Karm Torr
Karm Torr
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Ça fait vingt-deux.
Vingt-trois.
Rakid, c’était un accident.
Qu’est-ce qu’on en sait ?
Parce que c’est le seul corps qu’on a retrouvé.
Ce n’est pas une pr…

Le maire leva sa main griffue et les deux conseillers se turent aussitôt. Pour la septième fois, il parcourait du regard la liste sur son datapad qui égrenait le nom des victimes de… de quoi ? Ils l’ignoraient encore.

Quelle heure est-il, demanda-t-il de sa voix rocailleuse ?
Il arrive dans trente minutes, normalement.
Hmm…

La mercenaire que les fermiers avaient réussi à dégotter était déjà installée depuis deux heures dans l’unique auberge de la ville, à côté des trois pistes de ce qui leur servait d’astroport, et le maire commençait à s’inquiéter de ne pas pouvoir la forcer à ronger son frein plus longtemps encore. Mais au fond, même s’il ne l’aurait jamais avoué devant les grands propriétaires, il était soulagé de sa présence, à elle aussi. Les étoiles seules savaient quel Padawan à peine dégrossi l’Ordre Jedi consentirait à envoyer dans leur recoin perdu de la Galaxie.

Allons y.
Vous voulez l’accueillir vous-même ?

Son adjointe avait l’air surpris. Le maire haussa ses larges épaules.

Vous n’avez pas peur que ça fasse un peu…

Elle cherchait une manière diplomatique de dire les choses.

Que ça soit pris comme un signe de faiblesse, compléta le second adjoint, qui n’avait pas pour habitude de mettre de l’eau dans son vin.

Le maire eut un rire amer, qui se transforma en quinte de toux.

Parce que nous ne sommes pas faibles, en ce moment, peut-être ?

Quand leur speeder s’éleva du toit de la mairie, une espèce de pavé à deux étages posés au milieu de ce qui tenait lieu de place centrale, ils virent tous les trois se dessiner les champs vallonnés au-delà des limites du village, sous le soleil du printemps perpétuel de la planète, avec les céréales qui poussaient haute déjà. Un paradis. L’endroit parfait. Moissons deux, parfois trois fois par an. La route vers la mer était presque achevée, la saison prochaine.

On a toujours pas son nom ?

L’adjointe secoua la tête.

La seconde transmission est aussi endommagée que la première et on attend toujours les pièces du secteur voisin pour monter réparer le relai orbital.
Bon.

Il prenait cela avec philosophie. Cela, c’était normal. Cela, ça faisait partie des mésaventures ordinaires auxquelles étaient exposés toutes les colonies de la Bordure.

Le speeder se rangea le long de la piste du spatioport, après quelques minutes de trajet seulement. Il n’y avait pas vraiment de hall pour les voyageurs. Le bâtiment servait aux deux contrôleurs spatiaux à mi-temps, et puis principalement aux entrepôts pour embarquer et débarquer les marchandises, dans les barges de taille moyenne qui s’ébranlaient une fois tous les deux soirs, en partance pour les secteurs les plus proches.

Peut-être qu’ils nous enverront quelqu’un de bien, hasarda l’un des adjoints, en fixant le ciel, sa main palmée en visière. Un vrai guerrier qui… Qui serait en repos après s’être illustré au front. Quelque chose comme ça.
Quand on est en repos, on ne vient pas au milieu de nulle part chasser les…

Monstres. Le mot était resté coincé dans sa gorge. Elle se sentait stupide de dire ça. Mais c’était l’idée que tout le monde avait. C’était ce qu’on se racontait le soir, une fois la nuit tombée. C’était contre ça qu’on barricadait les portes des fermes et qu’il y en avait pour veiller, la carabine blaster à la main.

Finalement, un vieux chasseur jedi qui avait connu des jours meilleurs, trop cabossé pour voler au milieu des escadrilles de la République, creva l’un des rares nuages, puis décéléra et se stabilisa, avec des soubresauts de machine grippée, au-dessus de l’une des pistes. Les trois officiels s’approchèrent alors qu’un astromech se laissait descendre jusqu’au tarmac, puis le cockpit s’ouvrit et une silhouette bondit à l’extérieur.

Ce fut la déception, alors que Karm passait une main dans ses cheveux argentés. Il n’avait pas du tout l’air d’être un vrai guerrier. Encore moins d’un type qui se serait illustré sur le front.

Il a quoi, dix-sept ans…, murmura l’adjointe avec incrédulité, presque amertume ?
Silence, souffla le maire. On fait avec ce qu’on a. On a toujours fait avec ce qu’on a.

Ils étaient enfin à portée de voix. L’adjointe consternée constata qu’ils dépassaient tous les trois le Jedi d’une bonne tête.

Bienvenue, Jedi, sur Paxal. Je suis Phsarit Sina, le maire de la communauté, et voici mon adjointe Serevia Vox, qui est aussi la propriétaire de nos navettes d’export de grain, et Yash Yold, mon second adjoint, qui est aussi notre chef de la police.
Chevalier Torr, répondit Karm, de sa voix androgyne, et en ne parlant, comme c’était l’habitude pour les gens de son peuple, les Ark-Ni, à peine plus fort qu’un murmure.

Il n’en avait l’air que plus délicat, c’est-à-dire aux yeux des colons, moins prometteur.

C’est votre première mission, Chevalier Torr, ne put s’empêcher de demander Yold, alors qu’ils le guidaient vers le speeder ?

Les yeux d’un bleu clair et étrangement réfléchissants du Jedi se posèrent sur le chef de la police.

Pas vraiment, répondit-il. Je suis explorateur depuis des années. Spécialisé dans les cas difficiles.
Vraiment, enchaîna l’adjointe, sans parvenir à dissimuler sa surprise ? Vous avez l’air si jeune…
Trente ans, dit simplement le Jedi, en grimpant dans le speeder, alors que son droïde s’y arrimait.

L’engin s’éleva. Les trois colons étaient un peu rassurés. Trente ans, ce n’était pas si mal. Sans doute tout ce qu’ils étaient en droit d’espérer.

J’ai une nouvelle à vous apprendre, commença le maire qui, contrairement à bien des politiciens des mondes développés, ne s’embarrassait pas de politesses qu’il jugeait inutile. Plusieurs gros propriétaires terriens se sont cotisés pour payer les gages d’une mercenaire, qui vient d’arriver.

Karm n’était pas surpris.
Ça se passait souvent comme cela, dans les régions reculées.

Elle n’a pas l’air…

… très impressionnante, elle non plus, mais les fermiers du coin n’avaient pas vraiment les moyens de s’offrir les services des plus sanguinaires de la Galaxie.

… nécessairement de mauvaise constitution, conclut prudemment Phsarit Sina.

D’un regard, il invita son second adjoint à enchaîner.

Nous aimerions que vous collaboriez, dans la mesure du possible. Toute apparence de rivalité entre vous risquerait d’inquiéter encore un peu plus la population.
J’suis le rival de personne, déclara simplement le Jedi.
Bien, bien, très bien.
Donc. Vingt-deux personnes ont disparu, une a été retrouvée morte dans un fossé, tout ça tourne autour de la forêt, mais vous n’en savez pas plus que ça.
C’est à peu près ça, oui, confirma le maire.
À peu près ?

Le regard si particulier du Jedi sonda le sien et y voyant son propre reflet, l’homme se sentit mal à l’aise. Il détourna les yeux et le chef de la police rajouta :

C’est complètement ça, oui. Nous n’avons que très peu d’éléments, sauf les dates supposées des disparitions, et le nom des personnes.

Il tendit un datadisk à Karm qui l’empocha.

Et qu’est-ce qu’on cultive, dans le coin, demanda ce dernier en regardant par la fenêtre ?
Beaucoup de céréales, on a des vergers bien sûr, des champignonnières sous les collines, de la volaille près de la ville, du bétail un peu plus loin. De l’exploitation sylvicole aussi, même si on a arrêté toute activité après les premières disparitions.
Y a une carte de qui fait quoi où, niveau production agricole ?

Les trois autres échangèrent un regard perplexe, alors que le speeder se rangeait doucement devant l’auberge. Quel rapport avec l’affaire ?

Nous pouvons vous fournir cela, déclara le maire.

Karm se contenta de hocher la tête.

L’auberge ressemblait à tous les autres bâtiments du village : cubique, pratique, austère depuis l’extérieur. Des préfabriqués de colonisation acheminés quarante ans plus tôt, quand l’ExploCorps avait confirmé l’habitabilité de la planète et qu’une sous-commission du Sénat avait donné le feu vert pour le peuplement. Ils dureraient encore un bon siècle et si les fermiers avaient fini pour certains par se construire leurs propres maisons, la plupart des gens les utilisaient encore, pour éviter toute dépense inutile.

On avait aménagé l’intérieur avec un confort relatif, une sorte de bonhomie rustique, pour accueillir les quelques voyageurs de commerce et les inspecteurs administratifs qui venaient de temps à autre sur Paxal. En règle générale, seules deux ou trois des dix chambres étaient occupés et le couple d’aubergistes, d’anciens fermiers que leurs problèmes de santé avaient ramenés en ville, tenaient aussi une épicerie, qui concentrait l’essentiel de leur activité.

Où est Syzzy, demanda le maire, en constant que le comptoir était désert ?
Je vais voir dans le magasin.

L’homme hocha la tête.

Je vais chercher la merce… madame Darkan, fit pour sa part le chef de la police.

Le maire et le jedi se retrouvèrent seul à seul.

Vous pouvez laisser vos affaires au comptoir, Syzzy s’occupera de les monter, vous ne craignez pas grand-chose par ici.
J’ai pas d’affaires, répliqua le Jedi d’un ton distrait.

Le regard du maire s’arrêta sur son sac à dos.

Équipement, précisa l’Ark-Ni, laconique.
Maxence Darkan
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L'air à l'extérieur était doux, très doux, le temps dégagé se permettait d'offrir une légère brise qui pouvait soulager les plus étrangers à ce climat. Maxence, depuis l'auberge dans laquelle elle logeait, s'était permise d'ouvrir la fenêtre et d'observer les environs. Les pistes silencieuses jouaient sur la patience de la mercenaire, déjà accueillit par le maire et ses deux adjoints, ses derniers ne semblaient pas bien ravit de la carrure que prenait l'argent qu'ils avaient dépensé. Après tout, l'habitude de ce genre de comportement venait au fur et à mesure des missions, les premiers regards jugent très vite sur sa petite carrure et son jeune âge. Pourtant son accueil fut des plus agréables, ils lui expliquèrent la situation rapidement et le logis fut offert avec une bouteille tout droit sortie de leurs vergers avant leurs fermetures.

Elle avait été mise au courant de sa collaboration avec un chevalier jedi dont eux-mêmes ne connaissaient pas le nom, bien évidemment Maxence ne s'était pas privée pour leur montrer sa réticence à travailler en équipe. Trop tard pour faire demi tour, elle s'était donnée comme défi d'être la plus coopérative possible avec lui.

Elle astiquait calmement ses blasters en chantonnant, les pieds sur un vieux bureau, son bracelet se trouvait juste au bord, prêt à tomber. L'auberge était difficilement comparable avec les endroits qu'elle avait connu, mais loin d'être dépaysée, tout ce qui pouvait se comparer de près ou de loin à un taudis ne la déstabilisait plus. Nettoyé, elle posa ses armes et entama la bouteille.

-Eos, refais moi un compte rendu de la situation.

-Disparition mystérieuse de vingt-deux personnes et un mort qui n'a possiblement pas de rapport avec l'enquête. Les disparitions sont sûrement liées à la forêt. Toutes les structures agricoles ont été fermées depuis peu.

-Hou le vilain monstre. Des infos sur la faune et la flore ?

-Ma base de donnés ne comporte pas d'information sur la planète Paxal.

-Tu m'étonnes... Trou paumé.

Lorsqu'elle entendit au loin le bruit caractéristique des propulseurs d'un vaisseau en atterrissage, elle se leva, la bouteille à la main pour se pencher par la fenêtre. Au loin quelques silhouettes discutaient près d'un vaisseau avant de très vite monter dans un speeder pour se diriger vers l'auberge. Son équipier était enfin arrivé. Maxence prit une grande gorgée, posa la bouteille et commença à déballer ses affaires pour se changer. Un sac remplit de vêtements qui se ressemblaient tous, des treillis, débardeurs et autres pulls de couleur sombre, pour la plupart.
Tandis qu'elle finit tout juste de se rafraîchir, la porte s'ouvrit brusquement, du moins, assez pour faire sursauter la jeune femme. Il s'agissait de Yosh Yald, le chef de la police, il était tout aussi surpris de la voir.

-Je ne vous dérange pas j'espère ?

-Taper à la porte avant de la défoncer aurait suffit, mais non, vous ne me dérangez pas. Il est là ?

-Le chevalier Torr vient tout juste d'arriver.

-D'accord, j'arrive tout de suite.

Elle enfila ses holsters, les blasters bien en place, puis elle ajusta le bracelet autour de son bras sous le regard soutenu de Yosh. Une fois prête, elle le suivit jusqu'au hall de l'auberge. Il n'était pas compliqué de trouver le chevalier jedi au visage moins rude que les personnes qui l'entouraient. Ses cheveux argentés contrastaient énormément avec les yeux bleus qu'arborait son minois. Les deux faisaient une belle paire de petits jeunes en mission, en apparence du moins. Elle se permit de le dévisager un instant avant de le saluer, son visage voguait entre les deux genres, elle dut se mettre au point mentalement pour comprendre qu'il s'agissait bien de son opposé.

-Maxence, dit elle en hochant la tête. Bon, ne nous attardons pas sur de longues et inutiles présentations, on aura tout le temps de le faire durant l'enquête. Concentrons nous. J'ai quelques questions pour vous monsieur le maire. Tout d'abord, avez-vous une liste concernant la faune ou la flore qui aurait pu causer ces disparitions ? Ensuite, les disparus avaient-ils un lien de près ou de loin entre eux ? Et enfin, vous avez pensé à appeler un plombier pour réparer la douche ?

Il y eut un blanc, elle faisait la moue et ses yeux passaient sur chacun des visages en attendant une réponse.
Karm Torr
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Et du coup, le cadastre des cultures ?
Hm ? Ah ! Oui.

Les griffes du maire se mirent à pianoter sur son datapad, dont il ne releva les yeux que lorsque son adjoint refit son apparition, talonné par la mercenaire. Karm la fixa aussitôt d’un regard que sa nature réfléchissante rendait difficile à interpréter. Nul doute qu’il la jaugeait, cependant, mais c’était bien naturel dans ces circonstances. Il ne fut guère surpris de sa jeunesse : le contrat que les fermiers du coin avait pu proposer n’était probablement pas mirobolant et il avait dû attirer des mercenaires aux premières années de leur carrière.

Torr, répondit-il d’une façon laconique mais sans une once d’hostilité, en guise de présentation.
Nous avons les données de l’ExploCorps lors de la découverte de la planète, un collègue à vous, j’imagine, Chevalier…, commença l’adjoint pour répondre aux questions de la jeune fille ?

L’Ark-Ni hocha la tête. Le Jedi qui avait découvert Paxal était depuis mort dans la guerre contre les Siths, mais il jugea préférable de s’abstenir d’assombrir encore l’atmosphère avec une information qui n’avait pas d’influence directe sur leur mission.

… et également les données de l’exploration complémentaire par le corps de reconnaissance des services coloniaux de la République. Plus quelques observations de notre part, mais qui concernent plutôt la flore que la faune, parce que nous n’avons pas encore entrepris la domestication des espèces locales.

Il tendit de sa main palmée un datadisk à la mercenaire.

Comme vous le constaterez, il n’y a rien de référencé qui soit… Enfin…
La faune locale est peu menaçante, en tout cas dans cette région de la planète. C’est de toute façon l’une des conditions préalables à l’installation des colonies de peuplement. Tenez, Chevalier.

Ce fut au tour du maire de confier un datadisk à Karm, qui l’inséra dans son appareil, pour examiner les cartes du cadastre. La seconde adjointe ne tarda pas à refaire son apparition, talonnée par une vieille humaine au visage buriné et bruni par le soleil.

Quand aux disparus…, poursuivit le maire. Hé bien, nous sommes encore une petite communauté, quelques centaines de personnes tout au plus, alors tout le monde est plus ou moins lié d’une manière ou d’une autre à tout le monde.
Madame Syzzy, votre nouvel invité, le Chevalier Torr, dont la municipalité couvrira les frais, intervint l’adjointe, en désignant Karm.
UN JEDI, s’enthousiasma l’aubergiste en criant.
Madame Syzzy, s’exclama le maire !
QUOI ? MONSIEUR SINA ? QUOI ?

L’homme fit un geste circulaire à côté de son oreille, pour indiquer à la vieille dame que son appareil ne marchait plus.

AH OUI D’ACCORD BIEN BIEN JE VOIS, hurla-t-elle, avant d’extirper de derrière son oreille un vieux comlink modifié pour servir de sonotone, qu’elle réintroduisit après l’avoir tapé plusieurs fois contre le bord de son comptoir.
C’est mieux, s’enquit le maire ?
Bien, bien, bien. Je disais donc : un Jedi, j’ai connu un Jedi quand j’étais jeune, oh, un grand guerrier, il était passé dans notre village et…

Elle se lança dans une histoire interminable absolument dénuée de toute péripétie. Après un geste du maire, la seconde adjointe passa un bras autour des épaules trapues de l’ancienne fermière et la conduisit vers les bureaux de l’auberge, « pour vérifier que tout était en ordre du point de vue de l’administration ».

Des problèmes avec le bétail ?
Le bétail ? Non.
Hm.
Quoi ?
Là, là et là, fit l’explorateur en pointant des endroits sur les plans du cadastre qu’il avait affichés sur son écran, ce sont des exploitations d’élevage, vous confirmez ?

Le maire hocha la tête.

Et personne a perdu de bêtes ?
Pas que je sache. Yash ?
On nous a rien signalé, confirma le chef de la police.
Préoccupant, conclut Karm.
C’est plutôt une bonne nouvelle, non ?
Pour les ruminants, oui, fit le Jedi en rempochant son datapad. Mais ça veut dire que vous avez affaire à un prédateur qui préfère s’attaquer à des fermiers armés de carabine blaster et assez mobiles plutôt qu’à des têtes de bétail sans défense qui font pourtant des proies beaucoup plus faciles. Et si j’en crois la liste des personnes disparues, elles étaient d’espèces différentes, pas vrai ?
Donc ce n’est même pas une question de préférences alimentaires, conclut le maire, en suivant le raisonnement du Jedi.

Son adjoint et lui échangèrent un regard préoccupé.

Vous… vous pensez qu’on a affaire à… ?

L’homme laissa sa phrase inachevée, pour sonder l’opinion du Jedi. Qui commença par hausser les épaules.

J’en sais rien. Mais une prédation contre-instinctive dénote du raisonnement, donc de l’intelligence. On en apprendra pas plus avant d’aller voir sur le terrain.

La mercenaire avait l’air pleinement équipée et il en avait déduit que, comme lui, elle était prête à se mettre aussitôt au travail.

Vous, hm… Avez besoin de quelque chose ? Je suis sûr qu’on peut organiser une battue, nous ne manquons pas de gens courageux.
Vérifier que personne ne s’aventure dans la forêt, ce sera déjà beaucoup. Si on est pas revenus dans trois jours, mon droïde enverra un message à l’Ordre, qui avisera.

Cette perspective n’avait pas l’air de beaucoup le préoccuper, mais de toute évidence le Gardien n’était pas exactement l’homme le plus expressif de la Galaxie.

Bon, hé bien… Bonne chance, je suppose.
Oui, bonne chance, renchérit l’adjoint, au fond soulagé qu’on ne leur ait pas demandé de participer aux recherches.

Le maire leur confia les codes d’un speeder qui attendait dans la cour de l’auberge et dont ils pourraient se servir pour gagner la forêt, à quelques kilomètres de là, avant de partir rejoindre son autre adjointe auprès de Madame Syzzy. Karm fit un signe de tête à Maxence, avant de se mettre en marche.

J’m’appelle Torr, au fait. Du corps d’exploration de l’Ordre Jedi, principalement pour les missions en terrain hostile.

On l’aurait plutôt imaginé à jouer de la harpe en composant des poèmes mystiques sur la Force, certes.

Tu conduis ?

Lui voulait s’accorder les quelques minutes du trajet jusqu’à la forêt pour observer le paysage : aucun Jedi n’avait remis les pieds sur la planète, à sa connaissance, depuis son exploration préliminaire, des décennies auparavant, et Karm savait d’expérience qu’on en apprenait toujours beaucoup en étudiant la manière dont les gens cultivaient le sol.

T’en penses quoi, de tout ça, demanda-t-il encore en s’installant dans le speeder côté passager ?
Maxence Darkan
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Le maire ne tarda pas à répondre à ses questions, les réponses étaient aussi simples qu'elle le craignait, les données qu'on lui tendit ne décrivait aucun prédateurs dignes d'intérêts, surtout face à des fermiers armés, elle se permit de faire un tour sur toutes les espèces recensées dans la région, plus elle avançait, plus son visage se décorait d'un petit rictus frustré. Les seuls animaux menaçant n'enlèveraient pas les habitants sans laisser de belles traces de sang ou les corps sur place. De plus, la police ne devait pas être incompétente, cette piste n'avait sûrement mené à rien. Le maire tendit à son tour un datadisk au jedi.

La seconde réponse fut sans surprise, les gens se connaissaient tous d'une manière. Alors qu'elle se perdait dans ses pensées, les cris d'une sourde lui fit lever la tête. Une femme touchée par la dure vie de fermier ne fit avancer en rien l'enquête. La mercenaire ricana lorsqu'elle fut redirigée par là où elle était venue.

Maxence se tourna vers le chevalier lorsqu'il souleva un point intéressant : le bétail n'était pas touché, ce qui détruisit complètement l'idée qu'elle s'était faite sur la prédation. Ce genre d'enquête était nouveau pour elle. Trouver une personne disparue, ça, elle savait faire, vingt-deux d'un coup, là, il y avait un réel enjeux. Quelques suppositions venaient à elle, mais encore trop flous pour se permettre de les proposer face au maire. Elle se tut jusqu'à leur départ. Le chevalier Torr se présenta plus amplement.

-Maxence Darkan, mercenaire en herbe, j'aimerai avoir un terrain spécifique sur lequel m'épanouir, mais je fais de tout.

À sa proposition de conduire, elle ne fit que sourire, évidemment qu'elle allait conduire, il s'agissait bien là de quelque chose qu'elle aimait faire. Ce qu'elle pensait de cette enquête était une question plus complexe, elle démarra le speeder avant de répondre. Le bruit de l'engin lui fit hausser le ton.

-C'est un peu nouveau pour moi tout ça. Mais, comme tu l'as déjà sous entendu, la faune est loin d'être le principal suspect. Le truc qui me chagrine c'est que... S'il s'agit bien d'enlèvement par des personnes douées de conscience, la demande de rançon aurait déjà dû tomber depuis un bout de temps. Vingt-deux personnes, visiblement enlevées au hasard sans aucune nouvelle... Je sais pas trop. Et puis si des bandits s'étaient installés non loin, ils se seraient fait repérer. J'ai aussi pensé au fait que ces gens soient juste partis... Mais vu les structures qui peines déjà à accueillir deux chasseurs, je vois pas avec quoi ils pourraient partir de la planète.

Elle marqua une pause, le temps d'observer les quelques fermes et maisons qui passaient à toute allure. Une bonne génération avait fait son temps ici depuis que l'ExploCorp était passée, le désire d'un monde plus moderne aurait pu les attirer, mais encore une fois, il n'y avait pas de différence parmi les âges.

-Quand on y pense, reprit elle, les possibilité sont nombreuses. Si tu connais le coin, t'as des infos sur des tensions dans le groupe, des fermiers rebelles, pas en accord avec la protection de la république ? Ça pourrait expliquer ma présence ici. Ou même si l'empire convoite cette planète ? Je sais que ça pourrait paraître bête vu comme ça, à leur place j'aurais frappé fort, mais une tentative discrète dans le bute de faire fuir les habitants en plus de faire abandonner le terrain à la république n'est peut-être pas à exclure... 'fin bref, tu vois ce que je veux dire.

Ils arrivèrent en peu de temps à la bordure de la forêt, près d'un élevage de bétails et d'une exploitation sylvicole. Les arbres trop proches les uns des autres pour naviguer avec le speeder, elle l'arrêta et descendit. Elle jeta un oeil aux alentours, tout était très clame, les exploitations au point mort, elle entendait tous les volatiles alentours chanter. La forêt était parfaitement délimitée du reste de la colonie, un vrai travail de professionnel. Elle entra la première dans le bois sans un mot, fit quelques pas dans la broussaille pour s'arrêter net. Avancer à l'aveugle dans la forêt ne les mènerait surement à rien

-Tu crois que... Peu importe ce qu'on cherche, "ça" vient de là ? On peut aller faire un tour du côté des exploitations avant si tu veux, à moins que tes supers pouvoirs te disent qu'il y a un truc intéressant là dedans ?
Karm Torr
Karm Torr
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Trop loin.


Comme souvent, l’Ark-Ni dut se rappeler qu’il n’était pas seul avec ses pensées, ni avec quelqu’un de son propre peuple, et qu’on attendait de lui un peu plus que son laconisme spontané.


De l’Empire, j’veux dire. Trop loin et trop modeste pour que ça vaille le coup. L’Empire a déjà du mal à assurer la stabilité de ses planètes agricoles périphériques.


Conquérir des mondes industriels, c’était une autre histoire, mais les jeunes États avaient rarement les ressources nécessaires pour fédérer des campagnes que la République elle-même avait déjà bien du mal à pénétrer. En observant les alentours, Karm se faisait justement la même réflexion que son acolyte du jour : les choses n’avaient guère changées pour ce qui était des bâtiments depuis l’époque de l’ExploCorps et tous les efforts s’étaient concentrés sur les champs. On avait défriché le paysage, foré des puits, tracé des sillons, planté les vergers, mais tout cela naissait de l’industrie propre des paysans locaux, tandis qu’une transformation architecturale aurait requis, elle, des liens plus étroits avec le reste de la République.


On est vraiment dans le typique niveau Bordure, poursuivit le Jedi. Ça m’étonne pas qu’ils aient eu recours à une mercenaire. C’est des gens qui sont habitués à compter sur eux-mêmes, à traiter les choses de personne à personne, plutôt qu’à se reposer sur des institutions. Une mercenaire, c’est quelqu’un que tu vois, avec qui tu décides du prix et tout ça, si c’est oui ou si c’est non, tu le sais direct. Une requête à une institution multisectorielle ou pire, galactique, y a jamais rien de sûr. Et quand on vit loin de tout, on croit vite qu’on est oubliés par tout le monde.


Manifestement, ce n’était pas entièrement vrai, puisque le Conseil Jedi avait dépêché sur place l’un de ses explorateurs, et non des moindres. Karm lui-même manquait de subtilité politique pour comprendre que ce choix n’avait rien d’innocent et qu’en l’envoyant sur place, l’Ordre et par extension la République voulaient apporter la preuve aux collectivités locales de leur implication renouvelée dans les affaires qui les concernaient et contribuer à prévenir tout risque d’indépendantisme.


Les tensions internes, c’est toujours possible. Les gens qui demandent pas de rançon, aussi. Y a des raisons vachement plus sinistres que l’argent, conclut l’Ark-Ni en sautant à l’extérieur du speeder, pour enlever des mecs.


Le vent soufflait sur les hautes herbes qui bordaient la forêt et, devant eux, un chemin bien dégagé s’enfonçait entre les arbres, qui servait probablement d’ordinaire au passage des bûcherons. Karm tendit l’oreille. La forêt bruissait des cris des animaux et c’était une rumeur qui indiquait au moins une chose : aucun superprédateur étranger à l’écosystème local n’avait semé là la terreur parmi les autres êtres vivants. Exit pour l’explorateur, en tout cas pour l’instant, l’hypothèse d’une mystérieuse créature importée d’une autre planète.


Le Jedi secoua la tête.


T’as raison, allons voir les exploitations. La forêt va pas s’enfuir, prenons l’temps d’faire les choses proprement.


Les circonstances des disparitions l’inclinaient lui aussi à penser que la réponse se trouvait peut-être autant au sein de la communauté qu’au fond des bois. Le chef de la police avait certes l’air d’un homme sympathique, mais pour ce qui était de la compétence professionnelle, il ne lui avait pas fait forte impression, et Karm savait que pour beaucoup de gens comme lui, il était parfois difficile de s’imaginer les secrets sordides que pouvaient cacher les gens de sa propre communauté.


D’un geste de la tête, l’Ark-Ni désigna un ensemble de bâtiments préfabriqués qui se dessinaient non loin de là et formaient un complexe agricole, dominant du haut d’une colline des champs céréaliers et, pour une petite part, des cultures de maraîchage. Les deux enquêteurs se mirent en route, laissant le speeder à l’orée de la forêt.


C’pas mauvais que ce soit un peu nouveau, fit le Gardien en reprenant le fil de la conversation. L’ignorance permet souvent de poser les bonnes questions.


Quelques années plus tôt, Karm se serait enfoncé dans un silence professionnel et il aurait réduit leur conversation à ce qui était strictement nécessaire pour communiquer les informations de l’enquête. Mais le temps avait passé, on lui avait confié des responsabilités pédagogiques et il avait mieux cerné les implications de son rôle d’aîné et d’expert. Ces conseils-là lui venaient plus naturellement.


Et avoir l’air ignorant non plus, c’est pas un mal, poursuit-il. Toi et moi, on a des têtes à être à peine sortis de l’école, les gens risquent de nous prendre de haut et de chercher à nous apprendre la vie, mais pendant ce temps, ça veut dire qu’ils se méfieront pas.


Auprès de Luke Kayan, Karm avait appris à jouer avec les préjugés que les gens pouvaient avoir à cause de son physique. Un sourire malicieux se dessina sur les lèvres.


La fortune sourit souvent aux faux ingénus.


En parlant, ils étaient arrivés dans la basse-cour qui s’étendait au devant du corps de ferme et où s’ébattait des volailles. Une femme était assise sur un tabouret à l’entrée, les mains plongées dans un droïde agricole désactivé, démodé depuis deux générations au moins, et qu’elle tentait tant bien que mal de réparer. Elle leva les yeux vers eux et les considéra longuement, d’un regard opiniâtre, lent et pensif qu’elle réservait probablement à tous les étrangers.


C’est vous les enquêteurs ?


Karm hocha la tête.


Moi c’est Torr, elle c’est Maxence. Vous êtes seule ici, m’dame ? Vous avez peut-être un mari ?


La femme eut un rire bref, presque agressif, avant de siffler trois notes et puis une silhouette émergea du vestibule de la ferme, en train d’essuyer les mains pleines de farine avec un torchon humide.


Maria, le p’tit me demande si j’ai un mari.


L’autre femme leva théâtralement les yeux au ciel.


On se passe très bien d’un bonhomme, merci bien.
J’en doute pas, fit Karm.
Mariées depuis neuf ans, ne vous en déplaise, renchérit l’autre.
Non mais je voulais pas dire que…
Hé oui, comme quoi, dans les campagnes, c’est parfois plus progressiste que sur Coruscant.
Je viens pas de…
Un mari, non mais je vous jure…


Karm tourna les yeux vers Maxence, le regard plein d’un appel au secours silencieux.
Maxence Darkan
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L'empire était donc à exclure, l'idée était loin d'être pertinente, mais autant lancer toutes les suppositions qui lui venaient à l'esprit tant qu'elle le pouvait. Ce qui l'inquiéta tout de même fut sa réflexion sur les raisons des enlèvements, certes, il était resté vague, mais c'est dans l'inconnu que l'homme à peur. Qui que soit ces personnes ou cette chose qui les enlève, il semblerait que l'excitation de terrifier le reste de la population en faisant ce "je ne sais quoi" à ses proies étaient son bute. Elle frissonna à cette idée, pas par peur de rencontrer cette dite personne, mais qui dit psychopathe, dit combat. Elle se retourna vers la forêt une nouvelle fois, digne d'un film d'horreur, elle voyait le monde masqué par les troncs, qui cachaient à tour de rôle un peu plus ce qu'il y avait derrière. Une idée qui lui donna le tournis l'espace d'un instant avant de se concentrer à nouveau. Il était convenu d'aller faire un tour vers un des complexes, non loin sur une petite colline.

Elle se sentit quelque peu réconfortée à l'écoute de Torr qui n'avait pas peur de jouer les enquêteurs avec une petite nouvelle. De plus, sa tête d'adolescent, tout comme Maxence, avait dû lui causer quelques torts dans le passé, semblait en avoir tiré une certaine force et une bonne réflexion sur le sujet. Pour une fois elle n'ignorait pas ou pire ne méprisait pas la figure jedi avec qui elle travaillait. Il était plus... Ouvert que la moyenne, surtout par rapport à son tempérament.

-La fortune sourit aux ingénus...

Répéta elle en souriant. Quand elle leva la tête, ils étaient arrivés, il n'y avait pas foule, mais les bâtiments qui s'élevaient au-dessus d'eux restaient impressionnant. Une femme tripatouillait un vieux robot. Torr prit l'initiative de se présenter, lui et sa partenaire avant de dire une boulette qu'il regretta très vite. Maxence ricana à l'entente du sermon qu'il se prenait, les appelles à l'aide que lui lança ses yeux la fit intervenir.

-Mesdames, je vous en prie un peu de calme. Faites pas attention aux paroles de mon rustre coéquipier disons que... Elle se pencha près de la femme qui réparer le robot. Les jedis ont du mal à comprendre ce qu'est le réel amour.

-Ah ! Vous m'en direz tant ! T'entends c'qu'à dit la gamine Maria ? es enquêteurs ?

-Nan quoi ? 

-Pas capable de tremper le biscuit ou qu'ce soit ! Maxence se tourna vers Torr, un large sourire dessiné sur le visage.

-J'te jure que j'ai pas dit ça. Elle le regardait droit dans les yeux alors que les femmes continuaient de surenchérir un peu plus sur l'histoire. La jeune femme se racla la gorge puis reprit. Bon, d'accord on a compris, je me ferais un plaisir de lui expliquer comment fonctionne la gent feminine plus tard, pour l'instant on a des disparus à retrouver...

-T'es quoi toi au juste ? Reprit sérieusement la dite Maria.

-Quoi ?

-T'es quoi j'te dit ? Une jedi comme l'autre ? Faut ce nettoyer les oreilles hein ! Maxence inspira un grand coup.

-Je suis mercenaire. Moi et le chevalier Torr cherchons des...

-Alors c'est elle la mercenaire qu'on a payé pour ?

-J'm'attendais à quelqu'un de plus grand... Et plus matu...

Maxence dégaina son arme et tira en l'air. Emportée par la frustration que pouvait lui procurer les deux femmes, elle avait agi sans réfléchir. La tête baissée, elle rengaina son arme avant de reprendre, tout sourire, comme si rien ne s'était passé. Elle n'avait pas fait attention à la réaction du jedi, prise dans son jeu.

-Bon, on s'est pas bien compris je crois. Alors si vous voulez pas que je fasse monter le nombre de disparus de vingt-deux à vingt-quatre par moi-même, il va falloir nous écouter. Elle avait toutes les deux un air ahuri. Bien, maintenant, Torr a sûrement des questions à vous poser et croyez-moi, si j'entends encore commentaire sur sa virginité vous le regretterez.

Elle fit un signe de main au jedi pour lui faire prendre la parole. Quant à elle, un tour des lieux s'imposait. Sans trop s'écarter pour garder une oreille ouverte sur la discussion qui s'entamait, elle alla tout d'abord la volaille, puis inspecta l'entrée d'une grande grange juste sur le côté. L'intérieur trop sombre pour déceler le fond du bâtiment.

-Vous connaissez des gens qui travaillaient ici qu'ont disparu ?
Karm Torr
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Ironique que le Chevalier Jedi qui avait depuis des années une liaison loin d’être chaste avec un autre homme et qui professait l’une des visions les plus sensualistes de la Force Vivante fût accusé tout à a fois d’homophobie et de virginale pudibonderie. Aussi flegmatique que d’habitude cependant, Karm laissa passer tous les commentaires, l’air à peu près aussi concerné par la réputation de son biscuit que si l’on était en train de discuter de son choix de chaussures.

Karm appartenait probablement à l’une des ethnies humaines les moins expressives de la Galaxie et sa vie au sein de l’Ordre Jedi ne l’avait guère disposé à se montrer exubérant. Ni les remarques sur sa sexualité, ni le coup de feu brusquement tiré en l’air par Maxence ne parurent beaucoup l’affecter, alors que son regard passait lentement des deux femmes à la mercenaire. Elle avait la gâchette facile. Peu habituée à interroger des témoins, peut-être ? À surveiller.

Au demeurant, les deux fermières ne parurent pas bouleversées par les menaces de la mercenaire, peut-être parce que Maxence n’était guère impressionnante, peut-être parce qu’elle était accompagnée de l’un des représentants de l’Ordre et la Morale au sein de la République. Et puis des jeunes qui jouaient inconsidérément du blaster pour se donner des airs, ce n’était pas ce qui manquait dans leur campagne.

Vous voulez savoir si on connaissait des gens qui ont disparu ?
Ou si on a remarqué quelque chose d’anormal ?
Des phénomènes inexpliqués.
Par exemple, finit par lâcher Karm.

L’expression « phénomènes inexpliquées » en disant long sur les idées surnaturelles qu’une partie de la population avait commencé à nourrir à propos de cette sinistre affaire.

On les connaît tous à peu près, commença Maria. Des bons gars. Enfin, pas plus mauvais ni meilleurs que les autres, je suppose. Travailleurs, comme tout le monde ici.
Seulement des hommes ?
Seulement des hommes, confirma son interlocutrice.

Karm croyait de moins en moins en l’hypothèse de la bête sauvage.

Après, la forêt, enchaîna l’épouse de Maria, elle a à peu près toujours la même tête, on va pas se mentir. C’est une forêt, quoi.
Vous cultivez rien, là-dedans ?

La femme secoua la tête.

Plus au nord, y a des gens qui font des jardins forestiers, mais nous, on a déjà assez à faire avec les champs.
C’est du bois, surtout, dans ce secteur, si j’ai bien compris ?
C’est ça, r’gardez…

Elle s’essuya les mains pleines de cambouis sur le ventre de son bleu de travail, avant de se relever et de le guider jusqu’au bout de la cour, pour montrer une partie de la forêt.

À côté d’où c’que vous avez garé votre speeder, vous avez l’une des pistes de bûcheronnage. Plus loin à l’intérieur de la forêt, y a un camp pour préparer les troncs, les charger sur des droïdes de charriage, puis ils descendent par là, v’voyez, de cette colline, et le bâtiment que vous voyez au bout, c’est une scierie.
Ça appartient à une seule personne ?
Non, à la ville. La scierie, je veux dire. Après, la forêt, elle, elle est divisée en parcelles, qui peuvent se vendre. Les bûcherons louent l’utilisation de la scierie à l’année, je crois, c’est ça Maria ?
C’est ça, confirma son épouse.
Mais tous les gens qu’ont disparu étaient pas des bûcherons, pas vrai ?
Ah ça, non.
Je vois.

Avec des victimes aux profils aussi variés, difficile de voir à qui auraient profité tous les crimes, et plus d’une vingtaine de disparus, c’était beaucoup pour entretenir des fausses pistes.

Et donc, vous parliez de phénomènes inexpliquées ?

Maria haussa les épaules.

Nous, on a rien vu, mais c’est c’qui s’dit.
Non mais j’veux dire, il se dit quoi, précisément ?
Que certaines nuits, y a un brouillard noir qui se répand d’entre les troncs de la forêt et qu’on entend des cris qui montent de là-bas dedans.

Karm dissimula sa surprise.
Un brouillard noir, ce n’était pas n’importe quelle légende : c’était un pouvoir du Côté Obscur bien documenté. Mais il n’était pas impossible que la rumeur soit née précisément de ce qu’un tel avait pu lire sur les prouesses ésotériques des Sorciers Siths. On n’imaginait jamais ses superstitions à partir de rien.

Puis vous savez, le Gragou.
Le Gragou ?

Les deux femmes se regardèrent.

Ah, c’est p’têtre qu’ici qu’on dit ça. Le Gragou, c’est… Une histoire pour faire peur aux enfants, surtout.
Un vieux bûcheron qui se serait perdu dans la forêt et se serait transformé en bête sauvage et il chasserait les gens pour les emmener dans sa cabane délabrée et les dévorer vivants.

Bref, un mythe d’homme-sauvage comme il y en avait dans bien des planètes de la Galaxie. Karm tourna le regard vers la forêt. Et cette superstition-là, sur quoi se fondait-elle… ?
Maxence Darkan
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Les femmes s'étaient concentrées au plus grand plaisir de la mercenaire. Les bâtiments agricoles ne laissaient aucun indices, pas de traces de combat, de sang ou de quoi que ce soit qui aurait pu inculper un quelconque enlèvement dans les parages. Malgré tout, les informations qu'offrir le couple fut d'une très grande utilité. Les rumeurs, ces histoires de fumée noire ne resta pas sans écoute, en effet la mercenaire avait pris très au sérieux cela. Il s'agissait de la seule vraie piste qu'ils avaient désormais. Quant aux histoires d'homme sauvage, le "Gragou", elle ne put s'empêcher de ricaner une nouvelle fois. Lorsqu'elles eurent finit, Maxence considéra un instant son coéquipier, pas une émotion, rien qui ne puisse lui faire comprendre quoi que ce soit sur ce qu'il en pensait. Elle soupira.

-Merci mesdames, vous pouvez retourner faire vos trucs de fermiers.

La mercenaire se mit à regarder à son tour la forêt, elle avait prit au mot les dires des femmes, deux histoires se confrontaient, d'un côté, une légende d'enfants fondé sur le besoin de maintenir sa progéniture dans l'enceinte de la colonie, de l'autre, une histoire vague, certes, mais un étrange brouillard noir sonné plus spécifique qu'un compte d'homme-bête.

-Et si... Les deux histoires étaient liées. Non... On va faire un tour du côté de la forêt, y a plus grand chose à voir ici.

Elle avança la première, l'histoire trottait dans sa tête sans trouver de fin. Elle était perdue, ces seules options pour comprendre concrètement ce qu'était ce brouillard noir étaient Torr ou le terrain en lui-même. Machinalement, elle prit une boîte métallique se trouvant dans sa poche arrière pour en sortir une cigarette, mauvaise habitude qu'elle accepta depuis peu. Se retroussant les manches, elle l'alluma. Une grande bouffée plein les poumons, elle reprit.

-Ok je dois t'avouer un truc, cette histoire de brouillard noir j'y crois, mais je connais aucun engin capable de faire ça sans nous lâcher un vacarme d'enfer ou une atroce odeur d'essence dont ils auraient parlé. Quand à cette histoire de "Gragou"... Elle marqua une pause, putain de péquenots...

Elle continua de fumer en silence, elle avait pour bute d'empreinter la piste dont avait parlé la femme, celui des bûcherons. Un chemin bien tracé, il était encore possible de voir les traces des bottes qui se rendaient au travail. Le soleil passait à peine à travers les feuilles, ne laissant que quelques rayons donnant une petite ambiance champêtre.

-Il nous manque plus que le mobile, si ce qu'elles nous ont dit est vrai, a partir de là, trouver l'individu c'est pas si compliqué... même si j'ai la mauvaise impression qu'il nous tombera dessus avant le mobile. Enlever que des hommes, sans rançon, on dirait presque un enrôlement de force... Et puis bordel ce brouillard, t'as une idée de où il sort ?
Karm Torr
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J’ai une idée, ouais, murmura Karm en considérant la forêt et les pistes qui s’y enfonçaient, spectacle jadis bucolique et désormais inquiétant. Mais ça va pas te plaire. Ça me plait déjà pas à moi…
 
Ils prirent le chemin de la forêt, descendant la colline, pour remonter, quelques dizaines de mètres plus loin, sur le monticule d’où démarraient les premiers arbres.
 
Y a une manière d’utiliser la Force qui permet de répandre un brouillard sombre tout autour de soi. C’est une façon de se dissimuler. Assez peu discrète, j’en conviens, mais qui présente un certain avantage psychologique. D’autant plus que… disons que c’est pas exclusivement un aspect du Côté Obscur, mais ça reste quand même hyper associé aux Siths.
 
Le Jedi jeta un regard en coin à la mercenaire.
 
J’imagine que vu de l’extérieur, ça fait un peu ésotérique…
 
Comme la plupart de ses confrères, Karm avait parfaitement conscience que la Force restait au mieux un mystère, au pire une supercherie, pour tous ceux qui n’avaient jamais eu l’occasion d’être témoins de près de ses manifestations, et qui n’y étaient pas eux-mêmes sensibles. Dans les mondes isolés de la Bordure, où l’on pouvait passer toute sa vie sans jamais croiser le moindre Jedi ni le moindre Sith, la réalité des pouvoirs mythiques de ces personnages lointains était encore plus sujette à caution.
 
Après, bon, on va pas s’mentir, ce qu’un Sith fabriquerait ici pour kidnapper des éleveurs de carottes, je vois pas bien, mais ça pourrait aussi bien être quelqu’un qui est sensible à la Force mais qui perd le contrôle, sans jamais avoir reçu de formation et tout ça, et dont les pouvoirs commencent, disons, à déborder.
 
Ils étaient arrivés à l’orée des bois. Karm s’accroupit pour examiner les traces de bottes dans la terre que la couverture des arbres laissait meuble, malgré le soleil perpétuellement printanier de la planète. Rien de bien suspect.
 
J’suppose que ça sert à rien de spéculer dans le vide. Aussi bien c’est un phénomène naturel, genre dégagement gazeux d’un marais à l’intérieur de la forêt, vents nocturnes qui soulèvent de la terre charbonneuse, ce genre de trucs. Et des mecs ont vu trois nuages et s’en font tout un film. Essayons de trouver le camp de bûcherons, déjà.
 
Le moins que l’on pût dire, c’était que la forêt ne présentait pas un aspect franchement menaçant. Les oiseaux gazouillaient dans les branchages, de petits rongeurs bondissaient par-dessus les racines avant de se réfugier dans leurs terriers au passage des deux marcheurs et la piste qu’ils suivaient avait été clairement pratiquée dans la végétation, puis indiquée par des bandes de peinture régulièrement espacées sur les troncs d’arbre.
 
Ni l’examen des traces de pas, ni celui des petits branchages au bord du chemin, n’indiquait de confusion ni de bris, qui eussent été les signes possibles d’un combat précédant à l’enlèvement. Tout suggérait que les bûcherons allaient et venaient régulièrement, d’un pas régulier, vif mais ordinaire, vaquant à leurs occupations quotidiennes, jusqu’à l’interdiction d’exploitation prudemment prise par le maire de la petite communauté. Les enlèvements se faisaient de toute évidence ailleurs.
 
Après, y a une hypothèse qu’on peut pas écarter non plus, c’est que les gens aient rejoint la forêt de leur propre chef. Pour… une raison que j’ai présentement du mal à imaginer, pour être honnête, mais n’empêche…
 
Des enquêteurs spécialisés du Temple qu’il avait eu la chance de côtoyer, Karm avait retiré quelques principes élémentaires de toute bonne investigation, et notamment celui de ne pas se fermer à la moindre hypothèse, aussi étrange parût-elle. En tout cas, au bout d’une bonne demi-heure de marche, à l’ombre de la frondaison, ils débouchèrent dans une clairière en partie naturelle, que les bûcherons avaient achevé de régulariser, pour y installer un camp intermédiaire.
 
Il s’agissait en tout et pour tout de trois cabanes : l’une était un dortoir de quatre lits, l’autre une pièce unique, commune, pour les repas et la vie du groupe, et la troisième réunissait les fonctions d’atelier et de débarras. Un bloc sanitaire de toute évidence démonté d’une vieille corvette commerciale était adossée à la cabane des dortoirs et formait tout l’équipement de l’endroit.
 
Y a personne, déclara Karm à mi-voix, après avoir plissé les yeux quelques instants et considéré les lieux avec une intensité particulière. J’prends celle de gauche, j’te laisse celle de droite et on se retrouve pour fouiller ensemble celle du milieu… ?

Maxence Darkan
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Ils y revenaient, Max eut du mal à avaler sa salive, un pouvoir principalement utilisé par les Sith. Aux dires de son équipier, il pouvait aussi bien s'agir d'un pouvoir jedi, même si les jedis n'étaient pas réputés pour enlever des gens, ou d'une personne dans l'incapacité de maîtriser sa force... Les deux semblaient peu plausibles, comme déjà dit, un jedi ne ferait pas ça et ensuite, si quelqu'un ne maîtrisait pas ses pouvoirs, pourquoi enlèverait-il des fermiers et uniquement des fermiers de sexe masculin ? Elle termina sa clope, une grande inspiration stressée, se mêler des histoires de force ne faisait pas parti de ses plans.

-Je sais bien qu'un Sith ici c'est bizarre... Mais quelqu'un qui ne maîtrise pas sa force, pourquoi il enlèverait que des hommes ? Ça me parait... Absurde.

Il souleva d'autres idées, la nature, les gens qui partent d'eux-mêmes... Maxence ne le montrait pas souvent, si ce n'est jamais, mais elle se trouvait être plutôt influençable sur certaines idées. La probabilité qu'un Sith, peut être un renégat, soit à la source de tout ça, mijotait trop dans sa tête pour beaucoup porter attention au reste.

-Les gens qui se tirent, y a toujours pleins de raisons et crois moi, y en a pas mal ici. Perso, j'ai vécu le même genre de situation... Bon, à l’échelle des enfants, mais rester coincé ici, quand on veut savoir ce qu'est la vraie vie... J'me tirerai d'ici à leur place.

Ils marchèrent un bon bout de temps avant d'arriver au dit lieu. Si elle devait bien admettre quelque chose à cette planète bien éloignée, c'était bien sa beauté. La saison printanière donnée une belle lumière sur les cabanes. Si elle n'était pas occupé à chasser le Gragou-Sith elle aurait sûrement pensé à s'offrir des vacances, ici, loin de tout.
Torr, après bref inspection, proposa de se séparer. Maxence se tourna vers lui, un petit sourire mesquin.

-Se séparer, excellente idée. On fera comme dans les film d'horreur, le premier à se faire bouffer par le Gragou à perdu... Pas de chance pour moi, c'est les blondes qu'y passent toujours en premier. Aller, je mise dix balles qu'il se trouve dans la cabane de droite.

Elle lui donna une tape dans le dos, peut-être un peu plus fort que prévu, assez pour le secouer. Elle se dirigea vers la cabane qu'elle devait fouiller, par précaution, sa main saisit la crosse de son blaster en entrant, mais rien, pas l'ombre d'un Gragou. L'intérieur semblait très sombre par rapport au temps, quelques rayons passaient par le toit, de plus, l'endroit se trouvait sans dessus dessous. C'était un débarras après tout, des outils traînaient au sol avec des bouts de bois en tout genre et toute sorte de matériel. Maxence tournait sa tête de gauche à droite, enjambant le fouillis pour atteindre le bout du bâtiment, mais rien. La vilaine tentation de ramasser une des haches se fit ressentir, évidemment impossible pour elle d'y résister.

-Max la bûcheronne, ça sonne bien. Des outils tombèrent à l'entrée. Ni une ni deux elle dégaina son arme en direction du bruit. Oh merde, j'suis peut-être un peu...

-Stressée ?


-Putain Eos, j'ai failli flinguer mon poignet. Pfiu... Fais moi un scanne des environs et dis moi si tu trouves un truc. Un vaste rayon parcourra la pièce. J'arrive pas trop à déterminer si quelqu'un a foutu le bordel ou si ça a toujours été comme ça... Fait chier, j'me rends compte que j'ai perdu dix crédits.

-Il est possible qu'une ou plusieurs personnes soient passées par là, des outils sont peut-être manquant. Il peut s'agir des bûcherons à leur départ ou du Gragou.

-Eos c'est une blague l'histoire du Gragou. Des traces sur les murs ?

-Indéterminées, griffures de rongeurs, outils se cognant contre les murs, lancés de couteaux et coup de poings pour certains.

Elle continua sans un mot, ouvrant les grands placards d'affaires remplis de vêtements sales, de couteaux, cordes et tout autre sorte d'éléments inutiles. Il n'y avait rien d'autre à signaler que le bazar et encore, il n'avait peut-être rien à voir avec l'enquête. Elle se dirigea vers la sortie, Torr et la cabane du milieu pouvait sûrement éclairer un peu plus les choses. Une fois à l'extérieur, le jedi n'était pas encore là, elle se permit un petit tour du dernier endroit, une plus grande cabane que les deux autres, des fenêtres élevées et pas de porte arrière. S'il y avait quelqu'un... ou quelque chose à l'intérieur, il était bloqué.
Elle frappa trois fois le manche de la hache qu'elle avait gardé sur le cabanon de Torr.

-Alors ? Tu t'es pas fait bouffer rassure moi ? J'ai rien trouvé de mon côté, juste un bordel sans non. T'en ai où ?
Karm Torr
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T’inquiètes, j’te creuserai une jolie tombe, déclara le Jedi avec le plus grand sérieux (sans doute… ?), avant de se détacher de la mercenaire pour gagner la cabane qui servait de dortoir.

À l’intérieur, quatre lits presque collés les uns aux autres, des couchettes d’une barge de débarquement de l’époque de la colonisation, des décennies plus tôt, qu’on avait transporté jusque là et calées tant bien que mal avec des morceaux de bois. On voyait encore gravés sur les côtés les numéros de série qui correspondaient à un ancien vaisseau des services d’exploration de l’armée républicaine.

Au-dessus de chaque lit, on avait vissé dans les planches du mur un crochet auquel on suspendait un sac qui servait de chevet. Karm ouvrit l’un d’entre eux, le seul qui lui avait paru refermer quelque chose, pour en vider le contenu sur une couchette. Une pipe en bois, sculptée de façon artisanale, et qu’on avait commencé à décorer de gravures d’un côté, sans jamais finir. Une barrette de recharge pour datapad, pas le dernier modèle. Des cailloux polis et moirés, ramassés probablement dans le lit d’une rivière.

Une poche à tabac.
Que le Jedi ouvrit, pour effriter les feuilles qu’elle contenait entre ses doigts.
Les renifler.
Rien dont il fût familier, mais sa vie dans les Bordures galactiques lui avaient appris qu’on pouvait fumer tout et n’importe quoi, avec des effets secondaires plus ou moins violents. Par acquis de conscience, il glissa le tabac dans une poche de sa ceinture, avant de jeter un coup d’œil sous les lits – bonjour la poussière – et de quitter la cabane.

C’était pas révolutionnaire, avoua-t-il en retrouvant la mercenaire, qui ne paraissait pas non plus avoir fait la découverte de sa vie.

La porte de la cabane du milieu fut donc délicatement poussée, pour terminer l’inspection.

OK, ça, c’est révolutionnaire, lâcha le Jedi d’un ton dégagé, en se décalant d’un pas sur le côté, pour que Maxence puisse le rejoindre sur le seuil de la pièce.

Qui était décorée.
Étrangement décorée.
Des phrases recouvraient les murs, le plafond et le plancher, écrites parfois avec de la terre, parfois ce qui était probablement du sang et d’autres fois avec une substance marron et encore malodorante dont l’origine ne laissait guère de doute. Plus rarement, elles étaient gravées à même le doigt.

Karm se mit à lire tout haut quelques échantillons de cette prose déroutante.

« Les vers ont envahi la dernière de mes pensées »… « Plus de lumière dans les yeux de la forêt »… « Prenez garde aux arbres qui avancent »… « Vous les entendez ? Vous les entendez ? ».

Le Gardien sortit son datapad pour y enregistrer soigneusement l’image de ces singulières inscriptions.

Y en a que la vie forestière a pas laissés hyper relax, on dirait.

La découverte n’avait pas l’air de le bouleverser outre mesure. Les photographies prises, il s’autorisa à pénétrer pour de bon dans la cabane, pour ouvrir précautionneusement les placards et les tiroirs des meubles de facture grossière qui en occupaient le fond. Il y avait des conserves, des bocaux de végétaux en fermentation, de la vaisselle. Rien de très exotique.

Après quelques minutes, il se retourna vers la mercenaire.

Bon, écoute, j’suis pas psy ni pharmacien, mais là comme ça, j’ai l’impression que ça nous crie « champignons hallucinogènes » ou quelque chose dans le genre, non ? Après, le truc qui me chiffonne…

Au-delà du fait d’inspecter une cabane couverte de graffitis psychotiques qui embaumaient le fumier.

… c’est que partir dans un méga délire sur la forêt et enlever méthodiquement des gens, c’est pas exactement deux comportements qui vont ensemble. ‘Fin, je crois. J’ai p’têt une vision stéréotypée de la chose, mais dans ma tête, si t’es en pleine hallucination, tu choisis pas soigneusement tes victimes avant de les entraîner dans la forêt.

Mais il était explorateur, lui, et pas psychiatre.

Après, y a peut-être pas de corrélation. Hmbref…

Après un dernier regard circulaire à la cabane, Karm regagna l’air libre, pour y respirer à pleins poumons. L’idée d’essayer d’interpréter chacune des inscriptions lui avait bien traversé l’esprit, mais il avait l’impression que ce serait se lancer dans un exercice de spéculations stériles. Envoyer le tout à un Guérisseur psychologue de l’Ordre était toujours une éventualité, mais éloignés comme ils l’étaient, le temps que la transmission fasse l’aller-retour, ils seraient déjà au fin fond de la forêt.

J’imagine que y a deux grandes possibilités, déclara-t-il quand Maxence l’eut rejoint. Soit on retourne vers la civilisation avec nos super photos et on voit si ça évoque quelque chose à quelqu’un, c’qui est quand même pas impossible, on a peut-être pas affaire à un cas isolé. Soit on s’enfonce dans la forêt en espérant avoir l’air assez appétissants pour que quelqu’un veule nous kidnapper. T’en penses quoi ?
Maxence Darkan
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Les portes ouvertes, le jedi s'écarta pour faire place à la mercenaire, un premier mouvement de recule l'envahi. L'endroit émanait d'étranges vibrations, en plus des odeurs. Des peintures des plus originales avaient été parsemé ça et là. Une fois rentré, elle plaça sa main devant sa bouche pour éviter un maximum cette pestilence. À deux doigts de toucher un des écriteaux par curiosité, Maxence préféra s'abstenir de cette boulette pour l'instant, se contentant de les scanner. Tous ses écrits étaient bien fait des matières qu'elle pensait. À ne sachant trop quoi en penser, elle écouta Torr.

-Donc on a affaire à un magicien sous champi' hallucinogènes qui enlève uniquement les mecs et qui écrit des trucs bizarres avec sa merde... On dirait mon dernier trip... 'fin bref, on en reviens à un point, la flore.

Si ces "avertissements" avaient été placés là, c'est qu'il y avait une raison, la personne derrière cela est belle et bien partie dans un délire psychotique, mais il y avait forcément un sens quelque part. Elle lut une dernière fois tous les écrits les mémorisant ainsi, avant de rejoindre le jedi. La lame de la hache sur le sol, elle maintenait son poids sur la crosse. Ils tournaient encore et encore. Entre les deux, Max était sûrement la plus expérimentée sur le terrain des drogues... En mal.

-J'ai déjà pris des trucs tripant dans ce genre là... J'ai cru voir un Hutt avec des jambes... Le monde n'a plus la même saveur depuis... Mais, sérieusement, quand tu pètes un câble, qu'il soit dû à une quelconque substance ou juste au cerveau qui joue des tours, tout ce que tu dis a un sens, à ta manière.

Ces phrases devaient être liées en un point, les vers, la forêt, ses yeux et la lumière. Pour les plus lucides, le sens s'éloignait. Interroger les habitants ne l'enchantait guère, pour qu'ils disent quoi ? C'est à peine s'ils savaient lire. Elle considéra la forêt en silence, l'endroit vers lequel ils étaient venus, l'opposé, à droite puis à gauche.

-La forêt sans trop d'hésitation, interroger les péquenots, ça me fout en rogne... Ils savent pas aligner trois syllabes sans vomir leur langue. Certes, enlever méthodiquement les hommes en plein trip c'est bizarre, mais pour l'instant, on a que ça. Plus de lumière dans les yeux de la forêt, ça t'évoque quoi ? Répond pas je me pose la question... Une grotte ?... Laisse tombé.

Elle regarda les murs de la cabane sans trop savoir quoi chercher. Elle avait pris soudain un grand plaisir à comprendre le mystère. Elle leva la tête vers le ciel.

-À ton avis, quelqu'un qui chie partout et se coupent les veines pour écrire des messages, il laisserai pas un paquet de traces sur son chemin ? Faut regarder les alentours si on trouve des traces. Je sais pas si c'est le caca qui me fait cet effet, mais j'ai carrément envie de savoir qui se cache derrière tout ça.
Karm Torr
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Le regard de l’Ark-Ni s’était posé en biais sur la jeune fille, quand elle avait si promptement rejeté l’hypothèse d’interroger les habitants. À son humble avis, les paysans, fussent-ils plus éduqués, n’étaient pas moins clairvoyants que les plus subtils des Chevaliers Jedis, mais pour l’heure, comme la forêt lui paraissait une piste tout aussi solide, il ne fit pas de commentaire et son attention revint sur les arbres.


Les drogues, c’était un sujet qui lui échappait entièrement. Des rêves singuliers, quelques visions à travers la Force peut-être, quand il méditait profondément, voilà ce qui se rapprochait le plus pour lui d’expériences psychédéliques, et elles étaient fort rares. Peut-être trois ou quatre, dans toute sa vie, éphémères d’ailleurs, et souvent beaucoup plus cohérentes. Tout ce qu’il savait d’autres venaient des rapports des ethnographes du Temple, qui couvraient les cultes shamaniques.


Y a une autre possibilité à pas négliger, fit-il finalement remarquer, en désignant la cabane qu’ils avaient laissée derrière eux d’un geste de la tête, c’est que ça soit une mise en scène. Un mec enlève des types pour X ou Y raisons, pas du tout délirantes, et pour brouiller les pistes, il laisse un tableau un peu… Ben j’sais pas, c’est presque stéréotypé, non ? La cabane pleine d’inscriptions inquiétantes, le camp de bûcherons abandonné, l’indice opportunément placé tout au bout d’un chemin bien tracé entre les arbres.


Karm ponctua sa théorie d’un haussement d’épaules peu conclusif avant d’abonder dans le sens de la mercenaire :


Mais t’as raison, allons explorer la forêt. Sans plus d’éléments, d’façon, on va pas aller très loin. Viens, on va commencer par trouver un terrier.


Un… ?
Plaît-il ?
(Était-il tombé lui aussi sur des champignons colorés ?)


Quoi qu’il en fût, le Jedi se mit à inspecter très sérieusement la clairière, à la recherche d’un terrier. Quelques minutes plus tard, il se débarrassait de son sac à dos et s’agenouillait devant une sorte de taupinière. Une main posée sur le sol, les yeux fermés, l’homme se plongea dans la Force et, quelques secondes plus tard, une créature d’une trentaine de centimètres, avec un long museau torsadé et des pattes griffues, consentit à s’extirper de terre, pour s’asseoir face au Chevalier et le regarder fixement.


L’explorateur sondait l’esprit de la créature. Un terrier, c’était l’assurance d’avoir affaire à un animal relativement sédentaire, c’est-à-dire bien placé pour observer les allées et venues dans la clairière. Un témoin privilégié, en somme. La bête éternua violemment, avant de frotter son museau de sa patte droite. Ses perceptions étaient singulières, fondées moins sur la vue que les vibrations, et le Jedi dut faire preuve d’un peu de patience pour interpréter ses sensations d’un esprit bien différent du sien.


Y a eu un combat, finit-il par murmurer d’une voix lointaine. Dans la clairière, un homme contre un autre. Beaucoup de bruits. L’un des deux tombent. L’autre le traîne. Par là.


De la main, il désigna une direction, vers le cœur de la forêt. Il rouvrit les yeux et fit un signe de tête à l’animal, qui éternua une seconde fois avant de se replonger dans ses galeries. Le Jedi se redressa, reprit son sac et, avec son aplomb sérieux ordinaire, déclara :


Meilleur témoin du monde. Mais probablement illettré.


Et puis, laissant à Maxence le loisir de méditer sur la tournure singulière qu’avait pris sa carrière de mercenaire pour qu’elle doive désormais se reposer sur les témoignages silencieux des animaux fouisseurs, le Chevalier prit la direction indiquée par la taupe. Désormais, ils s’engageaient hors de toute piste et, en quelques mètres, ils eurent rejoint une végétation assez dense. Sur le chemin, Karm indiqua différents branches brisés à hauteur d’homme, preuves s’il en fallait qu’ils étaient sur la bonne piste.


Dans cette partie de la planète, la forêt était composée pour l’essentiel d’arbres feuillus et, quoique la vie y fût foisonnante, elle n’avait pas cette aura d’hostilité et de menace perpétuelles à laquelle le Jedi s’était habitué en s’entraînant dans les jungles d’Ondéron et de Dxun. C’était au demeurant pour la relative docilité de la faune locale que la planète, dans ces zones-là tout du moins, avait été jugée propice quelques décennies plus tôt pour les opérations de colonisation.


De temps à autre, les feuillages intermédiaires étaient soudainement agités par le passage d’une sorte de singe aux bras courts mais musculeux, qui se propulsaient par l’impulsion de ses jambes puissantes d’arbre en arbre, voyageur solitaire des frondaisons. D’autres fois, c’était un reptile frugivore qui se coulait paresseusement le long d’un tronc, pour se lover au pied d’un bosquet de baies qui servirait à son déjeuner.


En quelques occasions, ils croisèrent des prédateurs moyens, qui coursaient à toute vitesse des rongeurs pourtant véloces ou fondaient par surprise sur les oiseaux à quatre ailes qui avaient parfois l’imprudence de se poser au sol, pour manger les fruits à coque tomber des arbres, mais que leur envergure empêchait de décoller promptement quand ils étaient menacés. La progression était lente et difficile, parce qu’il fallait constamment escalader des racines noueuses qui montaient hors du sol ou se faufiler entre des troncs très serrés, mais la densité de la végétation permettait de suivre sans trop de difficulté l’homme qui les avait précédés et qui avait laissé sur son chemin des branches brisées, des fruits juteux piétinés avec la forme d’une semelle et des traces de mains immortalisées par la boue séchée, là où il lui était arrivé de tomber.
Maxence Darkan
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-Tu sais, je te trouve un peu pessimiste, pas la peine de réfuter les preuves qu'on a, visiblement, la seule personne qui veut nous mener à une fausse piste, s'il ou elle sait qu'on est là, c'est la personne qu'on recherche... Donc, ça reste une piste.

Avait elle dit tout sourire, presque fière de sa petite philosophie optimiste. Torr était d'accord pour aller chercher un terrier... Aller dans la forêt ? Elle ne prêta pas vraiment attention à cela, la hache sur l'épaule elle le suivit à... un terrier. Pas vraiment convaincu de la méditation surprise du jedi, elle resta plantée en silence jusqu'à l'arriver d'un petit rongeur sorti de terre. Il semblait sûr de ce qu'il faisait, donc aucun intérêt de l'arrêter dans son élan.

La petite bête avait visiblement répondu aux interrogations de Torr. La force étonnera toujours la mercenaire, cette puissance qui les entourait à chaque instant pouvait se montrer d'une utilité sans pareil.

-O... K... L'homme qui parlait à l'oreille des animaux, on en apprend tous les jours. Moi aussi je veux faire ça, tu pourras m'apprendre ? Elle ricana. Nan j'm'en branle, j'ai pas vraiment avant de savoir le meilleur moyen de se lécher les c... 'fin tu m'as compris.

Le chemin était tout tracé, la petite bête venait de montrer le bon chemin à suivre. Pour la jeune femme le calcul fut vite fait, un rongeur se montrait aussi utile que deux fermières adultes. Malgré les belles traces laissaient par le suspect numéro un, marché dans la nature n'était pas de tout repos, enlacé par une racine par ci, griffé par une ronce par là, de quoi jouer sur les nerfs de la jeune femme. Sautillant parmi la végétation comme une enfant ne sachant quoi faire de ses pieds, elle meublait le silence de son inévitable sarcasme.

-Maxence la bucheronne et son fidèle acolyte Torr, guidé par ce magnifique... peu importe ce que c'est, doivent désormais faire leur chemin dans cette étrange forêt peuplé de primates un peu moches, mais sûrement des plus dangereux. L'homme qui recouvre les murs de son caca se cache ici, les pistes sont encore fraîches... Arriveront-ils seulement à l'arrêter ? La suite dans le proch... Qu'est-ce que je raconte ?

À peine eut elle le temps d'en rajouter une couche qu'elle s'étala au sol, la stoppant net dans son élan de stupidité et cela, pour le bien de la santé mentale du Jedi. La tête sur un fruit rouge sucré à l'odeur singulière, son regard s'était alors posé sur un morceau de tissu arraché à un des deux hommes, apparemment la personne traîné en se fiant au positionnement. Elle le saisit avant de se relever, il ne révélait rien de particulier, un bout de vêtement noir pouvant faire partie d'un pantalon bas de gamme comme d'une chemise ou d'une toge en laine simple.

-J'ai trouvé ça... À moins que tu puisses parler aux vêtements ?... C'est une vrai question ce serait trop bien. Elle frotta sa joue contre son épaule. J'me disais un truc, se battre au milieu d'une clairière c'est bizarre, le mec qui s'est fait étalé a peut-être tenté de fuir... Mais je serais plutôt parti vers le chemin des bûcherons. Faut voir comment l'action c'est déroulé après tout.

La traque commençait à devenir longue, donnant l'impression qu'ils n'arriveraient jamais à destination.

-Il l'a traîné pendant combien de temps le bougre ?
Karm Torr
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Tu déconnes, répondit le Jedi quand Maxence lui agita le bout de vêtement en guise d’interlocuteur, mais y a des gens qui arrivent à travers la Force à… ‘fin, peu importe, pas moi.


Conclusion décevante, mais Karm n’avait jamais été un grand spécialiste pour scruter l’avenir ou le passé. Son rapport à la Force était trop physique, trop concret, trop sensualiste pour l’engager à se livrer à d’étranges divinations. Il manipula le bout de tissu dans tous les sens, sans pouvoir en tirer grand-chose de probant, avant de jeter un coup d’oeil au bracelet connecté à son datapad, pour vérifier l’heure.


On d’vrait manger un morceau avant de poursuivre, décréta-t-il. S’agirait pas d’être affaiblis si on tombe sur le tueur à la hache ou je sais pas quoi.


Et puis de toute façon, la situation méritait d’être réfléchie avec pondération. Le Chevalier se débarrassa de son sac à dos avant de s’asseoir sur une racine noueuse, pour en tirer une ration de survie fournie par les cuisines de l’Ordre, qui avait l’air aussi peu ragoûtante que toutes les rations de survie fournies par toutes les cuisines de la Galaxie. De fait, le Jedi se mit à mâchonner une sorte de pâte énergétique.


C’qu’est sûr, c’est qu’on a déjà une bonne direction. Et partant…


De sa main libre, il tira son datapad de sa poche, le posa sur ses genoux et pianota dessus, pour afficher la vue aérienne des environs : la forêt, la périphérie de la ville en bas, les collines et leurs différentes exploitations.


Il va à peu près en ligne droite, dit-il en traçant de l’ongle le parcours qu’il avait suivi au sein de la forêt, doué de toute évidence d’un très solide sens de l’orientation, à peu près vers le coeur des bois. En supposant qu’il emmène toutes ses victimes aux mêmes endroits, on peut extrapoler la trajectoire qu’il aura parcourue pour chacune d’entre elles, à différents points de croisement avec celle qu’on est en train de suivre.


Le Jedi engloutit le reste de son déjeuner dans une dernière bouchée, avant de fourrer l’emballage dans son sac à dos et de rentrer les données dans son datapad. Des lignes se matérialisèrent des exploitations d’où la police de la planète supposait que les autres victimes avaient été enlevées, jusqu’à venir croiser leur position actuelle. Puis quand il dessinait leur chemin prospectif plus profond dans la forêt, les lignes évoluaient en même temps.


Bon, maintenant, parmi les victimes, y a clairement deux cas à part, les mecs dont on a retrouvé le cadavre. Les gens à l’auberge nous ont dit que c’était genre des accidents, mais la planète a pas connu d’accidents de ce genre depuis la colonisation, alors j’pense qu’on peut raisonnablement parier sur le fait qu’ils ont plutôt réussi à s’échapper et que, dans la précipitation de leur fuite, ils ont effectivement fait une mauvaise chute. Donc je les mets aussi en régression. Maintenant…


Ces méthodes, il les utilisait d’ordinaire pour estimer les mouvements de populations animales à l’intérieur d’un massif végétal, mais le principe, au fond, était le même.


À partir des données météorologiques des différentes stations utilisées par les paysans du coin, et surtout du taux d’humidité, on peut estimer la fraîcheur des traces qu’on a vues jusque là, et l’odeur de la cabane, à vue du nez, indique aussi que la matière fécale était pas aussi sèche que ça, disons un jour ou deux, au max.


L’un des aspects les moins glamours de la vie d’un explorateur en pleine nature, c’était le temps passé à renifler des bouses et comme les grands parfumeurs apprennent à distinguer toutes les fragrances, Karm était devenu petit à petit un expert pour estimer la fraîcheur des déjections animales.


Donc, maintenant qu’on a une direction initiale, un intervalle temporel, en supposant une force, une endurance et une vitesse à peu près ordinaires, c’qu’on peut supposer vu les traces laissées, le mec a pas défoncé des arbres sur son chemin ni rien, on peut établir un modèle et isoler la zone maximale parcourue…


L’Ark-Ni se mit à marmonner quelques chiffres incompréhensibles à mesure qu’il les entrait dans le calculateur de trajectoire, avant d’appuyer une dernière fois sur l’écran du datapad. Le long de la ligne qu’il venait de parcourir, et qui se projetait indéfiniment dans le bois, une section se coloria en rouge, indiquant la dizaine de kilomètres où se trouvait probablement leur proie.


OK, donc. Maintenant. On va supposer qu’on a affaire à un agent relativement rationnel, c’qu’indique quand même les enlèvements sans indice, l’absence de trace de sang, le choix discriminant des victimes, ce genre de choses. J’veux dire par là qu’on va supposer qu’il emprunte en général le chemin le plus efficace, c’t’à-dire qu’il enlève ses victimes de là où il peut les traîner le plus facilement jusqu’à son repaire, donc en évitant les obstacles naturels difficiles à franchir, genre élévation du terrain, rivière, zones marécageuses, tout ça. Ça m’parait probablement, dans la mesure où y a des gens qui sont enlevés dans les bois, d’autres quasi chez eux, d’autres sur le chemin du boulot. Y a pas une seule méthodologie. Donc, j’dis au logiciel d’éviter les pentes de plus de trois degrés, les terrains trop humides et les cours d’eau, ça va conditionner les trajectoires et réduire la section de terrain à couvrir.


Nouveaux calculs du datapad, avant que la section coloriée en rouge ne se raccourcisse. Karm tourna l’écran vers la mercenaire.


Voilà, j’dirais qu’à partir de maintenant et sur à peu près trois kilomètres cinq cents, c’est là où on a le plus de chance de retrouver sinon notre mec, du moins l’endroit où il se terre d’ordinaire. Ça marche assez bien avec les prédateurs forestiers, j’pense pas que ce soit fondamentalement différent dans c’cas là.
Maxence Darkan
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Une pause s'impose, la nature s'arrangeait confortablement autour des deux enquêteurs, de grosses racines volumineuses faisaient de bons tabourets et les herbes touffues, d'excellents duvets dont Maxence ne se priva pas. Au-dessus d'elle, les feuilles dansaient au vent et les rayons de soleil caressaient son visage de temps en temps. Difficile de croire que des enlèvements d'une telle envergure pour une colonie comme celle-là ce produisait en ces lieux. Les volatiles qui gazouillaient, chantaient et sautaient de branche en branche pour rejoindre leur nid l'avait perdu assez longtemps pour ne pas suivre le début de la réflexion de Torr sur la triangulation de la position du criminel.

Les informations s'enchaînaient, perdue pour perdue, elle prit une barre chocolaté à moitié fondu de l'intérieur de son blouson pour se rallonger, n'essayant même pas de rattraper le file des équations qui s'écoulaient de sa bouche. Préférant la simplicité de la nature et le chocolat étalait autour de sa bouche. Quand il eut fini, la barre l'était aussi, elle se redressa pour voir l'endroit supposé de la position du kidnapper.

-J'ai pas suivi, mais... Rah ! Troi kilomètres cinq !

-[En supposant qu'il emmène tou...]

-Nan ta gueule Eos, me fais pas le récap'. Bon, bah ces kilomètres se feront pas tout seuls.

Elle se leva, jetant non-chalamant l'emballage de sa barre chocolaté en pleine nature. Trois kilomètres cinq en pleine forêt ne se trouvait pas être une expérience extraordinaire, la végétation pouvait être aussi belle qu'encombrant quand il s'agissait de tracer son chemin. La faune, elle, faisait sursautait, inquiété dans les coins les plus sombres et émerveillé lorsqu'un ruminant n'avait pas peur de s'approcher d'eux.

Il fallait dire que malgré l'acte stupidement contradictoire de jeter ses emballages en pleine nature, elle appréciait beaucoup la vue qui se profilait à chaque pas. Elle changeait des missions sur les planètes gelées ou seules les bêtes les plus velues et agressives survivaient. Ou pire, celles qui consistaient à ramper dans une quelconque rue de Corusante ou Nar Shadaa qui, même si en apparence semblaient plaire à la mercenaire, étaient des plus désagréables pour la santé.

Les enquêteurs avaient fait une bonne partie du chemin jusqu'à une petite source d'eau qui s'écoulait d'un talus naturel qu'ils longeaient et tout cela en un temps des plus minime. Elle s'arrêta la première pas très téméraire face à cette marche.

-Comment on agira face au kidnapper ? Elle remonta ses manches. On tente de l'arrêter par tous les moyens, ou j'ai autorisation d'lui pété les genoux s'il nous emmerde ? Dit elle avant de se passer de l'eau sur le visage. Sans oublier qu'il est peut-être tout seul à traînait ce mec, mais ils peuvent très bien être plusieurs cerveaux dans leur planque. Passant un main dans sa nuque, elle reprit. T'as dû le voir, parler avec calme ou pire, calmer les choses, c'est franchement pas mon truc. Alors je te propose un truc, tu fais le gentil flic, je fais la méchante. On la jouera à ta manière, mais si ça se passe pas comme prévu, ou qu'il y a une couille dans le potage quelque par, je m'en occupe et tu suis. En tant que chevalier, tu dois savoir jouer de ton sabre... De ton vrai sabre laser j'veux dire. Fallait qu'elle sorte à un moment ou à un autre celle-là.
Karm Torr
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Karm avait ramassé l’emballage pour le fourrer dans sa poche. Pas question de souiller une nature enchanteresse. La marche reprit. La douceur bucolique du décor ne cadrait guère avec les étranges suspicions qu’ils avaient déroulées depuis le début de leur aventure. Karm avait plutôt l’impression d’être dans un holodessin pour enfants sur le monde merveilleux des petits animaux qu’en plein théâtre de l’horreur où un psychopathe délirant attendait la moindre opportunité pour les trucider sans pitié.

J’me défends, lâcha-t-il négligemment quand la mercenaire l’interrogea sur ses aptitudes au sabre laser.

(Doux euphémisme.)

C’qu’est certain, c’est qu’on va faire un usage proportionné de la force, si c’est nécessaire, enchaîna-t-il, avec un regard un brin soupçonneux pour son acolyte. Tout fou qu’il est p’têtre, et potentiellement meurtrier, ça en reste pas moins un citoyen républicain qui a des droits et qu’on va pas molester indûment pendant son arrestation.

La précision n’était pas innocente : Karm savait pertinemment que perdue dans une forêt de la Bordure reculée, une mercenaire pouvait fort bien oublier qu’elle se trouvait en territoire républicain et qu’en l’espèce, leur marge de manœuvre était limitée et que le représentant de la loi, dans toute cette affaire, c’était lui.

Puis surtout on va commencer par bien comprendre c’qui s’passe, parce que si on arr…

Le Jedi s’interrompit brusquement. Le ruisseau avait fini par s’éloigner d’eau, pour serpenter plus loin dans la forêt, et des bruits nouveaux, inattendus, s’étaient joints aux chants des oiseaux. On entendait des ronflements de moteurs, des tintements métalliques et la rumeur de conversation. Karm échangea un regard avec Maxence, avant de reprendre sa marche, mais cette fois-ci très lentement, à pas précautionneux — silencieux comme une ombre dans une forêt qui semblait se prier à sa volonté de discrétion.

Au bout de dix minutes de cette progression subreptice, ils parvinrent à se plaquer contre le tronc d’un arbre centenaire, pour jeter un œil à un spectacle d’une étrange banalité : là, dans une clairière, pas de rituel satanique, pas de charnier, pas d’empilements de corps démembrés par un bûcheron frappé de furie, mais l’entrée d’un tunnel creusé dans la forêt défrichée, des baraquements construits à la hâte et une dizaine d’hommes qui s’activaient, transportant de la terre ou des outils, quand ils ne poussaient agricoles modifiées pour des travaux miniers à l’intérieur de leur galerie.

Le Chevalier finit par tirer son datapad de sa poche et par afficher la liste des hommes disparus, qui mentionnait leur nom, leur âge, le lieu de leur enlèvement supposé et leur espèce. Silencieusement, il se mit à pointer une à une les espèces à Maxence, avant de désigner les hommes correspondant qui s’activaient. Conclusion : leurs victimes présumées étaient là pour une bonne partie, en pleine forme, à s’activer à quelque mystérieuse activité. Voilà qui n’expliquait ni les deux morts dans la forêt, ni l’état de la cabane de bûcherons.

Karm finit par s’accroupir et par tirer de son sac une sorte de brique composée de milliers de petits cubes encastrés les uns dans les autres. Il effleura l’appareil et les cubes commencèrent à se réagencer, jusqu’à se donner la forme d’un crabe. Puis le Jedi pianota sur son datapad et l’animal mécanique partit se faufiler entre les hautes herbes. Fugueur, c’était le nom de cette étrange sonde, était en mission pour collecter quelques informations supplémentaires. En attendant, l’explorateur jugea plus prudent de battre en retraite sur quelques mètres.

OK. Donc… Ils ont trouvé un truc ? Ou ils fabriquent un truc. Vraisemblablement pas hyper réglo, sinon ils se seraient pas planqués. Soit parce que… Le truc en lui-même est illégal. Soit parce que l’exploitation est illégale. Soit parce qu’ils ont pas envie de partager. Quelque chose comme ça ?

S’il n’y avait pas eu deux morts en pleine forêt, Karm se serait demandé à bon droit si tout cela relevait encore de leurs affaires. Après tout, tous ces hommes étaient majeurs, libres de se volatiliser quand bon leur en chantait et il n’était pas impossible que leur soudaine pulsion excavatrice en pleine forêt fût parfaitement légitime. Quelque chose lui disait cependant que débarquer en plein milieu du camp pour leur demander de plus amples précisions n’était pas la stratégie la plus indiquée.

Ma sonde va faire quelques relevés, pour essayer de déterminer ce qu’ils trafiquent. Après ça, j’imagine que y a, hm… Deux grandes écoles. Soit l’un d’entre eux y va maintenant pour discuter pendant que l’autre le couvre, au cas où ça dégénère. Pourquoi pas. Soit on attend la nuit pour s’infiltrer et jeter un œil dans leur trou, en espérant qu’ils se soient pas organisés pour faire des rotations et bosser H24.

(Ou, dans le cas de la planète, H18.)
Maxence Darkan
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-Ah... Les lois républicaines j'vous jure.

Mercenaire à la limite de la légalité dans l'espace républicain, elle oubliait vite que tirer sur le premier venu avec la plus compréhensible des raisons de la galaxie, le juge te rattrapera toujours à coup de marteau et d'ennuyeux rassemblements vite médiatisé, selon la personne que tu descendais. Juste, mais lent et personne n'aime être le lent. Jusque là, elle ne s'était pas fait attraper par rapport aux possibles mission d'ordre louche qu'elle avait mené à bien, pour la plupart.

Prête à recevoir quelques ordres moralisateurs de la part de Torr, un bruit l'interrompit, elle l'avait aussi entendu. Des bruit de moteur, d'autres, indistincts, comme un chantier au loin. Maxence arqua un sourcil en croisant le regard du Jedi. Il prit l'initiative d'aller voir, suivi de près par la mercenaire qui, maintenant la crosse de son blaster bien en main et le manche de la hache (inutilement conservé) dans l'autre. D'un pas léger, ils trouvèrent le dit lieux. Une sorte de mine, des baraquements rapides pour dormir, un chantier nouveau donc. Torr, mieux équipé que sa coéquipière, pointé du doigt les supposé disparus.

Un étrange sentiment l'engloutit, le puzzles changeait de couleur et les chaînes soudaient à la va-vite se brisèrent. "Ça colle pas" chuchota Max. Les indices suivis jusqu'à maintenant ressemblaient à de très belles fausses pistes, pourtant, elles les avaient menés ici. Elle devait éclaircir les questionnements trop nombreux pour son cerveau avec Torr pour se remettre dans l'axe. Un drone en forme de crabe plus tard, le repli fut de mise.

La légitimité de leur présence devait être remise en cause, les cadavres trouvés ou non, n'avaient peut-être aucun rapport, mais ils faisaient de l'enquête, alors pourquoi ne pas leur poser de questions après tout ? Deux choix se présentaient à eux, aller les voir et tenter de les interroger ou attendre la nuit pour une approche plus pragmatique. Elle s'assit contre un arbre, les bras derrières la tête et cette stupide hache sur son flan.

-On attend la nuit. J'aime pas ça. Encore, que des culs terreux soient capables de foutre de la merde sur des murs pour brouiller les pistes, ça m'étonne pas tant que ça, mais tout le reste colle pas. Ça signifierait que les infos des deux bonnes femmes sont complètement fausses ou qu'il y a un homme qui maîtrise la force dans le tas et que, tuer des gens pour une mine... Bah y a plus classe comme façon de procéder. Sans compter qu'ils se sont fait chier à traîner un corps et pas l'autre.

Elle sortit une deuxième cigarette de sa petite boîte métallique, une étincelle plus tard, la fumée lui chatouillait les narines. Ensuite, elle retira sa veste pour y déposer ses blasters évitant de ce fait, la prise d'humidité potentielle au contacte du sol.

-J't'en propose pas je suppose ? Dit elle en tendant son bâton cancérigène. Sinon, imaginons et je dis bien, imaginons que cette mine renferme la plus précieuse des pierres. Pourquoi les garder que pour eux ? L'avarice tu vas me dire... j'en connais un rayon là-dessus d'ailleurs. Mais pour des gens qui vivent en groupe dans l'trou du cul de la galaxie, tu vois l'intérêt de le garder que pour toi ? Et pourquoi ces mecs ont disparu petit à petit et pas d'un coup ?

-La psychologie des espèces varient pour chacune, il existe de nombreuses encyclopédies à ce sujet. Comme vous l'avait déjà sous-entendu Maxence, l'envie de quitter la planète n'est pas à ignorer. Torr, la banque de données de votre datapad permettrait-il de trouver un minerai ou d'anciennes structures enfouies dignes d'intérêts ?

-Ah ouais, les présentations. Elle agita son poignet. Eos, chevalier Torr, chevalier Torr, Eos. Un bisou ? Non ? Non ?...
Karm Torr
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Fausses, j’sais pas. P’têt qu’il s’est vraiment passé un truc dans la cabane. P’têt qu’il y a du brouillard noir avec des origines hyper naturelles. T’as vu la tonne de terre qu’ils excavent, là ? Il suffit d’une bonne tempête une nuit, avec un vent bas, qui te souffle tout ça depuis la forêt et voilà le début d’la légende. Face à l’inconnu, les gens laissent leur imagination interpréter des faits qui peuvent avoir des explications plus rationnelles.

En bon Jedi, Karm était bien placé pour le savoir : entre les apologues complètement cryptiques de certains Maîtres et les chroniques largement fantasmées d’un passé désormais légendaire qui s’alignaient dans les archives de sa Bibliothèque, l’Ordre imposait à ses membres de démêler avec prudence la part de fiction et la part de réalité dans les enseignements qu’il lui délivrait à propos de la Force. C’était l’une des raisons pour lesquelles Karm préférait s’en tenir aux aspects de celle-ci les plus immédiats, les plus concrets, ceux qui étaient presque palpables.

Cool, fit-il en considérant le bracelet.

Comme à peu près tout ce qu’il disait, il avait eu un ton égal, détaché, de sorte qu’on ne savait pas trop s’il était indifférent, sarcastique ou véritablement intéressé. Son regard, lui, était plus expressif : l’Ark-Ni, comme la plupart des siens, était un grand amateur de technologie.

Ouais, donc, dit-il en reprenant le fil de ses propos, aussi bien c’est pas une mine.

Le Chevalier tira son datapad pour explorer les rapports d’exploration et les données laconiques transmises sur la planète.

Ça peut être… un tunnel de communication, ou une cachette, ou des habitations, ou un lieu de culte, ou une installation agricole, ou un chantier de fouille archéologique. Le truc, c’est qu’on a pas beaucoup de données sur les sous-sols, la colonie est quand même assez récente, trop pour s’être lancée dans l’exploitation minière. Ça exclut pas que quelqu’un ait trouvé un filon et décidé de l’exploiter. Quant au secret…

Haussement d’épaules.

J’sais pas, ouais, la cupidité, c’t’une bonne raison. Ou alors ils sont en train de faire un truc illégal. P’têt que la forêt appartient à quelqu’un, j’sais pas trop. On verra bien ce soir.

Et les heures passèrent.

De tant à autre, le Jedi se relevait pour s’approcher à nouveau du campement et s’assurer qu’il ne s’y produisait rien de révolutionnaire, puis il revenait attendre, en silence, dans un état semi-méditatif. Son esprit vagabondait dans la nature tout autour d’eux, dont il éprouvait la présence dans la Force : les feuilles, la sève dans les arbres, les esprits des animaux. C’était une occasion de mieux les connaître et d’affiner ses pouvoirs.

Le soir était en train de tomber quand Fugueur revint. Le crabe mécanique s’était faufilait entre les hautes herbes, avant d’escalader le genou du Jedi qui, assis en tailleur, était immobile depuis de longues minutes, respirant à peine. Karm rouvrit lentement les yeux. Un frisson le parcourut alors qu’il reprenait pied dans des perceptions plus ordinaires. Sans rien dire, il connecta la sonde à son datapad pour en interpréter les données.

Hmm… Apparemment, pas de l’exploitation minière : aucune radiation anormale, peu de particules métalliques dans l’atmosphère. En revanche, y a une substance atypique, on dirait… Des spores ? Du pollen. Quelque chose qui cadre pas avec les données issues de l’exploration. Des champignons, ça pourrait coller. Une vaste champignonnière souterraine, dans un endroit sombre, humide et frais. Et si les champignons sont, tu sais…

Il fit un geste de la main vers sa tempe, pour suggérer la folie. Hallucinogènes, c’était ce qu’il voulait suggérer.

Ça expliquera à la fois l’incident de la cabane et le côté secret parce qu’illégal de la chose. Mais peut-être que les spores sont un effet secondaire de ce qu’ils fabriquent là-dessous. Qu’ils sont tombés sur des champis psychédéliques sans même le savoir alors qu’ils creusent pour autre chose. En tout cas, si on compte les sources de chaleur, ils sont le bon nombre.

Le Jedi tapota la tête (… ?) de la sonde et les cubes de Fugueur se reconfigurèrent pour reprendre leur forme initiale de brique, que l’Ark-Ni rangea soigneusement dans son sac à dos.

Comme c’était souvent le cas, l’obscurité était tombée d’un coup sur la forêt. Dehors, les derniers rayons du soleil caressaient les herbes hautes des collines, les vergers et les champs, mais sous les frondaisons épaisses, la nuit était déjà là. Les rayons de la lune perçaient difficilement la couverture des arbres. Des lucioles zigzaguaient dans l’obscurité et, plus loin, de la clairière, montait la clarté tamisé de projecteurs qui servaient à l’éclairage du campement.

Karm fit un signe de tête à Maxence et ils recommencèrent à s’approcher, prudemment, tâtonnant pour trouver leur chemin. Les hommes dînaient en cercle et tous les outils avaient été soigneusement rangés. Une double bonne nouvelle, selon le Jedi : d’abord, la scène suggérait qu’ils ne s’organisaient pas pour travailler aussi la nuit, ce qui leur permettraient, à Maxence et à lui, de visiter l’excavation, et ensuite, ils allaient peut-être pouvoir entendre des bribes de conversation.

… sûrs que ça marche ?
Mon cousin est sûr.
… pas ton cousin.
Puisque je vous dis que c’est sûr.
… virait à rien … stock … pas livrer.
On veut un cargo, on aura un cargo, OK ? C’est pas comme si la surveillance de l’astroport était du genre militaire.

Le reste de la conversation fut inaudible, parce que certains des hommes se relevaient, en faisant tinter leur vaisselle métallique, pour aller la plonger dans un baquet d’eau savonneuse. Le repas était fini et les mineurs avaient l’air épuisé : Karm était prêt à parier qu’ils ne s’éterniseraient. Il fallait simplement espérer que les tours de garde pendant la nuit ne fussent pas trop vigilants.
Maxence Darkan
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Dormir. Voilà la seule occupation qui lui vînt à l'esprit. Une fausse bonne idée, elle n'eut jamais atteint plus que la somnolence, ouvrant de temps en tant un oeil sur le Jedi qui vadrouillait entre méditation et surveillance. Un soupire lui échappa, la méditation était une étrange manière de s'occuper, en tant que simple mercenaire, il lui était impossible de comprendre le bute de ce genre de manies. Les heures passaient et le temps se rafraîchissait, contrainte à remettre son blouson et poser ses blasters sur elle.

Au retour du petit crabe robotique, elle se redressa, la pénombre était tombée dans la forêt. Elle s'étira longuement, chacun de ses membres craquaient un à un sous forme de petite musique corporelle. Les recueilles étaient simples, champignons hallucinogènes, pas une mine, ni un lieu de culte, de la culture sûrement illégale pour la république. Il était temps de revêtir son costume anti-stupéfiants, de quoi passer une excellente soirée du moins.

Le geste de Torr enclencha une roue d'image, de souvenirs et d'idées sur les précédents évènements, en quelques secondes elle eut une hypothèse qui, certes ne faisait plus avancer grand-chose, mais qui expliquait ce qu'ils avaient vu. Elle tapa son poing sur la paume de son autre main.

-J'ai compris. Le délire de la cabane. Si ces culs terreux sont bien en train de cultiver des trucs hallucinogène, le spectacle des baraquements, ça doit être un mec qu'a respiré cette merde, a pété un câble et un des autres travailleurs a dû aller le choper de force, d'où la bagarre. Ça paraît plutôt logique vu comme ça.

L'infiltration fut lancée, la hache, aussi loin était elle allée, devait rester à sa place. Ses bottes se faufilaient entre les herbes et fougères qui menaient au camp. Des hommes discutaient à une table, autour d'un repas, ils parlaient buisness. L'illégalité du trafique fut en partie confirmée, peut-être ne fallait-il pas trop s'avancer, mais tout semblait mener à la même conclusion. Elle passait son regard d'un homme à l'autre tandis qu'il sortait de table, pas trop d'armes, en tout cas de première génération. La plupart partaient en direction des baraquements, deux d'entre eux faisaient la vaisselle à l'écart et deux autres discutaient en fumant une étrange pipe.

-C'est... pas bien méchant comme garde. Dit elle à voix basse. Doit pas trop y avoir de passage après tout.

Elle se lança en avançant un peu plus sans se mettre à découvert, son but était d'entrevoir l'entrée de la grotte. Elle n'avait pas fait le compte de tous ceux qui étaient présents, certains pouvaient encore se trouver à l'intérieur. Il fallait parié sur le fait que les lieux étaient vides. Fixée sur les gardes trop occupés à rigoler qu'à réellement surveiller les lieux, Maxence s'élança, tête baissée, dos courbé à petit pas rapides pour atteindre l'entrée. Les roches qui naturellement striées lui servit de cachette provisoire. La mercenaire fit signe au Jedi de la rejoindre le plus vite possible. Une fois à l'intérieur elle reprit à mi-voix.

-Et maintenant ? On vérifie que tout soit bien illégal et on les choppe ?
Karm Torr
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Ouais, confirma Karm quand Maxence souligna la légèreté des gardes, ça puis bon, c’est des fermiers, à la base, hein, pas des criminels endurcis.

Et le crime, supposait Karm, c’était comme tous les métiers : ça s’apprenait petit à petit. En dehors de ce léger détail, le campement était en revanche un modèle d’efficacité, qui trahissait la solide habitude de ces travailleurs agricoles pour ce qui était de faire tourner des exploitations.

On les choppe, répéta Karm avec incrédulité ?

Dans l’obscurité, son regard se posa sur la silhouette de la jeune femme à côté de lui.

Ils sont une vingtaine, hein. La moitié va se barrer en courant dès qu’on sortira nos armes et en admettant qu’on arrive à ligoter les dix autres, je vois mal comment on va les trimballer dans la forêt à nous deux. Non, on va choper des échantillons, se replier sur la ville ni vus ni connus, ‘fin j’espère, envoyer les données au laboratoire d’analyse le plus proche et aviser avec la police locale.

C’était sans doute beaucoup moins glamour que de surgir sabre à la main au milieu du campement pour assumer tout ce qui avait la mauvaise idée de pointer le bout de sa truelle, mais sans doute beaucoup plus raisonnable. Karm ne doutait pas de leur capacité, à Maxence et à lui, de maîtriser une vingtaine d’hommes inexpérimentés, que la vie dans une colonie paisible n’avait jamais préparé au moindre affrontement, et qu’ils prendraient d’ailleurs par surprise. C’était les fuyards qui l’inquiétaient, ceux qui iraient se cacher dans les collines et qu’ils mettraient une éternité à retrouver.

Le tunnel qui s’étendait devant eux ne s’enfonçait guère que de quelques mètres sous la terre. De vieux ventilateurs pour moteurs de speeders avaient été fixés au plafond, espacés par des lampes, pour faire circuler l’air dans la galerie et des planches en bois, grossièrement taillées, soutenaient la terre et empêchaient les éboulements. À l’intérieur régnait une humidité froide, contrôlée à intervalles régulières par des capteurs que les hommes du campement avaient sans doute empruntés à des stocks de matériel agricole.

Si l’entrée de la galerie paraissait naturelle, le reste, plus uniforme et plus lisse, avait de toute évidence était creusé exprès, à partir de ce qui n’avait dû être à l’origine qu’une cavité sans issue.

R’garde…

D’un geste de la tête, Karm désigna la paroi à leur gauche. Là, dans la terre sombre et moite se développe quelques centimètres d’une mousse blanchâtre. Bientôt, les deux visiteurs débouchèrent dans une salle étroite, ou en tout cas la galerie s’était un peu élargie. Là, une dizaine de vastes champignonnières étagées se laissaient recouvrir de la même mousse. Les conclusions de la mercenaire s’avéraient correctes, mais quant à se prononcer sur la légalité de la chose, c’était une autre hstoire.

J’imagine que tu m’as pas caché un doctorat en mycologie doublé d’une expertise juridique sur les substances illicites, murmura Karm, tout en prélevant soigneusement trois échantillons du champignon qu’il rangeait dans l’une des innombrables poches de sa ceinture. Étant donné c’qu’on a vu sur la cabine, j’propose de s’abstenir de tester par nous-même.

La lampe torche du Jedi balaya le mur du fond, pour s’assurer que le tunnel ne se poursuivait pas plus loin. Combien parvenaient-ils à produire par semaine ? Pour qu’une vingtaine d’hommes abandonnent leurs travaux des champs et viennent essayer de s’enrichir ici, le rendement devait être considérable. Pendant quelques secondes, Karm continua en tout cas de balayer les environs de sa lumière et puis, comme l’endroit ne présentait rien d’exceptionnel, les deux enquêteurs commencèrent à rebrousser chemin.

Dehors régnait la rumeur nocturne de la forêt. Les fumeurs avaient disparu, la vaisselle était finie, et il ne restait plus qu’un seul homme pour monter la garde, précaution plutôt symbolique qu’efficace. Entourés par le secret de la forêt, dans une planète sans histoire, il était évident que les entrepreneurs du champignon avaient jugé la précaution quasi superflue. L’homme, un solide gaillard d’une vingtaine d’années, pianotait sur son datapad.

Karm fit signe à son acolyte de patienter. Puis le Jedi tendit la main dans l’obscurité, en se concentrant sur la Force. Son attention était fixée sur un buisson de ronces qui dominait un petit talus, près duquel avait été établi le baquet à vaisselle. Bientôt, il en sentit la sève, intimement, et son esprit put parcourir les circonvolutions de ses racines. C’était là qu’il dirigea la Force, pour insuffler une vie plus soudaine, et précipiter d’un coup la croissance végétale.

Cinq racines jaillirent du sol, en provoquant un petit éboulis sur la pente du talus et, à ce bruit, le jeune paysan sursauta et se retourna vivement, tournant le dos à l’entrée de la galerie. Aussitôt, Karm en profita pour se faufiler dehors et regagner à toute vitesse le couvert des arbres.
Maxence Darkan
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-Roh t'es pas drôle...

Elle considéra un instant ses armes qui, pour aujourd'hui du moins, resteraient bien à leur place. L'idée même que toute cette histoire ne se terminerai pas en feu d'artifice de blasters, en cries de terreur et en sabre laser gigotant dans tous les sens pour terminer sa route dans le buste d'un cul terreux la fit soupirer. Morbide, mais Max. Sans compter le fait qu'elle ne pouvait pas goutter par elle-même la marchandise sous prétexte de ne pas finir comma la personne qui s'est bien amusé dans la cabane. Là, elle sourit, car elle s'imaginait elle et le chevalier Torr, complètement défoncé aux champignons hallucinogènes sans trop savoir ce qu'ils auraient fini par faire... Les possibilités semblaient assez nombreuses vu d'un certain angle.

Pour rester professionnel, elle voulait se contenter de scanner la mousse, mais étant donné que le scanner de son poignet ne pouvait s'empêcher de lâcher une chiée de lumière, elle se contenta d'un petit échantillon et non de la pièce en entier. Sur l'écran, la plupart des informations étaient suivies de points d'interrogations sauf pour la provenance où on pouvait lire "Planète Paxal/???" (ne sachant pas si ce champignon existait sur une autre planète) ou sur les effets, Eos s'était permis d'ajouter provisoirement "hallucinogène type B1" ce qui força Maxence à pencher sa tête sur le côté. Pourquoi B1 ? Cela signifiait-il qu'il existait un B2 et qu'il était plus fort ? Ou moins ? Ou même si le A était plus grand ou plus petit que B dans cette catégorisation, sans compter que tout cela pouvait s'arrêter au type X25 qu'elle n'en saurait rien. Alors non, elle ne s'y connaissait pas en mycologie et oui, les catégorisations étaient un système qui l'embêtait particulièrement.

-Aller, tirons-nous.

Avait elle dit, à mi-voix, en secouant la tête pour oublier le fait qu'elle venait de s'agacer toute seule. Torr se montrait d'une certaine ingéniosité pour se faufiler hors de la grotte, la force était un sacré outil à tout faire. Elle s'abstenue de faire une remarque sur ses pouvoirs, il devait comprendre maintenant qu'elle n'y pigeait pas grand-chose à comment tout cela fonctionnait entre les animaux, les plantes et la très connue, mais peut-être un peu trop côté, télékinésie des forceux.

Retournés à l'abri, il fallait désormais faire tout le chemin à l'inverse pour "prévenir les autorités compétentes", si ses autorités se montraient aussi compétentes que leur prénom n'osait même pas sous-entendre à ce niveau là, elles n'auraient pas fait appel à un jedi ou à une quelconque mercenaire qui se trouvait les mépriser. Tant pis, se dit elle, s'il y a de l'argent, il y a du temps. Une façon de penser profondément égoïste saupoudré d'un soupçon de capitalisme.

À repenser le chemin allé, ils avaient d'une dizaine de kilomètres retour pour retourner à la civilisation (aussi loin qu'il était possible de l'appeler comme ça), ce qui n'enchantait guère Maxence. Elle eut tout de même la patience de s'écarter suffisamment du camp avant de sortir une lampe torche, un vieux modèle que peu de personnes utilisées, pour s'éclairer parmi la végétation.

-T'as réussi à bien comprendre ce qu'ils disaient autour de la table ? Je suis pas sûr... J'ai cru entendre parler de cargaison au spatioport de la ville. Lança-t-elle pour briser le silence.
Karm Torr
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J’ai pas tout entendu, non…

Jadis, il avait été capable d’affiner ses sens en se plongeant dans la Force, mais ces derniers mois, ce pouvoir lui avait échappé, faute de pratique, alors qu’il avait dû se consacrer à d’autres recherches et d’autres entraînements. Le Chevalier se promit de reprendre en la matière un entraînement plus rigoureux.

Mais c’est c’que j’ai compris, aussi… J’imagine que…

Un bruit l’avait alerté dans la nuit, il tendit l’oreille et puis, après quelques secondes, jugeant que ce n’était probablement qu’un animal, reprit le fil de leur conversation :

… que ouais, il faut qu’ils exportent. Honnêtement, en drogue, j’y connais trop rien, mais vu la population locale, ne serait-ce que pour le nombre, je vois mal comment ils écouleraient de la marchandise ici. Il leur faut un cargo et hm… Un circuit de distribution, non ? Des gens pour la revendre, des dealeurs, des intermédiaires probablement…

Tout ce qu’une pareille entreprise impliquait demeurait assez vague pour lui, rien de plus que les quelques cours sur les circuits de distribution illégale qu’il avait suivis de loin, en tant que Padawan. D’autres de ses camarades, ceux qui se destinaient à devenir des Sentinelles et à enquêter sur le terrain, s’étaient probablement plus impliqués dans les explications labyrinthiques de leur professeur.

Mais désormais qu’il essayait de s’imaginer tout ce que la vente de ces champignons impliquait, il était pris d’un doute.

Dis… Est-ce que ça te paraît probable qu’ils se lancent dans quelque chose de ce genre-là sans… Ben sans aide extérieure. ‘Fin, sans personne pour les conseiller, déjà. J’sais pas parce que genre, moi, bon, j’suis pas un paysan, j’ai pas mal voyagé, j’ai vu des trucs et tout ça, mais si demain on me disait, vas-y pose toi et fais un plan pour écouler des champignons hallucinogènes hors de la planète, je pense pas que j’y arriverais, tu vois ce que je veux dire ? Ça demande… Des compétences, de l’expérience.

Pouvaient-ils seulement vendre les champignons en l’état ? Si la production de la drogue à en tirer impliquait une transformation, il faudrait aussi des laboratoires, un équipement chimique probablement absent de la planète.

Rien que récupérer le vaisseau, s’assurer qu’il sera pas fouillé par les autorités, c’t’une logistique qui doit rien avoir de comparable avec l’exportation d’la production agricole locale.

Certes, les vaisseaux en partance de Paxal étaient rarement fouillés par les autorités douanières, parce qu’on voyait mal dans quel genre de trafic la planète pouvait tremper. Mais une fois arrivés dans un vaste spatioport, qui pouvait garantir la sécurité d’une cargaison secrète, sans avoir pris ses précautions ?

On a probablement pas affaire non plus à un génie du mal parce que… Ben déjà, ça aurait été facile, je suppose, de nous empêcher d’y regarder de trop près. Quelqu’un entre les deux. Genre une petite frappe qui s’est trouvé de nouvelles ambitions ? Ou bien… un exportateur habitué à des choses plus légales, qui a vu une opportunité de se faire plus de marge mais qui gère pas des masses l’aspect policier de la chose ?

Au fil de ses raisonnements, ses soupçons commençaient à se porter sur Sereva Vox, l’adjointe du maire, qu’on lui avait aussi présentée comme la propriétaire des vaisseaux d’export du grain. Elle était idéalement placée pour assurer le transport de la marchandise et pour s’assurer que les autorités locales n’aillent pas y regarder de trop près. Pour entretenir des rumeurs inquiétantes, peut-être, aussi, à propos des hypothétiques horreurs de la forêt.

Si c’est quelqu’un du cru… C’est nécessairement quelqu’un du cru, j’imagine, non ? Pour savoir quel endroit dans la forêt conviendrait, quels gens du coin accepteraient de s’embarquer là-dedans, faut connaître le paysage, les personnes, tout ça. Mais si c’est quelqu’un du cru, j’propose qu’on dorme pas sur nos deux oreilles à l’auberge. Qu’on ait pas réussi à nous empêcher de débarquer ici, ça exclut pas qu’on essaiera de faire en sorte qu’on se réveille pas.

Mais c’eût été peut-être un geste désespéré. Descendre un Jedi aurait été la solution la plus sûre pour s’attirer la visite de tout un contingent de Sentinelles surentrainées et bien décidées à venger la mort de leur frère. Mais de ce point de vue, la situation de leur hypothétique trafiquant était désespérée : impossible de liquider les enquêteurs sans redoubler l’attention du monde extérieur, impossible de les laisser courir en liberté. Et quand les gens étaient désespérés, ils prenaient des mesures radicales…
Maxence Darkan
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Le jedi s'entraîna dans un monologue qui, malgré la question posée à Maxence, se répondait à lui-même, elle le laissait terminer. Il semblait déjà avoir une assez bonne approche de comment tout ce petit trafique pouvait s'organiser ici même. Inévitablement, la source de cette étrange organisation devait venir de cet endroit, elle le savait aussi, qui, dans cette immense galaxie, aurait la stupide idée de se lancer dans une telle histoire au fin fond d'une campagne ? Quoi que, après réflexion, Paxal était idéale pour que personne ne se pose jamais de questions sur une champignonnière illégale... Personne ne connait Paxal. Mais la façon de faire était bien trop amateur comme le souligna Torr, trop peu de gardes, aucune attention portée sur la police, un système d'export archaïque -le spatioport n'en proposait pas de meilleur après tout-, trop hasardeux quoi.

Pour ce qui était de s'y connaître en distribution de substances illicites, Maxence commença légèrement à suer, pour cause, elle en avait vu un petit rayon en tant que consommatrice d'occasion, suivi de petites discussions entre dealer-consommateur... Sans oublier les boulots pas bien légaux porté à l'intention de certaine "entreprises d'import-export" qui l'avaient engagé. Elle se souvient de pas mal de truc, d'un côté la fabrication, le fournisseur, la tête de pègre, la conservation et la disparition dans le réseau de distribution où, bien évidemment, personne ne se connaissait avec des têtes de malfrat de coin rue qui pouvait vous sortir sans aucune gène : "Le mec qui vend au bas d'mon appart 'vec le même tatouage de mafieu qu'moi sur le visage ? J'connais pas."

-Bah, de s'que j'en sais... J'ai pas trava... 'fin disons que... Oublie. Les réseaux c'est pas aussi simple qu'il n'y parait, on a pas que dealers, fournisseurs, messagers et tout le tralala. Il y a une sorte de partie immergée de l'iceberg, en gros, il suffit que t'es une connaissance, qui connait une connaissance, qui connait un dealer qui lui-même connaisse un mec bien placer pour lancer un truc. Elle reprit sa respiration. Par exemple, si quelqu'un connait bien les ou l'un des conducteurs de cargo, qui lui-même connait bien un dealer, il lui suffit de balancer la rumeur qu'il a de la bonne dans une grotte et qu'en échange d'une compensation, il en fournisse assez pour faire exploser la cervelle d'une armée de Gungan pour que tout parte en couille. Le système de bouche à bouche fonctionne plutôt bien, ça laisse pas de traces. Et puis, pour passer la douane, on graisse des pattes... Les flics sont pas comme les jedis, une poignée de crédit et le tour est joué.

Les joies de la corruption quoi, un terrain sur lequel elle ne s'était pas vraiment avancée, par chance. Elle la jouait plutôt réglo, une façon gentille pour dire qu'elle était assez radine pour ne pas utiliser ne serait-ce qu'une partie de ses économies pour mener à bien une mission.

Tout de même, il fallait le faire se trafique, se lancer sans avoir peur des répercutions sur la petite communauté refermée qu'abritait Paxal.

-Mais... Pour avoir des relation avec l'extérieur... Bah ici c'est compliqué quoi. Il faut être assez haut placé à mon avis. Même si je sais pas trop comment la colonie s'organise sur les relations externes, l'entourage du maire est assez suspect pour le coup.
Karm Torr
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Ouais, murmura Karm, avant que le reste de sa réponse ne fût entièrement perdu sous le hululement spectaculaire d’un rapace diurne, qui avait plus de coffre que lui.

Mais en substance, il était d’accord. On leur avait fait comprendre que Serena Vox exerçait un quasi monopole sur les allées et venues des vaisseaux marchands dans les trois pistes vaguement organisées qui servaient de spatioport à la colonie. Leurs soupçons se portaient inévitablement sur elle.

Pendant tout le reste de la marche, Karm conserva le silence, absorbé par ses pensées. Il essayait de se repasser en mémoire ses discussions somme toute assez brèves avec le maire et ses deux adjoints, dans l’espoir d’y retrouver un détail suspect, mais il savait bien, au fond, qu’il n’avait rien d’une Sentinelle Jedi et que cette exploration, qui prenait la tournure d’une enquête criminelle, sortait quelque peu de son domaine de compétence.

Vers le milieu de la nuit, ils firent une pause à mi-distance.

On d’vrait essayer de dormir ici quelques heures en attendant le lever du soleil. La forêt est pas dangereuse, on peut s’écarter d’une vingtaine de mètres de la piste qu’on a repérée, trouver un coin tranquille par où les mecs risquent pas de circuler et se reposer. Demain, ça peut tourner au grabuge et j’ai de toute façon pas l’intention de pioncer dans une chambre où je sais pas qui pourrait décider de m’aérer les poumons en jouant du vibrolame.

La perspective de dormir quatre ou cinq heures à la belle étoile ne le perturbait guère : depuis le début, c’était de toute façon l’éventualité la plus probable, puisque tout pointait vers la forêt. Ils s’écartèrent donc du chemin et puis, Karm ayant avisé un arbre massif dont les racines noueuses soulevaient le sol jusqu’à en former une petite colline, ce fut là qu’ils s’abritèrent.

L’explorateur se roula en boule contre l’arbre, recouvert par son manteau et, les yeux fermés, plongea très vite, avec l’habitude d’un homme rompu à ce genre d’exercices, dans un sommeil un peu méditatif, sans paraître particulièrement troublé par les insectes qui s’aventuraient parfois sur son visage. Il dormait certes d’autant mieux que les rapports d’exploration de Praxal avaient établi qu’en dehors des trafiquants hallucinés aux champignons, le principal danger de la forêt consistait à se faire mâchonner les lacets par les rongeurs du coin.

Cinq heures plus tard, le soleil du printemps commençait à percer les nuages et Karm ouvrit un œil, puis l’autre, pour se retrouver nez à bec avec un volatile en train de fienter sur son sac à dos.

Ben bonjour à toi aussi, marmonna-t-il en réprimant en bâillement, avant de chasser l’oiseau d’un geste de la main et de frotter son sac à dos contre l’écorce de l’arbre, pour éviter d’avoir à se promener avec un réservoir de guano.

Quelques étirements plus tard — qui apportèrent la preuve que ce Jedi-là était d’une remarquable souplesse : voilà un homme qui ne devait pas avoir de problème pour se couper facilement les ongles de pied —, Karm, les cheveux ébouriffés, et ponctuellement ornés de brindilles, se retourna vers Maxence.

Bien dormi ?

C’était une plaisanterie ?

Le Jedi jeta à Maxence en guise de petit-déjeuner une barre énergétique avant d’entreprendre d’agiter son datapad au-dessus de sa tête, à la recherche d’un signal — un exercice voué à l’échec sur une planète comme Praxal, dont les satellites de télécommunication se comptaient de toute façon sur les doigts d’une main (amputée de l’index).

Bon, on a pas été massacrés à la hache par un psychotique des bois, j’imagine que c’est déjà en soi une petite victoire, déclara-t-il en rempochant l’appareil. Du coup… J’propose qu’on rentre à l’auberge. Qu’on se douche pour être vaguement présentables, en faisant attention de pas être étranglés à la sortie de la baignoire, et qu’on essaie de… euh… mener l’enquête sur l’entourage du maire.

Quoi que cela puisse bien vouloir dire. Karm n’était pas exactement l’homme de la situation quand il s’agissait de poser des questions subtiles d’un air dégagé et quelque chose lui disait que Maxence n’était pas non plus la reine des interrogatoires discrets conduits avec doigté. Restait l’option de se mettre en planque au spatioport pour attendre de voir venir, mais rien ne disait que le cerveau de l’opération viendrait se compromettre au chargement.

Faut au moins qu’on ait le soutien de la police, murmura pensivement le Jedi, ils sont vachement trop nombreux pour qu’on fasse le coup d’filet par nous-même, puis ça relève des compétences des autorités locales. Tu saurais, toi, te rendre compte de si l’adjoint qui est en charge des flics est corrompu ou pas ? Parce que pour être honnête, parler aux taupes et tout ça, je sais faire, mais sonder les intentions des autres, déjà beaucoup moins. Chacun ses spécialités, quoi.
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