et là, des mois plus tard, elle fait des enfants morts. Mamy essaie de s’en débarrasser de nouveau… En la donnant à Callum. Et vous voyez où ça mène Callum…
- Maudite, commenta Dùnx, et il serra le pendentif en forme de dent de dragon qu’il portait autour du cou pour faire face au mauvais présage.
- Il faut qu’on prenne une décision, trancha Vika. Pour sauver le clan. Et il faut qu’on sache… Si pour ça, on peut encore sauver Callum.

Un silence de plomb tomba sur la petite assemblée.






Pendant ce temps, Callum avait passé sa fureur dans une pièce qui servait habituellement de cuisine. Il avait renversé une table chargée de fruits, comme si ceux-ci le narguaient, et avait frappé les murs de ses poings rageurs. Puis la fatigue avait gagné son corps et, suant, les sourcils froncés, il s’était laissé glisser sur un caisse pour s’y asseoir. Ses yeux tombèrent sur un couteau. Subitement il se releva, attrapa l’ustensile et se dirigea droit vers la pièce où Dana se trouvait.

Il repoussa l’écoutille avec un geste brusque en entrant, et fondit sur elle en levant la lame entre eux, la fusillant d’un regard halluciné.

- Montre-moi ! aboya-t-il.

Comme elle avait l’air de ne pas comprendre, il arracha la couverture qui la couvrait, avant d’attraper le soutien-gorge d’une main possessive. Il glissa la lame entre la peau de l’Inquisitrice et la dentelle, et celle-ci se découpa le long du fil affûté du couteau. Subitement, sa poitrine se retrouva mise à nue, et Callum lorgna le tableau général, avant que ses yeux ne tombassent sur le tatouage. Une grimace de désespoir tordit ses lèvres. Il attrapa Dana par le cou, la fit reculer jusqu’à la paroi derrière elle, appuyant le bout de sa lame sur sa gorge.

- Je te laisse un choix, dit-il, et sa voix tremblait de fureur, mais il essayait de se maîtriser. Je t’offre une vie. Une nouvelle vie. Une bonne vie. Je t’ai déjà proposé ça. A mes côtés. Tu seras une Reine, ici, tu ne seras plus rien obligée de faire pour cet Empire. Tout ce que je te demande en échange, c’est de prendre ce couteau et d’aller tuer l’impérial sous mes yeux. Que je sache que ce mot sur ton sein n’était qu’une lubie d’impérial déséquilibré et qu’il ne signifie rien. Sinon, je t’enfonce cette lame au milieu de ces lettres. Je la planterai dans le H, puis dans le O, et ainsi de suite, pour être sûr que ton cœur de femme maudite ne puisse plus rien contre mon clan.

Callum respirait lourdement. Ses yeux émeraudes étaient tout aussi fous de chagrin qu’il l’était de rage et un bref instant, il parut avoir un véritable espoir, un véritable élan de bienveillance. Il rapprocha doucement son souffle de celui de Dana, écrasa son corps du sien, d’une façon qui se voulait tendre malgré le couteau qui séparait leurs gorges.

- Choisis-moi et tu ne le regretteras pas, Dana Shar. Tu n’auras rien à craindre de moi. Je te comblerai, fit-il, suppliant.



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L’Agonie des Krayt

Je suis la seule à être revenue.







- Bien sûr, répondit-elle doucement.

Ses doigts féminins se refermèrent autour du poignet qui tenait la lame et la Force enroba l’esprit de Callum au même moment ; un esprit que le chagrin et le désarroi avaient rendu faible. Dana avait entrevu le couloir vers l’âme du chef, la Force avait créé une faille dans ses pensées désordonnées et elle avait empoisonné ses espoirs, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien sinon un grand vide que l’Inquisitrice combla de sa présence et de sa sorcellerie sith. Le vert éclatant des yeux de l’humain se ternit progressivement alors qu’elle chassait toute velléité pour y planter son contrôle et afin que ce dernier fut absolu, elle embrassa le Krayt, profitant du contact pour resserrer son emprise. Quand leurs lèvres se délièrent enfin, Callum abaissa son arme et resta silencieux. Dana savoura ce silence. Elle prit une grande inspiration, se concentrant pour maintenir le carcan du contrôle.











Des pas résonnèrent dans la coursive conduisant aux cellules. L’ombre de l’Inquisitrice grandissait à la faveur des rares néons opérationnels. Elle suivait celle du chef dragon. Vika se releva dès qu’elle aperçut le couple, jeta une œillade suspicieuse vers Shar qui avait revêtu une des armures légères portées par les membres du clan. Sa couleur sobre camouflait davantage qu’elle ne protégeait et le cuir sauvage dont elle était faite épousait harmonieusement les courbes de la Sith. Dana porta son attention dans la cellule, découvrit le corps inerte de Lloyd et refreina les milliers de battements que son cœur souhaita produire. Le moindre saut d’humeur pouvait briser le contrôle. Elle se mordit l’intérieur de la joue et délia la Force dans l’esprit du dragon :

Ouvre.

- Ouvre, dit Callum.

Il faut l’emmener chez Kraya.

- Et emmène-le chez Kraya, poursuivit-il d’un ton sans émotion
- Quoi ? Attends, y’a une heure….tu voulais le tuer, là il respire à peine et…

Fais ce que je te dis.

- Fais ce que je te dis, Vika. Tu l’emmènes chez Kraya pour qu’elle le soigne.

Vika cracha au sol et s’intéressa à Dana qui demeurait immobile et en retrait.

- C’est toi qui lui as dit de faire ça ?
- Je vois pas de quoi tu parles, j’accompagne Callum comme une épouse devrait le faire. Et je suis prête à chasser Vollen. L’impérial nous conduira sûrement à lui.

La dévaronienne secoua la tête et plongea dans l’atmosphère lugubre de la cellule pour attraper Lloyd sous les aisselles et le traîner dehors. Elle se dirigea ensuite, avec ce fardeau, vers l’infirmerie de bord – royaume incontestée de la mystérieuse Kraya. Dana déposa son regard sur Callum qui n’avait pas bougé et suivit Vika tandis que le chef prenait une direction opposée avec la démarche raide d’un automate. Il s’enfermerait dans sa cabine ; le vaisseau serait assez petit – espérait-elle, pour qu’elle puisse conserver le lien du contrôle. Elle n’aurait pas le choix, toute la Force, elle la concentrait dans ce seul exercice : celui d’avoir Callum Krayt sous sa coupe.

Arrivés à l’infirmerie de bord, Kraya se dépêcha de saisir le corps lourd du hapien pour le faire basculer sur une table médicale. Vika, les mains couvertes du sang Sith se détourna ensuite vers Dana qu’elle défia d’un regard sombre. Elles demeurèrent quelques secondes à se fixer dans les yeux, comme si elles avaient pu sonder l’âme l’une de l’autre. La dévaronienne ajusta le verpine qu’elle avait sanglé à l’épaule.

- Je vais monter la garde devant les portes de l’infirmerie. Si ca dégénère avec lui, tu seras tenue responsable.
- Ne me provoque pas, pétasse, répondit Shar en actionnant la fermeture de l’écoutille pour laisser Vika dehors.

Kraya s’efforçait de découper le t-shirt de Lloyd, ainsi que son pantalon. Elle se dépêcha ensuite de rassembler assez de matériels et de réactifs, la mine plissée de concentration. Sa belle chevelure vénitienne dansait dans l’air à chacun de ses mouvements précipités par l’urgence médicale. Elle s’occupa en priorité de la cuisse, qui lui sembla être la blessure la plus grave.

- L’artère fémorale n’est heureusement pas touchée. Sinon, il se viderait de son sang et je devrais l’amputer. Mais j’ai déjà soigné des blessures de verpine, enfin quand il reste un membre encore en place.

Dana se rapprocha d’un pas lent vers le corps inanimé de Hope. Elle percevait à peine sa poitrine se soulever et s’abaisser au rythme d’une respiration pénible. Son loup, son capitaine. Discrètement, d’un geste lent, profitant que Kraya soit occupée à opérer la plaie, elle noua ses doigts à ceux du hapien, toute blême. Elle sentit le sang visqueux et tiède imbiber le derme de sa paume. Pourquoi saignait-il autant ? Son cœur s’emballa et elle manqua de briser le lien qui la liait à Callum. Elle ressaisit la Force in extremis et se força à ne pas paniquer. Elle délogea une cigarra, son briquet. Elle devait se calmer.

- Il faut…il faut que tu m’expliques le code des Krayt, demanda-t-elle vers Kraya. Ses lèvres tremblotantes peinaient à garder la cigarra immobile et elle abandonna l’idée de fumer.
- Quoi ? s’étonna la médecin, plongée dans ses soins. Le code ?
- Vos lois. Je suis censée faire quoi ?
- Le chef du clan Krayt a l’autorité absolue. Comme chez les Saphirs. Il dirige. Par extension, son épouse aussi. S’il meurt, elle prend sa place en l’absence d’un héritier ou d’un membre de la famille capable de le faire. C’est pour ça que c’est le seul à pas partager son épouse. C’est pour ça qu’il avait besoin d’une épouse, au cas où il….survivrait pas à Vollen.
- C’est quoi cette histoire de partage de femmes ?
- C’est récent. Depuis le massacre qu’a commis Vollen, on était déjà pas beaucoup, siffla Kraya en bandant fermement la cuisse. Elle planta ensuite une seringue dans le muscle, avec de chasser la douleur. Mais Vollen a fait emmener toutes les femmes, ou presque, dont moi. On devient dragon par le sang maternel. Sans les femmes, le clan était voué à disparaître je…

Elle interrompit ses soins et s’essuya le front d’un revers de la main, tremblante.

- Je suis la seule à être revenue. Depuis, on partage les femmes, pour qu’elles puissent repeupler le clan.
- Toi y compris ?
- T’as pas remarqué, soupira Kraya d’un ton sec. Mon ventre.

Dana baissa les yeux vers le ventre de l’humain. Sous la combinaison médicale, la courbe de l’abdomen était légèrement arrondie.

- Cadeau de Vollen, belle-soeur. C’est pour ça que j’quitte pas les planques et que je me cache dans toutes les infirmeries. Je suis une honte.

L’Inquisitrice ne dit rien. Elle recula d’un pas, les lèvres pincées et fit volte-face pour quitter les lieux. Elle passa comme une furie devant une Vika lugubre. Le sol tangua sous ses pieds et elle dut s’appuyer d’une main contre une paroi avant de vomir. Le dégoût venait de l’emporter. Elle dériva ensuite, marchant péniblement se tenant aux murs d’acier, accablée par l’éclairage crasseux des néons. Elle croisa quelques membres du clan qui vaquaient à leurs occupations et elle ne remarqua pas les regards de crainte qu’on lui lançait, ni les murmures qui se créaient à son passage. Elle se dépêcha d’ouvrir l’écoutille de la cabine de Callum. Ce dernier était assis au bord de sa couchette, les yeux perdus dans le vide. Dana s’adossa à la porte et se laissa glisser au sol, retenant ses larmes, ses cris de rage. Elle bougea son bras et son pantin se releva. Il s’empara de la lame qu’il avait abandonné plus tôt et s’approcha de l’Inquisitrice qui fixait désespérément le sol. Elle ferma les yeux et renonça. Finalement, Callum reposa l’arme et elle se concentra sur sa propre respiration.













- C’est toi qui lui as dit pour le tatouage ?

Dana était assise sur une chaise, ses jambes étaient croisées et elle fumait une cigarra. Elle était à l’intérieur de la cellule et avait assisté au réveil de Lloyd qui avait été reconduit dans sa prison après les soins dont il avait bénéficié. Elle soupira une fumée blanche qui s’évapora dans l’air sombre de la minuscule pièce. La lumière des barreaux à énergie découpait sa silhouette féminine qui trônait, comme une Reine et à l’extérieur, veillant sur leur intimité, Callum montait la garde.

- Bien joué, lâcha-t-elle sans attendre de réponse et c’était impossible de dire si elle était sincère ou ironique. Du bout de sa cigarette tenue entre deux doigts, elle désigna un plateau avec du pain de fruits et de l’alcool. Pour que tu reprennes des forces.







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