Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
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L’air était frais; la matinée naissait à peine, et un jour timide s’élevait péniblement au-delà des épaisses nappes brumeuses de la nuit. Les rues et les bâtiments, encore détrempés à la fois par la rosée matinale et des averses nocturnes, miroitaient par nappes plus sombres dans l’aube grise et morose. Des écharpes cotonneuses s’attardaient encore le long des trottoirs – l’on sentait l’humidité et le froid jusque dans l’air lui-même. Les façades lumineuses et colorées étaient encore éteintes à l’heure précoce, les échoppes bruyantes et joyeuses encore fermées au point du jour naissant.
Les rayons, comme endormis, fournissaient une lumière maigre, s’étiraient péniblement entre les nuages, rechignant à réchauffer les rues de leur maigre chaleur. Un foulard de brume s’était échoué ici contre une bordure de marches. Une jambe squelettique d’acier vint la poignarder. Le nuage, tourmenté, tourbillonna, sa substance cotonneuse chercha à s’accrocher, à prendre prise sur l’acier froid qui l’avait ainsi délogée de son repos, mais la jambe s’en vint à la marche suivante, et l’étoffe éthérée s’en alla ainsi rejoindre les siens, dans les basses ruelles où le froid et les ténèbres livraient leur dernière bataille contre la lumineuse chaleur du jour naissant – qui s’affirmerait véritablement dans quelques heures.

Zerath grimpait le long des marches, pensif. Ses yeux observaient avec une curiosité légère le bâtiment vers lequel il progressait. Au-delà d’une montée majestueuse, il distinguait déjà l’architecture élégante du si réputé temple Jedi. Il sentait en lui monter la curiosité la plus élémentaire du monde ; enfin, il allait faire la rencontre de grands maîtres, d’autres exaltés qui suivaient le dessein des tout-puissants dieux. Dans le si réputé sanctuaire aux rituels secrets, il apprendrait la source dont naissaient les émissaires de l’éternité ; à travers eux, il saisirait la clef de la sublimation, dans les sphères les plus hautes du Panthéon. Il continuait à monter, marche après marche. Combien ce moment pouvait-il être important...Il le sentait, jusqu’au plus profond de son être. De sa tête à ses pieds, à travers même les bras qui n’étaient aujourd’hui que des pâles imitations inertes de ce qu’ils avaient été, il ressentait un frisson palpable d’excitation. Ah, les grands manipulateurs de la Force, cet aspect si frappant et fondamental de la Divinité incarnée ! Qu’il lui tardait d’enfin les rencontrer !

Le chemin de Zerath le mena après les imposantes marches vers une cour entretenue avec soin – des jardins harmonieux d’une végétation tenue avec rigueur et discipline. Les plantes poussaient en ordre, pourtant en équilibre ; sans doute n’avait-on jamais fourni d’obstacle à leur progression erratique mais à l’inverse des guides doux pour pérenniser leur croissance. Ici se déliait avec grâce un lierre dont les feuilles étincelaient de perles de pluie ; et toutes les feuilles en étaient incolores, dans le jour d’argent.

Au-delà de ces jardins, où déjà allaient quelques esprits bien formés et disciplinés – sans doute quelque jardinier ou serviteur de l’Ordre, songea le Kaleesh – se trouvait le Temple lui-même. Il n’y avait personne à qui s’adresser.

Zerath pressa légèrement le pas à cette fugitive pensée. Il n’avait que trop peu de temps à sa disposition. Il était un mystère à lever, de la plus cruciale importance, et chaque seconde gaspillée réduisait les chances d’en apprendre plus.

La marche de l’être de fer le mena bientôt à l’entrée véritable du temple. Il était pareil à une cathédrale, d’une splendeur impériale et d’un solennel que seuls possédaient les édifices de la Foi. Pressé sur son sceptre, le Kaleesh battit des cils, sous son masque aux orbites lumineuses. Magnifique vision que voilà ! Des siècles sans doute d’un artisanat minutieux, d’une technologie de pointe mais pourtant d’une finesse singulière avaient forgé les grands piliers qui s’élevaient, pareils à une allée de gigantesques arbres – dont les cimes soutenaient le plafond ouvert et lumineux de l’édifice, plusieurs dizaines de mètres plus haut. Sur les côtés, des mezzanines cerclées de barrières donnaient vers les quartiers environnants – probablement quelque aire d’entraînement, de jeu, d’enseignement, les bibliothèques peut-être également, et quelque formidable archive dont on entendait parfois parler hors de Coruscant comme d’un lieu mystique où étaient enfermés les secrets les plus curieux de la galaxie. Le cardinal reptilien ne pouvait que voir l’évident lien entre ce temple et ses propres croyances. L’architecture différait drastiquement, les moyens déployés également, mais l’on ne pouvait s’y tromper...Cette splendeur, cette majesté, c’était là tout l’apanage de Shaaz’Rak, le second venu de la Faille dans le cycle cosmique ! La puissance des Jedi était-elle alors une exaltation propre à l’influence du dieu lui-même ? Que dire, alors, de leurs ennemis naturels, les Sith ? Était-ce l’oeuvre de l’Ancienne d’Obsidienne, celle qui résidait toujours dans l’Abime sans fond de la Faille, entre la noirceur des étoiles ? Shalim, première venue, s’était opposée souvent à son frère Shaaz’Rak. Mais était-ce de cette rivalité fraternelle qu’était née l’opposition des Jedi et des Sith ?

Zerath se stoppa face au buste de quelque humain. Taillé dans le marbre et reposant sur un haut pilier d’identique composition, il était gravé d’une inscription que l’alien ne prit pas la peine de déchiffrer, tout à sa réflexion. Il était l’un des plus importants représentants de son peuple, il était le plus à même des siens pour discerner les messages des grands Éternels. Mais si toutes ces guerres de République et d’Empire n’étaient fondamentalement que des guerres entre dieux dissimulées sous des marionnettes, quel était son rôle ? Ses yeux détaillèrent un instant le visage creusé dans la roche blanche, ciselée et polie finement. Si la guerre devait se poursuivre, alors il n’existait qu’une réponse. Il devait y laisser son empreinte. Plus vive et plus marquée qu’aucune autre. Il n’était d’autre choix, songea le vieux Kaleesh. Marquer l’affrontement non pas par le sang, mais en se distinguant, en apparaissant à chaque côté, à chaque combattant comme une figure de proue. Non pas un simple officier, non pas un boucher, non pas un responsable d’une quelconque déroute – ce serait bien trop insuffisant !

Il devait être l’architecte. L’architecte d’une toile tissée avec le plus grand soin, avec sagesse et discernement, avec une minutie à faire pâlir même les meilleurs généraux de son peuple ! Il sentit dans sa poitrine son coeur battre plus fort. Oui...L’idée de quelque intrigue insondable captivait son intérêt au plus haut point. Jusqu’où pourrait-il bien mener tout ceci ? La simple pensée du futur qui l’attendait était grisante.

Mais, avant toute chose, il fallait plus d’informations. Zerath se levait certainement bien avant la venue des premiers rayons de soleil, pour ses propres rites. Il n’avait cependant aucune liturgie à effectuer en ce temple – si splendide soit-il, ou plutôt une seule : il attendait une maître Jedi. Il ne savait guère à quoi elle ressemblerait exactement, si ce n’était qu’on la nommait maître Vespen et que cette maître correspondait exactement au profil que le Kaleesh recherchait pour ses besoins. Il lui fallait une personne excellant en infiltration, apte à se fondre dans le décor ; pourtant il avait également besoin que cette personne puisse le protéger lui-même si le besoin se faisait sentir. Et si quelque garde du corps évident aurait pu faire l’affaire pour la seconde tâche, il ne connaissait que peu de personnes – même dans le corps militaire – qui auraient pu accomplir la première avec succès. Remplir les deux critères simultanément réclamait des talents particuliers. Des talents que, lui avait-on assuré, maître Vespen possédait absolument. On lui avait certifié sa force, car ayant terrassé un certain Nero – monarque de quelque monde dont Zerath ne connaissait guère le nom. Il s’était cependant renseigné promptement, jugeant que tout élément de la sorte ne pouvait être laissé au hasard ; si la valeur de cette maître était plaisante à apprendre, il s’inquiétait de son ignorance au sujet du monarque déchu, car tout empire décapité de sa tête pensante devenait un pion sauvage sur l’échiquier de la guerre qu’il n’était pas sage d’ignorer.

Fort des auspices positifs concernant cette maître Vespen, l’on avait convenu par le biais de la Chancellerie d’une entrevue avec elle au plus tôt, et ainsi Zerath était-il à présent au temple ; car il supposait la Jedi disposée à partir sitôt l’affaire tirée pleinement au clair – tout du moins songeait-il que la Chancellerie avait eu la présence d’esprit de transmettre toutes les informations qui étaient nécessaires à la concernée. Le point de rendez-vous était face au buste du maître Aernold ; c’était précisément là que se tenait actuellement le vieux Kaleesh, tenant de sa main droite son sceptre d’os tandis qu’il frottait de la gauche son avant-bras métallique, pensivement. Anoat ne serait pas une mince affaire, pas avec son corps actuel...Il n’avait jamais été fait pour le feu de l’action. Mais il devait voir de ses yeux ce nouvel ennemi. Les rapports de quelque agent infiltré ne suffiraient pas. Il voulait sentir et déterminer par lui-même ce qui se tramait dans ce monde, avant qu’il ne soit trop tard.
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Saery, de retour sur Ondéron après avoir vaincu Darth Nero sur Gree, avait repris des activités qui la plongeaient dans une certaine nostalgie. Éduquer sa padawan était devenu son quotidien, ce qui lui rappelait ses premiers jours avec sa précédente élève. À l’époque, la chevalière Vespen n’était pas aussi sûre d’elle. Plus verte et moins adroite, elle ne pouvait qu’imiter ce que son propre maître avait fait pour elle. Cependant, elle n’était plus cette jeune chevalière inexpérimentée. Saery était maintenant une maître que l’on avait félicité d’avoir tenu tête au Roi de Belkadan, un seigneur Sith réputé pour être l’un des plus féroces guerriers de l’Empire.  

Saery, elle, n’y voyait que la volonté de la Force. Si les quelques Jedi qui pensaient la connaître estimaient que cette victoire l’avait enorgueillie, seuls les plus éclairés savaient que Maître Vespen n’était pas assez naïve pour se complaire dans un tel triomphe éphémère. Combien de Jedi avaient péri sur Gree ? Combien de Sith avait-il fallu retourner à la Force pour leur faire comprendre que leur plan était voué à l’échec ? La victoire d’un maître sur l’autre avait-elle vraiment toute la valeur que certains semblaient accorder à cet événement ?  

Pour Saery, il s’agissait simplement de rester en vie, de continuer à influencer la galaxie avec la volonté mystique qui la guidait. Et, pourtant, quand elle se levait le matin pour faire la leçon à sa padawan, elle ne pouvait s’empêcher de remercier la Force de lui avoir donné l’occasion de voir cette nouvelle journée. Était-ce pour Lauren, ou bien simplement pour elle ? La Jedi n’avait pas vraiment de réponse. La seule chose dont elle était certaine, c’était d’à quel point elle détestait l'horreur qu’était la guerre avec l’Empire. 

Naturellement, elle n’avait pas envie de se battre dans cette tempête capricieuse qu’était ce conflit. Selon elle, personne de sain ne combattait par plaisir. Seulement, elle savait qu’il fallait des personnes capables de montrer les crocs au bon moment. Et, en cette période, la guerre n’en était probablement plus au point où éliminer quelques Sith dans les ombres suffirait à calmer les choses.  

Jusqu’ici, ses discrets exploits avaient porté leurs fruits, mais ce dernier coup qu’elle avait asséné à l’Empire, lui, semblait être d’un tout autre niveau aux yeux de ses confrères. Alors, après tout, peut-être qu’il s’agissait vraiment d’une victoire à célébrer, mais à quel prix ? 

Maître Vespen secoua la tête. Ce long débat interne lui brouillait parfois les idées, lorsqu’elle s’ennuyait. Elle avait déjà pris sa décision, ça ne lui servait à rien d’y penser sans cesse. Elle avait choisi de s’engager plus directement dans le combat contre les Sith et leur empire. Sa dernière mission lui avait, pour ainsi dire, ouvert les yeux. 

Ce qu’elle avait vécu sur Gree était d’une autre envergure. Elle n’avait pas vu les malheurs que les Sith infligeaient aux populations pour discréditer les Jedi, ni leurs plans pour déstabiliser la république de l’intérieur. Non, cette fois elle avait vu les siens mourir à ses côtés sur le champ de bataille. Et, bien que Saery n’ait jamais été crédule au point d’ignorer que de telles choses existaient, les observer avec ses propres yeux l’avait à nouveau piquée à vif. Elle sentait encore ce sentiment d’injustice qu’il lui fallait abreuver d’une volonté de fer afin de le faire taire.  

Il lui fallait maintenant peser plus lourd dans la balance. Ses missions étaient importantes, mais dénicher les Sith infiltrés était un travail long et fastidieux. Alors que, droit devant elle, elle pouvait trouver ceux qui menaçaient directement la république. Elle pouvait les imaginer faire face à ces jeunes Jedi, qui s’après elle, étaient trop peu mûrs pour savoir comment se comporter en situation de crise.  

Bref, il était temps de s’y mettre. 

Ce jour-ci. Saery devait rencontrer un certain sergent Ular’Iim. D’après le court dossier qu’elle avait pu consulter, il s’agissait d’un cyborg kaleesh qui était une grande figure pour son peuple et sa religion. Cependant, ce n’était pas pour discuter Dieux et Déesses que la république l’avait envoyé rencontrer les Jedi. Il s’avérait que ce prélat, comme il était désigné, avait habilement pris le contrôle d’une flotte entière et avait su se sortir avec brio des griffes impériales.  

Un stratège tribal... un étrange personnage, pensait l’ombre. Pourtant, ça ne l’empêchait pas d’avoir son importance, car celui-ci avait découvert des preuves qui venaient appuyer les soupçons des habitants de Gerrenthum, planète proche d'Anoat, qui pensaient que leurs voisins s’étaient lancés dans une course à l’armement. Il était clair que quelque chose se tramait dans ces lointaines terres totalitaires. S’y infiltrer afin d’en savoir plus était donc tout à fait logique et juste, stratégiquement parlant.  

Il avait été annoncé que le sergent tenait à participer à la mission. Il fallait rencontrer l’homme en question et le jauger un peu, pour voir quel genre de méthodes seraient exploitables pour se faufiler sur cette planète qui se voulait si secrète. 

De loin, en tous cas, le kaleesh semblait bien grand. C’était mauvais signe... Et de près, par la Force ! Il l’était encore plus ! Cette cape le rendait incroyablement massif et il traînait une sorte de sceptre... d’os ? Le bougre ne passait pas inaperçu. Saery, curieuse, s’approcha un peu plus à l’insu de l’imposant sergent. Tandis que celui-ci s’occupait en regardant les détails du buste qui se trouvait là, la Jedi l'observait à lui. Discrètement, elle cherchait à voir ce que cette cape pouvait bien cacher. C’était sa chance : elle l'analysait sous un angle qu’elle ne pourrait plus avoir une fois qu’il l’aurait repérée !  

Son attention était centrée sur une main composée d’un métal pâlot : il s’agissait d’un cyborg, après tout ! Il devait bien avoir quelques parties remplacées par-ci par-là ! Il lui fallait en voir plus, elle s’avança encore, comme si de rien n’était. Elle ne se rendait pas vraiment compte que, même si elle était toute proche, ce qu’elle faisait s’apparentait plus à du voyeurisme qu'à de l’inspection. Quand Zerath se tournait vers la droite, elle s’avançait sur sa gauche. Quand il s'attardait sur le côté gauche de l’œuvre d’art, Saery s'avançait sur sa droite. Ses yeux parcouraient le corps artificiel avec grand intérêt. Elle se demandait comment quelque chose aux airs si rustiques pouvait aussi bien fonctionner. Elle avait pris son temps, mais elle en était venue à une évidente conclusion : ce grand squelette mouvant n’était définitivement pas fait pour être discret. 

— Impressionnant...
Se laissa-t-elle déclarer. 

Machinalement, comme si elle réalisait que son nouvel interlocuteur pouvait sursauter en découvrant sa présence, la Jedi se recula d’un pas. 

— Je ne vous ai pas trop fait attendre, j’espère ? Demanda Saery en souriant innocemment avant de s’incliner. Enchantée, sergent. Je suis Saery Vespen. Comme vous le savez, je vais vous accompagner pour votre voyage.  

 D’un geste de la tête, elle balaya l’endroit du regard. La seule personne qu’elle aperçut était sa padawan qui traversait l’allée pour les rejoindre.  

— Je ne vais pas perdre de temps et vous le dire de suite : vous faire entrer sur Anoat risque d’être pénible.  

Elle plaça ses mains sur ses hanches. Elle se voyait déjà en train d’à nouveau jouer les contrebandières. 

— Enfin, non. Vous y faire circuler sera le plus dur, mais on avisera ! 

Les planètes avec un système tel que celui d’Anoat ont tendance à tout surveiller. Saery n’allait pas embrouiller l’esprit de tous ceux qui allaient les questionner au sujet d’un grand cyborg aux airs de mystiques. 

— Pour ce que nous allons chercher là-bas, nos yeux seront utiles, mais j’ai aussi pris de quoi ramener des preuves un peu plus concrètes. Dit-elle en passant délicatement son gant doré sur sa ceinture à outils. 

Saery n’avait plus vraiment l’habitude de porter tous ces accessoires à sa taille avec sa combinaison noire. Pendant longtemps, et presque quotidiennement, elle les cachait sous son long manteau pour ne pas se faire embêter. Si bien que sa main s’arrêta sur la barre de son holo-écran, comme pour s’assurer qu’il était bien là. En fait, elle avait un peu l’impression d’être à découvert. 

— Il ne me manque plus qu’à vous présenter Lauren, ma padawan que voilà, avant de décoller. Dit-elle en se tournant vers l’intéressée qui arrivait. 

Maître Vespen aimait aller vite et bien. Elle était sûre que bon nombre de ses confrères auraient invité le prélat à s’installer pour faire connaissance et boire un thé, mais une chose restait incertaine : celui-ci pouvait-il boire, au moins ?

Lauren Aresu
Lauren Aresu
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Un papillon multicolore attira l’œil distrait de Lauren, flottant plus léger encore que le vent. Le jour venait à peine de pointer le bout de son nez que les ailes de l’insecte captaient déjà les quelques rayons qui filtraient par le ciel nuageux. Elle avançait fébrilement, ses muscles étaient tendus par un curieux mélange d’appréhension et d’excitation. Le long de cette allée aux fleurs colorées et aux arbustes soigneusement taillés, seuls les sons feutrés des pas de la padawan et les derniers cris des insectes nocturnes étaient audibles. Malgré tout, étouffées, des paroles lui parvenaient : une voix féminine, Maître Vespen, et la voix masculine effrayante, presque robotique, du mystérieux inconnu qu’ils devaient rencontrer.

Elle se souvint de l’allure entraînante de son maître lorsque celle-ci lui avait annoncé la nouvelle. Une mission ! Pour la première fois depuis son arrivée au temple, trois ans auparavant, elle mettrait enfin les pieds dehors. Malheureusement, leur destination ne correspondait pas aux alléchants lieux de villégiature habituels, bien loin s’en fallait ! Mais pour Lauren, cela signifiait qu’on plaçait assez de confiance en elle pour l’accepter sur quelque chose, puisqu’elle ne connaissait pas les détails exacts de leur futur voyage, d’aussi important. C’était à la fois rassurant et… angoissant. L’Echani gagnait en maturité et, avec celle-ci, arrivaient les nombreuses responsabilités et situations inconfortables de même que les moments de doute. Et comme d’innombrables padawans avant elle, elle se posait la question : serait-elle à la hauteur ?

Elle serra les points, résiliente. Pourquoi ne le serait-elle pas ? Après tout, Maître Vespen avait veillé avec grand soin à ce que ses entraînements soient efficaces et qu’elle parvienne, avec le temps, à surmonter les difficultés qui l’handicapaient jusqu’alors. Grâce aux exercices sur le maniement du sabre, elle put enfin réaliser de fulgurants progrès quant à la dextérité de son bras robotique. Elle ne le considérait plus comme une partie étrangère à son corps, mais comme une extension utile de celui-ci. Elle constata même qu’il lui permettait d’accomplir des tâches qu’un bras fait de chair n’aurait pu exécuter. Leurs répétitions sur la Force consolidèrent son appréhension du phénomène et Lauren put apprendre à mieux contrôler son esprit si prompt à divaguer. De plus, quelques sessions au sein des imposantes archives Jedi, tant dans les voûtes de ses vastes pièces que par la postérité qu’elles véhiculaient, lui enseignèrent l’histoire galactique et les prouesses de leur Ordre. Souvent, Lauren s’attardait pour parler avec les maîtres responsables du lieu. Leur élocution fluente, leur sagesse intarissable et les histoires héroïques captivaient toujours l’attention de la padawan. Ils se prêtaient volontiers, affables, à leur rôle de conteur quand ils le pouvaient.

Mais, Maître Vespen n’était pas de ces maîtres aux préceptes justes, mais ennuyeux. Disons qu’elle faisait preuve d’une originalité qui déplaisait parfois à ses pairs, mais qui arrachait toujours un rire franc à Lauren. Et des anecdotes, elle en aurait à raconter à son propre padawan, un jour. Les souvenirs de leur dernière rencontre avec un droïde, durant ce que la Jedi appelait les sessions bidouillages, illuminèrent son visage. Oh oui ! Alors même que son maître lui montrait comment trafiquer un droïde pour comprendre son fonctionnement et s’en servir d’une manière quelque peu détournée afin de récupérer ses informations, Maître Vespen avait vraisemblablement touché l’un des centres de la parole et celui-ci se mit soudainement à débiter un flot d’insanités à faire rougir un mercenaire. La réelle question fut de comprendre qui avait jugé nécessaire d’intégrer un tel vocabulaire fleuri au tas de ferraille, mais elle fut vite noyée sous leur contagieux fou rire.

Seuls une dizaine de mètres séparaient maintenant Lauren du singulier duo. Les yeux écarquillés de l’Echani dévisagèrent leur invité. Du haut de son mètre soixante-deux, la padawan semblait rétrécir encore face au géant paisible. Les deux têtes se tournèrent vers elle. La main de l’homme cliquetait sur sa canne et Lauren réalisa alors qu’elle était tout aussi artificielle que la sienne. Lui aussi ! Pourtant, lorsqu’il baissa les yeux vers elle, elle rentra un peu plus la tête entre ses épaules. Au-dessus d’eux, les nuages ne paraissaient pas vouloir laisser filtrer plus de lumière et, tels d’imposants monstres difformes, continuaient d’avancer lentement. La jeune fille chercha le regard rassurant de son maître et se força, intimidée, à saluer l’invité qui semblait si curieusement intrigué par la statue à l’entrée du temple que padawans et Jedi ne voyaient plus, tant ils étaient accoutumés à sa présence.

— Enchanté, dit-elle d’une petite voix et, se tournant vers Maître Vespen, bonjour Maître ! fit-elle en s’inclinant poliment face à eux.
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
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Zerath patienta en silence, laissant s’exprimer la maître. Elle était discrète ; il ne l’avait purement point entendue ni vue venir. Il s’était certes perdu dans ses pensées, néanmoins elle n’avait pas fait le moindre son en approchant, pas le moindre pas sur le carrelage, pas le moindre froissement d’étoffe, pas un cliquetis de métal ou de penditif et autre bibelot malmené par un mouvement de poignet. C’était une humaine, de ce que le Kaleesh semblait distinguer – ou l’une de ces races similaires en tout point aux humains si ce n’était par quelque variation de couleur de peau, de chevelure encore ou de taille. C’était peut-être en raison de quelque trait génétique particulier que maître Vespen possédait deux yeux améthyste et p ar cet héritage particulier de sa lignée également que ses cheveux prenaient les teintes tantôt de la cendre tantôt du nacre sous les premiers rayons joueurs et guillerets de l’aube à présent bien affirmée.
Le Kaleesh observait son interlocutrice derrière son masque d’acier, étudiant les mouvements qu’elle effectuait en parlant – ceux-ci étaient discrets et mesurés – mais avant tout et surtout le ton de sa voix et la tournure précise de ses phrases. L’on néglige trop souvent la puissance des mots, et chaque phrase possède un sens exact révélateur de l’intention de celui qui la prononce mais également de sa personnalité ; ou tout du moins de sa façon de raisonner. Zerath n’ignorait pas cette vérité, car l’on n’occupait pas un rôle de prélat sans savoir écouter au-delà de ce que les mots semblaient se limiter à vouloir révéler. En chaque phrase était une volonté indicible qu’il fallait pourtant toujours parvenir à distinguer.

Or à travers les mots de maître Vespen, il sentait un enthousiasme à la limite de l’espièglerie, mêlé pourtant à une diligence masquée. Elle ne s’encombrait pas d’entrer dans les détails, ni même dans quelque salut cérémonieux si ce n’était une révérence – que Zerath lui rendit par une révérence propre à son peuple. Il demeura silencieux sur le succinct exposé de celle qui devait assurer sa garde ; ceci, jusqu’à la mention de la Padawan. Ce mot n’évoquait rien au vieil alien ; peut-être s’agissait-il de quelque dialecte local ou propre à maître Vespen ? La Padawan désignée était une jeune fille – également d’apparence humaine comme maître Vespen. Lauren. Et elle arborait des cheveux identiques à la Jedi, tout en occupant également une fonction au Temple. Il devait sans doute s’agir d’un mot dans un langage que Zerath ne parlait pas pour dire « fille » ? L’Ular’Iim avait appris que les humains transmettaient leur peau comme leur chevelure à leurs progénitures ; or il était certain que la chevelure blanche était la marque de l’âge chez les humains ou de quelque trait extrêmement rare. Les chances que cette Lauren ait pour nom de famille « Vespen » étaient donc plutôt hautes, jugea-t-il. Les Jedi faisaient-ils entrer leurs enfants au Temple à leur suite ? Curieux rite que voilà, mais il son rôle n’était guère de juger des coutumes étrangères aux siennes.


« - Enchantée, dit la désignée Lauren à son égard, puis d’ajouter à l’intention de celle que Zerath jugeait sa mère : bonjour Maître ! »

Et ainsi Zerath prit-il enfin la parole, certain des titres et dénominations qu’il devait employer envers ses deux collaboratrices :


«  - Un plaisir pour moi de vous rencontrer enfin, maître Vespen, Padawan Lauren. (Il n’était pas certain que Padawan puisse former un titre à part entière. Il espérait cependant que si ce n’était pas le cas ses interlocutrices sauraient ou le corriger ou lui pardonner, lui qui venait de contrées lointaines.) Je suis Zerath Ular’Iim, serviteur de la République et de ses armées pour l’heure présente. J’ai entendu parler de vos exploits face au seigneur Nero, que vous avez brillamment jeté à bas. Vous savez déjà que je viens au nom de la guerre vous tirer de la paix de votre temple, et que nous irons en territoire incertain, à Anoat la recluse.
Ne craignez guère pour ma propre discrétion, maître Vespen, car Anoat est un monde froid; et ceci joue certainement à notre avantage car je pourrai dissimuler mes propres particularités sous une tenue plus adaptée aux climats glacés. S’il est certain qu’un accoutrement particulièrement fourni attirera l’attention de quelque curieux, il sera non moins sûr que cette attention sera moins vive et directe qu’à la vision de mon corps dans toutes ses parures.
 
»

Il n’était guère enthousiaste à l’idée de se séparer de ses affaires de prière car elles étaient d’une valeur incommensurable à ses yeux. Cependant, c’était une meilleure option que de les soumettre à l’épreuve d’un monde hostile et de courir le risque de compromettre une opération entière. Zerath était attaché à ses traditions mais il n’était pas stupide ! Son index effilé s’éleva en l’air, alors qu’il poursuivait, presque interrogatif.

«  - Sans doute devrons-nous faire quelque chose à l’égard de votre chevelure également. Car si la monstruosité du cybernétisme attire l’oeil et frappe la mémoire, que dire de la coiffe nacrée ? Je ne suis guère humain, mais la beauté est aussi frappante que la laideur pour peu qu’elle soit extrême. Mais sans doute pourrons nous discuter plus avant de ces détails plus tard, car le temps nous manque maître Vespen – et cruellement ! Si vous avez réuni toutes les affaires que vous jugez nécessaires, permettons-nous de les amener jusqu’à la sortie du temple, où se trouve notre moyen de transport - courtoisie du service des armées.

Là, nous traiterons de ce qui nous est su et de ce que nous ignorons, que rien ne nous échappe. Nous devons nous mettre en route, pourtant je dois vous mettre en garde : toute impatience pourrait bien nous être fatale ! Aussi j’ai bien l’intention de partager avec vous ce que j’ai pu apprendre de Anoat, ce que j’en soupçonne également. J’écouterai attentivement ce que vous même savez. En matière de pratique – d’infiltration pour parler proprement – je suis votre humble élève. Mais pour l’heure, excusez mon manque de courtoisie et permettez moi de vous presser : avez-vous tout ce qu’il vous faut ou devons-nous aller chercher quelque objet qui vous ferait défaut pour le voyage ?
 »
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Saery, en bonne Jedi, s'abstint de répondre au cyborg. Elle estimait qu'il était naïf de penser qu'il serait suffisant de se cacher sous de lourds vêtements pour rester discret lorsque l'on atteint les deux mètres de haut. Peut-être le sergent s'imaginait-il que faire du tourisme dans les grandes allées suffirait à découvrir les plus sombres secrets d'Anoat ?

En tous cas, elle n'avait pas à s'en faire au sujet de la conversation : le prélat aimait parler ! Sa maîtrise du basic lui permettait de se lancer dans de longues phrases aux airs dramatiques, si bien qu'il aurait presque pu inquiéter la Jedi avec toute la pression qu'il se plaisait à installer.

Une main sur la hanche, l'autre balançant dans le vide, la Jedi jeta un regard à sa padawan. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour songer à son équipement qui n'attendait que d'être embarqué, comme le suggérait le sergent. Sa padawan, elle, s'était saisie de l'un de ces sabres que l'on prêtait aux padawans.

— Ne vous en faites pas, sergent. Nous n'allons pas nous rendre là-bas les mains dans les poches. Allons plutôt voir ce vaisseau.

Saery avait envie d'ajouter qu'elle avait de mauvais souvenirs avec la notion de discrétion de certains services militaires, mais être aussi négative n'apporterait rien de bon. Elle avait peur de se voir offrir un voyage à bord d'un vaisseau paré de logos républicains et d'autres signes bien trop voyants pour pouvoir entrer dans l'atmosphère d'un monde qui se voulait si fermé.

Heureusement, en arrivant devant l'engin, Saery put constater qu'il n'était pas si horrible que ce qu'elle pouvait se l'imaginer. Il s'agissait d'un petit vaisseau cargo customisé. Vu son apparence, ce n'était définitivement pas un vaisseau d'origine militaire. Il avait probablement appartenu à un contrebandier avant d'être saisi et gardé au chaud pour ce genre d'occasions.

Saery monta à bord et observa que son intérieur était bien plus harmonieux que le patchwork de métaux qui composait sa carlingue. L'ancien propriétaire n'avait sûrement jamais senti le besoin de faire des travaux d'intérieur. Tout ici avait été nettoyé. Peut-être un peu trop, même. C'était comme si on avait enlevé une partie de l'authenticité de ce brave vaisseau.

La Jedi emprunta le petit couloir qui menait à la cabine de pilotage. Elle fut étonnée de voir qu'ici aussi tout brillait. Curieuse de voir si tout était si bien entretenu, elle attrapa la poignée de l'une des trapes qui masquaient quelques composants et d'autres câbles. En tirant à peine, la poignée lui resta dans la main tandis que la portière s'effondra sur le sol. Là, elle put voir un gros noeud de fils gris relier tout ce que ceci ne masquait pas. Saery resta un peu bête, à regarder la poignée qu'elle tenait, puis elle se mit à sourire.

— Comme à la maison ! Lança-t-elle.

Posant ce qu'elle tenait ici, elle enjamba ce qu'elle venait de faire tomber sans y prêter plus d'attention. Elle rejoint un homme qui s'était levé pour voir d'où venait le fracas qu'il venait d'entendre.

— Enchantée ! Vous êtes le pilote ? Demanda Saery.

— Euh... Enchanté ? Répondit l'homme, pas vraiment sûr de lui. C'est bien moi, oui.

— Alors, ne perdons pas de temps, on y va ! Lança la jeune femme, pour éviter le sujet de la trappe.

Enjambant à nouveau le tout, elle fit demi-tour pour rejoindre sa padawan et le sergent.

— Bien ! J'espère que nous n'avons pas d'autres membres d'équipages, parce que le moins sera le mieux.

Elle se tourna vers Lauren tandis que l'engin se mit à vibrer doucement pour décoller.

— Et maintenant que nous sommes partis, il est temps de t'expliquer ce que nous allons faire, ma chère padawan !

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