Karm Torr
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Roaargh. Ooarrgh rrryk.
N’importe qu…

Karm s’interrompit, parce qu’un scolopendre gigantesque, qui devait faire au moins deux fois sa taille, était en train de serpenter dans sa direction. L’Ark-Ni retint son souffle, mais l’animal finit par se laisser glisser lentement sur une branche plus éloignée, dans l’épaisse forêt de Kashyyyk, et le Chevalier put reprendre son activité de tressage.

N’importe quoi, j’disais.
Graaor ruggh arrgh.

Ongoorrryyk, la Wookie qui l’accompagnait presque toujours quand il se rendait sur Kashyyyk, pour y explorer les niveaux inférieurs de la jungle, poussant chaque fois plus bas, dans un territoire plus dangereux, afin de parfaire ses talents d’explorateur et ses compétences de survie, prit un air renfrogné.

Non mais.

Le Jedi se laissa souplement glissé le long de la corde qu’il avait tressé à partir de lianes, afin de rejoindre son amie.

J’dis pas que ça existe jamais, les fantômes et tout ça, mais je dis que tout une station spatiale soudainement vidée de ses habitants par des ectoplasmes ou je sais pas quoi, c’est d’la légende spatiale.
Rraaaorgh u roo.
Attends, sérieux, en quoi c’est moi qui suis pas rationnel, dans c’t’histoire ?

La Wookie haussa les épaules, qu’elle avait larges et velues, et bondit une branche plus bas.


***


Biip biip ?
Nan, on va faire un p’tit détour avant de rentrer.
Bip…

L’astromech de Karm, qui s’était prévu une mise à jour tranquille à siroter de l’huile de moteur dans un coin du hangar de l’ExploCorps sur H’ratt, faisait preuve d’une saine circonspection. Les « p’tits détours » de son pilote, il les connaissait bien : c’était un coup à finir par passer une semaine dans une planète désertique à prendre des relevés holographiques de dunes absolument toutes identiques, jusqu’à en avoir du sable plein les boulons.

J’veux prouver à Ongoo’ qu’elle raconte n’importe quoi.

Hors de question qu’il avoue à son droïde que les histoires à dormir debout de la Wookie avaient titillé sa curiosité.

Calcule moi une route vers l’Oasis.
Bipbipbipbipbip, protesta aussitôt le droïde d’un ton paniqué !
Mais nan.
Bip.

Le ton était ferme, quoique électronique.

Promis, si un contrebandier te capture pour te désosser, j’te fais poser une plaque commémorative dans le hangar.

Blip fit la démonstration de son répertoire d’injures en binaire, mais, une demi-heure plus tard, le chasseur jedi s’élevait de la canopée de Kashyyyk pour quitter rapidement l’atmosphère de la planète et sauter dans l’hyperespace. L’Oasis n’était pas très loin, à deux heures de vol à peine, une station spatiale perdue entre Bimmisaari et Boz Pity, qui servait de plaque tournante à une population interlope de trafiquants et de mercenaires, de marchands d’esclaves et d’esclaves en cavale, de petits pornographes sans lendemain et de sujets impériaux en transit pour un monde plus ouvert.

Des stations comme celle-là, il y en avait des dizaines dans les espaces indépendants et tout le long de la Bordure, valves entre des nations dont les frontières étaient plus poreuses qu’on ne voulait bien le dire. Karm s’y sentait au fond plus à l’aise que dans les salons calmes des grandes administrations au coeur des terres républicaines, si étrangères à tout ce qu’il avait toujours connu.

Quant aux stations hantées, aux vaisseaux fantômes qui sortaient brusquement de l’hyperespace pour dériver sans but jusqu’à attirer des ferrailleurs trop téméraires pour se douter qu’ils allaient être engloutis par la machine, et toutes ces histoires qu’on se racontait dans les tavernes des spatioports dans tous les bras de la Galaxie, le Jedi n’y croyait pas.

Ou en tout cas pas totalement…

Il était plongé dans la relecture des notes qu’il avait prises lors de son entraînement à la survie sur Kashyyyk quand son chasseur quitta l’hyperespace. Karm éteignit son datapad et releva les yeux vers le vide interstellaire. Aussitôt, un frisson le parcourut.

OK…

D’habitude, comme pour toutes les stations, l’Oasis était entouré d’un essaim plus ou moins compact de vaisseaux en partance ou qui se préparaient à accoster. Ce jour-là, cependant, la station se contentait de tourner très lentement sur son axe, dans ce secteur désert, sans planète, sans lune, sans soleil, sans rien.

Karm coupa le pilote automatique et reprit les commandes de son chasseur, pour le manoeuvrer plus près.

Scanne pour des signes de vie.

Quelques secondes plus tard, avec un bip lugubre, le droïde affichait sur l’écran le résultat : zéro signe de vie. Karm savait que ça ne voulait pas dire que la station fût absolument déserte. Son chasseur était trop petite, la structure trop vaste, pour que ses scanners fussent d’une précision irréprochable. Mais il ne put s’empêcher d’éprouver un léger malaise.

Y a bien des vaisseaux à quai, on dirait, murmura-t-il en constant que des cargos étaient arrimés aux sas de déchargement de la station. On va essayer de se poser.

Karm se détacha de son anneau hyperspatial à bonne distance de la station, puis s’engagea doucement dans un hangar, avant de couper les moteurs, rangés entre deux vaisseaux de petite taille que le temps et les débris spatiaux n’avaient pas épargné.

Atmosphère ?
Bip bip, répondit l’astromech, pour confirmer qu’elle était respirable.

Le Chevalier ouvrit son cockpit et sauta sur le sol métallique. Le bruit de ses talons résonna dans le hangar désert. Il activa son comlink pour rester en contact avec le droïde.

Tiens toi prêt à redécoller si besoin. Et à venir me chercher ailleurs, si jamais…

Il lui fallut un moment pour comprendre que le souffle continu qu’il entendait était le bruit du système de climatisation qui continuait à purifier l’air de la station en circuit fermé. D’habitude, sous le brouhaha des allées et des venues et la rumeur des conversations, on ne pouvait pas y prêter attention.

Ouais, bon, OK, j’avoue, j’ai un mauvais pressentiment…
Darth Velvet
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La musique résonne dans le vaisseau, vibre dans le métal de la coque, dans le réseau d’air conditionné, dans les composants électromécaniques, en écho au ronronnement des moteurs supraluminiques. Et ma voix l’accompagne, douce et suave, de miel, composé de velours, de notes égrenées avec cette légèreté qui ne s’échappent que rarement de ma minéralité hivernale, de ce carcan de glace, ce drapé placide de givre et de gel dans lequel je me réfugie depuis si longtemps que j’en ai oublié le compte des années. Les doigts entrelacés de mes mains abandonnent le dessous de mon menton, pour avancer une pièce sur l’échiquier virtuel, avec une assurance que je suis loin de ressentir. Je suis certaine qu’E.V.A. se rengorge de mon coup, elle que je soupçonne d’avoir augmenter le niveau de difficulté du programme, pour le plaisir ou la dissection scientifique, de m’observer en difficulté.

« Jolie stratégie, Velvet, mais je pense que vous ne me battrez pas de cette façon » clame-t-elle . Si elle n’était pas une intelligence artificielle, je pourrais entendre le narquois du phrasé, l’aiguillon, le défi sous les mots.

« Hummm »

Je rumine légèrement, abandonnant les mélodies de la chanson crachée par les haut-parleurs, pour me concentrer sur manœuvre. Décidément, cette partie ne tourne pas en ma faveur.

« De combien de niveau as-tu augmenté la difficulté ? »

« Seulement de 4 points. »

« Ah. Quand même. »

« Ce jeu vous permet de développer une vision d’ensemble d’une situation donnée, pour en extraire les principaux avantages et inconvénients. C’est un très bon entrainement à la diplomatie et à la tactique militaire. »

Elle se tait. Je bouge un nouveau pion, sacrifice nécessaire pour ne perdre cette manche.

« Velvet, puis-je vous poser une question. »

« Tu peux, oui. »

« Je voulais connaitre votre position quant au sujet Alan Reijliidic. »

« Ah. »

De la surprise jaillit dans l’ondée azur de mes yeux, sous mes paupières à demi-closes.

« Peux tu préciser « position » ? »

« Bien sûr. Ragda dit que cette entité est le résultat de notre collaboration. Que… Mes capteurs m’informent que nous sommes à proximité d’Oasis. »

« E.V.A, nous reprendront cette discussion, mais pour le moment sort nous de l’hyper-espace et effectue les demandes d’amarrage, je retourne au poste de pilotage. »

Je suis tout juste installée, que l’hologramme miniature d’EVA apparaît sur la console.

« Velvet, mes demandes restent sans réponse. »

Dans l’obscurité ogresse, la station apparaît fragile, une petite lumière perdue dans un océan de ténèbres, éloignée de tout soleil, toute planète. Un îlot de civilisation dérivant dans le néant stellaire. Il n’y a aucun mouvements de vaisseaux, aucun transit alors qu’habituellement l’espace autour d’Oasis foisonne de navettes, de désordre.

« Étrange… »

« Aucun signal de détresse n'est émis. Que faisons-nous ? »

« Arrime-toi, et lance un message à Refuge, qu’ils sachent qu’il y a un problème ici, et que les prochains transits doivent impérativement se faire sur Junkfort Station. Vérifie la viabilité de la Station, les données atmosphériques surtout. »

*******

Le silence. Il règne absolument partout, sur les quais que je traverse rapidement, dans le hangar d’arrivée des voyageurs. Seul le bruit de mes bottes résonne sur le treillis métallique des passerelles, et le bourdonnement de l’air conditionné. Il n’y a personne. Strictement personne. Le petit poste de sécurité régulant le flux des transits est vide, un thermos encore chaud déposé à coté d’une console. Je regarde un instant les images des baies d’amarrage qui défilent, lentement. Mais là encore, aucune âme qui vive n’entache l’immobilité inquiétante du décor. Un frisson coule le long de mon échine et un froissement, imperceptible, frôle la Force comme une invite, comme une mise en garde peut-être.

J’avance, muette dans cet environnement stérile du moindre son humain. Je sais déjà que la travée marchande regroupant les comptoirs des négoces ne sera pas plus animée que le reste, mais je m’y sens attirée, aimantée. Les étals sont bien là, certains emplis de marchandises, d’autres figés comme bloqués dans le temps, mais leurs propriétaires demeurent invisibles. Je crois qu’il n’y a rien de plus oppressant que cette absence de bruits, de plus angoissant que de n’entendre que le cliquètement des machines qui usuellement se perdent dans le brouha. J’aimerais, juste une seconde, entendre la voix d’un autre, juste pour briser ma fébrilité éphémère.

Et là, soudain, une présence. Elle brise ma solitude, déformant la Force en une venue réconfortante. Presque réconfortante. Parce que si tous se sont volatilisés, de qui provient cette démarche si souple et étouffée, que je la perçois à peine en me concentrant. Ami ? Ennemi ? Est-t-il l’origine de cette désertion, ou un rescapé, peut-être ? Le métal de mon sabre glissé sur ma cuisse, se réchauffe doucement, de même que mes reflexes alanguis par cette situation inexplicable. Et je l’attends, figée au milieu de cette travée dont il ne reste rien du chaos bordélique de bazar spatial, de jade et de glace, pour le cueillir dès qu’il apparait par un hivernal :


« Etes-vous le responsable de ceci ? »
Karm Torr
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Velvet… ?

D’ordinaire, dans cette station surpeuplée, les murmures habituels de l’Ark-Ni auraient été parfaitement inaudibles. Au fond, c’était peut-être la première que Karm entendait si bien sa propre voix dans un endroit pareil et l’écho de ces deux syllabes avaient quelque chose d’inquiétant.

En remontant les quais d’approvisionnement, pour constater que les stocks des hangars étaient pleins comme on aurait pu s’y attendre, et que par conséquent on n’avait pas évacué la station en catastrophe en emportant une partie de la cargaison, il avait fini par déboucher dans les niveaux marchands, avec leurs étals déserts, mais encore ouverts. C’était là qu’il avait aperçu cette silhouette désormais familière, rencontrée plusieurs années plus tôt, avec Luke, à la fin de leur [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien].

Un fantôme dans une station fantôme, c’est pas sans ironie, dites donc.

Ils ne se connaissaient pas, pas très bien en tout cas, mais ils avaient Luke en commun et le Consulaire avait eu l’air de faire confiance à la terroriste. Après avoir passé l’essentiel de sa vie sur la Bordure, Karm avait appris à ne pas se fier à la réputation des gens. Les recommandations valaient mieux. Ils étaient beaucoup à être les champions des uns et les terroristes des autres.

J’suis responsable de rien du tout, répondit-il enfin, en s’approchant d’elle, et j’imagine que du coup, vous non plus.

Le Jedi pressa de l’index le bouton d’un grill à viande sur un étal qui vendait des brochettes et l’appareil s’éteignit.

C’est particulier les évacuations en catastrophe sans évacuation ni catastrophe, hein ?

D’un regard circulaire, il embrassa la coursive marchande sur laquelle ils se tenaient tous les deux. On n’avait pas renversé les stands, personne n’avait bousculé les marchandises en tentant de s’enfuir dans les précipitations, aucun comlink n’avait été abandonné au sol.

La plupart des quais d’arrimage sont occupés…

Autrement dit, tous ces gens ne s’étaient pas entassés dans leurs vaisseaux pour s’enfuir.

Soixante. Minutes.

La voix artificielle le fit sursauter. Elle était sortie sans prévenir du système de communication centralisé de la station, dédié d’ordinaire aux annonces de service.

Soixante. Minutes.
Blip, fit le Jedi qui avait activé son comlink, tu captes une transmission extérieure ?

À l’autre bout du fil on entendit une série de bips d’astromech et Karm secoua la tête. Rien. C’était un enregistrement diffusé par la station elle-même.

Soixante. Minutes.

Soixante minutes depuis que les passagers étaient partis ? Ou soixante minutes avant que quelque chose ne se produise ? En silence, Karm interrogea Darth Velvet du regard. Lui ne croyait pas aux coïncidences. La Galaxie était immense et s’ils se retrouvaient ensemble, sur cette station abandonnée de tous, flottant entre trois empires, c’était que la Force l’avait arrangé ainsi.

J’imagine que c’est parti pour la salle de contrôle…

Leur meilleure chance d’obtenir une réponse à leurs questions était d’interroger l’ordinateur central. L’idée de partir comme il était venu ne lui avait même pas effleuré l’esprit. Le mystère était trop entier et le danger pouvait s’exporter. Ce qui avait vidé cette station pouvait se produire ailleurs et Karm considérait qu’il était de son devoir de l’empêcher. Quant aux intérêts de Velvet en la matière…

L’Ark-Ni jeta un regard en coin à sa coéquipière du jour. Ou de la nuit. Difficile à dire. Qu’était-elle venue faire sur l’Oasis, à l’origine ? Attirée comme lui par une vague rumeur ? Quelque chose lui disait que ses questions sur le sujet resteraient toujours sans réponse. Il conserva donc un silence prudent alors qu’ils prenaient le chemin des turbolifts les plus proches. Examiner la galerie s’avéra pour lui un exercice vain. Pas d’indices, rien qui sautait aux yeux, sauf le spectacle d’une inchangeable normalité que l’absence soudaine des gens qui vivaient là rendait étrange.

Cinquante. Neuf. Minutes.
Ah.

Le Jedi pressa le panneau de contrôle du turbolift.

Dix contre un que c’est pas le décompte avant les feux d’artifice du Nouvel An et que tout le monde est pas caché dans les placards, pour pouvoir surgir en criant « surprise ».

Déformation de combattant oblige, quand il entendait des décomptes, il pensait à des explosions.

Pour l’heure, son problème le plus terre à terre, c’était que le turbolift ne marchait pas. Après avoir insisté sur le panneau, puis sur celui d’à côté, Karm se rendit à l’évidence que les ascenseurs étaient hors service — le seul signe, jusque là, de dysfonctionnement de la station.

Blip, t’as accès aux systèmes de bord ?

Non, reste au vaisseau, te connecte à rien surtout. Aussi bien y a un virus informatique ou je sais pas trop quoi…

J’ai jamais dit que t’étais hypocondriaque.

Une fois. Une fois j’ai dit que tu pouvais pas être allergique au pollen parce que t’es un droïde.

Ouais, bon, écoute, on en reparle plus tard, j’suis occupé, là.

Karm coupa son comlink et échangea un regard avec la Mirialane.

Il est caractériel mais il répare hyper bien les moteurs, se justifia-t-il.
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Velvet.
Un murmure… infime écho presque silencieux dans le désert aphasique de cette station abandonnée. Il s’approche, et les courbes de son visage se précisent, dessinant un jeune homme qui, un instant, me demeure inconnu avant de se faire familier. Est-ce son regard perçant vert d’eau, la juvénilité de sa silhouette androgyne, ou ses cheveux sélénites qui appelèrent mes souvenirs. Et, comme un élastique claquant après d’être trop étiré, ils me reviennent avec brusquerie. Luke et son ami jedi. K.. Karm ?


« Effectivement. C’est comme s’ils avaient tous été effacés. Au beau milieu de leurs activités. Je n’ai rien remarqué de suspect. Pas de tirs, pas de traces de combats ou de luttes. Le thermos au poste de transit était encore chaud, et la surveillance active. Les quais sont aussi occupés que les docks vides. Partout. »

La voix métallique du compte à rebours me cueille de surprise. Et, ce n’est pas le genre de surprise qu’il est agréable de recevoir, car rarement, arrivé à 0, on en apprécie la teneur. Mes lèvres se pincent alors que j’emboite le pas du jedi pour la salle de contrôle. De toutes évidences, à défaut de savoir exactement où son passer les résidents de la station, peut-être arriverons nous à en soutirer quelques informations et connaitre l’origine et le but du décompte.

« Je pense qu’il sera bien question de feux d’artifices, mais pas pour le plaisir de nos yeux. Quoique certains diraient qu’il y a de la beauté à voir sauter une station de cette grandeur. Un petit éclair de lumière dans l’océan froid et stérile de l’espace. Je préférais cependant, ne pas être ici quand on sera à quelques secondes du grand spectacle. »

J’observe Karm s’acharner sur le turbolift. Mon regard se plisse.

« Etrange… »

Mes yeux se portent sur le plan d’évacuation placardé à côté. Le plastiverre est tagué d’un « Remenber Artorias », peint en écarlate, mais au-dessous des lettres et des bavures, on devine les accès vers les niveaux supérieurs de la Station.

« On a plus qu’à marcher pour rejoindre le niveau des opérations, évidemment, c’est le plus éloigné de notre position actuelle. Sinon où serait le plaisir ! »

Mes lèvres s’étirent d’un sourire factice, sans joie, sarcastique. Les passerelles destinées à l’entretien des turbolifts, aux processus de maintenance de la station et aux évacuations de sécurité ne s’ouvrent automatiquement que sous un protocole d’urgence ou par scan rétinien. Un moyen efficace de s’assurer de la sécurité de tous, y compris du matériel, lorsqu’il n’est pas nécessaire d’emprunter ces voies détournées. Aussi à notre arrivée devant la porte, close, je ne cherche pas à l’ouvrir proprement, et, laissant jaillir de son étui ma lame, l’éventre promptement dans un rugissement de métal porté à fusion.

Cinquante. Deux. Minutes.

J’insiste, elle résiste quelques secondes avant de céder. Ce n’est peut-être pas la manière la plus élégante de se faufiler mais elle est efficace et n’a dévorer que…

Cinquante. Minutes

… deux minutes du restant imparti de notre temps. J’accélère empruntant le grossier escalier de treillis métallique qui serpentent dans les entrailles de la station. Je ne sais pourquoi, mais cette sensation oppressante qu’ils nous faut nous presser pèsent sur mes épaules. Une chappe de permabéton. M’enserrant de ses bras éthérés.

« J’ai un mauvais pressentiment. Vraiment un mauvais… » soufflais-je en avalant les marches davantage pour moi que pour lui.

Les niveaux défilent sans interruption, sans âme qui vive, sans incidents, au rythme de nos souffles, et de la voix.

Quarante. Quatre. Minutes.

Encore un effort. Plus que quelques marches et nous atteignons la passerelle du poste de commandement. De nouveau la porte siffle sous le même traitement que sa sœur avant d’expirer dans un sifflement de métal fondu. Le niveau, plus petit que les autres, regroupe les installations sensibles et prioritaires de la station, les structures liés aux communications, le centre névralgique informatique. Nous entrons directement dans le centre des opérations. Un dôme vitré nous surplombe, offrant à notre vue l’infini de l’espace, et, épinglé sur ce tissu de ténèbres, le chatoiement lointain d’étoiles. Ici aussi, il n’y a personne.

Quarante. Minutes.

« Humm et si nous trouvions un moyen de lui couper le sifflet, ou de savoir ce qu’il y a au bout de ce décompte. Regardez les registres et les journaux journaliers, je m’occupe de la petite voix. »

Je rejoins la console principale, pianotant sur les commandes holométriques. Pas de mot de passe, pas de blocage. J’accède rapidement aux programmes de la station, vu que les minutes qui défilent s’affichent presque instantanément.

« Effectivement, il va y avoir un feux d’artifice et une petite fête, c’est une alerte à la bombe. Visiblement il y a des engins explosifs qui ont été détectés. Charmant. Donc ce n’est pas désarmorçable d’ici, c’est indépendant à la station mais… on a une localisation. De votre côté ? des informations outre les habituels mouvements de vaisseaux ? »

Trente. Six. Minutes.

Karm Torr
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Moi qui espérais être la seule bombe à bord, lâcha Karm d’un ton distrait, alors qu’il était occupé à pianoter sur l’un des terminaux laissés à l’abandon, comme le reste de la station.


Il aurait préféré apprendre que la station état sur le point de s’autodétruire : ils auraient pu espérer inverser le processus depuis la salle de contrôle. Présentement, il avait accès au système de ventilation et pouvait reprogrammer les horaires d’activité des droïdes d’entretien de la coque extérieure, des pouvoirs dont l’application lui paraissait pour l’heure quelque peu limitée.


J’ai des…


Karm s’interrompit.


Trente. Cinq. Minutes.
Velvet…

D’un geste de la tête, Karm désigna le dôme vitré et l’espace au-delà. Une forme s’était dessinée au bord du transparacier, qui flottait dans le vide. Un corps. La station, qui accomplissait constamment sur elle-même de lentes révolutions, leur dévoilait une partie du secteur que sa masse métallique cachait juste là et, petit à petit, les deux explorateurs en découvrirent le sinistre spectacle. Les occupants étaient là, tous, morts dans le froid et l’asphyxie de l’espace, à flotter comme une foule de minuscules astéroïdes glacés.


La vache…, souffla Karm, que même son flegme légendaire ne parvenait pas à laisser de marbre devant ce tableau.
Trente. Minutes.


Le Jedi s’arracha de cette contemplation sinistre et reprit ses recherches dans le terminal.


Je… ouais, c’est ça, c’est des archives de surveillance.


Bientôt, l’holoprojecteur central de la salle de contrôle affichait des images de mauvaise qualité. Le son grésillait tant qu’on n’entendait rien de très clair et les angles morts étaient nombreux, mais on pouvait malgré tout distinguer une coursive marchande semblable à celle que Velvet et Karm avaient eux-mêmes traversée. Les gens y vaquaient à leur occupation et puis, soudainement, tout le monde se figea…


Vingt. Neuf. Minutes.


… et se mit à se diriger vers les sas de dépressurisation. À s’y enfermer. Puis à s’éjecter dans l’espace.


OK…


Pour Karm, cette réponse inattendue soulevait plus de questions qu’elle ne résolvait le mystère.


Bref. Les explosifs. Allons-y.
Vingt. Huit. Minutes.


L’heure n’était plus à s’essayer à d’astucieuses déductions sur les causes de ce suicide collectif. Armés de la localisation dénichée par Darth Velvet, les deux visiteurs partirent au pas de course, en direction du coeur de la station, là où la salle des moteurs abritait tous les dispositifs nécessaires à la vie de l’équipement : ceux qui assuraient la lente rotation, ceux qui alimentaient en énergie la ventilation, les générateurs de gravité et la salle des serveurs. Plus ils devaient s’escrimer à tailleur leur chemin au sabre laser dans des portes heureusement moins renforcées que celles d’une station militaire, plus Karm avait l’impression que les minutes défilaient vite.


Sept. Minutes, martela le système de sécurité de la station quand les deux enquêteurs déboulèrent dans la salle des machines.
Artisanal, observa philosophiquement Karm.


De fait, on n’était loin de la station flambant neuf, avec ses équipements d’origine bien agencés : les engins de l’Oasis avaient été remplacés pièce par pièce tant et tant de fois que la salle des machines ressemblait à une caverne d’Ali Baba, dont la ferraille aurait remplacé les trésors. Tout était bricolé, et probablement précaire, ajusté au petit bonheur la chance au fil des avaries.


Mais dans cette jungle de câbles et ce fatras de générateurs, la bombe, elle, n’était pas difficile à situer : elle était la seule à sembler tout droit sortie de l’usine.


C’est de l’explosif professionnel, ça, remarqua Karm, avant d’activer son comlink.


Difficile d’en tirer des conclusions : des militaires aguerris avaient pu placer la chose là, mais il était tout aussi possible qu’on l’ait dérobée à une entreprise de minage ou de construction.


Blip, tu m’entends ? J’ai euh… un engin explosif devant moi et pas tellement de temps pour y faire quelque chose. C’est euh…


L’Ark-Ni fit le tour de la caisse rectangulaire.


Une T-79, lut-il en examinant des gravures faites au micro-laser sur l’une des faces de la bombe, de chez G.E.M.
Six. Minutes.


Quelques secondes plus tard, le droïde téléchargeait les données trouvées dans les serveurs de l’Ordre à propos de la T-79 de chez Galidraan Équipements Miniers.


Utilisés par le génie civil et militaire impérial, bla bla bla… explosion contenue et localisée pour des travaux de précision… bla bla bla…


Karm faisait défiler à toute vitesse les dossiers transmis à son datapad par l’astromech, jusqu’à en arriver à la section de désamorçage.


Vous euh… j’dis pas ça pour être vexant, hein, mais il paraît que les explosifs ça vous connaît…


Comme le modèle était standard, les instructions étaient plutôt détaillées, mais Karm préférait mettre toutes les chances de son côté. Il s’empara du datapad avant de céder la place à Velvet. D’habitude, les terroristes faisaient exploser des choses plutôt qu’ils ne les empêchaient d’exploser, mais un peu de variété, ça pimentait l’existence, non ?


Alors, euh…, fit-il avant de se mettre à lire à haute voix : soulever délicatement le couvercle de dix centimètres en le prenant par les angles, sans toucher la partie centrale, puis sectionner les deux fils noirs qui le retiennent à la caisse, avant de l’ouvrir complètement. Retirer le bloc d’affichage en le soulevant sur un axe vertical, sans le faire pivoter, jusqu’à éprouver une résistance magnétique, puis passer la main sous le bloc, pour chercher le bouton à presser pour désactiver le champ magnétique. Retirer le bloc d’affichage, qui cessera de décompter le temps avant la détonation. Localiser les six tubes contenant le liquide explosif translucide, arrangés parallèlement les uns aux autres, au-dessus du bloc d’affichage, puis sectionner les fils qui les relient au dispositif, avant de les retirer.


Karm releva les yeux.


C’est assez simple, en fait.


Ce qui, en soi, n’était guère surprenant : il s’agissait d’un engin de chantier, non d’un explosif militaire, et par conséquent il n’était pas conçu pour résister au déminage. Et personne, en réalité, n’aurait dû être présent pour en empêcher la détonation, dans cette station désormais déserte d’un coin reculé de la galaxie.
Darth Velvet
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"Vous euh… j’dis pas ça pour être vexant, hein, mais il paraît que les explosifs ça vous connaît…"
 
« Comme quoi, il ne faut pas croire tout ce qu’on raconte. Je suis douée pour appuyer sur un détonateur, la différence avec un désamorçage est… de taille. »
 
Je n’ai pas l’expérience qu’il me prête, pas ce savoir qu’il m’octroie avec une générosité dérangeante. Il devrait pourtant savoir que les apparences se parent souvent de versatilité, de tromperie, qu’il ne faut boire à leurs eaux vives, que les yeux dessillés et la méfiance aux lèvres. Oui, un jedi, mieux que quiconque devrait le savoir, eux qui se drapent dans l’illusion d’une sérénité apparente, d’une chasteté émotive factice et d’un abord facile, alors qu’ils ne sont que faiblesses et lézardes emmurées, sensibilité châtrée et mensonges qu’ils se murmurent à eux-même. Mais qu’importe. Karm, sous ses yeux turquoise qui révèlent bien peu, ne connait de moi que les frémissements de couloirs et les avis de recherche. Peut-être, aussi, quelques secrets révélés dans l’alcôve de Luke, mais ces souvenirs sanglants, je doute qu’ils me dépeignent plus fidèlement.
 
Je glisse en place du jeune homme, devenant le prolongement de son bras, sa main, son exécutrice. Les instructions fusent, devenant les liens qui régissent le moindre de mes mouvements, et ses mots, tels les ensecrets du marionnettiste, courent sur les fils jusqu’à mes doigts. J’obéis consciencieusement, méticuleusement, au travers des consignes qu’il déverse dans le silence percé du ronronnement de la ventilation. Mes gestes coulent, sans heurt, avec précision. Je soulève, je pivote, j’éprouve, muselant la trame de mes pensées pour me focaliser sur mes actions et sa voix. Toujours. Oh, je n’oublie rien des horreurs dévoilées dans le poste de commandement, des corps dérivant dans leur linceul de ténèbres sous une nuit perpétuelle, des vidéos aux silhouettes confiantes marchant vers leur mort. Simplement je les relègue, je les jugule dans le secret de mon âme, pour plus tard, pour cet intervalle où il sera temps de trouver les responsables de ce charnier. Un instant proche.
 
Mon couteau sectionne avec une douceur contrastée, les fils. La charge est désamorcée. L’explosion programmée et annoncée, une réalisation avortée.
 
« Effectivement. »
 
Mon arme rejoint son fourreau, et je me tourne vers le jedi.
 
« Un engin explosif, donc cette situation n’est pas le fruit d’un hasard douteux, mais l’œuvre de quelqu’un. »
 
Une machination machiavélique. Comment peut-on en venir à annihiler toute une station par suicide, pour quels motifs ? J’aurais pu être, à quelques heures près, l’une de ses victimes s’offrant volontairement à la faux de la Mort, être l’un de ces corps, suspendue éternellement dans le vide jusqu’à ce qu’un soleil, une planète, un corps céleste ne me dévore.
 
« L’explosion aurait disséminé tous les cadavres alentours au loin, et détruit toute preuve. Ce qui m’inquiète c’est la méthode dont ils ont usé pour éliminer toute la population de la station… et sans récupérer quoi que ce soit, visiblement. Les docks sont pleins, rien à signaler sur les enregistrements. Les motivations ne sont pas de l’ordre du vol, mon intuition me dit que c’est plus complexe que ça. Cette station n’est pas riche, mais il y a de nombreuses marchandises et vaisseaux tout à fait lucratifs en cas de revente, je suis sûre qu’on peut exclure l’appât du gain comme mobile. »
 
Je me tends, mes lèvres se pincent, mon regard se fusèle avant d’épingler Karm, et de continuer le cheminement de mon résonnement.
 
« Qu’est-ce qui peut pousser des gens, à tous se synchroniser pour aller se suicider. Pas une menace physique, les vidéos sont assez claires. A mon sens il ne reste que deux possibilités : la suggestion par hallucinogène, drogue psychotrope. Ou une technologie nouvelle basée sur l’hypnose ? La deuxième me parait excessivement douteuse. Mais la drogue…. La seule chose qui fonctionnait encore lorsque nous sommes arrivés, c’était la ventilation. Je dirais même qu’on entendait plus qu’elle, comme si elle avait été forcée à la vitesse maximum. Et s’ils avaient introduit un gaz dans le système ? Tout le monde aurait été exposé, ce qui pourrait expliquer ce volontariat pour se faire expulser dans le vide…. Qu’en pensez vous? Ce n’est qu’une hypothèse, mais je pense qu’elle doit être vérifiée. »
 
Et au loin, le mobile se dessine sur mon horizon. Et si, tout ceci n’était qu’un essai clinique, un test pour éprouver une formule chimique ? Après tout, si une station disparait dans l’espace hutt, une station non soumise à un Kajidic, qui ira s’en soucier ? L’idée est tordue… oui… mais GEM est une entreprise de l’Empire, et ne dit-on pas que les impériaux sont retords…
Karm Torr
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Clairement, quelqu’un a fait sa petite expérimentation ici. Genre test grandeur nature.

C’était la seule explication convaincante, puisqu’on préférait détruire des cargaisons précieuses plutôt que de laisser des traces et que la bombe avait été installée là pour nettoyer plutôt que pour terroriser.

Le gaz a dû se diluer rapidement, poursuivit l’Ark-Ni, en laissant glisser les bretelles de son sac à dos sur ses bras pour le faire passer devant lui, parce qu’apparemment, ni vous ni moi éprouvons une folle envie d’aller nous refroidir d’un coup. Du coup… C’est probablement plutôt une arme d’invasion que d’extermination. Et on doit être au degré final des tests, parce que sinon… Ah, voilà.

Le Jedi tira une sorte de grosse brique de son sac à dos, avant de le renfiler correctement. Elle paraissait être composée elle-même d’une infinité de cubes minuscules. Karm effleura la tranche de l’appareil et les cubes commencèrent à se réagencer, jusqu’à prendre l’aspect d’une sorte d’étoiles à cinq branches, qui n’était pas sans rappeler un drone plus ordinaire. La machine finit par s’élever des mains du Chevalier, pour flotter tout autour d’eux.

Un cadeau de Luke, expliqua Karm, spontanément, naïvement — très naïvement, même.

Il n’avait pas pensé à ce que cette simple information révélait. Quels Jedis se faisaient des cadeaux les uns aux autres ? Et après tout ce temps, il fréquentait encore Luke ? Quand il prit conscience de la porte que cette information glissée en passant ouvrait sur la réalité de sa relation avec le Consulaire, Karm, en catastrophique comédien qu’il était, eut l’air aussi embarrassé que s’il venait d’écraser le tooka de son interlocutrice.

C’est, euh… c’t’une sonde d’exploration, Fugueur que je l’ai appelé, il va prendre des échantillons, pour voir si on peut repérer quelque chose. J’en doute, mais on sait jamais.

L’appareil, doué d’une intelligence artificielle rudimentaire qui suffisait à ses fonctions, les précéda alors qu’ils quittaient la salle des machines, pour rejoindre les ponts supérieurs de la station.

Les armes chimiques, ce s’rait pas une nouveauté pour l’Empire, reprit le Jedi.

Il y avait eu au sein des Sentinelles Jedi des rumeurs persistantes sur les laboratoires secrets de Darth Noctis et les gaz psychotropes qu’on y développait. Aux dernières nouvelles, les recherches avaient été abandonnés quand le Seigneur Sith s’était plus ou moins retiré de la vie impériale, mais on pouvait imaginer sans peine qu’ailleurs, d’autres avaient repris le flambeau.

J’imagine que y aura quand même eu une suggestion explicite. J’veux dire, les gens ont tous été affectés pile au même moment, et pour faire exactement la même chose, ça a pas été un délire désordonné ou qu…

Son comlink l’interrompit en sonnant sur la tonalité d’alerte, alors qu’ils étaient en train de gravir les escaliers.

Blip ?

Le Jedi se tourna vers Velvet.

Un vaisseau est sorti de l’hyperespace peut avant l’explosion et s’est tenu à bonne distance. De toute évidence, des gens qui savaient qu’il valait mieux ne pas trop s’approcher. Quand tu dis vaisseau, Blip, on parle d’un destroyer ou d’un chasseur biplace ?





Hm.

Petite corvette
, fit-il à l’attention de sa coéqupière du jour. Genre pour vingt, trente personnes.



Hm hm.

Et les signaux de… ?

OK. Surveille ça, on arrive.


Karm coupa la communication et acheva son petit rapport :

Modèle pas discriminant, utilisé aussi bien par les planètes indépendantes, la République ou l’Empire, un truc d’il y a quarante ans des chantiers navals de Kuat.

L’Empire était si récent, au fond, qu’en dehors de ses fleurons militaires, sa flotte de tous les jours ne différait pas fondamentalement de ce que l’on trouvait ailleurs dans la Galaxie.

Pas de signaux, pas de codes d’identification. Des gens qui veulent pas se faire repérer. J’imagine qu’ils voulaient s’assurer que tout était bien réglé. Éventuellement récupérer des données par télécom’ avant l’explosion.

En parlant, ils avaient repris pieds dans l’un des grands halls centraux de la station, dont le puits central, entouré par les coursives circulaires des étages marchands ou d’habitations, montait et descendait de chaque côté sur une dizaine de ponts. Fugueur prit de l’altitude progressivement, pour collecter des échantillons gazeux à différentes hauteurs.

J’imagine qu’il y a… Trois possibilités. Ou ils partent sans se poser de question, en supposant que la bombe a dysfonctionné mais que ça vaut pas le coup de prendre des risques supplémentaires. Ça paraît… Quand même peu probable. Ou ils tentent de faire exploser la station depuis l’extérieur, auquel cas ils partent et ils reviennent avec des renforts, en créant le risque de provoquer une crise diplomatique à cause de l’apparition inopinée d’une flotte. C’est… Pas impossible, si ce sont pas des Impériaux. Des gens qu’en ont rien à carrer du traité de paix…

Des Hutts, par exemple, qui n’étaient probablement pas ravis que la paix relative entre les deux superpuissances galactiques invitent celles-ci à se pencher sur leurs affaires.

Ou, et j’imagine que c’est le plus probable, ils se ramènent, pour voir ce qui s’est passé, posé une nouvelle bombe, éliminer éventuellement des témoins gênants.

Fugueur finit par revenir à leur niveau et Karm tira son datapad pour récupérer les données de la sonde. Après quelques secondes, les résultats étaient formels : pas de traces de psychotropes dans l’atmosphère de la station, mais une composition légèrement différente à ce qu’on aurait pu attendre. Le gaz utilisé par leurs mystérieux expérimentateurs s’était probablement décomposé pour passer relativement inaperçu.
Darth Velvet
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« Un cadeau de Luke … »

Luke. Karm. Je relève la tendresse sous les explications du jedi, devine l’attachement profond liant les deux chevaliers. La commissure de mes lèvres s’étirent lentement. Je n’ai jamais douter qu’il existait entre eux à défaut d’une amitié, au moins une réelle complicité, et la façon dont le premier m’avait présenté le second lors de notre dernière rencontre. A présent il me semble devoir réajuster mon jugement. Mon sourire persiste aux notes de sa gêne, et à cette légère hésitation. Une habitude, certainement, lorsqu’on sait combien de maitres du Temple proscrivent les relations humaines entre jedis, comme s’ils n’étaient que des droîdes dénués d’émotions. Mais comment ne pas s’attacher à ses camarades, aux personnes que l’on fréquente depuis notre plus tendre enfance et qui parfois revêtent le visage d’un frère ou d’une sœur de cœur. Comment endiguer, museler ce qui fait de nous davantage que des animaux ou des robots. La camaraderie, l’amitié, l’amour sont, à écouter ces vieux sages fous, des notions à connaitre mais à ne jamais expérimenter de crainte que l’obscurité ne se frayent par leur biais un chemin jusqu’à nos âmes. Mais cette vision n’est qu’hypocrisie et mensonges que l’on se raconte pour se rassurer de la peur du noir. Nul ne peut juguler complétement ce qu’il est, ce qui fait de lui un être doué d’intelligence et de raison, il demeure toujours une étincelle, quelque part, enfermée sous sa geôle de bigotisme. Et n’est-il pas plus dangereux de la nier plutôt que d’embrasser son existence en connaissance des faiblesses qu’elle ouvre en nous et des forces qu’elles distillent ?

« Comment va-t-il ? »

Le petit Fugueur se déploie, notre conversation s’étend pour s’interrompre rapidement nos esprits accaparés par le silence mortelle de la station uniquement brisé du le ronflement des aérations, et du pas cadencé de nos bottes.

« Je suis d’accord, il y a eu une suggestion. A vrai dire, le plus simple c’est d’utiliser les hauts-parleurs de la station, ce qui implique necessairement une complicité dans le commandement de la station, vu qu’on n’a trouver nulle part trace d’une quelconque résistance… »

Un traitre. Un félon sans foi ni loi, apte à inciter dans l’amorce d’un remord, au suicide. Des mères avec leurs enfants, des hommes honnêtes, d’autres moins, des chasseurs de prime, des hors la loi, des trafiquants et des marchands, des mercenaires, contrebandiers, artisans ou juste voyageurs en itinérance. Tout ceci pour en retirer quels bénéfices ? La gloire ? L’argent ? les deux peut-être…Mais l’émergence de ce vaisseau dans l’espace proche sonne comme un tout autre avenir pour celui là, et ses complices ou maitres. Si l’occasion se présente, elle se doit d’être saisie, pour comprendre les tenants et les aboutissants, les objectifs réels des instigateurs de ce massacre, et connaitre cette nouvelle arme si efficace qu’elle a annihilée toute une population en quelques minutes.

« Modèle pas discriminant, utilisé aussi bien par les planètes indépendantes, la République ou l’Empire, un truc d’il y a quarante ans des chantiers navals de Kuat. »

« Je ne suis pas étonnée, Ils ne veulent pas que l’on puisse remonter leurs pistes. Malheureusement pour eux, nous sommes là. Je ne pense pas qu’ils viennent pour faire exploser la bombe, elle était sur minuterie, s’ils avaient l’intention de la déclencher à distance, ce dispositif aurait été inutile. Je suis de ton avis, ils vont plutôt, plus probablement venir voir pourquoi elle n’a pas explosée comme elle l’aurait du. Donc… »

Notre chance…. Notre espoir de dévoiler les commanditaires de ce chaos.

« … ils vont venir ici. Armés, prudents, et sur leur garde. Si, comme je le pense, il y a eu un homme à eux sur la station pour tout déclencher, il risque de bien connaitre le terrain et de les guider. Ca nous laisse, le temps qu’ils débarquent aux docks, 5 à 10 minutes pour réfléchir à ce que nous faisons et à la façon de le faire. »

L’avantage du nombre et la connaissance du terrain ne parlent pas en notre faveur, cependant, avec l’effet de surprise et l’occupation en premier des lieux, nous devrions à, si ce n’est renverser les statistiques en notre faveur, au moins les égaliser.

« Je suppose qu’ils vont se rendre là où se trouve les explosifs et peut être, s’ils sont paranoïaques, comme tu le dis, vérifier qu’il a pas eu d’intrusion sur la station depuis la passerelle de commandement. Deux destinations possibles, et nous ne sommes que deux. Je suis d’avis que nous restions ensemble pour plus de sécurité et d’efficacité. Tendons leur un huet-apens sur la passerelle de maintenance qui mène à la salle des machines…. »

J’observe le jeune jedi. Il est intelligent, et nous nous accordons assez facilement sur nos déductions, cependant, si je ne doute pas un instant qu’il sache manier le sabre avec dextérité, je me demande s’il aura le cœur à le rendre mortel. En sera-t-il capable ? Ou son cœur recèle-t-il la même douceur naive que celle de Luke, cette même compassion vaine et cette infinie bonté qui ne peut exister à l’épicentre d’un conflit ? Eux n’ont nulle pitié, et, en mon sein, en écho à la sauvagerie cruelle de leur acte, je ne saurais trouver aucune excuse, aucun motif à retenir mon bras vengeur jusqu’à ce que leurs cris s’éteignent dans le silence ouaté de la station qu’ils ont vidée de son âme.

« Luke t-a-t-il expliqué comment nous nous sommes rencontrés, et… ce qu’il s’est passé dans le laboratoire d’Hapès ? Il faut que tu comprennes une chose, Karm. Je ne suis pas une jedi. Tuer ne me pose aucun problème, et d’autant moins qu’ils sont responsables de toutes ces morts. Je veux savoir pourquoi, pour qui et quand mes questions auront obtenu réponses, je veux qu’il n’en reste plus un seul en vie. Je dois savoir si tu es capable d’être à mes côtés, ou si tu en es incapable. Je veux savoir si tu seras un allié, un observateur ou un ennemi quand la mort commencera sa danse… »

L’implacabilité de mon regard le transperce. J’espère que le souvenir des silhouettes courant béatement à la mort lui rappellera que parfois, les compromis ne sont qu’illusions et les choix moraux restreints.


Karm Torr
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Luke va bien, répondit prudemment Karm, bien conscient que c’était un sujet sur lequel il n’était pas censé se laisser entraîner. Beaucoup de travail, et de plus en plus de missions sur le terrain. Ça devient un consulaire sacrément aventureux, à vrai dire.


Le flegme de l’Ark-Ni ne suffit pas entièrement à dissimuler la tendresse dans sa voix, mais au moins Karm parvint à ne pas avoir des étoiles pleins les yeux. Plus les années passaient, plus il lui semblait que les difficultés qu’il éprouvait à jouer de faux-semblants à propos de sa relation avec Luke devenaient considérables. Leur relation était désormais si étroitement mêlée à tous les aspects de son existence qu’il avait l’impression de constamment devoir avancer masqué, à force de la cacher.


Heureusement, l’irruption d’un vaisseau probablement plein à craquer de sanguinaires psychopathes offrit une heureuse diversion. D’un hochement de tête, le Jedi approuva la proposition de Darth Velvet et ils tournèrent les talons pour regagner la salle des machines qu’ils venaient de quitter. Fugueur, lui, fut laissé en embuscade, pour capter la progression des nouveaux venus. Si d’aventure ils s’orientaient finalement vers la salle de commandement, il serait temps d’aviser.


Ils sont en approche, murmura Karm, toujours connecté à son droïde à travers son comlink, dans les escaliers que Velvet et lui dévalaient. Ils vont dans un hangar à l’opposée de celui où j’ai mis mon vaisseau, mon droïde a du mal à capter le nombre de signes de vie, à cause de la station qu’est entre eux.


Mais l’étroitesse des coursives dans les ponts techniques compenserait de toute façon pour une bonne part l’avantage du nombre : leurs adversaires ne pourraient pas s’engager comme un seul homme, tous en groupe, et les submerger.


Quand Velvet et lui eurent pris leur poste, Karm se mit à examiner soigneusement leur environnement. Se battre au sabre laser dans un local réduit n’était pas une mince affaire, et dans l’espace, on avait vite fait d’endommager un système critique dont le dysfonctionnement pouvait avoir des conséquences désastreuses.


Mais son attention fut bien vite détournée par les propos de Velvet.


J’compte assassiner personne, si c’est ça ta question, répondit-il calmement. J’ai pas spécialement juridiction ici, on est en plein espace indépendant…


Techniquement, personne n’avait juridiction sur Oasis, qui flottait, et c’était exprès, entre des systèmes déserts, pour échapper aux forces de l’ordre de la République comme des mondes indépendants.


… mais au-delà du fait que moralement, je sois pas fan de l’assassinat par vengeance, si j’peux choper un impérial bien vivant et le ramener sur Ossus devant l’AGPU pour prouver qu’on est en train de fomenter des crimes de guerre à partir d’armes prohibées en même temps qu’on négocie la paix, je vais pas me priver.


Pour Karm, le meurtre était presque toujours un pis-aller à la fois moral et stratégique : un adversaire capturé vivant avait à ses yeux une valeur infiniment plus importante qu’un ennemi définitivement éliminé. C’était une source d’informations, une monnaie d’échange et, parfois, comme dans ce cas précis, une preuve.


J’dis pas ça contre toi, hein. Chacun sa manière de faire, j’vais pas te juger sur tes méthodes, et de toute façon, j’imagine que t’en aurais rien à carrer, ce qui serait bien compréhensible. C’est simplement que je vois l’intérêt de la République dans l’histoire. C’est mon boulot, quoi. Luke m’a pas dit grand-chose sur votre passif et sur…


Karm s’interrompit brusquement. Velvet avait dû la ressentir elle aussi : une présence soudaine dans la Force, dont la puissance était assez considérable pour qu’ils l’éprouvent sans la chercher, à une dizaine de ponts de distance. Le vaisseau inconnu venait de s’arrimer à l’un des hangars et il avait débarqué ses passagers. Un frisson parcourut l’échine de l’Ark-Ni.


J’sais pas qui c’est, murmura-t-il, mais c’est clairement pas n’importe quel Sith…


Voilà qui changeait considérablement la donne. Karm avait espéré un moment n’avoir affaire qu’à des militaires impériaux. Ils leur auraient déjà donné bien de la peine. Mais la présence d’un Sith puissant à bord de la navette ennemie impliquait probablement aussi un Apprenti, peut-être d’autres acolytes. L’affrontement prenait une dimension nouvelle et plus inquiétante.


OK, j’propose qu’on règle nos problèmes de casuistique à un autre moment, y a une question plus urgente, là.


Karm fit un geste de la main pour désigner le plafond et, par extension, les ponts au-dessus d’eux et les Siths qui l’arpentaient.


Dissimuler ma présence dans la Force et tout ça, honnêtement, j’sais pas faire. J’imagine que puisqu’ils cherchent quelque chose, ils ont tous leurs sens en alerte. Ils vont pas tarder à me repérer et ça va considérablement ruiner notre effet de surprise. Si toi t’es capable de dissimuler ton empreinte dans la Force, je propose qu’on conserve cet avantage en te laissant pas à côté de moi avant que tu aies pu en profiter.


Selon toute probabilité, le Sith en charge de l’expédition se rendrait à la salle de commandement et enverrait ses sous-fifres s’informer sur le statut de la bombe : Velvet et Karm pourraient donc profiter d’un peu de répit avant d’affronter leur adversaire le plus puissant.


[color=#00ccff]J’propose d’attirer une partie d’entre eux sur le pont juste au-dessus. Soit ils viennent tous dans ma direction et tu peux monter les prendre à revers, soit une partie d’entre eux viendra quand même voir où en est la bombe, et ça te fera moins d’adversaire. Et moi, euh… Ben j’vais me débrouiller, quoi.[/color)


Un beau programme en perspective.
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