Darth Hope
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A la Dérive

Ce moment était comme une dernière chance ; un peu à l’image du dernier repas d’un condamné






La barbe à bantha était énorme. Deux grands verres de sodas l’accompagnaient, car après leur course folle, la soif étreignait leur gorge. Dana était hypnotisée par les glaçons rutilants qui flottaient dans le breuvage pétillant. Et de minuscules cristaux de sucres parsemaient le cône de la barbe à bantha, ils se reflétaient dans les prunelles dorées de la Sith. La friandise avait une coloration mauve aux reflets bleutés : on extrayait le sucre du lait bleu afin de la fabriquer dans des cuves. A vrai dire, elle n’en avait jamais goûté et être ainsi attablée dans une petite échoppe, face à Lloyd Hope, baignée de rose brillant et de sucre l’impressionnait un peu. Et si elle retrouva des couleurs, c’était uniquement parce qu’elle s’était mise à rougir étrangement. Le droïde qui les avait servi portait un tablier blanc et une toque de la même teinte. Il claqua le montant de l’addition dans l’air d’une voix criarde et repartit, emportant avec lui les deux coupes de glaces des clients précédents.

- C’est gentil, merci, dit-elle en évitant le regard émeraude du Sith.

C’est gentil. Un vocabulaire qu’on entendait rarement dans la bouche de Dana Shar. Quant au merci, cela relevait encore du miracle. La majorité de ceux qu’elle avait prononcé dans sa vie, et ils n’étaient pas nombreux, s’adressaient à Hope. Qu’il lui sauve la vie tant de fois méritait des remerciements et qu’il lui offre quelque chose d’aussi banal qu’une boisson et une gourmandise lui donnait l’étrange impression d’être reconnaissante. Elle ramena vers elle son grand verre de soda et la paille multicolore disparut entre ses lèvres au maquillage froissé. Elle repensa au baiser nécessaire qu’ils avaient échangé plus tôt, à ce parcours fou dans les galeries techniques du métro-speeder. La première gorgée lui fit énormément de bien. Le sucre ne tarda pas lui procurer un léger regain d’énergie, à chasser les résidus de drogue qu’on lui avait fait ingurgiter à son insu : même le sourire de la Twi’lek sur la boîte du test de grossesse lui parut moins….agaçant.

Au fil de leur épopée, elle n’avait conservé précieusement que la veste du capitaine. Elle se débarrassa de celle en cuir qu’elle portait, libérant son buste que sa brassière outrageuse couvrait à peine. Elle plia le vêtement pour le déposer sur celui de Lloyd, à ses côtés sur la banquette et croisa les bras sur la table qui reflétait tous ces néons colorés de rose.

- Alors, je peux dire que…j’ai un rencard avec le Capitaine Hope ? Est-ce que je dois me considérer chanceuse ? s’amusa-t-elle dans une fausse moue circonspecte.

Les mèches blondes de sa perruque s’agitaient autour de sa figure à chaque mouvement, quand elle faisait fuir son regard vers le reste du café, par exemple. Ici, ils passaient presqu’inaperçus. Un technicien ayant terminé son service qui invite une prostituée à partager une barbe à bantha, c’était cocasse mais pas surprenant sur Astroballe. Ils ressemblaient à n’importe quel couple. Dana admira le hapien, ses cheveux en bataille, sa tenue débraillée dont le débardeur offrait une vue imprenable sur les muscles et les marques de griffure, ses lippes qu’elle convoitait et qui étaient marquées de rouge à lèvres bon marché.

- Je devrais pas dire ça, mais t’es plutôt bel homme, admit-elle du bout des lèvres avant de noyer sa bêtise en sirotant une bonne gorgée de soda. Ses joues se creusèrent tant elle aspira rapidement à la paille, les glaçons tintèrent. Même avec du rouge à lèvres, tu restes un peu mon genre, reprit-elle.

Oui, je le laisserai partir. Elle devait le laisser partir, mais il lui semblait que ce moment était comme une dernière chance ; un peu à l’image du dernier repas d’un condamné. Par endroit la peau de Dana reluisait de lueurs rosées, provoquées par les décorations lumineuses de l’endroit. Et quand elle se servit un bout cotonneux de barbe à bantha, ses lippes se mirent à briller de sucre qui fondait en partie dans sa bouche. C’était délicieux, c’était réconfortant. Mais pas autant que la chaleur de Lloyd, comme celle qu’il lui avait transmise sous un pont dans l’aube crasse de Kaas City.

- Si j’avais su, je me serai mise sur mon trente-un…le blond ne me va pas aussi bien qu’à toi et…j’ai l’impression d’avoir terminé mon service au Lagon Noir dans cette tenue. Qui était le genre à attirer des hommes mais…pas des hommes aussi bien que toi.

Nouveaux tintements de glaçons alors qu’elle déglutissait son soda. C’était gênant. Il fallait qu’elle arrête de parler. Autre bouchée de barbe à bantha. Avoir la bouche pleine, c’était l’assurance de raconter moins de conneries. Et l’ambiance autour d’eux était à la fois calme et festive. Le comptoir plus loin animé par la clientèle qui commandait à emporter et les tables étaient occupées par des couples ou des familles. La clameur de tout ce monde étouffait la musique un peu vieillotte que diffusaient les haut-parleurs. Dans ce décor banal, ils étaient d’un anonymat presqu'affligeant.









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Lloyd Hope
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Il apercevait les incessantes allées et venues de tous ces gens venus s’amuser, venus oublier, venus vivre une vie standard, car c’était encore possible dans l’Empire. 





Au départ, le hapien au visage grave ne cessait de jeter des coups d’œil derrière Dana, guettant l’entrée de la petite échoppe, à laquelle l’Inquisitrice en perruque blonde tournait son dos gracieux. Il avait seulement grommelé un assentiment, pensant qu’elle plaisantait, quand elle avait demandé s’ils avaient un rencard. Puis il y eut le commentaire suivant et soudain ses émeraudes tombèrent sur elle, étonnées.

Plutôt bel homme. Qu’est-ce qui lui prend ?

Il la regarda longuement, interdit. Elle avait toujours ces cernes, qui disparaissaient presque derrière ces mèches blondes. Dans cet accoutrement, encadrée de l’énorme barbe à bantha mauve et son soda, Dana lui parut soudain minuscule. Et trop dénudée. Il avait envie de lui remettre sa veste, mais ça n’aurait pas été correcte. Il grimaça.

- Heu…

Il se mit à s’essuyer la bouche comme il le put, dans un geste précipité. Le rouge s’étala sur ses doigts, et il ne put retirer toute trace sur ses lèvres. Il espéra ne pas avoir rendu les choses pires en étalant encore plus de maquillage autour de sa bouche ou bien il ressemblerait à un clown. Mais c’était peut-être moins pire que ce qui était en train de se passer maintenant. Des hommes aussi bien que lui ?? Ses yeux s’arrondirent avec un bref sourire embarrassé.

- Qu’est-ce que tu racontes.

Il se mit à boire son soda pour s’occuper. C’était très sucré. Ça pétillait. Ses yeux avaient dérivé vers la vitre à côté de leur banquette, et au-delà des lueurs des guirlandes électrique qui s’y reflétaient, il apercevait les incessantes allées et venues de tous ces gens venus s’amuser, venus oublier, venus vivre une vie standard, car c’était encore possible dans l’Empire. Si on n’était pas sur un territoire contesté, si on ne s’approchait pas d’une carrière militaire, si on n’habitait pas trop près des frontières. Si on ne croisait pas la route d’un Sith. Un vrai, ou un boucher.

Le hapien s’enfonça dans la banquette avec son verre, qu’il agitait légèrement dans sa main pour y faire tourner le contenu, comme il l’aurait fait avec un whisky ou un vin artorien pour en faire s’échapper les arômes. Habitude d’alcoolique. Il baissa les yeux sur sa propre tenue.

- Bon, Mumkin m’a dit que…

Il hésita, croisa un instant l’étendue dorée. Est-ce que c’était une bonne idée de reparler de ça ? Sûrement pas. Il s’éclaircit la gorge avant de froncer les sourcils.

- Nan rien. Dis donc, tu mets pas de mot de passe sur tes datapads ? demanda-t-il subitement, le ton plus nerveux. Enfin, ton datapad. Imagine que tu l’oublies ou tu le fasses tomber quelque part, tout le monde peut lire tes messages, c’est pas sérieux, ça.

Lloyd la regarda un instant avant de soupirer et de faire une moue penaude. Tu m’étonnes qu’on peut pas te dire la vérité.

- Désolé, grommela-t-il. J’devrais plutôt te remercier. Pour… Pour être venue m’chercher. C’est… Hum, c’est quand même cool d’avoir une coéquipière sur laquelle on peut compter. J’sais pas comment j’aurais fait autrement.

Il avala une autre gorgée de soda et passa sa langue sur ses lèvres pour en recueillir le surplus de sucre. Il s’était remis à toiser l’entrée de la boutique, mais cette fois-ci, il était moins aux aguets. Ou plutôt, ce qu’il guettait ne paraissait plus être une menace physique. Il s’était mis à pianoter sur son verre, faisant tinter le bout de ses ongles courts en un geste fébrile. Puis il parut s’intéresser à Dana de nouveau, et tâcha de se redresser comme s’il venait de se souvenir qu’il y avait peut-être une image plus cohérente à donner que celle d’un ouvrier blasé qui surveillait une porte. Il reposa son verre et guetta l’étendue dorée qui s’était adoucie avec cette nouvelle couleur de cheveux.

- T’as fait ça combien de temps, le Lagon Noir ? dit-il comme s’il commençait une conversation amicale. T’y prenais vraiment plaisir ? J’veux dire…

Il déglutit, baissa de nouveau les yeux sur sa boisson. Il repensa à la photo de Dana avec une twi’lek, dans une posture suggestive.

- J’parle pas de la danse, tout ça, ça je comprends. Mais tous ces types qui… Qui devaient…

« Baver sur toi » lui parut trop sage, considérant ce à quoi il pensait. Et « éjaculer sur toi » était… beaucoup trop cru.

- … être très excités. Ça te plaisait vraiment de faire bander des connards ivres qui devaient te voir comme de la viande à consommer ?

Leurs regards se confrontèrent un bref instant.

- Enfin j’veux dire, commença-t-il rapidement avant de laisser échapper un soupir exaspéré. Attends c’était pas… ça que je voulais demander à la base.

Mais t’es pas putain de capable d’avoir une conversation lambda ou quoi ?

Je vous guide aussi pour la conversation. Ça non plus, vous avez pas l’air d’avoir vraiment l’habitude.

Il retomba dans un silence atterré après avoir passé une main dans ses cheveux. Il avait chaud, soudain.



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Darth Hope
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Un bout de pâtisserie, une limonade, un bout de soleil au coin d’une terrasse calme.







- T'as raison, je raconte n'importe quoi.

A force de bouchées de barbe à bantha, son rouge à lèvres pétillait de cristaux de sucre, donnant à ses lippes une teinte mauve. Elle encaissa les maladresses de Lloyd, s’en vexa, et finit par détourner sa figure pour lui cacher son expression exaspérée. Qu’avait-elle cru, qu’ils pourraient faire semblant d’être des gens normaux. C’était débile. Elle considéra les visiteurs du parc, du café et prit une grande inspiration, de quoi coller un sourire forcé sur sa figure pâle et l’affronta de nouveau :

- C’était sûrement ce que tu voulais dire, répondit-elle en haussant les épaules.. Je les faisais bander, c’était exactement ça mon travail, ce pour quoi j’étais payée. Qu’est-ce qu’on s’en fiche si j’y prenais du plaisir ou pas. Je voulais juste mettre de côté pour…quitter l’Empire. Mais c’est un cercle sans fin, tu te casses une cheville et on retient les frais de toubib sur ton salaire. Et les commissions sur les prestations sont élevées.

Elle étira un nouveau sourire, comme si elle parlait d’une simple formalité :

- Je sais que…c’était pas le genre de femme dont voulait un homme. On aurait jamais emmené une travailleuse du Lagon Noir manger un bout ou au holociné. Donc je présume que ces connards ivres, je les méritais bien assez. Ils me voyaient comme de la viande à consommer, mais ils payaient pour ça et au moins, ils me voyaient. C’est pathétique, mais c’était comme ça.

Les glaçons se heurtèrent dans son verre quand elle but encore, enivrée par le sucre et les arômes artificielles. Quelque chose en elle se ravissait de cette douceur. Elle n’avait jamais pris le temps de savourer ce genre de détails : un bout de pâtisserie, une limonade, un bout de soleil au coin d’une terrasse calme. Elle avait remarqué les œillades de Lloyd Hope vers l’entrée, contre laquelle son décolleté ne rivalisait pas et la pensée lui arracha un soupir franchement amusé.

- J’ai fait ça une grosse année. Avant, j’étais serveuse dans une cantina de misère. Une vraie vie de princesse et…

Elle attira le datapad à elle.

- Concernant mon datapad, je mets jamais de mot de passe, parce que s’il est pas sur moi c’est qu’il est détruit et que….je n’ai pas grand-chose à cacher de toute façon. Je suis une Inquisitrice, qui fait des trucs d’Inquisitrice, ça devrait étonner personne.

Le rouge sur ses pommettes saillantes persistait, sublimé par les néons colorés au-dessus de leur table. Elle sentait les pointes blondes de sa perruque balayer ses épaules et sa nuque. Cela lui rappelait le temps où elle avait coupé ses cheveux, en rentrant dans les Lames Rouges. Les carrés lui donnaient un visage plus rond, et changeaient littéralement les traits de sa figure exotique. Et parmi toute cette étendue de peau nue, les serpents habillaient son poignet gauche, veillant jalousement sur sa main aux doigts vernis et clairsemés d’anciennes traces de brûlures qui n’étaient plus que des minuscules tâches blanches ci et là. A la table proche, un couple d’adolescent s’était mis à rire, côte à côte, ils flirtaient avec une complicité intime. Ils semblaient habitués à ce genre de lieu, ce genre de comportements. Elle enviait leur aisance : ils avaient l’air de savoir quoi faire, quoi dire. Ils ne pataugeaient pas un dans un ridicule mortel.

- T’as pas goûté de barbe à bantha, fit-elle soudainement en arrachant une boule moutonneuse et luisante de sucre. La pulpe de ses doigts était déjà collante et brillante à force de manipuler la friandise. La bouchée disparut entre ses lèvres rebondies et elle suça doucement son index et son majeur pour les nettoyer. Le geste était involontairement sensuel, surtout quand le bout de sa langue apparaissait pour lécher les miettes de sucre et se rendant compte qu’il l’observait, elle détacha ses doigts de sa bouche pour cueillir une nouvelle part de barbe sucrée.

Elle se pencha par-dessus la table. Sa poitrine effleura son propre verre de soda, menaçant de le renverser et elle tendit la sucrerie à Lloyd, la présentant près de ses lèvres où demeurait des vestiges de rouge à lèvres malgré ses efforts. De son autre main, elle les essuya correctement, passant son pouce sur elles, frottant les commissures des lippes hapiennes, attendant ensuite qu’il se sente prêt à goûter ce qu’elle lui proposait.

- Ca…hésita-t-elle, ravalant doucement sa salive. C’est…ça permet de reprendre un peu de force. On en a besoin, non ?

Et ces derniers mots n’étaient plus qu’un souffle, un murmure suave et léger.





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Quelque chose d’inéluctable. 





Le hapien fut décontenancé par ses réponses mais il resta stoïque, par habitude de ne rien laisser paraître, les yeux fixés sur le sucre qui s’amoncelait sur les lèvres de Dana. Mais quand même. C’était glauque, son histoire. Est-ce que Mat’ était bien différente, quand il l’avait rencontrée ? Penser à la twi’lek maintenant, en plus. Ce n’était pas ok. D’habitude, il évitait soigneusement la twi’lek, reléguée à un endroit de sa tête où elle ne pourrait le troubler dans tout ce qu’il avait à faire. Il soupira.

- Et pourtant tu voudrais retourner à cette vie-là, constata-t-il, l’air sombre. C’est donc que c’est mieux que notre vie de Sith ?

Mieux que notre vie en équipe ?

- Tu me diras, ouais, moins dangereux. Moins de pression. Moins… d’absurde.

Il haussa les épaules, la mine défaitiste.
Pour sa part, Lloyd paraissait ne pas voir le couple d’adolescents à leurs côtés. Tout au plus, leurs gloussements l’agaçaient.

Il laissa Dana lui essuyer les contours de la bouche, docile, tandis que ses yeux un peu éteints percutaient l’étendue dorée. Puis un léger sourire se dessina sur ses lèvres avant qu’il n’attrape du bout des dents le morceau de barbe à bantha qu’elle avait approché. Mais avant qu’elle ne retire sa main, il attrapa son poignet, faisant tinter les serpents, pour qu’elle restât à proximité. Le goût sucré se déposa sur sa langue, et il mâchonna lentement en la regardant.
Il avait l’impression qu’elle savait quelque chose qu’il ignorait. Quelque chose d’inéluctable, qu’il devinait peut-être aussi, qui avait empêché l’Inquisitrice, pour une fois, de montrer les dents alors qu’elle aurait dû se défendre des propos maladroits qu’il avait tenu. Comme une trêve longue durée, qui se paierait au prix fort, un jour ou l’autre.

Le hapien rapprocha la main de Dana et délicatement, il referma sa bouche sur le pouce collant de sucre de l’Inquisitrice. Il suçota le doigt pour le libérer ensuite, avant de passer à son index. Il n’avait pas besoin d’être suggestif. Le geste en lui-même se suffisait et un sourire en coin s’était peint sur ce masque habituellement impassible.

- Pas besoin de barbe à bantha quand on peut goûter une sucrerie dans ton genre, dit-il à voix basse en libérant enfin la main de Dana.

Il la regarda retourner à sa boisson, les lèvres légèrement pincées, pendant qu’il croisait les bras devant son soda reposé sur la table. A côté d’eux, les adolescents s’étaient mis à s’embrasser. Il entendait le son de la salive qui s’échangeait. Le garçon avait commencé à frotter maladroitement ses mains sur les hanches de la fille. Mais le hapien continuait à regarder Dana qui continuait sa barbe à bantha.

- C’était pas pour dénigrer ce que tu faisais au Lagon Noir ou quoi, dit-il subitement. C’est juste que… J’aime pas qu’t’allumes les autres. C’est égoïste, je sais. Tiens, par exemple, regarde le type là-bas. Derrière toi, celui avec une chemise bleue.

Derrière l’Inquisitrice, à deux banquettes de la leur, un humain à lunettes noires portait en effet une chemise bleue dont une forêt de poils noirs débordait dans le col. Il regarda ailleurs quand Dana lui adressa un regard.

- Ben depuis tout à l’heure j’hésite à lui défoncer la gueule, voilà, parce qu’il te reluque.

Il haussa les épaules quand Dana s’était retournée pour lui faire face de nouveau.

- C’est le genre de type pas raisonnable que je suis. Et tu vois dans ces conditions…

Le hapien hésita, plongea les yeux vers le fond de son verre.

- Enfin j’veux dire, par certains aspects, tu vois, je crois que t’es comme moi. Enfin pas que tu pètes la gueule à n’importe qui. Enfin si, un peu, dit-il précipitamment, en fronçant les sourcils comme il commençait à s’agacer lui-même de tourner autour du pot. Bon je veux dire, toi et moi, la vie normale, c’est mort. T’as une planète à sauver, tu t’rappelles ? Ta vengeance sur le Jedi, j’t’aiderai si tu veux, mais… Tu dis qu’il y a personne qui t’attend, et c’est pas vrai. T’as une planète entière qui t’attend, des milliers de gens, c’est juste que tu t’en rends pas compte. Parce que c’est un peu lourd, une planète entière. Moi j’ai une personne qui m’attend, pour qui je me sens responsable, peut-être deux si je compte Mumkin, et c’est déjà une charge folle. Alors je comprendrais que tu veuilles juste allumer le monde sur une barre en métal vu ce qui repose sur tes épaules mais… J’crois qu’il vaut mieux qu’tu sois forte, pour sauver ta planète, tu vois ? Que c’est ça qui comptera à la fin.

Il releva les yeux, précautionneux, pour rencontrer l’étendue dorée. Il se demandait si son charabia avait du sens pour elle. Il ouvrit la bouche en prenant une inspiration soudaine, ses deux mains s’ourlant autour de son verre comme si, accroché à ce soda sucré, il y avait trouvé un courage inattendu.

- Pour moi t’es une vraie princesse.

Le hapien essaya de soutenir le regard de l’Inquisitrice. Le silence fut troublé par des rires à une table voisine. Lloyd se leva brusquement.

- Bon on va y aller parce que moi aussi je raconte n’importe quoi. Viens.

Sans attendre de réponse, il attrapa sa veste et se dirigea vers le comptoir pour régler la note.






Dans les allées bondées, le hapien avait attrapé la main de Dana pour qu’elle pût suivre. Ils sinuaient entre les couples, les familles, les groupes d’amis. Entre les rires, les gens qui trinquaient, ceux qui se filmaient avec leur datapad. Entre les gens normaux, donc. Ceux qui n’avaient tué personne. Les attractions se succédaient de part et d’autre, des coloris flashy s’élevaient bien au-dessus de leurs têtes en publicités tapageuses ou en devantures recouvertes de néons lumineux. Lloyd regardait à gauche et à droite, comme cherchant quelque chose, mais il lui fallut un long moment pour enfin s’arrêter et considérer l’entrée d’un grand parc surplombé d’une très haute voûte similaire à un ciel nocturne. Une végétation synthétique, faites de couleurs impossibles, s’épanouissait en un labyrinthe enchanteur sur des kilomètres, promesse d’une évasion par les sens. Des barques à propulsion automatique flottaient sur l’eau, s’engageaient dans des canaux sinueux pour une visite envoûtante, sous des arches de fleurs exotiques éclairées par des nuées de lucioles.

Le hapien s’engagea vers les barques et aussitôt, un droïde surgit pour lui faire acheter deux tickets. Lloyd s’arrêta, justement de fouiller sa veste qu’il gardait à la main pour ne pas attirer les regards et en tirer quelques crédits à insérer dans la boîte du droïde. Alors la voie fut libre et le hapien conduisit Dana à une barque pour deux personnes. Il descendit le premier, avant de tendre une main à Dana pour l’inviter à monter avec lui.

- J’peux pas t’emmener au holociné, avoir des gens dans le dos que j’peux pas surveiller me fait flipper.

Il attendit un bref instant qu’elle prît sa main pour monter.





Le bruit de la foule avait fini par s’estomper, pour laisser place au glouglou solitaire du propulseur de la barque et aux bruitages d’ambiance qui accompagnait leur promenade plongée dans une pénombre propice à l’intimité.
Evidemment, Lloyd se retournait régulièrement pour vérifier qu’ils n’étaient pas suivis. Mais en dehors de ça, il arrivait à profiter du spectacle, assis aux côtés de Dana dont le coude effleurait parfois son bras. Et il restait silencieux, comme s’il avait juste attendu qu’elle s’amusât, comme s’il n’était de toute façon qu’un témoin. Témoin de ce que Dana pouvait aussi se prendre pour le genre de femmes qu’on emmenait manger un bout ou au holociné, si elle voulait.

Il avait glissé ses mains sous ses propres cuisses, comme si cela avait pu garantir que cette fois-ci, il ne dirait ni ne ferait de choses maladroites. Une créature aquatique, au corps lumineux, passa sous leur barque en entamant une danse impétueuse, et le hapien regarda Dana qui se penchait pour mieux voir.





- J’suis désolé si j’te rend malheureuse, souffla-t-il, profitant d’un moment où elle ne le regardait pas.



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Tu auras une vie normale de Sith






Cette vie-là, c’est la seule que je peux supporter sans toi.

C’était ce qu’elle aurait dû répondre plus tôt. Ses yeux étaient accaparés par le ballet d’un corps luminescent sous l’eau. Tout ici puait l’artifice : la voûte où un faux ciel étoilé scintillait, parfois interrompu par des déconnexions des projecteurs holographiques, le canal d’acier qui singeait le lit d’une rivière. Mais c’était assez parfait pour elle. C’était même le plus parfait qu’on lui avait jamais accordé. Et même les lucioles qui n’étaient que de minuscules droïdes scintillants lui convenaient.

Voilà, ils dérivaient au fil d’une eau à la fois claire et obscure, bercée par des courants contradictoires comme l’étaient leurs âmes maladroites. Elle avait gardé sa veste en cuir vermeil en travers de ses cuisses. Il ne faisait pas particulièrement froid malgré l’humidité des lieux. Et quand elle se pencha un peu plus, prête à invoquer la Force pour contrôler cette créature aquatique qui ravissait ses yeux au point qu’elle souhaitait la posséder, les mots de Lloyd arrivèrent à ses oreilles. Dana se détourna lentement vers lui, croisant ses prunelles émeraudes, cherchant une preuve, à entendre de nouveau peut-être, pour s’assurer qu’elle n’avait pas rêvé.

Finalement, elle sourit et se pencha de nouveau vers l’eau, mais l’animal avait disparu et elle n’aperçut que son reflet et celui des lumières artificielles.

- Tu peux bien être désolé, Lloyd, dit-elle d’une voix douce, sans animosité, sans colère, sans mépris.

Elle ménagea un silence énigmatique durant lequel, elle brisa son image à la surface de l’eau en y plongeant paresseusement ses doigts. Elle repensait au test de grossesse, aux 99% pas de chance qu’elle avait d’être porteuse d’une mauvaise nouvelle. Il pouvait bien être désolé, au moins pour cela. Et être désolé d’avoir tort sur toute la ligne. Il n’y avait pas que Mat’aenna ou Mumkin qui l’attendaient au bord d’un rivage. Elle aussi, l’attendait quelque part. Elle l’avait attendu toutes ces années et maintenant qu’il se rapprochait, elle avait l’impression que l’attente ne ferait que la broyer un peu plus. Des milliers de gens l’attendaient sur sa planète. Quelle importance quand elle, elle n’en attendait qu’un seul ; celui qui ne venait jamais.

- Quoiqu’il arrive, ajouta-t-elle alors que la fin du parcours se dessinait au loin, que les rumeurs et les silhouettes grandissaient. Je ne regrette rien. Et j’étais vraiment sérieuse avec cette histoire d’astroport, tu sais, je pense que…

Le temps manquait, bientôt, tout se terminerait ; pas seulement cette promenade étrange qui l’avait fait se sentir précieuse, mais tout. Leur équipe. Leurs étreintes. Leurs simples discussions. Alors ses mots se précipitèrent à ses lèvres et dévalèrent dans l’air avant qu’il ne soit trop tard :


- Je pense que tu fais un bon officier impérial. La frégate que tu auras, tu la mériteras. La maison que tu achèteras, aussi. Tu auras une vie normale de Sith, mais je veux que tu saches que quoique t’apprennes un jour, tout ça, tu l’auras eu à la seule sueur de ton front, de ta force, de ton mérite. Que personne pourra te voler ça. T’as pas à te soucier de si je suis malheureuse ou heureuse. C’est pas ça qui compte.





La barque motorisée percuta le quai après cette longue boucle dans une intimité quasi-parfaite. Ils accostèrent là où ils avaient embarqué, le regard fuyant, les mots encore plantés dans leur chair. Il l’aida à poser le pied à terre, comme il l’avait aidée à descendre dans le transport. La foule les saisit de nouveau, les rires, les cris, les musiques, tout ce qu’Astroballe faisait de plus innocent se concentrait dans ce parc, si l’on se fiait aux seules devantures. Même les patoruilles de sécurité étaient noyées dans ce flot incessant d’amusement et d’agitation. Cependant, alors que le couple de Siths longeait des stands de tirs qui rivalisaient d’audace par les lots proposés, entre les hurlements victorieux et les grognements défaits, ils captèrent au loin une patrouille venir à leur rencontre. L’allée était grande, la foule clairsemée. Dana agrippa le poignet de Lloyd et le traînait faire une petite cabine, qui était un automate à holographie. Dès que les portes se refermèrent, elles se teintèrent pour indiquer que la place était prise.

- Bienvenue dans cet holo-maton, fabriqué par Jorrson d’Astroball Industries. Veuillez vous positionner correctement devant les capteurs sensoriels.

Il n’y avait qu’un siège, étroit, sur lequel Lloyd avait échoué. L’Inquisitrice était retombée sur ses genoux et tous deux regardaient, un peu hébétés, l’écran holographique qui distribuait des instructions. Dana croisa ensuite le regard du blond. Ses lèvres maquillées frémirent et elle pouffa de rire avant de secouer la tête et de se pencher vers les commandes. Dehors, les patrouilleurs étaient passés, indifférents. Et eux, i ls étaient dans ce petit abri, un peu coupés du monde.

- Attends, je vais t’arranger ta coiffure, se moqua-t-elle en tentant de lui aplatir un peu les mèches. Ca sera pour ta nouvelle carte d’identité, tu sais celle que tu as égaré.

Provocante, en plus. Ses mains retombèrent sur les épaules du Sith, arrangèrent les bretelles de son débardeur pourtant parfaitement en place et ses doigts frôlèrent les marques de ses griffes de princesse. Elle avait arrêté de rire, de se moquer, troublée soudainement.

- Est-ce que ça t’a fait mal ?

Est-ce que je t'ai fait mal ?




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Des souvenirs de tendresse, des souvenirs interdits.  





Alors c’était vrai, qu’il la rendait malheureuse.









- Est-ce que ça t’a fait mal ?

Lloyd chercha son regard, surpris. Il ne comprit pas tout de suite. Il était resté silencieux tout ce temps, à ressasser ce qu’elle avait dit dans le parc, et le ton de sa voix quand elle l’avait dit. En face d’eux, sur un écran bombé, se reflétait leur propre image : leurs visages épuisés, encadrés de blondeur, les vestiges de sucre et de maquillage sur leurs lèvres, leurs vêtements qui semblaient les travestir. Le hapien avait refermé ses bras sur elle, comme pour empêcher Dana de glisser de ses genoux.

- Non, s’entendit-il mentir quand il comprit qu’elle parlait de ses épaules.

Il ne savait pas pourquoi il mentait. Parce qu’il avait l’impression qu’elle posait une autre question, alors il donnait une autre réponse. Et de toute façon, aurait-il pu vraiment avoir quoique ce fut à dire sur ces malheureuses petites plaies, quand il se souvenait la façon dont il l’avait prise chez Rhysode ? La façon dont elle avait encaissé la douleur, la façon dont elle avait même endossé la responsabilité de ce qui s’était passé ensuite, en l’assurant que c’était elle qui avait désiré le boucher ?

Il se souvenait le trou au fond duquel il s’était senti, sans le savoir vraiment, parce que tant de choses se passaient autour d’eux à ce moment-là. C’était le même trou au fond duquel il était maintenant, de façon plus consciente. Le genre de gouffre d’où il ne pouvait plus parler, parce que les mots n’allaient plus jusqu’à la surface et qu’il se laissait couler. Alors il colla juste son front contre la peau de l’Inquisitrice, au-dessus de son décolleté, pour s’y réfugier en silence. Il attendit qu’elle referma ses bras sur lui, pour que les souvenirs affluent. Les souvenirs de Kaas City quand elle l’avait pris dans ses bras. Les souvenirs de Ch’Hodos quand il s’était allongé entre ses cuisses. Des souvenirs de tendresse, des souvenirs interdits.

Il resta longuement les yeux ouverts dans le vide, à s’emplir de l’odeur de la peau de Dana, tandis que la machine prenait des clichés d’une Inquisitrice protégeant un Capitaine du reste du monde.







Ils étaient ressortis quelques instants plus tard, Dana tenant dans sa main quelques feuilles de papier glacé, sur lesquelles leurs corps continueraient à se percuter indéfiniment tandis qu’ils avaient repris leur déambulation sans but. Ils passèrent devant de nouvelles échoppes, des attractions aux nacelles dansantes, devant des stands de jeux. Lloyd ne paraissait rien voir de tout cela : il suivait l’Inquisitrice, mutique, ses émeraudes égarées sur les visages des passants qui soudain se ressemblaient tous. Les faces des humanoïdes et des aliens brillaient d’excitation, d’ivresse, du jeu et des lueurs que projetaient les néons lumineux, et tout ceci paraissait si absurde, depuis le fond de son gouffre, qu’il se contentait de se raccrocher de temps à autre à la perruque blonde dansante qui marchait devant lui, qui faisait un commentaire sur un établissement ou une attraction. Voulait-elle aller dans une direction qui la suivait, demandait-elle quoique ce soit qu’il acquiesçait d’un bref signe de tête, les lèvres scellées, le visage fermé. Et peu à peu le temps passait, l’Inquisitrice comprenait qu’il n’y avait plus rien à tirer de lui ce soir, et cessa d’insister.

Leurs pas finirent par les conduire à une extrémité du parc, où de grands panneaux vantant les mérites de telle ou telle attraction tentèrent de les retenir. La foule ici s’était éclaircie, les magasins étaient moins prisés, et ils ralentirent l’allure, indécis. Fallait-il retourner sur leur pas pour continuer à visiter des mondes enchanteurs, tenter de gagner des souvenirs, qui ne leur ferait que regretter d’avoir voulu vivre dans un monde qui ne leur appartenait pas ? Ou bien s’en aller pour effacer ces instants comme s’ils n’avaient jamais existé ?

Finalement, ils se décidèrent à poursuivre, à avancer vers l’inexorable. Ils passèrent les portiques et se retrouvèrent sur le quai d’un autre métro-speeder, vide. Lorsqu’ils le prendraient, la rame les conduirait vers les quais d’atterrissage, où ils n’auraient plus qu’à attendre Mumkin, si celui-ci n’était pas déjà posé pour les attendre.

Ils attendirent un moment côte à côte, en silence. On entendit le sifflement du métrospeeder, et soudain la rame apparut dans un souffle tapageur, et s’immobilisa devant eux. Les doubles portes des wagons s’ouvrirent, déversant quelques passagers, puis restèrent béantes, à attendre qu’ils grimpent. Dana entama le mouvement mais le hapien l’attrapa fermement par le bras pour la retenir.

Il y eut un moment suspendu, avant que soudain les portes ne se referment et la rame s’ébranla de nouveau.

Ils étaient toujours sur le quai, seuls dès que les nouveaux arrivants se dispersèrent, mais Lloyd tenait toujours la Princesse de Ch’Hodos par le bras. Comme elle se retournait, surprise, il lui attrapa l’autre épaule pour la rapprocher de lui. Près. Très près.
Quand ils étaient si proches, il était obligé de baisser la tête pour continuer à la contempler, et faire tomber son regard dans le sien.

Il referma ses bras sur elle, un masque sans expression sur le visage, avant de déposer ses lèvres sur les siennes. Pour y prendre ce qu’il restait de sucre, ce qu’il restait de maquillage, ce qu’il restait de mots qu’elle avait planté dans sa chair, ce qui lui appartenait. Ce n’était pas un baiser de désir charnel, mais autre chose, il ne savait quoi. Il savait seulement qu’il lui fallait cet oxygène, que de là où il était il n’avait pas de mots justes, qu’il ne pouvait qu’espérer qu’elle fût tendre, encore. Juste une minute.

Lorsque leurs lèvres se séparèrent, il la garda serrée contre lui, comme une prison Sith pour une boule de princesse triste.

- Tu continues à dormir dans ma cabine.

Ce n’était pas une question. Ses yeux émeraudes étaient fichées dans l’étendue dorée comme le canon d’une arme braquée sur sa tempe.

- Je ne suis pas prêt à avoir mal.



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Darth Hope
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 Rien n’avait bougé






- Oui, avait-elle soufflé sous la menacé de ce tsunami émeraude qui assombrissait ce paysage d’or et de lumière.

Où aurait-elle dormi d’autre ? voulait-elle rétorquer. Après tout, c’était lui capitaine, et elle se sentait lâchement bien sous ses ordres impérieux. Elle aurait voulu qu’il lui ordonne encore : de dormir avec lui, toujours, de l’embrasser toujours, de s’offrir à lui, toujours. Elle se serait soumise, mais l’inéluctable ne laisserait pas cela arriver. L’inéluctable les rattraperait bientôt. Pour elle, l’inéluctable était déjà presque là et triompherait.

Elle ne quittait plus sa main. Sa veste en cuir avait retrouvé la chaleur de ses épaules dénudées et elle avait observé les autres passagers de la rame qu’ils avaient emprunté, blottie contre le Sith, depuis un autre monde. Parfois, des yeux étrangers tombaient dans son décolleté vertigineux et quand ils rencontraient ensuite ceux de Lloyd Hope, qui était tel un dragon sombre gardant son joyau, ils se détournaient.


Mumkin avait envoyé les coordonnées du quai d’accostage sur le datapad de Dana. La sécurité ne semblait pas les avoir repérés. Entre temps, au niveau des stades d’astroball, des émeutes de spectateurs mécontents avaient éclatés, nécessitant des interventions urgentes. Un coup de pouce du destin qui ne se refusait pas. Peut-être que les bothans avaient considéré que la vidéo suffirait, finalement. Et quand ils arrivèrent au quai où le Sans-Visage dormait paisiblement, Dana admira une nouvelle fois le profil du hapien, sous les projecteurs, entre les cris des techniciens et des pilotes qui allaient et venaient dans cette immense zone ouverte. Personne ne faisait attention à eux. Et elle ne regretta pas son aveu, celui qui le décrivait comme un bel homme. Le sifflement des vérins hydrauliques leur indiqua que la passerelle s’ouvrait. Bientôt, la silhouette courbée du dévaronien leur fit signe d’embarquer rapidement.




- Merci Dunne, fit Dana en récupérant sa bure dans la coursive principale.

La balosar haussa les épaules en fumant de plus belle.

- J’espère que tu repasseras, avec Mumkin. Il est vraiment trop marrant. Et ahm, pour le test, bon courage hein.

L’adolescente à antennes se dépêcha vers la passerelle et quitta le vaisseau d’un pas léger. Shar lui envia cette légèreté tout en la maudissant de lui avoir rappeler l’existence de ce test à la con. Elle écarta les plis de sa bure noire pour apercevoir le sourire éclatant de la twi’lek, puis leva les yeux au ciel. Elle remonta la coursive. Mumkin et son patron étaient dans le cockpit, se préparant au décollage. Déjà la lumière du quai disparaissait, avalée par la plateforme de la passerelle qui se refermait. L’Inquisitrice activa l’ouverture de l’écoutille de la cabine du capitaine tandis que les moteurs du vaisseau vrombissaient, jetant des secousses timides et continus contre la moindre paroi. Lentement, elle se débarrassa de sa perruque blonde et de sa veste. Rien n’avait bougé. La Sith s’assit sur le bord de la couchette et se pencha pour presser le commutateur de la guirlande qui grésilla péniblement avant de s’illuminer. Des lueurs écarlates fondirent sur la peau de Dana qui sortit de la poche de son short quelques feuilles de papiers glacés, neuves et rutilantes.


Le jet d’eau brûlant heurta ses épaules endolories, dévala le long des ondulations carmines de sa chevelure. Et le silence de la cabine n’était perturbé que par le bruit de cette douche solitaire et salvatrice. Dans l’intimité de l’espace couchette, une photographie brillait, épinglée à la paroi, sous une petite ampoule rouge. Elle brisait un peu l’impersonnalité des lieux, les emplissant d’un souvenir visuel discret et percutant. Quiconque s’allongerait sur cette couchette verrait l’image de ces deux corps parfaitement compatibles.

En sortant de la douche, Dana dut se précipiter vers l’évier pour régurgiter une bile mauve qui fut, un jour, une barbe à bantha. Convulsion après convulsion, elle vida son estomac dans l’inox du lavabo. Ses prunelles dérivèrent vers sa bure d’Inquisitrice qui pendait à l’écoutille et elle s’empara de la boîte au sourire.

























Tous positifs.

- Merde…lâcha-t-elle à bout de force, essoufflée par ses propres émotions.

La diode qui éclaira la petite salle grésillait et son grésillement ressemblait à un rire moqueur, insupportable. Un bruit en provenance de la cabine la fit sursauter. Elle s’empressa de faire disparaître l’appareil dans un recycleur, direction les poubelles du Sans-Visage. Elle referma le recycleur au moment où l’écoutille s’ouvrit sur la silhouette de Lloyd. Elle lui fit face, elle était blême. Elle crut entendre la voix familière du hapien lui demander si tout allait bien et elle s’entendit répondre oui, comme si elle n’avait plus le contrôle de rien.

Alors elle se dépêcha d’ouvrir l’eau du robinet pour chasser les vestiges de ses nausées honteuses et en croisant son reflet dans le miroir, elle crut voir poindre des larmes dans l’horizon doré de ses deux grands yeux, mais Lloyd était là, elle ne pouvait pas craquer. Dans quelques jours, elle atteindrait Nar Kaaga et il n'y aurait plus que ça comme traces de son passage : un kimono rouge, une photo, une guirlande écarlate.





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Lloyd Hope
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Il pensait au Sans Visage. A tout ce qu’il y avait dedans. A ceux qui vivaient à bord. 





Une semaine plus tard, secteur Abrion.




- Patron ! On arrive dans le système Rishi !
- Ok !

Le hapien se tira de sa couchette après avoir entendu la voix de Mumkin, qui provenait du cockpit. Il avait passé de longues minutes à visionner des photos et vidéos provenant d’un datapad auquel il n’aurait pas dû avoir accès. Il était légèrement circonspect après avoir fermé les images d’un baiser langoureux entre une Dana qui ressemblait encore à une adolescente avec une sulfureuse twi’lek verte. H. ? Une personne.
Il grogna en rangeant le bloc de données dans un tiroir. Quel con tu peux faire.

Lorsque Lloyd se montra dans le cockpit, la surface couleur indigo de Rishi percutait de sa lumière l’intérieur du petit habitacle. Les cornes de Mumkin s’agitait tandis qu’il balançait sa tête, indécis, pour essayer de faire un choix.

- Bon, est-ce qu’on va à la capitale ou…
- Nan attends, n’engage rien, fit Lloyd. Je vais envoyer un message à Dana pour avoir une localisation plus précise. Ça sert à rien de griller nos cartouches, j’voudrais pas qu’on se fasse repérer bêtement.
- Comme tu voudras. C’est parti pour un stationnement orbital.

Le hapien acquiesça en silence, pour remonter le long de la coursive. Il s’engouffra dans sa cabine de nouveau, et au moment même où il tendait les doigts vers son datapad, l’holocommunicateur de la cabine se mit à biper. Une diode rouge clignota et Lloyd se hâta d’aller refermer l’écoutille et d’attraper sa veste d’uniforme, qu’il boutonna à la hâte. Il accepta l’appel en enclenchant un petit bouton tout en terminant son œuvre, et au moment où la silhouette familière d’un twi’lek à la peau carmine se matérialisait devant lui, il venait juste de se redresser.

- Maître.

Sa voix avait dû trahir sa déception, car le visage de Darth Laduim s’éclaira en un sourire taquin.

- Quel enthousiasme de me voir.
- Maître, avant que vous ne commenciez. Je sais que je n’ai pas avancé. J’ai dû… Gérer un certain nombre de problèmes très pragmatiques, ces jours-ci. Ce n’est qu’une question de jours. Je passerai par Dellalt et Caluula dans quelques jours.

Mais le twi’lek avait levé une main pour l’interrompre, le visage plutôt avenant.

- Je te fais confiance, figure-toi. Je sais que mon précédent avertissement a été entendu. Et j'ai reçu ton rapport concernant Astroballe. Intéressant.

Lloyd referma la bouche, étonné, puis se tint silencieux.

- Ce n’est pas pour cela que je te contacte, mais plutôt… Pour te féliciter.

Le hapien resta interdit, s’attendant presque à une boutade de la part de son maître, mais ce dernier avait grimacé un sourire malicieux.

- J’ai demandé ce matin même à ce que tu sois affecté à une frégate.
- Qu… Ah ?

Lloyd ne sut que dire. Il cligna des yeux, chercha des mots. Chercha une réjouissance qui tardait à venir dans son corps et son esprit.

- Cela va prendre quelques semaines pour qu’un bâtiment te soit officiellement transmis pour commandement. Au vu de la complexité de la situation actuelle, la réorganisation interne de nos moyens prend du temps. Tu pourras en profiter pour terminer ta mission. Mais ensuite, tu seras très vite très occupé, avec la guerre civile. J’entends que tu mèneras rapidement de fameuses batailles.

Le hapien s’humecta les lèvres, stupéfait. Il pensait au Sans Visage. A tout ce qu’il y avait dedans. A ceux qui vivaient à bord. Il n’aurait jamais cru que ce genre de préoccupation l’étreindrait le jour où on lui annoncerait enfin la bonne nouvelle.

- Et avec le salaire qui va avec, bien entendu. N’es-tu pas satisfait ?
- Heu… Si, bien sûr, maître. Merci… Je suppose. Merci beaucoup.

Il y eut un silence, où le twi’lek et le hapien s’observèrent, comme si chacun mesurait ce que ce changement induirait entre eux. Lloyd ne serait plus que le chien qui obéit, une fois qu’il aurait des centaines d’hommes sous son commandement. Il aurait un autre genre d’impact. Mais quelque chose clochait, ou du moins lui semblait-il.

- Et… Pourquoi cette décision soudaine ?
- Ah, hé bien… C’est grâce à l’Inquisition.
- L’Inquisition ? répéta Lloyd en fronçant les sourcils.
- Oui, l’Inquisition a enquêté sur toi. Tu comprends bien qu’on ne peut mettre à la tête de bâtiments de guerre de cette taille des hommes dont on ne peut garantir la loyauté. Alors, une Inquisitrice a enquêté sur toi depuis de longs mois. S’est rapprochée de toi pour surveiller tes activités et s’assurer que ton cœur n’allait ni à l’ennemi ni trop à tes projets personnels.

La bouche du hapien s’était entrouverte tandis qu’il scrutait l’hologramme, ébahi.

- Dana Shar a fait un excellent travail, paraît-il, même si je suis déçu que tu sois tombé dans le panneau si facilement, je suis aussi heureux que les conclusions de son rapport aboutissent à te faire considérer comme un vrai Sith. Félicitations, Lloyd. Maintenant, tu m’excuseras, j’ai d’autres appels à conduire, notamment pour discuter de qui seront les officiers qui t’épauleront dans ce nouveau commandement. Tu me donnes beaucoup de travail, Lloyd. J’espère que tu en vaudras la peine.


L’hologramme disparut subitement. Le hapien resta un long moment immobile, à fixer l’endroit où Darth Laduim s’était tenu devant lui, quelques secondes plus tôt, avant de s’asseoir doucement sur sa couchette. Ses yeux enfin réussirent à s’intéresser à autre chose. Son regard alla jusqu’au kimono rouge suspendu à l’entrée de sa salle d’eau.

Tu es un véritable Sith, Lloyd. Un bon officier impérial.

Était-ce seulement possible, qu’elle eut été là depuis Artorias pour rapporter et décrire sa vraie nature à l’Inquisition ?
Il songea à toutes ces fois où Dana et lui s’étaient retrouvés, de façon étonnamment fortuite après Artorias : l’immeuble de Kaas City, le manoir de Darth Runà, l’Egide, son arrestation de retour sur Kaas, puis encore Khar Delba. Tout ça avait-il pu n’être qu’une mise en scène vouée à les rapprocher, pour que Dana pût exploiter sa faiblesse, sa solitude ? Pour cela qu’elle l’avait tant physiquement occupé, qu’elle l’avait suivi sans problème sur Jabiim, qu’elle avait fait tomber une à une ses défenses pour le faire parler, pour le faire avouer ses projets pour Mat’aenna. Était-ce pour cela, qu’elle lui avait posé autant de questions sur la Twi’lek ? Qu’elle était revenue à la charge à la station, une dernière fois, avant d’aller délivrer son rapport à la tour Jorrson ?

Ça reste une Sith, ne te laisse pas berner par son corps et ses mimiques attendrissantes : ce n’est que de la comédie, pour elle, avait dit Hélios.

Il avait eu de la tendresse quand il en avait demandé. Pas quand elle en avait voulu. Soudain, il croyait voir toutes ces fois où il avait essayé d’avoir une implication émotionnelle alors qu’elle cherchait systématiquement à l’allumer.

Je peux réchauffer ton âme, avait-elle dit sur Ch’Hodos.

Alors, c’était ça, sa vraie spécialité ?

Maintenant, il se souvenait aussi de toutes les autres questions plus ou moins explicites qu’elle avait posé : quand elle avait dit qu’elle pouvait être renégate ou loyaliste dans ce lit sur Ch’Hodos, que peu lui importait, ne tendait-elle pas la perche pour savoir s’il aurait été prêt à trahir ? Et tout ce qui s’était passé sur sa planète, n’étaient-ce pas des preuves de sa ténacité pour le camp loyaliste, qui avait satisfait le jugement de l’Inquisitrice ?

Et maintenant que son rapport était fait…










Dana Shar lui annonçait qu’il n’y avait plus d’équipe.























Le hapien se releva brusquement pour faire volte-face, et s’écarter de cette couchette qu’une guirlande rouge éclairait comme si le petit compartiment n’était rien d’autre qu’un bain rempli de sang. Sous l’une des ampoules, une photo semblait le narguer : on y voyait le capitaine se réfugier dans les bras d’une Inquisitrice qui le couvait du regard.




Se réfugier dans un mensonge.


























Il s’effondra, les mains pressées contre sa bouche ouverte, pour étouffer un cri de toute façon silencieux, d’une douleur fulgurante qui ne sortirait jamais de sa poitrine.



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