Oui, moi.

Celui même que tu as essayé de transformer en monstre, que tu as tenté de retourner contre les Jedi, en me réintégrant dans leur sein. Mais c’était sans compter sur ma volonté, et celle de Léonard Tianesli. Ensemble, nous avons terrassé le mal qui me rongeait, et je suis ressorti de cette épreuve bien plus puissant que je ne l’avais jamais été. J’avais muri, et j’avais également compris le véritable danger représenté par les Sith. Depuis ce jour, j’avais cessé de croire dans l’idée qu’ils pouvaient tous être sauvés. En réalité, le nombre de ceux qui pouvaient éventuellement survivre loin du Côté Obscur de la Force était si infime, qu’il devenait presque illusoire de chercher à les épargner. Je l’avais certes fait avec cette apprentie Sith, mais elle n’était clairement pas du même calibre que cette femme qui m’avait torturé et qui se tenait à nouveau devant moi. Ce genre de Sith devait disparaître de la galaxie, à jamais. Le Côté Obscur ne pouvait être éliminé, mais les Sith oui. Du moins les plus puissants. Les autres ne feraient que succomber à leurs pulsions et s’entretueraient en laissant le reste de la galaxie dans la tranquillité. Je n’étais pas un fervent du massacre de masse les concernant, car l’histoire montrait que ça n’avait en rien fonctionné. De plus, c’était contraire à mes principes, et aux principes de l’Ordre Jedi lui-même. Mais pourtant, il allait falloir trouver une solution avant qu’ils ne prennent encore plus d’ampleur.

Cette Sith devait rejoindre la Force, et seul le temps jouant contre nous pourrait m’empêcher d’y parvenir. J’étais confiant, et cela se ressentait dans ma manière de me battre. Mon coup avait porté sans la moindre difficulté, avant que Maitre El’dor ne vienne aggraver la situation de la Zeltronne d’un combo magnifiquement maitrisé. Je laissais volontairement mon esprit s’ouvrir à l’aura du Nazzar, et uniquement lui, pour améliorer notre coordination, pour que nous ne fassions plus qu’un et soyons à même de prévoir chaque coup de l’un comme de l’autre.

Vu la puissance de nos coups, j’étais encore étonné qu’elle puisse tenir debout. La plupart des gens auraient dû être terrassé après avoir été aussi soudainement meurtri, mais elle était toujours debout. Ce constat, couplé avec l’aura de terreur qui se dégageait d’elle ne laissait pas de place aux doutes : elle n’était pas une de ces seigneurs lambdas. Non, elle était bien plus. Son titre de Nosfera existait depuis trop longtemps, et si ce n’était pas l’Impératrice que nous affrontions, l’impression était la même. Je savais que les choses s’étaient trop bien passées lors de notre dernier assaut. C’était évident, nous l’avion surprise. Mais les choses allaient changer, et je le constatais bien vite en remarquant l’apparition soudaine d’un brouillard que je ne connaissais que trop bien. Je l’avais vu pour la première fois au Temple, avec Hopeful. Puis, avec Shaar-là. Je savais comment m’en tirer, comment en annuler les effets. Mais j’avais besoin que la Force soit à mes côtés, qu’elle m’épaule dans cette traversée qui s’annonçait soudainement plus houleuse.

J’avais un mauvais pressentiment, et celui-ci se confirma bien vite lorsque Maitre El’dor encaissa de plein fouet l’attaque de la Sith sans que je ne puisse faire quelque chose pour l’aider. Je ne le voyais déjà plus, et je faisais appel au flux, à mon alliée, pour traverser cette épreuve, mais je ne sentais rien. Le vide total, le néant. Et c’était problématique. Je déglutissais, car je sentais déjà la suite venir, comme une véritable prémonition. Je devais faire quelque chose, et je laissais mon instinct me guider.

D’un pas vif, je faisais mouvement pour frapper vers là où je pensais que la Zeltronne se trouvait. Ma lame fendit l’air, mais ne fit qu’heurter le sol dans un crépitement.

Elle était déjà passé…

On était dans de beaux draps.

Ce brouillard était sans aucun doute mon Némésis, car chaque apparition de ce dernier avait engendré ma défaite cuisante. Zora l’avait utilisé à foison lors de nos rencontres et je pouvais encore me souvenir de chacun de ses coups mordants ma chair, de mon impuissance face à ma soudaine cécité, que ce soit naturellement ou dans la Force. Je me retrouvais incapable de savoir la position de notre adversaire, laissant Maitre El’dor seul face à elle. Que pouvais-je faire, si ce n’est retrouver le Nazzar et suivre ses mouvements ? Il devait savoir comment contrer ce fléau, comment repérer Nosfera. En restant à côté de lui, je pourrais peut-être suivre ses mouvements et ainsi frapper de concert notre adversaire. Mais encore fallait-il le trouver au milieu de cette purée de pois.

Le pire dans tout ça, c’est que je pouvais l’entendre parler. De fait, il ne me restait théoriquement qu’à suivre le son de sa voix pour le trouver, sauf que les choses n’étaient pas aussi simples. Le brouillard troublait les sens, et je ne faisais tourner en rond là où je pensais me rapprocher. Je connaissais déjà cet effet pour l’avoir expérimenté sur Ondéron et à bord de l’Atramentar et je ne savais pas du tout comment le contrer. J’avais bien trouvé une parade mais celle-ci n’était que temporaire et ne contrait pas les effets troublants du brouillard. Cette solution était la méditation mobile poussée à l’extrême, pour perfectionner ma réactivité et ainsi me ramener à un état de prescience suffisant pour anticiper les actions soudaines de l’adversaire.

Sauf que j’en avais été incapable. J’avais déjà essayé, pour échouer lamentablement. La suite fut tout aussi catastrophique. Ma lame avait frappé dans le vide, et la Sith se permettait désormais de nous provoquer. Je ne répondais pas. Je préférais me concentrer, penser à ce qui allait suivre. Oh, je savais déjà ce qui allait se passer. J’étais le plus faible de ses adversaires, celui avec le moins d’expérience. Il était logique que je fus le premier à faire tomber.

Mais je ne comptais pas me laisser faire. Elle avait beau parler, je sentais déjà le danger arriver. La Force donnait cet avantage puissant de pouvoir vous alerter. Le vrombissement des sabres lasers de la Sith, ou plutôt de son double –mais ça, sincèrement, je n’en savais rien- se fit entendre sur mon flanc et je réagissais presque immédiatement.

D’un mouvement rapide de côté, j’attrapais du coin du regard la lumière rougeâtre des armes qui fendaient l’air dans ma direction et je laissais tomber un genou au sol pour encaisser l’attaque. Ma lame vînt se présenter contre la première de mon adversaire, laissant échapper un craquement violent avant de glisser, le plasma venant effleurer et bruler ma peau le long de mon bras gauche. Je serrais les dents, trop concentré pour laisser la douleur frapper mon esprit et l’alerter de ma blessure. D’un mouvement félin, je bondissais de côté, vers l’avant, pour dévier la seconde lame venant me frapper à l’opposé. Je finissais sur une roulade, de laquelle je me redressais sur mes appuis. Je soupirais, étonné de m’en être sorti aussi facilement sans avoir recours à une intense méditation mobile. C’était la première fois que je ne mordais pas la poussière.

Elle avait raté sa chance, celle de me mettre à genou rapidement. Je restais concentré, utilisant ma connexion retrouvée dans la Force pour mettre ce que je savais faire de mieux à exécution. Je laissais le flux m’encercler, m’envelopper, alors que je projetais mon esprit dans le tissu de la Force. Je remontais les filaments qui me reliaient à mon environnement, pour mieux le découvrir et en cerner les aspects. Je ressentais le bien être soudain de ma connivence avec l’être mystique qui m’accompagnait en chaque instant. Je la laissais s’étendre dans mon organisme, le long de mes muscles et jusqu’à mon esprit.

J’étais désormais alerte de tout ce qui se passait.

J’étais prêt.

Ma blessure était superficielle. Maintenant que j’avais repoussé son attaque, je pouvais laisser la douleur m’atteindre pour m’informer de l’état de cette plaie portée sur mon corps. Une simple éraflure. Je remuais doucement mon bras gauche, avant de me replacer en garde. J’étais désormais capable de ressentir, de prévoir ce qui se passait. Je pouvais sentir l’arrivée soudaine de notre adversaire et parer plus efficacement ses attaques. Les flux de la Force venaient me traverser, alimentant cette toile à laquelle mon esprit s’était raccordé. Je pouvais ressentir les pulsions en provenance de Maitre El’dor, ainsi que tout ce qui se passait autour de moi. Seule la Sith restait volontairement une véritable inconnue. Elle était trop dangereuse, trop puissante, trop pernicieuse pour que je n’ose tisser ce lien mortel entre elle et moi. Je ne voulais pas égratigner son esprit, de crainte d’être submergé. Oui, d’une certaine manière, elle me faisait peur. Même si je bloquais ces émotions, j’étais conscient de leur existence. Si je laissais passer ne serait-ce qu’une infime portion de ces craintes, Nosfera le sentirait et tenterait de les libérer en moi pour me terrasser.

Ce n’était pas acceptable.

En tant que Jedi, protecteur de la Paix dans la Galaxie, je ne pouvais succomber.

Je n’en avais pas le droit.

Maitre El’dor non plus, mais e dernier semblait avoir reprit de l’assurance. J’avais senti son appel dans la Force, les liens du flux mystique s’étant soudainement agités alors qu’il venait soigner ses blessures les plus importantes. Ses paroles atteignaient mon esprit, plus inquiétantes qu’apaisantes. Je n’avais réalisé que cette Sith n’était plus seule, qu’elle avait fait usage de la Force pour créer une copie d’elle-même. C’était impensable, inimaginable. Comment pouvait-on maintenir pareil brouillard, créer une image de soi et contrôler les pseudo-pensées de ce double tout en agissant soi-même ? Le contrôle nécessaire dans la Force, la puissance dans celle-ci, était incroyable. Je n’avais jamais rien vu de tel, tout comme je n’avais jamais vu de « double ». J’avais lu des choses à ce sujet dans les hololivres, mais rien de plus.

Grand mal m’en fit, car je n’allais pas tarder à le découvrir à mes dépends. Le mouvement de Nosfera était prévisible et pourtant je me fis surprendre par l’arrivée soudaine d’elle et sa copie. J’étais le moins expérimenté, le moins menaçant. Au mieux étais-je un nuisible pour elle. Ma neutralisation était nécessaire pour qu’elle puisse terminer ce combat face à Maitre Eldor.

Impensable.

Je devais tenir, quand bien même je vis surgir les deux silhouettes du brouillard. Je pivotais pour me placer face à elles, mon corps se positionnant de sorte que mon regard puisse les voir se déplacer toutes les deux. Le vaisseau se mettait à trembler plus vigoureusement, signe que l’entropie était bientôt atteinte, que le monstre d’acier pourrait bientôt se lancer à vitesse-lumière. Nous devions partir, rapidement. Nous devions en finir, rapidement.

La brutalité des attaques ne m’offrait que plus de détermination à les contrer et à en terminer au plus vite. La première des silhouettes ne tarda pas à arriver sur moi, ma lame venant aussitôt se placer en opposition de la sienne, déviant de côté l’attaque visant à me faucher les jambes. Ma droite se décala presque aussitôt, permettant un pivot léger de mon corps me positionnant face à la deuxième cible, la première disparaissant dans son élan. Je reconnaissais le Djem So, style brutal, purement offensif et violent, dans les mouvements de mon adversaire. Les deux lames de la Sith ou de son double –je ne savais toujours pas qui était quoi- s’arrachèrent pour venir s’abattre sur moi, me forçant à un choix que je ne pris pas le temps de faire. Mon instinct me fit lever mon arme pour parer l’attaque aérienne, pariant sur la possibilité que la deuxième lame épargna mon corps.

Peine perdue. Si la première lame fut repoussée avec brio, me permettant de terminer le pivot entamé pour rester face à l’ennemi, la seconde mordit la chair de mon jambier antérieur.

« PETCHUK ! »

Ma jambe trembla sous le choc et je m’affaissais. Incapable de me soutenir sur l’instant, elle pliait, le genoux heurtant le sol alors que je grimaçais, cherchant à bloquer la douleur soudaine qui venait de pénétrer mes défenses pour m’informer de la gravité de la blessure. Mon bras blessé vînt immédiatement soutenir mon corps, alors que je cherchais à m’assurer que Nosfera ne chercherait pas à poursuivre son petit jeu. Je cherchais Alycius du regard, mon esprit se tendant dans sa direction pour chercher une forme de réconfort, mon lien s’étirant à l’extrême pour lui signaler le danger qui régnait, le fait que nous devions partir, le fait qu’il devait agir. Je pouvais encaisser ses attaques pour lui permettre de frapper, mais il devait faire vite.

Je baissais doucement la tête pour constater l’état de ma blessure, avant de tenter de me redresser, lançant faiblement à destination de Nosfera ces quelques mots en Corellien, presque dans un murmure :

« Halle metes chun, wagyx… »

Elle ne les entendraient probablement pas, et ce serait mieux si c’était le cas.

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