J’étais bien dans ses bras. Plus que bien même. Il me complétait. Je me sentais en paix avec lui. Les voix se taisaient, les souvenirs s’éloignaient. Si j’en avais la possibilité, je ne ferais plus qu’un avec lui. En écoutant son cœur, je jouais sur sa peau… à égalité entre la saine et les cicatrices. J’appréciais ces différences de textures. Elles rendaient Balian d’autant plus unique… si tant est qu’il en ait encore besoin. Je pensais que j’allais finir par m’endormir ainsi, vaincue par l’épuisement et par le plaisir. Mais le sujet qui avait manqué de nous séparer irrémédiablement revint sans trop se faire prier. J’avouais à Balian qu’il me faudrait du temps pour lui pardonner. Ce n’était peut-être pas exact : je lui pardonnerais plus vite que nous le pensions mais je n’oublierai pas. Comment le pourrais-je ?

-Tu y arriveras. J’en suis sûre… chuchotais-je. Ce ne sont pas les mêmes erreurs, en un sens. Je t’aiderai à te pardonner, Balian.

Je lui faisais confiance… malgré tout. Redressée, le regard plongé dans le sien, je caressais sa joue du bout des doigts. J’avais envie de le réconforter… Tout mon amour pour lui ne parvint pas à m’y contraindre tant je voulais qu’il comprenne que je n’accepterais pas qu’il réitère. Je m’en voulais, en lisant la honte et son désespoir sur son visage. Pourtant, je tins bon. Je le contemplais m’expliquer les effets secondaires de la drogue. Je les comprenais… Ceci dit… j’avais l’impression qu’il avait su ce qu’il faisait… même si rien n’avait su lui donner une limite. Je me gardais bien de lui dire, me contentant de chercher à ce qu’il me regarde.

-Balian… Regardes-moi… Je lui souris en obtenant gain de cause. J’avoue que… c’est nouveau… Je ferais au mieux pour te soutenir et être présente…. Même durant les effets secondaires. Ce que je veux dire, c’est que… je ne pourrais pas encaisser cet acharnement d’autres fois… Mais tu sais ce que je crois ? Que ta peur de me perdre sera une limite que tu ne franchiras pas.

Je venais de faire un nouveau pari. Autrement plus risqué que tous les autres. Je venais de mettre ma vie en jeu sur la foi de l’amour qu’il me portait. Je ne doutais pas de ses sentiments… Mais il ne me restait qu’à prier qu’ils soient assez forts face à cette drogue. Je retournais à ma position première et ce fut à mon tour de me crisper. Je frissonnais, me sentant glacée malgré la couette et la proximité de Balian.

-Je te le dirais… un jour… Parce que je ne veux pas que tu t’en veuilles à cause de ça. Ce qui est arrivé… n’est pas de ta faute et ne le sera jamais.

Bon. J’avais de fortes chances pour qu’il me demande de le lui dire tout de même. Comment pouvais-je le faire alors qu’il était encore sous le coup de ce qu’il nous avait fait ? Que je lui dise que ce n’était pas de sa faute ne changerait rien au fait que j’étais prête à parier qu’il culpabiliserait. Heureusement pour moi, il réalisa mon état de fatigue. J’eus un rire étouffé.

-En fait… je me sens bien… Mais j’ai la tête qui tourne… Et respirer me fatigue… C’est que je suis vraiment… épuisée…

Je frottais ma joue sur sa peau.

-Reste avec moi jusqu’à ce que je dorme… J’espère te trouver à mon réveil.

Je n’eus même pas la force de venir l’embrasser. Dans un soupir, je me pelotonnais dans ses bras et fermais les yeux, sombrant quasiment aussitôt dans un sommeil de plomb.

-J’ai toujours raison. Tu devrais le savoir , lui répondis-je avec assurance.

En réalité, je n’avais pas toujours raison mais dans la situation présente, il fallait que j’aie raison. J’avais noté qu’il lui avait fallut fournir un certain effort pour me regarder. Je lui avais sourit pour le récompenser… Cependant, je savais ce à quoi il pouvait bien songer. Je commençais à le connaître. Le voir ainsi rongé par la culpabilité me plongeait dans des émotions contradictoires. Je détestais le voir ainsi, j’aimerais parvenir à l’apaiser un peu… Et d’un autre côté, j’estimais que c’était la moindre des choses, que je ne savais pas encore les noirceurs qui avaient pu le motiver. Peut-être étais-je trop exténuée pour parvenir à démêler les fils de notre situation. Je continuais à lui sourire, caressant doucement sa joue.

-Balian… mon amour… Tout ira bien.

J’avais encore murmuré, ignorant qu’il ne m’avait pas encore tout dit. Je devais lui renvoyer l’imagine d’une incurable naïve, aux espoirs bien fous… Quelqu’un de jeune… Je me pelotonnais contre lui, me disant que j’avais besoin de repos pour pouvoir vraiment discuter de ces sujets. Pour bien souligner ma décision de parler des sujets importants lorsque je serais un peu mieux, je balayais sa question à propos de mes hématomes. Evidemment qu’il les avait vu… même s’ils commençaient à dater. Sincèrement, je ne voulais pas ajouter encore une couche ou deux au mal-être de Balian… Que ce soit vraiment de sa faute ou non… Je savais qu’il en culpabiliserait.

Pourtant… Il n’y était vraiment pour rien. J’avais été totalement consentante à l’idée de coucher avec lui… Et si j’avais su, je ne me serais pas rendue chez les Vestales au moment opportun. J’avais donc appris une nouvelle tradition métellienne… Et j’en avais fait les frais. Non… En lui-même, Balian n’y était pour rien… moi non plus, d’ailleurs. Je savais à qui je devais en vouloir. Eux… ils ne perdaient rien pour attendre. Je comptais leur faire payer chaque coup, chaque seconde passée dans les bains glacés, chaque grain de sel qui avait été frotté sur ma peau…. Chaque insulte, chaque repas ratés. Les vestales, bien que considérées comme des saintes femmes, étaient elles aussi dans le viseur. J’attendais d’aller mieux pour en parler à Ga’Hyus. Lui, comme bien des hommes, ne savait pas ce qu’il se passait au sein du Temple. J’étais tenue par le secret… Tout comme elles avaient jurés de respecter mon corps. Etant donné qu’une partie du serment avait été jeté aux oubliettes… Ajoutons à la liste ma chère tante… Et rien de moins que notre géniteur. Lui qui cherchait comment définitivement prendre l’ascendant sur le vieux… Oui, vieux… Parce que me livrer aux Vestales avait irrémédiablement brisé quelque chose entre lui et moi.

Finalement, Balian me rappela mon sommeil… Comme de par hasard, mon corps se mis en tête de réclamer son dû. A savoir : un long sommeil réparateur. Si possible dans les bras de Balian. Ce dernier ne se fit pas prier pour m’offrir le refuge de son étreinte. J’aurais voulu pouvoir continuer à écouter son cœur mais Morphée me rattraper et fut intraitable.

Même embrouillée comme elle était, See'Ryl avait suffisamment d'intuition pour capter l'approche d'un être vivant. Elle avait beau savoir où elle était, elle n'en fut pas moins surprise de voir Balian arriver, lui aussi étonné de la voir. Ouais, ce n'était probablement pas le meilleur moment pour être présente mais étant donné son état, la jeune femme ne savait pas quand elle pourrait revenir sur Coruscant et faire ce qu'elle devait y faire.

-Je suis réelle, oui. Murmura See’Ryl en se levant.

Elle s’approcha pour prendre Balian dans ses bras. Une étreinte réconfortante mais dépourvue de cette vague de Force dont elle était coutumière. Elle s’immobilisa quelques instants, avant de reculer pour retourner s’asseoir. Elle était pâle et épuisée. P4 était encore démonté devant elle, son datapad dévoilait des lignes de code. Elle désigna Légion, non loin.

-J’ai… profité de tes occupations pour venir remettre les choses en ordre. Ils ne sont pas arrivés à réactiver la poignée de ta porte d’entrée… Et au passage… j’ai demandé à Légion de réparer l’ouverture de ta porte de salle de bain…

Elle soupira et passa une main sur ses yeux. Puis, chose rare, elle eut un geste agacé, suivit de quelques mots rageurs, charriant toute sa frustration.

-En temps normal, je devrais avoir déjà fini… J’essaie de programmer P4 pour … Elle lui jeta un regard … Prendre en charge ton Clan… le temps que tu ailles mieux. Je ne sais pas pourquoi mais je galère à programmer un simple pont entre tes données et les miennes.

Elle soupira. Elle était à bout. Ne serait-ce que parce qu’elle ne savait plus sur quel pied danser avec Balian depuis… depuis ce qu’elle avait pudiquement baptisé « la soirée infernale ». Un doux euphémisme sur certains points. En désespoir de cause, elle releva les yeux vers le Mirialan.

-Je suis contente que vous soyez parvenus à vous retrouver… Même si ce n’est pas passé loin… Je te dois toutes mes excuses : j’ai échoué à apaiser la situation. Mon… lien avec la Force est plus que perturbé depuis…

Elle se releva pour laisser Légion prendre le relais. Le droïde ne fit aucun commentaire, s'approchant de P4 pour pouvoir accomplir ce que See'Ryl n'arrivait pas à faire. Cette dernière eut un nouveau soupir frustré, hésitant à s'agacer. Inutile de s’acharner plus… elle finirait par s’énerver… Chose qui était plus que déconseillée.

-Je te fais un café ? proposa-t-elle en se dirigeant vers la cuisine avant d’ajouter. Ne t’en fait pas : je serais partie avant qu’elle ne se réveille.

Un fin sourire passa sur ses lèvres. Elle avança jusqu'à la cuisine d'un pas peu assuré mais fut tout à fait capable de préparer un café. Elle apporta bientôt la tasse de Balian, pleine de café chaud. Pile comme il l’aimait.

Oh, elle se doutait bien que le choix de ses termes allait faire tiquer un Balian aux pupilles éclatées. Le voir pointer du doigt la porte de la chambre fit hausser un sourcil à See’Ryl qui désigna une paire d’écouteurs.

-Pas la meilleure idée du siècle dans mon cas mais ça a remplit son office. Je n’ai strictement rien entendu.

Ce n’avait pas été très discret de sa part mais lorsque sa migraine lui avait laissé entrevoir une accalmie, See’Ryl n’avait pas hésité afin de profiter du temps de répit non pas pour dormir mais pour faire ce qu’elle devait. Elle ajouta doucement.

-On va éviter de lui dire que j’étais là. Je ne suis pas certaine qu’elle ne tente pas de m’étriper sur place si elle en venait à le savoir.

Une vérité, prononcée sur son ton monocorde qu’elle n’utilisait plus rarement lorsqu’elle parlait avec Balian. See’Ryl se contentait surtout de le reprendre quand elle évoquait… la compagne de ce dernier. Compagne avec laquelle les relations étaient restées à un… « je ne vous aime pas. » qui avait tendance à tournoyer dans les pensées de la Jedi qui se releva lorsque Balian se retint au dossier du canapé. Elle le récupéra pour l’asseoir.

-Détends-toi. Elle va bien, murmura-t-elle. Je pense que le pire est passé.

Elle retourna à sa place, ne pouvant s’empêcher de se maudire pour avoir échoué à apaiser les tensions…. Rien ne tournait rond depuis l’entrepôt. Une énième fois, elle passa une main légèrement tremblante sur son visage. La question de Balian provoqua un sourire en coin. Sourire qui trahissait une émotion bien sombre.

-Mes implants se sont totalement déréglés… Parce que la chimie de mon cerveau est… en vrac, dirons-nous. Tout cela… me donne très… mal à la tête. Je… ne me souviens pas vraiment de ce qu’il y a eut après… ma sortie du bâtiment. Et… ce trou dans ma mémoire me perturbe… Entre la douleur et le fait que je cherche vainement à renouer avec d’éventuels souvenirs... je ne dors quasiment plus. Je ne parviens plus à méditer et je ne te parle même pas de l’usage de la Force… Me concentrer me… donne la nausée.

Elle soupira, fermant brièvement les yeux pendant que Légion se mettait en action pour la programmation.

-Ajoutons dessus le Conseil qui me demande des comptes… Il attend que j’aille mieux mais ça fait bientôt deux mois… J’ai plus l’impression que ça empire plutôt qu’autre chose…

Ouais… Elle aurait pu se contenter d’un « ça ne va pas » mais See’Ryl n’avait pas pour habitude de dissimuler les choses. Surtout à Balian. Rouvrant les paupières, elle murmura.

-Et… j’ai envie de…

Elle n’acheva pas. Il comprendrait. On lui avait dit qu’en tant que Jedi, elle serait moins susceptible d’être véritablement accro en aussi peu de temps. C’était… sous-estimer grandement la dose qu’elle avait inhalé. Elle finit par revenir à ce qu’elle faisait vraiment et la réaction de Balian lui attira un regard sombre de la part de la jeune femme.

-Stop. J’ai dit que je m’en occuperais… Bon pas éternellement mais je m’en occuperais. Parce que, écoutes-moi bien, Balian Atraïde, tu ne peux pas laisser tomber ces gens et tu ne le feras pas. Dussè-je subir ton caractère de merde jusqu’à la fin de mes jours.

Il y avait quelque chose d’intraitable dans le ton de See’Ryl. Elle refuserait toute négociation, toute tentative de fuite. Balérion avait voulu faire de son fils le Patriarche de son vivant… Et parce qu’elle respectait le défunt et qu’elle savait que Balian avait les épaules pour, elle ne le laisserait pas s’en sortir. Considérant le sujet comme clôt, du moins temporairement, elle lui proposa un café et alla le lui faire. Elle se permit un léger sourire en coin à la mention d'Aérion. S'il savait... Après lui avoir tendu sa tasse, elle prit la sienne et s’appuya sur le plan de travail.

-Tu n’as pas à me remercier, Balian. Nous avons déjà discuté de cela ensemble…

Il lui mentionna Vhagar et Tyberr’Hyus. See’Ryl se permit un sourire léger.

-Sinon, pourquoi crois-tu que je serais venue jusqu’à Coruscant alors que les voyages aussi longs me sont déconseillés… ? Elle leva son index pour le faire taire. Et… ne culpabilise pas pour ça : je devais voir Tyberr’Hyus… Je n’ai fait qu’avancer de deux semaines mon passage ici… J’ai appris que tu étais en arrêt… Peut-être devrais-je t’emmener avec moi… Evidemment, ta… compagne est la bienvenue. La planète où je travaille, en ce moment, est calme et magnifique. Je sais que tu adores la campagne.

-Je n’ai rien entendu, je te dis… chuchota-t-elle, tout de même un poil irritée par ce manque de confiance flagrant. Crois-moi, c’est pas mon délire d’écouter ce genre de chose… Tout comme je ne suis pas encore suffisamment suicidaire pour aller le lui raconter.

Elle ne comptait clairement pas avouer ce genre de chose à l’une des principaux intéressés. See’Ryl était du genre discrète. Elle savait qu’elle était allée trop loin mais n’avait pas imaginé mettre autant de temps. Dans sa tête, elle était venue seulement pour quelques minutes. Finalement… Cela s’était éternisé et elle faisait face à un Balian perplexe. Prévenante, elle installa le Mirialan dans le canapé, essayant de le détendre tout en sachant que c’était bien plus facile à dire qu’à faire. Connaissant l’individu, elle n’en doutait pas une seconde… même sans qu’il soit drogué, Balian n’entrait pas dans la catégorie « détendu ».

Tout en tâchant de faire bonne figure, See’Ryl donna un compte-rendu, certes succinct, de son état à son ami. En arrêt ou non, ce dernier restait son médecin, non ? Et au-delà de ce simple statut, l’une des personnes en qui elle avait le plus confiance dans cette vaste Galaxie. Elle lui expliqua son trou de mémoire, notant sa surprise sans pour autant s’y arrêter. Même pour elle, le dire l’étonnait toujours.

-Dis-le lui avant demain matin… je dois le voir à la première heure, murmura-t-elle, contente que Balian se soucie assez d’elle, malgré tout ce qui lui arrivait, pour suggérer de quoi la soulager. Aux dernières nouvelles, je n’ai aucune contre-indication. Mais tu connais mon dossier.

Son sourire s’était adoucit avant d’être chassé par un aveu qui lui faisait mal. Qui mieux que Balian pouvait comprendre ce qu’elle vivait ? Elle passa une main sur son visage, soupirant profondément.

-Je déteste ça. Si au moins j’avais pu profiter un peu des avantages…

Dans les faits, elle y avait eu droit… Sauf qu’elle ne s’en souvenait pas vraiment. Pour l’instant, tout était très flou. Trop flou. A peine si elle se remémorait un baiser avec Balian. Et encore… Il lui semblait tellement déconnecté qu’elle en venait à croire qu’elle l’inventait… Et que ce n’était qu’une trace du trouble qui l’avait assaillie après avoir compris qu’il ne l’aimait pas… A la réflexion, elle non plus. Il était son ami le plus proche. See’Ryl avait finit par comprendre que son attirance n’était due qu’à une forme de nouveauté… elle qui n’avait jamais été habituée aux rapports et aux contacts humains. La confusion, estimait-elle, était légitime… tout en étant terminée depuis un petit moment déjà, même s’il lui avait fallu un peu de temps.

Vint la question du Clan et l’Arkanienne se montra intraitable… et réconfortante à la fois. Il n’y avait qu’elle pour tout entrevoir d’une manière différente. Que Balian ne cherche pas à négocier ou à refuser prouvait que, déjà et malgré ce qu’il pouvait bien imaginer ou penser de lui-même, il commençait déjà à parcourir le chemin vers son héritage. Cependant, See’Ryl se garda bien de le lui dire. Elle se contenta d’un sourire en coin, de ceux dont elle avait le secret et qui semblait à la fois tout dire et ne rien dire.

Elle ne s’attendait pas, en revanche, que Balian lui présente des excuses pour avoir replongé. Lorsqu’il évoqua Taanab, il eut l’occasion de voir pour la première fois, l’expression de See’Ryl se décomposer avant qu’elle ne tousse… Le café ne se respirait définitivement pas. Elle prit le temps de retrouver une respiration stable et posa la tasse avant de s’approcher, tout doucement de lui.

-Balian… j’ai lu les rapports. Ton père n’a pas été tué par cet homme mais pas quelqu’un d’autre. Un individu armé d’un sabre-laser, murmura-t-elle avant d’ajouter sans lui laisser l’occasion de répondre. Ceci dit, il est évident que c’était l’intention première de celui qui t’a piégé. Je me suis posée la question… Avant de réaliser que ces personnes… cherchent toujours à prouver quelque chose… Elles utilisent tous les moyens possibles pour obtenir ce qu’elles veulent. A quelque part, leur fonctionnement est très semblable à celui communément retrouvé chez les Siths.

Elle termina de s’approcher pour frôler sa joue du bout des doigts et capter son regard.

-C’est à moi de te demander pardon. Je t’ai juré de ne jamais t’abandonner et… j’ai été incapable d’encaisser cette dose de drogue. Je pensais avoir… suffisamment prévu mon absence… Le fait est que non. Je… t’ai abandonné, Balian. Et j’en suis désolée.

Sans ses lunettes, Balian eut pu voir le regard immaculé se remplir de larmes. See’Ryl était définitivement trop épuisée pour maîtriser ses émotions.

-Merci.

Il était dit un peu sèchement… See’Ryl n’était définitivement pas dans son assiette, un peu trop tendue par des détails qu’habituellement, elle laisserait filer. Elle était plus du genre à hausser les épaules pour dire « si tu me crois pas, c’est ton problème, pas le mien ». Elle eut un sourire rassurant lorsque Balian s’excusa de ne pas pouvoir la suivre.

-Ne t’inquiète pas… Tu sais très bien que tu restes mon médecin. Là, je le vois parce que c’est ton interne… Pas parce que j’ai décidé qu’un autre médecin me soignerait… Quoique… si cela se sait au Temple, les soigneurs vont grincer des dents.

Et cela n’avait pas l’air de la perturber plus que cela. Elle avait l’habitude, désormais, d’à la fois réfléchir dans le cadre de l’Ordre mais aussi dans le cadre plus… extérieur. Elle n’avait pas envie que son dossier médical soit l’objet d’analyse et qu’il puisse servir à tout et n’importe quoi. Paranoïaque, See’Ryl ? Non, simplement prudente. La conversation dériva sur la mort de Balérion en elle-même. L’Arkanienne avait tout soigneusement consigné dans ses archives… et avait fait en sorte de récupérer les conclusions des autorités… Cependant, elle ne s’était toujours pas penchée sur l’affaire en elle-même. Trop de choses à régler, encore.

-C’était clairement pour t’atteindre, dit-elle en évitant de mentionner que le plan avait réussit. Balian n’avait pas besoin que l’on retourne le couteau dans la plaie… il finirait par s’en rendre compte tout seul comme un grand. Quand j’irais mieux, j’essaierais de remettre les pièces dans un ordre cohérent… Et pour ce qui est de Balérion… Il faut attendre que je récupère ma concentration et que je m’y entraîne… je devrais pouvoir servir de… « pont » pour que vous puissiez vous dire adieu.

Il y avait beaucoup de si… Elle tâchait de paraître assurée de réussir mais la manipulation qu’elle venait de proposer à Balian n’était pas vraiment son domaine d’expertise. Elle allait probablement devoir faire appel à un autre Jedi… et tâcher de le convaincre. Cela, elle préféra ne pas en parler. Elle verrait bien, de toute manière. Ce n’était pas pour tout de suite. La jeune femme finit par chercher le regard de Balian pour lui présenter ses excuses, profitant de leur rencontre pour pouvoir le faire. Elle se retrouva dans les bras du Mirialan, osant l’enlacer avec prudence et fermant les yeux pour poser son front contre son épaule. Comme si elle cherchait un peu de repos dans cette étreinte.

-Je… c’est ridicule. Je me dis que si je ne t’avais pas laissé… tu n’aurais pas replongé.

Elle soupira encore avant de se redresser et arborer un sourire léger. Ce n’était décidément pas un comportement habituel. Elle caressa la joue du Mirialan.

-Adminitratrice, j’ai terminé. Annonça Légion après avoir remonté P4.

L’Arkanienne sursauta, surprise alors qu’elle cherchait à mettre des mots sur le léger trouble qui l’avait envahie au moment où Balian l’avait pris dans ses bras. Une sensation évanescente qui la perturbait un peu plus et qui, à peine commençait-elle à l’analyser, lui échappait. Elle s’écarta lentement pour récupérer sa tasse.

-J’aimerais bien que l’Ordre ait le même point de vue que toi à ce sujet, dit-elle en avisant P4 qui revenait vers eux en flottant. J’ai mis à jour les systèmes de P4… Enfin non, Légion vient de s’en occuper. J’ai retiré le module de répétition… Parce que je ne tiens pas à ce que tu le détruises dans un élan de rage… je ne pourrais pas en refaire un avant un moment. Elle glissa une œillade taquine à Balian. A partir de lui, j’aurais accès à tes messages… Avant que tu protestes, il y a un filtre qui se charge de ne me transmettre que ceux concernant ton clan. De près ou de loin. Il y a aussi un nouvel add-on pour analyser ton… tes paramètres physiques. Il alertera Tyberr’Hyu ou Vaghar pour qu’ils viennent vérifier ton état.

Elle leva la main pour caresser le sommet bombé du petit droïde.

-Concernant ton clan, je ne te cacherais rien. Je me suis déjà entretenue avec ce qui semble avoir été le « bras droit » de Balérion. Je lui ai expliqué que tu avais besoin de temps pour faire ton deuil et que je prenais le relais. Pour l’instant, ça a l’air de fonctionner. Je présume que mon statut de Maître Jedi aide. Elle termina sa tasse. Bref, je te mettrais en copie cachée de tous les messages et autres échanges… S’il y a une grosse décision à prendre, je viendrais te voir directement. Cela te convient ?

Avec son attention habituelle, See’Ryl ne pouvait que voir le regard trouble et le peu de conviction de Balian lorsqu’il confirma que Tyberr’Hyus était son interne. Elle fit claquer légèrement sa langue contre son palais.

-Balian. Dit-elle fermement. Ton interne cherche à te faire garder ta place et ta licence. Il voudrait autre chose, tu serais déjà devant la Cour Martiale.

C’était un coup de poker. Elle n’avait pas lu dans les pensées de Balian mais, de part son expérience, testé les effets secondaires de la drogue qu’elle prenait. Elle-même devait parfois encore lutter contre une vague de paranoïa qui rendait plus compliquée son appréhension de sa situation avec l’Ordre. Elle passa sa main sur sa nuque, enchaînant sur les avancées concernant Balérion… Bien peu en réalité. Tout avait brûlé dans l’incendie… et les rares témoins – dont elle – bien trop drogués pour envisager d’avoir confiance dans leur témoignage.

-Faut-il vraiment une raison ? demanda-t-elle avec un fatalisme qui ne lui ressemblait guère. Comme tu le dis, tu étais une cible idéale pour prouver tout et n’importe quoi…

Prudente, elle évita soigneusement de mentionner ce qui lui venait à l’esprit : prouver qu’il faudrait juste un peu « d’aide » pour qu’un toxico replonge, prouver l’amour paternel avec un sacrifice inutile… Les possibilités étaient multiples et ils ne sauraient jamais laquelle était la bonne puisque l’instigateur de ce drame était mort et carbonisé. L’onde de tristesse de Balian entraîna une réponse immédiate de la part de See’Ryl. Immédiate mais maladroite : elle chercha à envelopper Balian dans une vague de Force réconfortante… Sauf que la vague fut un peu trop forte pour ne pas le faire vaciller. Elle s’approcha bientôt pour s’excuser et avouer pourquoi elle se sentait si mal. Oui, le risque de replonger avait été grand pour Balian mais…

-Je t’aiderais à remonter.

Plus qu’une promesse, c’était un serment. See’Ryl ne voulait pas laisser Balian dans la situation actuelle… bien qu’elle comprenne que cette dernière doive se prolonger un peu pour permettre au Mirialan de puiser quelques… « forces »… si l’on pouvait le dire ainsi. Elle remercia Légion et leva les yeux au ciel lorsque Balian confirma ce qu’avait risqué le petit P4. Fidèle à ce qu’elle avait promis, elle n’allait pas rester plus longtemps que nécessaire, consciente que Balian avait probablement plus envie de retourner voir sa compagne que de rester avec elle. Pourtant, elle prit tout de même le temps de lui expliquer ce qu’elle allait faire et, surtout, qu’il serait toujours informé.

-Prends le temps qu’il te faudra, dit-elle. Ton oncle m’est d’une grande aide et nous avons convenu de nous voir bientôt, dès que je pourrais voyager sans avoir besoin de trois jours de repos ensuite. Je n’ai informé personne de ton Clan concernant ton état.

Une précision importante. Elle s’était contentée de souligner le rôle crucial de Balérion dans la vie de son fils afin de justifier ce temps de « latence » nécessaire à son ami pour reprendre les rennes d’un rôle dont il ne se sentait pas capable. Elle nettoya sa tasse, la sécha et la rangea pour ne pas laisser de trace de son passage. Puis elle revint vers Balian.

-Je vais te laisser tranquille… Si tu cherches ton datapad, je l’ai laissé dans ta tenue de cérémonie militaire. Je compte rester encore quelques jours ici avant de repartir. Si tu as envie de me voir, je serais au Temple.

Elle se pencha pour déposer un baiser sur sa joue. Légion avait rassemblé ses affaires. Elle se dirigea vers la sortie.

-Prends soin de toi… ne me force pas à revenir te botter le cul. Je préfère venir te voir et boire une bière avec un film.