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Une silhouette menue, vêtue de noir et de vert vif, émergea de l’énorme structure de métal en rajustant son sac à dos. Soupirant de satisfaction, elle enclencha la fermeture de l’appareil en appuyant sur le bouton de fermeture manuelle à reconnaissance biométrique – le fin du fin – avant de s’éloigner en direction du Hall Central du Spatioport Ouest B de Coruscant, pour un contrôle de sa toute nouvelle pièce d’identité, parfaitement dans les règles pour une fois. Une fois les droïdes de sécurité passés, elle se dirigea d’un pas alerte vers les coursives qui menaient à une vaste esplanade en pleine air, laquelle devait bien s’enfoncer dans les entrailles de ce que l’on appelait communément la Grande Usine. Non pas que Coruscant ne soit pas une gigantesque zone industrielle, mais bien parce que les premières véritables usines qui avaient vu le jour sur la Ville-Planète avaient d’abord été situées dans le coin. Désormais, obsolètes, on les avait déménagé aux quatre coins de la planète, mais l’appellation était restée.

A vrai dire, la naissance d’une telle zone était lettre morte pour la jeune twi’lek. Avec l’enchaînement d’évènements qui l’avait conduit du Sénat au Temple Jedi, puis du Temple Jedi à Coruscant, ici-même, à la tête de son propre vaisseau, avec une nouvelle pièce d’identité, loin de ses fautes, de ses errements et de son passé, la jeune femme n’en finissait plus de rayonner littéralement d’optimisme. La traversée à bord de son vaisseau avait été solitaire, ce qui ne serait bientôt plus le cas d’ici peu, mais elle avait pu tranquillement mesurer le degré incroyable de générosité dont Saï Don et les maitres avaient fait preuve à son égard. Un vaisseau, un plein, des vivres pour deux semaines, la restitution de son arme, tout ça échangé contre un témoignage et beaucoup de confiance… C’était une nouvelle vie, qu’on lui avait offert sur un plateau d’argent, le pardon de ses fautes, la liberté, grisante, folle, contre quelque chose dont ils ne pouvaient pas être totalement certain, sa loyauté – marché qu’elle-même n’aurait jamais passé quelques semaines encore auparavant. Mais Mat’Aenna avait changé. Un peu, pas beaucoup – suffisamment pour avoir confiance, elle aussi. Pour désirer faire confiance à autrui, pour mener désormais une existence légale, officielle, dont elle saurait être fière. Peu importait les nuages de l’avenir, les douleurs et les incertitudes d’une vie certainement errante, la jeune femme était décidée à oublier les siths, à évoluer, à grandir enfin ! Et parce que l’ancienne promesse prononcée un beau soir d’ivresse, au milieu de deux contusions et d’un décor grandiose destiné aux très riches avait beaucoup compté pour elle, n’avait jamais cessé d’alimenter un rêve ancien, l’avait amené là aujourd’hui, elle se devait de consacrer sa première visite de twi’lek libre à un mécano qui, un an auparavant, travaillait et créchait dans le coin selon ses dires. Rien n’était moins sûr que ce soit encore le cas aujourd’hui – mais qui ne tentait rien n’avait rien, pas vrai ?

Les mains dans les poches, main serrée sur son arme dissimulée, elle continuait de s’enfoncer dans les profondeurs de Coruscant. Rapidement, elle se retrouva dans le décor familier et éclairé à la lumière électrique des couloirs qu’elle connaissait si bien, faillit s’arrêter dans une boutique à la devanture chatoyante, qui vantait à grands renforts de publicité aguicheuse de la peinture visible par « plus de 200 espèces différentes ». Le souffle un peu accéléré, les yeux brillants d’envie, la jeune femme s’empressa de s’éloigner, descendit encore un niveau par un grand escalator à sièges avant de s’arrêter, la gorge un peu encombrée. Le niveau 82. Le niveau de Lloyd, le niveau de la vérité – est-ce qu’elle le reverrait ? Est-ce qu’il désirerait partir avec elle ? Sur le coup, elle s’était plutôt bien entendu avec lui, et leurs rêves (et surtout l’alcool) les avait rapprochés. Mais le temps avait passé. Il l’avait peut-être oublié… C’était clair, pour une fois, l’alien à la peau verte agissait au radar, sans aucun plan précis. Mais après tout, elle avait besoin d’un mécano, elle lui montrerait comment se servir d’un blaster.... l’idée ne semblait pas trop surréaliste. S’envoler pour des aventures trépidantes, avec un équipage loyal, et jouer à la corsaire en bossant pour les autorités. Et peut-être, un peu beaucoup, pour son propre compte. Et s’il disait non, s’il se souvenait pas, c’était tant pis pour lui !

Les paupières légèrement dilatées sous l’effet de la surexcitation, la silhouette menue se rapprocha encore du bloc qui abritait l’employé du spatioport. Le bloc B, une architecture en plastibéton orange qui s’effritait un peu sur les bords. Un quartier-dortoir pour la classe moyenne qui n’était pas décidée à trouver plus grand plus bas. Un beau bâtiment, décida la jeune femme, résolument optimiste, qui se mit aussitôt à en parcourir la liste des habitants, avant de sourire largement sous l’effet de la fierté. En tout cas, elle, elle se trompait pas ! Lloyd Hope – l’espoir, ouais. Et si tout se passait pas comme sur des roulettes, ce serait pas grave. Elle avait d’autres ressources.

Une sonnerie. Une deuxième. L’attente devenait un peu difficile, lorsqu’elle réalisa brusquement son erreur. Bien sur qu’il répondrait pas ! Il devait être en pleine journée de boulot, rien de plus normal pour un type dans son genre… mais cela n’allait certainement pas déranger notre créature qui avait de la patience à revendre. C’est qu’elle avait des idées, elle ! Se précipitant dehors, elle refit le trajet en sens inverse jusqu’à la fameuse boutique à la décoration vantarde, acheta un pot de peinture verte, un sandwich de steak de Juna pour patienter, et revint se planter dans le couloir, où elle se posa à nouveau sur ses fesses. Alors commença l’attente…
jusqu’au bruit si caractéristique de l’ascenseur, qui s’immobilisa à son niveau, pour s’ouvrir sur une silhouette plus âgée que dans ses souvenirs. Mais impossible de le rater : c’était Lloyd, c’était lui !

Un grand sourire dessiné sur ses lèvres peintes, la jeune femme se leva à moitié, puis lui tendit le pot de peinture verte avant qu’il ne puisse réagir, avant d’éclater joyeusement de rire.

- « Surprise ! »

S’que c’était bon, ce genre de revanche sur sa vie pourrie !
Lloyd Hope
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Il en était à combien d’employeurs, en fait ?

Dans l’ascenseur qui gravissait avec peine le bloc B près de l’astroport intergalactique, le jeune homme maugréait intérieurement. Il avait les ongles noirs, des traces sombres sur une joue et sur le front en plus d’avoir déchiré un bout de son t-shirt qui s’était malencontreusement coincé dans une turbine. Son sac à dos pesant sur une épaule, il avait au moins pu sauver quelques outils –maigre consolation comparé à la perte de son job, une fois encore.

Son premier employeur, chez qui il était resté presque un an et demi, avait eu la bonne idée de l’envoyer sur Tatooïne récupérer des pièces de contrebande. Quand il s’était fait pincer, après un merveilleux séjour dans une prison locale de la planète sableuse, le patron avait purement et simplement nié qu’il était son employé. Après une amende, l’histoire s’était terminée par quelques coups de poing bien sentis à l’entrée de l’atelier où il travaillait d’ordinaire.
Après quoi, le second employeur avait vu sa boutique détruite dans l’attaque des Sith, puis Lloyd avait quitté le troisième parce qu’il n’était pas assez bien payé. Et celui-là…

Bref, ça ne servait à rien de ruminer. S’il avait su qu’il était si difficile de gagner honnêtement sa vie, songea-t-il avec amertume, il serait sûrement resté sur Korriban ! Oui, enfin… Non, il préférait être pauvre que mort, pour sa part. Mais quand même, ces Jedi, ce qu’ils pouvaient raconter comme foutaises ! Même en bossant comme un dingue, il avait à peine de quoi payer sa minuscule chambre du niveau 82. Et le soir, tout juste le temps de manger et de dormir. Quoique, ces jours-ci, il allait avoir du temps pour trouver un nouveau job. Il était bon pour passer ses journées à aller se présenter au cortège de sous-traitants du plus grand spatioport de la galaxie. Autant dire que les journées allaient être longues…

L’ascenseur cahota sur les derniers mètres, et Lloyd se tint à une barre métallique. A peine les doubles portes avaient-elles commencé à coulisser avec un bruit d’hyperpropulseur mal calibré que le jeune homme avait posé un pied en dehors, par habitude… Mais il s’arrêta avec un sursaut lorsque la voix lui parvint aux oreilles et releva la tête. Ses yeux s’arrondirent.

- Heu…

Une Twi’lek à la peau verte, des grands yeux bleus sur un visage ébloui, une tenue noire et verte –un brin vulgaire mais le corps bien proportionné de la jeune femme occultait tout à fait ce genre de détails.
Mécaniquement, Lloyd prit ce qu’on lui donnait, sans bien parvenir à mettre de l’ordre dans ses idées. On aurait dit… Ben oui, elle lui ressemblait bien. Mais non, elle était un peu plus vieille et elle avait un peu moins l’air d’une voleuse égarée. Et puis dans ses souvenirs, elle était joyeuse… Mais pas resplendissante de bonheur non plus. Mais il n’avait jamais connu d’autres Twi’lek qui auraient pu venir sonner chez lui ! Enfin si, mais Ashli’ita, elle ne reviendrait pas, vu qu’elle était partie avec ses crédits…
Lloyd baissa les yeux sur l’objet cylindrique qu’il tenait entre les mains.
Un pot de peinture d’un vert éclatant. Cette fois, le doute n’était plus permis.

- … Mat’ ? … Ca alors, j’en reviens pas !

Au moins, ça sortait du cœur. Il ne savait pas ce qui était le plus surprenant : qu’elle débarque ici sans que ce soit pour lui quémander des crédits ou un abri, qu’une inconnue rencontrée sur un balcon cherche à le revoir après avoir descendu sa flasque de Cœur de Réacteur ou qu’après tout cet alcool, elle se soit souvenue des indications pour trouver son appartement. Après au moins…

- Mais, combien de temps ça…

Derrière lui, les portes se refermèrent tout aussi bruyamment qu’elles s’étaient ouvertes, et Lloyd regarda autour de lui. Personne ne les avait vus. Pas encore.

- Attends, suis-moi.

Une main pour garder le pot de peinture, l’autre pour chercher le pass électronique qui lui permettrait d’ouvrir sa porte. A quelques mètres d’eux s’ouvrit l’un des appartements et Lloyd s’y engouffra à grands pas. A l’intérieur, une cellule sans fenêtre –un lit défait en face d’un bureau sur lequel étaient entassés quelques vêtements sombres. La seule autre porte était une écoutille qui, laissée ouverte, donnait sur une salle d’eau rudimentaire éclairée d’une lumière blanche. Dix mètres carrés... Pas le luxe, mais là au moins, il se sentait beaucoup mieux. Une impression d’intimité, de sécurité, qui ôtait pour quelques minutes au moins le sentiment désagréable que quelqu’un cherchait à le trouver ou à l’observer.

Le jeune homme laissa tomber le sac à dos sur le lit et se retourna pour faire face à la Twi’lek. Avait-il dit bonjour ? Il ne savait plus. Il ne savait même plus s’il avait souri.

- Désolé, c’est que j’m’y attendais pas trop, là, expliqua-t-il avec un air impuissant, mais il ne savait pas très bien s’il s’excusait pour l’accueil qu’il lui faisait ou pour le désordre de la pièce. Assis-toi, si tu veux.

Il n’y avait que le lit pour s’asseoir, et Lloyd resta debout, tripotant maladroitement le pot de peinture entre ses mains. Pourquoi lui avait-elle donné ça ? Ah mais… Oui ! Pour le vaisseau ! Il sourit malgré lui en lisant les indications d’application du produit. Ce qu’il pouvait être imbécile ! C’était cette fichue promesse qu’il avait faite. Le vaisseau.

Il fallait qu’il voie les choses en face, se morigéna-t-il en son for intérieur. Ce vaisseau, lui aussi il en avait rêvé le soir où elle lui en avait parlé. Et puis de leurs aventures aussi parce que, les soirs suivants, quand il avait essayé de s’endormir dans sa couchette inconfortable, il s’était dit qu’avoir un partenaire pour rigoler et boire, comme sur ce balcon avec la superbe vue, ç’aurait été rudement chouette. Certes c’était utopique –il ne fallait faire confiance à personne, les Sith le lui avaient bien appris cela- mais ça avait été bon de rêvasser à cette possibilité. Il y avait pensé souvent, depuis. S’acheter un vaisseau. L’appeler le Grand Soleil et en peindre un vert de chaque côté de la coque au cas où Mat’, un jour, se promenait là où était stationné l’appareil. Et comme ça, ils auraient pu rigoler de leur rencontre…
Mais force était de constater qu’il était plus facile de retrouver une inconnue avec qui on avait bu un coup sur Coruscant que de s’acheter un fichu vaisseau d’occasion.

Il n’aurait jamais l’argent pour son rêve, songea Lloyd tristement. Et puis il se sentait idiot, à ne pas savoir quoi dire. Il détestait être pris au dépourvu ! Mais il était tout de même content qu’elle l’ait retrouvé, même si c’était difficile à s’avouer.

Il releva finalement les yeux vers la Twi’lek.

- Joli travail, plaisanta-t-il avec un sourire gêné, il nous manque plus qu'le vaisseau...
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La twi'lek s'assit lentement sur le lit défait. Autour d'elle, une piaule comme elle avait en avait si souvent vue dans les bas étages de Coruscant, mélange de taudis noir et d'espace d'habitation que les gens tentaient de rendre confortable, malgré leurs horaires à la con et l'abrutissement d'un boulot souvent répétitif. Des vêtements et des restes de nourriture jonchaient les rares meubles, et une odeur de poussière émanait de l'ensemble de la surface restreinte - mais la jeune fille n'y portait aucune attention.

En fait, elle était beaucoup trop occupée à regarder son ancien compagnon de débauche pour se focaliser sur un décor des plus banal pour la zone. Maintenant qu'elle voyait Lloyd à la lumière, Mat'Aenna distinguait les tâches noirâtres de cambouis sur sa joue, sa manche déchirée et son regard las. Elle grimaça un peu. Il avait un travail, un toit où dormir, une vie. Et elle, elle arrivait par dessus tout ça, et elle venait mettre le boxon ? Elle se rendait désormais compte qu'elle tombait probablement comme une branche dans un nid de Glarx dans sa vie. C'était déjà un miracle qu'il la reconnaisse - et elle venait lui proposer un vaisseau. Un vaisseau...

Son moral remonta à cette seule idée, et la jeune femme se redressa fièrement, les yeux brillants à nouveau, ses lekkus s'enroulant avec grâce autour de ses bras, pour se dénouer aussitôt.

- "Je sais que ça faisait longtemps qu'on s'était pas vu."

Elle non plus n'aurait jamais pensé le revoir. Mais c'avait été finalement une des seules personnes qu'elle connaissait pour qui elle avait un brin d'estime, avec qui elle avait partagé plus qu'une partie de baise et quelques crédits dûment volés à la fin de la nuit. Et il était si beau ; presque trop beau pour un humain. Ça allait être difficile de l'oublier, celui-là, quand elle repartirait ! Mais elle ne pouvait pas le faire sans savoir. Il fallait vraiment qu'elle lui demande... sinon, ça continuerait à lui trotter dans la tête, et à l'empêcher de dormir le soir, tellement ses rêves étaient forts.
Son interlocuteur se penchait maintenant vers sa boite de peinture verte. On voyait presque ses méninges s'activer, se rappeler leurs rêves et leurs promesses d'un soir ; mais, au grand désarroi de la nouvelle capitaine, c'était une expression amère de tristesse qui venait plisser les traits de son visage d'ouvrier mécano. Qu'est-ce qui se passait ? Rien comme c'était jamais prévu, c'était vraiment décourageant ! Mais non, elle allait persister - du moins, encore un peu. C'était trop important, une promesse !

Et puis il se remit à parler, de sa voix un peu basse.

Le cœur de l'alien verte se remit à battre avec ardeur.

Ainsi, ce n'était que cela ? Il ne pouvait pas penser, bien sur, qu'une gamine s'était suffisamment bien débrouillée pour obtenir un vaisseau flambant neuf : il devait prendre son pot de peinture pour une vilaine blague... ou un appel au secours. Ce qu'il ne savait pas, c'était qu'elle n'avait pas besoin de lui pour se dépatouiller. Hé non !
La lumière illuminait la chevelure de l'Hapan de reflets d'or, et, sans réfléchir, elle en effleura la masse. Comment lui dire qu'elle avait un vaisseau et qu'elle avait besoin d'un mécano ? La question paraissait si simple - mais la perspective d'une réponse par la négative la rebutait vraiment. Bien sur, elle continuerait à vivre, mais pour une fois qu'elle essayait d'accorder sa confiance sans que l'autre ait eu besoin de faire un pas avant elle...

Mais il fallait s'attendre à être déçue, c'était certain. Elle aurait peut-être dû s'y préparer avant, voilà où avait été son erreur !
Un sourire plus doux illumina son visage aux traits encore fins d'adolescente.

- "Tu dois te demander pourquoi j'me ramène ici, alors que ça fait un sacré bail qu'on s'est pas vu. Mais, tu vois, j'avais un truc à te demander. Un truc important... Tu te souviens de notre promesse..."

Ce n'était pas une question. Il se souvenait. Mais s'il avait aucune envie de bouger de sa vie, et que la promesse soit restée lettre morte pour un humain comme lui ?

- "Pour les twi'leks, c'est sacré, une promesse. Je suis venue ici pour savoir si tu aurais aimé peut-être la faire vivre. Ce s'rait vraiment différent de ton boulot, et plus dang'reux aussi.. et je sais pas si tu s'ras payé régulièrement. En plus t'as sans doute une copine qui va vouloir qu'tu restes. Mais..."

Mat'Aenna déglutit péniblement. La surexcitation gagnait absolument tout son corps. Elle avait à la fois si hâte et si peur de cracher son morceau qu'elle se mettait à lanterner pendant des heures !

- "Bon, voilà. J'ai b'soin d'toi pour le peindre. Je veux dire. Mon vaisseau. Et puis, quand t'auras fini d'le peindre, ben, euh, j'me disais, peut-être, t'aimerais monter d'dans."

Voilà, c'était dit. Nerveusement, la jeune femme se mit à arpenter la pièce à grandes enjambées. Elle se sentait vaguement plus légère, et surtout remplie d'une fierté qu'elle n'avait jamais connu - elle était capitaine. Et la vie, la vie, c'était devant eux, pas derrière eux, on pouvait s'y concentrer sur l'avenir ! Et pas un avenir égoïste. Nan, elle serait avec des gens, avec qui elle se sentirait bien.

- "J'ai longtemps pensé à tout s'qu'on s'était dit ce soir-là, et j'ai jamais retrouvé un type avec lequel j'me suis aussi bien entendue. Je parle des gens normaux, hein, pas d'ces connards de siths. Ou des jedis. Pas les forceux, quoi."

Sa grande silhouette dégingandée s'arrêta enfin, pour se planter devant celui du jedi gris.
Qu'il dise quelque chose... L'attente devenait vraiment insupportable !
Lloyd Hope
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Ça, c’était clair, ça faisait longtemps qu’ils s’étaient pas vus ; le regard surpris du jeune homme ne l’avait pas tout à fait quitté. Mat’Aenna, l’adolescente Twi’lek voleuse qu’il avait rencontrée, n’était plus qu’une vieille ombre animée de la femme qu’il avait devant les yeux aujourd’hui. Elle avait vieilli –comme lui, sûrement- mais surtout, elle ne fuyait plus. Déjà à l’époque, elle l’avait épatée quand elle avait sauté sur le balcon –quitte à se blesser. Elle avait le cœur bien accroché, contrairement à lui. Elle regardait la réalité en face… Et ses lekkus se mouvaient avec douceur, et non plus avec inquiétude et frénésie. Pourquoi était-elle soudain si sûre d’elle-même ? Avait-elle trouvé une activité juteuse ? Si c’était le cas, ce devait pas être clair –les gens honnêtes se faisaient pas de la thune comme ça, même s’ils essayaient très fort : la preuve, il avait tenté le coup et il était de nouveau sans boulot et avec des économies à faire rire aux éclats un sans-abri des plus bas quartiers.

Le Hapan resta un moment silencieux, buvant sans vraiment les intégrer les paroles de la jeune femme. Une main verte passa sur ses cheveux sans même qu’il n’ait un mouvement de recul –en fait, toute la scène était si irréelle qu’il avait l’impression de rêver. Il se demandait vraiment si elle n’avait pas consommé trop de bâtons de la mort, ou alors c’était lui qui dormait éveillé.
Incrédule, ses yeux verts cherchaient dans ceux de la Twi’lek l’indice qui lui ferait découvrir la mascarade –mais il ne trouva rien que l’optimisme dont elle débordait. Elle n’avait plus le sourire désespéré. Elle était confiante. Comment était-ce possible, dans le monde qu’ils connaissaient tous deux ? Il avait bien compris sur le balcon que comme lui, sa situation était plutôt du genre désespérée. Qu’est-ce qui lui donnait cette force soudaine de croire en l’avenir, alors ?

- Oui, ça, pour m’en rappeler…

Une promesse de Twi’lek. Lloyd ne préféra pas commenter –il avait rencontré des filles de son espèce pas trop regardantes sur les conditions particulières de respect des promesses. Mais bon, Mat’ n’étaient pas de celles-là. Elle avait beau connaître ou avoir connu la misère autant que lui, ce n’était pas le même genre que celles qui avaient pu garder malencontreusement son portefeuille après quelques baisers nocturnes. Quelque part, il trouvait du réconfort dans le fait que Mat’ n’avait pas dû s’abaisser à ce niveau-là.

Mais les explications de la Twi’lek éclipsèrent brusquement toutes ses réflexions. Il resta là, à la contempler avec des yeux plus arrondis encore, et éprouva soudain le besoin de poser sur sa table déjà encombrée le pot de peinture. Puis il s’appuya au petit meuble derrière lui de ses deux mains, fronçant les sourcils.

- Ton… vaisseau ?

Elle avait dit ça comme ça, comme si c’était tout naturel. Mais il avait bien entendu. Elle avait dit « mon vaisseau ». Elle avait dit aussi « J’ai b’soin d’toi » et la combinaison de l’ensemble de sa phrase avait fait manqué un battement au cœur de Lloyd. Il ne savait plus ce qui était le plus ahurissant : que sa vieille amie ait dégotée un vaisseau ou qu’on lui dise qu’on avait besoin de lui quelque part. C’était un peu comme si après être resté des années debout dans un speeder-bus, on vous offrait une place pour vous asseoir, comme le reste du monde. Etrange sensation. Lloyd n’arrivait pas à sourire.
Mais il finit par écarter les mains, autant en signe d’incompréhension que de soumission.

- Alors je suis pas sûr d’avoir tout bien compris, là, lâcha-t-il. Mais j’ai pu d’boulot et pas d’copine. Quand à ce taudis, je pourrais plus l’payer longtemps, si tu veux mon avis.

Voilà, c’était dit. Il avait plus de job, il était seul au milieu d’un monde entier de vipères, et l’autre débarquait avec un vaisseau et un pot de peinture. Pour le coup, il avait vraiment du mal à y croire. D’un côté, ça le soulageait d’avoir quelqu’un à avouer qu’il était dans une impasse complètement sordide et d’un autre, il se sentait misérable d’avoir à prendre la main tendue d’une Twi’lek qu’il voyait pour la deuxième fois de sa vie. Mais au moins, c’était pas une « forceuse » comme elle avait dit. Donc, on pouvait au moins lui faire plus confiance qu’à un Sith ou un Jedi.

Le néon au plafond de la pièce grésilla, changea d’intensité avant de se stabiliser de nouveau. Il conférait au visage de Mat’ des ombres chinoises, comme si d’autres traits existaient chez elle mais qu’il ne pouvait discerner. Quant à Lloyd, il avait gardé le visage amer de sa révélation.

Ils continuèrent à se regarder l’un l’autre pendant une poignée de secondes. Mat’ avait l’air impatiente, remarqua-t-il. Elle devait avoir une sacrée mémoire pour s’être souvenue de son adresse après leur nuit d’ivresse. Ou alors, il l’avait un tout petit peu marquée… Il garda le silence quelques secondes encore, le temps de réaliser tout ce que la proposition impliquait : quitter Coruscant, voyager à bord d’un vaisseau, être…

- Bon, déclara-t-il en levant la paume de sa main devant elle, tandis que son visage s’éclairait d’un petit sourire. J’ai vraiment du mal à te croire. Mais... Tope-la.

… libre.
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