Gary Kovani
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Aduba-3. Une planète aride, sèche, désertique. Une de plus. Je soupire.

Trois silhouettes approchent. Un agent des douanes flanqué de deux sbires armés. Les couleurs de leurs uniformes agonisent, maltraités par le rayonnement impitoyable de l’astre diurne, boule de feu incandescente dans un ciel blanchi par la chaleur suffocante de la haute atmosphère. J’inspire. Au moins ici, contrairement à Tatooine, on peut respirer sans crainte de s’étouffer avec les particules fines de sables transportées par les bourrasques brulantes.

« Papiers et manifeste de cargaison. »

Une voix rauque, dénuée de la moindre once de politesse. Ni bienvenue, ni bonjour. S’il fallait en douter, l’accueil spartiate certifie que je n’ai pas mis les pieds sur un monde touristique. Ceux qui foulent le sol aride d’Aduba ne viennent pas pour le plaisir. De l’index, je soulève le bord de mon large chapeau conique. Mon regard croise celui du fonctionnaire. Yeux sombres. Orbites profondes. Nez crochu. Un profil de rapace. Non, plutôt de charognard. Il se dégage de cet homme une attitude de dévoreur de carcasse opportuniste plutôt que de prédateur calculateur. Je lui décoche un sourire en coin, et lui tend le datapad. Blotti entre la coque antichoc et l’écran tactile, quelques Wupiupi, une centaine, attendent patiemment d’être engloutis par la paume moite de sueur. L’homme les fait disparaitre d’un geste vif, mille fois répété. Il s’en cache à peine. Les pots de vins sont monnaie courante dans les territoires sous contrôle des clans Hutt. Et sur bien d’autres mondes. Mentalement je hausse les épaules. Les esprits les plus vertueux s’insurgeraient d’encourager de telles pratiques. Mais ceux-là peuvent aller se faire foutre. Il faut savoir s’adapter. Chacun monde dispose de ses règles, de ses us, de ses coutumes, et je ne suis pas assez idéaliste pour désirer les plier à mes propres convictions. Le douanier pose les yeux sur l’écran et fronce aussitôt des sourcils, devenus une large bande broussailleuse, en s’adressant à ses subordonnés.

« Inspectez le Xaltoca… Xalfacto… ce vaisseau ! »

Les deux soldats de fortune obéissent sans un mot. Leurs bottes claquent sur le métal de la rampe latérale déployée. Ils disparaissent dans le ventre du cargo peu avenant. Il a, connu des jours meilleurs.

« Le Xalfocafacta. »

Je n’obtiens qu’un grognement en guise de réponse. Je me retiens de rire. Il ne manquerait plus que je finisse en cellule pour outrage à agent en fonction. Dans chaque spatioport que je visite, la même scène se répète inlassablement. J’adore le nom de mon vaisseau, rien que pour ça. Loin d’être décontenancé, il continue son interrogatoire sommaire. Règles d’usage :

« Vous transportez des pièces de rechanges ? »
« Oui, pour des condensateurs hydroponiques. »
« Provenance ? »
« Tatooine... La négociation a été rude avec les Jawa... »


L’exode aura eu un seul et unique effet positif : je n’ai plus besoin de mentir sur ma provenance. Fut un temps ou je devais bifurquer et trafiquer mon journal de bord pour qu’on ne soupçonne pas ma venue d’Ondéron ou d’un monde Républicain. Des crissements métalliques m’informent que les deux sbires ont fini par découvrir les compartiments secrets sous le plancher et dans la cloison du cockpit. Quel contrebandier digne de ce nom n’en a pas pour dissimuler bien et personnes illicites ? Les miens sont vides, bien entendu. Pour réussir une bonne couverture, il faut savoir jouer avec le feu, les apparences, mais sans se brûler. Instinctivement, je baisse les yeux sur mon accoutrement. On me croirait sorti tout droit d’un holofilm. Le stéréotype du contrebandier : veste de cuir aux poches multiples, pantalon moulant, holster à la ceinture. Seul mon chapeau conique dénature la panoplie. Rien ne peut m’identifier comme un Jedi en mission.

Après quelques longues minutes sous ce soleil de plomb, les deux gardes ressortent. Ils hochent la tête. Sous-entendu qu’ils n’ont rien trouvé de douteux. Enfin, douteux d’après les standards de ce monde : ce qui ne signifie pas grand-chose. Je pense qu’eux-mêmes ne savent pas ce qu’ils cherchent exactement. Je ne quitte plus mon sourire faussement amical. D’un coin de l’œil, j’observe les autres vaisseaux stationnés sur le terrain vague que les locaux osent nommer pompeusement : spatioport. Une silhouette excite mon attention. Un cargo léger, chromé, rutilant malgré l’épaisse couche de poussière qui ternit sa carlingue. L’Anathème. Sans aucun doute. La dernière fois que j’ai vu ce vaisseau, il arborait encore fièrement l’emblème du Temple sur ses flancs. Il a été effacé depuis. Probablement pour garder profil bas depuis l’Exode. Il appartient à Guilbert Chamonard. Un diplomate Jedi porté disparu depuis cinq ans, avec son padawan. La semaine dernière, son transpondeur a été repéré par un vaisseau « ami », oui il en reste quelques-uns, sur la route de Triellus en direction de ce monde. Cette fois mon sourire n’est plus feint. Je suis heureux d’avoir retrouver sa trace aussi… facilement. Mais je ne vends la peau du wampa avant de l’avoir tué. Les indices les plus évidents sont souvent ceux qui mènent à de fausses pistes. Ils pourraient très bien avoir abandonné leur vaisseau pour couvrir leurs traces. Mais pourquoi ? Pourquoi refaire surface après cinq années d’errance à se terrer sous les radars de l’Ordre ? Il se pourrait aussi que le vaisseau est tout simplement changé de propriétaire…

« Bien. Tout est en ordre. »

Il me rend mon datapad et je le fourre aussitôt dans une poche de ma veste. Alors que mes doigts gantés le libèrent, j’esquisse une question en désignant du menton l’Anathème.

« Jolie carlingue. On n’en voit pas souvent des comme ça. »

Mon interlocuteur tourne la tête. Hausse les épaules.

« Des invités du Seigneur Attila. N’essayez même pas d’approcher de ce vaisseau. Mes hommes vous tireraient à vue. »

Je lève les mains, paumes ouvertes en signe de paix.

« Loin de moi cette idée ! »
« Je préfère cela. Bon, comme je le disais : tout est en règle. Je vous rappelle que, pour des raisons de sécurité, le spatioport est interdit d’accès en dehors des horaires d’ouverture. Il est interdit de dormir à bord. Seuls vos droides sont autorisés à rester dans l’enceinte, mais ils ne doivent pas quitter votre vaisseau sans votre présence sous peine d’être atomisés. Le Seigneur Attila décline toute responsabilité si votre cargo devait être fracturé et vos effets personnels ou cargaisons volés. Vous devez également vous acquitter de cinq jours de stationnement, même si vous repartez plus tôt. Soit cinq milles Wupiupi. »


J’obtempère, mécaniquement. La sécurité, mais pas trop hein. Quelque chose me dit que les gardes locaux se servent dans les soutes à la nuit tombée pour arrondir leurs fins de mois. Mais bon. Ce n’est pas si différent des taxes exorbitantes dont on doit s’acquitter sur certains mondes soi-disant civilisés. Ultime hochement de tête pour prendre congé de mon hôte. Lui, qui, sans un mot, volte-face et s’éloigne d’un pas rapide, certainement avide de gagner son bureau ombragé. J’inspire, expire. Bon. Il est plus que temps de démarrer cette enquête.

Mon index glisse sur le bracelet que je porte au poignet droit. Le lecteur biométrique passe de l’orange au vert. Sifflement des vérins pneumatiques. La large rampe de la soute arrière se déploie tandis que celle latérale, plus étroite, se referme. Son extrémité claque lourdement sur le sol desséché, lézardé de craquelures profondes. Je la gravis. De part et d’autre, une dizaine de caisses de deux mètres cubes sont solidement harnachés aux cloisons de métal nu. Ce n’est pas seulement une couverture : je transporte réellement des pièces détachées. Et je compte bien les vendre. D’un, pour financer les pots de vins que je verserai inévitablement durant mon séjour… Et de deux pour me faire un peu… D’argent de poche. J’ai plusieurs fois été réprimandé par le Conseil Jedi pour profiter des missions pour me faire quelques bénéfices… Mais c’est plus fort que moi : j’aime disposer de ma propre cagnotte pour conduire mes investigations en toute indépendance, sans devoir justifier mes dépenses. Je déteste la paperasse et le calcul des notes de frais…

Au fond de la soute, trône une petite motospeeder. Je la détache, l’enfourche et l’allume en passant mon bracelet devant le lecteur sous les cadrans. Ma botte écrase la pédale des gaz. Le bourdonnement des répulseurs entre en résonnance avec les battements de mon cœur excité. J’affiche un large sourire alors que je quitte précautionneusement le vaisseau. La rampe se referme derrière moi. Mais je ne l’entends pas : absorbé par le bruit des moteurs soniques. J’accélère un grand coup. La poussée arrache mon chapeau qui tombe sur ma nuque, une simple cordelette lui interdit de s’échapper plus loin.

Je quitte rapidement l’enceinte du spatioport. Un carré de terre aride ceinturé d’une haute clôture de barbelé. Une dizaine de miradors achèvent de transformer ce lieu de passage en un ersatz de pénitencier. Je note également deux énormes tourelles anti-aériennes. Leur ombre me dévorent alors que je passe à proximité. Elles dénotent dans le paysage, tant elle semble disproportionnées comparées aux installations sommaires qui les entourent. Attila le Hutt aurait-il des ennemis assez puissants pour mériter une telle défense ? Au loin, au-delà des effets d’optiques causés par l’air surchauffé, je devine l’imposante silhouette du palais du Hutt, juché au sommet de la seule élévation de la plaine asséchée. Autour, s’étends une ville tentaculaire, labyrinthique, aux couleurs mornes de terre et de poussière, qui n’est pas sans rappeler l’esthétique désuète des vieux holo-western. Je m’attendrais presque à trouver, à sa périphérie, un vieux panneau de bois surmonté d’un vautour où il serait écrit en lettre de sang « Bienvenue à Aduba City », souligné de quelques ratures intimidantes indiquant le nombre décroissant d’habitants…

Mais on n’est pas dans un holo-western. Sous ses airs de monde paumé, Abuda est une plaque tournante de la contrebande aux abords de la route commerciale de Triellus. Même si Attila le Hutt est loin d’être un incontournable dans le panthéon dynastique des Hutt, il dispose d’un pouvoir certain, et d’une manne financière suffisante pour maintenir à flot une ville d’un million d'habitants lovée dans une cuvette asséchée. Qu’est-ce que Guilbert et son padawan sont venu chercher ici ? Je n’en ai pas la moindre idée…
Ses'kai Mora
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Ses'Kai n'aimait pas repenser au passé, aux temps révolus et désormais inaltérables. "Ce n'est plus, alors quel intérêt ?" jugeait-il. Mais parfois, des souvenirs remontaient, s'accrochaient à ses pensées qu'il le veuille ou non, et lui tournaient en tête jusqu'à le rendre encore plus irritable que d'habitude. Triste constat, lorsque c'était souvent des situations déjà outrageusement irritante qui amenait sa mémoire à ressortir de vieux dossiers.
En l'occurrence, il repensait à son maître. Un Togruta avisé, mesuré, un peu trop moralisateur ou maniéré parfois. Un mentor qui prônait la réflexion, l'importance de peser le pour et le contre de ses mots et ses actes, ainsi que la portée qu'ils auraient dans le futur. Pour essayer d'intéresser son padawan, il usait souvent de métaphores, plus visuelles, plus concrètes, conscient que ça parlerait plus facilement à son impatient apprenti, qui n'écoutait pas vraiment plus pour autant les histoires de papillons et de leurs effets sur les courants d'air. Tout ça, c'était que du vent, selon lui.
Mais en s'entêtant à résoudre - ou créer - les problèmes au fur et à mesure qu'ils venaient, il fallait bien reconnaître que certaines conséquences ou enjeux lui échappaient. Pour le bretteur, ça n'avait pas beaucoup d'importance. Tant pis si une action entraînait un autre souci, il n'aurait qu'à le sabrer à son tour. Et si ça provoquait une autre complication, hé bien la démarche était déjà toute trouvée !

Cependant, maintenant que le chasseur de prime était assis dos à un mur sans fenêtres dans un bouge étouffant à l'atmosphère poisseuse de sueur et de tabac froid, entre autres, il se demandait si ça n'aurait pas valu le coup de garder les leçons de son maître dans un coin de sa tête pour les ressortir de temps à autre, plutôt que de tout rejeter en bloc. Non pas qu'il ait jamais douté de sa méthode, la force pure (et un sabre-laser bien employé) pouvait être la solution à tous les problèmes de la galaxie, pour peu qu'on en utilise assez.
Le problème, alors que son pied tapait nerveusement sur le plancher tandis qu'il serrait un verre opaque de crasse et contenant un tord-boyaux simplement honteux même pour un article de contrebande, c'est qu'il avait fini par se mettre tout seul dans la merde comme un gland. En tant que duelliste, sa force personnelle ne suffisait pas à faire plier des planètes en quelques jours. Pas encore du moins, se répétait-il pour apaiser son égo et sa rage intérieure.
Le vrai problème,  c'est qu'au moment de se dire "Et maintenant, je fais quoi ?" après avoir retrouvé sa liberté, son appétit féroce pour la violence et le défi le firent facilement signer comme chasseur de prime. Tacitement, en tout cas, les factions criminelles ne se souciant pas vraiment de tenir des registres de guilde avec toute la vermine et les laissés-pour-compte de la galaxie. Poursuivre quelqu'un, l'acculer, lui permettre de mener un dernier combat avec pour récompense la liberté ou une mort honorable, ça, ça lui parlait. D'autant que même à l'époque, il en avait déjà mené avec succès...

Mais avec sa mémoire de poisson rouge, il avait oublié à quel point dans "chasseur de prime" il y avait "chasseur". Ce qui consistait à passer l'immense majorité de son temps à avancer au hasard des rencontres et des idées pour retrouver la piste de sa proie. Traquer un fauve de dix tonnes dans la jungle, ou une petite fouine au milieu d'une cité-ruche remplie de furets qui puent, c'était pas exactement la même chose. Et dans le second cas, la chasse se faisait généralement grâce à des contacts, des renseignements, des pots-de-vins...
Bref, un travail d'enquête, qui demandait du savoir-faire, de l'intuition, des ressources, et des connaissances dans la pègre, le piratage informatique ou deux trois autres trucs du même acabit. Exactement tout ce qu'il n'avait pas. Un soldat lui avait un jour dit "L'armée, c'est se faire chier pendant très longtemps, d'attendre qu'il se passe un truc, avant d'avoir un tout petit peu d'action". Ben chasseur de primes, c'était presque pareil, sauf qu'il avait même pas le luxe d'attendre car c'était à lui de se bouger le cul après sa cible.

"J'aurais juste refaire gladiateur à plein temps" se grommela-t-il pour la quatrième fois en une heure avant de prendre une nouvelle gorgée, espérant étouffer sa rancune envers lui-même avec le goût affreux de l'alcool.

Déjà, retrouver une piste récente avait été une plaie, mais il avait eu la chance de poursuivre une cible assez mal aimée visiblement, car pas mal de gens lui avaient donné une direction ou un nom, en échange d'une promesse de casser une dent ou un doigt de leur part, ce qui était un marché des plus honnêtes à son humble avis. Mais ensuite, la piste l'avait envoyé en territoire Hutt. L'un de ces périmètres qu'il voulait éviter, de part son aversion naturelle envers les limaces, dont le seul nom le mettait en colère. Cela dit, il n'allait pas reculer juste parce qu'il savait que ça allait lui casser plus que les pieds. Au pire des cas, se disait-il, ça lui ferait une raison de plus pour tout casser quand ça tournerait mal.
Petite pincée de sel supplémentaire dans le fondement, ses dernières info' l'envoyèrent droit sur une planète aride. Un trou paumé et brûlant, où tout le monde pue et traîne des pieds. C'est comme ça qu'il le voyait en tout cas. Et ça n'avait pas mis longtemps avant de dégénérer. Sitôt son chasseur monoplace - qu'il avait "gagné" auprès de son ancien propriétaire après qu'un "défi" lancé après quelques verres ait tragiquement tourné pour l'un des deux - posé dans le spatioport, il se serait cru de retour à en terrain Républicain.
Tout de suite, une bande de pète-zouille est venue les lui brouter à propos de taxes, de réglementations et de sous-entendus. Il avait en retour laissé clairement entendre qu'il allait tous les équarrir s'ils causaient pas mieux, mais aucun n'avait bronché, habitués depuis longtemps à toutes les intimidations, en particuliers des chasseurs de prime. Amusé par leur aplomb et leur témérité, Ses'Kai avait finalement ricané un grand coup et obtempéré, les laissant en un seul morceau et s'acquittant de son dû.

Une autre de ses décisions qui lui faisaient ressasser les leçons de son maître. En tant que duelliste, avide de puissance et de gloire, l'argent n'avait pas d'intérêt. En tant que Jedi, Noir ou pas, l'argent n'avait aucune valeur. En tant que taré vivant au jour le jour, l'argent n'avait pas d'importance, à tel point qu'il n'avait même pas cherché à se figurer ce que représentait la somme exigé au spatioport. Il râlait cependant souvent sur les prix pratiqués dans les quartiers où il avait fini, mais bien plus par tradition - si on proteste pas, c'est qu'on est mou - que par cupidité.
Sauf qu'avec toutes ces conneries, ses fonds modestes descendaient rapidement. Il avait tout intérêt à plier sa traque ou à improviser un nouveau revenu tant qu'il était là, sans quoi sa mission risquait de lui coûter plus cher que ce qu'elle pouvait lui rapporter ! Et cette sensation d'urgence qu'il ne savait pas traiter ne faisait qu'accentuer son irritation.
C'était un tueur, bon sang de bon soir, pas un chien de police. Il savait pas flairer le gars le plus louche du lot au milieu d'une bande de putois ! Tout ce qu'il avait trouvé à faire, c'était aller dans un quartier qui avait l'air pourri, mais pas trop, pour chercher le bon équilibre entre les gens assez désespérés pour être prêts à tremper dans des trucs dangereux et immoraux, mais pas trop afin qu'ils puissent rester un peu sain d'esprit en le faisant.
Une fois les rues suffisamment sales à son goût - ayant finalement été convaincu après avoir vu un type répondre à l'appel de la nature en plein sur la porte d'un magasin, ce qui vira rapidement à une violente altercation que les autres passants regardèrent d'un oeil distrait sans s'arrêter - il se dirigea tout droit vers ce qu'il avait toujours pensé être le lieu de départ et d'arrivée de toutes les histoires. Le bistrot.

Et voilà où il en était désormais. À marmonner d'un air hargneux dans sa barbe de quatre jours comme s'il insultait son verre, la table et le monde entier, en jetant des regards secs vers quiconque tournait la tête dans sa direction ou passait la porte. Sa vibrolame bien en évidence sur à sa hanche gauche, et son sabre-laser "bien caché" dans une petite sacoche - qui contenait aussi une boite bientôt vide de pastilles sucrées et un vieux magasine de charmes -  sur la hanche droite, sa nature et la raison de sa présence ici ne faisait aucun doute, mais il était loin d'être le seul dans la région, alors tout le monde s'en fichait. Personne ne savait qui il cherchait, et personne ne s'en souciait.
Il commençait à sévèrement le démanger de juste vider son verre d'un trait, retourner la table pour l'effet de style, bondir sur une autre, et gueuler à toute la salle après le cul de qui il en avait. Jusqu'à maintenant, il s'était retenu, car il se disait que son maître n'avait pas entièrement tort sur un point : la discrétion, un minimum en tout cas, pouvait être plus utile que charger à l'aveugle. Si sa proie entendait un peu trop parler de lui, elle risquait juste de filer de nouveau et il n'aurait plus qu'à tout recommencer... en plus d'avoir perdu son temps ici, et ça, il ne le permettrait pas.
Cela dit, il manquait cruellement d'autres options. Interroger des gens au hasard ? Il allait juste craquer psychologiquement et tuer quelqu'un, et ça finirait en bagarre généralement avec toutes les forces locales. Comme d'hab. Pas terrible pour la poursuite de son objectif. Il n'avait pas plus d'indices, ne savait pas où en trouver, n'avait pas assez de ressources pour aller tailler de bout de gras avec les gros bonnets, et ne possédait pas de pouvoirs qui l'aideraient à enquêter.

"J'aurais juste du refaire gladiateur à plein temps"

Sur cette ultime répétition à sa seule attention, il vida le fond de son verre d'un trait, frappa violemment sur la table à défaut de la balancer à travers la pièce, et se mit à beugler.

"Ho, face de cul ! Ramènes-toi !"

C'était du bluff. Il ne cherchait même pas à fixer quelqu'un, ni ne s'adressait à personne. Le Thyrsian en avait juste sincèrement marre qu'il ne se passe rien, alors il tenta un truc, à moitié au hasard, espérant avec un peu de chance peut-être que quelqu'un se sentirait concerné par ce cri de colère d'un chasseur de prime et aurait une réaction quelconque, qui pourrait au moins le conduire quelque part.
Et au pire, il aurait une bagarre, et il aura qu'à accuser le tavernier et son immonde piquette. Mais au moins, il aura arrêté de s'ennuyer pendant cinq minutes...
Rork Adno
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Aduba la spécieuse [pv Ses' et Rork] Oms2

Rork n'avait pas pour habitude de se laisser gagner par la foi Jedi, mais lorsqu'il apprit que deux des siens étaient en danger à la Bordure Extérieure, le félin n'hésita pas une seule minute. Montant la rampe de son vaisseau, le Cathar vit rapidement qu'un holo l'attendait. Ce dernier parlait d'un duo en danger, qu'il fallait une intervention rapide de la part de tous les alliés des Jedi. Bizarrement, même après tout ce temps, le colosse aux longues griffes gardait un œil sur les ondes en rapport avec le Conseil. Depuis la disparition de Saï Don, il fallait bien que d'autres entretiennent la flamme et s'assurent que l'équilibre soit maintenu dans la galaxie. Enfin vu l'état de la galaxie, on devinait rapidement que cet équilibre était très bancal. Quoiqu'il en soit, Rork ne voulait pas baisser les bras et, remontant la rampe, l'ancien membre du Conseil décolla de cette planète rocheuse.

En sortant de l'hyper-espace, Rork scanna rapidement la surface de la planète, on n'était jamais sûr de rien et puis, avec de la chance, le félin pouvait tomber sur ses cibles. Mais non. Le secteur était immense, il y avait quasiment aucune chance de tomber sur eux, comme ça, au croisement d'une planète. Ce qui était en revanche certain, c'était que dans le secteur de Triellus, les informations étaient légion. Impossible de ne pas trouver son bonheur dans un lieu pareil. Le chasseur venait souvent ici pour avoir des informations en tout genre, une vraie mine d'or pour celui qui, comme Rork, avait le bras très long dans un lieu comme celui-ci. Tellement long qu'à plusieurs reprises, Attila le Hutt lui-même venait accueillir le colosse, ordonnant à ses hommes de ne rien toucher sur le vaisseau et de le surveiller comme si il était à Attila en personne. Privilège d'être surnommé le Croque-Mitaine par la plupart des membres de la Bordure Extérieure et donc de tous les réseaux sombres de la galaxie...

Aduba la spécieuse [pv Ses' et Rork] 9wgn

Sans tarder, Rork prit la direction du spatio-port, et à peine apparu sur les radar du spatio, l'ancien Maître Jedi fut invité à prendre place dans la partie du spatio-port la plus uppée. Enfin si uppé il y avait dans un endroit comme ça. Accélérant, le vaisseau de catégorie Predator de Rork plongea en direction du sol. Portant le nom du Fossoyeur, le vaisseau était reconnaissable de par les deux bandes rouges de chaque côté ainsi que des crocs, rouges également, peints sur le devant du vaisseau. Le reste de la carlingue était totalement noir, pire que le néant. L'atterrissage sans problème passé, le Cathar se leva de son siège et activa la rampe pour sortir. En bas, il y avait le chef du spatio-port et deux de ses hommes, qui étaient en plus de ça au garde à vous comme si c'était protocolaire de voir arriver le félin.

" M'sieur Rork ! M'sieur Attila vous souhaite la bienvenue, il ne vous attendez pas avant plusieurs semaines. Il espère vous voir arriver dans son palais afin de discuter de cette visite. Mais à votre convenance, il a dit...

- Je cherche quelqu'un. Mes affaires ne concernent pas Attila mais j'irai lui rendre visite dans la soirée, prévenez le.

- A...à vos ordres m'sieur !"

Sans dire un mot de plus, le colosse sortie un sac de taille moyenne en tissue, et le lança au chef spatio. Le bruit des crédits s'y trouvant était un bruit qui avait pour effet d'afficher un grand sourire sur le visage de ce dernier. L'ancien Maître Jedi tourna les talons et pris le premier speeder qui se trouvait là, sans même demander l'avis de qui que ce soit. On pourrait croire que Rork était devenu un salopard mais non, c'était les conditions qui voulaient ça. Dans la Bordure Extérieure, comporte toi comme les locaux si tu ne veux pas être pris pour un faible. Et la réputation du colosse à fourrure n'était plus à faire, il ne faisait que l'entretenir, tenir cette image de tueur froid et sauvage, qu'il ne valait mieux pas contrarier au risque de finir avec un bras en moins ou la gorge tranchée. Ce qui d'ailleurs était déjà arrivé. Car oui, des nouveaux qui se pointent dans le secteur, il y en avait pas mal. Et tous n'avaient pas encore toutes les informations sur qui venait et repartait et surtout sur qui était VIP ou non. Un jour que Rork revenait plus tôt d'une mission, qui en plus de ça c'était soldée par un échec, un p'ti nouveau dans le spatio vit le colosse monter dans le Fossoyeur. Mais évidemment sans savoir qui était Rork. Deux minutes plus tard, le jeunot hurla de douleur et pleura son bras gauche. Et le plus beau dans tout ça, ce fut les excuses du chef du spatio et d'Attila lui-même pour la gêne occasionnée.

Saï Don serait là, le Cathar était certain qu'il le regarderait avec un lourd regard réprobateur sur son comportement bien trop proche du côté obscur pour l'ancien. Tout, dans ses agissements, était contre les préceptes des Jedi. Le félin n'avait pas pour habitude de faire les choses à moitié et, comme toujours, c'était les reproches que celui-ci avait envers le Conseil. D'ailleurs les évènements allaient dans le sens du Cathar, la galaxie sombrait et les Jedis n'étaient plus. Ce qui prouvait bien que le manque d'interventions concrètes provoquait des résultats catastrophiques...

Aduba la spécieuse [pv Ses' et Rork] Vwad

Pied au planché, Rork lança le speeder vers la ville, quittant le spatio en sachant très bien que son vaisseau ne risquait strictement rien. Une fois à la périphérie, les autorités du coin étant relativement variable en terme de laisser aller, Rork gara le speeder et s'avança tranquillement. Des marchands, des visiteurs incognito, il y avait un peu tout dans le coin. Il y avait évidemment les habitants, un million de personnes vivant sur place, cela n'était pas rien et ça occupait pas mal de place. La chaleur et l'aridité de cette planète offrait très peu de possibilité en terme d'habillement, la plupart des gens portaient des protection en tissue claire sur la tête et le visage, ce qui faisait que les mercenaires présents et qui s'occupaient de la sécurité de la ville, demandait aléatoirement aux arrivants de baisser ce qui couvrait leur visage, histoire de voir si quelqu'un était recherché. Un des mercenaires, sûrement un nouveau, fit signe à Rork de montrer son visage, ce qu'il fit. L'ancien Maître Jedi n'avait rien contre montrer son visage en public, bien au contraire. Mais cette fois, ce fut inattendue comme réaction. Le mercenaire demanda au colosse de venir à lui et de se mettre sur le côté, commençant à lui poser des questions sur ce qu'il faisait là et les motifs de sa venue. Rork se prêta au jeu quelques secondes, histoire de voir combien de temps le soldat allait mettre pour comprendre à qui il parlait. mais ce fut un de ses collègues qui intervint en catastrophe.

" Wohwohwoh ! Excusez le M'sieur ! Il est nouveau, il ne vous connait pas, vous pouvez y aller, désolé..."

Sans rien ajouter, Rork avança, lâchant un petit grognement qui hérissa les poils du second mercenaire, le colosse pu le sentir. Dans son dos, tout en s'éloignant, le félin entendit le second garde lui dire qu'il avait échappé à la mort de justesse et qu'il devrait prendre note sur les têtes connues dans le coin si il voulait vivre un jour de plus. Ce qui eut pour effet d'afficher un sourire en coin sur le visage du Cathar.

Comment trouver une bonne cantina dans le coin ? Trouver le bon filon et l'exploiter ? Le chasseur allait devoir faire comme à chaque fois, trouver un bon équilibre entre les divers lieux où les sources d'informations trouvent leur place. Le félin se rendit donc dans la cantina habituelle lorsqu'il arrivait dans le secteur. Point de départ de toutes les enquêtes du Maître Jedi, et dans la majeure partie des cas, il y trouvait toujours quelque chose d'intéressant. Voir des fois, des trucs inattendus. Entrant dans la cantina, Rork s'approcha du comptoir et demanda un verre, qu'il termina d'un trait avant d'en redemander un second puis finir par faire signe au barman de laisser la bouteille. L'attente allait être longue, il fallait donc trouver de quoi s'occuper...
Gary Kovani
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Je relâche la pression sur la pédale des gaz. La moto-speeder décélère rapidement. Je me redresse, yeux ronds... Je n'ai que rarement été témoins d'un tel chaos. Même sur Nar-Shaddaa. L’artère principale qui fend Aduba-City est bondée. Plus que cela encore. Elle dégueule, vomis, gerbe des milliers de piétons, speeders, moto, et de chariots rudimentaires tractés par des bestiaux à poils, à plumes ou à écailles. Ou les trois à la fois. L'agitation est telle qu'une brume de poussières soulevée par le martellement des pas et des engins ne semble jamais vouloir se dissiper. Je réalise rapidement ce qui justifie une telle activité : la large avenue fend la ville tentaculaire de part en part. Comme un coup de hache dans un cadavre en putréfaction dont chacun des habitants serait un frétillant ver bouffeur de chairs. Elle relie, d'une parfaite ligne droite, le palais du Hutt au Spatioport. L'urbanisation utile poussée à son paroxysme pour le seul et unique être qui se juge bien au dessus des autres... La mégalopole est sorti des terres arides autour de cet axe vital, sans aucune logique, intelligence ou tentative de cohérence. Je secoue la tête. Plus que de me jeter dans la gueule d'un monstre, j'ai l'étouffante sensation d'entrer directement dans le cerveau d'un Hutt schizophrène.

Je klaxonne, force le passage. On m'insulte, me frôle. Je remonte péniblement l'avenue, joue la survie de ma carrosserie à chaque instant. La chaleur est plus qu'étouffante. La sueur et la poussière forment une croûte épaisse sur mon visage. Je tousse. A chaque fois que je tourne la tête, je croise une nouvelle espèce, un nouvel accoutrement, l'expression d'une nouvelle culture. Des badauds protégés sous des manteaux longs, sous des capuches profondes ou des chapeaux larges. Des silhouettes drapées, fantomatiques dans la brume de poussière. L'effort est si intense, que j'en oublie mon intuition. Elle qui me guide dans ces moments d'hésitations, lorsque je démarre une enquête et que les pistes sont bien trop maigres pour m'offrir un réel os à ronger. J'avance plus poussé par le foule que mu par mon instinct... Mais par chance, après une bonne demi-heure de lutte acharnée, j'arrive à m'extraire du flux incessant des véhicules. Je repère la devanture d'une Cantina. Je m'engouffre dans l’étroite rue la jouxtant. Enfin je relâche la pression. J'inspire, expire. Je gare ma moto-speeder à coté d'une rangée d'autres bécanes, bien moins entretenues. Je suis exténué. Je frappe du plat des mains me épaules et mon torse pour libérer du carcan de poussière. Puis je réajuste mon large chapeau conique, et entre.

Les portes saloon grincent. L'ambiance tamisée me prive de la vue quelques instants, tant le contraste avec l'extérieur est écrasant. Je cligne des yeux, avance en titubant. Quelques ricanements m’accueillent : ceux de habitués qui se gaussent de l'allure misérable des touristes déstabilisés... Mais tout ceci n'est que provisoire. Mes doigts glissent sur le bar, et je pose mon cul sur le premier tabouret libre.

« Qu'ez-j'vous sers l'étranger ? »

Face à moi, un énorme Bésalisk torse nu essuie des vers proclamés propres, mais donc l'opacité me laisse comprendre que ne se débarrasse jamais vraiment de cette poussière ambiante. Je hausse les épaules.

« Une bière, ça sera très bien pour commencer... »

La choppe apparaît aussitôt sur le comptoir. Sortie de nulle part. Son cul d'acier claque sans ménagement sur la pierre polie du zinc. Le colosse ouvre une large paume, me laissant d'autres choix que de payer, avant même d'avoir posé les lèvres sur la mousse excitée par le choc, qui dégouline avec une viscosité douteuse. Mais je ne suis pas du genre à faire la fine bouche. Au contraire. Il n'y a rien de mieux qu'une bière particulièrement dégueulasse pour vous fouetter l'esprit et vous remotiver à vous remettre en ordre de bataille. Une pensée philosophique accompagnée d'un geste bien plus terre à terre : je porte le récipient à mes lèvres... Et le regrette aussitôt... C'est comme si un Bantha venait de me chier dans la bouche. Non. Comme si un bantha venait de chier dans la fosse sceptique d'un char des sables dont les propriétaires Jawa auraient abusé la veille d'un plat épicé à base de fromage fondu... Oui. Quelque chose du genre. Même mon meilleur self-control ne m’empêche de grimacer. De l'autre coté du bar, le tenancier se marre. Sur qu'il file cette bière de merde aux nouvelles têtes pour leur souhaiter la bienvenue à sa façon. Une part de moi, la plus fière, refuse de jouer son jeu puéril. J'y retourne, et descends la choppe cul sec. Sans respirer ça pue moins la merde. Mais le goût refuse de quitter ma gorge, il me remonter par les narines, et me donne la nausée.

« Met moi un Bourbon... Et pas une bouteille de pisse hein... »

Une référence pour ceux qui l'auront. Je secoue la tête. La prophétie se réalise : l’âpreté chasse la langueur, et me donne le coup de fouet nécessaire pour remettre mes idées au clair...

Guilbert et son padawan officiaient dans l’espace Bothan comme représentant diplomatique de l’Ordre depuis plus d’une décennie avant... L'exode. Pourquoi réapparaître maintenant ? Cinq années sans donner le moindre signe de vie. Je pourchasse un vaisseau fantôme dont le propriétaire actuel n’a peut-être aucun lien avec l’ancien. L’urgence c’est d’en apprendre plus sur les invités d’Attila qui sont arrivée à bord de l'Anathème... S'ils n'ont rien à voir avec ceux que je recherche, l'enquête sera vite close.

Les minutes passent. Plus longues les unes que les autres. Devrais-je retourner au spatioport pour tenter d'entrer dans le vaisseau, malgré les menaces ? Ou m'introduire dans le palais du Hutt au risque de me retrouver avec toutes les autorités locales sur le dos ? Je... je laisse la Force influer en moi, j'écoute et observe au travers d'elle ce qui m'entoure. Des ivrognes accoudés au comptoir qui racontent leurs déboires. Des joueurs de Sabaac, plus au centre de la grand pièce, dont l'un ne cesse de tricher. La tension monte, l'un de ses adversaire commence à se douter de quelques choses. Je les ignore rapidement, et repousse ma conscience vers les alcôves les plus éloignées, les plus sombres, là ou se trament des deals bien plus audacieux. Un colosse de muscle à la peau sombre ne semble plus tenir en place. Il chuchote quelque chose, inlassablement, comme un mantra. La Force étire mes sens. Mon ouïe. Gladiateur ? Colère et frustration se dégage de cette silhouette charpentée. Un être sur le point d'exploser ? Je...

Un mot s'immisce dans mon oreilles, caresse mes tympants. Le Mot : « Jedi ». Murmuré sur faiblement que je doute un instant l'avoir réellement entendu. Ce ne peut être une coincidence. Je n'y crois plus depuis longtemps. Il a été prononcé par un jeune humain, à deux tables du colosse, où il raconte à des amis les exploits des jours précédents... Ils ont visiblement quelques crédits à débourser pour fêter quelque chose... Mon intuition piquée à vif, je me lève, pour me rapprocher d'eux... A part Guilbert, quelle est la probabilité qu'un autre Jedi se balade sur ce monde paumé ?!

Mais je perds aussitôt le fil de mes pensées. Les gonds de la porte-saloon agonisent de plus belle, malmenés par une force surhumaine. Mais cette fois, ce ne sont pas des ricanements qui accueillent la silhouette, mais un silence teinté de tension. Des dizaines de respirations coupées, hésitantes. Intrigué je relève de l'index le bord de mon chapeau conique... Et me fige. Maitre Adno. Je l'identifie sans l'ombre d'une hésitation. Le Héros de Bothawi : un Cathar immense dont la fourrure ébouriffée par la chaleur et la poussière décuple son aura charismatique, pour ne pas dire simplement : menaçante. Merde ! Je baisse le regard.

Nos chemins se sont déjà croisés plusieurs fois sur Ondéron. Nous avons également combattu ensemble contre la flotte Sith de l'espace Bothan. J'ignore s'il saurait me reconnaître... Mais je ne préfère pas jouer à ce jeu. Je tiens à ma couverture, être identifié comme un Jedi au milieu de la foule ne ferrait que me mettre des bâtons dans les roues, me fermer des portes, d'autant si le propriétaire de l'Anathème s'attend à être recherché ou poursuivi. Mais, d'un coté... Sa carrure et son réseau pourrait probablement nous ouvrir (ou défoncer) d'autres portes...

A l'instant même ou j'hésite, une soudain pression dans la Force m'arrache un frisson. Une émotion. Intense, brute. De la peur. Non. De la panique même. C'est le jeune homme qui parlait de Jedi qui en est la source. Hmm...

Alors que Maitre Adno s'initie aux breuvages locaux, je me glisse entre les tables. Avec une discrétion seulement connue des Sentinelles. Je me glisse entre les ivrognes et les gens de passages. Je les frôle à peine. A chaque pas, j'esquive les contours d'un plan audacieux pour forcer la souris à sortir de son trou...

Lorsque je passe à coté des joueurs de Sabaac, il me suffit d'un geste imperceptible pour que l'une des cartes dissimulées dans la manche du tricheur tombe au sol, sous le regard enfiévré de son adversaire soupçonneux. J'ai déjà fais deux pas lorsque l’engueulade éclate. Comme prévu, le jeune homme paniqué à la vue de Maitre Adno estime qu'il vient de trouver l'occasion idéale pour se tirer en douce. Sauf que non.

Il se lève, rapidement suivi par un compère. Je me glisse dans le dos de ce dernier. Un simple chuchotement. Mais imbriqué dans un carcan persuasif de Force pure.

« Le colosse là bas, il trouve que t'as une gueule de cul. »

La réaction est immédiate. Il vire du blanc au rouge. Colère soudaine, sourde, déraisonné car décuplée par mon influence... Il choppe son pote par l'épaule et l'attire vers la table du mastodonte. D'un ultime geste imperceptible, je déplace qu'une poignée de centimètres un tabouret au moment où l'ami furibond le dépasse. Ils se prennent les pieds dedans, basculent en avant... Et s’explosent contre la table de celui que je nommerai plus tard avec respect Maître Mora. Une chute sonore, rocambolesque, accompagnée de son chapelets de jurons, et de ses effets pyrotechniques de verre renversés et brisés au sol.

Et moi dans tout ça ?

Je recule simplement de quelques pas, dans l'ombre d'une alcôve, désireux de voir ce que je pourrais bien tirer du spectacle qui s'annonce : deux jeunes hommes suspects coincés entre un colosse hors de lui, et un Maitre Jedi qui ne peut ignorer la scène provoquée. L'expression « Être entre le marteau et l'enclume » n'aurait pu être mieux illustrée. Encore faudrait-il définir lequel des deux protagoniste tient plus du marteau ou de l'enclume... J'hésite encore.
Ses'kai Mora
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"Il faut toujours voir les choses du bon côté", lui répètent souvent des grosses molasses qui osaient pas porter leurs burnes dans des moments critiques. Hé bien pour appliquer leur philosophie de chiffe-molle à cet instant, le bon côté d'être sur dans un bar miteux, dans une cité pourrie, sur une planète de merde, c'est que les gens ont plus facilement tendance à prendre la mouche et répondre avec les poings.
Parce que le temps qu'il gueule, et que deux merdeux ne semblent répondre à son insulte, un deuxième conflit semblait vouloir éclater entre des joueurs de sabaac. Autant dire qu'avec un peu de chance, il aurait une belle bagarre générale. Ho, il n'y aurait aucune gloire à en tirer dans ce trou paumé, mais il s'en fichait. Il pouvait bien se permettre de péter quelques genoux juste pour le plaisir. Après tout, "le bon côté" dans le fait que l'Ordre Jedi ait disparu, c'est que plus personne ne viendrait lui dire d'un ton moralisateur "gneugneugneu c'est pas gentil d'être méchant" et lui n'aurait pas à faire semblant de presque écouter.
Par contre, le Thyrsian ne s'attendait pas à voir les deux glandus se ramasser tous seuls en plein dans sa table. Il dressa un sourcil circonspect, sans prêter attention au détail du public. Il se fichait bien de voir des petits et des grands observer avec curiosité ou lassitude la scène, qu'ils aillent tous se faire mettre, les poilus comme les chauves.(bravo la jeunesse, ça tient pas la picole)
"C'est pour ça que l'alcool devrait être réservé aux adultes, même chez ces Chutta de Sleemo Poy" railla-t-il avec mépris

Pour faire bonne figure, il confondit celle du malheureux anonyme avec un ballon et lui décocha un terrible coup de pied pendant qu'il se relevait, l'envoyant faire un petit vol suivi d'un atterrissage indélicat sur le dos. Face à cet acte de violence explicite - les empoignades et les chutes inappropriées ne comptant pas comme incivilités - le tavernier s'insurgea et le rappela à l'ordre.

" Eh ! Pad'ça ici mon gars, où ch'te sors par la peau du cul !"

"Ta gueule, gros lard ! s'enflamma le duelliste en le pointant d'un doigt très impoli T'as tellement creusé ton taudis dans le cul d'un bantha que j'suis sûr que tu lui racles encore les boyaux pour servir ta merde !"

Ayant complètement oublié la raison de sa présence ici, le Thyrsian tourna sur lui-même, les bras ouvert comme il aimait le faire dans les arènes pour inviter le public à l'écouter.

"Il se fout de vous ! Il vous sert de la pisse de petchuk en osant appeler ça de l'alcool ! Il laisse des tricheurs jouer au Sabaac pour que VOUS vous vous fassiez plumer !

En fait, il était plus ou moins convaincu que tous les joueurs de Sabaac étaient naturellement des tricheurs, et que ceux qui ne le faisaient pas étaient simplement des pigeons. Pas étonnant qu'il n'ait pas en très haute estime ce loisir qui n'impliquait - dans son texte de règle en tout cas - ni arme ni sang.

"Même ses putes sont une arnaque ! Elles videront même pas les bourses que vous voudriez et vous fileront quand même la chaude-pisse !"

Dans un coin, une femelle alien regarda nerveusement autour d'elle tandis que l'homme le plus proche s'en éloigna l'air de rien. Le patron qui était en train de se faire copieusement critiquer retroussa ses manches, prêt à mettre une raclée au fauteur de trouble à la peau noire. Ce n'était pas le premier client mécontent qu'il avait, et certainement pas le dernier qu'il balancerait dans un égout.
Sauf que Ses'Kai n'était pas n'importe quel client mécontent, et quitte à devoir improviser et se défouler, il attrapa le second pauvre gars qui s'était ramassé dans sa table et le souleva au-dessus de sa tête comme un rondin, ce qui ne manqua pas de le faire vertement protester.

"Révolutioooon !"

Et sur cette phrase qui lui semblait fort inspirée en dépit de son absence personnelle d'implication politique quelconque, il s'envoya un petit shoot de Force pour faire bonne figure afin d'augmenter sa puissance pour balancer de façon spectaculaire l'homme-projectile à travers la moitié de la salle, l'envoyant passer par-dessus le bar et s'éclater dans le mur derrière le barman, qui pour sa défense, fit une très belle esquive de client volant non-consentant.
Après tout, il s'était dit qu'il devait provoquer une réaction, et/ou trouver un moyen de financement alternatif. De son point de vue, se faire repérer par les locaux comme une brute aussi implacable qu'efficace pouvait être une bonne méthode pour se rapprocher d'une proie précieuse, ou à défaut, de gens qui pourraient l'aider à la chopper en échange de quelques genoux cassés. C'était gagnant-gagnant, sauf pour ceux qui serviraient de punching-ball mais leur existence était de toute façon négligeable.
Maintenant, restait à voir s'il était plus sage de chopper ceux qui allaient foutre le camp en supposant qu'ils auraient des infos juteuses sur quelque chose et craignaient le combat, ceux qui allaient au contraire s'illustrer en le challengeant dans le concours du cassage de bouches - il avait notamment un œil sur le Cathar au comptoir, qui avait l'air d'un pur frimeur, mais le fait qu'il lui dise quelque chose méritait de le faire sortir un peu du lot - ou tout simplement de défoncer absolument tout le monde et recommence dans le bar d'à côté. Ou d'en face. Une telle stratégie ne pouvait que finir par être efficace, pas vrai ?
Rork Adno
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Oh non, déjà ? On ne pouvait donc plus boire un verre tranquille sans que les choses dégénèrent directement ? Rork venait à peine de poser la patte dans la cantina, que déjà il y avait un bagarre de comptoir. Bon d'accord, il avait eu le temps de commander la bouteille et boire un verre mais ce n'était pas suffisant, surtout sur une planète comme celle-ci. La soif était le pire ennemi de tout le monde ici, mourir de soif était certainement la pire chose à vivre. Avec son opposé, mourir noyé. Et là on lui demandait de réagir à un bagarre, dans ces conditions là et alors qu'il était ici pour avoir des informations sur sa cible. Enfin cible, pas dans le sens habituel, là c'était plus des amis dans le besoin qu'il fallait que l'ancien Maître Jedi retrouve rapidement avant que d'autres, moins bien intentionnés, ne le retrouver lui et son padawan.

" Ooooh c'est pas vrai..."

Rork lâcha cette petite phrase avant de terminer son second verre. Là il y avait plusieurs solutions, soit le colosse ne prêtait pas attention à la bagarre et faisait signe au barman de lui trouver quelqu'un pour avoir des informations. Soit il balançait une vague de Force dans le tas pour voir ce qu'il pouvait bien se passer par la suite. Soit il tentait de calmer tout le monde le temps d'avoir ce qu'il était venu chercher et repartir. Après, une fois dehors, si la bagarre reprenait cela était complètement égal au Cathar. Dilemme, dilemme, quand tu nous tiens. Si Rork aimait bien les combats, les bagarres ce n'était pas trop son truc. Cela manquait cruellement d'enjeux, de frissons, d'aventure et surtout, à la fin, de gloire. Se faire un nom était à la fois simple et compliqué car il fallait être au bon endroit au bon moment. Sans pour autant finir avec un bras ou une jambe en moins. Et ça, ce n'était pas toujours garantie selon la situation dans laquelle on se retrouvait. Mais alors que le colosse à fourrure lâcha un léger grognement, il perçu deux auras, l'une était clairement Jedi et l'autre...l'autre était différente et à la fois familière. Celui qui possédait cette aura était certainement quelqu'un qui n'avait pas toujours été droit dans ses bottes. Rork pouvait sentir les Jedi Noirs, ou ancien devenu mercenaire, sans trop de difficulté. Allez savoir pourquoi, il les repéré assez vite, même dans un bain de foule. Ce Jedi Noir était visiblement pas du genre à faire dans le discret, il semblait adorer les affrontements.

Se retournant pour faire face à toute la salle, le félin posa d'abord ses yeux sur le Jedi, lui faisant un signe de la tête avec un léger sourire afin de le rassurer, sa couverture ne serait pas compromise à cause de lui. Puis il lui fit signe de le rejoindre. Quand ce dernier fut à bonne distance, Rork le reconnu, c'était Gary Kovani, un des Jedi qui était présent durant la Bataille de Bothawi. Une fois au comptoir, le colosse lui répliqua à mi-voix...

" Gary. Content de te revoir après tout ce temps. Je suppose que tu viens pour Guilbert et son padawan ?"

Guilbert et Rork avaient déjà plus d'une fois été missionné par le Conseil pour aider dans certains secteurs, principalement du côté de l'espace Bothan. A une époque il y avait beaucoup de Jedi mais malgré tout, dans certaines circonstances, à force d'aller et venir dans les mêmes endroits, il arrivait que des noms ressurgissent régulièrement. Et Gary, tout comme Guilbert, faisaient partie de ce lot de noms revenants souvent aux oreilles du Cathar. Surtout lorsqu'il fut promu Maître et membre du Conseil Jedi. Même si il tint ce rôle à peine plus d'une année.

" Tu sais qui est cet inconnu..." reprit l'ancien Maître Jedi en désignant celui qu'il ne connaissait pas encore sous le nom de Ses'kai. " Il semble un peu trop expressif pour un Jedi Noir."

Selon la réponse de Gary, le félin allait agir de telle ou telle façon mais avant ça, il devait être certain que ce n'était pas un membre d'une quelconque autre mission tordue auquel pouvait s'adonner le Conseil actuellement. Oui en cherchant des mercenaires pour retrouver un Jedi et son padawan, ce n'était clairement pas le meilleur choix, mais dans la désespoir, la plupart des gens pouvaient faire des choix totalement stupides. Et l'histoire avait assez souvent montré que le Conseil pouvait aller très loin dans sa bêtise, au point de finir éradiqué et pourchassé comme des hors-la-loi.
Gary Kovani
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Dans la vie, y’a un truc important. Y’en a pas qu’un seul, mais celui-là l’est particulièrement : être honnête avec soi-même. Les mensonges, les faux-semblants... Personnellement, je m’en fou. Pour arriver à ses fins, pour accomplir la mission, pour me dissimuler dans la foule, je suis le premier à user des plus fourbes subterfuges, à mentir comme un arracheur de crocs. Mais... Je suis toujours honnête avec moi-même. J’appelle ça la lucidité. Se mentir à soit même, c’est comme s’aveugler, se tromper, se précipiter sur un champ de mines en essayant de se convaincre que les carcasses éventrées sont des bouquets de fleurs...

Alors je vais être honnête… Bordel, je n’avais pas prévu, mais vraiment pas prévu, que la situation dégénère autant… Et aussi vite. J’ai clairement sous-estimé la capacité contre-offensive du colosse d’ébène. Totalement.

Je me jette au sol, roule sur le côté. Au même instant, une table s’écrase sur mon flanc. Je peste, le foie endolori. Mais je suis déjà sur pieds. Je bondis par-dessus une chaise. Un illustre inconnu tente de me refaire le portrait à grand coups de phalanges. Sans raison. Juste comme ça, histoire de participer aux festivités. J’esquive. Mon genou achève sa course dans son estomac, il se plie en deux, recrache sa bière dégueulasse par les narines. Il relève la tête, parce qu’il en veut encore, mais je suis déjà loin. J’use de mes talents pour me glisser le long des alcôves. La Force m’offre bien des dons : dont celui d’anticiper les trajectoires des choppes en acier inoxydable. Elles s’écrasent sur les cloisons en tonnant comme des gongs agonisants.

Le patron continue de gueuler. Mais ses éclats hargneux ne trouvent que l’écho de la bataille de Cantina qui bat son plein. Rapide coup d’œil par-dessus mon épaule. Quelques brutes plus épaisses que les autres tentent d’encercler l’inconnu aux pouvoirs à fleur de peau. Ma cible, le jeune homme que je voulais mettre sous pression par des moyens détournés, git au sol, non loin du bar, assommé par une vague de force qu’il a bouffé en pleine bouche. L’écume carmine bulle à la commissure de ses lèvres, tandis que ses globes oculaires roulent de côté. Je peux sentir son énergie vitale battre sous sa poitrine. Le coup l’a mis KO. Un KO technique duquel il ne reviendra pas avant de longues minutes. Intérieurement je peste. Il va me falloir le sortir de là…

Dans le feu de l’action, mon chapeau conique à larges bords s’est fait la malle. La cordelle a lâché, il traine éventré entre deux pugilistes éméchés. Je me redresse… Et aussitôt mon regard est happé par l’imposante silhouette du Cathar, toujours accoudé au bar. Il m’observe… Et m’adresse un signe discret. Enfin discret du point de vue d’un guerrier de sa stature. Je soupire. Les jeux sont faits, il ne faut lutter contre le Destin, marionnette de la Force sont les voies sont impénétrables.

Je me glisse à son coté. Le tenancier a sorti un fusil laser et menace de tirer dans la foule. Evidemment personne ne l’écoute… Mais cette démonstration de force inutile a au moins pour effet de créer un « bulle » plus calme dans une rayon de quelques mètres autour de lui. Les badauds sans histoires ont déjà fui les lieux. Seuls restent les durs à cuir qui trouvent en ces bastons un défouloir bienvenu. J’imagine que la vie sur ce monde pourri n’a rien de facile, un peu d’action décrasse les muscles et les esprits engourdis par la poussière et la chaleur. Ainsi… Nonchalamment, je pose mon séant sur le tabouret renversé que je viens de redresser. Maitre Adno est deux fois plus large que moi. Son immense ombre me dévore. Il chuchote. Le vacarme ambiant massacre les syllabes à peine échappées de ses lèvres félines. Mais mon audition améliorée les capte sans difficulté. Je hoche du chef.

« Oui. »

Est-ce que j’ai déjà dit que je n’étais pas du genre causant ? En vérité, tout dépend de la situation, du moment, de mon humeur. Là, tout de suite, maintenant, je n’estime pas nécessaire de m’éparpiller en détails. Je désigne d’un geste du menton le jeune homme avachi au sol, juste à mes pieds. Oui, je n’ai pas choisi cette place au comptoir par hasard. Je le garde à l’œil.

« Lui il fait quelque chose. »

Humain. Il doit avoir la vingtaine, pas beaucoup plus. Cheveux rasés très courts. Sombres. Son visage porte encore des traits juvéniles bien que l’environnement inhospitalier ait buriné de profondes rides sur son front et autour de ses yeux. Il est fringué à la mode du coin. Vêtements longs qui protègent des rayons ardent de l’astre diurne, mais assez léger pour ne pas mourir étouffé dessous. Sa cuisse gauche porte un holster. La poignée du Blaster qui en dépasse me parait bien trop neuve pour me faire croire à un fou de la gâchette. Comme ça, vu d’ici, il me fait plutôt l’impression d’un jeune qui tente de faire ses preuves dans un monde brutal… Et qui s’est retrouvé, de mon point de vue, au mauvais endroit au mauvais moment… Enfin, c’est ce que j’imagine : j’aurais mes réponses quand il sortira de sa torpeur. En attendant, je réponds à Maitre Adno.

« Inconnu au bataillon. Mais si je pouvais avoir un échantillon de sang, je pourrais demander à la database du temple s’il est répertorié chez nous. »

J’observe le « Jedi Noir » d’un œil critique. Celui du détective qui déchiffre chaque détail et recoupe les informations collectées. Je me méfie des outsiders. Pour autant, aucun picotement sur ma nuque n’annonce un mauvais pressentiment.

« On dirait qu’il s’est perdu dans le coin. Il a sauté sur la première occasion pour passer ses nerfs sur les locaux… »

Je baisse une nouvelle fois les yeux sur sa victime. La vague de Force a été violente, mais je suis convaincu qu’il s’est retenu : il aurait pu le tuer sur le coup sans difficultés. Je le sens.

« Il n’a tué personne pour le moment. Du moins pas volontairement… Il… »

« C’EST MON DERNIER AVERTISSEMENT ! APRES JE TIRE DANS LE TAS !!! »

Je déteste me faire couper la parole. Je lance un regard assassin au patron. Je peux lire sur son visage une rage à la frontière de la folie meurtrière. Aucun doute, il va passer à l’acte. Je me redresse, me penche vers lui. Il sursaute et recule pour me poser le canon de son fusil sur le front… Mais c’est déjà trop tard.

« La journée a été harassante, tu es fatigué. Tu devrais aller te reposer dans l’arrière-salle. »
« La journée a été harassant… je suis fatigué… Je vais aller me reposer dans l’arrière-salle… »


Son regard change du tout au tout. La colère cède place à une profonde lassitude. Il dévisage le vide, comme un zombie décérébré. Machinalement, il pose son fusil sur le comptoir et disparait en titubant derrière une lourde porte qui grince en s’ouvrant.

« Bon… J’en étais où… »

Pendant ce temps, le chaos est retombé. Les plus agités gisent au sol, dans leur propre sang, et celui de leurs voisins. Il ne reste sur pieds que des bagarreurs aguerris, les plus dangereux, ceux qui ont VRAIMENT envie de casser des gueules pour le plaisir.

« Je ne crois pas qu’il soit une réelle menace. Il pourrait même nous aider pour… »

Au même instant, les portes saloon claquent sans ménagement. Un groupe d’hommes entre en rangs serrés, la mine patibulaire, blaster en mains. Le plus trapu du groupe beugle :

« Levez tous les mains bien en évidence ! »

Maréchaussée où manges-merdes opportunistes ? La réponse ne se fait pas attendre.

« Les rixes sont interdites, par décret de son obésité Atilla le Hutt ! Vous êtes tous en état d’arrestation ! »

Pas un seul porte le même uniforme. Il faut croire qu’Atilla préfère payer des mercenaires en guise de milice plutôt que de se doter d’une réelle force de maintien de l’Ordre. C’est probablement plus facile de gérer ceux que l’on paye à prix d’or pour exécuter les ordres sans poser de questions.

« Vous allez nous suivre sans faire d’histoires, sinon… »

Tous mes muscles se raidissent. Les phrases qui finissent par sinon annoncent le plus souvent un drame imminent.

« Sinon quoi ?! »

Un gros Twi’lek hideux, dont les dernières canines viennent de sauter, ose poser la question fatidique. La seconde suivante, il est fauché en pleine tête par un rayon d’énergie pure. Il s’effondre lourdement, tandis que l’air s’emplit de relents de grillades qui m’ouvre l’appétit bien malgré moi. Le chef des miliciens souffle sur le canon de son blaster encore fumant.

« D’autres questions ? »

Je connais déjà la suite. Je glisse à l’oreille poilue du Cathar en lui désignant de nouveau celui qui git à mes pieds.

« Ce gars est ma seule piste pour retrouver Guilbert. Faut qu’on le sorte d’ici… Pour l’interroger. »

Ultime œillade en direction du Jedi Mercenaire. Inutile de recourir à mes dons de divination pour présager de la suite des évènements. Il n’a pas une tête à se rendre aussi facilement… Surtout face à une autorité aveugle qui tire et bute sans sommations ceux qui osent montrer le moindre signe de résistance.

« Ça va barder... »

Ma poigne se referme discrètement sur le fusil blaster oublié sur le comptoir. Yeux mi-clos, je puise dans la Force. Son énergie invisible coule dans mes veines… Je suis paré à bondir derrière le bar pour riposter au déluge de feu. Dans d’autres circonstance, peut-être que j’aurais tenté de calmer le jeu… Mais ils sont trop nombreux, et ils n’hésiteront pas à me canarder si j’ouvre la bouche.
Ses'kai Mora
Ses'kai Mora
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Des fois, la vie est incertaine. Des événements ne prennent tout leur sens que des années, parfois des décennies plus tard. Les penseurs ne cessent de trouver des luttes de morales ou de fatalités pour essayer de comprendre ou se résigner face aux aléas et aux mystères du destin et de la Force. MAIS ! Dans cet océan d'incompréhensions et de doutes, il y a certaines choses qui sont fiables, sûres, indiscutables.
Comme par exemple le fait que Ses'Kai soit l'un des pires enquêteurs de la galaxie. Et un bâtard sacrément coriace. Lorsqu'on est né pour le combat, qu'on a grandi en tuant, qu'on a été entraîné pour lutter dans les pires circonstances possibles, qu'on adore ça, qu'on a probablement pas un grain mais carrément toute la plage, ET la Force pour filer un coup de main, on a moyen de venir un véritable monstre ayant l'air impossible à tomber.
Car avant tout, le Thyrsian était un duelliste. Un combattant d'arène, un virtuose sanguinaire de l'arène. Une mêlée générale dans une catina qui pue, et le tout à coup de tatane et coups de boule, c'est pas exactement son domaine d'expertise. Et puis, il n'était pas là pour faire l'étal de ses talents ou de sa fureur légendaire. Il n'avait pas besoin de se donner à fond, juste d'agir, réagir, et casser des dents. C'était amusant après tout, et plus intéressant que rester assis sur un tabouret en buvant un truc qui mérite pas le moindre nom, pas même celui de jus de chaussette fermenté. Qu'il s'agisse du jus ou des chaussettes d'ailleurs.

Tout ça pour dire, que dans cette baston qui devenait encore plus confuse qu'il ne le pensait - faut dire qu'il pensait pas à grand chose, mais les gens avaient quand même l'air de sauter sur l'occasion pour s'amuser aussi - il ramassa pas mal de coups. Des châtaignes perdues qui lui étaient pas destinées, des marrons lancés au hasard qui finirent pour sa pomme, des tartes offertes par des habitués du n'importe quoi... La plupart des gens auraient fini avec une migraine incroyable, voire dans les pommes, à force. Il y avait même des choppes qui volaient, et l'une se tordit même contre sa trogne et le fit saigner du front. Sauf que ça n'allait pas arrêter un taré de sa trempe.
Il avait connu la morsure des lames les plus viles comme des plus nobles, encaissé des tirs de blasters, surmonté la fureur des sabre-laser et pris des building sur la couenne. Il avait même survécu à des crash orbitaux ou des explosions dignes des films les plus tape-à-l’œil. Une petite rixe n'allait pas le mettre à terre.
Surtout que, comme un vrai fumier, Ses'Kai ne se privait pas puiser dans l'Amélioration de capacités pour se rendre un peu plus fort, plus résistant, plus rapide. Il faut bien avouer qu'il utilisait ce pouvoir presque aussi naturellement qu'il respirait. Il s'en servait pour se déplacer, sauter, frapper, s'entraîner, se battre ou juste parce qu'il trouvait rien de mieux à faire.
Contrairement aux autres Jedis, le Thyrsian avait toujours considéré absurde la modération. "Je possède ce pouvoir, pourquoi je m'empêcherais moi-même de m'en servir ?" disait-il depuis les premiers jours. La Force lui confiait sa puissance, alors il l'exploitait librement, à la moindre occasion. Aucun tabou, aucune restriction, aucun interdit. S'il n'était pas un très bon "sorcier", le duelliste excellait en revanche redoutablement dans les rares pouvoirs qu'il maîtrisait vraiment.

Tout ça pour dire que malgré beaucoup d'efforts, le Thyrsian continuait à tenir debout et retourner des taquets, jusqu'à ce que le tavernier sorte son fusil et braille. Là, il y eut un instant de flottement, qui gonfla d'adrénaline les plus chauds de la bagarre qui retourna rapidement à la mêlée générale lorsque le proprio' sembla subitement abandonner tout espoir de calmer le jeu. Mais Ses'Kai lui, avait remarqué quelque chose. Quelque chose d'anormal, de surnaturel. De familier. Ce type, là, à côté, avec le chapeau éclaté. Il avait fait un truc. Comme il ne s'y attendait pas, le duelliste n'avait pas tout de suite reconnu... mais le changement soudain d'attitude du patron ne laissait pas de place au doute, pour qui connaissait le truc, et pouvait le faire.
Une Persuasion de Force.
Un Jedi.
Oui, ça devait être un Jedi car les Siths étaient de toute façon trop con pour faire dans la subtilité. Alors ça devait être un Jedi.
Cette révélation le figea sur place. La surprise, tout d'abord. Même à la "belle époque", rencontrer par le plus grand des hasards un confrère sur une planète civilisée était un événement particulier. Alors en trouver un, dans cette cantina miteuse sur cette planète de merde alors que la galaxie entière en avait après leur cul, c'était une improbabilité incroyable. Mais il y avait aussi...

Une grosse salade de phalange le sortit subitement de ses pensées en s'écrasant dans sa figure, le faisant tituber, et déclenchant une poussée de rage soudaine. Avec un rugissement sauvage, le Thyrsian balança un uppercut si violent qu'il souleva l'impertinent du sol et l'envoya se cogner contre le plafond. Dans un accès de violence débridée, il attrapa le malheureux par les jambes et le fit tournoyer comme une batte autour de lui pour se ménager de la place, avant de le balancer au hasard de la mêlée.
Mais un certain calme se faisant autour de lui, il put reprendre ses esprits et reporter toute son attention sur le Jedi. Il était, à cet instant précis, l'individu le plus important de toute la planète à ses yeux, et en tant que tel, méritait son focus plein et entier, pour toutes les meilleures et pires raisons qu'on pouvait trouver.
Les yeux rivés sur l'individu qui avait eu le malheur de se faire remarquer, pourtant avec une si grande discrétion que probablement peu de non-sensitifs auraient pu le relever, et encore, Ses'Kai était confus. Il n'aimait pas les situations délicates, les émotions complexes, ou les intrigues alambiquées. Lui, préférait foncer dans le tas, tout défoncer par la force brute, et voir ce qui ressortait après, pour l'achever à coup de botte. Ou de sabre. Ou les deux.
Sauf que découvrir qu'un autre Jedi avait survécu était aussi inattendu que déroutant.
Un de ses camarades de l'Ordre avait survécu ! Ce même Ordre qui l'avait conspué et pris de haut pour finalement s'effondrer sur sa propre incompétence. Un autre sensitif, apte avec un sabre-laser, donc un partenaire idéal pour cette enquête sur laquelle il galérait car il était hors de son propre domaine... ou alors, la proie la plus intéressante de ce monde pourri.
Des dizaines de voix s'exclamaient en même temps dans son crâne. Il voulait aller le voir, prendre des nouvelles des autres Jedis, de son maître, le défier, souligner qu'il avait eu raison, s'associer à lui pour sa mission, repartir avec lui pour relever l'Ordre, le tuer ici et maintenant pour achever de détruire les Jedis.
Les Jedis t'ont abandonné. Faisait une voix, plus douce, et pourtant très claire dans le tumulte de ses pensées. Ils t'ont toujours rejeté, méprisé. Ils ont toujours eu tort. Ils sont tombés face à la République, alors que tu as survécu à Dromund Kaas.
Les Jedis ne sont pas la perfection disait de l'autre côté une autre voix, ferme, mais paisible. La Force leur accorde des privilèges, c'est à eux de l'honorer en retour en en faisant bon usage. Ils consacrent leur vie à surmonter l'éphémérité de leur corps mortel.
Ils craignaient leurs propres pouvoirs au point de se laisser tuer par les Républicains. Ils ont lutté contre tous les fléaux de la galaxie, avec leur seule volonté pour meilleure arme, pendant des siècles. Ils avaient trop peur pour se battre Ils comprenaient que la puissance seule ne suffit pas Ils étaient lâches Ils étaient sages

Le maelström des voix qui l'assourdissaient lui donnèrent le vertige durant quelques secondes. Un vertige horrible, du genre de ceux qui vous tordent les tripes et vous donne l'impression que votre bras droit veut étrangler votre bras gauche, qui veut arracher la jambe gauche pour taper sur la droite, qui veut juste glander. Mais petit à petit, un écho commença à se distinguer, se répéter, au milieu du tumulte.
Ils avaient peur. Le côté Obscur... Ils avaient peur du côté Obscur. Tu peux le maîtriser. Tu savais l'utiliser, et c'est pour ça que tu as survécu. Tu iras loin, car tu es différent. Montre leur ce dont tu es capable Ton vrai pouvoir se révélera en temps voulu Montre leur ta vraie puissance Montre leur ce dont tu es capable Tue les Jedis Surpasse les Jedis Tue Surpasse
Jedi. Jedi, JediJediJediJedi

La confusion le submergea. Et après, l'obsession écrasa la confusion. Au milieu des voix, de ses pensées, du chaos de la Cantina, Ses'Kai n'était sûr que de deux choses. Il était fort, et il y avait un autre Jedi ici. Il était certain de sa propre puissance, et faisait face à une situation complexe et délicate.
Or, face à l'inconnu, ou l'imprévu, ou l'ennui, ou quoique ce soit en fait, la réponse de secours du Thyrsian était toujours la même. La violence. S'il ne savait pas comment franchir un obstacle, la Force et un sabre-laser lui offriraient un chemin. Pareil dans les missions diplomatiques, les assassinats, face aux doutes, face à l'ennemi.
Il avait survécu grâce à sa puissance et son instinct de guerrier, de tueur. Même la Force l'encourageait à suivre sa rage infinie e ses pulsions les plus spontanées, sans quoi il serait sûrement déjà mort depuis longtemps. L'Univers récompensait sa brutalité, son goût de la guerre, du duel.
Le regard braqué droit sur le discret Jedi, entre la confusion et la soif de sang la plus absurde, la main du duelliste se glissa lentement dans la sacoche qui dissimulait son sabre-laser alors que des nuages noirs finissaient de masquer ses pensées. Il n'avait qu'à céder, s'abandonner à sa propre fureur, et il pourrait enfin démontrer à un "confrère" ce qui était le plus efficace, le plus concret, réaliste, entre une philosophie abstraite, et la puissance brute.

Le son caractéristique d'un tir de blaster le rappela violemment à la réalité, et il cligna plusieurs fois des yeux dans le vide avant de retrouver ses esprits, comme quelqu'un qui émerge soudainement d'un rêve étrange au milieu de la nuit, mais en pleine journée. Il découvrit, les yeux ronds, une troupe venue ramener l'ordre dans la cantina, et en regardant un peu autour, un cadavre de Twi'lek à qui il manquait un bout de tête.
Pour une sinistre raison, cette vue fit éclater de rire le Thyrsian. Même lui ne comprenait pas ce qu'il y avait de si drôle, mais quelque chose dans la position du corps, du trou cramé dans sa gueule, ou juste du débile disgracieux et inutile qui s'est fait fumer comme un jambon pendant qu'il regardait même pas, avait le don de le faire soudainement rire.
Le milicien en revanche, trouva ça beaucoup moins drôle et braqua le chasseur de prime pour lui faire subir le même sort. Son blaster aboya une fois de plus, mais l'ex-Jedi esquiva d'un simple mouvement, en commençant doucement à se calmer. Surpris par cette esquive, à la limite de l'anomalie, le sergent - ou du moins, aimait-il ce rôle - fit comme s'il s'agissait d'un tir de sommation et garda son calme.

"J'peux savoir ce qui te fait rire ?"

Étouffant les derniers ricanements alors qu'il regardait le corps sans vie du Twi'lek, Ses'Kai tourna ensuite un regard noir, avec un rictus méprisant au coin des lèvres, vers le tireur.

"Tes têtes." répondit le duelliste avec un calme cynique.

Le milicien fronça les sourcils, se disant qu'il était tombé sur un vrai jambon complètement torché, tandis que le Thyrsian fixait à nouveau son "collègue" d'une autre vie qui avait l'air de se préparer au pire. Sa réaction l'amusa, et l'étonna un peu, car il ne s'attendait pas à ce qu'un Jedi, ou qui ait pu l'être, soit aussi conscient d'un danger imminent.
Le canon d'un blaster vint appuyer contre sa tempe. Visiblement, le sergent n'avait pas vraiment apprécié de se faire rire au nez puis ignorer après sa démonstration et estimait qu'une seconde exécution, peut-être plus théâtralisée, serait de bon aloi pour faire comprendre qui commande.

"Dis donc, trouduc' "

Pas terrible comme épitaphe se dit Ses'Kai, sans réussir à se débarrasser de son rictus, avant d'amorcer son geste.
La vitesse, c'est une arme redoutable. Elle permet de toucher une cible, et d'esquiver sa riposte. Peu importe la force de l'adversaire, peu importe la dangerosité de son arme, peu importe les talents qu'il a pu développer, si on frappe assez vite, et qu'on s'écarte avec encore plus de vélocité, tous les efforts de ses adversaires peuvent être vains. Beaucoup d'ennemis avaient commis la terrible erreur de sous-estimer celle du Thyrsian, même lorsqu'il ne se donnait pas la peine de l'améliorer par la Force. C'était l'un des talents qui le rendait si mortel à l'épée, et il en était conscient. Tant et si bien qu'il aimait - beaucoup - à penser qu'il était le Jedi le plus rapide de sa génération. C'était probablement faux, mais la question pouvait sûrement se poser.
Le sergent n'en aurait pas douté en tout cas, lorsqu'il sentit son visage glisser dans deux sens différents, avant d'entendre le bruit que fit la vibrolame du duelliste lorsqu'elle passa à travers sa tête. Son corps soudainement à l'agonie fut secouée d'un spasme incohérent, et le blaster tira dans le mur, sans qu'il ne parvienne à comprendre comment le mercenaire qui jugeait la mort qu'il lui apportait avec mépris avait eu le temps de saisir, tirer, frapper, en moins de temps qu'il ne lui en fallait pour appuyer sur la gâchette de son blaster.

Écartant les bras dans une posture frimeuse face au reste de l'escouade médusée, alors que leur "dirigeant" tombait comme une planche avec une tête en deux morceaux, Ses'Kai ne se priva pas de saisir l'opportunité, comme il l'avait appris longtemps avant de même savoir lire, pour les railler.

"Je crois que Sa viscosité Attila le Hutt, va avoir besoin d'un nouvel officier."

Après que les bouches bées se fermèrent, que les esprits se recentrèrent sur leur objectif, leur paye, ou juste sur la menace que représentait un chasseur de prime complètement dingue qui vient de sabrer l'air de rien leur supérieur, les fusils se levèrent vers le Thrysian, qui était bien loin de s'en affoler. On aurait pu le braquer avec des pistolets à eau, il aurait affiché la même insolence.

"Un volontaire ?"

Et puis, un sentiment étrange le saisit aux tripes. Un avertissement. Soudain, violent, redoutable. Du genre de ceux que ton instinct aiguisé ou la Force consternée t'envoie pour te dire "bouges, tu vas crever, pauv'guignol de merde". Pourtant, il ne craignait pas les blasters. Le Djem-So, son style de prédilection, était le dérivé - l'évolution ! - violent  de la Forme III qui avait littéralement été conçue pour contrer les blasters. Même si ce n'était pas son intention, ça faisait de lui une des plus grandes menaces des tireurs, au sein des Jedis. Il tuait avec tant de négligence, qu'il ne prenait même pas la peine de savoir qui mourait de quoi sous ses coups.
Alors pourquoi cette alerte soudaine et viscérale ?
L'absence d'un bruit caractéristique, d'une sensation très particulière, le fit regarder son arme.

"Ah oui, merde." lâcha-t-il avant que les blasters aboient.

Il se jeta de côté, en ayant du mal à croire à quel point il pouvait être stupide parfois. Avant de s'amuser de plus belle, en se disant que ça lui ferait un peu de challenge pour une fois de laisser son sabre-laser au placard.
Et puis ça lui éviterait de dévier malencontreusement un tir vers son collègue, car il avait la très ferme intention d'aller lui toucher deux mots une fois que le calme serait retombé.
Rork Adno
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Encore qui ne savait pas tenir sa langue et sa lame. Rork en avait croisé des dizaines comme lui. Et il en avait remis à leur place un nombre aussi important. A croire qu'il fallait obligatoirement que le colosse Cathar soit dans le coin lorsque des p'tis rigolos se sentent pousser des ailes. Pour ne pas dire autre chose. Quoiqu'il en soit, et sûrement en grande partie par réflexe, l'ancien usa de la Force afin de créer un bouclier autour de lui. Ce dernier savait très bien que dans des moments comme ceux-là, les choppes avaient tendance à partir dans tous les sens, pareil pour les tables. Voir carrément des gens. Mais grâce à la Force, et à la maitrise dont faisait preuve le félin, il y avait peu de choses qui pouvaient l'atteindre dans ces de beuveries instables.

Sans être plus perturbé que cela, Rork continua de boire, écoutant ce que le jeune Gary avait à en dire sur cette affaire. Enfin surtout sur cette tête brûlée qui semblait vouloir être aussi discret qu'un bantha dans un magasin d'antiquités. Gary ne semblait pas connaitre le jeune perturbateur non plus, ce qui était problématique, il fallait bien l'avouer. Mais l'idée de lui prendre une goutte de sang fit tilter le Cathar. Effectivement, la base de données des Jedi était relativement conséquente, il était très difficile de ne pas avoir un nom grâce à celle-ci. A l'époque où Rork était encore dans le Conseil Jedi, il l'utilisait assez souvent pour avoir un maximum d'informations. Aujourd'hui il en était réduit à venir sur des planètes comme Aduba. Triste réalité d'une galaxie changeante. Elle glissait le long du ruisseau telle une rivière, elle était souvent déviée par des rochers sans scrupules, rocher appelait Sith. Si Gary pouvait juste l'approcher, cela ne lui demanderait qu'une seconde pour le piquer et les deux Jedi seraient fixés...

Bon, Rork allait devoir s'y coller si il comprenait bien. Encore une fois, une démonstration de puissance allait devoir calmer les ardeurs d'un jeunot. Faisant un léger demi-tour sur sa chaise et faisant face à la salle en désordre, le colosse s'apprêtait à balancer une violence vague de Force afin de calmer tout le monde. Mais il n'eut pas le temps, des hommes, sûrement des mercenaires au service de ce bon vieux Attila le Hutt, firent leur apparition. Un Twi'lek trouva bien vite la mort en posant la mauvaise question au mauvais moment. Lâchant un long soupire, le Maître Jedi devenu chasseur de primes se redressa de la chaise, fixant les hommes qui venaient d'entrer. Un léger grondement s'échappa d'entre les crocs du félin. Puis d'un coup, une lourde perturbation dans la Force se produisit. Rork laissait sa puissance envahir les lieux, écrasant les volontés et les ambitions de tous ceux incapable de maîtriser la Force. Pour Gary et l'inconnu, les choses seraient légèrement différentes. Ce n'était pas quelque chose de courant de sentir une puissance pareille, la dernière fois que l'ancien avait fait appel à un degré aussi élevé de la Force, ce fut lorsqu'il affronta un Seigneur Sith. Si Yoda ou Mace Windu avait été de ce monde à ce moment là, même eux auraient eu de terrible maux de tête en sentant la puissance de Rork. Une aura rouge et noir entoura le Cathar, les yeux de ce dernier se remplirent d'une vague d'énergie sans précédent. Comme si la Mort elle-même avertissait toutes les âmes ici présentes. Et d'une voix d'outre-tombe, puissante et roque, le guerrier rétorqua :

" IL SUFFIT !" libérant un rugissement que seuls les Cathars pouvaient lancer.

Les hommes d'Attila reconnurent très vite qui était responsable de cela. Rork étant connu comme le loup blanc ici, où plutôt le tigre blanc, ces derniers se calmèrent instantanément. Bégayant quelques mots incompréhensibles de peur que le colosse ne les coupe en deux comme il l'avait déjà fait auparavant avec d'autres mercenaires qui avaient eu la mauvaise idée de faire du zèle avec Rork. Progressivement, l'ancien Maître calma son aura, revenant à la normale après une dizaines de secondes.

" M-m-m-monsieur Rork, j-je-je suis désolé, je ne vous avez pas reconnu de dos !" s'exclama le chef de la troupe de mercenaires.

" Toi, embarque ce corps, je ne veux plus le voir. Dites à Attila que j'arrive le voir, j'ai besoin de renseignements qu'il est le seul à pouvoir me fournir, est-ce claire ?

- O-oui monsieur !" reprit le concerné avant de donner l'ordre de ramasser le Twi'lek qu'il venait d'abattre.

Puis l'attention du Cathar se porta sur le jeune qui venait de provoquer tout se désordre. Fixant Ses'kai avec insistance, le félin finit par le désigner de son gros doigt griffu, avant de reprendre d'une voix tout aussi roque qu'il y avait deux minutes.

" Toi." fit le chasseur avant de faire signe du doigt à son interlocuteur de venir jusqu'à lui. " Viens voir ici." termina Rork dans un léger grognement d'impatience.

Les choses n'étaient pas faites pour aider, les deux cibles recherchées, Guilbert et son padawan, n'avaient pas des semaines devant eux et mettre trop de temps pour régler les détails risquaient de faire perdre la trace des cibles à Rork et Gary. Ce jeune devait faire un choix rapidement si il ne voulait pas être laissé sur le côté. Hors de question de prendre des risques inutiles vis-à-vis de Guilbert et de son padawan, ils étaient déjà bien assez en fuite comme ça. Tellement de monde voulait les avoir avant l'Ordre Jedi, il fallait agir vite. D'autant qu'il y avait fort à parier que le monde à la recherche des deux principaux concernés devait être assez conséquent. Vu toutes les informations dont disposait Guilbert et son padawan, c'était une véritable mine d'or pour tous ceux qui voulaient vendre ses renseignements au plus offrant. Avec en tête de liste les Sith évidemment. Donc bien loin des poivrots d'un cantina comme ici. Et ce jeune allait devoir comprendre très vite à qui il avait affaire si il ne voulait pas mourir prématurément en pourchassant deux innocents. Rork n'avait encore aucune information sur les évènements mais ce dernier savait très bien que des Sith, des Jedi Noirs et des chasseurs beaucoup moins scrupuleux que Rork, allaient apprendre très vite que des Jedi étaient en fuite. La prime sur eux était très importante. Les pires salopards de la galaxie risquaient de se pointer pour réclamer leur du...
Gary Kovani
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Une maxime me revient en mémoire, surgissant des tréfonds obscurs de mon hippocampe. Une phrase. Simple, mais porteuse d’un savoir universel. Le visage de celui qui l’a prononcé, un vieux Maitre Jedi, s’est évaporé depuis des décennies. Même en fermant les yeux, je ne suis en mesure d’imaginer mieux qu’une vague silhouette anonyme. Pourtant, les mots, eux, tonnent encore :

A chien qui grogne, on ne donne pas la main.

Un fragment de sagesse intemporel qui s’applique également aux espèces félines… Alors, lorsqu’un sourd feulement quitte la gorge de mon comparse, je me précipite aussitôt de l’autre côté du bar, pour me mettre à couvert. Dans l’élan, j’empoigne le jeune homme et le fusil blaster. J’atterris lourdement, dos contre les cadavres de bouteilles empilées qui attendent d’être évacuées. Une fraction de seconde pendant laquelle, j’en suis alors convaincu, le Grand Maitre Adno va faire gouter de son sabre aux impudents : le Cathar n’a jamais été réputé magnanime.

Mais au lieu d’un assaut physique, c’est une chape de plomb immatérielle qui s’abat sur mes épaules. Le vieux Cathar rayonne soudainement dans la Force. Sa présence s’intensifie au point d’en devenir douloureuse. Mon pouls frappe à mes tempes, mon dos se crispe, je frissonne. Même ceux qui ignorent les arcanes de la Force subissent de plein fouet les effets de son aura débridée. Une sensation de malaise inexplicable qui sape tout volonté d’agir.

Quel putain de frimeur.

Bien évidemment, je garde cette pensée ancrée bien au fond. Loin de moi l’idée de provoquer le colosse de muscles et de poils. A chat qui feule, on ne donne pas sa langue, hein ! L’orgueilleuse démonstration, pour autant, n’est pas sans effet. Bien au contraire. Les mercenaires aux ordres de notre illustre hôte Attila le Hutt, se ravisent en considérant leur adversaire. Ils baissent leurs armes, remballent leurs velléités… Jusqu’à s’excuser. Je lève un sourcil interrogateur. Qu’a bien pu faire Maitre Adno dans la région pour susciter une telle crainte. Non : je ne préfère pas savoir. Les vagues rumeurs me suffisent : celle qui parlent d’un justicier armé d’un sabre couleur d’or. J’hésite. Dois-je me relever ou bien rester sous les écrans radar ? Et puis merde, aux chiottes ma couverture et la discrétion. Ma main à couper que Attila est déjà au courant de notre présence avec tout ce tapage. Espérons seulement que notre ami commun, Guibert, n’en pâtisse pas.

Alors que le menace d’une fusillade façon vieux holo-western disparait définitivement, je me redresse précautionneusement. A mes pieds, mon otage, lui aussi malmené par l’aura du Cathar, sort de sa léthargie. Il se masse le crâne, paralysé par le choc et l’incompréhension. Je me détourne de lui. Inutile de garder un œil dessus pour le moment, il n’ira pas bien loin… Et je préfère le laisser recouvrer ses esprits avant de l’interroger. Il risquerait de ne pas mesurer la gravité de la situation dans laquelle il s’est fourré jusqu’aux cou. Je pivote, pour faire face à la salle pratiquement vide. Les rares combattants encore présents se sont enfuis dès que Rork les a libérés de son étreinte invisible. Les Mercenaires, eux, disparaissent rapidement, emportant avec eux le cadavre de leur victime. Le silence d’abat. Lourde, épais. Il ne manquerait plus qu’une sinistre musique jouée à l’harmonica pour parfaire ce tableau surréaliste : celui d’un tigre colossal face à un hercule d’ébène, qui se fusillent du regard… Et je n’ai ni besoin de lire dans les pensées, ni besoin d’une boule de cristal pour deviner que notre troisième larron n’obtempérera pas aux ordres du Maitre aussi facilement. Alors, pressentent une funeste issue, autant pour nous que pour l’enquête, j’interviens.

Je pose ma main gantée sur l’épaule du Cathar. Je suis crispé, tendu. Je m’attends à manger une mandale réflexe. Aussi, par anticipation, je laisse la Force refluer vers mon acolyte, pour l’apaiser et donner plus de poids à mes propos :

« Maitre Adno, s’il vous plait. Vous avez géré la menace. Guilbert compte sur nous, nous devons nous hâter. Nous n’avons nul besoin de provoquer cet individu. »

Mon regard se pose sur le trapu Thyrsian. Je plisse des yeux. Maintenant que je l’observe plus attentivement, le sentiment de l’avoir déjà vu quelque part me noue les tripes. Un pressentiment plus qu’une certitude oui. Mais j’ai appris, au cours de mes enquêtes, à écouter mes intuitions. Un souvenir fuse alors. Eparse, flou, imprécis. Son nom m’échappe… Mais pas le contexte. Oui. Je lâche alors, en un souffle, soudain convaincu :

« Il était des nôtres… »

Et je continue, assez fort pour être audible :

« C’est le Chevalier Noir ! »

Un sobriquet irrespectueux donné à un Jedi particulièrement violent, aux méthodes controversées. Avec les années, difficile de se souvenir avec exactitude des visages… Et comme je n’ai jamais eu le (dé)plaisir de le croiser en personne, son aura ne s’est jamais gravée dans ma mémoire sensorielle. Je lâche cette phrase, comme un test… Et, immédiatement, je sens que j’ai fait mouche. Oui, c’est bien lui. Je me souviens de cette époque, quelques années après la perte de mon Maitre, et la réapparition de l’Empire Sith, où je maudissais le Conseil Jedi pour son immobilisme, son incapacité à anticiper les manœuvres de notre ennemi séculaire. Le Chevalier Noir incarnait, pour moi, la voie de ceux qui refusaient de suivre aveuglément quelques vieux sages sclérosés et déconnectés des réalités du terrain. J’ai probablement fait parti de ceux, au sein de l’Ordre, qui trouvaient un écho en ses actes de bravoures inconsidérés, tant décriés par les esprits les plus obtus.

Seul bémol : le Thyrsian n’était pas porté disparu, mais déclaré mort après la bataille de Columex… Alors comment se trouve-t-il ici ? Milles questions naissent et meurent aussitôt. Les voies de la Force sont impénétrables aux faibles esprits que nous sommes comparés à son immensité. Seul un fou chercherait à en décrypter les mystères. Mais, néanmoins, un précepte reste et restera immuable : rien n’arrive pas hasard. La Force a mis le Chevalier Noir et la Héros de Bothawi sur mon chemin… Elle a un sacré sens de l’humour. C’est comme assister à une émission spéciale d’holo-réalité où reviennent les vieux champions des saisons passées. Malgré moi, j’esquisse un sourire amusé.

Alors je laisse l’impulsivité, une fois de plus, guider mes gestes. Je plonge ma seconde main dans ma sacoche, empoigne mon datapad, et le jette au Chevalier Noir. Il décrit une parabole parfaite dans les airs.

« Le code de déverrouillage c’est SexyPapyDon… »

Je me fige. Merde, j’ai vraiment dit ça à haute voix ? Avec l’âge je perds toute pudeur. Je secoue la tête.

« Jette un œil sur le dossier « Guilbert » sur le bureau… »

Je lui laisse quelques instants, pas trop non plus pour que Rork ne me coupe pas l’herbe sous le pied, avant de reprendre :

« Si j’ai bonne mémoire, Guilbert a fait partie des rares Jedi influents à défendre vos prises de positions, Chevalier Noir. Lui aussi militait pour des actions plus offensives de l’Ordre, et une totale indépendance des institutions Républicaines. J’imagine que c’est pour cette raison qu’il a été capturé parmi les premiers, et qu’il a été incarcéré dans un lieu tenu secret tout ce temps. Mais, à présent, le vieil homme est ici, quelque part, peut-être avec son padawan. Il possédait des informations de grande importance sur les activités des Ombres Jedi dont il avait été l’un des coordinateurs depuis l’Espace Bothan. Nous ignorons tout de sa libération, et des secrets qu’il a pu fournir à ses tortionnaires, volontairement ou non… Et il ne sera en sécurité tant que nous ne l’auront pas retrouvé. Son vaisseau est stationné dans le spatioport, mais je ne sens pas sa présence… »

Enfin je tourne la tête. Mon otage s’est relevé, penaud. Il commence à comprendre… Je le fusille du regard tout en continuant :

« Mais, lui, il sait quelque chose. Tu fêtais quoi avec tes amis hein ? Tu as parlé d’un Jedi, j’ai entendu… T’as intérêt à passer aux aveux, sinon je lâche mes collègues sur toi, pigé ? »

Il recule d’un pas, percute les rayonnages. Une bouteille en dégringole et se brise au sol. Une odeur âpre s’échape des débris : les miasmes infames d’un alcool frelaté. Même le bois du plancher semble rechigner à boire le liquide ignoble. Je quitte le jeune homme des yeux un instant, pour le reporter sur le Thyrsian :

« Alors, Chevalier Noir, tu marches avec nous ? Lui c’est Maitre Adno. Il est à l’Ordre Jedi ce qu’un passe-partout est à une bande de cambrioleurs : il ouvre toutes les portes. Le problème c’est qu’on ne sait pas laquelle ouvrir, et ce que se trouvera derrière… Et j’ai la sensation qu’il y aura de la baston dans l’air… Alors une paire de poings supplémentaires ne seraient pas refus. N’est-ce pas Maitre Adno ? »
Ses'kai Mora
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Franchement, la vie est injuste. Et le karma est une prostipute.
Je veux dire, tout se passait bien. L'enquête piétinait comme prévu, le Thyrsian finissait par rigoler un peu en distribuant des marrons selon la bonne coutume qu'il aimait perpétuer partout où il passait, et ça finissait même par devenir intéressant. Sérieusement, qu'est-ce qu'il y a de plus réjouissant qu'un petit meurtre gratuit sur un imbécile qui croit qu'avoir un flingue suffira à compenser l'insuffisance de sa vie ?
Et puis là, d'un seul coup, t'as une espèce d'énorme tapis ambulant bon pour la maison de retraite qui essaye de noyer tout ce qu'il peut y avoir de fun sur cette foutue planète sous une énorme Aura de Force. Si vous voulez savoir l'effet que ça fit au duelliste, hé bien c'était comme se prendre soudainement le contenu d'une fosse sceptique avant qu'on branche des ampli' de concert à fond en plein dans sa face alors qu'on lit tranquillou la dernière édition de Coquinou magasine sans déranger personne.
C'est assourdissant, ça fout la migraine, les nerfs, les boules. Bref, tout ce qu'il faut pour s'intégrer à une bonne journée pourrie normale. Sauf qu'il s'agit de Ses'Kai, et tout ce qu'il fait se doit d'être extraordinaire pour la plèbe vulgaire et inférieure. Même passer des journées de merde.
Qu'un débile profond essaye de lui vriller les tympans, c'est pas si grave. C'est pas le premier, pas le dernier, alors tant pis. Sauf que la façon dont Mister Discrétion 21.583 s'y était pris indiquait très clairement, avec des néons qui clignotent et une fanfare de Gamoréens sourds couverts de paillettes, que c'était un Sensitif. Et comme il avait tenté de taper la causette, ou de se faire discret, c'était probablement pas un de ces fumiers de Siths, qui eux ne se seraient pas privé d'étaler en long en large et en diagonale son identité.
Non, c'était un Jedi.
Encore. Un foutu. Jedi.
Sérieusement, Ses'Kai part dans le trou du cul de la galaxie, il échoue pitoyablement dans une cantina miteuse parmi d'autres, il se prend la tête comme d'habitude avec toute forme de vie à proximité, et alors qu'il pensait l'Ordre mort, éteint, kaput, räppaatz, voilà que DEUX Jedis viennent squatter son petit quotidien peinard. Vraiment, la Force est une connasse.

En dépit de la démonstration, faut-il le reconnaître, impressionnante - pour le commun des mortels du moins, restons sérieux - du Cathar, le Thyrsian ne ressentait pas l'appel habituel du défi à la vue d'un adversaire potentiellement digne de ce nom. Pourtant, le sac à puces remplissait les critères habituels de sélection, une apparence robuste, une vieille gueule qui devrait indiquer de l'expérience, une aura relativement puissante, le fait qu'il soit encore en vie cinq ans après la défaite de l'Ordre... mais le gladiateur ne ressentait qu'une colère profonde et un violent mépris pour le miteux minou.
S'abaisser à quelque chose d'aussi ridicule qu'étaler son aura, vraiment ? Non seulement c'était le genre de petit tour qu'affectionneraient plutôt les consulaires ou les Sorciers, mais en plus ça ne représentait pas forcément son véritable pouvoir. Il n'aurait pas été surpris que les spécialistes de la "magie" puissent truquer l'impression qu'ils donnent, essayer de se montrer plus forts qu'ils ne le sont en vérité. En bref, mentir, frimer, faire de la gonflette pour impressionner les jeunes filles après quelques verres, car on serait incapables de le faire avec ses vraies capacités.
La méthode était tellement méprisable à ses yeux, qu'il reconsidéra même le fait que le chat puisse être un Sith en fait. Un Sith recalé, peut-être ? Car il fallait bien être aussi pitoyable qu'un Impérial pour se pavaner comme ça et penser qu'on est un dieu.
Et en prime, il se permet de LE pointer du doigt comme lui-même aurait désigné un troufion qui tremble au fond de sa tranchée pour lui ordonner d'approcher. Mais quel culot, quelle audace, quel fumier !

"Hé, ducon"

Se campant fermement debout, signe qu'il ne ferait même pas mine d'envisager d'obéir même simplement par curiosité, le duelliste leva à son tour un doigt, qui pointait vers le plafond dans un geste considéré grossier dans la plupart des cultures.

"Ta mère t'as jamais dit que c'était mal poli de montrer les gens du doigt ?"

Et pendant cette petite joute improvisée, l'autre Jedi, celui qui avait décidé de se planquer lorsque ça commençait à partir en sucette, s'était rapproché du Cathar pour essayer de calmer le jeu. À première vue, il semblait être quelqu'un de plus raisonnable, plus subtil que la moyenne. 'pas vraiment le genre à s'enterrer dans une bibliothèque pour frimer avec des connaissances dont tout le monde se fout, ou alors à foncer en première ligne pour se frayer un chemin à la force des bras.
Une Sentinelle, peut-être ? Ça pourrait expliquer à la fois sa présence ici, et sa survie. Loin du Temple lors de l'assaut final, il n'aurait plus eu qu'à exploiter ses meilleurs atouts, comme d'habitude, pour se faire discret.
Le "petit" Jedi lâcha un nom, qui attira l'attention de Ses'Kai malgré lui. Ça ressemblait à un sobriquet, et la couleur utilisée semblait le désigner. Il fronça les sourcils, s'étonnant de trouver un écho dans ce surnom, devant remonter sur cinq longues et floues années avant de finalement se rappeler que c'était lui, le "chevalier noir". Chevalier. Un titre archaïque, hérité d'une très lointaine tradition, qui était censé apporter droiture et noblesse à qui le méritait. Pas étonnant qu'il ait toujours préféré se présenter comme un "guerrier Jedi".

Après un temps de réflexion partagé, la - probable - Sentinelle lui lança un datapad avant de donner le mot de passe. Le Thyrsian attrapa l'appareil au vol, et dévisagea avec un certain étonnement son ex-collègue. Il ne put s'empêcher d'avoir un petit ricanement, un début de rictus amusé au coin des lèvres, car même lui ne parvenait pas à rester totalement sérieux en entendant le mot de passe.
Cela dit, le Jedi acceptait de partager des informations, et même un code de déverrouillage, comme ça, sans conditions préalables. Voilà qui était un geste accueillant, car des informations, c'est précisément ce dont il avait besoin en ce moment.
D'autant plus que le Gentil Flic eut la bonne idée de lui dire quoi chercher, et ne se priva pas en prime de faire un résumé oral, des fois qu'il ait la flemme de lire. Ce qui était là aussi une bonne idée, car un dossier, ça peut être gros.
Et pour une fois, la première depuis peut-être très longtemps, Ses'Kai prit un instant pour réfléchir en silence, la mine renfrognée, pensive. "Gilbert", ça ne lui disait pas grand chose.... Mais pas grand chose ne lui disait grand chose au bout de cinq ans. D'autant plus qu'avec un peu de chance, il ne l'avait probablement jamais rencontré en personne.
Cela dit, apprendre qu'il y avait eu un Jedi, mature, expérimenté, qui avait compris que le Thyrsian n'était pas juste une bête sauvage assoiffée de sang le... troublait. À l'époque, ô comme il avait espéré que quelqu'un le soutienne. Il avait voulu montrer une voie, une méthode, dans laquelle d'autres plus sages, plus intelligents, auraient pu trouver un chemin meilleur pour eux tous. Mais visiblement, les rares qui avaient su lire derrière les apparences n'avaient pu se faire entendre à leur tour.

Tandis qu'il réfléchissait, la - sans doute - Sentinelle lui propose une sorte de marché, d'alliance, une belle aventure de "trois survivants Jedis contre les Hutts, les gangs, pour sauver un gars qui le mériterait bien", en gros. Sur le papier, ça sonnait plutôt cool. Mais l'idée de travailler en équipe lui déplaisait comme toujours, en particulier avec un "cambrioleur Jedi" dont la discrétion semblait presque aussi élevée que la sienne.
De plus, voulait-il vraiment encore avoir affaire aux Jedis ? Il n'avait jamais cherché à savoir s'ils étaient encore en vie, et si oui, où ils pouvaient se cacher. Et voilà qu'on lui apprenait qu'il y en avait désormais QUATRE - padawan inclus - sur cette planète. Une haine sourd grondait au fond de ses tripes, comme un magma bouillonnant n'attendant que d'exploser. Les Jedis devaient mourir, sans doute. Ils auraient du mourir, telle était la loi fondamentale. Ils avaient échoué, avaient été vaincus, l'extinction définitive serait sûrement plus douce et plus digne que de vivre dans la honte, obligés de se cacher comme des taupes dans un jardin.
Ironiquement, ce dernier doute l'aida à faire la lumière sur la décision à prendre. Ce "Guilbert" semblait avoir été un bon gars, le genre qu'il aurait voulu rencontrer à l'époque. S'il devait mourir, Ses'Kai voulait que ce soit dans la dignité, des mains d'un pair qui sache l'honorer, plutôt qu'au fond du cachot d'une crapule baveuse.
Et peut-être que, en étant très optimiste et rêveur... peut-être que l'ancien Jedi avait encore des choses à accomplir. L'idée de remonter un Ordre composé uniquement de Jedis isolationnistes et prêts à se salir les mains l'amusa.
Après un silence prolongé, le Thyrsian releva la tête vers le Gentil Flic et lui relança la tablette. Il la regarda tourner sur elle-même en l'air, et semblait bien partie pour atterrir sèchement dans le comptoir plutôt que se pose doucement dans les mains de son propriétaire. Car il faut bien l'avouer, jeter des trucs avec précision, c'est pas exactement sa spécialité.

"Okay" grommela-t-il simplement.

Il désigna du menton le Cathar avec une grimace mauvaise.

"J'espère que ton pote "Adno" sait aussi trouver les bonnes portes, ca va p'tet vous surprendre, mais j'ai pas attendu d'avoir un minable voleur à poils longs pour découvrir qu'un sabre-laser ouvre littéralement tout." Il termina sur un ton acide "Pour peu qu'on sache s'en servir correctement."

Car dans sa tête, deux Jedis qui parviennent à survivre au massacre et se retrouvent sur cette planète paumée... c'était peut-être deux gros planqués, pas forcément le genre à être des spécialistes du combat. Or, savoir utiliser ses deux bras et ses deux jambes comme un homme (ou une femme, le cas échéant) digne de ce nom était le premier échelon de la dignité selon lui.
Amer, perplexe, pensif, énervé, le Thyrsian tendit la main vers le Gentil Flic, ou plutôt vers la vitrine derrière lui pour escamoter grâce à la Télékinésie la bouteille la plus chère du rayon, le dernier espoir d'avoir un truc un tant soit peu buvable. Il en fit sauter le bouchon d'un coup de pouce et se prit une rasade à même le goulot, avant de grimacer.

"Je suis Ses'Kai Mora dit-il en bombant le torse et la tête droite, une bouteille de mauvais whisky à la main et une vibrolame dans l'autre Et si tu m'appelle "Maître Mora", ta tête va finir dans son cul."

Gary Kovani
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Être assis sur une poudrière, bouche cousue et mains liées dans le dos, à observer une allumette se consumer jusqu'à moment fatidique où une flammèche suicidaire déclenchera l'explosion... Telle est l'image, imbibée de malaise, qui me saute au visage, alors que les regards électriques des deux Maîtres se croisent, que leurs mots s'entre-choquent avec autant de hargne et de violence qu'un duel au sabre-laser. J'inspire, retient mon souffle.

A cet instant, je suis persuadé que le Cathar va réagir au quart de tour. Ceux qui lui parlent sur ce ton ne reste pas bien longtemps dans son sillage. La félin s'est taillé une réputation impitoyable, qui l'a poussé avec les années jusqu'aux porte d'un Temple qui n'assumait plus ses méthodes... Tout les oppose : l'un s'accroche au prestige et au respect dû à son rang, tandis que l'autre refuse que le passé lui soit ressassé. Mais ce fossé que les sépare est, paradoxalement, creusé par leurs similitudes : des Maitre Jedi aux méthodes controversées, qui se sont usé l'âme dans des combats perdus d'avance. Contre les Ténèbres. Des adorateurs de la lumière qui ont côtoyé bien trop de noirceur pour en être ressorti indemnes... Des vétérans d'un époque révolue, mais qui continue de hanter l'esprit des plus anciens membres de l'Ordre. L'Exode a changé les règles du jeu, rabbatu toutes les cartes. La République est devenue un ennemi au moins aussi perfide que l'Empire. Les vieux dogmes méritent d'être brisés... Et de nouvelles alliances formées.

« Maitre Adno... »

L'absence de réponse du Cathar m'invite à lui couper la chique. J'espère qu'il ne s'en formalisera pas trop, au risque de manger, au mieux, un patte velue dans le coin du visage. Au pire... Hmmm... Je ne préfère pas y penser.

« Je propose que nous nous séparions. Vous semblez bien connaître le Hutt qui domine ce monde. Notre présence en son domaine risque d'éveiller ses soupçons. D'autant s'il a effectivement quelque chose à voir avec la disparition de nos... amis communs. Il vaut mieux que vous alliez toqué seul à sa porte, tandis que Mai... Ses'kai et moi-même remontons la piste d'autre manière : celle que nous fournira notre otage... »

J'insiste lourdement sur ce dernier mot, tout en baissant les yeux vers le jeune homme prostré à mes pieds. Il tremble comme une feuille arrachée d'un arbre par une tempête assassine. Je lui décoche un sourire carnassier qui dissimule mon anxiété. Je m'attends à un chapelet d'arguments capable de briser le maigre espoir de calmer la tension ambiante... Mais je me trompe. Sans un mot, le Cathar quitte la pièce. Peut-être aurait-il, dans son infini sagesse, compris que l’intérêt des Jedi disparus passaient bien avant nos sentiments personnels. Ou bien n'avait-il  plus envie de gaspiller plus de salive. Difficile de savoir ce qui se trame sous le crâne velu d'un tel personnage...

Et lorsque les portes du saloon grincent dans l'ombre de son dos, je souffle enfin.

« Merde. J'ai cru que vous alliez en venir aux mains... Bon. Ses'kai... Allons trouver un endroit pour s’occuper de notre jeune ami... Quelque chose de discret. Du genre où on ne l'entendra pas crier. Une idée ? »

J'aurais bien proposé mon vaisseau... Mais le spatioport est sous étroite surveillance. Si Attila le Hutt est réellement impliqué dans la disparation de Guilbert Chamonard et de son padawan, il serait immédiatement averti de notre tentative d'extorquer des informations à un témoin clé... Nous allions devoir faire preuve d'un minimum de subtilité avant de passer aux choses... moins subtiles.
Ses'kai Mora
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Il ne s'en fallut sûrement pas de grand chose pour que des anciens "collègues", des alliés potentiels, ne se sautent à la gorge pour laisser le destin - et probablement le Côté Obscur - déterminer qui était le meilleur escrimeur. Que cela ne soit pas arrivé était certainement moins du au penchant Lumineux de cette connasse de Force et son humour noir qu'aux talents diplomatiques et aux propos aussi sensés que raisonnables de l'enquêteur.
Lorsque le Cathar lui tourna le dos, Ses'Kai sentit un élan de rage le gagner, mais plus encore de mépris. Quelqu'un qui ne trouvait rien de mieux à faire qu'étaler sa "puissance" refusait maintenant l'affrontement. Une aberration, un non-sens total pour le Gladiateur, qui peinait à envisager qu'il existe d'autres issues que se battre crocs et griffes, ou se soumettre et/ou mourir.
Cependant, il le laissa partir. Peut-être grâce à un soupçon d'intelligence s'illuminant pour lui souffler que l'ancien Maître pouvait encore servir une quelconque cause - genre, mettre des bâtons dans les roues, et si possible, les gencives, des Siths et des Hutts - à sa façon. Peut-être était-ce le goût du sang qui réclamait d'attendre une meilleure opportunité. Qui aurait pu assister aux duels des survivants de la Force, ici ? Quels spectateurs auraient scandé le nom du vainqueur et raconté sa violente victoire, dans ce trou paumé ? Non, s'il devait tuer un autre Jedi, il fallait que ce soit dans les formes, que le terrain soit favorable à l'épique du combat.

Plus renfrogné qu'un vieux daron avec une gueule de bois, se cognant l'orteil en allant gifler son gamin qui chiale à trois heures du mat', puis marchant sur une brique en plastique nonchalamment abandonnée par terre en retournant se coucher, et qui malgré tout essaye de rester stoïque pour pas réveiller la belle-mère qui ronfle dans le salon à en faire trembler les murs de tout le quartier, sous peine de piquer une crise et de foutre le feu à toute la ville juste pour avoir un peu de calme, le Thyrsian prit une nouvelle rasade du breuvage répugnant.
D'une oreille, il avait entendu la réflexion de l'enquêteur, et seule une petite partie de son esprit s'y consacrait, trouvant la remarque pertinente, la sujet sérieux, et le problème tout à fait concret. Le duelliste n'était pas "discret". Au contraire, il aimait qu'on le voit, savourait qu'on le reconnaisse. Fut un temps, il rêvait même d'incarner une sorte "d'avatar de la mort" pour que ses ennemis s'effondrent de terreur lorsqu'il arrive sur le champ de bataille en fanfare, mettant fin à la guerre par sa seule présence, et repérant d'autant plus vite et facilement les proies dignes de ce nom. Hélas, il n'en eut pas l'occasion.

Pourtant, il eut une idée qui lui fit dresser un sourcil pensif. La Sentinelle - qu'on va appeler Machin, pour des raisons pratiques évidentes - voulait un endroit discret, probablement à l'abri des regards et plus encore des oreilles indiscrets. Pour sa part, le Thyrsian doutait qu'un tel endroit existe, du moins en dehors des QG des plus grosses crapules de la planète. Dans ce genre de taudis géants, si un mur était suffisamment épais ou isolés pour ne pas entendre quelqu'un péter de l'autre côté, c'était déjà un grand luxe, en général... alors arracher des "aveux" n'allait certainement pas se faire dans le plus grand des silences.
Et il éclata d'un rire cruel et bruyant en concluant, dans sa volonté d'aller à l'encontre de la prudence et de l'Ordre, en se disant qu'il avait peut-être une solution.

"Un endroit où personne ne nous entendra ? 'Même pas sûr que ça existe ici il se fendit d'un sourire carnassier à l'intention de leur prisonnier, en jetant l'infâme bouteille contre un mur, pour le seul plaisir de briser quelque chose Mais je sais où on peut aller. Un endroit où l'on va pour défoncer des gens, où on a l'habitude d'entendre des cris et toutes sortes de bruits, et où un peu d'argent achète facilement le silence des proprio'."

D'un geste expert, il rengaina sa lame et jeta ensuite un regard railleur à son "collègue" d'infortune. Il avait tout l'air d'être un débrouillard, certes, aussi un adepte des "bonnes conduites" de l'Ordre. Il avait hâte de voir jusqu'où il était prêt à se salir les mains, et surtout avec quoi.

"Dis voir mon gars, t'es déjà allé au bordel ?"

Gary Kovani
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La question m’amuse. Je laisse échapper un fugitif sourire en coin alors que mon sourcil s’arc-boute. Ca fait vraiment très longtemps que l’on ne m’a pas affublé d’un « mon gars ».  Du coup je me sens l’obligation viscérale d’ironiser quelques mots :

« Un bordel ? Jamais de la vie ! Si le Conseil Jedi savait que… » J’explose de rire. « T’as cru lire "Jedi de l’année" imprimé sur mon front peut-être… ? » Je manque de lui renvoyer son « mon gars », légèrement vexé d'avoir été pris pour un saint nitouche. Mais je dévore les deux mots avant qu’ils ne s’échappent de ma gorge déployée. Il ne faudrait pas trop s’amuser aux dépends du colosse d’ébène, si je ne veux pas finir avec son poing dans l’estomac. Ou pire. Les alliés de circonstance ne font pas nécessaire d’excellents compagnons d’aventures. « J’ai écumé la moitié de ceux de Nar Shaddaa. La grande époque… » J’évite, évidemment, de préciser qu’il s’agit de l’époque, ou j’avais sombré dans la drogue et la petite délinquance. Accident de parcours. Ça peut arriver à tout le monde. Il me reste énormément de trous de mémoire de cette période, certains réels, d’autres seulement traumatiques… Je crois même avoir vendu mon corps plus d’une fois pour me payer quelques miettes régurgitées de bâtons de la mort. Définitivement : une grande époque, mais pas par le prestige. « Ironie à part, c’est le plan du siècle ! Qui irait s’inquiéter d’un gars qui hurle à la mort et appelle sa mère en pleurant dans un de ces lupanars miteux ? Je signe direct ! En plus y’en a un juste au coin de la rue. J’ai failli chopper une MST rien qu’en regardant la façade. » Un Euphémisme pour décrire le néon rouge qui crépite au-dessus d’une pute fripée qui, pour attirer le chaland, se dandine derrière la vitrine poussiéreuse lardée de tâches de doigts et de langues baladeuses. Clairement pas du premier choix. Ni du second. Ni même du troisième. Mais il en faut bien pour tous les gouts, et toutes les bourses, sans mauvais jeu de mot (ou peut-être que si). Bref. Ai-je vraiment besoin d’en rajouter ?

La question qui devrait flotter dans l’esprit de mon acolyte testostéronné est la suivante : Pourquoi ce foutu Jedi, purée qu’il est sexy dans ses fringues crasseuses, s’est-il amusé à repérer le bordel le plus proche ?! Question judicieuse, réponse élémentaire. Je lui épargne la souffrance de quelques supputation hasardeuses en répondant à ses interrogations silencieuses présumées :

« L’expérience m’a enseigné de sages leçons de vie : lorsque l’on doit prendre la fuite, le mieux c’est de se planquer chez nos amies les putes. Ça rebute plus d’un malfrat de se mettre à dos la profession.  Ils préfèrent laisser couler, en général, que d’entrer et de retourner l’établissement. Je comprends la logique… Il serait dommage d’être privé de desserts, ou de se retrouver, malencontreusement, avec un chicot planté dans le… Bref, tu vois où je veux en venir. Y’a des choses sacrées pour les gars de la rue. Les parties de jambe en l’air à toute heure du jour et de la nuit en font partie… » Plus ou moins. On va dire que le vent peut vite tourner en fonction du patron qui tire les ficelles. « Corolaire : je repère toujours où se situe le bordel le plus proche lorsque je m'apprete à mettre les pieds dans une cantina pour chercher des infos douteuses à des types douteux. Allons-y… Aide moi à déplacer notre paquet, on va faire comme s’il était à deux doigts du coma éthylique. »

A mes pieds, git toujours prostré en position fœtal notre ami d’infortune. Celui-là même dont on discute du meilleur endroit pour le torturer. Il a au moins eu l’intelligence de ne pas réagir… Preuve qu’on va probablement pouvoir en tirer quelque chose : s’il a assez d’instinct de survie pour fermer son gosier lorsque la situation l’exige, il aurait peut-être le réflexe de l’ouvrir lorsqu’il le devra. Sinon, il passera un sale quart d’heure. Sans ménagement, je choppe son col et le force à se relever. Ses jambes molles n’aident pas à l’opération. Il pèse son poids l’enfoiré. Une fois debout, dos plaqué contre le zinc désert, encore maculé des auréoles des verres renversés ou disloqués, je pose ma paume gantée sur son front. Il sursaute. La seconde suivante, il tombe lourdement en avant, sur moi. Une infime vague télékinétique directement sur la cervelle aura eu raison de sa conscience, et surement de quelques neurones. Pour au moins une quinzaine de minutes. Ce n’est pas une science exacte. Je passe son bras gauche par-dessus mon épaule et invite le Thyrsian à en faire autant, avec l’autre bras. Nous avons ainsi fière allure : celle de deux vieux potes qui ramènent le troisième larron de la bande vers un endroit où il pourra cuver en paix.

« Au fait, moi c’est Gary. Gary Kovani. Avec toute… cette confusion, j’en ai oublié les présentations. Mais tu peux m’appeler Deck. Ou pas m’appeler du tout. C’est toi qui vois. Je tenais à te dire que je suis un grand fan de tes exploits. Même si j'irais pas le crier sur tous les toits du Temple... »

Un coup de botte dans la porte saloon, et nous voilà à arpenter la rue poussiéreuse. La chaleur nous tombe dessus comme une chape de plomb qui décuple le poids de notre colis. Il me faut moins d’une dizaine de secondes pour sentir les gouttelettes de sueurs perler sur mon front, pour sentir l’humidité inonder mes aisselles et mon sillon inter-fessier. Quelle planète merdique. Presque pire que Tatooine. Le rugissement incessant des speeders et moto-jet dévore tout le brouhaha ambiant. Ils soulèvent dans leur sillage des nuages de poussières qui tourbillonnent en se laissant porter par les bourrasques brulantes à l’assaut de nos poumons harassés. Je place très vite le foulard qui orne mon cou sur mon visage, jusqu’à l’arête de mon nez. Je plisse des yeux, autant à cause de la luminosité que de cette saleté aéroportée.

Une trentaine d’enjambée et nous y sommes. Même pas besoin de traverser la rue. D’un coup d’épaule, j’ouvre la lourde porte richement décorée de sous-vêtements aux couleurs avalées par les ultraviolets. Nous sommes aussitôt accueilli pour une hôtesse défraichie, que j’aurais préféré reluquer dans des habits moins… évocateurs. Parfois l’imagination a du bon ! Je plonge la main dans l’un des poches multiples de ma veste, extirpe quelques crédits et lui balance. Ses mains agiles n’ont aucun mal à les intercepter.

« Un box m’dame. On n’en aura pas pour longtemps… »

Elle nous observe. Quelques instants. Baisse les yeux sur les crédits pour hausse les épaules. Je n’ai nullement besoin de la Force pour effleurer ses pensées et deviner les conclusions qui vagabondent dans son crâne glabre. Elle présume qu’on va se farcir, à deux, un malheureux ivrogne impuissant. Mais qui est-elle pour juger ? Elle a vu et fait bien pire. En vérité, elle n’est pas si loin du compte, même si nous n’attribuons pas les mêmes images inconscientes au mot « farcir ». Elle volte-face, sans un mot de plus, et glisse sur les escarpins qui soutiennent les deux poteaux lui servant de jambes, vers le fond de l’établissement, où l’éclairage tamisé dissimule les entrées des « back-room ». Nous contournons plusieurs tables, ainsi qu’une estrade ou une gamoréenne en string, les six mamelles à l’air, joue avec une barre chromée de pole-dance. Un spectacle qui restera, à mon plus grand désespoir, gravé dans ma mémoire pour le reste de ma triste vie de Jedi nomade et solitaire. Note hôte nous invite à entrer dans un box libre. Je la remercie d’un signe de la tête, puis dépose notre paquet sur le divan rouge criblé de tâches suspectes. Je recule, et verrouille la porte.

« Bon, tu veux la jouer comment ? » J’y réfléchis en même temps que je pose la question. « Le classique bon flic mauvais flic… Pfff. Non, c’est naze. On n'est pas dans un vieux holo-polar de série B. J’ai jamais compris le subterfuge. Deux méchants flics ça fait plus d’effet non ? » Je peux sentir au regard lourd et pénétrant de mon interlocuteur qu’il interroge ma motivation, mes méthodes, ainsi que mes limites. Où serais-je prêt à aller pour sauver l’un de mes frères Jedi ? Très loin, bien trop loin malheureusement.

Notre victime commence à reprendre conscience. Le temps presse. S’il entrevoit le moindre doute dans notre stratégie, il pourrait en tirer quelques miettes de courage stupide. Une perte de temps inutile… J’ai bien une solution plus rapide… Mais il me faudrait user d’un pouvoir que je me suis juré de n’utiliser qu’un dernier recours…

« La dernière fois que j’ai maltraité un gars pour avoir des infos, c’est revenu aux oreilles du Conseil. Alors je leur dis que je ne recommencerai plus. Tu vois, je suis du genre à ternir ma parole, au mot prêt. Je n’ai rien promis au sujet des tortures psychologiques, ou de laisser faire le sale boulot par une tierce personne… Alors… Voilà ce que je propose : tu t’occupes de la chair et moi de l’esprit. Je te laisse lui taper un peu dessus, histoire de le mettre dans le contexte, de lui montrer qu’on est sérieux. Et après je lui retourne la cervelle. Il crachera le morceau, d’une manière ou d’une autre. Partant, amigo ? »
Ses'kai Mora
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Depuis sa mésaventure face à la jeune Impératrice, cinq ans plus tôt, Ses'Kai n'avait de cesse de se répéter que la Force était une véritable chienne avec un humour plus grinçant que les ongles d'une prof de maths sur un tableau noir au ralenti. On lui offrait l'occasion de prendre la tête la plus côté du camp d'en face ? Et on le fait échouer. On l'envoie sur LA planète des Siths ? Et il peut même pas s'en farcir un proprement. Il finit par s'évader ? Et maintenant il erre sans but ni raison, au hasard d'un destin cynique.
Aujourd'hui, sa réflexion se portait sur ce type. Ce "collègue"... En toute honnêteté, le Thyrsian aurait presque envie de lui demander s'il était vraiment un Jedi. Et de sa part, c'était sacrément gonflé. Sérieusement, un type sale, avec de grands airs, dans le trou du cul du monde, avec de la répartie, de l'humour, des "différences d'opinion" avec l'Ordre de l'époque, un grand amateur de bordels en tout genres, et qui en plus lui lance au visage qu'il l'admirait autrefois ?
Sérieusement, entre lui et la "cible" qu'ils recherchent, ça fait deux fois en bien trop peu de temps que le duelliste se dit que la Force se fout de sa gueule, car s'il avait simplement pu rencontrer ou même juste entendre parler d'eux dans l'ancien temps, les choses auraient pu être tellement différentes... La guerre aurait pu prendre une autre tournure, des alliances plus efficaces auraient pu être nouées, des accords douteux auraient pu être rompus, l'Ordre aurait peut-être...

Le Thyrsian secoua violemment la tête alors qu'il aidait, presque machinalement, plongé dans ses pensées, le "jeune" Gary à porter leur proie du moment et à le traîner sans aucune forme de propreté vers le boxon à proximité. Par nature, Ses'Kai se méfiait des beaux parleurs et des bavards, des planqués, des "gens plein de finesse"... mais en fait, il se méfiait juste de tout le monde qui ne lui fonçait pas droit dessus l'arme à la main.
Pourtant, pour la première fois depuis... un temps qu'il ne parvenait pas à imaginer, le gladiateur songea qu'il aimait bien ce gaillard. Il avait l'air du genre à mettre les mains dans le cambouis quand il le fallait, et s'il ne ressemblait en rien à un foudre de guerre, il paraissait néanmoins fichtrement débrouillard. Un petit malin aux doigts agiles et à la langue souple. Ou l'inverse. Dans tous les cas, un camarade bien utile lors d'une enquête, infiltration, ou d'un dîner mondain.
D'un point de vue pragmatique, ils feraient une bonne paire. "Deck" - eût-il changé une lettre que cela aurait été difficile de pas l'appeler par un surnom phallique - pouvait visiblement s'occuper des subtilités et des magouilles. Et lui, l'assassin cruel, pouvait s'occuper du reste.

Il était pensif tandis qu'ils pénétraient dans le bordel, et était encore plongé dans ses pensées lorsqu'ils gagnèrent leur salle d'interrogatoire thématisée. Le guerrier noir accorda une demi-attention au monologue de son acolyte/associé qui se demandait s'ils devaient se la jouer cliché ou pas, et haussa vaguement un sourcil lorsque celui-ci suggéra une approche plus... intrusive.
Encore un détail qui fit tiquer l'ancien Chevalier. Entraîné par une Sentinelle, Ses'Kai savait bien que ce type de Jedi avait tendance à être plus souple sur le terrain, vis-à-vis des codes moraux ou légaux. Néanmoins, son maître, malgré sa polyvalence, était un peu rigide. Cela ne semblait guère être le cas de ce petit bonhomme plein de verve.

"T'inquiète Dicky, je gère."

Il ferma alors les yeux, prenant un bref moment pour respirer profondément,  peut-être faire le point sur sa vie ou préparer un plan astucieux. Durant une petite seconde, on aurait pu même croire voir un Jedi se préparant à sa méditation quotidienne, à l'époque où des jardins fleurissaient encore paisiblement à Odéron.
Puis il explosa.
Dans un hurlement de bête enragée à en faire trembler les murs, celui qu'on appelait en murmurant le Boucher laissa éclater sa énorme frustration. Le temps perdu à suivre des pistes sans queue ni tête, la plaie de devoir poireauter dans des lieux miteux qu'il méprisait, la honte d'avoir échoué à assassiner ses ennemis jurés pourtant à portée de main, la rage d'avoir vu l'Ordre s'effondrer alors qu'il les avait prévenu, et le sentiment omniprésent que quoiqu'il fasse, dise ou espère, il ne puisse que finir dans un mur et voir tous ses espoirs être vains. Tout ce qu'il abhorrait existait toujours malgré tous ses efforts, même les plus vicieux. Tout ce qu'il espérait voir briller aux yeux de tous, était désormais mort et enterré, ou simplement condamné à rester dans des bas-fonds puants.
Ses talents étaient limités. Le peu de patience ou de tolérance qu'il avait pu avoir l'avaient trahi, et même sa rage ne servait guère plus qu'à le pousser à la recherche d'une nouvelle proie comme si tuer quelque chose avait le même sens que croquer un bon steak. Quelqu'un devait payer. Et il allait payer fort.
C'était plutôt dommage pour le pauv'gars qui devait pas très bien comprendre ce qui se passait.

Suintant littéralement de haine, les yeux injectés de sang et les veines gonflés à la limite de l'explosion sur les bras et les tempes, le Thyrsian balança littéralement le premier truc à sa portée apte à voler à travers la pièce sans même faire gaffe s'il s'agissait d'une oreiller, une chaise ou du lit lui-même avant de se ruer sur le malheureux comme s'il voulait le dévorer. Dansant sur la frontière extrêmement fine de la Rage Obscure qu'il utilisait dans ses combats les plus intenses, il n'aurait pas fait la différence.
D'une poigne de bourreau, il le saisit au col et le souleva comme s'il ne pesait pas plus qu'un nouveau-né.

"PARLE CHIURE DE RANCOR !! hurla le guerrier comme s'il était possédé par un antique démon

Sans lui laisser même le temps de réaliser tous les inconvénients qui pouvaient se révéler extrêmement imminents, le duelliste le jeta de l'autre côté de la pièce, et sans même y réfléchir dégaina son sabre-laser, laissant la lame écarlate projeter une lueur sanguine sur son visage barbare tandis qu'il se rapprochait, les crocs à découverts, grondant férocement, honorant son surnom de Fauve.
Peut-être qu'une arme pouvait être un argument valide dans un interrogatoire. Sans doute qu'un sabre-laser devenait une rhétorique de poids. Probablement qu'une lame rouge promettait des choses très indélicates. Si ça avait fait parti d'un plan réfléchi, ça aurait pu être malin... mais c'était sûrement le hasard du tempérament instable d'un abruti stéroïdé.

"Crache le morceau. Tous. Et tout de suite ! Ou je jure que je t'étranglerais avec tes propres tripes jusqu'à ce que ta tête saute comme un bouchon !!"

Bien sûr, l'opportunité de faire du mal à quelque chose d'à peu près vivant l'avait emporté sur un petit détail peut-être. Sans doute insignifiant direz-vous, mais néanmoins potentiellement significatif dans pareilles circonstances... Car dans un autre contexte, assurément plus détendu, avec un ton un peu joueur, et certainement un alcool de meilleure qualité qui puisse offrir autre chose qu'une migraine, il n'aurait pas été surprenant que leur "invité" décidément bien malchanceux puisse être tenté de placer une petite réplique qui synthétise le problème posé par un jedi déchu berserker et mal luné.
"Vous pouvez répéter la question ?"
Gary Kovani
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Bien malin serait celui capable de déchiffrer l’expression gravée dans ce visage buriné par les coups et les ecchymoses. Un colosse d’ébène, taiseux, froid, distant, toujours sur la défensive comme prêt à encaisser une inévitable mandale du destin pour lui renvoyer dans la gueule aussi sec. Mes réflexions ne le dérident nullement. Tout ce que je récolte ce sont des œillades frigides, de celles capables de vous transpercent l’âme. J’ignore si j’éveille en lui la curiosité, le doute, ou la répulsion. Je ne corresponds probablement pas au genre de types avec lesquels il traine usuellement… S’il lui arrive de trainer avec quelqu’un. Je l’imagine plutôt en loup solitaire, en héros déchu et asocial. L’Empathie broyée par une vie de combats sanglants. Il n’est pas rare que les Gardiens Jedi les plus intrépides finissent avec l’âme usée jusqu’à la moelle, persécutés des par des syndromes post-traumatiques trop souvent passés sous silence. Même le plus puissant des Jedi reste un être de chair et de sang. Personne ne sort indemne d’une bataille. Encore moins d’une guerre. Personne n’en parle. Un tabou. On aimerait croire ceux qui nous protègent indestructibles. L’illusion de la carapace intacte…

Toutefois je comprends sa réticence : il est vrai, aussi, que je ne corresponds pas aux stéréotypes du bon petit Jedi. Ça nous fait un point commun, non ? Je lui décoche un sourire amical, avant qu’il ne passe à l’action. Une invitation silencieuse à agir comme bon lui semble. Je plaque mon dos contre la portée verrouillée. Personne ne s’invitera à notre petit fête sans devoir me passer sur le corps. Mais aussitôt, mon sourire s’efface. Tout comme mon outrancière décontraction, celle que j’affiche en toute occasion souvent pour agacer les interlocuteurs que je juge trop sérieux. L’obscurité darde aux limites de mon esprits, dont j’ai instinctivement levé le rempart pour ne pas y succomber. Un colère noire, une haine viscérale. Elles suppurent de chacune de ses cellules. Le coté obscur. Brut, puissant, épais, asphyxiant. Je suis pris de court.

Rien n’aurait su me préparer à une si soudaine déferlante de violence. Son hurlement me glace le sang, m’hérisse les poils. Une boule de terreur noue mes tripes. Bordel ! Si je ne m’étais pas écarté, j’aurais probablement servi de projectile improvisé, comme les cousins, les chaises, et le reste du mobilier. Le fauteuil tantrique passe à quelques centimètres seulement du visage de notre prisonnier, et s’écrase lourdement contre le mur. Le raffut est assourdissant. Les craquements sec du bois couvrent l’espace d’une seconde les gémissements haineux, les cris de terreur. Ai-je commis une erreur ? La question tourne en boucle, alors lourde chappe d’obscurité me pèse sur les épaules, anesthésie mes réactions. Le puissant Jedi que j’admire aurait-il sombré si profondément dans les ténèbres qu’il ne reste de lui qu’une carcasse vide habitée par sa haine ? Non. Je refuse d’y croire. Mais tout le reste me prouve le contraire. Je…

« Tout va bien ?! »

La voix de la tenancière tonne de l’autre coté du panneau de bois. Elle est inquiète. Plus pour l’intégrité de son établissement que pour les sévices en cours. Il me faut une longue poignée de secondes pour reprendre mes esprits, pour m’extraire de la torpeur médusée dans laquelle je suis plongé, témoin passif du spectacle surréaliste. Ces accès de rage ont toujours quelque chose de… Fascinant. Je secoue la tête.

« Il y a un problème ?! Qu’est-ce qui se passe là-dedans ? » J’entrouvre immédiatement la porte. Avant que le colosse ne se détourne de sa proie et qu’il laisse ses instincts prendre définitivement le pas sur sa raison.

« Tout va bien ! » Comment justifier tout ce raffut ? Elle risque d’appeler la sécurité locale, de peur qu’on démolisse tout. Même ici, dans ces lupanar miteux, il y a des limites. Les putes ça se remplace facilement. Le mobilier non. Alors j’improvise une excuse : « Mon ami vient d’expérimenter son premier orgasme prostatique. La fameux point P. Vous savez ce que c’est… » Un silence interdit me répond. Un alibi qui ne convainc personne, même pas celui à son origine : moi. Elle lève les yeux au ciel, secoue sa vieille caboche dépitée. Mais une poignée de crédits suffit à faire taire ses interrogations. Elle grogne quelque chose entre ses dents éparses. Des insultes peut-être. Mais je viens de lui donner assez d’argent pour couvrir les dégâts causés par… nos activités. Alors elle volte-face et disparait de mon champ de vision. Je referme la porte.

Dans mon dos, le silence est encore plus terrifiant que les hurlements. Maintenant que le Thyrsian souffle comme un buffle à trois centimètres du visage de sa victime, le jeune homme s’est tut. Il tremble comme une feuille morte maltraitée par les bourrasques automnales. La terreur déforme ses traits devenus laiteux. Ses yeux exorbités sont noyés de larmes qui dégoulinent sur ses pommettes pour se mêler aux filets de morves régurgités par ses narines dilatées. Il ressemble à un gosse. Un gosse tétanisé, convaincu que sa dernière heure est arrivée… Il n’a pas tort. Je profite de l’interruption pour m’interposer entre le colosse et sa proie :

« Je te pensais bien avare de préliminaires, mais là, tu exploses tous les records… Repose le… On a besoin qu’il crache le morceau avant qu’il canne de peur. » Je love entre mes mots, dans chacune de mes intonations, quelques échos apaisés de la Force, dans l’espoir de faire redescendre la tension l’ancien Jedi. La lame rouge achève de peindre ce tableau macabre en cinquante nuances d’écarlate. Je m’approche, prenant bien soin de ne pas le frôler ou le toucher. Un tape amicale sur l’épaule pourrait déclencher de vives représailles. Je tente de l’apprivoiser comme on le ferait avec une bête sauvage. « Je prends la suite… » S’il le tue, nous aurons fait tout cela pour rien. Malgré mon aversion pour les stéréotypes, me voilà contraint de jouer au « gentil flic » pour calmer le jeu et espérer tirer quelque chose de la loque qu’est devenu le type. Du moins le temps de mettre mon propre jeu en place.

Je prends la place de Ses’, et grimace aussitôt : Il s’est pissé dessus. Auréole sombre au fond de son pantalon. L’odeur acre de l’urée me pique les narines. Mais elle a le mérite de chasser cette odeur tenance de sexe froid qui flotte dans le box, que le parfum musqué balancé par la climatisation ne parvient à dissimuler.

Je m’approche encore. Le type est ailleurs. En état de choc. Je lui claque gentiment la gueule, deux ou trois fois, pour qu’il reprenne ses esprits et décide enfin de poser ses yeux sur moi. Je me lance dans une diatribe surréaliste, afin de noyer son esprit échaudé sous les mots, et lui faire perdre le peu de raison qu’il lui reste :

« Comme tu l’aurais compris, mon… ami ici présent, n’est pas particulièrement patient. Tu sais comment on l’appelle de là ou je viens ? Le colosse d’ébène, le chevalier noir, l’étêteur d’entêtés, le Boucher de Blastvirkren » Je viens de l’inventer, ça sonne bien non ? « Le tire-bouchons aux bras d’aciers, l’incroyable destructeur d’enfoirés de ton genre… Bref. T’as pigé le truc ? Des comme toi, il en bouffe des dizaines au petit dej’. Et encore c’est juste pour s’ouvrir l’appétit… » Je lui décoche un sourire carnassier. Le petit poisson est ferré, à mon tour de faire le show. « Mais moi, tu vois, je ne suis pas comme lui. J’exècre la violence gratuite. Je lui préfère laargement la violence utile. » Je dégaine une griffe laser. Orangée. « Bref, c’est simple mi amigo. T’as exactement dix secondes pour répondre à mes questions. Sinon… » D’un geste vif, j’abas ma lame sur sa jambe. Je la dévie au dernier moment. L’énergie pure découpe l’arrière de sa botte poussiéreuse, lui tranchant le tendon d’Achille du pied gauche. Une blessure si net et rapidement infligée qu’il n’en sent la douleur qu’une poignée de secondes plus tard. «… Je te découpe les tendons un par un. Tu verras. C’est pas très douloureux… Mais tu perdras petit à petit l’usage de tes membres… Pigé Choom ? » Il acquiesce, les yeux rivés sur son pied mutilé. Tant pis pour les bonnes résolutions. Je ferai mieux l’année prochaine. Peut-être aussi que je suis influencé par l’obscurité ambiance, même si je refuse de me l’avouer.

« Donc, c’est très simple compadre. Tu as été au mauvais endroit eu mauvais moment. Et en plus t’as un peu trop ouvert ta gueule. C’est ainsi. Va chier sur le destin si ça t’amuse… » Je recule un peu, pour lui laisser un peu d’air, qu’il puisse recouvrer un minimum ses esprits.

« Je t’ai entendu dans la cantina. Tu t’es vanté t’avoir exécuté une mission du genre premios. Gros paquet de biffetons, un max de réputation pour le big boss Hutt. Du travail propre hein ? Nova. Sauf que non. T’as mis les deux zapatos dans un vrai merdier. Un putain de vrai merdier. T’as juste touché aux mauvaises personnes, claro mi amigo ? Alors tu vas commencer par me raconter ce fameux job que tu fêtais hein… »

Il déglutit. Hésite. Mais la vue de ma lame qui s’approche de son genou lui fait soudain recouvrer l’usage de la parole :

« Putain mais vous êtes qui ?! J’pige rien ! C’est juste un job ! Le genre bien payé avec peu de risque. Merde ! Truc prémios ouais. Y’a un un sur des millions des comme ça ! Souvent quand ça paye, c’est qu’on va risque sa peau, tu vois ? » Ma lame approche encore un peu plus. On n’a pas l’après-midi. « Ha.. Je… On devait intercepter un gars au spatioport. Un vieux type. En bure. On a appris après coup que c’était un Jedi. J’sais pas, il aurait peut-être pu nous couper en deux s’il était mal luné… Mais non. Il a rien fait. Il était zen. Il nous a suivi direct. »
« Il était seul ? »

« Nan, y avait un gosse avec lui… » Son padawan…
« Et vous l’avez emmené où ? »
« Chez le big boss. Chez Attila. Mais, pampaw, j’te jure ! Y’a zéro embrouille ! Nada ! On l’a escorté aux grandes portes, façon film d’action tu vois hein ? La garde d’honneur l’attentait. Le mec était invité tu vois ? Pas un prisonnier ou quoi. Mission coolos ! Merde ! Putain ! Pourquoi vous faites tout ça ?! J’ai rien fait de mal… »
Il commence à dérailler. Sa tension retombe d’un coup. Il se recroqueville en lâchant des sanglots. Je me tourne vers Ses’

« On n’en tirera plus rien… Mais on a ce qu’on a besoin. C’est confirmé. Guilbert est bien ici, sur Aduba. Cependant… Le reste m’intrigue. Pourquoi le Hutt la reçu en grandes pompes ? Quelque chose cloche, je le sens… » La vue de ce corps rabougri lâche un sentiment de culpabilité au milieu de ma détermination froide. Je le chasse aussitôt. Je connais très bien ce genre de type. Il n’a peut-être rien fait cette fois. Mais son casier de conneries est aussi long que le bras. Je soupire.

« Va falloir qu’on se fasse inviter par le Hutt aussi… » Je me tâte à recontacter Rork… Mais non. Ses’ et lui pourraient aisément en venir aux mains. Et vu le contexte, je mise plutôt que le colosse d’ébène. Je le regarde droit dans les yeux, et lui demande :

« Il t’es arrivé quoi Ses’Kai ? J’ai rarement ressenti une rage aussi puissante, aussi profondément ancrée. » A cet instant je réalise que je n’ai plus un Maitre Jedi en face de moi. Mais un puissant utilisateur de la Force ayant renié toutes ses obédiences. Un Jedi Noir. « Tout le monde te croit mort... » Et là, je tente un coup truc, mu par l’instinct : « Tu pourrais revenir parmi nous si tu le voulais. Bien sûr il faudrait d’abord… Te débarrasser de toute cette haine qui occupe ton esprit. Nous pourrions y travailler ensemble, si tu le souhaite. Comme tu as pu le voir, je ne suis pas du genre à me défiler devant un boulot salissant. »
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