L’instant de joie avait été bref mais intense. Quand les croiseurs et vaisseaux de classe intermédiaire avaient cessé le feu pour battre en retraite, les radios des opérateurs avaient grésillé sous l’effet des cris de victoire des pilotes, des officiers des autres ponts de commandement et autres relais de communication. Seule leur salle à eux était restée silencieuse, presque sous l’ébahissement de l’avantage qu’ils retrouvaient.

Bien sûr, ils savaient que ce n’était que pour laisser place à l’autre partie de la flotte Sith –sûrement plus déterminée, moins abîmée… Et galvanisée par leur propre victoire sur la flotte du Chancelier Arnor. Mais il y avait cette impression forte que s’ils avaient battu une fois les Sith, même une partie de leur formation, ils pouvaient certainement réaliser cet exploit une seconde fois. Si leurs propres vaisseaux tenaient le choc, bien sûr.

- Je veux un rapport complet de l’état de nos bâtiments, ordonnait justement l’officier aux côtés de Maître Don.
- C’est en cours, Commandant !

Depuis le pont de l’Eclaircie, le vieillard sentait son cœur battre douloureusement dans sa poitrine. Douloureux mais plein d’espoir. Leurs chasseurs tourbillonnaient –leur nombre s’était considérablement réduit- et avaient été rejoints par des fragments d’équipes qui avaient été sous les ordres du Chancelier moins d’une heure auparavant. Des troupes qui avaient vu les leurs échouer, mais à qui on offrait une seconde chance. Qu’il ne faudrait pas laisser passer.

En attendant le rapport des officiers sur l’état de leur flotte et que la deuxième vague de Sith s’attaque à eux, le vieillard consultait un écran de communication, sur lequel était affiché les rapports les plus récents sur le déroulement des opérations à terre. Le Commandant de bord l’interrogea du regard.

- Les troupes républicaines et les Jedi résistent bien au sol, résuma-t-il. Mais la famille royale a été mise en danger. Il faudra faire au plus vite pour leur porter secours. Quant au Chancelier, il essaie de rejoindre le sol d’Artorias.

Il n’évoqua pas les mouvements du Sénat. Les militaires n’avaient pas besoin de douter maintenant du soutien des politiques –créatures dont ils détestaient bien souvent l’esprit volage et opportuniste. Le vieux Maître devait bien s’avouer que sur ce coup, il partagerait bien leur opinion : il avait suffit d’un seul pépin dans le mandat d’Halussius pour que les requins attaquent, en quête de pouvoir. Des noms comme Keyiën et Anthana ne l’étonnaient guère parmi ces prédateurs.

Le rapport sur l’état des vaisseaux apparut soudain à la suite des autres, et le Commandant de bord vint le consulter aux côtés du Jedi, attentif.

[Jet de sagesse pour récupération]

- On dirait bien que les réparations sont en bonne voie. A part quelques maillons faibles à protéger, le gros de notre flotte est opérationnel.
- Ce sont les chasseurs qui ont le plus été touchés...
- Comme toujours, soupira l’officier.

Leurs réflexions furent bientôt interrompues par plusieurs informations criées sur le pont de commandement. L’ennemi serait bientôt à portée. Attaqueraient-ils les premiers, avec la même fougue que lorsqu’ils s’étaient mesurés au Chancelier ? Ou bien joueraient-ils la patience comme la première escadre Sith ? Les lignes ordonnées de l’ennemi laissaient deviner la terrible main de fer avec laquelle ils étaient dirigés. Leur allure constante faisait s’imaginer à Maître Don les moissonneuses batteuses de Bakura se rapprochant inéluctablement d’un nid d’oiseaux au milieu d’un champ. Car leur propre formation, plus ronde, ressemblait plus à un cocon qu’à une formation de guerre : si leurs croiseurs étaient aussi en première ligne, les chasseurs et autres vaisseaux légers étaient tous repliés entre eux, prêts à sortir de la sphère de sécurité lorsqu’ils s’avèreraient utiles.
Le Commandant de Bord de l’Eclaircie, lui, ne s’était pas intéressé plus avant aux images. Il était retourné près des opérateurs, et donnait déjà de la voix.

- Messieurs, nous avons abattu leur première vague, il n’en reste plus qu’une autre moitié. Qui s’avèrera au moins tout aussi coriace que la première et qui aura, vous le savez, l’énergie du désespoir. Or, nous ne pouvons échouer. Sur cette planète se trouve bien des innocents que les Jedi protègent encore… Et notre Chancelier est parmi eux ! Ordonnez la reprise de l’attaque, officiers, feux à pleine puissance !
- OUI COMMANDANT !

[Jet d’intelligence pour attaque sur la flotte Sith]

Une secousse ébranla le pont, et chacun dût faire un effort pour conserver son équilibre. Le vieillard s’était cramponné à un pupitre doté d’un écran de commandes et il échangea un regard stupéfait avec le Commandant de bord. Leur attaque avait été si bien menée, la réponse de la flotte Sith était à peine croyable ! Avaient-ils pu prévoir leurs mouvements ? Avaient-ils fait semblant d’être concentrés sur la réorganisation de leurs bâtiments pour les attirer dans un guet-apens ? Vraiment, le vieil homme avait du mal à croire à une telle chance de leur part. Quelque chose lui échappait, là où le hasard ne les protégeait plus…
Et pendant ce temps, les ennuis commençaient sérieusement.

- Boucliers de l’Eclaircie endommagés à 63% mon Commandant ! cria la voix d’un Officier que l’affolement empêchait de rester calme. L’un de nos canons turbolasers lourds connaît une avarie due à une surchauffe, nos techniciens ne savent pas s’ils pourront le récupérer !

Le Commandant de bord serra un poing et l’abattit avec colère sur la rambarde qui le séparait des officiers. Lui aussi encaissait difficilement une telle entrée en matière. Ils y avaient tellement cru, et la puissance de tir des Sith les balayait soudain comme elle l’avait fait avec le Chancelier. Au moins, l’on comprenait pourquoi Halussius avait si vite été submergé…

- Que nos bombardiers prennent les devants ! cria-t-il, mais il ne savait plus vraiment s’il fallait tenter le tout pour le tout ou bien battre en retrait le temps de remonter la pente.

Il voulut interroger le vieux Maître du regard, mais celui-ci avait fermé les yeux, lâché la console et, tourné vers les baies en plastiverre, avait l’air de s’être changé en une statue de marbre. Faire appel à la Force en un moment aussi critique n’était pas des plus aisés, mais il était bien plus doué à cela qu’à n’importe quelle stratégie de bataille spatiale. De quoi manquaient leurs hommes ? De confiance. Voilà où agissaient les Sith en ce moment : en frappant fort, ils tentaient de les effrayer pour que la République recule, pour que chaque être prenne conscience du danger terrible qu’il courrait et auquel, face à de tels ennemis, ils n’échapperaient certainement pas. Mais en réalité, les Sith les abattraient plus facilement encore s’ils battaient en retraite ! Il fallait à tout prix remobiliser les hommes, mais pour cela, se préparer…

Grâce à la Force, unique et décisive alliée face aux Sith…

[Jet de sagesse pour Augmentation des Capacités – Charisme]

Cette fois, même si la flotte Sith semblait manipuler le hasard, le vieil homme sentait qu’ils pourraient tout de même faire face. Il ne laisserait pas une telle manœuvre se reproduire, il serait vigilant... La Force lui donnait une confiance augmentée et il n’avait plus qu’à la partager.

Maître Don avait repris vie et s’était tourné vers le Commandant, toujours dans l’attente.

- Laissez-moi parler à vos hommes, déclara simplement le Jedi avant de se diriger vers les opérateurs du pont.
- Faites donc, répondit le Commandant dont le front perlait de sueur.
- Messieurs, dit-il à pleine voix lorsqu’il fut placé devant eux, bien campé sur ses deux jambes, ces Sith-là ne sont pas les mêmes que ceux que nous venons de vaincre. Une autre stratégie va devoir être mise en place ! Car si nous fuyons maintenant, nous pourrons dire adieu à nos compagnons qui se battent sur Artorias. Cela, il n’en est pas question ! Pour ma part, je refuse de céder aux techniques d’intimidation des Sith ! Nous sommes le rempart de la République, la digue que je ne permettrais pas de céder ! Et je suis fier d’avoir à mes côtés des hommes aussi braves que vous… Car c’est ensemble, soldats républicains et Jedi réunis, que nous allons repousser l’ennemi ! Il nous faut gagner du temps pour les réparations, que les Chasseurs tiennent à l’écart les corvettes et ne restons pas dans la ligne de mire de leurs Interdictors !

Les officiers répondirent par quelques cris de ralliement et aussitôt, se remirent à pianoter avec frénésie. Priorité aux réparations ! Résister pour sauver les nôtres !

[Jet de sagesse pour récupération]

Les rapports se succédaient, déclenchant malgré lui des frissons sur la peau du vieux Maître ouvert à la Force. Cette deuxième partie de la flotte Sith était plus coriace que la première, mieux aguerrie, plus… Comment la définir, sinon qu’elle savait se battre mieux que la République ? Combien d’années de préparation cette guerre avait-elle nécessité pour les Sith ? Et comment les Jedi avaient-ils pu passer à côté ? C’était maintenant que le Maître du Conseil regrettait de ne pas avoir fait approfondir ces rumeurs sur la Dame Noire. Car ce ne pouvait être qu’elle, bien sûr…

- L’ennemi nous inonde, Commandant ! fit une voix paniquée dans son dos, mais le Jedi ne se retourna pas cette fois.

Il tentait de garder la Force auprès de lui, de faire prolonger un peu l’effet que son discours avait eu précédemment. Même si cela n’avait pas suffi…

- Faites se replier les bombardiers de première ligne, ordonna l’officier avec une ardeur maîtrisée. Priorité à la préservation de nos boucliers !
- Entendu, Commandant ! Formation de défense Core 2 engagée !

[Jet de sagesse pour défense]

Mais il n’y avait guère d’espoir de voir les bâtiments Sith s’éloigner en dépit du recul que se donnait la République. Saï savait qu’ils ne pourraient tenir une telle attitude longtemps, ne serait-ce que parce que les Sith profiteraient de ce mouvement pour les écarter définitivement d’Artorias et des leurs qui continuaient à se battre à la surface de la malheureuse planète. Que feraient-ils d’elle après s’en être emparée ? Martyriseraient-ils la population ou au contraire, tenteraient-ils d’en faire des citoyens qui leurs seraient loyaux pour étendre leur pouvoir face à la République ? La violence déployée pour la prise de ce monde ne laissait pourtant présager rien de tel.

- Seconde ligne ennemie en place, Commandant ! Trois croiseurs de type Léviathan viennent renforcer leur ligne de front !
- L’artillerie lourde, grinça le Commandant en faisant la moue.
- Il faut redoubler d’efforts sur les réparations, Commandant, intervint finalement le vieil homme. Nous ne sommes pas encore prêts à essuyer leurs attaques de plein fouet.
- Déviez notre position de 19 degrés en plongée, officier ! cria en réponse l’humain nerveux qui dirigeait les opérations. Que le reste de la flotte nous suive en conservant la formation Core… Et que l’on mette les bouchées doubles sur la réactivation de nos boucliers, nom d’un chien kath !

Premiers signes que l’angoisse commençait à toucher les têtes pensantes de leur flotte, estimait le vieillard. Il ne manquerait bientôt plus que lui pour ne pas sombrer dans la panique de la défaite. Mais il n’avait pas autant à perdre qu’eux… Du moins, c’est ce qu’il lui semblait –il avait déjà perdu en n’étant pas capable de secourir les siens au sol. En espérant que le Chancelier se débrouille de son côté…

Bientôt, de nouvelles attaques sur le flanc bâbord de leur flotte Républicaine furent déclarées. Les survivants de leur précédent adversaire ! Mais Saï n’eut même pas besoin d’intervenir car le Commandant de bord s’obstina à faire se replier leurs bâtiments malgré cette nouvelle attaque, s’obligeant ainsi à se concentrer sur une meilleure gestion interne de la flotte plutôt que de ne se concentrer que sur une défense automatique –inutile puisqu’ils les auraient à l’usure. Non, il fallait savoir résister pour attendre le bon moment pour frapper…

[Jet de sagesse pour récupération]

A condition bien sûr qu’ils ne soient pas déjà fichus lorsque cette occasion arriverait. Mais le vieillard avait foi en la Force et en les futurs inattendus qu’elle savait offrir aux plus désespérés.

Le vieil homme cessa un instant de se concentrer sur la Force, soulagé. La flotte Républicaine résistait visiblement aux attaques pourtant multiples des Sith. Tiendraient-ils aussi bien le choc jusqu’à l’arrivée des renforts depuis le Noyau ? Si le Jedi en doutait, il espérait néanmoins pouvoir contenir leurs ennemis jusque-là. Le plus difficile, bien sûr, serait de limiter les pertes.

- Les réparations sont en bonne voie, Commandant ! déclara un officier qui lui-même avait repris un peu confiance.
- Bien. Poursuivez les efforts dans ce sens. Quels sont les appareils les plus touchés ?
- L’Incident, Commandant. Mais nos techniciens ont bouclé une zone qui ne posera désormais plus de problèmes. Nous perdons néanmoins 10% de sa puissance de tir à cause de cette avarie.

Le Commandant acquiesça d’un mouvement sec de la tête et se remit à faire les cent pas. Quelque part, le vieil homme admirait la détermination dont il faisait preuve malgré la position délicate dans laquelle ils étaient tous. Mais il se garda de faire un commentaire, craignait de déconcentrer l’homme qui déjà, retournait s’adresser aux opérateurs de l’Eclaircie.

- Faites conserver notre position de défense, messieurs ! s’exclama-t-il. Core 2 est notre meilleure chance de nous en sortir avec un minimum de dégâts.
- Entendu, Commandant ! La flotte ennemie reprend son assaut, mais sa position est modifiée.
- Très bien.

Le Commandant s’était tourné, d’un même mouvement que le visage du Jedi, vers les écrans de contrôle qui représentaient en en lignes lumineuses la position de l’ennemi. Sans être un expert des manœuvres stratégiques de cette ampleur, cependant, il était difficile de prévoir ce que les Sith manigançaient en se plaçant ainsi. A part résister, que pouvaient-ils faire d’autre ?

- Commandant ! Leur puissance de tir est décuplée ! Core 2 maintenue ! A toutes les unités, Core 2 à maintenir coûte que coûte !

Le chef de la flotte ne répondit que par une grimace.

[Jet de sagesse pour défense]

Les salves de l’ennemi ne semblaient vouloir jamais s’arrêter. Saï remarquait qu’il voyait de moins en moins de chasseurs, autant parmi les leurs que de la flotte Sith, virevoltaient entre les bâtiments de taille plus imposante. Comme des insectes à durée de vie limitée, ils disparaissaient les uns après les autres. Combien de Jedi parmi eux ?
Inutilement, le vieillard s’agrippa à la rambarde la plus proche de lui, comme si les Sith pouvaient à tout instant renverser leur croiseur. Ce qui était certes une possibilité… Mais il avait besoin de se soutenir pour se concentrer de nouveau intérieurement. Non pour utiliser la Force cette fois-ci, mais plutôt pour mobiliser son intelligence et son expérience : quelles étaient les solutions qui s’offraient à eux en pareille situation ?

Pendant ce temps de réflexion, le Commandant s’enquérait de leurs boucliers.

- Ils tiennent le choc, lui expliquait un opérateur en montrant des jauges plus ou moins élevées sur un écran coloré. Mais nous ne pourrons atteindre un niveau de réparation optimal sur certains d’entre eux –trop endommagés, ou alors parce que les points de faiblesse sont inaccessibles ou trop dangereuses. A moins que l’on ne demande un peu plus de prise de risque, bien sûr…
- Non, rétorqua le Commandant. Concentrons-nous sur les zones les plus sûres. Au moins pour les parties qui n’engagent pas vitalement un trop grand nombre d’hommes. Inutile de se sacrifier pour la victoire ; notre objectif est de tenir le choc jusqu’à ce que des renforts arrivent. La priorité reste sur la consolidation des défenses de l’Incident et de l’Eclaircie, toutefois.
- Bien, Commandant, je transmets.

[Jet de sagesse pour récupération]

Les tirs de la flotte Sith ne semblaient plus vouloir cesser. Les bâtiments républicains encaissaient difficilement en position défensive, résistant mais terriblement mis à mal par la pression imposée par l’ennemi. Le niveau des boucliers diminuaient malgré les efforts redoublés des multiples équipes techniques et même l’Eclaircie avait affaire à d’importantes avaries. Rien qui n’entrave ses déplacements ni sa puissance de feu, bien heureusement, mais il était évident que cela ne saurait tarder, s’ils se laissaient ainsi ballottés par les Sith…

Pourquoi ces derniers s’acharnaient-ils tant à défendre Artorias ? se demandait le vieil homme dans son silence concentré. Il n’avait même pas eu le temps d’étudier la position de la planète sur un plan stratégique, mais il devait y avoir une raison. A moins que ce ne soit plutôt symbolique, vu qu’il s’agissait de la planète qui avait vu naître l’actuel Chancelier Suprême ? Connaissant la ruse des Sith, il devait y avoir un peu des deux dans la réponse. Mais maintenant que le vaisseau du Chancelier était tombé et que ce pauvre monde semblait détruit, pourquoi s’obstiner ? Pour y rester, il n’y avait pas d’autre solution. Ainsi donc, la rumeur qu’un empire s’installait en marge de leur république ressemblait fort à une réalité…

Le vieil homme évacua ces questions. Il y songerait plus tard, car l’heure était à la résistance –à défaut de la victoire. De nouveau, il tâchait de faire appel à la Force, avant de se préparer à s’adresser de nouveau aux troupes aux côtés du Commandant de bord. Ce dernier était exténué, mais il ne manquait pas de jeter des coups d’œil interrogateurs aux plages de silence et de solitude que s’imposait le vieillard en un moment si désespéré.

[Jet de sagesse pour Amélioration des capacités (Charisme)]

Le Jedi ne sortit de sa transe que quelques minutes plus tard, alors même qu’un opérateur débitait à toute vitesse la liste des bâtiments touchés par la nouvelle attaque des Sith. Plusieurs de leurs bombardiers avaient été mis hors d’état de nuire, et leur ennemi s’était mis à s’acharner –avec plus de confiance en lui, évidemment, car il les matait sans vergogne.

C’était là, précisément ce moment, que Saï avait attendu. Le moment où les Sith ne seraient peut-être plus aussi attentifs par excès de vanité et parce qu’eux aussi fatiguaient de ce combat sans répit. Un pari, en quelques sortes.

- Messieurs, les Sith commencent à prendre quelques risques. Mais surtout, ils ont l’air bel et bien décidés à mettre hors d’état de nuire notre armement… Et là-dessus, nous ne pouvons les laisser faire. Des renforts arrivent à plein régime depuis le Noyau, et il nous faut tenir jusque là ! Si votre Commandant l’accepte, nous quitterons notre position défensive.
- Oui, Maître, approuva le Commandant en se plantant à côté de lui, les jambes légèrement écartées pour ne pas être déstabilisé par les vibrations du croiseur. Messieurs ! Ordonnez la riposte, concentrons-nous à notre tour sur leur puissance de tir !
- Oui Commandant !

Et dans un sérieux tout militaire, les hommes et les femmes du pont se remirent à pianoter ou parler à leur micro-casque avec excitation.

[Jet d'intelligence pour contre-attaque]

Un pari, se répétait quant à lui le vieil homme. Et seule la Force pourrait faire tourner la chance de leur côté… Car c’était probablement leur toute dernière occasion avant que les Sith n’assoient définitivement leur supériorité à ce terrible jeu…

La contre-attaque avait échouée. Lamentablement. Le Commandant de bord avait l’air autant mortifié que Saï l’était lui-même. La stratégie de cette partie de la flotte Sith semblait terriblement rôdée. Où donc la Dame Noire avait-elle recruté ses généraux de guerre ? Etaient-ils d’anciens de la République, d’ailleurs ? Sinon, où les avait-on formés ? Il était si effrayant de songer à ce qu’un empire –puisque c’étaient les rumeurs qui couraient- Sith aussi efficace soit en train de se former. Etait-ce l’aube d’une ère nouvelle et sombre pour la Galaxie ?

- L’Eclaircie est touchée mon Commandant. Près de la moitié de ses turbolasers lourds ont été mis hors d’état !

L’officier en charge des opérations ne répondaient pas – il était concentré sur les nouvelles manœuvres de l’ennemi, qui semblait bien déterminé à les enfoncer plus encore qu’ils ne l’étaient, emportés par leur lancée. Le vieux Maître s’interrogeait : les Sith avaient-ils prévus que des Jedi conseilleraient à la République d’attendre qu’ils s’enhardissent pour frapper ? Cela expliquerait qu’ils ne se soient pas laissés avoir par leur tactique… Certes un peu prévisible, si l’on connaissait l’histoire des Jedi et des Sith. Comment les surprendre alors ?

Les deux hommes furent tous deux tirés de leurs réflexions graves par une nouvelle annonce d’un opérateur.

- Ils nous encerclent, mon Commandant, avait-il commencé.
- Je le vois bien !
- Mais cela leur permet désormais de nous empêcher de communiquer sur des fréquences à longue portée. Nous ne pouvons plus communiquer avec Coruscant, mon Commandant.

La nouvelle fut accueillie avec un long silence, avant que l’officier ne réagisse posément.

- Tant pis. Nous avons déjà donné notre position et demandé des renforts il y a longtemps.
- Notre silence n’appuiera que plus encore l’urgence de notre situation, conclut lui aussi le vieillard, bien décidé à ne pas se laisser abattre par de mauvaises nouvelles.

C’étaient en des heures si sombres qu’il ne fallait pas se laisser aller au pessimisme et au découragement, se répétait-il intérieurement comme un vieux réflexe qu’on lui avait appris alors qu’il n’était qu’un enfant du Temple Jedi d’Ondéron. Cette opiniâtreté lui avait fait supporter bien des situations, maintenant qu’il y songeait, mais elle ne réparait en aucun cas la gravité de ce qu’il était en train de se produire : si les Jedi ne pouvaient résister dans l’espace, ils ne pourraient plus venir en aide à leurs camarades sur Artorias. Qu’en étaient-ils d’eux, dont il n’avait plus non plus de nouvelles ? Comme il aurait aimé que Maître Caldin soit en charge des opérations au sol ! Il lui aurait fait confiance les yeux fermés. Non pas qu’ils ne croient pas en les Maîtres présents sur les lieux, mais la Force n’était pas si forte entre eux pour qu’ils puissent s’envoyer le moindre signal rassurant. Toutefois, il faisait confiance en Maître Wora pour donner du fil à retordre aux troupes Sith.

- Nous allons bientôt être obligés de battre en retraite, Maître, lui glissa le Commandant de bord, ses mâchoires visiblement écrasées par la colère et la déception. Il ne sert à rien de mourir ici si les Sith sont certains de l’emporter. Ce serait une perte d’hommes et de matériel inutile.
- Je suis d’accord avec vous, dut concéder le vieillard, mais la perspective ne l’enchantait guère. Pouvez-vous prévoir une trajectoire de sortie ?
- Cela se pourrait, mais je doute qu’ils nous laissent nous échapper facilement. Je pense qu’ils savent.
- Qu’ils savent ?
- Des Jedi. A notre bord. Il y a des chances pour que…
- Nous aviserons en temps voulu, dans ce cas.

Chaque problème en son temps. Inutile d’aller plus vite que la musique. Maître Don ne souhaitait guère que l’on cède à la panique et à la division des troupes. Par ailleurs, rien ne prouvait que ces Sith-là tiennent tellement à emprisonner des Jedi, même s’il était probable qu’il était plus judicieux d’écarter dès que possible les gardiens de la paix du chemin du cœur de la galaxie. Mais ce n’était pas pour eux que le vieillard s’inquiétait pour le moment.

[jet de sagesse pour récupération]

- Les réparations se poursuivent, fit le Commandant de bord, changeant de discussion avec une grimace agacée.
- Bien. Il ne nous reste qu’à nous défendre tout en élaborant une stratégie de repli.

Ce simple mot lui écorchait le fond de la gorge. Il fallait qu’il trouve un moyen de ne pas laisser tomber les troupes au sol, mais… Comment ?

Les Sith, pendant ce temps, refermaient inéluctablement leur étau sur les bâtiments républicains. Ces derniers semblaient se débattre dans l’espace comme des gizkas pris au piège au fond d’une soute de contrebande.

[jet de sagesse pour défense]