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Il avait accepté. Pas vraiment avec un enthousiasme débridé, mais le chef de clan n’avait pas refusé d’acceuillir les deux jedis. C’était tout ce qui comptait, à eux de rendre cette opportunité productive. Le reste n’avait pas d’importance. Alyria camoufla au mieux le discret soupir de soulagement qui l’avait submergé en entendant les mots de l’homme d’âge mûr en face d’elle. Pourtant, son mauvais pressentiment ne disparaissait pas, continuant d’opprimer sa poitrine avec force. Il se tramait quelque chose, elle pouvait le sentir dans la Force qui ondulait dangereusement autour de son interlocuteur, se colorant d’un rouge presque délava, comme le reflet d’une ancienne colère, d’une amertume cachée sous une fausse nonchalance. Et bientôt, l’explication tomba, tandis qu’il ajoutait avec désinvolture vouloir affronter l’un d’entre eux.

Evidemment. Voilà qu’il dévoilait son jeu. En un sens, la question n’était pas incongrue. La plupart des sociétés valorisant la force, souvent tribale avaient tendance à éprouver la puissance de leurs invités, a fortiori quand ces derniers appartenaient à un Ordre qui était connu à travers toute la galaxie pour les exploits mythiques et mystiques de ses membres. Affronter un jedi, c’était se mesurer à une élite, en quelque sorte. Etre battu était dans la logique, et pas un déshonneur. Vaincre représentait l’assurance d’asseoir encore plus sa domination, d’accroître son influence en entrant dans la légende clanique. De ce point de vue, cette invitation au combat n’était pas une surprise. Cependant, eu égard à la tension envahissant son partenaire, au vu de sa mâchoire contractée et de ses épaules tendues à l’extrême, il y avait autre chose, une intention sous-jacente seulement perceptible pour les deux hommes qui se défiaient du regard. Un instant, la maîtresse d’armes songea à se porter volontaire pour couper court à la pesanteur de l’atmosphère, pour éviter une lutte qui s’annonçait difficile émotionnellement, et sanglante. Elle ne craignait pas le vieil homme, pas par orgueil, mais simplement parce qu’elle était habituée à se défendre contre des adversaires plus imposants qu’elle et à retourner leur avantage contre eux. L’art martial echani de ses ancêtres paternels était rarement aussi précieux que dans ces moments-là. Mais Lorn choisit pour eux deux, relevant le gant du défi, aussi la trentenaire n’eut d’autre choix que de s’écarter pour laisser les belligérants se faire face, elle-même trouvant refuge dans un coin, à quelques mètres de distance des jeunes, qui observaient avec un mélange de crainte et d’excitation ce qui allait suivre.

Immédiatement, Alyria sut que son intuition avait vu juste. Il y avait bien plus entre ces deux-là qu’une simple ressemblance. A mesure que les coups pleuvaient, qu’elle voyait les attaques furieuses de son amant se heurter au mur défensif du plus âgé, elle se remémorait leur conversation dans le jardin du Temple, sous ce bel arbre qui les avait caché à la vue de tous, quand tout avait changé pour eux, quand ils avaient enfin abaissé les ultimes barrières gardant leurs secrets les plus personnels, quand l’épicanthix lui avait avoué ses sentiments avant de l’embrasser. Ces souvenirs ne la quittaient jamais, gravés dans son cœur, comme tous ceux qui avaient suivi : Byss, leur première nuit ensemble, Umbara, la Chancellerie, leur première dispute et leur premier je t’aime, Sy Mirth, Makem Te, et maintenant Panatha … Mais le tout premier restait particulier, il avait une saveur intense et douce de nostalgie, et il n’en était que plus vivace. Etait-ce donc ce père dont Lorn avait parlé ? Un oncle ? Plus probable, évidemment. Pourquoi, alors, cette hargne des deux côtés, qui consumait le maître jedi à sa plus grande horreur et sans qu’elle ne puisse s’interposer ? Puis le coup fatal tomba, son partenaire chuta, et les mots résonnèrent, implacables. Il le connaissait. C’était évident. C’était … Elle n’osait formuler l’hypothèse dans sa tête, mais se promit de demander, plus tard confirmation. Pour l’instant, cela n’importait pas. Il fallait que Lorn se relève, et qu’il fasse front. Qu’il se libère de ses démons, de ce démon en particulier qui lui faisait face. Avec un autre, elle aurait usé de la télépathie, mais pas avec lui, parce qu’elle ne le pouvait pas réellement. Cependant, leur lien à travers la Force lui permettait de l’atteindre, tellement il était intense.

Lentement, silencieusement, ne laissant rien paraître au monde extérieur, Alyria façonna une gangue apaisante, emplie de sa propre aura, de sa confiance inébranlabre en Lorn, du calme qui l’agitait malgré la tension, de sa foi en sa victoire, en sa force de jedi, et elle l’enveloppa de cette armure rassurante, qui était totalement intangible, mais avec l’espoir que cela l’aiderait à se concentrer, à lui rappeler qui il était, pour quoi il était présent … Et tout simplement, qu’elle tenait à lui. Qu’il était son tout, son présent et son avenir, que le passé n’était rien pour eux, tandis qu’elle répétait inlassablement dans sa tête, sans espoir d’être entendue :

« Tu n’es pas seul. »
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À bien y réfléchir le jeune colosse se rendait finalement compte que ce n’était pas la première fois qu’il posait les yeux sur son géniteur depuis son départ, quelques années plus tôt la Force l’amena sur une planète attaquée par une bande de brigands et le jedi y fut amené pour faire cesser les hostilités. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il se rendit compte que le groupe en question était composé d’épicanthix menés par son propre père qui ne semblait pas avoir perdu sa fureur conquérante avec le temps. À l’époque le colosse, plus jeune et moins tempéré, s’était autorisé un petit discours moralisateur en jetant sur le tapis le nom de son frère décédé comme exemple de ce que le bellicisme de son géniteur avait pu provoquer par le passé.
N’ayant jamais été connu pour ses talents naturels de diplomate, le jeune chevalier qu’il était eu toutes les difficultés du monde à faire entendre raison à son géniteur et ses compagnons, surtout que le futur roc d’Aargau était alors vu comme un traître à son sang pour oser s’opposer aux traditions martiales et conquérantes de son peuple nourricier. Mais n’était-ce pas dans ce genre de moment que la valeur d’un homme était mesurée ? Lorsque son cœur et son devoir étaient mis en opposition ? C’était lors de ces moments où les choix étaient les plus difficiles qu’un homme pouvait réellement prouver la puissance de sa détermination.

C’était sans doute à ce moment précis que le jeune homme réalisa à quel point il avait dévié de l’avenir qu’il aurait tracé si jamais son maître n’était pas venu le sauver ou, encore, si jamais son père n’avait pas eu la stupide idée d’attaquer la cible de trop. Il ne serait devenu qu’un guerrier de plus passant le bien de sa famille et de son clan avant tout le reste y compris toute réflexion sensée, ce qui semblerait sans doute pas si mal au citoyen moyen, mais Lorn avait désormais une plus large vision des choses et savait que les épicanthix n’était qu’un petit maillon de la grande chaîne qui régissait cet univers. Alors qu’ils ne soient pas satisfaits de voir leurs désirs guerriers bridés importait peu, le jeune chevalier n’avait pas été envoyé ici pour se faire des amis mais faire la paix et il y arriva au bout de quelques jours éprouvants.

Aujourd’hui, plus d’une décennie plus tard, le chevalier était devenu un maître reconnu et c’était en tant que tel qu’il posait le pied sur la terre de ses ancêtres avec son devoir pour seul moteur. La Force avait voulu que Lorn affronte son géniteur mais le maître d’armes n’avait pas prévu que le géniteur ait encore d’aussi beaux restes après tout ce temps.
L’expérience avait mis la jeunesse à terre non sans une certaine satisfaction, mais la jeunesse ne comptait pas en restait là et se releva bien vite en chassant de son esprit la frustration d’avoir pris le premier coup. Ce n’était pas la première fois que Lorn s’en prenait pleine la tête et ce ne serait certainement pas la dernière, il ne fallait donc pas qu’il laisse cette première défaite occuper son esprit et émousser ses réflexes. Surtout pas maintenant.

Alors que le colosse se releva, le chef de clan brisa le silence qui venait de s’installer d’un :

« Que dirait Nick s’il te voyait ? Reniant ta chair et ton sang pour des…étrangers ! Pour jouer au héros en te pavanant avec ton sabre laser ! Je ne sais pas si je devrais rire ou avoir honte ! »

Lorn avait fait son deuil depuis bien longtemps et cela ne le dérangeait plus d’évoquer le prénom de son frère cadet dans une conversation mais, allez savoir pourquoi, cela l’insupportait au plus haut point d’entendre ce nom sortir de la bouche de ce vieux guerrier. Outre le fait qu’il se sache personnellement responsable du trépas de son cadet, Lorn avait toujours considéré que tout cela ne serait jamais arrivé si le chef de clan avait pu freiner ses désirs de conquêtes et voir ce dernier évoquer le nom d’une personne dont il avait causé la mort provoqua une petite décharge dans l’esprit du maître d’armes. Oh non il n’allait pas succomber à la colère, cela faisait plus de 25 années qu’il ne l’avait pas fait et une si piètre provocation ne serait guère suffisante pour le faire replonger.

Chassant cette provocation de son esprit comme on balayerait de la main une mouche un peu trop ennuyeuse, Lorn raffermit la poigne sur son arme avant de répliquer :

« Et moi je pensais que notre dernière conversation vous aurait mis un peu de plomb dans la tête, mais il semblerait que cette tête ait pris trop de coups pour pouvoir fonctionner correctement. »


« Oh, vraiment ? Et qu’est-ce qui te fait dire ça ? »


« Vous transpirez la colère et l’arrogance, pas besoin d’être jedi pour le sentir. J’aurais simplement pensé que tout perdre vous aurait fait réfléchir, mais il semblerait que même la mort de votre plus jeune fils ne soit pas suffisante pour vous faire baisser les armes. »

Le jeune homme n’était pas entré dans cette pièce en se présentant comme le fils du chef mais bien comme un jedi à part entière, la nuance avait ici toute son importance et c’était pour cette raison qu’il évoqua Nick comme le fils cadet du chef et non pas comme son propre frère. Il n’était pas ici comme Lorn Vocklan mais bien comme le maître Vocklan, il tenait à maintenir très claire cette nuance.

« Un autre pompeux donneur de leçons de plus ! C’est donc ça que tu es devenu ? Tu arrives ici en terrain conquis, transpirant la suffisance et la vertu et tu penses pouvoir remettre en cause un mode de vie dont tu ne connais rien ? Range donc ton prosélytisme, Il n’a pas sa place ici et ne l’aura jamais ! »

Suffisant ? Donneur de leçons ? Voilà comme étaient vus les jedis à travers le monde par ceux ne pouvant supporter qu’on remette en question leur façon de faire ou de penser, peut-être était-ce bien de la suffisance que de se croire assez sage pour dire à quelqu’un ce qu’il devait faire ou dire, mais si avait un effet positif au final alors la suffisance importait peu. Les jedis étaient là pour maintenir la paix et l’équilibre, peu importait si certains grinçaient des dents an appréhendant le changement nécessaire.

Puis, sans daigner relancer le débat en sachant qu’il ne trouverait pas une réponse unanime de sitôt, Lorn bondit cette fois-ci le premier en ouvrant son esprit à la Force. Il aurait pu s’énerver et s’exciter à la vue de ce combat stimulant et pourtant il ne le fit pas. Pourquoi ? Parce que même à distance il pouvait encore sentir la caresse de son aimée et sa présence autour de lui et au plus profond de lui, chose très étrange pour un épicanthix habitué à l’inviolabilité de sa psyché.
Elle était à côté de lui à travers la Force et la certitude de cette présence lui suffit à ne pas laisser la difficulté de ce combat gangréner son esprit, aussi put il appréhender cet affrontement l’esprit tranquille. Ainsi les armes se fracassèrent l’une sur l’autre dans un brouhaha ahurissante mais le jeune homme sembla tenir bon avec une force renouvelée, à la surprise de son adversaire qui enchaîna les coups jusqu’à ce que les deux lames finissent par céder et éclater lors d’un énième fracas.

D’instinct les deux hommes laissèrent tomber leurs armes brisées et inutiles pour se jeter dans le bataille à coups de pieds, de poings et de coudes comme le suggérait le Teräs Käsi : art martial créé par leur propre peuple.
Si Lorn était connu pour être un bretteur émérite sa carrure lui donnait un avantage certain quand il en venait aux mains mais force était de constater que son adversaire n’était pas en reste non plus, ainsi les deux colosses échangèrent des coups et des blocages à un rythme effréné mais le premier moment de faiblesse ne vint pas de celui qu’on attendait. Lorn avait plié le genou une fois, tous s’attendaient donc à ce qu’il réitère ce moment de faiblesse mais il n’en fut rien, aidé par la Force et son aimée il tint bon coup après coup jusqu’à ce que son poing droit fasse flancher son adversaire.

Recevant un coup de paume au niveau de la mâchoire, déstabilisé et désorienté, le vieillard sentit une douleur l’assaillit au niveau du genou et plia la jambe dans un cri de douleur avant qu’un direct du droit ne vienne percuter sa mâchoire de nouveau et le propulser à terre sans ménagement. Le toisant du regard, le souffle rapide en réponse à l’effort fourni, le jedi se pencha sure lui pour lui lâcher sèchement :

« Je ne suis pas là pour vous faire entendre raison et vous faire renoncer à vos désirs de grandeur, si vous n’avez pas ouvert les yeux jusqu’à maintenant alors aucun de mes mots ne pourra vous faire entendre raison. Je suis là pour comprendre la raison de ces récentes disparitions et corriger ça si possible, ni plus ni moins.»

Même si le visage de son adversaire était toujours braqué sur le sol, sa remettant encore du coup qu’il venait de recevoir, le jeid pouvait aisément comprendre de ce que ressentait le vieillard à travers la Force mais il n’en ressentait aucune satisfaction pour autant. Bien sûr c’était toujours plaisant de gagner un combat de plus mais celui-ci était un combat qu’il aurait aimé ne jamais avoir à mener.
Laissant un moment pour laisser au chef de clan le temps de se remettre, le colosse pivota la tête pour voir si son aimée était toujours là, comme s’il avait besoin de la voir en plus de la sentir à travers la Force. En vérité il puisa dans la demoiselle la force suffisante pour lâcher sa réplique suivante :

« Ce n’est pas votre fils que vous avez devant vous, vous l’avez perdu le jour où vos désirs de grandeur vous ont conduit à la ruine. Nous sommes ici comme représentants de l’Ordre jedi alors vous allez me faire le plaisir de mettre votre égo démesuré et votre désir d’impressionner vos élèves de côté pour répondre à nos questions. »

La demoiselle avait été troublée dès l’évocation du nom du chef, Lorn avait pu très aisément le sentir, mais avait-elle immédiatement fait le rapprochement du lien que partageaient les deux hommes ? Si ce n’était pas le cas alors le voile était désormais levé et le sujet reviendrait sur la table d’ici peu de temps.
S’accroupissant juste à côté du colosse brisé, le maître d’armes s’autorisa une petite familiarité en lui soufflant :

« Tu crois que je ne sens pas la colère bouillonner en toi ? Ton envie de me refaire le portrait crève les yeux mais je vais te dire un petit secret. Tu ne me battras pas : ni maintenant, ni jamais. Alors épargne-toi une autre humiliation ou je vais finir par croire que tu aimes ça. Ton entêtement t’a déjà suffisamment coûté.»

Lorn aurait très bien pu agrémenter ce petit constat d’une menace des plus évidentes comme le fait de lui briser les deux bras ou toutes les phalanges si le vieillard avait le malheur de se relever, mais ce serait surfer dangereusement avec le sadisme ou la violence gratuite et ce n’était pas le genre de personne qu’il souhaitait devenir.
Quelqu’un d’autre avait-il pu entendre ces mots ? La déesse à la crinière de feu, peut-être, par l’intermédiaire de la Force mais c’était à peu près tout. Serrant les dents tout en rassemblant la force de se relever, le jedi lâcha finalement à l’attention du chef de clan et de toute l’assistance :

« Je vous remercie pour cette leçon intéressante, chef Vocklan. Nous allons vous laisser vous reposer un moment et nous reviendrons ensuite pour aborder plus en détails des questions sur les récentes disparitions. »

Il était inutile de s’attarder plus longtemps sur cette piètre victoire qui ne méritait nulle félicitation, le maître d’armes n’avait rien de plus à dire et savait qu’entamer à chaud une discussion avec celui qu’il venait d’humilier ne mènerait à rien de bien. Attrapant sa veste avant de quitter la pièce puis le bâtiment, le jeune homme balaya les environs pour trouver quelque chose où s’asseoir et un banc en bois fit parfaitement l’affaire.
S’asseyant sur ledit banc dans un soupir de soulagement, Lorn s’autorisa enfin à souffler avant de cracher les dernières gouttes de sang qui se baladaient toujours dans sa bouche.



Décidément les réunions de familles n’étaient vraiment pas pour lui.

Puis, au milieu de nulle part, un mot fut lancé à l'attention de son aimée:


« Merci.»

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Si Alyria avait pu ressentir un certain malaise la veille au soir, ce n’était rien à côté du maelstrom de quasi nausée qui la prenait alors qu’elle assistait, impuissante, à cette débauche de crochets et directs dont leur délégation se serait passée. Passe encore le combat, après tout, les mœurs locales guerrières auraient pu le justifier. Mais désormais, en plus de se rendre coup pour coup, les deux hommes s’invectivaient, déballant leur passé commun devant tous, achevant de rendre tous les présents plus silencieux qu’à un enterrement. Clairement, tous avaient compris qu’il y avait là presque une remise en cause des croyances du chef, de son statut, par un étranger qui n’était autre que son fils prodigue.

Entendre le prénom du frère décédé de Lorn lui fit mal, réellement, pour lui. Elle savait combien le deuil était douloureux, combien il s’en était voulu. A l’époque où il lui avait enfin révélé ce lourd secret, elle avait essayé de le convaincre qu’il n’avait pas eu le choix, qu’il n’avait rien à se reprocher, et avait eu l’impression de l’apaiser par ses paroles. Est-ce que cela avait vraiment été le cas ? Elle l’espérait. Et ne pouvait s’empêcher de ressentir une pointe de dédain envers un homme qui, incapable d’endosser le fardeau de ses erreurs, le rejetait sur son enfant survivant, dont il aurait dû être si fier, et qui portait le poids des errements d’un père méconnu depuis trop longtemps.

Etre méprisé par sa propre famille, beaucoup de jedis connaissaient ces affres, en réalité. La plupart des familles ne remettaient leur enfant qu’à contrecœur, et n’appréciaient pas forcément la sagesse de ceux qui, dépourvu d’attaches, n’avaient plus forcément en tête les mêmes valeurs, les mêmes idéaux. La brisure du début s’approfondissait, pour se transformer en cassure complète. S’en rendre compte était souvent une blessure douloureuse, qui se résorbait avec le temps. Pourtant, Alyria était persuadée que sur ce point, Lorn et elle étaient semblables : tous deux avaient depuis longtemps fait le deuil de leurs familles, et de ce qu’il en restait. Leur famille, c’était l’Ordre. C’était eux deux. L’épicanthix était trop éloigné des siens, de son père. Et elle-même n’avait jamais rien eu en commun avec sa mère. Son seul lien familial demeurait Joclad, qui comptait peu, dans le sens où il était ténu et où elle le considérait avant tout comme un jeune frère, un garçon talentueux et doué, et non simplement un quelconque petit-cousin éloigné. En un sens, il était plus que de la famille : comme Lorn, elle l’avait choisi.

A ses côtés, les plus jeunes retenaient leurs souffles, certains inquiets pour leur chef, d’autres hypnotisés par le rythme effréné du combat, quand les plus perspicaces se regardaient et chuchotaient entre eux pour discuter de ce qu’ils entendaient, sans doute pour demander des explications plus tard à leurs parents ou à un aîné. Quelques-uns, enfin, l’observaient avec curiosité alors qu’elle restait droite, comme impassible, ses yeux rivés devant elle, pas un muscle facial ne bougeant, alors qu’elle suivait dans la Force chaque mouvement, chaque inspiration. Son instinct lui dictait de faire fi de toutes ces coutumes grotesques et de tisser immédiatement une Protection sur Lorn, tandis que la sagesse le lui interdisait, de même qu’un brin de psychologie. Elle avait conscience que ce combat, son amant devait le mener seul, sans son aide, et sans ce qui pourrait être considéré comme de la triche. Il lui était simplement douloureux d’être à ce point inutile, quand bien même elle comprenait les raisons qui avaient mené à cet état de fait.

Enfin, le coup final fut lancé, précis, brutal, typique du style de son partenaire, qu’elle connaissait suffisamment pour avoir anticipé la botte sans en avoir rien laissé paraître. Le soulagement et la fierté l’envahirent immédiatement, tandis qu’une chaleur douce se répandait dans ses membres. Cet affrontement avait été beau, et loyal. Une echanie, même de sang-mêlée comme elle, ne pouvait que le constater, tant son sang en avait été échauffé malgré son contrôle absolu. Lorn avait triomphé, et timidement, quelques jeunes applaudirent. Ainsi, personne ne percevrait les paroles échangées entre le chef et son héritier. Heureusement. Mieux valait que certains échanges restent du domaine du privé. Voyant Lorn sortir finalement, Alyria saisit la balle au bond et souffla un rapide :

« Si vous voulez bien m’excusez … »

Puis elle rejoignit l’épicanthix en quelques enjambées dehors, posant une main gantée dans son dos avant d’y faire des petits cercles concentriques, doux, réguliers, simplement pour l’apaiser, lui manifester son soutien. Lentement, elle se mit face à lui, posant son autre bras sur sa joue, avant de murmurer gentiment :

« De rien. »

Son gant passa près de la bouche du trentenaire, se tachant légèrement de sang, ce dont Alyria n’avait cure. Elle s’immergea dans la Force, s’ouvrant à l’énergie mystique et ouvrit une connexion presque instantanée avec l’organisme de Lorn, parcourant ses flux vitaux pour résorber les petites estafilades et les ecchymoses diverses, usant de ses pouvoirs guérisseurs avec une dextérité acquise par des années d’utilisation intensive. Quand elle eut fini, elle ouvrit les yeux et déclara :

« Voilà. C’est mieux ainsi, non ? »

Son visage exprimait un calme serein, mais aussi un amour profond, sincère, qui se lisait parmi les membres de couple solidement installé, qui savent éprouver de la fierté face aux prouesses de l’autre sans s’en rengorger, avec la satisfaction simple de voir leur partenaire triompher des épreuves de la vie seul, sans leur aide. Lentement, ses lèvres se rapprochèrent de celles de l’épicanthix, et elle souffla au creux de sa bouche :

« Je suis fière de toi. »

Et elle l’embrassa. Tendrement d’abord, dans une légère pression, sans charger à mettre plus d’intention dans ce baiser que le simple sentiment délicat d’être ensemble. Sa main passa de sa joue à son cou, pour l’attirer à elle, et faisant fi des regards qui auraient pu les espionner, elle approfondit leur échange, se perdant dans l’odeur de son amant, dans leurs mouvements qui, depuis les années, avaient acquis une familiarité sucrée qui ne cessait pourtant jamais de la contenter. Peut-être était-ce tout simplement le goût de l’amour qui ne faiblissait pas, malgré le temps et les difficultés. Finalement, ils se séparèrent, et Alyria souffla doucement, ses mains toujours autour de son cou :

« Je crois … Que nous sommes prêts. Pour le Conseil. Pour l’avenir. Le passé ne nous retient plus. J’ai la conviction que nous sommes le futur de l’Ordre. »

Elle prit ses mains dans les siennes et ajouta :

« Ensemble. Nous pouvons y arriver. Parce que nous avons triomphé seuls des épreuves sur notre route. Et que nous combattons ensemble les autres.»
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Au cours de sa formation de jedi le jeune homme avait été confronté à tout un tas d’enseignants différents mais ce qui revenait le plus souvent, parmi tous ces adeptes de la Force, était le profond désir de ne jamais devoir recourir à la violence dans quelque situation que ce soit. Bien entendu il arrivait certains moments où la situation obligeait le jedi à faire un choix, à user de violence pour le bien du plus grand nombre, mais ces situations-là devaient devenir aussi peu régulières que possible aux yeux du jedi car celui-ci était avant tout un garant de la paix et de l’équilibre. La violence n’entraînait que la violence, voilà ce qu’on lui avait répété un nombre incalculable de fois alors qu’il entraînait son corps et son esprit pour les occasions où l’usage d’une telle violence physique serait inévitable.
Il était un garant de la paix et un diplomate, du moins sur le papier, ce qui ne voulait pas pour autant dire qu’il devait rester sans défense. Les jedis étaient chargés de maintenir l’équilibre dans la galaxie et de maintenir la paix au sein de la République autant que possible, ils devaient donc être préparés à affronter des individus très peu coopératifs à l’idée de baisser les armes. Certains jedis parmi les plus pacifiques croyaient en la puissance des mots et la capacité à raisonner même les plus violents des hommes, Lorn ne pouvait d’ailleurs qu’admirer une telle détermination, malheureusement il n’était pas aussi optimiste que ses pairs et préférait nettement être prêt pour les situations – trop nombreuses à son goût – où les mots auraient autant d’effet qu’une piqure de moustique sur une carapace en duracier.

Ces situations arrivaient toujours. Ce n’était pas du cynisme de la part de Lorn que d’établir ce triste constat, il avait vu un nombre incalculable de fois la raison être vaincu par la barbarie et sauvagerie présente dans chaque être humain doué d’intelligence, il avait vu les faibles écrasés par les forts, il avait vu les faibles implorer en vain la pitié des forts. Alors Lorn avait fait un choix, un terrible choix, celui de prendre les armes pour défendre les faibles quitte à jeter ses leçons aux orties plutôt que de devoir consoler une veuve en pleurs en lui disant qu’il avait fait tout ce qui était en son pouvoir, avec les mots pour seule arme. C’était peut-être une vision un peu trop simpliste des choses, il savait bien que la violence détruisait parfois plus qu’elle ne protégeait, que les bonnes intentions ne suffisaient pas toujours, mais il laissait à ses pairs les réflexions philosophiques sur le bien-fondé de ses actes.

La question n’était pas de savoir s’il rechignait à se battre ou non, la réponse étant bien sûr négative, la question était de savoir si avec le temps il avait commençait à aimer se battre. Eh bien quoi, la question était-elle aussi absurde que cela ? Certaines personnes étaient attirées par la violence et par ce qu’elle leur permettait d’accomplir, les siths en étaient le plus parfait des exemples, mais Lorn avait-il lui-même franchi cette ligne ? Non, pas encore, il avait beau se sentir vivant lorsque les flammes de la bataille léchaient son corps il ne ressentait pas pour autant de plaisir malsain lorsque son sabre laser perçait la chair d’un homme comme si ce n’était que du beurre. Il avait beau se sentir puissant face à un adversaire vaincu il savait au moins une chose, il avait beau être un jedi plein d’incertitudes malgré les apparences il savait au moins que jamais le plaisir ou la joie ne viendraient s’insinuer en lui lorsqu’il prendrait la lourde décision de supprimer une vie.

Ni maintenant, ni jamais.

Mais ici il ne s’agissait pas de supprimer une vie ou de prendre du plaisir dans un énième combat, il ne s’agissait pas non plus d’humilier un hôte devant tout le monde, il s’agissait de faire ce qui devait être fait pour s’assurer une bonne coopération de la part de l’hôte pour toute la durée de l’enquête. Il voulait faire une petite démonstration à ses élèves. Qu’à cela ne tienne. Il voulait se mesurer à un jedi ? Lorn ne pouvait l’en blâmer car il n’était pas le seul. Mais ce fut lorsque le chef décida de balancer à la tête du jedi tous ses griefs et toute sa rancune que Lorn comprit que cet affrontement prenait une mauvaise tournure. Ainsi son père ressortait le dossier de son jeune frère ? Malheureusement Lorn s’était suffisamment tourmenté lui-même en se remémorant ce jour fatidique que de telles paroles ne pouvaient plus l’atteindre désormais, il prit donc sur lui d’en finir avec son adversaire de la seule façon qu’il connaissait.
Il ne put nier qu’une pointe de fierté et de satisfaction grandirent en lui lorsque sa victoire fut constatée, cette victoire symbolisait le trait final qu’il n’avait pas encore pu tirer sur sa famille, mais il chassa bien vite de telles émotions car la fierté pouvait le mener vers de sombres routes qu’il ne désirait par arpenter. Il préféra s’éclipser et laisser son hôte soigner son corps blessé et sa fierté broyée tout en laissant son propre corps meurtri se reposer, laissant un épais filet de sang s’extirper de sa bouche pour aller s’écraser par terre.

Alors qu’il restait là, penché vers l’avant, du sang coulant de sa bouche au compte-goutte comme un robinet mal fermé, le jeune homme repensa à ce qu’aurait fait sa compagne ou bien encore son mentor devant une telle situation. Auraient-ils fait le même choix que lui ? Auraient-ils décidé de convaincre l’hôte qu’une telle démonstration n’était pas nécessaire ? L’homme qu’il était devenu était satisfait d’avoir rabattu le caquet de son hôte mais le jedi qu’il était ne pouvait que déplorer le fait d’être rentré dans son jeu. Était-ce là l’exemple qu’il devait donner aux jeunes générations ? Bien sûr que non, les jedis étaient censés être au-dessus de tout cela et en acceptant ce duel Lorn s’était montrant aussi déraisonnable que mal avisé.

Mais il devait le faire, il ne savait pas comment le décrire mais son cœur lui avait fait comprendre que c’était un combat qu’il ne pouvait pas laisser de côté, comme une page à tourner ou un trait qu’il n’avait jamais eu l’occasion de tirer. On ne lui avait jamais laissé le temps d’enterrer son frère ou de dire adieu à sa famille, peut-être était-ce pour cela qu’il était ici plus que pour cette mission, peut-être pourrait-il enfin connaître la paix de l’esprit.

Sentant quelques gouttes s’accumuler au bord de ses lèvres, le jeune homme leva sa main droite pour nettoyer un peu sa bouche mais ce fut une autre main que la sienne qui vint nettoyer le sang. Trop plongé dans ses réflexions pour sentir sa compagne approcher, le jeune homme ne se rendit compte de sa présence que lorsque sa main caressa ses lèvres et que ses capacités curatives furent à l’œuvre. Il sentait la douleur s’en aller petit à petit ce qui était une bonne chose mais, lorsque la demoiselle lui demanda si ce n’était pas mieux ainsi, il ne put s’empêcher de murmurer :

« Tu ne devrais pas te fatiguer pour réparer mes erreurs. »

Il savait bien que la demoiselle lui répondrait que cela lui faisait plaisir de l’aider de cette façon, ou quelque chose du genre en tout cas, mais demander à quelqu’un de le soigner suite à un combat qu’il n’avait pas pu ou voulu stopper ne lui semblait pas juste. Mais qu’importe, le mal était fait.
Mais bientôt, alors que la demoiselle lui faisait part de la fierté qui s’emparait de son cœur suite à ce petit affrontement, le jeune homme n’eut pas le temps de placer un seul mot que les lèvres de sa compagne étaient déjà contre les siennes. Depuis combien de temps n’avaient-ils pas eu le temps de partager un tel moment sans penser à rien d’autre ? Beaucoup trop longtemps à son goût, mais désormais ils n’étaient plus que tous les deux et pouvaient se laisser aller. Les regards furtifs des passants importaient peu désormais, Lorn voulait simplement profiter de ce fugace moment pour être avec sa moitié et oublier tout le reste.

Le baiser fut un peu trop court à son goût, comme toujours à vrai dire, mais une fois leurs lèvres détachées la demoiselle fit part à son camarade de sa volonté d’officialiser leur relation auprès du Conseil. Était-ce ce petit affrontement sans importance qui lui avait donné le signal ou y réfléchissait-elle depuis quelques temps déjà ? Lorn supposa que c’était la seconde option et, lorsque la demoiselle lui annonça qu’elle les pensait prêt pour franchir le pas, son compagnon répondit :

« Je n’en ai jamais douté.»

Bien sûr qu’il était amusé par la confiance de la demoiselle qui voyait leur couple comme l’avenir de l’Ordre, peut-être était-ce d’ailleurs un peu prématuré ou présomptueux de penser ainsi, mais au moins elle était désormais sur la même longueur d’onde que l’épicanthix qui aurait voulu franchir le pas depuis quelques temps déjà. Mais il comprenait les réticences de la demoiselle qui avait voulu attendre pour ajouter des kilomètres à son compteur afin de prouver ce qu’ils valaient vraiment, afin de prouver qu’une telle relation n’était aucunement un frein dans l’accomplissement de leur devoir.

Ils s’étaient créé un nom aussi bien dans l’Ordre qu’à travers la galaxie, leurs exploits étaient connus mais cela ne voulait pas dire qu’ils allaient s’arrêter en si bon chemin. Non, bien sûr que non, leur chemin ne faisait que commencer et bientôt leurs deux noms seraient connus, respectés et parfois même craints à travers la galaxie. Ce n’était pas forcément un but en soi mais la simple conséquence de leurs actions et de leurs prouesses. Ils étaient doués, terriblement doués et la galaxie commençait à peine à s’en rendre compte.

Alors que les secondes défilaient, leur hôte attendant peut-être leur route, le jeune homme souffla à sa moitié :

« Restons-là un peu plus longtemps, si ça ne te gêne pas. Ils peuvent bien attendre un peu.»

Les mains de la demoiselle toujours au creux des siennes, front contre front, plongé dans la Force, le jeune homme voulut simplement profiter de ce petit moment de douceur et d’intimité avec la demoiselle sans penser à sa mission ou tout ce qui gravitait autour. Ils étaient des jedis mais aussi un couple, un couple qui avait besoin de se retrouver de temps à autres. Ainsi lentement, sûrement, le jeune homme vint positionner une de ses mains sous le mentor de la demoiselle comme pour en soutenir le visage, avant de s’en approcher et déposer à son tour un chaud baiser sur ses lèvres.

Ces moments étaient rares mais d’autant plus précieux.
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« Il en faut bien plus pour me fatiguer. Grâce à toutes nos erreurs, comme tu dis, résorber trois écorchures n’est pas un grand sacrifice. Et puis, nous avons une mission diplomatique, tu ne voudrais pas que nous, puissants jedis, et toi, vainqueur de chef, soyons incapables d’étayer notre réputation de mystiques ? »

Il y avait une part de vérité étonnante dans cette phrase prononcée avec un brin d’humour et un haussement d’épaules pour signifier que ce n’était rien. Alyria voulait le soigner parce qu’elle ne supportait pas que son amant ou qui que ce soit d’ailleurs souffre devant elle quand il était si facile de résoudre le problème, certes, mais également parce qu’un émissaire avec des ecchymoses et du sang séché n’était guère avenant. Et puis, à le voir frais et dispos, nul doute que leurs interlocuteurs si méfiants se souviendraient que l’Ordre jedi avait ses mystères. Pour une culture tribale, ce n’était pas une mauvaise chose, là où les urbains considéraient avec méfiance ces démonstrations. Mais dans des sociétés dominées par la coutume et la croyance en des forces supérieures, éloignées du matérialisme rationnel des villes, l’impact n’était pas forcément négligeable. Il était quelque part ironique qu’une confrérie vouée à la connaissance ait parfois ses meilleurs auditoires dans les endroits les plus reculés, quand on y pensait.

L’inébranlable confiance de Lorn dans leur couple lui arracha un sourire. Il était amusant de constater que pour un homme si pétri de doutes sur sa place au sein de l’Ordre, sa destinée ou ses compétences, il avait une capacité exceptionnelle à croire dans leur duo intime, infiniment plus qu’elle au demeurant. Non pas qu’elle ne plaçât pas toute sa foi en eux, au contraire, sinon jamais elle n’aurait accepté de vivre cette idylle secrète, de mettre en danger sa relation avec la Force en la testant comme jamais, et surtout, elle ne nourrirait pas de tels sentiments de sûreté et de calme vis-à-vis de leur avenir, au point de penser être mûrs pour affronter le regard du Conseil. Parfois, Alyria se demandait d’où venait à son amant cette puissante confiance dans leur couple, et ce depuis leurs débuts. C’était lui qui avait fait le premier pas, lui qui avait attendu patiemment qu’elle se sente prête à accueillir son amour. Elle pouvait bien être celle qui écoutait ses blessures intimes, ses failles intérieures, il était son Roc, celui qui, finalement, savait que leur union sentimentale pouvait tenir envers et contre tout, supporter le jugement de leurs pairs et triompher.

L’épicanthix désirait rester un peu, profiter de l’instant, et la demi-echanie ne se sentit pas le courage de se libérer de son étreinte pour revenir à leurs devoirs, surtout quand ses lèvres étaient à nouveau occupées à goûter celles de Lorn, qu’elle savourait une fois encore le bonheur d’être dans ses bras, simplement, sans se soucier brièvement de l’état de la galaxie ou de leurs devoirs. L’avenir était à eux, mais pour le moment, le présent l’était davantage. Ils restèrent là un moment, leur baiser devenant malgré eux de plus en plus passionnés, sans jamais dépasser les limites de ce qui aurait pu être considéré comme un geste exubérant d’affection en public. Jamais ils ne s’étaient autorisé une telle familiarité en dehors du couvert de leurs chambres, hormis brièvement sur Sy Mirth, au réveil, et encore, les autres dormaient, aussi le risque était moins grand. Là, ils étaient réellement comme un couple d’amoureux juste heureux de se retrouver ensemble après une épreuve difficile présentée à l’un d’entre eux. Etait-ce la perspective de parler au Conseil qui avait fait sauter leurs barrières ordinaires, leur timidité immanente ? Peut-être. Quoiqu’il en soit, ils finirent par se séparer, et Alyria posa sa tête contre l’épaule du colosse pendant plusieurs minutes, sentant son rythme cardiaque se calmer à mesure que le souffle revenait. Puis elle se détacha, et finit par demander, mue par un besoin de faire prolonger l’instant autant que par son inépuisable curiosité … et sans doute l’ultime nécessité d’être rassurée :

« Dis-moi … Comment peux-tu être toujours aussi … Sûr, quand ça nous concerne ? D’habitude, c’est plutôt l’inverse mais … Tu ne doutes jamais de nous. Depuis le tout premier jour. Comment arrives-tu à ressentir cette … certitude ? En permanence ?

Tu n’as jamais eu un instant à te demander, toutes ces années durant, si nous étions réellement sages de nous accrocher à cette relation ? De penser que nous serions suffisamment méritants pour nous placer devant le regard du Conseil.

Non pas que je ne sois pas sûre. Mais … J’ai souvent l’impression que tu as en nous une foi qui me dépasserait presque. Comme si la Force te guidait dans ce sens. »


La réponse l’intéressait grandement, de même que celle qu’il apporterait à sa question suivante :
« Quand as-tu su ? Que nous étions prêts ? Que tu pouvais m’aimer librement ? Je sais que au premier jour … Tu ne m’as pas répondu. Et tu avais raison. La curiosité me guidait, et elle n’était pas forcément bien placée.

Mais … Aujourd’hui, j’ai juste envie de savoir pourquoi tu es si sûre. Quelles sont les racines qui font que tu crois en nous, comment tu en arrivé avant moi à ouvrir les yeux. »


L’ultime secret. C’était finalement ce qu’elle lui demandait. Et pour faire preuve de bonne foi, elle allait lui dire quand est-ce qu’elle avait décidé qu’ils étaient ce qu’ils devaient être.

« J’ai su à mon retour de Dantooine. Quand ce sith est arrivé et que d’emblée, j’ai su où te trouver, su que quoiqu’il se passe, nous agirions de concert. J’avais médité longuement, là-bas, et j’étais parvenue à la conclusion que quoi qu’il se passe, le vrai signe saurait de savoir si je pouvais continuer de te voir comme partenaire, et non uniquement comme amant potentiel. Que j’avais des sentiments pour toi, mais que je devais savoir s’ils étaient à la hauteur de ce que tu voulais m’offrir.

Et c’était le cas. Et je l’ai compris à ce moment. Et je l’ai vu confirmé sur Byss. »


Il en coûtait à la jedi de s’ouvrir à ce point, car c’était réellement les derniers remparts, les ultimes secrets qui se trouvaient éventés. C’était le dernier pas, l’étape supplémentaire à franchir. Lorn méritait de savoir. Il méritait d’entendre pourquoi elle avait décidé de lui accorder son entière affection.

« La Force ne s’opposait pas à ce que nous nous aimions. »
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Alors que le jeune homme peinait toujours à remettre de l’ordre dans son esprit, notamment en tentant de chasser ses questions concernant le bien-fondé de l’affrontement qui venait d’avoir lieu quelques minutes plus tôt, la tirade de la demoiselle parvint tout de même à décrocher un sourire au jeune colosse. Chaque était conscient qu’en posant le pied dans cet Ordre pour la première fois ils embrassaient une voie de mysticisme et d’obscurantisme aux yeux de certains esprits étriqués, car aucune étude scientifique n’était véritablement capable d’expliquer les prouesses dont les adeptes de la Force étaient capables. D’ailleurs ces être sensibles étaient-ils capables eux-mêmes d’expliquer cette symbiose avec la Force ? C’était plus une sensation qu’un phénomène clairement identifiable, c’était plus du domaine de l’instinct que du scientifique à proprement parler.
Certaines des communautés les plus primitives ou les plus ignorantes voyaient les jedis comme rien de moins que de mystérieux sorciers à respecter tout autant qu’à craindre mais, fort heureusement, cette mystique réputation finissaient par s’atténuer quelque peu au sein de sociétés plus avancées technologiquement et intellectuellement. Oh bien sûr même au sein de Coruscant la grande les adeptes de la Force étaient vus comme des êtres vivants dans un monde à part, chaque jedi le savait, mais à force d’expérience chacun d’entre eux arrivait à faire fi des regards qui leurs étaient portés. Cela faisait partie du boulot, tout simplement, car chaque être humain craignait toujours ce qu’il ne pouvait comprendre.

Mais alors que le jeune homme terminait enfin d’organiser ses pensées une question lui fut posée, une question qu’il supposait être présente depuis un bon moment sans avoir la force d’être posée. Comment pouvait-il avoir autant confiance dans son couple alors qu’il était aussi souvent en proie au doute quand cela le concernait ? Bien sûr qu’il s’attendait à cette question, il se demanda même pourquoi sa compagne ne la lui avait pas déjà posée plus tôt, mais soit, elle était désormais posée sur le tapis et il lui incombait d’y répondre.
La tête de sa compagne contre son épaule, Lorn leva la tête et ses yeux d’un bleu parmi les plus clairs se perdirent dans l’immensité du ciel au-dessus de lui comme s’il y cherchait une réponse, mais en vérité il cherchait simplement la manière de formuler la réponse qu’il possédait déjà.

Sans trop savoir pourquoi, peut-être bien à cause de ses origines martiales, Lorn n’avait été sujet au doute qu’en de très rares occasions depuis que son maître l’avait personnellement pris sous son aile, se concentrant sur une tâche extrêmement simple qui était la recherche du perfectionnement constant. Il ne désirait pas être le meilleur de tous les jedis ni la plus fine lame que l’Ordre ait jamais connue, encore que ce dernier titre ne lui déplairait pas, il désirait simplement être meilleur qu’il ne l’était la veille et ce fut cette simple idée qui régit sa vie jusqu’à ce jour.

Son maître l’avait sauvé et avait eu confiance en sa capacité à devenir quelqu’un au sein de l’Ordre, à lui succéder pour ainsi dire, quel genre d’élève serait-il s’il en venait à douter son mentor et sauveur ? Celui à qui il devait la vie ? Non, l’esprit de Lorn avait depuis toujours été façonné dans le plus dur des métaux et, bien que craquelé et affaibli par le meurtre de son frère, l’enseignement de son mentor avait permis de reforger cet esprit pour le rendre encore plus solide qu’avant.

Si Alyria croyait que Lorn doutait toujours de lui-même sans raison ce n’était pas par hasard mais parce que Lorn voulait que tous pensent cela de lui, mais la vérité était beaucoup plus simple que profonde que cela. Il avait volontairement laissé le doute s’insinuer en lui, il s’était autorisé voire même forcé à douter pour continuer à avancer et ne jamais se reposer sur ses lauriers, car c’était en se remettant perpétuellement en cause qu’il pouvait continuer d’évoluer et il en serait ainsi jusqu’à ce qu’il rejoigne la Force. Son titre de Roc n’était – en réalité – pas usurpé le moins du monde, que ce soit concernant son couple ou sa propre personne il n’avait jamais douté un seul instant de leur réussite mais il ne savait pas vraiment comment le dire à son aimée. Comment lui dire que le doute qu’elle sentait en lui était voulu et non subit ? Il aurait bien voulu garder cela secret quelques instants de plus mais, puisque sa compagne s’ouvrait ainsi à lui, en faire de même était le moins qu’il pouvait faire.

« Je vais te dire un petit secret. Je ne doute pas, point à la ligne. Je m’autorise à douter de moi-même parce que cela m’est utile voire nécessaire, mais sans cela…je ne doute pas un seul instant de moi-même ou de ceux en qui j’ai confiance et que tu arrives en haut de la liste. »

Comment pouvait-il expliquer cela plus clairement ? Bien sûr il ne s’attendait pas à ce que sa compagne comprenne pourquoi douter de lui semblait nécessaire mais ce n’était pas le sujet, ou peut-être que cela le deviendrait plus tard mais pour l’heure il y avait une question qui attendait une réponse. D’où lui venait sa confiance en son couple ? La réponse vint en partie.

« Maître Torm fut toujours étonné de ma…réceptivité, ma lucidité. J’aime à croire, comme il le suggérait, que c’est ma compréhension de la Force qui me donne une vision aussi claire des choses. Je t’ai ouvert mon cœur parce que j’ai su, parce que j’ai senti que nous pourrions créer quelque chose et que nous pourrions surmonter les épreuves mises sur notre route. Je ne me suis pas demandé, j’ai su que cela fonctionnerait mais je ne saurais dire si cela est dû à une très grande confiance ou si c’est la Force qui parle à travers moi. Peut-être les deux. »

Puis vint la question plus précise, à quel moment fut-il frappé par cette certitude ? La réponse vint au moment où Lorn pointa du doigt la main brisée de la demoiselle. Il n’avait pas besoin de rappeler les détails de ce jour fatidique, ce jour où il découvrit sa camarade inconsciente avec une main en moins.

« Ce jour-là, quand je t’ai récupérée. Ce jour-là fut le tout premier signal mais je me suis tût durant les années suivantes car nous avions tous deux nos rôles à jouer. J’aurais pu m’ouvrir plus tôt mais je savais qu’il était bien trop tôt, pour toi comme pour moi. »

Laissant un silence s’installa tandis qu’il réorganisait ses pensées, chassant ses souvenirs de cette sombre journée et des émotions intenses qui s’étaient emparées de lui en récupérant le frêle corps de sa camarade, Lorn reprit par :

« Je suis sûr parce que j’ai rarement pu lire aussi clairement dans un esprit que dans le tien, parce que j’ai rarement connu quelqu’un aussi bien que toi. Il ne s’agit pas juste du temps passé ensemble ou des batailles menées côte à côte, peut-être est-ce la Force qui m’a permis de voir en toi ce que j’y cherchais, peut-être est-ce la Force qui m’a dirigé vers une personne pouvant me comprendre. »

Rabaissant sa tète vers le bas, posant ses yeux sur ses deux mains calleuses, il conclut son introspection d’un :

« Peut-être est-ce la Force qui m’a permis d’obtenir une telle clarté d’esprit ou peut-être n’a-t-elle rien à voir là-dedans, tout ce que je sais c’est que j’ai toujours plus ou moins su que mes sentiments à ton égard étaient différents. Pendant longtemps je ne me suis simplement pas autorisé à fouiller davantage dans ces sentiments, parce qu’il était trop tôt, parce que nous n’étions pas prêts. Je ne peux pas l’expliquer rationnellement. Quand il s’agit de toi, de moi ou de nous deux je ne doute pas, ni maintenant ni jamais.»

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« Merci … pour m’avoir dit. Je comprends mieux, maintenant. C’est drôle … Je doute, parce qu’ainsi je suis sûre qu’à chaque décision que je prends nous concernant, j’ai pesé le pour et le contre. Et ton assurance me convainc souvent. Comme j’ai l’impression que mes questions te permettent d’y voir plus clair, parfois, de rationaliser ce que tu sais déjà.

Je crois que nous sommes plus complémentaires encore que je l’aurais cru. Avec ces dispositions d’esprit … Il y en aura toujours un qui croira, et un qui remettra les évidences en cause. C’est peut-être ainsi qu’une relation jedi peut avancer : pas d’assurance qui mène au côté obscur, ni d’interrogations perpétuelles et nuisibles. »


Même leurs modes de pensées se complétaient. Là se trouvait la dernière pièce du puzzle qu’était leur liaison, que peu à peu, Alyria s’était plu décortiqué, d’abord pour choisir, et ensuite pour se convaincre jour après jour du bien-fondé de sa décision. Elle avait observé les faits, les réactions, les avancements, réfléchi sur son propre comportement après leur seule et unique dispute. En matière personnelle, elle n’avait pas l’assurance de Lorn, c’était un fait. Et c’était tant mieux. Parce que ce temps de préparation, de méditation dont elle avait besoin permettait toujours de ne rien brusquer, tandis que sa force tranquille servait à canaliser ses doutes, de même qu’elle l’aidait à se remettre en question. Elle comprenait parfaitement ce que le jedi disait … Parce que dans tous les autres pans de son existence, elle était comme lui. Et lui comme elle. Ils étaient des miroirs, le reflet inversé de leurs âmes respectives. Voilà pourquoi elle croyait fermement que leur relation était une évidence : ils étaient l’équilibre nécessaire l’un à l’autre, des opposés qui, finalement, regardaient dans la même direction.

Surtout, son cœur se gonfla d’une infinie quiétude en l’entendant parler de son amputation. Jamais elle n’avait pensé à cet événement d’une façon positive, malgré les années passées et les blessures peu à peu refermées, bien que difficilement et douloureusement. La veille l’avait bien montré : les cicatrices demeuraient vives, et un rien suffisait à les rouvrir. Comme si la Force l’y poussait pour apaiser son amante, l’épicanthix venait de délivrer le meilleur remède à son esprit tourmenté. Oui, ce jour-là avait été la fin d’un monde. Mais pas de son monde. Au contraire, une autre voie avait été tracée, et si au départ, elle l’avait trouvé terriblement sinueuse, elle avait enfin réussi, grâce en partie au colosse, à en accepter les contours et à l’emprunter sereinement. Il lui manquait juste à voir cet événement non pas avec une philosophie résignée, de l’acceptation, mais bel et bien avec des yeux empreints d’espoir. Tel était le cadeau qu’en peu de mots, Lorn venait de l’y faire, peut-être inconsciemment. Et à cette pensée, sa voix s’étrangla dans sa gorge, tandis qu’elle se résolvait à ne pas pouvoir ajouter une phrase de plus. A la place, elle écrasa ses lèvres contre les siennes dans un baiser nettement plus passionné que le précédent, avant de s’écarter et de souffler, légèrement hors d’haleine :

« Il est temps que je vois ce jour comme le moment d’un renouveau. Sans le savoir, ce sith m’a sans doute apporté plus que personne n’a jamais pu le faire. »

Si c’était le début de leur lien actuel … Le bourgeonnement d’une superbe plante qui n’avait cessé de s’épanouir … Alors elle pouvait l’accepter pleinement. Faire sienne cette vision de son passé, et la laisser fleurir dans son esprit pour enfin l’intégrer complètement non comme un événement de rupture, mais bel et bien de continuité. Sa vie avait pris un nouveau tournant, mais définitivement, cela avait été pour le meilleur. Depuis, elle avait considérablement changé, grandi, mûri, en tant que jedi et en tant que personne. Elle était devenue maître jedi, Chancelière de la République, avait trouvé un nouvel équilibre auprès de ses amis, de Lorn … Elle était devenue autre, certes, que ce qu’elle avait prévu initialement … Et en même temps tellement plus. Elle avait même le sentiment, finalement, que son expérience se révélerait précieuse pour l’Ordre, d’une manière ou d’une autre. Elle avait contribué à son rayonnement, et cela n’aurait sans doute jamais été possible si elle s’était cantonnée à son strict rôle de maîtresse d’armes, si elle était simplement restée la meilleure amie d’enfance de l’épicanthix. Mieux, avec cette plénitude qu’elle ressentait face à cette acceptation pleine et entière de sa destinée, de sa trajectoire si peu commune, elle se sentait envahie d’une profonde certitude, comme jamais auparavant peut-être. Alyria était prête. Elle était enfin entière.

« Je crois … Que nous devrions parler au Conseil. Quand nous rentrerons sur Ondéron. Il est temps … Et je pense que nous avons toutes les réponses que nous avons cherché en main, désormais. »

Il était temps d’aller de l’avant. D’en finir avec les secrets, de tout révéler, et de savoir si, comme eux, l’Ordre pouvait croire que la Force les avait réuni. Et enfin, de rompre définitivement avec le passé, avec ce qu’elle avait été, pour se consacrer pleinement à sa mission de jedi.

« J’aimerais aussi … Prendre une padawan. Wen Janto, pour être précise. J’y ai mûrement réfléchi, et ces dernières années … Je suis convaincue que nous avons créé un lien dans la Force qu’il est temps de concrétiser.

Si elle acceptait de m’avoir pour maître … Je pense que je lui dirais la vérité. Pour nous. Elle a le droit de savoir qui sera son enseignant sur la voie des jedis avant de s’engager sur le chemin de la chevalerie avec moi. »

Le moment des projets était venu, de continuer sur cette vie qui se traçait peu à peu devant eux. Mais pour le moment …

« Excusez-moi … Nous sommes prêts à vous recevoir pour écouter votre requête et y répondre … »

Un jeune épicanthix venait de faire apparition, signalant la fin de cet intermède personnel. Rapidement, les deux jedis s’écartèrent l’un de l’autre, conscient que cela signifiait que le père de Lorn avait été soigné et qu’il n’objecterait plus à leur présence. A vrai dire, il n’avait pas vraiment le choix, son fils avait gagné le droit de s’exprimer devant le clan. Restait à savoir s’ils parviendraient à tromper la méfiance ambiante pour parvenir à leurs fins et obtenir des informations intéressantes sur les disparitions. Même si Alyria n’en doutait pas. Ensemble, ils étaient capables de tout.

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Pendant la grande majorité de sa vie Lorn n’avait pas été homme à partager ses pensées avec quiconque, garder les émanations de son esprit comme partie intégrante de ce qui faisait son essence, gardant son esprit clos comme le plus secret de ses jardins. Bien sûr son maître le connaissait suffisamment pour deviner ce qu’il se passait dans sa tête rien que par ses imperceptibles mimiques ou ses réactions physiques mais il s’agissait plus d’analyse que de connexion mentale, sa nature d’épicanthix le protégeait au moins sur ce point-là. Mais était-ce une bonne chose que de tout garder pour lui-même, le bon comme le mauvais ? Il savait que faire part de ses doutes à ses camarades et ses maîtres était la première étape nécessaire à la résolution de ces incertitudes, on le lui avait suffisamment répété, malheureusement sa formation avait été polluée par les restes de son bref passé guerrier qui l’empêchaient d’avancer et de sauter le pas nécessaire.
Son maître avait essayé pendant plusieurs années de la forcer à s’ouvrir aux autres, de le forcer à exprimer ses pensées puisque personne n’était en mesure de pénétrer dans son esprit, mais ce fut un exercice qui connut un échec assez relatif. Certains pourraient argumenter que Lorn était connu pour être un maître d’armes discipliné et taciturne, deux traits inhérents à sa profession, mais d’autres connaissaient Lorn pour sa brutale franchise qui en mettait plus d’un mal à l’aise. Alors qui pouvait bien avoir raison ? Était-il simplement froid ? Non en vérité il avait choisi de garder ses pensées pour lui-même car elles n’appartenaient qu’à lui, mais également car il savait que beaucoup n’acceptaient pas facilement son honnêteté dans son plus simple appareil, sans filtre d’aucune sorte. Mais parfois il venait un temps où il devait sortir de son mutisme, lors d’une opération conjointe ou d’un entraînement par exemple, et pour son plus grand déplaisir ce genre de moment était de plus en plus fréquent depuis quelques années.

Mais si son esprit était hermétiquement fermé pour des raisons psychologiques et génétiques, cela n’empêcha pas le jeune homme de se rapprocher de quelques autres jedis au cours de sa formation et de raffermir ce lien même une fois sa formation terminée. Son esprit était peut-être clos mais la Force diffusait tout de même ses intentions et ses émotions à tous ceux suffisamment réceptifs pour y faire attention, la Force lui permettait de s’ouvrir aux autres d’une certaine façon et cela sans qu’il n’ait à faire le moindre effort, n’était-ce pas ce qu’il désirait ? Non, en vérité il n’avait jamais voulu s’ouvrir aux autres mais il était conscient de cette nécessité au sein de la voie qui était la sienne, il n’avait pas choisi la voie de la sentinelle mais celle de l’enseignement et de protecteur, il ne pouvait donc pas se permettre de s’isoler dans un coin en espérant qu’on le laisse tranquille : cela n’arriverait pas.
Au cours de sa formation il s’était donc rapproché de plusieurs rares jedis et bien vite une demoiselle à la crinière éclatante sortit du lot sans qu’il ne sache pourquoi, elle dégageait une énergie vivifiante et son style de combat n’était en rien comparable à celui du jeune épicanthix ce qui piqua la curiosité du principal concerné. Il n’était pas de ceux cherchant à se mesurer à leurs camarades pour prouver leur force et leurs progrès, la seule personne qu’il cherchait à surpasser était lui-même, aussi ne prit-il que rarement part aux duels compétitifs ayant souvent lieu entre jeunes étudiants. Mais c’était bien hors-monde qu’il était le plus à l’aise, loin de la sécurité des murs du Temple, en territoire inconnu, une épée Damoclès toujours au-dessus de lui sous la forme d’une bête sauvage ou d’une menace inattendue.
C’était face au danger que le jeune homme arrivait à en apprendre davantage sur lui-même et sur la personne à ses côtés et, dans ce sens, il en apprit plus sur sa camarade que sur n’importe quel autre jedi au fil des ans passés en mission. Il ne s’agissait pas de mots ou d’émotions mais plus de sensations, d’instinct. Comment pouvait-il vraiment expliquer cela ? Lorsque le danger survenait et que les éblouissantes lames étaient dégainées un lien imperceptible se formait à travers la Force, chaque combattant était lié d’une manière ou d’une autre afin de pouvoir sentir les mouvements de l’autre et agir en conséquence pour ne pas se gêner mutuellement.
Un tel lien était difficile à créer et encore plus difficile à raffermir mais c’était possible, à force de temps et d’expérience, aussi à l’aune de leur promotion au rang de chevaliers les deux jeunes esprits avaient déjà atteint une communion rarement atteinte par deux étudiants. Leur coordination mettrait encore plusieurs années à se perfectionner pour atteindre leur niveau actuel, c’était certain, mais cette connexion fut l’une des premières pierres sur la route les menace à leur relation d’aujourd’hui.

Lorn n’avait jamais considéré le fait de donner son cœur à quelqu’un comme une option viable, tout discipliné et renfermé qu’il était il ne se voyait pas devenir dépendant de quelqu’un d’autre sur le plan émotionnel, il lui fallut donc plusieurs années et énormément d’introspection pour se rendre compte qu’une telle affection n’allait pas nécessairement signifier son trépas ou son affaiblissement, mais ce ne fut que le jour où sa camarade perdit sa main qu’il se rendit compte qu’il n’y avait pas que du respect et de la camaraderie dans son cœur lorsqu’il était avec Alyria. Lorn avait toujours eu la plus pure foi en ses capacités sans laisser le doute s’insinuer en lui et c’était cette certitude qui l’avait aveuglé pendant tout ce temps, qui l’avait interdit d’envisager l’éventualité de sentiments assez mal perçus par le credo des jedis.

Mais c’était fait, il avait laissé le serpent de la crainte et de la passion enserrer son cœur suffisamment longtemps pour que cela en devienne gênant voire même douloureux, il avait gardé ces choses-là pour lui pendant trop longtemps et il décida enfin de s’ouvrir. La réaction de la demoiselle ne fut pas immédiatement positive mais les voir ensemble aujourd’hui était le meilleur des résumés.
Avec un peu de recul le jeune homme se rendait aujourd’hui compte qu’il n’avait jamais eu besoin de son égal féminin, il n’avait jamais eu besoin de quelqu’un lui ressemblant trait pour trait mais plutôt une âme capable de combler ses creux tout en cherchant en lui de quoi boucher les siens. La similarité n’était pas gage de réussite dans une relation, la complémentarité l’était bien plus, il le comprenait enfin après plusieurs années.

Il était la pierre quand elle était le vent, il était le pilier qui soutenait le monde quand elle était la brise qui caressait la pierre et emportait les doutes au loin, s’il était la certitude qui s’autorisait le doute alors elle était le doute menant à la certitude, s’il était la ligne droite elle était la route sinueuse. Ils étaient deux faces d’une même pièce, deux regards braqués dans la même direction mais depuis des perspectives différentes, Lorn le comprit enfin en ce moment de paix où il sentait son aimée lovée entre ses bras.
À chaque fois qu’il était près d’elle il sentait son cœur se réchauffer et son esprit s’apaiser, à chaque fois qu’il était près d’elle il ressentait une plénitude et un bien-être que même le plus monstrueux des champs de bataille ne serait jamais capable de lui fournir, aussi voulut-il faire durer ce moment aussi longtemps que possible. Alors que leurs lèvres se détachées de énièmes fois après un baiser passionné ce fut au tour de la demoiselle de faire part d’une nouvelle certitude qui s’emparait d’elle : enfin elle se sentait prête à affronter le Conseil Jedi en leur annonçant la nouvelle.

S’autorisant un petit sourire à mi-chemin entre le soulagement et le bonheur sous sa forme la plus pure, content de voir que sa compagne se sentait désormais aussi prête qu’il l’avait toujours été, il se permit de rebondir sur cette annonce avec :

« Tu crois ou tu es sure ? »

Ce n’était là qu’une simple petite boutade, le jeune homme savait que sa compagne réfléchissait suffisamment à tout pour ne pas évoquer cette éventualité sans y avoir très longuement pensé. Il ne faisait là que jouer sur les mots car il sentait sa muse suffisamment apaisée pour que ses mots ne soient pas teintés du moindre doute.
Puis vint ensuite un autre sujet, la demoiselle semblait désormais prête à prendre un nouveau padawan sous son aile et Lorn ne put nier la légère pointe de jalousie qui commença à gratter l’arrière de son cerveau. Pourquoi était-il le seul qui ne semblait pas prêt à prendre en charge toute la formation d’un de ses jeunes étudiants ? N’était-il bon qu’à manier le sabre laser à longueur de journée ou était-ce sa personnalité qui démotivait la plupart des candidats potentiels ? Sentant ce sujet difficile pointer le bout de son nez, il le balaya aussitôt de son esprit car il savait qu’il ne pourrait pas trouver une réponse ici, il était apprécié pour son efficacité mais par pour sa personne, cela au moins il le savait mais ne s’était jamais douté que cela pourrait être un tel frein à l’acquisition d’un padawan.
Alors que le nom de l’heureuse élue fut balancé dans la conversation le jeune maître fut surpris par ses propres pensées, quelques années plus tôt il ne cessait de répéter à sa camarade qu’il ne se sentait pas prêt à prendre un padawan et aujourd’hui il se minait le moral car il n’arrivait pas à en avoir un ? Il avait bien eu quelques élèves qui sortaient du lot mais aucun ne fut assez constant pour rester sous sa coupe assez longtemps, mais il ne manqua pas d’être surpris par le changement qui s’était opéré dans son esprit au fil du temps. Se sentait-il finalement prêt à en avoir un ? Comme le lui avait dit sa camarade il ne pourrait jamais se sentir vraiment prêt avant d’avoir essayé, ce n’était qu’une perte de temps qu’autoriser la jalousie à se faire une place sans son esprit.

Elle voulait avouer leur relation à sa padawan ? Lorn comprenait le désir de partir sur des bases saines sans cacher quoi que ce soit à l’heureuse élue mais il ne fit aucune remarque pour autant, se contenta d’acquiescer d’un petit mouvement de la date sans en rajouter. À quoi bon ? La décision ne lui revenait pas, c’était celle d’Alyria et il n’avait pas à lui interdire de dévoiler cela à sa future élève alors qu’il voulait le dire au Conseil Jedi depuis quelques temps déjà. Ce serait hypocrite de sa part que de faire la moindre remarque à ce sujet, aussi préféra-t-il se taire jusqu’à ce qu’une tierce personne vienne briser leur moment d’intimité.

Se séparant de sa camarade non sans regret, il se leva de ce banc et rattrapa sa veste posée à côté de lui avant de pénétrer dans le bâtiment. Guidé par le jeune épicanthix, le duo fut mené dans une salle différente de la précédente qui se présentait comme une salle de réunion assez sobre, une salle aux dimensions assez réduite et composée d’une grande table et de quelques chaises dont le confort ne semblait pas la caractéristique principale.
Le grand patron était en bout de table, toisant le duo du regard avec une expression faciale figée dans un rictus d’agacement faisant écho à son égo froissé. Il était entouré de certains autres hommes un peu moins âgés que lui, une sorte de comité d’accueil improvisé et tous restèrent silencieux jusqu’à ce que les jedis décident de s’assoir à l’autre bout de la table.

L’espace d’un instant Lorn hésita à tourner son regard vers sa compagne pour la laisser parler mais il n’en fit rien, gageant quelle ne serait pas contre le fait qu’il ouvre le dialogue une fois de plus. Un premier homme, assis à quelques mètres sur la droite, ouvrit le bal en leur demandant s’ils étaient bien là au sujet des disparitions notées dans plusieurs communautés, ce que Lorn confirma d’un simple hochement de tête. Même s’ils n’étaient pas une très grande communauté ils avaient eux-mêmes noté la disparition de 4 de leurs jeunes éléments au cours des deux derniers mois mais ils ne s’étaient pas inquiété plus que cela, gageant qu’il s’agissait de jeunes en mal d’aventure qui s’étaient motivés les uns les autres pour partir ensemble. Ils avaient disparu deux par deux mais personne n’avait cherché à faire le rapprochement, bien sûr les parents avaient fait remonter l’information mais les recherches avaient cessé aussi rapidement qu’elles avaient débuté.

Lorn était-il surpris ? Non, simplement déçu de voir qu’une société guerrière avait si peu d’égard pour ses propres membres, sur ce point-là il était plutôt content de ne pas avoir eu à baigner dans cette culture pendant bien longtemps. Ignorant l’hôte en bout de table et les froids regards qu’il lui lança, il reporta son attention sur celui qui avait ouvert la conversation avant de lui dire :

« Dans ce cas j’aimerai m’entretenir avec les amis proches des disparus. »

Son interlocuteur fut surpris et lui demanda s’il ne voulait pas s’entretenir avec la famille avant, ce à quoi il répondit :

« Les amis d’abord. Jusqu’à présent les disparus n’ont jamais prévenu leurs familles de leur départ, mais peut-être se sont-ils confiés à leurs plus proches amis avant de partir. »

Alors que son interlocuteur acquiesçait en signe d’approbation ou de simple acceptation, la voix rude du maître de maison se fit entendre :


« Qu’en sais-tu ? »

Ah enfin il se manifestait, pendant un instant le maître crut que son hôte allait rester silencieux tout le long de cette réunion mais c’était illusoire de penser ainsi, alors qu’il n’avait pu le battre avec ses poings le chef de clan décidait de secouer le jedi avec la seule chose qui lui restait : les mots.

« Rien, justement. Nous avons quelques indices pour le moment mais ce n’est pas suffisant, et puisque vous n’avez pas mené d’enquête pour connaître la cause de la disparition de ces quatre jeunes nous allons devoir fouiller nous-même. »

Mettant rapidement les points sur les i, espérant que cela suffirait à faire comprendre qu’il n’était pas là pour arrondir les angles, le maître d’armes se tourna vers celui qui avait ouvert la conversation quelques secondes plus tôt.

« À moins que vous ayez récupéré quelques informations qui pourraient nous aider.»

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« Je crois que j’en suis sûre. »

Ainsi Alyria venait de sceller, non sans une une pointe d’humour bienvenue, cette conversation. Elle ne ressentait pas le besoin d’en dire plus : en un sens, tout avait déjà été abordé, y compris ce à quoi elle n’avait de prime abord pas pensé, ce dont elle n’avait jamais osé parler. Quant à son amant, il partageait son avis puisqu’il acquiesça simplement à ses dernières paroles, se contentant de savourer l’instant présent, aussi elle décida d’en faire de même, jusqu’à ce qu’ils soient interrompus dans leur douce étreinte par cette jeune voix qui les rappelait prudemment à la raison. La suite de leur mission les attendait, et la jedi espérait ardemment que cette fois, l’entêté chef de clan ne s’opposerait plus à leur présence.

Manifestement, le vieil homme était réticent, mais acceptait tout de même de les laisser s’exprimer … Non sans mal, au vu de la pique qu’il lança sans retenue aucune contre son propre fils, ce dernier n’hésitant pas à le remettre en place sèchement, quoique sans excès. Clairement, ils n’étaient toujours pas les bienvenus, et on leur faisait clairement sentir qu’ils n’étaient que tolérés, qu’ils avaient gagné la possibilité d’être entendus, sans forcément être écoutés. Néanmoins, au plus profond d’elle-même, la trentenaire était persuadée que la démonstration avait fait son œuvre sur un peuple respectant à ce point la force brute, et les plus jeunes lorgnaient avec intérêt le tombeur de leur meneur, avides probablement de se mesurer à leur tour à lui et incapables d’oser un réel défi, conscients tous que là n’était pas le moment et que leur chef n’apprécierait guère cet excès de zèle. Quant aux plus âgés, ils se contentaient de les toiser sans forcément d’animosité, simplement avec l’air tranquille et sûr de ceux qui ne doutent pas et savent qu’au moindre faux pas, ils avanceront leurs pions avec célérité. Bref, le duo marchait sur des œufs, et mieux valaient qu’ils ne s’attardent pas trop.

Peu désireux a priori de leur faciliter la tâcher, le leader du clan Vocklan secoua la tête à la question de Lorn et se contenta de se pencher vers un de ces lieutenants en marmonnant quelques mots qu’Alyria ne perçut pas. Le sbire sortit en quelques enjambées, porté par des cuisses puissantes emmaillotées dans un habit cérémoniel en cuir d’elle ne savait trop quel animal local, apparemment. Plusieurs minutes s’écoulèrent dans un silence pesant, durant lequel personne ne parla, aucun des présents ne désirant rompre la quiétude précaire des lieux par un mot malencontreux. On s’observait, on se jaugeait … Ou plus exactement, les hôtes scrutaient leurs curieux invités qui ne bougeaient pas d’un pouce. Au petit jeu de la patience, difficile de battre un jedi.

Finalement, l’envoyé reparut avec un premier individu, un mâle d’environ dix-huit ans, aux traits encore un peu ronds mais aux muscles saillants et bien découpés sur son torse nu, qui s’avança en roulant légèrement des mécaniques, tout en s’affaissant légèrement quand on le positionna en face des deux jedis aux yeux perçants, et que ces derniers commencèrent à lui poser des questions, interrompus ça et là par le chef pour une intervention plus ou moins acerbe. Au bout d’un quart d’heure, Alyria fit signe qu’elle en avait entendu : clairement, le garçon ne savait rien, et disait la vérité. Ses amis avaient disparu sans laisser de traces, et s’il avait remarqué qu’ils étaient plus concentrés sur leur entraînement physique les semaines précédentes, ce n’était pas particulièrement nouveau ou digne de susciter la suspicion dans un tel environnement. Puis une jeune fille fit son entrée, un peu plus jeune que le précédent, elle n’avait manifestement pas fini sa croissance puisqu’elle était légèrement plus petite que la maîtresse d’armes, ce qui, jusqu’à présent, était un fait plutôt rare. Elle non plus n’avait pas grand-chose à ajouter, si ce n’était que ses camarades paraissaient plutôt excités les jours précédents leur départ. Apparemment, la disparition avait été volontaire et planifiée. Ils se rendaient quelque part … Pour quelque chose qui ne semblait pas les rebuter, au contraire. Cependant, ne pas donner de nouvelles depuis aussi longtemps était étrange … Ce qui ne pouvait signifier qu’une seule chose …

« Les événements n’ont pas dû se passer comme ils l’avaient prévu … »

« Comment ça ? »

« Apparemment, vos jeunes sont partis pour faire quelque chose qui semblait leur plaire. On a donc dû les appâter. Et s’ils n’ont prévenu personne … C’était sans doute parce qu’ils ne pensaient pas en avoir besoin. Du moins, c’est une possibilité que j’envisage de plus en plus sérieusement. »

Elle n’eut pas de réponse, mais le front du vieux chef se renfrogna, comme s’il réfléchissait sérieusement à cette hypothèse sans le dire clairement. Sur ces entrefaites, un troisième témoin fit son entrée, cette fois une jeune femme dans la force de l’âge, qu’on leur présenta comme la fiancée d’un des disparus. Immédiatement, Alyria sentit chez la guerrière une force peu commune. Son visage n’exprimait qu’une forme de défi farouche, comme si elle savait parfaitement ce qu’elle faisait là. Ses premières répliques furent très semblables à celles des autres. Pourtant … La Force tournoyait autour d’elle comme s’il manquait une clef du puzzle. Comme si …

« Je crois que vous ne nous dites pas tout. »

« Vous m’accusez de mentir ? Vous remettez mon honneur en doute ? »

L’accusation avait fusé, comme la jedi s’y était attendue. Elle savait pertinnemment qu’elle était en terrain glissant, car les épicanthix paraissaient un peuple chatouilleux sur les notions d’honneur, comme la plupart des populations qui conservaient des traditions claniques. Aussi, sans se départir de son calme, la maîtresse d’armes répliqua placidement :

« Je pense plutôt que par honneur, vous vous empêcher de dire quelque chose que vous estimez … malavisé. Ou disons, susceptible de porter atteinte à la réputation d’un être qui vous est cher. »

« Chef, cette étrangère m’insulte ouvertement en remettant ma parole en doute ! Je réclame le droit de me défendre ! »

Le vieillard ne dit rien, mais Alyria sentit que la tentation de laisser la jeune femme régler son différent par la force le titillait. Cependant, un vénérable à sa gauche, sans doute l’ancien du clan, à en témoigner par sa barbe fleurie par les ans, souffla d’une voix rendue chevrotante :

« Seuls ceux qui ne sont pas en accord avec leur conscience réagissent sans se défendre véritablement mon enfant. La jedi n’a fait qu’émettre un doute, et vous me paraissez ne pas vouloir vous défendre autrement que par des invectives. »

Le chef comme la jeune femme se rembrunirent, moment qu’Alyria choisit pour déclarer :

« En tant que jedi, je peux savoir quand quelque chose ne va pas. Dites-vous que quoi qu’il ait pu se passer, rien de ce qu’a fait votre fiancé ou ses amis n’était répréhensible en soi … Et qu’il n’est pas déshonorant de se faire piéger par des êtres vils et rusés. Cela prouve seulement sa vertu d’âme, que de ne pas penser au pire. »

Un long silence suivit cette déclaration, puis finalement, comme soulagée d’un poids, l’épicanthix se décida à parler :

« Lok’yir et ses amis ont entendu lors de leur dernier passage à la capitale que quelqu’un organisait des combats à main nu pour sélection son futur équipage de mercenaire. C’est tout ce que je sais, il m’en a parlé brièvement un soir, et puis il n’a plus abordé le sujet. Mais je pense qu’ils ont tous décidé de tenter leur chance … »

« … En se disant que s’ils étaient pris, ils n’auraient qu’à rentrer mettre leurs familles au courant. »

Le mystère se dénouait enfin … Restait à décider de la marche à suivre. Partir immédiatement ? Ou permettre à Lorn de rester un peu plus longtemps avec son clan d’origine, de renouer avec d’autres membres de sa famille peut-être plus accueillants ? Alyria préférait le laisser décider, non sans remercier la jeune femme et les autres présents pour leur aide précieuse.
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Si le jeune homme avait voulu rejoindre un corps de métiers où il serait acclamé et accueilli à bras ouverts partout où il passerait il n'aurait clairement pas choisi de développer son affinité avec la Force pour devenir le défenseur de l'équilibre qu'il était aujourd'hui. Les jedis étaient appelés lorsqu'un point de vue plus détaché était nécessaire et que des questions différentes avaient besoin d'être posées, des questions que beaucoup n'appréciaient pas forcément mais qui n'en restaient pas moins nécessaires comme celles que le duo était en train de poser au petit comité devant eux. Si Lorn comprenait aisément qu'une communauté soudée pouvait voir d'un assez mauvais œil l'ingérence d'une force externe dans leurs affaires, il avait désormais suffisamment de recul pour passer outre les considérations des uns et des autres pour se concentrer sur sa mission. Ces hommes n'aimaient pas être interrogés de la sorte ? C'était presque dommage que le colosse n'en n'ait absolument rien à cirer, c'était presque dommage qu'il n'en n'ait rien à faire que ce soit la planète où il aurait pu vivre si les choses avaient été différentes, c'était presque dommage que ce retour aux sources ne lui fasse ni chaud ni froid.
Conscient que son arrivée ne s'était pas faite sans heurts et qu'elle provoquerait bon nombre de bruits de couloirs, conscient également qu'il ne pouvait attendre de son géniteur que la plus petite coopération possible sans pouvoir en exiger davantage, Lorn se présenta donc dans la salle et commença par demander à voir les amis des disparus mais les entretiens qui suivirent ne lui apprirent malheureusement rien de bien neuf. Le maître d'armes avait espéré que ces disparus se soient confiés à leurs amis mais de toute évidence ils ne l'avaient pas fait, ils étaient partis l'esprit tranquille sans penser avoir besoin de prévenir qui que ce soit ce qui signifiait que les choses ne s'étaient peut-être pas passées comme prévues. Laissant à sa camarade le soin de mener l'entretien suivant, le maître d'armes observa la demoiselle interrogée et repéra également que la Force tourbillonnait autour d'elle sans ressentir pour autant le besoin de le faire remarquer. Pourquoi ? Parce que sa compagne avait une compréhension de la Force sensiblement aussi poussée que la sienne, il ne doutait donc pas qu'elle avait également remarqué cette turbulence qu'elle ne tarda d'ailleurs pas à exploiter.

Alors ainsi ils avaient été attirés par une petite compétition pour gagner leur place dans un groupe de mercenaires ? Ce n'était guère étonnant que pareille façon de faire attire les jeunes esprits en mal de prouver et se prouver quelque chose, peut-être serait-il également tombé dans le panneau s'ils avaient grandi comme eux. Que faire désormais ? Retourner en ville, tendre l'oreille en espérant capter l'organisation d'un autre de ces combats et improviser à partir de là.
Alors que le maître d'armes signifiait à l'assistance qu'ils avaient tout ce dont ils avaient besoin, supposant que personne ne connaissait vraiment le lieu où se déroulaient ces combats, le colosse se pencha vers la demoiselle à la crinière de feu pour lui murmurer :

« Et si je me faisais passer pour un candidat potentiel , si on tombe sur un recruteur ? »

Il y avait des chances que son visage soit reconnu sur cette planète, une toute petite chance mais le visage de son aimée était encore plus connu que le sien autant dire qu'il n'avait guère le choix. Après tout ils pouvaient utiliser l'option la plus directe et prendre le risque que le recruteur leur glisse entre les doigts en ayant vent de leur arrivée, ou ils pouvaient se montrer un poil subtil et essayer de se fondre dans la masse ce qui ne devraient pas être bien compliqué pour le roc.
Se levant de son siège et quittant la sécurité de cette bâtisse, Lorn inspira profondément tout en se tournant dans la direction où se trouvait leur véhicule. Était-ce la dernière ligne droite qui se profilait à l'horizon ? La fin de cette énième mission ? Content pouvoir enfin en terminer avec ce retour aux sources dont il se serait bien passé, sentant sa moitié non loin de lui, Lorn ne fit que quelques pas vers son véhicule avant qu'une voix familière ne retentisse à sa droite.

« Et tu comptais t'en aller comme ça ? Sans rien dire ? »

Se figeant immédiatement sur place en laissant une expression indéchiffrable prendre vie sur son visage, tentant en vain de cacher sa surprise et son inconfort qui se diffusaient à travers la Force comme du sang dilué dans de l'eau, Lorn ne put s'empêcher de déglutir avant de trouver la force de se retourner pour faire face à son interlocutrice. Elle était là, à quelques pas de lui, toute fine selon les critères de son peuple et pourtant ses prunelles azurs reflétaient une sagesse et une force de caractère rarement vues chez une autochtone. Où avait-il déjà vu ses yeux ? Dans le miroir, chaque matin.

Il était là face à elle mais il ne savait que dire, il était face à celle à qui il devait tout et pourtant il restait sans voix. Il avait bataillé avec les plus puissants siths, combattants de féroces bêtes sur les plus lointaines planètes et la seule présence de cette femme le laissant sans voix, lui d'habitude si prompt aux remarques cinglantes. Pourquoi ? Pourquoi qu'il lui devait tout, vraiment tout et que, à l'inverse de son géniteur, dans ses plus lointains souvenirs il n'avait jamais rien ressenti d'autre que le plus pur des amours pour cette femme.

L'amour qui lie une mère à son fils.

Le colosse fut fidèle à son titre de roc et ne bougea pas d'un pouce lorsque cette femme s'approcha de lui, pas à pas. Elle avait beau être encore très belle le passage du temps sur son visage était aisément visible, mais des deux ce n'était pas elle qui avait le plus changé depuis leur dernière rencontre. Laissant son visage s'illuminer d'un franc sourire face au mutisme de son enfant, Shantia Vocklan s'arrête à deux mètres du colosse avant de lever les yeux vers lui sans rien dire. Elle passa une bonne minute à plonger ses yeux azurs dans les siens sans mot dire, comme si un simple regard était suffisant pour lui faire comprendre quel type d'homme il était devenu depuis leur dernière rencontre. Souriant en voyant la force qui pulsait derrière les prunelles du maître d'armes, cette femme mur reporta ensuite son attention vers la demoiselle à la crinière de feu.

« Voici...»


« Je sais déjà qui c'est, ces choses-là se sentent. »

Elle savait déjà sans qu'on ne lui ait rien dit ? Lorn ne savait pas s'il devait être perplexe ou soulagé de ne pas avoir à rentrer dans ces explications gênantes, aussi laissa t-il Shantia se rapprocha de la demoiselle. Ni une ni deux, avec la plus grande familiarité et bienveillance du monde, elle posa ses douces et chaudes mains sur celles de la maîtresse d'armes, avant de lui demander :

« Viens un peu par ici que je te regarde. Bon, même si ses manières laissent un peu à désirer je peux au moins reconnaître qu'il a bon goût. »

Si les femmes étaient généralement assez proches dans ce genre de communauté, se serrant les coudes jour après jour, Lorn ne pouvait pas dire qu'il n'était pas gêné par cette situation dans laquelle il ne se sentait pas d'intervenir. Que pouvait-il dire ou faire ? Les deux femmes faisaient connaissance et il allait devoir rester à l'écart.
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« Tu fais peut-être un peu trop âgé pour que l’artifice soit parfait. Encore qu’avec les vêtements adéquats et quelques artifices … »

Alyria réfléchissait à toute vitesse, l’expression grave et concentrée, alors que les jedis venaient enfin de découvrir le fin mot de l’histoire et pouvaient envisager de passer à une nouvelle phase de leur enquête. Techniquement, la solution proposée par Lorn était idéale : épicanthix, il pouvait brouiller les pistes un moment et tromper les recruteurs qui ne le reconnaîtraient peut-être pas. Au moins son visage était moins connu que le sien. Il y avait son nom certes, mais cela se résoudrait facilement par l’emploi d’un pseudonyme avec les complicités locales au cas où les malfrats se révèlent du coin. Il ne fallait tout de même pas se faire avoir par une bête erreur comme sous-estimer leur connaissance des liens claniques locaux. Pour autant, le gardien était un trentenaire marqué par une vie de combat, aussi il fallait estimer avec prudence s’il pourrait passer pour un jeune assoiffé de gloire. D’emblée, la culture guerrière de Panatha fournissait un avantage certain : ses cicatrices seraient prises pour la marque d’un milicien au sang chaud, typiquement ce qu’il fallait dans ce genre de recrutement. Et puis … Malgré son manque d’objectivité cruel en la matière, la maîtresse d’armes était à peu près certaine de ne pas commettre d’impair en affirmant que le colosse était admirablement bien conservé, sans signe trop distinctif d’âge. A vrai dire, elle se faisait souvent l’amère réflexion que d’eux deux, c’était bel et bien lui qui avait touché du doigt la fontaine de jouvence.

Etrangement, jusqu’à ce moment, elle n’y avait jamais réellement pensé, mais au milieu de son peuple, la réalisation l’avait heurtée avec l’effet d’une bombe : elle vieillissait, et plus vite que Lorn, le métabolisme étant plus lent que celui des hapiens et des echanis. A vrai dire, en raison de ce métissage peu ordinaire, Alyria ignorait quelle était son espérance de vie standard, non influencée par la Force, mais l’estimait approximativement à la durée de vie humaine ordinaire. Dans tous les cas, elle s’était rendue à une évidence qui ne l’avait jamais effleurée auparavant : malgré la Force, si la guerre et les batailles les épargnaient … Elle mourrait vraisemblablement avant lui. Elle s’affadirait plus vite, et ce constat lui laissait une impression étrange d’amertume, en même temps qu’un sentiment aussi intense que vertigineux : ainsi, c’était vrai, elle s’imaginait désormais passer sa vie auprès d’une personne, avancer sur le chemin de la vie jusqu’à son ultime délitement. Certes, le sous-entendu avait toujours été présent dès qu’ils s’étaient engagés l’un envers l’autre … Sauf qu’il prenait là une dimension nouvelle, puissante, profonde, qui transcendait même son destin de jedi. Elle voulait vivre et mourir comme jedi, mais aussi comme compagne de Lorn. Cette réalisation raffermissait encore davantage sa volonté de parler au plus vite au Conseil. Il n’était plus possible de vivre ainsi, pas quand leurs existences étaient à ce point imbriquées, liées l’une à l’autre.

« Je te suivrais avec un Voile de Force de loin, de toute manière. Ainsi, je m’introduirais un peu partout, si besoin est. »

Il fallait qu’elle se concentre à tout prix sur son devoir, quand bien même cette planète n’en finissait plus de charrier des événements qui la forçaient à réfléchir sur son avenir, à s’appesantir sur sa relation avec l’épicanthix comme rarement elle l’avait fait depuis sa retraite sur Dantooine, depuis ce moment où elle avait réalisé que la profondeur des sentiments qu’elle éprouvait pour son meilleur ami n’étaient pas uniquement platoniques, qu’il y avait un espace qu’elle avait volontairement ignoré pour faire grandir quelque chose de tout à fait différent, d’infiniment plus sensible et douloureux. Cette méditation, elle l’avait accomplie dans la douleur. Aujourd’hui, elle avançait dans la sérénité, sûre de son choix, ayant accepté cette part de son destin, l’ayant définitivement embrassé comme faisant partie intégrante de son être. Panatha était l’ultime délivrance, la fin d’un voyage et le début d’un autre, celui de l’affirmation après la découverte et la consolidation.

Pour autant, décidément, la Force paraissait vouloir jouer avec ses bonnes intentions et détruire méthodiquement toutes ses tentatives pour cesser de revenir sur ses questionnements intimes. Silencieuse, à une distance respectueuse, une fois qu’ils furent sortis du bâtiment, la trentenaire vit une femme d’un certain âge avec une dignité grave s’avancer vers eux, et deux prunelles cyans si familières se posèrent sur eux. Ce regard, elle l’aurait reconnu entre mille, même sans le connaître, car elle aimait s’y plonger dès qu’elle le pouvait. Il était le charme discret des Vocklan, leur assurance précieuse. Elle adorait les lueurs qui y dansaient, l’amour qui s’y reflétaient. Ces yeux, c’étaient ceux de Lorn, et il n’y avait sans doute qu’une personne au monde à même d’arborer les mêmes saphirs délicats : sa mère. Les premiers mots que l’arrivante prononça achevèrent de convaincre la gardienne qu’elle avait vu juste.

Que devait-elle faire ? Se présenter ? Laisser Lorn le faire ? Ne rien dire ? La prudence, et une certaine lâcheté momentanée la convainquirent de choisir la dernière option et de laisser autant que possible à la mère et au fils un peu d’intimité. Alyria ne savait pas comment réagir face à une famille, du moins autrement qu’avec méfiance et détachement, et ce n’était pas uniquement dû à sa formation de jedi. A vrai dire, cela n’avait même pas grand-chose à voir, contrairement aux idées reçues. Si la Main Brisée n’avait pas le goût pour les effusions familiales, c’était tout simplement parce que propre mère ne le lui avait jamais transmis. Bambin, elle avait bénéficié des attentions de son père … Mais dès son départ définitif pour Hapès, jamais sa mère n’avait eu les mêmes gestes. Elle était son héritière avant d’être sa fille. Et les deux femmes n’étaient jamais parvenues à s’entendre. A vrai dire, à l’âge adulte, leurs contacts s’étaient limités à deux échanges d’holomails : le premier pour annoncer la mort de son paternel, le second pour la féliciter de son accession à la Chancellerie. Autant dire que le bilan était maigre … et peu flatteur. Alors, en connaissant de surcroît le passif de Lorn avec sa famille, la maîtresse d’armes se trouvait finalement dans l’une des rares situations où elle ne savait que faire et se contenta donc d’observer la scène, aussi touchée que désemparée. La suite n’allait pas manquer d’achever de faire atteindre à sa gêne des sommets.

Au vu du sixième sens de la matrone Vocklan, Alyria ne put s’empêcher de penser nerveusement que la dame méritait un siège au Conseil jedi … En tout cas, elle était plus perspicace en trente secondes que l’ensemble du Temple en deux ans. Il y avait de quoi se poser des questions sur la réputation d’excellence des maîtres … Ou alors sur leur capacité à faire comme si de rien n’était, perspective qui aurait pu, en d’autres circonstances, lui arracher une grimace agacée à l’idée qu’ils n’aient pas été aussi discrets qu’ils l’auraient dû. Quoi qu’il en soit, la formidable capacité à mettre les pieds dans le plat de Shantia, qui faisait penser à la trentenaire que clairement, Lorn avait hérité autre chose d’elle que ses yeux, leur épargnait au moins un mensonge désagréable. Soit. Elle avait résolu d’être honnête envers leur relation. Autant commencer dès à présent, non ?

Néanmoins, alors qu’elle s’apprêtait à se présenter en bonne et due forme, sa vis-à-vis fit un geste qui manqua la désarçonner complètement : elle mit ses mains sur celles d’Alyria, touchant sans le vouloir son point faible, réveillé la veille et toujours douloureux. Instinctivement, et sans le vouloir, consciente que cela risquait d’être mal interprété mais ne pouvant lutter contre cette réaction épidermique de son corps, la jedi se raidit, et il lui fallut s’ouvrir discrètement à la Force pour retrouver un semblant de sérénité, avant de balbutier un peu maladroitement et bien trop cérémonieusement, la nervosité accentuant son pédantisme ordinaire :

« C’est un honneur pour moi de vous rencontrer … Madame. Je suis … »

Elle hésita. L’habitude aurait demandé qu’elle se présente par son titre jedi. Pour autant, curieusement, et pour la première fois de son existence, elle avait l’impression que ce n’était pas approprié, qu’il fallait … autre chose. Qu’elle dise qui elle était par la naissance, et non par la destinée et un talent inné. Alors, cette réalisation faite, elle sut ce qu’il convenait de dire, et compléta :

« Alyria Von, fille d’Endar Von, unique enfant de la matriarche Von d’Echania, et de Malya Helm, aînée de la dynastie des Helm d’Hapès. Maître jedi.»

Presque comme si elle avait toujours su cela, la trentenaire venait de décliner son identité à la manière clanique, en décrivant d’abord ses racines avant de donner son identité ordinaire. En fait, contrairement à ce qu’elle avait fait jusqu’à présent, Alyria venait de se présenter comme les épicanthix le faisait, en signe de respect autant que par volonté de montrer qu’elle n’était pas si différente, malgré des origines bigarrées et lointaines. Gentiment, elle ajouta, son regard tourné vers Lorn un instant avant de se rabattre sur son interlocutrice :

« Il s’est amélioré je crois, au niveau des manières. Et puis … Je crois qu’aller droit au but fait partie de son charme, vous ne trouvez pas ? »

Avant d’ajouter, presque en forme d’aveu :

« Soyez fière Madame. Votre fils est un homme d’exception, et un grand jedi. Sans doute infiniment meilleur que moi. Peu sont capables de tant de convictions dans l’exercice de notre devoir. »
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Jouer un rôle différent du sien était un tour de force qui demandait des années d'entraînement ainsi que, dans le meilleur des cas, une bonne dose de talent inné. Il fallait être capable de se créer une personnalité de A à Z et de s'y tenir de tel sorte quelle puisse être passée au crible sans risque par le plus pointilleux des tests, autant dire que cela demandait un très grand travail en amont ainsi que du sang-froid et une bonne dose d'improvisation. Mais quand il venait le temps pour un jedi de travailler sous couverture la tâche était bien plus ardue, cette tâche pouvait parfois le mener jusque dans le domaine de ses cousins corrompus par les ténèbres et, à ce moment-là, il devait contrôler ses faits et gestes tout autant que sa présence à travers le Force. C'était un travail très difficile que de contrôler et changer ce que diffusait sa présence à travers la Force, certains arrivaient même à disparaître totalement mais c'était un talent des plus rares.
Au départ l'idée de Lorn lui sembla particulièrement évidente, il se pensait tout à fait capable de jouer le rôle d'un jeune homme ayant soif d'aventure et d'action, mais malgré sa carrure taillée pour ce rôle il ne fallut que d'une remarque de la part de sa compagne pour le faire se sentir vieux. En effet il était désormais plus proche de la quarantaine que de la vingtaine et, si la longévité de sa race lui permettait de ne pas avoir pris une ride depuis qu'il avait quitté le rôle de padawan, son regard portait les marques d'un homme qui en avait bien trop vu pour avoir encore soif de nouveauté et de combats sanglants.

Parfois il avait ce regard aussi dur que la pierre et aussi inébranlable que la plus solide des montagnes, c'était le regard qu'il montrait en public pour se montrer digne de son titre de roc et de sa réputation de maître d'armes intransigeant et implacable. Mais ce n'était pas le seul regard qu'il avait, dans ses moments intimes il avait un regard plus apaisé et plus tendre envers sa compagne à la crinière de feu, un regard rempli de plus d'amour et d'affection qu'il ne pourrait porter à personne d'autre. Mais, en secret, il possédait un troisième regard qu'il ne gardait que pour lui-même, le regard que tous les soldats vétérans partageaient après avoir mis les pieds bien trop souvent sur un champ de bataille, un regard dans lequel se mêlait une fatigue et un petit côté désabusé, un regard à travers lequel les ravages de la guerre le fatiguaient plus qu'ils ne l'horrifiaient. S'était-il habitué à l'horreur, aux morts et au sang ? Oui, et il le regrettait.

Il avait acquis une expérience qui surpassait beaucoup des autres maîtres et, de ce fait, il ne pouvait prétendre efficacement passer pour un jeunot voulait se mettre au défi. Une tenue négligée suffirait-elle à donner le change ? Il espérait que oui, mais savoir que sa compagne serait non loin de lui était suffisant pour lui procurer le réconfort dont il avait besoin pour ne pas douter.

Une fois le doute envolé pour quelques instants, le duo put sortir de la bâtisse jusqu'à ce qu'une personne étrangement familière ne vienne l'interpeller. Mis à part les fois où il se regardait dans un miroir c'était sans doute la première fois qu'il avait l'occasion d'observer ses prunelles qui, ici, reflétaient une patience et une douceur absente des siennes. Même après plus de deux décennies de séparation il aurait reconnu cette femme entre mille sans trop savoir comment, il le savait même avant que cette femme n'ouvre la bouche, il le savait depuis le moment où il l'avait sentie à travers la Force. Dans un coin de sa tête le jeune homme avait espéré éviter cette rencontre car il ne savait pas trop quoi dire, contrairement à son père il n'avait pas de ressentiment envers sa mère mais peut-être en avait-elle envers lui ? Après tout il lui avait retiré l'opportunité de voir grandir son second fils.

De ce qu'il avait pu apprendre la rencontre avec les parents était une étape lors de l'évolution d'une relation amoureuse car elle permettait de connaître ceux qui avaient apporté dans ce monde l'être aimé, c'était l'occasion de faire bonne impression et de se faire apprécier de sa belle famille. Si jusqu'à maintenant cette première rencontre avait été plus catastrophique qu'autre chose, grâce à l'amabilité légendaire des hommes de la famille Vocklan, la mère sembla désireuse de rattraper le coup en montrant une facette plus douce et calme.
Si le jeune homme eu toutes les difficultés du monde à masquer sa surprise face à son secret si facilement percé par sa génitrice, une partie de lui fut soulagée de ne pas devoir faire semblant face à quelqu'un d'autre, pour quelques instants il pouvait au moins laisser le mensonge et les faux-semblants de côté.

N'était-ce pas mieux ainsi ? Tout solide qu'il était ses épaules ne pouvaient pas supporter ce poids indéfiniment.
Ainsi, n'osant pas laisser son esprit voguer à travers la Force pour venir caresser celui de sa génitrice, le colosse resta en retrait en écoutant son aimée se présenter comme une personne et non pas une jedi ou une ancienne chancelière, ce qui changeait pas mal de d'habitude. Écoutant ce speech sans déporter son regard des prunelles de la demoiselle, la mère Vocklan se perdit un moment dans le regard de la demoiselle comme si elle y voyait quelque chose de plaiasnt ou de fascinant. Mais quoi ? Lorn ne pouvait le dire, son esprit restant en retrait jusqu'à ce que finalement ce fut à son tour de devenir le centre de la conversation.
Alyria, pensant bien faire, évoqua son évolution au niveau des bonnes manières ainsi que son caractère direct qui semblait faire partie de son charme, avant de demander son avis à la reine mère. Avant même que les mots furent sortis de la bouche de celle à qui il devait la vie le maître d'armes sut quelle serait sa réponse, sa mère ne l'avait que trop peu vu pour être capable d'émettre un avis cohérent et ses mots mirent en relief cette séparation.

« Difficile à dire. La dernière fois que tu ne nous sommes vus il n'était encore qu'un enfant, un enfant troublé. Mais au moins il a appris à sourire de nouveau, et je gage que tu y es pour quelque chose. Pour cela tu as toute ma gratitude, mon enfant.»

L'évocation du trouble de l'enfant provoqua un pic à l'arrière de la tête du colosse qui, serrant les dents pour faire fi de cette gênante douleur, chassant de son esprit le souvenir associé à ce trouble. Une arène, du sang, un corps sans vie : il n'avait pas besoin de demander pour deviner à quel trouble elle faisait référence.
Mal à l'aise face à des compliments qu'il trouvait démesurément exagérés, ne voyant pas en quoi il était exceptionnel mis à part exceptionnellement têtu, il s'abstint de tout commentaire et laissa la mère Vocklan répondre à sa place :

« Ce sont des paroles que tous les parents rêveraient d'entendre, savoir que leur enfant est devenu quelqu'un de bien. Je suis certaine que vos parents doivent être fiers de toi, également. »

En vérité le jeune homme ne connaissait qu'assez peu de choses sur le passé de sa famille et, comme cela avait pu être son tour aujourd'hui, il ne put s’empêcher de se demander si la demoiselle serait désireuse de passer faire un petit coucou à certains de ses parents si l'opportunité lui était donnée.
Si Shantia Vocklan était plus intéressée par la demoiselle que son fils avait dégotée plutôt que le fils en question, un silence s'installa progressivement et, comme si elle désirait mettre son fils encore plus mal à l'aise, Shantia brisa le silence avec une question qui concernant toutes les mères :

« Bon alors, plus sérieusement, quand est-ce que vous me faites des petits enfants ? »

Semblant presque s'étrangler face à la gêne qui monta subitement à sa gorge, n'ayant pas du tout prévu l'arrivée d'une telle question et n'ayant pas non plus préparé de réponse appropriée. Gêné comme un adolescent pouvait l'être la première fois que ses parents lui parlaient de sexe ou de préservatif, ne sachant plus du tout où se mettre, ne cherchant même pas à masquer la gêne qu'il laissait à travers la Force, le colosse détourna le regard et chercha autre chose à regarder pour détourner son attention de la situation.
Si au début tout ne fut rien de plus qu'un flou lointain, des formes et des bâtisses à l'horizon, ses prunelles azur s'arrêtèrent sur une forme plate et, lorsqu'il plissa les yeux pour voir ce qu'il y avait à quelques centaines de mètres de là, il reconnut le lieu comme un cimetière avant de se demander à voix haute :

« Est-ce que c'est... ?»


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Rarement Alyria n’avait ressenti de la gêne avec une telle acuité. Elle qui avait négocié avec des sénateurs, des têtes couronnées, des siths même brièvement, qui avait été la première personne de la République, se trouvait presque démunie devant cette femme âgée qui lui parlait simplement de son fils. Pourquoi était-ce si difficile de trouver les mots justes dans une situation pourtant si banale ? Pourquoi se sentait-elle aussi maladroite ? Elle ne savait, mais se mordit l’intérieur de la bouche en se morigénant silencieusement en observant le sourire de la brave matrone épicanthix se faner alors qu’elle se rendait compte de l’implication de ses dires. Elle avait voulu bien faire, échanger quelques amabilités, et se retrouvait maintenant dans une position plus qu’inconfortable, en ayant fait remonter involontairement, par sa négligence, des souvenirs douloureux. Oui, la maîtresse d’armes avait le contact facile au Temple ou en politique, mais pour les relations ordinaires, elle était d’une ignorance crasse, et s’en rendre compte avec une telle violence était aussi humiliant qu’étrangement de bon aloi, comme pour lui rappeler que malgré toutes ses victoires, son passé, il demeurait des espaces dans lesquels elle était peu douée, pour ne pas dire carrément catastrophique. A trente-sept ans, elle continuait d’apprendre, de se tromper, et de recommencer, et pour des choses que le commun des mortels aurait trouvé ridicule. Oui, elle était incapable de s’adresser correctement à sa belle-mère, mais n’avait eu aucun problème pour affronter les pires politiciens dans l’arène du Sénat.

En même temps, comment aurait-il pu en être autrement ? Si Alyria avait le contact facile, mue par une sorte de sociabilité aigue, un besoin d’aller vers les autres qui n’avait jamais été feint et se manifestait depuis l’enfance, son éducation soignée, pour ne pas dire hautaine et pédante, n’avait jamais facilité son insertion. Si elle était parfaite dans les couloirs policés du Temple pour parler aux maîtres ou se faufiler dans les hautes sphères de la société, si elle maîtrisait parfaitement les codes de la haute société et savait encore réciter par cœur les quarante titres normalement en vigueur sur Hapès pour l’Erennada, soit l’alpha et l’oméga de toute jeune fille de la bonne société hapienne, les codes ordinaires lui avaient souvent paru étrangers. A l’époque de son apprentissage auprès de Ranek Lond, ce dernier avait tenté de la défaire de ses manières empesées, et la traîner dans les cantinas sordides de l’espace hutt avait eu quelques effets salutaires. Dorénavant, elle était capable d’évoluer correctement dans des milieux plus modestes, elle avait appris à se fondre dans la masse, certes. Pour autant, cette conversation était différente. Il ne s’agissait pas d’effectuer son devoir de jedi, de passer pour une autre ou de faire tapisserie dans les jardins de Coruscant, non, il fallait tout simplement qu’elle parvienne à se faire accepter d’une femme qu’elle n’avait jamais vu, et qui n’avait d’autres liens avec elle qu’un homme qui était à ce moment autant un fils qu’un amant. Et cela, aussi fou que ça puisse parvienne, la gardienne ne savait pas le faire, tout simplement. Le concept même de famille au sens traditionnel lui était étranger, alors comment parvenir à dire ce qu’il fallait ? A ne pas se laisser envahir par ce sentiment de malaise si connu qui pousse chacun à jeter tout à trac la phrase de trop une fois dans sa vie ?

Ainsi, rarement Alyria s’était sentie aussi coupable qu’en entendant la pauvre femme faire référence aux temps de son esclavage, à son enfant tué par son autre garçon pour assurer sa survie. La nausée l’envahit brusquement, de même les regrets. Evidemment, comment avait-elle pu être aussi insensible, surtout alors qu’elle connaissait le passé de Lorn ? Quelle imbécile … Pour un peu, elle se serait tapée la tête contre un mur de dépit si elle l’avait pu. Apparemment, son interlocutrice ne paraissait pas lui en vouloir, la remerciant même à nouveau, ce qui acheva d’accentuer son malaise. Manifestement, sa bonté n’avait pas de limite, et l’espace d’un instant, la jedi se demanda comment une personne comme elle avait pu partager une partie de son existence avec un homme comme le père de son amant. Le couple Vocklan était comme le jour et la nuit. Un peu comme ses propres parents en quelque sorte …

Une fois encore, elle ne sut que répondre quand Shantia Vocklan les évoqua. Que dire, encore une fois ? La réponse la plus franche, et la plus désespérément brutale, aurait été d’affirmer la triste vérité, à savoir que son père était mort avant qu’elle ne fasse quoi que ce soit de son existence, et que sa mère n’avait jamais accordé à son unique enfant aucune attention depuis qu’elle avait manifesté ses aptitudes jedi. Malya Helm n’avait pas été cruelle comme pouvait l’être les hapiens en supprimant cette honte gênante pour sa lignée, elle n’avait pas tenté d’étouffer les dons de sa fille, mais n’avait pas non plus caché que son départ ne la dérangeait pas. Non, sa mère n’avait jamais débordé d’amour maternel. Bien qu’elle ne puisse en avoir la confirmation, Alyria était persuadée que sa mère avait continué sa grossesse uniquement car elle s’était dit qu’ainsi, elle aurait une héritière à moindre frais, et qu’elle n’aurait ainsi pas besoin de s’encombrer d’un mari dont elle n’avait que faire puisque sa sœur avait déjà fait le travail pour deux. Que sa fille soit sensible à la Force, et c’était son unique opportunité qui s’envolait. Quelle importance donc accorder à cette gamine indésirable sur sa propre planète, qui jetait l’opprobre sur le glorieux nom de Helm ? Oh, certes, la maison était l’une des plus cosmopolites dans le Consortium, au point d’avoir une des leurs qui avait un jour décidé d’épouser un humain. Aux yeux de la plupart des hapiens, les Helm étaient étranges, avec leurs lubies de se mélanger avec les autres races. Aussi une métisse n’avait pas trop choqué, hormis les plus conservateurs. C’était, au fond, dans les mœurs de cette curieuse lignée. Mais une jedi ? Non, pardi, c’était trop. Il y avait des limites à la tolérance éminemment étriquée des hapiens.

A vrai dire, ce qui avait le plus blessé Alyria avait été le moment où, le soir de sa nomination à la Chancellerie, elle avait reçu un message de son auguste génitrice la félicitant et lui disant à quel point elle était fière d’avoir une fille qui s’était élevée aussi haut … Malgré son statut de jedi. Puis, le reste du message servait à lui annoncer que l’Erennada souhaitait s’entretenir avec elle, et que voir une rejetonne d’Hapès au sommet de la République était une opportunité exceptionnelle. La vénalité de ces quelques lignes lui avait rappelé avec une véracité douloureuse pourquoi elle n’avait jamais éprouvé de peine en s’éloignant de Malya. Ni la fille ni la mer n’avaient jamais compté l’une pour l’autre. Le seul de ses parents qu’elle aimait, c’était son père, et ses souvenirs s’affadissaient de plus en plus, au point qu’Endar Von était désormais davantage une ombre flottante dans sa mémoire qu’autre chose. Et pourtant … Oui, lui aurait été fier d’elle. Vraiment. Elle le savait. Il aimait sa fille pour ce qu’elle était, à savoir la chair de sa chair, un cadeau inespéré dans sa vieillesse. Et la différence avait marqué une bonne partie de son existence. Peut-être fallait-il voir dans cette enfance tourmentée, déchirée entre deux adultes qui n’avaient jamais rien eu en commun hormis une nuit d’ivresse quelques vérités psychanalytiques sur ce que la maîtresse d’armes était devenue. Nul doute que sa passion pour l’art martial, sa recherche de ses origines echanies et le fait qu’elle ait volontairement renoncé à un futur de consulaire n’étaient pas complètement étrangers à l’adoration de ce père militaire et au rejet de cette mère diplomate. Néanmoins, tout cela était un peu complexe à expliquer à une parfaite inconnue, aussi elle tenta un poli :

« Probablement … »

Sauf qu’à la minute où elle prononça ce mot unique, elle s’en voulut. Il sonnait faux. Non, il était faux. Complètement. Evidemment, puisqu’il s’agissait de ces interjections toutes faites qu’on servait dans les dîners officiels quand on n’osait pas exprimer son avis sur un sujet, encore moins son désaccord. Qu’est-ce que cela lui coûtait, d’être honnête ? Elle ne reverrait jamais cette femme, selon toute probabilité en tout cas. Leur échange constituait sa seule chance de montrer qui elle était sans fard, à la génitrice de l’homme avec qui elle partageait sa vie. Aussi elle ajouta, l’air bien plus sérieux qu’auparavant :

« En fait … Non. Ma famille est auprès de l’Ordre, et je doute que mon seul parent survivant ait ce genre de pensées, du moins, pour les bonnes raisons. Mais à vrai dire … Cela n’a pas d’importance. Ceux que j’aime sont heureux pour moi, et je suis heureuse pour eux quand ils réussissent. L’essentiel est là. »

C’était sec. Mais c’était dit. Et cette fois, plus de faux-semblants, c’était bel et bien ce que pensait réellement Alyria. Elle ajouta doucement :

« Je suis navrée d’avoir remué des souvenirs douloureux. Je ne sais simplement pas quoi vous répondre. Je ne ... Cette situation m’est inconnue, essentiellement parce que je n’ai jamais connu de famille au sens traditionnel du terme, et pas uniquement parce que je suis une jedi. Alors, j’essaye de ne pas vous être trop désagréable, mais en vérité, vous être sans doute l’interlocutrice la plus impressionnante à laquelle j’ai fait face. Parce je ne suis pas là en tant que jedi, du moins pas à cet instant, et que j’aimerais simplement … votre amitié. Votre approbation, peut-être, je ne sais.

Mais ce que j’ai dit à propos de Lorn … Je le pense sincèrement. C’est mon meilleur ami, depuis presque trente ans. Il est une part de mon existence, la moitié de mon âme. J’aime votre fils, pour plein de raisons différentes. Surtout parce que sans lui, je ne suis plus entièrement moi-même.

Et je voulais juste … Que vous le sachiez. Que votre enfant est un homme bon, courageux, drôle même s’il ne l’admettra jamais. Il est aussi merveilleusement agaçant, manque de confiance en ses capacités et est un adepte forcené du bougonnement. Et j’aime autant ses qualités que ses défauts. »


Se rendant compte de tout ce qu’elle venait de débiter, Alyria rougit violemment, avant de marmonner :

« A force de vouloir être honnête, j’en ai peut-être un peu trop dit … »

Tentant de reprendre contenance malgré son teint pivoine, elle conclut maladroitement :

« Ceci étant fait … Je peux vous laisser en famille pour aller vous recueillir … Si vous le désirez … »
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Pour beaucoup de cultures la famille était au centre de tout, génératrice d'autant de bonheur que de malheur, c'était littéralement le berceau dans lequel grandissait et se forgeait un individu pour poser les bases de celui qu'il serait amené à devenir. Pour toutes ces cultures il serait donc tout bonnement impensable de renier ou oublier ce qui constituait la base de leur éducation et c'était sans doute pour cette raison que les jedis semblaient être des ovnis au milieu de tout ce traditionalisme. Mais n'était-ce pas pour le mieux ? Pour forger un être nouveau il fallait faire table rase de ce qu'il était afin de laisser la place pour ce qu'il pourrait devenir, cependant, malgré les précautions prises pour que la famille ne soit plus qu'un lointain souvenir dans l'esprit de ces jeunes éléments avides d'apprendre, bon nombre de jeunes élèves gardaient des souvenirs et des émotions.
Certains se souvenaient vaguement d'heureux moments tandis que d'autres finissaient par ressentir de la rancœur pour avoir té ainsi abandonné aux bras d'inconnus avec la promesse d'un hypothétique meilleur avenir, mais final rare étaient ceux qui ne se souvenaient de rien concernant leur ancienne vie. Et que dire de ceux qui choisissaient de succomber à un tel oubli ? Ils existaient et Lorn ne pouvait décemment pas les juger car, à ses yeux, il était tout aussi difficile d'oublier sa famille que de devenir jedi tout en maintenant vivace la flamme de cette ancienne vie dans son esprit. Ils faisaient le dur choix de recommencer à zéro car c'était ce qui leur était demandé, ils s'y pliaient non sans difficultés pour devenir ce que la Force avait besoin : des agents de l'équilibre.


En vérité le colosse enviait ceux qui arrivaient à faire un tel ménage dans leur tête car il en était bien incapable, il enviait ceux qui n'étaient pas mus par le crainte de ressembler à leur géniteur comme cela pouvait être son cas, il enviait ceux qui arrivaient à dormir d'une traite sans être constamment réveillés au milieu de la nuit, trempés de sueur, comme cela était toujours son cas. Ceux-là n'avaient aucun problème pour dormir car ils étaient en paix avec eux-même...non, ceux-là dormaient car ils avaient oublis qui ils étaient à l'origine. Était-ce plus préférable ? Il ne préférait pas se prononcer à ce sujet.

Si la demoiselle à la crinière de feu avait toujours été douée pour l'art de la diplomatie et de la politique, maniant les mots avec presque autant de dextérité que son sabre laser, le jeune homme avait toujours compris être son exact opposé dans la matière. Elle n'était pas douée pour les conversation spontanée ou à cœur ouvert et lui, de son côté, avait une sainte horreur de la diplomatie et des débats interminables. Elle n'était pas assez spontanée mais il manquait totalement de retenue et, comme le voulait l'expression, les opposés avaient par s'attirer jusqu'à ce que l'un commence à puiser chez l'autre ce dont il manquait cruellement. La demoiselle avait fini par être plus ouverte au fil du temps et, tel un aveu de faiblesse, Lorn avait bien conscient que sa virulence et sa brutale franchise avaient un peu perdu de leur panache ces derniers temps.
Mais peut-être n'était-ce pas une si mauvaise chose que cela en fin de compte. Peut-être.

Mais qu'il soit à l'aise avec sa famille ou non le jeune homme y était confronté de force aujourd'hui et, malheureusement, son sens du devoir était tel qu'il ne pouvait décemment pas abandonner cette mission à cause d'opinions personnelles. Il avait une réputation de loyauté et d'efficacité à tenir et, plus que tout, comme il avait été convenu avec sa moitié, son devoir passerait toujours avant n'importe laquelle de ses relations.
Beaucoup de couples avaient régulièrement des discussions à ce sujet pour savoir ce qui était le plus important de leur vie et, fort heureusement, ce couple-là n'avait jamais eu à débattre de ce sujet-là car la réponse leur était toujours parvenue comme évidente : ils étaient des jedis avaient quoi que ce soit d'autre.


Alors que le jeune colosse reportait son attention vers le cimetière qui se dessinait de l'autre côté du village, à quelques dizaines de mètres de là, la conversation entre les deux demoiselles suivit son cours et la matrone comprit bien vite qu'Alyria ne partageait pas les mêmes valeurs familiales que les siennes. Comment le pourrait-elle de toute façon ? Elle avait été coupée du reste du monde et de sa famille, c'était normal qu'elle n'y soit pas aussi attachée que ses autres sœurs hapiennes pourraient l'être. Mais, même si cela paraissait évident, la mère crut bon de pointer quelque chose du doigt.

« La famille ne s'arrête pas au sang, petite, mais j'ai l'impression que tu le sais déjà. »

La famille constituait en réalité le cercle de personnes avec qui quelqu'un pouvait se sentir parfaitement à l'aise et, parfois, ce cercle pouvait s'étendre à ceux qui ne partageaient aucun lien du sang. D'où pouvait donc venir le terme de frères d'armes ? À des individus ayant traversé de nombreuses épreuves ensemble jusqu'à forger un lien tout aussi fort que deux individus partageant le même sang et le même foyer. Même si cela était un peu différent les jedis formaient une communauté à part entière qu'on pourrait facilement considérer comme une famille.
Puis, alors que la conversation suivit son cours, la matrone ne peut s'empêcher de sourire face à la réplique de la demoiselle qui semblait désireuse d'avoir son amitié et son approbation, comme si elle était la femme la plus influente ou impressionnante qui ait jamais croisé le chemin de la jedi. Devait-elle se sentir flattée ? Elle l'était mais prenait cela avec philosophie, se contentant de sourire tout en répondant.

« Tu le connais certainement mieux que moi, je suppose que tu a contribué à faire de lui celui qu'il est aujourd'hui et pour cela tu as déjà mon approbation. »

La demoiselle sembla être gênée de parler aussi librement de ce qu'elle aimait chez celui qui partageait sa vie et son cœur, chose qui ne manqua pas de faire naître un petit rire discret chez la matrone qui n'avait pas l'habitude de rencontrer une femme faisait preuve d'une telle retenue au point d'être gênée par le plus honnête des discours.

« C'est ce qu'il se passe quand on peut être honnête envers soi-même. Cela fait du bien, n'est-ce pas ? »

Les deux femmes se tournèrent ensuite vers l'endroit où se dirigeait le colosse et, quand ce lieu fut identifié, Alyria crut bon de s'écarter pour laisser un peu de place à la famille dans ce moment de recueillement. Tournant les yeux vers son fils qui s'éloignait un peu plus à chaque seconde, la mère Vocklan fit un mouvement de tête en direction de Lorn pour inciter la demoiselle à le rejoindre avant d'ajouter :

« Pas besoin , j'ai déjà fait mon deuil depuis longtemps. Il lui reste à se pardonner lui-même et je gage que te savoir à ses côtés l'aiderait sans doute dans cette tâche. »

Un pas après l'autre le jeune homme se rapprocha de l'entrée du cimetière jusqu'à ce qu'il puisse apercevoir les premières sépultures comme des formes floues dans l'horizon. Quelques poignées de secondes plus tard il arriva enfin à l'entrée et pénétra dans ce lieu sacré sans une once de doute ou de peur. Peur de quoi ? Ici gisaient les moins bavards des résidents de cette planète, s'il y avait bien un endroit où il pourrait être tranquille c'était bien ici.
Les mains négligemment cachées dans ses poches le maître d'armes semblait errer dans ce lieu comme une âme en peine mais il n'en était rien, son regard caressait les stèles une à une comme s'il espérait reconnaître un ou deux noms mais cette tâche était bien vaine. Qui espérait-il reconnaître de toute façon ? Il n'y avait bien qu'une seule personne qui justifiait sa présence en ce funeste lieu et ce fut au bout de plusieurs minutes que la stèle de cette fameuse personne fut enfin trouvée.

Tel Goliath face à David le maître d'armes resta ainsi immobile à toiser la stèle pendant quelques minutes, silencieusement, comme s'il peinait à réaliser ce qui se trouver sous la terre juste devant lui. Il avait joué cette rencontre des milliers de fois dans cette tête et malgré une importante anticipation Lorn ne se sentait pas plus stresse que cela, en vérité il se sentait peut-être même plus libéré qu'autre choix de pouvoir s'adresser à autre choix que ses souvenirs et sa culpabilité. C'était libérateur.

Ainsi, après une dizaine de minutes d'un silence presque religieux, un mot sortit de sa bouche.

« Salut.»

Oui il s'adressait à un mort qui ne l'entendait pas et ne pourrait jamais lui répondre mais cela importait peu, il était content de pouvoir extérioriser ces paroles en se fichant de savoir si quelqu'un l'entendrait ou le prendrait pour un fou. Respirant profondément, comme s'il voulait dégager un poil collé tout contre sa poitrine, le colosse s’assit lentement par terre jusqu'à croiser ses jambes à quelques centimètres de la pierre tombale. Les mains jointes et posées tout contre lui, serein, Lorn dévisagea la stèle comme s'il y voyait la silhouette de la personne qui était enterrée là-dessous, comme s'il avait une véritablement conversation avec quelqu'un n'ayant pas encore rejoint la Force.

« Je sais qu'on a déjà eu cette conversation des centaines de fois mais je tenais à le faire ici, face à face. C'est le moins que je puisse faire.»

Il avait déjà ressassé les événements beaucoup trop de fois pour désirer le faire ici une fois de plus, il désirer simplement faire une seule chose depuis qu'il avait vu ce cimetière se profiler à l'horizon. Se redressant un peu, le colosse plongea une main dans sa poche pour en retirer un petit appareil plat contenait une image holographique d'un passé lointaine. Contemplant l'objet dans la paume de sa main comme un objet précieux dont il rechignait à se débarrasser, Lorn lâcha finalement :

« Je pense qu'il est temps que je te rende ceci, je n'ai plus besoin de ça pour me souvenir. »

Lentement le poing du guerrier se leva jusqu'à enfin s'ouvrir pour poser délicatement l'objet sur le haut de la stèle, avant de s'écarter lentement avec une pointe de difficulté. Bien sûr que c'était dur d'abandonner son seul lien avec le passé mais il savait que ce geste était plus nécessaire qu'aucun autre ici. Se sentant étrangement libéré en sachant que cet objet n'était plus dans sa poche, le jedi ferma les yeux et profita du calme ambiant pour mettre un peu de l'ordre dans son esprit avec une petite méditation de son cru.
Combien de temps dura t-elle ? Une bonne dizaine de minutes aux bas mots mais, quand ses yeux s'ouvrir, Lorn conclut sa visite familiale par un :

« Il est temps pour moi d'y aller. Nous nous retrouverons un jour, dans la Force.»

Au lieu de se relever comme on pourrait s'y attendre, le jedi se mit à genoux et, posant les deux poings fermés à terre, se pencha en avant jusqu'à ce que son front touche même le seul, signe évidente de respect et d'une demande de pardon. Jamais il ne s'était agenouillé, personne ne l'avait vu plier le genou devant qui que ce soit et aujourd'hui et il était face contre terre devant la mémoire d'un mort. L'immense colosse était à terre, le roc d'Aargau faisait preuve d'une humilité que peu de personnes lui connaissaient envers quelqu'un qui ne pourrait plus jamais lui répondre. Mais qu'elle soit là ou non importait peu, il avait besoin de faire cela pour être enfin en paix avec ce qu'il avait fait...ou essayer de l'être en tout cas.
Il resta bien une bonne dizaine de minutes dans cette position des plus inconfortable et, quand le silence fut fermement installé, un le brisa d'un :

« Pardon...et merci, petit frère. Merci pour tout. »
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L’émotion gagnait Alyria, qui sentait comme un lien invisible se nouer peu à peu entre elle et son interlocutrice, aussi bien émotionnellement qu’à travers la Force, comme si ce qu’elle éprouvait dans les tréfonds de son cœur faisait naître de nouveaux filaments au sein de l’entité mystique, guidé par l’élan d’affection intense qui la submergeait à mesure que les paroles de bon sens de Shantia Vocklan s’infiltraient en elle, déversant leur chaleur dans sa posture rigide et lui faisant hocher la tête doucement. Rares étaient ceux qu’elle pouvait dire avoir réellement apprécié immédiatement au cours de son existence, lui ayant donné ce sentiment délicieux d’être acceptée inconditionnellement. Il y avait eu ses amis d’enfance au Temple, bien sûr, sans compter Lorn qui était l’évidence même, encore que l’apprivoiser avait été finalement assez complexe au début de leur temps comme jedis, le jeune épicanthix d’alors ne se laissant guère approcher, mutique et tout entier travaillé par les ombres de son passé. Mais la petite fille d’alors avait vu au-delà de son aspect bourru et avait déclaré dans son langage d’enfant qu’il avait ‘les yeux gentils’, manière de dire que sous l’extérieur cassant se cachait un trésor qu’il suffisait de découvrir peu à peu. Cependant, si la maîtresse d’armes aimait aller vers les autres, elle se livrait finalement peu elle-même. Lui faire parler de son enfance relevait de la prouesse en dehors des banalités d’usage, exprimer ses doutes était une gageure, et peu pouvaient réellement se targuer d’avoir percé la carapace de fer qui imprimait ses moindres faits et gestes. La trentenaire aimait le contrôle, et le perdre l’indisposait, la rendait profondément mal à l’aise même. Voilà pourquoi elle préparait toujours ses visites et missions minutieusement, et que l’inconnu avait toujours été une réelle source d’angoisse, sauf en ce qui concernait l’art martial. Là, étrangement, c’était le contraire : si la bretteuse avait ses habitudes, ses bottes fétiches, elle éprouvait un plaisir certain à s’adapter à l’imprévu, à se dépasser pour trouver la solution à un problème apparemment insoluble. C’était précisément ce qui en faisait une adversaire si redoutable : la bousculer ne faisait que la rendre encore plus déterminée à vaincre, stimulant son intellect et ses réflexes plus que la normale. Clairement, son adaptabilité prononcée au combat avait quelque peu vampirisé ses capacités à se fondre dans la masse socialement.

Autant dire qu’éprouver un tel sentiment de chaleur et de reconnaissance pour une parfaite inconnue ne lui était pas franchement familier. Mais étrangement, Alyria ressentait pour Shantia Vocklan comme une sorte de lien filial. Elle avait l’impression que cette femme âgée avait simplement accepté qui elle était, ce qu’elle était, ce qu’elle représentait pour son fils sans se poser de questions, avec cette pointe de fatalisme qui sied aux parents éloignés de leurs enfants pour longtemps, mais sans hostilité. Et il était réellement agréable de se sentir accueillie ainsi, sans formalité, comme si … Elle faisait partie de la famille. Oui, c’était probablement qui l’avait perturbé autant avant de l’émouvoir : la matrone épicanthix s’était comportée avec elle de la même manière qu’avec une fille ou une nièce, et la jedi n’avait guère l’habitude de tant de familiarité. Brusquement, l’ombre d’un regret passa dans sa tête : elle aurait aimé pouvoir apporter autre chose à cette vieille femme qu’une présence fugace et quelques promesses. Que ce serait-il passé, en vérité, si les deux maîtres n’avaient pas appartenu à l’Ordre ? Seraient-ils venus plus tot ? Auraient-ils annoncé un mariage, des projets d’enfants, tout ce à quoi ils ne pouvaient réellement prétendre, encore moins alors que leur couple demeurait un secret ? Certes, la maîtresse d’armes peinait à croire qu’en plusieurs années, certains de leurs plus proches camarades ou quelques maîtres très expérimentés soient totalement dupes. A vrai dire, s’ils passaient tous deux plus de temps au Temple, sans doute que la question ne se poserait même pas. Le fait d’être sans cesses éloignés d’Ondéron ou en mission avait quelque peu facilité le développement de leur amour, et ce qu’Alyria avait au départ vu comme une malédiction, notamment l’épisode de la Chancellerie, se révélait peut-être au final une bénédiction sur un plan plus personnel. Ils avaient eu le temps de s’épanouir, sans doute d’une façon différente qu’un couple normal, si tant est que la normalité veuille signifier quelque chose dans cette galaxie si diverse. Pour autant, certaines choses leur demeuraient inaccessibles, et si la maîtresse d’armes chassa bien vite le regret qu’elle éprouvait à son égard, une forme de compassion douce-amère lui vint pour sa vis-à-vis. C’était une chose de savoir son enfant à jamais hors de portée. S’en était une autre que d’entrevoir ce qu’un destin différent aurait pu apporter.

Lentement, son regard dériva vers Lorn, qui s’était éloigné vers la tombe de son frère. Pudique par nature, la bretteuse estimait qu’il méritait un peu de temps seul avec son chagrin, sans une compagnie qui aurait pu le gêner ou abréger son recueillement. Néanmoins, devant les paroles de la mère, elle révisa un peu son jugement, se disant qu’à cette heure, il n’était plus question de remords, mais d’acceptation, de réussir à trouver enfin la paix face au passé pour construire un avenir. Or cet avenir, Alyria désirait que l’épicanthix le construise avec elle, à ses côtés, qu’ils continuent à avancer ensemble. Voilà pourquoi elle lui avait parlé de dévoiler enfin leur relation au Conseil. Ainsi, ils pourraient enfin voir plus loin, et cesser de vivre avec cette épée de Damoclès en permanence. Certes, il y avait un risque qu’ils soient obligés de se séparer. Si c’était le cas, cela signifierait tout simplement qu’ils n’auraient pu progresser en tant que jedis et en tant qu’amants, ce qui était impossible à ses yeux. Malgré tout ce qu’elle ressentait pour Lorn, malgré sa certitude qu’il était probablement l’amour de sa vie, elle n’aurait pu sacrifier son identité de jedi pour continuer leur relation, car cela aurait signifié renoncer à qui elle était, à son identité profonde. Penser le contraire aurait prouvé, de toute manière, que la passion avait pris le pas sur son engagement pour le côté lumineux.

Sa résolution prise, Alyria salua doucement la brave femme, avant de lui souffler :

« Merci pour tout. »

Avant d’ajouter, une lueur malicieuse au fond du regard :

« Si jamais vous devenez grand-mère, vous en serez la première informée, promis. »

Puis, après cet instant de légèreté, la trentenaire retrouva son sérieux et s’avança vers la tombe, s’arrêtant à une certaine distance, souhaitant tout de même accorder à Lorn un minimum d’intimité. Il pouvait sentir qu’elle était là, à quelques pas, elle le savait. Mais ce qu’il avait à dire était une démarche personnelle, aussi, quelque chose qu’il devait accomplir seul. Aussi, avec un mélange de fierté et d’émotions contenues, Alyria observa le colosse déposer l’hologramme sur la stèle, consciente de ce que ce geste lui coûtait, de la symbolique qu’il revêtait. Se détacher de son dernier bien du passé était une étape cruciale pour se reconstruire, et aller de l’avant. Tandis que Lorn parlait à son frère disparu, la jedi ne put s’empêcher de se souvenir que c’était précisément quand l’épicanthix avait enfin réussi à parler de lui qu’ils avaient commencé à construire doucement leur relation. Comme libéré d’un poids, son amant avait saisi l’occasion d’une discussion à cœur ouvert pour l’embrasser, déclenchant les prémisses de ce qui les liait à présent. En un sens, il avait continué à avoir une influence déterminante sur la vie du jedi, pour le meilleur cette fois.

Lentement, Alyria acheva de s’approcher avant de s’arrêter brusquement, surprise par le mouvement initié par Lorn, qui se trouvait à présent face contre terre, dans une attitude qui ne lui était guère courante d’humilité totale, de soumission presque au souvenir flottant autour de la stèle. Aussi elle laissa un certain temps passer, avant de se poster à ses côtés et de poser une main qui se voulait réconfortante sur son épaule et la serra très délicatement, pour lui manifester autant son soutien que son amour, avant qu’elle ne souffle dans un murmure audible uniquement par son compagnon :

« Merci. »

Sachant que ce mot unique pouvait interpeller, elle s’empressa d’élaborer, avec la même douceur dans sa voix grave :

« Nous ne nous connaissons pas … Mais grâce à toi, Lorn m’a ouvert son cœur, il y a quelques années de cela. Sans toi … Nous n’aurions peut-être pas eu le courage d’avancer sur le chemin qui est le nôtre. »


Elle ne savait quoi ajouter, aussi elle finit par demander :

« Tu veux y aller ? Ou rester encore un peu ? »

Leur mission les attendait. Mais ce moment avait aussi son importance, car il avait apporté sans doute la paix intérieure que l’épicanthix cherchait depuis des années, comme si cet objectif avait été partie intégrante de leur tâche sur Panatha … Et l’espace d’un instant, Alyria ne put s’empêcher de s’interroger silencieusement pour savoir si cela n’était pas un peu le cas. Les voies du Conseil étaient impénétrables … Et recelaient souvent des vérités dont on ne se rendait compte qu’après tout. En enquêtant pour trouver la vérité, peut-être que les deux jedis l’avaient découvert sur eux-mêmes.
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Pour un homme d'apparence aussi froide et sèche que pouvait l'être le jeune maître d'armes il était très difficile voire même inconcevable d'admettre publiquement ses erreurs, ce n'était pas une question de fierté mal placée ou d'orgueil mais bien le reflet d'une vie entière placée sous le sceau d'une discipline de fer. À quoi pouvait bien servir un soldat inefficace ? Que pouvait-on bien faire d'un outil cassé ou rouillé ? Toutes les réponses pointaient dans la même direction et tendaient à montrer au jeune homme que l'efficacité primait sur tout le reste. Au diable ses sentiments si cela lui permettait de faire son boulot, au diable sa vie sociale si cela pouvait faire de lui un meilleur combattant et un bien meilleur protecteur qu'il ne l'était déjà. Il avait depuis longtemps abandonné son individualité et ses petits caprices personnels pour le bien du plus grand nombre et, bien qu'il ne soit pas le maître jedi à avoir sacrifié le plus de choses au service de l'Ordre et de la galaxie, il avait depuis longtemps accepté la possibilité de rejoindre prématurément la Force au cours d'une périlleuse mission ou d'une défense impossible.

Mais comme tout être humain le jeune homme avait appris depuis longtemps que malgré tous les entraînements du monde il ne serait jamais parfait et encore moins infaillible, il pouvait essayer de l'être en mettant chaque jour son corps à rude épreuve mais c'était une course-poursuite qui ne prendrait réellement fin que quand il rejoindrait la Force. D'un œil extérieur bon nombre d'autres jedis ne voyaient dans l'attitude de Lorn qu'un homme de plus déterminé à faire son travail, rares étaient ceux à même de comprendre à quel point cette course au perfectionnement régissait son existence toute entière depuis qu'il avait accédé au rang de chevalier. Qui pourraient être les heureux élus ? Les plus anciens membres du Conseil sans doute, son mentor et bien sûr sa déesse à la crinière de feu.

Sa vie avait débuté par une succession de mauvais choix ayant entraîné la mort de son frère par ses propres mains et, quoiqu'on puisse en dire, il porterait la culpabilité de cet acte à tout jamais et celle-ci modèlerait le reste de son existence. Était-ce par hasard qu'il s'était donné à 500 % tout le long de sa vie ? Était-ce par hasard que, dans sa prime jeunesse, maître Torm l'identifia comme un garçon en colère envers le monde entier mais par-dessus tout envers lui-même ? Il avait une chose impardonnable à se faire pardonner et, à défaut de ne pouvoir y arriver, il avait décidé d'être le meilleur pour se racheter de sa faute passée. Beaucoup diraient que ses raisons n'avaient pas été les bonnes dès le départ et beaucoup auraient sans doute raison, mais le colosse était depuis longtemps rentré dans ses bottes de jedi pour rentrer dans le rôle créé sur mesure pour lui. Celui de guerrier, celui de formateur, celui de protecteur.

Peu importaient les raisons qui poussaient cet homme-là à se lever chaque matin pour peu que le travail soit fait, telle était sa façon de voir les choses. Il ne s'excusait pas de ses erreurs passées mais n'en pensait pas moi, il n'avouait jamais publiquement sa faiblesse mais la reconnaissait en son for intérieur mais aujourd'hui c'était différent, s'il y avait bien quelqu'un face à qui il pouvait avouer sa faiblesse et demander pardon c'était bien lui...lui plus que quiconque. Bien sûr cela ne changerait rien au passé car son corps devait avoir nourri les asticots depuis bien longtemps, mais Lorn aimait à croire qu'il était là quelque part, écoutant ses paroles et ss pensées à travers la Force, il aimait croire qu'il ne faisait pas que parler tout seul.

Il se laissa donc tomber à genou et, front contre terre, ferma les yeux et laissa son esprit libérer ces pensées qui le hantaient depuis tant d'années, ces pensées qu'il s'était dites tellement de fois comme si celle-ci serait différente. Connaissant le caractère de son frère le colosse savait qu'il lui aurait pardonné mais désormais c'était à son tour de se pardonner lui-même pour ce fratricide.

Non, en vérité ce n'était pas quelque chose qu'il pouvait oublier ou pardonner mais il pouvait au moins apprendre à vivre avec et s'habituer à cette douleur, il pouvait la laisser rentrer et s'en servir comme source de motivation au lieu de lutter contre elle comme il l'avait toujours fait jusqu'à maintenant. Et qu'avait-il gagné à aller contre le courant ? Des cauchemars tous les soirs depuis plus de vingt ans, des insomnies, des réveils en sueur, un manque de sommeil auquel il avait été forcé de s'habituer. Rien de tout cela n'était normal ou sain mais il avait fait avec et, aujourd'hui, il désirait passer ce cap et accepter ce qu'il s'était passé sans chercher à se faire pardonner.
Ce n'était qu'une grosse erreur de puis à rajouter à son actif, une gigantesque erreur avec laquelle il allait devoir compter et qu'il devrait accepter pour continuer à avancer. Il ne pouvait pas continuer indéfiniment à se flageller de la sorte que cela ne ramènerait pas les morts à la vie, il était ici pour apprendre à accepter son acte impardonnable et avancer avec la douleur qui, il l'espérait, se dissiperait avec le temps.

Ce fut la présence de la demoiselle avant son contact qui parvint au colosse qui, il devait bien l'avouer, état surpris de voir son aimée tenter de rentrer en contact avec un mort qui il le faisait depuis toutes ces années. Était-elle devenue folle elle aussi ou essayait-elle d'aider à sa manière ? Le deuxième scénario était nettement plus probable. Relevant la tête et redressant on buste face à la sépulture, Lorn répondit à son aimée d'un :

« On peut y aller, je nous ai assez retardés comme ça.»

Se redressant en jetant un dernier coup d’œil à la sépulture face à lui, le jeune homme demanda alors à sa moitié :

« Direction la ville, on trouve qui organise les combats de recrutement, je me fais passer pour un candidat et tu me suis dans l'ombre ? Par contre je vais devoir changer de vêtements pour donner le change, ce ne sera pas long.»

Le jeune homme s'éclipsa quelques instants - non sans chasser une petite larme pointant le bout de son nez au bord de son œil gauche – pour aller chercher des vêtements à sa taille et, lorsqu'il s'éclipsa pour se changer il ne put s'empêcher de repenser à la remarque de sa mère sur le fait d'avoir des enfants. Il était vrai que les épicanthix avait une longévité plus important que l'humain moyen mais ce n'était pas le cas de son aimée et, avec la vie qu'ils menaient, était-ce vraiment raisonnable ? Non, chaque chose en son temps, il faudrait d'abord parler de leur relation au Conseil avant de penser à la suite et après...après quoi ? La maison avec la barrière blanche, les deux enfants et le chien n'était pas un style de vie pour un jedi, mais était-ce incompatible avec la création d'une nouvelle vie ? Une question qu'il n'avait jamais pris le temps de se poser mais qui allait s'ajouter à la liste des autres questions sans réponses.

Pantalon noir ayant vu des meilleurs jours, veste en cuir marron venant cacher le t-shirt noir recouvrant son torse, cheveux plaqués en arrière dans un style plus jeune et plus agressif, le maître d'armes réapparut devant la demoiselle dans sa nouvelle tenue sans savoir si cela suffirait à donner le change. Après tout, comme tout jedi sa garde-robe était assez limitée .
Sans une once d'hésitation il tendit ses deux mains vers la demoiselle, dans chacune de ses mains se trouvait un de ses sabres lasers qu'il désirait confier à la demoiselle. Pourquoi ? Parce qu'il s'agissait d'une mission qui demandait de l'infiltration, il avait opté pour un petit blaster à sa ceinture et une lame cachée dans sa botte droite mais c'étaient les seules armes qu'il pourrait s'autoriser.

« Tiens. »

Il ne s'agissait pas d'un vulgaire cadeau car les sabres lasers étaient l'extension du corps du jedi et une partie d'eux-même, Lorn venait de remettre à soin aimée son tout dernier bastion défensif et était désormais presque à nu. Était-ce dérangeant ? Pas avec elle, jamais.
Il était désormais temps d'y aller.
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« Je te suis. »

Alyria ne voyait rien à ajouter, aussi elle se contenta d’appuyer ses dires par un simple hochement de tête. Lorn avait pris sa décision, et désormais, leur mission reprenait ses droits. Certes, leur plan manquait quelque peu de finition, cependant, le facteur temps était trop important pour se permettre de finasser. Bien qu’il lui répugnât considérablement d’envisager les choses de cette manière, la jedi avait parfaitement conscience que cette fois, il allait falloir passer en force et compter en partie sur leur puissance brute en cas de pépins. La jeune femme n’était pas sans ignorer que la combinaison de leurs pouvoirs commençait à devenir réellement dévastatrice. Ils l’avaient vu sur Makem Te, quelques mois auparavant, en l’emportant sur la Main de l’Impératrice et en parvenant à détourner un croiseur à deux, exploit tout de même peu commun. Quelque part, et malgré leur éloignement forcé, depuis Byss, la trentenaire avait l’impression que le duo avait gagné en force et en coordination, au point que leur répertoire de techniques liées occupait une part non négligeable de son propre arsenal. Parfois, elle se demandait même s’ils n’avaient pas finalement réussi à contourner le mur infranchissable de l’esprit de son amant en créant une nouvelle manière d’appréhender leur lien à travers la Force, d’une manière nouvelle, qui leur faisait presque ressentir les mouvements de l’autre de façon quasiment instinctive. Ce n’était pas comme lire dans les pensées d’un tiers, ou avoir leurs cerveaux reliés, c’était bien davantage avoir leurs muscles en connexion profonde, l’ensemble de leurs sens comme combinés, tel un seul corps à huit membres qui agissait en sentant les réactions des diverses parties de son anatomie. Et c’était précisément cette synergie qui les rendait redoutable, car poussée à son paroxysme.

Tandis que Lorn s’éclipsait pour revêtir de nouveaux vêtements, Alyria en fit de même, consciente que son Voile de Force n’avait pas la perfection nécessaire pour la dissimuler entièrement sur une période aussi longue. Elle jouerait sur les ombres et les recoins, pour autant, elle tenait à mettre absolument toutes les chances de son côté, ce qui passait par une adaptation rapide de sa garde-robe, consistant à changer tout simplement la couleur de ses habits ordinaires pour passer au noir. Vêtue ainsi, seule sa chevelure flamboyante ressortait, ainsi que les manches de ses sabres, lui donnant un aspect plus imposant, mais aussi plus mystérieux, plus sombre. Une fois le changement effectué en catimini, elle revint à leur point de rendez-vous et attendit pour voir bientôt émerger une version curieusement rajeunie et légèrement rebelle de l’épicanthix, ce qui l’amusa très légèrement, bien qu’elle tentât de n’en rien laisser paraître. L’heure n’était plus vraiment aux plaisanteries.

En recevant les sabres de son compagnon, la gardienne éprouva une curieuse chaleur, comme si leur puissance se répandait dans sa paume. Certaines marques sur les manches rappelaient des souvenirs, parfois glorieux, souvent douloureux, des épreuves affrontées en commun. Surtout, ils étaient le symbole de la place de son amant dans l’Ordre, de sa dextérité arme en main, et sans doute ses biens les plus précieux. Certes, il était essentiel qu’elle les prenne, pour le bien de la mission, néanmoins, elle percevait avec clareté l’honneur qui lui était fait, et le poids de la responsabilité qui était la sienne désormais, alors qu’elle accrochait précautionneusement les deux sabres à sa ceinture, en plus des siens, se transformant involontairement en armurerie ambulante. Ses yeux verts se plantèrent dans les saphirs de Lorn, et un instant passa ainsi, plein de mots qui n’avaient pas besoin d’être prononcés.

« Merci. J’en prendrais soin. »

Puis ils partirent, non sans avoir pris congé formellement du clan. Le salut au chef fut d’une froideur sans nom, mais son épouse serra son fils et sa … belle-fille ? Bref, elle serra les deux jedis dans ses bras, s’attirant quelques regards noirs par ce simple geste, mais aussi des hochements de tête discrets de ceux qui approuvaient la sauvegarde des liens du sang et les règles de l’hospitalité, peu importe envers qui elles étaient adressées. Alyria laissa Lorn prendre les commandes, avant de se juger sur l’arrière du speeder, et ils commencèrent à foncer le plus rapidement possible vers le lieu de rendez-vous, dévorant la steppe aussi vite que l’engin le leur permettait, son paysage monotone se transformant bientôt en un mélange hétéroclite de couleurs étranges.

Après plusieurs heures, la ville fut enfin en vue. A une distance plus que raisonnable, la bretteuse descendit du speeder, laissant Lorn continuer seul jusqu’au lieu qu’ils avaient convenu. Elle marcha jusqu’à un point, avant de se mettre à courir avec aisance, en marathonienne experte qui n’appréciait rien tant que l’air lui fouettant le visage. Cette méthode assurait au jedi d’arriver avant elle et d’avoir l’air de faire quelques démarches ou de déambuler en ville pour donner le change, pendant qu’elle entrerait d’une autre façon, comme une étrangère de passage. Ironiquement, après toutes les émotions vécues ces derniers jours sur Panatha, l’exercice physique lui procura un plaisir intense, et bientôt, elle s’oublia dans le martèlement régulier de sa foulée sur le sol dur, à un rythme qui ne pouvait être acquis que par des années d’une pratique sportive de haut niveau, et avec l’expérience de la course de fond. Même Chancelière, elle n’avait pas renoncé à cela, en faisant son jardin secret, et ce avec une joie qui ne s’était jamais démentie. Aujourd’hui, courir lui permettait tout simplement de se vider la tête, de laisser jouer ses muscles élancés pour se focaliser sur son but, oubliant les difficultés et les rencontres vécues. Plus rien d’autre n’existait que ses pieds battant la terre et les pavés … Ainsi que son désir de délivrer les jeunes gens retenus contre leur gré. Ce pour quoi les deux maîtres étaient venus et avaient traversé la moitié de la galaxie.

Enfin, elle arriva en vue de l’astroport et de la cité l’environnant et finit par y entrer, ralentissant sa foulée pour marcher d’un pas rapide vers le lieu de rendez-vous. Enfin, elle fut en vue de Lorn, et s’empressa de revêtir un large Voile de Force autour de sa personne, puis ainsi transformée en une sorte de caméléon vivant, elle se dirigea vers l’épicanthix, enlevant son gant pour poser sa main métallique sur son épaule, afin qu’il sache qu’elle était là, le contact à nul autre pareil étant normalement suffisant pour transmettre le message sans avoir à parler. Nul doute qu’il avait mis à profit le temps passé sans elle pour trouver l’endroit où ils devaient se rendre, aussi Alyria remit son gant et lui emboîta silencieusement le pas, se logeant dans son ombre et calquant ses mouvements dessus, au point que les passants n’auraient sans doute vu qu’une sorte de brise étrange suivre le jedi, une onde légèrement mouvante mais peu perceptible pour l’œil non entraîné.

« C’pour ? »

L’épicanthix qui gardait l’entrée vers où Lorn les dirigea n’avait guère l’air commode, et Alyria s’empressa de se tapir dans les ombres un peu plus tandis que son amant négociait son passage. Après un temps qui lui parut infini, il lui céda la place, et elle se colla à lui pour passer dans l’intervalle réduit qui lui était accordé. Ils suivirent les instructions et descendirent dans les profondeurs de la terre … Pour déboucher dans un véritable complexe souterrain qui manqua lui arracher une exclamation de surprise. Une véritable organisation souterraine vivait là, comme un chancre sous la surface de Panatha. Et contre les murs, un sceau qui commençait à faire tristement parler dans la galaxie.

« Borenga a fait les choses en grand, ici … »

Alyria murmura ce triste constat à son amant, avant de se plaquer contre le mur en entendant des bruits de pas. Cette fois, ce furent un falleen et un arkanien qui débouchèrent, et non des épicanthix, et la sensation des phéromones de l’être vert frappa la trentenaire de plein fouet, cette dernière se mordant les lèvres pour tenter d’y rester insensible au mieux, se focalisant sur la douleur de sa lèvre mordue plutôt que sur la chaleur qui envahissait son corps. Les yeux du falleen se posèrent sur l’endroit où elle se tapissait, et elle craignit un instant d’être découverte … Puis enfin, ils passèrent leur chemin, et ce fut comme si une chappe de plomb la quittait à mesure que l’entêtant personnage s’éloignait.

« Essayons par-là. »

Ils s’engagèrent dans l’un des vastes couloirs, curieux de savoir ce que le bout allait bien pouvoir leur réserver …
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Si le jeune homme avait la réputation d'être un professeur sec et exigeant au sein de l'Ordre ce n'était pas pour rien, avec le temps et la pratique il était capable de faire la part des choses et de laisser ses émotions ou sentiments personnels de côté lorsque la situation l'exigeait. Le problème était que, à force de réprimer et laisser de côté ses pensées les plus intimes et ses questions laissées sans réponses, celles-ci finissaient toujours par remonter à la surface lors des moments où il était le plus vulnérable. Pourquoi n'avait-il pas dormi toute une nuit complète sans avoir de cauchemars depuis son arrivée au sein de l'Ordre jedi ? Pourquoi se réveillait-il toujours en sueur ? Parce que le sommeil était son moment de vulnérabilité, le sommeil était le moment où son esprit lui mettait sous le nez tous les sujets avec lesquels Lorn n'était pas totalement en paix.
Revenir sur la terre de ses ancêtres générait en lui un autre moment de vulnérabilité et, malheureusement, passer devant la tombe de son défunt frère en était le pinacle qu'il ne pouvait éviter ou ignorer. Pendant quelques secondes il brisa les barrières érigées dans son esprit et laissa ses douloureux souvenirs remonter à la surface en un flot ininterrompu, s'armant de toute une vie de calme et de contrôle pour lutter contre cette mer d'émotions s'écrasant vague après vague sur le roc qu'il était avec une violence renouvelée. Cette épreuve fut sans doute aussi difficile que n'importe quel autre combat qu'il mena au cours de sa carrière mais, comme toujours, Lorn tint bon contre vents et marées et termina cette lutte par un ultime remerciement à un être qu'il retrouverait tôt ou tard quand lui aussi rejoindrait la Force.

Le combat terminé et les esprits reposés, le colosse se changea et remis sans aucune hésitation ses deux armes à son aimée. Beaucoup aimaient personnaliser leurs manches par coquetterie ou désir de marquer leur individualité mais, à bien y regarder, les deux armes du jeune homme ne révélaient qu'un pragmatisme poussé à outrance. Il ne s'agissait que d'une paire de tubes de couleur sombre sans le moindre artifice ou le moindre ajout superflu pouvant perturber leur maniement, cette arme n'avait rien de personnelle et pouvait être utilisée par le premier venu sans difficulté mais cela n'arrivait jamais. En vérité mis à par leur créateur lui-même c'était la toute première fois que ces deux armes se trouvaient entre des mains étrangères, signe d'une confiance aveugle envers cette déesse aux cheveux de feu.
Lorn aurait pu se sentir nu sans ces deux instruments mais il n'en fut rien, en effet tous les maîtres savaient qu'un jedi n'était jamais désarmé car il avait toujours la Force à ses côtés, ce qui était sans compter sur son corps suffisamment endurci pour devenir une arme à part entière.

Serrant une dernière fois sa mère dans ses larges bras, ignorant royalement son géniteur, le colosse empoigna les commandes de l'appareil et décolla en direction de la ville qu'ils n'atteignirent que plusieurs heures plus tard. Laissant sa compagne partir en premier pour ne pas attirer l'attention, finissant seul le reste du trajet jusqu'à l'astroport. Descendant de son véhicule et se mêlant à la foule environnante, l'épicanthix ne manqua pas de sourire en voyant de nombreuses carrures égales à la sienne, imaginant désormais ce que ses collègues devaient voir tous les jours quand il arpentait les couloirs. Sentant soudainement la présence de sa compagne aussi bien physiquement qu'à travers la Force, sentiment des plus rassurants même s'il n'était pas inquiet le moins du monde, Lorn se dirigea vers un coin qu'il avait repéré quelques minutes plus tôt et, soutenant le regard du garde qui l'interpella, répondit effrontément :

« À ton avis, papy ? »

Papy ? À bien y regarder le garde devait à peu près avoir le même âge que Lorn mais cette réplique juvénilement stupide suffit à lui offrir une place jusque dans les profondeurs de cette planète. Que pouvait-il bien se tramer ici ? Que pouvaient-ils tous bien chercher en se terrant ainsi ? En s'engageant dans un couloir, sa compagne juste derrière lui,le maître d'armes eut bien vite sa réponse.
Cela commença par quelques bruits sourds au loin et à mesure que le duo avança les bruits se firent plus répétés et plus secs puis, après quelques poignées de secondes, Lorn put aisément déterminer la nature de ces bruits : des coups. Le duo pénétra dans une large pièce circulaire dans laquelle avaient été creusées des fosses improvisées dans lesquels se battaient des jeunes hommes par groupes de deux. C'était donc ça qu'ils cherchaient ici ? La violence aveugle ? Non, il y avait autre chose, il devait y avoir quelque chose à gagner pour que cela attire autant de jeu, que ce soit de l'argent ou autre chose il devait forcément y avoir quelque chose en jeu.
Un humain à la quarantaine bien tassée s'approche de l'épicanthix pour lui demander la raison de sa venue ici et, ignorant royalement du regard son interlocuteur pour se focaliser sur les combats, Lorn lâcha d'un air absent :

« Je veux participer au prochain combat.»

L'humain fronça les sourcils et ne tarda pas à protester, argumentant que cela ne fonctionnait pas ainsi et qu'il y avait un protocole à respecter pour avoir sa place parmi tous ces vaillants jeunes hommes. Pas patient pour deux sous, Lorn décida d'improviser et de laisser parler son personnage. Attrapant l'humain par le col et le soulevant jusqu'à ramener son visage très proche du sien, Lorn simula un énervement et une lassitude justifiées avant de cracher :

« Inscris-moi ou je te fais bouffer tes dents, grand père ! »

Le grand père des plus inquiets par ce coup de sang ne demanda pas son reste et tapota fébrilement sur sa tablette de données en demandant à Lorn sous quel nom il devrait l'inscrire. Jacen, juste Jacen, il n'y avait pas besoin de chercher plus loin. Bientôt un adversaire lui serait trouvé et il pourra gravir les échelons jusqu'à haut du classement. Ainsi , une fois tout en haut, pourrait-il rencontrer le recruteur et mettre un terme à cette farce.
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Alyria devait l’admettre : face à ce complexe bordé de tranchées de combat, elle se sentait terriblement impuissante. Certes, il était caché … Mais pour le moment, elle ne voyait pas de traces de chaînes ou de mauvais traitements particuliers, or organiser des combats avec des participants volontaires n’était pas en soi une infraction particulièrement grave. Il y avait bantha sous roche, sauf que pour le moment, elle ne pouvait rien faire, hormis regarder Lorn s’immiscer dans la chaîne de combat et forcer un des surveillants à l’inscrire, dans l’espoir sans doute de triompher du plus grand nombre et de parvenir par cette voie à obtenir une réponse. Sauf que puisqu’ils n’en connaissaient pas exactement la teneur … Eh bien, inutile de se le cacher, la maîtresse d’armes commençait à sentir l’inquiétude la gagner.

Evidemment, elle n’éprouvait aucune angoisse pour la santé de son amant. Ce dernier était plus que capable de défaire les adversaires les plus coriaces, et il l’avait démontré brillamment peu de temps auparavant en parvenant à vaincre son propre pair, un épicanthix qui devait avoir à son actif plus d’une lutte aisément remportée. Sa condition physique était exceptionnelle, son expérience forgée par des années au sein d’un Ordre notoirement exigeant en termes martiaux, il était un excellent duelliste à mains nues grâce à sa grande maîtrise du Tera Kasi, et la Force lui conférait des avantages qu’aucun de ses futurs opposants n’avait. Il pouvait aisément sentir les changements d’humeur de n’importe quel belligérant, anticiper leurs mouvements grâce à son acuité supérieure, et pousser son corps à des limites inhumaines en raison de sa connexion avec l’entité, ce qui fournissait une supériorité de fait contre tous les non-sensitifs. Bien sûr, il n’était pas à l’abri d’une erreur, d’un adversaire plus coriace ou plus retors que la moyenne, pour autant, la gardienne savait que Lorn disposait de tous les atouts nécessaires pour triompher. Le problème venait d’ailleurs, car en ne sachant pas s’il advenait quelque chose de particulier des vainqueurs, elle s’exposait à une surprise potentiellement désagréable. Or, rien n’agaçait plus la jedi que l’imprévu : planifier méticuleusement avait toujours été son lot, et elle s’y tenait avec une méticulosité qui frôlait parfois le monomaniaque.

Laissant son compagnon se préparer pour ses combats, Alyria s’éloigna donc, remontant les couloirs en prenant soin de rester constamment tapie dans l’ombre, la sueur commençant à perler à son front à mesure que l’effort pour maintenir le Voile de Force devenait plus coûteux. Ses réserves d’énergie n’étaient pas infinies, tout de même, et chaque minute supplémentaire ajoutait à son fardeau. Il lui faudrait à un moment donné s’économiser ou se révéler, sous peine de s’épuiser trop rapidement. Pour le moment, néanmoins, elle parvenait à tenir la cadence. Elle contourna quelques gardes, eu une ou deux frayeurs, mais fut heureuse de surprendre une conversation entre deux individus lourdement armés qui parlait d’un troisième larron et de son bureau, le ton de déférence indiquant clairement que ce personnage leur était hiérarchiquement supérieur, ce qu’elle recherchait depuis un petit moment. Ni une ni deux, elle s’empressa de les suivre, se servant de ses dons de Guérison pour abaisser ses pulsations cardiaques afin de rendre son déguisement encore plus parfait, chaque mouvement devenant d’une précision presque mécanique, totalement contrôlé à mesure qu’elle avançait. Ils finirent par ouvrir une lourde porte et y déposer une caisse, puis la refermèrent et sortirent. A l’intérieur, la jedi poussa un soupir de soulagement. Se faufiler sans les effleurer lui avait demandé un effort considérable, mais elle était parvenue à son but. Annulant sa protection, elle s’empressa de fouiller dans les papiers et datas éparpillés sur le bureau, avant de tenter de forcer le datapad qui avait finalement échoué dans ses mains. Cela lui prit une bonne demi-heure, et elle finit par se reposer sur la Force pour tenter de deviner comment fonctionnait les circuits, avec plus ou moins de succès, puisqu’elle effaça une bonne partie des données au cours de ce processus, à son grand regret. Pour autant, ce qui restait n’était pas inintéressant, bien au contraire.

Au travers de quelques notes et commandements, la formidable entreprise sur laquelle ils avaient débouché se révélait à elle. Les jeunes étaient attirés par des promesses de mercenariat et de combat, et le début donnait cette illusion … Jusqu’à ce que les vainqueurs soient désignés et emmenés à l’écart, puis drogués et acheminés vers l’espace hutt pour y servir de nervis auprès de Borenga, qui constituait ainsi une petite milice à moindre frais sur les mondes perdus de la République et d’ailleurs, des communications venant d’autres planètes attestant ce fait. C’était un trafic à échelle intergalactique … Et aux ramifications plus que dangereuses. Il était impératif que cela cesse, au moins sur Panatha, Alyria espérant que la peur saisirait les recruteurs et qu’ils abandonneraient leurs autres complexes. Elle aurait aimé faire plus, notamment pour ceux qui avaient déjà été emmenés … Mais en l’état actuel des choses, il était trop tard, et agir demeurait en dehors de sa portée, ce qui ne signifiait pas pour autant que rien n’était envisageable. Simplement, pour le moment, il fallait parer au plus pressé.

Revenant en toute hâte sur ses pas, non sans avoir forcé l’ouverture de la pièce de sa manière habituelle, c’est-à-dire par la force brute, la gardienne courut presque jusqu’aux fosses, consciente qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps avant que l’intrusion ne soit détectée. Il fallait faire vite. Apparemment, Lorn s’en était bien sorti, et elle le rejoignit rapidement dans son box, posant sa main sur son épaule comme elle l’avait fait précédemment, avant de déclarer :

« Lis ça. »

Et elle lui fourra le datapad dans la main, attendant sa réaction qui ne tarderait pas, puis enchaîna :

« Je vais essayer d’arrêter le prochain convoi … Et toi, tente de ne pas en faire partie. »

A ce moment, une alarme résonna. Trop tard.
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Sans être spécialiste en la matière le colosse avait au moins qu’il y avait quelques méthodes rapide pour qu’un recruteur arrive à ses fins. La première était de mener son enquête et de démarcher les clans locaux à la recherche de recrues potentielles mais, dans les cas où le communautarisme était trop important pour que cette méthode puisse fonctionner, il pouvait toujours organiser des concours avec des prix à la clé pour motiver les plus cupides et les plus téméraires. Fort heureusement pour ce mystérieux recruteur il ne pouvait pas trouver meilleure plante pour trouver des recrues, les épicanthix étaient des conquérants et avaient toujours fait de très bons mercenaires et gardes du corps de par leur impressionnante carrure. Quelques beaux discours, des aventures avec de la gloire et un peu d’argent puis le tour était joué, il n’en fallait jamais beaucoup pour motiver les plus jeunes esprits à braver l’inconnu dans l’espoir de devenir célèbre.
Dans une autre vie Lorn aurait pu aisément faire partie de cette foule d’idiots mais aujourd’hui il n’en jouait que le rôle, aujourd’hui il était là pour botter des culs en espérant que cela puisse le mener quelque part : un problème des plus simples. Sentant son amante s’éloigner de lui pour aller fouiner avec une discrétion que l’épicanthix ne saurait égaler, le colosse se laissa tomber dans la première fosse devant lui quand son pseudonyme du moment fut appelé. Si son jeune adversaire semblait fébrile et inquiet Lorn comprenait facilement pourquoi, le garçon en face de lui était ici pour se prouver quelque chose à lui-même et le maître d’armes était le tout premier obstacle sur son chemin.
Cherchait-il à gagner le cœur d’une femme ou bien à faire fortune en arrivant au sommet ? Peut-être cherchait-il le respect dont il pensait manquer ? Les raisons importaient peu au jedi qui, sans attendre, se rua à toute berzingue vers son jeune opposant qui démontra une piètre résistance. Le garçon tenta vainement d’esquiver le premier assaut de Lorn – un coup de pied balayé à ras du sol – mais le guerrier expérimenté enchaîné avec un crochet qui coupa le souffle du garçon avant de le jeter à terre par un uppercut bien placé.

Observant les dents s’échapper de la bouche de son jeune opposant, accompagnées d’une bonne dose de sang et de salive, le colosse jeta un œil au corps inanimé de son opposant tombant lourdement à terre avant de le gratifier d’un discret :

« Tu me remercieras plus tard.»

Le jedi n’était pas certain de ce qu’il advenait des gagnants et des perdants mais, dans la logique de recrutement qui poussait à organiser de tels combats, les perdants devaient sans doute être laissés de côté et l’attention du recruteur était reportée sur les vainqueurs. Être perdant assurait donc qu’on soit laissé de côté – tranquille – et de ce fait en lui bottant le cul Lorn venait probablement de sauver la vie de ce blanc-bec. Dans les dizaines de minutes qui suivirent plusieurs autres combats s’enchaînèrent avec une difficulté croissante mais qui ne mette le colosse en difficulté, celui-ci avait la Force à ses côtés pour atténuer la douleur et accompagner ses coups : un allié sans faille.
Alors qu’il allait sortir de la fosse en attendant son prochain opposant le jeune maître sentit la présence de sa camarade se rapprocher de lui et, enfin, celle-ci lui tendit un texte qu’il ne tarda pas à lire. Drogue et esclavage, c’était donc cela qui se tramait ici ? Lorn aurait bien aimé broyer ce texte pour le voir disparaître mais il constituait une preuve, de plus l’alarme qui suivit le força à focaliser son attention sur le chaos qui s’empara de cette communauté.
Tous commencèrent à courir dans tous les sens et, au loin, Lorn observa quelques agents se rapprocher des différents vainqueurs pour tenter de les rassemble autant que possible malgré le bordel ambiant. Bien sûr le colosse ne fut pas épargné et le grand-père de tout à l’heure l’invita à rejoindre le reste du petit groupe, prenant soin de ne pas toucher le jedi pour ne pas de nouveau s’attirer ses foudres.
Les plus jeunes semblaient déboussolés ce qui était compréhensibles mais les agents tentèrent de les rassurer avant de leur montrer le chemin d’une sortie seconde débouchant non loin de l’astroport, l’un des agents leur expliqua qu’une fois là-bas ils prendraient un transport pour se diriger vers leur nouvel employeur. Bien sûr la procédure ne s’était pas passée comme prévue, la faute à cette satanée alarme, mais le jedi n’en était pas mécontent : le processus avait été accéléré. Silencieusement il débuta donc sa course à travers les étroits couloirs menant à cette maudite sortie secondaire et, à chacun de ses pas, il ne cessa de se demande quand viendrait le coup de la drogue et surtout quand se mettre à agir vraiment. Bientôt, très bientôt.
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