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Le regard du Padawan s'était attardé pendant quelques secondes sur son Maître, puis les yeux noirs s'étaient détournés pour observer évasivement les différents écrans de contrôle. Il n'y avait précisément rien à regarder que le défilement des données automatisées, gérées par les ordinateurs de bord, qui s'en tirait fort bien, sans surveillance ni aide extérieure, pour accomplir le long mais monotone voyage de retour.

Mais Orme avait trop peu de confiance en sa propre capacité à dissimuler ses pensées pour laisser longtemps son regard s'attarder dans celui de son interlocutrice. Sans doute la femme n'aurait-elle aucune difficulté, comme tous les Jedis expérimentés, à démêler les sentiments que ses paroles feraient naître chez son apprenti, mais le geste du Coruscantien naissait beaucoup plus d'une pudeur irréfléchie que d'un dessein formé de cacher ses réflexions.

Il était vrai que le discours de la Jedi n'était pas fait pour satisfaire l'idéalisme mystique de son jeune compagnon d'aventures. Si Orme s'était tenu éloigné de la politique et des missions consulaires dès qu'il avait été en âge de comprendre, de commencer à comprendre, les enjeux de semblables négociations, c'était précisément parce que cette implication exigeait une certaine résignation pondérée qui était loin d'épouser son caractère.

Stratège et raisonnable, il l'était sur le champ de bataille, lorsqu'il fallait mener à bien une mission complexe. Mais en matière de morale, il était peu porté aux compromis et aux calculs, et il eût préféré de très loin une vie d'ermite coupé du monde qu'une existence de politicien. Naturellement, Ellana évoquait des choses qui lui étaient familières et dont tout membre de l'Ordre était bien vite forcé de prendre conscience, mais elle le faisait avec un calme qui froissait un peu les nobles sentiments de son Padawan.

Au bout de quelques minutes de silence, le jeune homme finit par murmurer :

— Je vois.

Un peu découragé par l'insuccès de leur mission sur Mustafar, épuisé par le contre-coup des courses-poursuites, des combats et de sa blessure, Orme ne se sentait guère l'énergie de s'engager dans un débat. Il entrait peut-être encore dans son laconisme ordinaire un peu de distance à l'endroit d'Ellana : ce n'était après tout que la seconde fois qu'il la rencontrait seul à seul et leur relation toute nouvelle était loin d'avoir la force et la confiance qui unissaient Padawans et Maîtres de longue date.

Plongé encore pendant quelques secondes dans ses pensées, Orme finit par esquisser une moue dubitative. Il se releva et, d'une voix un peu fatiguée :

— Je vais inspecter le vaisseau. Vérifié qu'on ne nous a pas laissé de mauvaise surprise.

C'était manifestement une excellente excuse pour rester un peu seul et il ne croyait pas qu'Ellana se laissât abuser ; mais Orme ne songeait pas vraiment à mentir avec efficacité. Il avait besoin de ruminer les derniers événements, qui résonnaient curieusement avec la conversation qu'il avait eue avec Ulrich au bord de l'étang. Cette étrange coïncidence n'était pas sans le laisser un peu perplexe et, habitué à apercevoir des signes dans ce que d'autres tenaient pour le hasard de la vie, il avait besoin d'interpréter ces quelques faits.

Une douleur lancinante persistait dans ce qui avait été quelques minutes plus tôt à peine une blessure importante et affectait sa démarche d'une légère boiterie, mais les soins prodigués par Ellana et une certaine force de caractère chassaient de son visage toute impression désagréable. La douleur physique, il avait appris à s'en accommoder par la force des choses.

Il marchait lentement le long de la coursive principale qui descendait vers la soute. Le vaisseau n'était pas très grand, mais il excédait de très loin les proportions d'un chasseur. Mustafar était une planète commerciale plutôt que combattante et c'était manifestement un appareil de transport, que les locaux possédaient en quantité, qui leur avait été prêté pour leur retour. Parfois, une odeur très tenue montait des entrailles de l'appareil, semblable à celle des produits qui étaient utilisés pour traiter les minerais après leur extraction.

L'appareil ne présentait pas de particularité et, manifestement, pas de danger. Mais Orme déployait des trésors de précautions pour en inspecter les moindres recoins, soucieux de prolonger son excursion autant que possible. Il y avait dans ce silence d'acier entouré du vide infini de l'espace, après le bruit et la fureur des combats, quelque chose de profondément reposant.
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