Lloyd Hope
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Le hapien avait reçu Dana dans ses bras avec un soupir de soulagement à peine maîtrisé. Il ne savait guère de quoi cette étreinte le soulageait exactement. De voir que Dana était vivante, qu’elle ne retenait pas contre lui les marques que les évènements avaient laissé sur son corps, qu’il était vivant aussi, qu’elle avait décidé de l’étreindre malgré les conneries et tout le reste. Toujours était-il qu’il avait senti sa poitrine se relâcher brusquement après des heures de frustration, ou de doute. Alors il l’avait serrée fort à son tour, en silence. Derrière lui, la baie donnait sur des chemins sillonnant entre les montagnes, que parfois quelques individus parcouraient chargés de telle marchandise ou les mains libres, au pas de course. Les reflets d’un bouclier translucide, presque invisible, donnait une sensation de sécurité que Lloyd n’avait pas ressentie depuis qu’il avait quitté le Sans Visage… Combien de jours plus tôt ? Il avait perdu le fil du temps. Mumkin était-il déjà retourné dans le système de Dromund Kaas ?

- Ça va, ça va. J’ai rien eu de grave. C’était que superficiel, ok ?

Il fronça brièvement les sourcils avant de reculer légèrement, pour pouvoir voir le visage de Dana. Elle portait encore une égratignure sur le front qui avait été rincée, mais les rougeurs persistaient sur son derme et aussitôt il pensa aux autres marques que sa nouvelle tenue dissimulait. Il secoua la tête en un signe négatif.

- C’était une folie, Dana. On a pris tellement de risques. Pas seulement venir sur Ch’Hodos, mais tenter ça, au nez et à la barbe de ton… d’Akusha.

Ton mari. Il serra les dents mais s’efforça de grimacer un sourire parce qu’il savait qu’il avait probablement l’air trop sérieux, trop pessimiste. Trop parano.

- Qui est une vraie saloperie, au fait. Hélios n’avait aucune chance.

Leurs yeux se rencontrèrent et il lut le doute dans l’étendue dorée. Se posait-elle la même question que lui ? Maintenant qu’il s’était mesuré à Akusha, estimait-il pouvoir être à la hauteur ? Aurait-il pu vaincre ?
Il haussa les épaules.

- Et moi, j’avais une princesse à sauver, éluda-t-il. Enfin, une coéquipière, je veux dire.

Ma princesse de Ch’hodos. Avait-il encore le droit de prononcer ces mots-là ?






Au dehors, un vent caressait la roche escarpée qui entourait deux hommes vêtus de noir tandis qu’ils gravissaient, marche après marche, un col qui leur donnerait accès à une crète. Lloyd suivait ainsi Hélios qui le guidait jusqu’à un point où, avait-il assuré, ils auraient une vue d’ensemble de l’édifice qui était leur QG, mais aussi sur leur environnement direct. La chaleur était plus surmontable, lui semblait-il, que dans Ch’Hodos City. Malgré tout, gravir ces marches pentues, creusées dans la roche des siècles plus tôt, lui arrachait un voile de sueur et des étirements douloureux dans les côtes.

Par flashs intrusifs, il revoyait parfois une Sépha qui traversait une allée entourée de flambeaux, le visage enfoncé et sanguinolent, ou bien la chute du corps de Dana s’écrasant sur la route. Les images étaient désagréables. Il savait que c’était normal. Son cerveau digérait, en quelques sortes. A ces tableaux d’horreur, il venait poser comme des pansements plus doux les souvenirs de la sensation de sa tête soutenue par les genoux de Dana, dans un speeder, ou celle des doigts fins de l’Inquisitrice qui parcouraient sa chevelure. C’était ainsi qu’il tâchait de soigner ses blessures, désormais. Celles de l’intérieur.

Le hapien n’avait pas demandé l’autorisation de sortir du complexe médical. Il avait enfilé l’uniforme noir qu’on lui avait fourni et après avoir vu Dana et l’avoir rassurée, il en était sorti, avait posé des questions. Personne n’osa lui faire de recommandations sur son état de santé, personne n’osa désapprouver frontalement. Hélios, au contraire, avait proposé de l’emmener faire le tour des lieux, sans dissimuler qu’il espérait tirer quelque chose à son tour à dépenser ainsi son temps précieux. Sinon, à quoi servait d’avoir ramené ici l’apprenti du Castellan Noir ? S’il l’était vraiment.

- Voilà, d’ici tu peux voir les trois bâtiments que nous utilisons quotidiennement, dit-il lorsqu’il fut arrivé au sommet d’une plateforme rocheuse.

Une pointe métallique se dressait là, la cime se terminant bien au-dessus d’eux comme une étrange sculpture. Le hapien regarda ce dispositif, qui était en fait un point de relais du bouclier invisible qui les protégeait, avant de s’intéresser à la vue qu’Hélios embrassait d’un geste ample, avec fierté. Dans la montagne, des portes imposantes avaient été creusées ; des arches reliaient des ponts métalliques à des édifices de pierre, plus anciens. C’était, comme on en voyait souvent, un assemblage de vestiges plus ou moins anciens, plus ou moins disparates en fonction des usages variés que l’on avait fait au fil des décennies.

- Sur le flanc de l’autre côté, il y a d’autres ouvertures, mais elles sont trop visibles depuis l’extérieur. Nous avions peur qu’à l’aide de satellites, ou de simples observateurs passant dans le désert, on puisse y déceler notre activité, c’est pour cela qu’on utilise que les bâtiments avec leurs façades intérieures.

Hélios élevait un peu la voix pour s’expliquer, couvrant le sifflement du vent qui, à cette altitude, se faisait légèrement ressentir. Le soleil était intense, comme partout sur Ch’Hodos, et Lloyd devait cacher ses yeux émeraudes d’une main pour supporter les rayons lumineux. Ses cheveux étaient sans cesse balayés par la brise, et la caresse chaude amena sur son derme une poussière orange.

- Tempêtes de sables ? demanda-t-il.
- Rares. Et pas très virulentes. Mais problématiques pour nos communications. Elles brouillent parfois les lignes.
- Et les radars, ils sont gênés ?
- Parfois, ça arrive oui. On couple une surveillance automatique par des rondes en véhicules. Mais comme tu t’en doutes, en cas d’opacité de l’atmosphère, même avec ça, on est aveugles pour un moment.

Lloyd acquiesça en silence. De ce qu’il avait vu sur le chemin, cette base était plutôt bien équipée malgré ses faiblesses évidentes. Face à une force de frappe renégate, ils ne pourraient tenir très longtemps un siège. Mais tant que la base resterait dissimulée, inconnue de l’ennemi, elle était un centre d’opération idéale.

- Et les souterrains ? Ils mènent quelque part ?
- On ne sait pas encore exactement. Mes hommes sont pour la plupart pas mal occupé entre les surveillances et les relais à faire entre les différentes grosses villes. On a commencé l’exploration, mais on ne veut pas avoir trop d’espoir là-dessus. Un groupe de femmes se rassemble une fois par semaine pour marcher sous terre. Elles prennent des vivres et partent à pied dans les souterrains pour les cartographier peu à peu. Mais je me demande si c’est pas une perte de temps.
- C’est quand même une piste en cas de repli nécessaire. Si on pouvait faire venir quelques droïdes d’exploration, ils vous cartographieraient ça rapidement et avec plus de fiabilité.
- C’est pas le genre de moyens qu’on a, ici, rétorqua Hélios, soudain légèrement sur la défensive.

Lloyd détacha son regard des chemins en contre-bas pour se tourner vers Hélios.

- Si je fais le tour, c’est justement pour voir quel genre de moyens il serait intéressant de vous apporter, Hélios.

Ce dernier acquiesça en silence, avant de détourner le regard. Il désigna, vers l’horizon devant eux, une masse sombre.

- Ça, c’est la chaîne Aligaka. Derrière, à quelques centaines de kilomètres, 1654 exactement, il y a Dahara. C’est la grosse cité la plus proche.

Le hapien acquiesça doucement. 654 kilomètres, c’étaient un paquet d’heures de route. Mais c’était moins loin que Ch’Hodos City. Lloyd ne s’en était pas rendu compte, mais il avait passé plus d’une journée entière dans ce petit speeder qui les avait extrait du guêpier de Rhysode. Il y avait eu des pauses ravitaillement, mais il s’en souvenait à peine. Un peu plus tôt, Shira lui avait expliqué qu’il lui avait donné un sédatif, avec l’accord de Dana, à cause de ses côtes qui le faisaient gémir dans son sommeil. Ce qui expliquait pourquoi il n’avait aucun souvenir de son transport jusqu’au complexe médical.

- Alors c’est vrai ? fit soudain Hélios en se tournant vers lui, le tirant de ses réflexions. Tu es l’apprenti du Castellan ?

Le hapien hocha doucement de la tête, et Hélios fit une moue approbatrice, puis le silence se réinstalla entre eux. Il y avait une distance entre les deux hommes que tous deux percevaient plus nettement maintenant qu’ils savaient qu’ils devaient collaborer, d’une manière ou d’une autre. Quelque chose les maintenait sur un fil fragile entre une indifférence glaciale et le feu de leurs colères respectives, absorbées en eux sous l’effet d’une évidence : ils avaient beaucoup en commun, au-delà de ces choses qui les différenciaient. Leur différence hiérarchique, le poids de ce qu’Hélios avait fait ou pas pour le boucher, de ce qui était arrivé à Léti et à son meurtrier, de ce que l’un et l’autre avaient fait pour Dana, mais aussi, justement, leur lien avec la Princesse. Lloyd n’avait pas encore décidé si l’humain serait un rival ou un allié. Il serait probablement un peu des deux, devinait-il.

- Je dois t’appeler comment, alors ? Je te donne du mon seigneur ?

Il y avait une pointe d’ironie, bien sûr, mais Lloyd resta impassible.

- Hope, ça ira très bien.
- Hope, répéta Hélios. Hope. C’est ton nom ?

Lloyd acquiesça.
Nouveau silence. Hélios regarda de nouveau l’horizon, puis souffla brièvement, comme un rire étouffé. Le hapien savait très bien pourquoi. Le tatouage. Mais encore une fois il resta stoïque, le visage fermé.

- Tu lui en veux personnellement, ou tu en veux au monde entier ?

Hélios parut se renfrogner en se retournant.

- Je me mettrai pas entre vous, si c’est que tu demandes.
- C’est pas ce que je demande. Je veux savoir si je dois m’inquiéter.
- C’est-à-dire ?
- Si quelqu’un touche à un de ses cheveux, je veux savoir si tu seras sur la liste des gens que je vais saigner.

L’humain parut interloqué. Il adressa à Lloyd un regard sérieux. Bien évidemment, il comprenait qu’il s’agissait d’une menace, et non d’une vraie question. Il grimaça, trahissant ce qu’il ressentait de désagréable.

- Non. Bien sûr que non. Shar est importante pour la cause.
- Bien. Dans ces conditions-là, je suis prêt à vous apporter mon aide.

Et le recensement des moyens utiles se poursuivit après cela.







- … Le problème n’est pas vos demandes mais le moyen de les acheminer discrètement jusqu’à votre base, disait Lloyd.

Le soir était venu, et des lueurs rouges s’infiltraient dans une salle ronde et fraîche, où un amas de caisses faisait office de table de réunion. Hélios avait rassemblé certains de ses plus proches lieutenants. Les loyalistes, composés de gens de toutes sortes, anciens esclaves, fils de nobles dont les familles avaient chuté pendant la guerre civile ou autres, s’étaient regroupés un peu confusément. Par sa notoriété, Hélios avait su faire sa place dans les esprits afin de se retrouver légitimement à la tête de l’un des groupes loyalistes importants. Il y en avait d’autres, selon ses dires, mais ils étaient indépendants entre eux par contrainte : il était difficile de communiquer entre poches de résistance sans prendre de gros risques. Alors, chaque poche de résistance se contentait d’apporter sa pierre à l’édifice. A l’intérieur de ces poches de résistance, les fonctionnements différaient. Ici, dans le groupe d’Hélios, constitué de quelques deux cents personnes, sans compter tous les informateurs et familles qui les hébergeaient ici et là ou les soutenaient de manière informelle, il y avait une hiérarchie approximative où quelques personnalités charismatiques s’étaient emparées de leur domaine de prédilection. Plutôt qu’un chef qui organisait tout ce petit monde, Hélios se donnait pour tâche d’organiser ce qu’il appelait des actes majeurs. Autrement dit, des évènements, des coups précis qui feraient parler les médias ou leur donnerait tel ou tel avantage, en fonction de ce qu’il percevait comme opportunité. Autour de lui gravitaient des humains aux chevelures de couleurs variées, revendiquant plus ou moins une égalité des statuts dans cet environnement.
A cet instant, Hélios faisait les cent pas devant une arche qui donnait vers l’extérieur, tandis que ses sbires, bras croisés ici, penchés sur un moniteur là, ou encore assis dans un coin sur des caisses qui faisaient elles aussi office de sièges de fortune, écoutaient sagement. Était-ce parce qu’ils attendaient d’Hélios qu’il montre le comportement à avoir face à ses propositions, ou si c’était parce qu’avoir l’apprenti du Castellan Noir dans la pièce était intimidant, il n’en savait rien. Lloyd s’assit sur l’une des caisses à son tour, l’une de celles disposées au centre, le temps de permettre à Hélios de réfléchir sur ce qu’il convenait de faire.

- Ce n’est pas le plus urgent, décréta soudain l’humain. Il nous faut d’abord communiquer sur ce qui s’est réellement passé chez les Rhysode, pour redonner espoir !
- Les deux peuvent être faits en parallèle. Vous ne pourrez pas toujours vous contenter de répondre aux urgences. Il vous faut planifier en amont la défense de cet endroit si vous voulez y survivre.
- Nous n’avons pas les moyens de faire ça, Hope. Tout le monde ici est très occupé.
- Justement, c’est la raison pour laquelle je vous suggère de me laisser négocier ça pour vous.
- De te faire confiance.
- C’est ça.

Il y eut un silence.

- Nous allons y réfléchir. Qu’en dit Shar ?
- La Princesse Dana Shar, rectifia doucement Lloyd, cherche des moyens de ramener Ch’Hodos aux loyalistes. Je doute qu’elle s’y oppose.
- Elle te fait confiance.

Lloyd prit une légère inspiration, soutenant le regard d’Hélios qui avait cessé ses allées et venues pour se figer en face de lui. L’humain avait une forme de défi dans le regard, mais le hapien savait très bien, déjà, ce qui se jouait entre Dana et lui. Cette demande de confirmation ne visait qu’à faire entendre cette alliance à toutes ces personnes qui les entouraient, qui restaient silencieuses, à les écouter.

- C’est ça, approuva Lloyd.

Dès lors, il sut qu’ici, l’alliance de Lloyd Hope, chien de Castellan Noir, et Dana Shar, princesse de Ch’Hodos, serait connue de tous.






Lorsqu’il pénétra dans l’une des salles les plus élevées de l’édifice fiché dans la montagne, que ses pas résonnèrent sous une voûte ancestrale, lieu sacré où l’on avait supposé qu’une princesse pourrait y avoir suffisamment noblement ses quartiers, le hapien retournait cette pensée de leur alliance dans un sens, puis dans l’autre. Peu importe l’angle sous lequel il prenait le problème, il se rendait bien compte qu’il mettait le doigt dans un engrenage dont il ne se tirerait pas tout à fait avant, au moins, la fin de la guerre civile sur Ch’Hodos. Et ce, sans l’autorisation du Castellan. Il ne jugeait pas nécessaire d’en faire part à Dana, qui avait déjà un monde à sauver, mais il devait au moins la tenir au courant de ce qu’il comptait faire.
Ce qui lui fournissait, par ailleurs, une excellente excuse pour la rejoindre alors que la nuit tombait.

Mais devant une double porte encadrée de flambeaux, ouverte sur un salon poussiéreux mais élégant – un mélange de vieux meubles et tapisseries et de caisses acheminées par les résistants pour fournir un minimum de technologie moderne – Shira surgit pour se mettre en travers de son chemin. Le hapien s’arrêta net, n’entrant pas dans le salon où il ne percevait personne d’autre.

- Dana n’est pas là ?

La twi’lek prit une brève inspiration avant de baisser les yeux, comme si elle avait retrouvé ses habitudes d’esclave face à celui qui n’était finalement pas un guerrier-esclave, de son niveau social.

- Si, elle est dans la chambre attenante. Mais… Dame Shar est un peu indisposée, hum… Seigneur ?
- Lloyd. Tu veux dire qu’elle ne veut pas me voir ?

Le hapien avait incliné la tête pour voir le visage de Shira qu’elle avait baissé. Elle accepta de rencontrer son regard interrogateur et eut un sourire.

- Non, je veux dire qu’elle est réellement fatiguée. Je voulais juste vous prévenir. Si je vous empêche d’entrer, elle va m’en vouloir.
- Je vois. Je n’ajouterai pas à ses soucis alors, promis. Tu peux… Je m’en occupe pour un moment, si tu veux filer, dit-il à voix basse, avant que ses lèvres ne se parent d'un sourire discret. J’ai eu Hélios toute la journée, on échange ?

La twi’lek eut un nouveau sourire, malicieux cette fois, et s’effaça de son chemin, mais Lloyd l’interpela avant qu’elle pût s’enfuir.

- Shira ?
- Oui, Seigneur ?
- Lloyd.

Le hapien jeta un regard vers le salon, vérifiant que Dana ne s’y était pas montrée.

- Merci d’avoir pris soin d’elle, dit-il à voix basse.

Shira ne répondit rien. Elle se contenta d’acquiescer avant de disparaître d’un pas léger.


Darth Hope
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Ici aussi il y avait une statue à l’effigie de Shar Dakhan, un petit autel creusé dans la roche et que les résistants entretenaient à l’aide de prières, de petites offrandes, comme des bougies, comme des bols…Dana détourna ses yeux de cette contemplation qui lui remémorait la nuit passée. Elle ne pourrait jamais échapper à son héritage où qu’elle aille sur Ch’Hodos. Cette planète s’était bâtie sur la gloire de Shar Dakhan puis de ses descendants. Avant, elle n’y ressentait aucune fierté, aucune satisfaction. Elle avait laissé ces sentiments à Damaya Shar qui devait reprendre le flambeau de leur aïeul.

Assisse sur une méridienne de pierre aux coussins défraichi, elle observait ses mains gantées de noir qui avaient massé son ventre douloureux, pour espérer chasser des nausées soudaines et persistances. Le médecin était passé rapidement, sans son droïde et avait conclu que les chocs physiques qu’elles avaient reçus récemment avaient dû perturber beaucoup de sa physionomie. Et c’était tout. Il ne pouvait pas lui donner de médication, les stocks étaient trop précieux et devaient servir aux cas graves, ce qu’elle comprenait. Shira lui avait préparé une concoction d’épices dans de l’eau chaude afin de l’aider à se remettre. Elles avaient parlé un peu. Elles avaient même évoqué Damaya Shar. La twi’lek affirmait que sa mère avait vécu une vie heureuse au service de la princesse Damaya, qu’elle n’en voulait pas à cette dernière, qu’elle avait énormément de rancune pour Darth Tiamat qui avait ordonné ce bûcher. Qu’elle combattait aux côtés d’Hélios pour venger sa mère et Dana comprenait cela. Elle avait assuré à Shira qu’elle n’aurait jamais permis que les affaires de sa sœur soient brûlées et encore moins ses esclaves. La bleutée avait souri brièvement avant de s’éclipser. Shar en profita pour saisir le bol où les épices infusaient.

La couleur du breuvage lui rappela soudain Jabiim et les infusions de Kashiina. Elle se souvenait du sourire de Ruth, des cris stridents de Mercy qui délivrait son enfant dans la jungle bordant le lac. Elle voyait à la surface du liquide, l’eau paisible du lac qui avait accompagné un moment de tendresse sous les trois lunes. Elle déglutit et l’arrivée de Lloyd Hope mit fint à sa contemplation étrange. Elle le sentit dans la Force avant d’entendre vaguement sa voix s’adresser à Shira. Elle redressa rapidement pour quitter la pièce adjacente au salon. Elle dut ralentir le pas, parce qu’elle s’apprêtait à régurgiter. Alors elle but d’une traite la décoction de Shira, avalant tous les souvenirs de Jabiim.

- Lloyd, souffla-t-elle comme si elle avait été surprise qu’il soit là.

Et il était vrai qu’elle avait l’air fatiguée. Des cernes couvaient sous ses yeux dorés, contrastant avec sa peau pâle qui ne comportait aucun maquillage. On voyait mieux les traces, quelles qu’elles furent, colorer ses traits féminins. Mais il y avait une constante inchangée sur son portrait si humain : une cicatrice blanche qui barrait le coin gauche de sa lèvre inférieure. Finalement ses joues s’empourprèrent étrangement et elle lui désigna un siège quelconque. Ce n’était clairement pas le grand luxe des palais qu’ils avaient côtoyé ces temps-ci, mais les vestiges avaient une architecture grandiose qui suffisait à éclipser le mobilier de piètre qualité que les loyalistes avaient acheminé.

Elle-même s’assit sur un fauteuil, plus loin. Il y avait une distance physique convenable entre eux que son regard d’or semblait avaler tandis qu’elle l’admirait avec attention. En réalité, elle ne savait pas par où commencer maintenant qu’ils étaient seuls, que la nuit s’apprêtait à tomber. Elle savait qu’il avait passé la journée avec Hélios, qu’il avait pris sa place de capitaine dans cette nouvelle forteresse et elle était restée en retrait. On lui avait dit de se reposer, mais elle n’avait pensé qu’à lui durant toutes ces heures. Elle essayait de chasser ce sourire ridicule de ses lèvres, un sourire qui perçait sur ses joues deux fossettes presqu’inédites tant elles étaient rares. Alors, elle détourna sa figure, rompit le contact visuel dans l’espoir de lui cacher ce sourire.

- Merci d’avoir sauvé la princesse. Merci de m’avoir sauvé, dit-elle enfin une fois que les mots acceptèrent de se former au bord de ses lippes. J’ai l’impression qu’Hélios ne me parle pas véritablement de ses intentions. Se rebelle-t-il contre Akusha, les renégats ou….contre le pouvoir en général. Il ne voit plus en moi la princesse que j’étais avant. Il…ne voit plus en moi sa maîtresse.

Elle prit une profonde inspiration et délogea de sa tenue un paquet de cigarras et un briquet que Shira avait réussi à lui dénicher. Des jours sans fumer et le cliquetis du mécanisme qui fit jaillir la flamme manqua de la faire jouir, tant elle avait besoin de cette toxine, de cette sensation apaisante qui vint dès qu’elle inspira sur la cigarette et soupirer une fumée translucide qui échappa à ses lèvres charnues.  La main qui tenait sa cigarette tremblait légèrement et la nausée revint mais elle tint bon et poursuivit.

- Je crois que je commence à me rendre compte que c’est mon demi-frère. Qu’on partage le même sang. Et je m’en veux d’avoir et bien, couché avec lui, durant plusieurs années. Mais c’était ainsi. Il comblait un vide que personne d’autre ne pouvait combler à cette époque-là.

Personne d’autre à part toi, semblaient dire ses yeux quand ils se dirigèrent sur lui.

- Je sais pas pourquoi je te dis tout ça, c’est juste…que…

Elle s’interrompit pour fumer davantage et nerveusement. Son cœur remontait jusqu’à ses lèvres à chaque bouffée de toxine et elle se concentrait pour le ravaler. Son ventre était sens-dessus dessous, ses émotions aussi. Elle réussit à se calmer et lâcha :

- J’ai pas supporté de voir cette pétasse sur toi et j’ai pas su me contrôler. Je voulais pas que tu vois ça. Mais…quelle importance, je t’ai jamais rien montré de glorieux de toute façon. Sur Artorias, quand j’ai dit ton nom, au Conseil Noir, chez Rhysode…même chez les Lames Rouges, j’ai jamais été douée pour la discipline. Un jour, le Seigneur Khorog il m’a…

Un début de rire avorta sa phrase et elle écrasa son mégot au sol avant de se remettre sur son siège :

- Il m’a passé le savon de ma vie parce que j’avais cassé un lustre…t'aurais dû voir sa tête...

Et elle éclata de rire. C’était un rire qui emplit la pièce d’échos sincères et hilares, parce qu’elle était contente au fond, qu’ils soient vivants. Elle. Lui. Elle croisa son regard émeraude en riant et lui adresse une moue désolée et quand le rire se tarit enfin, c’était parce qu’elle venait de vomir, soudainement. La nausée avait été plus forte que sa volonté et son hilarité lui avait trop retourné l'estomac. Elle observait, choquée, le sol qu'elle venait de souiller et ferma les yeux, se maudissant.


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Il avait respecté sa volonté en s’asseyant dans le fauteuil désigné, même si la distance que cela imposait entre eux ne lui plaisait guère. Mais c’était peut-être mieux ainsi ; ils avaient des choses sérieuses à discuter et ils parviendraient mieux à prendre des décisions en gardant la tête froide. Mais Lloyd mit peu à peu de côté les premières phrases qu’il s’était préparé à lui dire. Ce dont parlait Dana n’était absolument pas ce qu’il avait prévu.
Hélios, Mera, Khorog.
Il resta silencieux, à rencontrer son regard, jusqu’à ce que soudain elle régurgite le contenu du bol qu’elle avait avalé en arrivant. Il suivit pauvrement des yeux la tâche qui s’écrasa devant elle. Puis il la regarda de nouveau pour contempler ce qu’il n’avait fait qu’apercevoir jusqu’ici : les cernes, le teint pâle.

- Tu ne vas pas bien, Dana.

C’était un constat. Il soupira en se levant, abandonnant le fauteuil mou pour rejoindre le siège de la princesse. Il ne lui laissa pas le choix : il passa ses mains sous son corps en se baissant pour la prendre contre lui avant de la soulever du fauteuil. Il émit un grognement de douleur quand cela compressa ses côtes injectées de kolto synthétique.

- Désolé, dit-il en la transportant dans la pièce voisine, où un lit était recouvert de draps propres disposés là par Shira, y’a pas que le mobilier qui est un peu abîmé, les serviteurs aussi.

Il la déposa sur le lit. Lloyd reconnaissait l’odeur des huiles parfumées qu’il avait senti sur elle lorsqu’elle l’avait étreint, le matin même. Cela lui donna envie de s’allonger près d’elle, mais il s’empêcha de se laisser aller. Il se détourna pour chercher dans la pièce quelque chose qui pouvait servir de bassine, et finit par déloger un grand bol du salon – peut-être une décoration – pour le déposer sur une table de chevet dont le bois sombre était patiné par les ans. Il hésita un instant, puis se décida à tirer un siège jusque près d’elle.

- J’ai renvoyé Shira pour la nuit, expliqua-t-il en s’asseyant. Alors c’est moi qui vais m’occuper de toi, ok ?

C’était un ok qui n’appelait pas de réponse. Il ne lui laissait pas vraiment le choix. Le hapien s’affaissa dans le fauteuil, déposant sa tête contre le dossier, pour la regarder pensivement.

- Ça tombe bien, d’ailleurs : j’y connais rien du tout, dans ce domaine-là. A part te mettre sous la douche quand tu meurs de froid, évidemment.

Et te faire sourire quand tu as pas bonne mine, songea-t-il quand il vit que sa re remarque avait légèrement étiré les lèvres de l’Inquisitrice. Il répondit par un bref sourire, mais bientôt ses lèvres se pincèrent et il baissa les yeux.

- Hélios… Il te voit comme un atout, maintenant, dit-il en haussant les épaules. Je suppose qu’après votre… passé commun, c’était inéluctable. Mais pour tous les autres, tu es toujours la princesse de Ch’Hodos.

Du bout des doigts, Lloyd se mit à jouer avec un fil qui s’échappait d’une broderie de l’accoudoir. Ses yeux parurent se concentrer sur la danse du fil coloré qui courait sur sa peau abîmée, tannée. Il s’humecta les lèvres, hésitant un instant, avant de déglutir.

- Je… J’voulais pas que tu vois ça non plus, pour… Pour ces femmes, là, chez Rhysode. J’ai… J’ai pas eu le choix, tenta-t-il de se justifier, mais finalement il retomba pauvrement dans un silence éteint.

Le choix. On avait toujours le choix, disaient certains. Il avait eu le choix aussi, pour Darth Runà. Il n’était pas toujours très doué pour choisir les meilleures alternatives, et le savait. Il savait aussi qu’il n’y avait pas grand-chose à dire sur le sujet. Dire qu’il était ivre ne changerait rien pour Dana. Et pour lui, ça lui avait juste permis de ne pas réfléchir quand Polla avait touché son torse, puis son sexe, quand Mera s’était mise à le chevaucher. Mais il n’avait pas suffisamment bu pour ne pas se rendre compte. Dire qu’il avait eu une érection sans même le rechercher. C’était la trahison de son corps. Il sentit son estomac se tordre désagréablement et rejeta ces souvenirs, essaya de piocher dans des images plus réconfortantes. Songea à Dana dans la cabine du Sans Visage. Un pervers, un boucher, un alcoolique. Je l’ai toujours su. Echec cuisant de la technique du souvenir-pansement.

- Bref, c’est pas vraiment de ça dont j’étais venu parler, dit-il soudain.

Lloyd releva les yeux pour affronter le regard de Dana. Elle aurait dû lui en vouloir. Peut-être était-elle trop fatiguée. Il lâcha le fil avec lequel il jouait pour se redresser un peu sur son siège, essayer de mettre de l’ordre dans ses idées.

- Voilà, j’ai fait le tour avec Hélios. Leur base est pas mal du tout. Il manque du matériel, elle pourrait être renforcée. J’ai proposé de m’atteler à en faire un inventaire de choses utiles, pour essayer de voir comment je pourrais les faire venir discrètement par la Marine. Parce qu’en l’état ça pourrait être compliqué de tenir un siège. Tant que personne sait où on est cachés, pas de souci, mais le jour où… Ca sera compliqué. Et aussi j’ai rencontré ces types, là, ses lieutenants, et ils vont me montrer l’état de l’armement demain. Après faudra… Enfin y’a des choses à faire, abandonna-t-il, ses idées ne suivant pas les paroles.

Ou les paroles ne suivaient pas ses idées, il ne savait pas très bien. Il se pencha pour mettre son visage dans ses mains, dissimulant ses traits, frottant doucement ses yeux et son front comme s’il avait voulu effacer des visions qui lui voilaient les yeux, redémarrer les programmes qu’il avait dans la tête et qui dysfonctionnaient.

- C’est confus, désolé. J’suis fatigué. Et t’as pas envie d’entendre parler des détails, hein ?

Ses yeux émeraudes réapparurent entre ses doigts pour la consulter d’un regard.

- Tu veux que… je te trouve à manger ? Je sais pas. Ou si tu préfères que je te laisse te reposer.
Darth Hope
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Elle étira une moue désabusée, le contemplant partagée entre l’amusement et un léger agacement. Elle roula près du bord de son lit, et tendit ses doigts pour frôler le poignet de Lloyd. Les serpents qui gardaient précieusement la main gauche de Dana s’agitèrent brièvement, animés par le mouvement soudain.

- J’ai pas faim. Et t’es fatigué, hein ? Tu pourrais te reposer aussi.

Dana tira sans ménagement sur le bras qu’elle tenait pour le faire basculer vers elle, qu’il puisse se courber et atterrir sur le lit où elle lui fit une place afin qu’il s’allonge à ses côtés. Combien de fois s’étaient-ils retrouvés dans cette position ? Sur le flanc, à se faire face inexorablement, chutant dans le regard l’un de l’autre. Elle était incapable de les compter, mais elle se remémorait de chacune d’entre elle. Et elle observait Lloyd avec gravité, sans sourire. Seuls ses cils longs et sombres se mouvaient quand elle clignait doucement des yeux, transportée par le silence soudain. La pénombre dévoilait à peine leurs traits et à l’abri de la montagne rouge, il faisait frais. Assez frais pour dresser une chair de poule sur le derme de Dana qu’elle avait nu au niveau des bras. Mais ce n’était pas la fraîcheur qui lui avait arraché ce frisson. Dans l’alcôve creusée, l’effigie de Shar Dakhan les jugeait toujours et elle n’en avait cure. Plus bas, ses doigts s’étaient entremêlés à ceux du hapien.

- Tu peux parler de toi, chuchota-t-elle doucement. J’ai tellement de questions sur Lloyd Hope.

Elle en avait toujours eu. Même si elle avait vu les parts d’ombre qu’il possédait, même si elle avait découvert quel monstre sa beauté couvait, elle avait l’impression de ne rien savoir de lui. Et cette ignorance la frustrait tellement.

- J’ai dit que je savais qui t’étais, mais je me suis sûrement trompée. Je suis loin de savoir, je crois.

Ses lèvres s’étaient rapprochées et son souffle cherchait déjà celui de Hope. Elle sentait le tabac, mais surtout les épices du breuvage qu’elle avait régurgité. Et si leurs respirations se mélangeaient, leurs bouches ne se touchaient pas. Il y avait encore cette retenue absurde, ce voile invisible entre leurs figures baignées d’intimité, comme si l’embrasser l’aurait consumée, comme si elle se gardait de commettre un impair qu’elle paierait cher. Il y avait quelque chose de dangereux chez Lloyd Hope. Sa main libre s’attarda sur le col de son uniforme sombre et en défit très lentement l’attache ; ses doigts glissèrent contre la gorge du hapien, dans une caresse mesurée.

- Pourquoi t’as pas choisi Runà ? C’était pas pour me sauver de Kedrod, reprit-elle dans un murmure et en articulant ces mots, ses lèvres frôlèrent les siennes sans les embrasser. C’était par désir pour moi ? Est-ce que tu me désirais ? Tu devrais dire la vérité, le grand Shar Dakhan te regarde et si tu mens et bien….tu peux dire adieu à ton âme damnée.

Un sourire chassa la fatigue présente sur ses traits. Et elle ne lui laissa pas le temps de répondre, parce qu’elle n’aurait pas supporté qu’il dise autre chose que ce qu’elle voulait entendre.

- Parce que moi, oui. Je voulais que tu me choisisses parce que j’avais du désir pour toi. Ne t’en fais pas, je suis fatiguée, demain j’aurais oublié, toi aussi.  On ne m’avait jamais fait l’amour comme ça. Ni Aarian, ni Hélios. Et je sais que personne me fera l’amour comme ça.

Elle baissa les yeux sur la ligne que dessinait la bouche du Sith et les releva. Ses deux prunelles dorées brillaient, captant dans leur étendue la moindre luminosité qui se répercutait dans cette chambre froide, sombre, millénaire. Et le lit dans lequel ils étaient étendus paraissait si petit.

- C’est absurde ce que je dis, mais ce serait pas la première fois que je serai absurde. Est-ce que tu fais encore ça avec Mat’aenna ?

Le ça renvoyait à l’acte charnel, c’était assez explicite dans le contexte. Dana n’avait aucune animosité dans sa voix, sa question n’avait aucune amertume et elle assumait que la réponse ne lui plairait peut-être pas, mais la curiosité avait pris le pas sur la raison. De toute façon, elle était sortie des rails ce soir, et elle n’avait pas fini de chuter : dans l’horizon émeraude du blond, contre la chaleur de sa peau sous ses doigts.

- Et c’est ce que tu veux ? Être avec elle, un jour. Si la réponse est oui, alors jusqu’à ce que ce jour arrive, je veux  pas que t’arrêtes de me faire l’amour, après ce jour, je disparaîtrai. Je te laisserai en paix. J’irai chercher le meurtrier de ma sœur. Mais avant, je tuerai Akusha et je ne serai plus mariée.

Elle se tut parce qu’il fallait que Hope lui réponde. Désormais, ses doigts féminins étaient contre la nuque blonde qu’elle flattait pensivement.


Lloyd Hope
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Le souffle du hapien s’était accéléré, fébrile. Ses yeux s’étaient agrandis tandis qu’il déglutissait. Mais l’émeraude froide ne pouvait cesser de se réchauffer au soleil de cette étendue dorée, alors il soutint ce regard. Après le réconfort de pouvoir s’allonger près d’elle, une épouvante qui le plongeait dans un mutisme qui dura quelques secondes. Savoir qui était Lloyd Hope ? Mais personne, avait-il failli répondre. Pourquoi pouvait-elle croire qu’il était quelqu’un ? Il était quelque chose. Un boucher, un monstre, un chien. Y avait-il autre chose à dire ? Et pourtant, elle avait des questions. Précises.
Il ne savait pas par quel bout commencer.

- J’avais plein de raisons de le faire.

Autant commencer par le plus facile, alors. Il leva sa main libre, celle qui ne jouait pas entre les doigts de Dana, pour montrer son pouce entre eux. Comme si un doigt posé sur la bouche de l’Inquisitrice avait pu le protéger.

- D’abord, si, j’avais pas du tout envie que Kedrod te fasse quoique ce soit. Ensuite – il leva son index – je n’avais aucune envie de passer une seconde nuit avec… ta maîtresse. Et trois.

Il leva son majeur, mais les mots ne suivirent pas tout de suite. C’était compliqué d’expliquer. Dana ne savait-elle pas ? Parler était compliqué. Il s’humecta les lèvres.

- J’croyais que tu m’allumais juste pour… Pour… J’sais pas. M’amadouer. Me faire faire ce qui t’arrangeait, en tant qu’Inquisitrice. Et que ça marchait. Mais que du coup j’avais une occasion en or de t’avoir rien que pour moi. Je veux dire…

Il prit une inspiration. Il allait être ridicule. Mais quoi ? Elle savait aussi, qu’il était un sentimental. Alors il se jeta à l’eau, d’une traite.

- Evidemment, que je te désirais. C’est comme si mon corps avait su bien avant moi combien il épouserait le tien à merveille, tu vois ? Combien il serait fait pour te saisir. Et… ta peau contre la mienne au Grand Temple, c’était… j’ai compris que je touchais à une drogue plus addictive que le slick. Beaucoup plus addictive. Que je me damnerai pour en avoir encore. Que Darth Runà avait raison, tu serais ma malédiction.

Le hapien retomba dans le silence, rompit le contact visuel en baissant sa main. Et voilà comment il s’était retrouvé esclave personnel d’une princesse de Ch’Hodos, lui, l’apprenti du Castellan Noir, aurait-il pu ajouter, mais il se contenta de laisser un bref souffle exprimer cette ironie. Mais il savait que la vérité cachait encore autre chose. Quelque chose qu’il n’était pas vraiment capable de formuler.

Il repensa à Mat’. Une vague de culpabilité l’assaillit. Ce n’était pas nouveau. Il vivait avec depuis longtemps. Depuis bien avant Dana. Ces eaux-là avaient juste un autre goût, désormais. Il serra brièvement les dents, cherchant un courage qu’il n’avait pas.

Pourtant il réussit à rendre aux émeraudes la chaleur du soleil doré qu’elles cherchaient. Il cligna des yeux, s’humecta les lèvres, le souffle tremblant comme s’il s’était trouvé face à un serpent mortel.

Il y avait quelque chose de dangereux chez Dana Shar. Tout particulièrement quand ils abordaient ce sujet-là : Mat’aenna.














- Non.














Il avait admis cela au bout d’un long moment de silence.

Pendant plusieurs secondes, il n’y eut rien d’autre, parce qu’il ne savait pas quoi dire. Démêler le vrai du faux, la vérité objective des chimères qu’il s’était construit dans sa tête pour survivre, les mots qui pouvaient être dits de ceux qui le plongeraient dans la honte. Il essaya d’inspirer calmement, mais sa poitrine s’écrasait comme sous l’étreinte de chaînes invisibles.

- On ne se voit presque plus, en fait, murmura-t-il. On ne se voit plus parce que je…

Il retint son souffle, tenta de nouveau.

- Parce que je…















Tu ne peux pas dire ça.















Lloyd ferma les yeux, avant de les rouvrir pour basculer subitement sur le dos, rompant le charme dans lequel le serpent l’avait fait tomber en l’hypnotisant, cherchant soudain de l’air à faire entrer dans ses poumons.

- J’peux pas, désolé, lâcha-t-il rapidement, dans un souffle.

Il y eut un autre long silence, pendant lequel il contemplait la voûte ouvragée au-dessus d’eux. Il aurait dû la trouver belle. Mais elle paraissait poussiéreuse et abandonnée.
Lloyd respira longuement, effaré. Il venait de casser quelque chose entre Dana et lui, ou du moins se le figurait-il, en refusant de répondre à ces questions. Mais comment aurait-il pu savoir quoi répondre, alors qu’il ne savait pas lui-même quoi penser ? Il déglutit, et le silence se prolongea, épais.

Au-delà d’une ouverture, par laquelle un air frais se faufilait dans la pièce, le soleil disparaissait, et la luminosité peu à peu baissait dans la pièce. Quelques bougies avaient été allumées çà et là, peut-être par Shira en prévision de leur intimité, mais le hapien restait immobile sous l’œil vigilant de Shar Dakhan.









- C’est pas vrai, tu sais. Que tu m’as jamais rien montré de glorieux.

Sa voix avait enfin percé après de longues minutes de silence, dans un souffle plus posé, plus calme.

- Te voir chevaucher un rancor par exemple, c’était glorieux. Te voir trôner dans l’arène, comme une princesse, aussi. Te voir danser sur la plage.

Mais il y avait un son d’inéluctable dans sa voix rauque.

- Te voir, en fait. Te voir, comme ça, dans ma vie. C’était glorieux.
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Alors, elle pouvait penser qu’elle était la seule. La seule qu’il touchait, qu’il possédait. Du moins s’en persuadait-elle, car s’il ne touchait plus Mat’aenna quelle autre femme aurait-il pu apprivoiser de ses doigts brûlants. Mais il ne pouvait en dire plus. Elle était resté interdite face à sa réaction avant de basculer sur le dos aussi, pour regarder dans la même direction que lui et pointer son attention sur le plafond inaccessible tant il était haut. La nuit viendrait. Une nuit de plus aux côtés de l’apprenti du Castellan Noir. Combien de nuits ? Beaucoup. Ou pas assez, selon la nature de ces nuits. Il y en avait eu des terribles. Il y en avait eu des merveilleuses. C’était toujours comme ça avec Lloyd Hope, un fil tendu sur lequel elle marchait en équilibre précaire et quand elle chutait, c’éait soit dans le bonheur le plus total, soit dans la détresse la plus douloureuse. Le juste milieu était l’oubli bien sûr. Oublier, nier.




Ou se taire.






Comme il s’était tu. Comme il se taisait maintenant. C’était le moment où elle tombait du mauvais côté du fil et qu’elle se fracassait contre les défenses qu’il érigeait.

Mais quand il décida enfin de rompre le silence, elle encaissa cette espèce d’aveu étrange, entrouvrant les lèvres pour inspirer un air qui ne faisait déjà plus battre son cœur. Car les mots de Hope avaient soudainement remplacé l’oxygène. Elle tourna sa figure pâle, plaquant sa joue contre les draps, et fixant le profil du hapien se dessiner dans la pénombre. Elle laissa ses yeux glisser le long de la courbe d’une boucle blonde qui lui barrait insolemment le visage. Puis, elle grimaça, fronça les sourcils comme si elle réalisait quelque chose et qu’elle s’en vexait. Elle parut perplexe quelques secondes et répondit enfin :

- Tu t’es pas rendu compte que c’était toi qui rendais ces moments glorieux ? J’ai chevauché ce rancor parce que mon corps était incapable de courir te porter secours. J’ai trôné dans l’arène parce que j’étais ta princesse et j’ai…j’ai dansé dans l’espoir de capter ton regard uniquement. Y’a tellement de choses que tu sais pas Lloyd.

Et moi non plus. Et peut-être ne devrions-nous pas les savoir, c’est logique.

Alors, elle revint à sa contemplation du plafond espérant que certaines réponses tombent de cette obscurité vertigineuse. Elle ramena ses doigts le long de sa tresse écarlate et entrepris de défaire sa chevelure, mèche après mèche. Les ondulations soyeuses et carmine coulèrent sur la literie en silence au fur et à mesure qu’elles se libéraient du carcan de la tresse. Le mouvement régulier l’aidait à réfléchir et à se détendre ; ce qui n’étaient pas choses faciles quand elle était à proximité dangereuse du hapien.

- T’as envie de te damner ? demanda-t-elle subitement, sans le regarder alors que la dernière mèche cuivrée retombait sur les draps. Elle fixait toujours le vide immense au-dessus d’eux.

De nouveau, sa joue échoua sur le matelas pour l’observer, et un sourire ourlait ses lèvres.
















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Le hapien avait tourné son visage vers Dana, d’abord dans l’expectative, puis éberlué. Il avait cru qu’elle allait l’allumer plus directement pour se déshabiller ainsi mais finalement il y eut le ça de sa vie avant lui. Il entrouvrit la bouche pour former un O de saisissement, ses yeux s’écarquillant dans un mélange d’indignation et de délectation.

Puis soudain il se mit à rire, et le coin de ses yeux se froissa de félicité. Un vrai rire. Qui effaça les défenses qu’il avait érigé, qui balaya la retenue qui l’écrasait. Depuis combien de temps n’avait-il pas ri ?

- Bon ben ça a pas l’air si mal !

Il roula sur le côté et sa main attrapa le poignet de Dana pour l’arracher à la lingerie et il se colla contre elle, l’attrapant pour la serrer contre lui, l’empêcher d’aller trop vite. Son rire s’était éteint mais un léger sourire resta accroché sur ses lèvres.

- Hé, laisse-m’en un peu, exigea-t-il.
- Je… J’suis désolé si j’t’ai fait mal, chez Rhysode. Mais tu m’allumes beaucoup trop, Dana Shar. Je sens plus ma force, quand tu fais ça.

C’était une excuse sincère, au milieu d’autres choses qui animaient les reflets de son visage quand il fit doucement glisser le pantalon et la dentelle le long des jambes de Dana pour l’en débarrasser définitivement. Il retira ses propres bottes et déboutonna tranquillement la chemise de son uniforme, prenant son temps en la regardant comme elle le regardait aussi : d’égal à égal, peut-être.

Il se mordit la lèvre inférieure.

- Mais je peux me racheter ? ajouta-t-il rapidement, avec un petit air implorant qu’il avait déjà eu avec elle, dans d’autres circonstances.

Je veux pas que t’arrêtes de me faire l’amour.

Quand il fut enfin torse nu, il attrapa Dana par les genoux pour la tirer vers lui avant de descendre du lit et l’attirer jusqu’au bord, pour qu’elle y fut assise. Alors il se mit à genoux devant elle, et releva son visage qui avait retrouvé une certaine sérénité, loin des soucis qui fronçaient parfois son front, ou des émotions qui pinçaient ses lèvres lorsqu’il hésitait. Cette fois, il n’y avait que des émeraudes chargées de convoitise et ses lèvres cherchèrent doucement le souffle de l’Inquisitrice. Il frôla le coin de sa bouche, avant de se détourner vers sa joue, pour porter son souffle jusque dans l’oreille de Dana.

- Devant Shar Dakhan, qui jugera si tu as suffisamment obtenu satisfaction.

















Te faire l’amour. Te faire l’amour jusqu’à






Te faire l’amour jusqu’à






Jusqu’à











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Dana retomba, étendue sur le dos, la chevelure emmêlée, le souffle précipité et court. Ses yeux fixaient le plafond aux voutes ouvragées, un peu ahuris, un peu larmoyants, un peu comblés, un peu sentimentaux. Et un sourire balayait la ligne de ses lèvres, déformait sa vieille cicatrice. Finalement, elle roula sur le flanc pour se coller contre le hapien et se redressant sur un coude, figea ses yeux dans les siens. Ses doigts pianotèrent un air sur les muscles de son abdomen, à la fermeté inégalée depuis ses entraînements chez Jephego. Elle laissa ses lèvres glisser le long de la mâchoire du Sith, embrassa son cou, goûta à la sueur -, à la chaleur de sa peau et revint chuter dans son regard émeraude.

- Le jugement de Shar Dakhan est sans appel, souffla-t-elle en essayant de cacher son amusement qui ne reflétait finalement qu’un étrange instant de plénitude. Il te met un petit cinq sur dix.

Et parce qu’elle crut lire de l’indignation dans cet horizon émeraude, elle ajouta en plaquant un index en travers des lippes du blond.

- Mais…Dana Shar est pas d’accord avec lui.

Il y eût un silence, très long durant lequel ils purent sombrer dans des eaux dorées, dans des eaux émeraudes comme deux navires qui s’étaient percutés en pleine tempête, ou deux vaisseaux que la gravité avait soudainement attiré dans la trajectoire l’un de l’autre. Elle aurait voulu lui décrire ce qu’elle voyait, qu’il était beau, qu’elle aimait sa couleur de cheveux mais aussi celle de ses yeux, que si elle l’allumait, c’est parce qu’elle aussi ne pouvait s’empêcher, qu’elle se damnerait aussi pour une seule caresse de sa part. Elle aurait sincèrement voulu le dire. Seulement, les mots auxquels elle pensait lui paraissait moches et insuffisants pour exprimer sa pensée, alors elle se taisait, admirait, touchait…mettait sa respiration au diapason de celle du hapien.

- Je t’en veux pas pour chez Rhysode, déclara-t-elle enfin d’une voix basse pour ne pas trop déranger le silence. C’est moi qui suis revenue. Parce que t’avais pas l’air bien et que je voulais pas que tu sois seul. Et oui, parce que je te désirais, aussi. En fait…il y a une règle. Elle dit qu’on abandonne jamais la mission. Mais moi, j’abandonnerai jamais mon binôme, mon coéquipier. Je peux pas abandonner la seule personne en qui j’ai confiance. Même si t’es qu’un con et que…tout ça, ça ne mène nulle part. Mais je suis de ton côté.


Elle s’installa sur le dos et posa sa tête sur le torse du capitaine, laissa sa chevelure s’emmêler un peu plus. Maintenant que la nuit était tombée, on ne voyait presque plus les voûtes du plafond, mais elle se concentrait pour les deviner et parce que l’air se rafraîchissait dans cette grande pièce, refroidissant la sueur sur leurs peaux, elle ramena un drap sur eux, comme si elle recouvrait un secret. Et sous ce morceau de tissu, elle récupéra un peu de la chaleur corporelle du hapien et lui partagea la sienne en retour, derme contre derme.

- Je suis pas loyaliste ou renégate. En fait, je m’en fiche complètement. C’est Akusha que je déteste, c’est ma génitrice. Papa voulait pas se soumettre quand l’Empire s’est formé. Il a dit non. Et il a disparu après. J’ai détesté l’Emipre pour ça. Si t’avais pas été là, j’aurais sans doute suivi Darth Ramken. Parce que c’est un véritable Sith. Mais j’avais pas envie de te combattre, j’avais pas envie d’être séparé du capitaine du Sans-Visage. J’ai juste choisi mon propre camp dans cette guerre débile. J’ai juste voulu ne pas te laisser seul. Ne pas devenir une ennemie. Pas après tout ce qu’on a traversé. C’est la loi du plus fort, on me l’a toujours dit. Quand Jacet Ashar m’a dit qu’il avait le boucher, qu’il savait. J’ai voulu le tuer mais il a menacé ta vie. Alors je me suis soumise. Il a dit qu’il t’épargnerait, mais qu’il me tuerait. Ca m’a pas dérangé. J’ai même pas cherché à savoir s’il disait vrai, s’il allait tenir sa promesse. C’est comme ça. Les gens m’atteindront de cette manière. Ils m’atteignaient avant ça, autrement, en parlant de ma sœur. Y’a tellement de bourreaux dans cette galaxie de merde…moi j’ai la chance d’avoir pu choisir le mien.

Un sourire espiègle tira ses traits et elle releva sa figure vers lui, le pointant d’un regard sans appel. C’était lui le bourreau et elle s’en accommodait parfaitement. Il peignait mieux que n’importe qui sur son corps, parfois des marques invisibles, parfois des marques visibles. Quelle importance. Aucune, pour Dana.








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- Shar Dakhan est juste jaloux.

La nuit avait plongé la nouvelle chambre de la Princesse dans la pénombre, et des bougies sur l’autel, une cire visqueuse s’accumulait sous des flammes discrètes. Lloyd faisait courir ses yeux sur les ombres qui avaient grandi derrière les meubles, créant des zones obscures, où auraient pu se cacher… Il laissa échapper un soupir, avant de se rendre compte que Dana pouvait mal l’interpréter. Alors il se tourna vers elle pour lui adresser un bref sourire penaud.
Il essaya de prendre une inspiration pour parler mais sa bouche se referma sur un goût stérile. Son esprit se raccrocha fébrilement à quelques mots entendus, qui étaient pour lui qu’il ne pouvait le lui dire, comme un canot de sauvetage.
Aussi le hapien se redressa sous le drap. Pas pour s’en aller. Il écarta les cuisses de l’Inquisitrice pour s’allonger entre elles, sur elle, sur le ventre. Pas pour recommencer. Pour être juste là, sa tête posée sur la poitrine de Dana, son oreille collée à cette cage thoracique où résonnaient des battements cadencés, comme une musique qui le berçait. Il tira sur le drap au-dessus de lui pour le faire remonter jusqu’à ses épaules. Il ne voyait plus le visage de l’Inquisitrice mais tout son torse était réchauffé par le corps de Dana, alors il ferma les yeux et la pièce et ses ombres disparurent, même si elles dansaient encore devant ses paupières.

Il sentit bientôt des doigts féminins se glisser dans ses cheveux blonds. Lloyd essaya de se détendre et expira doucement.

- Je suis content que tu sois loyaliste avec moi, souffla-t-il au bout d’un moment de silence. C’est déjà compliqué d’être… Le chien du Castellan. Le Conseil Noir m’a à l’œil, au cas où j’aurais envie de trahir, et parfois j’ai l’impression qu’ils le veulent juste pour pouvoir se débarrasser de Laduim. Soit que je rejoigne Ramken juste pour qu’ils puissent l’accuser, soit que je trahisse directement Laduim pour prendre sa place un jour.

Il haussa les épaules, fit remonter ses mains autour de Dana pour les poser autour de son buste. Il ne pouvait s’empêcher de balayer lentement le derme chaud sous ses doigts, la sensation de douceur était du même genre de réconfort qu’un doudou pouvait apporter à un enfant, lui semblait-il. Cela lui donnait une certaine forme de courage.

- Evidemment, ni l’un ni l’autre ne m’intéresse. Tout ce qui m’importe, c’est que l’Empire retrouve sa stabilité. Sinon, il s’effondrera sur lui-même. Et c’est pas Ramken et Magamoth qui vont nous trouver ça. Ils sont trop… Cupides, et provocateurs. Ils sont le pire des Sith. De vrais Sith, comme Shar Dakhan, régnaient intelligemment.

Oui, il savait qui était Shar Dakhan. Non pas qu’il s’intéressait particulièrement à l’Histoire. Mais récemment, il avait tapé ce nom pour mieux comprendre, sur un datapad. Ses devoirs pour la mission Ch’Hodos.
Oui, il se donnait des missions seul, désormais. Darth Laduim aurait tôt fait de s’en rendre compte et de réagir. Mais réagir comment ? C’était pile ou face : soit il verrait le signe d’une maturité suffisante de Lloyd pour le libérer de Mat’aenna, ou bien… Il lui ferait payer le prix de cette audace qu’il jugerait menaçante.
Et oui, il savait que parler ainsi de son maître, du Conseil Noir, de Ramken et Magamoth, c’était le genre de trucs dangereux qu’il n’aimait pas que Dana fît. Mais ici, sur Ch’Hodos, il lui semblait qu’il y avait une autre vie.

Les mains de l’Inquisitrice ralentirent peu à peu dans leurs caresses et ses lèvres se pincèrent quand il pensa qu’elle était peut-être en train de s’endormir.

- Tu sais que, hum… Je préfère te le dire plutôt que tu le découvres par toi-même. J’ai connu Damaya.

Il releva son visage vers Dana, rencontra ses yeux dorés qui s’étaient agrandis. Du coup, elle ne dormait clairement plus.

- Hé, j’ai rien fait avec, j’te jure. Je couche pas avec tout ce qui bouge, t’es au courant ? fit-il en faisant mine d’être vexé.

Puis il réinstalla sa tête contre le corps de Dana, son souffle balayant le tatouage qu’elle portait près du cœur.

- On a été à l’Académie ensemble. Je veux dire… Mon premier passage à l’Académie. J’suis désolé pour ta sœur mais…

Il avait bien conscience qu’il marchait sur des œufs.

- J’aurais jamais pu faire confiance à cette princesse-là. Aussi belle et intelligente qu’elle pouvait être. La perfection marche pas dans ce monde. Y’a que les anomalies comme nous qui survivent. Et y’a qu’une anomalie comme toi pour... se laisser atteindre à cause de moi.

Il y eut quelques secondes de silence, pendant lesquelles il n’entendit que le cœur de Dana, qui lui semblait s’être accéléré légèrement, ou bien se faisait-il des idées.

- J’irai terminer les Ashar, dit-il comme ça, sur le ton de la conversation.

Lloyd glissa doucement sa tête pour lever les yeux vers elle. Les courbes de l’Inquisitrice se dessinaient entre leurs visages comme un paysage ensorcelé : la peau de Dana luisait d’une sueur – probablement en partie celle du hapien - qui captait les lueurs tremblotantes des bougies, et parfois se couvrait d’un tapis frémissant quand un frisson parcourait son corps. Et au-dessus ce paysage, les émeraudes contemplait l’étendue dorée qui veillait sur lui comme un soleil.
Il referma les yeux. Sa voix était devenue à peine audible.



- Protège-moi encore.

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Avec tendresse, elle enroula ses bras dénudés autour de lui, pour le protéger. Mais elle s’interrogeait, le regard perdu dans le vague obscur. Si Damaya Shar était si parfaite, qu’elle ne marchait pas dans ce monde, pourquoi avait-elle aimé un Jedi ? La question lui brûlait les lèvres, mais elle n’avait plus le courage de la poser ou de parler davantage. Les mots venaient de faire leur temps, d’arriver à expiration. Lloyd Hope avait connu Damaya. En d’autres circonstances, cela l’aurait enragée. Cependant, un réconfort soudain s’était diffusé en elle, parce qu’il avait connu sa sœur aînée et que malgré toute la beauté, toute la perfection qu’elle avait été, c’était dans les bras de Dana Shar qu’il se reposait. L’une de ses mains remonta flatter sa chevelure blonde. Le poids du hapien sur elle lui procurait un sentiment de sécurité.


Il s’était assoupi, ou du moins le supposait-elle. Ses propres paupières s’alourdissaient. Mais il y avait quelques mots, qui avaient loupé le coche, qui avaient pris les escaliers au lieu du turbolift et qui arrivèrent seulement, péniblement, essoufflés, dans sa bouche :

- Je veux juste que tu sois bien…que tu aies la vie que tu veux.





[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]






Un seul rayon solaire perçait dans la chambre et frappait sa figure endormie. Elle émit un grognement d’inconfort et s’ébroua avant d’ouvrir les yeux. Le lit était froid, grand et vide. Avec un air un peu ahuri, tout échevelée, elle tâta les draps autour d’elle, à la recherche de Lloyd. Et en constatant son absence, elle sentit les souvenirs de la nuit passée lui filer entre les doigts. Elle était persuadée que peu avant l’aube, quand le ciel était encore noir, ils avaient encore fait l’amour. Peut-être qu’elle l’avait rêvé. Elle s’assit sur la couche et ramena le draps contre sa poitrine, un peu désarçonnée par cette solitude soudaine. Demain, j’aurais oublié. Toi aussi.

Un bruit en provenance du salon adjacent fit battre son cœur d’espoir. Mais la silhouette d’un Hélios souriant se dévoila, Shira dans son sillage. L’ancien esclave avala les mètres qui le séparaient du lit de Dana et s’effondra dedans, en travers des pieds de la princesse qui eût un léger sursaut. Elle tira davantage sur le drap et jeta une œillade scandalisée vers la twi’lek qui se contenta de hausser les épaules. Il s’appuyait sur un coude, trop non-chaland et elle crut presque retrouver le Hélios d’avant, qui s’adressait à elle avec complicité, mais elle se sentait crispée parce qu’elle se doutait bien qu’il tentait de l’amadouer.

- Bien dormie ? Ecoute, il faut que tu fasses un truc.

Dans le mile.

- Où est Lloyd ?
- T’es déjà perdue sans lui ? sourit-il. On avait besoin de lui, assez tôt. Y’a que les princesses qui peuvent se prélasser hein. Juste un conseil, avant les batailles à venir, il faut qu’il garde sa hargne alors ahm…
- C’est quoi ce truc ? le coupa-t-elle, excédée avant de se rallonger, rabattant le drap sur sa figure.
- Un discours ? plaida-t-il. Public ? Où tu prends position pour le Conseil Noir ? Ou t’explique ce qui s’est passé chez Rhysode ? (Il adressa un regard à Shira qui sembla l’encourager en silence). On le diffuserait partout sur Ch’Hodos.
- Non.
- Non ? Dana, tous les médias disent que t’es notre victime ! On perd des soutiens précieux, s’énerva-t-il doucement.
- Je dois quitter Ch’Hodos, avec Lloyd, décida-t-elle en surgissant du drap. Si je fais ce discours, si je dis tout ça, Akusha retournera la moindre pierre de Ch’Hodos pour me retrouver, me le faire payer et me faire cracher de force un serment envers Ramken. Tant que vous le laissez croire qu’il a le contrôle de la situation, vous pourrez vous préparez en toute discrétion. Lloyd va plaider votre cause chez Laduim, on vous enverra de quoi contre-attaquer sérieusement. Et quand je reviendrai, on reprendra le pouvoir.
- Dana…
- Le bruit va vite courir que j’étais ici, en pleine santé, que je soutiens la cause loyaliste. J’ai besoin que tu nous aides à fuir. Je dois rejoindre Dromund Kaas.

Il grimaça une moue désapprobatrice et s’extirpa enfin du lit. Shira prit une profonde inspiration et tenta un sourire qu’il ignora tant sa contrariété était grande. Après quelques pas perdus, à ruminer ce refus, il s’immobilisa et pointa un index autoritaire vers elle et elle leva les yeux au ciel.

- Très bien, on va parler de votre départ au briefing de midi. Shira, assure-toi qu’elle sait où il va se dérouler.
- Oui Hélios.

Et il quitta la pièce d’une démarche hâtive. La twi’lek croisa le regard de Dana et pouffa étrangement de rire. L’Inquisitrice attrapa sa tunique noire qui traînait encore sur un coin du lit et la jeta sur la femme aux lekkus, faussement vexée, puis une violente nausée lui retourna l’estomac et elle régurgita son repas de la veille sur la literie. Shira écarquilla les yeux, arrêta de rire et se dépêcha pour aider Dana qui vomissait encore.





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Le médecin barra soudainement la route de Lloyd Hope dans une coursive. Il saisit le blond par le bras pour l’écarter vers une alcôve où ils ne gêneraient pas le passage. La figure du soignant était sérieuse, derrière ses épais sourcils broussailleux et noirs, il fixait Hope de ses petits yeux étrécis. D’un regard, il s’assura que le couloir n’était pas trop fréquenté et annonça d’une voix basse et grave.

- C’est à propos de la princesse. Elle se sentait pas bien hier, alors je suis allé la voir, je l’ai auscultée et par acquis de conscience j’ai fait une prise de sang. Mon droïde médical vient de me transmettre les résultats, faudrait ahm…

Il racla sa gorge parce que deux miliciens loyalistes étaient passés près d’eux et sitôt le calme revenu et face à l’air contrarié du Sith, il reprit vite :

- C’est rien de grave. Mais faudrait juste s’assurer qu’elle se repose, c’est important. Lui éviter les situations de stress, ou les efforts physiques trop intenses. Ca passera mais bon, vaut mieux suivre mon conseil.

Parce qu’il était tenu au secret médical, il n’en dirait pas plus. Il relâchait le bras du hapien non sans une grimace d’excuse.

- Bon, c’est tout. Si vous avez encore mal, n’hésitez pas à revenir prendre votre dose de kolto synthétique. Et oubliez pas pour la princesse, d’accord ? Ca serait mieux qu’elle revoit un médecin une fois que vous serez de retour sur Dromund Kaas, pour être sûr que tout va bien. Elle a été beaucoup secouée et y’a des blessures qui…bref. Je dois y aller.

Et il recula dans le couloir, l’air énigmatique comme s’il avait détenu un secret d’état ou manipuler une bombe. Il fila enfin, disparaissant vers l’aile médicale de la structure. Autour du Sith, la vie se poursuivait, les allées et venues ne cessaient pas, dans un calme relatif. Ce docteur était juste étrange, à l’image de beaucoup de ses confrères.





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- Dahara est encore relativement neutre, annonça fortement Hélios entouré de ses lieutenants de confiance qu’il dépassait d’une demi-tête. Sous son uniforme protocolaire de milicien, on devinait sa musculature acquise au fil de sa vie de labeur et de gladiateur. Les rétines dorées de Dana coulait sur ce corps athlétique, pensives. Elle avait retrouvé sa tenue de la veille et en arrivant dans la grande salle qui jadis, devait servir de salle de trône, beaucoup – si ce n’est la totalité des résistants présents avaient déposé un genou déférent au sol. Tous, sauf Hélios et Lloyd Hope. Maintenant, il s’agissait d’esquisser la dernière stratégie, celle de la retraite. Une courte seconde elle croisa le regard émeraude de Hope et s’en détourna aussitôt.

Hélios frôla une commande sur la grande console autour de laquelle ils étaient rassemblés et une carte holographique jaillit dans l’air. Elle représentait la cité de Dahara, le joyau de Ch’Hodos. Cette ancienne ville marchande avait été fortifié il y a cinq cent ans, par la première Reine de Ch’Hodos : Dahara Shar, une arrière-arrière-arrière-arrière grand-mère de Dana. Elle en avait fait sa citadelle, son siège de pouvoir, rompant avec la tradition masculine qu’était d’établir l’autorité dans la Forteresse de Shar Dakhan. Elle avait eu un règne long.

- Son astroport fait l’objet de moins de contrôles mais…le plus difficile actuellement est de rentrer dans Dahara. C’est pratiquement impossible. (Il se détourna vers Lloyd, l’air très sérieux) Si vous avez un vaisseau, il va falloir qu’il tente l’atterrissage dans les montagnes. Votre pilote est capable de ça ?

Dana secoua la tête pour faire passer le message à Hope, mais il sembla l’ignorer ou ne pas la voir alors elle poussa un soupir discret, le laissant répondre. Elle était encore pâle, comme la veille. Et elle avait l’impression qu’essayer de se battre ou de faire entendre sa voix par la force habituelle la feraient encore vomir. Mais elle avait chaud et ils étaient debout depuis une heure à écouter Hélios discourir sur un possible plan de retrait. Elle avait à peine ingurgité le petit-déjeuner que Shira avait fait l’effort de lui apporter plus tôt. Un courant d’air traversa la salle. Un moment de faiblesse s’empara de son corps. Shira la vit vaciller et quand elle se précipita, il était trop tard. Shar s’était effondrée. La twi’lek l’aida à s’asseoir sous les regards étonnés et incertains. Personne ne s’était attendu à voir une princesse, Sith de surcroît, si fragile. Hélios pinça ses lèvres d’amertume.

- Ce sont les combats d’hier, déclara Shira vers eux tous. Elle a été blessée, je vous rappelle qu’elle a combattu alors que vous étiez absents.
- Ca va Shira, intervint le leader. Amène-la voir le médic’. Akusha n’a épargné aucun d’entre nous. Elle doit peut-être se reposer encore. Enfin…(Et il dirigea une œillade un peu accusatrice vers Hope) si on lui en laisse l’occasion.



Lloyd Hope
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- Bref.

La voix du hapien avait été cassante quand il avait rendu à Hélios un regard irrité.

- Merci Hélios pour ces éléments. Evidemment que mon pilote pourra atterrir dans les montagnes, si vous me donnez des coordonnées précises, précisa-t-il avant de se tourner vers la petite assemblée qui s’était formée devant eux, où certains jetaient encore quelques regards curieux vers la Sith. La Princesse Shar et moi-même allons retourner en territoire loyaliste, pour y trouver des moyens.

Lloyd baissa un instant le regard, mais ce ne fut que pour mieux s’avancer devant Hélios. Pensivement, il se mit à arpenter l’espace devant le premier rang de ceux qui les écoutaient. Un poing fermé dans le dos, l’autre main qui se mit à égrener avec les doigts ce à quoi il avait pensé.

- Des droïdes de combat et d’exploration, des munitions pour le type d’armement que vous possédez et dont nous avons fait l’inventaire, si possible des armes légères supplémentaires, des technologies d’excavation, énuméra-t-il, et enfin, nous allons tracer un couloir hypothétique à partir des données de cette base afin de pouvoir y envoyer très rapidement des moyens d’extraction de la part de la Marine, si jamais cela devenait nécessaire. En attendant, de votre côté, il faut vous assurer de ne pas être découvert et d’établir des communications les plus sécurisées possibles avec Ch’Hodos City et Dahara pour y établir des surveillances sur les mouvements de troupe et les décisions politiques.

Soudain, il se rendit compte qu’il avait capté l’attention de l’assemblée. De tels moyens étaient probablement plus que ce que leur petite colonie avait possédé depuis leur création. Lloyd contempla un moment les visages attentifs, se rendant compte qu’il suscitait un espoir inattendu : s’il faisait miroiter des chimères, il savait que ces gens lui en tiendraient rigueur. Et il n’avait aucune certitude que Laduim lui concéda tout cela. La vérité était qu’il comptait bien trouver ces moyens autrement que par le Castellan si le maître ne donnait pas à son chien les os à ronger qu’il désirait. D’autres problèmes. Il verrait plus tard.

- Soyons clairs, poursuivit-il d’un ton abrupt, la Marine Impériale est mobilisée partout dans l’Empire et il ne sera pas possible de vous donner les moyens de faire face de front aux forces renégates de Ch’Hodos. Darth Akusha a la main sur cette planète, pour le moment. Il s’agit pour l’instant de vous faire survivre, de nous assurer que vous pourriez soutenir un siège quelques temps, que nous serions capables de vous exfiltrer pour que vous vous réinstalliez ailleurs si votre base est découverte.

Il y eut quelques hochements de tête compréhensifs. La salle dans laquelle ils se trouvaient était vaste, mais le groupe s’était rassemblé pour mieux entendre, pour mieux voir, comme un petit essaim silencieux entre les colonnes antiques.

- Mais ces moyens seront précieux pour soutenir la cause le temps de vous organiser mieux. Plus tard, lorsque nous reviendrons, d’autres plans pourront être dressés avec le reste de l’Empire.

Le hapien cessa le manège qui le conduisait d’un bout à l’autre du petit espace qui les séparait, Hélios et lui, du reste de l’assemblée, pour tourner son regard vers l’humain. Ce dernier acquiesça en silence, le visage légèrement fermé. La rencontre touchait à sa fin. Les explications avaient été longues et les individus présents n’avaient plus qu’envie d’aller discuter avec les collègues de tel ou tel détail, de façon informelle. Alors Lloyd eut un bref signe de tête, pour signifier à Hélios qu’il en avait terminé. Cependant, avant de s’en aller lui-même, il se tourna une dernière fois devant l’assemblée pour lui faire face, le visage ténébreux, insondable.

- La Princesse compte sur vous tous pour être encore vaillants lorsqu’elle reviendra, dit-il d’une voix tranchante. Et elle reviendra.

Il y eut un silence, et leur regard alla de l’apprenti du Castellan à la Princesse. De Dana à Lloyd. Et de l’Inquisitrice au Boucher, encore.




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- Mumkin. C’est Lloyd, tu m’reçois ?

C’était la dixième fois, au moins, que le hapien répétait cette phrase. Il était assis tout en haut du chemin de crête, là où Hélios l’avait emmené le premier jour, pour lui faire visiter la base. Une poussière orange se déposait sur ses vêtements noirs et dans ses cheveux blonds tandis que, sous le soleil ardent, il fronçait les sourcils pour voir le cadran du dispositif dans ses mains, auquel il avait relié son comlink pour pouvoir obtenir une communication longue distance. Que Mumkin ne fut pas à son poste était possible, qu’il soit déjà parti vers Dromund était également une possibilité. Que son bidouillage ne fonctionnât pas, aussi.

Il allait abandonner quand un grésillement, enfin, se fit entendre.

- … oyd ? … é pas retro… é ?

Le hapien sursauta mais son visage s’éclaircit tandis qu’il s’était mis à manipuler l’un des boutons du dispositif qu’il avait déposé par terre devant lui.

- Mum ! Je te capte à peine. Toi tu m’entends bien ?
- … va. Je comm… der si t’avais… blié que t’étais pas esclave.
- Ouais, nan, j’ai pas oublié. On a fini. Tu vas pouvoir venir nous chercher. Je t’envoie des coordonnées et il faudra venir cette nuit. Fais une approche tranquille et ne viens te poser que quand le point sera passé en face sombre. Ok ?
- … cord. J’ai… te raconter.
- Ouais. Mais plus tard, il faut que je retourne au chevet de Dana. Ça a été… Plus lourd que prévu.
- … erde. J’espère qu’elle est quand… te grimper si… mauvais poil !

Lloyd fronça les sourcils, jeta un œil sur son comlink.

- J’espère que j’ai pas compris ce que t’as dit.
- … oi aussi.
- Bon, on se rappelle quand t’es en orbite. Merci Mum.
- … tron !




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Dana avait été ramenée par Shira à sa chambre. Quand le hapien rentra d’un pas sombre dans celle-ci, le soleil de l’après-midi jetait sur les draps froissés – ceux dans lesquels ils s’étaient étreints – une lueur ardente qui ne faisait qu’accentuer l’impression de pâleur qui émanait de Dana. Shira était assise au bord du lit, une bassine sur les genoux, dans laquelle elle trempait un linge dans une huile odorante, censée chasser les nausées. Lloyd regretta un instant que cette odeur effaçât les traces olfactives de leurs ébats, qui flottaient encore le matin même, quand il avait quitté le lit en silence.

Il tira d’un geste un peu brusque le fauteuil le plus proche vers le lit pour s’y laisser tomber avec un soupir. Il toisa un moment Shira qui évitait son regard. Sur ses gardes, elle passait d’un geste précautionneux le linge sur la gorge de la princesse, au-dessus de sa poitrine que dissimulait sa tenue. Lloyd commença sans préambule. Il était d’humeur directe, maintenant qu’une nouvelle menace, inattendue, lui semblait montrer le bout de son nez dans ce lieu qui jusqu’ici leur avait été clément.

- Il est bizarre ce docteur, lâcha-t-il. Le prends pas mal, mais dès qu’on sort de cette planète je veux que tu ailles directement chez un médecin de Kaas.

Sur un monde développé, quoi.

- Et pas en passant par la case Runà, si possible.

Le hapien se releva, puis se mit à faire les cent pas devant elle.

- Sérieusement, « c’est rien de grave », qu’il me dit, gronda-t-il entre ses dents, et après tu t’évanouis presque. Soit c’est un nul, soit tu as vraiment trop tiré sur la corde.

Il avait essayé de ne pas avoir l’air de lui faire des reproches, mais il fit la moue en se rendant compte qu’il était cassant. Il adressa à Dana une œillade entendue, avant de se rasseoir en s’efforçant de ne pas laisser la frustration prendre le dessus. Quand il parla de nouveau, il essayait d’être plus posé.

- Il va falloir que tu te montres plus entreprenante avec les gens de cette base. Que tu leur parles. Au moins un petit mot avant de partir. Si on veut qu’ils tiennent, si tu veux pouvoir revenir ici et y trouver du soutien pour combattre Akusha, tu dois leur faire sentir qu’ils sont, quelque part, des gens privilégiés. Une espèce de garde d’honneur de la Princesse. La fierté les aidera à tenir.

Shira releva soudain le nez, croisa enfin le regard du hapien. Il lut dans ces yeux azur quelque chose qui ressemblait à de l’espoir.

- Oui, c’est une bonne idée, intervint-elle avant que ses joues ne rosissent, et elle baissa les yeux. Enfin, pardon de vous interrompre. Mais ça, ou un héritier, cela aiderait à tenir le groupe et même les autres groupes loyalistes.

Lloyd siffla de dédain entre ses dents.

- Un héritier ?! Pour affaiblir Dana et que le gosse récupère une planète dévastée ? C’est bien la pire chose qui puisse arriver.

Shira lança une œillade indignée à Lloyd, mais ce dernier l’ignora en s’enfonçant dans le fauteuil, le visage fermé. Il croisa le regard de Dana, puis de Shira, avant de soupirer, penaud.

- Oh je sais, convint-il, moins acide, on m'a pas recruté pour mon optimisme. Mais c'est pas en rêvant qu'on reste vivant, ok ?
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La tension entre Shira et Lloyd, juste au-dessus d’elle l’agaçait. Elle se redressa doucement, repoussant la main de la twi’lek qui revenait avec le linge odorant, dont le parfum commençait à lui filer la nausée, alors que l’huile dont il était baigné devait combattre cet état.

- J’ai trop forcé, grimaça-t-elle au souvenir de la soirée chez Rhysode. User de la Sorcellerie Sith, c’est un grand pouvoir, mais ça demande de l’endurance et de l’énergie. Réanimer des morts, c’est éprouvant. J’irai mieux avec le temps. C’est pour ça que c’est rien de grave.
- Bien sûr, sourit Shira, de manière crispée après un regard acerbe pour Lloyd auquel elle s’adressa clairement. Un héritier assure la stabilité d’un monde. Si la princesse meurt sans descendance qu’est-ce que vous pensez qu’il se passera sur Ch’Hodos, des dizaines de guerres civiles pour le pouvoir. Même moi, je comprends ça. Un enfant, ce serait une bénédiction. Un genre d’espoir dans ces temps troublés.

Un silence se tissa entre les trois âmes. Il aurait été pertinent que Dana tranche sur la stratégie à adopter, mais elle semblait manquer d’air bien qu’elle fût étrangement calme. Elle songeait à cette partie qu’incombait son devoir envers la lignée Shar. Elle laissa un long soupir fuir ses lèvres entrouvertes.

- Qu’aurais-je à offrir à un héritier. Une citadelle à l’abandon et un monde sur lequel les Shar ne règnent plus ? (Elle grimaça son inconfort) J’irai parler aux hommes d’Hélios.

Shira poussa un soupir et ramassa la bassine à l’eau assouplie par l’huile miraculeuse, mais inefficace. Elle y avait laissé retomber le linge d’un geste contrarié et passa son regard de l’un à l’autre, les lèvres pincées. Aussi, parce qu’elle comprenait où était sa place, elle prit congé sans une parole de plus. Elle leur avait déjà exposé suffisamment son point de vue, qui devait sûrement faire écho à celui de son amant, Hélios. Ses pas résonnèrent contre les voûtes du plafond jusqu’à ce qu’elle quitte les appartements improvisés. Dana rejeta le drap qui couvrait ses jambes et glissa pour s’asseoir au bord du lit et faire face à Hope.

- Je suis pas très douée pour ça, pour parler. Je vais sûrement me taper la honte de ma vie, mais c’est toi le capitaine, alors je vais faire comme tu me recommandes de faire.

Nouveau silence et elle dirigea son regard vers la sortie avant de revenir à lui, sérieuse.

- Mais elle n’a pas tort. Je suis la dernière Shar. Il y a encore des choses que tu dois savoir sur Ch’Hodos, mais…si je m’éteins, il ne restera plus personne. On oubliera Shar Dakhan et Ch’Hodos sera définitivement aux mains de charognes comme Akusha. Ou pire, comme les Ashar qui revendiqueront clairement le pouvoir. Même Orcus pourrait ramener sa gueule de merde ici, sous prétexte qu’il était marié à ma sœur. Mais t’es pas concerné, je réglerai ça, je présume en temps voulu.

Elle hésita, agitant nerveusement ses doigts, puis se pencha pour plaquer ses lèvres contre le front du Sith dans un baiser bref et tendre, comme si elle voulait se faire pardonner de quelque chose et qu’elle-même ne savait pas quoi.


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Les miliciens et les esclaves s’écartaient, pâlissant. Des mains nerveuses frôlaient des blasters, prêts à dégainer pour se défendre. Au plus haut de la petite assemblée, Hélios et ses lieutenants s’écartèrent à leur tour. L’ombre imposane du Nexu contourna la console de fortune dressée en plein milieu de la grande salle antique. Sa queue fine glissa sur les câbles qui la reliaient aux générateurs. Plus loin, sous un puits de lumière naturel, la silhouette de Dana flottait sur un siège taillé dans la roche sombre et pourpre de la montagne. Luis grogna, mais elle le contrôlait parfaitement. A sa cheville, la lanière de cuir avait disparu. Elle avait fait don à Shira, au cas où. L’autre moitié, était toujours au poignet de Lloyd Hope qui était debout à ses côtés. Désormais, il n’y avait que la Force qui la liait à l’animal insolent et elle se voyait dans ses paires d’yeux rouges et dominantes. Elle avait ordonné qu’on le libère de sa cage dans laquelle il tournait en rond depuis trop longtemps et elle avait été obéie.


La créature se coucha docilement à ses pieds croisés et porta sur l’assemblée un regard dangereux. Mais Dana arrivait à frôler son esprit à sauvage et elle devinait des images réconfortantes dont Luis se morfondait.

Les rétines lumineuses de Shar se posèrent sur ces hommes et ces femmes, un étrange mélange de soldats, d’esclaves. Aucun Sith n’avait daigné la soutenir ou se soumettre à elle. Aucun noble de lignée Sith non plus. Elle décroisa ses jambes et se redressa. Shira avait passé un peu de blush écarlate sur ses joues pour chasser la pâleur flagrante de son sa figure. Elle semblait avoir repris des couleurs. Hélios aussi, était debout à ses côtés.

- Quand je reviendrai. Nous serons rassemblés dans la Forteresse de Shar Dakhan, et du haut de ses remparts nous jetterons tous les traîtres de Ch’Hodos, expliqua-t-elle d’une voix froide et tranchante qui inspirait plus de terreur que d’admiration. Ceux qui me suivront auront une place dans ce que Ch’Hodos redeviendra. Un monde Sith et pur.

Elle descendit les marches de pierre polie par les passages d’anciens souverains, si anciens qu’ils étaient désormais oubliés. Luis la suivit, parfois, il s’approchait de certains et montrait ses crocs, menaçant.

- Et ceux qui pensent à me trahir, ou à retourner leur veste. Je saurais qui ils sont. Et je les tuerai moi-même. Le capitaine Hope, apprenti du Castellan Noir, soutient également notre cause et nous octroiera des moyens. D’ici là, vous avez votre leader.

Et elle tourna son regard précieux vers Hélios qui se contenta d’un rictus complaisant.

- J’ai confiance en Hélios, il représente ma volonté. Suivez-le, jusqu’à mon retour. Il sait où il doit vous mener.



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Dès que le Sans-Visage s’arrima dans le secteur, sous le bouclier invisible de cette cité en ruine, Luis bondit sur la carlingue, impatient de retrouver le cockpit et sentant déjà l’odeur de Mumkin. La passerelle se déclencha dans la nuit sombre que quelques fanaux discrets perturbaient. Mais elle descendait trop lentement pour le nexu qui tournait en rond, grognant son mécontentement. Dana se détourna pour faire face à Hélios qui la sondait d’un regard à la fois défiant et déférent. Elle savait qu’elle n’en aurait pas fini avec Hélios, qu’il ne se contenterait jamais de reprendre la place qu’il avait eu, pas après tous les sacrifices qu’il avait fait au nom d’une princesse lointaine et en laquelle, il ne voyait désormais plus qu’une cause.

- J’abandonnerai pas Ch’Hodos. La milice de Listehol, censée combattre la résistance ne devrait pas trop t'inquiéter, mais ne les provoque pas. Ils ne sont pas ta cible
- Je sais pas si je dois m’en réjouir, mais on aura l’occasion d’en discuter, une fois la victoire acquise et Akusha tombé. Une fois que tu ne seras plus mariée. (Il jeta un regard vers Lloyd qui saluait déjà un Mumkin prudent face à la joie de Luis et revint à Dana). Personne ne peut régner sur Ch’Hodos sans la dernière Shar à ses côtés.
- Nous verrons, dit-elle simplement.
- Et le peuple n’acceptera plus un étranger dans ce rôle, insista-t-il en ramenant une nouvelle fois son attention vers Lloyd qui revenait vers eux.
- Je me suffirai à moi-même.
- Nous verrons, répéta-t-il avec une certaine arrogance avant de reculer pour admirer le Sans-Visage dans son entièreté et rejoindre les côtés de Shira qui venait d’apparaître.

Dana se tourna vers le hapien et lui offrit un sourire simple. Elle frôla sa main de la sienne, et le geste n’échappa à aucun regard attentif. Puis, elle détacha sabre et comlink de sa ceinture pour les lui tendre avec un geste cérémonial exagéré, s’amusant :

- Tu redeviens un égal, capitaine. J’espère que y’aura assez d’eau chaude dans ta cabine.

Et elle le contourna pour engager un pas assuré sur la passerelle du Sans-Visage. Luis bondit pour embarquer à son tour. Le dévaronien s’était déjà plaqué, dos à un mur et fit un petit signe pour saluer l’Inquisitrice.










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