Karm Torr
Karm Torr
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— Non, elle était juste… Énorme !

Karm mima la taille de la fleur en question avec ses mains, avant de se souvenir que son geste était inutile. Il renfonça les mains dans ses poches. Parfois, il lui arrivait encore d’oublier que Luke ne le voyait pas.

— Donc, énorme, et baveuse. Et alors moi, j’essaie de sortir du, euh, truc, au milieu, quoi, avant d’être digéré vivant, et puis…

Le jeune homme s’était lancé dans l’une de ses histoires. Il en racontait souvent à Luke, des histoires d’explorations, de découvertes improbables dans des planètes lointaines que personne ne connaissait, de péripéties exotiques auxquelles l’Ark-Ni veillait à ajouter toujours un peu de burlesque. Ils se retrouvaient souvent de la sorte, depuis deux ou trois semaines, ensemble, depuis qu’ils étaient revenus de Vonghaï, la lune où ils avaient échoué de concert, après avoir été les victimes d’un attentat dont les motivations demeuraient encore entièrement mystérieuses.

Normalement, ils étaient ensemble pour travailler, bien sûr. Après son échec dans l’Espace Hutt, Karm apprenait aux côtés de Luke les subtilités d’une enquête bien menée, au-delà du B.A. BA que maîtrisait tout Chevalier, après avoir réussi ses épreuves. L’Ark-Ni était studieux, même si de séance en séance, il devenait à chaque fois plus évident que son esprit fonctionnait par raccourcis étrangers, conclusions atypiques, dont on ne savait pas toujours très bien s’ils tenaient de l’extraordinaire clairvoyance ou d’une profonde méconnaissance des réalités contemporaines. Un peu des deux, sans doute.

De son côté, il entraînait Luke au combat, et spécialement au combat à mains nues. Contrôler la Force pour appuyer les coups. Frapper mieux, et plus vite, et plus fort. Connaître les corps sans les voir, deviner le rythme de la bataille — danser, parce que pour Karm, le combat, comme beaucoup de choses, c’était aussi de la musique. Cet entraînement-là, c’était aussi du travail, mais il n’était pas rare qu’en corrigeant la position de l’Hapien, les mains de Karm s’attardent sur ses hanches, ou sur ses épaules, ou une fois même sur ses cuisses, et parfois aussi, quand ils étaient penchés ensemble sur un écran où défilaient les indices de quelque enquête que Luke jugeait exemplaire et qui servait à l’édification de Karm, leurs souffles se mêlaient l’un à l’autre, joue presque contre joue, beaucoup plus longtemps qu’il n’était nécessaire.

Il y avait des nuits où Karm, seul dans sa chambre, rêvait de Luke, et il se réveillait dans des draps moites et chauds du plaisir passé, un plaisir partagé dans ses songes, toujours solitaire en réalité, et quand il s’en rendait compte, il était partagé entre une espèce d’émerveillement naïf devant ce qui se passait là, à l’intérieur de son corps et de son âme, et la déception immense à la perspective d’un inassouvissement sans espoir. S’il avait été plus sage, peut-être qu’il aurait pris la décision ou de se séparer de Luke pour de bon, ou de parler à cœur ouvert à l’Hapien, mais le Jedi qu’il était avait beaucoup aussi du jeune homme sans expérience, et démuni face à lui-même.

— Donc, je grimpe hors de la fleur géante, et puis là…
— Chevalier Karm Torr.

Les deux Jedis se tournèrent vers la voix qui s’était élevée derrière eux, dans les jardins du Temple d’Ondéron. Quatre Sentinelles se tenaient là, des Ombres si Karm ne se trompait pas, spécialisés dans la chasse du Côté Obscur et, en l’occurrence, dans le contre-espionnage. Le jeune Gardien hocha la tête.

— Il va falloir nous suivre.
— C’t’urgent, demanda innocemment l’intéressé ?

Comme un seul homme, les Sentinelles portèrent la main au sabre qui pendait à leur côté. Karm haussa un sourcil.

— Nous sommes dans l’obligation de vous détenir, le temps que des déterminations soient faites, quant à votre culpabilité éventuelle dans une affaire de sécession et de meurtres.

C’était beaucoup de politesse pour une accusation aussi grave mais même un Chevalier que l’on soupçonnait d’être passé au Côté Obscur méritait, sinon le bénéfice du doute, du moins des égards. Avec un flegme typique des siens, Karm reçut la nouvelle comme si on venait de lui parler de la pluie et du beau temps, ce qui risquait peut-être de lui donner l’air coupable, à défaut d’être surpris.

— C’était pas la peine de venir à quatre.
— Nous avons lu votre dossier, les précautions paraissaient d’usage. Votre sabre, s’il vous plait…

La main tendue de la Sentinelle était sans appel. La tension était palpable alors que Karm décrochait à gestes lents l’arme de sa ceinture, pour la remettre à l’homme, qui la rangea aussitôt, avant de passer les menottes magnétiques aux poignets que tendait calmement le jeune prisonnier. Et ce fut ainsi que Karm Torr, Chevalier Jedi, fut arrêté sous les yeux de Luke Kayan.

*

— Qu’y a-t-il ?

Dix jours plus tard, dans le Temple de Coruscant, Karm restait à l’embouchure du couloir où on l’avait conduit, après lui avoir remis son sabre et présenté des excuses sobres, certes, comme souvent chez les Jedis, mais parfaitement sincères. Le jeune Chevalier tourna le regard vers le Maître avec qui il venait de s’entretenir longuement. Il haussa les épaules.

— Vous avez peur que les autres, dehors, vous pensent coupable.

Nouveau haussement d’épaules.

— Elle l’était, murmura l’Ark-Ni d’une voix éteinte.

Il parlait de Tavaï.

— Mais vous n’êtes pas elle.

Karm poussa un soupir et quitta finalement le couloir, pour rejoindre le reste du Temple, le reste des Jedis, et les regards qui peut-être se poseraient sur lui, et ses idées tristes.
Luke Kayan
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..."Énorme"...

Difficile de se faire à la voix parfois trop douce de Karm, mais à force de le côtoyer, Luke avait fini par saisir les non-dits cachés dans des intonations subtiles. "Énorme": le mot avait rebondi de telle manière que Luke sut à peu près quelle taille faisait la fleur, du moins dans son monde de mesures à lui. L'un de ses nombreux mondes... Mais il ne dit rien, s'amusant à contempler son ami patauger, via les inflexions peu assurées de sa voix. Karm était si patient et tellement envieux de tout partager avec lui, réparant ses erreurs de description alors même qu'il savait que Luke serait incapable de les relever. S'en était aussi drôle que charmant. Attendrissant.

En réalité, le plus difficile à appréhender, mais aussi le plus excitant étaient les cours de combat à mains nues. Le Hapien se débrouillait beaucoup mieux dans ce domaine que celui du sabre-laser, car le toucher était¡- sans mauvaise arrière-pensée- sa spécialité. Il n'était pas embarrassé d'un bâton dangereux et vrombissant qui gâchait les éventuels indices sonores, une chose inanimée qu'il ne ressentait pas car elle ne faisait pas partie de lui. Libre, pourvu de ses seuls nerfs sensibles ainsi que de la Force, le Chevalier apprenait aussi vite que bien. Le seul détail parasite, inquiétant tout en restant absolument indispensable était ce rapprochement entre eux, magnifiquement honteux. Les deux jeunes hommes raisonnables avaient jusque là réussi à ne pas franchir la frontière de l'impensable, diluée d'ailleurs, au fil de ces dernières années par un Conseil plus clément, mais toujours strictement interdite aux faibles. Comme Luke. Il ne pouvait pas perdre cette amitié précieuse en plein épanouissement, à l'instar de cette fleur géante... Belle mais capable de les dévorer. Il ne le permettrait pas, ne serait-ce que par respect pour Karm.

Alors pourquoi son coeur fit-il trois bonds et demi lorsque les Chevaliers se présentèrent, rompant leur bulle et leurs rires, brisant leur aventure de leur marche militaire et de leurs intentions sans équivoque? Pourquoi Luke se sentit-il soudainement inquiet? Et comment son esprit était-il parvenu en cette fraction de seconde bouleversante à faire le parallèle entre Jason et Karm? Il en attendait bien plus que prévu, de cette relation. C'était mauvais, mauvais et décevant.

D'un regard si morne qu'il paraissait avoir été tué pour la seconde fois, le blond laissa, sans rien dire, les hommes s'emparer de l'Ark-Ni, lui aussi étrangement calme, résigné. Il se leva du parc, laconique puis rentra. C'était l'heure de s'entraîner.

**
*

La déception avait levé une onde de résignation première chez Luke, fausse vaguelette trompeuse qui vient lécher la grève avec gourmandise et cynisme, sachant très bien qu'elle était le prémisse d'un grand raz-de-marée. La catastrophe, plus que naturelle d'ailleurs, se manifesta le lendemain, après s'être soigneusement vêtue d'amertume. Le Hapien, surpris, avait lutté autant que possible contre l'acidité qui rongeait son estomac, alimentée par ses souvenirs. Il n'était pas en train de tomber amoureux de Karm, alors pourquoi est-ce qu'il se demandait à toute heure s'il était destiné à toujours réitérer la même erreur, à savoir, s'attacher-vraiment s'attacher- à un criminel?

Comme ses questions étaient aussi indicibles que le brouillard sur Kamino, Luke avait choisi de tourner la chose autrement, quitte à souffrir d'avantage encore: songer que son ami était innocent. Tavaï... La première colère-sentiment obscur qui l'avait d'ailleurs rendu malade comme un chien, tant il y était peu habitué, et l'avait cloué au lit pour la journée.- passée, le jeune homme s'était rappelé, par monceaux, de ce patronyme et de ce qu'il impliquait: Une Maître rebelle, aux idées bien différentes de celles de son Padawan, lequel s'était détourné de son apprentissage trop guerrier. Un espoir. Karm n'était pas Tavaï.

Et les recherches abondèrent facilement dans ce sens réconfortant. En fait, c'était tellement facile que Luke se demandait s'il n'interprétait pas les preuves, lui habituellement si impartial. Quelques jours et deux nuits sans sommeil ou presque avaient achevé de dissiper ses doutes. C'était évident . Du coup, seul subsistait les inquiétudes purement éthiques, dépurées de tout sens judiciaire. Les réflexions, cela dit, n'en restaient pas moins difficiles à démêler, et il fallut deux jours de plus pour que Luke se décide: Il serait courageux et soutiendrait Karm. Il serait lâche et reprendrait leur relation où elle en était, c'est-à-dire à un stade quasiment platonique. On verra bien songeait l'aveugle. Ironique.

**
*

Le dossier, peu épais mais concis et rédigé avec attention dormait sur le bureau de Luke. Il n'avait finalement pas envoyé les résultats de son enquête personnelle aux autorités, craignant de porter préjudice à Karm en démontrant presque ouvertement leur relation dépassant la bonne entente professionnelle. Le détenu n'avait pas besoin d'une nouvelle accusation, concernant cette fois le recrutement de témoins loin d'être impartiaux. De toutes manières, si le Hapien avait raison et que sa tendresse certaine envers le Chevalier ne le trompait pas, il serait facile de déceler les fissures de l'accusation. Karm devrait rapidement être relâché. Alors pourquoi stressait-il?

Une courte mission intense diplomatique servit de bouée au sauvetage, le blond parvint à se sortir les problèmes judiciaire de son ami de la tête. Du moins, à les ranger dans un coin. Cela dit l'angoisse revint au galop lorsqu'il sut qu'enfin Karm était sorti. Bien sûr, il était heureux que ce dernier soit blanchi mais s'inquiétait de savoir comment il réagirait en le retrouvant, et s'il comprenait que Luke avait préféré ne pas le contacter afin de ne pas contaminer le jugement. C'était une de ses propres leçons en diplomatie, la plus difficile qui soit à appliquer: intervenir pouvait tout gâcher, une accusation comme une présomption d'innocence.

Là, par hasard, dans les couloirs... Vraiment? N'était-ce pas plutôt la Force facétieuse, tricheuse qui l'avait mené directement vers Karm? Qu'attendait son amie mystique? Qu'il aille contre les règles du Temple? Pourtant, elles étaient faites pour leur bien, les maintenir ensemble dans la lumière, non? Alors pourquoi la Force s'obstinait-elle à le pousser vers son ami? À moins qu'elle ne soit l'excuse la plus lâche qui soit, permettant à Luke de se diriger vers lui d'un pas bien trop rapide pour être naturel.

Au bout du chemin, le jeune homme ralentit son allure, comme s'il pouvait contempler son vis-à-vis dans son ensemble. Il posa ses yeux sur sa silhouette et souffla.

- Je savais que tu étais innocent. Je l'ai su le deuxième jour. Je ne t'ai pas contacté pour ne rien gâcher. La contamination. Tu sais.

Et il baissa la tête. Coupable de ne pas avoir donné des nouvelles, coupable d'en donner maintenant. Ils devraient s'éviter. Ils devraient ne jamais cesser de se retrouver. Se séparer serait un crime, au moins aussi grand que celui de se retrouver.
Karm Torr
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Interrogatoire — Premier Jour

— Ouvrez votre esprit…

L’invitation n’avait rien de bienveillant. Ils étaient tous assis en tailleur, dans une salle de méditation, mais cette méditation-là n’avait pas pour objectif de trouver une quiétude commune. Il s’agissait pour Karm de se livrer entièrement aux Ombres, de laisser leurs pensées inquisitrices explorer son esprit à lui, pour qu’aucun mensonge de sa part ne puisse venir troubler l’enquête. Toute résistance serait interprétée comme l’aveu d’une culpabilité.

Alors il s’exécuta.

— Combien d’armes savez-vous manier ?
— Hein ?

Ce n’était pas exactement la première question à laquelle il s’était attendu — précisément pour cela, sans doute, qu’on la lui posait.

— Combien d’armes ?
— Euh. J’sais pas. Quinze. Vingt.
— Vous vous considérez comme un guerrier ?
— Oui.
— Vous avez déjà tué quelqu’un ?
— …
— Vous avez déjà tué quelqu’un ?
— Oui.
— Combien ?
— Six.
— En bataille ?
— Oui.
— En dehors des batailles ?
— Non.
— Jamais ?
— Jamais.
— Est-ce que vous aimez ça ?
— Non.
— Vous battre ?
— …
— Est-ce que vous aimez vous battre ?
— … oui…

*

Il avait erré sans but dans les couloirs du Temple, incapable de savoir s’il voulait gagner une salle d’entraînement, attraper un vaisseau et regagner Ondéron, pour trouver une nouvelle mission, ou simplement se réfugier dans sa chambre et disparaître sous les draps. Il avait à peine senti la présence de Luke, préoccupé tout entier par ce froid qui le remplissait de plus en plus, et qu’il avait senti dès le premier jour, pendant l’interrogatoire. Toutes les questions posées, toutes, elles continuaient à résonner dans son esprit.

Et puis Luke, soudain, était là, comme sorti de nulle part : des profondeurs d’un Temple qui, pour la première fois de la vie de Karm, paraissait hostile et menaçant à l’Ark-Ni, des profondeurs du silence dans lequel ils avaient vécu, l’un pour l’autre, pendant ces dix jours, et des profondeurs de ses pensées. Ce fut un regard plein d’incompréhension que le jeune homme posa sur son ami, et il ouvrit la bouche une fois, deux fois, et trois, pour articuler quelque chose, avant de lâcher :

— J’pensais juste que… j’sais pas… J’pensais…

La voix de Karm s’étrangla dans sa gorge et il resta un moment à fixer ses pieds, avant de décider brusquement :

— Viens.

Il s’engagea à nouveau dans les couloirs du temple, à pas vifs, pressé de sentir une porte se refermer sur lui, qui les protégerait, Luke et lui, du regard des autres. En quelques minutes, ils parvinrent à la chambre qu’occupait l’Ark-Ni sur Coruscant, quand il collaborait avec les Archéologues principaux de l’Ordre, et où Luke n’avait jamais mis les pieds, parce que cette intimité-là aurait été peu prudente.

Elle était dépouillée comme souvent les intérieurs des Jedis mais quelques éléments ne mentaient pas, qui annonçaient la présence de l’Ark-Ni : peu de tenues jedis, des vêtements civils plutôt, de voyageurs galactiques, une pile d’holodisques sur les arts martiaux, l’astrophysique, la géologie et la mécanique, et un drôle d’instrument, semblable à un violon, qui attendait dans un coin le retour de son propriétaire. La porte se ferma automatiquement derrière eux.

L’agitation de Karm était palpable, même sans lire dans la Force. Soudain, il attrapa Luke par la tunique, l’attira contre lui, passa ses bras autour de l’Hapien, enfoui son visage dans le cou du Consulaire et fondit en larmes — une vraie crise de larmes, pas comme dans les holodrames : avec des hoquets, et de gros sanglots, et des reniflements. Il tremblait dans les bras de Luke, comme une feuille, et il lui fallut de longues minutes pour arriver à dominer le tumulte de ses émotions, l’espèce de désespoir écrasant à l’intérieur de lui, et à reprendre son souffle, à contenir ses larmes, pour pouvoir murmurer :

— Tu m’as manqué. J’ai pas d’mouchoir.

Glamour.

Karm se redressa et se détacha de Luke, pour essuyer le reste de ses larmes d’un revers de manche. Il disparut dans la petite salle de bain attenante à la chambre, se moucha dans du papier toilette, avant de revenir timidement dans la pièce principale. Il se sentait trahi par l’Ordre, et un peu par le Code Jedi, alors quand il regardait Luke, il ne voyait plus l’interdit, et seulement la promesse d’une consolation.

— Désolé. J’suis pas… De super bonne compagnie. Mon côté repris d’justice, ça m’rend peu fréquentable, tu vois…

Karm tenta un sourire timide, adossé dans l’encadrement de la porte entre la salle de bain et la chambre.

— Est-ce que tu crois que… peut-être…

Il aurait voulu que Luke le prenne dans ses bras. Encore. Requête puérile, sans doute, mais besoin impérieux. Il baissa les yeux et murmura piteusement :

— Nan. Rien. Désolé.
Luke Kayan
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- Non.

Non. Luke ne l'avait pas abandonné. Il avait peut-être laissé penser à... Quand c'était son sens pratique allié à la connaissance de la bureaucratie qui l'avait poussé à laisser les larmes rouler, seules, sur les joues de son ami. Pondération. Même dans l'amitié, surtout dans l'amitié. Refus de l'assouvissement de ses propres douleurs, délaisser des réponses qui pourraient soulager et parfois agir contre sa propre volonté, indocile, illogique. Le Hapien s'était répété sans cesse ces phrases afin de ne pas encore tomber dans l'erreur, et aujourd'hui, c'était un Karm confus, peut-être en colère qui balbutiait, mais un Karm libre. Dans ce genre de dossier simple, une seule lettre, un seul témoignage aurait pu tout fausser.

Soudain pressé le Chevalier turquoise intima Luke de le suivre. Le jeune aveugle avait beau connaître le Temple, il peinait à marcher au même pas, victime de son appréhension naturelle. Il essaya d'oublier les éventuels obstacles qui pourraient traîner et posa sa main sur le mur pour s'aider. Une fois, deux de ses ongles rencontrèrent un coin de tableau bas. Douleur supportable mais constante, légère et insistante. Ce n'était rien comparé à la déception, à la crainte que le Hapien avait dû chasser de son esprit pendant ces jours de séparation. Mais Karm n'était pas destiné à être un monstre, c'était un innocent tableau dans la vie de Luke, aux coins délicieusement douloureux, ponctués de questions abruptes, et à la toile satinée tendre sous la pulpe des doigts.

Ils arrivèrent enfin. Luke n'avait pas l'odorat d'un Cathar mais il disposait toutefois d'un sens légèrement plus développé que ses pairs. Ainsi, le parfum de Karm lui sauta aux narines, et il s'étonna de la reconnaître si facilement. Sa main se posa sur le lit, il marchait sans encombre, signe que la chambre était soit bien rangée, soit dépouillée de tout superflu, soit les deux. Lorsque son vis-à-vis s'approcha, il était en pleine exploration des lieux, à sa manière, lançant la Force dans les recoins de l'espace exigu. Son appréhension avait légèrement diminuée, faisant place à sa curiosité naturelle. Il aimait cet endroit, calme. Plus que son propriétaire en tout cas qui se jeta dans ses bras.

Surpris, le Hapien ne réagit tout d'abord pas, rigide, le dos droit, les bras le long du corps. Il se souvenait de tendresses rares échangées avec son maître, guère plus. Même Josh et Joey s'étaient tenus à carreaux, tant et si bien qu'ils ne pouvaient pas vraiment compter comme "ex-petits amis". Quant à Jason: Il ne voulait pas y songer.

De l'amitié, ce devait être de l'amitié entre eux. Pas plus.

- C'est normal.

Il avait vraiment dit cette phrase bateau? Lui si prolixe? Le Chevalier s'empourpra devant sa gaucherie. On ne l'avait pas habitué à réagir à ce moyen de consoler. Simple, parfois bien plus efficaces que les mots dont il était amoureux.

- Je veux dire ne t'en fais pas. Je reste là.

Le Hapien signala le manque ressenti en l'absence de Karm via la Force. Celle-ci tourbillonna, les enlaçant d'avantage. Animé par sa propre aura, Luke releva les bras pour enserrer la silhouette de son camarade en pleurs.

- Je suis là.

L'Ark- Ni se détacha de lui. Il se demanda si... Si quoi au juste? Luke poussa un léger soupir, décidé à ne pas du tout l'être, décidé, justement. Sans savoir que c'était justement une autre embrassade que demandait son interlocuteur, il le reprit contre lui, désarmé par la tristesse qui se déversait au sein de la Force, transperçant son ami habituellement si calme. Il devait se sentir terriblement déçu par Tavaï. Luke ne s'imaginait guère à sa place, lui qui à 13 ans avait fait face aux accusateurs traitant Saï Don de criminel. Cette souffrance-là lui paraissait plus acceptable que la trahison de l'ancienne mentor de Karm.

- Je suis désolé.

Le blond approcha ses lèvres de celles de son aîné. Nulle pensée néfaste ne polluait son esprit en cet instant, aucun "je ne devrais pas" car son geste était pur, dénué de toute arrière-pensée. Et il posa délicatement un baiser sur la commissure des lèvres de l'Ark-Ni. Juste un instant. Il se détacha, tandis que la Force,elle, virevoltante se calma et se centra sur Karm, essayant d'entrer en lui comme le ferait un bain chaud, caressant sa peau. Il lui promettait soutien dans cette terrible épreuve.
Karm Torr
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Pas.
De.
Panique.

Les yeux plongés dans ceux de Luke, même si, techniquement, ça ne servait pas à grand-chose, Karm retenait son souffle en observant l’Hapien qui venait de l’embrasser. C’était un baiser sage, et chaste, certes, mais Karm en était tout chamboulé et, désemparé devant la chose, il restait là, les deux mains posées sur le torse de Luke, le visage tout près du sien, à se poser des questions d’adolescent, et puis à ne plus s’en poser du tout, pour juste laisser la Force venir en lui, et répondre à Luke en déployant à son tour la vague de ses impressions.

*

Interrogatoire — Jour 2

— Vous a-t-elle déjà puni ?
— …
— Tavaï. Vous a-t-elle déjà puni ?
— Tous les Maîtres punissent leurs Padawans.
— En vous frappant ?
— Parfois.
— Quand ?
— Quand je faisais une erreur.
— Pourquoi ?
— La douleur endurcit le corps et l’esprit.
— Une fois par semaine ?
— …
— Une fois par jour ?
— Plus ou moins.
— Plus ou moins ?
— Plus.
— Vous trouviez ça normal ?
— Ça fait partie de l’entraînement d’un Padawan.
— Est-ce que vous seriez surpris d’apprendre que ce n’est pas le cas ?
— Quoi ?
— Que les Maîtres ordinairement ne frappent pas leur Padawan ?
— C’est que je me spécialisais dans le combat. Il fallait bien s’endurcir.
— Même.
— …
— Si vous deviez former un Padawan au combat, vous le frapperiez, pour l’endurcir ?
— … non…
— Alors vous reconnaissez que ce n’est pas normal ?
— … oui…
— Vous y preniez du plaisir ?
— Bien sûr que non.
— Alors pourquoi ne pas avoir protesté ?
— J’avais pas beaucoup d’amis. J’pensais que c’était comme ça que les choses se passaient.

*

L’une de ses mains, finalement, avait lentement remonté du torse de Luke jusqu’à son épaule et maintenant de l’épaule dans son cou, pour pouvoir poser les doigts sur la peau nue et si étrangement parfaite de l’Hapien. Karm caressait le cou de Luke, et sa joue, et cette fois il n’avait plus ni l’excuse de la guérison, ni celle des arts martiaux.

— J’ai… j’ai essayé de faire comme tu m’as appris. Comme pour les enquêtes. Rester, euh… Ordonné et simple. Parler efficacement. Méthodiquement. Prendre les choses petit bout par petit bout. Si tu m’avais pas appris tout ça, j’me serais embrouillé, j’serais passé pour un cinglé sanguinaire.

Son index suivit le dessin des lèvres de Luke et sous les mains du Hapien, le corps du Gardien fut parcouru par un frisson. La Force qui vibrait entre eux ne voilait rien du désir qu’il éprouvait mais la déception qu’il avait ressenti à l’égard de l’Ordre, et de sa formation, et du Code même, pendant ces dix jours où il avait plongé à chaque fois un peu plus dans l’abîme de son passé, avait balayé ses scrupules et il était surpris de découvrir que ce qu’il restait ne lui peignait pas ses sentiments pour Luke sous un jour sombre ou dangereux.

Ce n’était pas compliqué comme dans les livres ou les holodrames. C’était simple, très simple même.

— Merci.

Karm finit par se détacher de l’étreinte de Luke.

— Je… je sais pas quoi faire.

Le Jedi s’assit au bord du lit, les coudes posés sur les genoux, les mains croisées.

— Est-ce que tout ce que j’ai appris, tout ce qu’elle m’a appris, c’est de la m… c’est mal ? Est-ce que, genre, je devrais arrêter de me battre ou… ? J’sais pas, si je suis devenu Chevalier, c’est que ça allait dans une certaine mesure, non ? Mais, je sais pas, genre… Ça…

Il décocha le sabre de sa ceinture pour le faire tourner entre ses doigts.

— C’est elle qui m’a expliqué comment faire, c’est elle qui m’a conseillé sur le cristal, et la forme de la poignée, et tout ça. Et c’est genre, l’objet auquel je tiens le plus, mais maintenant, j’ai l’impression que ça va juste me rappeler ce qu’elle fait, ce qu’elle m’a fait, et tout ça. Et j’suis pas habitué à… à avoir des, euh… Des sentiments super compliqués, tu sais ? J’suis pas, genre, une âme torturée ou je sais pas quoi. Ma vie elle est plutôt simple, ‘fin je crois. Même, euh…

La voix de l’Ark-Ni devint plus gênée et plus hésitante mais il se lança tout de même à l’eau :

— Même pour toi… J’veux dire, je me suis posé des questions et… Et tout. Mais… En vrai… Je sais que tu es pour moi, et je suis pour toi, et c’est sans doute objectivement compliqué et tout, mais dans ma tête, c’est évident comme la vie qui cherche à se libérer.

Karm baissa les yeux et concéda :

— Mais c’est p’têt nul. Peut-être que je suis juste pas assez subtil et poète…
Luke Kayan
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[hj: désolée pour les éventuelles fautes et la qualité médiocre, j'ai tapé la moitié sur téléphone. ]

- Les intentions, probablement, oui.

Luke choisissait avec une prudence exacerbée chacun de ses mots. D'après ce qu'il pouvait lire entre les lignes, Tavaí l'avait maltraité, il ignorait si c'était plus psychologiquement que physiquement, toutefois le souci restait le même: critiquer quelqu'un que Karm avait côtoyé pendant 15 ans environ. Le sentier jonché de ronces était retors, que regarder? Les ronces qui égratignent ou le fruit délicieux qui en naît? Une situation complexe pourtant familière au Hapien. Tandis que les mains courraient sur ses lèvres puis sous ses paumes, il ne songea pas un instant à les retirer, trop affairé à organiser ses propres confessions.

- Je ne suis pas né aveugle, et je n'ai pas eu d'accident. Ma mère me frappais et j'ai failli en mourir. Ses intentions à elle, n'étaient pas bonnes. Du moins après avoir remarqué que sa méthode ne fonctionnait pas pour m'éduquer à son image. Elle se vengeait, simplement. Cela dit je crois que celles de Tavaï l'étaient. Cela ne justifie aucun de ses gestes, mais tu peux en retirer le bon: toi. Ce que tu as forgé, la mûre qui est né de ces ronces est bonne, et mature aussi. Tu n'as pas choisi le même chemin qu'elle et c'est très respectable, non, admirable. Maintenant il faudra du temps pour trier, décider ce que tu dois garder de son enseignement: probablement les techniques de combat. Quant au reste, l'expérience et ta sensibilité t'aideront à t'en détacher.


Les égratignures de ronce avaient fini par s'infecter et ils fallaient les soigner. C'était une métaphore peut-être honteusement clichée mais tout aussi honteusement vrai. Luke devait se concentrer pour ne pas crier contre Tavaï, persuadé par ailleurs de ne pas connaître la moitié de l'histoire.

- Ma mère est devenue une étrangère et j'oublie son influence sur moi au profit de celles, bien meilleures, de celles qui m'entourent. Je ne devrais pas, selon le code, m'attacher autant à Maître Fin et pourtant je le considère... Oui... Comme un parent. Toi... Et bien je ne sais pas. On se voit depuis si peu de temps et si longtemps à la fois. On ne devrait pas...

Le Hapien laissa Karm se détacher avec difficultés. Mais bien que physiquement il se soit éloigné son aura restait accrochée à celle de son comparse. Il essayait d'insuffler un peu d'espoir à cette aura désabusée.

- Ta sensibilité, c'est elle qui t'as sauvé du côté obscur. Tu es une des personnes les plus sensibles que je connaisse, Karm. Mais...

Mais?... Luke souffla un bon coup et s'approcha du lit. Il tâtonna un peu mais retrouva finalement un bout de tissu qu'il remonta patiemment jusqu'à retrouver la main de son interlocuteur.

- Tout ce que j'ai pu t'apprendre et qui t'as servi lors de l'interrogatoire me crie de ne pas m'en poser, de questions je veux dire. Je devrai juste dire non. Et toi aussi. Raisonnablement c'est le mieux pour nous. Je fus si sensible une fois déjà que j'ai failli courir à ma perte. Et encore si c'était juste la mienne, de perte. Jecrains la tienne. J'ai déjà été hum... Avec quelqu'un et si tu me permets le parallèle avec Tavaï, lui aussi m'a trahi. J'ai du le dénoncer pour fraude et il est suspecté de meurtre. Je n'avais rien vu venir. Je ne sais pas si je serais apte à apporter quoique ce soit à quelqu'un. Je ne suis pas aussi équilibré que tu le crois.

La tolérance du temple à l'égard de es relations était une chose, la tolérance que chacun devait avoir en sa propre personne en était une autre. Luke poussa un soupir, toujours debout. Une main sur le matelas et l'autre sur la tête comme s'il essayait de prendre de la distance, sans en prendre réellement. Évidemment.
Karm Torr
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Interrogatoire — Jour 3

— Vous êtes vierge ?
— Eeeeuh…
— C’est une question simple.
— Oui.
— Oui c’est une question simple ou oui vous l’êtes ?
— Je le suis. Comme la plupart des Jedis.
— …
— Non ?
— Tavaï vous a-t-elle déjà fait des avances ?
— Hein ? Nan. N’importe quoi.
— Connaissez-vous un dénommé Gando Camissan ?
— Non.
— Savez-vous avec qui Tavaï a été intime ?
— J’ignorais qu’elle l’était avec quelqu’un.
—Auriez-vous aimé l’être ?
— Avec Tavaï ?
— Oui.
— Non.
— N’avez-vous jamais eu de sentiments pour elle ?
— …
— Jamais ?
— Si. Peut-être. J’étais ado. Perturbé. Les hormones, tout ça.
— A-t-elle encouragé ces sentiments ?
— Non.
— Les a-t-elle découragés ?
— Elle les ignorait.
— Votre Maître qui vous entraînait des heures et des heures par jour, une Jedi profondément familière de la Force, connectée à vous, vous pensez qu’elle ne les connaissait pas. N’est-il pas plus probable qu’elle les ai tacitement encouragés pour mieux vous contrôler ?
— …
— Il est temps de vous rendre compte que vous ne lui devez rien et qu’il est préférable de nous aider.

*

— J’ai jamais cru que t’étais équilibré, tu sais.

Karm Torr ou l’art de la drague.

— Eeeeuh… J’dis pas ça, c’était pas pour, c’que j’veux dire c’est que…

Le jeune homme s’interrompit pour une profonde inspiration et, une fois un peu calmé, se releva pour faire face à Luke. Il avait gardé la main du Consulaire dans la sienne. L’autre, il la posa à la taille du Hapien pour l’attirer plus près de lui.

— On est tellement… Ensembles. J’veux dire, tu sais, la Force, nos esprits, nos… Âmes. Je sais pas. Que je sens bien comment on est fragiles, et euh… Perdus et tout. J’te connais. Peut-être pas, tu sais, avec des mots et tout ça, mais je te connais. Je connais rien du reste, de, euh… Des garçons, tu vois, en général, ou… Ou même des filles. ‘Fin, bon, j’ai regardé des trucs de biologie, hein, j’dis pas, l’anatomie tout ça, mais je veux dire, les relations, tout ça, j’avoue, c’est un peu flou. J’ai jamais été avec personne, d’aucune manière. Mais toi. Toi je te connais.

Comme souvent, Karm eut l’impression d’avoir été confus et il aurait voulu accompagner ce qui lui semblait bien être, malgré tout, une déclaration un peu romantique d’un geste viril et conquérant. Plaquer Luke contre le mur, lui offrir un baiser spectaculaire à en couper le souffle, mais il avait peur de mal faire. Alors à la place, il se contentait de caresser du pouce le dos de la main de son ami.

— Dis… J’peux poser une question… ?

Et comme tout tempérament turbulent, Karm savait qu’il valait mieux s’octroyer à soi-mêmes les autorisations, alors il enchaîna :

— T’as jamais penser à… Guérir ?

Sa main remonta lentement le long du flanc de Luke, caressa encore une fois son cou et sa joue, avant d’effleurer ses paupières. Il avait eu tant et tant de fois l’envie de découvrir ce corps du bout des doigts qu’il peinait à imaginer une raison qui le pousserait à s’en séparer.

— J’veux dire, avec la Force, un traitement intensif au bacta, des cellules souches bien développées, ça devrait être jouable. Maintenant que t’es un Jedi adulte, j’veux dire, et que tu peux vraiment gérer le processus. Ou y a les implants cybernétiques. Tu t’es jamais dit que… Pour tourner complètement la page, et laisser ta mère dans le passé, tu pourrais effacer ce qu’elle t’a fait ? Bon, après, tu te rendrais compte que dans le genre physique humain, j’suis un peu zarbi, mais n’empêche…

Et bien sûr, dans cette question, il y en avait une implicite, qui le concernait lui : qu’aurait-il dû changer chez lui, Karm, pour effacer ce que Tavaï y avait peut-être laissé, elle qui avait forgé son corps comme un instrument pendant des années et des années ?
Luke Kayan
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[hj: pardonne-moi la qualité. J'ai perdu le rp au moment de poster. Je l'avais dit bien long et touuuuuuuuut sur téléphone. Et là j'ai du tout refaire... La haine. Donc tu as le résultat :un bric brac de téléphone, word, passé via hotmail ect ]

- One me rendrait la vue, mais pas ma vision passée du monde avant elle. Et puis...On ne peut pas guérir ce qui est mort.

Ssns colère, tout juste un brin d'amertume, Luke venait de clore son sort. Il savait que jamais, ni ses yeux, ni son âme ne guériraient totalement. Au mieux, il pouvait s'auto-appliquer des soins palliatifs: s'adapter à sa cécité et méditer pour guérir une esprit en effet parfois instable. Son cœur s'était d'abord senti déçu, mais surtout craintif lorsque l’Arkni lui avait sous-entendu qu’il connaissait ses défauts. Qui voudrait d’un homme instable ? Pire encore, quel Jedi pourrait accepter, sans se moquer, d’un collègue fragile ? Pourtant les mots suivants, confus, bancales de Karm réconfortèrent Luke, comme si son ami était capable de rendre la fragilité belle. D’ailleurs, c’était la première fois, semblait-il, que le Hapien s’approchait de la définition de cette beauté qui lui avait toujours échappé. Les tremblements de voix, de gestes, pouvaient être beaux.

Parfaitement mièvre et parfaitement conscient de l’être, le blond ferma les yeux. Les révélations du Chevalier Turquoise en ce qui concernait son absence d’histoire sentimentale avant lui procurait une joie puérile ainsi qu’une grande culpabilité. Qui était-il pour gâcher l’innocence de Karm ?

-Mes pupilles captent encore la lumière, elles sont plus lentes que celles des voyants car elles ont perdu l’habitude mais en réalité, mes yeux sont bien vivants et ils voient. Ce sont les nerfs optiques qui ne transmettent plus les images au cerveau. De ce fait une opération serait aussi lourde que risquer car elle viserait à remplacer des tissus sains, se mutiler en retirant tout pour d’hypothétiques implants fonctionnels. Encore faudrait-il d’ailleurs que la zone de la vue de mon cerveau ne se soit pas définitivement endommagée, atrophiée après des années de non-utilisation. Je ne peux pas non plus passer autant des mois alités à récupérer puis en réhabilitation : entendons-nous bien, je ne suis pas un élément essentiel de l’Ordre mais il a besoin de toutes les mains valides, surtout en ces heures difficiles.

Il n’osa pas avouer que le monde des couleurs avait aussi quelque chose d’effrayant, d’agressif, là ou le noir feutré parvenait parfois à le rassurer. Ce serait ridicule.

D’autant que pour lui, le sacrifice était naturel. Élevé ici, Luke avait été sauvé par le Temple, Saï et son entraînement Jedi. Il leur devait tant, d’où son sentiment d’être un véritable traître, une « catin »- même si 3 ou 4 nuits avec son ex ne le définissaient pas vraiment en tant que tel, sinon en comparaison avec Karm, si pur.-.

-Et puis je n’ai pas besoin de ça pour voir que tu es « zarbi ». – Juste vengeance contre Karm qui avait souligné sa fragilité auparavant, au lieu de galamment le contredire.- mais j’aime bien.

Il regretta aussitôt ses mots qui ne faisaient qu’enflammer d’avantage l’ambiance. Car à ce rythme il ne jouait plus avec le feu, sinon un corps privé depuis des années d’anciennes sensations enfouis. S’il les avait réellement connues à vrai dire, puisqu’Avec Jason, la communication tenait du néant côté Force. Une cécité bien plus lourde à porter pour Luke. Toutefois, Jason ou Karm, la problématique demeurait :

Un Jedi à l’aube de sa carrière qui devrait être en train de plonger dans ses cas non résolus, de nouvelles enquêtes ou du moins réviser son mémoire se retrouvait là, incapable de dégager la main de son ami sur sa hanche. Pire, il demeurait passif, avec une phrase totalement lâche sur le bord des lèvres.

-On ne devrait pas.

Sans trop savoir s’il désirait que Karm le prenne au mot et se range du côté de la raison ou le pousse à la faute, le convainc qu’ils n’étaient pas d’horribles fraudeurs, Luke soupira profondément. Le dilemme lui paraissait bien plus insoluble que le néant.
Karm Torr
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— Y a une légende ark-ni… ‘Fin, c’est pas tant une légende que, euh, un genre d’apologues, quoi. Bon, par contre, c’est super raciste, mais tout est super raciste chez nous, donc bon. Bref, y a un genre d’apologue, c’est une histoire de vaisseaux. Y a un vaisseau au bout d’un champ d’astéroïdes, qui perd de l’air et l’équipage va bientôt mourir. À l’autre bout du champ d’astéroïdes, y a un vaisseau ark-ni et un vaisseau républicain.

Bon, les Républicains, ils suivent la procédure. C’est trop dangereux de pénétrer dans le champ d’astéroïdes, alors ils vont contourner, mais ça prendra trop de temps et les gens du vaisseau en détresse, ils vont juste mourir avant que les Républicains arrivent. Les Ark-Ni, ils rentrent dans le champ d’astéroïdes, ils naviguent entre les rochers, parfois ça passe à deux doigts de les exploser, mais ils arrivent de l’autre côté à temps et ils sauvent les gens dans le vaisseau.


Et donc ?

Quelques secondes passèrent en silence, le temps que Karm se rende compte que sa métaphore n’était peut-être pas très explicite.

— Euh… Ouais, c’que j’veux dire, c’est… ‘Tends, je réfléchis.

Luke ne put pas voir la moue songeuse d’élève appliqué que Karm adopta malgré lui, le temps de mettre ses pensées toujours trop vives et un peu trop chaotiques pour les autres en bon ordre. Finalement, le Gardien reprit :

— On vit des temps difficiles et c’est courant dans des moments comme ça de se dire qu’il faut suivre les codes et les procédures, parce qu’ils existent depuis longtemps. Mais le principe même des situations exceptionnelles, c’est d’échapper à la régularité des protocoles. Et aujourd’hui, des fois, j’ai l’impression que l’Ordre se replie sur ce qui le distingue radicalement des Siths pour se préserver du Côté Obscur, qu’on partage le monde des âmes comme on a partagé la Galaxie, pour éviter les conflits : à nous la paix, à eux les émotions, à nous la méditation, à eux l’impulsivité, et tout ça.

Mais en vérité, je crois que c’est toute la vie en entier, et toute l’âme, qui est notre champ de bataille. Qu’il y a la bataille de l’extérieur mais qu’il y a aussi la bataille de l’intérieure. Que la rage des Siths doit pas nous dissuader d’être en colère devant les injustices, que leurs expérimentations scientifiques doit pas nous dissuader d’être curieux, et que leurs jalousies possessives doit pas nous dissuader d’être aimants et désirants. Parce que si on leur abandonne la faculté d’aimer et de désirer pour des méditations trop confortables parce qu’elles sont aseptisées, alors on leur abandonne le principe même de la vie et la guerre sera déjà perdue.


Il eût sans doute été plus simple de pousser Luke contre un mur et de l’embrasser sauvagement mais pour Karm, l’argument qu’il cherchait à développer dépassait de loin leur situation particulière. Il l’avait compris à mesure qu’il avait tenté de l’expliquer, s’éclairant à lui-même ce qui n’avait jusque là été dans son esprit que des germes d’idées et d’intuitions.

— Moi, je crois qu’il faut traverser les astéroïdes pour préserver la vie, plutôt que de la laisser s’éteindre par peur de la risquer. J’crois que quand le code dit qu’il y a pas d’émotion mais la paix, c’est que la paix est cachée derrière l’émotion et que l’émotion est pas mal ou un rocher sur lequel on but. Comme quand il dit que y a pas de chaos, mais l’harmonie. Ça veut dire que quand les choses apparaissent chaotiques, si on regarde bien, y a de l’harmonie. Quand on est submergé par les émotions, si on les comprend bien, on peut quand même trouver la paix. Pas en les fuyant mais en se les… Appropriant. En leur donnant du sens.

Le jeune Jedi eut un rire nerveux, avant d’avouer :

— OK, j’ai jamais parlé autant dans ma vie, sérieux…

Mais il était parvenu à exposer ce qui était le fondement de sa philosophie de Jedi et de sa compréhension de la Force, avec moins d’élégance et d’érudition que ne l’aurait fait un Maître, sans aucun doute, mais avec cette sagesse précoce qui affleurait parfois dans ses attitudes et ses réflexions, quand il se sentait assez en confiance pour laisser libre cours au fil de ses pensées.

Embarrassé cependant à l’idée d’avoir paru grossier et pataud à Luke qu’il estimait plus raffiné et plus intelligent que lui-même, Karm ressentit le besoin d’exprimer autrement ce qu’il avait cherché à dire. Il faisait confiance en son corps, souvent, plutôt qu’en ses mots, alors il se pencha pour déposer un baiser dans le cou de Luke — un autre à la naissance de sa mâchoire — et le troisième, enfin, après toutes ces nuits de rêves brûlants, tous ces songes éveillés, tous ces regards dérobés, se posa sur les lèvres de son ami.
Luke Kayan
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- Mais, et si mon vaisseau s'est déjà écrasé parce que je ne savais pas piloter et que j'ai eu l'arrogance, un jour, de m'y essayer, pire encore, au milieu d'un champs d'astéroïdes?

Et il n'y avait pas que cela. Malgré ses joues rosies par l'amusement aussi bien que l'émotion, toutes deux provoquées par l'exposition philosophe-un brin burlesque, oui, il fallait le reconnaître- de Karm, Luke refusait encore de s'abandonner. D'abandonner ses croyances envers le code dont il s'était déjà détourné à ses risques et périls. Aujourd'hui impliqué, en tant que témoin dans une affaire de fraude s'étendant jusqu'au meurtre, le Chevalier pouvait s'estimer heureux de n'avoir qu'à pleurer la trahison, et non l'accusation qu'on aurait pu lui porter, les éclaboussures de son ancien amant. Lui qui pensait avoir appris la leçon donnée par les circonstances, la vie et la Force elle-même. Lui qui se pensait fidèle aux Jedis, devenu suffisamment fort pour lutter contre ses faiblesses. Une fragilité sensée lui interdire, à lui et à lui seul de s'unir à quelqu'un d'autre, sous peine de s'écraser, entraînant l'autre dans sa chute. Les yeux clos, le jeune homme soupira.

- Je suis heureux que tu aies pris la peine de me parler de cette légende.

Il lui fallait renoncer à ses promesses intérieures, à la sévérité de Saï qu'il imaginait à sa façon, les sourcils froncés, le visage clos, l'âme blessée par un ancien Padawan s'ébattant dans la luxure. Mais... Karm aussi avait renoncé à son silence habituel pour lui parler de cette légende, or rien de grave n'était arrivé. Au contraire. Le sacrifice dans ce cas était aussi beau qu'utile; étant donné que les paroles de l'Ark-Ni n'étaient pas simplement drôles ou touchantes dû à leur façon enfantine de sortir des lèvres de ce dernier. Elles possédaient également une part de vraie, jalousement gardées dans les replis de chacun, de Luke qui craignait finalement de découvrir cette dite vérité teintée de gris. Il était plus facile d'apprécier le blanc, et de détester le noir, mais cependant impossible pour une personne aussi sincère que lui de ne pas se reconnaître dans les mots de Karm. La haine, il l'avait non seulement pensé, mais aussi enseigné, n'était pas un sentiment dangereux en soi. C'était un enfant égaré, inculqué à force de coups, de paroles blessantes, qui pouvait être bercée comme la gamine tremblante au'elle était, être entourée puis dorlotée pour être transformée en amour.

Une sensation légère, mouillée, parcourut la bouche du Hapien qui sursauta, comme un petit garçon effarouché, attaqué par une soudaine déferlante de sensations. Il s'éloigna un instant, éberlué, presque scandalisé par cette rupture. Leur pacte tacite venait définitivement de se briser, et il ne savait pas si se réfugier dans le code, si rassurant en effet, ou prendre le risque. Mais puisqu'il était sensé avoir aidé l'Ark-Ni en lui enseignant comment mener une enquête, le blond décida de suivre à son tours, les classes de son ami. Il se rapprocha à nouveau puis répondit au baiser. Comme si c'était le premier- et ça l'était.- mais aussi le dernier. La pulpe de ses lèvres s'appuya contre celle de Karm, il insista, poussant doucement la porte des mots si sages, derrière leur allure vagabondes, pour découvrir leur créatrice, cette langue désirée, et l’entourer de la sienne. Il s'inspirait du savoir du Gardien, s'appropriait ses paroles, sa façon d'être, le parfum de sa salive, son essence toute entière. Puis, il rompit le baiser et demeura là, debout et droit. Seules ses mains plantées dans celles de Karm restaient, exerçant juste assez de pression pour maintenir les paumes fines contre les siennes.

Ses ongles immobiles, couchés dans les nervures de la ligne de vie du Chevalier Turquoise s'agitèrent d'un soubresaut, à peine perceptible. Ses lèvres se pincèrent, et il prit le temps pour lâcher difficilement cette phrase, plus courageuse. Néanmoins habillée de doutes, elle révélait sa difficulté à renoncer à ses "méditations aseptisées". Il possédait une volonté mais devait l'exercer de toutes ses forces afin de se rapprocher de Karm, autant que de s'éloigner. En partie prêt à tourner le dos à ses principes, le Hapien luttait âprement. Mais peu à peu, indéniablement, les Ark-Ni gagnaient du terrain, échappant à certains astéroïdes et acceptant que d'autres ricochent sur la surface de son cockpit. La légende de Karm avait beau être un brin raciste en effet, elle était pourtant réaliste.

- Et qu'on fait les rescapés Ark-Nis en premier après s'en être sortis? Est-ce qu'ils ont pleuré de joie? Ou déploré la perte des Républicains?

Il se sentit absolument ridicule. Mièvre et d'autant plus ridicule. Difficile de savoir en réalité ce que souhaitait réellement Karm, et puis Luke ne voudrait pas le blesser, ni physiquement, évidemment,
ni mentalement. Après tout, son ami était encore pur même s'il ne cumulait pas beaucoup plus d'heures d'expérience de "vol" au-dessus des nuages, dans le septième ciel.- 3 ou 4 nuits tout au plus.-

- Nous, on est sensé atterrir où?

Et leur vaisseau, petite coque de noix, tiendrait-elle la marée face au néant spatial? Une carlingue construite de bouts d'ailleurs, comme sur Vonghaï n'était pas supposé réussir à tenir sur de longues distances. Cela valait-il vraiment la peine de s'engager sur cette navette? Où étaient-ils sensés se rendre? Allaient-ils de nouveau s'écraser à cause d'une panne, d'un manque de carburant ou d'un attentat?

Est-ce que c'était si mal de s'écraser?

D'une main inconsciente, Luke serra d'avantage celle de son ami dans la sienne, il avait rapproché son corps et posé sa tête contre l'épaule de Karm, le cou précédemment baisé par ce dernier encore chauffé à blanc. Immobile, se détendant progressivement, Luke attendit, tenant son ami enlacé, à la façon d'un proche. Un amant. Peut-être? Qui sait? Pas lui en tout cas.
Karm Torr
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— Ah mais les Républicains, ils sont vivants, à la fin. Tout le monde est vivant à la fin. J’ai mal raconté.

L’apologue, c'était un art délicat, songea Karm, les lèvres encore chaudes du baiser de Luke. Il était un peu rassuré. De loin, embrasser un garçon, ça lui avait paru un exercice difficile. Surtout avec la langue. Une ou deux fois, il avait consulté des articles pour jeunes filles sur l’Holonet qui donnaient de précieux conseils pour les demoiselles perdues en pleine puberté et il avait trouvé ça bien théorique. En réalité, c’était tout naturel : soulagement.

— M’enfin généralement, un Ark-Ni qui est content, ça fait de la musique.

C’était une petite révélation en passant, parce que Karm n’avait jamais parlé de musique à Luke. Son ami devait avoir une petite idée sur la question, cependant, puisqu’à chaque fois qu’ils partageaient les mêmes impressions dans la Force, comme sur Vonghaï quand ils avaient réparé le vaisseau, comme lorsqu’ils s’entrainaient aux arts martiaux, la Force perçue par Karm se matérialisait d’abord comme une complexe symphonie. Mais c’était la seule allusion que le jeune homme eût jamais faite à cette part si importante de sa culture.

Les mains dans celles de Luke, Karm était partagé entre le désir de tout consommé tout de suite, de débarrasser Luke de ses vêtements, et de découvrir avec lui ces plaisirs qu’il n’avait jamais connus que solitaires, et la crainte d’être grossièrement maladroit. Quelque chose lui disait bien qu’un entraînement au combat rigoureux, qui avait développé sa souplesse, son endurance et sa dextérité, le disposait à ne pas être un amant trop mauvais, il nourrissait les mêmes peurs que la plupart des jeunes gens inexpérimentés.

Son cœur s’accéléra quand il guida les mains de Luke sous la chemise blanche de sa tenue de Jedi, pour les poser sur son ventre — là, en dessous de sa peau pâle, ses abdominaux peu massifs mais parfaitement dessinés frémirent en sentant la chaleur des doigts de l’Hapien. Pendant une fraction de seconde, Karm songea qu’il devait ces muscles d’abord à Tavaï. Comme son agilité, comme sa souplesse, comme sa dextérité. Pendant une seconde, dans la Force, il y eut la froideur qui accompagnait ce souvenir, puis elle se dissipa alors que l’Ark-Ni faisant remonter les mains de son ami jusqu’à ses pectoraux.

D’une voix malgré tout mal assurée, il expliqua :

— Y a des Ark-Ni qui atterrissent jamais nulle part de toute leur vie. Ils naissent sur un vaisseau, vivent sur un vaisseau, s’éteignent sur un vaisseau. Il y a un proverbe qui dit… Hm. Ark-o ban, v’ri-o shol, kr’st-an r-em.

Parfois, on aurait juré que la langue ark-ni avait plus de soupirs que de mots. Karm libéra les mains de Luke, en espérant que l’Hapien accepterait de les laisser sur son torse, et les siennes se glissèrent à leur tour sur le vêtement du Consulaire, pour se poser au creux de ses reins, et caresser des pouces la peau dont il ne voulait plus se passer.

— Traduit, ça donne, euh… L’espace, notre foyer, le voyage, notre vie : l’un et l’autre, infinis.

Karm hésita à se lancer dans une explication de grammaire sur l’ark-ni et la composition de ce proverbe en particulier mais il jugea in extremis que la syntaxe des langues à particules n’était pas nécessairement le sujet le plus romantique qui fût. Il posa son front contre celui de Luke, les yeux fermés, concentré sur la Force et les sensations qui naissaient des mains de son ami sur son corps, et des siennes sur celui de Luke.

Après quelques secondes de silence, sans bouger, il murmura :

— J’suis désolé.

Il serra un peu plus Luke contre lui.

— J’suis pas sûr d’arriver à… Bien comprendre tes craintes, tu sais ? J’ai peur aussi, j’veux dire, mais c’est plus du, j’sais pas, stress. Peur de pas savoir comment faire, quand, euh, si, ‘fin, tu sais. Physiquement, là.

Karm n’était définitivement pas prêt à écrire des romans pornographiques à succès.

— Mais dès que t’auras le dos tourné, j’vais écumer les rubriques sexos des magazines pour filles sur l’Holonet ou je sais pas, et ça ira mieux, mais toi ta peur est plus compliquée, et plus légitime sans doute, et j’me sens un peu, hm. Démuni. J’ai l’impression que c’qui s’passe là, c’est la chose la plus naturelle et la plus pure qui me soit arrivé depuis une éternité et pour toi j’ai l’impression que c’est presque une… épreuve.

Comme souvent, l’Ark-Ni avait l’impression d’avoir des impressions trop simples, trop solides à certains égards, pour la complexité du monde et des gens. Souvent, quand il entendait les discours prudents des Maîtres à propos du Côté Obscur et des tourments intérieurs qui y poussaient, le jeune Padawan avait l’impression qu’on lui parlait une langue tout à fait étrangère. Malgré la violence de son propre apprentissage, il ne s’était jamais senti près du gouffre, ni particulièrement indécis.

Il avait fini par croire qu’il était d’un tempérament un peu simple, qu’il était un guerrier un peu trop entier pour saisir ces subtilités de poète et de philosophe, et il fallait l’insistance de Luke à lui assurer qu’il était sensible et doux pour qu’il se dise que, peut-être, ses certitudes tranquilles procédaient d’autres choses que d’une brusquerie de caserne.
Luke Kayan
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[HJ: J'ai supposé que la cicatrice de l'oération était restée, dis-moi si ce n'est pas le cas! Je modifierai!]

Froideur brûlante.

L'aura de Karm, inexplicablement se tordait, exaltante, chaleureuse puis fraîche. Une joie matinée de tristesse. Oxymore inquiétante, délicieuse. Le jeune homme laissa ses mains voyager seules-en réalité un peu aidées.- le long de la poitrine de son ami. N'ayant véritablement connu qu'un autre homme dans sa vie-Josh avait eu le droit à des cavalcades de doigts par-dessus son pyjama, et Joey en-dessous mais juste au niveau des hanches, jamais plus loin.- la comparaison fut immédiate, claire, tranchante, inévitable. Jason était plus imposant mais moins musclé. À son instar, Karm avait un corps "utile", bâti pour être fonctionnel, sans un gramme de graisse en trop, sans rien de superflu: Une peau ferme sur des muscles souvent rudoyés par un entrainement constant, parfois poussé à la limite de l'humanité. Le Consulaire avait lui-même échappé aux signes les plus évidents de leur vie difficile et dangereuse, vu qu'à part une cicatrice lisse longeant son épaule et quelques autres, éphémères, il était indemne. Toutefois il était aussi plus mince de Karm, frôlant la limite du maigre, un cadeau maternel, conséquences d'années de privations à un âge crucial, desquelles il n'avait jamais complètement récupéré.

Tandis qu'il laissait donc son ami se servir de ses doigts comme bon lui semblait, Luke eut un petit sourire en passant sur une marque bien plus familière que le reste de ce corps qu'il découvrait: une légère boursouflure dont il ignorait si elle disparaîtrait ou pas; au niveau des poumons. Les membres du Medcorps avaient du le lui dire, ou du moins essayé de réparer les coutures très artisanales de Luke qui avait agit avec les moyens du bord.

- Est-ce qu'elle va s'en aller définitivement ?

Le jeune homme fermant les yeux se remémora leur épopée sur Vonghaï et l'instant horrifique, passé dans l’ascenseur. Il n'avait pas voulu alarmer son patient, et gardant ses craintes pour lui, avait silencieusement prié la Force. Les blessures du Chevalier Turquoise étaient graves à ce moment, et Jedi ou pas, les bactéries auraient pu le dévorer en guise de vengeance pour avoir été narguées de manière si insolente: opérer dans un ascenseur, accoucher dans un vaisseau: Luke devenait-il un soigneur de l'extrême?

Mais tandis qu'il interrogeait Karm sur ce détail apparemment insignifiant et qu'il se concentrait sur la délicieuse pression exercée contre ses reins, le blond ouvrit brutalement les yeux. Il s'écarta un instant de Chevalier, si étonné qu'il paraissait vraiment le dévisager. Le souffle coupé, le jeune homme évalua mentalement la portée des paroles de l'Ark-Ni avant... D'éclater de rire. Un rire totalement spontané, innocent, et libérateur... Sauf pour le pauvre Karm peut-être. Jamais le Hapien si pondéré n'avait été pris d'une telle explosion de joie. Quoique, lorsqu'il avait découvert une espèce d'insectes utilisant la Force, la sensation avait été extraordinaire, mais aujourd'hui, en vérité, la raison à son allégresse était bien moins scientifique.

-Par...don. C'est juste... Pas ta faute. Le contexte. On a l'air... Je ne sais pas.

Il se moquait gentiment de Karm mais aussi de lui, dans le fond. Tous deux se ressemblaient tant, et voir son ami agir comme lui l'aurait fait faisait comprendre à Luke combien il pouvait parfois sembler "ridicule" aux autres. La réaction du Chevalier Turquoise était aussi touchante que burlesque! Cela dit, le Hapien finit par calmer son rire, pauvre Karm qui essayait de faire de son mieux. À l'instar du blond, il voulait chercher des réponses dans les livres, avec le sérieux d'un explorateur plongé dans une jungle hostile. Oh oui, Luke aurait agit exactement de la même façon. Preuve en était son passage dans une boîte de nuit réputée avec la danseuse Aarona, où il était installé au bar avec son carnet de notes, plongé en pleine étude sociale.

Quant aux holofilms pornographiques, il se rappelait du dernier en date qu'il avait "vu" dans la base de Vonghaï. Les gémissements de la Twi''Lek obèse lui avaient paru simplement déplacés, forcés, obscènes. Un bon moyen de haïr encore plus le sexe selon Luke. Fait curieux, ce n'était pas la première fois qu'il avait vu ce type de "documentaire", et, vraiment vu cette fois, au sens propre du terme. Non pas parce qu'il était un petit pervers à 7 ans, mais parce qu'un des rares enfants à jouer avec lui lors d'une réception l'avait entraîné dans les bureaux de son père. L'autre gamin, âgé de 12 ans déjà débrouillard avec un datapad avait sans souci retrouvé le dossier pas si bien caché de son géniteur. Luke trop timoré, effrayé à l'idée de recevoir une gifle capable de le faire voler à l'autre bout de la salle par sa mère n'avait pas saisi- ni regardé- grand chose. De fait, ironiquement, il avait fini par fermer les yeux hermétiquement afin d'échapper aux images de seins protubérants. Il se souvenait juste de l'incompréhension, d'une gêne au moins aussi violente qu'un coup de Maria et de la peur d'être attrapé. Mais il garda sous silence l'anecdote, se sentant ridicule rien qu'à l'idée de l'exposer.

- Premièrement, je ne suis pas une fille.- Commença Luke d'un air faussement outré, étrangement plus à l'aise sur un sujet qui semblait habituellement lui provoquer des réactions allergiques, boutons sur le visage en moins.- Deuxièmement, je crains que tu ne trouves aucune réponse dans ce type de... Hum... Documents. Ou que celles que tu trouves ne servent guère de solution.- Non merci, il n'avait pas envie d'avoir un acteur porno dans son lit.- Il faut juste euh... Laisser faire?-Il avait osé, vraiment? Luke se sentit honteux de proférer une telle vérité, lui le coincé de service, le somnifère planificateur des moindres détails. Cela dit, c'était vrai.- Je veux dire... C'est différent pour deux hommes. Enfin je ne sais pas, je n'ai pas connu de femmes mais... Euh c'est moins... Pardon... Naturel.- Atalan le tuerait en entendant dire ça, mais les faits étaient là: le corps d'un homme était fait pour s'unir à celui d'une femme.- Alors il faut du temps pour gagner en confiance et faire ça comment dire... Un peu autrement. On n'est pas forcés d'aller jusqu'au bout, tu sais.

*Déjà qu'on ne devrait pas...*

Mais ils étaient allés trop loin pour reculer. Relancer cette phrase friserait l'indécence. La moquerie pure et cette fois loin d'être délicate.

- On peut juste... Rester comme ça.

Proposa le jeune homme en renversant néanmoins Karm sur le lit. C'était si étrange de prendre les rênes, lui à peine plus expérimenté que son ami dans le domaine. Toujours est-il que ce mélange dans la Force, cette musique l’enivrait davantage encore que ses 3 ou 4 nuits avec Jason. Il n'aurait jamais pensé avant que la Force pouvait avoir un côté sensuel. D'un côté c'était terriblement excitant, de l'autre préoccupant, car Luke ne voulait pas salir cette grande puissance mystique qui venait toujours à son secours quand il en avait besoin, et qui, après une prise de contact douloureuse avec un Ysalamari était revenue en lui.

Allongé de profil sur le lit moelleux, le Jedi passa sa main sur tout le corps de l'Ark-Ni, frôlant son corps, à l'instar du sien, mince mais volontaire, tirant sa force d'une détermination assez peu commune. Ils n'étaient pas bâtis pour être Jedis de base mais l'étaient finalement. De quoi être fier et se sentir, certes, un peu coupable de ce qui était en train de se passer. Par jeu ou par pudeur, le jeune homme évita les parties trop intimes de Karm, offrant des caresses en surface, actif mais avare. Son compagnon saurait-il résister?

Pour le moment, la scène était plutôt attendrissante, on aurait dit deux adolescents dans leur chambre d'étudiant hésitant à sauter le pas. Il ne leur manquait qu'une petite musique entraînante pour décider d'aller plus loin ou rester sagement ainsi, maîtrisant leur désir de gamins qui ne savent pas s'y prendre. Quoique, la musique, ils l'avaient déjà.

Via la Force, Luke essaya de calquer la mélodie de Karm, mais c'était difficile car il n'était pas habitué à en user ainsi, possédant sa propre marque: ironiquement une Force plus dansante, silencieuse mais mouvante et gracieuse, vive.

- Raconte-moi la vie des Ark-Ni qui ont toujours la tête dans les étoiles.

Réclama-t-il sur un ton faussement outragé. On ne pouvait pas lui proposer un début d'histoire puis se taire. Pour un curieux dans son genre, les contes, réels ou non, étaient ce qu'il y avait de plus romantique, surtout si ça parlait d'étoiles-bien que paradoxalement il prête un amour plus que prudent aux vaisseaux.- Ils y allaient naturellement et à leur façon.
Karm Torr
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Le rire de Luke n’offensa pas Karm, parce que le rire était l’un des fondements de la société ark-ni : il était l’instrument essentiel qui permettait de regarder les crises et les difficultés d’un peu plus loin, de balayer les petites contrariétés qui ne manquaient pas de surgir, entre des gens qui vivaient constamment ensemble dans un espace très étroit, et qui devaient compter les uns sur les autres à chaque instant.

Néanmoins, il remarqua :

— Pas naturel, pas naturel, c’est bien une réflexion de Planétaire, ça.

Le jugement demeura un peu mystérieux, parce qu’entre temps, Karm se laissa renverser sur le lit. Il se redressa un instant pour se débarrasser de son haut, avant de s’installer sur le matelas ferme à nouveau et d’accueillir Luke dans ses bras. On ne pouvait pas dire que le lit de Karm offrait le confort idéal aux premières embrassades.

— Elle d’vrait partir dans un mois, jugea-t-il quand les doigts de Luke repassaient encore sur sa cicatrice. Là, ils laissent le temps de la pleine guérison aux organes internes et ensuite, ils retirent la cicatrice.

Ce n’était pas un souci esthétique mais une précaution chirurgicale, pour éviter toute réouverture malheureuse.

Karm avait passé un bras sous la taille de Luke et posa la main sur sa hanche, pour le garder contre lui. Son autre main glissée sous sa propre nuque, il observait le plafond mais ses sens étaient occupés plutôt par la course des doigts de son ami. Son excitation était palpable dans la Force, elle était sensible aussi sur son corps, qui n’en cachait pas les signes, mais Karm n’en était pas embarrassé.

Ce désir qui l’envahissait pourtant ne le poussait à aucun geste précipité. L’Ark-Ni l’accueillait avec une tranquillité philosophe, sans chercher à le retenir mais sans vouloir non plus le satisfaire brusquement et cette attitude un peu étrange était le fruit autant de son tempérament que d’un entraînement physique intense qui le poussait à ne pas céder toujours à son corps.

— Les Ark-Ni… ? J’suis pas doué pour raconter des histoires. Mais… Hm. Si, voilà. Il y a un rite de passage, ça vient pas à un âge particulier, juste quand on se sent prêt. On va dans une baie d’observation du vaisseau, quand il traverse un espace sans planète, sans astéroïde, à la limite d’un système, on s’assoit, et on regarde l’espace. D’abord les étoiles dans le noir et puis le noir lui-même. On regarde, on fait le vide en soi-même, c’est le silence dans l’espace, le noir devant soi, aucune impression, et on se retrouve tout seul avec soi-même. Plus de monde extérieur. Parce que l’espace infini est le miroir de l’âme, il est le refuge où l’Ark-Ni se retrouve en tête-à-tête avec ses vérités profondes et apprend à être soi.

Le rituel ressemblait beaucoup à un exercice de méditation jedi, en plus individualiste, mais ce n’était pas surprenant : nombreuses étaient les cultures dont la religion ou la spiritualité recherchaient la Force par des moyens semblables.

— Et ensuite on repense aux étoiles. Chaque étoile est un être. Quand on regarde un amas d’étoiles de loin, on les voit toutes ensemble, comme une seule lumière : c’est comme ça que les autres doivent voir les Ark-Ni. Mais les Ark-Ni vivent dans l’amas, et eux distinguent les étoiles, et ils savent que chacun brille à sa manière. Et que chacun a le droit à cet espace noir et vide autour de lui, pour se retrouver avec soi-même. ‘Fin bref. C’est un peu philosophe, quoi, et je maîtrise pas très bien, ça remonte à loin.

Karm se tourna sur le flanc pour faire face à Luke.

— Y a pas vraiment d’hommes et de femmes, chez les Ark-Ni. ‘Fin, si, t’sais, biologiquement, quoi. Encore que les différences sont inexistantes, à part les organes reproducteurs. Et les gens, généralement, sont les uns avec les autres indépendamment de… ces organes là. Alors pour nous c’est aussi naturel que le reste. J’suis pas sûr de bien saisir pourquoi ça le serait pas.

Et tout en parlant, il avait soulevé lentement le bas de la chemise de Luke, jusqu’à la faire passer par dessus la tête de l’Hapien et la lancer sur la chaise du bureau. Il ne savait pas très bien où il voulait s’arrêter, et même si ses peurs étaient puériles et adolescentes, elles étaient bien réelles. Son regard courut sur le torse nu de Luke et puis il le poussa doucement sur le dos, avant de se redresser lui sur un coude.

— C’est… Comment dire ? Difficile pour toi ? Le fait qu’on soit deux mâles, je veux dire. Socialement ? Je me rends pas trop compte.

Une question insidieuse traversa son esprit : Luke l’aurait-il apprécié s’il avait été une femelle ? En bon Ark-Ni, Karm était persuadé qu’il n’y avait quasi aucune différence, et d’ailleurs certaines de ses contacts le traitaient comme une femme, parce qu’il ne les avait jamais détrompés. Mais pour Luke, sans doute, c’était différent.

Karm se pencha pour déposer un baiser sur le torse de l’Hapien. Ça, c’était facile. Pas trop technique. Pas trop intimidant. Mais son regard descendit du torse au nombril, et du nombril jusqu’à la ceinture du pantalon, et en-dessous de la ceinture, aussi.

— Hmm, commenta le jeune homme, avec un soupir à faire fondre les glaces de Hoth.
Luke Kayan
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L'histoire du peuple des étoiles lui plaisait profondément, à un point qu'il se serait presque endormi, signe d'une félicité complète, pure, sans équivoque. La tête soutenue par sa main, le jeune homme avait poussé un long soupir pour ensuite s'étirer à la manière d'un chat, pour un peu, il aurait ronronné.

- Heureusement que tu ne maîtrises pas très bien. J'aurais eu envie de prendre un vaisseau, là tout de suite, pour y aller.

Luke n'était pas favorable à une coulée mièvre de bons sentiments perchés sur des bâtonnets écœurants de compliments à la chaîne, toutefois il était obligé de reconnaître à voix haute, un certain talent de poète à Karm, quoiqu'il en dise. Évidemment l'imagination du Hapien s'était retrouvée sans dessus dessous, outrée de travailler à plein régime tandis que le cerveau du concerné s'évertuait à différencier les étoiles inconnues de ce néant qui l'accompagnait chaque jour. À n'en pas douter, il réussirait la première partie du rituel de Maturité Ark-Ni haut la main, entouré du vide depuis ses 7 ans. Se représenter les astres était moins accessible malgré les nombreuses descriptions lues dans des livres ou contées des lèvres de Saï. Il s'y essayait toutefois, avec une ardeur frisant l'excès de zèle, usant de la Force pour dessiner mentalement une sorte de boule lumineuse qui concentrait toute son énergie. Ce devait être cela une étoile: une lueur qui perçait le manteau tantôt froid, glacial, inquiétant, tantôt doux, reposant, feutré de la nuit. Cette nuit qui s'offrait à eux, colorées d'un noir mat, agréable, bercé par les mots de l'Ark-Ni.

- C'est surtout... Biologique. Je ne sais pas comment les... Hum... Ark-Nis se reproduisent, mais chez nous le corps d'un homme-pardon du mot brutal- s'encastre avec celui d'une femme. Deux... Mâles comme tu dis, c'est plus compliqué, nous n'avons pas été crée pour cela. Ni physiquement, ni socialement. C'est difficile d'accepter, surtout quand on est adolescent...- Le Jedi se souvint de ses nuits d'inquiétude, passées à se demander si l'ombre de son homosexualité soupçonnée était une anormalité de plus ou la continuité de la sienne, immense, qui l'écartait depuis toujours du chemin des autres.- Mais ça va. Je veux dire, je ne le chante pas sous tous les toits, d'ailleurs je crois que personne ne sait vraiment, sauf mon Maître, toutefois... J'accepte mieux.

Ce secret gardé à coups de non-dit plus que d'une chape de protection excessive était, de fait, moins honteux que celui de s'être laissé si facilement trahir par Jason. Le trentenaire n'était pas seulement un fraudeur, Luke était persuadé qu'il avait commandité ce ou ces meurtres dont le Tribunal doutait encore. Lui pas. Il avait fini par ouvrir les yeux et vu... En noir sang, combien cet homme qu'il avait aimé était ambitieux. Tous ses petits gestes, y compris les plus innocents, possessifs, avaient été des signes. Il ne les avaient pas vu venir, alors qu'il était sensé être formé à cela. À sa décharge, Luke avait peu vu l'ambassadeur en vrai, mais les messages auraient dû suffire. La Force aussi. Et aujourd'hui?

C'était différent. Ce devait être différent car il ne survivrait pas à une nouvelle déception du genre. La conclusion d'une telle optique était aussi lâche que mièvre, et pourtant réaliste. Le Hapien n'admettrait nulle autre trahison, tant et si bien qu'il doutait encore à mettre un mot sur sa relation avec Karm. Seuls le soulageaient le fait que cet homme suivait la doctrine de l'Ordre-en y faisant des entorses, certes.- contrairement à son Ex qui le détestait et le réprouvait, ainsi que le temps qu'ils avaient pris pour se connaitre, refrénant une passion immédiate.

- De toutes façons, je n'ai pas le choix. C'est ma nature. Ici on appelle ça être homosexuel. Ce n'est pas la norme dans la société mais c'est plus ou moins bien accepté. Certains utilisent même ce fait, cette particularité? -appelle cela comme tu veux.-pour revendiquer des droits, parfois à outrance. Ils profitent d'être une minorité pour faire du chantage. Tandis que leurs détracteurs les salissent de parjures, et que les derniers, au milieu, et bien, essayent de se fondre, de s'intégrer.

Luke avait entendu parler de ces groupuscules qui exagéraient toujours leur spécificité pour s'abroger des droits en excès. Il les méprisait profondément, froidement. Au fond, il rejoignait un peu la philosophie de Karm, la facilité d'expression et le naturel en moins: Hommes et femmes étaient complètement égaux, pourvus des mêmes droits mais également de devoirs semblables.

Défait de sa tunique, le Jedi se laissa glisser complètement contre la peau nue de son compagnon. Il disposa ses mains de part et d'autre du corps désiré, tendu par un plaisir contenu, professionnellement maintenu dans un état agréable mais contrôlable. Lui aussi sentait cette brûlure qui rongeait son frein, couchée dans son bas-ventre, comme un feu qui se croit fort, dansant en réalité dans l'âtre d'une maison, domestiqué. Il jeta quelques brindilles dans les flammes crépitantes, affamées mais guère plus, en apposant un baiser aux lèvres de Karm lorsque ce dernier relâcha son nombril pris en otage. D'une main, il descendit prudemment jusqu'au bas du ventre de son camarade qu'il massa tranquillement, avec conscience. Parfois ses doigts agrippaient un bout de peau, puis il la relâchaient gentiment, tandis que d'autres, il s'arrêtait à peine en chemin, brise timide qui repartait sitôt arrivé.

Quant à la Force, la sienne toujours, elle dansait avec le feu dans l'âtre, bercée par les flammes d'un désir tout à fait en accord avec elle.

- Est-ce que les Ark-Nis connaissent la notion du mariage? Ou du moins, de l'exclusivité?

C'était un peu brutal, sous des airs se voulant subtils, mais en réalité c'était surtout la curiosité qui avait poussé Luke à formuler cette question apparemment à double-sens. Il se demandait si leur désir de se fondre en un groupe commun ne leur faisait pas oublier un peu cette individualité-celle de chacun dans son cercle de néant n'appartenant qu'à lui.- au niveau des relations. D'un côté cela dit, inconsciemment, il démontrait aussi une certaine volonté à ne pas partager. En effet, Luke ne se voyait pas prodiguer ces caresses voir plus au nom d'une aventure sans lendemain. C'était impossible de dire "juste une fois", pas dans son langage, quelques soient les règles de l'Ordre-
aujourd'hui plus honorifiques qu'autre chose, certes.- Il outrepassait les frontières sur le long terme ou ne posait pas un seul orteil sur la ligne. De ce fait, il s'imaginait sincèrement mal partager Karm. Leur culture était si différente... Celle de son ami paraissait si sage, si attrayante mais également un peu effrayante.

- J'aimerais voir ta planète, un jour. Indépendamment d'une mission ou pas. Tu aurais envie d'y retourner ?

Il voulait éviter de proposer ce voyage -d'ailleurs il fallait encore trouver le moment pour le faire!.- sachant que lui n'accepterait jamais, absolument jamais d'emmener Karm sur Hapès. Comme sa mère, il ne considérait plus sa planète d'origine comme tel. Il y était d'ailleurs haï et en danger de mort s'il venait à y retourner. Après l'affaire de sa mère portée devant les tribunaux, les laboratoires de beauté dévastés, et un ambassadeur mis dans une mauvaise posture, tout ça "grâce" à une saleté de mâle... Mieux valait que ce dit mâle n'y remette pas les pieds.

- C'est si étrange. Tu viens d'une planète tellement égalitaire... Sur ma planète d'origine, les hommes sont inférieurs, je veux dire, vraiment inférieurs, presque des esclaves... Et nous nous retrouvons sur Coruscant, planète de la République, moderne, mais encore aux prises avec un certain machisme, où les femmes sont parfois considérées soit comme inférieures, soit comme supérieures dans certains domaines comme la garde de l'enfant, la primeur de crédibilité dans des cas de maltraitances conjugales.

On en revenait toujours aux majorités écrasantes, et aux minorités abusives qui jouaient de leurs faiblesses pour les transformer en force. Cet univers était magique, magique et épuisant.

La main de Luke s'aventura une fraction de seconde plus bas. Dans la zone interdite [Musique du documentaire du même nom!]. Erreur d'un aveugle? Possible.
Karm Torr
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— HM.

Les joues d’un Karm qui éprouvait désormais quelques difficultés à se concentrer sur la politique rosirent quand la main de Luke s’égara sous la ceinture de son pantalon. Loin de chercher à l’en dissuader, le jeune homme, d’un geste de bassin, vint chercher un peu plus la présence des doigts de son ami aveugle. Le front à nouveau posé contre celui de Luke, il laissa échapper un soupir brûlant, alors que ses propres mains, de leur dextérité habituelle, mais hésitantes, commençaient à débarrasser l’Hapien de ses tout derniers vêtements.

— J’ai pas de planète. Les Ark-Ni ont pas de planètes. Juste des vaisseaux, quelques petites bases spatiales, et des mines sur des astéroïdes. Mais pas de planète. C’est une nation itinérante, sur la Flotte.

Une réalité dont Karm avait découvert, au sein de l’Ordre, qu’elle était singulièrement difficile à appréhender pour la plupart de ses interlocuteurs.

— A… attends.

Le Jedi roula sur le dos et, après quelques contorsions, il se débarrassa de son pantalon et de son boxer. Il était nu maintenant, vraiment et complètement nu, et même si pour Luke, ce n’était pas une différence très significative, puisqu’il ne pouvait le voir, Karm ne put s’empêcher de ressentir une vague d’appréhension qui lui noua le ventre. Le cœur battant, il se tourna à nouveau sur le côté. Il prit l’une des mains de Luke dans la sienne et la posa sur son ventre, avant de la guider, lentement, avec une appréhension sensible, plus bas, et encore un peu plus bas, jusqu’à ce qu’un soupir émerveillé et chaud lui échappe.

Il repoussa ensuite les derniers vêtements de Luke et le contempla pour la première fois dans sa pleine nudité. La maigreur de l’Hapien ne le perturbait pas : il était frappé surtout par sa beauté, et peut-être par cette rencontre inattendue entre le désir d’homme que le corps du Consulaire exprimait et ses traits féminins. Par la force des choses, en grandissant au sein de l’Ordre, Karm avait assimilé un peu de ces distinctions de genre qui forgeaient les sociétés humaines et confusément, il comprit qu’il désirait Luke aussi parce que Luke était un homme.

— Les Ark-Ni ne sont pas exclusifs. Enfin… Pas dans leurs rapports sexuels. C’est plus fréquent dans les rapports sentimentaux, mais pas systématique.

Il ne comprit pas tout de suite que la question ethnographique de Luke en cachait une plus personnelle. Il faut dire que le corps offert du Jedi était une distraction captivante. Karm finit par tendre la main et caresser du bout des doigts ce qu’il avait découvert, avant de s’en saisir plus fermement.

— Je t’ai dit, les histoires de prénoms, avec les Ark-Ni. Il y a un prénom qui est très caché, très secret, qu’on se choisit soi-même et qui…

Le jeune homme s’interrompit malgré lui avec un gémissement. Tout en parlant, il réfléchissait à ce que Luke avait dit d’abord, sur les hommes, sur les femmes, sur leur manière de s’encastrer, et des idées de plus en plus précises fleurissaient en lui, comme la jungle d’Ondéron, chaude et moite, pleine de passions sauvages.

— … q-qui… est seulement donné à la personne là quand on meurt, parce qu’on rentre dans l’éternité, et à la personne qu’on aimera pour la vie, parce qu’elle nous fait rentrer aussi dans l’éternité. Et donner ce nom-là, c’est un peu… quelque chose d’équivalent à… se marier. Après, pour le reste, les droits, tout ça, y a pas de propriété privée, pas d’héritage, alors la question se pose pas tellement.

Il ne pouvait s’empêcher de se demander à quel point cette conversation n’avait pas pour Luke le rôle de garde-fou : une manière de se prouver qu’ils pouvaient se découvrir l’un l’autre et conserver au moins un peu de leur calme, un peu de leur faculté à raisonner, sans se jeter l’un sur l’autre, comme des bêtes.

Peut-être qu’ils pouvaient se rassurer autrement. Karm tendit le cou pour embrasser Luke et sa présence dans la Force enveloppa le jeune Chevalier. Comme ils l’avaient fait sur Vonghaï, et comme pendant leurs entraînements martiaux, il laissa son aura se mêler à celle de Luke, étroitement, il laissa tous les accents de sa musique résonner dans l’esprit de celui qui devenait son amant, et son esprit à lui s’ouvrit, entièrement : il se livrait sans rien cacher, plus encore qu’il ne l’avait fait aux Ombres. Son affection pour Luke, sa fidélité tout à fait chevaleresque, sa crainte de ne pas être à la hauteur, un peu des inquiétudes inspirées par Tavaï qui survivaient malgré le plaisir, mais le plaisir surtout, et le désir, de rentrer en lui, sur le lit, sur le bureau, dans la douche, par terre, partout, et d’autres désirs encore — parler ensemble, et étudier ensemble, et rester en silence dans une demi-torpeur — des choses simples et des choses compliquées, sensuelles ou calmes, tout était là pour Luke, alors que la main de Karm se faisait plus insistante.

Son propre plaisir allait vite, malgré son endurance naturelle, malgré ses petits entraînements solitaires, la nuit et en secret, mais il ne cherchait pas vraiment à le retenir et bientôt, alors qu’il embrassait Luke avec une ardeur renouvelée, il s’y abandonna, dans un gémissement étouffé, encore plus présent et plus imposant dans la Force, sans que son aura, bien au contraire, ne fût troublée de la moindre obscurité.
Luke Kayan
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Une main plongée dans la chevelure courte mais fournie du jeune homme, Luke retint un gémissement. Contrairement à Karm, il n'était pas très expressif en ce sens, plutôt timide et toujours sur la retenue. Dernières attaches résistantes à son idéologie déjà bien accidentée. Pour autant peu préoccupé par ce fait, Luke ressentait plus une curiosité pour le nom secret de Karm. Évidemment vu son importance, le Hapien ne demanda rien ni songea le faire. C'était trop tôt, probablement et il se contentait des promesse via la Force. Fidélité, lui aussi pouvait l'offrir à son ami et sans difficulté. Même si sa première nuit- en somme,, la première pour lui, tout court.- avait très rapidement été scellée, le Hapien était de ceux qui tombaient très rarement amoureux. Il lui fallait une personnalité, une mentalité, une droiture ne souffrant aucune torsion, or Karm le possédait. Si seulement ils n'étaient pas Jedis. Luke savait que le Conseil de montrait plus laxiste mais les questionnements demeuraient, gachant légèrement le moment.

Le jeune homme parvint toutefois à faire taire ses doutes, du moins pour l'instant. Et par chance, ceux-ci s'étaient gentiment laissés enterrer avec sa culpabilité. Sa gêne, elle, restait présente et se voyait sur son visage rosi autant par le désir que par sa timidité.

- Tu n'as jamais eu envie de quitter l'Ordre pour retourner sur les vaisseaux Ark-Ni?

Demanda-m le Consulaire, désireux d'en savoir plus sur cette planète qui n'en était pas une, un monde où il serait probablement de trop, lui et ses coutumes républicaines. Il imaginait Karm débarquer sur Coruscant ou Onderon, pourvu d'habitudes si égoïstes, un endroit où y compris la possession de biens des Jésus devait sembler abusive. Le Hapien peinait à saisir quant à lui, l'attachement à des origines. Il ne possédait aucune culture personnelle. Sa planète, c'était le Temple, simplement. Avant, il n'avait jamais vraiment existé.

Immobile, soumis au jugement de son amant, Luke se demandait ce que pensait Le chevalier Turquoise de ce corps fin, musclé à qui il manquait pourtant quelques kilos, distordant la perfection caracteristique de sa race. Sans être anorexique, le Hapien avait des côtes légèrement saillantes et les os de ses épaules ressortaient un peu. Il aurait sans doute être pu plus attirant. Au fait... Pourquoi avait-il mit son boxer avec un petit trou sur le dessus de la cuisse? Tant de questions adolescentes dont il devrait avoir honte au lieu de se préoccuper pour des humiliations futiles comme son apparence. Tomber amoureux ne rendait pas futé en tout cas, c'était certain.

Le savoir-faire que démontrait Karm laisserait presque croire que l'homme était un menteur professionnel et qu'il était en réalité très habitué à ce type de corps à corps. Ou alors Luke était bon public, rendu subjectif par son attirance psychologique envers le Chevalier Turquoise. Quoiqu'il en soit, il appréciait le traitement et se laissa naturellement dominer. C'était Karm le Protecteur, le meneur de jeu et le Hapien ne protesta guère, lui laissant le trône au royaume de la douceur sensuelle. Il faut dire que sans Karm, Luke aurait probablement déjà fuit, s'enfermant dans ses chers livres et rassurantes méditations. Cette nouvelle torsion aux préceptes des Jedis pouvait être aussi positive que négative mais il faudrait du temps pour que le résultat soit visible et que le destin tranche entre les deux tendances.

Aujourd'hui, loin de cette époque aux couleurs monochromes prometteuses ou dévastatrices, Luke vivait l'instant. Le refus imposé pendant de longues semaines malgré les tentations, le temps qu'ils prenaient là, maintenant, discutant à demi-mots. Tout contribuait à éroder sa proverbiale patience. Il n'avait pas envie d'écouter cette vertu. D'un geste inquisiteur, presque autoritaire, le jeune homme ramena ses bras contre lui, et dans ses filets, espérait-il, Karm, afin de le rapprocher, mais aussi de l'inviter au-dessus.

Le poids-plume, certes- de l'Ark-Ni l'aidait à prendre pleinement conscience de son corps. Il sentait chaque particule composant ce dernier, soumis à un contact presque fusionnel. Ses bras, ses ongles, jusqu'à la racine de ses cheveux le tiraillant à cause de longues mèches blondes coincées sous sa silhouette. Tout lui répondait, tout se signalait. Il avait l'impression de voir.

D'un geste sans doute un peu trop pressant qui le fit rougir, le Hapien entrouvrit les jambes pour laisser son ami retomber sur lui. Il voulait juste se rapprocher davantage. Toujours plus. Pour mieux le voir.

Via la Force, il répondait aussi, promettant aisément une fidélité qu'il avait toujours porté en lui et qui l'avait toujours fait demeurer au Temple, celle qui lui avait fait répondre que "oui, il quitterait son compagnon" si le Conseil l'ordonnait. Aujourd'hui, en offrant cette fidélité à Karm, Luke s'engageait dans une pente dangereuse car il ne serait pas sùr d'accepter une séparation. Du moins si le temps passait trop. À moins qu'il ne soit définitivement déjà trop tard? Peu importe, il voulait lui donner sa fidélité. C'était chose faite. Ne leur restait plus qu'à signer le contrat aussi délicat que beau et explosif.
Karm Torr
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Entre les cuisses de Luke, Karm aurait voulu aller plus loin. Pour la première fois de sa vie, il se sentait homme — ou mâle — ou masculin — il n’aurait su trop dire — pour la première fois il avait l’impression que ses muscles faisaient de lui quelqu’un de viril, au moins un peu, et ces idées étranges, qu’il appréhendait mal, la culture de sa naissance les jugeait sévèrement mais elles lui paraissaient, malgré lui, charmantes.

Il avait peur de mal faire. Sans doute, si Luke ne lui avait pas expliqué plus ou moins confusément que deux hommes, ça ne « s’encastrait » pas aussi bien que les femmes, l’Ark-Ni n’y aurait pas repensé à deux fois, mais désormais, Karm avait l’impression qu’il y avait tout un monde de gestes préparatoires qu’il ignorait et sans lesquels ils couraient à une catastrophe mécanique, comme quand on essaie de faire rentrer des torpillons à protons de la mauvaise taille dans les tubes d’un chasseur trop petit.

Il songea aussi qu'il devrait se trouver des métaphores plus poétiques.

Il s’était laissé emporter par le plaisir une fois, dans la main de Luke, mais son ardeur avait à peine diminuée, la faute à la jeunesse et à l’enthousiasme. La Force ne l’aidait pas non plus à rester calme. Couché sur son amant, Karm avait laissé la Force exacerber ses sens et, les yeux fermés, le visage enfoui dans le cou de Luke qu’il mordillait légèrement, il sentait la peau de l’Hapien sous la sienne, le corps qu’il plaquait entre le matelas et le sien, avec une acuité surnaturelle : il en sentait les formes et la chaleur, le sang qui courait dans les veines, et certaines veines en particulier, le souffle impatient qui l’invitait, la douceur, la fermeté.

D’un geste des hanches, Karm commença à caresser leurs bassins avec une souplesse rythmée par les pulsations de la Force, qui donnait une idée pour le moins avantageuse de ce qu’il aurait été capable de faire, s’il avait osé posséder Luke vraiment. L’une de ses mains commença à courir dans les cheveux de Luke, l’autre s’était posé, un peu possessive, sur la hanche de l’Hapien et…

— Sénat. Sénat. Sénat.

Les trois mots à contre-temps avaient été lancés par une voix électronique sortie d’un datapad, quelque part dans le pantalon de Karm abandonné sur le sol de la petite chambre. Le Chevalier se figea, le souffle contre la peau de Luke, tendu de désir contre lui, partagé entre l’appel du devoir et celui de la chair, puis il finit par soupirer :

— Désolé…

Il déposa un baiser sur le front de Luke, un baiser étrangement chaste si l’on jugeait que leurs deux bas-ventres encore serrés l’un contre l’autre ne laissaient aucun doute sur la vigueur de sa passion, puis il se détacha de son amant et sauta du lit avec une souplesse de tigre, pour récupérer l’appareil. En tapotant l’écran, il afficha le message, non sans relever souvent les yeux pour observer le corps de Luke, manifestement transi de désir.

— T’es tellement beau…

Ce n’était pas un compliment très élaboré mais ça venait du fond du cœur. Karm finit par baisser les yeux vers son écran et la douche froide du message fut accompagnée d’un « oh » très nerveux. Dans la Force qui les enveloppait toujours, la fougueuse domination de l’Ark-Ni fut presque aussitôt remplacé par une inquiétude qui n’annonçait pas la catastrophe mais un problème toute personnelle.

— Oh, répéta Karm, comme si quelqu’un venait de lui annoncer qu’il était nécessaire et urgent de l’amputer des deux bras.

Son désir était retombé et il restait là, nu, dans sa chambre, avec son datapad. Il se rendit compte qu’il était heureux malgré tout que Luke soit là, et dans la Force se propagea sans que Karm n’y réfléchisse une onde d’amour et de tendresse, même s’il eût été intimidé peut-être à l’idée de donner leurs noms à ses sentiments.

Il finit par relever les yeux et expliquer :

— J’suis convoqué par la, euh… « Sous-commission en charge de l’identification des ressources stratégiques pour le développement de nouvelles communautés civiles sur la Bordure Extérieure de la commission en charge des questions de déplacement de populations pour raisons humanitaires du Sénat ». Les gens qui s’occupent des réfugiés de guerre, entre autres, t’sais, pour qui je trouve des planètes, parfois. Ils veulent que, euh… J’explique le processus, ma façon de faire, pour établir un protocole, pour former un corps d’exploration spécifique dans l’armée républicaine, susceptible d’adopter ma méthode, ‘fin, des éléments fournis par différents experts.

Donc, il était un expert. Ça faisait sens, bien sûr, mais il trouvait l’idée un peu étrange. En tout cas, l’annonce relevait au mieux d’un honneur qu’on lui faisait, d’une reconnaissance de ses aptitudes et de son travail, au pire d’un exercice administratif un peu fastidieux. Mais Karm évidemment, qui n’avait rien d’un orateur, sauf peut-être dans le tête-à-tête informel, et dont les rapports étaient souvent difficiles à démêler, voyait tout cela comme une épreuve autrement plus difficile que de survivre un mois sur une planète déserte.

Après un soupir, il posa le datapad sur le bureau et vint s’asseoir au bord du lit, tourné vers Luke. Il posa la main sur la jambe du Jedi et commença à caresser sa cuisse, dans une geste qui parvenait à être alternativement provocant, quand ses doigts remontaient tout en haut de la cuisse, et sage, quand ils redescendaient un peu plus bas.

— Bon sinon, pour répondre à ta question, j’ai eu envie de quitter l’Ordre, mais c’était quand j’étais beaucoup plus jeune, quand l’entraînement était vraiment… ‘Fin, tu sais.

Violent et douloureux.

— Mais après, une fois Chevalier, non. J’suis un Jedi. Y a plein de trucs chez les Ark-Ni dans lesquels je me reconnais pas. La République, c’est pas vraiment mon monde, mais l’Ordre, oui. Maintenant… Maintenant, encore plus.

Grâce à Luke.

Si seulement ses fonctions au sein de l’Ordre ne lui imposaient pas d’expliquer ses méthodes à un parterre de politiciens…
Luke Kayan
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À défaut de gémissements parfaitement contrôlés, Luke ne pouvait ordonner à sa respiration de s'apaiser. Pas plus que les soupirs, s'échappant chaotiquement de ses lèvres, savourant leur revanche sur ce jeune homme habituellement si serein. Il ne se souvenait pas avoir vécu un jour cela, malgré ses nuits avec Jason. Non. Karm et lui étaient à un tout autre niveau bien que l'ambassadeur ait su l'emmener à l'extase, et surtout cette fois, Luke ne craignait pas le phénomène qui s'était déjà produit lors du paroxysme avec son ancien compagnon: Un échange pendant lequel il avait involontairement dérobé la vue à Jason et avait pu apercevoir son visage. Le Chevalier Turquoise possédant la Force, il saurait abonder en ce sens ou refuser que la fusion aille aussi loin.

Le souffle court, le blond se vit projeté à l'extérieur de son corps complètement détendu, un phénomène qui arrivait peu souvent lorsqu'on s'appelait Luke kayan, le coincé ou encore le somnifère dans la bouche des autres. Il s'observa à sa manière, presser le bassin de Karm contre le sien,
tellement émoustillé qu'il était en train de lui demander de se fusionner avec lui, sans aucune des préparations prétendument dû à la logique biologique. Dans de tels instants, la douleur se mêlait au plaisir, renforçant encore ce dernier.

Toutefois, alors qu'il s’apprêtait à guider Karm vers son intimité la plus profonde, l'un de ses secrets les mieux gardés après des années de formation Jedi où la chasteté se préservait au même titre que la lumière, une voix, mécanique, résonna. Luke se tendit en une fraction de seconde, victime de ses réflexes. Il repoussa le Chevalier en même temps que ce dernier se retirait, lui aussi très réactif. Heureusement car la force que le Hapien avait mit dans ses bras aurait eu tendance à projeter son ami hors du matelas. Habituellement Luke n'était pas très fort, voir pas du tout comme le révélait son physique de roseau, mais les sens en ébullition, l'adrénaline venaient de lui offrir un retour à la réalité brutal.

Les joues en feu, le Jedi se glissa sous les draps et remonta brusquement la couverture sur lui, comme si c'était Saï Don en personne qui venait de pénétrer dans la chambre. Il se détendit légèrement lorsque sa mémoire auditive lui repassa la bande son qui venait de les interrompre. Cette voix provenait d'une machine, pas d'un chevalier impoli comme avait pu l’être Evengellyne et qui les auraient surpris. Personne ne savait. Pas encore. Lentement il rejeta un peu de la couverture, pris à la gorge par une sensation de chaleur à retardement. Cette dernière glissa jusqu'à la naissance de son bassin, caressant doucement sa peau.

Lorsque Karm revint avec une onomatopée qui voulait tout dire, le Hapien ne put s’empêcher de sourire. Il frissonna légèrement lorsque les doigts du "puni" caressèrent sa cuisse, encore aux prises avec un désir non satisfait, mais se concentra pour se contenter de prendre le menton de son ami-après quelques tâtonnements.- Il dirigea le visage de ce dernier vers le sien, conscient de l'importance du regard pour les voyants. Petit, ça l'effrayait, mais il savait que ce n'était pas une réaction normale désormais.

- Alors ne regrette pas maintenant, pour une simple mission. Nous allons réviser: Je suis un éminent membre de la sous-commission.

Il prit un air sérieux au possible, la mine glaciale d'un administratif ennuyé par la charge qu'on lui avait donné mais décidé à la mener à bien minutieusement. Juste histoire de se venger du pauvre exposant, en lui mettant des bâtons dans les roues, au moindre détail manquant. Certes, à moitié dénudé, et le visage emprunt de compassion pour son ami haïssant ce type de rencontre que lui-même n'appréciait guère, il perdait un peu en crédibilité. Ceci dit, Karm pouvait en être certain, le Chevalier ne lui laisserait passer aucune erreur s'il préparait un discours avec lui.

- Bonjour Chevalier Torr, et bien, nous attendons votre exposé. Quelle stratégie de création et de déploiement d'un corps d'exploration nous conseillez-vous d'adopter.

Malgré tout, il sourit, contrôlant son désir. C'était ça leur vie, et ça serait cela. L'Ordre avait la priorité, ils serait sûrement interrompus très souvent même si aujourd'hui c'était un sacré manque de chance. Mais cela plaisait à Luke. Avoir un compagnon aussi impliqué que lui, qui comprendrait ces nuits passées à travailler, ces moments de bonheur cisaillés au sabre-laser, ce rythme effréné.
Au moins, Karm ne le lui reprocherait pas. Mieux, il n'avait pas hésité à accomplir son désir,
quittant sa peau pour son datapad. Loin de se sentir frustré, le Chevalier s'en trouva rassuré.
Il venait de trouver quelqu'un qui ne le freinerait pas dans sa carrière, bien au contraire. Finalement il se pouvait que tous deux avancent sans aller contre l'Ordre. Et si cette union, au lieu d'être dangereuse, les renforçait?
Karm Torr
Karm Torr
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— Attends, attends, j’peux pas répondre, là, j’ai genre, j’ai rien préparé.

Karm s’imaginait déjà devant un parterre de politiciens contrits et de bureaucrates taciturnes, à buter contre tous les mots du basic, qui n’était pas sa langue maternelle, pour arriver à articuler finalement de vagues banalités.

— J’ai deux s’maines pour préparer mais deux semaines c’est pas suffisant, faut que j’apprenne les chiffres par cœur et… Ouais, non, on me laissera probablement mon pad, hein ?

Probablement, puisque c’était une commission, pas un examen. Le jeune homme poussa un soupir et finit par se faufiler sous les draps, à côté de Luke, serré contre son amant, à cause de l’étroitesse du lit. Ils étaient tous les deux assis, plus ou moins bien calés contre l’oreiller unique, épaule contre épaule. La main de Karm retrouva sa place sur la cuisse de Luke.

— Quand je passais mes épreuves de Chevalier, Maître Gouvar m’a posé toutes les questions sur les institutions républicaines et la politique, sérieux, j’ai cru qu’il allait m’assommer à coups de tentacules tellement mes réponses étaient, euh… Directes. Disons.

L’insolence du Chevalier était bien connue des Maîtres Jedis en charge de la formation des Padawans. Pourtant, Karm ne le faisait pas exprès : c’état un mélange de culture ark-ni, de tempérament rebelle et de maladresse sociale qui le poussait à répondre un peu brusquement, parfois avec une pointe de sarcasme, à des questions que les autres jugeaient trop sérieuses pour être livrées à la plaisanterie.

— C’est public les commissions du Sénat, non ? On peut trouver des enregistrements. Ça me fera encore plus flipper si je vois comment ça se passe mais au moins je saurais à quoi m’en tenir.

Karm inclina la tête pour la poser contre l’épaule de Luke et ce geste tendre fut accompagné d’un autre très différent, puisque sa main descendit un peu plus entre les cuisses de Luke et que ses doigts se refermèrent à nouveau sur l’objet de leur désir. C’était à croire que l’Ark-Ni se faisait une spécialité de mêler les attitudes innocentes aux caresses les plus licencieuses. Pour Karm cependant, qui était loin de considérer la sexualité comme une faute et qui était né dans une société où la morale ne condamnait guère ce genre de choses, il y avait une continuité réelle et toute naturelle entre les unes et les autres.

— En vrai, je connais mon sujet, murmura Karm, en parlant des réfugiés plutôt que de la caresse lente et ferme qu’il venait d’entamer. C’est juste, j’ai zéro charisme. À part pour te séduire toi. Et ça me suffit largement.

Un instant, il se demanda si cette petite déclaration romantique n’avait pas quelque chose de ridicule et puis il décida que c’était sans importance : il n’avait pas besoin d’être éloquent avec Luke, puisqu’il avait simplement besoin d’être sincère.

— J’vais préparer un discours et peut-être, si t’as l’temps, tu pourrais te pencher dessus et…

Il s’interrompit parce que l’un des frissons de plaisir de son ami, propagé à lui à travers la Force, avait gagné son propre corps et redonné de la vigueur à un désir sapé par la convocation sénatoriale.

— … et… mettre de l’ordre dedans. Ensuite, on f’ra un entraînement. Ou deux. Ou probablement cinq ou six, hein, soyons réalistes sur mes progrès.

S’il apprenait vite comment être un aman, ce ne serait pas demain la veille qu’il se muerait en politicien accompli, fût-ce en simple qualité de témoin, et il était fort probable que l’audition s’achèverait en demi-teinte. Karm voulait surtout limiter les dégâts et ne pas compromettre des initiatives politiques qui lui demeuraient confuses, comme souvent les rouages de la République, mais dont il pressentait l’utilité.

En attendant, il passa son autre bras autour de Luke et l’incita à s’allonger avec lui dans le lit, sur le côté : il plaqua son torse contre le dos de son ami, le gardant entre ses bras, alors que sa caresse devenait de seconde en seconde plus insistante. Le visage enfoui dans les cheveux de l’Hapien, Karm puisait dans la Force qui les liait la confiance en soi et la certitude que la perspective de témoigner avait rudement compromises et, persuadé que Luke l’épaulerait, il laissa se déliter ses inquiétudes, en resserrant son étreinte.
Luke Kayan
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- Je t’aiderai. Toi tu mets les idées, moi je rédigerai, si tu veux.

Karm était capable de rédiger, Luke n’en doutait pas, mais le stress couplé au peu de temps disponible poussaient naturellement le Hapien à se proposer. Il avait toujours bien écrit, d’abord dans un style un peu rigide, semblable à sa personnalité, forgée par une enfance chaotique. Jamais plus il n’aurait accepté de retourner dans ce néant mental. Jamais. Adolescent, Luke s’était réfugié dans l’écriture de poèmes sur ses doutes, des alégresses passagères, et des histoires de couleurs égarées, souvent réinventées. Il avait ensuite grandi et refusé la voie de la diplomatie, jugée ennuyeuse, peu utile, une discipline de couard amoureux de la bureaucratie. Victime de ses hormones quoiqu’il en dise ou le laisse paraître, le Padawan avait absorbé les critiques de ses pairs aux muscles saillants et aux faits d’armes prometteurs. Des rires diffus, discrets, des moqueries délicates et d’autant plus cruelles. Saï, patient avait achevé de le convaincre, décelant chez lui un certain don pour la parole, un charisme que Luke avait fini par accepter, et accueillir comme un cadeau salvateur. Sans lui, que serait-il devenu ? Moins que le sujet des moqueries de ses camarades doués au sabre-laser, un membre de l’Agricorps, une destinée honorable à laquelle il s’était toujours refusé.

Le blond s’était donc entraîné à l’art des mots, son style s’adaptant à son âge. Au début trop pompeuse, influencée par l’école de vieux maîtres amoureux des tournures abusives, sa plume s’était muée, devenant plus concises quoique munie encore, de ce charme poétique plus ou moins étrange selon le sujet abordé.

Naturellement donc, le jeune homme souhaitait porter secours à l’Ark-Ni, honoré que ce dernier lui demande implicitement son aide, l’accepte et l’englobe dans son monde, via toute la tendresse transmise à travers la Force.

-On te laissera ton Datapad, détends-toi. S’ils t’appellent ce n’est pas pour t’évaluer, au contraire, à ce niveau, c’est qu’ils savent ce que tu vaux, que tu as fait tes preuves. Ils connaissent ta personnalité et ont été renseigné, ce qui implique qu’ils l’ont pleinement intégré et même, l’apprécient.

Commenta Luke, d'une voix légèrement altérée par un rire naissant. Il trouvait Karm tellement attendrissant, et particulier aussi. Lui si entreprenant au lit redevenait un petit garçon lorsqu'il s'agissait de faire ses devoirs. Consciencieux mais craintif à l'idée d'exposer, le Chevalier Turquoise ne donnait qu'une envie au Hapien: se lever immédiatement pour lui rédiger un rapport duquel le premier pourrait s'inspirer. Avoir quelque chose de déjà fait sous la main avait toujours aidé Luke à se tranquilliser. Mème si actuellement, l'humain semblait vouloir avoir toute autre chose entre ses mains. Luke s'arqua involontairement, parcouru par un frisson de plaisir couplé à la surprise. Il avait cru qu'ils se lèveraient pour se mettre au travail. Encore plus étonnant: il appréciait de ne pas avoir à le faire.

- On... Pourrait déjà commencer à f-faire un plan. Vu que tu maîtrises déjà le thème, ce n'est pas tant une question de recherches que de pré...sentation.

Pré-sensation... C'était tout à fait cela. Cette promesse de plus qui luisait à nouveau, étouffée entre leurs corps complètement collés. Plaqué contre la poitrine de son ami, le Consulaire essaya d'échapper sans en être convaincu lui-même à l'étreinte. Seulement 15 jours devant lui pour aider convenablement son ami qui méritait uniquement le meilleur... Il fallait s'y mettre.

- On... Doit...

Le bourreau du travail se tut, rendu aux mains de l'Ark-Ni qui respirait à même ses cheveux. Cette reprise après la douche froide ajoutait encore plus de sensualité à leur relation, et la passion remontait en flèche, surprenant le Hapien qui croyait avoir son corps totalement sous contrôle. Il tenta une dernière fois de démontrer sa superbe capacité de retenue en revenant au thème du travail.

- Mon droïd a un programme intégré qui lui permet de combiner les rapports afin d'en faire une projection résumée intéressante. Avec ça, les membres de la Comission pourront suivre ton exposition. Mais tu dois veiller à rester toi-même. Ce sont tes paroles qu'ils veulent, ta manière de t'exprimer, ton efficacité et ton savoir. Peu importe les quelques défauts dont ils sont déjà au courant.

S'il y avait un avantage à être aveugle c'était bien celui-ci: disposer d'un programme très cher pour qu'un robot fasse tout le travail informatique de construction d'un rapport à projeter sur un écran, de façon la plus moderne et pratique qui soit. Selon la dernière commission l'ayant reçu, le résultat était dynamique, coloré et...

- D'accord. Après.

Suite à sa vaine tentative, Luke s'abandonna complètement. Il infligea quelques ondulations du bassin contre le corps de son ami, cherchant à exacerber ses sensations. S'il devait perdre la tête à nouveau, il ne serait pas le seul à chuter, parole de Consulaire incapable de se retenir d'avantage.

- Une dernière chose, évite de m'insulter en prétextant ne pas avoir de charisme. On va croire que je n'ai aucun goût.

Rendu provocateur par la situation, le jeune homme enserra les bras de l'Ark-Ni autour de sa poitrine, l'emprisonnant et limitant ses gestes. Se faisant, il se collait toujours plus contre lui, plaquant son noble postérieur de fesse-presque-plate ou du moins à la présence de graisse très relative, contre l'intimité de Karm. Il ne tomberait pas le premier, non, ou du moins, pas seul.
Karm Torr
Karm Torr
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— C’est impressionnant… la compilation de rapports, je veux dire… très… pratique…

Voilà.
Pratique.

On pense aux droïdes, on pense aux recommandations des écoles minières pour la prospection des ressources souterraines dans le cadre de l’établissement de nouvelles galeries, et on essaie de faire abstraction des fesses de Luke qui l’invitaient sans aucune ambiguïté. C’était le plan de Karm, pour ne pas succomber à la tentation de concrétiser ses rêves solitaires.

— Tu…

Droïdes, rapports, mines, réfugiés : 0. Hapien qui se serrait contre lui avec des soupirs suggestifs qui faisaient bouillonner des années d’hormones plus ou moins bien contenues : 1. De seconde en seconde, Karm sentait s’effilocher l’argument de la logique biologique exposé par Luke et — c’était plus remarquable — ses craintes d’adolescent, sa peur de ne pas savoir faire, de ne pas être assez habile, ou adéquatement proportionné, ou intuitif.

Il sentait le corps de Luke comme il le sentait dans leurs entraînements au combat et dans leurs méditations récupératrices. Il avait l’impression de la comprendre jusque dans sa moindre cellule, et qu’aucun geste que lui inspirait l’intuition forgée dans l’intimité que leur offrait la Force ne pouvait être une erreur. Plus les instants passaient, dans la chaleur de leurs bras, moins il avait l’impression d’être confus : au contraire, le plaisir qui nourrissait leur liaison dans la Force lui rendait leur étreinte singulièrement claire.

Alors finalement, d’un geste de bassin, sans même l’avoir vraiment réfléchi, le corps de Karm entra en celui de Luke comme son esprit était entré déjà dans le sien. Au même moment, les vagues de Force qu’il propageait autour de Luke se concentrèrent comme pour une guérison mais c’était pour dissiper la douleur et prévenir la moindre blessure. Il n’en avait pas eu précisément l’intention ; simplement, ce pouvoir s’était manifesté intuitivement, un peu comme dans les batailles ses facultés de détection surnaturelles et bien entraînées lui permettaient de parer les attaques surprises.

Peut-être cette guérison de Force qui se joignait à l’union était la preuve de ce qu’avait suggéré Luke : que l’homosexualité n’était pas strictement naturelle. Karm pensait plutôt que tout ce qui s’accomplissait à travers la Force relevait de la vie et que la vie était toujours naturelle. Cette vérité-là s’imposait à lui, informulée, alors même qu’un plaisir nouveau l’irradiait. Comme toujours, Karm réfléchissait d’abord par son corps : de la même manière que la solution de problèmes délicats et complexes lui apparaissait souvent dans les plus intensifs de ses entraînements, il appréhendait petit à petit sa philosophie personnelle de la Force en faisant l’amour à Luke.

Il ne parlait plus. Il allait et venait en lui, avec une adresse qui ne devait rien à l’expérience et tout à ses pouvoirs de Jedi, qui lui soufflaient à travers la Force les gestes à accomplir, ce dont le corps de Luke avait besoin et ce qu’il fallait au sien à lui pour le lui apporter. Comme c’état sa première fois, il avait failli s’abandonner presque aussitôt au plaisir suprême mais son endurance avait été soutenue par la Force, comme lorsqu’il devait escalader pendant des heures des parois abruptes sur des planètes ignorées de tous.

Il n’y eut bientôt plus aucun aspect de leurs étreintes qui ne fût l’exploration de l’un ou l’autre de ses pouvoirs. Jamais son aura n’avait été plus lumineuse ni n’avait trahi plus clairement combien sa maîtrise physique reposait sur un puissant lien mystique avec la Force. D’un geste, il finit par plaquer Luke sur le ventre pour le couvrir de son corps, pour lui embrasser la nuque, mais aussi pour donner plus de vigueur à ses assauts. Il y avait quelque chose du Juyo, la forme de combat au sabre laser, dans la puissance qu’il déployait peu à peu en puisant dans ses passions, frôlant la frontière qui le séparait de l’excès, sans jamais la franchir.

Au bout d’un temps bien plus long dont il n’en aurait été capable sans le soutien de la Force, Karm fut cependant obligé de s’abandonner au plaisir. Il le sentit dans tous ses muscles, dans tout son esprit, et il comprit confusément que ce n’était peut-être pas seulement le sien mais aussi les sensations de Luke qu’il percevait dans la Force, de la même manière que lui communiquait les siennes au Hapien couché sous lui. Il lui fallut de longues secondes de calme après la tempête pour lui permettre de rompre lentement l’union et de se laisser tomber sur le matelas à côté de Luke, le souffle court, en sueur, fatigué par cette démonstration de prouesses aussi mystiques que physiques, qui avait donné à Luke un aperçu bien plus fidèle de l’étendue de ses aptitudes martiales que ne l’avaient fait jusque là leurs entraînements de débutant.

Les yeux fermés, une main alanguie sur le dos de son amant, Karm avait l’impression d’avoir eu une révélation, une révélation sur lui-même, sur Luke, sur la vie, sur la Force, mais une révélation qu’il aurait été bien incapable de mettre en mots.

Malgré tout, il murmura :

— Tam.



Mon prénom, c’est Tam.
Luke Kayan
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Les muscles détendus au maximum, à demi-somnolent, Luke avait oublié les histoires de droïds, de rapports et de compilations en tout genre, sauf la leur, peut-être, encore si récente. De la main posée nonchalamment sur son dos, une chaleur agréable, promesse d'un futur ensemble, au sein de l'Ordre évidemment. Et malgré les doutes encore présents, surtout celui concernant leur compatibilité entre vie professionnelle et personnelle- le dilemme commun d'au moins 80% des populations diverses de la Galaxie.- Luke se sentait optimiste.

Lorsque le chuchotis atteint son oreille, il eut d'abord du mal à comprendre, émergeant difficilement de son semi-sommeil, induit par une décontraction musculaire et mentale totales. Puis, prenant compte de l'ampleur du cadeau, le jeune homme rouvrit les yeux, ses paupières papillonnèrent une seconde comme pour ingérer l'information. Tam, c'était simple, à la fois semblable et différent du prénom public de son ami. C'était... Un secret délicat, caché sous un aspect anodin, mais Luke connaissait suffisamment la culture Ark-Ni.- bien qu'il en ignore encore les grandes subtilités.- pour connaître la valeur du présent.-

- Je t'aime... Tam.

Une phrase peut-être rapidement délivrée après si peu de temps passés à se connaitre et pourtant sincère. Ces deux mots étaient d'autant plus forts que le jeune homme ne l'avait jamais dit à Jason. Il y avait eu des amorces, des gestes, des réponses à cette même déclaration de la part de l'ambassadeur mais jamais une véritable déclaration en retour. C'était la première fois que Luke, de sa propre volonté, osait la prononcer, et bien qu'il découvrait les dangers et la portée de ses paroles, il ne les regrettait guère, délicieusement aveuglé par la tendresse. Tout à coup, le blond se sentait aussi apte que le fameux couple Luuna et Lyrae à surpasser les difficultés du quotidien. Les missions ensemble. il aimait croire que du moment que leur devoir restait ancré en eux, qu'ils savaient chacun quels étaient les risques de perte, qu'ils y travaillaient pour valoriser ensemble, le véritable but de leur vie, ils pourraient tout concilier. Évidemment, c'était simple de le songer maintenant, à l'abri sous les draps chauds, mais pour l'instant, Luke y croyait comme jamais. Il était juste heureux de trouver quelqu'un sur une longueur d'ondes égale à la sienne, prêt à sacrifier sa vie pour autrui. Un sacrifice double, puisque chacun des deux Chevaliers acceptaient de connaître des moments terribles d'inquiétudes, de blessures et oui, c'était possible, de mort. Après tout, c'était connu, les Jedis n'avaient pas une espérance de vie outrageusement longue, bien que paradoxalement, la Force leur permettent de souffrir d'Arthrite plus tard.

- Ne t'inquiète pas pour ton rapport. Je te le ferai.

Fit-il joyeusement tandis que ses muscles acceptaient enfin de répondre. Profitant de leur bonne disposition, le Jedi s'assit dans le lit et se redressa pour chercher la douche. Normalement elle devrait être située au même endroit que dans sa chambre vu les installations semblable.

BAM.

Non... Finalement... Non.

-Et... Pour commencer, où as-tu rangé ta douche?

Aïe... Romantisme brisé.
Effet professionnel cassé.
La honte.
Karm Torr
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— J’suis un explorateur, j’me douche pas, je sens le fauve pour me mêler aux fauves, assura Karm d’un ton des plus sérieux.

C’était ce que les Ark-Ni appelaient « l’humour d’astéroïde » : froid, comme les astéroïdes, et du genre à faire des trous dans la coque, comme les astéroïdes, mais qui cachait des trésors, quand on le connaissait bien. Comme les astéroïdes. Luke devait s’y être habitué, après toutes les heures qu’ils avaient passé ensemble.

— ‘Tends, j’vais t’montrer.

Il se tira du lit à son tour pour venir poser les mains sur les épaules nues de Luke. Il le guida dans la salle de bain sommaire où l’Ark-Ni ne collectionnait pas les produits de beauté. Comme le reste de la chambre, l’endroit brillait surtout par son aspect fonctionnel mais c’était aussi que, pour Karm, les intérieurs dépouillés et bien aménagés rappelaient les vaissaux ark-ni où chaque mètre carré comptait. Là où certains voyaient des pièces impersonnelles, lui se rappelait des lieux de son enfance.

— Y a un genre de marche, murmura-t-il contre la nuque de Luke, quand ils arrivèrent devant la cabine de douche.

Il le suivit à l’intérieur et les portes se fermèrent automatiquement derrière eux. Karm attrapa doucement le poignet de Luke quand celui-ci s’apprêta à allumer l’eau.

— Faut qu’je règle, d’habitude, je la prends glacé, question de renforcement musculaire et de résistance au froid mais après l’effort, la chaleur, ça détend les muscles et ça permet une meilleure régénération.

C’était l’un des innombrables petits savoirs quotidiens qui distinguait la vie de Karm, en tant que guerrier, de celle d’autres Jedis qui, pour être bien entrainés, n’avaient pas de leur corps une maîtrise aussi minutieuse que l’Ark-Ni. Il effleura du bout des doigts l’écran tactile de la douche, releva le niveau de la température et activa l’eau. Le jet d’eau chaude commença à tomber au-dessus d’eux, Karm attrapa une capsule de gel douche dans le mur, l’écrasa entre ses paumes et entreprit de savonner doucement le corps de Luke.

— J’veux pas que tu m’le fasses. Le rapport. Mais j’veux bien que tu m’aides. Juste, t’sais, j’dois apprendre aussi à faire ce genre de choses par moi-même, même si… ça me saoule, et que c’est difficile. Même un peu humiliant.

Il savait qu’il n’était pas bête, c’était évident, mais il avait aussi acquis, et très tôt, la conscience aiguë que son esprit fonctionnait très différemment de celui de beaucoup d’autres, avec des raccourcis et des sursauts, qui le conduisaient à bien comprendre des problèmes complexes mais aussi à passer à côté de beaucoup d’évidences. Il avait bon espoir qu’avec de l’obstination et de l’application, aussi beaucoup de bons conseils de la part de Luke et d’autres, il parviendrait à réaliser ces tâches essentielles qui faisaient partie de son quotidien.

— Les ch’veux…

Il s’était mis à genoux pour laver les pieds de Luke. Il se releva, en passant ses mains sur les jambes de son compagnon, sur ses cuisses, sur son entrejambe aussi, mais presque innocemment, avant de les laisser sur ses hanches.

— … j’te laisse faire, les miens sont vach… beaucoup plus courts, j’saurais pas m’y prendre, j’veux pas les abîmer.

Ses mains glissèrent au creux des reins de Luke et il l’attira un peu plus contre lui, pour pouvoir l’embrasser. Il avait peine à croire qu’il lui avait fallu vingt-six pour découvrir ces plaisirs intenses et précieux et il s’expliquait mal surtout qu’il avait pu longtemps penser qu’il était possible de s’en passer. Lorsque leurs lèves se séparèrent, il garda un moment Luke dans ses bras, avant de consentir à le libérer pour le shampoing.

Alors qu’il frottait vigoureusement ses propres cheveux toujours si rebelles, il avoua un peu brusquement, d’un ton aussi dégagé qu’il en était capable :

— J’crois que j’aimerais bien devenir Maître.

Ce n’était pas donné à tous les Chevaliers et, très franchement, il doutait pour l’heure beaucoup d’en être capable. C’était une résolution toute fraîche, qu’il avait prise dans le lit, allongé à côté de son amant, après avoir fait l’amour pour la première fois de son vie. Ce n’était sans doute pas comme ça que les grands noms de l’Ordre jugeaient opportun de prendre ce genre d’engagement mais Karm avait attrapé la certitude au vol.

— Pour que, euh… C’qui m’est arrivé avec Tavaï arrive pas aux autres. Pour que les gens comme moi…

Il ne savait pas exactement ce que ce « comme moi » recouvrait. Des gens qui se sentaient toujours étrangers ? Des esprits chaotiques ? De grands timides ? Des rebelles ? Quelque chose comme ça.

— … trouvent plus leur place. Pour que les Corps Auxiliaires soient pas forcément perçus comme un échec. Pour que le combat soit abordé différemment. Pour… Pour plein de choses.

Il se sentit rapidement embarrassé d’avoir avoué cette ambition qu’il estimait disproportionnée à ses facultés. Il n’avait pas fallu longtemps pour que le jeune homme qui avait découvert sa propre virilité en possédant son amant avec fougue et vigueur retrouve la fragilité incertaine qui le caractérisait souvent. Karm poussa un soupir résigné face à l’ampleur d’une tâche impossible, jugeait-il, à accomplir.

Il s’adossa au mur carrelé de la douche et laissa l’eau rincer ses cheveux et son corps. Les yeux baissés sur son ventre, il regarda le filet d’eau trouver son chemin entre ses abdominaux rigoureusement dessinés et comme souvent, il eut l’impression qu’il se réduisait à ça : des muscles bien entretenus. Les jambes et les bras, pas la tête.

— ‘Fin bon, c’t’une idée de gamin, hein, pas vraiment un projet pratique… C’est juste… Quand on a, quand, euh… On est, hm… Quand on a joui ensemble… J’ai eu l’impression que peut-être c’était possible. Sûrement. J’sais pas. Désolé.
Luke Kayan
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- Ah eux, j'ai abandonné le combat depuis longtemps.

Luke sourit, laissant une rigole d'eau s'infiltrer entre la commissure de ses lèvres, jusqu'à entrer dans sa bouche. Quoiqu'il fasse, ses cheveux repoussaient à une vitesse folle, si bien qu'enfant, sa natte d'apprenti avait été tressé avec ses véritables mèches. De la même manière qu'en tant qu'Hapien, il ignorait tout du monde infernal et secret des points ouvertes. Cela en devenait presque ennuyeux.

- L'eau froide, j'en ai entendu parler mais je n'ai jamais pu.

Confessa le jeune homme sur un ton badin. S'il était apte à affronter le sabre-laser pour un entraînement demandant de multiples efforts pour un résultat médiocre, il n'avait jamais pu se résoudre à laisser l'eau glacée courir sur sa peau. Quand on pesait 50 kilos tout mouillé pour 1 m 70, le froid était une torture invivable. Bref, Karm avait découvert un des gros points faibles du Hapien réellement frileux.

- Je peux comprendre pour le rapport. Que tu veuilles le faire seul si tu t'en sens capable. Je crois même que j'ai déjà vécu la situation... Dans une douche par exemple. Je suis aveugle, pas paralytique.

Ajouta-t-il d'un ton tout aussi sérieux que celui de l'explorateur annonçant qu'il n'avait pas de douche. En réalité un peu gêné et surtout peu habitué à se faire dorloter de la sorte, Luke se concentra sur son massage de cuir chevelu. La mousse couronna sa tête parée d'une masse blonde plus fournie qu'on ne pourrait le croire de prime abord, lorsqu'il les maintenait-presque- sagement contenus dans un élastique ou reposant sur ses frêles épaules. Suite au tendre baiser, Luke se rinça soigneusement tout en écoutant l'étrange lubie de Karm. Il y réfléchissait au fur et à mesure que son ami expliquait ses circonstances. En soi, l'idée semblait précipitée, surtout pour Luke qui s'était toujours senti incapable de former un élève. Pour autant, il ne se voyait pas décourager son ami, lequel avait montré certaines capacités d'enseignement loin d'être risibles. Aussi lorsque ce dernier renonça seul, comme un grand, défaisant tous ses propres arguments, Luke le força à se calmer d'une onde chaleureuse mais décidée.

- C'est une bonne idée, Karm. Si tu cesses de t'auto-détruire, de défaire tes propres arguments et de te décourager de tes convictions.- Il poussa un léger soupir. L'onde se radoucit, enveloppant l'Ark-Ni comme le nuage de vapeur de la douche.- J'ai bien appris à tex côtés. Tu expliques bien, ne penses pas le contraire... Je crois que si le Conseil te laisse cette opportunité, de la même manière qu'ils t'ont libéré et ne t'ont pas retiré du service, c'est qu'ils ont pleinement confiance en toi. Suis leur jugement et le mien. Calme-toi. Tu es un bon Jedi, tu travailles bien.

Certes, ce qu'ils venaient de faire n'était pas précisément être de bons Jedis, mais ça ne comptait guère, en tout cas, pas pour les capacités d'enseignement de l'Ark-Ni-

- C'est vrai, tu es particulier, mais je connais peu de maîtres qui ne soient pas particuliers... Voir extravagants à leur manière. Maître Don est énigmatique, sage, puissant mais surtout très facétieux. Mon apprentissage fut atypique, basé sur ces histoires pour lesquelles, tu le sais, j'éprouve beaucoup d'affection. C'est ainsi qu'il m'a attiré à lui, m'a calmé lorsque je fuyais une classe de sabre-laser. Tu trouveras un apprenti qui saura s'adapter à ton caractère, et toi au sien. Si tu sens que c'est ta voie, si tu en a l'envie, c'est que tu es prêt. Du moins pour la première étape. Lorsque le Padawan en question t'interpelleras, alors votre voyage commencera, et je te soutiendrai.

Lui-même doutait énormément quant à ses propres capacités, mais il faut dire que ce n'était pas Karm qu'on traitait de somnifère. En tant qu'explorateur il devait être plutôt apprécié, tandis que le blond philosophe était le plus ennuyeux des Chevaliers du Temple. D'ailleurs, on avait déjà menacé des Padawans refusant de dormir d'aller le chercher pour qu'il les assomme avec ses recherches sur la Force. Luke était fait pour la bureaucratie, le travail en solitaire, les recherches de fond de tiroir. C'était bien moins passionnant ou prestigieux que Karm, le découvreur de planètes. Pour autant le Consulaire n'était pas jaloux, chacun avait sa place. Un jour peut-être trouverait-il un ou une apprenti(e) aussi tranquille que lui, peu apte à voyager au coeur des batailles. Un(e) Jedi uniquement musclé par l'entraînement personnel, l'auto-discipline de haut vol, et reconnu pour ses missions de caractère passe-partout, celles dont personne ne voulait mais sensées faire avancer le monde. Juste un peu.

- Je pense que très peu de Maîtres agissent comme Tavaï, mais une chose est certaine, si l'un d'entre eux est averti sur les dangers de dérives de ce genre, c'est toi. Le Padawan que tu choisiras sera chanceux.

Sur ce, il ouvrit la douche, frissonnant au contact de l'air frais. Non décidément, il ne supportait pas les baisses de température.
Karm Torr
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Karm suivit Luke du regard alors que le Hapien quittait la douche, à moitié convaincu par les propos pourtant fort sincères et très rassurants de son compagnon. Est-ce qu’il s’auto-détruisait ? C’était aussi quelque chose que lui avaient suggéré à demi-mots les Ombres qui avaient conduit son interrogatoire. Qu’il avait laissé Tavaï le maltraiter. Et cette idée travaillait Karm. Peut-être qu’il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez lui.

Un frisson parcourut sa peau mais il secoua la tête pour lui-même, pour s’en débarrasser, acheva de se rincer et sortit de la douche, attrapant à son tour une serviette chaude sur l’étagère automatique de la salle de bain. Il se frictionna vigoureusement avant de la replacer sur l’étagère, qui bascula pour la faire disparaître et en proposer aussitôt une autre, propre, confort technologique des plus ordinaires sur Coruscant.

Karm considéra son reflet et celui de Luke dans la classe et un sourire timide passa sur ses lèvres. Il trouvait réconfortante l’image de leur proximité dans la nudité. Il se rapprocha de Luke et, pour éviter à celui qui était désormais son compagnon de tâtonner désespérément dans la salle de bain à la recherche de ce dont il avait besoin, il lui glissa un peigne dans la main.

— J’vais essayer, assura-t-il à moitié convaincu, en se recoiffant avec ses doigts. D’être plus sûr de moi, j’veux dire.

Après tout, sûr de lui, il l’était quand il fallait se battre, quand il fallait courir dans une jungle inconnue et pleine de bêtes sauvages et, venait-il de découvrir, quand il faisait l’amour. Il n’avait qu’à puiser dans la certitude qu’il avait quant à ses aptitudes physiques pour trouver le chemin d’une confiance en soi plus générale.

— D’façon, j’ai toute la vie devant moi.

On ne devenait pas Maître du jour au lendemain et Karm imaginait que même dans le meilleur des cas, même s’il avait été un parfait prodige, il se serait écoulé de nombreuses années avant qu’il ne siège au Conseil de Réassignation ou quelque chose du même genre.

— Faut d’jà que j’commence par survivre à une troupe de sénateurs.

Karm posa une main dans le dos de Luke pour le guider à nouveau dans la chambre, le temps que l’Hapien s’habitue à une chambre destinée à lui devenir très familière. Il lui rendit ses vêtements et ne put s’empêcher de le contempler alors qu’il se rhabillait. Pour être honnête, si la menace si pressante de l’audition n’avait pas plané au-dessus de sa tête, il aurait probablement poussé Luke sur le bureau pour lui faire à nouveau l’amour. Mais rien ne modérait plus efficacement l’ardeur hormonale de la jeunesse que les rouages implacables de la démocratie parlementaire.

L’Ark-Ni se décida à renfiler ses propres vêtements et, quelques minutes plus tard, ils étaient tous les deux installés en tailleur sur le lit, où Karm tendait à un à un les holodisks qui contenaient ses rapports à Luke — des rapports, l’Hapien put rapidement s’en rendre compte, qui ne brillaient ni par leur clarté, ni par leur extension. Quand Karm s’expliquait de vive voix, il était évident qu’il maîtrisait son sujet à fond mais avec un total manque d’efficacité rhétorique, sans parler d’un langage pour le moins familier qui cadrait mal avec les attentes des sénateurs.

Le Gardien écoutait religieusement les explications de son ami — et il en alla de même, jour après jour, même s’il était évident que pour Karm, cette formation accélérée était douloureuse pour l’ego et éveillait bien des angoisses. L’Ark-Ni n’était cependant pas du genre à reculer devant les difficultés et ce n’était que lorsqu’ils avaient travaillé de longues heures ensemble qu’il s’autorisait à renverser Luke sur le lit, ou bien à se faufiler sous le bureau, ou à le pousser contre mur, pour se livrer à des activités moins studieuses.

Pour agréables que fussent leurs étreintes cependant, elles n’en étaient pas inutiles, en tout cas pas pour Karm. Les pouvoirs de l’Ark-Ni se déployaient souvent dans leur intimité partagée, plus Karm avait l’impression de mieux comprendre, grâce à Luke, sa propre connexion à la Force et le rôle qu’elle jouait dans sa vie, dans ses sensations, dans son corps. Luke était devenu pour lui une révélation sans cesse renouvelée, une vérité absolument essentielle, dont il n’imaginait plus se séparer.
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