Travis Torn
Travis Torn
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[HRP : Ces évènements sont en succession direct à l'évent XII, et font chronologiquement suite à [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien].]

An 3481 av BY. Espace Hutt, en orbite autour de Boz Pity, (Secteur Halla) dans la Bordure Médiane.

La corvette trafiquée s’extirpa du voyage subluminique dans une nuée de diaprures stroboscopiques.
Ses hyperdrive détonants au travers d’un hurlement silencieux qui s’égara, loin, dans les profondeurs enténébrées du vide spatial.
De par le transparacier qui détourait la verrière du poste de pilotage, Bendal Tusk, l’officier en chef, observa un bref instant les reliefs scabreux de Boz Pity avant de reporter son attention sur son escouade. Ou plutôt ce qui subsistait de son escouade. Un groupe de neuf hommes, la plupart issus des forces spéciales et dont la mission s’était, jusqu’à maintenant, déroulée dans une succession d’ébarbures insoupçonnées qui les avaient conduit au bord de la catastrophe.
*Pourtant, les instructions étaient claires au départ…*, songea l’impérial, tandis qu’un étaux d’un froid stellaire semblait poindre, juste sous son sternum, pour lui comprimer lentement la poitrine. *…limpides même.* A priori, il s’agissait d’une banale mission de routine ; plusieurs agents devaient être exfiltrés sur Pakuuni, là où sa section était stationnée.
Un contrebandier avait été engagé pour leur servir d’intermédiaire -quoiqu’homme de paille semblait plus qualifiable. L’officier prévoyant de se débarrasser de lui à l’épilogue de leur collaboration.-, et le convoi disparaitrait au terme d’un circuit subjacent qui les conduirait successivement sur Raxus, puis Elom, planète impériale.
Mais c’était sans compter sur les évènements récents qui avaient une nouvelle fois ébranlé la Galaxie. -et Bendal savait qu’ils étaient légions depuis l’éclosion de cette guerre.- Les médiats avaient relayé en direct les offensives éclairs, sur Dathomir, puis Dubrillion, non sans peaufiner leurs discours par une bonne dose de propagande, lustrée dans cette dramatis personae si inhérente à ce que réclamaient des trilliards d’individus enchainés à l’Holonet.

La routine, donc. Rien d’alarmant…
… excepté lorsqu’une flotte républicaine avait déferlé par vagues séquentielles, à quelque kilomètres au-dessus du puit gravifique de Pakuuni, parce que quelqu’un avait balancé sur l’existence d’un réseau de contrebande interplanétaire qui s’y développait. Et prospérait même.
Et ça, en revanche, c’était particulièrement alarmant.
À l’expérience, il savait que ce genre de petite bombe à retardement se soldait presque toujours par une conclusion en chausse-trappe.

Au fil des heures, la situation s’était envenimée jusqu’à virer carrément à l’émeute lorsque l’armée avait fait feu sur les civils qui tentaient de fuir le blocus. Et Bendal avait perdu le contact avec l’équipe à exfiltrer.
Il avait donc du finir à la main.

Son escouade s’était enfoncée dans les profondeurs du hangar, se frayant le plus souvent un chemin à coup de blaster, qu’aux moyens de bravades purement et inutilement diplomatiques, vu les circonstances.
Ils avaient finalement réussit à investir le point de chute…
…et l’endroit était un véritable charnier.
Du contrebandier n’y avait subsisté nulle traces, mais la zone semblait avoir subi les affres d’une de ces tempêtes à vents ultraviolents qui sévissaient au-dessus des gouffres-cités d’Utapau. L’espace était jonché de cadavres ; certains si affreusement mutilés qu’ils étaient devenus presque impossible à identifier. D’autres exhibant un foisonnement de plaies cautérisées qui ne ressemblaient en rien aux sévices d’une arme à calibre standard.
Deux survivants avaient pu être évacués, et Bendal avait mis la main sur les restes fondus de ce qui évoquait vaguement la poignée d’un sabre laser.
Les choses s’éclaircissaient.
Le premier, pratiquement nu et inconscient, avait été amputé juste au-dessus du poignet -quoiqu’épluché eusse été un terme plus péjoratif, à en juger l’état de la plaie- et arborait plusieurs brûlures dont une sérieuses sur ce qui subsistait de son bras droit. Le membre fumait encore là où la chaire avait été complètement calcinée, par endroits.
L’autre n’avait pas tenu longtemps, et dans son agonie, alors que la corvette forçait le barrage à travers un jaillissement de tirs entrecroisés, il avait eu le temps de désigner l’homme inconscient en régurgitant un mot…
« Jedi. »
*Intéressant. Et fâcheux à la fois.*
Le regard de l’impérial coula sur les commandes du tableau de navigation.
L’appareil avait effectué plusieurs trajets en vitesse lumière après avoir échappé au blocus. Le dernier en lice les ayant expédié en orbite autour de Boz Pity ; planète primitive, perdue dans les limbes de l’espace Hutt.
Il ne leur restait plus qu’un seul saut à effectuer pour Raxus Prime, mais avant cela…

« Diagnostique sur l’état du prisonnier ? », questionnât ’il, sans détacher les yeux de la console.
« Stable, monsieur. », lui répondit le timbre procédurier du sapeur médical, alors qu’un holovid affichait les reliefs d’une cellule pressurisée, juste devant la verrière centrale. Un jeune homme, engoncé dans une tenue de travail mal ajustée, y était assis en tailleur, les yeux clos. Son bras droit avait été pansé dans une attèle de fortune. Il devait souffrir le martyre, mais nulles émotions ne semblaient dénaturer l’inflexibilité peinte sur ses traits fins.
*Encore un truc de Jedi...*, songea Bendal, alors que ses doigts gantés vinrent affectueusement caresser la matraque télescopique qui décorait son ceinturon.*…nous allons voir pour combien de temps tu parviendras à exhiber cette gueule d’ange, mon mignon.*
« Parfait. Allez me le préparer pour l’interrogatoire. »


***

La brusque décélération se répercuta en onde de choc dans la Force, avertissant Travis de l’émergence du vaisseau sur les esquisses d’une nouvelle euphonie. D’emblée il ressenti les variations, lointaines et disparates, du monde inconnu qui suintaient à travers les strates de son atmosphère pour venir cogner contre son esprit comme une immense pulsation.
Il ouvrit lentement les paupières, et mit un certain temps à s’habituer à l’éclairage artificiel de la cellule de confinement. Son regard coula sur les dalles froides de plastacier, puis remonta jusqu’aux esquisses de son reflet qui ondulait par vagues effluentes à travers le champs de force scellant l’entrée de la pièce. Il mit un certain temps à se reconnaître derrière le teint cadavérique et les mèches aile de corbeau, rendues collantes par la transpiration. Ses yeux bleus froids étaient profondément enfoncés et lui renvoyaient un regard douloureux sous les cernes violacées qui marbraient sa peau, juste avant la saillance de ses pommettes. Il tenta avec adagio de se dépouiller de l’état semi-méditatif dans lequel il s’était immergé à son réveille, mais à peine eut-t ’il relâché son attention qu’une douleur atroce lui dévora le bras ; lui donnant l’impression qu’il venait de le plonger dans un bain de duracier liquide. Son faciès se crispa fortement, et il dû faire un effort de concentration inouï pour rassembler ses perceptions. Il s’ouvrit à la Force. S’ouvrir ? Non, il l’attrapa, comme il avait pris l’habitude de le faire depuis quelque années. La méthode était beaucoup plus rapide, efficace, et résolument immédiate.
Il s’accorda sur les flux et reflux qui saturaient l’atmosphère artificielle de la petite pièce, et les aspira en lui, s’en parant comme d’un manteau invisible. Presque aussitôt, il senti l’énergie l’imprégner ; chassant graduellement la fatigue, et réduisant la souffrance à de froides décharges lancinantes qui vibraient sous la chaire de son bras jusqu’à son moignon comme une multitude d’aiguilles électriques.
Au temple, on lui avait naguère enseigné que la Force n’était qu’harmonie et équilibre. Et il y avait cru. Pendant longtemps, Travis Torn s’était accroché à cette vérité avec toute la force de conviction propre à sa nature implacable -et peut-être un tantinet opiniâtre ?- Mais les contingences qui avaient jalonnées sa vie depuis le début de cette guerre, couplées à ce qu’il avait vu à travers les horreurs qu'elle engrangeait, lui avaient fait sérieusement revoir cette philosophie.
L’espace d’un instant, les images récentes de Pakuuni refluèrent dans ses souvenirs lorsque la Garde, pourtant tributaire des valeurs républicaines, avait tiré sur les civils paniqués. Il avait vu une femme nautolan et son alevin se faire littéralement pulvériser par les rafales d’un DLT-19. Plus loin, un vieillard avait chuté durant la bousculade. Un officier s’était avancé et l’avait abattu d’une décharge dans la nuque.
La poignée de son sabre à la main, Travis se frayait déjà un chemin vers le peloton, mais Karm l’avait stoppé dans son élan, l’obligeant à suivre la foule.

Son regard se fit plus acéré tandis qu’il refoulait sa peine et sa colère, les réduisant à quelque chose de froid et sous-terrain ; parfaitement sous contrôle dans l’abime de son subconscient.
Harmonie ?
Inepties…
…la Force était un conflit permanent.

Il inspira, longuement… et reporta ses perceptions sur l’instant présent.
Par-delà la pièce, derrière le rayon capteur, le couloir était lambrissé de transparacier, et offrait une vue imprenable sur la planète inconnue qui se profilait, en contrebas. Sur la droite, il repéra un sas d’ouverture donnant accès à un module de sauvetage, à côté d’une multitude de pièces détachées laissées en vracs dans un coin.
Le corridor, quand à lui, s’allongeait sur une dizaine de mètres.
*Bien.*, songea Travis Torn alors que les ébauches d’un plan germait lentement dans son esprit.
Il ferma les yeux et laissa la Force poursuivre son travail de réviviscence.

Moins de dix minutes plus tard, la porte coulissa au fond du conduit, et deux hommes s’extirpèrent du centre de commande. D’emblée, le jeune homme pu ressentir leur agressivité, associée à une sorte de plaisir anticipé, presque animal, comme celui d’un charognard qui patientait avant la curée.
Le champs de force se désactiva.
« C’est qu’il a l’air réveillé. », lança un soldat en le toisant de haut-en-bas. -Le ton était ouvertement narquois.- « L’officier supérieur penses que tu as des choses à nous dire. Cependant… », il fit craquer ses jointures. « …j’espère que tu prendras un certain temps avant de te mettre à table. », les yeux bleus coulèrent sur l’impérial, le détaillant dans une sorte de calme insolent. « Tu as perdu ta langue, Jedi ? », Silence. « T’inquiète pas. », poursuivit l’homme en le relevant sans ménagement. « Tu vas très vite la retrouver. »
Travis grimaça lorsque son comparse le tira par son attèle jusque dans le couloir.
« Tu sais encaisser ? »
La pointe d’un blaster le poussa en avant. Un pas.
« Moi je veux voir si tu sais encaisser. »
Un deuxième.
« Après quoi, ce sera le terminus pour toi. »
Le regard du Jedi se concentra sur quelque chose devant lui, puis graduellement, il s’arrêta.
« J’en doute fort, hélas. »
La diction avait été parfaitement calme. Presque un tantinet condescendante.
Il y eut un moment de flottement, et durant une milliseconde, le temps se figea.
« Oh ? Tu as retrouvé ta lan… », le coude valide de Travis Torn lui percuta violement la mâchoire, mettant fin à sa débauche de simagrées. Dans une démonstration fulgurante de flexibilité acrobatique, le jeune homme effectua une glissade latérale sur le corps en train de s’affaisser, s’en servant comme tremplin pour projeter ses jambes en avant, et faucha le deuxième homme dans un double fouetté horizontale.
À peine eut-t 'il touché le sol qu’il tendit la main vers la masse de pièces détachées. Les objets vibrèrent un instant puis s’envolèrent comme des shrapnels vers le soldat en train de se relever.
Une nouvelle vague de souffrance excoria sa blessure, lui arrachant un râle. Le Jedi se ramassa en avant, et eut tout juste le temps de tituber vers le sas de la capsule lorsque la porte de la salle des commandes s’ouvrit brusquement, au bout du corridor.
Des tirs ricochèrent contre l’embrasure de la trappe lorsque Travis se servit de la Force pour broyer la commande d’ouverture, condamnant l’issu et provoquant in peto l’éjection du module qui creva l’atmosphère de Boz Pity dans un jaillissement d’étincelles embrasées.

***

À plusieurs kilomètres, très loin en-contrebas. Une alarme s’activa dans l’un des postes de contrôles furtifs du Refuge.
Puis une deuxième.
L’espace d’un instant, il ne se passa rien. Jusqu’à ce qu’une trainée rougeoyante finisse par se distinguer entre les nuages.
Derrière la comète, un objet métallique fonçait à une vitesse bien supérieure à celle du son, crachant plusieurs résilles de traînées étincelantes, fines comme des cheveux, qui vinrent parfois frôler la tête de la capsule en chute libre.
Il y eut un long silence…
Et un BANG géant raisonna dans toute la vallée quand l’appareille percuta la surface d’un champs de Bota.
Darth Velvet
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Il n’y a rien de plus magnifique que cette aurore, lorsque la nuit s’étire paresseuse, presque blême et crayeuse sous la lumière lactescente du petit matin, lorsque le soleil embrasse et embrase les nuages de rose, de pourpre et d’orangé sur l’horizon crénelé. Le vent effleure délicatement les herbes hautes, et le froissement de cet océan émeraude me caresse, m’emplit, me submerge comme une vague de quiétude frémissante. Mais est-ce réellement cette heure qui me semble si belle, et cet instant si serein malgré les premiers piaillements des oiseaux et le crissement des insectes encore ensommeillés… ou est-ce simplement le plaisir d’être encore vivante, encore libre, indemne au sein de mon Refuge, la conscience allégée sinon d’avoir remporté une victoire, de savoir chacun des miens saufs malgré le désastre de Pakuuni?

Les souvenirs de cette débâcle m’assaillent, réminiscences imprimées avec horreur sur ma rétine, résurgence d’un fiasco dont la République est la seule responsable. Et les jedis… maudits soient-ils ces parangons prompts à distiller leurs enseignements pacifistes mais incapables de retenir, de museler la soif d’ambition de cette vice-chancelière diligente à ensemencer la mort comme l’on sème les champs. Comment peut-on s’ériger en Gardienne des valeurs républicaines, en Protectrice des populations et décimer les siens d’une main gélifaire tachée de sang, implacable, sans qu’aucune émotion n’affleurent ses yeux et son cœur. Probablement parce qu’en lieu et place, sous sa chair putrifié par l’avidité, il n’existe rien d’autre qu’un trou béant… un gouffre… Elle me rappelle indéniablement tout ce que je hais dans les castes gouvernantes, cette Lana Anthana, meurtrière des siens qui jamais ne payera l’acompte de ses crimes.

Je me redresse vivement, chassant les fleurs qui frôlent mon visage, d’une main lascive et calme, d’un calme si éloigné de mes pensées soudainement agacées par la tournure de mes réflexions. Le soleil entame avec une nonchalance amusée sa course vers le firmament, et déjà, Refuge s’agite en contre-bas de la falaise où je me suis perdue pour admirer la naissance de cette journée. Un sourire s’égare sur la courbe d’une lèvre tandis que je demeure encore, quelques instants, immobile. Profil séculaire offert à la douce tiédeur des rayons matinaux. Je n’ai pas envie de bouger, pas encore, pourtant un bip discret retentit à mon poignet, et mon bracelet de communication s’illumine, coupant définitivement les ultimes brumes de mes rêveries paresseuses.

« E.V.A. ? »

« Nos capteurs viennent de détecter une intrusion dans le secteur de notre système solaire. »

« Qui ? »

« Difficile à dire. D’après les données que nous recevons c’est une corvette de modèle CR70 ou CR60. Mon pronostique : il y a 80% de probabilité qu’ils s’agissent d’indépendants. Possiblement des trafiquants ou des contrebandiers. Tout semble indiquer que la navette est actuellement en état stationnaire. Quels sont vos ordres ? »

« Surveille-les, et préviens-moi immédiatement s’ils bougent. »

« Bien Velvet. Terminé. »

Mes yeux se lèvent sur le ciel, d’ultimes diaprures incarnat et or se mêlent encore à l’azur, soulignant les montagnes de traits évanescents. Ma main suspendue au-dessus de mon front, protège mon regard qui se perd soudain vers le lointain, vers l’espace, vers ce danger qui se profile, silencieux et imperceptible, inexorable.

Je ne sais combien de temps je me dresse ainsi, jaugeant l’invisible et l’intangible, visage plissé, lèvres pincées, jusqu’à ce qu’un objet en flamme crève les nuages dans un grondement d’orage vicié. L’alarme d’E.V.A. s’affole à mon poignet, mais je n’ai pas besoin de l’entendre pour comprendre.


« Velvet, entrée dans l’atmosphère d’une des capsules de sauvetage du vaisseau. »

Avec un temps de retard. Je retiens une remarque acerbe et me contente d’assener d’une voix hivernale :
« Enclenche le protocole d’urgence niveau 3. Immédiatement. Je veux l’équipe de garde du Protectorat sur le lieu de l’atterrissage aussi vite que possible. Qu’ils m’y rejoignent. »

La capsule fuse, météore, comète à la chevelure rougeoyante, de feu liquide sur l’océan crémeux de nuages jusqu’à ce qu’elle plonge vers la plaine, vers les champs de Bota. Je cours, la terre tremble sous mes bottes, alors que mes muscles se gorgent de Force pour augmenter ma vitesse. Un crash. Pas un atterrissage. J’accélère encore, puis me fige.

Devant moi, les cultures de Bota s’ouvrent sur un large sillon de plantes déracinées et calcinée, de morceaux de métaux noircis, et de cendres. Je m’approche, pas feutré, discrète silhouette dans la fumée et la nuée de poussières en suspension. Mes doigts, coulent vers la carlingue brûlante, vers la trappe. Finalement la capsule n’est pas aussi endommagée que je l’imaginais, et, à la pression de ma main sur le mécanisme, la porte s’ouvre au son d’un vérin asthmatique.



Travis Torn
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« Que s’est-t’il passé ? » , le ton, boréal et flegmatique, présageait un danger sous-jacent alors qu’une tension croissante envahissait la passerelle du vaisseau de combat. L’air était encore imprégnée par l’odeur surchauffée des tirs de blaster.
Il y eut un instant d’hésitation, puis l’un des deux hommes, dont le visage ensanglanté semblait avoir subi les ictus d’un bombardement artisanal, se racla la gorge.
« Le captif s’est échappé monsieur. »
« Et comment est-ce arrivé ? », le silence qui s’en suivit -et qui constituait déjà une forme de réponse en soit- fut pour le moins révélateur.
« C’est bien ce que je pensais. », soupira Bendal en dégainant son arme de poing.
Le malheureux voulu protester mais une décharge, d’un rouge almandin, creusa un cratère fumant à la base de son front, lui carbonisant la cervelle. L’autre tenta de fuir vers la calle quand deux tirs successifs mirent fin à son élan, le faisant trébucher, puis s’échouer en convulsant contre une verrière comme une larve wrosha dans une poêle à frire.
L’espace d’un instant, le calme mortuaire ne fut alors perturbé que par le claquement régulier des bottes de l’officier qui rejoignait la salle des commandes.
« Le module était-t’il équipé d’une balise ? »
« Oui monsieur. »
« Excellent. », ses doigts pianotèrent un instant sur la console, et les répulseurs de l’appareil se mirent soudainement à gronder.
« Messieurs, je gage qu’il est une nouvelle fois temps d’évaluer vos compétences sur le terrain. »

***

« Tu t’octroies un peu de repos ? », la voix, chaude et familière, tira Travis de sa léthargie. Il leva les yeux du petit feu de camps -les flammes, étrangement incolores, avaient attisé sa curiosité-, pour détailler le visage du zabrak dans une expression suffisamment concentrée pour masquer sa confusion.
« Vous ne devriez pas être ici. »
« L’inverse pourrait également se vérifier. », lui fit remarquer Ighelm.
Le maître Jedi paraissait moins imposant que dans ses souvenirs. Désormais plus petit que Travis de quelque centimètres, il était néanmoins plus trapu, et son faciès dégageait toujours cette même impression de puissance compassée. Il était vêtue d’un manteau sombre aux reflets fauve qui luisaient légèrement sous le reflets des flammes. L’accoutrement du jeune homme avait également changé. Les vêtements, empruntés dans la garde-robe du transporteur impérial, s’étaient transmués en une bure de Jedi bleu nuit qui coulait avec élégance le long de ses épaules ; réhaussant sa silhouette athlétique.
Il ne ressenti plus aucune douleur lorsqu’il fit doucement bouger ses doigts, et sa main était toujours présente.
L’environnement avait quand à lui une texture étrange ; dépourvu de reliefs, et imbibé d’une brume vaporeuse qui modifiait la composition des lieux dans un clair-obscur grisâtre.
« Nous sommes dans un rêves ? »
« Pas exactement. Tu aurais préféré que ce soit le cas ? »
« L’ingénuité n’a pas vraiment fait partie de mon quotidien ces temps-ci.»
« Rêves et ingénuité sont deux choses bien distinctes. Tu sembles amer. »
« Beaucoup de choses ont changé. République… pour tant est que l’on puisse encore appeler cela une « République », et Empire se sont une nouvelle fois embourbés dans un conflits abscons. »
« La plupart des conflits sont basé sur l’abscons »
« Vous n’avez pas assisté à celui-ci. »
« Tu le penses ? »
Un sourire cynique coula sur les traits du jeune homme.
« Les Jedi ont été détournés de leur fonction. Et la plupart sont soit trop aveuglés par leur engouement à combattre les Sith, soit trop enclins à servir la République qui les utilise à des fins arbitraires, pour s’en rendre compte. »
La brume autour des deux Jedi s’intensifia.
« C’est plutôt légitime, mais subjectif comme raisonnement. Cela dit je n’ai pas à te juger, j’ai également un certain lot d’erreurs non négligeables à mon actif. »
L’humain gloussa.
« C’est bien la première fois que je vous vois reconnaître vos torts. »
« Profite-en tant que cela dure. » Le visage du zabrak commença à disparaître derrière le voile. « Quelqu’un approche… vous avez déjà eut l’occasion de vous rencontrer par le passé, même si j’aurai préféré assister à ça dans d’autres circonstances. », Travis discerna de la tristesse dans la voix du maître Jedi. « Soit patient avec elle. Je pense que vous allez peut-être avoir certaines choses à vous apporter, l’un à l’autre. »
« Je suis seul, traqué par un escadron de l’Empire sur un monde inconnu. Je doute de pouvoir apporter quoi que ce soit à qui que ce soit. », remarqua le jeune homme, formellement substantiel. « Et je ne suis pas aussi fort que vous. »
« Non, effectivement. », lui rétorqua Ighelm en s’évaporant doucement.
« Tu es plus fort. »



Travis Torn émergea dans une bigarrure de lumières clignotantes.
À en croire la multitude d’alarmes différentes qui hurlaient en même temps dans l’habitacle, l’atterrissage du module tenait d’avantage du miracle que d’un quelconque contrôle Jedi.
Pour le moins que l’on puisse appeler cela un atterrissage, et non un crash.
Il remua doucement, tentant autant que faire se peut de canaliser la douleur dans son membre tandis que sa main valide se débarrassait fébrilement du harnais de sécurité. La plupart des rêves s’estompaient rapidement, mais celui-ci se fit plus vivace à mesure qu’il s’éveillait.
Le Jedi n’avait aucune raison de songer à Ighelm. Le souvenir demeurait certes un désagrément indélébile, mais il y avait longtemps qu’il avait appris à le canaliser. Et pourtant, quelque chose l’ébranlait dans ce rêve. L’expérience lui avait paru presque… réelle.
Tangible.
Déconcertant. Mais l’heure n’était pas à l’introspection. Il s’était évanouis quand l’appareil avait percé l’atmosphère, et il avait dû rester dans les vap un certain temps, à en juger par la condensation qui luisait sur les écrans de contrôle. Hors, chaque minutes s’avéraient précieuses.
S’il s’attendait à être traqué, il ignorait avec quelle efficacité ses poursuivant allaient réagir, mais il ne se leurrait pas.
Il avait très clairement reconnu le filigrane des troupes de chocs de l’Empire sur l’uniforme des deux soldats.

La console étaient complètement fichu, mais il se souvint d’un « trucs » qu’il avait autrefois lu dans un manuel de pilotage. Il glissa la main sous le tableau de bord et fouilla à tâtons jusqu’à trouver ce qu’il cherchait. Ses doigts se refermèrent sur un boitier qu’il eut du mal à arracher. L’objet ; un kit de maintenance, révéla plusieurs outils dont une carte de craquage qui -si elle voulait bien fonctionner- allait lui permettre de forcer le sas de la capsule.
Il avança la clef vers la glissière de détection…
…mais quelqu’un, à l’extérieur, le devança.
Le module siffla sous l’effet de dépressurisation, et un frémissement, vaguement familier dans la Force, exhuma un autre souvenir.

L’éclat aveuglant d’un sabre laser écarlate.
Une douleur cinglante au visage.
La haine, qui irisait dans une paire de prunelles cérulées.


Travis se figea en reconnaissant les traits suaves, et le regard imperméable de la mirialan qu’il avait naguère affronté sur l’un des mondes du Noyau. En outre, si la perspective de voir une créature attrayante se jeter sur vous pouvait avoir son lot d’érotisme, l’entrevue lui avait plutôt fait l’effet d’un Porg coincé entre les griffes d’un Nexu.
Pur hasard ? Ou encore une fois l’une de ces démonstrations du « destin » qui stipulait que la Force pouvait avoir un sens de l’humour des plus sordide ?
*Planète Impériale donc…*, en déduisit le jeune homme alors qu’il s’entendait dire sur un ton mesuré, mais accrédité d’une pointe de sarcasme.
« Vous êtes venu parachever ce que vous avez commencé sur Corellia ? »

***

Velvet ne fut pas la seule présente sur les estampes bucoliques de la toile.
Dans les hautes herbes, plusieurs silhouettes étaient en train d’investir les lieux, encerclant la carcasse cabossée dans une manœuvre parfaitement synchronisée.
Il y eut un frémissement, lorsqu’un soldat en armure intégrale émergea des fourrés ; elle était d’un noir luisant, et les filtres à particules présents dans son casque ôtèrent toute humanité à sa voix lorsqu’il s’exprima.
« Forces impériales. Veuillez vous écarter, je vous prie. »
Le blaster se pointa vers la Jedi Sombre, mais il garda son doigts hors de la gâchette.
Du moins pas pour longtemps…
… juste assez, en fait, pour analyser les données de son scan biométrique qui identifiaient la jeune femme comme une renégate à l’Empire.
« Oh, je vois… changement de programme donc, je vais devoir vous demander de me suivre, madame. Nous avons-là tout un cortège de gentlemen, prêt à vous escorter dans les règles de la bienséance. »
Il joignit le geste à la paroles d’un léger mouvement de casque, et deux troopers se rapprochèrent, blaster au poing, pour la prendre en tenaille.
Un gant, renforcé au duranium, lui saisit l’avant-bras.
Darth Velvet
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Cette voix. Cette odeur. Cette présence crevant la Force de son arôme de cendres et de souvenirs. La saveur de ce spectre accule mes pensées, et ses mots, tessons narquois de givre et d’amertume, suspendent la main sur mon sabre. L’acidité de mes réminiscences s’invitent entre nous, fixe le temps, les secondes, comme si l’univers se figeait dans une attente inquiète, feutrée. Je vois sans voir l’homme qu’il est devenu, ne retenant de lui que la courbure juvénile de sa mâchoire, l’anthracite muselé de peur de son regard d’antan, et la cicatrice fendant sa joue. Il y a entre nous trop de non-dits, trop de colères, trop de Ighelm. Ah… le passé aime rouvrir ses anciennes failles et contempler le sang goutter des plaies encore fragilement refermées. Cruel et sombre, aux démons encore affamés. Mais je ne suis plus tout à fait la femme que je fus, dans cette cantina, il y a des années, alors que la violence, la haine, alors que mon obscurité morcelait et écartelait mon âme. Les blessures guérissent… toujours… si on le désire vraiment… cela je l’ai appris.

« Non. »

Rien de plus, rien de moins. Et comme brisant le maléfice de nos retrouvailles, mes yeux se dessillent de ce miroir vénéneux de notre passé. Il se fêle, se fissure, éclate les illusions pour n’abandonner qu’une vérité nue, dénuée de toutes mystifications. Il n’y a plus de naïveté pétulante, plus de certitudes inébranlables, plus cette étincelle bienveillante irradiant le cœur de ses iris. Juste des cernes soulignant la fatigue de son corps et de son âme, un rictus méprisant sur sa bouche défaite, une capitulation.

« Forces impériales. Veuillez vous écarter, je vous prie. »

L’arrogance de cet ordre glisse sur moi. Maudits impériaux qui s’imaginent que l’univers est leur, s’abrogeant le droit de vie et de mort sur des terres qui jamais ne leur appartiendront. J’ignore comment ils sont passés au travers de la surveillance pointilleuse d’E.V.A, pour ce qui est de la mienne… je ne connais que trop mes faiblesses pour ne pas maudire ma distraction.

« Oh, je vois… changement de programme donc, je vais devoir vous demander de me suivre, madame. Nous avons-là tout un cortège de gentlemen, prêt à vous escorter dans les règles de la bienséance. »

« Vous êtes ici en territoire Hutt, en territoire Rejliidic, Impérial, pas à Dromund Kaas. » répliquais-je, monotone et glaciale, le regard posé sur les deux soldats en mouvement.

Un avertissement. Non…une promesse …une prophétie… que le vent emporte d’une vrille tiède, m’abandonnant au silence ronflant de leur suffisance et à celui des bottes lourdes foulant le champ ravagé par le crash. L’arrogance et l’assurance demeurent l’apanage des guerriers qui tombent pour jamais se relever. Et cet officier, profil anguleux et fat, exsudant la morgue et une satisfaction précoce, ignorant, brandit déjà les oriflammes de sa débâcle. Là où il s’imagine juste une femme et un blessé, se dresse l’avatar de son échec. Par-delà la poussière encore suspendue dans l’atmosphère en brume fine et irritante, par-delà les feuillages verdoyants et les corolles blêmes, par-delà ses hommes éparpillés en cercle fermé, tel les anneaux d’un boa sur sa proie, je sens les miens, mes sentinelles, leurs vibrations batailleuses frémissant sur le tissu arachnéen de la Force.

Une main frôle mon bras, métal glacé sur l’émeraude dénudé de ma peau. Et comme un signal inaudible, comme le chant nasillard d’un tocsin ou le cri d’une banshee, la fièvre martiale de la guerre envahit nos veines, souffle l’air de nos poumons, embrase nos esprits d’une même volonté belliqueuse. Unie. Indivisible. Fulgurante.

Liquide, d’eau et de feu, je volte rapidement sous le bras tendu du soldat trop téméraire, emportant dans mon élan son poignet, tandis que je passe au derrière de lui, tordant, broyant son membre dans son dos, d’une poigne de fer. Proie devenu prédateur, je l’attire d’un mouvement sec dans le giron de mes bras, son dos collé à mon ventre, bouclier involontaire déchiré par les tirs de ses alliés. Ma lame se déploie brutalement depuis sa tempe, dans une fleur de lave, volant son dernier râle sans l’ombre d’un remord. Je n’entends même pas le son du corps qui choit sur le sol, ou les hurlements des impériaux. Le deuxième trooper m’est si proche que je couvre la distance d’une roulade qui achève mon attaque d’un coup par en-dessus. Juste à la jointure abdominale avec l’aine. Mon sabre s’enfonce promptement, avec une facilité écœurante avant de le découper en deux, d’un mouvement ascendant.

Les sentinelles se sont déployées, ailes silencieuses et aguerries, apportant la mort dans le sillage muet de leur engagement. Les impériaux n’avaient pas la moindre chance, et elles ne leurs laissèrent pas le moindre espoir, les sabres iridescents taillant dans la chair, et les blaster crachant leur éclair incarnat. De cette escouade, ne demeure que l’officier, droit, visage clôt et doigts crispés sur la détente de son arme, alors que j’éclate un à un les os de sa main, de ses bras, de ses épaules jusqu’à ce qu’il se décide, enfin à abandonner son pistolet. Des larmes jaillissent, et du sang roule sur ses joues saillantes.

« Je te l’ai dit. Tu es ici sur le territoire du Kajidic Rejliidic et ta présence en ces lieux, n’est ni acceptée, ni tolérée. »

Derrière moi, mes sentinelles se rapprochent. Quatre. Quatre silhouettes aussi mortelles et expéditive que je le suis. L’une d’elle se fend vers la carlingue de la capsule de survie, secourant le jedi, d’une main tendue et bienveillante.

« Il n’y a ici que la mort pour toi et les tiens. Elle peut être rapide, ou douloureuse, le choix t’en revient. »

Les questions vinrent. Et les réponses en retour. Du bout des lèvres parfois. Mais la trahison ne l’est que lorsqu’elle est consommée, et elle ne le fut pas, sa vie fauchée par ma lame.

« Velvet ? »

Je me retourne, appréciant la démarche vacillante de Travis Torn soutenue par Heral, dont les montrals s’agitent imperceptiblement.

« Travis… » soupir. « Je ne suis pas sûre d’être particulièrement heureuse de ta visite, surtout au vu des amis que tu traines derrière toi… toutefois tu es le bienvenu ici, et il ne te sera fait aucun mal à la condition que tu respectes ceux qui y vivent. Malheureusement, nous n’avons pas le temps de te faire visiter dans l’immédiat ou de remédier à …. Tes blessures… Je veux éliminer toute menace, et ce vaisseau en orbite en est visiblement une. Tu nous raconteras ultérieurement pourquoi ils te pourchassent et ce qu’ils font ici, mais pour l’heure, tu peux, soit te joindre à nous. Soit rester ici, des secours arriverons rapidement. »

J’esquisse un sourire cruel

« Nous allons aller faire une petite visite de courtoisie aux impériaux, en empruntant la navette et les uniformes de ceux-ci. »

Travis Torn
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Ça n’aurait jamais dû se passer comme ça.

Peu de choses, au truisme d’une existence fondée sur les conjectures de la discipline, de l’organisation, de l’adaptation, et d’une méticulosité prompte à faire passer le plus pragmatique des scientifiques d’Arkania pour un vulgaire pêcheur de coquillage drexelien, avaient été en mesure de surprendre Bendal Tusk. Il s’arrangeait toujours pour avoir une longueur d’avance sur les autres. Chacune de ses actions, chacune de ses stratégies, étaient basées sur la cohérence d’un raisonnement profondément cartésien. À Kaas City, ses camarades de section l’avaient surnommé « Strategos » lorsqu’il avait terminé ses classes avec presque un an d’avance. Il n’échouait jamais. Il parvenait toujours à s’accommoder aux écueils de la situation. Il arrivait toujours à ses fins. Que ce soit par l’intelligence ou l’intimidation, et ce dans un une absence de morale qui frisait presque le nihilisme.
Et pourtant …

Ça n’aurait jamais dû se passer comme ça.

La petite navette de détachement, synchronisée sur la balise du module volé par le Jedi, comportait un champs de blocage de scanner dernier cri. Précaution désuète pour une escale sur un monde supposé exempt de civilisation intelligente -et donc, de toutes technologies à radar-, mais Bendal avait quand même insisté pour que le système de brouillage soit activé. Ils s’étaient posés avec la discrétion d’un kouhun en chasse, et l’escadron avait comblé la distance jusqu’à l’épave dans un record de rapidité.
La présence de la fugitive ne l’avait que très simplement étonné.
Pourquoi pas après tout, l’endroit offrait tous les éléments viables pour une planque prolongée et était riche en ressources nécessaires à la survie.
Non, ce qui l’avait d’abord désappointé, c’était cette espèce de flegme dédaigneuse dont cette garce avait fait preuve. Comment osait-t ’elle lui répondre ainsi ? Comment osait-t ’elle ?
Elle aurait normalement dû exsuder ne serait-ce qu’une pointe d’anxiété ou de stupeur ; au lieu de cela, elle l’avait lorgné d’un manière…
…comme s’il s’était agis d’un insecte, grossièrement esquiché sur le pare-brise d’un airspeeder.
« Vous êtes ici en territoire Hutt, en territoire Rejliidic, Impérial, pas à Dromund Kaas. »
« Quelle différence ? »
La réponse avait été cinglante, instantanée, et douloureuse.
Si l’entraînement à neutraliser un individu sensible à la Force comptait parmi les aptitudes inculquées aux troupes de chocs, Bendal, n’avait jusque-là jamais eut à en mesurer toute la stérilité. En outre, lorsqu’il vit Kane et Chiaros -deux vétérans qu’il avait lui-même trier sur le volet- se faire littéralement démolir par la mirialane, il en arriva à la conclusion que soit la cellule, en charge du programme de formation des nouvelles recrues à l’Académie, avait sérieusement déconsidéré le sujet. Soit la priorité à assurer la survie d’un soldat face à un certain type d’adversaire avait ses propres limites.
Il pencha pour la seconde option.

Ça n’aurait jamais dû se passer comme ça.

Lui dicta une nouvelle fois son subconscient quand d’autres combattants émergèrent des fourrés pour décimer le reste de son unité en un claquement de doigt.
Quelque chose de si rapide qu’il se limita à un enchaînement de variations floues le renversa, et lui immobilisa le bras en arrière d’une torsion ferme.
« Je te l’ai dit. Tu es ici sur le territoire du Kajidic Rejliidic et ta présence en ces lieux, n’est ni acceptée, ni tolérée. »
« Ça n’aurait jamais dû se passer comme ça.… », fini-t’il par dire de vive voix, plus pour lui-même qu’à l’intention de la Jedi Noire. « …comme c’est étrange. »
« Il n’y a ici que la mort pour toi et les tiens. Elle peut être rapide, ou douloureuse, le choix t’en revient. »
Une douleur cruelle lui déchira le poignet… puis l’avant-bras, quand Velvet commença à l’interroger.
Et les hurlements qu’il dégorgea furent ceux d’un animal sauvage.

***

Les détails, brutalement raffinés, d’une séance de torture formaient une exhibition macabre à laquelle Travis Torn était désormais habitué. Il en avait été à maintes reprises le spectateur -et parfois même l’acteur- lorsqu’un ennemi susceptible de détenir des informations finissait par s’échouer entre les lignes républicaines. En outre, la perspective d’allouer ce genre de pratiques aux cartels, ou aux impériaux seuls, était une vision parfaitement manichéenne au regard du Jedi. L’expérience du combat et les émotions ressenties sur le terrain, en temps de guerre, lui avaient très nettement fait comprendre qu’il n’y avait qu’un pas entre l’éducation et la barbarie. L’Holonet, formaté pour brandir des images profondément patriotiques ; l’avancé courageuse des troupes républicaines… la libération d’un monde sous domination impériale… les visages radieux et souriants d’une pléiades de citoyens, toutes espèces confondues, se congratulant des victoires sur l’ennemi…
…ne montrait pas toujours l’envers du décor.
La République contenait également son lot de monstruosités, et il était des choses, d’infimes détails que l’Ordre Jedi, à travers ses leçons d’altruisme aseptisé et d’anti-vie philosophiques, n’enseignait pas toujours.
Pour sa part Travis, malgré toute la bonne volonté qu’il pouvait drainer à travers la Force, n’avait jamais vraiment réussit à éprouver assez d’empathie envers quelqu’un qui essayait de le tuer. Et ce même si les raisons pouvaient se légitimer par une explication parfaitement concevable. Vestige d’une enfance passée hors des clous du conditionnement Jedi peut-être ? Ou caractère propre, développé entre les rouages d'une violence que peu de padawan avaient été capable d'anticiper depuis le début de cette guerre.
Aujourd’hui encore, cette emphase soulevait d’avantage de questions que de réponses dans l’esprit critique du jeune homme.

Cela dit, Velvet avait également tenté de lui faire la peau par le passé.
Mais malgré le sarcasme dont il avait fait preuve tout à l’heure, la présence de la mirialane suscitait en lui des émotions contradictoires.
C’était perturbant…
…mais Travis Torn était bien trop imperturbable pour le reconnaître.

Dans tous les cas, il s’était trompé sur un point ; elle aussi, n’était manifestement pas du côté de l’Empire.
Pour qui, alors ? Et qu’était-t ’elle au juste, à présent ?
Un détail, dans ses propos, l’avait fait bien fait tiquer tout à l’heure, mais cela paraissait absurde.
Rejliidik ?
Quiconque ayant servi la République à l’aube des évènements post-Makem Te, pouvait encore aujourd’hui en dire, et en redire sur ce nom-là. Il était attribué à une créature de l’ombre ayant coudoyer les sphères du pouvoir, avant d’être sujet à de nombreuses controverses depuis l’affaire « Janos ». Successivement ministre, puis vice-chancelier, il était passé de suspect à paria lorsque des éléments le reliant à Borenga lui avaient été imputés.
Après quoi, il s’était purement et simplement évaporé dans la nature. Plusieurs théoriciens se demandèrent s’il n’avait pas encore échafaudé un énième plan de sortie. Il était assez machiavélique pour ça. Mais Travis, plus réaliste, se disait qu’il avait sans doute été la victime d’un chasseur de prime, et que sa dépouille devait plus certainement pourrir quelque part, sous les étages d’une zone désaffecté, sur Nar Shadda, ou dans l’estomac d’un sarlacc.
*Calme…*, le jeune homme inspira doucement, puis expira. *…les réponses viendront en temps voulu.*

Ses paupières se plissèrent tandis qu’il reportait son attention sur l’impérial. Masquant le plaisir froid suggéré par la perspective de le voir souffrir -la loi du Talion ayant une saveur exquise quand l’oppresseur finissait opprimé- derrière un contrôle alcyonien.
Au milieu des chuintements et des borborygmes inintelligibles, Bendal fini par cracher l’emplacement de la navette, stationnée à moins d’un kilomètre d’ici. Puis celui du vaisseau, en orbite autour de Boz Pity. Il donna également le mot de passe qui leur permettrait d’être reconnu par le pilote, procédure abstraite mais néanmoins nécessaire au protocole, et clôtura sa diatribe par une débauche de supplications et d’appels à la pitié…
…ce à quoi Velvet répondit par l’écarlate de son sabre laser.

Le vent charria l’odeur de chaire brulée jusqu’aux narines du Jedi lorsque la tueuse coula son regard dans le sien, éveillant ses propres instincts de combattant.
Travis les refoula d’une pichenette mentale, préférant focaliser sa concentration sur les reflux qui isolaient sa blessure.
La Force -et peut-être un peu la poigne d’Heral- était pour l’instant le seul rempart entre l’éveil et l’évanouissement.

« Travis… Je ne suis pas sûre d’être particulièrement heureuse de ta visite, surtout au vu des amis que tu traines derrière toi… toutefois tu es le bienvenu ici, et il ne te sera fait aucun mal à la condition que tu respectes ceux qui y vivent. Malheureusement, nous n’avons pas le temps de te faire visiter dans l’immédiat ou de remédier à …. Tes blessures… Je veux éliminer toute menace, et ce vaisseau en orbite en est visiblement une. Tu nous raconteras ultérieurement pourquoi ils te pourchassent et ce qu’ils font ici, mais pour l’heure, tu peux, soit te joindre à nous. Soit rester ici, des secours arriverons rapidement. »
« Le contraire m’aurait étonné. », lentement, avec des gestes précautionneux, il se libéra de l’étreinte d’Heral. « Votre hospitalité est… » (grimace de douleur) « …des plus surprenante, vue la manière dont les choses se sont terminées la dernière fois. », nouvelle vague de souffrance, une pause dans la Force, et enfin, la froide résolution du guerrier dans l’anticipation. « En d'autres circonstances, j'aurai trouvé l'idée séduisante, mais dans l'état, il me serait difficile de réaliser la même performance que vous. » Ironie ? Ou simple constat ? La diction était légèrement nébuleuse. « En revanche, ils s’attendent à me voir revenir en captif, là-haut. Je peux peut-être vous servir d’appât. »
« Nous allons aller faire une petite visite de courtoisie aux impériaux, en empruntant la navette et les uniformes de ceux-ci. »
« Leurs casques déforment la voix, et certains de vos camarades ont effectivement le même gabarit que ces hommes, mais pour vous… », observa-t’il en avisant la silhouette féline, certes vive et découplée, mais dont la carrure démarquait un très léger écart de dimensions face aux armoires à glace de Bendal Tusk. « …je crains que cela ne soit quelque peu délicat. »
Le ton avait été parfaitement sérieux, bien que l'espace d'une fraction de seconde, un temps si infinitésimal qu'il aurait pu passer pour un mirage, Velvet pu voir un éclat légèrement espiègle glisser dans le regard de Travis... qui se fronça une nouvelle fois lorsqu'une vague électrisante lui rappela la gravité de sa situation.
Rompant la bravade, affichée tant pour minimiser son état physique qu’émotionnel.

***

À plusieurs kilomètres de là, en apesanteur au-dessus du puit gravifique de Boz Pity, Kyle Vadar suivait des yeux les deux corps en suspension dans le vide spatial.
Peu après l’exécution -un geste inutile, et parfaitement démesuré, à ses yeux-, Bendal Tusk avait donné l’ordre d’éjecter les cadavres hors du vaisseau. Faute de place pour les conserver.
Quelque heures auparavant, il avait encore joué au dejarik avec ces deux-là.
« Tu t’y habitueras », lui avait un jour dit l’un de ses camarades.
Mais c’était faux. Il avait beau chercher des raisons parfaitement logiques au caractère reptilien de leur supérieur, rien ne justifiait une telle débauche de cruauté.
À ses yeux, Bendal était un monstre et cette guerre commençait à s’éterniser.
Machinalement il tira un petit objet de sa poche, et appuya sur l’interrupteur qui activa l’holo d’un nourrisson.
Son fils allait bientôt avoir un an et il commençait à regretter d’avoir succombé aux slogans de recrutement, diffusés en boucle sur les écrans publicitaires qui jalonnaient les étages supérieurs de Kaas City.

« Quand tout ce poodoo sera fini, j’arrête. », se promit-t ’il en rangeant l’holoprojecteur dans les replis de son uniforme.
Une alarme s’activa, suivit du code de reconnaissance impérial.
« Pas trop tôt… », marmonnât-t ’il en avisant au loin la silhouette effilé du transporteur furtif. « … j’ai franchement hâte de lever les voiles. »

Il prévint les autres, et établi la transmission avec l’appareil…
… sans se douter que la suite des évènements allait prendre une tournure insoupçonnée.
« Soldat Vadar au rapport, protocole d’ouverture du sas enclenché, monsieur. »
Aucune réponse, hormis la friture du grésillement ininterrompu qui bourdonnait dans son comlink.
« Capitaine Tusk ? »
Darth Velvet
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Un soupir s’échappe de mes lèvres contrites, comme un aveu silencieux de ma désapprobation, de mon impatience moirée d’agacements. Je ne veux pas de cette discussion avec lui, pas ici, pas maintenant alors que le feu de sa capsule crépite encore, que les regards vitreux des morts s’attardent sur nous, vindicatifs et accusateurs, que la poussière et la fumée montent vers les cieux en colonnes de cendre et de suie. J’aimerais museler la querelle ouverte qui subsiste entre nous, poison insidieux du passé, crever l’abcès, mais la menace obscurcissant de son aile funèbre Refuge, demeure. Et de ceci, je ne peux faire abstraction. Boz Pity, sa sécurité, sa protection.

« Les mondes, les événements, les personnes évoluent. Aucune constance, ni rien, ne demeure figé dans le temps. Ceci tu devrais le savoir et le percevoir mieux que quiconque, toi qui as tant changé. Pourquoi, moi, serais-je resté la même ? Le fantôme d’ighelm ne s’attache plus mon ombre et, la folie n’entache plus aussi facilement mon âme. Mais l’heure n’est pas à ressasser des événements révolus.. » lui concédais-je cependant, mon regard abandonnant la charogne inerte de l’impérial pour Travis.

Ah…. Il y a, je crois, dans l’encre de mes prunelles, sous l’observation hivernale de son corps meurtri par le crash et les sévices, sous l’inventaire acide de ses faiblesses, l’émanation silencieuse et imperceptible d’une sollicitude inattendue. Mes paupières se closent sur une inquiétude mort-née, alors que ma voix se raffermit, plus fraiche encore, plus intransigeante et plus rèche, qu’elle ne le fut auparavant.


« Si tu ne te sens pas capable de tenir un blaster ou un sabre alors ne vient pas. Je n’ai pas besoin d’un poids mort accroché à ma cheville. Prendre d’assaut ce vaisseau, même en effectif réduit n’aura rien de plaisant. Je refuse de perdre une de mes sentinelles, parce qu’elle devra te protéger de ton orgueil. Si tu n’es pas en état, restes ici. Un guerrier doit connaitre ses limites. Si les tiennes sont atteintes, ne met pas les autres en danger par égoïsme ou arrogance. »

« Velvet.. »

Une voix veloutée d’un reproche sous-jacent. Esteran s’approche d’un pas vers le jedi et sa main calleuse s’égare sur son épaule, un ancrage pour le jeune homme que je devine perturbée par l’étrangeté de ma sentinelle. Buriné, défiguré par trois sillons parallèles qui crèvent son visage sombre, parcheminé, éclairé par le prisme améthyste de son œil unique. Les cheveux argentés de l’humain balayent sa nuque, et un air paternaliste s’égare sur la courbe d’un sourire, comme une réponse, comme un réconfort à cette capitulation épinglé sur Travis depuis que j’ai ouvert la bouche.

« L’idée du gamin est bonne, et tu le sais. Bon il est pas au top, mais on peut arranger ça. » un éclair violet me foudroie, et malgré la minéralité séculaire qui m’emprisonne, l’empreinte d’un amusement éphémère frôle la commissure de mes lèvres.

« Hmmm. »

« Il est pas manchot au point de pas savoir tenir une arme, et on sera pas de trop à un de plus. Pour le reste il y a Heral et la bota. »

« Humm. »

Assentiment général. Ma volonté ploie inexorablement sous leurs acquiescements muets, j’hausse les épaules, muselant les craintes qui s’enroulent autour de mon cœur en guise d’avertissement. Il est faible, et même si je ne doute de sa ténacité, de cette opiniâtreté qui a porté ses pas jusqu’à notre seuil, je sais aussi que le corps comme l’esprit ont des limites, des frontières qu’il ne faut jamais franchir. Ce n’est pas à moi de dire si elles le sont, mais il est de mon devoir de protéger les miens, envers et contre tout. Même d’eux. Et Travis, s’il est un fugitif auquel j’offre le réconfort d’un refuge, d’un lieu sûr, n’appartient pas à ceux-là. Et pourtant… je cède. Peut-être ne suis-je pas aussi lucide que je le devrais lorsqu’il est question de cet homme ou de mes hommes, ou peut-être est-ce ma façon à moi de sauvegarder chacun d’entre eux, y compris le jedi. Au détriment de nos chances. Un guerrier amoindri n’en reste pas moins dangereux, et combinant la force salvatrice d’Héral à la baie de Bota, il n’en sera que plus létal.

« Bien. »

Il n’y a pas besoin d’ordres supplémentaires. Héral, soutenant déjà Travis d’un bras assuré, se place devant lui, apposant ses mains sur son torse.

« Je vais chasser la douleur… mais pour les dégâts, je ne peux y remédier que superficiellement. Donc plus de saignements pour le moment, par contre faudra s’occuper sérieusement de ton cas à notre retour. »

Un frisson ondule la toile arachnéenne de la Force, et sous les doigts de la sentinelle, la douce chaleur guérisseuse et réconfortante pénètre dans les chairs tuméfiés, coulant tel un liquide apaisant sur les plaies à vif. Les montrals du Togruta vibrent, un instant, à l’unisson, puis se figent tandis qu’il retire ses mains, pour récupérer dans le sac suspendu à sa ceinture, un étrange fruit rouge et fripé.

« Tiens mange-ça…. Ça va te donner un coup de fouet. »

Je le laisse découvrir le goût acidulé de la baie sur sa langue, l’arôme un peu piquant. Un peu amer. Trop sucré. Et les effets fulgurant dans chacune de ses cellules, revigorants et sauvages. Autour de lui, son aura frémit et se dilate, la Force s’accumule, aimantée, régénérée, dégorgeant dans ses veines d’un souffle nouveau, diluant provisoirement sa lassitude et sa détresse comme après une bonne nuit de sommeil.

« Tu te sens mieux gamin ? »

Les autres sentinelles n’ont pas attendues, bras ballant, que Travis recouvre quelques couleurs, que son teint crayeux retrouve une pointe de rosée aux tempes sous l’action combinée du fruit et du Togruta. Ils arborent, à présent, avec une prestance toute impériale, les uniformes des troopers, casques vissés sur leurs faciès, et armes au poing. Et si certains plastrons aux cicatrices fuselées et aux taches de sang dégagent encore une odeur de brulé, si l’ensemble n’est pas aussi emprunté et policé que l’apparence usuelle des soldats, il émane d’eux une menace sourde, une promesse de violence, la caresse de vétérans revenant du feu. Seuls Héral, Travis et moi, demeurant nous-même, le togruta en raison de ses montrals, impossible à incarcérer dans un casque, Travis pour qu’il puisse jouer les appâts, et moi… parce qu’ils ne me verront que lorsqu’il sera trop tard pour arrêter la fusion de ma lame.



« Esteran, tu prends le commandement. C’est simple. Vous êtes arrivés sur les lieux. Il y avait un intrus en sus du fugitif. » d’un hochement de tête je désigne Héral. « L’officier est mort, ainsi que plusieurs de vos camarades mais vous avez maîtrisé les deux cibles. Fait simple. Les mensonges les plus concis sont les plus faciles à faire avaler. »

Le ronronnement du moteur accompagne mes paroles, s’enrichissant d’un grésillement désagréable lorsque la navette franchit la stratosphère de Boz Pity. Du coin de l’œil, j’observe Esteran fournir blaster et respirateur portatif à Travis tandis que je poursuis.

« Sur place, nous allons nous diviser en deux groupes. Héral, Travis, Zevta, Darius, vous irez en salle des machines. Je veux que vous arrêtiez les moteurs. De préférence sans trop les endommager. Esteran, Vic et moi, nous nous chargerons des communications qui, vu la taille du vaisseau, doivent probablement être vers le poste de pilotage. Communications minimales. Et on évite de rameuter tout ce que le vaisseau compte de soldats. Si jamais ça chauffe trop, nous dépressuriserons l’ensemble du vaisseau, alors gardez vos casques et vos respirateurs. »

« On y est. »

Dernières secousses annonçant notre arrimage, et la Force s’enroule autour de moi, drapé d’ombres et de ténèbres, fondue, dissoute seulement trahie par mon souffle et le léger frémissement du décor dans lequel je m’annihile. Je ne suis plus que spectrale, présente et pourtant indécelable, le pouvoir de mon sortilège entrelacé sur ma peau. Travis se demandait comment je pourrais donner le change… s’il n’y a rien à voir, la question ne se pose plus.

« Soldat Vadar au rapport, protocole d’ouverture du sas enclenché, monsieur. Capitaine Tusk ? »

« Le capitaine Tusk est mort Soldat Vadar. » cingle Esteran dans un chuintement d’holocom, avant de débiter sans s’interrompre. « Je dois impérativement voir le lieutenant Crespin. Les corps sont dans la soute. »

Nous débarquons sitôt la rampe accessible. Les yeux du soldat s’arrondissent lorsqu’il découvre les armures brulées, les impacts de blaster, la poussière et la crasse maculant le blanc. Esteran se fige devant lui, ordonnant qu’il débarque les cadavres. Un homme occupé est un homme qui ne s’interroge pas, qui ne relève pas l’incongruité de la situation, qui ne fait pas attention au-delà de ce qui se trouve juste sous son nez. Aussi, ne remarqua-t-il pas notre impatience à sortir du hangar, ou la séparation de notre groupe sitôt le sas franchit. Ou, peut-être, préféra-t-il ne rien voir, se contentant de sortir les dépouilles de ses camarades, de son officier, figeant au passage un coup de botte dans le flan ensanglanté du capitaine.

Travis Torn
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Ses iris, aux teintes de ciel d’hiver, scrutèrent la mirialane dans un détachement subtilement feint.
Peu de choses, dans la gestuelle de Travis, laissèrent filtrer l’irritation réprimée en cet instant. Peu de choses, excepté un bref plissement de paupières qui survint par deux fois, couplé à une légère raideur. Dans la Force c’était une autre histoire. Avec un peu d’attention, ceux qui y étaient sensibles purent ressentir la légère altération autour du Jedi ; comme la condensation provoquée par un chiffon humide posé sur une cocotte-minute.

Le monde évoluait c’était un fait et Travis, comme Velvet, avaient pu en mesurer toute les encoignures au cours des récentes imbrications. Mais la part cartésienne présente en lui se demandait toujours ; pour quelle raison l’épargnait-t’ elle ? En toute logique, et d’après ce qu’il avait pu lire dans la Force à travers elle, sa seule présence lui faisait -à quelque détails prêt- le même effet qu’un gaz toxique, parce qu’elle lui rappelait des conjectures qui lui avaient naguère apporté de la souffrance. En outre, il était un Jedi, et il savait que l’Ordre suscitait parfois des sentiments contradictoires dans les mondes qui parachevaient cette Galaxie, au-delà des frontières du Noyau. Surtout depuis que la République en avait fait du matériel militaire depuis l’éclosion de ce conflit ; les éloignant encore un peu plus d’une philosophie qui s’était montrée de plus en plus bancale à ses yeux, ces derniers temps. Qui plus est, ce groupuscule auquel elle semblait désormais adhérer cherchait à protéger son intégrité, et un Jedi, surtout lorsqu’il était affilé à la République, avait tendance à attirer l’attention.
Se pouvait-t ’il qu’il y ait une autre équation ? Un détail auquel il n’avait pas réfléchis ? Le genre de circonstance qui ne se mesurait pas à travers le prisme du pragmatisme.
Peut-être.
La psyché lié aux émotions, ou au sens des valeurs, était parfois bien plus complexe à analyser, d’autant plus lorsqu’on avait à faire à un esprit aussi retord. Mais Velvet ne semblait pas exempt de tolérance en fin de compte.
Pour le tact en revanche, c’était une autre histoire.

De « l’égoïsme » ? De « l’arrogance » ?
Un réacteur commença lentement de s’échauffer dans sa poitrine, enfiévrant ses yeux, mais Travis se maîtrisa.
Faire quelque chose de stupide dans un moment aussi délicat serait particulièrement malvenu.
Il inspira doucement.

« Vous avez parfaitement raison. », le ton était très calme, presque (trop ?) doucereux. Le regard, quand à lui, la transperçait de part-en-part. « Il serait maladroit de perturber cette opération par une quelconque débauche d’égoïsme, ou d’arrogance, comme vous l’avez si habilement souligné. Je vais donc patienter ici le temps que cette affaire soit réglée. Dans tous les cas, je ne puis que vous remercier de votre sollicitude bien que je ne pense pas vraiment en être digne, vu les… déconvenues que ma présence semble vous avoir apporté jusqu’à maintenant. »
« Velvet.. », entendit-t ’il prononcer alors qu’une main, dans un geste presque paternel, se posa avec douceur sur son épaule. Chassant l’amertume qui commençait à poindre, et prenant légèrement Travis au dépourvu. « L’idée du gamin est bonne, et tu le sais. Bon il est pas au top, mais on peut arranger ça. »

L’attention du Jedi se porta sur le nouveau venu ; un homme d’âge mûre, aux allures de vieux briscard, qu’il n’avait pas remarqué tout à l’heure. Son apparence à elle-seule semblait narrer les péripéties d’une vie tumultueuse, et la patience dans ses yeux vifs reflétait les esquisses d’une sagesse que seule l’expérience pouvait apporter.
Une brève tergiversation, et la mirialane fini par abdiquer en lui lançant un regard en coin avec…
…qu’était-ce que cela ?
Une ébauche de sourire ?
La pantomime ne dura pas plus d’une seconde, et les lèvres charnues retrouvèrent leur pincement sévère alors que toute chaleur désertait le minois de Velvet.

Un tantinet déconcertant. Et… intriguant à la fois.

Héral le relâcha doucement. Dans un geste qui intima au jeune homme de le laisser faire, le togruta posa ses mains avec précaution sur sa poitrine et ferma les yeux.
« Je vais chasser la douleur… mais pour les dégâts, je ne peux y remédier que superficiellement. Donc plus de saignements pour le moment, par contre faudra s’occuper sérieusement de ton cas à notre retour. », joignant le geste à la parole, il appliqua une légère pression, et Travis pu sentir la Force affluer sous ses paumes, traversant ses vêtements pour entrer directement en contact avec sa chaire. Il eut d’abord l’impression d’être infiltré par une sorte de carburant liquide parcouru de crépitements, infusant chaque parcelles de son être ; chaque tissus, chaque muscles, chaque organes dans un orphéon apyrétique qui calma graduellement la souffrance. Les ondes d’énergie se concentrèrent en plusieurs endroits et fusèrent jusqu’à son membre amputé, enrobant les brûlures dans une sorte de baume invisible qui mit subitement fin à son supplice. Relayant la douleur fantôme à une vague contrition, certes omniprésente, mais momentanément écartée par la Force.
Lorsqu’il fut satisfait, Héral ôta ses mains et lui tendit un étrange fruit, pas plus gros qu’un pois, d’un rouge d’aniline. « Tiens mange-ça…. Ça va te donner un coup de fouet. »
Les iris cérulées considérèrent la bais avec scepticisme lorsqu’il s'en saisit d’un geste délicat, entre le pouce et l’index. Intrigué, le jeune homme la fit rouler un instant dans sa paume avant de la glisser dans sa bouche.
Le goût était amère, mais l’effet fut quasi-instantané. Toute fatigue s’évapora, son esprit s’éclaircit, et un besoin de mobilité, d’action, enflamma ses sens.
C’était grisant.

« Tu te sens mieux gamin ? »
« On ne peut mieux… merci. », rétorqua Travis encore parcouru de frémissements. Il fit rouler ses épaules tout en ouvrant et refermant sa main valide pour tester son état. « Les propriétés de cette baie sont… », une légère pause. Il pouvait presque voir la Force affluer dans son corps. « …surprenantes. »

Autour de lui, les autres s’afféraient déjà. Chacun semblant prendre la mesure de son poste dans une efficacité martiale familière à Travis qui avait passé d’avantage de temps sur les dreadnaught de la République, entouré de soldats, qu’en relaxation dans les couloirs du Temple ces deux dernières années. Mis à part les ébréchures et autres marques cautérisées sur les armures luisantes, il fut bientôt entouré d’impériaux. Son regard balaya le sol, passant au crible les éléments qui le jonchaient et fini par s’arrêter sur la dépouille de Bendal Tusk dont le blaster réservé aux officiers n’avait pas été ramassé.
Le jeune homme tendit la main, et l’objet lévita jusqu’à sa paume. Un sourcille s’arqua légèrement sur son faciès au contact froid de la crosse en duracier. Il avait toujours détesté les armes à cartouches énergétiques, les trouvant grossières et inélégantes -somme toute, loin d’égaler un sabre laser en terme d’efficacité-, mais il allait hélas devoir s’y accommoder. Le pistolaser disparu entre les replis de sa tenues, et il suivit le briefing lorsque la petite section se mit en route vers la navette.
En soit, l’idée était intéressante et le plan ne comportait que peu de failles. L’essentiel se jouerait au bluff, le groupe se scinderait en deux ; celui de Vel prendrait directement le contrôle du système de communication dans la salle des commande, tandis que Travis et Héral neutraliseraient l’hyperdrive -et accessoirement, le champs anti-grav si les choses tournaient au vinaigre-.
Du togruta, il n’avait pu en déduire que peu de choses hormis le fait qu’il était, tout comme lui, un utilisateur de la Force. Un ancien Jedi, peut-être ? Quoiqu’il ne l’eût jamais croisé sur Onderon, ni Coruscant. Dans tous les cas, ses capacités combinées aux siennes pourraient s’avérer cruciales. Des deux autres, peu d’informations, mais tout dans leurs attitudes (calme, discipline, résolution) traduisait une formation militaire accomplie.
Ils prirent place dans l’appareil qui s’éleva progressivement au-dessus de l’atmosphère de Boz Pity. Encore une fois, la mirialane pu surprendre Travis en se dissimulant presque totalement dans la Force, et un calme tendu -de celui qui précédait généralement la tempête- plana lourdement dans la carlingue jusqu’à ce qu’ils furent en vue de la corvette.
« On y est. »

À peine se furent-t ’ils arrimés que l’intercom grésilla sur la console du tableau de bord. Laissant filtrer, au milieu des hachures, la voix de l’agent de quai en attente du protocole. Ce à quoi Esteran donna le change sur un ton sec et parfaitement formaliste.
Il y eut un claquement sonore, suivit d’un tremblement lorsque le sas s’activa dans un bruit de dépressurisation, et chacun s’en tint au rôle qui lui avait été affublé.
D’emblée, il put détecter une infime touche de suspicion dans le regard de Vadar. Le soldat le suivit des yeux un instant, et il baissa les siens dans un simulacre de capitulation. Dans la foulé, le corps de Bendal fut trainé hors de la soute. Travis camoufla un rictus lorsque l’impérial gratifia la dépouille de son supérieur par un hommage des plus percutant.
Manifestement, l’officier n’était pas déprécié que par ses ennemis, et l’attitude de son subalterne fut assez révélatrice quant à la cohésion qui devait régner sur le vaisseau.
*Intéressant.*, observa le jeune homme.
Les alliances gangrenées par la dissension étaient généralement les plus faillibles.

La cohorte se scinda en deux au détour d’un embranchement, et le petit groupe du Jedi remonta les couloirs de plastacier à l’éclairage artificiel jusqu’à un terminal en veille.
« Une idée ? », demanda Héral de derrière Travis qui pianotait d’une main sur la console.
Un holo décrivant les plans de la corvette s’activa dans une vaporisation diaphane détourée de bleu.
« La salle des machines se trouve à environ deux-cents mètres, sur le pont arrière. », il zooma sur un logo en surbrillance, là où était située la pièce sur la carte, et plusieurs holocam leurs montrèrent une galerie constellée d’interrupteurs, manettes, voyants et autres commandes en tous genres.
« Les moteurs et l’hyperdrive sont ici… », dit-t’ il en désignant un tableau de contrôle. « …et en l’occurrence, nous avons de la chance. »
« C’est-à-dire ? »
« La pièce n’est surveillée que par cinq droïdes de maintenance. », rétorqua le jeune homme avec un bref clin d’œil.
Autrement dit, pas de surprises.

***

Pas de surprises était peut-être une conclusion un peu hâtive…

Sur le quai, Kyle Vadar observait toujours le cadavre de Bendal Tusk, une main sur le coude opposé, une autre soutenant son menton dans une posture circonspect. D’un point de vue purement étique, rien ne lui faisait plus plaisir que de voir cette pourriture refroidie. Mais d’un point de vu professionnel, de nombreux détails le dérangeaient.
Parmi les soldats, il y en avaient plusieurs qu’il connaissait personnellement. Certains au point d’en avoir fait des amis. Pourtant aucuns de ces hommes n’avaient fait montre de familiarités. Aucun échange, aucun geste, ils étaient juste passés à côté de lui avec une contenance presque mécanique.
Il repensa aux armures noircies, et aux marques de combats. Certaines lui avaient paru si abimé qu’il était rigoureusement impossible que leurs possesseurs en soient ressortis indemnes.
Et pourtant…

Quelque chose clochait.
Il se pencha au-dessus du corps de l’officier, et posa la main sur la blessure qui lui avait été fatale.
Il connaissait ce genre de plaie.
Et elle n’avait rien à voir avec un tir de blaster.
L’impérial enfila son casque, chargea son blaster, et s’enfonça dans les entrailles du vaisseau.

***

« C’était le dernier. », déclara Darius en explosant le dôme pivotant d’un droïde monté sur répulseurs.
« Bien. », dit Héral qui s’approcha des commandes du moteur.
Travis se tenait adossé dans l’encadrure de la porte, la main posée sur la crosse de son pistolaser. Ils n’avaient pas mis dix minutes à localiser la salle des machines, et à neutraliser la maintenance droïde sur le point d’activer l’alarme à la seconde où les Sentinelles franchissaient le seuil. Il s’apprêtait à rejoindre le groupe quand un frisson le parcouru, au moment où la Force titilla ses perceptions, le mettant en garde contre quelque chose d’imminent.
Instantanément, il pivota arme au poing, pour se retrouver nez-à-nez avec le blaster de Vadar.
L’inverse se réverbéra pour l’impérial, et les deux hommes se jaugèrent dans une situation de statu quo tendue.
De l’autre côtés, Darius et Zevta levèrent leurs joujous respectifs au moment où Héral activait son sabre laser.
« Je ne ferai pas ça si j’étais vous. »
« Paradoxalement, je pourrais vous rétorquer la même chose. », objecta Travis sur un ton égal.
Vadal désigna les trois autres d’un geste du menton.
« Des amis à vous ? »
« En quelque sorte. »
« On dirait que cette halte sur Boz Pity vous a été profitable. »
« Le hasard fait bien les choses. Vous ne voulez vraiment pas baisser votre blaster ? »
« Pour être exécuté sommairement ? Voyons mon vieux… »
Travis haussa légèrement les épaules.
« Je pourrai considérer votre reddition. »
L’autre se déporta légèrement sur la gauche, vers un interrupteur d’alarme.
« Ch ch ch, mauvaise option. »
« Pas pour moi. »
Sa main s’approcha du bouton.
« Baissez votre bras, je vous prie. »
« Allez vous faire voir. »
Une nouvelle onde de choc dans la Force, et Travis compris qu’il était déterminé. Les deux hommes firent pratiquement feu en même temps, mais le manchot eut le réflexe d’esquiver une milliseconde avant Vadar.
Il senti l’odeur d’ozone, au moment où le laser lui effleurait presque le visage.
L’autre reçus la décharge en pleine poitrine et commença à s’effondrer…
…avant d’être rattrapé par son assassin qui le posa en douceur sur le sol.

« Stupéfiant…venant…d’un Jedi. », ahana le mourant en tentant de saisir quelque chose dans une des poches de son uniforme.
« À dire vrai, je ne suis plus tout à fait sûre d’en être un. », rétorqua Travis, alors que le soldat rendait son dernier souffle.
Il resta figé un instant à observer sa victime l’air insondable, et se saisit de l’objet qu’il tenait serré dans sa main.
Il s’agissait d’un holoprojecteur.
*Curieux. *, songeât-t ‘il en fourrant la pièce dans sa combinaison.
Au même moment, le vaisseau tout entier tressauta lorsqu’Héral coupa les moteurs et l’hyperpropulsion, et le jeune homme dû prendre appuis sur la paroi pour ne pas tomber.
« Bon. », déclara le togruta en rejoignant Travis. « Maintenant, il faut trouver Velvet et la cabine de pilotage. »
Le Jedi lui emboita le pas, mais ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil en arrière.

Il s’agissait du premier homme qu’il tuait de sang-froid.
Darth Velvet
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Les bottes des sentinelles résonnent lugubrement sur la passerelle métallique, cadencés et rapides. Le pas d’hommes qui ne souffrent pas qu’on les retarde par quelques curiosités mal avisées. Les rares membres d’équipage que nous croisons avisent des uniformes calcinés pour aussitôt se plonger sur leurs tâches usuelles, les regards furtifs et intrigués sous des paupières semi-closes, les mains suspendues et immobiles, mais les lèvres irrémédiablement scellées. La peur suinte de leur peau perlée de sueur, à telle point qu’elle envahit la Force d’un miasme malsain, nauséabond et huileux. Oui, le personnel de ce vaisseau, des soldats jusqu’aux techniciens, exsude une anxiété sourde qui coulent sur nos peaux en une mélasse visqueuse et glaciale, infiltrent nos chairs d’une appréhension, d’une tension presque douloureuse. Là, à un souffle de mes hommes, ombre de leurs ombres, vacillement de l’air dans leur sillage affirmé, je ressens les relents de cette affliction d’autant plus vigoureusement que je suis drapée de Force. Un saisissement. Oui, à l’image d’un saut dans une eau polaire, lorsque le liquide se referme sur nous, que le froid envahit chaque atome de notre être jusqu’à les entrechoquer violemment, qu’il chasse toute l’air de nos poumons, bloquant notre respiration, resserrant notre gorge, nous invitant à la tétanie dans son univers de ténèbres.

Je ne sais ce qui provoque ce sentiment, cette obscurité, cette inquiétude sous-jacente et cette exhalaison fétide d’épouvante dissimulées sous une soumission exagérée. Nous aurions dû être inquiété, on ne laisse pas décemment passer deux hommes en lambeaux d’armures vaquer à leur guise dans les couloirs d’un vaisseau, malgré leurs airs revêches et les armes à leurs ceintures. Surtout à cause des armes à leurs ceintures. Mais nul ne fait l’affront de se dresser contre nous, ou plutôt entre nous et la passerelle de commandement.

Rapidement nous pénétrons sur le ponton. L’espace s’ouvre au-delà du dôme de transparacier, dévoilant l’éclat feutré et vert de Boz Pity. Une perle de jade auréolée de la lumière crue du soleil, sur son écrin de velours noir. Je ne sais pourquoi nul colon, nul clan ou cartel ne s’est essayé, avant notre arrivée, à apprivoiser les landes verdoyantes, les grandes plaines, les forêts d’arbres millénaires ou de découvrir les secrets que recèlent les ruines anciennes des Gangantelles. La planète n’est pourtant ni hostile, ni difficile, juste sauvage. Mais qu’importe, elle est aujourd’hui notre foyer, notre refuge et chacune des sentinelles donneraient sa vie pour la protéger.

Là, au centre de ce lieu de commandement sous les étoiles, deux silhouettes s’affrontent. Face à face. Le regard de l’une accroché à l’étoffe sombre de son interlocuteur alors que l’autre se perd dans l’admiration de ce ciel. L’uniforme de la femme reflète sur sa poitrine, l’éclat bref de quelques médailles. Une officier. Mais elle ne s’oppose en rien à celui qui la domine d’une tête, les lekkus enroulés sur sa poitrine, en écharpe blafarde. De ce twilek, couleur de craie et de mort, vénéneux et altier, augure ténébreux, il ne présage que des ennuis. Dans ce tandem, il est celui qui ordonne, décide, exige. Tout de sa posture à l’orgueil de ses lèvres pincées, de son aura épineuse à l’absence de grade épinglé sur sa tenue, dénote le sith.


« Lieutenant Crespin. »

Le flamboiement rubescent de son attention s’arrête sur le profil d’Esteran. Ses bras se croisent dans un bruissement de tissu soyeux et ses yeux sont comme deux meurtrières acides, de rouge et de vert poison, mais c’est la femme, une humaine pâlotte et stricte qui répond.

« Oui. Où est le Capitaine ? »

Je maudis l’instant où Esteran a rendu tangible notre présence, il n’est plus temps de reculer, d’ériger une nouvelle stratégie alors que je devine que notre couverture se délite, lentement, telle une orange que l’on pèle couche par couche, strate après strate. Il n’a pas besoin d’un seul mot pour ce faire. Juste d’une incursion brève et incisive dans la Force. Cruelle. Inquisitrice. Elle viole les sentinelles et se retire, délayant sur le visage sardonique de ce sith, un sourire torve.

« Mort, lieutenant Crespin. N’est-ce pas ? »

Esteran ne cille pas, mais, sous le métal de son armure, sa main se fait fébrile, et sa voix presque éteinte.

« Oui. »

« Lieutenant, veuillez sonner l’al…. »

Ses mots s’éteignent sur son visage devenu rictus. S’il a perçu les miens, il n’a décelé à l’ombre de leur présence la mienne. Une erreur. Le souffle de ma respiration s’égare dans la nuque de l’humaine, juste avant que ma lame ne fauche sa vie, esquissant dans la chair lactescente de son cou, un collier de perles sanglantes. Son corps choit au sol, sans un râle, sans un bruit. Et pourtant cette mort si elle ne déclenche pas les alarmes du vaisseau comme l’aurait souhaité le sith, elle éclate en affrontement, entonne les hostilités.

Vic glisse à couvert derrière une console, son blaster délivrant salve après salve d’énergie sur les impériaux présent. Estéran, profitant de cette barrière de protection, s’acharne à détruire l’accès à la passerelle pour que d’éventuels renforts ne nous prennent à revers. Quant à moi, il est ma cible. Les autres ne sont pas un réel danger, ou du moins pas un danger tel que lui. Son sabre se déploie lugubrement dans un vrombissement d’invitation.

« Des sensitifs. Ici. Sur Boz Pity. Comme c’est intéressant ! Il y en a d’autres ?»

Silence. Pourquoi répondre, alors que si nous échouons, elle n’aura d’importance puisqu’il ira de toute évidence confirmer ses soupçons directement, sans tenir compte de ce que je pourrais dire. Mais je ne peux manquer à Refuge, à ses enfants déambulant dans les salles d’apprentissage du Nexus, ses adultes venus trouvé la paix, la quiétude ou la rédemption dans notre colonie. Qui qu’il soit, son voyage se termine ici. Quel qu’en soit le prix.

« Qui est-tu ? »

Personne…. Seule ma lame rétorque, se jettant sur lui avec l’avidité d’une furie affamée par une diète prolongée de combat. Elle siffle, trace des arabesques écarlates en défi, tente à percer la garde presque parfaite de mon adversaire. Mais tout bretteur à une faille, un appui trop long, un bras un peu plus lent, une position perfectible. Celui là s’enroule tant dans la Force, jouant à projeter ses éclairs que je cueille au sabre ou esquive d’un bond, et en oublie qu’un bon combattant ne se limite pas à usage abusif de ses pouvoirs. La Force n’est rien si on l’utilise avec brutalité et sans discernement. Il ne suffit pas qu’elle soit un outil, il faut se fondre en elle, la laisser devenir le prolongement de son bras, de son esprit. Il ne faut pas la dompter, pas la dominer, pas la contraindre. Mais l’assimiler, s’harmoniser avec son essence jusqu’à devenir une unité, un entier. Lui, il se comporte en esclavagiste, use de sa puissance sans contreparties.

Ses sortilèges crissent et m’assaillent, féroces et inefficace lorsque je glisse au corps à corps, dans l’étroitesse de notre proximité. Je bloque sa main armée, de ma main libre, coule vers son dos. Il se déroule, suit mon mouvement. Un instant, ses yeux me paraissent exorbités, l’orgueil et la suffisance ragaillardis dans la nuée de Noirceur qui empoisonnent ses rétines. Un instant bref, éphémère, qui ne dure que le temps de mon désarmement. J’abandonne mon sabre entre ses doigts, chavire entre ses jambes pour me redresser derrière lui. Il se retourne arrogant, s’arrogeant une victoire qui ne lui appartiendra jamais pour s’élancer en pointe vers mon cœur, s’imaginant mon trépas bien avant que sa lame ne transperce ma peau. Je bascule au dernier instant, la chaleur du laser affleurant brûlant ma tunique, noircissant l’absinthe en dessous. Mes deux mains empoignent la garde de ce sabre, bien trop longue, et en usent. Tel un levier. Je retourne son arme contre lui, et, le transperce.


« Qui est tu ? » chevrote-t-il, tombant à genoux.

« Ta mort. » réplique Eredan, derrière moi avant que j’achève son supplice d’un mouvement délié. « Vic est blessé. »

« C’est trois fois rien ! » répond l’interressé, laconique.

« Non, c’est même assez moche. Il faut qu’Héral voit ça. »

Contacte-les, et préviens-les qu’on dépressurise le vaisseau. Un sith c’est déjà une mauvaise surprise, je n’ai pas envie qu’on en ait d’autres. Et maintenant, tu vas devoir aussi réparer ce sas… »

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