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Le vaisseau atterrit en douceur sur l'aérostation. Wen repoussa légèrement la capuche de sa bure padawan couleur de terre pour mieux lancer un dernier regard sur le paysage. Coruscant demeurait l’éternelle ville géante qui fourmillait d’activité. Depuis combien de temps n’y avait-elle pas mis les pieds ? Dix ans ? Plus ? Fut un temps elle accompagnait son père tout juste promu au sein du sénat, découvrant avec toute la curiosité d’un enfant de six ans un nouvel environnement aussi terrifiant que fascinant. Elle avait comme une sensation de cœur qui se serre, comme toujours quand elle pensait à ce passé révolu. Elle n’avait pas prévenu son père qu’elle était à Coruscant. Le temple désapprouvait les rencontres avec la famille, tout ce qui relevait de l’attachement était perçu comme une gêne dans la formation de jedi. La vie de padawan était un long sacerdoce.

- Nous sommes arrivés, l’informa un membre du personnel du vaisseau de plaisance qu’elle avait empruntée avec un chaperon chevalier qui faisait le même voyage qu’elle.

Wen tourna un regard doucement rêveur vers l’homme et le remercia. Elle saisit le sac simple qui comptait le peu d’effets nécessaires à ses récents voyages, vérifia la présence de son sabre à la ceinture et se dirigea vers la sortie du vaisseau. Elle rajusta au passage sa capuche, elle n’aimait pas s’afficher trop clairement comme jeune jedi. Elle revenait d’une planète agricole qui abritait le quartier général d’un corps jedi. Elle avait décidé de découvrir les multiples applications de la Force qui traversaient l’ordre pour approfondir ses connaissances, car les corps étaient considérés comme beaucoup d’apprentis comme un enseignement de seconde zone, secondaire et médiocre qui s’occupait de ceux qui n’avaient pas eu la chance d’être choisi par un maître. Mais Wen avait conscience que malgré le temps passé sans mentor, elle n’avait pas été envoyé dans les corps parce que son entraînement avec Eyon Tarr était trop avancé pour qu’elle change de voie.

La pollution lui bloqua la respiration. Les planètes agricoles ou Ondéron étaient des planètes vertes. En comparaison l’air de Coruscant était irrespirable. Et le bruit, la circulation, les cris sans cesse… Elle aurait besoin de quelques jours pour s’habituer à ces lieux. L’endroit lui semblait déjà bouger bien trop vite alors même qu’elle n’avait fait que trois pas sur la plateforme d’atterrissage. La jeune nautolan reprit ses esprits et alla à la rencontre de la jedi qui l’avait accompagné. Cette dernière discutait avec un agent de la république venu pour l’accueillir.

- Je vous remercie d’avoir veillé sur moi maître Lok’tar, dit-elle avec modestie en s’abaissant légèrement, comme elle faisait toujours.

L’imposante chagrienne lui fit un sourire aimable, la Force formait comme un halo lumineux autour d’elle. Il était impossible de lui donner un âge précis tant tout dans son apparence jusqu’à ce qu’elle émettait semblaient hors du temps. Elle savait cependant que Diena Lok’tar était plus âgée que beaucoup de maîtres jedi, pas autant que Sai Don toutefois, ce qui faisait d’elle un maître jedi respectable bien que discret.

- Le voyage fut agréable, bien que je n’apprécie que peu Coruscant. Trop de bruits, trop de conflits, même la force ne semble savoir où en donner de la tête (elle fit un rapide clin d’œil à la jeune apprentie jedi). Quelle est la prochaine étape de ton voyage, padawan Janto ?

- Je pense rejoindre l’hôpital central. J’ai appris qu’Alyria Von était en convalescence là-bas.

Maître Von… Il s’était passé tant de choses durant ses derniers mois. Elle était devenue la personne la plus importante de la république. Chancelière et maître jedi. Deux responsabilités immenses sur une seule personne. Certes l’une des personnes que Wen estimait le plus et qu’elle savait à même de remplir ses fonctions, celle qui en était le plus capable. La padawan n’avait suivi que de loin les évènements qui avaient suivi Byss, entre la traîtrise de Lord Janos et l’assassinat de Valerion Scala, la politique semblait s’être abîmée dans la plus étrange des périodes. Alyria s’était retrouvée Chancelière pour la transition, sans pour autant avoir désiré un tel rôle. Elle avait dû être bien trop occupée.

- Alyria Von, c’est vrai, répéta maître Lok’Tar, le visage pensif mais insondable. Laisse-moi te commander un transport, ce sera plus rapide, sur le compte de l’ordre Jedi.

- Je vous remercie grandement de votre générosité, Maître.

Wen n’était pas resté en reste ces derniers mois non plus. Elle avait ensuite visité les corps guérisseurs, ceux-là mêmes qui aidaient les forces armées sur le champ de bataille. Ils se distinguaient par une connaissance aigüe du corps, que ce soit de celui des humains ou de nombreuses autres espèces. Ils étaient aussi savants que des médecins, et leurs esprits savaient devenir aussi précis que des scalpels. Leur art était d’une grande complexité et nécessitait des années de formation, demandait l’alliance d’une formidable mémoire, d’un sang-froid extraordinaire et d’une intuition fulgurante. Elle avait pu rencontrer les corps des savants, des sages et des intellectuels, archéologues, historiens de la force de linguiste. Elle avait effleuré des ouvrages millénaires écrits dans des langues que seules quelques dernières personnes parviennent à déchiffrer, entendu des légendes qui dépassaient l’entendement, frôlé des artéfacts si anciens que le simple toucher pouvaient les faire tomber en poussières. Puis elle avait voyagé jusqu’aux planètes agricoles. Elle avait pu apprendre à reconnaître et identifier la Force qui nourrissait la terre. Des millions de personnes dans la galaxie étaient nourries grâce aux talents des corps agricoles, qui étaient devenus experts dans le maniement de la vie. Quel étrange usage.

Diena Lok’Tar la quitta peu après un dernier salut respectueux. Quelques instants plus un véhicule taxi standard se présenta à l’entrée de l’astroport. Wen s’y engouffra, toujours songeuse. Elle indiqua sa destination au chauffeur. Elle recouvert son sabre de sa cape. Quelques mois avaient à peine suffi pour tout voir et tout faire, pour tout découvrir et tout respirer. Mais elle avait mûri. Elle avait grandi. Elle n’avait que peu progresser mais elle avait l’impression de mieux saisir les multiples formes que prenait la Force dans l’Univers. Qu’elle était à la fois unique et plurielle. Coruscant battait comme un cœur multiple. Il était curieux de voir comme chaque planète avait sa propre résonnance dans la Force. Ici elle était si dense qu’elle en devenait difficile à lire. Le côté Obscur pouvait s’y cacher aisément. Elle avait entendu dire que d’autres planètes comme Nar Shaada faisaient cet effet particulier.

Le véhicule stoppa. Wen jeta un œil à l’extérieur. L’hôpital ne différenciait pas vraiment des autres bâtiments de la planète. Elle remercia le chauffeur et sortit. Il avait été payé d’avance. Comme toujours dans les endroits où il y avait de nombreux blessés et avec encore plus d’intensité depuis qu’elle était revenue des corps, la détresse des sentients la frappa de plein fouet. En tâchant de rien en laisser paraître, elle passa les portes automatiques qui émirent un bruit électronique sur son passage comme une sorte d’alarme. Un immense Cathar manqua de lui bondir dessus.

- Veuillez-vous débarrasser de toutes vos armes, gronda-t-il en désignant d’un signe de tête peu affable un panneau qui affichait un Blaster zébré d’un trait rouge.

- Je suis une padawan, rétorqua calmement Wen, je n’ai que mon sabre sur moi et c’est ma vie. Vous savez comme l’ordre lutte chaque jour pour le bien des citoyens. Je rends visite à mon maître qui revient des batailles contre l’empire.

Le Cathar douta. Il lui demanda de patienter, le temps de communiquer avec un supérieur. Ce dernier, un Duros en blouse blanche, ne tarda pas à arriver en chair et en os, le ton servile. Il expliqua que c’était la règle, que les armes étaient dangereuses et qu’un incident était vite arrivé. Il suffisait qu’un patient traumatisé la voit, qu’un déséquilibré l’attrape et on virait à la catastrophe. Wen dut reconnaître le bien-fondé. Elle donna son sabre de padawan, on lui assura que ses affaires seraient solidement gardées. Mais qui allait-elle voir plus particulièrement.

- Alyria Von, maître jedi et chancelière de la République, répondit la nautolan avec une once d’orgueil dans la voix. Nous sommes liées par une promesse.

Le duros sembla un peu embarrassé, comme si seuls les hauts dignitaires avaient une raison valable de rencontrer la chancelière alors qu’elle avait besoin d’être au calme. On la fit patienter. Wen médita dans la salle d’attente sous les regards curieux des autres personnes qui attendaient, blessés qui devaient patienter pour qu’une place se libère au sein des chambres et couloirs constamment engorgés ou simples visiteurs, familles et proches, l’air inquiets, souvent livides et se tordant les mains jusqu’à la douleur. Tout le monde avait vu son sabre et savait le rôle qu’elle jouait donc, mais personne n’osait l’approcher. Les jedi avaient toujours été entourés de ce mélange troublant de respect et de crainte. On vint la chercher quinze minutes plus tard.

- Alyria Von est prête à vous recevoir.

Elle monta dans un ascenseur jusqu’à un étage très haut et très sécurisé, mais elle n’était pas au bout de ses peines. Elle passa des contrôles de sécurité, identité, même dans une sorte de détecteur de Force Obscure (comment était-ce seulement possible). Seulement après elle put afficher un sourire resplendissant à la vue de la chevelure rousse et du visage caractéristique des Happiens d’Alyria Von.
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Le retour d’Aargau avait été long… Et les événements qui avaient suivi tumultueux. Alyria savait qu’elle avait une pile de dossiers à régler, et pas des moindres, certains étaient d’ailleurs soigneusement consignés dans un datapad qu’elle consultait actuellement, la mine soucieuse. Les médecins avaient bien essayé de lui faire comprendre que la phrase repos complet incluait de ne pas avoir d’activité potentiellement stressante, elle n’en avait eu cure. La Chancellerie n’allait pas tourner seule, et elle n’allait pas laisser le malheureux Alan seul à bord. Blessée ou pas, elle accomplirait son devoir jusqu’au bout. Il en allait de son honneur de Maître jedi.

Sur le plan strictement médical, la gardienne s’était assez rapidement remise. Il fallait dire qu’elle était d’une constitution robuste, et surtout, que les années passées à s’entraîner et à parcourir la galaxie lui avait donné une résistance naturelle à la douleur. Comme toutes les personnes sensibles à la Force et ayant appris à se servir de ce lien à des fins curatives, elle avait également une capacité de régénération cellulaire largement au-dessus de la moyenne classique, et qui avait été augmentée par ses soins en raison de son expérience en matière d’automédication.

Ce n’était pas un hasard si, malgré son étiquette de guerrière avant tout, un certain nombre de jedis venaient la consulter pour des cours sur la Guérison. Alyria, de par sa connexion à la Force vivante et sa maîtrise toute en précision de cette dernière, était une guérisseuse qui avait pris de l’assurance avec l’expérience, et qui était, de l’avis de beaucoup, naturellement douée dans cet exercice pourtant difficile, surtout pour les non-consulaires. Cependant, pour la trentenaire, au contraire, il était du devoir de ceux risquant leur vie sur le terrain de savoir se soigner seuls. Les médecins étaient rarement derrière chaque combattant, et tous les hommes et femmes lancés dans une bataille devaient connaître les rudiments nécessaires à leur survie. C’était pour cela qu’elle avait insisté tout au long de son passage au Ministère de la Défense pour revaloriser le rôle des médecins militaires, améliorer leur formation et enseigner les bases à tous les soldats républicains. Sacrifier des vies pour gagner une guerre était inévitable. Cela ne voulait pas dire qu’il était du coup nécessaire de ne pas tout mettre en œuvre pour éviter, justement, d’en perdre. Moins il y aurait de mort, mieux ce serait. Telle était sa devise.

Globalement, son état de santé avait rapidement cessé d’être préoccupant. Il fallait maintenant attendre que le processus de guérison naturel finisse le travail entamé par ses propres pouvoirs et les bons soins des médecins républicains. Il y avait une limite à ce que la science et la Force pouvaient accomplir, et Alyria savait que pousser trop son organisme aurait des conséquences néfastes à terme. Aussi elle laissait les os se ressouder, les brûlures se résorber. Seuls des bandages sur ses bras témoignaient encore de la violence du choc qu’elle avait enduré, puisqu’on lui avait enlevé son attelle au bras la veille. Pour ses côtes, il n’y avait pas de miracle : du repos était nécessaire, mais le tout s’était résorbé sans aucune complication. Une chose était sûre : la Chancelière était bientôt prête à reprendre du service… Enfin, même si elle n’avait jamais réellement quitté la direction des affaires, conversant presque tous les jours avec son Vice-Chancelier et les ministres déjà en place, ainsi qu’avec d’autres candidats potentiels pour remplacer ceux qui avaient décidé de quitter le navire… Bref, sa convalescence restait éminemment occupée par la politique.

Cependant, elle avait tenu aussi à s’enquérir d’autres choses, notamment concernant le Temple… Et une en particulier avait attiré son attention. Wen Janto, la jeune nautolane qui avait attiré son œil de professeur peu avant son départ pour Byss, avait été transférée sur Coruscant. Alyria avait sérieusement songé à la prendre comme padawan, mais sa nomination au poste de Ministre, allié au départ de la jeune fille pour une destination qu’elle ignorait, avait mis un terme à cette ambition. Pourtant, quand elle avait appris que l’adolescente était à présent sur la capitale, et avait demandé à la voir, malgré sa situation, la maîtresse d’armes avait accédé à sa requête, et prévenue le service de sécurité plus que conséquent autour d’elle désormais de sa venue, afin qu’ils la laissent passer sans barguigner.

Quand elle vit la jeune fille s’encadrer dans la porte, Alyria sentit une bouffée de sympathie l’envahir. Wen était telle que dans ses souvenirs, mais paraissait… Changée. Plus mûre peut-être après cette année en dehors d’Ondéron. En tout cas, il y avait quelque chose dans son aura de Force qui était clairement différent, même si la trentenaire n’aurait pas su dire quoi immédiatement.

En tout cas, elle lui adressa un sourire chaleureux, et essaya de se redresser sur ses oreillers, la mine fatiguée, mais soudainement ragaillardie :

« Wen… Ça fait longtemps… J’espère que tu vas bien. »

Mieux qu’elle sans doute, c’était évident. D’un signe de tête, elle fit signe au colosse blond qui ne la quittait presque plus depuis l’attentat sur Aargau :

« Major Olson, vous pouvez nous laisser. »

« Bien, Votre Excellence. »

L’homme sortit sans un mot supplémentaire, et referma la porte derrière lui, laissant les deux femmes à leurs retrouvailles. Alyria attendit un instant, puis enchaîna, s’adressant à nouveau à la padawan en face d’elle :

« Cette année en dehors d’Ondéron a-t-elle été… constructive ? »

En vérité, elle ne savait pas exactement ce qu’avait fait Wen. Elle savait juste que la nautolane n’avait pas été sur Ondéron ou Coruscant, et était curieuse d’entendre la jeune fille lui raconter ce qu’elle avait vécue. Pour un temps, elle était redevenue un simple maître jedi écoutant avec attention une apprentie… Et cette sensation familière lui fit un bien fou.

Même si la Chancellerie saurait fatalement se rappeler à elle.
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Wen osa à peine regarder l'armoire à glace qui se dressait sur sa droite, son bras aurait suffit à broyer son crâne de créature amphibie. Bien heureusement, l'intimidant major Olson quitta la pièce, toujours une expression renfrognée indéchiffrable sur son visage carré. Il avait appelé Alyria votre excellence, ce qui impressionna la jeune nautolane. Il était rare qu'un jedi, ce culte incompris du reste de la galaxie parfois, reçoive de tels honneurs. Mais à présent le maître Von était devenue l'une des personnes les plus importantes de la galaxie. La padawan s'approcha du lit à petits pas silencieux. La maître-d'arme paraissait fatigué, elle n'était pas malade toutefois et se remettait de ses blessures.

- J'ai entendu dire que vous aviez été héroïque, maître Von.

Comme toujours, avait failli ajouter Wen mais elle se retint. Déjà sur Byss elle avait apparemment dû affronter des seigneurs Sith en vadrouille et s'en était tiré avec succès. Et maintenant Aargau et la trahison de lord Janos. Wen n'était que peu au fait de la politique, ironique pour une fille diplomate et aspirant sénateur, mais la vie au temple ne poussait pas forcément les membres à s’intéresser de près aux bouleversements de la sphère rhétorique. En revanche, la création d'un temple sur Coruscant semblait être un symbole important des liens qui unissaient de plus en plus étroitement les jedi et la République. Cela signifiait-il donc qu'il serait plus simple de s'intéresser à la vie politique de la galaxie ? Elle n'avait pas encore eu le temps de faire un saut du côté de cette nouvelle enclave jedi et cette question demeurait pour l'instant en suspens.

- Je vais bien, affirma-t-elle à son mentor. Quitter la belle Ondéron pour des terres inconnues a quelque chose de vivifiant. Les longs voyages peuvent être fatigants mais découvrir les merveilles des corps jedi n'a pas de réel équivalent.

Elle avait été habituée à voyager par son ancien maître, Eyon Tarr, le jedi errant, chevalier qui sauvait la veuve et l'orphelin en parcourant la galaxie de long en large. Il n'y avait rien de meilleur que de ressentir de nouveau la liberté de partir et de découvrir autant que l'on le désirait cette immense galaxie.

- Je pense que partir dans les corps m'a permis de découvrir les différentes applications de la Force, certaines qui ne sont pas connues ou très peu par les jedi. Je trouve que j'ai beaucoup grandi. Notamment parce que j'ai rencontré beaucoup de personnes différentes par rapport au temple. En fait les corps mobilisent beaucoup le principe de la Force Vivante plus qu'autre chose, ce qui est bien différent de ce qu'on nous apprend habituellement sur Ondéron.

Les joues de Wen avaient sans doute un peu foncer en prononçant ces mots. Elle comprenait mieux pourquoi les corps étaient ostracisés par rapport au reste de l'ordre. pour Elle repensait à ce cours avec maître Fyëlen, elle voulait apprendre le pouvoir de guérison, ce qui n 'avait pas été très brillant puisque ce dernier avait une conception complètement différente de la Force par rapport à celle de son ancien maître. Ce dernier l'avait donc rabroué et cet enseignement entre des opinions contraires n’avaient pas été d'une efficacité remarquable. Étant donné sa fragilité physique par rapport à d'autres jedi du même âge, la nautolane avait trouvé stratégique de maîtriser cette technique en plus de la protection de Force qu'elle connaissait déjà. Elle s'était donc promis de retourner un jour dans les corps médecins pour y parvenir enfin, ou peut-être Alyria aurait-elle le temps de l'aider…

- Les agrocorps sont assez impressionnants de ce côté, poursuivit-elle avec passion. Ils sont capable d'utiliser la Force présente dans les plantes et la terres pour améliorer les cultures, rendre des planètes plus productives… Mais c'est un exercice complexe qui semble nécessiter beaucoup d'entraînement et une vision particulière que je n'ai sûrement pas. Même en observant les utilisateurs les plus doués les reflux de Force étaient bien trop subtils pour en saisir toutes les variations.

Wen espérait distraire un peu Alyria. Une chambre d'hôpital et de la paperasse ça n'avait rien de joyeux pour se soigner et se remettre.

- J'ai aussi beaucoup apprécier les medcorps. On m'avait toujours dit que la guérison par la Force était complexe, mais lorsqu'on m'a dit tous les dégâts que pouvaient occasionner un utilisateur sur un organisme, c'était vraiment terrifiant !

Elle avait suivi un cours en présence d'autres élèves un peu plus jeunes qu'elles, âgés entre 14 et 16 ans pour la plupart. Il y avait eu des patients qui s'étaient retrouvés avec des hémorragies internes, des lésions cancéreuses parce que la nature des tissus avaient été modifiés par erreur et beaucoup d'autres problèmes assez horribles qui heureusement étaient en général réversibles, du moins ceux observer en milieu hospitalier. Même des utilisateurs expérimentés pouvaient échouer et commettre des erreurs, car on touchait là à une discipline de la Force complexe et parfois imprévisible.

- Donc oui, conclut Wen pour arrêter de babiller et ne pas laisser maître Von crouler sous les informations, ce fut des voyages assez instructifs, même rester loin de vous a été difficile.

Elles n'avaient pas encore pu devenir officiellement maître et élève, ce qui était déchirant pour Wen après être restée longtemps sans professeur. Mais elle savait être patiente. Surtout que maintenant Alyria devait faire avec un amoncellement de devoirs bien supérieur à d'autres maîtres jedi. Décidément les voies de la galaxie étaient bien étranges. Quand elle reprit la parole, la padawan ne demanda pas si l'année d'Alyria avait été productive, ce qui aurait été proprement ridicle vu le palmarès accumulé par son mentor l'année passée.

- Et vous maître Von, vous vous remettez bien de vos blessures ? Les affaires de la République de sont-elles pas trop difficiles à porter ?

Wen s'inquiétait avec une réelle sollicitude. Alyria était une guerrière qui avait grandi dans un temple, avait combattu sur des champs de bataille, s'était entraînée au combat pendant la grande majorité de son existence. Malgré son charisme et son intelligence, elle n'avait pas été nécessairement préparée pour de telles responsabilités, elle n'en n'avait peut-être même pas envi, mais les jedi étaient également doté d'un sens du devoir et de l'abnégation propre à leur ordre. Wen poursuivit avec une lueur inquiétude dans les immenses balles de tennis noires qui lui servaient d'yeux :

- Nous avons gardé Aargau mais tout le monde parle de l'annexion de Dubrillion par l'empire Sith, j'ai l'impression que le côté Obscur tend à s'enhardir… Allons-nous respecter les traités jusqu'au bout ?

Elle n'avait pu s'en empêcher. Pourtant elle s'était dit que parler travail et politique n'était peut-être pas le plus agréable, mais elle avait vécu les événements récents de loin et son angoisse était réelle.
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Héroïque ? Le mot aurait pu la faire sourire, en d’autres circonstances. Oui, elle avait une nouvelle fois trompée la mort pour sauver des vies et mettre un terme à une conjuration dangereuse. Pour autant qu’en avait-elle retirée ? Hormis des blessures, strictement rien. Ah si pardon ! En guise de remerciement, une trahison qui l’avait profondément blessée. Autant dire que si elle ne regrettait pas son geste, qui avait permis de couvrir plusieurs personnes, en raison de son éthique de jedi, le mépris profond qu’elle éprouvait à l’égard du lâche politicien était sans borne. C’était le genre d’actes qui lui faisaient penser que ses pairs n’avaient pas tort quand ils disaient de se tenir aussi éloignés que possible d’un milieu vicié par la corruption et l’ambition dévorante. Grendo S’orn en avait été la preuve éclatante, et un souvenir qu’elle garderait longtemps à l’esprit. Dorénavant, elle serait sur ses gardes.

Aussi, elle ne put s’empêcher de souffler avec amertume :

« Je crains que l’héroïsme ne soit guère à sa place en politique. »

En fait, ce n’était même pas du tout le cas, et elle le savait parfaitement. Cela dit, apparemment, la simple reconnaissance n’en avait pas beaucoup non plus. Une bande de requins avides, prêts à s’écharper pour la moindre miette de pouvoir… Voilà ce que tous ces sénateurs étaient. Les exceptions étaient rares, les parts d’ombre toujours présentes. Enfin, de toute façon, on ne lui demandait pas son avis en tant que jedi, non ? Alyria avait oublié un bref instant que son rôle consistait à devenir la chair à canon d’imbéciles prônant la guerre sans rien promettre pour la mener à bien, mais ne craignant pas d’en appeler à la fidélité de ceux qu’ils allaient envoyer en première ligne sans aucun remords. Tous ces hypocrites la dégoûtaient. Oh oui, un jour viendrait où, les élections faites, elle partirait sans remord, abandonnant ce petit monde de rodomontades grotesques pour parcourir la galaxie sereinement, faire son devoir de jedi… Et oublier un temps les vicissitudes républicaines.

Chassant ses sombres pensées, elle écouta avec plaisir la jeune nautonale lui conter ses découvertes de l’année passée par le menu. Entendre un jeune s’émerveiller des possibilités des corps, d’avoir appris des usages de la Force insoupçonnés… Voilà ce pour quoi elle était faite, et Alyria eut tôt fait d’oublier ses ennuis politiques pour écouter attentivement Wen, souriant souvent en se remémorant ses propres séjours au sein des corps jedis, et les surprises qui avaient généralement accompagnées ces derniers.

Elle était heureuse de savoir que sa protégée avait apprécié cette expérience formatrice, aussi elle déclara avec un grand sourire aux lèvres :

« Je vois que tu as suivi mon conseil. J’en suis heureuse. »

Et à l’intonation de sa voix, à ses yeux verts qui brillaient d’une lueur nouvelle, nul doute que Wen pourrait aisément voir qu’elle était sincère. Sentir un lien dans la Force se tisser entre un padawan et un maître était l’une des plus belles choses dans la vie d’un jedi. Si Alyria avait pensé prendre la nautolane comme apprentie une fois sa mission sur Byss terminée, les événements en avaient décidé autrement, et elle en avait été sincèrement peinée, pensant que son travail en tant que Ministre était incompatible avec la tutelle d’une adolescente.

On aurait pu penser que le même raisonnement s’appliquait à une Chancelière Suprême. En un sens, c’était le cas. Si Wen était toujours partante pour devenir sa padawan, alors elle devrait comprendre que ce ne serait pas officiel tout de suite. La maîtresse d’armes préférait éviter à la jeune fille de devenir une cible éventuelle pour la cohue médiatique qui scrutait ses moindres faits et gestes. Du reste, elle savait que le Conseil se montrerait circonspect à l’idée d’une telle exposition, et elle partageait cet avis.

Cependant, cela ne signifiait pas que le duo officieux ne devait pas, maintenant que la nautolane était présente sur Coruscant, continuer à consolider leur lien noué plusieurs mois auparavant, afin que, le moment venue, toutes deux deviennent un tandem parfaitement rodé.
Alors qu’elle se faisait ces réflexions, Wen continuait sa tirade, l’air enjouée, et Alyria eut brusquement une vision d’elle-même à cet âge. Cette pensée la rendit un brin nostalgique des jours où elle croyait encore que son destin se bornerait à devenir un Chevalier jedi respecté. Que de chemin parcouru depuis… Que d’échecs et d’inattendu aussi.

Avec un petit rire, la gardienne déclara après le compte-rendu de Wen sur le Medcorps :

« Ah ah, oui, je m’étais fait la même réflexion lors de ma première visite dans le corps des guérisseurs. Ironiquement, dans mes souvenirs, Cannelle d’Este aussi… »

Le fait d’avoir le même âge que la responsable actuelle du Medcorps occasionnait forcément quelques petites connaissances amusantes.

« Mais d’un autre côté… La Guérison par la Force est une discipline fascinante, et bien maîtrisée, offre des résultats exceptionnels…. Et hélas, souvent vitaux pour notre survie. »

Elle en était un exemple frappant, et si les années avaient affiné sa maîtrise des techniques curatives de l’Ordre, elle avait payé le prix du sang pour parfaire ses connaissances, en devenant trop souvent la cible de ses propres soins.

Gentiment, la demi-echanie finit par dire :

« Si tu le désires, j’ai quelques connaissances dans ce domaine que je pourrais te transmettre, un jour. Avant ton séjour au Medcorps, tu avais déjà pris des leçons sur la Guérison de Force ? »

Mieux valait dévier la conversation, histoire qu’elle évite de rougir face au compliment adorable de sa jeune padawan. Comme quoi, malgré tous les compliments dont on lui abreuvait les oreilles au Sénat, il était bien plus agréable selon elle d’avoir la reconnaissance et l’admiration simple d’une nautolane de dix-huit ans. Une affaire de priorité sans doute.

Avec un mince sourire, elle répondit aux questions de sa padawan, ne désirant pas l’inquiéter outre mesure, d’où l’adoption d’un ton plaisant et faussement désinvolte :

« Oh, je suis du genre coriace… Les maîtres d’armes sont durs au mal, alors, ce n’est pas bien grave, je me remets lentement, mais sûrement. Je préfère laisser la guérison se faire aussi naturellement que possible, pour laisser la nature suivre son cours sans la forcer.
Et cela me donne l’occasion de réfléchir plus posément aux affaires de la République. Une occasion en or, donc ! »


Afin de ne pas inquiéter la jeune fille, mais également à cause de la raison d’Etat, elle ne s’épancherait pas sur ses sentiments plus que mitigés à l’égard de sa charge. La Chancelière se devait d’être forte. C’était son credo depuis son accession à la plus haute fonction de la République, et elle n’en démordrait pas. Quant à sa dernière question…

« A vrai dire, la bonne formulation serait plus : maintenant que les siths ont de facto rompu le traité, allons-nous continuer à les laisser menacer des peuples innocents ? »

Selon elle, cette version était plus proche de la vérité.

« Avec l’installation d’une base militaire secrète, la souveraineté de la République a été mise à mal. Sincèrement, le gouvernement essayera dans la mesure du possible de préserver la paix. Mais les faits sont ce qu’ils sont, et je ne puis promettre davantage. »

Sa conclusion était bien sombre, mais hélas réelle…
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Wen fronça le front car elle n'avait pas de sourcils, le drame des créatures amphibies, en remarquant à quel point Alyria semblait fatiguée de son rôle politique. La padawan n'avait passé que quelques années avec son père dans le sénat et les vastes bâtiments qui encerclaient ce dernier. Elle n'avait que de vagues souvenirs des murmures dans les couloirs, des drames, des larmes, des poignards dans le dos. Elle devait avoir 5 ou 6 ans et sautillait joyeusement aux côtés de son père dans les larges avenues, sans prêter attention aux histoires qui l'entouraient, plongée dans l'insouciance des jeunes enfants. Elle se demanda quels sortes d'ennemis Alyria avait dû affronter. Etait-il plus simple de se battre avec des mots ou avec un sabre ?

- Quelqu'un vous a trahi ?

C'était la théorie la plus envisageable, mais il était difficile pour Wen sans demander directement. Elle était curieuse de voir par quelles épreuves le maître-d'arme était passé pendant qu'elle voyageait à l'autre bout de la galaxie. Elle gardait cependant un lointain souvenir, celui de son père qui lui racontait l'une de ses désillusions, quand il était plus jeune et commençait sa carrière. Il avait perdu son premier poste important face à un ami d'enfance en qui il avait confiance. Depuis, il s'était toujours montré d'une prudence extrême derrière un sourire de façade et des relations souvent superficielles et plus basées sur les intérêts que les affinités réelles. C'était un monde cruel s'il en était.

Alyria avait souri quand Wen avait évoqué ses aventures dans les corps. La nautolane était ravie d'apporter un certain réconfort pendant que la maître jedi se remettait de ses blessures. Elle sentait un lien particulier avec cette dernière, elle ne parvenait pas à mettre des mots dessus. C'était juste quelque chose de naturel, même si pour l'instant la création d'un binôme officiel était fortement compromise. Wen commençait à croire que la Force avait mis une sorte de malédiction au-dessus de ses tentacules et qu'elle ne connaîtrait sans doute jamais une situation stable ou un parcours classique et sans embûches. Mais elle se disait souvent avec philosophie que les jedi dotés du chemin de vie idéal et sans encombres ne courraient pas les rues.

- Cela fait déjà quelques temps que je cherche à parfaire mes connaissances et mon talent talent pour la guérisons et ces derniers sont restés bien maigres, admit la nautolane avec un bref sourire. J'ai déjà eu un cours avec le professeur Fyelen, et ce ne fut pas très concluant.

Avec le recul ce qui s'était passé à ce moment-là prêtait plus à sourire qu'autre chose. Incompréhension entre générations, tempéraments différents et philosophies de la Force opposées. Wen en avait conclu que l'enseignement du maître jedi n'était tout simplement pas adapté à ses besoins. Ils étaient éducationnellement incompatibles et il était certain que le maître Gabriel n'aurait jamais choisi Wen comme padawan naturellement, et se retrouver sous l'égide d'un tel homme aurait été une torture continuelle. Pourtant elle avait apprécié son cours sur la philosophie de la Force, même si dernier lui avait démontré d'une manière criante que la Force Vivante était loin de remporter tous les suffrages au sein du Temple.

- Il n'aimait pas beaucoup ma façon de considérer ou d'utiliser la Force, précisa-t-elle après un court silence et avec un petit rire nerveux. Je pense me souvenir qu'il m'avait même dit que lorsque je l'utilisais, c'était d'une manière très proche du côté Obscur, ce qui était plutôt surprenant puisque jamais je n'ai rencontré de réel Sith, même pendant mes voyages plus jeune alors qu'ils étaient encore une vieille légende poussiéreuse et que les seuls dangers étaient les pirates et les esclavagistes de la bordure extérieure.

La bonne époque, avant que Darth Ynnitach ne sorte de son trou pour unifier les groupuscules Sith épars, rouvrir une académie sur Korriban et montre une ambition territoriale démesurée avec son empire nouveau-né. Avant les survivants Sith fuyaient les jedi comme la peste. Mais il était arrogant de les avoir pensé disparus et annihilés. Tant qu'il y aurait la Force, il y aurait un pendant Obscur et Lumineux, c'était ainsi.

- Mais dans les medcorps je n'ai pas pris de leçons directes. Je ne suis pas certaine que les professeurs là-bas puissent m'enseigner sans autorisation de mon maître éventuel. J'avais de plus peur de troubler des élèves plus avancés, mais j'ai acquis de bonnes connaissances théoriques dans le domaine. Je pense qu'avec votre aide je parviendrai rapidement à avoir de bons rudiments.

Elle eut un pâle sourire en écoutant Alyria la rassurer ensuite sur sa santé. Elle l'air un peu faible, mais Wen ne doutait pas de la solidité de la jedi, même si elle pouvait sentir qu'elle était pour l'instant un peu abattu. Pas tant physiquement que moralement. La jeune padawan avait l'intuition que c'était en lien avec le constant bâchage qu'elle devait affronter des les médias. Elle songea que la maître-d'arme ferait mieux de laisser au plus vite néfaste qui ne convenait pas au code et à la mentalité profonde des jedi. Même voir Leto, le maître de son ami Kalen, en ministre de la guerre ne lui plaisait pas. Il était noble de vouloir servir les intérêts du peuple, mais les jedi se devaient de rester indépendants et neutres de tout corps politique au risque de se détourner de leurs buts premiers tout en croyant les servir au mieux. Wen était certes très intéressée par la diplomatie, mais il demeurait une nuance avec la politique.

Les sith étaient devenus des menaces très concrètes et les paroles d'Alyria ne faisaient que peu de place au doute. La chancelière considérait la guerre comme une alternative probable aux derniers bouleversements. La nautolane avait beaucoup de mal à imaginer quel genre de changement cela allait-il générer pour elle ou pour le temple, hormis le fait de travailler avec la République. Mais ce n'était pas des pensées qui s'accordaient avec la joie des retrouvailles. Avec un grand sourire, Wen sortit de son sac en toile couleur sable un petit sachet.

- Je vous ai rapporté quelque chose des agricorps.

Elle ouvrit le sachet et des petits bonbons sombres emballés dans un papier transparent tombèrent sur les draps. Le temple n'était pas un grand amateur de sucreries pour ses fervents partisans, mais les agricorps fabriquaient ses petites choses pour les vendre, même les moines avaient besoin d'argent.

- Apparemment ils ont de bonne propriétés énergétiques. Maître Ki-Maey a fait elle même poussé les plantes qui servent à leur fabrication. Ils sont réputés pour leurs propriétés énergétiques, ça s'appelle des Mey-Mey.

Wen fit un clin d'oeil à Alyria en en prenant un.
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« L’union s’arrête où commence l’ambition. »

C’est par ces paroles cryptiques que répondit Alyria à la question directe de Wen… Enfin, pour ceux ayant suivi l’actualité républicaine des derniers jours, ces quelques mots pouvaient au contraire être d’une limpidité troublante. Mais la maîtresse d’armes ne s’épancherait pas d’avantage sur des problèmes politiques qui n’avaient pas à intéresser une simple padawan. Moins elle serait impliquée dans les méandres troubles de la Rotonde, mieux cela vaudrait.
Aussi, avec un sourire aussi large que faux, mais cela, il était presque impossible de le deviner, à moins de très bien connaître cette native de l’aristocratie hapienne dont les premières leçons maternelles avaient été de feindre, la Chancelière ajouta :

« Ne t’inquiète pas de cela… Ce n’est pas bien important. »

Au demeurant, ce n’était pas entièrement faux. Ces remous n’étaient rien face à la Force… Tout au plus une péripétie qu’on aurait tôt fait d’oublier dans moins d’une demie-décennie. On se souviendrait de la crise d’Aargau… Mais pas de tel ou tel nom oublié dans les recoins de la mémoire de quelques vieillards cacochymes du Sénat. Il fallait se concentrer sur le présent, sur la formation de Wen. Là était l’essentiel.

Alyria écouta donc la nautolane lui expliquer en détail les péripéties entourant son apprentissage au long cours de la Guérison de Force, et fronça légèrement les sourcils en entendant parler ainsi de Gabriel, et de ses avertissements. D’ordinaire, son frère de sang echani était un professeur apprécié, patient… Et à la maîtrise de la Force infiniment plus pointue que la sienne, même si la gardienne savait qu’elle avait des connaissances honorables dans quelques domaines très particuliers. Que s’était-il donc passé entre ces deux-là pour en arriver à une conclusion aussi alarmante ?

Songeuse, elle fronça légèrement les sourcils, cherchant une explication, tout en écoutant d’une oreille un peu distraite la suite des propos de Wen… Avant de trouver la solution dans les paroles de la jeune fille. Elle allait devoir creuser cette question dès que possible. A vrai dire, la chose l’intriguait autant que le défi potentiel la motivait. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pu tenir pleinement son rôle de professeur, hormis durant quelques brefs moments auprès de Joclad, et dans son domaine fétiche qu’était la maîtrise du sabre laser. Là, elle allait devoir faire appel à ses talents de maître jedi, et non de simple maître, pour espérer réussir là où un de ses plus éminents confrères avait échoué.

Cependant, sa réflexion fut interrompue par le cadeau inattendu de la padawan, et Alyria sentit son cœur se gonfler de reconnaissance, aussi un sourire cette fois bien sincère illumina son visage, la fatigue semblant avoir disparu soudainement de ses traits. Elle prit l’un des bonbons proposés, en déplia l’emballage, avant de répondre par un léger rire au clin d’œil de Wen :

« D’ordinaire, j’éviterais les aliments à trop forte teneur en sucre, c’est rarement indiqué pour les maîtres d’armes… Mais vu que je vais rester éloignée d’une salle d’entraînement pour une ou deux semaines encore, autant en profiter. »

Elle déposa alors la sucrerie sur sa langue et en savoura les senteurs fruitées très agréables. Un léger moment de nostalgie la saisit et elle se sentit projeter plus de trente ans en arrière, quand elle était sur cette même planète en train d’être couverte de cadeaux ridicules par son vieux garçon de père. Elle revoyait une des maîtresses régulières de son paternel pour ses largesses calorifiques, et ce dernier hausser les épaules d’un air ennuyé… Tout cela avait un parfum d’enfance retrouvée, période à laquelle elle n’avait pas songé depuis bien longtemps. C’était un autre temps, une autre vie.

Une fois le bonbon dégusté, elle fit une petite pause, avant de dire avec une simplicité vibrante de sincérité :

« Merci Wen. C’était très gentil de ta part… Et très bon. »

Elle ajouta sur un ton plaisantin :

« Si c’est une tentative de gagner l’approbation de la Chancelière, Suprême, c’est très réussi. »

Pour autant, Alyria n’en oubliait leur discussion première et elle invita la jeune fille à s’asseoir sur le fauteuil en face du lit sur lequel elle était allongée. Redevenue bien plus sérieuse, elle finit par dire :

« Tu sais Wen… Il n’y a pas besoin d’avoir rencontré un sith pour en adopter même partiellement et tout à fait involontairement les manières de faire. Le glissement vers le côté obscur peut être insidieux, c’est pourquoi tous les maîtres sont extrêmement attentifs à certains détails qui peuvent parfois paraître inutiles quand on est plus jeune.

Explique-moi honnêtement ce qu’il s’est passé avec le Maître Fyelen, et ce qui l’a poussé à te dire cela. Je le connais de longue date, et je sais qu’il n’aurait pas prononcé de telles paroles à la légère.

Une fois cela fait, j’aimerais que tu me donnes en quelques mots ta définition de la Guérison de Force. »


Parler d’arts curatifs dans un centre médical militaro-jedi… On faisait difficilement plus à propos, non ?
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L'union s'arrête là où commence l'ambition. Cette phrase était amplement suffisante à la jeune Wen pour définitivement considérer la politique incompatible avec le rôle d'un jedi. Les jedi abandonnaient leur propre ambition pour se laisser happer par le code et la Force, ils n’œuvraient pas pour leurs propres intérêts. Les passions étaient déconseillées et en dehors de de leur art, ils n'avaient rien à mettre en avant. La nautolane était d'avis que maître Von quitte ce rôle qui lui avait échouer de manière presque accidentelle le plus rapidement possible. Mais elle n'était qu'une toute jeune padawan, Alyria était plus âgée et plus expérimentée. Elle ne pouvait donner son opinion sans paraître prendre un rôle auquel elle ne pouvait prétendre sans sembler présomptueuse.

Elle se tut donc, et encore plus lorsqu'Alyria émit un sourire qui rassura Wen. Juste un peu bien sûr, au moins la maître d'arme se remettait doucement, mais cette dernière devait quitter son rôle de chancelière, et pour cela il faudrait trouver quelqu'un qui puisse la remplacer. Ce ne serait pas une mince affaire. En période de trouble, il fallait soi quelqu'un qui n'avait aucun sens de l'ego et prêt à sacrifier la moindre parcelle de son existence sur l'autel de la communauté, soit au contraire une personne obsédée par sa propre ambition, pour succéder à quelqu'un. Des personnes qui sortent de l'ordinaire, l'espèce qui ne court pas les rues.

Wen évoqua le cours avec le maître Fyëlen, et elle nota la réaction, certes subtile, de l'hapienne, quand elle passa au moment du côté obscur. Avait-elle été trop brutale dans sa façon de prononcer les événements si bien que les liens entre le maître et elle soient distordues ? L'échec de ce premier essai lui avait été pénible, il était important pour elle de maîtriser cette technique si utile sur le champ de bataille… Elle en avait ressenti une forte amertume, celle qui nous reste au fond de la gorge comme un arrière-goût désagréable. Gabriel avait été dur sans doute, mais cela faisait parti de son caractère. Mais elle n'ajouta rien à ce sujet, ce qui est dit est dit.

La jeune nautolane rit doucement en entendant le calembours de la chancelière. Elle n'avait pas vraiment prévu de se lancer dans la corruption de fonctionnaire, un loisir qui de toute façon lui aurait coûté de nombreuses années libertés et une quantité d'argent astronomique pour rien qui ne puisse la satisfaire. Au moins sembla-t-elle apprécié les Wey-wey, Wen avait un instant douté qu'elle accepte d'en manger un. Elle s'empressa donc de corriger Alyria avec un sourire enfantin, le genre de sourire que l'on a quand on sait quelque chose que la personne en face ignore.

- Mais ce ne sont pas des bonbons très sucrés en réalité… Ils ont été étudié pour ne pas être trop riche. Ce serait bête de rendre des gens malades ou de participer au diabète alors que nous sommes des jedi. Ils sont surtout travaillé pour servir de snack et recharger les batteries sans perdre trop de temps, comme des barre énergétiques mais plus marrantes.

Le genre de chose qui pourrait correspondre aux chagriens, tiens, cette race qui n'avait aucun sens du goût. En écoutant Aly Wen se resservit pensivement. Elle n'avait pas beaucoup mangé pendant les voyages stellaires. Il y avait quelque chose de profondément troublant pour le corps que de se retrouver privé du rythme jour/nuit et tout le métabolisme s'en retrouvait un peu bouleversé. Elle avait eu énormément de mal à manger aux bonnes heures et en quantités suffisantes.

Avec un plaisir à peine cachée, la chancelière enfila un costume de maître jedi, un rôle qu'il lui faudrait attendre encore un peu avant d'embrasser de manière définitive. C'était le test pour découvrir si elles n'étaient pas seulement compatibles dans le domaine des armes amis aussi dans celui plus complexe et plus subtil de la Force. Fyëlen était de retour sur le tapis.

Wen fronça ses sourcils inexistants, une habitude qu'elle avait fini par adopter en voyant son entourage humain et proche-humain le faire quand ils réfléchissaient. Ce cours avait eu lieu il y a bien plus d'un an, et si de grossiers souvenirs lui revenaient à l'esprit, elle avait un peu de mal à se remémorer les mots exacts de son maître.

- Je pense que le cours a déjà mal commencé parce que quelques semaines avant nous avions eu un cours de philosophie de la Force qui avait été très intéressant, mais nous avons tous des conceptions différentes de cette dernière. Mon ancien maître Eyon m'a inculqué une façon de considérer la Force proche du concept de la Force Vivante.

Le grand conflit idéologique de la Force qui n'en cessait de remuer le temple et l'ordre dans son ensemble depuis des siècles.

- Maître Fyëlen est profondément ancré dans la Force Unificatrice. Du coup lors de notre rencontre pour apprendre à guérir, et bien ce... clivage est remonté à la surface. Il m'a dit que ma manière d'essayer de plier la Force à ma volonté au lieu de la laisser venir à moi était une caractéristique du côté obscur et que c'était risqué. Enfin je crois qu'il a utilisé plus ou moins ces termes.

Wen passa nerveusement ses doigts sur les draps immaculés du lit d'hôpital. Ils avaient été changés récemment. C'était encore un souvenir bien étrange, elle n'avait pas l'habitude de voir les maître jedi du temple lui faire des reproches avec si peu de tact. Elle lança à Alyria un regard un peu inquiet, redoutant comme par réflexe la réaction de la belle happienne.

- Mais je ne pense pas qu'il me voulait du mal. Il était simplement inquiet à mon avis, et un peu en colère de voir que mon enseignement avait été autre que celui qu'on enseigne au temple, pas spécialement contre moi, ajouta-t-elle avec philosophie.

La peur de maître Gabriel était sans doute fondée, mais Wen avait du mal à considérer la Force Vivante comme une caractéristique profondément obscure. Il avait toujours existé des jedi de cette trempe qui avait fait parti de l'Ordre ou vécu en marge de celui-ci sans forcément sombré dans les ténèbres.
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« Je retiens cette information aussi intéressante que gourmande. »

Alyria fit un petit clin d’œil à Wen tout en avalant son dernier bonbon, son goût acidulé la mettant définitivement de bonne humeur, tandis qu’elle voyait le visage de la jeune nautonale s’illuminer d’une expression enfantine qui lui fit légèrement plaisir. Ce n’était pas étonnant, dans le sens où les jedis avaient tendance à grandir et à mûrir très vite, au point d’avoir bien peu de temps pour profiter des plaisirs simples de la jeunesse. Pire, plus les années passaient, plus la difficulté à se souvenir de ces moments tranquilles, innocents augmentait.

Pourtant, selon la trentenaire, ces instants étaient extrêmement importants, et elle avait toujours refusé que ses étudiants perdent trop vite cette fraîcheur insouciante. Certes, un peu de plomb dans la cervelle de quelques-uns étaient nécessaires, mais cela ne devait jamais se faire au prix d’une main de fer absolue qui oublie de profiter des moments agréables et anodins que la vie avait à offrir. Sinon, comment ces jeunes pourraient savoir ce pour quoi ils se battaient ? Comment sauraient-ils ce qu’ils devaient défendre ? La paix était un grand mot, et pour la maîtresse d’armes, il fallait que chacun y goûte pour en comprendre la beauté, et être prêt à mettre sa vie en jeu pour en défendre l’existence. Partager des friandises avec une élève, plaisanter n’était pas une frivolité ou un manque d’autorité dommageable : c’était une nécessité pour forger un lien, mais aussi et surtout créer des souvenirs heureux et calmes pour les plus jeunes, qui amèneraient en temps utile à la réflexion.

Cependant, les derniers grammes de sucreries avalés, il était temps de se concentrer sur son travail de maître et écouter attentivement les explications de Wen. Aussi Alyria la laissa s’expliquer, sentant que la jeune fille avait besoin d’un peu de temps pour remettre ses souvenirs dans le bon ordre. Si elle avait passé un an dans les corps, cela signifiait que ce cours avec Gabriel remontait au moins à autant de temps, sans doute même à avant Byss… Une éternité pour une adolescente… Et également pour la demi-echanie.

Combien d’événements s’étaient passés depuis ce fameux affrontement sur la planète infestée par le côté obscur ? Combien de changements, de bouleversements ? Elle avait presque arrêté de les compter. Qu’il lui semblait loin, ce temps où elle pestait contre elle-même pour avoir dû reculer sur Ossus afin de protéger le jeune Naile Dawks de la fureur de ce sith au bâton étrange. Désormais ses défaites ne se comptabilisaient plus sur un champ de bataille ou dans un duel, mais dans des joutes verbales et autres trahisons politiques. Certains y auraient vu une ascenscion foudroyante. Elle y voyait un renoncement à ce qu’elle était, et la possibilité terrifiante de mettre en danger la République et l’Ordre.

Cependant, même au cours des dernières semaines, Alyria avait trouvé souvent de quoi retrouver sa place de maître jedi, notamment auprès de Joclad, et même l’espace des quelques secondes fatidiques sur Aargau qui l’avaient conduites dans ce lit d’hôpital. Malgré son amertume quant à la suite des événements, elle ne regrettait pas son geste. Elle avait fait son devoir, et si c’était à refaire, nul doute qu’elle se résoudrait à pareil sacrifice à nouveau. Et son honneur de jedi était sauf, point besoin de remerciements ou de loyauté pour cela : avoir sauvé plusieurs vies était une récompense qui se suffisait à elle-même.

Aussi la sang-mêlée se concentra sur les propos de Wen, et son esprit analytique activa ses rouages pour essayer de comprendre les tenants et les aboutissements de cette confrontation entre son amie et la jeune fille qui avait apparemment mal tourné. Premièrement, elle sentait dans les propos de la nautonale comme une honte, ou du moins un sentiment d’être en marge à cause de l’enseignement de Force Vivante qu’elle avait reçu de son ancien maître. Quelque part, Alyria avait du mal à comprendre une telle chose. Certes, chez les chevaliers et les maîtres les plus férus de métaphysiques, les débats étaient courants entre les adeptes de la Force Unificatrice et ceux de la Force Vivante. Mais beaucoup de membres de l’Ordre respectaient les deux façons de penser et se forgeaient leur philosophie propre dans un mélange des deux manières de voir l’énergie mystique qui les parcouraient tous, et les tensions à ce sujet étaient du domaine du débat intellectuel essentiellement. Enfin, certes, certains vieux maîtres un peu rigoristes avaient tendance à privilégier tel ou tel vision et à sanctionner les élèves ne partageant pas leur mode de pensée. Cela dit, les deux étaient enseignées aux jeunes initiés, donc elle devait dans un premier temps rassurer la jeune fille pour la convaincre du bien-fondé de son enseignement, et lui offrir des exemples de jedis haut-placés qui partageaient sa pensée.

Pensivement, elle finit par dire :

« Tu sais, les deux facettes sont enseignés aux initiés, le reste après est du ressort de l’apprentissage et de la démarche intellectuelle de chacun. Si la Force Unificatrice est plus répandue chez les maîtres, et encore, cela est vrai pour les Consulaires mais pas forcément pour les Gardiens et les Sentinelles, d’autres préfèrent se référer à la Force Vivante et fondent leur enseignement et leur philosophie dernière. Par exemple, les maîtres Vorkosigan et Vocklan sont de bons exemples de cette façon de penser. »

Elle avait pris à dessein des figures connues, que ce soit son Ministre de la Justice ou bien son amant maître d’armes et désormais triomphateur de la base d’Aargau, afin d’avoir des exemples parlants, et dont elle était certaine accessoirement. Leto lui avait parlé de sa vision de la Force au cours de leur rencontre lors de sa nomination, et Lorn… Eh bien, ce n’était pas comme si elle ne connaissait pas personnellement les inclinations de son meilleur ami et compagnon. Ne restait plus qu’à ajouter sa propre personne à l’équation.

« D’autres encore, les plus nombreux à mon sens, tentent de faire une sorte de syncrétisme entre les deux philosophies, souvent en tendant plus ou moins vers l’un ou l’autre côté, mais sans rejeter la partie qui les attire le moins, ce qui est mon propre cas. »

Elle fit une légère pause pour laisser à Wen le temps de digérer ses propos, puis enchaîna :

« Ce que je veux dire, c’est que les deux façons de faire sont parfaitement valables … Tant que leur interprétation est correcte. Et si je n’étais pas présente au moment de cette conversation que tu as eu avec Maître Fyelen, il est possible que ses inquiétudes soient dues non pas à tes pensées, mais à ta technique.

Et les erreurs techniques sont possibles, mais corrigeables. »


Ainsi, elle ne désavouait pas son ami, et essayait d’atténuer les remontrances de son confrère, qu’elle pouvait comprendre.

« La Guérison doit se faire en symbiose avec la Force. Il est impossible d’en réussir une en tentant de la contraindre. Au contraire, il faut s’ouvrir à ses flux, sentir la façon dont elle coule à travers l’être vivant que l’on désire soulager, mais aussi et surtout autour de lui, pour l’amener peu à peu à traverser la matière et pénétrer les organes pour mieux les reconstruire. »

Nouvelle pause dans son explication.

« En clair : en tentant de faire quelque chose que la Force refuse, par exemple en essayant une manœuvre qui irait à l’encontre du cours naturel de la vie, le jedi risque en effet de glisser vers le côté obscur, et de blesser l’être qu’il désire soigner.

La Guérison est en réalité la capacité du jedi à être un passeur entre la Force et un organisme blessé, comme quand en méditation, le corps devient une plate-forme entre l’esprit et les alentours, pour ressentir toutes les vibrations de vie autour de soi, et répartis dans le temps et l’espace. »


Elle s’arrêta après cette longue explication, avant de demander :

« Est-ce que tu as déjà essayé de ressentir cela en méditation ? Ou au cours de tes entraînements ? »
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Aborder les échecs, aussi anciens et futiles pouvaient-ils être, plongeait la douce Wen dans une nervosité caractéristique. A vrai dire les professeurs jedi la connaissaient surtout d'après ce trait qui était malheureusement courant chez les padawans et initiés. Les jeunes pratiquants de la Force avaient souvent cette pensée étrange que le poids de la galaxie reposait sur leurs frêles épaules inexpérimentées, un paradigme à double-tranchant. Dans un premier temps, ils pouvaient faire preuve d'une zèle profond né d'une volonté de bien faire assez envahissante. D'un autre côté, la crise de larmes du « je ne suis pas à la hauteur du don dont j'ai hérité » et autres réjouissances n'était jamais bien loin. Le vrai enjeu était de rester dans le positif. C'était cependant difficile, car cet aspect de la personnalité de nombreux jeunes jedi se retrouvaient une fois devenus des chevaliers accomplis, d'où la défection de certains d'entre eux quand ils pensaient avoir échoué et déçu.

Avec Alyria, ce sentiment avait tendance à s'amenuiser chez la nautolane. Cette dernière savait toujours où trouver les mots pour remettre Wen un peu d'aplomb face aux déceptions et aux mauvaises rencontres. C'était sans doute pourquoi elles avaient sympathisé aussi rapidement pour manquer de peu de concrétiser le duo padawan/Maître. Mais il semblait que pour le moment la Force avait d'autres projets… Le destin semblait éprouver la patience de Wen avec une certaine cruauté, elle qui avait avait perdu l'habitude d'évoluer sous l'égide d'un maître. Cette situation aurait des conséquences. A moins qu'elle ne se révèle soudainement un prodige de la Force sous la direction d'Alyria, elle deviendrait chevalier un peu plus tard que certains camarades, dont les plus précoces avaient déjà leur cérémonie d'adoubement prévue dans l'année. Wen acceptait cette situation, elle ne luttait pas contre ce qu'elle ne pouvait pas influencer.

Elle ne fut pas particulièrement surprise d'apprendre que maître Vorkosigan n'était pas un grand partisan de la Force Unificatrice, elle connaissait plus mal le maître Vocklan pour affirmer la même chose sur ce sujet, bien qu'elle ait souvent vu ce dernier avec Alyria. Ils restaient tout de même des maîtres jedi un peu en marge du temple. Avec une certaine nostalgie, elle se demanda où son ami Kalen, le padawan du maître Vorkosigan, pouvait être en ce moment. Elle avait entendu qu'il avait été héroïque sur Kashyyyk, elle se demanda si elle aurait bientôt une occasion de le féliciter à ce sujet.

- Il y a les midi-chloriens aussi, ajouta-t-elle dans un souffle, comme si elle prononçait un mot interdit.

Une manifestation physique de la Force, de micro-organismes présents en chaque être vivant et avec un mystérieux lien avec la Force. Pour certains, il s'agissait d'une preuve que la Force ne pouvait être qu'Unificatrice, une manifestation quasi-divine d'un pouvoir qui échouait aux quelques individus élus dans l'immensité de la galaxie. C'était concret, c'était vivant, c'était prouvé. Elle l'avoua, la rousse maître-d'arme admit son penchant personnel pour le côté Vivant de la philosophie de la Force. Dans le court silence qui suivit, Wen songea qu'elle non plus ne rejetait pas totalement la vision Unificatrice, mais qu'il lui semblait que cette dernière correspondait tout simplement moins à sa perception et à sa conception des choses. Elle scruta quelques instants le visage calme quoiqu'un peu fatigué d'Alyria, se demandant comment elle arrivait à concilier deux visions qui avaient toujours été présentées comme des opposés, des contraires.

- Je pense aussi que maître Fyelën faisait référence à ma technique, confirma Wen. Il semblait cependant penser que ma technique risquait de corrompre ma pensée et de la laisser petit à petit s'abîmer dans les ténèbres. Il avait affirmé cela avec un tel aplomb que j'en ai eu des frissons.

Une expression dubitative se peignit sur le visage juvénile de la nautolane. Il était toujours difficile pour les esprits jeunes de concevoir qu'il était possible de se laisser gagner par le côté Obscur sans même s'en apercevoir, comme un murmure insidieux qui naissait à l'arrière de votre crâne, envahissait votre esprit avec des mots subtils et séduisants pour vous dominer totalement. Les adolescents se pensaient toujours plus solides et résistants qu'ils ne l'étaient en réalité, mais ceux à l'esprit plus raisonnable comme Wen.

Elle se souvenait cependant des mots de Gabriel, quand ce dernier évoquait la manière la plus correcte de guérir en utilisant la Force. Elle faisait le lien avec les enseignements reçus dans les medcorps et les paroles d'Alyria. Pourtant ce ne devait pas être une situation complexe. Elle avait déjà senti le flux et le reflux de la Force lors des séances de méditation, elle aurait normalement dû sans problème savoir se laisser guider par cette dernière pour soigner correctement. Mais le basculement entre rester simplement passive et cette étape était plus subtile, car on pouvait facilement essayer d'accélérer les choses en forçant les choses. Wen en avait fait les frais.

- J'ai toujours un bon ressenti de la Force, que ce soit en moi ou chez les autres, ou dans la nature et le vide autour de moi. Un ressenti meilleur même que celui de certains de mes camarades. Je pense que j'ai tout simplement du mal à devenir un simple passeur, à être à la fois active et inactive dans l'épreuve de guérison. La méditation est un acte naturel pour moi.

Ces mots manquaient-ils de retenue ou de modestie ? Elle avait pourtant l'impression de n'exprimer qu'une vérité née de l'observation de ses camarades lors des entraînements. Wen était indéniablement l'un des potentiels majeurs de sa promotion en matière d'usage de la Force, comme s'il avait fallu que le destin comble sa faiblesse physique d'une manière ou d'une autre.

- Peut-être suis-je trop impatiente, peut-être ne suis-je pas encore assez bien entraînée… Avez-vous jamais eu du mal à appréhender un usage particulier de la Force ?

Wen était toujours curieuse de savoir comment les grands maîtres jedi étaient avant d'en arriver au sommet de leur discipline. Ils avaient été des jeunes initiés et padawans eux-aussi. Il était toujours bon d'humaniser ces figures presque légendaires dans l'esprit des apprentis de la Force pour se dire que tout était possible si on avait confiance et si on comprenait que les épreuves et les difficultés pouvaient être surmontées.
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« Et leur existence n’est qu’une preuve que la Force existe, pas une indication sur sa nature. La physique ne peut expliquer l’intégralité de la métaphysique, Wen. »

Alyria avait dit cette phrase sur un ton doux, pour montrer qu’il ne s’agissait nullement d’un reproche, mais simplement d’une remarque pour lui faire comprendre la différence entre les faits observés et l’interprétation qu’on leur donnait. Quelque part, c’était à la fois la divergence et le trait d’union entre le scientifique et le philosophe. Le second cherchait le pourquoi, le premier le comment, et pour autant, tous deux se retrouvaient toujours à un moment où à un autre.

C’était aussi quelque part la différence entre les jedis et les siths. Beaucoup de leurs cousins obscurs se contentaient de considérer l’existence des midi-chloriens comme la preuve que la Force était une manifestation semblable à l’eau ou à l’air et leurs atomes, donc dominables par les êtres pensants, pliable à leur volonté une fois la bonne formule alchimique trouvée. Les jedis constataient que sa présence partout à travers des micro-organismes était la preuve qu’elle était le vivant, et devait en cela être appréciée à sa juste valeur de point d’équilibre du cosmos. En un sens, on aurait presque pu y discerner une sorte d’approche philosophico-écologique contre un utilitarisme agressif.

Seulement, comment l’expliquer à une jeune initiée ? En choisissant les bons mots pour lui faire comprendre son point de vue, et ainsi amener des explications quant au comportement de Gabriel. Peu à peu, elle pouvait comprendre le jugement sévère de son ami. Certes, elle y aurait sans doute mis plus de forme pour éviter de traumatiser autant la jeune fille, mais il était possible qu’il ait sincèrement eu peur que Wen ne se fourvoie dans sa pensée de la Force Vivante et que sa conception ne se fausse peu à peu, impactant négativment ses techniques.

« Manifestations vivantes, énergétiques… Nous en apprenons sans cesse sur la Force, et il est probable que nous ne cessions jamais de le faire. Sans doute même qu’il est impossible d’en comprendre tous les ressorts. Nous devons la voir comme le point d’équilibre, d’union au sein de la galaxie, et nous interroger sur le sens de cette dernière… Et sur celui que nous voulons lui donner.

Pas nous précipiter en jugeant que notre volonté sera plus forte que l’ordre immuable des règles qui régissent ces mondes. »


L’allusion au code sith était limpide. Les uns respectaient l’harmonie de l’espace, s’y fondaient, les autres engendraient le chaos en s’y frayant un chemin contre-nature. Et cela lui fournissait l’occasion parfaite pour enchaîner la suite et faire le lien avec la situation de Wen et les reproches de Maître Fyelen.

« Ainsi, par notre façon de manipuler la Force, parfois, il arrive de trop pousser notre volonté, de contraindre celle qui devrait être une alliée, et non un outil. C’est un phénomène subtil, insidieux, et il est difficile de s’en rendre compte par soi-même. Cela dit, avec l’expérience on arrive à s’en prémunir. »

Là encore, elle avait formulé sa phrase comme une remarque d’ordre générale, sans viser la nautolane afin d’offrir une certaine neutralité, tout en espérant la faire légèrement réfléchir de son propre chef pour aboutir à une remise en cause éventuelle ou au moins à une nouvelle réflexion. Elle conclut avec délicatesse :

« D’où l’inquiétude de Maître Fyelen. »

La boucle était bouclée. Restait donc à remiser cette partie de leur conversation peu plaisante pour passer à une nouvelle chance pour Wen de se perfectionner, et de comprendre plus en détails la philosophie de la Guérison. Si Alyria pouvait accorder foi à ses affirmations, alors il était certain que la jeune fille possédait les talents adéquats pour devenir une excellente guérisseuse. Cependant, la difficulté à savoir se projeter dans un flux était un écueil assez connu, qu’elle-même avait éprouvé par le passé.

C’est en partie pour cela que la question la fit rire doucement. Il est vrai qu’au même âge, elle se demandait aussi si les vieux maîtres de l’Ordre avaient eu aussi sué sang et eau pour faire léviter un vulgaire caillou. Et maintenant… Eh bien, parfois, elle continuait de se demander comment les plus vénérables faisaient pour maîtriser certaines techniques encore hors de sa portée. La seule différence était que maintenant, d’autres la regardaient aussi comme un modèle d’expérience dans la manipulation de la Force. Dire qu’originellement, ce n’était pas son point fort… Comme quoi, l’apprentissage faisait des merveilles.

« Oui bien sûr ! Pour être parfaitement, quand j’étais jeune, la manipulation de la Force était très loin de pouvoir compter dans mes spécialités… Enfin hormis pour certaines techniques très précises comme la Télékinésie, et dès que j’ai su l’appliquer, le Lancer de Sabre. Mais pour le reste… J’étais loin derrière bon nombre de maîtres, voire de chevaliers actuels. »

Alyria avait toujours eu une affinité particulière avec la Télékinésie et ses dérivés. Après tout, c’était à cause de sa compréhension innée de son mécanisme qu’elle était au Temple, pour l’avoir utilisé d’instinct en étant enfant. Ainsi, ce n’était pas un hasard si en grandissant elle avait rajouté le Lancer de sabre à sa panoplie de techniques favorites en combat.

« J’ai mis des années avant de réussir à réussir convenablement une Vague de Force, et je n’ai jamais eu une grande facilité pour créer des Boucliers. A l’époque, mon maître m’a conseillé d’apprendre à focaliser la Force de manière extrêmement concentrée, en un seul point infime, pour augmenter ma concentration et maintenir le flux suffisamment longtemps avant de l’étendre peu à peu.

C’est une façon de faire que j’utilise encore parfois, et qui, si elle n’est pas fondamentalement orthodoxe, me convient. Parfois, il faut juste trouver sa propre méthode. »


Peut-être qu’elle conviendrait à Wen d’ailleurs… Mue par son intuition subite, la jedi fit signe à la nautolane d’approcher, et joignant le geste à la parole, elle lui dit :

« Viens. »

Soulevant son bras gauche, elle entreprit d’enlever avec application le bandage l’enserrant pour révéler les traces de brûlures qui gondolaient sa peau. Expliquant la chose doctement, sans émotion apparente, la trentenaire déclara :

« Ceci est le résultat de la déflagration d’une grenade thermique. La cicatrisation est avancée, mais pas complète.

Je vais pouvoir te servir d’entraînement sans grand risque. »


La dernière phrase avait été dite sur le ton de la plaisanterie, évidemment. Cela dit, la proposition était parfaitement sérieuse.

« J’ai besoin de voir comment tu t’y prends. Essaye d’accélérer le trajet des plaquettes dans mon avant-bras en t’ouvrant à la Force. Si cela t’es plus facile, focalise-toi sur un point fixe, une veinule particulière, et commence par-là, puis étends peu à peu ta conscience vers le reste des vaisseaux adjacents. »

Elle conclut avec un sourire :

« C’est quand tu veux, Wen. »
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Wen acquiesça doucement aux paroles de la maître-d'arme, même s'il demeurait un doute en elle sur la nécessite du destin à créer une manifestation physique de la Force alors que la Force Unificatrice mettait en avant l’immanence de ce phénomène. Mais elle n’avait pas à argumenter sur les points de vue des maîtres plus âgés qui savaient certainement bien mieux qu’elle sur quelle voie s’engager. L’usage de la Force était un acte d’une grande subtilité, d’une plus grande subtilité que l’imaginaient les Sith et les gens du commun. La nautolane en avait conscience, elle en avait pris conscience il y a bien longtemps, quand déjà elle parlait avec son père et que ce dernier avait du mal à saisir le concept même de la Force. Pour beaucoup il s’agissait plus d’une forme de magie, parfois avec des relents de culte ou de religion, que d’une réalité tangible qui était présente à divers degrés en chacun.

- Maître Fyelen m’a bien fait sentir que ma… volonté, ou du moins ma façon de l’utiliser, n’était pas celle qui convenait. Ceci dit je n’avais pas encore réellement utilisé la Force au moment où il a prononcé ses paroles, pour une première séance c’était trop juste, j’analysais simplement les flux de la Force, j’étais sur le point d’essayer, mais j’ai immédiatement senti que ce n’était pas… la bonne façon.

Wen se tut un instant, son front formant des plis soucieux. Cette séance n’avait pas été des plus concluantes, mais au moins lui avait-elle appris la prudence, surtout lorsqu’il s’agissait du corps ou de l’esprit d’autrui. Elle avait au moins retenu les bases, et peut-être était-elle quasiment prête à faire un pas de plus dans l’apprentissage de la guérison ? Elle manqua de soupirer de soulagement quand le chapitre Fyelen fut clos pour en revenir à des sujets plus légers.

- Vous aimez plutôt les pratiques de la Force qui sont dans l’action, en conclut Wen. Vous avez dû avoir du mal avec d’autres techniques plus passives…

Les maître-d’armes n’étaient pas des maîtres de la Force, ou du moins n’était-ce pas leur spécialité la plus attendue. Certains cependant pouvaient devenir des maîtres plus que respectés en la matière. Wen quant à elle ne maîtrisait encore que peu d’applications concrètes de la Force. Télékinésie, un peu de protection… Rien de plus puissant, et c’était sans doute l’une des plus grandes failles au sein de sa formation.

- Comme je suis relativement fragile et de corpulence très légère, l’une des premières choses que m’avait apprise maître Eyon était de me protéger et de réduire les dégâts que je pouvais avoir. Mais j’imagine que lorsqu’on est habile avec un sabre, ce n’est pas la priorité.

Avec un sabre, on pouvait aisément détourner les tirs de blaster, voire les retourner à l’envoyeur. C’était quelque chose que Wen parvenait à faire un peu mieux que se battre en duel contre un autre maître du sabre. Elle n’avait encore jamais rencontré de vrai Sith, ce qui était une chance en soi de ce côté-là.

- Qui était votre maître, maître Alyria ? Je ne crois pas que vous l’ayez beaucoup mentionné et je ne connais même pas son nom.

Wen avait prononcé ces mots avec prudence, elle ignorait si elle pénétrait un terrain miné. Elle ne connaissait pas grand-chose du passé du maître Von. Elle avait hérité son surnom d’un drame passé qui lui avait fait perdre une main, et parfois l’éclat argenté de sa prothèse pouvait vous sauter aux yeux. Elle avait surement eu un élève fut un temps, elle était certaine avoir ouïe quelques paroles à ce sujet au temple, il y a peut-être quelques années. C’était cependant une curiosité plus forte qu’elle, les padawans et les initiés en savaient en général bien peu sur le passé des maîtres quand ils avaient le même âge. Elle se souvenait avoir parlé un peu de maître Eyon avec Alyria, ce n’était donc pas une demande qui sortait de nulle part.

Wen perçut pendant un instant cet éclat caractéristique dans le regard de l’hapienne, elle avait eu une idée. Elle lui intima d’approcher d’un geste, la padawan s’exécuta, curieuse. Les yeux de Wen s’agrandirent (s’il était possible que ses yeux gagnent encore en taille puisqu’ils lui mangeaient déjà une bonne moitié du visage) lorsqu’elle vit qu’Alyria défaisait avec application les bandages qui lui enserraient le bras.

- Je ne pas si c’est vraiment…

Mais Wen se tut en voyant la peau craquelée apparaître dénuée de ses protections. Bien sûr ce n’était une très jolie blessure à regarder, la peau était étrangement parcheminée à certains endroits et semblait à peine celle d’un sentient, mais elle gardait l’aspect d’une blessure saine en bonne voie guérison. La grenade avait explosé un peu trop près de toute évidence, et la plaie avait sans doute été douloureuse.

- Sans grand risque, répéta Wen avec scepticisme.

Elle observa la peau de la jedi avec attention. Lors de la séance avec Fyëlen elle avait été trop loin dans l’analyse du corps, elle s’en été aperçue un peu trop tardivement, il était aisé de s’abîmer dans la contemplation des petites cellules qui luisaient dans la force comme autant de petites lucioles. Mais si elle s’en tenait aux parties superficielles, comme la peau dans ce cas, elle ne pouvait aggraver les choses, du moins pas de manière durable et irréversible. Si Alyria avait confiance en elle pour lui servir de test elle tâcherait de ne pas la décevoir et de ne pas montrer ses craintes de manière trop visible.

- Je vais commencer par simplement observer les blessures avec la Force, commenta simplement la jeune padawan avant de se concentrer.

Chaque corps vivant avait une résonnance particulière dans la Force, comme si l’univers était une symphonie dotée d’un nombre infini d’instruments aux vibrations uniques. C’était des éclats qui allaient au-delà de la perception des 5 sens, ce qui rendait la sensation difficilement explicable pour le profane. Wen tendit délicatement sa conscience vers la blessure d’Alyria, elle avait des anomalies, des petites, car la cicatrisation n’était en effet pas encore terminée. La padawan constata qu’il ne suffirait de pas grand-chose, juste d’un souffle, pour que la brûlure soit définitivement soignée. Aller plus loin en se laissant glisser par la Force était tentant, mais dangereux et inutile. Wen sortit de sa méditation en douceur, avec une certaine maîtrise comme l’exercice ne lui était pas inconnu.

- La blessure est en cours de guérison, dit-elle simplement. La Force vitale est un peu troublée mais elle se remet en place. Ce ne devrait pas demandé beaucoup de travail que de tout résorber…

Elle ne pouvait cependant le faire sans l’aval d’Alyria. De plus, elle ne savait toujours ps effectué cette différence subtile entre forcer le Force et la laisser agir. La maître jedi voudrait de toute façon surement continuer cette leçon après avoir suivi avec attention le cheminement de son élève…
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Préférer les techniques de Force qui s’utilisaient dans l’action ? Peut-être bien, en effet. La remarque arracha un sourire à la maîtresse d’armes. La jeune nautolane était loin d’être bête, et sa réflexion n’était sans doute pas très éloignée de la vérité, même si Alyria ne l’avait formulé elle-même dans ses termes. Pour autant, force était de constater une certaine justesse dans de tels propos, ce qu’elle s’empressa de dire à voix haute :

« C’est une façon de voir les choses. Je n’y avais jamais pensé en ces termes… Mais c’est assez vrai. »

La suite lui apporta un peu moins de satisfaction. La trentenaire ne comprenait pas ce besoin presque maladif que la jeune fille avait de pointer aussi souvent de prétendues faiblesses physiques, fait qu’elle avait remarqué lors de leur première véritable tête-à-tête. Wen n’était pas très corpulente ? Eh bien soit, elle-même n’avait rien d’une armoire à glace dans sa jeunesse, et sa musculature actuelle, sèche et nerveuse, elle l’avait développée à force d’entraînements intenses. Rien n’était irrémédiable, et en réalité, ce que certains percevaient comme des défauts pouvaient se transformer en atouts si correctement exploités.

« Tu sais Wen… Ce n’est pas parce que tu n’es pas forcément la padawan la plus corpulente du Temple qu’il faut en conclure automatiquement que tu dois pallier je ne sais trop quelle faiblesse obligatoirement. Ou plus exactement, ce n’est pas parce que tu te juges ainsi que tu dois obligatoirement axer ton développement sur ce point. »

Bon, dit comme ça, son discours était pour le moins abscons. Elle allait devoir s’expliquer un peu mieux.

« Ce que je veux dire, c’est que la défense, peu importe le physique que l’on peut avoir, est une nécessité, mais cela ne veut pas dire qu’elle prend la même forme pour tous les individus, et dans toutes les circonstances.

En clair : améliore tes aptitudes à la Protection de Force si tu estimes que c’est un choix technique qui te correspond. Mais ne t’y limite pas parce que tu crois pallier une faiblesse physique qui n’en est pas vraiment une. Etre fin et léger présente des avantages indéniables, comme celui d’être plus vif et leste que la moyenne.

Personne ne naît avec un sabre-laser dans la main. En revanche, tout le monde a la capacité de travailler sur la création de son propre style, en exploitant judicieusement ses atouts… Et en transformant ses faiblesses en avantages.

Après tout, apprendre la Protection par la Force et m’exercer à l’esquive m’a plutôt bien réussi en la matière, je crois… »


Sa dernière phrase avait été dite avec un sourire complice, afin de montrer à Wen que celle qu’elle avait en face avait un jour commencé sur les mêmes bases. Cependant, une question taraudait Alyria, qui ne put s’empêcher de demander :

« Juste à titre informatif… Ton maître t’avait-il dit pourquoi il avait privilégié la Protection plutôt que le Bouclier ? »

Peut-être que la réponse à cette interrogation démontrerait à Wen que son ancien maître avait en réalité eu un raisonnement similaire à celui d’Alyria concernant le potentiel de la nautolane : privilégier une défense de Force lâche afin de permettre une mobilité maximale en comptant sur la rapidité et l’ingéniosité de son élève… Qui était décidément faite pour un Niman offensif, en tout cas, la maîtresse d’armes se promit d’y réfléchir sur son temps libre pour adapter éventuellement un planning d’entraînement en conséquences, une fois qu’elle aurait repris sa place légitime au Temple, et qu’elle aurait réglé un certain nombre de choses pour se consacrer à l’enseignement de celle qu’elle voyait de plus en plus comme sa nouvelle padawan, quand bien même rien ne pouvait être officiel eu égard à sa position actuelle.

Pour autant, il lui fallut faire taire ses considérations futures pour se recentrer sur la conversation présente, et la nouvelle question de Wen la fit soudainement se plonger dans un passé auquel elle n’avait plus pensé depuis longtemps. Non pas qu’elle ne soit pas proche de son ancien maître, ce dernier avait eu une place privilégiée dans son accomplissement en tant que jedi, et femme, simplement, la position du twi’lek rendait leurs communications malaisées.

« C’est le maître Ranek Lond qui m’a formée. Il vient peu au Temple, ça doit bien faire trois ou quatre ans que je ne l’ai pas vu… »

Ou pouvait-il bien être ? Sans doute dans la Bordure Extérieure, ou dans l’espace hutt, à traquer siths et criminels, à chercher des artefacts pour le compte de l’Ordre. Etant donné la nature de ses missions et de son rôle au sein des jedis, il était normal que les nouvelles soient parcellaires. Les Ombres n’aimaient pas la lumière… Ironique, quand on y pensait.

« C’est une Ombre jedi. Ceci peut donc expliquer cela. »

Elle n’en dirait pas plus.

Restait à vaincre les réticences de Wen par rapport à la Guérison, ou plus exactement, sur le fait d’en effectuer une sur elle-même. Pour cela, elle ne voyait qu’une solution : appliquer exactement la même recette que celle qu’elle avait utilisé des années auparavant avec Joclad, pour l’aider à progresser dans la maîtrise de l’Ataru.

Avec un sourire confiant, elle répondit donc par l’affirmative aux observations de la nautolane :

« En effet. Ce sera donc une occasion parfaite pour t’exercer. »

Elle ajouta enfin son plan :

« Pour t’aider, je vais te guider à travers la Force. Plus exactement, je vais lier en partie nos esprits, afin de te faire sentir les flux de Force et t’aider à parvenir au résultat attendu.

Après, tu essayeras seule.

Je te préviens, la sensation peut être assez… étrange au début. »


Sur ces mots, Alyria attendit un peu son consentement, puis ouvrit son esprit à la Force, s’immergeant profondément dans cette dernière, avant de remonter son courant vers Wen, et se glisser à la frontière de son esprit, pour faire se rencontrer doucement les deux consciences. Le contact se révéla, comme souvent, surprenant, la trentenaire veillant à rester dans les limites tout en érigeant de solides barrières pour éviter que la nautolane, dans un réflexe quelconque, ne réagisse mal et envahisse son propre esprit.

Puis, une fois installée, elle entreprit de la guider, lui faisant voir à travers ses yeux les ramifications de Force, leur beauté. Lentement, elle l’amena à se laisser pénétrer par cette dernière, à ressentir les liens entre son corps et celui de la maîtresse d’armes, pour se laisser dériver au sein de ses derniers, et embrasser la puissance vivante qui les parcouraient et l’amener à son paroxysme, dans une symbiose parfaite.

Se retirant alors, elle laissa Wen se remettre un instant, puis demanda doucement :

« Alors ? »
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Les billes sombres de la Nautolan devinrent un peu floues à cause de la réflexion. Son maître avait-il encouragé la protection de Force pour faire face à une faiblesse ou avait-il une idée plus précise comme semblait le penser Alyria ? Avec la télékonésie et ma détection, il s’agissait de l’un des premiers pouvoirs de Force qu’elle avait su maîtriser. Se concentrer pour former une solide membrane autour des endroits les plus fragiles. Qu’avait-il dit déjà à ce sujet ? Wen se rémora le visage à la barbe sombre et hirsute (qui tendait sur le poivre et sel à la fin de sa vie), le visage taillé à la serpe encadré de cheveux noirs désordonnés d’Eyon Tarr. Il avait souvent une voie grave et une lueur malicieuse au fond des yeux. Il n’y avait plus de douleur quand elle faisait sortir son regard caractéristique des tréfonds de sa mémoire, juste un poids dans un coin de son âme.

- Il me semble que maître Tarr trouvait la protection de Force plus utile, finit-elle par dire après cet instant de réflexion. Elle requiert moins de concentration et me permettait de jouer du sabre pour renvoyer les tirs de blaster, ou du blaster quand j’en avais un.

Bien que ce soit inhabituel pour un jedi, Wen tirait bien avec un pistolet laser. Elle avait un bon œil et une main précise, ce qui lui permettait de garder les arrières d’Eyon quand ils partaient à l’assaut d’un repère d’esclavagistes ou d’un quelconque nid de bandits dans les dunes de Tatooïne. Il y avait longtemps qu’elle n’en avait pas eu entre les mains ceci dit, ce n’était pas utile au temple. De toute façon les jedi maniaient le sabre laser, pas autre chose.

Elle écouta religieusement les informations que lui donnait le maître Von sur son maître. Ce ne devait pas être le genre d’information que l’happienne partageait avec n’importe qui. Wen elle-même ne disait en général pas de quelques mots à propos d’Eyon si on ne l’interrogeait pas directement à son sujet. La relation maître-padawan prenait avec le temps les nuances et l’épaisseur d’une relation presque filiale qui aboutissait à une certaine pudeur, des deux côtés sans doute. Un lien dans la Force entre deux individus qui se rencontrent était un sentiment difficilement descriptible. Chaque lien était unique, l’expliquer à un profane de la Force était une tâche aussi ardue que de l’expliquer à un autre jedi. Wen fut donc très reconnaissante qu’Alyria lui accorda pendant ses quelques instants.

Wen fut impressionnée. Les Ombres jedi étaient peu nombreuses, déjà que les sentinelles n’étaient pas parmi les plus nombreux. C’était une voix complexe, exigeante et qui nécessitait d’effleurer dangereusement le côté Obscur, au risque de s’y convertir. Ils étaient un peu en marge, à cause justement de cette proximité avec les abysses qui les rendaient énigmatiques et incompréhensibles à ceux qui avaient choisi la voix de guerrier plus orthodoxe ou de diplomate. Elle savait que la maître de Kalen, le si intimidant maître Vorkosigan, était cette espèce, de même que la maître jedi qui l’avait accompagné jusqu’à Coruscant, Diena Lok’Tar. Des jedi dont le corps finement musculeux, au caractère certes un peu taciturne mais inflexible, le regard dur. Ces deux derniers étaient assez âgés, un exploit. Sentinelle ne garantissait nullement des chances énormes de survie. Etait-ce la voie que choisirait Kalen Nelaru à son tour ?

La padawan ne posa pas de question en plus, le laconisme d’Alyria démontrait amplement que l’happienne ne souhaitait en dire plus au sujet de son maître. Elles en revinrent donc à la guérison. Wen accepta avec soulagement de se laisser guider, elle qui craignait tant de blesser par accident ceux qu’elle soignait. Elle n’avait cependant jamais accompli un acte de telle sorte, entendez par là communiquer par la Force de la manière dont la maître-d’arme parlait. Elle se demanda avec curiosité si qui que ce soit avait déjà étudié plus en avant les manifestations de deux consciences proches dans la Force.

- Il me semble que c’est une solution acceptable, avoua Wen dont la curiosité apaisait à présent les craintes. Vous avez déjà fait cela avant ?

Elle se replongea doucement dans la Force, il était inutile de brusquer les choses. Comme toujours ce qui se passait dans cette conscience des consciences était intraduisible, comme si les mots qui composaient le vocabulaire étaient insuffisants. Elle sentit la puissance réconfortante d’Alyria qui la prenait par la main, Wen se sentait fragile à côté de cette dernière, elle se laissa accompagné. Elle resta prudente, ne se laissa pas déborder par l’étrangeté des nouvelles sensations qu’elle rencontrait et maintint une discipline de fer sur ses propres flux de Force. La maître jedi évoluait avec facilité. « La force de l’expérience », se dit la nautolane. Elles effleurèrent les pulsations de vie qui étaient animées par la Force, c’était quelque chose de puissamment lumineux. Wen sentait battre les veines, mais ce n’était plus seulement les siennes ou celles de d’Alyria, c’était quelque chose de plus profond qu’elle ne pouvait identifier à coup sûr. Une seule chose était sûre, c’était presque magique.

Wen réintégra son corps en même temps qu’Alyria (elle ignorait si réintégrer était le mot exact), il lui fallut un instant pour se refaire à la gravité, le monde lui sembla lourd et lent, mais elle savait que cette sensation n’était que passagère. Etait-ce ce que les anciens appelaient rejoindre la Force ? Était-ce la plénitude qui était cherchée dans les profondeurs des longues méditations matinales ? C’était en tout cas les énergies qu’il fallait mettre en œuvre pour soigner.

- C’est une sensation nouvelle. Il me semble avoir effleuré ces embranchements, je pense comprendre ce que l’on entend par se laisser guider par la Force à présent.

Les mots sonnèrent étrangement hachés à ses oreilles, sa pensée décousue. Elle ne voulait laisser la sensation de s’être approchée de la solution, laisser échapper cette impression d’être proche du but.

- Je vais tenter seule maintenant.

Wen lança un bref regard à Alyria qui voulait « soyez prudente tout de même ». Elle se laissa glisser à nouveau dans la Force, se laissa guider par elle jusqu’à l’endroit où les ramifications étaient moins nettes. Elle aida un petit embranchement à se clore correctement, avec un mouvement de Force un peu maladroit et imprécis mais qui suffit à réparer ce petit embranchement. C’était épuisant, sans doute le stress. Elle s’éloigna de la Force.
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« Oui, bien sûr, sinon je ne te le proposerais pas. Mon propre maître était adepte de cette méthode d’enseignement, et je reconnais qu’avec les années, je ne peux pas lui donner tort. Lier son esprit de la sorte est un moyen pratique de partager une vision, une méthode avec un autre jedi. En quelque sorte, c’est une version très atténuée de la Fusion Mentale, qui plutôt que de fondre les capacités de deux jedis de façon complète, reste en lisière pour permettre seulement de guider, afin que chacun conserve son individualité.

Techniquement, c’est beaucoup moins puissant et à usage plus limité qu’une Fusion complète. C’est aussi beaucoup moins dangereux, même si des précautions s’appliquent toujours, notamment celle qui veut qu’un lien préexistant facilite l’approche. : familial, amical, de maître à padawan… »


Elle avait appuyé légèrement plus sur la fin de sa phrase, comme si elle désirait montrer quelle était sa réelle conclusion, son véritable motif pour utiliser une telle méthode. En effet, ce n’était pas seulement une manière d’aider Wen. C’était aussi, pour elle-même, un test afin de savoir si oui ou non la jeune nautolane était bien destinée à devenir son élève, si ce lien dans la Force qu’elle sentait se tisser entre elles n’était pas uniquement le fruit de son imagination.

Chaque expérience de ce type était une nouveauté, surtout la première fois. Ce qu’elle avait ressenti la première fois que Ranek Lond avait utilisé cette version de la Fusion mentale l’avait profondément déstabilisé. Cela dit, elle n’avait à l’époque que douze ans, aussi le choc était somme toute normal. Des années auparavant, quand la maîtresse d’armes s’était retrouvée à la place du maître, et non plus de l’élève au moment d’aider Joclad à parfaire sa maîtrise de l’Ataru et donc sa compréhension de la Force, les choses avaient été radicalement différentes. Peut-être était-ce dû à son appréhension plus aisée de la Force, à son expérience, ou à leur lien familial. Quoiqu’il en soit, elle n’avait pas ressenti ce vertige désagréable éprouvé dans sa jeunesse au moment de connecter son esprit avec celui de Maître Lond. Non, là, elle avait guidé l’échange, veillant toujours à ne pas outrepasser les limites du garçon pour éviter de réitérer, justement, l’expérience désagréable de sa préadolescence.

Apparemment, Wen était plus proche de la réaction initiale de Joclad que de la sienne, ce qui était une excellente chose. Alyria comprenait l’émerveillement qui transparaissait dans la voix et les expressions faciales de la jeune fille. Appréhender ainsi la Force dans toute sa plénitude, l’espace d’un bref instant, sentir les pulsations d’un autre corps, voir les ramifications liant un autre esprit au sein et au monde extérieur… C’était une sensation fascinante, troublante. D’une certaine façon, c’était voir un univers familier avec des yeux nouveaux, plus précis, plus grand. Comment s’étonner que bon nombre de jedis se spécialisent dans l’étude des voies de la Force, après avoir expérimenté de telles possibilités ? La trentenaire comprenait cette fascination métaphysique, elle-même, bien que dotée d’un côté terre-à-terre relativement poussé, plutôt pragmatique ne restait pas insensible à de telles manifestations mystérieuses. Elle n’y avait pas consacré sa vie, mais respectait ceux qui avaient choisi de dédier leur existence à percer les secrets de cette essence mystique.

Elle ne savait pas si ce serait le cas de Wen, mais en tout cas, lui offrir la possibilité de caresser du bout de sa conscience un ailleurs aussi impénétrable ordinairement ne pouvait être que bénéfique. Les plus jeunes de l’Ordre regardaient parfois les grands débats philosophiques autour de la Force avec dédain ou incrédulité, car ils avaient du mal à en percevoir toute l’étendue. Puis les années passaient, et les jedis, en mûrissant, découvraient enfin cet univers accessible à un petit nombre d’élus, ce qui leur permettait de comprendre avec une acuité nouvelle les propos autrefois incompréhensible de leurs vieux maîtres. La nautolane avait dix-huit ans : elle était suffisamment mûre pour cela.

Satisfaite de l’air de résolution qui apparaissait sur le visage de Wen, appréciant sa détermination à réussir seule l’exercice, Alyria l’encouragea par un sourire confiant et un léger :

« Vas-y. »

Bon, évidemment, il ne s’agissait pas de la laisser agir sans aucune supervision, au cas où les choses dégénéraient, la maîtresse d’armes voulait être sûre de pouvoir rattraper les dégâts, mais il était important de donner aussi la plus grande marge de manœuvre, et donc d’erreur possible, à la nautolane, pour qu’elle mette en œuvre par elle-même ses nouveaux apprentissages. S’immergeant dans la Force, la demi-echanie suivit donc à distance le travail de Wen, prête à intervenir sur son flux interne de midi-chloriens en cas de problème. Cependant, elle n’eut pas besoin d’en venir à une telle extrémité. La padawan allait lentement, mais sûrement, et si son travail n’était pas parfait, ce qui était normal pour une débutante, la Chancelière sentit un léger picotement sur son bras, à l’endroit où les tissus se régénéraient. Bientôt une petite tache blanche apparut au milieu des marbrures brunâtres qui striaient encore son membre blessé. C’était une entame encourageante.

Laissant Wen reprendre son souffle, Alyria examina encore un peu la plaie avant de dire :

« C’est bien, tu as compris le principe. Etant donné que tu alimentes la Force de ton propre fluide vital par ton esprit, il est normal d’être très fatiguée au début par la moindre petite guérison. Quand ton esprit est à la lutte avec des émotions comme le stress, le passage de la Force se fait plus difficilement, la concentration vient moins aisément… Avec le temps et l’expérience, cette anxiété diminuera.

Il n’y a pas d’émotions, il n’y a que la paix. Ce n’est pas qu’un mantra à répéter sans cesse, mais cette phrase est aussi un moyen de se souvenir des méthodes à appliquer pour une meilleure réussite dans nos tâches quotidiennes en tant que jedi. »


Alyria n’avait jamais été favorable à une lecture littérale du code et au prémâchage qu’on en faisait aux initiés. Savoir réciter par cœur quelques phrases un peu mystiques n’avait jamais fait de qui que ce soit un bon jedi. En revanche, en connaître les applications concrètes, s’en servir comme credo en l’interprétant au mieux était la clé du côté lumineux à ses yeux. Peut-être que cet acharnement à chercher la logique, le côté pratique de tout était un des points qui faisait qu’en fin de compte, elle avait choisi la voie des Gardiens, et ce sans regret.

« Avant de continuer plus avant… Qu’est-ce que tu as étudié exactement lors de ton séjour dans le Medcorps, et éventuellement avec ton ancien maître ? Y a-t-il un domaine qui t’a plus particulièrement intéressé ? Traumatologie, maladies infectieuses, zoobiologie… Ici, il y a largement de quoi s’occuper et essayer de se calquer sur ce que tu maîtrises déjà théoriquement, avant d’élargie le spectre des possibilités.

Même avec la Force, le fonctionnement du corps des espèces vivantes de la galaxie est suffisamment complexe pour que de solides connaissances anatomiques et médicales basiques soient requises. »


En cela, la formation des guérisseurs était en tout point semblable à celle des scientifiques non-sensibles à la Force, ce qui expliquait le fait qu’un certain nombre d’entre eux finissaient par rejoindre le Medcorps jedi en raison de la base de données et de sujets rares sur lesquels expérimenter et travailler pour la recherche. Et si ces études pouvaient sembler fastidieuses, il était impératif que Wen ait bien conscience que maîtriser la Force n’était pas l’unique clé pour réussir à devenir un bon guérisseur.

Comme aurait dit Ranek Lond, la Force était une condition nécessaire, mais rarement suffisante…
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C’était une expérience nouvelle et étrange, mais Wen n’avait pas été déstabilisée outre mesure. Elle avait toute confiance en Alyria, elle avait confiance en l’expérience et la bienveillance de cette dernière, elle acceptait avec humilité la supériorité du maître Von sur ses encore modestes capacités. Mais Wen pensait sincèrement qu’avec de la bonne volonté et un travail régulier, elle finirait par réaliser son plein potentiel et à devenir une jedi respectée, que ce soit de par la maîtrise de la Force ou par au moins un talent respectable au sabre. Suivie et guidée par Alyria, elle avait au moins pu saisir le petit détail qui lui manquait. Elle venait d’avoir la chance de pouvoir voir la façon dont fonctionnaient les jedi d’expérience.

La fatigue se résorbait rapidement, sans doute car son aventure n’avait été que de courte durée. Ce n’était pas la même sensation qu’une fatigue musculaire, physique, comme après un entraînement au sabre ou l’un des parcours d’obstacles que les maîtres du temple aimaient tant. Ce n’était pas cette fatigue psychologique et pesante qui nous venait après une journée de stress et nous laissait comme un poids dans l’âme et la sensation pesante d’être exsangue et sans énergie. C’était quelque chose de plus profond, qui faisait appel à un ressenti d’une autre nature, indéchiffrable et mystérieuse, pourant présente. Wen secoua brièvement la tête et ce simple geste la revigora.

- Je trouve que c’est une très bonne manière d’enseigner, ajouta la jeune padawan avec enthousiasme. Mais les personnes qui manquent de pratique avec de la Force doivent être désarçonnés par les nouvelles sensations…

Wen essaya de se rappeler la personne, ou plutôt l’enfant, qu’elle avait été il y a quelques années. Elle n’aurait sans doute pas eu les connaissances et la maturité nécessaires pour apprécier l’expérience. Mais la mort de son ancien maître, les années d’étude au temple et les responsabilités venant avec l’âge, elle avait gagné en confiance en elle et en savoir. Elle avait grandi en somme, pour devenir un être plus ouvert, moins ralenti par ses émotions et plus enclin à apprendre et gagner et talent. Elle n’était pas encore tout à fait sûre de ce qu’elle souhaitait devenir, suivre la voie des diplomates comme l’aurait voulu il y a quelques années, ou poursuivre une voie plus offensive… Il lui prendrait de toute façon plus de temps qu’à d’autres élèves pour être adoubée chevalier, puisque son entraînement avait été perturbé pendant un moment et ainsi plus temps accordé à la réflexion.

Malgré l’imperfection manifeste de ce premier essai, Wen constata avec plaisir qu’Alyria était satisfaite. Malgré sa peur de commettre un impair, elle était certaine que la présence rassurante de l’happienne, dans un premier très proche pour la guider, puis plus diffuse quand elle avait laissé la nautolane agir seule. La padawan avait senti la présence de son maître, légère et discrète comme une plume mais discernable malgré tout. Elle observa le bras blessé du maître Von. Une minuscule tâche blanche était apparue à l’endroit où elle rétablie la connexion avec la prudence de l’élève effectuant sa première tâche dans une relative autonomie, ce qui acheva de dessiner un sourire satisfait sur le visage aux traits francs de la jeune nautolane.

- La paix s’acquiert avec l’âge, c’est ce que disaient de nombreux maîtres au temple.

Wen n’avait pas de souvenir précis, Eyon l’affirmait aussi pour rassurer son anxieuse élève qui déjà sous sa coupe pouvait manifester une certaine inquiétude. Elle avait été une enfant nerveuse d’aussi loin qu’elle s’en souvenait.

- Malheureusement le code est tellement évident pour les vieux sages jedi qu’ils oublient que pour les plus jeunes ce ne sont que des mots simplistes qui n’ont pas réel profondeur. Ceci-dit, la paix naît de la confiance en soi qui grandit en vieillissant, avec l’expérience notamment.

Malgré sa simplicité, le code était d’une infinie difficulté à suivre littéralement. Abnégation était un mot d’ordre qui en surgissait en filigrane avec une force inconcevable. A vrai dire les ermites étaient surement ceux qui pouvaient obéir au code avec le plus justesse sur certains points. La complexité du code résidait dans sa simplicité, cela n’avait aucun sens à première vue mais ce devait surement beaucoup amusé les premiers jedi de l’ordre qui avaient rédigé ces mots. C’était peu probable, tous les textes décrivaient Odan’Nurr comme étant d’un sérieux complet.

La prochaine question d’Alyria plongea quelques instants Wen dans une perplexité bien inutile, car la réponse lui vint comme une évidence. Elle ne souhaitait pas devenir uniquement guérisseuse, une spécialité qui pouvait d’ailleurs être prise dans la voie des consulaires. C’était donc pour des raisons pratiques.

- Mes connaissances acquises autour de la guérison étaient principalement orientées autour de la traumatologie. Guérir des blessures légères, des brûlures de sabre, souder un os brisé… Je ne souhaite devenir une guérisseuse de talent capable d’endiguer les pires maladies infectieuses de la galaxie. Je souhaite être utile, guérir mes propres blessures dans l’action, celles de mes compagnons et celles des innocents blessés dans les conflits. Mon ancien maître Eyon avait commencé à me montrer quelques bases : soigner des égratignures par exemple, mais il est mort trop tôt pour que j’acquière définitivement ce talent.

Ça cadrait avec Eyon. Il avait l’esprit pragmatique. Ce n’était certainement un jedi consulaire, son esprit indépendant et peu porté sur les longues réflexions jedi avait achevé de l’isoler du Conseil et du Temple en plus de son mode de pensée peu apprécié dans les hautes instances de l’Ordre.

- C’était un jedi sentinelle. Pas une Ombre, il n’était pas assez discret. C’était l’un de ces jedi qui avaient choisi de garder un système pendant de longues années. Il ne vivait pas au Temple et avait choisi un système éloigné du noyau. Il passait du temps à essayer d’apaiser le système, combattre les pirates, aider les autorités locales

Un travail bien noble s’il en était, plus courant qu’on l’admettait puisque les jedi pouvaient aisément changer leur rôle avec l’accord du conseil. C’était un bon moyen d’avoir des talents versatiles et de ne pas trop s’ennuyer. De longues années passées à chasser le bandit dans un espace inhospitalier amenait forcément à développer un esprit tourné vers l’utile, particulièrement adaptée à une vision pragmatique de la Force. Eyon avait été un humain avec de la suite dans les idées.
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« Toujours s’adapter à l’âge de ses élèves… Sans oublier le sien, telle est la clé d’un bon apprentissage.

Du moins, c’était l’un des mantras préférés de mon maître. Comme quoi… Tu t’entendrais sans doute bien avec lui. »


Contrebalancer une phrase sentencieuse par une référence amusée était un des moyens préférés d’Alyria pour faire passer un message à un padawan. Trop souvent, elle avait remarqué que les grandes leçons de sagesse avaient tendance à ennuyer mortellement les adolescents, ou même à les braquer dans un refus immature des conseils de leurs aînés, comme s’ils se muraient dans une dichotomie construite de toute pièce entre « nous » et « eux », deux groupes irréconciliables. Plus jeune, il lui était arrivé d’avoir ce genre de pensée, assez rapidement réprimée cependant, la jeune fille qu’elle était à l’époque préférant boire les paroles des maîtres plutôt que les critiquer. Mais les mouvements d’humeur ne lui étaient pas étrangers, et elle n’avait pas la mémoire suffisamment courte pour ne pas se souvenir des chuchotements de mécontentements des plus fougueux de ses anciens camarades.

Alors elle cherchait à s’adapter à ses élèves, à leurs attentes, sans chercher forcément à les ménager dans ses attentes, l’exigence ne disparaissant jamais. Pour autant, elle privilégiait souvent la pratique, alliant rapidement les explications théoriques à une observation empirique, n’hésitant pas à faire confiance aux capacités de ses étudiants, surtout quand ils commençaient à se rapprocher de la maturité donnée par l’âge adulte, comme c’était le cas de Wen. Et surtout, elle n’aimait pas sous-estimer leur potentiel, persuadée que chacun avait sa pierre à apporter à l’édifice, que ces enfants étaient des gemmes qui ne demandaient qu’à être polies pour briller de mille feux. Certes, cela aurait pu paraître presque utopique, mais Alyria ne faisait que suivre les enseignements que l’expérience lui avait donné. Ce n’était pas un hasard si son premier padawan n’avait pas manqué de faire parler : beaucoup de chevaliers de son âge s’étaient demandés ce que la pépite des arts martiaux du Temple pouvait bien trouver à ce garçon mou, atrocement timide et solitaire. Or, la maîtresse d’armes avait pris le l’effacé Armod Sinvar sous son aile car elle avait été la seule à voir que derrière cet apparent détachement se cachait un garçon au calme presque trop troublant pour sa jeunesse, capable de rester des heures à méditer seul, manquant de la confiance en lui-même pour se faire remarquer et cultiver ses talents. Alors elle l’avait instruit, formé pour qu’il devienne ce qu’il devait être, tirant parti de son extraordinaire sérénité intérieure pour le pousser sur la voie de la chevalerie. Elle était fière de ce qu’il était devenu, et d’y avoir contribué. Comme elle était sincèrement heureuse de voir chacun de ses anciens élèves au sabre progresser, trouver un maître, se faire adouber… Et dans quelques années pour certains sans doute, devenir maîtres à leur tour. Ainsi elle avait l’impression de contribuer à l’établissement d’une nouvelle génération, de s’incrire dans un tout qui dépassait sa propre personne, et ce, ironiquement, de manière bien plus intense qu’en dirigeant la Chancellerie. Peut-être que sa collaboration avec Wen lui donnerait la même sensation de devoir accompli au-delà de ses espérances.

« Cela dit… La paix vient bien plus des erreurs commises que de la confiance en soi. Dis comme ça, je sais que ça semble paradoxal… Et pourtant, la vraie harmonie est de reconnaître ses fautes, et d’en tirer l’expérience qui fera que l’essai suivant sera le bon, car tu es en mesure de savoir ce que coûtera un échec, et d’accepter ce risque comme une éventualité, et non la fuir dans une lutte éperdue. »

Plongeant son regard pénétrant dans les orbites noires de la nautolane, elle ajouta avec fermeté :

« Un échec n’est pas une preuve de faiblesse. Sans échec, il n’y a rien à surmonter, rien à tester. Il est naturel, indispensable. C’est précisément ce que les siths n’ont pas compris, dans leur doctrine de force brute et immédiate. L’élimination de ceux ayant échoué, comme leur désir de vengeance aveugle, ne sont que des pis-aller qui ignorent la véritable force : celle d’aller au-delà de ses peurs, de les maîtriser, et de les accepter, pour finalement être capable de s’en détacher. »

Comme beaucoup de choses, ces leçons ne venaient qu’avec le temps, et si elle savait que les jeunes gens étaient souvent agacés par ces platitudes, il convenait de les rappeler. Tout en montrant que la fatalité n’existait pas, et qu’ils avaient une marge de progression énorme.

« Pour autant… Quand j’ai pris mon premier padawan, ce ne fut pas à cause de son don pour le sabre, car Armod n’était pas très doué, ni pour sa maîtrise de la Force, dans la moyenne, ni pour quelque don autre. Non, il a capté mon attention par sa capacité à rester des heures durant en pleine méditation, seul, dans un état de parfait apaisement…

L’âge ne fait pas tout. La maturité est la réelle clé, de même que la manière d’appréhender et de surmonter les échecs que l’on a connu, aussi mineurs soient-ils. »


Le code était peut-être abscons, mais son application n’était pas réservée à une élite de vieux cacochymes, au contraire. Un chevalier pouvait faire des erreurs malgré son expérience et rester une impitoyable tête brûlée, et un padawan tout juste sorti de l’enfance receler des trésors de maîtrise. Et cela, elle en avait eu l’exemple devant elle des années auparavant, à la même place que celle qu’occupait Wen à l’heure actuelle.

Néanmoins, il était temps de quitter le terrain des grandes explications pour revenir au cœur de ce qui se transformait véritablement en leçon. Après avoir écouté Wen, Alyria cacha difficilement son sourire :

« Traumatologie, hein ? Ici, tu risques d’avoir de quoi t’exercer. Mais je comprends ton ancien maître. Moi-même, c’est la première spécialité qui m’a été enseignée. Le reste est venu bien après, en perfectionnement, quand je me suis rendue compte que certaines missions nécessitaient d’autres connaissances, au moins théoriques.

C’est fou comme les gens sont souvent contents d’avoir sous la main quelqu’un ayant deux ou trois bases en obstétrique et gynécologie… Bien que ce soit loin d’être ma spécialité, entre nous. »


La fin avait été dite avec un léger rire, tant il est vrai que de telles spécialités ne correspondaient guère à l’idée qu’on se faisait d’une maîtresse d’armes. Et pourtant, sans pouvoir suppléer un droide chirurgical en cas d’hémorragie grave en cas d’accouchement ou de tumeur maligne, elle avait acquis certaines connaissances, estimant au fur et à mesure de son avancement dans l’art de la Guérison qu’avoir un panel plus vaste à sa disposition n’était pas la pire des choses. Bien au contraire.

Reprenant le fil de la conversation, son sourire s’agrandit encore plus quand elle reprit le fil de la conversation, déclarant avec une pointe de malice dans la voix, ses yeux brillants soudain :

« Bien, voilà ce que nous allons faire : tu vas m’attendre dehors le temps que je me rende à peu près présentable, puis nous irons … mettre à l’épreuve tes talents sur d’autres cibles que moi.

Et après Aargau, ce n’est pas ça va manquer. »


Une fois la nautolane sortie, Alyria attira à elle le reste de ses vêtements et entreprit de s’habiller en grimaçant, veillant à couvrir les bandages autour de ses bras avec un vêtement long. Mettre un pied à terre se révéla douloureux, mais pas davantage que lors des dernières séances de rééducation pour confirmer la solidification de ses côtés cassées désormais réparées, et en bonne voie de cicatrisation.Au moins, ses exercices du jour seraient utiles.
Sortant de sa chambre, elle trouva devant elle le Major Olson qui la regarda d’un air très surpris, avant de balbutier :

« Votre excellence, vous ne devriez pas… »

« Allons, je fais juste ma thérapie physique à une autre heure que d’habitude, voilà tout. »

L’air dubitatif, mais pouvant difficilement s’opposer à la Chancelière en exercice, le colosse blond suivit les deux femmes alors qu’Alyria les conduisait d’un pas plus lent qu’à l’accoutumée, mais néanmoins vigoureux vers ascenseur au bout du couloir.

Le trio entra à l’intérieur, et la jedi annonça à la reconnaissance vocale :

« Niveau traumatologie de guerre 2. »
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Wen eut un pâle sourire en entendant le mot d’esprit d’Alyria. Il y avait beaucoup de maîtres qui se prenaient très au sérieux, trop au sérieux. Certains oubliaient qu’ils n’avaient que des enfants en face d’eux. Elle ne cherchait pas à excuser certains cours difficiles avec les gamins agités. Wen était souvent la première à critiquer le manque d’attention de ses camarades, c’était vrai. Mais avec le temps elle s’était aperçue que les padawans de son âge n’avaient pas tous les mêmes capacités de concentration, ni la même maturité et que parfois les maîtres jedi ne savaient pas vraiment s’adapter. Ils manquaient d’autodérision et considéraient que faire correspondre leurs cours et leurs façons d’enseigner était s’abaisser d’une manière ou d’une autre, trahir la grandeur de l’ordre et de la Force. En réalité, il s’agissait juste d’être efficace et compréhensif. Les adultes, les vrais, pouvaient parfois faire preuve d’une obstination à toute épreuve pour paraître sages. Au moins Alyria semblait loin de ce stéréotype.

- Pourrais-je le rencontrer un jour alors ? demanda-t-elle avec un air taquin en faisant référence à l’ancien maître d’Alyria.

La padawan écouta pensivement la maître-d’arme évoquer ce qu’elle pensait des échecs. Wen avait beau savoir qu’ils étaient formateurs, mais elle avait toujours une anxiété sourde à l’idée de décevoir qui que ce soit. Elle ne se l’expliquait pas. Les mots d’Alyria la rassuraient un peu. Elle avait conscience que personne n’était parfait. L’happienne lui expliqua qu’elle avait choisi pour premier padawan un garçon qui n’avait pas de qualités exceptionnelles. La façon dont elle en parlait révélait une réelle fierté. Wen chercha brièvement dans la mémoire, mais elle n’eut nulle réminiscence d’un dénommé Armod. Sans connaître son âge ou sa race et connaissant le va-et-vient du Temple, il y avait peu de chances qu’elle puisse s’en souvenir. Elle tenta de trouver entre elle et lui à travers la façon dont la jeune femme l’évoquait, mais elle avait du mal à se retrouver dans ce lots de qualificatifs peu brillants, était-elle trop orgueilleuse ? Avait-elle tendance à présumer de ses capacités ?

Il lui semblait parfois étrange qu’il existe une société aussi violente et différente que celle où elle avait grandi depuis toujours. Sans en avoir fait les frais directement, il était clair qu’il s’agissait de deux opposés, deux pôles contraires qui se repoussaient mutuellement sur tous les points. Comment était-il seulement possible de vivre et de s’épanouir dans ce genre d’endroit ? Il existait pourtant des êtres attirés par cette abjecte mentalité, qui s’y enfonçait avec délectation. Elle eut un instant dans son esprit la vision fugitive des représentations de la terrible impératrice des Sith dans les médias. Peau rouge semblable à celle de cette race sensuelle qui contrôlait les phéromones, les zeltrons, les traits du visage beaux sans aucun doute, sans âge, une bouche tordue, cruelle, yeux jaunes et sauvages. Elle faisait déjà effet sur le papier, alors en personne ? Comment une telle créature avait-elle pu se retrouver à la tête des Sith ? Les jedi connaissaient-ils seulement son histoire ?

Wen opina du chef au mot traumatologie. Il lui semblait toujours être la discipline à connaître pour un jedi, les membres de l’ordre avaient une tendance presque comique à attirer les ennuis. Elle s’accordait avec Alyria sur certains points.

- Il me semble simplement que c’est celle que doit connaître un jedi en premier. La plus pratique surement, en particulier pour apprendre la guérison par la Force. Je ne désavoue pas les autres. Elles me semblent juste plus… latérales, moins essentielles pour les débutants. Guérir les blessures physiques, c’est simple à comprendre, utiles. Neurologiques, c’est trop complexe, moins immédiat. Je serais cependant intéressée d’entendre vos expériences d’obstétrique. Un accouchement au milieu du désert ? Dans un vaisseau en train de s’écraser ?

La nautolane avait eu un sourire comique qui avait encore accentué ses pommettes déjà proéminentes, même pour quelqu’un de sa race. Alyria Von devait être quelqu’un qui avait un tas d’histoire à raconter. Un éclat dans les yeux de la chancelière suprême mit soudainement la nautolane sur la défensive. C’était le genre de regard qu’avaient les gamins avant de faire une bêtise quelconque, le genre qu’elle devait surement retenir pour être préparée à l’inattendu à venir. Alyria lui demanda de sortir le temps qu’elle s’habille. Wen le fit en se demandant ce qui allait arriver. Elle n’était pas particulièrement inquiète pour elle, la jeune maître jedi était cependant toujours en cours de rémission. Wen s’en voudrait qu’elle se blesse pour lui faire plaisir. « Mettre ses talents à profit sur d’autres ». Elles allaient sans doute gambader dans les autres étages pour soigner d’autres gens. Les pauvres.

Le colosse blond n’avait pas bougé. Droit comme un poteau dans le couloir, mâchoire serrée. Quel était son nom déjà ? Le Major Olson. Le major Olson devait sans outre être le prototype du chic type trop strict et normé pour son bien. Il accorda un regard de mauvaise humeur rapide à la nautolane. Cette dernière approcha de lui avec un grand sourire aimable et lui tendit ses petits bonbons participant à la richesse des jedi. Le militaire observa un bref instant les petites boules marron au fond du sac. Avec mauvaise grâce il en prit une poignée dans son énorme poing avec un sourire d’encouragement de Wen. Satisfaite, elle se recula tandis qu’au même moment Alyria sortit de sa chambre d’hôpital, prête à se lancer à l’assaut du monde. D’un mouvement rapide, Olson s’était placé devant la chancelière, alarmé. Elle le rembarra sans brutalité. Que pouvait-il faire après tout ?

Wen la suivit jusqu’à l’ascenseur, les portes de ce dernier s’ouvrir dans un glissement silencieux. Le petit groupe entra dedans tandis qu’Aly donnait la destination. Traumatologie de guerre, niveau 2. Ils descendirent dans les profondeurs. L’ascendeur parcourut plusieurs dizaines d’étages en quelques instants, petit miracle de la technologie du Noyau. L’hôpital ressemblait à une vaste et complexe machinerie avec ses multiples rouages bien réglés. Ce sentiment fut plus fort quand les portes s’ouvrirent à nouveau sur des couloirs immaculés et à ce qui ressemblait à une vaste salle d’accueil où deux Ithoriennes vêtues de blanc discutaient, en pause sans nul doute. Derrière elles, d’autres portes et couloirs.

L’endroit semblaient calmes, mais il semblait résonner au loin des voix indistinctes qui parlaient ou criaient de douleur. Il devait y avoir des blessures de guerre si graves qu’elles ne devaient jamais disparaître. Où aller ? De quelles blessures Alyria allait-elle décider de s’occuper ? Wen lui lança un bref regard interrogatif.
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Tout en attendant patiemment d’arriver au niveau 2 du département de traumatologie, Alyria en profita pour reprendre sa conversation avec Wen et répondre aux questions qu’elle avait laissé en suspens le temps de se préparer pour cette petite excursion médicale.

« Je n’ai pas effectué d’accouchement dans de telles conditions et heureusement. Mais même sans ça, il arrive que l’on tombe sur des situations assez délicates…

Quand j’étais encore padawan, mon maître et moi dormions chez un indic’… Quand sa femme s’est mise à avoir des contractions extrêmement fortes dans la nuit, et dans l’espace hutt… Les hôpitaux ne sont ni monnaie courante, ni bon marché. Bref, nous avons dû jouer les sages-femmes d’urgence.

C’était la première fois que j’étais confrontée à ce type de procédures, et franchement… J’aurais préféré me trouver à des lieux de là. Sauf que je n’avais pas le choix, et qu’avec le temps… Je me dis que ce genre de moment contient sa récompense pour ce qu’il amène en ce monde. »


Elle devait avoir environ seize ans à l’époque, et devait reconnaître que cette expérience avait été salutaire pour son devenir de jedi. A force d’accompagner un Ombre dans les pires recoins de la galaxie, la padawan qu’elle était alors avait fini par se décourager face à l’immensité de leur mission, des torts à réparer, se sentant inutile. Mais ce petit moment de lumière avait ravivé sa foi dans la nécessité d’avoir des jedis déployés partout, et dans leur capacité à apporter le bien, même lors d’une traque des ténèbres. Il fallait se contenter de ces instants, les chérir, et les porter en étendard au fond de son cœur pour ne jamais perdre de vue ce qu’était réellement la tâche d’un jedi : préférer la vie, envers et contre tout.

S’arrachant à ses pensées comme les portes de l’ascenceur s’ouvraient, Alyria ajouta avec un mince sourire :

« Si Maître Lond revient de sa surveillance de la Bordure… Peut-être que je te le présenterais oui. »

Depuis la fin de sa formation, la présence au Temple de son ancien maître s’était faite de plus en plus rare, le twi’lek retrouvant sa vocation d’Ombre pour s’enfoncer dans les profondeurs de la galaxie, ne revenant qu’en de rares occasions pour référer de l’avancée de ses recherches et enquêtes au Conseil, ou soigner ses blessures. Du coup, Alyria ne le voyait qu’en de rares occasions, et même si elle connaissait par cœur le numéro d’urgence de son comlink, elle n’avait pas cherché à le contacter, sachant que son travail exigeait la plus grande discrétion et qu’il fallait donc éviter de tenter de le joindre au mauvais moment. Bien sûr, elle se demandait souvent ce qu’il devenait, ce qu’il aurait pensé en voyant sa protégée devenir Chancelière de la République, même si c’était à son corps défendant. L’excentrique alien avait toujours professé qu’il voulait un apprenti unique, destiné à accomplir de grandes choses. La jedi avait toujours trouvé l’idée grotesque. A présent, elle se demandait si ce dernier n’avait pas vu des fragments du futur dans la Force Unificatrice… Même si elle n’aurait jamais la réponse, et ne tenait pas réellement à l’avoir. Son passage à la Chancellerie n’était en rien l’aboutissement de son existence de jedi, mais plutôt un accident de parcours, une farce du destin, qui se terminerait bientôt.

Avançant dans la grande allée aux murs immaculés, Alyria s’adressa à l’un des médecins passant par-là, qui manqua s’étrangler en voyant la Chancelière baguenauder en dehors de sa chambre. Elle coupa court néanmoins à ses protestations, avant de présenter Wen rapidement en tant qu’envoyée du Medcorps jedi. Elle lui demanda ensuite quelques indications sur les blessés présents, arguant qu’il était du devoir de la Chancelière de s’enquérir personnellement de l’état de ceux ayant combattu à sa demande. D’abord surpris, l’homme finit par donner les informations sous la forme d’un datapad, avant de s’excuser et de rejoindre une des salles, sans doute pour vérifier la santé d’un de ses patients. La jedi parcourut la liste, puis choisit enfin un nom qui l’intéressait. Elle fit signe à Wen de la suivre et finit pat entrer dans une petite pièce.
Là, une femme d’une quarantaine d’années, au visage couturé de cicatrices, reposait dans un lit, des bandages entourant le haut de son corps. L’odeur de bacta qui se dégageait laissait à penser qu’elle avait dû séjourner dans une cuve un petit moment. Elle s’approcha de la soldate, et déclara :

« Padawan Janto, voici le Major Scudavera, blessée lors de l’assaut sur la base sith d’Aargau. Major, je suis… »

« Oh punaise la Chancelière ! Euh, j’veux dire, merde, euh… »

Etouffant le rire qui lui venait, Alyria réussit à garder son sérieux avant de dire avec gentillesse :

« Enchantée Major. J’ai emmené cette jeune fille pour l’aider à se perfectionner dans les arts de la médecine. Ça vous dérange si elle vous examine ? »

« Euh… Ben non… Ça fera que la cinquantième à le faire, alors une de plus ou d’moins… »

« Merci. »

Se tournant vers Wen, elle lui dit :

« La première chose à faire est d’examiner le blessé. A ce niveau 2, les blessés sont en convalescence, donc tu vas t’entraîner à détecter les différentes traces laissées dans la Force et sur le corps des victimes par un choc, puis à diagnostiquer précisément leurs symptômes.

Il y a deux façons de le faire. L’une est de remonter le cours de la Force unificatrice, et de chercher les ruptures entre elle et le sujet. L’autre est de s’immerger dans la Force Vivante et d’examiner les flux traversant le patient.

Aucune des deux n’est préférable à l’autre ou plus efficace, cela dépend simplement de la sensibilité de chacun. Dans l’idéal, mieux vaut être familier avec les deux, histoire d’être paré à toute éventualité, mais dans un premier temps, tu peux choisir une seule méthode. »


Elle revérifia le dossier du Major Scudavera, qui contenait le rapport détaillé des blessures reçues, à savoir une quadruple fracture des côtes et une atteinte légère à la moelle épinière.

« Certains préfèrent regarder dans la Force en premier, d’autres examinent d’abord la victime… Et certains font les deux en même temps.

Personnellement, je recommande cette approche qui permet d’avoir deux visions complémentaires, mais c’est peut-être un peu complexe à faire sans expérience. »


Elle s’arrêta, puis la laissa passer devant et avec un sourire, lui indiqua qu’il était temps d’essayer elle-même :

« C’est à toi de jouer. »
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Wen tenta de s'imaginer dans une situation d'accouchement impromptu. Elle ne connaissait pas grand-chose aux bébés, aux femmes qui attendaient des bébés et encore moins l'acte d'enfantement lui-même. Elle se demandait si beaucoup de gens de la galaxie étaient aussi ignorants qu'elle à ce sujet ou si le Temple restait très secret à ce propos. Parfois la sensation de vivre dans un vase clos privilégié et hors de la galaxie refaisait surface, un sentiment commun à de nombreux padawans et initiés dans cet univers monacal parfois étouffant.

Les yeux de Wen brillèrent. Maître Lond avait déjà obtenu dans son esprit le statut de légende de l'Ordre, dans l'ombre certes, mais cela n'enlevait rien à son titre imposant. Il ne pouvait exister qu'un être exceptionnel pour avoir su repérer, former et façonner une jedi telle qu'Alyria Von. L'optique de le rencontrer un jour, aussi lointain ce jour puisse-t-il être, la mettait étrangement en joie. La padawan avait l’impression d'être privilégiée, d'avoir gagner la confiance de la maître d'arme. Le rôle de l'ancien maître d'Alyria devait avoir énormément de responsabilités : être sentinelle n'était pas une voie facile et beaucoup d'entre elles avaient une durée de vie limitée. C'était une vie de danger, souvent à la marge de la civilisation et du temple lui-même, mal-à-l'aise avec la part la plus ambiguë de ses troupes, comme un sujet tabou que l'on relaye au fond du placard lors des repas de famille, un secret honteux.

Ce genre de réflexion mettait toujours Wen dans l'embarras quant à son avenir et à l'éternelle question de la voie à suivre, comme s'il était nécessaire que l'Ordre la fasse entrer dans une petite case. Mais n'était-ce pas déjà le cas ? N'avait-elle déjà pas été choisie quand d'autres étaient envoyés dans les corps car ils n'avaient pas attiré l’œil d'un maître jedi ? La padawan chassa ces pensées. Elles étaient mauvaises. Elle avait presque l'impression de blasphémer. L'Ordre n'était pas parfait, rien ni personne ne l'était, mais c'était une organisation bien plus digne que beaucoup d'autres. Elle ne devait pas laisser ses doutes et ses failles lui faire perdre sa foi en la Force. Elle saurait la guider le moment venu, quand il faudrait faire un choix, mais pas maintenant.

En attendant elle devrait apprendre. Un médecin frôla la syncope en voyant la chancelière se promener libre comme l'air dans les allées de l'immense hôpital. Wen renifla. Cet étage sentait les médicaments de manière encore plus manifeste qu'à l'étage de la chancelière. Comme toujours dans ces lieux stressants l'atmosphère était tendue, c'était visible jusque dans la Force qui avait une résonance particulière, Wen sentait qu'elle avait tendance à être sur ses gardes. Comme si sa sensibilité hors normes faisait écho aux pensées chaotiques des blessés et traumatisés de guerre dans leur difficile convalescence. Beaucoup deviendraient des êtres méfiants et bercés par les désillusions.

Alyria sembla choisir un cas qui l'intéressait parmi le datapad que le médecin lui avait passé. Wen dansa un peu sur place en attendant, puis elles entrèrent finalement dans une petite salle blanche. La major Scudavera semblait en avoir connu de dures, avec ses cicatrices et l'odeur lisse du bacta qui imprégnait jusqu'aux murs. La nautolane eut un petit sourire devant le visage étonné de la femme de guerre, surprise de l'intérêt soudain d'un éminent membre du gouvernement pour sa personne, sa personne qu'elle pensait peu importante. Wen était persuadée que la major était très courageuse. Elle allait faire de son mieux pour la soigner un peu, selon ses maigres compétences. Elle lui adressa un signe de tête amical derrière l'épaule d'Alyria.

- Bien comprendre la situation avant d'agir, fit doucement Wen en écho aux mots de la chancelière.

Elle pouvait déjà voir les blessures physiques, mais quiconque était né avec le don de la Force savait que la réalité était plus approfondie que ce que les yeux voyaient. Les blessures étaient cependant répartie sur le haut du corps. Par timidité, peut-être avait-elle tort, Wen n'osa pas défaire les bandages de sa patiente du moment. La toute première, se dit-elle avec une pointe d'émotion.

- Ce sont les côtes n'est-ce pas ?

- Ouais… Saleté d'éclat de missiles… Mais ça encore ça va, c'est surtout la moelle épinière qui a inquiété les médecins… mais ça va. C'est en bonne voie.

Une zone sensible, même dans la Force. Elle le remarquerait sans doute rapidement. Wen avait senti uen pointe d'inquiétude dans la voie et la posture un peu raide de la major. Elle se souvenait bien de la façon de procédé des medcorps. Il fallait toujours rassurer le patient, la tension pouvait troubler les connexions et les flux, car dans la Force le corps et l'esprit sont étrangement liés, comme un miroir et son reflet. Peut-être étaient-ce la jeunesse et la gaucherie de la douce Wen qui provoquaient la méfiance instinctive de la militaire.

- Je ne vais pas commencer par vous soigner immédiatement. Vous avez entendu la chancelière. Je vais simplement analyser la Force, vous me sentirez à peine.

Elle avait parlé d'une voix douce et apaisante et tenter de persuader la major de ses mots, mais ce n'était pas une technique qu'elle maîtrisait très bien. Scudavera devrait donc se contenter de sa parole pour cette fois, mais elle sentit tout de même la convalescente se détendre un peu.

Elle ne prémédita pas un usage ou une conception particulier de la Force et se contenta de se laisser plonger comme elle l’avait fait avec les blessures d'Alyria. Tout comme les blessures de cette dernière, celles du major Scudavera étaient en voie de guérison, mais il y avait toujours un peu de travail.

Par réflexe ou par habitude, Wen examina d'abord les flux. En effet ils étaient un peu génés dans leur cours, discontinus, elle devina qu'il s'agissait des côtes. En outre la blessure à la moelle épinière se révéla moins grave que ce qu'elle avait imaginé. En parcourant les autres flux elle sentit les hématomes et les vieilles cicatrices qui gardaient une trace diffuse du passé. Trois… Quatre fractures pour les côtes, et la blessure à la colonne vertébrale devait encore la gêner…

- Les côtes… Il y en a quatre qui sont cassées… La moelle épinière est en bonne voie de rémission aussi. Si vous gardez le moral tout se passera bien. Je peux essayer d'arranger la colonne vertébrale, le flux est un peu difficile. Vous devez le sentir.

Wen jeta un regard interrogatif à la maître-d'arme.
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Certes, un bon guérisseur jedi requérait une parfaite maîtrise de la Force, des connaissances encyclopédiques sur l’anatomie, l’épidémiologie, la botanique, une vivacité d’esprit, une excellente capacité d’analyse… Et la plupart possédait cet ensemble, travaillant sans cesse leurs dons. Pour autant, selon Alyria, le plus important demeurait le contact avec le patient.

Evidemment, certains de ses camarades auraient émis un profond désaccord avec ce jugement, mais avec le temps, la gardienne avait fini par comprendre que la mise en confiance des malades, la proximité avec ces derniers permettaient de diminuer les rechutes et complications de moitié, et cela par des facteurs psychologiques qu’il ne fallait pas sous-estimer. Quelqu’un qui avait confiance en son médecin, dans son diagnostic, qui posait les bonnes questions et s’intéressait plutôt que de subir les choses en ayant l’impression d’être balloté d’un spécialiste à l’autre pouvait perdre sa combativité, ou afficher une attitude blasée.

A vrai dire, la maîtresse d’armes avait l’impression que le Major Scudavera était un peu dans cette situation. Un coup d’œil sur ses états de service lui indiqua qu’elle était une « cliente » régulière des hôpitaux militaires, toujours en première ligne, souvent blessée, et avec plus de décorations que tout un quarteron de généraux. Une sacrée femme en somme, qui devait en avoir assez de passer la moitié de son existence entre quatre murs blancs, à se faire examiner par la terre entirère. Alyria sentit une bouffée de sympathie l’envahir, et tandis que Wen commençait son examen, elle s’assit dans le fauteuil prévu pour les visiteurs, avant de continuer sa brève conversation, essentiellement pour détourner l’attention de la patiente et laisser à la jeune nautolane tout le loisir de l’examiner à son gré.

« Aargau, hein ? Vous étiez parmi les troupes d’assaut ? »

« Affirmatif, M’dame, j’étais dans les premiers à pénétrer ce foutu bunker, avec le grand sec et le costaud qui commandaient. Des jedis comme vous. Pas très causants, mais foutrement efficaces. Sauf vot’ respect, M’dame ! »


La référence arracha un sourire à la jedi, qui ne manqua pas de reconnaître les individus auxquels la soldate faisait référence, aussi elle répondit avec intérêt :

« C’est impressionnant Major. Je ne savais pas que vous aviez côtoyé les maîtres Tianesli et Vocklan. »

« Si si, j’étais avec l’épicanthix, mais le grand sec est arrivé après, et puis on a pris le bunker. Enfin, y a un saligaud qu’essayait de se barrer qui a balancé une grenade, et j’me suis retrouvée dans les choux. Comme d’hab, quoi. »

Alyria hocha la tête, avant de se tourner vers Wen quand cette dernière demanda l’autorisation d’aller plus loin et de s’entraîner à la guérison de façon plus immédiate. La demi-echanie se leva et se rapprocha du lit de la patiente, avant de dire doucement :

« C’est exact. Et si tu t’en sens capable, tu peux essayer. A condition que le Major Scudavera soit d’accord, bien évidemment. »

La blessée fixa la jeune fille avec circonspection, avant de siffler :

« Z’allez essayer vos trucs de jedis, avec la Force et tout ? »


Alyria ne sentait pas de peur chez la militaire, mais plus une méfiance instinctive face à quelque chose qu’elle ne pouvait voir, et que personne ne lui avait sans doute jamais expliqué. Affichant une expression sereine, la Chancelière expliqua sans brusquerie aucune :

« Oui, maintenant que votre état est stabilité, la padawan Janto est à même d’identifier avec précision les lésions de votre colonne, afin de les résorber peu à peu. En résumé, elle va tenter d’accélérer votre métabolisme, vos capacités naturelles de guérison… Un peu comme le font les cuves de bacta ou de kolto. »

« Comme… un genre de médoc à effet rapide ? C’est ça la Force ? »

« On… peut voir ça comme ça dans le cas présent, disons. C’est… comme votre sang, en quelque sorte, constitutif de qui vous êtes, c’est un flux qui vous parcourt, et sur lequel nous pouvons agir. »

« Genre, vous régulez ? »

« C’est cela. »

« Bon… ok. Allez-y, faut que la jeunesse se forme ! Mais si tu pouvais éviter de me mettre en vrac, j’apprécierais, ma mignonne. C’est pas que, mais j’ai des gosses à revoir moi.»


Bon ce n’était peut-être pas le feu vert donné avec le plus d’assurance mais… C’était toujours ça. Et en plus, Alyria commençait à trouver cette petite discussion avec le Major rafraîchissante. Manifestement, elle avait fini par oublier le rang de celle à qui elle parlait pour retrouver son naturel franc du collier, et la jedi devait avouer que c’était agréable d’avoir une conversation sans rond de jambe, pour une fois.

« Tu peux y aller Wen, souviens-toi de tout ce que tu as appris pour contrôler le flux. »

Elle-même s’ouvrit plus profondément à la Force, afin de vérifier le travail de la jeune fille. Non pas qu’elle ne lui fasse pas confiance, au contraire même, mais une enseignante se devait de faire passer le bien-être du patient avant son appréciation d’un élève. Enfin, normalement, elle n’aurait pas à intervenir.
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Wen ne doutait pas un seul instant que les maîtres Vocklan et Tianesli pouvaient marquer les esprits de leurs subordonnés même si la jeune padawan ne les avait rencontré que peu. Les maîtres jedi avaient toujours cette prestance qui tenait de leur compréhension inhérente de la Force, cette forme de sérénité tranquille qui pouvait intimider certaines personnes. Il fallait aussi reconnaître leur côté un peu taciturne évidemment. Wen aimait bien le major Scudavera. C'était une femme directe et honnête, elle avait l'air d'être loyale à la République et de faire honneur à l'armée. En plus de cela elle avait eu la gentillesse d'accepter que Wen la soigne, ce qui n'était pas rien. D’autant plus la nature des risques que cela pouvait entraîner.

D’un bref signe de tête, la jeune fille montra qu’elle était prête à appliquer ce qu’elle avait appris. Alyria était une professeure patiente et bienveillante. Il était fascinant de voir à quel point elle appréciait de guider ses protégés.

- Je vous remercie Major. Je ne vous ferai pas de mal. Comme l'a dit maître Von, je vais me contenter d'accélérer le cours naturel des choses sans les altérer.

Wen avait naturellement une certaine appréhension à se lancer dans le grand bain. Elle allait devoir d’exercer sur un vrai être humain, avec une vie, des proches, des amis… Une sacrée épreuve. Mais la padawan souhaitait réellement progresser sur les voies de la Force Elle tentait donc pour s'apaiser autant que pour rassurer le major de lui parler. Elle avait l'impression qu'en calmant le patient elle se calmerait également. En plus elle n’avait pas l’air des plus rassurée, la major. C’était compréhensible. Pour ceux qui n’avaient pas de lien avec la Force, c’était plus une sorte de magie mystérieuse qu’une réalité concrète qui obéissait à des règles et qui pouvait s’avérer utile en de nombreuses situations.

- Donc vous avez des enfants, major ? Quel âge ont-ils ?

Elle allait se lancer dans une affaire complexe, il fallait bien l’admettre. Etait-il bien raisonnable qu’elle se concentre à la fois sur une discussion avec la major et sur sa tâche ô combien nouvelle difficile. Mais Wen songea qu’elle avait choisi le moyen le plus adapté. Le stress d’un individu se ressentait dans la Force vivante comme les ondes de l’eau calme troublée par une pierre. Elle commença à se concentrer tandis que la major reprenait d’une voix un peu adoucie. Wen percevait sa voix comme déformée tandis qu’elle observait le flux de la Force, repérant l’endroit où le flux était moins fluide, moins évident.

- Ouais, un grand et un petit. Que des mecs, tu parles d’une malédiction. Kellan a 15 ans et Alar 6 ans.

Wen commença à rétablir doucement les flux. Il y avait des dizaines de petites connexions à refaire, c’était un travail précis et exigeant. Au moins les côtes étaient un endroit moins sensible pour débuter que la moelle épinière. Elle n’avait aucune envie de faire l’usage de ses jambes à qui que ce soit. Les blessures devaient être douloureuses, quand on était touché aux côtes le moindre mouvement devenait une torture.

- Vous enfants et monsieur Scuvadera ne sont pas trop inquiétés ?

- Ils ont l’habitude. Ils me suivent au gré des affectations, viennent me voir quand je suis blessée. Ils étaient là hier. Mais Kellan a un gros examen, du coup je préfère qu’il taffe un minimum aujourd’hui.

La vie de militaire ne devait définitivement pas être une sinécure. La jeune nautolane tenta de manipuler la Force de façon à ce que les raccords se refassent doucement, pour que le soin aille plus vite et se fasse à terme de manière plus saine, meilleur même qu’avec le balta. Il n’était cependant pas aisé quand on était habitué à ne pas agir de manière directe sur les choses. C’était ainsi, Wen avait toujours été habituée à observer la Force, à l’analyser, à la sentir. Etait-ce l’absence de la présence d’un maître attitré pour la guider durant son apprentissage qui avait abouti à un manque de pratique ? Ou bien était-ce la philosophie jedi, peu ancré dans la Force Vivante, qui faisait que certains padawans se cantonnaient à une pratique méditative et passive de ces flux ?

- Est-ce que vous vous sentez-mieux ? demanda doucement Wen à la major.

Elle jeta au passage un regard soucieux à Alyria. Elle avait fait de son mieux mais elle avait la vague impression qu’elle n’avait pas parfaitement réussi l’exercice. Scudavera tendit la main pour toucher prudemment ses côtes. Sur un bras elle avait une jolie collection de vieilles cicatrices. Elle devrait être dans l’armée depuis des années.

- Ça me lance toujours un peu. Mais ça va un peu mieux, admit-elle d’un ton un peu bourru. Je suis moins groggy qu’en sortant de mon bacta.
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En observant Wen discuter avec sa patiente tout en se concentrant sur sa tâche à effectuer, Alyria ne put s’empêcher de sourire doucement. La jeune fille avait compris ce que certains jedis mettaient parfois des années à réaliser : la Force pouvait beaucoup, mais le contact humain était indispensable pour maximiser son efficacité. Il ne s’agissait pas uniquement de guérir plaies et bosses, mais aussi de se rendre compte qu’il s’agissait d’une personne vivante sur ce lit d’hôpital, avec ses aspirations, son passé, sa famille… Parler, c’était déjà un peu soigner, car cela apaisait les tensions des malades ou blessés qui se laissaient plus facilement aller, permettant un équilibre de leurs flux internes et donc un meilleur passage de la Force.

Certes, passé un certain stade, les maîtres guérisseurs finissaient par savoir contourner les perturbations induites par les difficultés sur le terrain ou la souffrance, pour autant, l’apprentissage devait commencer par la base, et cette dernière consistait en des actes simples : poser un diagnostic, interroger calmement le patient, le rassurer, puis tenter d’améliorer ses conditions de vie dans la mesure du possible. Même si les médicaments avaient des effets particulièrement positifs, un certain nombre, surtout les anabolisants, avaient la fâcheuse tendance de ne faire qu’endormir la douleur et d’introduire une forme de dépendance. La guérison prenait donc plus de temps qu’avec un traitement par la Force, ce qui expliquait pourquoi les traumatologues étaient souvent recherchés par les unités militaires, et unanimement appréciés pour leurs services. Dommage qu’ils soient si rares, au fond.

Pour autant, la Chancelière prenait aussi plaisir à mieux connaître un de ses soldats, tout simplement. Elle avait conscience de porter sur ses épaules une partie des responsabilités qui faisaient que le Major Scudavera, et bien d’autres d’ailleurs, reposait dans cet hôpital militaire, parce qu’elle avait ordonné l’assaut sur cette base militaire. Bien sûr, le choix avait été simple, la République ainsi que les jedis ne pouvaient se permettre de laisser une force ennemie aux portes d’Aargau. Pour autant, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver une certaine culpabilité à l’idée d’avoir contribué, même contre sa volonté première, à la mort de personnes qui auraient aimé rester un peu plus avec leurs proches. Tous connaissaient leurs devoirs, mais la perte n’en était pas moins douloureuse.

S’asseyant sur une des chaises pour les visiteurs, tout en vérifiant dans la Force les progrès de Wen, Alyria questionna la soldate à son tour, essayant de la distraire au mieux pour donner toute latitude à la nautolane dans l’administration de ses soins :

« Votre mari exerce quel métier ? »

« Jorg ? Il est mécano. Et comme y en a toujours besoin, ben, il trouve du boulot où je vais. J’l’avais fait prendre sur Aargau, les contrats étaient bons, et pis, marié à une militaire… ça rassurait la hiérarchie là-bas.

Y’m’a dit qu’y avait eu un gros bazar là-bas d’ailleurs, une histoire de fuite de fioul où je sais pas quoi, enfin, j’ai pas trop pigé, j’étais dans les vapes.

Mais c’est p’tet intéressant pour vous, M’dame. »


La trentenaire ne put s’empêcher de trouver touchant le fait que la Major désire l’informer d’un dysfonctionnement sur le terrain, même si elle avait été mis au courant de cet incident par les rapports circonstanciés de son Ministre de la Défense, qui enquêtait pour savoir d’où était survenu le problème. Si l’ennui technique ou l’erreur humaine n’était pas à exclure, le vieil echani n’excluait clairement pas la tentative de sabotage pour ralentir les efforts de l’impitoyable machinerie républicaine. Etant donné ses piètres talents de mécanicienne, elle-même n’y avait guère compris grand-chose, et s’était contentée de renvoyer un message lui donnant toute latitude pour résoudre cette affaire en interne.

« Toute information est bonne à prendre pour améliorer l’efficacité de l’armée républicaine, Major. Le témoignage de votre époux pourrait être précieux. »

« Ah ben… J’lui en toucherais deux mots alors… »

Constatant que Wen avait fini, Alyria se leva pour examiner son travail, écoutant leur patiente admettre qu’elle se sentait un peu mieux. Une fois son contrôle terminé, elle souffla à l’attention de la jeune fille :

« N’oublie pas de vérifier le passage des messages nerveux quand tu achèves une guérison, afin d’être sûre que les neuro-transmetteurs ont été correctement raccordés. Parfois, on se focalise sur les os, les vaisseaux sanguins, les muscles, tout en oubliant les éléments plus petits qui coordonnent pourtant l’ensemble. »

D’une main experte, la jedi toucha la militaire et termina le travail de Wen, corrigeant quelques menues scories, puis s’éloigna avant de la complimenter :

« Mais c’est très bien pour un début. »

Après avoir discuté encore quelques instants avec le Major Scudavera, Alyria prit congé de l’officier pour lui permettre de se reposer, et tout en revenant à leur ascenseur, la demi-echanie détaille la suite de leur programme :

« Je vais t’emmener dans un autre département. La guérison ne se limite pas uniquement à traiter le choc initial… Mais souvent à limiter les traumatismes induits par la blessure en elle-même. Un bon guérisseur doit connaître les bases pour commencer le processus … Et savoir que le processus de reconstruction ne s’arrête jamais là. »

Elle appuya sur un des derniers boutons, et l’ascenceur s’ébranla. Dix bonnes minutes plus tard, elles arrivèrent enfin à bon port et sortirent de là. Un panneau blanc indiquait : Service des amputations et de la rééducation.

« Ici se trouvent ceux pour qui toute la science du monde n’a rien pu faire… Mais qui peuvent quand même apprendre à retrouver le contrôle de leur corps, à condition d’avoir les soins adaptés.

Un certain nombre de guérisseurs de l’Ordre sont d’excellents prothésistes. C’est aussi un savoir important, au moins pour savoir comment sauvegarder un moignon en bon état si une coupe s’avère trop nette pour pouvoir sauver le membre en effectuant une chirurgie d’urgence. »


Son premier padawan n’avait pas su, parce qu’elle n’avait jamais pensé à lui enseigner cela, et aujourd’hui, elle en payait toujours le prix, comme en témoignait l’éclat de son poignet gauche sur lequel vint se refléter un rayon de soleil ayant traversé l’une des baies vitrées de l’étage.

On disait qu’on apprenait de ses erreurs. Alyria tenait à ce que ce proverbe devienne une réalité.
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Wen adressa un sourire radieux à Alyria. Pendant qu'elle travaillait et qu'elle soignait la major elle avait entendu la façon dont la maître d'arme avait parlé à la patiente. Elle avait aidé la nautolane à rester concentrée sur la guérison en distrayant la militaire à sa place, lui permettant de parvenir au bout de sa tâche. Ceci dit, l'élève n'avait pas vraiment suivi la conversation tant elle s'appliquait sur sa tâche. Après cet épisode, Wen avait la sincère impression d'avoir compris les bases de la guérison et de pouvoir utiliser cette technique. De manière encore imparfaite, elle avait encore à apprendre, mais elle sentait pouvoir exercer des soins de base dans des situations difficiles et des missions qui nécessitaient ce genre de talent. Ses « réparations » n'étaient pas impeccables. La maître jedi se chargea elle-même de mettre en ordre quelques détails, notamment des petites liaisons faciles à oublier.

Elle jeta un regard furtif à la major. Elle avait l'air satisfaite de leur petit passage, d’aller mieux. Sans doute avait-il suffi qu’elle puisse parler à quelqu’un, un peu. Wen se demanda combien de temps la guérison qu'elle avait opérée avec l'aide d'Alyria Scudavera allait-elle gagné sur la totalité passée dans cet hôpital de Coruscant. Une semaine ? Plus ? Elle ne connaissait pas encore assez bien ses capacités ou le temps de repos nécessaire après des blessures reçues qu'elle ne pouvait pas le déterminer. Avant de quitter la salle, Wen s’abaissa pour saluer la femme.

Alyria avait déjà pris de l’avance. Elle se dirigeait vers l’ascenseur. Wen trottina à sa suite pour la rattraper. Elle se demandait quelle était la suite du programme. La maître-d’armes avait surement autre chose de prévue, ce n’était pas tous les jours qu’elles pouvaient passer du temps ensemble. C’était dans ces moments-là que Wen n’avait qu’une seule hâte : devenir définitivement la padawan du maître Von pour progresser rapidement, rattraper le retard qu’elle avait par rapport à ses camarades futurs jedi et devenir à son tour chevalier. Mais la situation n’était pas aussi idyllique, Alyria n’avait pas le temps pour le moment. Wen se devait alors de se contenter de ces brèves rencontres, ces instants où elle apprenait le plus.

L’happienne pressa un bouton et l’ascenseur commença sa route, un voyage interminable durant lequel Wen tenta de comprendre ce qu’elle avait dit. Les traumatismes induits par la blessure elle-même… La guérison était donc un travail qui avait également lieu sur le plus long terme. Il ne semblait pas à la nautolane avoir abordé cette notion de la technique mais était curieuse d’en savoir plus. Elle avait cependant du mal à imaginer l’utilité de cette dernière dans son existence de jedi. Elle ne souhaitait toujours pas devenir infirmière. Elle aspirait à plus, n’en déplaise à certains membres du conseil… Pendant qu’elle râlait intérieurement, l’ascenseur s’arrêtait à bon port. Wen descendit prudemment, toujours sur les talons d’Alyria, comme une ombre.

Service des amputations et de la rééducation… Wen réprima tant bien que mal un frisson. Elle avait eu il y a longtemps dans un livre qu’elle avait trouvé dans les tréfonds de la bibliothèque du temple d’Ondéron que les malades avaient un statut particulier dans de nombreuses sociétés. Particulier, il ne fallait entendre rien de positif dans ce terme. La maladie visible était un signe de faiblesse qui entraînait un rejet des pairs, comme un réflexe anthropologique primal. Il y avait une théorie comme quoi ils nous rappelaient la faiblesse de l’existence, nous ramenait à la peur de la mort ou de la perte de l’intégrité physique ou mentale. C’était pour cela que le sentiment qui habitait de nombreux individus en voyant une personne différente était le dégoût ou une sorte de curiosité morbide. Cela avait été le premier réflexe de Wen, mais elle se souvint que même Alryria avait perdu sa main.

- C’est vrai que beaucoup de personnes au sein de jedi ont des blessures assez graves, fit timidement Wen en lorgnant discrètement la main de fer du maître Von qui reflétait un éclat de lumière. Les sabres lasers sont sans doute responsables de nombreuses coupures trop nettes.

Le sabre laser n’était définitivement pas une arme à prendre à la légère. Pas plus que les dangers que la vie de jedi. Jedi signifiait faire partie de l’élite de l’ordre après tout.

Wen reporta son attention autour d’elle. La Force indiquait à la fois souffrance. Sans des rééducations difficiles, de la tristesse mais aussi un sentiment plus serein que celui qu’elle avait connu aux étages supérieurs. Sans doute car il s’agissait de blessures anciennes, que le choc était passé et que certains patients se remettaient doucement jusqu’à pouvoir sortir. Il y en avait d’ailleurs quelques-uns dans les couloirs, dont un homme âgé avec une béquille.

Ce dernier avait une prothèse sur une moitié de la jambe, mais la prothèse de semblait pas être définitive. Wen ne luis reconnaissait cette forme ou cette manière qui faisait qu’on la remarquait à peine car elles éraient à présent si perfectionnées qu’elles remplaçaient parfois parfaitement un membre. L’homme avançait prudemment, c’était surement son premier essai. Une infirmière ithorienne suivait son avancée d’un œil professionnel et attentif. Wen avait la sensation qu’il avait déjà rejeté plusieurs prothèses.

- Quant à moi, à part vous je ne connais personne de proche qui ait une prothèse. Je ne sais pas grand-chose de ce que cela implique médicalement ou par rapport aux talents particuliers des jedi. Il ne me semble pas que les medcorps l’aient évoqué.

Les grands yeux noirs et curieux de la nautolane s’était reportés sur Alyria. Elle était sincère, elle ne savait pas où la maître jedi souhaitait en venir, ni où elle désirait aller. Elle avait cependant la certitude qu’il s’agissait d’un enseignement assez rare dont elle pourrait un jour ou l’autre tirer partie.
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Quand elle vit les yeux de la nautolane fureter vers sa propre main, Alyria ne put s’empêcher de sourire doucement, même si son expression tenait plus du rictus mélancolique que du rire joyeux. Son surnom indiquait bien la spécificité de cette partie de son anatomie qui n’était plus de chair depuis longtemps. La Main brisée… Avec le temps, elle s’était habituée à cette appellation, malgré la charge émotionnelle qu’elle impliquait. Avant qu’elle n’arrive à accepter son sort, à dépasser ses appréhensions et son malaise vis-à-vis de ce bout de métal greffé à son poignet, entendre ces trois mots la hérissaient. Maintenant qu’elle avait progressé, mûri à ce sujet, grâce à toutes les discussions qu’elle avait eues avec ses amis et les épreuves qu’elle avait traversées, il lui était assez indifférent, presque comme le souvenir d’un temps où son principal souci n’était pas l’avenir de la République, mais le sien. Comme quoi, s’inscrire dans un tout plus grand que soi pouvait avoir des vertus inopinées.

Cependant, cela signifiait surtout que la maîtresse d’armes connaissait mieux que personne l’ensemble d’un processus douloureux qu’on enseignait rarement. Les jedis apprenaient à soigner les blessures ouvertes, à maintenir en vie… Mais après ? Il y avait, justement, une nouvelle vie qu’il fallait apprivoiser. Et surtout, rares étaient ceux qui avaient suffisamment de connaissance pour savoir quoi faire quand leur partenaire perdait un membre sous leurs yeux. Elle n’avait pas enseigné cela à Armod. Il fallait qu’elle le fasse avec Wen. Surtout, au-delà de cet aspect, la gardienne désirait que la jeune fille voit par ses yeux la réalité des traumatismes, sans fard ni bienveillance. C’était pour cela qu’elle lui faisait visiter un hôpital militaire et non un centre médical du Medcorps : pour qu’elle voit aussi les souffrances de ceux qui ne combattaient pas contre des sabre-lasers.

Tout en laissant son regard dériver vers le patient qui essayait prudemment une prothèse de la jambe et que Wen fixait avec insistance dans ses efforts, la trentenaire souffla, répondant à ses interrogations tout en déroulant aussi le fil de sa pensée :

« Les sabre-lasers cautérisent les blessures. L’avantage, c’est que la personne ne se vide pas instantanément de son sang sur place. L’inconvénient, c’est qu’ainsi, ils brûlent les tissus, les nerfs et les tendons, rendant toute tentative de rattachement du membre arraché non viable. Mais surtout, sans les soins adéquats, il arrive que la coupure induise une difficulté de fixation pour la prothèse future.

Si ton partenaire est blessé de la sorte, il est de ton devoir de le maintenir en vie, mais aussi de tenter au maximum de sauver ce qui peut l’être pour permettre un rétablissement plus facile et diminuer les difficultés physiologiques pour l’avenir. Peu de jedis savent comment faire. Ce n’est pas primordial pour sauver une vie, et tout le monde n’est pas un guérisseur hors pair. Mais, je connais… plus que bien la différence que cela peut faire.

Avant que tu ne m’accompagnes plus tard sur le terrain, quand ce sera possible, je t’enseignerais ce qu’il y a à savoir sur ce sujet. »


Elle s’arrêta, observant l’homme trébucher et se faire rattraper par l’infirmière qui lui tapota dans le dos pour le réconforter avant de l’encourager à réessayer.

« A ton âge, je partageais ma chambre au Temple avec une autre padawan. C’est le Chevalier Shein. Ses bras sont bioniques. »

Ce n’était pas un secret, Luuna ne s’en cachait pas vraiment. En disant cela, Alyria voulait donner un exemple la touchant personnellement, pour que Wen comprenne ce qu’elle allait dire après :

« C’est normal. Hormis d’éventuelles malformations de naissance, pour le moment, tes amis et toi êtes un peu trop jeunes pour avoir été confrontés à des situations de ce type… A quelques exceptions près. Mais ce temps viendra.

Dans les années qui vont venir, vous allez vous préparer pour les épreuves en vue de devenir des Chevaliers jedis. Et puis, adoubés, vous serez seuls en territoire difficile. Les blessures viendront. Ce n’est pas une perspective réjouissante, mais il est inutile de se voiler la face. Et quand un malheur pareil frappera, tu sauras quoi faire pour comprendre cette souffrance au-delà des mots de réconforts habituels. L’aspect psychologique est presque plus déterminant que le physique, dans ces moments. Traiter une amputation est médicalement aisé. Faire face à ses conséquences, nettement moins. »


Soudain, l’homme en plein exercice se prit la jambe à pleine main, les yeux exorbités, avant de hurler de douleur et de s’effondrer. Malgré son envie de se précipiter pour le relever, Alyria resta au même endroit, avant de murmurer doucement à la padawan qui l’accompagnait :

« La plupart des personnes amputés souffrent du syndrome dit du membre fantôme. Il est induit par la sensation qu’on a d’avoir encore son corps entier, comme avant. Allié au stress, il produit des hallucinations et des douleurs foudroyantes. C’est une cause de rejet de la prothèse, mais aussi de souffrance psychique.

Observe le flux de Force autour de lui. Regarde la manière dont il se contorsionne autour de ses terminaisons nerveuses alors qu’il n’y a pas de connexions naturelles.

C’est cela, que tu dois savoir voir, et traiter. Ou plus exactement, soulager. »


Se tournant vers Wen, Alyria ajouta doucement :

« Soigner les chairs est une première étape. Chaque personne dont tu peux être amené à prendre soin pourra avoir des séquelles. Un bon médecin, et un bon jedi, doit être en mesure de ne pas s’arrêter aux symptômes physiques uniquement. Sinon, tu ne fais que la moitié du travail.

Et… Il n’y a pas que les sabres-lasers qui font cela. La plupart des traumatismes de ce genre sont dus à des grenades. Cet homme a presque de la chance. Le souffle ne lui a disloqué qu’une jambe. La plupart des victimes perdent plusieurs membres. »


Il y avait tellement de façons de faire souffrir… Etrangement, les êtres pensants avaient une capacité formidable pour imaginer les armes les plus effroyables.

« Allez. Présente-toi, demande-lui comment il s’appelle, si tu peux l’aider. Comme avec le Major Scudavera, mais seule.

Ecoute-le. »

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Wen n'avait pas encore combattu sur le champ de bataille. Elle n'avait même pas encore de vrai sabre laser, songeait-elle en effleurant l'endroit où devait se trouver l'arme d'entraînement sous l'épais tissu marron de sa bure jedi. Elle ne connaissait encore que peu les réelles implications des blessures, les traumatismes post-meurtrissures qu'évoquait crûment la maître-d'armes. Elle avait du mal à imaginer ce que pouvait ressentir une personne face à un membre fantôme. Bien que se considérant comme un être empathique par nature, sa main ou sa jambe faisaient tant partie d'elle que perdre l'un ou l'autre aurait été perdre une partie de son identité. Était-ce ce que ressentaient les blessés graves qui étaient privés d'une partie de leur chair ? Se sentaient-ils ôtés d'une part de leur humanité ou de ce qui faisait d'eux des sentients ? Que ressentaient ceux qui étaient partie machine ? C'était une question philosophique intéressante. Elle creuserait sûrement la question plus tard.

- Il me semble indispensable d'apprendre à éviter que mes compagnons jedi ne se retrouvent sans membre tant que cela est dans mon pouvoir. Je veux être prête à soigner mes amis et mes frères d'armes lorsque nous serons réellement en danger.

Elle avait 18 ans. Elle approchait de l'adoubement. Elle avait toujours été plus ou moins protégée. Même par Eyon dont la mort avait été le premier événement traumatisant de sa courte existence. Sa mère était morte quand elle était trop jeune pour avoir d'autres souvenirs qu'un sourire vague ancré dans un visage aux traits indistincts. Elle avait passé une grande partie de son existence dans l'enceinte du temple, séparée du monde par de grands murs blancs qui les isolaient du monde extérieur. Alyria avait raison. Bientôt ses amis et elles seraient prêts à accomplir de grandes choses. Il y auraient des blessures, la mort aussi. Il fallait qu'elle se prépare. Il fallait qu'elle devienne forte pour protéger ceux qui l'entouraient. Wen connaissait mal le chevalier Shein. Elle l'avait déjà aperçue au Temple. Elle savait qu'elle était une jeune zeltronne qui avait plus ou moins le même âge que le maître Von. Elle savait qu'elle avait perdu deux membres, elle se souvenait avoir vu ses deux prothèses qui luisaient de cet éclat caractéristique.

Wen jeta un regard hésitant à la prothèse d'Alyria, comme fascinée par l'éclat métallique. Oserait-elle demandé ce que l'on ressentait lorsque l'on perdait une partie de sa chair ? La padawan était d'une indéniable curiosité mais elle craignait de manquer de respect ou de réveiller des blessures anciennes qui n'étaient peut-être pas cicatrisées ou pas autant qu'elles semblaient l'être. Elle opta pour une interrogation plus mécanique mais qui lui semblait importante, certes moins que le traumatisme psychologique qui semblait durer des années et des années après la blessure.

- Quelles sont les différences de sensation entre un bras organique et mécanique ? Avez-vous senti des différences de réflexe ? Est-ce que cela affaiblit, rend moins réactif ?

Soudain l'homme qu'elle avait aperçu se mit à hurler de douleur. Wen eut envie de se précipiter mais l'infirmière Ithorienne l'aidait déjà à se relever. Cette dernière lui fit une injection et l'homme sembla s'apaiser un peu. La nautolan avait mal au cœur. Sans se rendre compte elle avait commencer à émettre une forme de vague de Force apaisante. Les membres de sa race avaient gardé une capacité archaïque : les nautolans étaient capables de ressentir les sentiments des autres êtres vivants. C'était une capacité un peu atrophiée par le temps mais dans le cas de Wen la Force l'exacerbait légèrement. C'était pour cela qu'elle était plus empathique que certains de ses semblables.

Elle devait donc aider l'homme. Wen abaissa doucement la tête en écoutant la maître d'armes. Elle comprenait vaguement ce à quoi l'hapienne faisait référence. La tâche lui semblait encore plus énorme que soigner le major Scudavera. Elle n'était pas certaine d'y arriver. Elle ressentait cependant les connexions de Force dont parlait son maître. Elle s'avança d'un pas hésitant, jetant un regard inquiet à la jedi rousse. L'homme était en sueurs mais il la regarda s'approcher sans méfiance, juste avec curiosité. Il avait reconnu la tenue traditionnelle des jedi. Des yeux elle demanda l'autorisation de l'infirmière pour venir plus près, cette dernière l'intima de s'approcher d'un geste calme de sa tête allongée.

- Bon… Bonjour. Je m'appelle Wen. Je suis padawan… Enfin élève jedi. Padawan c'est ainsi que nous appelons les apprentis appelés à devenir jedi. Je suis avec mon maître pour m'entraîner à aider les autres. Et vous ?

L'homme avait une quarantaine d'années. C'était un humain au visage taillé à la serpe, peau mate et yeux cernés très clairs. Un légère calvitie ornait son crâne. Il avait les traits un peu tendus par la douleur mais paraissait maître de lui. Sans doute grâce aux calmants que lui avaient donnés l'ithorienne il y a quelques minutes et qui faisaient effet. Wen pouvait le sentir dans la Force également. Elle commençait à bien ressentir ce genre de chose depuis qu'elle était dans l'hôpital. Elle craignait que la fatigue d'un usage même passif de la Force ne finisse par l'empêcher d'agir. Elle était pour l'instant encore loin d'être au bout de ses réserves et chassa cette pensée de son esprit. L'homme répondit sur le même ton calme.

- Je m'appelle Otto Keti. Je conduis des véhicules militaires depuis un bout de temps. Une mine a fait sauté mon camion et je me suis retrouvé avec une jambe broyée.

Ce n'était donc pas une grenade. Mais c'était tout aussi effroyable.

- Vous êtes ici depuis combien de temps ?

- Deux semaines environ. J'ai rejeté ma première prothèse il y a quelques jours. J'ai pas l'impression que ma jambe accepte celle-là non plus avec un plaisir grandiose. Les médecins m'ont assuré qu'ils faisaient de leur mieux mais ce n'est pas une partie de plaisir.

Wen entra dans la Force. Elle sentit les particules caractéristiques et se concentra sur la liaison entre la prothèse et la chair. En effet elle avait comme l'impression que les cellules d'Otto Keti traitaient la nouvelle jambe comme un corps étranger. Elle suivit les conseils d'Alyria et comprit que les causes physiques, le rejet, étaient issus de causes psychologiques. L'homme n'avait sans doute pas accepté la perte de sa jambe, les anticorps considéraient donc que le membre fantôme était toujours présent et que ce qui venait s'y greffer devait être détruit. Wen lança une vague d'apaisement pour aider l'homme à supporter la douleur.
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