- « Vorkosigan, le commandant Vorrst veut vous voir. »

Dit-on froidement à travers la lucarne de la porte de la cellule du Jedi avant que celle-ci ne coulisse. Deux soldats en arme et un officier en tunique noir, calot sur la tête apparurent dans l'encadrement de la porte face à un Leto Vorkosigan planté debout, au milieux de quatre mètres carré de pièce vide et sombre, les mains entravées d'une paire de menotte magnétique. Il était démuni de ses effets personnels. On lui avait confisqué sa bure, sa ceinture utilitaire, et pire encore, son sabre-laser lors de son arrestation. Mais il savait rester digne. Il toisait sans coup férir ceux qui lui rendaient visite dans sa cellule, silencieux, de marbre. Il savait que c'était la Force qui avait ordonné le cour des évènements, et qu'il devrait s'y plier.

Avec le temps et l'expérience, il avait apprit à ne pas se laisser aller à la fatalité. Cela lui était arrivé plusieurs fois dans sa ''jeunesse'', il avait constaté bien vite les manquements et les échecs qui découlait d'un tel manque de constance. Depuis, il en avait fait son point fort premier. Sa détermination n'était plus à prouver, rare était ceux capable de le mener jusqu'au désespoir et à l'abandon.

Pourtant, cette fois-ci, Leto Vorkosigan, Maître Jedi et Ministre de la Justice de la République doutait. À son grand regret, il n'avait put aller jusqu'au bout de ce qu'il avait entamé. Désormais, des dizaines de questions sans réponses se bousculaient dans son esprit. Mais pas une ne concernait véritablement son avenir, de savoir si dans la minute qui suivrait il aurait toujours la vie sauve. Qu'était-il advenu de Sarlions, Kessel et Galdur une fois qu'ils furent mis en état d'arrestation ? Et qu'était-il advenu de Rhino, le soldat impérial blessé. Starwolf et Maximus avaient été assez malins pour endormir la vigilance de tout le monde et ainsi piégé Leto, mais avaient-ils été assez cruels et égoïstes pour laisser mourir leur camarade afin de réussir leur mission ? Mais tout cela n'était rien face à la situation de Felucia qui restait en grave danger de cataclysme.

D'après les calculs du Jedi, cinq nouvelles heures s'étaient passées depuis son arrestation, soit huit heures au total. Les astéroïdes devaient dés lors être tout proches, à même d’effleurer l’atmosphère de Felucia, provoquant probablement d'extrêmes perturbations à la surface de la planète. Température en constante élévation, pression de l'air inhabituellement forte, séismes et mouvements des plaques tectoniques, bouillonnement et évaporation des surfaces d'eaux douces, panique chez la faune qui se rendait compte bien mieux que quiconque qu'ils étaient tous voués à la destruction...

Leto chassa cette idée de sa tête lorsqu'il fut temps de se mettre en route. Si il y a bien une chose qu'on lui avait apprit en devenant Jedi, c'est qu'il y avait toujours de l'espoir, en tout cas jusqu'à temps qu'on soit bien certain que tout soit terminé. En attendant, voilà de quoi lui occuper l'esprit différemment. Il fut escorté à travers les coursives grisâtre du croiseur impérial, les murs criblés d'une multitude de lampes laiteuses en forme de rectangle et les portes blindées octogonales s'ouvrant à l'approche du groupe.

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Lorsqu'il fut arrivé sur le pont de commandement, il fut accueilli par un officier qu'il reconnut aussitôt. Grand, une fine moustache lui barrant le visage, un teint clair, des yeux verts perçants et concentrés, des épaulettes impeccablement taillées et serties de gallons de cuir impressionnants, il s'agissait du commandant Vorrst, Humain originaire de la planète Metalorn.

Lui et Leto s'était déjà rencontrés une heure plus tôt, dans la salle de communication où il avait put assister, de façon très surprenante à l’interrogatoire musclé du Moff Kreing, l'homme que Leto et ses compagnons étaient partis chercher sur Felucia. Ainsi, Leto avait put suivre toute les révélations sinistres du Moff et combler les zones d'ombres de cette triste histoire. Le commandant, bien qu'impérial était lucide et loyal, il accueillit le Ministre avec respect. Il savait de toute façon qu'il n'aurait pas le choix si il voulait faire ce à quoi il penser :

- « Monsieur le Ministre.

- Commandant. Un silence vint se déposer sur le pont de commandement du croiseur, touts les officiers et techniciens réunis ici étaient suspendus aux paroles que pourraient s'échanger les deux individus, bien conscient de la situation critique dans laquelle ils se trouvaient.

- Nous n'allons pas tergiverser plus longtemps, je vais être clair, nous avons besoins de vous. Leto observa autour de lui. Voici le topo. Le commandant fit apparaître une petite carte holographique du secteur Nilgaard, là où se trouvait la planète Makem Te. Leto put y voir les différentes manœuvres de la flotte républicaine au prise avec les vaisseaux impériaux pendant la première partie de la bataille qui s'était déroulée pendant qu'il était sur Felucia. Nous vous avons préparé un rapport complet des opérations si vous voulez vous informer.

- Qu'attendez-vous de moi ?

- Monsieur le Ministre... je ne pensais pas dire cela un jour, surtout à une figure comme vous, mais … il enleva son calot pour venir l'accrocher à sa ceinture. Je ne veux pas de la guerre. Personne ici ne la veut. Déclara-t-il en désignant les techniciens alentours en écartant les bras. Vous pouvez croire ce que vous voulez de l'Empire et de ses forces armées, mais je suis persuadé que la vocation d'envahisseur cruel et de tyran despotique que les diplomates républicains nous prêtent est erronée.

- Vous savez quel est le fond du problème, nous le savons tous.

- Tout cela n'est que politique, l'Empire ne désire qu'une chose, pouvoir se développer et garantir à ses citoyens une vie décente et la sécurité pour tous. Nous ne sommes pas tous des Sith. L'erreur de tous nos dirigeants depuis des centaines d'années a été de leur faire confiance et de s'allier à eux, de gré ou de force d'ailleurs, mais jamais nous n'avions véritablement voulu Artorias, Byss, Dubrillion... pas plus que nous ne voulons Makem Te aujourd'hui.

- Ne croyez-vous pas qu'il est un peu tard pour dire que vous ne vouliez pas tout cela. Déjà tant de gens innocents sont morts.

- Il n'est jamais trop tard pour essayer de réparer les choses. Le commandant s'approcha de Leto et ordonna à son escorte de soldat de regagner son poste, très vite, les deux individus furent isolés au centre du pont de commande.

- Il n'y a plus rien à réparer, il faut repartir de zéro ou aller ailleurs. Répondit Leto, sardonique.

- Le terme n'est peut-être pas tout à fait adéquat, mais je suis persuadé qu'un Jedi comme vous, qui privilégie la vie avant tout a comprit là où je voulais en venir.

- À qui vous adressez-vous, au juste ? Le commandant soupira, résigné plus que jamais à demander l'aide de Leto.

- En théorie, au Jedi, pour accompagner l'idée que j'aimerai véhiculer, en pratique au Ministre pour modeler les mentalités, convaincre et user de son influence.

- De la politique. Le commandant eu un rictus, bien conscient que Leto faisait miroiter face à lui une de ses répliques qu'il avait eu quelques secondes plus tôt.

- Je sais que vous ne voulez pas la guerre, pas plus que moi, pas plus que le père de famille qui s'occupe d'une ferme et de ses enfants au fin fond de Chandrila.

- Cette fois-ci, je ne crains que l'Empire n'ai été trop loin. Ce qui se passe notamment sur Felucia est trop grave pour qu'on se contente d'en rester là. Et cela, vous savez que ce n'est pas de mon ressors. Les Jedi ne voudrons pas de la guerre, mais si la République se sent de plus en plus en danger, elle attaquera.

- Kreing est une ordure, mais il s'est fait abusé ! Par pitié admettez-le, et la situation sur Makem Te est des plus particulières. L'entrée en scène de Borenga a tout chamboulé, impossible dans ces conditions de déterminer qui à raison et qui à tord ! Je vous en conjure, dans le doute, ne nous déclarons pas la guerre mutuellement, c'est le meilleur moyen de rendre les choses encore plus chaotiques qu'elles ne le sont déjà. La ferveur de l'impérial était des plus saisissante, ses effluves émotionnelles pleines de sincérité englobaient les alentours proches comme autant de vagues d'écume sur le bord d'une plage.

- Borenga, le dénominateur commun à tous nos soucis … Soupira le Jedi. Que voulez-vous de moi ?

- Nous savons qu'un grand sommet galactique pour la paix se tient actuellement à bord de la station spatiale Star Home, propriété du consortium d'Hapès. Des représentants et hauts dignitaires républicains, neutres et impériaux y sont réunis pour parlementer sur l'avenir, sur les oppositions de nos camps. Il se dirigea précipitamment vers la console de communication qu'il avait tout proche de lui pour l'activer. Mais d'après nos derniers rapports, les négociations ont tournées court après que la situation ai dégénérée autour de Makem Te. La délégation impériale à semble-t-il quitté les lieux, mais les républicains sont restés. Nous craignons qu'ils ne soient décidés à ordonner des manœuvres hostiles à travers toute la galaxie en représailles. Le commandant tourna la tête vers Leto. Je vous en prie, parlez-leur, si ils veulent la guerre, essayez de les en dissuader. Leto hocha la tête et s'approcha de la console à son tour.

- Si je garde ces menottes, ils ne seront jamais convaincus de votre manœuvre, ils croiront que je suis contrains à parler sous la menace. Dit le Falleen en levant ses poignets entravés devant son visage. Le commandant l'observa un instant, non sans une ombre de suspicion dans le regard puis ordonna à un soldat tout proche de lui retirer les menottes.

- Nous allons nous brancher sur la fréquence du Star Home, une telle station doit avoir une signature unique qui lui est reversée, elle ne sera pas compliquée à trouver. » En effet, après quelques secondes de recherche par l'ordinateur, l'écran se vit parcouru de code bleuté et une transmissions put débuter. Une petite sphère holographique vide apparut au dessus de l'écran, Leto ne savait pas sur qui il allait tomber, puis après quelques grésillement, un visage étonnamment familier lui vint.

Il s'agissait de Wen Janto, malgré son teint bleu, les lézardes holographiques qui lui parcouraient le visage, sa fatigue apparente et sa voix légèrement discordante, il aurait put la reconnaître entre mille. L'une des seules amies, en tout cas la plus fidèle et la plus proche que pouvait avoir son Padawan au sein de l'Ordre Jedi. Élève de la célèbre Alyria Von avec qui il avait aussi sut tisser des liens solides et sincères. Rien n'aurait put lui faire plus plaisir à cet instant que de voir le visage d'une personne à qui, il le savait, il pouvait accorder sa confiance sans condition.

Leto ne tarda pas à voir dépasser, sur le côté inférieur gauche de la retransmission holographique le sommet de la tête d'une autre jeune fille. Des cheveux argentés, des oreilles félines, un regard malicieux, une apparence juvénile trompeuse, nul doute qu'il s'agissait de la Padawan Loreline Shi'va qu'il ne connaissait à vrai dire pas très bien. Il aurait tant voulu savoir comment ces deux jeunes gens se sont retrouvées dans un pétrin qui semblaient les dépasser littéralement – qui dépassait quiconque dans cette fichue galaxie de toute manière lui y compris, mais il n'en avait pas le temps. Sa curiosité devait passer après son devoir, aussi présenta-t-il ses excuses silencieuses à Wen et Loreline pour la brutalité de son approche.

- « Wen, Loreline, heureux de vous voir saines et sauves. Saine et sauve ? Leto se doutait-il qu'elles avaient été en danger ? Pas véritablement, non, mais avec tout ce qui se passait sur Makem Te, Felucia, et aux alentours de la voix Perlemienne, il lui semblait de bon tons de déclarer ceci. Juste au cas ou. Je vais devoir être bref et direct, d'avance je m'en excuse. La galaxie traverse en ce moment même une crise, peut-être que vous êtes déjà au courant. Sur la voix Perlemienne, loin de Coruscant, aux abords du territoire impérial se joue une terrible bataille. Résumer la situation serait délicat et nous n'avons pas beaucoup de temps, vous allez devoir me venir en aide pour tenter de sauver la galaxie. Sauver la galaxie ? Carrément, Leto ? N'avait-il pas peur que déclarer cela de but en blanc ne fasse paniquer les jeunes filles qu'il avait en face de lui ? Certainement pas. Il savait que Wen était l'élève d'Alyria, et qu'elle lui avait certainement appris la maitrise de soi, la vaillance et la droiture avant toute chose. Il ne savait pas de quoi était capable Loreline, mais son profond regard espiègle cachait une véritable force de caractère et il espérait que celle-ci lui permette de garder son sang froid lors des moments cruciaux. Par ailleurs, sa proposition de lui faire un rapport des évènements sur le Star Home l'intéressait hautement, il salua la présence d'esprit de la Padawan et il accueillit la proposition de la jeune Cathar avec concentration. Bonne idée Loreline, je t'écoute. Après avoir entendu le résumé des faits s'étant déroulés sur le Star Home, Leto reprit la parole. Je vous expliquerai plus amplement les tenants et aboutissants de ceci si vous y tenez, plus tard. En attendant, voici notre objectif, je dois entrer en contact avec touts les dignitaires et représentants républicains à bord du Star Home. Le "gratin" qui y est présent représente une forte influence politique au sein de notre société, je dois les convaincre que la guerre et les représailles irréfléchies et précipitées ne sont pas les bonnes solutions. Vous, vous devez pirater le système de communication du Star Home afin de me permettre de m'adresser à ces gens là en direct. J'ai besoin d'avoir accès aux écrans, terminaux, haut-parleurs, holocom, comlink, personnels et publics de toute la station afin de m'adresser aux maximum de gens possibles. Mais de là où je suis, je ne peux rien faire d'autre qu'attendre et parler, c'est vous qui devez me donner accès à touts ces appareils de communication. Le temps presse, voyez ce que vous pouvez faire de votre côté, je garde le canal ouvert... que la Force soit avec vous. »

Leto se tut, puis se redressa au dessus de la console de communication et échangea un regard circonspect avec le commandant Vorrst. L'impérial lui rendit son regard et hocha silencieusement la tête. La tension était à son comble.