Si près du but, et après avoir failli servir de plat de résistance à une bande de fauves enragés, ils n’allaient sûrement pas rebrousser chemin à cause de trois pantins faisant les cent pas, barrant l’accès au seul passage vers l’édifice mortuaire dont on pouvait discerner vaguement l’entrée, mais non ses contours. Suivant le mouvement imprimé par le Dame Noire, dont la détermination semblait ne pas avoir changé d’un iota, Araya laissa Zora emboiter le pas de son maitre, préférant clôturer la marche afin de garder un œil attentif sur les complices de longue date. Sait-on jamais, maintenant qu’ils ne tarderaient pas à arriver vers leur destination, peut-être lui réservaient-elles un coup fourré, soit en s’en prenant directement à lui, soit en tentant de le semer. Les Sith ne sont réputés ni pour leur sens de l’honneur, encore moins celui du partage, alors autant rester prudent et faire preuve d’esprit pratique. En parlant de ça, ils n’avaient pas eu à chercher longtemps leur chemin, ce dernier étant déjà balisé par l’exploration du droïde de reconnaissance qui ne s’était pas privé de laisser de nombreuses marques de son passage. Pendant l'heure qui suivit, le groupe progressa à marche forcée à travers une forêt laissant place, çà et là, à des zones de pénombre, tellement la canopée des arbres laissait à peine filtrer la lumière d’un soleil déclinant. Fort heureusement, ils ne tombèrent sur aucun autre prédateur en mal de chair fraiche, si ce n’est le cadavre d’une créature dont la vermine se repaissait sans gêne. Un spectacle peu ragoutant que certains esprits mal placés ou superstitieux auraient jugé de mauvaise augure, mais l’arkanien n’était pas de ceux-là.

La pente du sol s’accentuant d’un coup, la montée soudaine marqua le fait qu’ils se rapprochaient du flanc de la formation rocheuse. S’arrêtant net devant l’entrée de la caverne, Araya reprit légèrement son souffle avant de zieuter les parages. Aucun signe, aucun indice probant ne laissa croire que les environs étaient fréquentés par la faune focale, ce qui ne fut pas pour lui déplaire. S’abreuvant d’une gorgée d’eau, il s’approcha ensuite de la saillie rocheuse formée par le passage souterrain, qui semblait effectivement vide de tout occupant, au premier abord. Si le droïde avait pu y passer sans encombre, c’est qu’il ne devait pas y avoir grand danger à faire de même. Placide, il lâcha un « je vais jeter un œil, je reviens » avant de s’engager à l’intérieur de l’étroite fissure qui alla de suite en s’agrandissant, avant de se resserrer tel un goulot d’étranglement. Plus loin, par endroits, Araya ne put faire autrement que de se faufiler de côté pour continuer d’avancer. L’obscurité ne tarda pas à être totale, et sans ses implants oculaires, sans doute que le Sith aurait dû recourir à la vision de Force pour ne pas buter la tête la première contre les fractuosités des parois sinueuses de la grotte. Faisant demi-tour, il regagna la sortie, quittant la fraicheur salvatrice du chemin souterrain.

« Rien à signaler, mais je ne suis pas allé jusqu’au bout… A mon avis, les types qu’on a vu ne sont pas passés par-là, ils auraient laissé des traces derrière eux sinon. Alors, qu’est-ce qu’on décide ? A mon avis, mieux vaut passer de l’autre côté, et les surveiller de loin à tour de rôle, au cas où vous vouliez faire une pause avant d’entrer dans ce tombeau… S’ils montent la garde, j’imagine que c’est pour éloigner les menaces ou les gêneurs éventuels, donc, ils doivent couvrir quelque chose. Il y a forcément quelqu’un d’autre qui leur a demandé de faire le planton de toute manière… Ça pourrait être de vulgaires pilleurs de tombes, mais j’en ai pas l’impression. Alors ? » interrogea l’arkanien, regardant Darth Ynnitach et Zora à tour de rôle, époussetant la terre de ses vêtements.

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A l’instar de sa remarque à propos de son séjour sur Ondéron, Noval fit mine d’ignorer la paire de macrojumelles que venait de lui tendre Darth Ynnitach, ses implants rétiniens faisant parfaitement l’affaire à cette distance. Selon ses dires, les gardes en faction devant le temple arboraient un symbole, chose qu’il fut à même de confirmer : deux des trois larrons portaient une sorte de tabard sur lequel une représentation iconographique figurait bel et bien, sauf que l’arkanien n’avait pas la plus petite idée de sa signification. Les armoiries d’une famille de nobles ondéroniens ? Peut-être, qui sait ! Après tout, les mieux placés pour répondre à la question n’étaient pas loin, et comme ils auraient bientôt maille à partir avec, inutile de tenir une conférence sur le sujet : ils l’apprendraient en temps voulu. En tous cas, cette bande de gaillards avait une fière allure, d’autant plus qu’ils restaient constamment sur le qui-vive, malgré la pluie et l’obscurité grandissante. Celui au capuchon paraissait le plus sur ses gardes, tenant en main ses armes dégainées – deux vibroépées rayonnant de reflets violets tirant sur le mauve – comme s’il s’apprêtait à passer à l’attaque au moindre signal suspect, prêt à faire face à n’importe quel danger. Si les deux autres allaient et venaient pour surveiller les alentours, celui-là restait parfaitement immobile, se contentant de légers mouvements de tête, scrutant les environs d’un regard aussi perçant que celui d’un prédateur en chasse. Qu’est-ce qu’ils faisaient là, au juste ? Montaient-ils la garde ou attendaient-ils quelqu’un ? Encore une fois, autant d’interrogations futiles qui ne servaient à rien dans l’état actuel des choses, remarqua-t-il pour lui-même. Et l’intervention de l’apprentie de la Dame Noire, même si elle paraissait péremptoire au premier abord, était assez censée. En revanche, prendre ces types à la légère ne lui inspirait rien de bon :

« Et des Maalraas, vous en diriez quoi ? Qu’ils sont de simples félins, juste bon à échauffer vos sabres ? » déblatéra-t-il mécaniquement, jetant un regard en coin vers l’humaine qui paraissait se recroqueviller sur elle-même, avec sa maitresse en guise de dame de compagnie pour venir la réconforter. Etrange vision que voilà… « Mais je vous donne raison, l’approche directe sera sans doute la plus efficace… Surtout que pour les dissuader de réagir au quart de tour, il faudrait être un baratineur doublé d’un comédien hors-pair… » rajouta Noval en s’asseyant en tailleur, cherchant une position relativement confortable à proximité d’un arbre dont les branchages offraient un abri relatif au crachin qui ne s’arrêtait pas de tomber dru. A nouveau, il prêta attention aux propos de Zora, qui ne manquèrent pas de le surprendre :

« Pour que je requiers ?! Ah mais je n’ai rien requis du tout ! C’est fort aimablement que votre maitresse m’a proposé son aide afin de connaitre le fin mot de cette histoire… Quant à l’artefact, alors là c’est encore un mystère, c’est bien pour ça que nous sommes là, pour savoir ce que mon maitre a tant convoité des années durant. Croisons les doigts pour ça en vaille la peine… » insista Noval, fermant les yeux en commençant à inspirer et expirer profondément, dans l’espoir de prévenir d’éventuelles interruptions à venir. Nul besoin de dormir, surtout qu’avec de telles harpies si près, sans compter la présence des gardes non loin, la menace était bien trop grande de ne jamais revoir le soleil briller à nouveau. D’où le recours à la transe méditative, un état végétatif où paradoxalement, le corps et l’esprit s’assoupissent alors que les sens demeurent en alerte, dressés de telle sorte que leurs perceptions continuent d’effleurer la conscience demeurée à l’état d’éveil. Quand on ne peut pas faire autrement, il faut bien utiliser les moyens du bord pour couvrir ses arrières… A vrai dire, il n’aurait su dire de quel groupe il avait le plus à craindre, sûrement de plus comploteur des deux, une pensée qui l’incita à se méfier plutôt deux fois qu’une ! Indéniablement, il allait devoir garder à l’œil le maitre et son élève, s’il tenait à avoir une chance d'anticiper leurs manigances et leurs coups bas. Quand il y a un doute, c’est qu’il n’y a pas de doute, point final !

S’il n’avait pas fait en sorte d’accentuer considérablement l’acuité et la portée de ses perceptions sensorielles pour palier à l’état de torpeur corporelle, proche de la tétanie, dans lequel il était plongé, Darth Araya aurait incarné une cible facile, même pour un enfant muni d’une simple pierre. C’est une chose que de sentir venir la menace inhérente à un danger, une toute autre consiste à réagir à temps pour parer la moindre intention hostile. Voilà pourquoi l’esprit, seul maitre à bord dans ces moments-là, doit constamment rester éveillé et capter ce qui l’entoure. A lui de faire le tri entre les nombreux bruissements de la nature en pleine nuit, des flip-flops des gouttes d’eau tombant sur le feuillage des arbres aux vibrations des pas causées par le déplacement des créatures rôdant dans les environs. Cette transe de la conscience ne permet pas de récupérer pleinement sur un plan physique, à l’inverse du sommeil ordinaire, mais a l’avantage de ne pas se couper de son environnement, de rester en suspens entre le réel et le mental qui le perçoit. Une forme dérivée de la méditation apprise aux Jedi et au Sith, et qui peut s’avérer bien utile, de temps à autre. Avant qu’il ne soit contraint à se faire poser des implants oculaires, Araya était même capable de détecter les fluctuations des auras émanant des êtres sensibles à la Force, trahissant les éventuels revirements d’intentions, mais plus maintenant. S’il peut toujours repérer la présence d’individus cherchant à passer inaperçu ou se dissimuler en utilisant des voies obscures, ses visions de Force ne sont plus aussi pertinentes qu’auparavant : la contrepartie à payer pour disposer d’une vue surpassant à plus d’un titre celle du commun des mortels.

Heureusement, la nuit s’écoula calmement au rythme des fines ondées détrempant la terre peu à peu, créant çà et là de minces ruisseaux d’eau qui abreuveraient une faune et une flore encore endormie, plus pour longtemps d’ailleurs. Les premières lueurs de l’aurore chassaient peu à peu la noirceur de la nuit, lorsque Darth Ynnitach se leva d’un bond, faisant s’écarquiller les yeux de l’arkanien, qui fit aussitôt craquer ses cervicales en se massant le cou. Zora ne tarda pas à lui emboiter le pas, tandis qu’Araya s’employait à quelques mouvements d’assouplissement pour soulager le léger engourdissement dont souffrent ses membres. L’heure d’en découdre était venue, à en croire les secondes passées à épier leurs futures adversaires, toujours fidèles au poste, tels des statues imperméables au temps qui passe. Sans lui demander son avis, le maitre donna le signal et prit les devants, se dirigeant tête baissée vers les gardes, suivie de près par son apprentie, qui lança un sourire en coin à l’arkanien avant de s’élancer à son tour, un peu comme pour lui murmurer qu’il aurait sûrement droit à un gage à force de trainer la patte. « Soit, quand il faut y aller… » pensa Araya en dégageant quelques fourrées d’un geste du bras.

Déjà, les deux furies venaient de se précipiter telles des bêtes enragés vers leurs futures victimes, bien déterminées à en finir le plus rapidement possible. Dire que ces deux-là n’avaient pas fait le chemin pour badiner de choses et d’autres aurait été un euphémisme, à les voir brandissant leurs sabres à tout-va, espérant bien trancher quelques membres dans la foulée, histoire de rendre le combat plus festif et attrayant ! Qu’à cela ne tienne, Araya accourra pour se jeter à son tour dans la mêlée, défiant du regard l’un des gardes s’apprêtant à dégainer. Imitant son geste, l’arkanien s’empara de ses sabres qui libérèrent leurs lames d’un seul trait, avant de se ruer sur lui, alignant une série de coups plus puissants que précis, davantage destinée à impressionner l’adversaire et le pousser à la défensive, l’empêchant ainsi de trouver une ouverture afin de contre-attaquer dans la foulée.

- Deux jets d'agilité pour attaques au sabre -

Précisions:

Contrairement à l’affrontement contre les Maalraas qui, de par leur surnombre, avaient bien failli s’éterniser au désavantage des Sith, ce combat-là tourna court. En dépit du fait qu’ils s’y étaient préparés, les ennemis se retrouvèrent vite débordés par des adversaires aussi habiles que motivés d’en finir le plus rapidement possible, quitte à ne faire aucun prisonnier, renonçant à l‘éventualité d’un interrogatoire ultérieur. Après quelques passes de sabre laser échangées avec les gardes protégeant bec et ongle l’accès au temple, un cho sun suivi dans la foulée par un cho mok parfaitement exécutés par la Dame Noire clôtura les hostilités, l’ennemi capitulant sans le vouloir : à genoux, la face révulsée de douleur, il tomba évanoui, face contre terre. L’opposant d’Araya venait de connaitre un sort plus définitif, l’abdomen transpercé de part en part, tandis que Zora conclut son duel d’un cho maï audacieux, son adversaire poussant un cri de douleur en fixant, hébété, son bras armé privé de main, laquelle retomba mollement à quelques mètres de lui. Décidément, ces deux-là faisaient vraiment la paire, et l’arkanien s’apprêtait à lancer une plaisanterie à propos des qualités manifestes de l’enseignement martial prodigué par Darth Ynnitach quand il aperçut du coin de l’œil l'apprenti Sith mettre un genou à terre, pestant violemment.

« Quelle idiote je fais ! J’aurai pu… j’aurai dû l’éviter ! » cracha-t-elle en toussant, les dents serrés, une main posée contre son flanc ensanglanté. Hésitant à intervenir sur-le-champ, n’étant pas certain de l’attitude à adopter, l’arkanien préféra laisser le maitre et son élève régler cela entre eux. Il se contenta de vider son ceinturon du peu de contenu qu'il portait, laissant trainer le seul médipack restant à terre, comme si de rien n’était. Contretemps ou pas, de toute manière, ils ne tarderaient pas à savoir ce qui se passe par-delà l’entrée de ce temple recouvert d’une végétation si épaisse qu’on avait du mal à en distinguer les contours, sans compter l’épaisse nappe de bouillard qui flottait aux alentours. Abaissant le regard vers les survivants en mauvaise posture, l’un d’eux était passe de se remettre sur ses pieds. En réponse à ce regain de détermination, Araya se contenta de lui infliger un étranglement de Force carabiné pendant quelques secondes, juste assez pour qu’il ait tout le loisir de réaliser que le pire serait à venir, si sa langue ne se déliait pas rapidement :

« A part vous, combien d’autres ?! Réponds ! » vociféra-t-il en posant distinctement chaque syllabe, comme pour mieux faire durer la torture.

« Qu… Que le maitre da… dans le temple… » articula la victime, de nouveau à genou, en prise à une force invisible enserrant sa trachée de l’intérieur.

« Personne d’autre ?! » insista son bourreau.

« Pers… Non… Je… jure… » siffla l’autre en sombrant peu à peu dans les vapes de l’inconscience, s'affaissant comme une loque, préférant laisser à La Dame Noire le soin de disposer de sa vie, en retour à l’affront subi par son apprentie. Il faut savoir être prévoyant par temps de guerre…

« Ma foi, je te crois… » répliqua sereinement le seigneur Sith, qui prit le temps de fouiller subrepticement le garde, à la recherche d’un je-ne-sais-quoi qui aurait pu le renseigner sur son appartenance à un groupuscule, par exemple. Nada, hormis quelques crédits, et diverses cartes d’accréditation qu’Araya enfouit discrètement au fond d’une poche de sa tunique : la curiosité arkanienne avait encore frappé ! Se retournant vers ses compagnons de voyage, l’air neutre, ce dernier jugea qu’il serait sûrement avisé de laisser l’un des membres de l’expédition en couverture, le temps que les autres s’aventurent plus avant dans ces vestiges, de manière à pouvoir les prévenir via leur comlink ou, le cas échéant, les rejoindre en cas de danger majeur. On n’est jamais assez prudent, surtout en territoire inconnu… Il fallait juste espérer que la blessure de Zora ne soit pas trop grave et l’empêche de tenir ce rôle de guetteur. Bien sûr, il y avait fort à parier que son amour-propre en prendrait un coup, mais qu’importe, ce n’était sûrement pas la première fois qu’elle connaissait des convenues de ce genre ! Et surtout, un tel prix ne serait pas cher payer si, en contrepartie, ses acolytes pourraient partir en étant assurés d’être couverts, au lieu de se retrouver pris entre deux feux, sans pouvoir faire machine arrière. * Un maitre... Qu'est-ce qu'il a voulu dire par-là, ce mécréant ? * s'interrogea-t-il. En attendant de savoir ce qu'il en retournait au sujet de Zora, Araya se contenta de sonder les environs en balayant du regard les arbres et les fougères à proximité, à la recherche du moindre mouvement, ou crissement, suspect.

Répugnant… Et si déroutant à la fois ! Cela faisait une éternité qu’une expression de stupeur si marquée n’avait pas figé les traits anguleux et mornes d’Araya. Bouche bée, son regard resta médusé tout le long de ce festin macabre par lequel Darth Ynnitach venait de révéler au grand jour une part d’elle-même que l’arkanien n’aurait jamais voulu croire sans l’avoir vu de ses propres yeux. Ce fut dorénavant chose faite : il savait désormais que sous ce masque de beauté se cachait ni plus ni moins qu’une Anzat. Bien évidemment, cette révélation troublante ne devait sûrement pas tombée dans l’oreille de n’importe qui. D’ailleurs, il ne devait sûrement pas être le seul au courant : parmi le cercle intime des fréquentations de la Dame Noire, certains privilégiés avaient sûrement dû assister à ce spectacle si écœurant, peut-être même qu’il y en eût d’assez déviants pour considérer la vision de tels sévices comme une expérience cathartique, ne se doutant pas qu’ils serviraient eux-mêmes de pâture, un jour ou l’autre. En attendant, Araya ne comprenait que trop bien le procédé sinistre et mortel que les représentants de cette espèce avaient pour habitude d’infliger à leur victime. Ils s’en nourrissaient, purement et simplement, et le seul organe accessible par les voies nasales… Il ne fallait pas être un féru de science pour comprendre ce qui était en train de se passer, compte tenu des spasmes nerveux agitant légèrement le corps de la victime tout le temps que dura l’infâme buffet froid de la Sith. A l’aide de minces tentacules se frayant un chemin jusqu’au cerveau, elle le lui aspira d’une traite, aussi aisément que s’il eût s’agit d’un liquide corporel !

Un moment passa pendant lequel l’arkanien demeura immobile, décomposé, les lèvres entrouvertes et asséchées, non pas de soif, mais d’une angoisse qu’il ne put réprimer que difficilement, ne sachant que penser de ce qu’il venait de voir. Sans mot dire, l’excitation intellectuelle prit rapidement le pas sur son appréhension instinctive. L’idée de pouvoir observer, analyser, autopsier un spécimen de cette espèce dans le but de découvrir les secrets de son anatomie déclencha un sourire malsain sur son visage qui retrouva une certaine consistance. Rassasiée, l’Anzat prit ensuite des nouvelles de son apprenti : une attitude qui ne fut pas sans rassurer Araya sur la suite des événements. Etait-elle encore en proie à une faim dévorante, ou bien l’encas précédent avait-il suffi à étancher sa soif ? Bonne question même si l’arkanien se voyait mal la lui poser. Dans le pire des cas… Il fixa son attention sur l’autre garde encore inconscient, soulagé de sa présence. Par chance, le discours de Darth Ynnitach montra qu’elle avait retrouvé son sang-froid : Zora, gravement blessé, resterait en retrait, et profiterait de l’occasion pour récupérer des forces en puisant dans la vitalité du dernier garde. Côte à côte, les seigneurs Sith se croisèrent du regard sans rien laisser transparaitre de ce qui venait d’arriver.

-Et bien, seigneur Araya. Il semblerait que la Force veuille que nous ne soyons que deux à entrer dans cette tombe… Avez-vous appris quelque chose ?

Mal à l’aise, le Sith fit signe que non de la tête, avant de bredouiller quelques mots qui semblèrent rester coincés au fond de sa gorge, n’ayant appris que très peu de choses par le fait. Visiblement, il n’avait pas complètement digéré le morceau, alors que l’Anzat s’élançait déjà d’un pas décidé vers l’entrée du temple, le lieu de l’ultime confrontation avec ce soi-disant " maitre ". Ce dernier n’avait pas pris la peine de dissimuler ses traces, n’imaginant pas être suivi par qui que ce soit. Chose étonnante, les seigneurs Sith progressèrent sans difficultés, passant d'un couloir à un autre sans que rien ne se mette en travers de leur chemin. Sans doute que ce fameux maitre avait déjoué les pièges et les protections censés barrer la route aux profanateurs importuns, signe que l’inconnu n’était pas à prendre à la légère. En revanche, plus ils avançaient et puis Araya distinguait nettement un changement dans l’air : l’atmosphère devenait de plus en plus pesante, chargée d’une présence et d’une énergie considérable, toute deux corruptrices. D’abord une aura, puis une deuxième, lui sembla-t-il, venait de se distinguer nettement dans la Force, l’une plus puissante que l’autre... Arrivé à un passage plus étroit débouchant sur une espèce de crypte, il passa la tête et ne distingua qu'une forme humanoïde intégralement capée qui murmurait des paroles incompréhensibles en faisant les cent pas. Peu à peu, la voix se fit plus insistante, plus distincte, tandis que des effluves vaporeuses firent leur apparition en sillonnant le sol, parsemées d'arcs énergétiques carmin. Quelque chose était en train de se passer... Darth Ynnitch, plus fougueuse que jamais, ne se fit pas prier pour interpeller l'auteur de ces manifestations, demeuré sans visage, lorsque l'écho d'une voix d'outre-tombe résonna, se fracassant contre les murs de l'antichambre, résonnant de tout son poids sur chacune des pierres :

« Qui ose profaner ma dépouille ? Qui ose m’invoquer ? QUI OSE ?! QUIII !?! »

Surréaliste, il n’existe pas d’autres mots pour décrire la scène qui se jouait devant eux. D’un pas cadencé, Darth Ynnitach et Darth Araya venaient lentement de pénétrer dans le caveau mortuaire à l’invitation de cette voix tout droit sortie des limbes d’une après-vie mystérieuse. On aurait dit que le tombeau lui-même vibrait de crépitations sinistres, comme s’il entrait en résonnance avec les flux répétés de vagues d’énergie rougeoyantes, tel un pulsar se nourrissant du côté obscur, avec pour épicentre cette forme spectrale semblant flotter à la surface craquelée des dalles de pierre sombre recouvrant le sol et les murs. S’agissait-il vraiment d’une apparition du Roi Ommin, narguant la petite assemblée de Sith en n’attendant plus qu’une chose, qu’ils s’affrontent dans une joute à mort, où seul le vainqueur gagnerait le droit de quitter ces lieux vivant ? L’idée que ce revenant veuille se réincarner en chair et en os traversa l’esprit de l’arkanien, avec pour seule réponse un regard inquiet se lisant sur son visage. Après tout, peut-être cherchait-il autre chose qu’un simple divertissement, après des siècles passés à ruminer son exil de la surface d’Ondéron : un prétendant susceptible de devenir le réceptacle de son âme déchue, peu importe les conséquences qu’un tel transfert aurait sur l’heureux élu.

Quant à l’ennemi qui leur faisait face, il était bien décidé à jouer crânement sa chance coûte que coûte. Face à une telle soif de reconnaissance, l’arkanien pensa qu’il s’agissait soit d’un adversaire à ne pas prendre à la légère, soit d’un fou se méprenant sur ses propres capacités. De ce point de vue, le doute ne tarda pas à se dissiper ! La création de double. Un pouvoir dont Araya avait entendu parler sans jamais le voir à l’œuvre jusqu’à maintenant… Voilà qui fut chose faite ! Le Sith venait de se concentrer quelque secondes, lorsqu’une ombre se détacha de sa silhouette avant de s’éloigner de quelques pas, parfaite duplication de son auteur, laquelle afficha un sourire narquois face à la mine intriguée d’Araya. La donne venait de changer, et l’affrontement s’annonçait autrement plus épineux à présent qu’il avait pallié à son infériorité numérique. Lui et la Dame Noire échangèrent un regard sans mot dire, se tenant prêt à parer toute éventualité. Dégainant ses sabres qu’il activa aussitôt, soignant ses appuis d’un léger glissement de pieds, il s’apprêtait à sonner l’assaut, laissant à Darth Ynnitach le soin de percer à jour le vrai du faux face à ces jumeaux ténébreux.

-Seigneur Araya… Celui-là est l’original… Détruisez son double ! Maintenant !

Compte tenu des circonstances, il aurait été de mauvais ton de se faire prier outre mesure, en n'obéissant au doigt et à l’œil aux ordres de l’Impératrice, surtout lorsque leurs peaux sont en jeu ! L’entraide était de mise, et nulle dissension ne viendrait obscurcir cette coopération salvatrice, pour l‘un comme pour l’autre. Laissant libre cours à la Force aiguisant ses talents de bretteur, il focalisa son attention sur la cible à abattre, et se lança tête baissée, ses sabres inclinés tenus à la parallèle sur son flanc gauche, à l’instar de ses bras, visualisant à l’avance l’enchainement de coups qu’il allait porter. Déconcentré par un grondement soudain retentissant sous ses pieds, les gestes d’Araya manquèrent d’amplitude et de précision, ratant partiellement la cible qui n’esquissa pratiquement aucun mouvement pour parer ses attaques. Le combat s’annonçait aussi long que rude !

[Pouvoir passif d’Ambidextrie // Deux jets d’agilité pour deux attaques au sabre sur le clone]

(Rappel : Agilité -2 sur la deuxième attaque ; 4 Pf par tour)