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Quelque part sur Coruscant — Deux semaines plus tôt

— … en somme, je pense que vous serez tout à fait satisfaite des récents résultats. Nous avons réussi à restreindre la fréquence de mutation de plus de 90% pour cent et le ciblage génétique est devenu plus précis.
— Mais ça ne fonctionne toujours pas ?
— Eh bien, hmm…

Le chef de projet se mit à regarder par les vastes fenêtres de transparacier d’un air absent. Prudemment, il répondit :

— Tout dépend de ce que vous appelez fonctionner.
— Je suis sûre que ma définition est semblable à celle de nos clients. Le ciblage génétique doit être optimal. Et nous avons déjà un mois de retard…
— Les recherches seraient plus concluantes si nous pouvions démanteler l’essentiel de notre opération sur Namadii et procéder à d’autres tests ailleurs, sur du matériel génétique différent.

La directrice poussa un soupir. Prolonger ainsi la phase de développement, sur une autre planète qui plus est, c’était s’exposer à de nouveaux coûts. La rentabilité de ce produit ne cessait décidément de chuter. Pensivement, elle pianotait des doigts sur le bord de son bureau. Après plusieurs secondes de réflexion, elle finit par répondre d’une voix lasse :

— C’est entendu. Évacuez le personnel de Namadii. Je compte sur vous pour que les choses soient faites dans la plus grande discrétion, cela va sans dire.
— Oui, madame.

*

Namadii — Cinq jours plus tôt

Velya posa sa fine vibrolame dans la petite bassine métallique à côté d’elle. L’humaine secoua la tête, désemparée, avant de relever les yeux vers l’homme d’une cinquantaine d’années qui lui faisait face.

— Je suis désolée, Wes. Je suis chirurgienne, pas pathologiste. Ni légiste. On est très loin de mon domaine de compétences. Tout ce que je peux dire, c’est que c’est… mystérieux. Enfin atypique.

Séparé par le cadavre ouvert entre eux, sur la table de dissection de la morgue, dont il fallait bien avouer qu’elle ne servait pas souvent, les deux humains considéraient la situation d’un air très préoccupé.

— Mais ça ressemble aux trois autres ?
— Autant que je puisse en juger.
— Et il y a lieu d’en craindre de nouvelles ?
— Difficile à dire. Ce n’est peut-être pas viral ni même… Je ne sais pas. C’est possible. C’est très possible, je suppose.
— On aurait besoin de spécialistes. Quelqu’un du noyau. Quelqu’un de plus compétent. Sauf votre respect, doc’.

Velya balaya les excuses du chef de la sécurité d’un revers de la main.

— Mais la République ne s’intéresse pas vraiment aux planètes dépeuplées de sa périphérie. Pas quand elle doit protéger ses routes commerciales, gérer ses affaires politiques, se défendre contre…
— Je connais peut-être quelqu’un. Quelqu’un qui pourrait nous aider. Ou trouver des gens susceptibles de nous aider.

*

Temple d’Ondéron — La veille

— Intéressant ?
— C’est un cours pour les Padawans.

La Guérisseuse se pencha pour observer les hologrammes qui flottaient au-dessus du datapad modifié dont Atalan se servait pour travailler.

L’approche génétique fondamentale dans la gestion par cloisonnements des épidémies virales. Je ne suis pas sûre que ce soit, comment dire… Très accessible.

Un demi-sourire se dessina sur les lèvres du Maître.

— Je plaisantais.

La Guérisseuse parut soulagée. À sa décharge, Atalan avait la réputation d’attendre beaucoup de ses élèves — parfois trop. Cela dit, ces derniers mois, le Maître s’était familiarisé avec l’art délicat de la pédagogie et il était mieux à même, désormais, de cerner les aptitudes des nouvelles recrues. Il ne lui serait pas venu à l’idée de donner un cours pareil.

Le Miraluka coupa l’appareil et, sans vraiment se tourner vers son interlocutrice, il demanda :

— Je peux faire quelque chose ?
— Eh bien… Nous avons une mission qui pourrait t’intéresser. Une mission… Disons à moitié pédagogique, à moitié, je suppose, épidémiologique. Dans un endroit reculé. Avec probablement des insectes immenses et de la nourriture douteuse. Je me suis tout de suite dit que ça t’intéresserait.

Atalan hocha lentement la tête.

— Pour commencer, Luke Kayan, ça te parle ?

*

Astroport commercial de Coruscant

Luke Kayan, en vérité, ça ne lui parlait pas beaucoup. Il connaissait vaguement l’ancien apprenti de Sai Don. Il ne lui avait jamais parlé mais il l’avait déjà… vu. Aux yeux d’un Miraluka, le Hapien était un être exceptionnel. Sa présence dans la Force avait quelque chose de spectaculaire. Spectaculaire en tout cas pour un esprit comme Atalan, particulièrement sensible à la Force Vivante. Dans l’un des astroports commerciaux de Coruscant, ceux par où transitaient les réserves agricoles de la République, Maître Pirin n’avait besoin d’aucune indication pour le reconnaître. Au milieu des autres êtres vivants, au milieu de la transparence terne des objets inertes que la Force n’animait pas de sa pulsation vitale, Luke Kayan détonait.

Le rendez-vous avait été fixé sur Coruscant, au départ du couloir hyperspatial qui les mènerait à Namadii. Ils embarqueraient sur un vaisseau commercial, un transporteur agricole qui faisait continuellement la navette le long du couloir de Namadii. C’était Atalan qui avait choisi ce moyen de transport. Il détestait piloter lui-même. Et puis, se mêler à la population des voyageurs, c’était toujours un excellent moyen de commencer à découvrir un monde. Prendre la température, en quelque sorte.

Ce n’était pas sans appréhension qu’Atalan louvoyait entre les voyageurs pressés, les négociants en gros, les capitaines de corvette, les ouvriers agricoles, saisonniers d’une planète à l’autre, qui vivaient au rythme des routes commerciales et des différents climats planétaires. La mission était simple, familière même, mais Luke Kayan… Luke Kayan était un cas compliqué. Atalan n’avait jamais eu un, comment est-ce que le Conseil des Guérisseurs avait formulé ça, déjà ? Un stagiaire. Il ne savait pas trop ce qu’il devait faire. Après avoir appris sous Maître Don, en quoi Luke pouvait-il profiter de son expertise ?

Comme souvent, le jeune Maître se sous-estimait. À tort, il était persuadé que le Chevalier qu’il s’apprêtait à rencontrer ignorait jusqu’à son nom et, à tort, il était convaincu de ne pouvoir rien lui apporter de plus. L’idée d’être une sorte de supérieur hiérarchique le mettait mal à l’aise. Avec les Padawans, bien sûr, c’était différent. Mais entre Chevaliers ? Évidemment, il n’était plus un Chevalier. Plus maintenant. Maintenant, la double responsabilité de Maître Jedi et de membre du Conseil des Guérisseurs pesait sur ses épaules.

— Attention aux gorets de Mrisst, ils dégagent une odeur épouvantable.

Le Miraluka s’était glissé à côté de Luke. Il portait des habits de voyageur, beige ou marrons, et rien n’annonçait chez lui le Maître Jedi. Il s’abstint de désigner les animaux dont il parlait : les cris de cent ou deux cents porcins, dont les cages gigantesques étaient déchargées d’un vaisseau-cargo pour une grue automatique, résonnaient sur le quai immense où le Chevalier attendait.

Pour être honnête, dans cet astroport, tout puait. C’était un mélange indescriptible d’odeurs de bétail, de sueur et de vieux cargos. Parfois, à la faveur du vent et quand on déchargerait une cargaison plus végétale, des effluves d’herbe fraîche et même de fleurs se répandaient pendant quelques secondes dans le spatioport et puis, d’un coup, on avait à nouveau l’impression de pique-niquer dans une porcherie.

— Le capitaine Borg est là.

Atalan avait cette habitude de Miraluka de parler de choses et de gens qui se trouvaient derrière lui ou qui étaient encore dissimulés pour le commun des mortels, sans se retourner, sans prendre la peine de faire semblant d’avoir, comme les autres espèces, des yeux et le besoin de regarder. Mais Luke, et Atalan le savait, était mieux placé qu’un autre pour ne pas se soucier de cette particularité.

Le Maître Jedi tourna les talons et se mit à marcher à grandes enjambées vers une montagne de caisses. Borg se servait de l’une d’entre elles comme bureau provisoire, le temps de faire le compte de ce qui rentrait dans son vaisseau. C’était un humain d’une soixantaine d’années, auquel il manquait quelques dents et beaucoup de diplomatie, mais qui entretenait avec certains Jedis des relations excellentes, parce qu’il était toujours de bons conseils sur les mondes des Bordures. On l’avait recommandé à Atalan.

— Capitaine Borg.
— Ce serait-i pas les messieurs qui veulent aller à Namadii ?
— De fait.
— V’z’êtes en avance, les gars. On va encore charger pendant, oh, une bonne heure.
— Pas de problème en perspective ?
— Des problèmes ? Pour aller à Namadii ?

Borg laissa échapper un rire franc et son second, une femme beaucoup plus jeune au physique quelque peu ingrat, se fendit d’un sourire indulgent.

— Y a jamais d’problème pour Namadii. Tout l’monde s’en fout de Namadii.

Borg baissa la voix.

— Enfin, leur dites pas là-bas que j’ai dit ça, hein.
— Ça restera entre nous.
— Mon bébé est à quai, si des fois vous voulez aller vous installer.

D’une main calleuse, Borg désigna le bébé en question, un cargo qui avait connu des jours meilleurs mais qui, à coup sûr, remplirait son office. Atalan hocha la tête et, après avoir remercié le capitaine, il se dirigea en compagnie de Luke vers le cargo.

— J’espère que vous tenez bien la gnole artisanale. C’est souvent indispensable pour se mêler aux hommes d’équipage.

Pour sa part, Atalan, dont la constitution était redoutable, savait lever le coude — quand les nécessités d’une mission l’imposaient, évidemment.

— Ça et les chansons un peu lestes. Mais surtout la gnole.
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Retouches d'une thèse enfin terminée, ou début d'un second volume ?

C'était l'une des nombreuses réponses auxquelles Luke espérait trouver une réponse sur Namadii, petite planète perdue qui n'intéressait personne sauf lui. Lui et Atalan Pirin qui serait son "maître de stage" dans l'art de la guérison. Avide de connaissance, et surtout de se rendre aussi utile qu'il le pouvait, le Hapien n'avait hésité qu'une fraction de secondes-le temps de s'assurer que son aîné ne serait pas importuné par sa présence.- avant d'accepter la réunion de leurs missions respectives. Bon, dans le cas de Luke, elle était plus personnelle qu'autre chose, puisqu'il s'agissait de remplir la bibliothèque du Temple, pour le moment dans un petit recoin de feuilles reliées non certifiées par les vénérables Jedis, mais tout de même. Pour espérer passer devant ce Conseil dans le Conseil et voir sa thèse se transformer en livre reconnu de ses pairs, Luke souhaitait peaufiner encore un peu ses recherches, à moins que ce ne soit, comme il y avait également songé, le début d'un nouvel écrit. Tout dépendrait du temps que lui laisserait son apprentissage auprès d'Atalan devenu sa priorité. En effet, cette mission touchant directement des ruraux affectés par un virus ou du moins, une maladie étrange les tuants les uns après les autres était prise très au sérieux par le Chevalier. Il n'y avait pas de petite population perdue à ses yeux, ni Républicaine, juste des gens souffrant qu'il pouvait essayer de soulager.

Aussi, bien qu'il ne soit qu'en "stage", le Hapien n'avait pas l'intention de s'endormir sur son bureau d'études, ni sur sa thèse. Il était particulièrement décidé à donner un coup de main à Maître Pirin, tout en stressant aussi à l'idée de ne pas être assez bon. Relativement peu formé à ce niveau, Luke n'avait suivi qu'une branche du Cursus des Guérisseurs, et espérait qu'on l'air signifié au Maître Jedi d'ailleurs. Histoire de ne pas trop le décevoir. De plus, étant aveugle, il avait raté la moitié du cours, surtout lors de la pratique, même s'il reconnaissait lâchement au fond de lui être assez content de ne pas visionner des cadavres à disséquer. Non, décidément, l'art de la guérison n'était pas pour lui. Tout du moins, pas dans son entièreté. D'abord Jedi Consulaire, le Hapien avait surtout ensuite l'intérêt d'utiliser son lien particulier avec la Force pour soigner avec ses dons ainsi que ses connaissances théoriques. Sa curiosité insatiable couplée à son envie de bien faire le mèneraient certainement à toucher au scalpel si on lui l'ordonnait, mais il se voyait mal dans cette position honnêtement. Bah, il verrait bien, confiant envers le savoir-faire de son professeur, et surtout pas le moins du monde offusqué d'être relégué au rang de "Padawan". Au contraire, l'idée le ravissait, le ramenant dans sa prime jeunesse, lorsque Saï l'avait pris sous son aile. Bien sûr, le jeune homme ne s'imaginait pas non plus être aussi "passif" qu'un apprenti, mais il était heureux de retrouver ce statut d'étudiant, persuadé qu'il en saurait beaucoup plus à la fin de son séjour.

Partisan du concept de l'apprentissage éternel, ayant été à bonne école en ce sens, le Hapien était loin d'imaginer que son aîné doutait pouvoir lui enseigner quelque chose. Au contraire, c'était lui qui craignait de ne pas être capable d'assimiler assez vite la tonne de savoir qu'il ignorait encore. Le Miraluka était une personne intransigeante à ce que l'on disait, menant ses élèves au plus haut niveau dès le début. Chose qui n'ennuyait pas le jeune Jedi, ayant lui aussi tendance à philosopher très rapidement avec n'importe qui sur de hauts sujets casse-pieds pour lesquels seules des personnes ayant comme surnom "le somnifère" pouvaient se passionner.

Vêtu d'une simple chemise grise et d'une petite veste noire simple, le tout serti d'un jean à coupe droite, le jeune homme avait été incapable de se donner une allure plus modeste. Être Hapien n'avait pas que des avantages, au contraire même. Oui, la beauté pouvait être un sacré frein dans la vie, surtout lorsqu'on n'en profitait pas. Luke et ses longs cheveux blonds-pas spécialement entretenus, même négligemment attachés en queue de cheval- parfaitement soyeux, fleurant bon la vanille après un simple shampoing, avait toutes les peines du monde à se faire passer pour n'importe quel quidam. Lors de sa dernière mission, on avait eu du mal à affadir ses traits, bien que la teinture était parvenu à le rendre légèrement plus banal. Cependant, aujourd'hui, ne disposant pas d'autant d'effets, Luke parvenait encore à se détacher de la masse, devinant des regards se promener sur sa silhouette fine et ses traits de Hapien sans défaut. Il passait pour un étudiant aristocrate -ou du moins de haute école.-, augmentant cette impression à cause de son phrasé. En réalité n'aspirant qu'à une vie modeste, quoique non dénuée non plus-il fallait l'avouer, l'austérité complète préconisée par l'ancien Ordre ne le dérangeait pas, mais seulement pour un temps, et Luke ne se voyait pas se priver éternellement de douches ou d'un petit lit, même si ce devait être une paillasse.- enfin bref, pour la discrétion, il repasserait malgré ses vêtements simples.

Un "grouik grouik" tranchant particulièrement avec "l'élégance" involontaire du jeune homme vint ternir le tableau, manquant de l'aider à se rendre moins attractif. Heureusement, une bonne âme le prévint. Esquissant un pas en arrière bien qu'il ignorait exactement où se trouvaient les fameux gorets, Luke remercia la personne, qui, en plus de posséder un certain altruisme semblait également maîtriser la Force. L'aura avait soudainement sauté au nez du Hapien, à défaut des sympathiques porcs. Ce devait être Maître Pirin, l'évidence le prenant légèrement par surprise, Luke le salua en bafouillant un peu, se rappelant au dernier instant qu'il valait mieux éviter les termes trop jedis. Il était en avance-mesure de précaution habituelle chez lui- et ne comptait pas sur la présence du Maître avant une bonne demi-heure.

-Bonjour M... Monsieur.

Malgré les occasions qu'il avait eu d'infiltrer, Luke avait failli jeter un Maître en pâture aux gens qui le bousculaient pour circuler dans le hangar. Habitué depuis tout petit à énormément respecter la hierarchie-Saï lui avait toujours permis de discuter, encouragé même à critiquer mais ne l'avait jamais invité à l'appeler par son prénom, comme c'était la lubie de certains aujourd'hui.- le jeune homme avait du mal, en mission avec un autre Jedi de rang supérieur à l'appeler fadement "monsieur". Il se ressaisit, le rouge aux joues et tourna la tête lorsque Maître Pirin lui signifia que leur Capitaine était arrivé. Borg. Même son prénom sonnait... Borné. Luke se garda bien de dire quoique ce soit à part des salutations sur un ton soigneusement choisi: poli sans être trop de la "haute".

Un peu honteux, il joua donc les Padawans passifs qu'il ne voulait surtout pas être, bien que pour le moment, il n'ait pas trop le choix. Montant à la suite d'Atalan dans la navette, Luke se rendait compte que le Miraluka l'impressionnait quelque peu. Il n'était pas habitué à sentir une présence aussi puissante, aussi omniprésente dans la Force, et la seule aura de ce genre qu'il connaissait appartenait à son amie Elora. Cette dernière était finalement revenue au Temple après avoir fui à cause d'une déception amoureuse... Celle que son propre ami lui avait asséné en lui avouant être homosexuel. Depuis, tous deux avaient fait la paix, et Elora apprenait petit à petit à ne ressentir que de l'amitié pour lui, cependant, les choses ne seraient plus jamais pareilles. Luke avait perdu sa soeur de coeur, il y avait comme une dissension au sein de la Force, entre eux et ils se voyaient moins. Ressentir à nouveau ce type d'ondes caressant son esprit, respectueuse mais à ses yeux, tout à fait capable de lire tout ce qu'il y avait dans sa tête était aussi émouvant, fascinant que gênant. De plus, le Hapien n'avait plus fait de mission de ce type avec des inconnus. Enfin des inconnus... Autre point dérangeant, la réputation d'Atalan Pirin. Ayant une certaine tendance à admirer grandement n'importe quel "nom" du Temple et à se sous-estimer, Luke n'était pas forcément à l'aise face à ce "grand", alors qu'on aurait pu croire le contraire vu la renommée de son maître. Cependant, il avait toujours dissocié leurs deux noms, afin que la gloire de son ancien mentor ne retombe pas sur lui. De ce côté le Chevalier avait sa propre petite renommée après être revenu dans un état physique lamentable de l'académie de Korriban mais mentalement lumineux, quelques missions réussies d'envergure -comme n'importe quel Chevalier pouvait en avoir- avaient aussi fait raisonner son nom, d'ailleurs lui et Yun étaient devenus de "grands amis" d'Arkania, mais il estimait que son confrère avait un palmarès beaucoup plus important... Et plus original aussi.
Sa façon très moderne d'enseigner préoccupait également un peu le jeune Jedi qui partageait de façon mitigée l'opinion d'Atalan. Curieux de nature, Luke aimait apprendre et surtout, bien apprendre. Cependant, son éducation stricte de Jedi, sa tendance à prendre le code au premier degré-même s'il se décoinçait petit à pett.- le rendaient automatiquement fermés à certains... Savoirs. De ce fait, il avait été bien ennuyé lorsqu'il avait un jour surpris deux Padawans en train de... S'amuser dans une salle vide. Le Hapien alors persuadé que le moindre rapport non protégé entre deux personnes de sexe opposé donnait un enfant avait envoyé la gamine protestant qu'elle n'était pas en "période de" à l'infirmerie. Il n'avait en réalité aucune idée de ces choses là, sinon peut-être qu'il avait enfin fini par comprendre à 18 ans, que non... On ne tombait pas enceinte en s'asseyant sur la cuvette des toilettes. Or, son aîné était connu pour donner ce type d'enseignements, selon Luke, pas vraiment nécessaire. Il s'était décoincé depuis et reconnaissait la difficulté de résister à l'attrait du désir physique. Aussi, ne préconiserait-il plus une simple abstinence, sinon l'évitement maximum de ces rapports, et une protection efficace à chaque fois. Ce n'était quand même pas si compliqué d'enfiler un... Comment ça s'appelait déjà ? Ah oui, un préservatif. Zut, ce n'était pas lui qui s'occupait de ça quand ça lui arrivait personnellement à la fin. Mais en tout cas, ce n'était pas bien compliqué, alors pourquoi perdre du temps à enseigner ça aux élèves ? C'était presque les inviter à pêcher par excès. Que les filles aient la peur presque systématique de tomber enceinte les forçaient à réfléchir au moins. Enfin, lui n'en savait pas vraiment grand chose en réalité. A Atalan de gérer ça... Mais qu'on ne lui en parle pas !

Heureusement, leur mission ne portait pas sur ce sujet, sinon un domaine bien plus important et par manque de chance, grave. La santé de toute une population, aussi dégarnie soit-elle sur ce bout de planète rurale était en jeu. Ne restait plus qu'à s'y rendre, même

-Je suis absolument désolé. Je ne tiens pas l'alcool.

Un peu honteux de ne pouvoir s'infiltrer correctement -Oui... Il très sérieusement étudié les différentes manières de s'alcooliser ainsi que les divers effets secondaires de ce type d'activités, et même commencé à apprendre des chansons paillardes pour une autre mission de ce genre, avant de fermer la voix graveleuse d'holonet, un rouge bouillant s'invitant sur ses joues.- Luke se contenta d'un petit sourire désolé. Un autre inconvénient de sa constitution Hapienne était sa fragilité. Peu habitué à boire, voir pas du tout même s'il avait complètement fini drogué une fois par hasard -et le résultat n'avait pas été beau puisqu'il avait demandé une Sith en mariage.- le jeune homme ne tenait pas un verre d'alcool. La seule fois où il avait un peu bu, pour accompagner un repas fameux au Galactiquement Vôtre en bonne compagnie, d'abord pour ne pas vexer l'ambassadeur d'Hapès, il avait fini dans son lit. Pas saoûl mais bien pompette et décomplexé, aidé en plus par une situation rocambolesque de vol généralisé dans son hôtel. Bref, à éviter dans son cas, même si c'était au prix de l'intégration dans l'équipage. Mais d'ailleurs. Avaient-ils réellement besoin de se mêler à ces hommes ? Non pas que le Hapien veuille faire la fine bouche, seulement, il ne voyait pas vraiment l'intérêt. Peut-être que Maître Pirin souhaitait leur soutirer des informations non-dites sur Namadii ? Possible, après tout, le Capitaine avait beau affirmer qu'il ne se passait jamais rien dans un tel coin paumé, les dits trous perdus étaient souvent remplis de secrets, et des pires qui soit. Un peu comme dans les quartiers pauvres de Coruscant, ou justement les petites maisons de campagne retirées. Ce mystérieux virus devait bien provenir de quelque part.

-Pensez-vous que cette infection puisse être d'origine criminelle ? Et que l'équipage en saurait quelque chose ? Que l'hécatombe soit issue du hasard, de contamination ou volontaire par ailleurs ?

Souffla-t-il discrètement, déjà plongé dans sa mission. Les sourcils fins froncés, le jeune homme ajouta le plus sérieusement du monde.

-Si vous avez accès à l'une de ces petites fioles qu'ils utilisent pour boire... Comme vous l'avez suggéré pour nous intégrez, prêtez-moi en une opaque, je la remplirai d'eau. J'ai étudié, quoique certainement pas avec suffisamment de sérieux, les réactions d'une personne en état d'ébriété. Je tâcherai de leur paraître... Sympathique.

Il ne voulait surtout pas décevoir Maître Pirin dès le début, quand bien même l'idée de se mélanger totalement à l'équipage lui paraissait étrange. Une blague ? Peut-être en était-ce une, mais le pauvre Chevalier n'y avait même pas pensé en réalité. Toutefois, son petit côté farceur -très discret de prime abord, mais vraiment hein.- le poussa à essayer de détendre l'atmosphère à son tour.

-Rassurez-vous, il paraît que je n'ai pas une mauvaise voix. Au moins, ça ira pour les chansons.

La première fois qu'on lui avait signalé qu'il possédait en effet une certaine capacité au chant, c'était dans la villa de Jason. Ce dernier amusé avait pu entendre son compagnon entamer une petite berceuse dont il se souvenait de quelques bribes après une mission dans un camps. Il lui avait alors dit qu'au moins, si les Jedis ne voulaient plus de lui, le blond pourrait se reconvertir. Fâché au début, le jeune homme avait vertement rappelé que cela n'arriverait jamais, tout du moins, de son propre gré avant de se rendre compte que ce n'était qu'une farce et accepter de rire. Les conversations avec l'ambassadeur concernant le Temple et l'investissement de Luke pour son Ordre étaient généralement houleuses il faut dire. Heureusement, aujourd'hui, le blond était en compagnie d'une personne partageant ses idéaux, et parfaitement capable d'appréhender sa conception de la vie.

Au fur et à mesure donc, le Hapien se détendait, voyant le bon côté des choses, hâtif de commencer à apprendre. Apparemment, ce serait plus tôt que prévu, puisqu'il allait pouvoir étudier le mode de vie d'une espèce à part; les membres d'équipages d'un rafiot de l'espace. Intéressant en soi. Tout était bon à prendre pour un éternel étudiant un peu trop sérieux mais plein de volonté comme Luke. Pauvre Atalan, il allait devoir apprendre que ce dernier avait tendance à tout prendre au premier degré.
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La rampe d’embarquement était située dans un coin du vaisseau, laissant la plus grande partie de la coque aux grandes baies de déchargement, autour desquelles s’activaient des droïdes-élévateurs. Pas de cargaison vivante en perspective : des machines, des engrais chimiques et du matériel typique de celui qu’on utilisait sur les planètes peu peuplées des Bordures, là où les exploitations avaient des tailles plus modestes que les grandes agrofermes qui formaient le paysage des mondes agricoles tout autour du Noyau.

Sur le flanc du transporteur, on lisait à peine le nom Danae écrit en basic sous le matricule d’identification du vaisseau. Le Danae abritait ordinairement cinq à six hommes d’équipages, en dehors du capitaine Borg et de son second, mais il lui arrivait de transporter quelques passagers, des familiers du capitaine ou des voyageurs qui lui étaient recommandés soit par des amis qui travaillaient dans les administrations de Coruscant, soit par des membres de l’Ordre Jedi. Vétéran de quelques échauffourées républicaines, Borg avait conservé de son passé militaire un patriotisme pragmatique et de solides relations.

C’était donc l’esprit assez tranquille qu’Atalan se préparait à voyager à son bord, ce qui, de toute évidence, n’était pas le cas pour le Chevalier dont aurait juré qu’il allait se décomposer sur la rampe d’embarquement. Il faut dire que la suggestion alcoolique d’Atalan n’avait pas été entièrement innocente : comme souvent, les remarques du Guérisseur avaient vocation à révéler la personnalité de ses interlocuteurs. Atalan avait parfaitement conscience que tous les Jedis n’avaient pas passé, comme lui, le plus clair de leur vie dans les recoins douteux de la République ou de l’Espace Hutt, dans les forêts sauvages où s’étaient abîmés d’infortunés pilotes qu’il fallait à tout prix secourir ou dans les bouges sordides où quelque aventurier vous promettait de vous conduire à d’anciennes ruines.

S’il devait embarquer Luke dans les confins agricoles de la République, il voulait savoir à quel point le jeune Hapien était… eh bien, Hapien, justement. Le Consortium de Hapès n’était certes pas l’endroit le plus cosmopolite au monde et les Hapiens n’avaient pas toujours la réputation d’être de front aventurier, une réputation qui pouvait tenir largement aux préjugés que leur beauté faisait naître mais dont il n’était pas exclu qu’elle vînt aussi d’un tempérament casanier. Luke était un Jedi et Atalan ne doutait pas qu’il eût été déjà exposé à bien des aventures mais la voie des Consulaires offrait parfois des existences plus familières du calme policé des salons diplomatiques que de la rudesse des périples galactiques.

Donc, Atalan tâtait le terrain.

— Je vois.

Façon de parler.

L’ancien Padawan de Saï Don était beaucoup plus humble qu’il ne l’aurait cru mais il se rendait compte que sa propre inquiétude avait été injuste. D’eux deux, Luke était sans doute le plus effrayé par cette mission.

— Paraître sympathique est tout à fait superflu : il suffit de l’être.

Bien sûr, entre le beau Hapien civilisé et les routards de la Galaxie, les critères sur ce qui constituait un voyageur sympathique devaient sensiblement différer. Ce disant, les deux Jedis s’engagèrent dans leur « cabine », qui tenait plutôt du placard où l’on avait miraculeusement casé deux couchettes et une cabine de douche spatiale qui exigeait à coup sûr de sérieux talents de contorsionniste. 

Le voyage vers les Régions d’Expansion, où se trouvait le secteur de Namadii, prenait ordinairement trois jours depuis le Noyau Profond mais la planète, mais le fameux couloir hyperspatial qui reliait la capitale à la colonie offrait le luxe d’un voyage en un seul bond. Qui plus est, pour voyager à vide le moins possible, Borg commençait par décharger son matériel à Namadii, récupérer des marchandises et remonter le couloir en direction de Coruscant, de sorte que la Danae fût toujours pleine. Ainsi, il ne faisait d’escales qu’au retour et une trentaine d’heures serait suffisante.

Atalan se débarrassa de son manteau. La porte automatique de la cabine s’était refermée derrière eux et il se sentit plus libre de répondre aux questions de son compagnon de voyage.

— Le capitaine Borg a une excellente réputation et son équipage lui est fidèle depuis de nombreuses années. Je doute que nous ayons à attendre de mauvaises surprises de sa part. Ma suggestion était plus, disons, d’ordre ethnographique.

Du bout des doigts, Atalan effleura le bracelet à son poignet. Sans écran, la machine offrait d’infimes variations de texture dont le Miraluka tirait les informations essentielles : l’heure, quelques données simples tirées de l’Holonet ou, éventuellement, les commandes de tel ou tel appareil auquel le bracelet pouvait être connecté. C’était un ustensile tout à fait courant et pour lui l’une des nombreuses manières de surmonter une difficulté sérieuse dans un monde comme le leur : l’incapacité à percevoir, malgré la Vision de Force, ce qui n’existait pas — c’est-à-dire les hologrammes.

— Pour connaître un monde agricole, refermé sur lui-même, communautaire comme Namadii, il y a généralement trois solutions. Consulter les archives de la République, de l’Ordre ou de telle ou telle administration, ce que vous avez fait comme moi, je n’en doute pas…

On y apprenait, à vrai dire, assez peu de choses. Oh, il y avait, bien sûr, des rapports économiques complets sur le rendement agricole ou, mais c’était plus anecdotique, industrielle de Namadii, les listes électorales de chaque élection ou les recensements, ce qui, somme toute, n’aidait guère à se faire une idée précise de la planète. Atalan savait au moins, désormais, que Namadii comptait un million d’habitants, en gros, répartis sur l’ensemble de la planète entre les deux pôles, sauf dans les rares déserts climatiques, et que les installations groupées comptaient communément cinq cents à mille habitants au même endroit. La planète était presque exclusivement peuplée d’êtres humains, qu’on pouvait difficilement appelé encore des colons, puisqu’ils vivaient là depuis plusieurs générations.

— On peut parler aux habitants, évidemment. Et on peut parler aux voyageurs qui s’y rendent souvent. Chaque source aura sa propre vérité sur la planète, sur les gens qui y vivent, sur ce qui est considéré comme normal ou hors du commun. Et de la même manière qu’il faut savoir quoi demander à un archiviste et comment le demander, il faut savoir comment parler aux mécaniciens des vaisseaux-cargos.

À strictement parler, ce n’était pas de la médecine mais Atalan avait rapidement compris, après ses premiers échecs, notamment sur Galantos, que les médecins qui partaient en mission devaient d’abord comprendre les populations, avant même de s’attacher à la science. C’était quasiment du bon sens mais c’était un bon sens qui lui avait manqué, jadis, à l’âge de Luke.

Le Miraluka s’assit sur le bord de l’une des couchettes.

— Criminelle, l’infection, peut-être. Trop tôt pour le dire. J’ai regardé les rapports d’autopsie que la responsable sur place, Velya Nomir, nous a communiqués. Ce à quoi nous avons affaire est… eh bien, évident, je suppose, d’un point de vue hypothétique.

Eh bien, ce n’était évident que pour lui, dans ce cas. À cette époque encore, le tout jeune Maître éprouvait quelques difficultés à se mettre spontanément au niveau de ses interlocuteurs et à songer que ses réflexions ne sauraient être bien comprises s’il ne les développait pas. Velya Nomir s’était gardée de toutes conclusions. Les autopsies indiquaient prudemment que les causes du décès pouvaient être « multiples » tant les corps avaient paru souffrir de maladies différentes. C’était comme si la pneumonie, une violente indigestion et une démartite sévère s’étaient invitées en même temps à la fête. Sincèrement persuadé que ce tableau diagnostic parfaitement incohérent relevait de la plus pure évidence, Atalan poursuivit :

— Ce qui doit nous préoccuper avant tout, c’est notre situation une fois sur place. Namadii a beau être au bout d’un couloir hyperspatial, c’est un monde isolé et, en dehors de la capitale, on n’y voit pas beaucoup d’étrangers. Pas beaucoup d’étrangers comme nous, surtout. Je veux dire des Jedis, évidemment, et des non-humains, qui plus est.

Autant ne pas tourner autour du pot.

— Pour certains de ces habitants, qui n’ont jamais quitté l’exploitation où ils sont nés, alors même qu’ils disposent de l’essentiel de ce que l’on pourrait considérer comme la civilisation technique, les Jedis sont une matière d’holonews, quelque chose d’assez semblable aux personnages des holodramas. Et la République, même, est une idée lointaine. Cela fait longtemps qu’ils n’ont pas connu une guerre, semblerait-il, ou une crise économique majeure. L’intervention républicaine, je veux dire du gouvernement central, se limite à quelques audits financiers de temps en temps, des missions d’observation des élections quand Namadii est tirée au sort dans les instances de contrôle du Sénat, je suppose, ce genre de choses. Dans beaucoup de mondes républicains de la Région d’Expansion et à plus forte raison de la Bordure Médiane, la République et l’Ordre Jedi sont des concepts. Certains de ces habitants verront probablement débarquer avec perplexité si ce n’est avec suspicion des Jedis chez eux et pour eux, nous serons deux aveugles avec des pouvoirs magiques.

Ce qui, de fait, n’était pas toujours éloigné de la réalité.

— Avec cela à l’esprit, comment suggéreriez-vous que nous procédions, une fois sur place ?
Luke Kayan
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[HJ: Désolée, je trouve ça vraiment nul :/]

Sympathique vu la situation signifiait "saoûl", étant donné que c'était ce qui semblait convenir aux membres d'équipage -passons sur le fait de boire en conduisant.- mais bon, Luke était particulièrement heureux de ne pas devoir ingérer des bières correlliennes pour obtenir des informations ! Le Hapien hocha tout de même la tête à ses propos, il ne voulait pas boire, mais se mêler aux employés ne le dérangeait pas. Luke était en fait un adepte de cette méthode, l'ayant déjà utilisé sur Naboo lors d'une mission soit-disant de routine. Les cuisiniers, serveurs, secrétaire et autres personnes gravitant autour des gens "importants", souvent mis de côté avaient de bonnes oreilles, ainsi qu'une capacité à analyser étonnante. L'opinion des membres de l'équipage, rôdés aux voyages sur Namadii ne pouvait qu'être positif, même si Borg avait déjà été clair sur le sujet en apparence. Il ne se passait jamais rien sur cette planète.

Cependant, aujourd'hui, si, il s'y passait un drame suffisamment important pour que des Jedis se rendent dans ce monde rural, oublié de beaucoup, méprisé par ceux qui restaient. Luke écoutant attentivement le Maître prenait conscience, qu'attaque bactériologique ou non, eux-même seraient confrontés directement à une maladie peut-être très contagieuse. La Force les protégeaient généralement mais pas toujours, et le Hapien à la constitution fragile en savait quelque chose. Il avait connu des rhumes assez coriaces pour résister à ses Midichloriens pourtant nombreux. Néanmoins, le jeune homme n'avait pas envie de renoncer pour autant. Cela faisait partie des risques du métier, bien que contracter une maladie mortelle l'inquiétait d'avantage que combattre un ennemi aussi dangereux, mais visible. Mieux valait donc éviter de penser à ce détail effrayant pour se concentrer sur leur premier souci.

De ce côté là, Luke était encore une fois surpris. Sachant le monde républicain, il avait pensé que les habitants connaissaient les Jedis. Il ne les imaginait pas assez triviaux pour croire en des magiciens en toge. Tant pis, il faudrait faire avec et éviter un vent de panique comme l'avait signifié le Miraluka.

-Faisons-nous passer pour de simples médecins dans un premier temps. Des guérisseurs, ce que nous sommes n'est-ce pas ? Et si nous devons utiliser la Force, agissons discrètement. La majorité de ces gens y sont probablement insensibles ou n'ont pas été formés. Il sera difficile pour eux de "voir" quoique ce soit.

Ignorant la portée de son expression plutôt... Intéressante étant donné leur situation commune, le Hapien répondit à la question de son aîné posée plus tôt après un petit temps de réflexion.

-Et je suis d'accord pour parler aux membres de l'équipage, je peux tenter de rester naturel. Même si je ne connais pas la manière de les aborder, en général, le contact se faisait facilement durant d'autres missions.

Jouant les aveugles perdus, le jeune homme accrochait immédiatement. Amusant, accessible, pas dangereux pour un sou. Ensuite installé, il se taisait et ouvrait grand ses oreilles. Les "petits" comme les femmes de ménage, ravies qu'on les écoute ne tardaient pas à déballer des potins en tout genre. Luke avait passé de sacrés moments en leur compagnie. Il se souvenait encore de la cuisinière qui l'avait bourré de madeleines en lui racontant absolument toutes les aventures de la famille de bourgeois de Naboo la plus tordue de la Galaxie. Avec une certaine affection, le Hapien rangea gentiment Mathilde dans un coin de sa tête. Malgré son attitude peu ouverte face à la boisson ou les types d'approches plus... Machos, brutales lui convenant guère, il n'avait aucun souci à se mêler à la "population", estimant faire partie de cette masse, la seule différence résidant dans le fait qu'il les servait justement.

-Pour en revenir notre arrivée. Une solution serait d'être honnête. De prendre le temps qu'il faut pour leur expliquer ce que nous sommes, notre rôle s'il le faut, mais de nous dévoiler.

Du temps, il n'en aurait que peu. Cependant, en perdre pour éviter la panique et pouvoir agir librement, sans couverture ridicule pouvait aussi se révéler précieux. Luke ne voyait pas de mal à faire confiance aux Namidiiens et à leur intelligence. En simplifiant les choses, ils pourraient bien leur rafraîchir la mémoire sur le sens du mot république ainsi que le terme Jedi. N'est-ce pas ? Au pire, qu'ils les prennent pour des sorciers si cela les chantent, du moment qu'ils comprennent que leurs intentions étaient bonnes.

Un peu stressé comme s'il était évalué à l'égal d'un Padawan, Luke se redressa plus correctement encore dans son siège, abordant une position digne, peut-être un peu ridicule car inutile dans ce vaisseau cargo.
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La première proposition de Luke fut accueillie avec un silence circonspect qu’il n’était pas facile d’interpréter. En réalité, le Miraluka était sceptique. Capitaliser sur l’ignorance des gens pour pouvoir opérer sans difficulté lui paraissait à la fois malhonnête et difficile. Si le mensonge était une ruse nécessaire en bien des circonstances et s’il fallait, parfois, savoir s’infiltrer, Atalan essayait de l’éviter autant que possible. Luke semblait procéder ordinairement de manière bien différente. Il avait proposé de prétendre boire de l’alcool et de mimer l’ébriété pour s’attirer la sympathie des hommes d’équipage et, désormais, il suggérait d’abuser de la crédulité des villageois de Namadii. Déstabilisant.

Toutefois, Atalan percevait sans peine le stress de Luke. Il était familier de cette inquiétude que ses silences contemplatifs inspiraient parfois aux élèves et il n’était pas rare, dans l’une de ses classes, qu’à une même question un même élève apportât des réponses bien différentes, espérant obtenir à chaque fois une nouvelle réaction du Maître, comme un indice de l’exactitude de sa nouvelle proposition. Rapidement d’ailleurs, Luke suggérait une méthode alternative, avant de se redresser, comme s’ils avaient été en pleine séance de méditation et qu’Atalan risquait de corriger sa posture.

Comme pour donner le contrepoint, Atalan se pencha en avant, les coudes sur les genoux, les mains croisées, les quelques mèches de cheveux qui échappaient à sa tresse sombre encadrant des deux côtés son visage.

— Mentir est souvent une mauvaise solution. Moralement, c’est une difficulté, mais surtout les gens sont souvent plus perspicaces qu’on ne le croirait. Et l’ignorance collective n’empêche pas les connaissances particulières : il suffit qu’un membre de la communauté perce le mensonge à jour et partage sa perspicacité avec les autres, et toute la confiance s’effondre. À vrai dire, être des étrangers sera notre principal handicap. Que nous soyons en plus des Jedis ne change finalement pas grand-chose : de l’étranger qu’on a jamais vu, dans une communauté où l’on ne voit jamais d’étranger, on s’attend à tout, par principe. Que nous nous présentions comme des guérisseurs étrangers envoyés par la République ou comme des Jedis… Il n’y aura somme toute qu’une infime différence de degrés.

Ces choses-là, Atalan ne croyait pas qu’on pût les apprendre dans les cours du Temple, à Ondéron, ou même auprès des Chevaliers chevronnés de Coruscant. C’était une expérience de terrain, qui venait avec le nombre des années, quand on passait du temps, beaucoup du temps, sur les mondes des Bordures et de la Région d’Expansion. On pouvait toujours décrire la manière dont les communautés qui menaient une vie radicalement différente de la fièvre cosmopolite du Noyau concevaient l’existence mais entre la description et la compréhension fine, quotidienne, de ces réalités, il y avait tout un monde.

— La ruse est utile mais elle est d’autant plus utile qu’elle est moins fréquente. Mentir demande du temps, de la vigilance et du calcul. Toute l’attention que nous mettrions à paraître, aussi minime nous semble-t-elle à chaque instant, est une attention que nous ne consacrerions pas à autre chose. Souvent, l’on dit aux Padawans que mentir est un mal. Mais plus simplement, plus fondamentalement, mentir est une maladresse. La plupart du temps, c’est employer à sabre à double-lame et risquer de s’amputer d’un bras quand un vibro-scalpel et un peu de patience suffiraient.

Atalan laissa échapper un rire bref.

— Navré, il faut que je travaille encore mes métaphores martiales. D’ordinaire, je puise plutôt dans le registre pédagogique mais j’essaie de varier mon style.

C’est que depuis qu’il était Maître, Atalan se rendait compte qu’il avait à parler… tout le temps. Au sein du Conseil des Guérisseurs, devant les Padawans, devant les Chevaliers qui lui demandaient son avis, devant les membres du corps médical des deux Temples. Il prenait lentement goût à cette situation qui le sortait de son laconisme ordinaire.

— Détendez-vous, Luke. Je sens votre inquiétude et je crains d’en être en partie responsable. Je ne suis pas ici pour vous évaluer.

Le vaisseau se mit à vibrer légèrement. Borg avait fait démarrer les moteurs pour les chauffer mais le décollage ne serait probablement pas immédiat.

— Ou plutôt, si, je suppose. Disons que je ne suis pas ici pour vous sanctionner mais pour vous conseiller, si tant est que mes conseils puissent servir à quelque chose.

Cette dernière remarque tenait à moitié du manque de confiance qu’il éprouvait toujours et à moitié de l’humilité jedi.

— La Force est puissante en vous. Quand l’inquiétude point en vous, vous devriez écouter plutôt la Force que les rouages de votre propre esprit. Votre intelligence est un outil utile seulement quand elle raisonne dans la tranquillité. La tranquillité est un effet de l’âme plutôt que de l’esprit. Quand nous disons que la Force nous guide, ce n’est pas que notre intuition s’y opposerait à notre compréhension conceptuelle du monde et des problèmes, que nous nous remettions à la mystique plutôt qu’à la raison. Simplement, nous avons toutes sortes de facultés qui doivent vivre en harmonie pour que chacune d’elles puisse s’exprimer. L’intelligence sans tranquillité donne des raisons à la peur et au doute. Comme souvent les politiciens nous le prouvent, on peut raisonner tout et son contraire. Le jugement juste est l’équilibre de l’intuition et de l’intelligence.

Machinalement, Atalan glissa l’une de ses mèches noires derrière son oreille.

— Notre mission vous inspire des peurs et des inquiétudes. C’est normal. Moi-même, j’en ai des craintes. Je crains de n’avoir rien à vous apprendre et que vous ayez le sentiment de perdre votre temps, après avoir fréquenté Maître Don. Je crains que la tâche qui nous attend se révèle plus complexe qu’il n’y paraît et excède nos aptitudes. Je crains pour votre sécurité. La crainte est une utile conseillère. Bien comprise, elle suscite la prudence et l’envie de mieux faire. La crainte est mère de précautions et de prévenance.

C’était typique de la conception d’Atalan. D’autres Maîtres auraient suggéré que la peur était le chemin du Côté Obscur mais, selon Maître Pirin, le Côté Obscur ne naissait que d’une mauvaise compréhension des émotions. La crainte, comme le désir ou même la colère, était des phénomènes de la vie, donc de la Force : l’étude sereine de la Force leur donnait un sens, tandis que la corruption maladive de l’esprit et de l’âme en faisait des instruments du Côté Obscur.

— C’est parce que je crains de n’avoir rien à vous apprendre que je vous parle autant, alors que d’ordinaire je parle peu. Et c’est parce que je vous parle autant que nous pouvons anticiper nos problèmes et nous concerter. C’est parce que j’écoute cette crainte qu’elle me conseille. Vous avez l’air stressé et anxieux. Par ma présence, je le devine, mais par notre mission aussi. Plus vous renfermez ces craintes en vous, plus nous aurons du mal à nous allier. Alors que dans la Force, nous trouverons la communauté d’esprits et la clairvoyance nécessaire à nos travaux. Dites-moi ce que vous craignez et nous écouterons vos craintes pour savoir ce que nous devons faire.
Luke Kayan
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[HJ: Désolée, je n'ai pas pu résister à l'idée de mettre en jeu la Padawan qui a fricoté avec un autre... Vilaine fille. Si ça te paraîs inutile ou hors à propos, fait-moi signe mais je trouvais que ça faisait une ouverture sympa... Et que ça donnait un peu de "quotidien" avant le drame Very Happy ]

Mentir n'était pas bien.

Luke résista à l'envie de s'engoncer dans son fauteuil jusqu'à disparaître. Chose qui semblait plutôt faisable vu sa silhouette fine doublée de sa honte obèse. Désormais Atalan allait le prendre pour un menteur compulsif, quand le Hapien n'avait fait que suggérer une solution. Pas la meilleure, certes, mais une qui pourrait dans un premier temps, pallier à l'urgence. Le jeune Jedi hocha toutefois la tête aux propos de son aîné-non sans avoir légèrement froncé du nez en imaginant à sa façon la réalisation de la métaphore quelque peu macabre.- il s'était mal exprimé et le reconnaissait sans se chercher d'excuse. De plus, il est vrai que le jeune homme avait tendance depuis le début de la mission à vouloir recourir à la ruse. Jedi Consulaire, il avait dû mettre de nombreux principes de côté, apprendre à jouer finement, si finement que chacun de ses discours était saupoudré d'au moins un joli mensonge, ou une vérité enjolivée. C'était comme ça lorsqu'on était diplomate. Une cachoterie pouvait éviter la troisième guerre inter-galactique... Ou comme le signifiait le Miraluka, la déclencher. Jusque là, habitué aux infiltrations, le Hapien avait encore abordé cette mission comme l'une d'elle.

-Pardonnez-moi Maître, j'ai dû changer d'identité sur Coruscant pour infiltrer les bas-fonds et sur Naboo pour me mêler, au contraire, au gratin de la haute société. J'ai sans doute la fâcheuse tendance à aborder les autres missions de la même façon.

Avoua-t-il sincèrement. L'idée d'être vu comme quelqu'un doué de duplicité le gênait un peu, mais il se rendait compte que c'était peut-être effectivement devenu sa voie. Heureux de pouvoir en changer donc, le jeune homme fit un gros effort pour aller encore plus au-delà de l'évitement des mensonges: dire la vérité. Sa vérité, sur ses craintes lui paraissant stupides. Aussi stupides que celles de Maître Pirin pour tout dire.

Les yeux ronds, le Jedi écouta les confessions de ce dernier, résistant à l'envie de lui couper la parole pour le rassurer. Il se sentait même coupable que son interlocuteur puisse penser de la sorte. Lui, n'avoir rien à apprendre ?

-Maître, je vous en prie. J'ai certes eu un des meilleurs professeurs qui soit. Un des plus grands Jedis. Néanmoins, je ne suis pas lui, ni même son reflet. Simplement son Padawan qui n'a ni eu le temps, ni la capacité d'apprendre tout ce qu'il sait. Je dois encore travailler sur moi, vivre ces théories que seule l'expérience éclaircie et prouver ma valeur. De plus, Maître Don lui-même a encore à apprendre. Il m'a toujours suggéré qu'écouter autrui dispenser son enseignement n'était jamais une perte de temps, y compris lorsque la leçon fut déjà donnée. Il y a toujours une nouveauté à découvrir, un point de vue à explorer plus en profondeur, des détails à ré-apprendre et je suis d'accord avec lui. De plus, rassurez-moi, mais vous savez bel et bien que je n'ai qu'un niveau basique en guérison ?

Souriant légèrement, soudainement compatissant avec son aîné aussi stressé que lui-ou presque.- le blond se lança immédiatement ensuite, craignant de ne pas avoir le courage d'évoquer ses craintes à son tour sinon.

-J'ai peur de ne pas être à la hauteur. Mon handicap, mon inexpérience, mes maladresses. Je ne me suis certainement pas assez documenté sur la planète, surtout que les archives sont peu nombreuses. Je trouve étrange et suspect qu'un monde quelqu'il soit soit aussi tranquille pour tout avouer. Ce type de missions est aussi nouveau pour moi, alors j'essaye d'en comprendre la teneur, en espérant ne pas vous ralentir. Moi non plus je n'ai pas l'habitude de beaucoup parler, mais ce sera comme vous l'avez signifié, l'effet du stress... Ou parce que cette conversation m'intéresse au plus haut point.

Avec une touche d'humour, Luke clos ce petit monologue qui lui avait tant coûté à sortir. Soupirant un peu, le jeune Jedi se relaxa, surpris mais heureux de découvrir qu'effectivement, malgré une légère appréhension sur ce qu'on pourrait penser de lui, dire la vérité sur ses sentiments au lieu de les repousser soulageait. En fait, il le préconisait déjà aux Padawans sous sa tutelle mais n'avait jamais eu l'occasion de réellement l'appliquer, sauf pour son handicap qu'il n'éprouvait presque plus aucune difficulté à évoquer.

Atalan inspirait la confiance, surtout lorsqu'il l'écoutait et appliquait directement ses conseils, puisant dans la Force pour chercher la bonne voie. Les mots de celui-ci raisonnaient encore dans sa tête, surtout ceux qui parlaient de sa crainte de ne rien avoir à apprendre à l'apprenti de Saï. Or, il y avait bien une chose que Luke avait songé transmettre à un guérisseur via un holo-message anonyme -très courageux, le chevalier, comme vous pourrez le constater.- et puisqu'ils avaient un peu de temps devant eux, que le calme appelait à être brisé, le Hapien reprit prudemment. On aurait dit un pré-adolescent, il faut dire que le domaine tendait à être éviter à tout prix, mais au moins, le doute sortirait de sa tête.

-En parlant d'avoir des choses à m'enseigner, j'ai songé à un détail. Je n'ai pas de Padawan, seulement j'en aide quelques uns, surtout les aspirants sans maître déjà âgés ou ceux qui veulent passer un diplôme universitaire en parallèle à leur formation. Cela concerne une élève du premier groupe. En fait... Comment dire. Cette jeune fille m'a confié avoir... Hum... Avec un garçon. Vous savez... Elle craignait d'être enceinte; elle l'a vue une fois et pas seulement pour s'embrasser. Elle a ajouté ne pas être dans sa période, mais si elle ne s'est pas protégée, je suppose que c'est possible n'importe quand, n'est-ce pas ? Surtout s'ils ont... Vous voyez. Seulement, me conseillez-vous de lui le dire abruptement ? Et que faire si elle l'est ? Faudrait-il avorter ? Elle n'a que 16 ans, ce serait du gâchis, mais d'un autre côté, la vie... A combien de pourcentage estimez-vous qu'une humaine de 16 ans a de chance d'être enceinte après... 70 % je dirais au moins.

Très clairement, Luke avait une idée arrêtée sur la chose. Si les bébés ne s'attrapaient pas sur la cuvette des toilettes, il pensait que chaque rapport pouvait engendrer un enfant, ignorant tout des cycles de la femme. Quant au 70% évoqué, il était tiré de conclusions personnelles basées sur le nombre d'enfants nés au Temple, même lorsque l'Amour était prohibé. Ce ne devait pas être facile à éviter si un Maître comme Ellana ou une Chevalière comme Luuna étaient tombées dans piège. Quant aux protections, le Hapien avait résisté à l'envie de s'offusquer lorsque la gamine lui avait demander où s'en procurer, car non contente de sa bêtise, elle désirait continuer à voir ce garçon. Lui, ne connaissant évidemment rien du tout à ces histoires l'avait envoyé en marmonnant à l'infirmerie mais elle avait répondu en toute sincérité jamais oser y aller. Est-ce qu'en ayant un autre rapport, la jeune femme risquait-elle de retomber enceinte ? C'était bien comme ça que se faisaient les jumeaux, n'est-ce pas ?

Pour être ignorant, il l'était, et le pire était que c'était en quelque sorte de sa faute. Fermé à tous ces sujets, le jeune homme avait toujours fermé les bouquins ou pages holonet ayant pu l'éclairer, le rouge aux joues. Quoi de plus facile pour un aveugle de ne pas voir ce qui ne l'intéressait pas ? De plus, pourquoi le faire ? Il n'y avait jamais été forcé personnellement, étant homosexuel. Bon, Jason s'était protégé lors de leurs premiers rapports, sans lui expliquer pourquoi. Luke avait retenu que c'était important, surtout pour les femmes mais n'allez surtout pas lui demander comment ça marchait, ce n'était pas son domaine, ni son rôle lors de ses propres petites... Digressions physiques personnelles avec l'ambassadeur.

-Et le pire est qu'elle souhaite recommencer mais n'ose parler à personne à part moi.

Soudain le Hapien rougit violemment, une idée nauséabonde venait de lui sauter à la gorge. Avec son manque de précisions, il allait réussir à faire croire qu'il était le père.

-Je précise que je n'ai rien fait. Enfin, ce n'est pas moi qui... Avec elle.

Poussant un gros soupir après avoir oublié de respirer pendant au moins une minute, le blond finit par détacher sa ceinture. Tant pour se donner de l'air que pour s'apprêter à se lever. Malgré cet interlude, il gardait la mission en tête.

-Je vais m'occuper de voir si le personnel est d'humeur bavarde. Il me suffira d'expliquer légèrement notre mission, tout en gardant le sceau de confidentialité sur certains points. Mais vous avez raison, mentir dans ce cas là ne servira à rien. Namadii n'est un enjeu important dans la tête de personne.

Suggéra-t-il, content d'avoir pu exposer ses craintes concernant cette élève qu'il appréciait, douée de surcroît dans les études. Et même s'il avait honte à l'avance de recevoir des réponses sur un tel sujet, le jeune homme était parvenu à avancer sur un thème qu'il pensait laisser traîner indéfiniment malgré l'urgence. Désormais il ne lui restait plus qu'à prendre note des conseils d'Atalan qui lui dirait tout de but-en blanc et reprendre le fil de la mission.
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Si Atalan n'était pas un grand politicien, il croyait fermement, en revanche, en les vertus de la discussion. Le guérisseur n'avait rien d'un solitaire : toujours, il avait été persuadé que la Force en général et toutes les situations de l'existence ne se comprenaient jamais pleinement qu'en confrontant les points de vue les plus divers, quitte à affirmer le sien au bout du compte — un art qui lui manquait encore, il est vrai. Attaché aux traditions de l'Ordre, il voyait là le principe fondateur de la relation entre les Padawans et leurs Maîtres, les Chevaliers et leurs Conseils, les Conseils en eux-mêmes et les uns par rapport aux autres. Ce n'est pas, à strictement parler, que l'Ordre dût être, à ses yeux, une structure démocratique, semblable à cette République dont il était l'indéfectible gardien, mais bien qu'il fût un organisme collégial où la concertation revêtait la plus grande importance.

Comme souvent, il crut avoir la preuve de ses conceptions en entendant Luke lui assurer qu'il avait beaucoup à apprendre de lui. N'était-ce pas précisément ce qu'il avait eu besoin de savoir pour aborder leur collaboration avec la sérénité nécessaire et ne pas cultiver l'impression d'être un imposteur qui ne méritait pas son titre, cette impression même qui le hantait souvent, depuis qu'il avait été nommé au sein du Conseil des Guérisseurs et, plus encore, en tant que Maître ? Il était persuadé que, de la même manière, Luke tirerait profit à avouer ce qui le tracasserait:la confiance était la clé des rapports entre les Jedis.

Il ne retint pas un petit rire léger quand Luke eut fini de déployer ses craintes mais il fut impossible de le confondre pour une réaction de moquerie parce qu'aussitôt, le Miraluka reprit :

- Votre handicap?

Le leur, en somme.

- Vous avez conscience que la plupart des Miralukas éprouvent à l'égard des autres, quel est le terme consacré ? Proches-humains, voilà, à l'égard des autres proches-humains une pitié teintée de mépris à cause de l'aveuglement de leurs yeux, qui leur imposent de se laisser abuser par les couleurs superficieilles du monde et les empêche de voir, véritablement, ce qui existe à travers la Force. Il y a un proverbe miraluka qui dit, à peu près traduit en basic : le Miraluka voit le trésor et l'humain voit le mur.

Il y en avait d'autres du même genre et de moins polis qu'Atalan jugea préférable de ne pas servir au Hapien, qui pourrait être embarrassé.

- Ce que vous voyez à travers la Force grâce à l'insensibilité de vos yeux à la lumière est infiniment plus riche et plus complexe que ce qu'ils voient à travers l'organe imparfait qui leur sert à percevoir. Ce que vous appelez un handicap, Luke, mon espèce l'appelle un don. Et les plus religieux, même, une bénédiction. Vous n'en serez qu'un meilleur guérisseur, parce que la couleur d'une plaie est bien moins intéressante que ce que la plaie donne à voir dans la Force.

Et c'était probablement parce qu'ils en étaient à des discussions médicales que Luke jugea opportun de lui demander son avis sur une question biologique. S'il n'avait été autant préoccupé par les incohérences de l'Ordre à cet égard et le grave danger que couraient les Padawans de se voir exposés, personnellement ou au cours de leur mission, à des difficultés que rien ne les aurait préparés à gérer, Atalan aurait probablement été pris d'un fou rire. Luke devait vivre dans un monde bien angoissant s'il croyait que les rapports sexuels étaient presque immanquablement suivis de la procréation.

- Hmmm. Je vois.

Il allait devoir résister à la tentation de lui parler des abeilles et des fleurs.

- Rasseyez-vous, l'équipage attendra. Prenez une profonde inspiration, tout va bien se passer. Ce n'est pas si compliqué que ça.

Il fallait toujours se méfier quand Atalan Pirin prétendait que quelque chose était simple : c'était un coup, les aspirants guérisseurs le savaient bien, à se retrouver à faire des recherches sur des cas médicaux complètement tordus et des méthodes thérapeutiques oubliées de tous et que personne ne comprenait vraiment. Le Miraluka avait une conception toute personnelle de la simplicité, forgée à l'aune de son propre génie scientifique.

- Vous savez, les choses sont souvent plus simples quand on utilise les mots appropriés. Il n'y a pas de raison d'être embarrassé et, du reste, rien ne nous dit que la mission vers laquelle nous nous dirigeons et la maladie que nous aurons à décrire ne soient pas de nature sexuelle. Bref, quoi qu'il en soit, dans des cas comme le vôtre, je crois qu'il faut d'abord appliquer une règle fondamentale : ne jamais faire conscience en la perspicacité d'une fille de seize ans ni à ce qu'elle croit savoir sur son corps. Les adolescents ont souvent des idées vagues, imprécises voire fantasques de ce genre de choses et leurs certitudes sont parfois tout aussi dangereuses que leur ignorance. Seconde règle fondamentale : les Padawans sont encore plus mal placés que les autres pour savoir quoi faire dans ce genre de cas, parce que personne, jamais, ne prend la peine de leur parler de ces questions pourtant fondamentales.

Et au ton dont il venait de faire cette dernière remarque, il était aisé de deviner que les conceptions d'Atalan sur la question ne correspondaient guère à la politique d'omerta développée insensiblement par les moralistes rigoristes à l'intérieur de l'Ordre.

- Les adolescents ont des relations sexuelles parce que c'est à ça que servent les adolescents. Et les jeunes adultes aussi. Et les adultes et un peu tout le monde. La conjonction sexuelle est le fruit du désir, le désir l'expression de la Vie et la Vie l'expression de la Force. Mais avant même l'aspect purement, disons, métaphysique du problème, il faut se plier à la biologie et la plupart des proches humains, comme une grande majorité des espèces, est soumise à de puissants impératifs biochimiques au moment de l'adolescence. Il faut se méfier de la lecture purement biologique, cela dit, à cause de son biais procréationniste, qui...

Là n'était pas du tout la question et Atalan avait commencé à s'embarquer dans un discorus théologico-biologico-philosophique qui n'aiderait pas Luke à savoir s'il devait prescrire la pilule du lendemain. Le Miraluka se rendit compte qu'il s'était laissé emporter par l'enthousiasme de ses explications et il balaya ses propos trop généraux d'un sourire.

- Enfin, revenons-en à votre problème précis. Ce que je ferais à votre place, c'est de conseiller à cette Padawan de se rendre au centre médical, de l'accompagner avec un peu d'autorité si c'était nécessaire, et de demander à voire une guérisseuse. Je vous donnerais les noms des femmes du centre d'Odéron qui sont les plus susceptibles d'apporter une aide appropriée.

Autrement dit, celles qui s'occuperaient du problème avec patience et bienveillance, plutôt que de commencer par faire la morale.

- Ce qui devrait se passer, dans un monde parfait, c'est que la guérisseuse discute avec la Padawan pour savoir d'elle si elle désire ou non apporter une nouvelle vie au monde. Personne d'autre que la femme concernée ne devrait être en mesure de prendre cette décision mais cela n'implique nullement qu'elle doive être laissée à ses seules ressources. Une naissance dans la Force est toujours une bénédiction mais elle n'est jamais une obligation : une future Jedi ne devrait être ni encouragée ni découragée de participer à la Force de cette manière plutôt qu'une autre, et d'ailleurs ni la voie du Jedi, ni celle de la procréation ne sont mutuellement exclusives. Ce sont pas les exemples qui manquent à le prouver. Une fois la décision prise, si la Padawan a décidé de garder un éventuel enfant et si la grossesse a bien lieu, eh bien… c'est un tout autre problème, qui demande du tact et de la prudence, et auquel il sera toujours temps de réfléchir plus tard. Dans le cas contraire, selon le délai qui sépare le rapport de la consultation, on prescrira différents abortifs, qui provoqueront vraisemblablement des menstrues anticipées, pour empêcher la fixation de l'ovule fécondée à l'intérieur de l'utérus. Sauf si la grossesse est déjà avancée. Fort heureusement et depuis longtemps, ces méthodes sont indolores, quoiqu'elles soient peu employées, pour des raisons évidentes, au sein des Temples, mais elles demeurent éprouvantes psychologiquement.

Atalan considérait d'ailleurs que les Jedis plus que les autres femmes étaient susceptibles d'être durement touchées après un avortement, parce qu'elles étaient parfois capables de percevoir la Vie qui était en train de se former au sein de la Force. Il savait d'ailleurs que certains Guérisseurs considéraient l'avortement comme un crime à toutes les époques de la grossesse. Lui-même avait été longtemps de cet avis puis son opinion, au fil des années et des réflexions, avait sensiblement changé.

- Ceci étant dit, le degré de fécondité d'une femme humaine est infiniment inférieur à celui que vous supposez, même chez les individus qui, comme votre Padawan, sont dans l'âge le plus propice à la fécondation. Comme vous le savez sans doute...

Atala marqua une hésitation et corrigea :

- … peut-être, les humaines et la plupart des proches humaines, comme d'ailleurs une bonne partie de ce que l'on appelle les mammifères, alternent des cycles d'ovulation et de menstrues. Les ovules sont des œufs internes produits régulièrement par les mammifères. L'ovulation se produit au niveau du ventre. Un œuf est produit par un ovaire, une fois sur deux, et l'autre fois par l'autre ovaire. Il n'est pas immédiatement mature : disons que comme une fleur, il éclot peu à peu. Quand il est mature, il se détache de la… branche sur laquelle il a poussé et descend plus bas dans l'appareil procréateur, à l'intérieur de l'utérus. L'ovule fécondé va se fixer dans l'utérus et permette le développement de l'embryon jusqu'à la naissance de l'enfant. En revanche, l'ovule non fécondé va être évacué par les menstrues qui sont… un peu comme si tout se fanait, à l'intérieur de l'utérus.

Comme souvent avec Maître Pirin, la métaphore botanique était de rigueur. Chez lui, elle était plus qu'une figure de style : elle trahissait la conviction nourrie par le Guérisseur que la Vie, au sein de la Force, est douée d'une secrète cohérence et qu'entre les êtres, il existait des similitudes précieuses à méditer.

- Par commodité de langage, disons que le moment où l'ovule mature se détache de sa « branche » pour descendre dans l'utérus est l'ovulation. Une femelle humaine n'est fertile qu'un peu avant et un peu après l'ovulation, entre… hmm… disons six à dix jours d'Ondéron. En dehors de cette période d'ovulation ou de fécondité, la femelle humaine, et donc la plupart des proches humaines, n'est pas fertile. Et il faut encore voir que même pendant cette période, tout rapport sexuel est loin d'entrainer la fécondation. Il serait difficile ou en tout cas peu significatif de vous donner une statistique, parce qu'elle varie beaucoup en fonction des individus concernés, de leurs dispositions physiologiques et psychologiques, du corps de la femme en question, de la qualité spermatique de son partenaire. Bref...

Atalan ne savait pas trop s'il était en train de perdre son interlocuteur. Il était soucieux de lui expliquer la situation de la façon la plus complète possible, parce qu'à ses yeux, le problème dépassait de loin celui de cette Padawan particulière. Il se souvenait de sa conversation avec Alyria, à la sortie du cours inespéré d'obstétrique dispensé sur Ondéron par l'ancienne chancelière. Il était urgent à ses yeux qu'un savoir de cet Ordre, au moins théorique, se répandît au sein du Temple et les interrogations inquiètes de Luke en étaient encore une fois la preuve.

- En théorie, il est possible à un couple mâle-femelle, hétérosexuel donc, d'éviter systématiquement la procréation sans jamais utiliser de moyens de contraception en évitant d'avoir des rapports d'un certain type pendant la période de fertiltié ou, tout du moins, en évitant la projection du liquide spermatique à l'intérieur de conduits organiques susceptibles de mener à l'utérus.

Dit comme ça, le miracle de la vie perdait un peu de sa romance, certes.

- Le problème, c'est que les cycles de reproduction ne sont pas constants et peuvent subir d'infimes variations au fil de l'année, des décalages d'un ou de plusieurs jours, en fonction de l'état psycho-physiologique de la femelle, particulièrement chez les individus régulièrement soums au voyage spatial ou à des changements planétaires, de sorte que les calculs et l'anticipation correcte sont quasi impossibles. Qui plus est, les adolescentes ne reconnaissent pas toujours de manière convenable les signes extérieurs qui accompagnent la période d'ovulation ou confondent la corrélation entre ces signes et la fécondité avec une relation causale. De sorte que l'adoption systématique de moyen de contraception est encore la meilleure solution. À plus forte raison si le Padawan en question souhaite recommencer.

Et Atalan, l'air de rien, ajouta avec un sourire tranquille :

- Ce ne serait pas le pire, d'ailleurs, mais le plus sage à faire.
Luke Kayan
Luke Kayan
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[HJ: Pardon pour le HS pseudo-philosophique sur la Vie des Jedis et leur non intégration à la vie en société xD. A la fin du rp, sa remarque peut justement recentrer sur la mission. Quoiqu'il en soit, j'adore écrire avec toi :) ]

-Je ne suis pas Miraluka-Concéda le jeune homme malgré son attirance pour l'explication ô combien poétique et rassurante de cette espèce.- je ne compense pas, du point de vue biologique. Je veux dire que je lis le braille, je ne vois pas les silhouettes à travers la Force, pouvant uniquement ressentir les Auras de ceux à travers qui elle coule. Néanmoins, je n'aurai aucune indication sur leur taille, leurs contours. J'ai eu une amie Miraluka qui m'a plus ou moins expliqué votre don et c'est vrai que s'en est un. Pour ma part, dans l'optique de simplement remettre les choses à leur place, sans aucunement me plaindre car je m'estime chanceux de recevoir l'aide de la Force, je suis vraiment aveugle.

Jamais Elora ne se cognait contre les murs, elle n'utilisait pas de canne dans les endroits inconnus ou trop peuplés, voyait des traits à sa façon à défaut des couleurs et lisait normalement s'il s'en souvenait bien. Bien sûr, loin de lui l'idée de dénigrer les efforts d'adaptation de cette race, sinon de corroborer les propos d'Atalan, les Miralukas étaient des Miralukas, lui était devenu non-voyant suite à une série de circonstances. Quoiqu'il en soit, Luke espérait toujours pouvoir servir, sachant qu'il parvenait partiellement à localiser les perturbations. Une blessure serait pour lui un genre de point de rupture vers où la Force en milliers de fils invisibles convergeaient, hurlant sa douleur.

Quant à la suite de la conversation, elle ne s'éloignait pas tant que ça du premier sujet, puisqu'Elora, Miraluka de son état avait eu le coeur brisé par son meilleur ami. L'Amour, le seul à savoir rester perché en équilibre parfait entre l'obscurité et la lumière. En effet, si l'histoire avec son amie avait grandement fait souffert le Hapien, celle avec l'ambassadeur lui avait permit de s'apaiser et de grandir, tout en le piquant de son aiguillon vénéneux à ses heures. On n'aimait jamais gratuitement, il y avait toujours des larmes à offrir en sacrifice en retour.

Combien d'heures le jeune Padawan de l'époque était-il resté, transi de froid et d'inquiétude dans son lit. Se préoccupant de ne pas avoir de soucis avec les filles. Lorsque Josh l'avait séduit, le monde était tombé tout autour de Luke qui, s'il ne connaissait déjà pas grand chose à l'Amour, ignorait tout de ce "versant". Son aîné n'avait été qu'un flirt et de ce fait, n'avait su le rassurer, sinon attiser ces désirs incompréhensibles et le frustrer d'avantage parce qu'il ne pouvait saisir la logique de cette tendresse envers ceux de son sexe. L'adolescent malgré ses airs calmes ainsi que sa retenue -souvent cité lorsque deux élèves étaient surpris à se bisouiller- en avait bavé, et sans doute qu'au fond, il trouvait qu'Atalan avait raison. Laisser des jeunes livrés à eux-même était incongru, voir cruel.

Cela n'empêchait toutefois pas de rougir violemment lorsque de nouveaux termes débarquaient dans son cerveau. Des quoi ? avait dit Maître Pirin ? Des menstrues ? Le nom sonnait monstrueux. Emballé dans l'explication d'Atalan avant même de pouvoir dire quoique ce soit pour recadrer le passionné, Luke s'était retrouvé enseveli sous une tonne d'informations qu'il peinait à saisir. Et ce n'était pas faute du Miraluka. Ne pouvant s'en empêcher, le jeune homme avait inconsciemment porté sa main à son ventre [Je répète, à son ventre pour les pervers sourds.] compatissant avec les femmes. Il avait rarement été aussi content d'être un garçon même si l'idée de devenir une fille ne l'avait jamais traversé. Imaginant ses organes se fâner en son être, Luke éprouvait presque la douleur de ses pauvres congénères qui devaient-chaque moi en plus ! - supporter cette horrible manifestation de la nature pour donner la vie. On lui avait déjà très vaguement expliqué comment se déroulait une grossesse-niveau gosse de 10 ans- et l'expérience ne le tentait pas vraiment à l'époque, mais ce que disait Atalan sonnait comme une condamnation. C'était donc ça que les gens évoquaient en parlant des "règles" ou du "moment" des femmes lorsqu'elles étaient particulièrement de mauvaise humeur ? Jenny la Sith l'ayant attaqué devait vraiment en avoir des irrégulières dans son cas. Genre toutes les semaines.

Cette petite angoisse dûe à l'inconnu mais aussi à son imagination fertile par moment passée, le jeune homme eut une nouvelle grimace. Cette fois, il s'en ouvrit à Atalan, trop surpris pour être timide sur le coup par la déduction qui le gênait beaucoup.

-Mais alors, si c'est biochimique... Programmé par la nature pour la procréation... Pourquoi y a-t-il des personnes attirées, vous savez, par leur propre sexe ? Ça n'a aucune logique.

Histoire de ne pas passer pour le gros homophobe de service, ce qui aurait été un comble venant de lui, le Hapien s'était retenu de balancer un "contre-nature" bien senti. Mais c'était ce qu'il avait l'impression d'être, d'avantage encore que lorsqu'il ne s'assumait absolument pas. Autant la connaissance avait de bons côtés, autant il fallait savoir la distribuer avec sagesse car c'était une arme redoutable. Heureusement, Atalan était un excellent professeur qui avait réussi l'exploit d'intriguer Luke, qui, au lieu de se fermer comme toujours, le temps qu'arrive la réponse, essayait de saisir. Evidemment, il piqua plusieurs fars et passa plusieurs fois sa main dans ses cheveux, prêt à suffoquer de honte, mais il tentait au moins de comprendre, non seulement pour aider la Padawan mais aussi par pure ouverture d'esprit.

-L'accompagner ? Moi, mais je n'ai aucune connaissance sur sujet qui justifierait...

Habitué à se valoir par lui-même, le jeune homme ne saisissait pas vraiment le sens de l'accompagnement psychologique. Évidemment, Saï s'était toujours bien occupé de lui, mais de part son rang si spécial avait souvent été absent, sans compter qu'il avait toujours donné énormément d'autonomie à Luke afin de réveiller sa confiance en lui. Le Hapien était donc loin d'être un sans coeur, mais pourvu d'un caractère assez secret, en s'imaginant à la place de Lawra, la Padawan, il aurait trop honte d'aller à un tel rendez-vous accompagné. Mais bon, soit. Malgré une gêne considérable, il écouterait Atalan. Que cela lui coûtait-il après tout ? Et surtout, que cela coûterait-il à Lawra d'y aller seule ? Avec tout ce que disait Maître Pirin, le Chevalier saisissait le désarroi d'une jeune fille ignorante dans une telle situation. Si elle s'était de plus confié à lui, ce n'était pas pour rien.

-Je le ferai. En espérant que personne ne croit que...

Luke ne s'en rendait pas compte, d'ailleurs il s'en moquait, mais dans une situation comme ça, il se souvenait qu'on lui avait parlé de son "succès". Avec son joli minois, la relation entre Lawra et lui pourrait prêter à confusion. Il était le professeur tentateur ayant poussé une gamine à faire une connerie, et juste assez responsable pour l'accompagner chez la guérisseuse. Ayant déjà eu suffisamment de rumeurs et hypothèses débiles le concernant en ce sens. Au point qu'un gamin de 13 ans avait stupidement tremblé lorsqu'il lui avait proposé son aide seul à seul. C'était un détail, mais Luke ne voulait plus vivre cette épreuve salissante. Il ne voulait pas avoir ce rôle là.

-En tout cas je vous remercie. Je peux vous assurer que j'ai appris énormément de choses. Je ne pensais pas que c'était aussi... Complexes, ni que les conséquences pourraient être aussi désastreuses.

Le jeune homme imaginait désormais assez facilement le choc psychologique de ces gamines livrées à elles-même. Certaines devaient cacher leurs grossesses, sans parler de quelques énormités comme des fugues pour avorter en secret en ville. Peut-être moins maintenant que l'Amour était toléré, mais en se mettant à leur place, le Jedi s'avouait qu'il aurait probablement paniqué et que l'idée d'en finir avec cette vie débutante lui aurait au moins traverser l'esprit. Être viré du Temple ? Jamais. Et il n'était pas le seul à songer cela après des années de formation, sans avoir reçu de préparation pour une vie éventuelle au-dehors. Certains jeunes adultes ne voulaient même pas être chevaliers, néanmoins, leur méconnaissance du monde extérieur, leur manque de diplômes les motivaient. Luke n'en avait évidemment pas conscience, mais il avait vécu le drame de sa génération, craignant de se retrouver à la rue sans rien, même si dans son cas, il était réellement désireux de devenir Jedi.

Exemple du parfait petit Chevalier, le jeune homme incarnait les qualités d'un bon Jedi, mais aussi ses défauts. Ignorant comme un gosse sur certains points, surtout ceux où la Force et le Sabre-Laser n'intervenaient pas, Luke était tout bonnement incapable de faire front à des situations du quotidien. Que ce soit se suffire à lui-même dans un appartement avec des factures etc-même si n'étant pas stupide, il aurait fini par s'adapter- ou comprendre d'intégration des gens de son âge. Les bars, il les connaissait comme des lieux d'informations faciles et de sources peu fiables, les discothèques étaient des pièges dangereux, les réunions entre jeunes: des promesses de boissons et de drogues. Luke ne savait rien de l'université, de la détente. Pour lui, s'amuser était une discussion philosophique autour d'un café. En soi, ça n'était pas un drame mais c'était toutefois le symptôme d'un gros souci dont il n'avait aucune conscience. Les Jedis étaient des enfants formatés, peut-être dans une bonne intention, mais au fond ils ignoraient trop de choses de la vie, craignaient dans le secret, refusaient les émotions au lieu de simplement les maîtriser et luttaient contre leur propre nature. L'éveil était douloureux, gênant bien qu'également libérateur au fond. Si Luke était une personne "biochimiquement" déréglé, au moins il le saurait. Il avait après tout accepté son handicap plutôt facilement. Être "malade" si c'était le cas excuserait-il ses déviances ?

-Le plus sage ? Vous êtes sûr qu'à seulement 16 ans c'est une bonne idée ? Elle s'est déjà mise dans de sacrés ennuis si jamais elle est enceinte. Je veux bien croire que la statistique est basse, mais alors, les Jedis ont une tendance à gonfler les chiffres, parce qu'il y a eu pas mal de cas

Lança-t-il à peine ironique. C'est vrai après tout, même une maître du Conseil s'était faite avoir de la suite, et ça ne pouvait pas être une volonté puisqu'à l'époque ces relations étaient interdites. Enfin sur un point, son aîné avait raison sur un point. Mieux valait que Lawra lui parle, se confie, voir le charge de trouver ces fameuses "protections" avant de recommencer sans rien mettre.

-Bon, allons voir cet équipage, il est aussi temps d'apprendre des choses d'eux.

Fit Luke en choisissant finalement de sourire, bien qu'intérieurement il reste chamboulé. Tout doucement il s'était rendu compte de son ignorance et de la portée de cette dernière, même s'il oscillait avec ses valeurs de sobriété passant par le tabou.
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Une nouvelle, le Chevalier voulut écarter la conversation pour en revenir à la mission et Atalan ne sut si c’était par une sorte de professionnalisme ou par une volonté arrêtée d’éviter un sujet qui l’embarrassait. Luke avait le chic pour soulever d’innombrables questions et fuir les réponses très poliment mais à toutes jambes malgré tout. Cet Hapien était intrigant. À bien des égards, il paraissait être un pur produit de l’Ordre, pétri par les contradictions d’institutions qui essayaient tant bien que mal, et parfois n’essayaient pas beaucoup, de s’adapter à la diversité d’une Galaxie et d’une Vie qui s’ingéniaient toujours à excéder leurs habitudes.

Ce n’était pas évident parce qu’il n’avait pas bougé d’un cheveu mais le Miraluka observait Luke avec une attention plus grande encore. Pour des êtres comme les Miralukas, pour un Miraluka Jedi qui plus est, le jeune Chevalier éclipsait facilement tout ce qui l’entourait. Atalan éprouvait en le considérant la même émotion que lorsqu’il lui arrivait, par hasard, d’écouter une musique d’une profonde justesse, mélancolique ou joyeuse, sereine ou, comme en ces instants, nerveuse. La présence de Luke dans la Force était une pulsation vitale qui éclipsait sans peine la curiosité que le Miraluka pouvait obtenir pour l’équipage de la Danae.

Il finit par hausser les épaules.

— Je n’ai jamais été un grand spécialiste des astronefs, c’est le moins que l’on puisse dire, mais à en juger par les vrombissements du vaisseau et ce que nous a dit Borg tout à l’heure, je suppose qu’on ne va pas tarder à décoller et que jusqu’à tant que l’on saute dans l’hyperespace, les membres de l’équipage préféreront sans doute ne pas avoir leurs deux passagers dans les pattes. Rassurez-vous, nous aurons tout le temps du trajet pour discuter avec eux.

Comme le voyage de Coruscant à Namadii se faisait en un seul saut, pour l’équipage, à l’aller, il n’y avait somme toute pas grand-chose à faire. Une fois les calculs effectués et le saut accompli, à part quelques tâches de manutention légère qui, pour la plupart, devaient être effectuées de préférence à quai, la vie à bord du vaisseau devait être assez calme.

— Vous avez l’air peiné, Luke. Plus qu’embarrassé. Je me trompe peut-être…

Ben voyons.

— … mais si c’est le cas, la mission peut attendre, parce qu’elle sera d’autant mieux menée que votre esprit sera plus tranquille.

L’agitation de Luke, du reste, n’était pas faite pour étonner Atalan : après tout, le sujet qu’ils évoquaient était ô combien sensible pour la plupart des Jedis et la politique de tolérance plus ou moins formalisée qui tendait à s’imposer dans les Temples ne changeaient pas grand-chose à l’affaire, pour la majorité de l’Ordre.

— Que les Jedis soient plus fertiles que les individus moyens de leur espèce n’est peut-être pas très surprenant. En un sens, les Jedis sont plus vivants que les autres, plus présents dans la Force, et c’est la Force qui conduit à la Vie. C’est une… idée amusante, à vrai dire.

Il n’y avait jamais réfléchi avant que Luke n’en fît la remarque mais le raisonnement ne lui paraissait pas aberrant. Il se voyait mal proposer au Conseil des Guérisseurs un protocole expérimental susceptible de tester cette audacieuse hypothèse : quelque chose lui disait que ses collègues ne verraient pas d’un très bon œil l’organisation de séances de copulation surveillée, fût-ce pour les besoins de la science et de la connaissance de la Force.

— Ceci étant dit, que votre Padawan ait commis une erreur en manquant de se protéger quand elle ne souhaitait pas d’enfant n’implique pas, je l’espère, qu’elle la commettra à nouveau, si elle est bien conseillée. D’ailleurs, quand je vous suggérais de l’accompagner, je ne voulais pas dire que vous devriez lui tenir la main d’un bout à l’autre de la consultation mais au moins, disons, la conduire jusqu’au Centre Médical. Le reste est une affaire plutôt privée. Et plutôt féminine.

Et il y avait fort à parier que la nervosité manifeste de Luke en la matière aurait un effet plutôt délétère que secourable.

— Ce qui est sage, c’est de connaître la Force telle qu’elle s’exprime le plus spontanément et le plus souvent dans la Galaxie plutôt que de nier systématiquement la réalité de cette expérience.

Pour une fois, Atalan s’exprimait de manière assez abstraite. Lui qui avait décrit avec une exactitude médicale les processus de la reproduction humaine restait assez vague sur les implications morales de l’idée qu’il avait laissé transparaître. C’était que le Miraluka avait encore du mal à accepter le magister théologique que son statut de Maître Jedi officialisait pourtant. Il y eut d’ailleurs un moment de silence pendant lequel l’hésitation du jeune Maître fut sans doute aisément perceptible puis le Miraluka se risqua à reprendre la parole :

— Vous savez… certains Jedis, certains… ambassadeurs, surtout, parmi les Consulaires, et je ne dis pas ça pour vous froisser évidemment, ont tendance à considérer que la seule expérience véritable que l’on fasse de la Force est une expérience spirituelle ou plutôt que la seule vraie expérience spirituelle est de nature, disons, abstraite. Que la méditation, par exemple, est un exercice qui permet de s’abstraire de ses contraintes corporelles pour atteindre l’état de détachement qui permettrait, disons, de contempler la Force à un plus haut degré de pureté.

À peu de choses près et simplifiée, c’était même sans doute la position la plus représentée au sein de l’Ordre.

— Mais quand on est guérisseur, quand on est un guérisseur, surtout, qui opère principalement à travers la Force plutôt qu’à travers les outils et les produits chimiques, les appareils et les médicaments, on comprend que la Force est une expérience corporelle. La méditation n’est pas un exercice d’abstraction, la méditation…

Le Miraluka chercha ses mots. Il avait la réputation d’être un expert en la matière au sein du Temple et beaucoup attribuaient sa santé remarquable à sa pratique intense de la méditation. On racontait même — à tort — qu’il avait commencé à étudier le Morichro.

— … la méditation est une expérience intimement corporelle, sensuelle, même. Le désir que nous éprouvons pour d’autres êtres est la manifestation de la pulsion vitale qui est notre manière à tous, comme tout être vivant, notre première manière, notre manière fondamentale d’être en rapport avec la Force. Et je ne crois pas qu’il faille être trop fonctionnaliste dans notre conception de ces désirs. Que ces désirs favorisent la reproduction, c’est un fait, mais c’est un fait tout aussi attesté que, dans la Galaxie, et dans tous ses écosystèmes ou presque, il existe des désirs, chez les espèces rationnelles comme chez les animaux moins évolués, qui n’ont aucun rapport avec la reproduction et la génération, des désirs entre mâles, des désirs entre femelles ou bien des désirs entre mâles et femelles qui ne conduisent jamais à la procréation. Et il n’y a là rien d’illogique. Les désirs et les communions charnelles auxquelles ils conduisent sont des expressions de la Force, des connaissances de la Force. Parfois ces communions peuvent aboutir à de nouvelles vies mais… la plante ne vit pas pour fournir de l’oxygène à ceux qui ont besoin d’en respirer. Ce n’est pas sa fonction. La plante vit telle qu’elle vit parce qu’elle est ainsi et la plante toxique et vénéneuse n’est pas moins vivante ni moins noble, pour être moins fonctionnelle, que la plante utile à certains. Le toxique n’est qu’une donnée relative et, en biologie, de la même manière, la logique n’est qu’un produit de la morale, jamais de la nature.

Il avait condensé en quelques phrases la matière à un long traité de théologie et, à vrai dire, c’était peut-être beaucoup parce qu’il craignait de développer trop amplement des idées qui eussent choquer Luke. Atalan, cependant, aimait trop les discussions de ce genre pour résister la tentation de les poursuivre et il ne tarda pas à demander, de sa voix douce qui invitait à la sincérité :

— Pensez-vous vraiment que chez les humains ou chez les autres, le désir qui pousse le mâle vers le mâle ou la femelle vers la femelle devrait être condamné parce qu’il serait illogique ou, disons, contre-nature ?
Luke Kayan
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Se séparer du corporel pour purifier l'esprit. N'était-ce pas l'essence même de la méditation ? Selon Atalan, non, et l'expérience de Luke ne venait que confirmer ses propos. Chacun de ses mots ne faisait que souligner la véracité de cette expérience aussi effrayante que fascinante que le jeune Jedi avait vécu avec Jason, lui dérobant ses yeux pour s'entrevoir au moment ultime. Luke avait tâché d'oublier cet événement, inquiet pour la vue de Jason qu'il craignait de dérober ou de faire diminuer à force d'allers-retours invraisemblables. Enfin, le phénomène ne s'était pas tant reproduit que ça heureusement. Une fois sur Naboo et peut-être encore sur Coruscant, déjà parce qu'ils ne s'étaient pas spécialement beaucoup "unis" à cause du contretemps que supposaient leur travail respectif, mais aussi parce qu'il fallait réellement que le Jedi soit dans des conditions optimales de bonheur. Aucune préoccupation ne devait l'habiter en cet instant, il devait se donner coeur et âme à une activité n'ayant parfois... Rien de pur. L'autre façon pour lui d'atteindre ce sommet, et par conséquence d'observer d'étranges réactions de la Force était la méditation ou la concentration. C'est ainsi que le Hapien avait volé la vue à Halussius Arnor, le temps d'un instant, tandis que ce dernier coopératif l'y aidait en créant un lien entre eux via une Onde puissance reflétant toute sa sagesse.

Ces moments là, extrêmement rares, venaient s'ajouter à ceux où gamin, Luke s'était endormi après avoir envoyé une onde "gigantesque" pour aider aux soins d'Ellena, avançant considérablement le processus. Epuisé, le petit garçon, faible réceptacle pour sa si majestueuse amie s'était effondré net, pareil lorsqu'il était parvenu, depuis la ville d'Ondéron à appeler son Maître au secours parce qu'on l'enlevait. Luke aimait la Force, il avait confiance en elle, mais il est vrai que parfois, cette dernière lui jouait des tours presque inquiétants, qui, encore une fois, le faisaient se sentir en marge.

Peut-être pas vraiment prêt à disserter sur ce fait, le jeune homme soupira et se contenta d'envoyer une légère onde de Force au Miraluka après un petit temps de réflexion. Signe qu'il avait reçu et acceptait en partie sa théorie. Il était évidemment incapable d'expliquer en quoi il lui donnait raison, et surtout pourquoi il s'était si vite rangé de son avis. De plus, s'y résigner totalement serait repousser un peu ses croyances, car effectivement, en tant que Consulaire, Luke avait toujours prôné la Force comme échappatoire à l'immondice matériel. Il s'était toujours servi de la méditation pour se libérer des impressions d'échec ou de saleté comme lorsqu'il avait découvert son penchant. C'était le moyen, un peu lâche avouons-le, de s'échapper de ce monde trop dur. Une jolie prison envoûtante où l'on s'aveuglait volontairement aux petites questions qui rendent la vie si difficile.. Et mêlé aux auras de ses confrères marchant dans le couloir, dans ces purs moments, le jeune homme se sentait moins à l'écart.

Car oui, Luke avait l'impression de détonner sous de nombreux accès, ramassant au passage toute la culpabilité que son cheminement créait. Se sentir différent n'était-ce pas faire preuve d'arrogance ? Sous le couvert de songer à ses petits soucis voir de se dénigrer, n'était-il pas en train de se concentrer de manière exagérée sur sa personne ? Et puis peut-être n'était-il pas si différent au final.

En effet, les questions d'Atalan avaient le mérite de ranger le flot de pensées migraineuses qui parcouraient presque sans cesse l'esprit de Luke lorsqu'il touchait involontairement à ce sujet. D'un côté, il ne voyait absolument pas Jason comme un être abject ou contre-nature, et pourtant, s'ils étaient ensemble c'était bien que l'Ambassadeur avait le même "vice" que lui. De la même façon, le blond ne se voyait pas laisser passer une insulte homophobe face à un(e) inconnu(e) et il défendrait avec la même ardeur un couple lesbien ou homosexuel que des civils hétérosexuels. En fait, le jeune homme était plutôt tolérant avec autrui, ayant d'ailleurs toujours prit le parti de respecter Ka'Lei, un chevalier transsexuel. Certes, il ne comprenait pas l'idée, et n'abordait qu'une curiosité timide quant au thème, mais en tout cas, pour un Jedi reconnu traditionnel, Luke faisait preuve d'une grande modernité sertie d'une tolérance assez surprenante vu son mode de pensée habituel. Mais il faut le dire, le Hapien était un faux traditionnel, puisque les idées de cours nouvelles lui avait toujours plu, il se renseignait quant à la méthodologie, aux découvertes en tout genre, et surtout malgré sa gêne considérable, participait à la conversation avec Atalan. Très timide, il se cachait simplement sous la couverture de son rôle de Chevalier coincé, gentil dans le fond et compréhensif mais surtout immuable, ancré dans ces valeurs qui l'avaient jadis fait sortir de son autisme.

En fait, Luke portait bien le sceau de Saï, même s'il était probablement plus "coincé" que ce dernier. Malicieux à ses heures, inventif et tourné vers les douleurs d'autrui, Luke était tolérant avec autrui, sans concession pour lui. Néanmoins, les paroles de son comparse de mission lui faisaient malgré tout réfléchir à l'illogisme de son système. S'il s'insultait à l'idée d'être contre-nature, il faisait de même avec Jason ou Ka'Lei, à un degré encore plus élevé de l'impensable pour sa part. Sa volonté n'étant pas là, le Hapien se sentait comme obligé de s'accepter un peu plus, et étrangement, cela lui retirait un peu de son mauvais goût pour l'auto-flagellation.

-Les condamner ? Non, bien sûr ! Ils sont consentants et ne font de mal à personne.

Encore une fois, la logique que Luke croyait avoir acquise volait en éclats. Rempli de paradoxes, avec cette réponse énergique, le jeune homme démontrait une tolérance aussi sincère que vive, alors qu'il condamnait lui-même la "nature" de ces relations. Sous ses aspects traditionalistes, encore une fois, le Hapien était en réalité un adepte de "la liberté s'arrête là où commence celle des autres", c'est à dire que tant que cela ne faisait souffrir personne, chacun faisait ce qu'il voulait de son derrière -ou de toute autre partie de son corps concerné.-

-Et je préfère ça à l'hypocrisie du membre d'un couple hétérosexuel qui par commodité, continue d'entretenir les apparences d'un mariage, mentant à l'autre encore amoureux tandis qu'il ou elle la trompe.

Emporté dans son élan, le jeune homme se sentit tout à coup stoppé, ayant l'impression de commenter un holofilm à l'eau de rose. Mais bon, malgré qu'il s'en veuille pour ce type de conversation normalement considérée superficielle, le Hapien devait admettre qu'il appréciait grandement cette discussion. Bien sûr, ses joues ne cessaient de le brûler depuis le début, ses mots se bloquaient dans sa gorge et il alternait entre enthousiasme et silences gênés, de plus les révélations faites quant à ses croyances parfois fausses étaient douloureuses... Mais Luke apprenait petit à petit à démêler ses pensées, grâce à Atalan.

Ce qui aidait, c'était que le Maître ne critiquait pas ouvertement le Temple Jedi, ni des personnalités de ce dernier, usant de la méthode des questions qui forçaient son élève du moment à réfléchir. Il avait "attaqué" un adorateur de la philosophie sur son propre terrain, le rendant plus prompte à s'ouvrir.

Légèrement apaisé quoique l'esprit enivré par des milliers de nouvelles questions, Luke offrit un petit sourire au vide. Il devait bien commencer à s'accepter et à réellement faire fi de ces choses qui n'importaient guère tout en couvrant une importance sans nom. La Force vivante, sensuelle, toutes ces théories n'étaient pas encore complètement entrées dans sa tête, et il n'en discuterait pas avec n'importe qui, mais il acceptait l'existence de cette théorie, sachant que pour lui, la méditation continuait d'être le mieux.

-Cette fois, je crois que nous sommes bien en hyperespace.

Le rebond, subtil mais signal implacable pour un aveugle avait fait réagir le Hapien qui avait machinalement tourné la tête vers le devant de l'appareil. Ses mains sur le siège se décrispèrent légèrement, car le vol généralement sans secousse ne lui posait pas de souci. Seuls le décollage et l'atterrissage avaient tendance à l'étourdir, lui faisant perdre les repères spatiaux chers aux aveugles.

-De qui souhaitez-vous vous occuper ?

Comme il aurait aimé savoir comment Atalan était au courant pour les révélations d'une Force sensuelle. Et si c'était dangereux pour un compagnon ne la maîtrisant pas, ni ne possédant la capacité de la sentir. Mais ça, ce serait petit à petit, au cours de leurs péripéties peut-être qu'il l'aborderait. Chaque chose en son temps.

-Merci. Je veux dire, pour tout ça. Je contacterai la Padawan dès que j'aurai un moment tranquille pour la convaincre que... Que ce n'est pas si grave et qu'il y a des solutions.

Acheva-t-il, un peu hors à propos après avoir fait référence à la mission. Mais sauter du Strangulot au Bantha n'était qu'un signe de gêne, ce qu'il éprouvait encore grandement à l'idée d'avoir une élève enceinte sous sa tutelle ou encore, de savoir qu'il aurait ce soir en s'endormant, une énorme réflexion personnelle l'empêchant probablement de sombrer dans le sommeil. Mais c'était ainsi que l'on grandissait. En se sentant mal avant de se sentir bien. En démêlant la pelote de fils d'idées embrouillés. Le tout était d'accepter, ce qui prenait encore un petit temps en soi. Bref, la maturité et l'ouverture d'esprit se méritaient.
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Il y avait quelque chose d’étrange dans la réaction de Luke mais Atalan n’avait pas tant l’expérience de semblables conversations qu’il pût facilement comprendre le problème. Il lui semblait que le Chevalier réagissait, pour une fois, plutôt par intuition que par réflexion — du reste, c’était loin d’être un défaut. Ses réponses furent vives mais laconiques et le saut dans l’hyperespace sembla apporter une diversion salvatrice. Une troisième fois, Luke remit leur mission sur le devant de la scène et, cette fois-ci, Atalan se contenta de hocher la tête sans le forcer à reprendre le fil de leur conversation.

— Parfait…

La voix du Maître était pensive et, en cela, il pouvait paraître distant — voire déçu. En vérité, il craignait simplement de n’avoir pas été à la hauteur de sa tâche et, comme souvent, d’avoir fourni des explications complexes pour éclairer une vérité qui lui semblait évidente. Sans doute était-il préférable qu’il se consacre à des problèmes plus immédiats.

— Allons faire un tour sur le pont principal et voir déjà si nous pouvons nous rendre utiles. Ce serait la moindre des choses.

Le capitaine Borg les avait accueilli à son bord en échange d’une participation aux frais du voyage qui, pour tout dire, était plus symbolique que profitable. Atalan n’était même pas sûr que ce que l’Ordre avait payé couvrait la nourriture de leurs deux ou trois repas sur la Danae. Peut-être que Borg y voyait un investissement sur le long terme, parce que de bonnes relations avec les Jedis étaient toujours profitables mais, au fond, Atalan pensait plutôt que le capitaine se comportait avec un patriotisme qu’il témoignait plutôt par les actes que par les discours.

Les deux Jedis quittèrent leur cabine. Il n’était pas difficile de s’orienter à l’intérieur du vaisseau : l’essentiel de la carlingue était occupé par les soutes qui abritaient la cargaison, de sorte que les coursives que l’on avait à emprunter couramment, situées presque tout vers le haut et l’avant de l’appareil, formaient un chemin simple et direct qui desservait successivement les cabines, la cuisine et sa salle commune et le pont.

Quand ils y furent parvenus, le capitaine les accueillit avec une exclamation joviale.

— Ah ! Voilà mes passagers ! La cabine vous convient ? C’est pas l’grand luxe mais enfin…
— C’est amplement suffisant. La sortie d’orbite s’est passée sans encombre ?

Borg haussa les épaules.

— En dehors des cafouillages habituels des aiguilleurs spatiaux. Et encore, on a été chanceux. V’s’avez c’qu’on dit : on met parfois moins de temps pour aller de la Bordure à Coruscant que de l’orbite à la planète. Et inversement. Mais on d’vrait être sur Namadii dans trente-trois heures. P’têtre un peu plus, sur les pistes de leur astroport sont prises. C’est rarement la cohue là-bas mais d’sons qu’c’est pas très grand, quoi.
— À vous entendre, ce n’est pas la destination rêvée.

Nouvel haussement d’épaules.

— Bah, j’dis ça, j’dis rien. Si on aime la forêt et les grands territoires vierges, j’suppose que ça a son charme. Moi, j’préfère plutôt les bazars et les astroports animés, si vous voyez c’que j’veux dire.
— Sûrement qu’il y a des routes commerciales plus propices à de semblables distractions.
— Pour sûr. Mais si c’est pour payer le divertissement à coups d’attaques de pirates et j’en passe, m’est avis que le calme de la Coruscant-Namadii est encore préférable. C’est qu’j’ai passé l’âge de jouer à cache-cache avec les têtes brûlées.
— Une sage décision, à n’en pas douter.

Et un triste constat sur la sécurité des voyageurs commerciaux aux confins de la République.

— Est-ce qu’on peut faire quelque chose pour aider ?
— Bah…

Borg promena un regard tranquille autour de lui. Sur le pont de la Danae, de fait, l’heure n’était pas à l’effervescence. La seconde de Borg et les deux hommes d’équipage qui étaient encore là paraissaient absorbés dans des activités somme toute assez peu professionnelles : la première jouait une partie de dejarik sur une table holographique miniature, probablement contre l’ordinateur, et les deux autres regardaient une holofiction où la moitié des protagonistes étaient apparemment de plantureuses Twi’Leks légèrement vêtues. Atalan ne les percevait pas mais il le déduisait aux dialogues.

— À moins qu’v’z’ayez une folle envie d’éplucher des racines en cuisine pour filer un coup d’main à Andok, pour le repas de ce soir…
— Vous cuisinez vraiment ?
— Ce s’rait bien dommage de s’avaler des nutriments en tablette quand on pilote un vaisseau agricole, vous croyez pas ?

Le visage d’Atalan s’éclaira d’un sourire. Ses compétences culinaires étaient quelque peu atypiques et elles reposaient surtout sur de longues expériences de survie plus ou moins solitaires dans les jungles et les bois aux quatre coins de la Galaxie. Il en avait développé un goût certain pour la préparation des repas même si son sens de l’assaisonnement et des ingrédients décourageait parfois ses convives.

— Direction la cuisine, donc.

Atalan se tourna vers Luke.

— Ceci dit, je parle pour moi. Si vous préférez une autre activité, je suis sûr que le Capitaine trouvera de quoi vous occuper.
Luke Kayan
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Pour Luke aussi, Atalan était un soleil au milieu d'une masse fade. Ses émotions étaient donc d'autant plus perceptibles, bien que le Maître se contrôlait évidemment bien. Un peu confus à cause de sa réponse aussi courte que pensive, le Hapien éprouva le désir de s'excuser. Il avait réellement apprécié cette conversation mais avait besoin d'une légère pause pour digérer son nouveau savoir, aussi gênant que soulageant. Pourtant, le jeune homme resta silencieux, comme s'il évoluait à distance de son propre cerveau. Ces informations l'avaient choqué, et c'était pire lorsqu'il y pensait. Peinant à se concentrer dans leur mission, bien qu'il l'ait invoqué juste avant, le jeune homme resta en retrait lorsqu'Atalan s'adressa à Borg. En même temps, le Maître posait déjà les bonnes questions, et le capitaine se montrait plutôt coopératif, pour ne pas dire d'excellente humeur, sans doute content qu'on prenne son avis en compte. Luke prit note mentalement des moindres paroles de ce dernier, n'oubliant pas de répondre aux questions.

- Nous sommes très bien installés, je vous remercie.

Lança le blond au moment opportun, sans modifier ni son ton calme, ni son langage habituellement soutenu. Il ne voyait pas l'intérêt de se cacher face à Borg naturellement ouvert. Ce dernier devait voir de nombreux passagers, si bien que le Hapien ne s'étonnerait guère qu'il ait déjà deviné leur "profession" ou tout du moins une semblable. Pour aller sur Namadii il fallait chercher quelque chose de précis, et ces questions étaient le symptôme par excellence des fouineurs justiciers. Enfin, ces deux là visiblement lui plaisaient, en plus, ils étaient polyvalents et plutôt modestes puisqu'éplucher les pommes de terre ne les dérangeaient pas.

-Non, je trouve ça parfait.

Sans ironie aucune, Luke avait calmement répondu au Miraluka, le suivant dans la cuisine. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le blond avait envie de connaître ce monde dont il ignorait tout, au même titre que celui de la conduite d'un vaisseau. De la même manière, le Hapien était amusé à l'idée de savoir comment Atalan se débrouillerait avec ses patates. Bien sûr, ça risquait d'être moins ridicule que lui qui allait certainement fournir la sauce tomate du bout de ses doigts coupés. Enfin, ce serait sans doute un exercice redoutablement utile avant de manier un scalpel car le jeune Chevalier ne doutait pas que son aîné le ferait participer à tout sans l'épargner.

Installé donc sur une poubelle-miraculeusement propre- renversée à l'envers pour servir de tabouret, ses "armes" en main, à savoir une pomme de terre et un couteau. Le jeune homme attendait les conseils de la cuisinière, une rodienne quadragénaire amusée. C'était sans doute le moment pour l'aborder.

- N'est-ce pas trop dur d'être cuisinière sur un vaisseau ?

- Oh c'est comme pour tout t'sais mon petit. Y'a des avantages et des inconvénients. D'abord c'est surtout chiant parce qu'on est loin de la famille, la mienne est installée à Coruscant, mais bon sinon on voit du pays. J'peux raconter ça à mes petits et comme ça ils savent plein de choses, et ça depuis qu'ils sont sortis de l'oeuf.

- Quelle est votre destination favorite ?

- Ben dit donc tu enchaînes toi, j'ai l'impression d'être une star d'holonet.-Minaudait la ménagère qui répondait en fait à au moins la dixième question de Luke, toujours plus ravie. Comprenant sa fierté à être enfin prise en compte et surtout à pouvoir échapper au morne quotidien de son recoin de vaisseau un peu oublié de tous, le Hapien se montrait particulièrement attentif.- J'adore Alderaan. Des fruits... Gros comme ça tu vois mon p'tit ? Enfin tu vois pas grand chose toi, désolé. A ce propos ton copain et toi vous êtes sûrs de vouloir éplucher des patates vu l'état de vos yeux ? Humpf pour en revenir à tes questions et anticiper même, j'déteste Tatooine, c'est sec, y'a rien là-dessus, inutile de penser à refaire son stock là-bas. On meurt de faim quand on sort de cette foutue planète et on débarque pas avant bien longtemps encore.

Après un petit temps de discussion à laquelle le Hapien prenait finalement plaisir, la rodienne finit par aborder le sujet voulue.

- Namadii ? Ouais, un peu pareil que Tatooine, c'est désert. Enfin, le peu de produits qu'il y a, reconnaissons-le, c'est de bonne qualité, mais ces temps-ci on nous a conseillé de ne plus acheter. Du coup on a stoppé les achats. On y fait étape quand quelqu'un demande à y aller, mais on recharge sur la planète d'à côté... Et comme je sais que tu vas me l'demander. Y'a des trucs curieux à Namadii il paraît. Une épidémie, mais les rumeurs divergent beaucoup. Certains disent que ce sont les produits, d'autres carrément les gens. Du coup vous devez faire attention là-bas. Ah et la patate, occupe-toi en, elle va pourrir à ce rythme.

Affectueuse malgré son côté un peu brute, la quadragénaire laissa les deux Jedis devant travailler un peu. Tournant la tête vers Atalan dont il venait de déceler la présence, ignorant s'il était là depuis longtemps, le jeune homme lui fit part de ses découvertes.

- Selon la cuisinière, Namadii est considérée comme contagieuse. Elle pense que l'épidémie s'est transmise par la nourriture, notamment les fruits. Personnellement je n'en sais rien mais je pense que les habitants se la transmettent directement, sinon, un simple avertissement l'aurait déjà ralentie, les gens cessant de consommer la nourriture de leurs potagers. Sans compter que de l'aide Républicaine aurait déjà envoyé des caisses de nourritures, n'est-ce pas ?

Un peu inquiet à ce sujet, ayant obtenu plusieurs preuves du manque d'engagement de cette chère République envers son peuple disséminés sur des dizaines de planètes parfois oubliées, le Jedi apposait à ses propos, tout l'idéalisme dont était encore capable son jeune esprit.

- En ce qui concerne tout ça... Je veux dire, ce à quoi j'ai coupé court, je tiens à vous remercier, j'ai beaucoup appris, c'est juste que je ne sais pas encore comment vraiment prendre la chose. Je suppose qu'il me reste encore énormément à découvrir. J'en ai envie et pas envie à la fois, c'est probablement puéril, surtout d'un point de vue scientifique comme le votre... Mais j'ai sans doute un peu peur de savoir certaines choses, imaginant que l'on ne m'y ait pas informé voir formé pour de bonnes raisons.

Se surprit-il à dire plus facilement qu'il ne l'aurait cru, probablement car sa propre réplique l'avait prit de surprise. Ses lèvres s'étaient bien jouées de son cerveau encore embrumé pour tout dire et il avait prononcé ces mots à la va vite, étonné par ses propos alors qu'il les débitait, une patate et un couteau dans ses deux mains respectives.
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Installé devant une bassine, un économe hors d’âge à la main, près de ce qui servait d’évier dans la petite cuisine du vaisseau, Atalan épluchait consciencieusement ses pommes de terre, en prêtant une oreille apparemment distraite à la conversation qui se déroulait non loin de lui, entre la Rodienne et son nouvel acolyte. Il devait bien avouer que Luke se déroulait mieux qu’il l’aurait cru. Sans doute la Rodienne n’était pas une cliente difficile. Elle aimait parler, comme souvent les équipages des vaisseaux commerciaux qui, en fréquentant des routes trop tranquilles, avaient tendance à priver les hommes et les femmes du bord de conversations intéressantes. Il n’empêchait qu’à l’humble avis d’Atalan, les incertitudes témoignées par Luke un peu plus tôt étaient en partie infondées.

Pour sa part, il garda le silence le plus complet, peu désireux de s’interposer entre le Chevalier et la cuisinière. Il laissa son esprit vagabonder peu à peu sur les flux et les reflux de la Force, n’offrant à sa tâche matérielle qu’une attention mécanique. Il avait déjà réfléchi à ce qu’ils feraient en arrivant sur Namadii, dans telle ou telle situation, et toute hypothèse nouvelle à ce sujet aurait relevé, probablement, de la spéculation vaine. Maintenant, il préférait écouter — ou voir — ce que la Force avait à dire et à montrer, ce qu’elle suggérait, discrètement, confusément parfois, à propos de leur mission, de Luke, de tout autre chose.

Bientôt, les pommes de terre épluchées, lavées et débitées en morceaux s’entassaient dans sa bassine, tandis que les pelures avaient été passées au désintégrateur. Ce n’était pas vraiment des pommes de terre — le mot était devenu l’appellation générique des différents tubercules qu’on cultivait ça et là dans le Noyau et sur la Bordure Intérieure. De toute façon, la plupart des habitants de Coruscant ne faisaient plus la différence depuis bien des générations.

Atalan quitta son poste pour rejoindre Luke, tandis que la cuisinière récupérait le fruit de son travail. Elle ne fit pas de commentaires sur la rapidité et l’aisance avec laquelle l’aveugle supposé avait manié son économe et elle se mit à chantonner un morceau à la mode, tandis que la conversation s’engageait entre les deux Jedis.

Le Miraluka balaya ce qui ressemblait à des excuses d’un geste de la main.

— Votre confusion est bien naturelle. Ce n’est pas seulement un sujet scientifique, c’est un sujet moral et, pour ainsi dire, théologique. Tout dépend évidemment de votre manière de…

Atalan s’interrompit. Il s’aventurait sur un territoire qui lui était moins familier. Certains Jedis, avait-il compris au fil des années, ne voyaient pas l’Ordre de la même manière que lui. Pour eux, ce n’était pas une religion. Pas vraiment. Ce n’était pas une affaire de foi et de préceptes. De réflexions parfois abstraites sur la nature de la Force et du destin. C’était un art martial et une doctrine politique, en gros.

Le Maître haussa les épaules.

— Quoi qu’il en soit, ces choses-là prennent du temps.

Cette fois, c’était lui qui donnait l’impression de vouloir éviter la conversation. D’ailleurs, il revint aussitôt au sujet de leur mission.

— En tout cas, vous avez sans doute raison.

 À propos de la nourriture ou de l’aide républicaine ?

— Selon les autopsies sommaires pratiquées sur Namadii, les symptômes des victimes sont très variés. Les problèmes alimentaires sont souvent plus spécifiques que ça, sauf quand la nourriture a été empoisonnée par des agents artificiels. Auquel cas, sur une planète comme Namadii, la maladie ne prend pas la forme d’une épidémie.

Il avait dit cela sur le ton de l’évidence et, quelques mois plus tôt, il s’en serait sans doute tenu à cette explication elliptique. Depuis, il avait appris. Alors il expliqua :

— Namadii est composée de petites communautés relativement isolées les unes des autres qui subviennent pour l’essentiel à leurs propres besoins alimentaires. Les cas d’épidémies alimentaires interviennent dans les mondes où les denrées circulent à l’échelle continentale ou planétaire, avec des systèmes d’importation et d’exportation développés, une économie mondialisée, ce genre de choses. Pour qu’une épidémie se propage dans un monde plus insulaire, d’un point de vue démographique, comme Namadii, il faut que la maladie voyage avec les gens et passe de personne à personne. Sauf si les gens de Namadii ont l’habitude de promener leurs sandwichs et de se les offrir les uns aux autres, vous voyez.

Et c’était peu probable.

— Et puis, de fait, la République aurait pris des mesures plus drastiques qu’un simple blocus médical. Elle aurait retiré de la circulation les produits namadiens sur Coruscant, par exemple. Et elle se serait penchée un peu plus sérieusement sur le cas. Coruscant n’aime pas perdre ses greniers.

L’analyse que proposait Atalan de l’implication républicaine était bien moins généreuse que celle de Luke. Si Atalan était un républicain dans l’âme, il était attaché plutôt au concept et aux idéaux qu’à leur manifestation temporelle et politicienne. Dans le système qu’il connaissait, il ne plaçait qu’une confiance toute limitée.

— Pour l’heure, je suppose que nous ne pouvons pas en savoir beaucoup plus. Évitons de charger nos esprits d’idées théoriques qui pourraient nuire à notre jugement sur place, reposons-nous et nous verrons une fois arrivés.
— Tenez.

La Rodienne était revenue fourrer un saladier dans les mains d’Atalan.

— Vous savez ce que c’est ?
— Des fèves suk-suk.
— Un connaisseur ! Il faudrait les écosser.
— Bien sûr.
— Brave garçon.

Voilà un titre que l’on donnait rarement aux Maîtres Jedis. Atalan posa le saladier sur le plan de travail et se mit à écosser les fèves, tout en engageant une conversation exclusivement culinaire avec la Rodienne. Ses vastes connaissances en botanique trouvaient là un terrain d’application un peu inattendu mais la cuisinière était ravie, apparemment, de pouvoir deviser des différents modes de préparation des racines. En réalité, entre Luke et Atalan, quand le repas fut fini, la Rodienne était conquise.

À n’en pas douter, à l’heure du repas, les deux Jedis auraient le droit à la meilleure part.
Luke Kayan
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Théologique ? Surpris par ce mot, Luke avait vivement tourné la tête vers Atalan. Il savait que les utilisateurs de la Force étaient souvent vu comme les suiveurs d'une religion par la population, sans compter les Jedis eux-même, divisés sur la question. Lui-même se considérait comme Athée, car à ses yeux, la Force n'était pas une déesse, sinon une espèce à part entière, vivant en harmonie avec d'autres espèces. Un peu comme la cohabitation de certains crustacés avec des plantes venimeuses, ou des oiseaux perchés sur le dos des Eopie. Bien sûr, avec cette vision des choses, adieu le côté mystique et poétique de l'idée, mais le Hapien savait aussi nuancer ses pensées. A ses yeux, la base de la relation était ainsi, totalement, purement scientifique, donc impossible à remettre en question. La Force existait... Mais plus encore, car au-delà de cette cohabitation intéressée, il y avait des liens et des sentiments. C'était quelque peu confus dans la tête du Chevalier ayant toujours vu cette grande Puissance comme une amie, en grandissant, il avait mit de l'eau dans son vin, histoire de ne pas passer pour un de ces hérétiques, excusant ses gestes sous le prétexte de "suivre les indications de sa compagne", mais le fond était demeuré. D'ailleurs, Luke suivait des principes stricts envers lesquels il avait foi, croyant au plus profond de son être en l'idéologie du Temple. C'était un peu comme lire la Bible [HJ: Pardon pour la référence on ne peut plus humaine, mais je n'ai rien trouvé de mieux.], être d'accord avec la tolérance et l'honnêteté prônées sans pour autant croire en un Dieu dirigiste. Ce qui était en plus, assez hypocrite à ses yeux car ces gens là agissaient bien pour aller au Paradis et éviter l'enfer, alors que lui estimait maximiser sa cohabitation naturelle avec la Force car elle le guidait sur le chemin auquel il croyait fermement, sans espérer de récompense.

Du coup, le jeune Jedi ne savait pas réellement de quoi il en retournait, cependant il était persuadé que ce n'était pas un problème théologique, tout du moins de sa part, car il ne croyait en aucun dieu, lesquels ne se manifestaient jamais au contraire de la Force.

Quoiqu'il en soit, ni la Force, ni une quelconque divinité, par même deux Jedis semblaient aptes à aider Namadii pour l'instant. Atalan avait raison, il fallait attendre d'arriver là-bas avant d'émettre plus d'hypothèse. Heureusement, au lieu de tourner en rond, Luke avait de quoi faire, comme répondre à son aîné en prenant son courage à deux mains... Si pleines soient ces dernières, présentement encombrées par une un couteau rapeur [HJ: Ouech ouech Cool ] et une patate-n'étant pas vraiment une patate apparemment.- le jeune homme se mit au travail. La nature du couteau l'aidait à éviter des coupures, tandis qu'il apposait le bout de métal sur le légume qui perdait inexorablement sa peau, recrachée par les deux espaces prévus à cet effet.

- Pour certains, en effet c'est une question théologique.

Fit-il, un peu rêveur, prouvant également ne pas être l'un de ces religieux vu qu'il ne s'impliquait pas dedans.

- Et vous, que pensez-vous à propos de la Force ? Quelle serait la nature de sa manifestation ?

Intérieurement, le blond pariait pour le côté scientifique, un peu comme lui mais en plus poussé encore. Cela correspondait bien au caractère du Miraluka pragmatique et féru d'hormones. D'ailleurs, les Midichloriens en étaient-ils ? Hum, l'idée dérangeait un peu Luke qui, s'il acceptait l'explication en partie scientifique, ne se résignait pas à voir la Force comme un simple animal cherchant à survivre. Avec le temps, elle avait évolué, s'élevant de la masse grouillante des matérialistes, invitant ceux qu'elle habitait et qui la respectait à toucher quelque chose allant au-delà de la gravité, ou simplement du commun. Elle était l'expression d'une espèce physique à l'esprit si pure que l'évolution lui avait donné une place supérieure à tout le reste, et certes, un peu mystique.

- En ce qui concerne Namadii, je suis d'accord, attendons de voir. J'espère que nous aurons accès au premier cas...

Pourvu que les habitants n'aient pas brûlé le corps. Même si faire une autopsie n'était pas spécialement dans les plus fous désirs de Luke, ce dernier reconnaissait que cela pourrait servir leur cause. De toutes manières, le Hapien était là pour apprendre, alors autant le faire à fond et sans rechigner, jusqu'à chercher lui-même la confrontation avec ce à quoi il n'était pas habitué.

Coupé dans ses pensées par la voix de la cuisinière, le jeune Jedi laissa une oreille traîner. Visiblement, Atalan était un professionnel des arts culinaires, et ce malgré sa propre cécité. C'était assez impressionnant même si le handicap généré par la génétique depuis des siècles était moins grave qu'un autre se manifestant après un accident. Luke lui achevait tout juste sa première patate. Il passa sa main dessus, content de découvrir le féculent entièrement lisse, et donc débarrassé de sa peau rugueuse. Concentré, le jeune homme parvint à en éplucher trois autres jusqu'à ce que la cuisinière les invite à donner leurs ingrédients pour faire le repas. Le Hapien lui arracha un sourire. Aussi volontaire soit-il, les arts de la table ne seraient manifestement jamais un de ses gros talents, au contraire d'Atalan achevant de séduire la matrone.

Le repas prêt, les membres d'équipage s'assirent, racontant leurs histoires et d'autres types d'anecdotes. Luke participa sans chercher à remettre Namadii sur la table, il n'y avait plus grand chose à savoir de plus de toutes façons. Lorsque le dessert arriva, les esprits reposés, pour ne pas dire un peu ankylosés s'ouvrirent d'avantage. On sortit une bonne bouteille de wisky corrélien que Luke se vit forcé de refuser -intégration ou pas, un verre de cette boisson le ferait rouler sous la table.- tandis que le capitaine sortait un jeu, défiant Maître Pirin.

- Nous arrivons bientôt, mais il y a bien le temps pour une petite partie. Vous connaissez ?

Un sourire carnassier flottait sur les lèvres de ce bon vieux capitaine qui venait d'apposer le goulot de sa bouteille sur sa bouche. Le Chevalier se dit que lui faire remarquer que boire ne serait-ce qu'une gorgée en plein travail manquait de professionnalité ne serait pas le meilleur moyen de s'intégrer. Au lieu de ça, il songea aux premiers propos d'Atalan, s'il y avait quelque chose de secret à tirer sur Namadii, mieux valait que Borg boive. Armé de ce constat, le jeune Jedi prit la bouteille et servit à nouveau le capitaine qui riait grassement en voyant le petit aveugle s'intéresser de très près à l'alcool. Il choqua contre le verre de ce dernier -rempli d'eau au grand désarroi de l'équipage.- et trempa ses lèvres, avant d'en revenir au Miraluka, plateau en avant.

- Alors ?

Tout sourire, Luke indiquait quant à lui s'être trouvé une mission... Servir le Wisky a quiconque tendait son verre -pourvu qu'on lui indique où- et sourire un peu béatement. Silencieux, discret mais efficace.
[HJ: Tu peux choisir le jeu évidemment :) Et décider si un secret est "révélé".]
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Ce qu’il pensait de la nature de la manifestation de la Force ? C’était une manière bien détournée de lui demander s’il était croyant ou non. Atalan ne retint pas un léger rire.

— Vous avez l’art de la formulation. On sent le Consulaire adepte des ambassades.

Il fallait bien l’avouer que le sujet n’était pas sans être quelque peu délicat. Nombre de Jedis avaient fini par considérer toute discussion abstraite, métaphysique ou spéculative comme un chemin dangereux qui menait aux contestations ouvertes et, donc, au Côté Obscur. Atalan connaissait des Maîtres qui déconseillaient à leurs Padawans de réfléchir trop avant aux mystères de la Force pour se contenter de la considérer comme une sorte de données objectives assorties de règles morales strictes qu’on aurait pu trouver tout aussi bien dans n’importe quelle organisation militaire chargée de protéger une démocratie. D’autres adoptaient une position plus modérée et tenaient simplement pour une pure perte de temps des débats que rien, vraisemblablement, ne viendraient jamais prouver, dans un sens ni dans l’autre.

— Je suis croyant, si c’est votre question.

Et à en juger par les précautions qu’avaient prises Luke avec le mot « théologique », cette réponse n’était peut-être pas celle que le jeune Hapien attendait.

— Je crois que la Force est une divinité qui se manifeste dans le monde matériel ou que le monde est une manifestation divine de la Force. Ce n’est pas une compréhension personnaliste de la question, cela dit.

En d’autres termes, Atalan était un panthéiste plutôt qu’un monothéiste.

— Mais je soupçonne que ces sortes de considérations ne vous intéressent pas beaucoup.

C’était dommage. Atalan le regrettait un peu : l’occasion, somme toute, se présentait rarement de parler de théologie mais, pour autant, il n’avait pas — ou pas encore — la vocation d’un guide spirituel et il ne cherchait pas à cultiver une discussion qui n’aurait pas suscité l’intérêt de son interlocuteur. À mesure qu’il avançait en âge, ces sujets revêtaient pour lui une importance sans cesse plus grande mais, en un sens, ils le mettaient mal à l’aise, parce qu’il n’était pas certain de cerner leur place au sein de la vie d’un Jedi.

En tout cas, le débat théologique est toujours moins pressant que les nécessités alimentaires et la préparation du repas reprit ses droits jusqu’au début du repas lui-même. Les conversations s’engagèrent et il était aisé de voir qu’Atalan se retrouvait là dans l’un de ses milieux de prédilection. Si le Miraluka répugnait à fréquenter les antichambres gouvernementales et les salons policés, il était toujours content de pouvoir se mêler à un équipage ou fréquenter des tavernes, quand elles n’étaient pas trop mal famés. C’était comme ça, jadis, qu’il avait découvert la Galaxie et ce monde-là resterait toujours pour lui plus familier et même plus réel que celui des grandes instances avec lesquelles traitaient les Ambassadeurs Jedis.

L’ambiance était on ne peut plus détendue et Atalan se vit bientôt devant un jeu familier.

— C’est le Borduron, c’est ça ?

Il s’agissait d’un vieux jeu développé des siècles plus tôt par les troupes républicaines pour tromper l’ennui de certains postes de garnison et qui consistaient, en théorie, à gérer sa domination stratégique sur les bordures de la République. En vérité, le matériel de jeu était le plus souvent abstrait et il fallait beaucoup d’imagination pour y reconnaître de véritables batailles : les joueurs se partageaient un plateau en pentagone dont l’espace était disputé par des cônes et des pyramides de trois couleurs. Chaque joueur avait sa propre couleur et pouvait, dans certaines circonstances, manier la troisième, dite couleur neutre. Pour s’adapter à la vision des différentes espèces qui ne reconnaissaient pas les couleurs, les pièces étaient aussi entaillées à la base, au sommet ou en leur milieu selon le camp auquel elles appartenaient.

Si le jeu était somme toute un peu moins complexe, pour ce qui était de la stratégie, que d’autres du même genre qui étaient plus largement répandu, il était en revanche beaucoup plus difficile à apprendre à cause de la complexité initiale de ses règles qui en rebutaient plus d’un et il avait eu tendance, les décennies passées, à se faire de plus en plus rare, jusqu’à devenir la marque de fabrique des vétérans des forces armées de la République.

— Vous connaissez ? Pas mal, pour un p’tit jeune. Alors. À chaque fois qu’on perd une pièce, on boit un coup. Deal ?
— Deal.

L’aspect alcoolique fut peut-être la seule raison qui maintint l’intérêt du public quand la partie commença parce que le jeu, pour un observateur extérieur, était absolument incompréhensible. Les parties, du reste, étaient interminables : les pièces prises revenaient souvent sur le plateau. Aussi les joueurs enchaînaient les verres. Borg paraissait de plus en plus joyeux mais il n’avait pas l’air, pour autant, de rien perdre de ses facultés mentales. Et Atalan, lui, n’aurait pas eu l’air plus serein si son whisky n’avait été que de l’eau.

Ce ne fut finalement que bien plus tard que les deux Jedis rejoignirent leur cabine. Le capitaine Borg avait gagné la partie de Borduron, même s’il avait accusé — amicalement — le jeune Maître de lui avoir sciemment laissé l’avantage, ce dont Atalan ne s’était défendu que d’un sourire. Ils n’en avaient pas appris beaucoup plus sur Namadii, sauf à considérer les anecdotes innombrables sur le petit bar de l’astroport et ses charmantes hôtesses comme des informations capitales. En revanche, ils étaient devenus tout aussi populaires auprès des membres d’équipage qu’auprès de la cuisinière, tout autant, d’ailleurs, pour la générosité du service de Luke que pour la descente d’Atalan.

Lequel, d’ailleurs, donnait un tout nouveau sens à l’expression « tenir l’alcool ». Dans la cabine, avec son flegme ordinaire, il commenta d’ailleurs :

— Ce whisky n’était pas mauvais mais il manquait parfois un peu de caractère.  En tout cas, vous avez une belle carrière d’échanson devant vous. Enfin bref… Nous ferions mieux de nous reposer, avant notre arrivée.
Luke Kayan
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Être croyant ? Ce terme signifiait-il vraiment quelque chose lorsqu'on avait la preuve devant le nez ? La Force existait clairement, il était difficile de le renier et les non-croyants devaient donc être rares. Enfin, chacun sa vision des choses, et Luke trouvait également beau qu'Atalan ait cette foi. C'était une autre manière d'approcher ce grand pouvoir qui les liait, curieusement plus mystique que lui, l'enfant qui parlait à la Force comme à sa mère.

- Vous soupçonnez mal, ça m'intéresse.

Répondit le jeune Jedi avec un sourire pour son aîné. Si son art de la formulation lui faisait adoucir les termes, donnant l'impression qu'il craignait certains débats, Luke était plus ouvert qu'il ne le croyait lui-même. Curieux, une fois en confiance comme c'était le cas avec le Maître, le Hapien acceptait de changer son monde, ou campait sur ses positions selon ses croyances. Armé d'un caractère plus affirmé que dans sa prime jeunesse, le blond aimait penser qu'il savait désormais faire la part des choses.

Laissant de côté cette discussion qu'il jugeait capable de ressurgir plus tard comme c'était déjà arrivé avant, le Jedi avait donc servi le petit groupe de joyeux fêtards. Peu de confessions sur Namadii furent dévoilées, et jamais précieuses. Il fallait s'y attendre dans le cas d'une épidémie plutôt que de celui d'un meurtre. Cette maladie était de plus en plus sûrement l'effet d'un caprice de la nature que d'un grand terrain de test pour une prochaine attaque bactériologique. Rejoignant son collègue, surpris de lui trouver une voix aussi claire que d'habitude-soit il tenait parfaitement l'alcool, soit il avait, par truchement, uniquement ingurgité de l'eau.- Luke lui offrit un sourire timide. Malgré le fait que les jeux et l'alcool ne constituaient pas son ambiance favorite-d'ailleurs, en bon novice, il ignorait ce qu'était un Échanson, supposant que ce devait être une sorte de serveur.- il appréciait ce début de mission.

- Vous avez raison, dormons un peu, j'ai l'impression que nous n'aurons guère l'occasion de le faire là-bas.

Se laissant choir sur sa propre couchette, les yeux fixant le plafond, Luke ne tarda pas à laisser les balancements le guider sur le chemin du sommeil. Malgré lui, le début de ces aventures mouvementées, tant physiquement que mentalement lui imposaient un enregistrement et rangement d'informations dans son cerveau. Et pour ça, rien de mieux qu'une bonne sieste.

Ce fut son réveil, réglé à une bonne dizaine de minutes avant de débarquer qui fit ouvrir les yeux à Luke. S'étirant, le jeune homme se leva sans un mot pour Atalan, signe d'une tranquille préparation concentrée plus que de l'animosité évidemment. Sans savoir si ce dernier le voyait d'ailleurs, le Hapien vérifia que toutes ses affaires étaient prêtes, que son Datapad et son comlink soient chargés. Une fois sa besace en cuir correctement rangée, Luke s'assit pour attendre l'atterrissage. Ce dernier fut quelque peu chaotique étant donné que Borg ne semblait pas tenir aussi bien l'alcool que le Miraluka, mais rien de grave. C'est tous en vie qu'ils arrivèrent sur Namadii. Comme ils disposaient encore de quelques minutes avant de devoir descendre, le jeune Jedi se tourna vers Atalan en souriant, plus détendu qu'au début.

- Prêt ?

Avec une blouse soigneusement pliée, un masque, des gants, et même une lampe torche-habituellement disposée dans ses affaires pour ses partenaires.- le Chevalier supposait être prêt. Tout du moins, autant qu'on puisse l'être en affrontant un virus aussi mortel que mystérieux.

- Alors comment nous présenterons-nous au final ?

Demanda Luke, plutôt docile et ouvert à finalement dire la vérité. Il faudrait expliquer plus longuement mais c'était toujours plus confortable que de mentir. Un acte que le Jedi réprouvait mais usait lors de certaines infiltrations. Aujourd'hui, ils entraient surtout dans un village ignorant et désespéré. Le coup en valait la peine, même si s'introduire premièrement comme simples médecins pouvait être plus doux. Quoique, leur prouver que la République s'inquiétait réellement pour eux en faisant débarquer des Jedis sur Namadii pourrait les tranquilliser et les rendre plus coopératifs. Avouons-le, Luke n'était pas habitué à ce type de mission, ne sachant pas trop comment faire son approche. Heureusement Atalan Pirin était là, et lui, moins raidi, confiant envers son aîné qu'il apprenait petit à petit à connaître.

[HJ: Désolé, je ne fais pas trop avancer le schmilblick, mais je préférais te laisser débarquer, vu que Luke te laisseras sûrement faire les premiers pas. N'hésite pas à décrire un peu les alentours ou le camps. Je continuerai ! En espérant que mon post peut-être un peu vide t'inspireras quand même... I love you ]
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Au fil des années, les Padawans d’Ondéron avaient cultivé toutes sortes de légendes sur les Maîtres de l’Ordre et les Chevaliers les plus en vue. On assurait par exemple, dans certains dortoirs, que Saï Don avait plus de mille ans et les plus audacieux suggéraient qu’il avait participé à la fondation de l’Ordre avant de découvrir le secret de l’immortalité. La main bionique de l’ancienne Chancellière Von était, parait-il, capable d’envoyer de petites torpilles à protons quand le besoin s’en faisait sentir et le jeune Maître Pirin, selon les dernières légendes en date, ne dormait jamais.

Si les élucubrations des Padawans étaient chaque année plus imaginatives, elles naissaient toujours d’une observation factuelle : les rides de Don, la main de Von et le style de sommeil tout personnel de Pirin. De fait, comme à son habitude, Atalan passa la nuit assis en tailleur, les yeux fermés, dans une posture méditative qui était à mi-chemin entre un sommeil ordinaire et une transe curative. Les Guérisseurs du Temple savaient que la méditation thérapeutique était la grande spécialité de Miraluka et santé de fer devait beaucoup à la pratique exceptionnelle qu’il en avait : chacune de ses nuits participait ainsi à la solidité de sa constitution.

Le lendemain matin, il n’était pas plus affecté par l’alcool qu’il ne l’avait été la vieille. Atalan Pirin n’était pas homme à avoir une gueule de bois. Il ne bougea pas d’un cheveu tandis que Luke s’attelait à ses divers préparatifs et seule une respiration d’une lenteur inhumaine trahissait qu’il était encore en vie. Il devait bien être conscient de son environnement, cependant, parce qu’à peine la petite salle de bain tout-en-un de la cabine libérée qu’il se releva avec souplesse et y succéda à Luke.

Bientôt, les deux Jedis débarquaient sur Namadii. Après avoir remercié Borg et son équipe, ils considèrent le spatioport principal de la planète. L’architecture locale était à mille lieues des bâtiments titanesques de Coruscant mais on voyait bien là un hall d’accueil, cinq ou six pistes, une dizaine de hangars à vaisseaux et quelques entrepôts. Des spatioports dans le genre, il ne devait pas y en avoir plus de trois ou quatre sur Namadii, un par continent probablement, et celui de la capitale, où ils se trouvaient, quoiqu’il fût le plus important, n’aurait pas pu faire concurrence à n’importe quelle installation privée des grosses exploitations agricoles sur les mondes du Noyau.

— Comme des Jedis.

De toute façon, pour l’heure, il n’avait guère le choix. Une femme de trentaine d’années, flanquée d’un homme au moins deux fois plus âgé mais dont les traits et la posture trahissait la vigueur qui venait avec une vie active et rustique, s’approchaient d’eux à grands pas. Ils s’arrêtèrent devant les deux Jedis et la femme prit la parole.

— Bonjour. Bienvenue sur Namadii. Je suis Velya Nomir, la directrice des services sanitaires, et voici Wes Alans, notre chef de la sécurité. Nous sommes très, hm…

Le regard de Nomir passa de Luke à Atalan et d’Atalan à Luke. SI la beauté du Hapien ne lui avait pas échappé, il était évident qu’au ton de sa voix, le stress de cette rencontre l’emportait sur toute autre émotion.

— … honorés de… recevoir vos, euh… Seigneureries…

Alans se racla la gorge. Nomir lui jeta un regard rapide.

— C’est pour les Siths, ça.

Les joues de la directrice s’empourprèrent. Elle se lança aussitôt dans des excuses :

— Je suis désolée, je suis vraiment… On a pas l’habitude de… Je ne voulais pas… Nous ne sommes pas…
— Ce n’est pas grave.

Wes réprima un sourire.

— Je suis Maître Atalan Pirin du Conseil des Guérisseurs de l’Ordre Jedi et voici le Chevalier Luke Kayan qui m’assiste dans cette affaire. Nous avons été envoyés par le gouvernement républicain pour vous aider à gérer votre crise sanitaire.
— Vraiment ?

Le chef de la sécurité afficha un sourire goguenard.

— Envoyés par le gouvernement républicain ? Le gouvernement républicain ne s’intéresse pas vraiment à notre cas.
— Il s’y intéresse ou il s’intéresse simplement à la qualité des produits de ses mondes-fournisseurs. Très franchement, chef Alans, je suis médecin, non diplomate. Les détails politiques qui président à notre intervention m’intéressent moins que la situation et la manière de la régler.
— Excellent. C’est par ici.

Wes entreprit de les conduire, en traversant les pistes, à l’endroit où Nomir et lui avaient garé leur speeder.

— Il va falloir excuser les gens d’ici si l’accueil est un peu frais. La mise en quarantaine de la planète a été le seul signe d’intérêt de la part de la République depuis des années et avec les nouvelles des guerres ou… des paix, on ne sait pas trop, les gens sont méfiants. Je suppose que c’est parfois dans les endroits les plus calmes que les gens ont le plus peur.
— Mais nous sommes très contents que vous soyez venus, bien sûr, s’empressa d’ajouter Nomir, comme si elle avait craint que la franchise pragmatique de son acolyte pût refroidir l’enthousiasme des deux Jedis.
— Pour sûr.

Ils avaient contourné un bâtiment sans croiser personne mais, de l’autre côté, là où la façade du spatioport donnait sur le reste de la petite ville qui faisait office de capitale, les rues, somme toute, étaient animées. On leur lança quelques regards.

— Aussi, il faut avouer que les gens de Namadii ne sont pas très habitués aux étrangers.
— Pas très cosmopolite.
— Ouais, c’est une manière polie de dire que la plupart sont franchement racistes. Grimpez.

Wes Alans désigna d’un signe de tête un speeder à cinq places qui n’était plus dans sa prime jeunesse mais qui décolla sans problème.

— Je dis ça à cause de votre allure.
— Non que ça pose un problème.
— Pas ici, autour du spatioport, mais si vous allez plus dans les terres, dans les exploitations et les camps, les gens ont jamais vu de non-humains, ni de Jedis, ni… d’étrangers, tout simplement. Je dis pas qu’ils sont du genre à jeter des pierres mais ce sont de petites communautés, vous comprenez.
— Je vois. Ce ne sera pas une situation exceptionnelle.
— Je vous accompagnerai de toute façon mais Chef Alans est contraint de rester ici à cause de la quarantaine et des problèmes que ça pose au spatioport. Certains chefs de coopérative ne sont pas très contents de ne plus pouvoir exporter leurs produits et ça crée des tensions.
— Je suppose que le gouvernement local a mis en place des aides.

Wes Alans éclata de rire. Tournée vers la banquette arrière, Nomir expliqua d’un ton gêné :

— Vous allez rapidement découvrir que sur Namadii, le gouvernement est une notion très floue. La plupart des gens vivent en communauté et les communautés s’organisent elles-mêmes. Elles sont représentées par des conseils continentaux qui eux-mêmes sont représentés par un conseil national qui nomme des chefs de service pour les quelques affaires courantes de niveau planétaire mais, dans l’ensemble, la plupart des décisions se prend au sein même des communautés. De toute façon, la collecte d’impôts serait presque impossible à organiser alors mettre en place des services centraux sans financement…
— Mais n’êtes-vous pas la directrice des services sanitaires ?
— Hmm…

Valya passa une main dans ses cheveux.

— Disons que jusqu’à présent, c’était une fonction quelque peu… théorique.
— Ouais. Bienvenue sur Namadii quoi.
Luke Kayan
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Soulagé de ne pas devoir mentir, le jeune homme acheva ses préparatifs pour sortir. Légèrement en retrait, il suivit Atalan qui les représenta admirablement. Inconsciemment, Luke prenait note de sa façon de parler, à la fois élégante et franche, rompant les barrières que lui-même avait tendance à entretenir au nom de la courtoisie. Depuis qu'il le connaissait, Maître Pirin possédait la capacité enviable de définir le caractère de son interlocuteur et de faire correspondre son discours. Veyla et Wes étaient pourtant très différents, l'une trop douce, probablement inquiète à l'idée de froisser les Jedi, et l'autre les testant sans cesse. Tantôt piquant, tantôt rassurant, Atalan installa facilement le dialogue tandis que Luke s'était contenté de saluer et de sourire, suivant paisiblement. En attendant de devoir parler à son tour, le jeune homme observait de son mieux les alentours. Il sentait vaguement les tourments habitant la planète, remarquait le vide autour d'eux. L'inquiétude, l'excitation et la méfiance leur tournoyaient autour, comme des requins affamés. Y en avait-il un pour croire en eux ? Selon ses cours au Temple, il serait profitable de se concentrer sur Veyla Nomir, facilement impressionnable, mais le Hapien savait aussi que la théorie ne suffisait pas toujours. Laisser Alans en dehors pourrait le vexer, or l'homme semblait posséder un certain charisme, sans parler de la défiance du peuple de Namadii à leur égard. Il pourrait les retourner contre eux en moins de deux. L'affaire allait être très délicate, et Luke, si Consulaire soit-il, craignait de tout faire rater. Il faut dire que ses dernières missions ne s'étaient pas franchement bien passées, il avait enchaîné les échecs, éclaircies de temps à autre par des victoires sans saveur, que d'autres-comprenez Yun- gagnaient pour lui. Le Padawan anciennement Sith, avait su convaincre d'avantage que lui, sensé être le guide.

Faisant fi de ses scrupules à son égard, le Chevalier se concentra sur ses talents, tout organiser en demeurant discret, prendre des informations, tâter le terrain. Un travail qui lui coûtait en tant qu'aveugle, réclamant tout son instinct et son imagination pour interpréter ce noir semblable à celui du Temple, sinon qu'il était inconnu.

- Madame Namadii, Monsieur Alans, soyez sûrs que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour vous aider, avec ou sans le gouvernement. Mais pour commencer, serait-il possible d'avoir un inventaire des médicaments dont vous disposez et de l'état de votre établissement médical ? S'il vous plaît ?

Installé sur la banquette arrière, le jeune homme avait sorti un calepin tout ce qu'il y avait de plus commun. Avec une petite tige en métal à la pointe affinée, il perçait des petits trous habiles dans le papier. C'était toute une technique ! Essayez, vous, de faire un de ces ronds parfaits, sans déchirer la feuille ou à la bonne place. Sans parler du balancement du vieux speeder grinçant.

- Je vous donnerai tout ça une fois arrivé au centre, mais maintenant, nous allons rencontrer les malades si vous le voulez bien. Plus vite le contact sera établi, plus nous éviterons les hypothèses délirantes des plus imaginatifs.

- C'est de toutes manières, la manière de combattre la maladie la plus efficace. Écouter les victimes, les approcher et essayer de les soutenir.

Assura Luke, plein de bonne volonté. Comme amusé par le petit jeune -la beauté Hapienne du Chevalier avait pour regrettable effet secondaire de lui faire perdre en crédibilité.- Wes se baissa pour sortir de sa besace plusieurs masques respiratoires, anciens et certainement douteux bien qu'ils réduisaient les risques.

- Je suppose que vous préférerez prendre des précautions.

Sous-entendu "nous on est proche de nos malades, on se planque pas". Sans vraiment réagir, le Hapien sentit un coup de vent passer devant lui. La main de la directrice qui venait de se saisir d'un des masques pour le garder à côté de soi. Histoire de ne pas laisser les Jedis dans l'embarras et qu'ils soient jugés par les habitants, elle avait décidé de se servir de l'un d'eux. Peut-être qu'au fond, ça la soulageait.

- De toutes façons, c'est plus sûr.

- Oui, et ce sont surtout les règles.

Ne put s'empêcher de répliquer Luke, un peu étonné et fatigué de ce jeu de qui "a la plus grosse". Wes était le typique petit dur rebelle qui l'agaçait. Il croyait tout savoir, se prenait pour une grande victime du gouvernement, au point de se refermer sur lui même lorsque de l'aide lui était apporté. Tâchant de ne pas entraîner de tensions, le Chevalier reprit d'un ton neutre l'évaluation de la situation.

- Les malades sont-ils traités chez eux ou dans votre centre ? Si ce n'est pas le cas, il faudrait songer à les y réunir. Je sais que cela peut sembler froid, impersonnel... Mais cela permet d'éviter ou au moins de ralentir les infections.

Sur une planète oubliée de tous, presque dépeuplée par une maladie, les familles se soudaient au point d'en oublier les normes d'hygiène minimale en cas d'épidémie. C'est pourquoi, ces maladies se propageaient encore plus rapidement. Il n'y avait qu'à voir les propos de Nomir concernant son rôle de directrice sanitaire "théorique". Les habitants de ce recoin de planète faisaient probablement ce qu'ils voulaient en la matière, préférant s'enfermer dans leurs croyances que de penser à la réalité scientifique. Bien qu'il n'ai pas spécialement prit de gants pour l'annoncer, Luke demeurait aimable, et surtout, il avait ses raisons pour demander à Veyla et Alans d'enfin prendre ces mesures. Il avait perdu, échauffé par ses échecs, son envie d'y aller par quatre chemins pour ménager les gens et avait annoncé avec sérieux les règles qu'on lui avait apprit lors de sa formation basique en médecine. Le reste ce serait à Atalan de lui l'enseigner.

- Vous croyez sincèrement que les habitants, après avoir été abandonné des années, vont écouter deux hurluberlus débarqués bien après la guerre ?

Et voilà, comme d'habitude. Cette victimisation devenait fatigante. Pourquoi réclamer de l'aide, et finalement lui tourner le dos ? Luke allait s'apprêtait à répondre avec amabilité qu'il s'agissait de normes reconnues intergalactiquement, et que les Namadiiens risquaient de se punir d'avantage en jouant les têtes de mule, mais une petite secousse du speeder les détourna de leur discussion naissante. Seraient-ils arrivés ?
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Le speeder avait atterri à côté d’un bâtiment plus petit que la plupart des hangars du spatioport. Il faut dire que les services médicaux n’étaient pas toujours très prisés des locaux, qui préféraient recourir à la proximité de guérisseurs plus familiers et que les étrangers, eux, avaient pour habitude de se remettre aux bons soins des médecins de bord ou des droïdes médicaux présents sur leurs vaisseaux. La méfiance diffuse qui accueillait les initiatives médicales de ce qui tenait lieu, sur Namadii, de gouvernement central, était pourtant quelque peu injuste. Pour être une jeune médecin fraîchement sortie de l’une des universités peu réputées de la Bordure, Valya n’en était pas moins compétente.

Et de la compétence, il en fallait, pour gérer les affaires courantes. Alors que les quatre passagers du speeder descendaient, Atalan considérait le bâtiment d’un air songeur. C’était difficile à voir, parce qu’il ne regardait nulle part en particulier, mais l’esprit du Jedi courait sur la structure. La télékinésie avait toujours été l’un de ses pouvoirs de prédilection et elle était étroitement liée avec ses perceptions uniques de Miraluka Jedi : l’architecture d’un lieu nouveau lui apparaissait le plus souvent avec une clarté toute particulière.

Le bâtiment aurait eu besoin de sérieuses réparations.

— Par ici.

Personne n’avait cru bon de répondre à la dernière provocation de Wes et les trois hommes se contentèrent d’emboîter le pas à la maîtresse des lieux. À l’intérieur de l’hôpital, une dizaine de personnages, des infirmières, des aides-soignants, deux ou trois personnels administratifs et deux médecins en plus s’affairaient constamment. D’ordinaire, la vie de l’hôpital était plutôt calme et l’essentiel du personnel était dépêché à droite ou à gauche, dans les alentours de la capitale, pour traiter des patients à domicile.

Malgré tout, la concentration exceptionnelle du jour ne manquait pas d’organisation. Valya avait réglé ses affaires comme du papier à musique. Ce qui devait être son assistant, un gamin tout juste majeur qui portait encore quelques traces de l’adolescence, contourna un peu précitemment le guichet d’accueil pour venir à sa rencontre.

— Docteur ! Aucune am…

Comme s’il venait à peine de se rendre compte de la présence des deux étrangers, l’adolescent s’interrompit et risqua un regard curieux et perplexe sur Luke puis sur Atalan. C’était leurs yeux — ou l’absence de ceux-ci — qu’il regardait surtout. Il déglutit péniblement et finit par détourner le regard du visage du Miraluka.

— … Aucune amélioration particulière. On va avoir besoin de nouveaux dons de sang, par contre.
— Contacte la Coopérative Agricole Alpha, qu’ils fassent appel à la solidarité des fermiers autour de la capitale. Et demande à la Namadii Com’ de diffuser un spot sur l’Holonet.
— Ah. Euh…
— Un problème ?
— Ben, c’est que les gens de la CAA sont pas vraiment, comment dire…

Valya lança à un regard au chef de la sécurité qui poussa un soupir résigné.

— Allez, viens, gamin, j’vais t’apprendre comment on s’impose devant les vieux paysans.
— Par ici, rajouta la responsable à l’intention des deux Jedis.

Alors que Wes et l’assistant s’en allaient de leurs côtés, Valya guida Luke et Atalan dans les couloirs de l’hôpital. Elle fournit en chemin quelques explications, des données brutes surtout, sur le personnel, le nombre de chambres, les équipements, les médicaments et le quotidien des lieux. Ils débouchèrent finalement devant la vitre d’une chambre, qui permettait d’observer le patient.

— Comme vous le constatez…

La jeune femme s’interrompit. Elle jeta un regard en coin aux Jedis.

— Excusez-moi, mais je dois vous avouer que je ne sais pas ce que vous constatez, exactement…

Elle, elle voyait bien l’état du patient, mais qu’en était-il de ses nouveaux associés ?

— Son flux sanguin est perturbé. Le sang est fluidifié, le cerveau est insuffisamment alimenté et la cicatrisation imparfaite. Il est sujet à des crises d’épilepsie, ses ganglions lymphatiques ont cessé de remplir leur rôle immunitaire et des infections secondaires se sont développés.

Valya haussa les sourcils.

— C’est… En effet. Mettez les masques, on va entrer.
— Les masques sont superflus.
— Vos pouvoirs vous protègent des infections ?

La question avait tenue plutôt à l’émerveillement enfantin devant les légendes jedis qu’à la curiosité professionnelle.

D’une voix pensive, Atalan murmura :

— Ça n’est pas viral. Ni infectieux.

Et sans autre explication, le Maître Jedi passa la porte de la chambre et s’approcha du patient. Celui-ci, à demi-conscient, respirait lentement. Un projecteur de mauvaise qualité diffusait une production d’holocinéma, piètre distraction pour un malade de toute évidence à l’agonie. De l’autre côté de la vitre, Valya était toujours saisie par la perspicacité surnaturelle du Miraluka.

— On entend des histoires sur les Jedis mais je ne pensais pas que c’était à ce point-là…

De toute évidence, elle supposait que les aptitudes dont Atalan venait de faire la démonstration étaient communes à tous les membres de l’Ordre, alors qu’elles procédaient en réalité d’un long entraînement où se mêlaient une familiarité des plus intimes avec la Force et de profondes connaissances médicales. Pour Atalan, les corps des malades étaient le plus souvent comme des livres ouverts et s’il ne parvenait pas toujours à déterminer dès l’abord les causes de la maladie, il en cernait sans peine les symptômes.

Un examen plus approfondi apportait en général les compléments d’information. Un main étendue au-dessus du corps du patient, le Maître Jedi se tenait désormais immobile. Intimidée par ce spectacle, moitié sceptique, moitié fascinée, Valya était restée sur le pas de la porte.

Parce qu’il n’oubliait pas son rôle, Atalan, lui, quitta son mutisme et, sans se retourner, demanda :

— Luke ? Qu’en pensez-vous ?
Luke Kayan
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- Maître Pirin est un professionnel de la médecine. Nos dons nous aident, mais c'est avant tout la formation qui compte.

Précisa Luke d'un ton calme pour qui voulait bien l'entendre. Fidèle à ce qu'ils avaient décidé, il ne jouait pas la carte des obscurs pouvoirs de magiciens, cherchant à démystifier les actes du Miraluka, quand bien même ce dernier l'impressionnait. En effet, pour avoir longuement côtoyé Elora, le blond savait que sa race exceptionnelle lui permettait des choses auxquelles un Jedi lambda, voyant ou non n'avait pas accès. Sans parler de la maîtrise de la Force extrême de son aîné. C'était dans ces moments-là que Luke, déjà modeste de nature se sentait encore rapetisser. Il avait tant à apprendre.

Subjugué par les paroles d'Atalan, ainsi que sa présence à la fois imposante et douce au sein de la Force, le jeune Jedi eut un petit passage à vide avant de s'approcher à son tour, intimidé. De son mieux, il cacha son inquiétude, inutile de casser la bonne impression qu'avait donné le Miraluka à Vayla, désormais sous le charme-quoiqu'emprunte d'un léger scepticisme-. Heureusement Wes qui rendait Luke nerveux de part son caractère et ses remarques avait déguerpi en compagnie du si jeune assistant qui les avait fixé avec intensité. Plus tranquille donc, et confiant envers Maître Pirin, le Hapien s'approcha, néanmoins surpris d'être mis à contribution aussi tôt. Il avait pensé que le "médecin" lui donnerait des tonnes de bouquins à avaler puis se contenterait de lui débiter des remarques lors des premières interactions, au mieux, il aurait tendu le scalpel. Mais non, déjà, Luke devait entrer en contact avec le patient.

Au travers de la Force, la première chose qui le frappa fut la souffrance de celui-ci, fournissant tous les efforts du monde pour fixer son attention sur un point. L'écran diffusant désormais des spots publicitaires, comme si ces derniers pouvaient lui promettre des achats futurs, et donc, sa survie à la maladie. Or le Hapien avait remarqué presque de suite que l'homme était condamné. Bien sûr, il existait la probabilité de se tromper couplée à celles de ces miracles qui faisaient votre carrière de guérisseur, mais franchement, la situation présente permettait peu de doutes.

Le corps du patient n'était que des bouts de viande séparés, plus ou moins fourmillants selon leur état de dégradation. Certains envoyaient une sensation de "froid" mental intense à Luke, presque éteints. Les plus vaillants pulsaient maladroitement, prenant une inspiration profonde au sein de la Force avant que tout ne s'arrête de fluctuer, pour repartir d'un bond douloureux ensuite. Son être semblait rattaché par des noeuds maladroits essayant en vain de maintenir un semblant d'harmonie, malheureusement pour lui, tout se disloquait petit à petit. Le flux d'énergie s'échappait en même temps que son fluide vital, courant n'importe comment et se perdant dans le néant. Luke fut impressionné, car s'il avait côtoyé des blessés graves, y compris lui lorsqu'il avait 7 ou 8 ans et que sa mère l'avait bien abîmé, le Hapien n'avait jamais approché de malade en phase terminale. Cette fois, la Force ne s'échappait pas d'un seul endroit, sinon de partout, fuyant ce corps désormais inutile, qu'elle cédait à la mort.

- A-t-on fait des analyses de sang ? Les bactéries voyagent certainement grâce à lui, empirant les infections. Avec un peu de chance on pourrait isoler le micro-organisme responsable. Il faudrait également procéder à une biopsie des organes les plus touchés.

Bien sûr, restait à savoir si Namadii disposait du matériel suffisant, et si le presque-condamné survivrait. Luke avait apprit-et cela correspondait à son mode de pensées de toutes manières. que même si le patient était en train de mourir, il fallait éviter ce qui pouvait empirer son état, sauf si ce dernier donnait son accord et que c'était le traitement de la dernière chance. Présentement, le Hapien avait conscience que l'homme était plus un cas d'étude qu'autre chose. Une biopsie ne le sauverait pas, ne faisant qu'envahir d'avantage son corps meurtri pour donner des informations tardives. Le pauvre malade ne ferait que servir ses prochains s'il était capable de supporter un tel traitement de choc, probablement ne bénéficierait-il pas du savoir d'Atalan. Mais on avait enseigné à Luke de toujours conserver l'espoir. Alors il agissait rapidement, proposant des idées certes bateaux mais pratiques, dignes d'un apprenti médecin lambda, ayant reçu une formation de base. Bref, exactement ce qu'il était....

Ou un peu plus... Car apposant sa main sur la poitrine du malade, le Hapien entreprit de faire fluctuer la Force qui manquait à ce dernier. A nouveau, bien que s'échappant de toutes parts, l'énergie envahit son corps blessé, tandis que Luke apaisait ses gémissements, bel et bien à travers la fameuse "magie" Jedi, cette fois-ci. Vayla craignant le pire avait lancé son corps en avant, lorsque la respiration de l'homme avait cessé de siffler mais ses yeux clignant doucement à la suite du traitement, encore étonné de cette amélioration éphémères la convainquirent de rester à sa place. Malheureusement, Luke ne pouvait guère faire plus au risque de s'épuiser, l'état de l'homme retomberait alors rapidement en décrépitude. Cependant, ses forces légèrement renouvelées pouvaient aussi lui servir à résister à la biopsie.

Pleine d'espoir, conquise par les Jedis, Valya s'approcha de Maître Pirin, décrochant timidement son masque. Elle planta son regard sur le foulard cachant celui inexistant du trentenaire, une longue aiguille dans sa main.

- Pouvez-vous le sauver Maître Pirin ?

Demanda-t-elle, en tendant du bout des doigts la seringue destinée à la biopsie, prête à tout accepter au nom du patient incapable de parler.

- Il a deux enfants adorables. Sa femme est déjà morte de la maladie.

Luke coupa son propre élan, lequel allait le pousser à clamer de voir le corps de la défunte pour comparer. Heureusement il se tut, se contentant de baisser doucement la tête et d'occuper ses mains à rassurer le malade, sa paume enserrant doucement une épaule tremblotante mais vaillante. L'homme avait une bonne carrure, il avait été râblé avant que la maladie ne le terrasse, le transformant en une poupée fragile sifflante. Probablement l'archétype de l'agriculteur solide, ne craignant ni les infections, ni les blessures. Quel était ce virus apparemment non infectieux qui l'avait ainsi transformé ? Et qui malheureusement-raison pour laquelle, il le savait de façon presque certaine, continuerait de le transformer vers l'inéluctable apparence de cadavre ?

Avec prudence, le Hapien diffusa encore un peu de son pouvoir guérisseur. Il se sentait coupable de distribuer ainsi sa Force au compte-goutte mais se rappelait qu'en aidant Maître Caldin, plus jeune, il s'était finalement évanoui, endormi sur le lit. Cette fois-là, d'autres avaient pu prendre le relais tandis que Saï l'emmenait dans sa chambre, mais aujourd'hui, il devait conserver ses capacités pour le prochain. Condamner d'avance cet homme, au nom de son peuple. Un martyr n'ayant pas demandé à le devenir. Peut-être un héros, si à partir de son corps, Atalan trouvait la souche maudite.

- La salle est-elle entièrement désinfectée pour les manipulations ?

Inutile de rajouter que sans un 100% de propreté, l'homme survivrait encore moins de temps que prévu et qu'ils pourraient également perdre le virus. Futile aussi de rajouter que Luke avait fait cette remarque pour couper le silence lourd qui s'était installé.
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