Karm Torr
Karm Torr
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— Rien à déclarer ?
— Nope.

Les deux mains dans les poches de son sweat à capuche, le casque autour du cou, dont on pouvait entendre s’élever un peu de musique électronique, Karm ressemblait à n’importe quel adolescent en plein voyage, dans le grand hall de débarquement d’Ala Galada, la Cité des Deux Soleils.

La foule qui se pressait aux postes de douanes ne ressemblait guère à celles qui, partout dans les grands spatioports de la Galaxie, répondaient aux mêmes questions. À Ala Galada, les Non-Humains étaient rares, très rares : Humains et Presque-Humains formaient l’essentiel du personnel, l’essentiel des voyageurs et l’essentiel des résidents. Il fallait se plonger dans les niveaux inférieurs de l’immense station spatiale, là où vivaient et travaillaient les plus infortunés, près des unités de retraitement et des conduits d’évacuation, pour apercevoir quelqu’un d’autre.

— Qu’est-ce que c’est que ça, interrogea la douanière, en désignant sur l’écran du scanner à bagages la forme longue et incurvée du sabre-laser fourré au milieu des vêtements.
— Mon vibromasseur, répliqua l’Ark-Ni du tac-au-tac, fidèle à lui-même, bien conscient que les armes étaient strictement interdites sur la station.
— Monsieur, je vais vous demander de me suivre.
— Ce n’est pas une arme.

Le Jedi avait fait esquissé un léger geste de la main, pendant qu’à quelques mètres de lui, les autres voyageurs, retenus de l’autre côté du portique, commençaient à s’impatienter. La douanière fronça les sourcils et le jeune homme accentua la pression qu’il exerçait sur son esprit.

— Vous pouvez me laisser passer.
— Je peux vous laisser passer.

Elle lui rendit d’un air un peu absent ses papiers coruscantiens — l’une des nationalités par défaut adoptées par les Jedis non-républicains lorsqu’ils étaient naturalisés après avoir définitivement intégré l’Ordre — et Karm récupéra son sac à dos sur le plateau flottant, pour le jeter sur son épaule. Quelques secondes plus tard, il disparaissait au milieu de la foule, pour gagner l’un des ascenseurs qui le conduiraient quelques niveaux plus bas, dans les quartiers sans histoire pour la classe moyenne, celles des touristes du commun et des employés ordinaires d’Ala Galada, où Luke l’attendait dans une chambre de motel.

L’Hapien l'avait précédé sur la station, quand ils avaient appris que les services d’investigation scientifique de la République, en analysant soigneusement l’épave du Trépidant, le cargo bakurien qui avait explosé lors de leur première mission ensemble, avaient déterminé que l’explosif utilisé correspondait à une composition chimique caractéristique des attentats perpétrés par Action Secrète, un groupe de terroristes mercenaires dont le quartier général, disait-on, se situait quelque part sur Ala Galada.

Retenu par son audition à la sous-commission sénatoriale sur le déplacement des populations réfugiées et la formation de corps exploratoires, Karm avait dû rester sur Coruscant deux jours de plus, laissant à Luke le soin de repérer les lieux et rassembler les premières informations, une tâche pour laquelle l’Hapien avait de toute façon bien plus d’expérience que lui.

Malgré toute leur préparation commune, entrecoupée d’entraînements martiaux et d’étreintes tout aussi physiques, l’audition avait été un quasi-désastre : l’Ark-Ni s’était décomposé face à des politiciens aguerris et c’était fort déprimé qu’il avait embarqué sur le premier vol commercial en direction de la Cité des Deux Soleils, en songeant que malgré toute la confiance que Luke plaçait en lui, son ambition de devenir Maître pour réformer, à son humble mesure, l’Ordre Jedi était vouée à l’échec.

Il avait passé le voyage à regarder les distorsions de l’hyperespace en écoutant de la musique, laissant ses pensées vagabonder tantôt vers la mission qui l’attendait, tantôt vers Luke. Deux semaines s’étaient écoulés depuis qu’ils s’étaient embrassés pour la première fois, depuis qu’ils avaient fait pour la première fois l’amour, et les sentiments de Karm n’avaient en rien perdu de leur force, bien au contraire. Ils étaient d’autant plus solides qu’auprès de Luke, il avait l’impression d’apprendre beaucoup : sur son âme, sur son corps, sur la Force, sur les enquêtes, sur la politique, sur la vie en général.

La perspective de retrouver Luke et de progresser dans leur enquête commune sur l’attentat qui avait coûté la vie à l’équipage du Trépidant étaient ainsi le seul motif de réjouissance de sa journée. Découvrir Ala Galada n’en était certainement pas un. La station spatiale avait été financée par quelques riches trilliardaires aux idées ouvertement racistes. En orbite autour d’un système d’étoiles binaires, elle offrait dans ses vingt niveaux supérieurs des résidences temporaires ou permanentes luxueuses. Les vingt niveaux d’en-dessous étaient consacrés au commun des mortels, surtout aux amateurs de jeux d’argent ou de bronzage express, tandis que les vingt niveaux inférieurs étaient occupés aux livraisons et aux services essentiels, assurés par des employés payés une misère, mais qui bénéficiaient d’un logement, d’un emploi quasi assuré et de conditions de sécurité infiniment meilleures que dans les quartiers pauvres des grandes villes sur les autres planètes de la Galaxie.

On supposait qu’Action Secrète s’était établi à Ala Galada à cause de la protection de l’un ou l’autre des notables influents et parce que la République n’enquêtait guère sur ce qui se tramait dans cette station pourtant située sur son territoire : l’influence et la fortune des copropriétaires de la Cité suffisaient à assurer que les prérogatives de leur service de sécurité privé ne soient presque jamais violées. Karm et Luke avaient donc jugé préférables de faire profil bas et de se mêler aux autres voyageurs.

Le motel qu’ils avaient choisi était l’un de ces établissements sans histoire comme il y en avait des dizaines dans les niveaux centraux. Personne ne songea à poser de questions à Karm quand il traversa le lobby d’un pas décidé pour gagner les escaliers. Les couloirs étaient calmes, les chambres étaient calmes et le Chevalier doutait qu’il se fût jamais rien passé d’extraordinaire entre ces murs-là. Arrivé devant la chambre qui portait le numéro qu’ils avaient réservé, il posa une main sur la porte et laissa l’onde de sa présence se propager dans la Force jusqu’à Luke.

Quand l’Hapien vint lui ouvrir, Karm se glissa dans la chambre et, à peine la porte refermée, il y plaqua Luke, laissant son sac à dos glisser par terre, pour embrasser son compagnon, parce les quarante-huit heures de leur séparation lui avaient paru bien trop longues. Sa main s’était glissée sous le haut de Luke pour se poser au creux de ses reins, comme souvent désormais, et le retenir contre lui, tandis que l’autre caressait sa nuque. Le baiser dura et dura encore, jusqu’à ce que Karm consentit à les laisser respirer. Le front contre celui de son amant, il murmura :

— J’t’aime.

Et il consentit enfin à se détacher de lui pour récupérer son sac et, après avoir abandonné ses chaussures dans l’entrée, découvrir le reste de la chambre.

— Wow. Y a un tableau hideux au-dessus du lit, un genre de… clown ? J’sais pas. Flippant.

Karm laissa son sac contre un placard, disparut dans la salle de bain le temps de se laver les mains et revint ensuite dans la chambre. Il n’était pas pressé de raconter à Luke comment son audition s’était déroulée, très honteux du résultat, alors à la place, il s’assit au bord du lit et demanda :

— Alors ? T’as fait fortune au blackjack ? Y a plus de drones de sécurité au mètre-cube que dans l’quartier administratif de Coruscant.

La plaisanterie avait donc été suivie immédiatement d’une remarque tactique — guerrier un jour, guerrier toujours.
Luke Kayan
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- Bonjour.

Imperturbable, Luke avait lancé ses salutations dès que la porte s'était entrouverte, miraculeusement silencieuse. C'était le petit courant d'air qui s'était engouffré accompagné d'une aura bien connue qui avaient avisé le Jedi. Les cheveux encore légèrement humides après une douche réconfortante, le jeune homme vêtu d'un tee-shirt gris et d'une veste bleue marine, presque noire, reçut l'effusif Ark-Ni.

- Je suis bien content d'avoir été épargné alors. De ce que je me souviens, les clowns ne font pas du tout rire.

De fait, il avait hurlé de terreur, gamin, lorsque l'un d'eux à un gala de charité l'avait saisi dans ses bras, sans prévenir aucunement. Alors allergique au contact, persuadé qu'on ne le touchait que pour le frapper, l'enfant avait fait terriblement honte à sa mère. Ensuite, il avait toujours associé ces êtres à la punition monumentale reçue par la suite. Aujourd'hui aveugle depuis plus de 10 ans, il lui semblait pourtant encore être capable d'imaginer fidèlement leurs lèvres barbouillées de maquillage. Luke effaça ce reste de traumatisme manifestement commun chez les enfants en retournant son baiser à Karm. Peu sensuel, le Jedi avait d'abord eu du mal à s'adapter aux nombreuses sollicitations de son ami, à peu près pour tout et n'importe quand, mais comme ce n'était pas désagréable il avait fini par apprécier et répondre, bien qu'il ne prenne presque jamais l'initiative.

- Je n'ai rien gagné ! Ils se méfiaient de ma canne d'aveugle.

Répondit Luke en souriant, non sans se souvenir de cet épisode tendu avec un Gungan et Ferus Livian, un ex- Padawan qui s'était servi de la Force pour tricher dans un casino.

- La sécurité est très élevée, oui. Mais également très sélective. D'après ce que j'ai pu entrevoir, certains flanchent facilement devant une pile de billets, et c'est assez grossier. Les corrompus manquent d’entraînement. C'est tellement facile et ils sont si peu contrôlés qu'ils ne se méfient guère de n'importe quelle proposition. Un point pour nous. Par contre, Action Secrète semble bien protégée. Selon le profil provisoire que j'ai pu esquisser, je pense que ce sont des jeunes. Moins de 35 ans, majoritairement des hommes et de haute société. Ce qui expliquerait la qualité des produits utilisés ainsi que leur exclusivité. En réalité je ne les imagine pas si expérimentés que cela. Ils sont surtout bien épaules, par des employés experts, peut-être même des scientifiques qui fabriqueraient leurs bombes sur mesure. Je n'ai rien d'autre. Les gens deviennent muets quand on parle d'Action Secrète. Pour les habitants d'en haut, c'est tabou, une honte. Pour ceux du niveau inférieur, des héros.

Le jeune homme poussa un léger soupir avant de continuer, il s'assit sur le milieu du lit, faisant contrepoids, de ce fait le matelas rebondit un peu. Au moins il était suffisamment moelleux pour que les deux Jedis n'aient pas le dos en charpie lorsqu'ils se lèveraient. Sur le coup, Luke s'était aussi demandé s'il était convenable qu'ils envisagent une nuit sur un seul grand matelas, ou si ce serait se montrer littéralement grossier envers l'Ordre. Incapable de se décider, il avait choisi une chambre avec deux lits séparés, lesquels étaient pour le moment accolés l'un à l'autre, formant ce grand ensemble qui leur servait présentement de bureau.

- Et comme leur mouvement de prime abord, plus égoïste que social, dérivé de l'ennui plutôt que d'une véritable envie de révolution, s'est transformé en exemple pour ceux d'en bas... Certains se sont joints à la cause, revendiquant des sabotages au nom de l'Action Secrète. La majorité le font sans l'aval du groupe, mais l'un d'eux semble suffisamment actif pour attirer la véritable bande qui pourrait, soit essayer de les intégrer, soit de leur donner la leçon: on ne copie pas les authentiques membres de l'Action Secrète, salissant leur ego et pire encore, mettant en danger leur pérennité. Ensuite il y a bien une autre piste, ténue mais valable. Le même produit utilisé dans la bombe et lui aussi exclusif de l'Action Secrète fut découvert il y a deux jours dans un quartier des bas-fonds. Une nouveauté pour ce groupe qui frappe normalement dans les sphères d'en haut, ou comme tu le sais bien... Sur de grosses proies comme le Trépidant. Ils veulent marquer, alors pourquoi s'attaquer à un pauvre supermarché à demi-approvisionné? Soit c'est une revendications de la part de ces ramifications mal contrôlées ou une attaque de l'Action Secrète contre les copieurs. Qu'en penses-tu?

Demanda le blond, légèrement stressé car parfaitement conscient d'avoir trouvé peu de choses. En tout cas moins que d'habitude. Il faut dire que sur Ala Galada, cité raciste par excellence, son physique particulier ne lui avait guère servi, au contraire. Les gardes l'avaient "reniflé" de haut en bas, doutant que ses origines soient complètement humaines, sans savoir mettre le doigt dessus. Les passants le regardaient étrangement, s'attendant à voir son maquillage s'effriter pour laisser apparaître un Infiltré ou jugeant que c'était un de ces métisses dégoûtants. Même si les proches-humains étaient tolérés ils n'en étaient pas pour autant appréciés, et Luke avait du redoubler de prudence.

Sans parler de l'inextricable toile dans laquelle évoluait l'Action Secrète, une des seules organisations aptes à fonctionner correctement dans cette cité si hypocrite, laquelle rappelait d'ailleurs Hapès sous bien des aspects. Les apparences, la richesse cachant la crasse. Non, Luke n'aimait pas cet endroit et s'y sentait mal à l'aise. Se redressant d'un bond leste, le Jedi parvint plus difficilement à la petite table où se trouvait un dossier déjà conséquent, parsemé de bouts de métal très fins qui dépassaient, des sortes de marques-pages troués: du braille. Les feuilles quant à elles, étaient imprimées en double exemplaire: un dans la langue des aveugles, l'autre en basic pour Karm. En guise d'introduction, on y trouvait le mode de vie général des Galadaéns, leurs habitudes, comment se fondre dans la masse et quelques observations. Ensuite, venaient une cartographie des lieux les plus intéressants, liés à des chapitres. Une punaise plate de forme différente signalait la situation d'un gang intéressant des bas-fonds, ainsi que leur description qui apparaissait en annexe en-dessous. La punaise rose et en forme d'étoiles-un peu criarde, certes.- semblable à celle placée quelque part dans les hauts quartier indiquait ce que Luke supposait: la présence de copieurs ou de véritables membres de l'Action Secrète dans les bas-fonds.

L'écriture représentait bien le style de Luke: chaque note était soigneusement rédigée, via ordinateur bien sûr. Les mots s'enchaînaient avec concision et élégance. Même si à 24 ans, le blond devait encore s'améliorer, on pouvait lui reconnaître l'exploit de faire des rapports intéressants et agréables à lire. Du moins, plus que ce qu'on pourrait attendre de ces papiers majoritairement ennuyeux. Quelque part, il devait cette amélioration à Karm qui le poussait toujours à donner le meilleur de soi, à réviser ses techniques ou les modifier pour les adapter. Enthousiasmé à l'idée d'aider son ami, et certes, influencé par son jugement, Luke affinait sa plume, il essayait en tout cas.

- Ça ne s'est pas passé comme tu voulais. N'est-ce pas?


Le Chevalier Turquoise ne lui aurait pas passé sous silence cette fameuse réunion s'il l'avait jugé agréable. Calme, le Hapien posa une main se voulant encourageante sur l'épaule de son aîné. Il ne s'inquiétait pas trop en règle générale car si la chose avait vraiment été irréparable, Karm ne serait pas ici mais en Conseil disciplinaire. Restait à savoir quel impact avait eu cette possible difficulté sur son estime de soi déjà bien basse.
Karm Torr
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Il avait dérangé Luke. N’est-ce pas ? Pendant toutes les explications de l’Hapien, qu’il avait néanmoins écouté religieusement, l’Ark-Ni avait observé son am avec un brin d’anxiété, comme à chaque fois qu’il avait l’impression que ses gestes passionnés ou même simplement affectueux indisposaient le jeune homme. Souvent, il rêvait que Luke, lui aussi, sans raison particulière, le pousse contre un mur, ou laisse ses mains se faire un peu baladeuses. Mais il essayait de se souvenir que le corps, et les gestes, c’était son langage à lui, pas celui de Luke — et de ne pas en tirer trop de conclusions.

La main sur son épaule fut une consolation qu’il ne put s’empêcher de trouver un peu froide et impersonnelle. Il n’en voulait pas à Luke, il se sentait coupable plutôt d’avoir des attentes si manifestement disproportionnées. Qui avait besoin de se jeter sur son compagnon après seulement quarante-huit heures ? Luke, lui, avait évidemment vécu la séparation avec philosophie, peut-être indifférence, et c’était bien sûr parfaitement normal.

L’Ark-Ni avala sa salive avec difficulté, la gorge nouée tant par le souvenir de l’audition que par l’embarras provoqué par l’accueil du Consulaire, et il murmura :

— Ça s’est passé comme ça devait se passer…

Il parcourait les notes prises par Luke, où il reconnaissait le style sûr et efficace de son ami.

— On m’a dit après que le rapport était très bien, alors c’est déjà ça. Heureusement que t’étais là. L’audition en elle-même, c’était… Un naufrage.

Pour une fois, Karm retenait beaucoup dans ses émotions dans le lien qui l’unissait à Luke à travers la Force, pour que l’Hapien n’ait pas à sentir l’ampleur de la honte qu’il avait éprouvé en se faisant mettre en pièce par de vieux sénateurs. Dans la distance que ce réflexe de fierté blessée instaura inévitablement entre eux, Karm se sentit soudainement bien seul.

— Y avait un mec qui arrêtait pas d’insister comme quoi les explorations devraient être des missions militaires, et à chaque fois que je disais que c’était pas absolument nécessaire, il revenait à la charge, et il insistait sur mon inexpérience, et il a même suggéré que j’avais eu un genre de stress post-traumatique après Dubrillion et que c’était pour ça que j’aimais pas l’armée. N’importe quoi.

Si Karm avait certainement des problèmes de confiance en soi, il opposait à l’adversité des batailles et à la violence physique un mental d’acier, qui avait de quoi laisser perplexe. Même des années de Padawan vécues sous les coups d’une Maître trop exigeante semblaient l’avoir laissé beaucoup plus sain qu’on n’aurait pu s’y attendre.

— J’ai pas compris c’était quoi son problème alors j’ai pas su répondre.

D’autres que lui auraient cerné sans difficulté l’enjeu de ces étranges questions. Toute opération de l’armée républicaine, quand elle était d’envergure, était soumise aux règles d’appropriation parlementaire du budget de la République. Si le corps d’exploration républicain était créé sous l’égide de l’armée, alors il ne pourrait opérer qu’avec l’aval du parlement. Il était dès lors évitant que le sénateur entendait court-circuiter une initiative qu’il jugeait dispendieuse en la soumettant à un contrôle étroit et que ce contrôle exigeait d’abord qu’il en prouvât le caractère strictement militaire.

Mais ces subtilités politiques échappaient entièrement à Karm. Le jeune homme finit par hausser les épaules, sous la main de Luke, et par conclure :

— ‘Fin bref, c’est passé. Notre rapport et les autres experts compenseront, j’pense. J’pouvais pas m’attendre à un miracle en seulement deux s’maines.

Mais il s’y était attendu quand même.

— Faut qu’j’me change, si j’veux pas avoir l’air d’un touriste fraîchement débarqué.

Le Gardien quitta le lit, attrapa son sac à dos au pied du placard et partit s’enfermer dans la salle de bain. Sur Ala Galada, les deux soleils mais surtout l’atmosphère artificielle de la station entretenaient perpétuellement le climat des premiers jours de l’été et, à part les voyageurs qui venaient d’arriver, tout le monde adoptait une tenue légère.

Dans la salle de bain, Karm se déshabilla, avant de fixer sa silhouette en boxer dans le miroir. Tout autour de son reflet, l’écran réfléchissant affichait les informations du jour : la météo perpétuellement identique, les casinos avec des événements spéciaux, les concerts, les horaires des navettes de groupe entre les différents niveaux. D’un geste de la main, il balaya les widgets sur le côté pour rester seul à seul avec son reflet.

Peut-être que Luke ne le trouvait pas beau. C’était possible, ça, sans doute, d’aimer quelqu’un mais de ne pas le trouver beau. Il était musclé — mais pas assez ? Trop imberbe ? Trop petit ? Des imperfections de la peau, peut-être ? Qu’est-ce qui déplaisait précisément aux doigts de l’aveugle ? Karm ferma les yeux, prit une profonde inspiration, tenta de se débarrasser de ces questions futiles qui ne devaient pas le hanter pendant leur enquête, et tira un pantalon noir tout en poches de son sac, du genre que les jeunes amateurs de sports extrêmes portaient dans les rues branchées des noyaux, et un tee-shirt un peu près du corps. Il glissa le sabre dans l’une des poches, un datapad dans l’autre, quelques crédits ici, ses papiers là, et il destructura soigneusement sa coiffure, pour avoir enfin l’air d’un jeune cool et insouciant qui écumait les stations de divertissement aux quatre coins de la Galaxie.

La porte de la salle de bain se rouvrit, Karm en émergea mais il ne revint pas s’asseoir sur les deux lits accolés, de peur que la gêne qu’éveillaient ses questionnements sur ses rapports tactiles avec Luke ne soit trop sensible.

— Du coup, on commence par où ?

Les enquêtes, c’était le rayon de Luke, et il ne voulait pas se rendre ridicule avec une suggestion déplacée. Mais il était probable qu’investiguer l’explosion du supermarché des niveaux inférieurs était l’une des meilleures solutions : c’était ce qui s’était produit hors du profil ordinaire de l’organisation, et probablement l’un des maillons faibles de la chaîne d’Action Secrète.
Luke Kayan
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- Les pros-militaire: Il est très difficile de leur faire entendre raison, y compris pourvu de la meilleure éloquence qui soit.

Fit Luke en tâchant de consoler son amant. Il ne s'étonnait guère des remous dans la Force, presque exagérés. Lui aussi prenait son travail très à coeur et se serait senti détruit. C'était donc, en guise de bien maigre consolation que le Hapien répondit à la détresse de Karm, via une onde chaleureuse traversant la porte pour se faufiler dans la salle de bain. En réalité, il était très loin d'imaginer être la cause du problème, naturellement peu tactile et surtout, avide de protéger leur relation. Pour se faire, le jeune homme savait devoir prouver au Conseil- qui devinerait tôt ou tard leur amour.- que son travail, le code passait avant tout. Il préférait avoir peu sur le long terme que beaucoup sur un temps défini. Ce serait trop difficile de se passer de Karm, y compris après quelques semaines de rencontres amoureuses, Luke se sentait très attaché à lui, au point que l'explorateur lui avait affreusement manqué pendant ces 48 heures. Une véritable fleur bleue, des fois vraiment, il se faisait horreur.

Pour obtenir la tolérance de leurs aînés, le Hapien se bridait, et il songeait naturellement que Karm était dans la même optique, ou du moins qu'il le devrait. Cela n'empêchait toutefois pas le blond de se montrer affectueux d'autres manières, plus subtiles, tant et si bien qu'elles étaient parfois imperceptibles: un rapport pour cette mission encore plus soigneusement rédigé que les précédents, des ondes de Force délicates quoique fugaces prêtes à répondre à celles de l'Ark-Ni, ou encore, une supervision poussé de leurs biens pour partir en mission. Le Hapien avait un amour pragmatique.

- Et bien je propose de directement nous rendre sur la scène de crime. Vu la qualité du service de sécurité, ainsi que sa loyauté envers la République plutôt chancelante, il serait possible qu'ils aient laissé des preuves... Ou se soient empressées de toutes les ramasser. Mais bon si l'info a filtré, c'est qu'il y a de l'espoir. Quelqu'un doit en avoir assez des agissements de l'Action Secrète. Par ailleurs dans l'Alinéa 3.B j'ai émis l'hypothèse d'une piste: chercher parmi les rares prisonniers et ou victimes affiliées aux membres de l'organisation. Qui sait, les familles, s'ils ont suffisamment de vaillance et de rage, pourraient nous donner des informations. Je ne les vois pas tous couvrir avec amour ceux qui ont embrigadés leurs enfants qui se sont ensuite faits emprisonner voir tuer leurs proches. La majorité de ceux qui tombent sous les coups de la justice-
histoire de donner l'impression d'agir.- ou sur le champs de bataille proviennent justement des quartiers pauvres. Il suffirait de faire un crochet, suite à la révision de la scène. Qu'en penses-tu?


"L'ennemi de mon ennemi est mon ami". Malgré leur méfiance envers la justice et surtout des étrangers, les familles des anciens membres de l'Action Secrète ou des victimes indirectes pourraient se décider à parler. En ce qui concernait les prisonniers, ce serait difficile de les trouver car les noms étaient soigneusement gardés. En revanche, en ce qui concernait les morts... Leur identité courrait certainement les ruelles obscures et puantes de leur lieu d'origine. Tout le monde savait là-bas, souvent mieux et plus précisément qu'un gouvernement peu intéressé par le sujet.

En sortant, Luke pressa doucement le bras de Karm, lui envoyant une onde de courage et de tendresse. Ce dernier ne devait plus songer au Sénat. Ce qui était fait était fait, et de toutes manières, aucune catastrophe n'était à présager semblait-il puisque le jeune homme était à ses côtés. Pas vraiment inquiet donc, le Hapien invita son ami à se concentrer sur leur mission. Interroger des gens après avoir étudié une scène de crime peut-être déjà patouillée et trifouillée dans les sens. Ce serait un excellent exercice de diplomatie pour le Chevalier Turquoise, et pour Luke, la preuve suprême de leur fusion. Deux Jedis efficaces accomplissant leur devoir, déjouant jusque là, à force de raison, de travail, de contrôle de soi et de ténacité, les mauvais tours qu'impliquaient une relation amoureuse. Était-il orgueilleux d'y croire ou simplement optimiste et romantique? En tout cas, c'était ce qui le faisait vibrer, lui, bien qu'il apprécie leurs retrouvailles sous les draps. Pour Luke, leur vie poursuivait ce but, servir l'Ordre et le peuple. De ce fait,
il n'imaginait rien de mieux comme preuve d'amour que l'accomplissement de ce dernier ensemble.
Karm Torr
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— J’en pense que t’as l’air de connaître ton affaire, répondit Karm, partisan de se ranger à l’opinion des plus expérimentés que lui. Je te serai plus utile pour analyser les lieux de l’explosion et parler à d’autres combattants que pour planifier l’enquête, j’t’avoue.

Cela dit, s’il se reposait sur Luke, cela ne voulait pas dire qu’il ne prêtait pas une attention soigneuse à la méthode dont l’Hapien faisait la démonstration. Avec le temps, même s’il n’avait pas vocation à enchaîner les enquêtes, Karm avait bon espoir de progresser dans le domaine. S’il voulait vraiment devenir un Maître Jedi, il était essentiel qu’il ait au moins une idée générale des différents domaines de compétences de l’Ordre, même ceux qui échappaient à leur expertise.

Les deux hommes quittèrent donc leur chambre et, occupé par la mission, Karm avait retrouvé son sang-froid ordinaire, laissant dans la chambre ses angoisses et ses déception personnelles. Dans les avenues et les ruelles d’Ala Galada, le Gardien fit montre de sa vigilance ordinaire, sous ses airs de touriste décontracté : il examinait les passants, repérait les armes dissimulées, notait mentalement la disposition des lieux.

Luke et lui finirent par se retrouver dans un ascenseur qui descendait vers les vingt niveaux de la section inférieure. Dans la cabine, une voix féminine à la douceur exagérée diffusait des annonces promotionnelles adaptées aux niveaux qu’ils allaient visiter : des bars sans prétention, des offres d’emploi, des salles de jeux où les machines de hasard étaient plus nombreuses que les jeux de carte élaborés.

Les portes se rouvrirent bientôt sur un spectacle qui échappa aux prédictions de Karm. Par la force de l’habitude, familier des bouges de la Bordure Extérieure, il s’était attendu à un enchevêtrement de ruelles métalliques sales, à la chaleur insoutenable des réacteurs principaux, mal isolés du reste des niveaux inférieurs, et à l’odeur des ordures, mais Ala Galada, même dans sa pauvreté, ne présentait rien de tel : les rues étaient bien entretenues. Pas de crasse, pas de rouille, pas d’huile de moteur.

La pauvreté, cependant, sautait aux yeux d’une autre manière. Ici, aucune plante ni aucune tenture ne venait rompre la froideur impersonnelle des parois métalliques et la lumière artificielle n’était pas soigneusement modulée, loin des baies vitrées, pour imiter celle d’un soleil. Les néons électriques s’alignaient, égaux et blancs. Malgré les gens qui se pressaient dans les rues, avec leurs habits soigneusement rapiécés mais ternes, il régnait une sorte de silence qui recouvrait le bruit des pas et des rares conversations : le silence qui naissait de la certitude d’être surveillé. Par les employeurs. Par le service de sécurité. Par l’Action Secrète.

— Au moins, on va s’fondre un peu plus dans la foule, remarqua Karm, C’est un peu plus divers.

Les Non-Humains n’étaient toujours pas en majorité dans les niveaux inférieurs mais on surprenait parfois, ici ou là, une antenne ou un tentacule. Les deux Jedis se frayèrent un chemin dans la foule et personne ne regarda trop longtemps les yeux pourtant étranges de l’Ark-Ni, ou même la beauté de l’Hapien aveugle. Pourtant, Karm était à peu près certain d’être surveillé et, les plans rassemblés par Luke gravés dans son esprit, il emprunta bien des détours pour semer une éventuelle filature, avant de déboucher dans la ruelle qui donnait sur l’arrière du supermarché, à l’abri des regards.

— OK. Quelques secondes.

Il sortit son datapad de sa poche, le brancha sur le verrou électronique de la petite porte de service et commença à pianoter sur l’écran. C’était l’une des compétences essentielles de tout explorateur que de savoir forcer les portes, surtout quand elles étaient fermées depuis longtemps, et l’Ark-Ni avait appris auprès des Archéologues Jedis à ouvrir des voies barrées par les systèmes les plus divers et les technologies les plus antiques.

Après quelques instants, le vrombissement caractéristique d’une inversion magnétique se fit entendre et la porte s’ouvrit. Karm rempocha son datapad, effleura l’écran de sa montre et, une fois la lumière de la petite lampe poche intégrée allumée, il pénétra à l’intérieur du supermarché condamné et obscur.

— ‘Tention, c’est plein de débris, prévint-il, avant de glisser sa main dans celle de Luke, pour l’aider à se guider, alors qu’il balayait de la lumière à son poignet le local exigu aux étagères renversées.

L’odeur de brûlé continuait à dominer, même des jours après l’incident. Il s’y mêlait d’autres odeurs, de nourriture surtout, des paquets éventrés qui craquaient parfois sous les pas des Jedis. Un peu plus loin, de discrets crépitements électriques indiquaient que des câbles avaient été tranchés pendant l’incident. Une mousse blanchâtre recouvrait les endroits les plus abîmés, probablement expulsés par les droïdes d’intervention, au moment de l’incendie.

Après quelques minutes d’inspection silencieuse, Karm fut prêt à donner son verdict :

— Bon, j’suis plutôt habitué à déminer des bombes qu’à faire exploser des trucs, sauf des morceaux de montagne…

Rapport à l’exploration géologique, qui exigeait parfois de se frayer un peu brusquement l’accès à des galeries souterraines.

— … mais clairement, le but, c’était pas de souffler la structure, sinon, la bombe aurait été sur le pilier porteur. Là, elle a été placée près de la papèterie, pour un départ d’incendie vachement rapide, et tout brûler. Que le supermarché reste sur pied mais que tout soit détruit, quoi. Ça sent le message qu’on cherche à faire passer.

Et le message s’adressait probablement aux propriétaires des lieux.
Luke Kayan
Luke Kayan
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- Merci.

Avec chaleur, Luke serra la main qui guidait la sienne. Habituellement fier, il était aujourd'hui heureux de compter sur ce soutien, dans ces bas-fonds totalement inconnus. Ses dons étant occupés à scruter un danger éventuel, le Hapien ne pouvait pas les utiliser pour mieux se guider. Se reposer sur Karm était un soulagement. Lorsque tous deux pénétrèrent dans la boutique en question, l'odeur de brûlé pris le Jedi à la gorge. Il toussa lorsque les cendres entrèrent dans sa gorge, puis, portant une manche à son nez pour éviter davantage de dégâts, le jeune homme enjamba les débris. Tandis que son ami étudiait les lieux, il restait silencieux, gêné par l'ambiance morbide mais heureux d'avoir quitté celle trop agitée de la ville où il sentait toutes les énergies converger vers eux. De plus, il faisait confiance en Karm pour obtenir des indices, notamment sur le comment de cet incendie-explosion.

- Action Secrète serait une couverture parfaite pour déguiser un crime. Ils sont quasiment intouchables et la police du coin est justement celle qui efface ses traces. Mais si c'est un message... Alors le pyromane n'avait probablement aucune intention de brouiller les pistes, bien au contraire. Il y a des chances que cette famille soit la cible de l'organisation, pas celle d''un imitateur. On doit absolument leur parler.

Et quand bien même ce n'était pas le cas, si cet incendie devait les mener sur une fausse piste, les deux Jedis n'avaient guère plus d'indices. La cité aux deux Soleils étaient trop lumineuse, aveuglante. Karm et lui devaient se battre contre des rayons artificiels qui protégeaient leurs citoyens hypocrites, certains allant jusqu'à aduler des terroristes. De fait, la pauvreté était au contraire, une nuit sombre, froide, vertigineuse qui, dans ce lieu, complétait le jour cinglant d'Ala Galada: personne ne révélerait le nom de la famille visée facilement, ni qui avait survécu. Qu'ils soient ennemis ou alliés de d'Action Secrète, ici on lavait son linge sale en famille ou plutôt dans le quartier.

- Je crains qu'y compris avec nos vêtements civils, nous ne soyons atypiques. Cet endroit est grand mais tous ou presque se connaissent depuis des générations et doivent savoir qui vient d'où. De plus, je ne pense pas que nous ressemblions aux autochtones.

Suggéra le Hapien, peu sûr de sa dernière hypothèse. Il savait que par logique, leur physique ainsi que leur gestuelle différait à un degré plus ou moins élevé qu'un peuple imprégné de toute une culture et d'un climat. Cela dit, il ignorait comment si l'écart était grand et s'il pouvait le réduire. Ce n'était pas facile de calculer de tels paramètres pourtant indispensables en infiltration lorsqu'on était aveugle.

- Est-ce que tu crois qu'on peut espérer quelque chose de la police locale?

Légalement parlant, ce serait bien difficile, ou alors il faudrait jouer avec la frontière, chose à laquelle le Hapien répugnait particulièrement. Qu'il ait une relation amoureuse avec un pair était déjà difficile à admettre, si satisfaisante soit-elle, mais interroger de pauvres bougres nourris aux relents de poubelles de manière musclée, ou recourir aux méthodes des pourris du gouvernement en leur graissant la patte lui semblait impossible. À part s'installer dans un coin et attendre au petit bonheur la chance qu'une rumeur chute dans leurs oreilles était la meilleure, non, la seule chose à faire. Ce n'était pas une option.

Un peu découragé, et sans doute contaminé par l'aura assombrie de Karm- bien que ce dernier se soit montré professionnel dès sa sortie de la chambre.- le jeune homme poussa un léger soupir dégoûté. Il savait d'avance devoir s'agenouiller dans ce capharnaüm pour prendre des échantillons, lesquels ne donneraient sûrement rien, parce qu'encore pire que le feu, les corrompus avaient dû nettoyer la scène.

La chance sembla pourtant sourire aux deux Jedis, car Luke entendit un bruit. Il se retourna vivement et capta une aura effrayée suivi de pas précipités. Ceux-ci cherchaient à emmener ladite aura le plus loin et le plus vite possible. Un enfant. Peut-être un témoin indirect voir... Direct? Même dans le premier cas, l'occasion était trop belle, une aura immature était plus simple à faire parler. Elle n'était pas munie de préjugés semblables à ceux des adultes et se laissaient convaincre, surtout si elle était effrayée. C'était un peu triste de songer au possible enfant comme à une opportunité, quitte à la secouer en la forçant -par la douceur évidemment.- à parler mais ce n'est pas comme s'ils avaient le choix. Encore fallait-il l'atteindre. Par automatisme, le Hapien détala à sa poursuite. Bien sûr, il esquissa quelques pas de course, pouvant remercier son entraînement intense de lui avoir permis d'arriver aussi loin... Avant de glisser dans les gravas et de tomber. La Force lui avait permis de se réceptionner et malgré une douleur aiguë à la cheville, Luke n'avait rien de cassé. Se redressant à demi, ravalant sa frustration, il cria à son ami.

- Aïe! Vite! C'est peut-être notre seul chance.

La Force bondit aux côtés de l'explorateur, chaude, intense, presque comme si c'était le Chevalier qui courrait à ses côtés.
Karm Torr
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— La police, j'sais pas, mais y a pas un genre de, euh, base de données, que les gens consultent quand ils veulent acheter un truc. Un bâtiment, j’veux dire. Avec le nom des propriétaires des autres bâtiments.

Un cadastre, en somme, mais en tant qu’enfant d’une nation communiste, élevé plus tard comme un Jedi, les notions de Karm sur l’organisation de la propriété privée étaient pour le moins floues. Luke n’eut cependant pas le loisir de l’éduquer sur les subtilités d’une société capitaliste bien administrée. Une nouvelle opportunité se profilait à l’horizon, du genre fuyante et nerveuse.

— Yep, approuva flegmatiquement l’Ark-Ni après la chute de son ami.

Et la seconde suivante, il était parti. Distancer Karm à la course exigeait des aptitudes sérieuses ou de très grandes jambes. Le semer dans un endroit encombré, puis une succession de ruelles exiguës, qui mettaient les réflexes et l’agilité des coureurs à rude épreuve, c’était au mieux surhumain, au pire parfaitement utopique. L’Ark-Ni avait déboulé hors de la supérette, puis bondit sur le mur du bâtiment d’en face, et bondit sur celui du supermarché, et ainsi de suite jusqu’à atteindre les doigts.

Là, il s’était élancé en suivant à la trace, dans la Force, l’enfant qui courait en contrebas et qui, à sa différence, devait bousculer les passants et s’arrêter parfois, pour pouvoir continuer à progresser. Techniquement, le chemin de Karm n’était pas non plus sans embûche mais une succession d’acrobaties lui permettaient d’éviter les antennes, les conduits de climatisation ou les parapets sournois. Une minute plus tard, il atterrissait derrière une gamine qui s’acharnait sur une porte qui refusait de s’ouvrir.

— Salut.

L’enfant fit volte-face et leva ses petits poings. Elle devait avoir onze, douze ans peut-être, les cheveux coupés très courts, propre comme à peu près tout le monde ici, mais mal nourrie, quoiqu’elle ne fût pas famélique.

— Relax.

À travers les méandres de la station, Karm transmit son assurance dans la Force, à Luke, pour lui confirmer qu’il avait rattrapé la fuyarde.

— Si tu veux t’en prendre à eux, va falloir m’passer sur le corps.
— M’en prendre à qui ?
— À eux.
— OK.

Les mains dans les poches, Karm fixait la gamine, et la gamine fixait Karm. Quelques secondes passèrent en silence, avant que l’adrénaline ne retombe et que l’enfant commence à réfléchir plus posément et se rende à l’évidence des cheveux argentés et des yeux lumineux.

— T’es pas d’ici, toi.
— Nope.
— T’es pas méchant… ?
— Nope.
— Ah.

Silence.

— J’ai laissé mon collègue là-bas, c’est genre possible d’aller le retrouver ?
— Ben…

L’enfant eut une moue pensive.

— Vous faisiez quoi là-bas ?
— On enquêtait.
— Comme des genres de policiers ?
— Ouais.
— Mais vous êtes pas des policiers ?
— Nan.
— C’est pas super clair, ton histoire, là.

Karm haussa les épaules.

— Bon, d’accord, consentit finalement l’enfant d’un ton un peu réticent.

Le Chevalier tourna les talons et l’étrange duo commençait à se frayer un chemin à un rythme plus calme dans les rues du niveau. Si les passants avaient prêté attention à la course de l’enfant, ils n’en témoignaient rien mais Karm commençait à soupçonner qu’ici, il valait mieux ignorer tout ce qui se passait autour de soi, pour n’être impliqué dans aucune histoire trop compliqué.

— C’est quoi ton nom, demanda le Jedi alors qu’ils longeaient des successions de boutiques toutes de même taille, dont les vitrines sommaires proposaient des produits d’une triste monotonie, parce que la diversité était réservée aux niveaux supérieurs.
— Toi d’abord.
— Torr.
— Drôle de nom.
— Merci.
— J’m’appelle Ronokonoyamanam.
— Et genre mon nom est bizarre ?
— Les gens m’appellent Rono, en général, concéda la petite.
— J’imagine.

Ils tournèrent dans la ruelle du supermarché.

— Comment t’as fait pour m’attraper ?
— J’me suis téléporté.
— Naaaaan, s’exclama la petite, en tournant vers Karm des yeux ronds et émerveillés.

Son regard croisa celui de l’Ark-Ni et elle eut une nouvelle moue, déçue celle-là.

— Ah c’est pas vrai.

Karm avait toujours un certain succès avec les enfants, parce que ceux-ci attendaient beaucoup moins de lui qu’il se conforme à des usages sociaux que le jeune homme ne maîtrisait guère. Il poussa la porte du supermarché, ralluma la lame de sa montre et ils retrouvèrent Luke.

— J’te présente Ronokonoyamanam.
— T’as retenu mon prénom !
— J’suis un mec plein d’surprises.

La gamine fixa Karm en se demandant si, par hasard, il ne s’était pas vraiment téléporté. Mais son attention fut bientôt happée par le spectacle du supermarché calciné, qu’elle observa avec un mélange de peur et de tristesse. Karm, qui supposait qu’il n’était pas mauvais de la laisser mariner dans des émotions qui la disposeraient à se confier, s’approcha de Luke et demanda :

— Ça va ta cheville… ?

Il n’avait pas hésité à détaler pour poursuivre l’enfant, plutôt que de rester en arrière pour soigner Luke et il essayait de se dire que c’était parce qu’il avait senti que la blessure du Chevalier était mineure, non parce qu’il faisait passer son devoir avant son compagnon.
Luke Kayan
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[hj: pardon c'est nul mais j'ai tout tapé sur téléphone. C'est aussi très court mais la Luke ne peut pas trop agir...  ]


- Ça va. Merci.

Loin d'être fâché ou ne serait-ce que gêné par l'absence de Karm, le jeune homme se sentait au contraire rassuré par son attitude professionnelle. Même s'il s'était brisé la cheville, le devoir primait. En réalité, l'imbécile, c'était lui qui avait décidé de gambader dans des décombres alors qu'un sentier droit et dégagé relevait déjà de l'épreuve pour ses yeux morts. Après une onde désolée teintée d'excuses lancée à Karm, le Jedi se releva. Il posa un peu difficilement son pied et veillait d'ailleurs à ne pas trop l'alourdir, renversant son poids sur l'autre, mais n'y prêtant guère plus d'attention, s'intéressa à l'enfant. C'était une fille et probablement encore toute jeune d'après ce que lui indiquait la voix. D'un côté, tant mieux, elle serait moins méfiante et plus sincère-quoique certains gamins débrouillards de ces quartiers mentaient comme des arracheurs de dents, et même toute sorte d'autres membres.- de l'autre, il serait complexe de démêler ses propos, si elle se décidait à ouvrir la bouche d'ailleurs.

- Bonjour, je m'appelle Luke.

Fit-il simplement, quelques secondes après avoir tenté d'enregistrer le nom imprononçable de la gosse, pour finalement abandonner, à son grand dam.

- Nous aimerions beaucoup connaître les propriétaires de ce supermarché. Sais-tu qui c'est? Vois-tu, des gens leur veulent du mal et nous voulons les protéger.  

Luke chercha ses mots un instant. Les enfants du cours basique au temple semblaient l'apprécier pour son bon fond ainsi que sa grande patience, mais ils aimaient plus le taquiner que se confier à lui. Le Hapien avait du mal avec les jeunes, surtout les bambins. Son éloquence était trop fine, trop ennuyeuse pour eux' simplifier n'était pas si simple, ni acquérir leur spontanéité qui semblait coller à la peau de Karm. Cette capacité aux réponses immédiates, franches, vraies avaient participé à faire céder Luke aux avances de son vis-à-vis. Il trouvait ça tantôt envahissant- son ami avait parfois l'air d'un ado en manque constant d'attentions. - tantôt charmant. Plus charmant qu'embêtant pour être juste.-

- Est-ce que tu les connais ? Ce sont tes amis?

Il se tut, conscient qu'il risquait de ''somnifériser'' la gamine. Il se dit aussi qu'il aurait dû commencer par quelque chose de moins direct. L'interroger plus doucement mais Luke et les gamin franchement, ça le faisait moyennement. Franchement, il était déjà heureux d'avoir Karm à ses côtés auparavant, mais ce n'était rien comparé à son soulagement du moment même s'il avait honte de s'afficher si mal à l'aise, peu prompt à négocier avec une enfant. Super le professeur de négociations. La gosse cependant ne paru pas s'en formaliser et s'intéressa à lui qui se redressait en se frottant un peu la cheville. 

-T'es tombé ?
-Oui.
- T'as eu mal?
- Oui. Sur le coup. 
-Et là, t'as encore mal?
- Non, pas vraiment.
- Faut regarder où on met les pieds. C'est papa qui le dit quand on tombe. Mais il dit ça aussi aux gens qui tombent dans les pièzes.
- Je sais. Je ferai plus attention la prochaine fois.  Ton père dit cela aux gens... Comme Les propriétaires de la maison?
- Oui et à ceux que Richard déteste. Car il leur fait des pièzes et ils tombent dedans même en regardant où ils mettent les pieds. Des fois. - La gosse hésita un instant elle avait l'air d'apprécier les deux hommes. Ils étaient rigolos. Mais quand même. Son instinct affûté de petite chatte des gouttière revint à la surfaces et puis elle aimait les embêter. Avoir le pouvoir en les mettant mal à l'aise et oui, en les interrogeant. - Z'êtes pas policiers. Vous avez pas de blasters comme les policiers d'ici. Ni plein de sous... Et pi les policiers ça a des uniformes et pas les cheveux bleus. Et pi ça tombe pas non plus.

Zut, pour une fois qu'il s'en sortait à peu près. Qui était Richard au fait ? Pourvu que Karm le sorte de là.
Karm Torr
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— Ça doit pas être facile de s’appeler Richard.

La gamine pouffa. Karm avait décidé de voler à la rescousse de Luke, dont le style était peut-être un brin trop guindé pour les enfants des quartiers. Au début, il s’était contenté d’observer son ami — et sa cheville — en se demandant s’il ne devait pas le soigner, si Luke lui en voulait, si Luke le jugeait trop infantile, et puis il lui était apparu que, dans ce cas très particulier, le Consulaire ne serait peut-être pas le plus indiqué pour tirer les vers du nez de leur témoin.

— T’as quel âge ?
— Onze ans et demi.
— Onze ans, quoi.
Et demi.
— J’suis pas mauvais avec un blaster.
— Alors pourquoi t’en as pas ?
— J’voyage léger.
— Tu viens de loin ? Il est arrivé quoi à tes yeux ?
— J’suis né comme ça.
— La classe.
— Et ouais.

Karm y allait à l’instinct et comme souvent dans ses conversations, son instinct partait dans toutes les directions — comme l’esprit de Rono, précisément, une gamine vive et curieuse, qui n’avait pas hésité à fureter dans l’entrepôt.

— Ça doit être saoulant d’avoir Richard tout le temps sur le dos, n’empêche.
— T’es gay ?
— Hein ?
— J’dis ça à cause de ton t-shirt.
— Il est cool, mon t-shirt.
— Le frère du cousin de ma voisine…
— Donc son cousin.
— Quoi ?
— Le frère du cousin, c’est un cousin aussi, nan ?
— Ouais, peu importe. Le frère du cousin de ma voisine, ben il est parti avec un cuisinier de chez Jerry’s, ils font genre, des trucs ensemble et tout, et maintenant ils ont une ferme de champignon, quelque part, et ma copine Kanya, elle a dit qu’ils étaient des gays.
— OK.
— Et ben il portait des t-shirts super moulants comme ça.

Karm baissa les yeux vers son t-shirt.

— C’est pas super moulant, c’est à ma taille.
— On voit quand même tous tes abdos dessous et tout.
— Ben faut bien être sportif pour protéger les gens.

Bingo. Rono commença à considérer cette observation en silence et avec beaucoup de sérieux. Karm n’était pas très massif, c’est sûr, mais il était assez musclé quand même et puis il l’avait rattrapée dans la rue. Il n’avait pas de blaster mais il avait l’air assez confiant en lui. Et l’autre, là, celui qui était tombé, il était ennuyeux, mais ennuyeux comme les gens intelligents qui avaient un vrai métier. Ça valait peut-être vraiment le coup de leur parler.

— Richard, il dit que Ben et Sodi, ils auraient pas dû se plaindre à cause de Kav.
— Ah ouais ?
— Ouais.
— Mais ils se sont plaint, genre, vachement forts ?
— Ben ils en ont parlé à la réunion de quartier, quoi.
— Ah ouais, quand même.
— Ouais.

Karm n’était pas sûr de pouvoir tirer des conclusions lumineuses de ces précieux éléments mais il ne doutait pas que Luke parviendrait à rassembler les pièces du puzzle qu’il collectait méticuleusement.

— Mais, genre, ils ont dit quoi ?
— Que Richard aurait pas dû demander à Kav de faire je sais pas quoi sur la navette des Coréliens. Celle qu’a explosé. Ben, il a dit que si Richard avait pas dit ça, la police aurait pas attrapé Kav et que c’était pas à Richard de donner des ordres à son fils. Et il a raison, moi, genre, j’obéis à mon papa, mais c’est tout. Et encore pas tout l’temps.
— J’imagine.

Si la police avait arrêté les complices de Richard, que devaient-ils en déduire ? Que Richard était l’objet d’une enquête de la partie de la police qui échappait à la corruption ? Ou que la police commandée par l’Action Secrète des beaux quartiers avait décidé de faire le ménage dans les factions un peu trop indépendantes des niveaux inférieurs, pour préserver l’intégrité de l’organisation ? Karm avait du mal à savoir quelle hypothèse était la plus probable.

— Franchement, moi j’dis, faut aller parler à Richard, mais genre calmement.
— Ben tu peux toujours essayer, murmura Rono d’un ton peu convaincu.
— Faudrait encore pouvoir le trouver.
— Suffit d’aller sur les docks.

Il y eut une tension dans la Force qui trahit les sentiments de la gamine : elle était certaine d’en avoir trop dit, de s’être laissée emporter par les répliques au tac-au-tac de Karm, par son ton dégagé et son air un peu désordonné, qui ne lui avaient pas laissé le temps de bien réfléchir à ce qu’elle était en train de révéler. Son cœur s’accéléra, comme si elle avait été prise en faute, puis elle s’exclama :

— J’vais être en retard pour le dîner.

À nouveau, elle détala au milieu des gravats et, cette fois, Karm jugea plus sage de ne pas la poursuivre. Elle devait être suffisamment éprouvée par cette conversation. Le Chevalier se retourna vers Luke et s’agenouilla dans les décombres.

— Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse, maintenant ?

En parlant, il avait relevé légèrement la jambe du pantalon de son ami et entouré sa cheville endolorie de ses mains. Les yeux fermés, il se concentra sur la Force, pour en entamer la guérison.

— Faut aller direct sur les docks ? Parler à Ben et Sodi ? Aller voir la police ? Ou… Y a sans doute des choses auxquelles j’pense pas. Désolé.

Aussi, il se demandait si son tee-shirt n’était pas vraiment trop moulant.

C’était peut-être ça qui déplaisait à Luke ? Sa manière de s’habiller ?
Luke Kayan
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Luke suivait l'échange avec intérêt, pour dire, même ses yeux semblaient dévorer la scène, avec un léger froncement lorsque Rono suggéra que Karm était ''gay''. Ou plutôt devina... Ou plutôt... Bref, en tout cas il en avait l'air, et à cause de ses vêtements. La mode. Une galaxie qui échappait à la connaissance du Hapien, lequel avait pourtant essayé de la redécouvrir à travers de nombreuses études. Seulement, sans rien voir, il fallait avouer que les termes ''gothique'', ''bon chic bon genre ne signifiaient rien. Le jeune homme avait sa tenue Jedi et des vêtements civils dont les étiquettes étaient trouées d'incations en braille : la couleur et le ''style.'' Ainsi, il portait très souvent des vêtements neutres afin de ne rien mettre de criard: le gris avec le noir, une valeur sûre.

Bref, mis à part cette information qui le déconcertait mais ne semblait pas importante, Luke nota quelques indices dans un coin de sa tête bien que ce ne soit pas facile. Enfermé dans son monde tel un autiste lors de sa prime jeunesse, puis adolescent élevé au Temple, le Hapien était habitué aux enfants capables d'exprimer leurs pensées en suivant un fil conducteur, armé d'un langage assez soutenu. Chaque Padawan était entraîné à développer correctement ses réflexions, à les construire. De ce fait, les propos décousus de Rono lui coûtaient des efforts, sans parler du contexte n'était pas le meilleur: ce supermarché cramoisi dont les odeurs fortes déconcentraient partiellement le jeune homme à l'odorat sensible.

Lorsque les bruit de pas de l'enfant-aussi légers et vifs que ceux d'une souris-s'éloignèrent, Luke se tourna vers Karm. Il sentit un début de guérison et allait lui dire que ce n'était pas la peine mais quelque chose l'en empêcha. Ce refus qu'il voyait comme l'énonciation d'une stricte vérité- sa blessure n'était pas grave et il pouvait s'atteler lui- même à la tâche.- couplée au pragmatisme le plus pur- éviter de fatiguer ses ressources pour une chose aussi simple.- lui parut pourtant insensé. Comme si, s'intéressant aux ressentis de Karm lui faisait petit à petit saisir sa vraie mentalité: Ce dernier risquait de ne pas accepter ce simple "ça ira", c'était un besoin de soigner son ami. Luke n'en était pas sûr, mais préféra donc ne rien dire, sinon accepter la guérison et remercier le Chevalier Turquoise d'un signe de tête, sans parler du fait que son action avait effectivement soulagé sa cheville douloureuse.

- Maintenant?- Luke plissa les paupières et une lumière furtive s'installa dans ses prunelles disparates. On touchait enfin à son domaine: la stratégie.- On ne cherche personne. On va faire s'évader Kav, et laisser la police et Richard le flaire pour l'attraper.- Inutile d'ajouter que ces infos seraient un leurre, il était hors de question de mettre le prisonnier en danger. Déjà que le faire s'évader ne serait pas simple... Il faudrait demander une autorisation express aux services secrets de la République, exposer la situation de danger pour le témoin, les convaincre que la police corrompue pouvait tenter de mettre fin aux jours du saboteur présumé, aussi bien que l'association. Puis, organiser une fuite que nulle autorité accepterait officiellement de couvrir. Mais la bureaucratie, "l'ennuyeux" Jedi y était immunisé, il saurait comment y faire.- Je ne doute pas que les corrompus auront si chauds à l'idée qu'un possible témoin de ce qui se trame dans les geôles, qu'ils sortiront de leur cachette pour essayer de l'éliminer au nom de leur propre protection ou de l'Action Secrète, tandis que Richard pour se venger directement sur ce prisonnier qu'il aimerait certainement éliminer. Nous cueillerons en flagrant délit les policiers pourris ainsi que Richard, une possibles têtes pensants de l'Action Secrète, au même lieu de rendez-vous. Quant à Kav, nous le ferons libérer pour ensuite négocier une incarcération sur Coruscant, plus sûr pour lui ainsi qu'une révision de peine, si nécessaire, contre des vraies infos sur Richard, voir toute l'association.

Le jeune homme savait qu'après avoir capturé Richard, s'ils y parvenaient, ils devraient sans doute entamer un long interrogatoire et peut-être faire face à divers niveaux jusqu'à toucher la vraie tête de l'hydre mais au moins, ils avaient un plan, enfin si Karm l'approuvait.

- Merci.

Réitéra-t-il soudain, comme pour ajouter une seconde couche à ses premiers remerciements pour les soins procurés à la cheville, mais aussi pour l'accompagnement. Il était à la fois heureux d'être avec Karm pour l'inspirer et l'aider, mais surtout honteux de se montrer aussi gênant, lent à l'heure de se déplacer.

- Pour un flagrant délit, je ne suis cependant pas le plus indique, sans doute... S'il faut courir. Enfin, tu as vu le résultat. J'essaye via la Force de me repérer, mais je ne suis pas un Miraluka.

Luke baissa légèrement la tête, son enthousiasme momentanément disparu. S'il ne pouvait pas participer à son propre plan- ou un autre si le sien montrait une faille... On voyait mieux en prenant du recul, ce que pouvait faire Karm.- c'était aussi décevant qu'humiliant, mais force lui était de reconnaître que pour ces actions rapides, il ne servait presque à rien.

-Je suis désolé. La gamine, on l'aurait pas attrapé sans toi.

Ah ils étaient bien partis tiens, chacun avec ses complexes. S'en devenait aussi charmant qu'agaçant.
Karm Torr
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— D’un autre côté, sans toi, on aurait pas récupéré toutes ces infos au départ pour commencer à bosser. J’peux te dire que si j’étais resté deux jours tout seul ici, on serait pas partis avec autant d’éléments, hein.

Son truc à lui, c’était les forêts, les massifs montagneux, les lacs mystérieux, et certainement pas le crime organisé qui épousait la police corrompue dans une station spatiale étrange aux instances politiques mystérieuses. Karm demeurait ainsi persuadé que Luke avait fait l’essentiel du travail : courser une gamine ne pesait pas lourd. Au demeurant, ça ne lui posait pas de problème : en bon Ark-Ni, il estimait que chacun contribuait à la mesure de ses compétences et que toute contribution avait de la valeur.

— Bref, on est un duo du tonnerre.

Il tendit la main, effleura du bout des doigts la joue de Luke, en une caresse légère, qu’il interrompit presque aussitôt, en se disant que son compagnon n’avait sans doute pas envie d’être touché. En tout cas pas par lui. Sans ça, leurs retrouvailles auraient été plus chaleureuses, n’est-ce pas ? L’embarras de Karm se sentit sans difficulté à travers la Force et d’ailleurs le Gardien murmura :

— Désolé…

Il prit quand même la main de Luke pour le guider à travers les graviers.

— On se replie sur la chambre, l’temps d’étudier les plans de la prison et de recevoir le feu vert de la République. J’ai une contact aux forces spéciales, j’pense qu’elle pourra accélérer tout ça. Elle me doit un service.

L’une des grandes spécialités de Karm consistait à récupérer des personnes en détresse perdues dans des endroits peu hospitaliers. Des scientifiques le plus souvent, des prospecteurs industriels parfois, qui visitaient des planètes lointaines, mais il n’était pas rare que la République réquisitionne ses services pour exfiltrer des agents qui se retrouvaient isolés en pleine nature, en territoire ennemi.

Le Jedi libéra la main de son compagnon dans la rue et ils empruntèrent à nouveau un chemin compliqué pour retrouver un ascenseur, différent du premier qu’ils avaient emprunté, et regagner quelques niveaux plus haut leur chambre de motel. Karm laissa ses chaussures dans l’entrée et s’installa en tailleur sur un lit pour composer un message à l’intention de son contact et de l’Ordre, laissant à Luke le soin d’extraire du système central de la station toutes les informations qu’il pourrait trouver sur la prison.

Karm doutait qu’ils puissent en toute discrétion télécharger les plans complets du pénitencier mais une disposition générale serait un bon début. Ce ne serait pas la première évasion qu’il orchestrerait dans des conditions difficiles. Le message envoyé, il quitta son lit, retourna le tableau de clown face contre le mur et vint s’asseoir sur celui de Luke, à côté de son ami, pour examiner ses découvertes.

— ‘Tends, j’me branche.

L’Ark-Ni sortit son datapad, le connecta à celui de Luke et afficha un hologramme qui représentait le secteur où la prison était située. La mauvaise nouvelle, c’était que les plans étaient pour le moins généraux : ils relevaient plutôt du schéma d’urbanisme, qui indiquaient les fonctions des bâtiments se succédant dans cette rue-là, que d’un descriptif détaillé de leur disposition intérieure. La bonne nouvelle, c’est que la criminalité censément inexistante à Ala Galada, à cause de la surveillance permanente et de la menace insidieuse de la brutalité policière, n’invitait pas à construire des prisons très élaborés et que les deux Jedis avaient affaire là plutôt à un centre de rétention qu’à un véritable pénitencier.

— OK. Doit y avoir un générateur de secteur pas très loin, le couper créera une petite diversion, sans doute pas long parce qu’ils doivent avoir des back-ups, mais assez pour que je puisse au moins rentrer, ensuite, j’improvise. Va falloir faire un peu de repérage dans le coin, pour que tu saches quoi saboter et comment.

Il lui paraissait évident que Luke s’occuperait de la diversion, qui pouvait être bien moins planifiée et ne provoquerait sans doute pas de course-poursuite et de combats inopinés, que de l’évasion proprement dite. Karm déconnecta les deux datapads et rempocha le sien. Il fixa Luke et ses pensées quittèrent le problème de la prison pour revenir à celui de sa relation avec l’Hapien. Malgré lui, son inconscient avait continué à ruminer l’accueil sobre que son compagnon lui avait réservé quand il était arrivé.

Soudainement, Karm murmura :

— J’change de t-shirt et on va jouer aux électriciens.

Il quitta le lit, retira son t-shirt, fouilla dans son sac à dos pour en extirper un autre, plus ample, qu’il enfila avant de rejoindre la porte et ses chaussures. Il achevait de les fermer quand son datapad vibra.

— Mission autorisée.
Luke Kayan
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- Oui.

Un tout petit "oui", pas très assurée accompagné d'un sourire qui faisait de son mieux pour y croire en guise de réponse, et Luke suivit Karm jusqu'à la chambre. Au moins ce dernier ne voulait pas changer de collègue de travail, c'était déjà ça. Une fois arrivés, tous deux se mirent au travail, et tandis que Karm négociait avec une connaissance, le Hapien rédigea rapidement un rapport via clavier pour ne pas déranger son ami avec le synthétiseur vocal. Il se servait naturellement des touches grâce à ce petit relief auquel personne ne faisait généralement attention. Les détails étaient parfois ce qui faisait vraiment la différence. Lorsqu'il transmit son dossier aux autorités avec une clé de cryptage contenue dans son datapad, il ne put s'empêcher de sourire en remarquant que son ami et lui avaient terminés ensemble. Oui, au fond, ils devaient réellement être une équipe du tonnerre.

- Laisse- moi la diversion, j'suis un pro pour ça.

Répliqua le jeune homme en mangeant une syllabe, un autre détail dont il s'aperçut après coup: serait-ce dû à la nervosité que générait la mission? contentement de pouvoir assurer pour au moins une chose? Ou simplement par imitation? Après un temps passé en compagnie de quelqu'un très apprécié, Luke avait cette tendance à copier un peu ses habitudes.

- Pourquoi m'as-tu dit désolé?

La question, apparemment hors-sujet surpris Luke en personne. Il tourna la tête vers son ami, l'air effectivement désolé de s'être laissé avoir par ses propres lèvres qui avaient vomies une réflexion que son cerveau avait égaré dans un coin pour la faire chuter sur le parquet de la chambre d'hôtel, alors qu'ils allaient sortir. Précisément, une main du Jedi était posé sur la porte et l'autre sur le poignet de Karm. Tout en douceur mais également avec fermeté. Quelque chose n'allait pas, et sa cervelle se décidait enfin, cette lâche, à quitter son excuse confortable: le malaise caché par le feu de l'action ne pouvait pas être seulement dû à la réunion ratée. Et puis il y avait ce détail. Encore un oui, et pas des moindres car le Hapien y tenait particulièrement lorsqu'ils partaient en mission: Le baiser, au cas où... Un geste tendre auquel il ne dérogeait jamais, reniant un peu les retrouvailles adolescentes pour une tendresse grave, presque dramatique à l'heure où le danger guettait. La dernière rencontre entre leurs lèvres, passionnées, pour ne rien regretter si... Et une prison de moyenne sécurité n'était pas une excuse pour s'y refuser ou l'oublier: on ne savait jamais.

- Je ne sais pas ce que j'ai fait, mais pardon si je t'ai blessé.

Lança le blond en se sentant aussi stupide que fleur bleue et soumis. Néanmoins il fallait reconnaître que l'opinion de Karm lui importait plus que tout ceci- parfois cela l'inquiétait.- et il ne voulait pas débuter une mission potentiellement dangereuse sans s'assurer qu'ils étaient totalement sur la même longueur d'onde. Luke déplaça prudemment ses mains de la porte au tee-shirt plus ample de Karm, il le pressa légèrement pour sentir la peau de son ami en-dessous et ferma les yeux, immobile, attentif.
Karm Torr
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— Non, j’suis pas… Blessé, j’aurais pas dû…

Dire quoi que ce soit. Karm se sentait coupable de jeter ses inquiétudes éparses dans l’esprit de Luke, à un moment où l’Hapien avait bien sûr besoin de se concentrer, pour accomplir une mission de première importance, et qui d’ailleurs leur tenait beaucoup à cœur, à tous les deux. Souvent, le Gardien se demandait comment bien des Jedis tout aussi jeunes que lui parvenaient à conserver cette tranquillité de marbre qu’il leur voyait en toutes circonstances mais, pour être honnête, au fond, il les enviait pas et il jugeait mal qu’il y avait quelque chose de malsain, presque de mortuaire, dans le calme qu’un certain de nombre de ses confrères professaient au sein de l’Ordre.

Ce fut sans doute pour ça qu’il se décida à se confier.

— C’est juste parfois, j’ai l’impression d’être trop…

Ses mains se posèrent sur les hanches de Luke et il chercha un moment le mot approprié, pour ne pas risquer avec une maladresse d’expression de compliquer une situation dont il craignait déjà que les subtilités ne lui échappent.

— … insistant ? Physiquement, je veux dire. J’ai l’impression qu’on est très différents toi et moi sur ce qu’on attend de… Sur ce plan-là. De la relation. ‘Fin, j’veux dire…

Karm poussa un soupir, bien conscient qu’il ne parviendrait pas à être parfaitement clair. Il attira Luke un peu plus contre lui et, comme il le faisait souvent, il posa son front contre le front de son compagnon, comme si de la sorte ils pouvaient mieux se communiquer leurs pensées.

— Là, par exemple, quand je suis arrivé, et je t’ai embrassé, et tu m’as embrassé aussi, mais quand même, j’ai senti, j’ai eu l’impression… J’ai eu l’impression que je t’avais pas manqué. Moi, j’avais envie de te toucher pour bien te ramener à moi, pour bien sentir la Force entre nous ou… Mais toi non, ou alors pas comme ça, ou alors je sais pas.

Décrire des postures de combat et des roches rares, des planètes lointaines et étranges ou des vaisseaux atypiques, c’était décidément beaucoup plus facile que de tenter de peser ses sentiments avec des mots et de plier ses impressions les plus charnelles aux règles de la syntaxe. Karm avait bien conscience d’avoir une perspective singulière sur le monde et sur la Force, en tout cas pour un Jedi, une approche d’abord physique et pour ainsi dire sensuelle, mais il commençait à peine à comprendre comment cette formation si particulière affectait non seulement ses attitudes guerrières mais aussi sa vie personnelle, sa vie sentimentale.

— Alors, euh… Des fois, je me demande si tu me trouves désirable. Même si c’est idiot, t’sais, déjà, un peu vain, mais surtout, ben je sais que tu… ‘Fin, j’veux dire, quand on… T’sais, c’est genre, euh, explicite.

Le désir de Luke, il en recevait après tout des témoignages très physiques et très concrets.

— Et puis surtout, des fois, je me dis que tu dois te dire que je suis un genre de, d’obsédé. Et je sais pas si t’aurais vraiment tort. Mais y a que toi qui m’obsèdes comme ça. Et puis obsédé, c’est pas le bon terme.

Tant bien que mal, il était parvenu à expliquer ce qui lui pesait. Après un soupir, il avoua :

— J’me sens tellement immature, bête et superficiel…

Quand on était élevé par un Ordre qui appelait souvent à faire abstraction des réalités physiques pour se concentrer sur les vérités impalpables, à oublier son corps dans la méditation pour développer son esprit, il était difficile de ne pas vivre parfois mal cette approche sensiblement différente qui était celle de Karm, où la vie biologique, les pulsations de la chair, du désir, de la sève des arbres, du sang des animaux, de la semence des hommes, de la pluie et et de la terre meuble, étaient riches de la Force, plus que l’abstraction des esprits vides, obsédés par la pureté d’une pensée puissante.

Karm n’était pas brouillon, il était chaotique comme une vie qui s’apprêtait à fleurir d’un coup, dans une énergie à laquelle certains aspects de la discipline de l’Ordre peinaient à donner du sens. Les arts martiaux avaient été essentiels à sa compréhension de la Force mais Luke, en le touchant, en l’embrassant, lui avait ouvert un nouvel univers, auquel le Jedi était très sensible, uniquement disposé, mais où il se sentait perdu, et même un peu seul.

Timidement, Karm demanda :

— J’t’ai manqué… ?
Luke Kayan
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- Tout ça?

Luke haussa un sourcil, surpris de voir émaner autant de confessions de la bouche de son ami. Comment pouvait-il avoir tout ce chaos dans sa tête, pour si peu? Non pas que le jeune homme veuille dénigrer les sentiments de Karm, mais il trouvait cela triste de s'inquiéter à cause de ces fameux détails. Lui-même n'avait ressenti que partiellement ces tranches d'émotions, à des moments concrets, lorsqu'il avait failli se tordre la cheville en courant après une gamine, quand il fallait aménager un plan pour correspondre à son handicap. Pour le reste, serein, il avait tendance à se fier à la Force et au temps, il restait naturel. Seulement le souci était que Karm possédait une toute autre nature, plus vive, plus vivante. Formé depuis sa tendre enfance chez les Jedis, sorti d'un autisme presque irréversible, Luke était une personne extrêmement calme, qui démontrait peu ses sentiments et n'appréciaient normalement guère le contact physique. Avec soin, il essaya de choisir ses mots.

- Je suis désolé Karm, parfois je me montre plus distant parce que je ne veux pas perdre tout ce que l'on a sur le long terme. Le Conseil finira par s'apercevoir de notre relation mais si nous lui prouvons être capable d'être pondérés, de ne pas oublier ou négliger notre travail, ils pourraient nous laisser continuer. Je ne veux pas qu'ils nous disent de tout arrêter, alors je m'habitue dès le début à "peu mais pour longtemps".

Déclara le blond, prenant un petit temps de pause avant de continuer. Il cherchait ses mots autant que ses émotions.

- En outre, je n'ai jamais été habitué à de grandes démonstrations. Je... Humpf, bien sûr que tu m'as manqué mais cela me semblait juste, évident... Alors certes, je n'ai pas réagi effusivement. Je n'y ai même pas... Songé honnêtement. Obsédé? - Il eut un petit rire enfantin qui le coupa dans ses explications en entendant Karm s'accuser lui-même.- C'est vrai que tu es... Euh? Plus actif que moi? Oui on va dire cela, mais je te désire tout autant. C'est juste que c'est plus... Cadré? J'essaye de faire la part des choses. Est-ce mieux? Je ne pense pas, c'est juste une question de caractère? Chaque chose en son temps. J'aimerais que tu cesses de t'inquiéter pour tout cela. Si je ne t'aimais pas, ne te désirais point, jamais je ne m'offrirais à toi, ni un bisou, rien. Si cela venait aussi à changer, je te le dirais. Alors s'il te plaît, si tu es inquiet un jour, dit-le moi, ne remâche pas ça tout seul et ne crains pas d'être ridicule. D'accord?

Cette auto-discipline ne lui avait jamais coûté de véritables efforts bien qu'il ait du se refréner avec Karm, au nom de leur relation justement, pour la protéger, convaincre à tout moment les Maîtres qu'elle n'était pas un danger pour leur travail. Depuis le début, il s'était restreint avec cette idée en tête, ceci couplé avec sa tendance naturelle à éviter le contact plus cette stricte formation bien ancrée dans sa cervelle avaient provoqué la situation.

- Oui tu m'as manqué.

Répéta le Jedi en guise conclusion, puis il répondit au baiser avec toute la passion possible. Sage mais sincère.
Karm Torr
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Il était facile de se laisser convaincre de ce que l’on désirait profondément et Karm écouta volontiers les explications de Luke, même si, pour une bonne part, elles correspondaient peu à ses propres habitudes. Pour Karm, l’avis du Conseil était important mais il n’était pas essentiel. L’autorité ni la hiérarchie n’étaient des réalités très familières à l’Ark-Ni, qui avait l’organisation plus libre de sa propre société chevillée au corps.

Ainsi le baiser le rassura sans doute beaucoup plus que les mots. Ses mains glissèrent sous le haut de Luke pour retrouver sa peau, caresser ses flancs, sentir sa chaleur et son énergie. Il laissa la Force le remplir des sentiments de son ami, ceux qui résistaient aux paroles, qui échappaient à l’attention constante que leur situation particulière les forçait à porter à eux-mêmes et à ce qu’ils éprouvaient. Il aurait pu faire l’amour à Luke, là, contre le mur, mais à la place il rompit leur baiser et ses mains revinrent au-dessus du vêtement.

— Promis j’vais être… P’têt pas plus calme…

Soyons réaliste.

— … mais moins inquiet.

Karm déposa un dernier baiser sur le front de Luke.

— Allons-y. On sera moins suspects à rôder autour de la prison le jour que la nuit.

Bien sûr, au milieu de l’espace, en face perpétuellement des étoiles binaires d’Ala Galada, ces notions-là n’étaient que le produit des artifices déployés par les concepteurs de la station. Plus on montait dans les niveaux supérieurs, plus l’illusion holographique d’un véritable ciel aux heures changeantes était saisissante et, tout en bas de la station, on avait abandonné toute idée de faire passer l’enchevêtrement métallique des coursives pour de véritables ruelles.

La prison étant située dans les niveaux médians, elle jouissait elle aussi de son jour et de sa nuit, de ses couchers et de ses levers de soleil, lumières diffuses soigneusement composées par quelque holoartiste et qui, à la différence de celles des niveaux supérieurs, n’avaient pas été renouvelées depuis des années.

Les deux Jedis quittèrent leur chambre, empruntèrent un nouvel ascenseur et s’engagèrent dans l’une des navettes qui serpentaient de niveau en niveau et qui guidait les touristes à des endroits précis. Assis à côté de Luke dans le wagon à suspension magnétique qui filait sur le flanc des bâtiments et s’engouffrait dans les brefs tunnels séparant les niveaux, Karm observait les autres voyageurs, des familles avec leurs enfants, des employés de casino qu’on reconnaissait à leur tenue, deux ou trois membres de la police.

— Canopée de printemps, annonça une voix artificielle.

Les deux Jedis se levèrent avec d’autres et descendirent à la station la plus proche de la prison. Le reste du quartier était occupé surtout par des spas, des salons de beauté et d’autres commerces du même genre. Karm, qui éprouvait du plaisir à nager dans des sources chaudes ou les lacs froids des montagnes, avait du mal à saisir le charme que l’on trouvait à ces boites à eaux et à vapeurs exiguës et l’idée même d’un massage lui paraissait saugrenue.

— C’est quoi une « épilation à la Twi’Lek », demanda-t-il avec un brin de naïveté alors qu’ils passaient devant un tableau de tarifs pour une esthéticienne qui vantait ses techniques exotiques. Ouais, non, en fait, j’crois que j’veux pas savoir.

Comme la prison se profilait à l’horizon, Karm les fit bifurquer dans l’une des petites ruelles qui n’étaient guère empruntées, parce qu’elles donnaient surtout des portes de service, pour gagner les arrières-boutiques ou les locaux techniques. Arrivés devant un panneau qui portait différentes inscriptions relatives au système de climatisation de la station, Karm dégaina une nouvelle fois son datapad.

— Fais le guet.

Une suggestion qui pouvait paraître saugrenue, adressée à un aveugle, mais Karm avait toute confiance en l’aptitude d’un Jedi de repérer un indiscret, fût-ce les yeux fermés. Il lui fallut quelques tentatives pour forcer le code de la serrure magnétique mais le panneau finit par coulisser dans le mur et les deux hommes purent entrer dans le local et fermer derrière eux.

— Passer par l’aération, c’est sans doute le plus simple, et on devrait pouvoir choper un plan d’circulation de l’air à partir du terminal, au moins pour les deux trois pâtés de maison qui nous intéressent.

Bien sûr, c’était seulement parce que Karm n’était pas très grand et qu’il jouissait d’une souplesse à toute épreuve qu’il pouvait espérer se faufiler dans les conduits. Le Gardien s’installa devant la console, connecta son datapad et recommença à explorer les systèmes informatiques de la station, remerciant la Force que la prison ne fût pas située aux niveaux supérieurs, où il supposait que les mesures de sécurité étaient bien plus drastiques.

— Hmm… Ça va pas être une partie de plaisir, murmura Karm en suivant des yeux le chemin tout en circonvolution qui amenait l’air dans la prison, mais ça devrait être jouable. Par contre, pour sortir avec l’autre, là, à moins qu’il soit comme moi, c’qu’est peu probable, va falloir forcer à travers un mur au sabre-laser, ça risque de pas être discret. On s’retrouve où après ? Au motel ? Au consulat corélien ? Au supermarché ?

C’était eux qui avaient vu le navire de l’un de leurs compatriotes exploser, ils leur prêteraient sans doute volontiers l’asile, pour le compte de la République.
Luke Kayan
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- Euh? Un centre de beauté spécifique pour Twi''Lek?

Aussi ignorant que son ami à ce sujet, Luke eut simplement le temps de se rappeler d'un cours de biologie. Il allait s'étonner sachant que les Twi''Lek n'avaient ni poils, ni cheveux, lorsque Karm lui offrit une partie de la réponse. Avec une grimace, le jeune homme considéra l'endroit où se trouvait probablement le centre puis le délaissa, non sans un petit sourire final, à peine perceptible mais toutefois complice pour Karm. Ce type d'anecdotes se savourerait plus tard à deux, il était probable qu'ils en rient d'ailleurs.

Les alentours étaient si tranquilles que Luke avait l'impression d’être doublement aveugle. Les gens qui passaient sans le regarder, -sans rien regarder d'ailleurs- semblaient mornes, résignés à leur sort dont ils ignoraient tout au final. Le jeune homme ne remarqua rien de spécial donc, et tout en restant à l'affût, il laissa ses pensées s'envoler vers la Mission, le déroulement prochain de cette dernière mâtiné de quelques inquiétudes bien logiques. Quelques particules de Karm se logèrent également dans sa tête, quoiqu'il puisse essayer de faire pour les faire partir, parce que ce n'était pas professionnel. Rien à faire, l'Ark-Ni, ses préoccupations, son désir de devenir Maître. Tout cela se promenait allègrement dans le cerveau du Hapien et les idées sauvages continuaient de cavaler jusqu'à ce qu'il trouve de quoi s'occuper. En plus de lui offrir une certaine contenance, de le normaliser, le Datapad que le blond venait de sortir allait lui permettre de récolter davantage d'informations sur Kav',son caractère et son état de santé.

- Rien à signaler.

Il écouta attentivement le Chevalier Turquoise lui exposer le résultat de sa "chasse" aux solutions, autant dire qu'elles n'étaient ni fameuses, ni prometteuses, surtout vu ce qu'il avait appris. Le chevalier décrocha un écouteur de ses oreilles et proposa celui-ci à Karm, même si en passant furtivement son doigt sur l'écran, le Hapien enclencha l'écran de l'appareil. Aussitôt la fiche de Kav apparu, avec une photo inquiétante: un humain à la calvitie déjà avancée dont le visage ovale révélait une alimentation de pauvre, fast-food et "allergie" aux fruits. Le sabre-laser leur serait vraisemblablement utile.

- Il a des problèmes, s'essouffle rapidement faute de faire du sport, c'est un intello peureux. Donc il ne devrait pas chercher à nous trahir, et je pense qu'il a été poussé par Richard, nous aurons une chance d'obtenir des réponses sans trop de difficultés. En revanche, il va falloir le faire sortir de là. Comme tu dis. On y va.

Proposa le blond, conscient du travail qu'il y aurait à faire, mais aussi des risques qu'allaient prendre Karm. Mieux valait ne pas y songer et surtout ne pas traîner, histoire que son inquiétude ne se note pas trop, même s'il était indéniable que son calme s'était quelque peu émoussé. Son envie de partir rapidement, de se mettre au travail aussi tôt que possible ne révélait pas seulement du professionnalisme.

- Au Motel pour ensuite aviser. Le Consulat pourrait nous être utile mais on ne sait pas jusqu'où s'étend l'influence d'Action Secrète, et il est logique que si Kav s'enfuit, il essayerait d'obtenir de quitter la cité, notamment en demandant l'asile politique.

Vu tout ce qu'avait remué l'association criminelle, oui, tout ce qui avait rapport avec l'Action Secrète relevait de la politique. Coruscant risquait fortement d'accepter Kav les bras ouverts, surtout s'il prétextait avoir des informations juteuses par rapport à la véritable tête du groupe. Karm et Luke seraient le chaînon qui permettraient à la Planète Lumière, référence de la République et à l'homme de se rencontrer. Pour cela, il leur faudrait être particulièrement prudents.

**
*

- Je suis prêt.

Le jeune Jedi projeta une dernière onde d'encouragement à son collègue, lorsque ce dernier eut préparé tout ce dont il avait besoin. Lui avait son rôle de prévu, devant la prison, et désormais c'était à lui de jouer. Bien habillé, pour ne pas dire très élégant, Luke attirait des regards plus accueillants que la première fois et peu nombreux étaient ceux qui se posaient des questions sur sa nature humaine désormais. Les apparences ouvraient bien des portes, surtout ici. Il tira sa canne d'aveugle de sa poche et défroissa sa veste grise anthracite bien coupée.

Se fiant au bruit d'un moteur un peu trop enthousiaste, Luke attendit qu'un véhicule passe un peu trop rapidement, négociant un virage serré pour se littéralement se "jeter" dessus. Le véhicule donna effectivement un coup au jeune homme qui, malgré une douleur relative, s'en félicita. La situation litigieuse n'en paraîtrait que plus réelle. Avec difficultés, le blond se releva, des cheveux s'échappaient pas mèche de son cotagan, il arborait le visage défait et s'appuyait sur sa canne blanche tout en frottant de la main son flanc endoloris. L'accident ayant eu lieu devant la prison, le Jedi devina sans avoir besoin de regarder qu'il avait déjà attiré le regard des gardiens ennuyés.

- C'est un scandale! Renverser un aveugle, c'est un Outrage Monsieur. Un outrage! Je le dirai à mon père! Et les représentants de la loi, bravo... Personne pour m'aider...

Il put sentir la Force frissonner. Deux gardiens avaient quitté leur poste pour le rejoindre, nécessitant seulement quelques pas tant il était prêts pour le rejoindre. Ils devaient se demander "qui" était le père de ce gosse de riche qui réclamait justice. Par chance, le coupable de l'accident commença à répondre, ce qui promettait une belle bagarre, juste à l'entrée de la prestigieuse prison. Les gens autour s'offusquaient, comment pouvaient des gardiens de la paix- qu'ils soient policiers ou non?- tolérer cette situation? Se laisser crier dessus pas un coupable véhément et ne pas d'avantage protéger d'honnêtes citoyens tel ce jeune garçon issu, cela se voyait, d'une bonne famille.

* Vas-y!*

Songea mentalement le Hapien à son ami, tandis qu'il exagérait encore le scandale en espérant attirer l'attention du directeur à travers sa fenêtre.
Karm Torr
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Le sabre-laser serré dans un poing, Karm attendait à côté d’une grille d’aération ouverte, dans une ruelle obscure et peu fréquentée, que Luke lui donne le signal de départ. Avant de s’engager dans le conduit, il pressa l’écran de son datapad, pour envoyer à celui de Luke, connecté plus loin à un panneau électrique, la commande qui serait nécessaire pour perturber les circuits de la prison et troubler, au moins un temps, les caméras de surveillance. Puis Karm rangea son appareil et pénétra dans le conduit, refermant derrière lui.

Ramper dans la climatisation n’avait rien d’un exercice facile : même Karm n’avait que quelques centimètres de marge, parfois moins, dans les conduits de plus en plus étroits et, à chaque angle, l’Ark-Ni devait déployer des trésors de souplesse pour se contorsionner et continuer sa progression, avant que ses muscles gainés autant que possible ne lui permettent de progresser encore un peu plus.

Il y avait quelque chose d’ironique à songer que, s’il était demeuré chez les Ark-Ni, parmi les siens, il aurait pu faire une expérience exactement semblable, à réparer le système d’aération d’une de leurs stations à eux, ou d’une base sur un astéroïde. Souvent, sa vie de Jedi était radicalement différente de celle qu’il aurait pu mener mais, parfois, les deux coïncidaient, et Karm se demandait toujours s’il était censé y voir un signe.

Il avait soigneusement mémorisé le tracé des conduits, pour savoir quel coude emprunter à quel moment, quand monter à la force de ses bras et de ses épaules, quand descendre, pour ne pas finir par déboucher dans un salon à ongles ou une piscine privée. Même si la monotonie métallique des conduits n’avait pas grand-chose à voir avec les grands repères naturels qui servaient d’ordinaire d’ancrage à son sens de l’orientation, celui-ci était suffisamment affiné chez l’explorateur pour lui permettre de poursuivre sans beaucoup d’hésitation.

Il finit par entendre le grésillement caractéristique de la grille laser qui barrait l’accès aux conduits de la prison, précaution sommaire et peu coûteuse, pour un établissement de second rang, et néanmoins relativement efficace. Karm tourna lentement la tête pour pouvoir apercevoir les chiffres qui défilaient sur sa montre et qui indiquaient quand le virus qu’ils avaient rapidement programmé commenceraient à se propager. Pendant plusieurs secondes qui lui auraient paru interminables sans son entraînement de Jedi, il resta immobile, tordu dans le conduit, avec à peine assez de place pour respirer, puis le grésillement cessa brusquement, comme la circulation de l’air.

Il n’avait que quelques instants devant lui avant que ces fonctions essentielles ne soient pas reprises en main par les générateurs auxiliaires, alors il redoubla d’efforts. À peine avait-il passé de l’autre côté du conduit que la grille laser se rétablit et l’air recommença à souffler dans la climatisation. Sans s’arrêter, Karm poursuivit sa progression, jusqu’à avoir la certitude d’être au-dessus de la cellule de Kav. Il tourna précautionneusement le poignet de la main qui tenait le sabre laser, présenta la sortie de la lame contre la conduit et activa l’arme.

Dans la cellule, Kav sursauta en voyant le faisceau bleu sortir d’un cou du plafond et commença à découper un carré. Il était assez intelligent cependant pour comprendre qu’il s’agissait peut-être d’une opportunité et pour ne pas alerter les gardes. Bientôt, un bloc de métal et de béton tomba du plafond mais se suspendit au milieu de la pièce, comme retenu par des câbles invisibles, avant que Karm ne le fasse flotter lentement — et en silence, surtout — vers le sol.

Le Jedi suivit, se réceptionnant avec souplesse dans la cellule.

— C’est Richard qui vous envoie ?
— On va p’têtre faire la conversation plus tard, suggéra l’Ark-Ni en s’étirant, pour chasser la douleur de son exercice d’homme-serpent. Histoire d’éviter que les gardes se rameutent, quoi.
— Et les caméras ?
— H.S. mais pas pour longtemps.

Karm se dirigea vers le mur de la cellule qui donnait, s’il se souvenait bien, sur un couloir de service technique de la station et recommença son travail de découpe.

— Vous êtes un renégat ? Un Jedi, euh, gris… ?

Kav savait que ça existait. Il supposait aussi que jamais un Jedi légitime ne viendrait en aide à un membre d’Action Secrète et il lui semblait que les Siths, d’une part, avaient des sabres rouges, et d’autre part, paraissaient plus effrayants. Karm s’abstint de répondre mais, alors qu’il avait presque fini de pratiquer une ouverture dans le mur, il déclara :

— On a de la compagnie.

Tous les gardes n’avaient pas dû se précipiter au secours de Luke mais la diversion avait dû être néanmoins assez efficace, parce que Karm ne sentait que deux présences qui accouraient vers eux. N’écoutant que son courage, l’artificier d’Action Secrète vint prudemment se réfugier aux côtés du jeune homme, qui n’avait pas forcément un physique très rassurant, mais qui au moins était armé.

Par une pression de la Force, Karm acheva d’abattre la cloison. Il retracta la lame de son sabre. Conscient qu’avec Kav à ses côtés, il ne distancerait jamais les gardes à la course, il fit volte-face pour les affronter. Les deux hommes déboulèrent à la porte de la cellule. Ils abaissèrent le mur de plasma et mirent Karm en joue. Les deux rayons de laser étourdissant avaient déjà fusé des canons quand la lame du sabre, que Karm tenait de la poigne inversée Shien, éclaira à nouveau la cellule de sa lueur bleutée.

Les rayons furent renvoyés en direction des gardes. L’un d’entre eux ne parvint pas à éviter son propre tir et s’effondra comme une masse, le second cependant esquiva d’une roulade sur le côté mais, déjà, Karm, s’était précipité en travers de la cellule. En courant, il avait désactivé son sabre et il était parti s’accrocher de lui-même à sa ceinture. Quand le garde commença à se relever, il en fut découragé par un coup de pied sous le menton. Karm fit voler le blaster de l’homme jusqu’à sa main et lui décocha un unique tir pour le plonger dans l’inconscience, avant de rejoindre Kav.

— On y va.
— Je peux avoir une arme aussi ?
— Plus tard peut-être, trancha Karm en s’engageant dans le couloir de service.
Luke Kayan
Luke Kayan
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- Mais enfin, c'est vous qui vous êtes jeté sous le speeder!
- J'étais sur le passage piéton... Alors, vous allez m'accuser de ne pas avoir regardé devant moi? Et ma canne? Seriez-vous également aveugle?

Luke n'avait aucune "pitié" de faire passer ce mauvais moment au conducteur de toutes façons déjà un peu trop énergique. L'homme perdait peu à peu son sang-froid, soufflant comme un bœuf et réduisant davantage sa crédibilité. Les deux gardiens de prison désormais absorbés par l'histoire essayaient probablement de se rendre compte de "qui" était le père de ce gamin. Sans doute craignaient-ils pour leur poste alors qu'il n'y avait aucun lien direct entre celui-ci et l'incident. Probablement se sentaient-ils morveux pour tout un tas d'autres d'affaires. La corruption généralisé d'Ala Galada permettait à un imposteur-Luke en l’occurrence- de démonter l'apparente solide perfection de cette société qui lui rappelait chaque fois plus celle d'Hapès.

Toutefois, il fallait être réaliste, le Jedi ne pouvait pas gagner l'intérêt de tous, y compris en faisant preuve de persuasion via la Force. Karm devrait se battre pour faire sortir Kav, pour peu que ce dernier accepte d'ailleurs de le suivre. Craignant pour sa vie, l'homme pouvait décider de rester dans sa cellule, préférant l'enfermement à la vengeance de Richard l'attendant dehors. La seule raison qui pourrait le pousser à bouger son popotin gélatineux était la menace intérieure, émanant des murs de la prison, pourris par la corruption à défaut de moisissure, naturellement inacceptable dans la cité des Deux Soleils.

En attendant, faisant mine de téléphoner à son géniteur soit-disant influent, il avait cliqué sur le programme qui devait brouiller les caméras de surveillance. Néanmoins, Luke commençait à être à court d'argument. Les observateurs, y compris les badauds de passage, se fatiguaient de son attitude de gosse de riche buté, pleurant pour un coup qui ne l'avait pas blessé. Bientôt le vent tournerait et le conducteur serait vu comme la personne malmenée par le jeune maniaque. Avant que ce ne soit trop tard et que les gardiens finissent par lui demander son nom de famille, le Hapien céda subtilement aux excuses de circonstances de l'accusé qui finit par retourner sur son speeder. Luke salua les gardiens puis dissolut le contact, il fit mine de s'appuyer contre un muret pour reprendre son souffle, mais sans faire d'histoire.

Encore quelques minutes et toutes les caméras de surveillance retrouveraient leurs fonctions,
de la même manière que le petit incident ne serait plus dans la bouche des gardiens qui retrouvaient déjà leur place, ainsi que leur concentration, quoique relative. Le blond finit par abandonner les lieux lorsque tout le système se remit en marche, aussi discrètement qu'il avait cessé de fonctionner. Il ne pouvait qu'espérer que Karm ait suffisamment eu le temps, lui ne pouvait plus agir car se faire arrêter pour désordre public serait une catastrophe.

Le jeune homme prit un taxi pour se rendre au motel. Il monta dans la chambre et se changea, afin de retrouver des vêtements civils plus modestes que ceux, en tissu précieux qui lui avaient précédemment donné cette attitude de fils à papa handicapé et capricieux. D'un geste de la main, le Jedi glissa son sabre-laser dans sa sacoche en cuir, laquelle lui offrait désormais une allure d'universitaire, bien de sa personne sans exposer de richesse ostensible.

Anxieux, il attendit son ami et Kav. Intérieurement, le jeune homme ne se sentait pas à l'aise. Il avait beau avoir préparé la sortie en contactant les autorités de Coruscant pour qu'elles viennent le chercher avec des mesures de sécurité adaptées, Luke savait aussi que dans le motel, il n'y en aurait pas pour recevoir Kav. Même si ce dernier n'était pas un meurtrier dans l'âme, il restait accusé de terrorisme, ce qui n'était pas rien. Et si le gros homme, derrière son apparence débonnaire les trompaient? S'il avait quelque chose de préparé afin de réellement fuir ? Les deux Jedis avaient agit très rapidement, sans prévenir Kav afin d'éviter ce genre de surprise, mais le Hapien craignait de mêler le prisonnier à des civils, de la même façon qu'il espérait ne pas se retrouver comme un imbécile, avec Karm, à rentrer les mains vides. Non seulement le gouvernement serait très en colère contre eux, pas prêts de faire confiance aux Jedis avant longtemps, mais en plus la suite de leur plan serait nul. Comment faire croire à la police et à Richard si Kav était quelque part, s'il était vu ailleurs? Non seulement le fugitif sensément inexpérimenté pourrait réellement mourir, mais eux se retrouveraient complètement bloqués, sans aucune chance de trouver des indices.

Mais Karm assurerait... Il le savait.
Karm Torr
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Les couloirs de service n’étaient ordinairement guère empruntés que par les droïdes de maintenance de la station. Interminables, sans décoration, éclairés par des néons qui diffusaient une lumière toujours égale, ils couraient tout autour de la superstructure, n’offrant jamais au regard que la monotonie constante de leurs portes, qui donnaient sur les locaux techniques, et de leurs panneaux de contrôle, pour l’électricité, la rotation gravitationnelle, les hologrammes plafonniers et le recyclage de l’air.

Karm pressait le pas mais Kav avançait peu vite. En marchant, les sens en alerte, le Jedi avait néanmoins entrepris de sonder comme il le pouvait l’esprit de son nouvel acolyte, de tenter de deviner, au moins superficiellement, si ce n’était ses intentions, tout du moins le genre d’homme qu’il était. Il lui semblait que l’artificier était réellement soulager d’échapper à la prison, inquiet bien sûr, sans doute à cause de la fuite, et porté par un vague espoir, dont Karm n’identifiait pas très bien l’objet.

Mais bientôt des voix s’élevèrent derrière eux. Des poursuivants, à n’en pas douter. Karm se figea, fit volte-face, et son esprit si particulier s’activa : cinq ou six idées y jaillirent brusquement, liées par une logique qui aurait échappé à presque n’importe qui d’autre que l’Ark-Ni. Son esprit tactique les analysait à toute vitesse, aussi facilement qu’il aurait du mal à les expliquer à d’autres et puis il finit par fourrer son sabre-laser dans les mains de Kav.

— Rendez-vous au motel Comor, niveau 38, chambre 12. Là-bas, on vous protègera et on vous exfiltrera. Prenez ça avec vous. Vous en servez pas, vous vous blesserez.
— Mais…
— J’vais retenir les poursuivants pour que vous ayez le temps de vous enfuir.

L’autre solution aurait consisté à tenter de les distancer mais, avec le peu athlétique Kav, c’était perdu d’avance. Protéger leur futur indicateur et l’envoyer à Luke était la seule chance de progresser dans leur enquête.

— Vous voulez pas votre arme, si vous devez vous battre ?
— Partez. Maintenant.

Kav resta encore un moment incertain mais le regard insistant de Karm finit par le convaincre de prendre ses jambes à son cou, fût-ce lentement. Pour Karm, le calcul était simple. Si les poursuivants étaient trop nombreux, il avait peu de chance de l’emporter sur eux sans les tuer. S’il était capturé, le sabre-laser compromettrait gravement son anonymat et compliquerait l’intervention de la République. Pour rendre le pire des scénarios moins dramatiques, mieux valait donc s’en séparer.

Le Jedi se lança en courant dans le couloir à la rencontre de ses poursuivants, pour les intercepter le plus loin possible de Kav. Cette manœuvre lui offrit le luxe de la surprise, quand il déboula dans la courbe du couloir, pour asséner un coup de pied voltigeant dans la tempe de l’un d’entre eux. En retombant sur le sol, il dévia de la tranche de la main un tir de blaster, qui atteignit un troisième homme de plein fouet, avant de propulser d’un coup de paume augmenté de télékinésie le tireur contre le mur métallique du couloir de service.

Un quatrième homme fut frappé à la gorge, avant qu’une main sur sa nuque n’attire son menton très vite contre le genou de Karm qui arrivait dans l’autre sens mais le Jedi n’eut pas le temps d’éviter le tir de blaster de son cinquième adversaire, qui le toucha de plein fouet, et l’assomma aussitôt.

*

— Ah. Enfin, vous vous réveillez.

Karm ouvrit péniblement les paupières, la tête encore lourde de la salve d’énergie. Il se rendit compte très vite qu’il était ligoté à une chaise, par des câbles électriques s’il ne se trompait pas, ce qu’il interpréta, somme toute, comme un bon signe : cela voulait dire qu’il n’était pas retenu par la police et certainement pas dans une prison en bonne et due forme. Les chances de s’enfuir étaient donc plus élevées. Un regard circulaire, malgré sa nuque douloureuse, lui confirma qu’il se trouva dans une sorte d’atelier et, sur l’un des établis, il crut reconnaître les composants d’une bombe en cours de fabrication. Il en déduisit qu’il avait été capturé par l’une des cellules d’Action Secrète.

— Concentrez-vous.

Le jeune homme reporta son attention sur l’homme qui lui faisait face. La quarantaine, bien habillé quoique discrètement, le visage anguleux et les traits tirés. Il était appuyé contre un autre établi, les bras croisés, et fixait le Jedi d’un regard pénétrant.

— C’est une sacrée démonstration de force que vous nous avez faite là dans la coursive. Pas dans le genre amateur je suppose.

Karm ne répondit rien.

— Pour qui travaillez-vous ? La police ? La République ? Les Corelliens ? Richard ?
— ‘Tain, avec autant de possibilités d’emploi, vous devez pas avoir un taux de chômage délirant par ici, dites moi.

L’homme eut un rire bref et amer.

— L’humour ark-ni, n’est-ce pas ? J’ai déjà rencontré l’un des vôtres, sur la Bordure Extérieure. Vous autres Charognards, vous avez toujours eu du flair pour les métaux rares et, ma foi, les orfèvres d’Ala Galada en font parfois des choses merveilleuses.
— Ravis d’avoir pu aider.

En parlant, Karm essayait de tordre ses poignets dans tous les sens, discrètement. Il lui semblait qu’il y avait un peu de jeu dans ses liens, surtout s’il essayait de les détendre grâce à la Force, mais il lui faudrait plus de contorsions pour se libérer et, trop évidentes, elles attireraient forcément l’attention de son geôlier. Mieux valait attendre qu’il le laisse seul.

L’homme prit une petite boite à côté de lui.

— Il y a quelques années, j’ai trouvé… Enfin pas moi, un de mes employés, disons, a trouvé, dans un bazar hutt, ces objets ma foi fort utiles.

Il ouvrit la boite, s’approcha de Karm et sortit une petite électrode de quelques centimètres de diamètre. Armé de ciseaux, il découpa de l’autre main le tee-shirt du Jedi.

— J’veux pas vous décevoir, mais c’genre de choses, c’est jamais le premier soir pour moi.

Bientôt, Karm eut une électrode sur chaque pectoral, deux autres sur le ventre et deux autres au cou.

— Vous voyez, elles stimulent le système nerveux et causent, m’a-t-on dit, des douleurs tout à fait considérables. Mais elles ne laissent pas de trace et c’est vraiment un moyen idéal d’inciter les gens à se faire plus… communicatifs. Sans pour autant attirer l’attention. Alors je vous le demande encore une fois : pour qui travaillez-vous et où est l’artificier ?
— Honnêtement, j’vais finir par croire que les gens ont un problème avec les tee-shirts ici parce que…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’une violente douleur parcourut tout le haut de son corps, comme si on avait tordu ses membres encore et encore. Les dents serrés, il ne parvint pas à retenir un long gémissement plaintif et puis la décharge s’arrêta. De toute évidence, son plan d’attendre que l’homme parte pour s’enfuir n’était pas viable.

— Vous voulez reconsidérer votre réponse ?
— Vous savez c’que ça m’rappelle, cette douleur ?

Derrière le bourreau, une barre de fer commença à bouger toute seule, très, très lentement.

— Dites-moi.
— Les cours du soir.

Et une deuxième décharge partit dans les nerfs de l’Ark-Ni.
Luke Kayan
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- QUOI?

Kav sursauta, le sabre-laser qu'il tenait entre ses doigts boudinés chuta et roula jusqu'aux pieds de Luke qui, sentant la caresse du métal, se baissa pour l'attraper. Via la Force, il ferma la porte derrière l'ex-prisonnier qui se mit à trembler, facilement impressionnable. Il fallait avouer, à sa décharge, qu'un inconnu l'accueillant calmement dans la chambre de motel et changeant tout à coup d'attitude, pour adopter cet air de surprise couplé au mécontentement avait de quoi inquiéter. Luke n'avait pas le physique de l'emploi, il semblait si sage, si tranquille que c'était encore plus préoccupant de le voir se départir de sa flegme. C'était en réalité tellement rare que même un inconnu pouvait le pressentir: Le Hapien n'était pas dans son état habituel, et le constat ne faisait qu'augmenter son anxiété. Le blond du fait de gros efforts pour retrouver son sang-froid, davantage encore pour ne pas enfermer Kav dans la chambre et filer aider son ami. Il se sentit un instant complètement stupide, plus aveugle que d'habitude. Comment avait-il pu croire que cette relation n'affecterait pas ses capacités professionnelles? Il s'était fait un sang d'encre pour Karm, et désormais, perdait presque ses moyens devant un accusé, accessoirement un témoin et un civil.

Heureusement, le Jedi se reprit, utilisant une méthode de respiration en profondeur apprise plus jeune. Il ferma les yeux, s'évada de courts instants au sein de son propre corps, fermant ce dernier à toute interaction avec l'extérieur. C'était dangereux car Kav pouvait profiter de cette volée de secondes pour fuir, mais le Hapien avait senti ses intentions, l'artificier était trop timoré pour tenter quoique ce soit et le Chevalier devait se centrer pour élaborer un plan.

D'abord, il mena fermement Kav à l'Astroport, appelant une dizaine de fois les autorités Coruscantiennes en chemin, afin de les convaincre de mandater un agent.

- Le Chevalier Karm Torr est resté en arrière. Si on le fait parler, il risque de compromettre votre identité. -C'était l'argument vil qui avait fait en partie céder le chef des opérations après de trop longues négociations.-

- Très bien, attendez l'arrivée de l'agent qui prendra l'exfiltré en charge, laissez Torr... Il a été entraîné pour ce type de choses, nous ne pouvons rien faire pour lui, pour le moment.

- Vous plaisantez j'espère? Ils peuvent décider de déplacer Torr, chaque seconde compte.

- Et vous précipiter dans la gueule du Gundark n'arrangera rien. On sera bien, si vous aussi tombez entre leurs griffes. Comme je vous l'ai dit, il saura s'en sortir, il a été préparé à ce genre d'éventualités et connaissait les risques, et vous aussi d'ailleurs.

Le jeune homme pourtant habitué à obéir docilement aux ordres s'y refusa, et ce malgré le ton qui montait entre le chef et lui. Le premier eut beau menacer de parler de l'incartade de Luke à son Ordre, le Chevalier rétorquait efficacement, utilisant la logique et le pragmatisme pour défendre l'indéfendable: en grande partie, c'était son cœur qui parlait.

- S'il nous arrive quelque chose, mettez ça sur le compte de l'Ordre, vous ne serez pas mouillé. Par contre, s'il y a un mort dans l'affaire, parce que vous n'avez pas su prendre la bonne décision à temps, c'est-à-dire utiliser le moyen le plus accessible pour tenter de libérer l'agent en proie à un danger réel, c'est vous qui serez dans la ligne de mire.

À l'autre bout du Comlink Luke entendit un gros soupir suivit d'un "saletés de Jedis" "J'savais qu'on aurait du envoyer des hommes, des vrais. Saloperie de Force, des conneries... ils s'croient supérieurs. Ah si c'était un des miens". et d'autres remarques sur leur prétendue capacité au calme en toutes circonstances. D'un côté il est vrai que Luke malmenait un peu la réputation des siens, de l'autre, il était extraordinairement tranquille, froid au possible, incisif. Non. Il n'allait pas à l'encontre des règles Jedi. Le paquet serait livré, la mission n'était pas mise en danger puisque n'importe quel agent pourrait reprendre le flambeau. Il ne faisait que venir en aide à quelqu'un qui en avait besoin. N'est-ce pas? En prime, le Hapien suivait les normes de la mission.

- Et si Gala Alada se rend compte qu'un Républicain fouinait dans sa prison au même moment qu'un prisonnier s'enfuit. Je vous laisse imaginer le scandale. Torr est fidèle, mais je ne doute pas, et vous non plus, qu'ils aient des moyens persuasifs de le faire parler... Tôt ou tard.

- Ça va. Allez donc chercher votre petit ami. Mais je n'enverrai personne vous chercher, vous vous débrouillez, c'est compris?

Cracha Frédé'rick Tatcher avec tout le mépris du monde, sans que Luke sache s'il devinait la véritable relation entre Karm et lui, ou avait balancé ça en référence à son acharnement pour lui venir en aide.

- J'ai toujours su qu'il se passait des trucs pas net dans les dortoirs de votre secte.

- Terminé.

Luke se fichait des insultes, il avait eu ce qu'il voulait. Le jeune homme se tourna ensuite vers Kav, interdit, qu'il maintenait fermement par le bras, selon le protocole de sécurité.

- Kav, est-ce que vous avez eu un animal de compagnie dans votre jeunesse?
- Quoi ?
- Est-ce que vous avez eu un animal de compagnie dans votre jeunesse?
- Ouais. Un gizka.
- Un Gizka?
- Bah ouais, c'est plus intelligent que c'que vous croyez et la capacité d'adaptation de ces petites bêtes est fascinante. J'en récupérais dans les bas-fonds, j'en élevais plein dans mon terrarium mais j'avais mon chouchou. Lui, c'était un pur souche, un qui venait du berceau d'la race selon @Arti53 le spécialiste sur Holonet.
- Comment s'appelait-il?
- Vous voyez, vous vous y intéressez déjà! Quand je vous disais qu'ils étaient fascinants.
- Son nom.
- Guerrier. Des tempêtes du désert.
- Des tempêtes du désert?
- Bah ouais, Guerrier: J'vous ai dit ça résiste à tout, et "des tempêtes du désert": il venait de Tatooine. c'était un pur race.

L'agent arriva, un homme rond mais musclé au visage clos. On avait du le contacter précipitamment et venir ici en délaissant tout ce qu'il pouvait être en train de faire ne devait pas lui plaire. Le Hapien s'assura brièvement qu'il prenne les mesures de sécurité nécessaire avant de rentrer au motel. Il conserva son smoking de bonne facture mais changea sa chemise.- songeant amusé et triste à la fois, à Rono, l'enfant des quartiers qui critiquait le tee-shirt de Karm.- Désormais il abordait une tenue nettement moins "classe", le faisant ressembler à un loubard. Il était temps que Lou reprenne du service.

Il arpenta les rues à la recherche d'un indice, et finit par se laisser porter par la vague d'émotions qu'avait suscité la fuite de Kav, dit le traître par certains du quartier. Ce n'était pas bien difficile, tout le monde ne parlait que de ça, y compris quelques enfants. Luke entra dans un bar, l'air dégagé. Il découvrit assez facilement que la police ne retenait pas Karm, sinon Action Secrète qui allait, disait-on, faire passer un mauvais quart d'heure à celui qui avait aidé le traître à fuir.

- Moi aussi j'leur ferais la peau. À tous ces pourris!
- Tu dis ça sérieusement mec, ou t'es comme les autres loosers qui parlent et foutent rien?
- Nan, nan, moi j'le ferais... Pour Richard.

La tension était à son comble, l'homme exultait tant et si bien que l'aspect de Luke, grimé en sympathisant de l'Action Secrète ne comptait guère. Pour noyer son "désespoir" face à la trahison faite à son gourou Richard, le junkie fil de fer avait déjà bu plusieurs bières corréliennes et un whisky de Nar Shadaa. Luke ne lésinait pas sur la monnaie, prenant garde à ne jamais laisser le verre de son nouveau "complice" vide.

- Si on les faisait payer, p't'être que Richard nous verrait enfin. Il saurait que c'était pas à un nullard comme ça qu'il devait refiler le boulot, ah ce fils de p*te de Kav, on dit qu'il s'est fait la malle... Mais pas seul. J'me demande qui est assez con pour l'avoir comme ami.
- On pourrait interroger sa famille pour le retrouver?- Suggéra Luke, sournoisement. le visage de l'homme, persuadé que l'idée était venue de lui, s'éclaira.-
- Ouais... J'sais où ils crèchent.
- On y va.
- Une dernière peinte, pour la gloire de Richard?
- On y va, Ed.

Le hapien attrapa le poignet de l'ivrogne et rabattit ses lunettes noires sur son nez. Suivre l'homme fut un supplice, mais il tenait bon, envoyant la Force en éclaireuse pour le prévenir des plus gros obstacles. Enfin, il se retrouva devant le refuge de la famille de Kav: une maison des plus modestes, peinturlurée d'oeufs pourris et de mots grossiers sur les murs. Deux fenêtres étaient cassées. Le Hapien assoma Ed, ce qui ne fut pas bien difficile au vu de son état, puis il sonna à la porte. Le père de Kav se dirigea vers l'entrée et fit glisser un blaster par la commissure de la porte.

- Je m'appelle Luke, je suis infiltré et j'ai aidé votre fils à s'échapper. Il a eu un Gizka qui s'appelait Guerrier. - L'arme cliqueta, le cran de sécurité venait d'être défait.- Guerrier des tempêtes du désert.- Avec un soupir, le père de famille baissa le blaster et fit entrer le Hapien.

- Kav est en sécurité, mais j'ai besoin de vous. Où Action Secrète se cache?

L' homme hésita. La femme semblait elle, plus fragile, elle avait longtemps pleuré. Même Luke pouvait le percevoir à travers sa faible aura.

- C'est momentané. On ne pourra pas éternellement assurer la protection de votre fils. Tant que le réseau fonctionnera... Il sera en danger. Ils vont remonter jusqu'à lui, où que ce soit.

Luke insista sur les derniers mots, la mère éclata à nouveau en sanglots.

- On n'a plus rien à perdre, Georges.


- J'étais un ancien partisan. Un haut placé, ami intime de Richard; Puis quand c'est allé trop loin, j'veux dire des meurtres, tout ça, j'ai quitté le groupe. Il a trouvé amusant de se venger en faisant du chantage à Kav, nous menaçant pour qu'il sabote un vaisseau Corrélien. C'est encore très récent tout ça, il a pas du avoir le temps de changer de quartier général. Et de toutes manières, il ne pensait pas que j'étais une vraie menace, jusqu'à ce que mon fils ne s'évade...

L'adresse ancrée dans sa mémoire, Luke se dirigea vers l'endroit approximatif où tout le monde savait que l'association terroriste trafiquait: une zone désaffectée pourvue de plusieurs bâtiments abandonnés, notamment des usines d'assemblages de pièces. Classique. Luke s'introduisit dedans,
faisant fi du panneau de danger qu'il ne voyait de toutes façons pas. Sa progression fut laborieuse et chercher Karm était comme fouiller une botte de foin pour espérer y retrouver une aiguille perdue. Sauf que le Hapien tenait à cette aiguille.

Luke se concentra alors, caché derrière un énorme poteau. Il lança la Force, appelant son ami.

*Je suis là. Guide-moi.*

Une vague de chaleur accompagna le message, diffus, transmis sous forme d'émotions plus que de mots. S'il savait où Karm se trouvait, Luke gagnerait du temps et pourrait trouver une bonne façon de s'infiltrer. D'autre part, il avait aussi besoin de se rassurer quant à la survie de son compagnon.
Karm Torr
Karm Torr
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Un soupir chuintant résonna dans l’atelier alors que les derniers soubresauts de la décharge cessait d’agiter le corps de Karm. Le Jedi était en sueur et la douleur vive commençait à hanter son esprit après avoir torturé son corps. Il fallait toutes les aptitudes surhumaines des fidèles de l’Ordre pour ne pas songer à se rendre sans plus attendre et à dire, tout dire, pour que la souffrance ne revienne pas une troisième fois.

Mais Karm sentait qu'il était sur le point de découvrir quelque chose d’important. Son tortionnaire lui avait demandé s’il travaillait pour Richard ou la police et c’était donc qu’il avait affaire à une tierce partie, probablement à l’un de ces gros bonnets d’Action Secrète, fondateurs fortunés, qui voyaient d’un mauvais œil que l’organisation tombe entre les mains d’un baron des bas-fonds. S’il résistait encore un peu, s’il en apprenait un peu plus, sa capture pouvait devenir une aubaine.

— Je crains que ma patience ne commence à s’épuiser.
— M-mec, débuta Karm, qui ne parvenait pas à empêcher sa voix de trembler, j’vais av… voir du mal à c… compatir.

L’homme hésita manifestement. L’Ark-Ni n’était pas très grand et, même s’il avait un physique bien entretenu, il restait probablement fragile. Trop de décharges nerveuses et il mourrait peut-être, ce qui compliquerait assurément l’extraction d’informations.

— Donnez moi un nom.
— Bob. V’z’avez une tête… à vous appeler… Bob.

Et Bob effleura le boitier de contrôle, pour déclencher la troisième décharge.

*

C’était douze ans plus tôt mais Karm s’en souvenait comme de la veille. Il était dans un vaisseau avec TavaÏ, alors qu’il n’était qu’un jeune Padawan de quatorze ans, au lendemain de sa première bataille, sur Ondéron. À genoux torse nu devant le siège de l’Amarane, le dos tourné à elle. Tavaï donnait une tige de bois souple et, régulièrement, elle lui donnait un grand coup sur le dos. La douleur violente s’en propageait dans ses épaules, dans sa nuque, dans le creux de ses reins.

— La douleur est comme toutes les sensations : un artefact du corps, qui peut s’ignorer.

Et un autre coup.

— La Force peut en détourner une partie et ce qu’elle ne peut pas détourner…

Un autre coup. Une larme roula sur la joue de l’Ark-Ni.

— … il suffit de s’y plonger, pour que la douleur perde son sens et devienne négligeable…

Et encore.

— … comme dans la bataille, il y a la paix au milieu des émotions…

Une interprétation toute personnelle du Code Jedi. L’Amarane frappa encore son Padawan.

— …. il y a la quiétude au milieu de la souffrance.

*

La douleur vrillait ses nerfs mais, au lieu de l’ignorer, Karm se concentrait sur elle. Il ne voyait plus qu’elle, elle devenait pure, elle remplissait son esprit, illuminait d’une lumière cruelle chaque recoin de son corps et chaque aspect de son lien à la Force. Brusquement, derrière son bourreau, sur l’établi, la barre de fer bondit et frappa le Galadien en plein crâne. L’homme s’effondra, lâchant le boitier, ce qui interrompit la décharge.

Le souffle court, le corps tremblant, les muscles crispés, Karm peina à retrouver son calme. Une attaque de panique menaçait de succéder à sa prouesse morbide inspirée par les enseignements pervers de Tavaï. Mais, soudain, il sentit la présence de Luke, encore trop lointaine, et sa chaleur et sa passion, à travers la Force, qui courut sur sa peau, sur ses lèvres, sur son esprit. Les yeux fermés, Karm inspira profondément, du corps comme de l’âme, cette promesse presque accessible mais il ne fut pas capable de communiquer sa propre présence.

Chaque chose en son temps. Puisant dans son calme retrouvé, le jeune homme commença à se contorsionner, presque à s’en débouter l’épaule et le poignet, tandis qu’il tirait par télékinésie sur ses liens. Il parvint après bien des efforts à leur arracher l’un de ses bras, puis l’autre, avant de se relever. Aussitôt il chancela et il dut se retenir un établi pour que ses jambes ne l’abandonnent pas. Il lui fallut encore fermer les yeux, encore respirer, encore penser à Luke pour rassembler ses forces.

Il se débarrassa des restes de son tee-shirt en lambeaux et s’agenouilla près du corps inconscient de son bourreau, pour lui faire les poches. Quelques crédits, des cartes magnétiques, une pièce d’identité. Casper J. Smith, niveau 2. Il avait donc vu juste : un des riches mécènes originaux d’Action Secrète, probablement. L’affaire de Kav avait dû creuser les tensions entre les fondateurs premiers de l’organisation et les idéologues zélotes qui avaient emboité le pas à Richard.

Le Gardien empocha ses trouvailles, déçu de ne pas avoir mis la main sur un blaster, ramassa la barre de fer et, après avoir examiné la bombe en construction, dont les composants lui parurent hélas inutiles à son évasion, il se posta à la porte, posa dessus sa main libre, ferma les yeux et se concentra sur la Force. Deux gardes d’un côté et de l’autre, puis au-delà une sorte de désert, soit qu’il y eut personne, soit qu’il fût incapable de les percevoir.

Karm prit une profonde inspiration, compta jusqu’à trois et ouvrit la porte à la volée. Aussitôt, un coup de barre de fer accueillit le garde de gauche sous le menton, puis elle s’abattit sur la main de celui de droite qui avait empoigné son blaster, avant de le frapper à la tempe. Karm allait récupérer l’arme de poing quand il découvrit pourquoi il n’avait rien ressenti de l’autre côté de la porte, à part les deux gardes.

Il n’y avait pas d’autres hommes, certes.

— Innntruuus.

Par contre, il y avait toute une tripotée de droïdes. Karm dut abandonner le blaster et se jeta précipitamment derrière une grosse caisse pour éviter la salve de tirs de blaster. Les riches fondateurs d’Action Secrète peinaient peut-être à convaincre des forces vives de se joindre à eux, ces temps derniers, mais ils ne manquaient apparemment pas de moyen pour en acheter des mécaniques. La chaine de montage dans laquelle le Jedi avait débouché abritait une vingtaine de droïdes et, sans sabre laser, il était vain d’espérer les combattre. Il fallait repérer un chemin pour s’enfuir.

Et vite. Très vite. Mais avant cela, songeant que son ami volerait sans doute à sa rescousse et risquait de se trouver confronter à un semblable comité d’accueil, Karm tenta de communiquer par la Force :

* Plein de droïdes. Sortie est. *

Il n’était pas tout à fait certain que son message parvienne à Luke.
Luke Kayan
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Contrairement à ce que certains ineptes croyaient, la communication télépathique ne ressemblait pas à un appel via Comlimk: net et tranché. De fait, si Luke ressentit l'onde transmise et la reçut avec un soulagement immense, il ne capta pas clairement le contenu. Toutefois, en traçant l'aura comme un animal aurait suivi le sillon olfactif, Luke remonta patiemment la piste. À ce jeu, il était plutôt doué, entraîné depuis sa tendre enfance à ne pas perdre Saï dans les méandres de couloirs bondés, sans se laisser distraire par les présences qui croisaient la sienne, les gens qui s'arrêtaient pour saluer, les bousculades ou obstacles. Il faut dire que le septuagénaire avait une marche vive, étonnamment souple, et comme il n'avait jamais voulu traité le Hapien en handicapé, il ne lui avait pas épargné ces utiles courses, parfois véritablement dramatiques pour celui-ci. Au début, Luke perdait son maître, il chutait par terre, pour se retrouver simplement égaré dans un coin du Temple inconnu. Évidemment, aujourd'hui, il se doutait bien que Saï veillait sur lui, derrière un pilier, mais à l'époque, le garçon s'était assez senti isolé pour ne pas réitérer ses erreurs de distraction.

Le jeune homme buta donc deux ou trois fois, mais plus efficace qu'un GPS, il parvint à localiser l'endroit où se trouvait son ami. La nuit tombante le fit frissonner, mais il ne s'en plaignit pas, songeant que bientôt, ce serait lui qui aurait l'avantage sur les gardes, étourdis par une semi-cécité dont lui se riait allègrement. À l'approche du hangar, le Jedi s'arrêta et se cacha derrière une vieille machine rouillée qu'on aurait pu finalement essayé de vendre un bon prix en tant qu'objet de collection. Il alluma son Datapad et mit ses écouteurs. Une voix mécanique entreprit de lui décrire le plan de construction de l'usine datant de plusieurs siècles: un avantage car la structure âgée ne devait pas être bien équipée question protection. Il pourrait ainsi forcer une porte voir une paroi.

À défaut de sabre-laser, Luke disposait de la Force, sa grande alliée. Sachant à peu près où se diriger, le blond marcha rapidement vers l'Est, il aurait aimé courir, voler, mais savait qu'il devait se montrer prudent. Karm n'avait pas besoin d'un renfort à la cheville cassée. Il comprit que le danger menaçait en recevant une onde à retardement de Karm. Ah. Des droïdes, c'était sûrement de ça que voulait l'aviser son compagnon, et la raison pour laquelle Luke les ressentait si tardivement. Il se plaqua contre un mur, espérant ne pas se tromper et être réellement bien caché. Évidemment, cette notion était difficile à saisir pour lui, et il devait compter sur une logique laborieusement acquise: un gros objet placé derrière l'adversaire ou y compris devant était sensé occulter efficacement une présence, mais lui laissait facilement dépasser un pan de sa toge, ou même un pied.

Cette fois-ci, le jeune homme avait une main qui dépassait légèrement, plaquée contre l'arrête du mur et sensée définir la longueur de ce dernier pour essayer de deviner s'il pouvait se cacher. Trop tard. Vu. Heureusement, son approche avait été suffisamment silencieuse pour conserver un certain effet de surprise. Luke profita du fait que seuls deux droïds venaient vers lui pour surgir et leur envoyer une vague de Force, un peu trop enthousiaste, certes, qui les frappa et les projeta en arrière. Les robots atterrissant sur le sol meuble furent capables de se redresser, même si leurs circuits étaient endommagés. Avec peine- Luke détestait se battre contre des machines, il perdait ses repères.- le Chevalier finit par les abattre, en les attirant avec la Force, pour les laisser s'entrechoquer après avoir esquissé un pas en arrière. Il se saisir du blaster de l'un d'eux et grimpa sur la chaîne de montage inactive. Le tapis étant bien défini, plat et dégagé, le Hapien prit le risque d'entamer une petite course. Il était plutôt rapide même si ses pas n'étaient pas aussi déliés que ceux d'un voyant. Il existait toujours cette appréhension à se prendre un mur, naturellement. Disposant toutefois de l'avantage d'être en hauteur, le Jedi put jeter le blaster en direction de son ami qu'il ressentait enfin comme étant tout proche.

- Karm!

Avisa le blond en sautant au milieu des droïds, armés d'une barre de fer qui jonchait le sol.
Cette dernière était plus fine que celle de Karm, moins puissante donc mais plus légère. Vif,
le Hapien envoya un coup dans le menton mécanique d'un robot, puis il se servit d'un poussoir pour embrocher plusieurs d'entre eux alignés. Son manque de force faisait que les robots, bien souvent, se redressaient. Toutefois, Luke essayait de gagner à l'usure en faisant preuve d'une habileté qu'eux ne disposaient pas. Il avait tendance à délaisser sa barre, comme le sabre,
pour se concentrer sur la Force.

- Comme sur Vonghaï! Une plaque sur eux. Dirige-la!

Le jeune homme attendit de voir si le Chevalier Turquoise trouvait que son idée était bonne,
et accessoirement une pièce suffisamment grosse pour être décrochée ou soulevée afin d'écraser les droïds. Lui apporterait sa télékinésie pour la déplacer selon les indications de son aîné. D'une onde de Force, incisive, presque imperceptible mais à la fois très douce et chaleureuse, le Hapien manifesta son soulagement à l'idée d'avoir retrouvé son amoureux.
Karm Torr
Karm Torr
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Finalement, la perspective de fréquenter les spas aux bains relaxants qu’ils avaient vus près de la prison ne lui paraissait pas si étrange. Combattre une vingtaine de droïdes armé d’une seule barre de fer, quand on était déjà bien éprouvé, ça vous entamait le moral. Mais Karm sentit bientôt Luke et la présence du Jedi s’accompagna de celle, non moins salvatrice, d’un blaster que Karm attrapa au vol, en bondissant.

Le premier tir rata sa cible, les deux suivants firent fumer des droïdes, le temps pour Karm de se rapprocher de la position de Luke, en évitant les représailles. Il finit par lancer sa barre de fer et la guida comme il l’aurait fait en lançant son sabre : le métal pivota à toute allure et décapita trois droïdes qui s’effondrèrent sur le sol, tandis qu’un dernier tir de blaster en faucha un quatrième. Karm sentit une chaleur trop intense vers son épaule gauche mais la salve n’avait fait que l’effleurer et il ignora sans peine la douleur.

À nouveau protégé, il laissa son esprit se mêler à celui de Luke, tandis que les droïdes désorientés, en manque de direction claire et précise de la part des humains inconscients, tiraient au petit bonheur la chance en progressant maladroitement sur les corps désarticulés de leurs anciens camarades. Pendant ce temps-là, la puissance des deux Jedis s’unissait dans la Force, avec beaucoup plus de facilité qu’elle ne l’avait fait sur Vonghaï, parce qu’ils se connaissaient bien désormais, ils se connaissaient même intimement.

Une plaque métallique qui aurait dû être découpée en pièces précises bien des années plus tôt mais qui avait été laissée suspendue là, quand l’usine avait fermé, commença à grincer avant de se détacher brusquement, pour aplatir avec fracas dix droïdes. Karm jaillit de sa cachette et profita de la confusion des machines restantes pour décocher quelques tirs de blaster bien placés et, finalement, grâce à l’intervention salutaire du Consulaire, le calme régna à nouveau dans l’usine désaffectée.

Karm, lui, tomba à genoux sur le sol, une main par terre, incapable de rester debout plus longtemps, sans reprendre son souffle. Il savait que quand l’adrénaline se dissiperait, d’autres douleurs viendraient s’ajouter à celles qui survivaient déjà la fin de sa torture et au combat. De roulades en esquives, son torse nu, en sueur, s’était coupé et éraflé à plusieurs endroits, des blessures superficielles qui ne laisseraient guère de trace, quelques jours plus tard, mais qui s’ajoutaient pour l’heure à tout le reste.

— Ça… Ça va aller, assura-t-il d’une voix plus faible que de coutume. Juste un peu d’aide.

Il tendit un bras à Luke pour que l’Hapien l’aide à se relever, l’autre main toujours crispée sur la poignée du blaster. Une fois debout, Karm passa son bras autour de la taille de Luke et le serra contre lui, pas très fort, parce qu’il était fatigué, et pas très longtemps, parce qu’ils avaient encore affaire, mais assez pour joindre le réconfort des sens, qui comptait tant pour lui, à celui de la Force.

— Merci, Luke.

L’Ark-Ni prononçait très rarement le prénom unique de son compagnon et il était évident qu’il lui avait donné beaucoup de la valeur que son propre prénom caché devait avoir en retour pour Luke. Il le réservait à des moments précieux et essentiels. Son étreinte se relâcha cependant et il entreprit de retirer les électrodes encore collées à sa peau.

— On était poursuivis avec Kav, j’étais obligé de retenir les mecs, mais ils étaient trop nombreux. On m’a emmené ici, j’pense un gros bonnet d’AS qui a l’air d’en avoir sévère après Richard. Ou… Quelque chose comme ça.

Après avoir jeté la dernière électrode, Karm prit la main de Luke et l’entraina dans le petit atelier où Casper resterait inconscient pour un moment encore.

— C’est Casper J. Smith, le mec qui m’a…

Torturé. La main de Karm frémit dans celle de Luke.

— … interrogé. Du niveau 2, si j’en crois ses papiers d’identité, donc plein aux as. Entre lui et Kav, j’pense que les Républicains auront pas beaucoup d’mal à secouer toute la structure. Puis y a une bombe là sur le côté, ‘fin en cours d’assemblage, et deux types que j’ai assommé à côté de la porte, c’est pas les suspects qui manquent.

Karm essayait de ne pas penser au scénario le plus probable : Smith se verrait offrir l’immunité en échange de tous les autres membres de l’Action Secrète qu’il accepterait de balancer et son bourreau jouirait probablement bientôt de sa liberté. Peu importait, n’est-ce pas ? Il avait accompli son devoir et, dans quelques semaines, d’interrogatoire en interrogatoire, ils sauraient qui avait engagé les mercenaires d’Action Secrète pour faire exploser le Trépidant.
Luke Kayan
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[hj: désolée pour les fautes. J'ai tapé plus de la moitié sur téléphone.]

Luke sentit une secousse le tirer vers le bas, cependant il campa sur ses jambes. Volontaire et vaillant. Tandis que Karm le remerciait, le Hapien hocha automatiquement la tête, silencieux, incapable de dire quoique ce soit, pris par l'émotion tandis qu'il songeait à ce que son ami avait vécu pour être dans cet état. Ils avaient beau ne pas être des surhommes, il était difficile qu'un Jedi termine ainsi, prêt à chuter et respirant la douleur pure via la Force. En outre, il se sentait mal de ne pas avoir pu arriver avant pour sauver Karm.

- Ce que je ne comprends pas, c'est que cet homme, apparemment un gros poisson, était presque seul dans cette usine désaffectée. On ne peut pas dire que la sécurité était à la hauteur du supposé rang de ce Smith.

S'étonna Luke en réfléchissant à toute vitesse. Karm et lui étaient des chevaliers Jedis, certes, mais ils n'étaient pas les super héros que décrivaient les holofilms dégoulinant de clichés pompeux. Qu'ils soient arrivés à bout de la sécurité- tout au plus une vingtaine de droïds et deux gardes.- en duo était plus inquiétant que flatteur.

- Soit c'était un dissident au sein de la propre organisation, ce qui explique qu'il ait souhaité t'interroger discrètement, soit il voulait briller sur ses concurrents et obtenir des infos de première main pour les rapporter à ses chefs en premier. Soit Action Secrète souffre d'une crise identitaire: des taupes cachées parmi ses rangs, donc les bourreaux agiraient en cachette sur ordre de leur supérieurs. Soit il n'est pas si puissant que cela, ce qui signifie que les vrais gros poissons sont vraiment très hauts placés.


Des 4 options, la deuxième et la troisième étaient les moins inquiétants, d'ailleurs celle de l'espion pourrait leur servir. Trouver un agent qui aimait jouer sur les deux tableaux serait un ajout dans le dossier contre Action Secrète qui se montait petit à petit. Luke n'avait jamais suffisamment de preuves. Il voulait toujours s'assurer que les criminels finissent bien où ils devaient finir, quitte à attendre patiemment, à les laisser libres en prenant des risques un peu plus longtemps pour les coincer définitivement. Avant, il croyait naïvement qu'une preuve irréfutable arrêtait le pire des délinquants mais il avait dû apprendre que la corruption existait, sans parler du chemin judiciaire tortueux. De ce fait le blond était nettement plus prudent et moins enthousiaste. Avoir deux membres d'Action Secrète ne servait à rien tant que rien ne les unissait formellement au groupe. Si celui-ci parvenait à se séparer d'eux comme un lézard du bout de sa queue, Kav et Casper serviraient peu. Luke soupira devant la tâche à accomplir, il attrapa son comlink difficilement, soutenant Karm de l'autre, puis, composant un numéro spécificique, il les prévint du paquet à récupérer.

En attendant que le chef des opérations daigne enfin envoyer des agents - ce qu'il avait décidé de faire, tout de même rudement content et soulagé que Karm soit vivant et surtout qu'ils aient récupéré Smith.- Luke murmura d'un air désolé un ''attends'' à son ami puis se dirigea vers l'homme assommé afin d'assurer qu'il soit bien mis hors d'état de nuire. Il était temps car ce dernier commençait à s'éveiller. Désormais menotté contre un solide radiateur e assis dans un recoin, les chevilles attachées, l'homme émit un grognement dont le Hapien ne se preocupa guère.

-Assieds-toi. Je vais t'ausculter.

Lança le Chevalier, aussi sérieux qu'inquiet. Ses mains commencèrent à détacher la tunique de son camarade pour courir le long de ses côtes ou sur les articulations. Pendant ce temps, il envoyait une onde de Force réconfortante et destinée à endormir un peu la douleur. Il savait trop bien ce qu'avait voulu dire Karm en parlant d'interroger. Lui aussi on l'avait questionné de la sorte sur Hapès. Souhaitant éviter d'y songer et ne pas forcer le Chevalier Turquoise à en parler pour définitivement s'en assurer, le Hapien tâcha de garder un semblant de normalité. Il savait qu'un voyant aurait pu le retrouver plus facilement...

- Il faut attendre les agents.


Fit-il, s'excusant d'obliger Karm à rester sur place.

- Décidément. On a le chic pour les urgences médicales sans des lieux peu appropriés.

Luke sourit. Son trait d'humour toutefois cachait aussi une certaine inquiétude alors qu'il oscultait son compagnon.
Il n'était pas sûr d'avoir autant de chances concernant une opération dans un lieu encore plus sale que la jungle de Vinghaï.
Karm Torr
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L’avalanche d'hypothèses de Luke sapa le moral de Karm, qui avait vu l’affaire terminée, et le Chevalier s’assit sur l’un des tabourets des postes de travail, près de la chaine de montage depuis longtemps désaffecté, en proie à beaucoup de découragement, pendant que son compagnon était parti s’assurer que Smith et ses deux gardes ne se relèveraient pas pour leur fausser compagnie.

Il aurait voulu trouver des raisons pour exposer une théorie plus rassurante que celles de Luke mais les idées qui se pressaient dans son esprit trouvaient mal le chemin des mots et, par le mélange de la fatigue, de la douleur qui se réveillait peu à peu une fois l’adrénaline dissipée, et des voies toujours labyrinthiques de son propre esprit. Quand Luke revint, le Chevalier était donc bien silencieux, abattu presque, malgré la victoire qu’ils venaient de remporter.

Les mains de son compagnon sur son torse et ses flancs nus le consolèrent un peu, même si elles n’étaient là que pour le soigner. Karm ferma les yeux et se cambra légèrement, laissant ses sens surdéveloppés se réveiller à cette auscultation qu’il voulait recevoir comme une caresse. Il accueillit la Force de Luke des vagues de la sienne et ses mains finirent par se poser sur celles de son ami, pour que l’Hapien, debout derrière le tabouret où il était assis, passe ses bras autour de sa taille.

— J’vais bien, c’est juste un peu de douleur.

Beaucoup de douleur, à vrai dire, mais le plus gros était passé, depuis qu’il s’était échappé de l’établi.

— J’ai l’habitude.

Les yeux toujours fermés, Karm laissa sa tête reposer contre le torse de Luke derrière lui.

— J’ai pensé à ce que Tavaï faisait, et à la manière dont elle m’a appris à… ouais, m’habituer… à ce genre de choses. Se plonger dans la douleur, résister. Tout ça. L’entraînement.

C’était un entraînement qui relevait de la maltraitance bien sûr et dont les différences avec les méthodes siths n’étaient guère flagrantes.

— J’suppose que j’dois lui être reconnaissant, quelque part…

Et c’était peut-être ce qui l’affectait le plus : que son succès du jour, il le dût à ces années trop nombreuses où il avait été malmenée par une femme qu’il était bien forcé de reconnaître désormais comme une traitresse aux instincts pervers et violents. Qu’il les avait supportées sans vraiment se poser de questions, prêt même à supposer qu’il n’y avait là rien que la marche ordinaire d’une formation un peu rigoureuse au sein de l’Ordre.

Il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez lui.

Il fut parcouru par un tremblement de douleur, ses mains se resserrèrent sur celles de Luke et puis il souffla :

— C’est rien. Juste… Les répliques. Comme les séismes. Ça va passer.

Des bruits se firent entendre à l’autre bout de la salle de montage, Karm descendit de son tabouret, s’arrachant à contrecœur de l’étreinte de Luke, et se tint prêt à intervenir, scrutant la pénombre, le blaster à la main, mais bientôt, les agents des services spéciaux de la République annonçaient leur affiliation. Une poignée d’hommes se porta à la rencontre des prisonniers, un autre entreprit d’inspecter les droïdes inertes, tandis que la lieutenante en charge de l’équipe se présentait aux deux Jedis.

— Lt. Moko.

D’un geste de la tête, elle désigna Karm.

— Besoin d’assistance médicale ?
— Ça ira.
— On a transféré Kav au consulat corrélien, on va faire pareil de ceux-ci. Des interrogatoires préliminaires nous diront si on a des arrestations complémentaires à faire dès maintenant et on procèdera à une extraction pour une enquête plus approfondie. Mais nos sources nous disent que deux mécènes suspectés d’Action Secrète, qui étaient en voyage dans le Noyau et devaient revenir dans les jours qui viennent à Ala Galada, on changea leur plan de vol pour la Bordure Extérieure.

C’était à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. D’un côté, bien sûr, cela signifiait que deux gros poissons disparaissaient dans la nature mais, de l’autre, cela impliquait qu’ils avaient eu peur des récents événements et que les arrestations du jour risquaient de porter leur fruit.

— Des experts des cellules anti-corruption de la République sont en train de déterminer des dirigeants locaux fiables, pour les aider à mettre sur pied une opération de purge des administrations et des services de sécurité mais…

Elle s’interrompit pour écouter le rapport de circonstances de ses hommes, hocha la tête à quelques endroits stratégiques et on commença à déplacer les prisonniers. Moko était une femme efficace et peu sentimentale, le profil type de la tacticienne de terrain qui prospérait dans les forces spéciales, intègre à sa manière, mais efficace à l’extrême, qui ne s’encombrait pas de considérations personnelles. Quoi qu’elle eût pu penser au fond d’elle-même de l’Ordre en général, de ces deux Jedis-là en particulier, elle n’en laissait rien paraître.

— … je vous conseille de passer du motel au consulat pour le reste du séjour, voire d’écourter ce séjour. Allons-y.

Elle tourna les talons et les deux Jedis durent lui emboîter le pas, alors qu’elle traversait à grandes enjambées la chaine de montage.

— Barney, passez-lui votre veste.

Le spécialiste des droïdes, qui ferma la marche, retira son coupe vent pour le tendre à Karm, qui l’enfila pour couvrir son torse nu.

— Il va récupérer une sorte d’immunité, pas vrai ? Smith, là.

Moko haussa les épaules.

— Ça, c’est aux procureurs de voir. Mais je suppose qu’il y aura quelque chose comme ça sur la table pour lui, oui.

Karm réprima un sourire résigné, alors qu’ils grimpaient à bord de la navette magnétique du consulat, aux portes de l’usine.
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