Oola Cha'kin
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- Kaaaaazzz !

Le cri de la Twi’lek trancha l’air vif et froid du quai C23 du spatioport. C’était un bâtiment tout en longueur, avec des plateformes successives dont certaines étaient plus fréquentées que d’autres. Au nord, les navettes commerciales étaient bondées et Oola avait vite abandonné d’essayer de fuir par cette voie. Elle s’était rabattue sur les quais au sud, moins fréquentés. Là, des navettes de toute taille atterrissaient et décollaient à longueur de journée, dans une brume qui restait sombre et grise même en pleine journée. Ce soir-là, une pluie fine s’était mise à tomber, rendant glissante les passerelles qui permettaient de circuler entre les passerelles. Quelques bennes débordaient de détritus en diffusant une odeur désagréable mais Oola était quand même restée dissimulée derrière, prostrée durant de longues heures. Le désespoir était proche. Elle était à deux doigts de faire demi-tour. Déjà, dans sa tête s’échafaudaient tout un tas d’histoires pouvant excuser son absence : elle pouvait avoir été kidnappée, oui ! C’était une bonne histoire ça ! Mais sa mère ne la croirait jamais. Et puis, il y avait eu cette drôle de navette qui s’était posée et Oola avait aperçu un visage à la couleur caractéristique. Elle avait reconnu ensuite la démarche assurée du type qui descendait la passerelle.

- KAAAAAZ !


Dans le brouillard sombre qui meublait le paysage, masquant les milliers d’édifices en métal qui peuplaient la lune de Nal Hutta, la petite silhouette d’Oola trottina. Elle serrait sa veste autour d’elle comme si elle était transie de froid – et il fallait dire qu’elle était complètement trempée. Ses bottines éclaboussèrent une nuée d’insectes rampants qui se dispersèrent quand elle approcha la navette – le chiss s’était retourné et elle eut enfin confirmation : il s’agissait bien de Kazorof.

- NON MAIS T’AS PAS HONTE ?! aboya-t-elle en le fustigeant du regard quand elle fut enfin à sa hauteur. Tu nous as laissés tous seuls comme ça derrière ! Dans la mi-sère !

Elle s’était plantée devant lui et relevait son minois courroucé vers le visage de Kazorof car elle était plus petite que lui malgré les talons qui la réhaussaient un peu sur ses bottines. Ses lekkus étaient enroulés autour de ses épaules, imitant pauvrement une écharpe.

- Tu es parti comme ça sans penser à ta petite Oola chérie ?! Que tu veuilles pas mettre les autres dans la confidence, je comprends, mais MOI !

Son ton surjouait une indignation catastrophée et elle planta subitement un doigt violet sur la poitrine de Kazorof.

- Tu sais quoi ? Tu mérites à peine que je t’adresse la parole, décréta-t-elle, puis aussitôt ses yeux s’étrécirent, et son regard dévia vers la créature de métal juste à côté. C’est ta navette, ça ? Je pars avec toi.

Elle jeta un coup d’œil vers le début des quais, mais l’heure de la nuit était avancée et l’endroit restait presque désert, si on omettait l’infinie foule qui se massait toujours vers les quais au nord, loin d’eux. Ici, les quais étaient lugubres, vidés d’âmes, et un frisson parcourut l’échine d’Oola lorsqu’un rongeur s’échappa de la poubelle derrière laquelle elle était restée dissimulée. Elle masqua son réflexe d’aversion en ajustant sa veste autour d’elle pour la resserrer un peu plus étroitement avant de croiser les bras.

- Tu me dois bien ça, après tout, poursuivit-elle en se hâtant vers la navette. Non mais vraiment, partir comme ça sans prévenir…

Comme Kazorof n’avait pas l’air de suivre, elle jeta un coup d’œil vers lui par-dessus son épaule.

- Ben alors, tu fous quoi ? Ne me dis pas que tu étais revenu pour autre chose que me récupérer quand même ?!

Oola resta bouche ouverte. Odieux, semblait dire son regard bleu.
Kazorof
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S'il avait imaginé un instant que son nom ferait écho dans tout le spatioport sitôt un pied en dehors du STS Arcadia, Kazorof y serait obstinément demeuré deux à trois heures encore. Les lèvres se sont d'abord crispées dans un rictus amer, le déni accroché sur le dos de son long manteau noir. La capuche rabattue sur le sommet du crâne, il refuse tout bonnement de se retourner. Mais de nouveau, l'affreuse injonction, balancée plus violemment encore, à en alerter les trois prochains quais alentours, si ce n'est carrément la BTA. Ses épaules s'affaissent dans un frisson brutal, et d''emblée il se tourne pour faire face à la catastrophique apostropheuse.

Ses yeux écarlates pourraient probablement l'incendier.

Nullement impressionnée ni par la posture de la twi'lek, ni par le ton ouvertement outrée qu'elle a visiblement décidé d'adopter, il lui passe fermement un bras par-dessus son épaule, prenant garde de ne pas toucher ses lekkus.

- Oo-laaaaa.

Le nom est pincé entre deux lèvres quasi-closes tandis qu'il la fait rapidement pénétrer l'Arcadia, l'enjambée follement rapide, et la poigne brutale.

- Qu'est-ce que tu fiches ici ?

D'un seul geste il la balance dans la rangée de sièges, étirés en rang d'oignon contre la paroi de métal. Sa capuche est tiré d'une main pressée. Il regagne l'entrée pour observer furtivement le bout du quai, perçoit un groupement d'uniformes familiers. Bordel. Lui qui était parvenu à demeurer sous les radars pour un atterrissage impeccablement discret sur le C23, voilà qu'elle venait de lui foutre au cul tout un paquet de troufions qu'il allait forcément devoir engraisser s'il ne voulait pas les voir fouiller l'intégralité du vaisseau.

- Tu t'es barrée c'est ça ?

Son regard ne s'attarde pas sur la twi'lek. Il vérifie machinalement que son blaster est toujours bien à sa ceinture, et mesure le temps qu'il lui reste avant le débarquement inévitable de la BTA.

- Vraiment très con si tu veux mon avis. J'peux pas t'embarquer. Naskosh doit déjà être à ta recherche. Il fait de moins en moins dans la dentelle depuis mon départ de ce qu'on dit. Si ça se trouve il t'as tracé. T'as quoi sur toi ? Débarrasse toi de ce que t'as pas besoin.

Il parle vite, et ses mains ont déjà ouvert et refermé plusieurs compartiments pour déplacer ci, et ça, beaucoup de ce qui ressemblerait de loin à des déchets spatiaux, mais qui clairement n'en sont pas. Certains trucs sont balancés dans son déchiqueteur avec empressement.

- Qu'est-ce que t'es allé t'barrer putain. Tu m'fous dans la merde. T'aurais pas p...

Kazorof se fige soudainement. Les soldats ne sont plus bien loin. Son regard se plante sur la twi'lek, et il la chope par un bras.

- Ok tu sais quoi ? On va faire un deal. Je t'aide à trouver une planque, et toi tu m'tire du pétrin dans lequel tu viens de m'enfoncer. J'ai aucune envie d'leur filer mes crédits, mais faut vraiment pas qu'il fouille ce putain de vaisseau. Tu me les distrais. Tu sais jouer un rôle hein Cha'kin ? Évidemment que tu sais. T'as qu'à dire que j'suis un client. Tu piges ? J'suis ton client, et c'est pour ça qu'on s'est mis là où y a personne. Me regarde pas comme ça. Deal ?

Son visage est si proche qu'il peut percevoir une sourde colère qui gronde dans le fond de ses yeux bleus.

- Deal ?
Oola Cha'kin
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Un instant, Oola n’avait pu dissimuler un sourire goguenard. De une, c’était bien Kazorof. De deux, elle était déjà à bord. Trop facile. Elle se laissa aller sur la banquette, trouvant une place à son aise, ignorant la brutalité avec laquelle elle y avait été repoussée. Une fois bien enfoncée dans le cuir usé, la twi’lek prit sa mine offusquée de nouveau, tout en serrant contre elle son seul bien : son sac de courses à moitié troué.  

- Attends, tu vas vraiment me reprocher de m’être tirée de là ? C’est le Temple Jedi qui se fout de la charité ! Et j’ai pris qu’un putain de sac plastique ! Tu me crois débile ? D’ailleurs, ça fait plusieurs jours que je suis partie figure-toi et personne ne s’est pointé. Conclusion : je suis clean de tout traceur, argumenta-t-elle avec aplomb, les yeux étrécis en suivant le manège du chiss d’un regard vindicatif.

Oola croisa les jambes, détacha son regard pour le baisser sur l’une de ses mains, examinant momentanément ses ongles : un vernis bleu électrique était un peu écaillé mais apparaissait luminescent dans la pénombre grâce aux diodes qui éclairaient quelques panneaux latéraux dans le vaisseau. Perdue ainsi dans sa contemplation délicate, elle poursuivit d’une voix plus calme.

- Comme si c’était moi qui te foutais dans la merde. Si tu veux tout savoir, Naskosh te cherche sûrement bien plus activement que moi et depuis avant mon départ. Il a dit qu’il avait vu clair dans ton petit jeu et que tu paieras le prix fort le jour où tu t’y attendras le moins. Il était fu-rax. Je l’avais jamais vu comme ça, je te jure, et maman dit qu’elle non plus, alors qu’elle est là depuis un sacré paquet d’années.

Avec détachement, comme si cette confession avait une importance pour Kazorof mais sûrement pas pour elle, la twi’lek haussa les sourcils – inexistants en réalité, c’était un rude trait de crayon noir qui lui donnait l’air plus âgée qu’elle ne l’était réellement. Subitement son minois surpris se redressa vers le chiss et elle resta figée.

- Heu…

Coup d’œil vers la sortie. L’ouverture du vaisseau laissait voir le quai strié par la pluie. Des silhouettes sombres martelaient en effet le béton dans leur direction. Une voix jeta un ordre et Oola déglutit.

- Attends, je vois pas en quoi c’est moi qui vient de t’enfoncer dans l’pétrin, protesta-t-elle subitement à voix basse, pour ne pas que leur dispute parvînt aux oreilles de la brigade. Et comment ça une planque ? Je veux pas une planque, je veux quitter la planète !

Mais le chiss insistait et ils se retrouvèrent nez à nez. Les yeux rouges du chiss avaient quelque chose de surnaturel. Elle les avait toujours trouvés malaisants, ces billes rouges et lumineuses, comme si elles étaient faites pour vous transpercer. Il s’en dégageait une impression d’impossible accès aux pensées de Kazorof. Oola pinça les lèvres.

- Deal, lâcha-t-elle finalement à contre-cœur.

Elle se leva subitement et repoussa du plat de la main le torse du chiss, afin de se dégager sèchement un passage vers la sortie. Elle accrocha le sac à son épaule et dézippa d’un geste sa veste en cuir : sa peau apparut au-dessous, sa poitrine dissimulée par un débardeur sur lequel elle tira rapidement pour faire apparaître la rondeur de ses formes au niveau de son décolleté, au moment où les pas des soldats se faisaient entendre juste au bas de la passerelle.

- Hé !
gronda une voix, rude, filtrée par un casque dissimulant un faciès alien. Sortez de là ! C’est un contrôle !
- OOooouuuh !

La voix de la twi’lek s’était faite brusquement joviale comme elle s’engagea vers la sortie de la passerelle. La brume s’était un peu dissipée à l’extérieur, si bien qu’à travers la pluie encore présente, on devinait les contours lumineux de quelques enseignes commerciales sur les bâtiments voisins.

- Restez tranquille, vous voulez ? C’est chacun son tour, non mais oh !

Oola avait fait irruption sur les marches de métal qu’elle descendit avec une précaution toute feinte, comme si elle était juchée sur des talons élevés – ce n’était absolument pas le cas. La silhouette en tête n’était autre qu’une armure constituée de pièces disparates, comme prélevées sur d’autres uniformes pour former un accoutrement bigarré mais solide complété par un fusil blaster qu’il gardait en main. Derrière lui, trois autres membres de la brigade – deux humains, un nikto – étaient plus simplement vêtus de combinaisons grises, mais ils portaient à l’épaule le même blason que leur chef : les lettres BTA étaient inscrites en aurebesh, mais Oola ne s’en formalisa guère. Elle eut un sourire aguicheur qui étira ses lèvres roses.

- Laissez-nous passer.
- Je suis désolée mais mon client m’a réservée pour touuute la soirée, claironna-t-elle. Ça ne sert à rien de faire la queue ou de vous bousculer, c’est premier payé premier servi. Revenez d’ici deux à trois heures, au mieux.

Le soupir du chef s’entendit à travers son casque – les trois autres restaient mornes, ou rêveurs, en regardant évoluer la twi’lek qui toucha le bras de l’armure du bout du doigt, comme pour faire mine d’être admirative d’une telle pièce. Elle avait rejeté l’un de ses lekkus en arrière, gardant l’autre sensuellement déposé sur son épaule.

- Pour qui est-ce que vous travaillez ? grommela encore l’armure.
- Moi ? Mais pour personne, je suis une indépendante, sourit Oola.

L’humanoïde dans l’armure se raidit imperceptiblement.

- Vos papiers.

Le sourire de la twi’lek se crispa. Elle rejeta son deuxième lekku brusquement en arrière. Le chef en armure tendit la main vers elle.

- Ahm… C’est-à-dire que…
- Vous êtes majeure ?
- Mais oui…
- Et indépendante.
- Mais oui !
- Alors, vous avez des papiers. Sinon, vous êtes en situation irrégulière.

Oola resta immobile, comme figée sur place. L’un des humains eut un ricanement.

- Indépendante, hein, laissa-t-il échapper d’un ton railleur, désagréable. Comme si les twi’lek savaient gérer elle-même leurs contrats et se protéger des fraudeurs. Tu f’rais mieux d’intégrer un réseau, et vite.
- On peut t’en présenter un ou deux, nous, renchérit le nikto, dont la voix reptilienne avait un timbre nasillard.
- N’importe quoi, persifla Oola en  les fustigeant du regard. Les twi’lek peuvent travailler à leur compte, je vois pas le problème ! Sur Ryloth, il y a des femmes qui organisent des maisons entières et d’abord je sais faire des factures et même un peu la comptabilité, môssieur ! Et je suis sûre que -
- Vos. Papiers, la coupa sèchement le chef.

Oola se tut, mais elle recula d’un pas. Elle affichait soudain une mine supérieure, fermée. Ses yeux bleus étaient catégoriques.

- Je les ai oubliés, déclara-t-elle en croisant les bras, visiblement de mauvaise foi.
- Embarquez-la.
- Quoi ?!

Elle n’eût guère le temps d’obtenir des explications. Les trois uniformes l’entourèrent pour la saisir par les bras et elle se sentit trembler subitement comme une feuille sous le regard inhumain du casque trônant sur une armure bigarrée.

- Mais attendez, mais ça va pas non ?! C’est même pas moi que vous cherchiez à l’origine ! Celui que vous cherchez est là-dedans ! Moi je suis innocente ! J’ai rien fait ! Je suis montée là par hasard, je le connais même pas !

- Innocente et sans papier, bien sûr, on fouillera tout ça pour vérifier une fois en cellule…
- QUOI ?!

Et subitement, la twi’lek se retrouva les mains sèchement ramenées dans le dos. Un métal froid se referma sur ses poignets et elle comprit qu’elle était déjà menottée. La panique l’envahit subitement et elle se démena pour se retourner vers le vaisseau : en haut de la passerelle, cependant, il n’y avait personne.

- KAAAAZ ! KAAAAAZ AU SECOUUURS ! KAAAAAAAAAAZ !
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Dans l'ombre de son habitacle, Kazorof s'était appliqué à tirer son manteau pour le délester sur le sol, et à débrailler sommairement ses mèches de quelques gestes hâtifs. Ses bretelles étaient tombées de ses épaules, et son tee-shirt avait ça et là quitté les bordures du pantalon, histoire de prétendre un minimum à la connerie. Son bras avait automatiquement refermé la porte aussitôt que Oola avait gagné la passerelle, l'abandonnant complètement aux troufions de la BTA. Avec un peu de chance, le jeu d'acteur de la twi'lek suffirait à leur faire oublier le contrôle de son quai. Le corps en tension contre la paroi de métal, il écoutait la conversation, qui lui parvenait à demie-étouffée, mais tout de même suffisamment clairement.

- Bordel Oola, cause pas tant, il échappe entre ses lèvres dans un chuchotement rageur, le poing serré au-dessus de sa tête. On s'en branle que tu sache faire la putain de comptabilité.

Son blaster est saisit presque par réflexe tandis qu'il perçoit le cliquetis familier de menottes, mais il ne fait pas un geste pour actionner l'ouverture de l'habitacle. Son nom résonne de nouveau plus intensément que tout à l'heure, se répercute sur les parois du vaisseau, et probablement jusqu'au bout du quai. Il serre les dents. Il pourrait juste les laisser l'embarquer. Faire décoller l'Arcadia ne lui prendrait qu'une poignée de minutes, ils n'auraient pas le temps de revenir, ne se rappelleraient probablement pas de son vaisseau. La twi'lek n'était vraiment pas son problème. Elle n'aurait même jamais du être ici. C'était sa faute si la BTA avait débarqué, c'était qu'un juste retour des choses qu'elle les éloigne de lui et lui laisse le temps de déguerpir.

Kazorof a pas la moindre putain d'idée de ce qui lui prend pourtant soudainement, alors que d'un geste il dégomme l'interrupteur, et que de quelques enjambées il gagne le haut de la passerelle pour interpeller les trois types. Ses yeux rouges s'attardent sur les mains qui trainent sur Oola.

- Hey, s'passe quoi là, j'ai payé pour celle-là, c'est quoi l'problème ?

La nonchalance de sa voix contraste parfaitement avec l'adrénaline qui le prend aux tripes. Il est déjà en train d'évaluer la distance entre lui et les soldats. Leur posture. L'emplacement de leurs armes toujours scellées à leur ceinture. Les trois se tournent, et c'est l'officier qui répond en lui faisant pleinement face.

- Elle est pas en règle. Laisse nous faire notre travail si tu veux pas qu'on t'embarque aussi.
- Mais j'ai payé, alors m'rendez mes crédits ou vous m'la laisser deux heures comme c'est prévu.
- T'as pas compris je crois.
- Oh si j'ai compris. J'ai compris que j'me faisais arnaquer. T'es dans l'coup c'est ça ? Il demande brusquement à Oola en dardant sur elle deux yeux ardents. C'est pour ça qu'tu coûtais pas bien cher, c'est une putain d'arnaque. Vous savez pas qui vous essayez d'arnaquer. J'bosse pour Drelgun Kretta, ça vous parle non ?

Kretta était un nom qui pesait suffisamment lourd pour que les deux types tenant Oola se regardent un peu incertains, tandis que l'autre se démontait pas et faisait un pas en direction de Kazorof.

- C'est une menace ? Me rappellerait si j'avais vu un chiss autour de Kretta.

Merde. Fallait qu'il tombe sur le mec qui connaisse le cercle de Kretta. Évidemment. Kazorof s'avance toutefois, descend la passerelle d'un pas déterminé pour tenir tête à l'officier.

- Tu veux faire un pari ? On voit combien de temps tu gardes ton poste au spatioport quand tu te seras tiré avec ma marchandise. Vas-y j'te regarde.

Y a une seconde qui passe. Une autre. Le silence s'étend jusque la paire de dégénérés qui continuent de maintenir Oola, à laquelle il n'adresse aucun regard. Il aurait du les laisser se barrer avec la twi'lek, ça parait évident. Le mec mord pas. Il a tout du mec qui se fait graisser la patte par beaucoup plus haut que Kretta. Le plan est carrément foireux. Alors avant que la décision soit prise du côté de la BTA, Kazorof se décide à balancer violemment la tête vers l'avant pour assommer le type, et de dégainer son blaster pour tirer sur les deux sbires.

- BOUGE ! Il balance à Oola en la chopant par le bras pour la pousser vers le vaisseau.

Oola Cha'kin
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Un petit cri s’était échappé des lèvres de la twi’lek à la vue de l’officier que Kazorof venait d’assommer. Les tirs de blaster fusèrent, les deux sbires se jetant de côté pour tenter d’éviter les traits d’énergie. L’un d’eux prit un tir dans la jambe et s’effondra au sol avec un cri de douleur, mais le nikto réussit à se dissimuler derrière une caisse pour essayer de tirer à son tour. Oola sursauta avec un nouveau cri avant d’enfin réagir à la traction du chiss. Tous les deux grimpèrent sur la passerelle, Kazorof se retournant brièvement pour répliquer aux tirs de blasters qui s’écrasaient sur la carlingue avec fracas.
Bientôt, ils s’engouffrèrent à l’intérieur et Oola se jeta sur la banquette derrière le siège de pilotage en se recroquevillant pour éviter de nouveaux tirs, la tête rentrée dans les épaules. Heureusement, Kazorof avait déjà actionné la passerelle qui se referma dans un concert de pistons de compression. Une fumée blanche fut éjectée autour de l’appareil, noyant le quai tandis que le chiss se ruait sur les commandes. Oola, elle, préféra rester recroquevillée, tremblante et les yeux fermés, un long moment. Elle fut ballotée contre la banquette, sentant soudain sous ses pieds le grondement rude des moteurs du vaisseau qui s’éveillaient en rugissant. Les secousses étaient chaotiques, signe que Kazorof ne prenait guère beaucoup de précautions pour les faire décoller à la va-vite.

Au bout de plusieurs minutes, enfin, les vibrations s’harmonisèrent et s’apaisèrent, signe que l’appareil avait trouvé un rythme de croisière.

Derrière le siège de Kazorof, au-dessus de son épaule, le haut des lekkus, puis les yeux d’Oola apparurent, prudents. Elle s’était cramponnée avec force au siège du pilote et son regard électrique dévorait ce qui se déroulait sous ses yeux : une étendue noire et profonde. Infinie.

Un moment, elle resta longuement silencieuse. Son souffle fébrile s’échappait de lèvres restées entrouvertes. Un « woaw » discret lui avait échappé tandis qu’elle sentait son cœur battre à tout rompre – et son estomac se soulever drôlement lorsqu’ils sortirent de l’atmosphère.

Alors, sans les frictions de l’air qui les avaient freinés jusque-là, le silence s’installa aussi dans l’habitacle, seulement troublé par quelques bips discrets émanant du tableau de bord et le ronronnement lointain des machines sous leurs pieds. Oola laissa échapper un soupir de soulagement avant de sourire, hébétée devant ce spectacle qu’elle vivait pour la toute première fois de sa vie : l’espace, vu de ses propres yeux, à travers seulement une fine vitre de transparacier.
Au bout d’un moment, elle s’ébroua.

- Pfiou, c’était moins une, lâcha-t-elle juste au-dessus de l’épaule de Kazorof. Heureusement que j’ai bien joué mon rôle, hein ?

Sans plus attendre, Oola se redressa. Elle sortit de la banquette pour mieux enjamber l’accoudoir du siège de copilote et de crapahuter pour s’y installer – non sans donner un coup de coude maladroit au chiss. Enfin, elle réussit à se glisser sur le fauteuil et chercha la ceinture de sécurité pour la passer autour de son bassin avec précaution. Puis elle déposa ses mains sur les accoudoirs avec un soupir d’aise, à la manière d’une passagère s’installant en première classe. Ses yeux se verrouillèrent de nouveau sur cet écran étrange, noir, infini. Les lumières intérieures du vaisseau – principalement des diodes et des écrans aidant au pilotage, leur faisaient un teint plus pâle que d’ordinaire. Oola remua le bout de ses doigts. Gigota un peu du bout des pieds, baissa les yeux sur les commandes auxquelles elle ne comprenait rien.

- Au fait, c’est moi que t’appelles la marchandise ? Je te prierai d’avoir un peu plus de respect à l’avenir, décréta-t-elle sur un ton urbain. Quel prétexte t’aurais utilisé si j’avais pas été là pour jouer les greluches prêtes à se vendre au plus offrant, hein ?

Elle continua d’examiner son environnement quelques secondes. Il y avait une sacrée floppée de boutons sur ce tableau de commandes, mais elle eut la bonne idée de ne toucher à rien. Il y avait un kit d’urgence accroché non loin de sa tête, ainsi qu’une poignée pour s’accrocher. Au-dessus, plusieurs anneaux semblaient servir à ouvrir de petits compartiments techniques. Oola s’en désintéressa pour regarder Kazorof – il pilotait très sérieusement. Elle avait toujours trouvé qu’il faisait tout très sérieusement. Elle ne serait pas de trop pour égayer un peu son voyage.

- Alors on va où du coup ? Pas sur un monde trop froid j’espère, je suis pas équipée pour.
Kazorof
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L'adrénaline est pas vraiment retombée. Elle s'est doublée d'une colère sourde qui le fait pousser avec brutalité sur les leviers de commande, ses yeux rougeoyants braqués sur un horizon obscur ponctué de plusieurs déchets spatiaux et astéroïdes informes. Pas un mot n'est expulsé tandis que la twi'lek s'agite autour de lui, occupant l'espace de répliques absurdes qui ne manquent pas ajouter à son bouillonnement interne. Puis, d'un geste sec, le chiss se redressa pour saisir une poignée au plafond, se retourner pour dominer Oola de toute sa hauteur. Son regard semble vouloir la clouer à son siège.

- Je te rappelle que si tu avais pas été là, y aurait jamais eu de putain de brigade sur ce putain de quai !

Les deux mains se sont plaqués sur les accoudoirs, et il approche pour presque lui coller au visage.

- Alors je m'en bat les reins que t'aies chaud ou que t'aies froid, ou que tu sois vexée parce que tu trouves que j'te traite pas avec respect, parce que putain j'étais à ça, il montre un espace minuscule entre son pouce et son index, ça Oola, d'les laisser t'embarquer, tellement t'as tout fait foirer.

D'un mouvement il se redresse, le regard toujours nettement agacé.

- Tu m'casse les couilles.

Délaissant le cockpit, il s'enfonce à l'intérieur du vaisseau pour ouvrir un compartiment, en tirer une tablette étroite sur laquelle il s'affaisse, son attention focalisée sur la carte qui défile. Il avait prévu de décharger sa cargaison pour la revendre dans les vingt-quatre heures, pas de la conserver bêtement entre Nar Hutta et Nar Shaada. Faudrait pas une heure avant qu'un vaisseau les accoste pour leur demander ce qu'ils foutent là. Sans plan, il allait juste devoir se débarrasser de ce qu'il avait mis des jours à récupérer.

- Putain.

Le visage s'éclaire au moment où l'index percute un point volumineux à une embardée de là. Pourquoi il y a pas pensé plus tôt. Possiblement que c'est même mieux que ce à quoi il avait pensé au départ. Bon, ça il le dirait pas à haute voix. Il balance l'appareil dans le compartiment, refermé dans la seconde, avant de se replacer aux manettes pour faire bifurquer l'Arcadia côté tribord, et relancer les réacteurs.

- T'auras pas froid là où on va. Mais va falloir apprendre à tenir ta langue. T'as déjà entendu parler de l'Anomalie ?

Le satellite, minuscule, gravitait autour de Nar Hutta dans un enchevêtrement de pièces immondes qui formaient un genre d'aberration tentaculaire, d'où le nom que tout le monde lui avait donné. Le groupement était une merde incroyable, véritable marché noir expulsé de la planète depuis de nombreuses années, et qui échappait clairement à toute autorité - probablement parce que l'autorité n'en ressortait jamais. Avec le temps, la rumeur disait que c'était devenu une simple déchetterie, mais le chiss était persuadé que la cité vivait encore. Kazorof y avait jamais mis les pieds. Parce que si le système avait une sale réputation, ce coin là était peut-être le pire.

- La BTA nous lâchera pas le train tant que j'aurais pas évacué l'orbite de Nar Shaada. Là-bas, personne nous suivra. On va oublier les histoires de marchandise. Celle qui va les intéresser te ressemblera pas.

Le vaisseau est subitement projeté vers l'avant, et Kazorof sent un soulagement lui traverser le corps, déliter la colère de tout à l'heure. Son visage est détendu lorsqu'il se tourne vers l'adolescente.

- Et arrête de faire la gueule.
Oola Cha'kin
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Oola s’était figée, les yeux agrandis dans l’expectative, en silence. La voix du chiss était plus virulente qu’elle ne l’aurait cru. Elle fouilla un bref instant sa mémoire, à la recherche de la dernière fois où elle avait vue Kazorof si fâché que cela, et ne trouva rien : c’était la première fois qu’elle l’entendait crier ainsi.

Mais la tempête fut vite passée. Les yeux bleus électriques d’Oola suivirent les mouvements du chiss, sans expression. Mais bientôt, elle haussa les fins traits de maquillage qui faisaient office de sourcils, et un fin sourire étira ses lèvres. C’était comme elle s’y était attendue : Kazorof n’était pas vraiment fâché contre elle, il était juste un tout petit peu stressé. Elle se laissa aller en arrière avec un sourire.

- L’Anomalie ? Jamais entendu parler.  

Quand Kazorof revint près d’elle, cependant, elle affichait de nouveau un air affecté, voir profondément offusqué. Il ne fallait pas le laisser croire qu’il s’en tirerait à si bon compte après pareil affront. Elle croisa les bras sur la poitrine et détourna le visage. Ses cils papillonnèrent de temps à autre, quand elle jetait vers lui quelque regard discret, pour vérifier ses faits et gestes. Tant qu’il ne retournait pas sur la planète, cela lui conviendrait bien.

- J’fais pas la gueule. T’as pas un chewing-gum ?

Oola soupira, puis ouvrit un compartiment à sa droite, au hasard. Il était rempli de fils et de petits trucs en métal et elle s’en désintéressa immédiatement. Elle referma le compartiment pour ouvrir le suivant.

- Ooooh, trop bien, je crève la dalle.  

La twi’lek tira un sachet du compartiment. C’était un papier sulfurisé à la couleur de l’acier où était imprimé un logo haut en couleurs – Glucar, l’énergie en barres ! – dont Oola coinça un bout entre ses dents pour déchirer le coin du papier, non sans effort. Elle renversa la tête en arrière pour avaler le gel violine et épais qui s’échappa du sachet.

- Mmmmh…  

Elle écarta le sachet un instant, pour lire que le gel nourrissant était parfumé au cactus d’Hypori. Elle haussa les épaules avant de reprendre sa dégustation, sans la moindre intention de partager ce précieux butin.

- Mmmh, dis donc, t’as déjà mangé du cactus d’Hypori pour de vrai ? Moi non.

Pas grand-chose ne poussait sur Nar Shaddaa, à part les plantes à épices qui se vendaient sur les marchés pour leurs propriétés récréatives. Le goût du cactus d’Hypori n’avait rien à voir avec les odeurs des feuillages amers des plantes à épices. Oola ferma les yeux pour s’enfoncer dans le siège, suçotant le sachet jusqu’à la dernière goutte.

- J’espère que ta destination est aussi chaude qu’Hypori. J’ai toujours rêvé d’être un peu plus, comment dire, un peu plus foncée, tu vois ? Avec un teint fuschia, j’suis sûre ça ferait plus contraste avec mes yeux. Parce que j’ai des jolis yeux, mais ils ressortent pas trop. Tu as remarqué au moins ? J’ai pas les yeux pareil que ma mère.  

Elle rouvrit les paupières pour se redresser subitement, et balança nonchalamment le sachet vide derrière le siège, avant de se pencher vers Kazorof. Pour le voir de près. De très près. Si près que le bout de son nez aurait presque touché la pommette du chiss si celui-ci ne s’était écarté au dernier moment.

- Qu’est-ce que t’en penses ? Plutôt joli non ?

Elle haussa encore les sourcils, plus haut pour bien lui montrer la couleur de ses yeux. Puis elle se laissa retomber dans son siège, mais sans quitter Kazorof du regard. Elle avait pour une fois un prétexte pour le détailler un peu. Cette fois, elle avait vu de plus près ses yeux à lui, avec ce rouge énigmatique, un peu trop lumineux pour être naturel. Pour être expressif, même. Elle froissa les lèvres en une moue songeuse.

- Avec du fuschia, ça ressortirait mieux.  

Oola détourna le regard vers l’espace. Des astéroïdes frôlèrent la carlingue de l’appareil et elle rentra imperceptiblement la tête dans les épaules – mais il n’y eut aucun impact. Kazorof était concentré sur le pilotage. Oola se mit à jouer avec le bout d’une étiquette qui se décollait légèrement sur le tableau de bord.

- Elle ressemble à quoi, ton Anomalie ?  

Elle eut un sourire malicieux quand son regard en coin chercha de nouveau le chiss.

- Elle fait quel genre de business ?  

Oola décocha un petit coup de coude vers l’avant-bras de Kazorof.

- Tu peux m’le dire hein. Elle est humaine ? Ca fait longtemps qu’tu la vois ?

Kazorof
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Shigreja. Sûr qu’Oola en avait un air. Sans doute que c’est ce qui l’emmerdait, globalement, dans toute l’affaire. Il pouvait décemment pas envoyer dériver par-dessus bord cette gueule là. Fut un temps, fort lointain, le visage avait représenté tout un monde. Il avait fallu plusieurs années pour réaliser que ce monde n’était pas le sien. Il avait malgré tout conservé une importance pour Kazorof. Comme les multiples frères et sœurs qui avaient peuplé son berceau. Il ne l’aurait jamais admis à voix haute cependant.

- Mon anomalie…

Le chiss se tourna pleinement vers l’insolente pour la guetter de toute sa hauteur, se pencher légèrement pour approcher presque autant qu’elle l’a fait tout à l’heure. Sa main vient s’ajuster à la hauteur des deux lekkus, emballés dans leurs lanières de cuir.

- À peu près haute comme ça. Le teint rose, pâle, des yeux turquoises, et un culot plus gros que la gueule d’un rathtar.

Immédiatement il se décroche pour de nouveau s’investir sur son tableau de bord, enclencher plusieurs mécanismes dans une gestuelle vive et parfaitement naturelle.

- Mais si on parle de l’Anomalie, on parle plutôt d’une décharge géante qui flotte au milieu de l’espace, et qu’attend que de nous digérer vivant. C’est ni humain, ni quoi que ce soit. C’est un bordel sans putes, mais qui brasse possiblement bien plus de crédits que tu n’en verras jamais de ta vie. Quant au genre de business qu’on y trouve…

Kazorof abaissa le levier d’accélération et retourna dramatiquement son siège pour faire de nouveau face à la twi-lek, son regard pénétrant la couvrant avec flegme.

- Disons que c’est le genre de contrebande dans lequel même les hutts veulent pas tremper le bout de la queue. Alors le moins tu cause, et le mieux tu te portera. Si tu dois causer, évite de reproduire ton petit spectacle de tout à l’heure à moins de vouloir finir en pièces détachées.

Le problème avec Oola, c’est qu’elle est justement pas comme Shigreja. Elle en a certes un air, mais aucunement le caractère. À l’opposé du servile, elle peut pas s’empêcher de l’ouvrir pile quand il faut pas, à essayer de se faire plus grande qu’elle ne l’est, pour prouver il sait pas trop quoi.

- C’est ma seule chance de me débarrasser de ma cargaison sans perte, alors tu fais pas n’importe quoi. Sinon j’t’en fait bouffer pour de vrai des cactus d’Hypori, et tu verras par toi-même que ça a pas grand chose à voir avec les Glucar.

Ces trucs là étaient gorgé de beaucoup de connerie, mais clairement pas franchement de cactus. Tout simplement parce que ça se bouffait pas. L’exotisme du nom prêtait juste une valeur au produit, et faisait probablement rêver un bon quart d’enfants bafoués du système hutt. Il l’avait appris de la pire des façons, et il recommencerait pour rien au monde. Le faciès se détend quelque peu tandis que le vaisseau poursuit sa route, en pilote automatique. Il quitte son siège pour ouvrir un compartiment au-dessus du transparacier, y récupère une sacoche qu’il laisse brutalement tomber sur le siège.

- Je suppose que t’as pas d’arme dans ton sac plastique. Tu sais te servir de ça ?

La fermeture est brutalement ouverte pour dévoiler un blaster d’ancienne génération, légèrement rouillé mais en très bon état de marche. Son ancien compagnon d’infortune, remplacé quelques mois plus tôt seulement, et gardé là pour les cas d’urgence. Il y en avait bien deux autres planqués dans tout le vaisseau.
Oola Cha'kin
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Oola avait soutenu le regard du chiss avec une détermination tranquille - du moins, en apparence - avec un petit air sévèrement mutin dans le regard, qui n'était pas sans rappeler, en réalité, Shigreja lorsqu'elle menaçait silencieusement sa marmaille quand elle se montrait trop dissipée. Mais Oola n'avait en effet pas grand chose d'une mère s'inquiétant pour ses enfants. Elle n'avait pas grand chose de quelqu'un qui s'inquiéterait pour qui que ce soit d'autre qu'elle-même, en réalité. Sa bouche s'étira en un sourire faussement poli tandis qu'elle détourna son regard blasé vers l'océan noir qui leur faisait face.

- Une décharge géante. Wouahou. Su-per. J'ai hâte d'y être.

Tandis que le chiss poursuivait, Oola leva les yeux vers le plafond, et tâcha de se taire avec un soupir. Mais elle ne put résister bien longtemps.

- Je te rappelle que c'est toi qui a voulu que j'aille leur jouer un petit numéro. Moi, j'avais rien demandé à la base. Et pourquoi tu la jettes pas dans l'espace, ta cargaison, si tu veux t'en débarrasser, d'abord ?

Les lekkus de la jeune femme glissèrent le long de ses épaules quand elle se tourna vers les manettes laissées vides par Kazorof. Elle haussa un moment les sourcils, impressionnée que le vaisseau pût être ainsi laissé dérivant dans l'espace. S'il y avait bien un domaine dans lequel elle ne connaissait rien, c'était bien le pilotage. Elle s'intéressa vaguement à toutes les commandes compliquées qui s'étalaient sous son nez, jusqu'à ce qu'une sacoche atterrît sur le siège voisin, la faisant sursauter. Kazorof en sortit un blaster et Oola déglutit un bref instant.

- Ben oui, oui bien sûr que j'sais m'en servir. T'oublies que j'ai grandi sur Nar Shaddaa comme toi ou quoi !

Avec assurance, Oola s'empara de l'objet, et se dépêcha de le dissimuler dans le sac plastique qu'elle remit hâtivement à son épaule. Elle s'agita un bref instant dans son fauteuil, et soudain décida qu'il n'était plus nécessaire de conserver sa ceinture de sécurité. Le harnais cliqueta lorsqu'elle le décrocha pour mieux se hisser vers l'arrière du cockpit, sans un regard supplémentaire pour Kazorof.

- Pousse-toi, il faut que j'aille me remaquiller.


La silhouette de la twi'lek fut engloutie dans la pénombre du vaisseau, où seules quelques diodes discrètes coloraient de lueurs douces les contours de la coursive principale et des quelques caisses qui y étaient entreprosées. Au fond, en dehors de la passerelle extérieure verrouillée, deux petites écoutilles étaient fermées, et Oola se dirigea dans cette direction pour explorer les cabines que ces ouvertures dissimulaient.

- Y'a un miroir dans ton foutu vaisseau ? jeta-t-elle par-dessus son épaule.

Ses doigts effleurèrent un panneau de commande, et un bip ! réprobateur se fit entendre en même temps qu'une petite lumière rouge sur le panneau de commande. Oola haussa les épaules avant de tenter sa chance sur le panneau de commande de l'écoutille voisine. Cette fois-ci, le panneau de métal se déverrouilla immédiatement dans un chuintement feutré : au-delà, une lumière blanche dans une minuscule pièce faisait étinceler les rebords métalliques d'un lavabo et d'un toilette, sobres. Une douche à ultra-sons était coincée dans un angle, mais pas de miroir à l'horizon. Oola laissa échapper un soupir à la vue de cette salle de bain beaucoup trop rudimentaire à son goût. Elle s'y réfugia néanmoins en faisant coulisser l'écoutille derrière elle pour la refermer.

Echappant enfin à tous les regards, Oola laissa échapper un long soupir silencieux, les lèvres formant un petit O maîtrisé tandis que ses deux mains tremblantes se débarrassaient du sac plastique, qu'elle posa dans le lavabo. Avec précaution, elle en retira le blaster.

Ce n'était pas une très grande arme, mais elle était plus lourde qu'elle ne l'aurait crue. Un peu rouillé par endroits, le métal sombre était maculé de petits éraflures discrètes, témoignage de toutes les aventures au cours desquelles il avait servi. En s'humectant les lèvres, Oola le fit tourner doucement entre ses mains pour l'observer sous toutes les coutures. Il y avait ici et là des petits mécanismes, qui servaient probablement à désassembler l'arme, ou à la recharger. Enfin, elle finit par oser mettre la paume de sa main sur la crosse et son index se posa lentement sur la gâchette.

Elle leva le blaster dans la seule direction où elle avait la place pour le faire, vers sa gauche : sur la surface chromée d'une armoire à pharmacie, son reflet la menaça de cette arme et Oola fronça les sourcils pour paraître plus dure, les lèvres froissées en une moue concentrée.

Mais soudain elle abaissa le blaster pour mieux s'approcher de l'armoire chromée, et elle fit passer sur sa joue couleur parme ses doigts délicatement manucurés.

- Chuba, jura-t-elle à voix basse. C'est vrai que je suis trop pâle. Fichue lumière blanche, aussi... KAZ !

Oola se hâta de ranger l'arme dans le sac, pour mieux entrouvrir l'écoutille ensuite. Son visage apparut dans l'entrebaîllement, ainsi qu'un lekku qui se balança juste en-dessous.

- Kaz ! Dis, on pourrait acheter des lampes à UV pour le vaisseau ? Qu'est-ce que t'en penses ? Elles sont bleues, en général, ça donnerait un petit coup original au style intérieur, puis ça irait bien avec ta couleur quoi. Tes p'tits coins, on dirait une morgue, puis ton cockpit est super sombre. Alors qu'on pourrait en profiter pour améliorer un peu notre teint pendant le voyage. D'ailleurs, on en a pour longtemps ?
Kazorof
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Cinq minutes. Ce fut tout ce dont Kazorof put profiter avant que la voix criarde ne bouleverse à nouveau les corridors. Il avait levé les yeux au ciel lorsqu'elle avait indiqué aller se remaquiller, parce que bon sang, bien sûr que c'était important à cet instant, en cet endroit, et au vu de ce qu'ils allaient faire... Mais il n'avait rien dit, car il n'attendait qu'une chose depuis qu'il s'était assit au poste de pilotage. La solitude et le foutu silence. Ça n'avait pas duré. Deux doigts portés sur l'arête du nez, il échappe un soupir. Se tâte à la laisser sans réponse, réalise bien vite que y aura pas de meilleur moyen de la faire brailler encore plus fort, et encore plus longtemps.

Une dernière vérification des coordonnées, et il quitte le cockpit pour gagner l'arrière du vaisseau. Son pas léger et ses mouvements lestes font de lui quelqu'un de plutôt silencieux, et c'est presque soudainement qu'il parait dans l'encadrement de la pièce occupée par Cha'kin. Bras croisés, il reste là une à deux secondes, ses yeux d'abord perché sur le sac qu'elle a apporté là, puis sur le visage identique à celui qu'elle arborait tout à l'heure. Se remaquiller. Bien sûr. Plutôt fouiller l'intégralité de l'endroit tant qu'elle l'a pas dans les pattes. Pas de doute que celle là sort du même endroit merdique que lui.

- Mais pourquoi j'y ai pas pensé plus tôt. Des lampes UV. T'as d'autres idées brillantes comme ça j'suppose. P't-être quelques néons fushias pour la convivialité ? Des droïdes masseurs, un ou deux générateurs d'encens, ce genre de truc... ?

Les yeux illuminés d'une complicité sarcastique se fendent subitement d'une rougeur brute et sombre. Un bras empoigne sa cadette avec force tandis qu'il la sort de la cabine pour l'entrainer à sa suite. L'autre main a saisi le sac, qui gigote bruyamment contre lui jusqu'à ce qu'ils atteignent le pont.

- T'as cru que t'étais en croisière ou quoi, il grogne entre ses dents.

Le plat de sa main s'écrase contre un bouton poussoir, qui provoque la chute brutale d'un volet. À l'intérieur, une caisse de métal scellée.

- Là-dedans y a de quoi s'acheter un vaisseau de trois fois la taille de celui-là, avec toutes les lampes UV qu'tu veux. Tu captes ? Alors non j'vais pas tout balancer dans l'espace : j'ai besoin que tu prenne ça au sérieux Cha'kin. C'est pas un putain de jeu. T'as grandi sur Nar Shaddaa, tu l'sais que c'est pas un putain de jeu. Quand j'te dis que j'ai un plan pour me tirer de ce foutu système, j'déconne pas. Alors prends ça au sérieux.

La main se rabat pour redresser le volet d'une seule pression, et il lui balance son sac entre les bras.

- Montre moi. Comment tu tiens ton blaster. J't'ai jamais vu en utiliser, j'ai b'soin d'être sûr que tu sais faire. Grouille.

C'est sûr qu'elle va tout faire capoter. Il sait même pas pourquoi il la garde à bord putain.
Oola Cha'kin
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- HAAAAaaaaaaaaaan nan mais attends mais c'est des SUPERS idées !

Oola avait porté ses doigts manucurés - le vernis de ses ongles était malheureusement clairement abîmé - pour cacher sa bouche ouverte en un O admiratif. Evidemment, Kazorof n'était pas sérieux, et la twi'lek le regarda faire sa démonstration avec la fameuse marchandise. Elle toisa vaguement le volet, l'air offusqué, et rattrapa le sac contre elle de justesse.

- Hé ! Doucement s'il te plaît ! On t'a jamais dit de traiter les femmes autrement ?! Pas étonnant qu'tu virevoltes tout seul  dans ton vaisseau avec un manque de tact pareil ! brailla-t-elle, les lèvres pincées.

Les néons blancs de ce qui faisait office de salle d'eau blanchissait la cime des lekkus d'Oola, qu'elle enroula autour de ses épaules comme si elle se drapait d'une étole précieuse. Le chiss et elle échangèrent longuement un regard silencieux, puis elle finit par consentir à ressortir l'arme pour la tenir de sa main droite. Plutôt que de viser quoique ce soit, elle se contenta de baisser les yeux sur le revolver, comme pour l'observer de près.

- Du fuschia, des massages et de l'encens... Tu savais que j'avais toujours rêvé d'ouvrir un salon de bien-être ? tenta-t-elle en relevant le regard.

Elle agrandit ses yeux, soulevant ses faux sourcils dessinés au crayon. Devinant qu'elle allait recevoir un autre sermon, Oola leva une main comme pour interrompre Kazorof avant même qu'il ne pût parler, le temps de pouvoir injecter ses idées.

- Mais Kaz on pourrait faire FOR-TUNE. Sur le long terme j'veux dire. On refait l'intérieur du vaisseau, avec un petite cabine privée pour les massages - j'te laisse faire les massages, j'veux bien faire les crâniens mais c'est tout. J'peux faire les épilations et les manucures, et on sera le premier salon de bien-être itinérant ! Et LA tu vois qu'c'est utile que j'sache faire la compta hein ! Avec tous les crédits qu'on va s'faire...

Elle avait fini sa tirade sur une voix plus douce que celle qu'on lui connaissait habituellement. Même ses yeux étaient devenus moins hostiles, tandis qu'elle guettait le chiss. Mais ce dernier était comme une statue taillée dans la pierre bleue, percée de deux rubis qui ne cillaient jamais ou presque. Oola l'avait toujours connu comme ça : même enfant, elle le trouvait impénétrable, impossible à transpercer, impossible à lire, impossible à émouvoir. Etait-ce lié à son espèce ? Peut-être. Comment savoir ? Les Chiss, ça ne courait pas les rues. Il lui semblait même n'en avoir absolument jamais rencontré en dehors de Kazorof. Ses sourcils comme des barres sombres sur ce regard sibyllin accentuait une impression vague d'hostilité dont elle n'avait jamais su si elle était voulu ou non. Kazorof voulait-il avoir l'air d'un dur, ou bien était-ce inconscient ?
Elle n'avait pas peur de lui.
Pourtant, elle finit par soupirer, voyant que ce silence prolongé n'était pas en sa faveur.

- Pfff, bon, bon, d'accord.

Oola laissa choir le sac à ses pieds, et prit le revolver à deux mains. Elle visa en direction d'une cible imaginaire, par-dessus l'épaule du Chiss. Elle ne tenait pas très bien la crosse, ni ne savait placer l'arme par rapport à son regard ; elle se doutait juste qu'il fallait approximativement viser dans la bonne direction. Cela devait suffire, non ? Après, il fallait appuyer sur la gâchette. Ce qu'elle ne ferait pas là : elle avait beau ne pas être allée à l'école, elle savait quand même qu'il était de bon ton de ne pas percer la carlingue d'un vaisseau dans l'espace.

- Piou ! elle mima à voix basse, du bout des lèvres, en levant légèrement le canon comme si un coup était parti.

Ca, elle savait à peu près quel mouvement et quel bruit ça faisait. Sûr qu'elle ne s'en était jamais servi elle-même, mais que dans les quartiers du hutt qu'elle avait servi, elle avait vu un sacré paquet de gens tirer avec un blaster. Mais qu'une fois ou deux, il avait fallu débarrasser un corps ensuite.
Elle laissa retomber l'arme le long de son corps, avant d'avoir pour Kazorof un regard insolent.

- Ca ira comme ça, monsieur le petit chef ?
Kazorof
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Kazorof a même pas daigné lui répondre, encore moins réagir. Juste braquer ses chardons ardents sur son minois de sainte nitouche, et la voilà qui comprend toute seule qu'il est plus que temps d'arrêter les conneries. Bras croisés, il la regarde tendre l'arme droit devant elle et hausse un sourcil devant sa posture gauche. La gaillardise d'Oola fait rien pour compenser son manque de préparation quand, dans un mouvement d'une vivacité brute, il récupère l'arme et la braque directement sur elle.

- Piou.

Il l'abaisse aussitôt, avec un sourire sarcastique qui lui déborde sur une joue.

- Défends ton blaster aussi bien que tu défends ton maquillage et on verra si tu peux jouer la maline. Franchement c'est quoi cette façon de le tenir !

Il lui refout entre les mains et la force à resserrer sa prise.

- Tu tiens le seul truc qui peut te sauver la vie, mets-y du tien.

Ses doigts sont un peu violent sur la peau fragile de la Twi'Lek. Il pourrait pas en avoir plus rien à carrer. Kazorof vient se placer derrière elle pour lui faire lever les bras et viser l'écran digital qui leur fait face. Sa force empêche Oola de bouger.

- Droite, sûre, tu peux pas juste le braquer et espérer que ça se passe.

Il la lâche aussi sec pour faire le tour et se place devant elle.

- Faut qu'il soit à hauteur de regard, que ta cible soit parfaitement alignée au viseur. Trop mou ton bras. Pis tu tremble à moitié, quoi, il est trop lourd ?

Kazorof lui malmène le poignet sans même avoir besoin de forcer.

- T'as qu'a imaginer que c'est un prolongement de ton bras. J't'ai déjà vu foutre des gifles et t'avais plus de force que ça. Mets y du tien Cha'kin. Faut qu'tu puisse te sauver la peau si ça tourne mal.

Me sauver la peau serait plus exacte. Il peut franchement pas se permettre de pas avoir un minimum confiance en la capacité de tir de la seule personne alliée qu'il aura sur place. L'Anomalie pardonnerait pas la moindre faiblesse, et les probabilités que le deal se déroule comme sur des roulettes étaient pas en leur faveur. Kazorof lâche donc pas l'affaire, et il arrête d'emmerder Oola qu'une fois qu'il se sent satisfait de sa posture. C'est carrément frustrant de pas pouvoir la faire tirer sur la moindre cible, mais ça devra faire l'affaire. Le vaisseau s'éclaircit soudain tandis que l'ordinateur central se met à balancer ses signaux, et le chiss prend la direction du poste de pilotage.

- On va débarquer. Attache toi, ça risque de secouer, il balance à l'intention de la twi'lek.

À peine il a prévenu qu'un ébranlement semble agiter le vaisseau tout entier. Kazorof enclenche le communicateur par réflexe.

- Vous êtes entré dans le noyau de l'Anomalie, veuillez décliner votre matricule et votre identité.
- Frégate UX500, Kazorof aux commandes. J'viens faire affaire.
- Combien de passagers à bord ?
- Deux. Permission d'atterrir ?
- Permission accordée. Merci de rejoindre le quai 42B.

Bordel, c'était plus facile qu'il l'aurait imaginé. Le communicateur est aussitôt coupé, et dans un vacarme d'acier invraisemblable, il enclenche une poussée minutieuse qui le voit pénétrer les entrailles de la bête. Y a des déchets en flottement un peu partout qui effleure la carcasse en orbite mais ne semble jamais vraiment s'en éloigner, provoquant des crissements intempestifs et particulièrement désagréables.

- Cha'kin, bienvenue dans l'Anomalie, il déclare fièrement.
Oola Cha'kin
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Si Oola s'était laissée faire - elle était loin d'avoir le sentiment qu'elle pouvait l'emporter dans un lutte contre le chiss - elle n'en avait pas moins réagi avec une grimace dégoûtée. Kazorof ne savait réellement pas se comporter avec la gente féminine.

- Mais aïe, tu m'fais mal ! couina-t-elle en lui lançant un regard plein de mauvaise volonté.

Ses lekkus dansèrent derrière ses épaules quand elle secoua la tête avec un soupir exaspéré, sentant le chiss passer derrière elle, puis se positionner devant, droit dans sa ligne de mire. La silhouette du mercenaire paraissait trapue quand il avait ce grand manteau dans lequel il disparaissait presque tout entier, et ses yeux brillants et rouges tapis dans l'ombre était la seule chose qu'elle pouvait distinguer dans cette partie du vaisseau envahie de pénombre. Les néons de la salle d'eau faisaient à côté d'elle un contre-jour qui s'efforçait d'illuminer les câbles qui couraient au-dessus de leur tête, et sous les grilles qui supportaient leurs pieds.
Oola s'humecta les lèvres. Elle tâcha de se concentrer, ses faux sourcils se fronçant tandis qu'il alignait son regard avec la pointe du canon, visant approximativement le coeur du chiss.

- J'comptais plutôt sur toi pour nous sauver la peau, maugréa-t-elle à voix basse, non sans perdre sa posture.

Mais Kazorof marquait un point : Oola jouait d'une feinte indépendance, et indépendante, elle ne l'était pas si elle ne pouvait pas se défendre elle-même. Son doigt tremblait sur la gâchette. L'arme était lourde, quand on la tendait comme ça, à bout de bras.
Elle cessa brusquement l'effort en laissant ses mains retomber le long de son corps, devant elle.

- T'es pas bien hein, de rester là, le railla-t-elle pour masquer sa faiblesse. Il pourrait être chargé.

Oola baissa subitement les yeux sur l'arme pour la regarder de plus près. Est-ce qu'il était chargé ?





L'Anomalie portait plutôt mal son nom. Oola l'aurait volontiers renommé le Trou à Ordures, ou bien le Ramassis : on aurait dit que les déchets de l'Espace tout entier avait vogué pour se retrouver là, comme attiré par des forces invisibles, se percutant et tournoyant sur eux-mêmes. De grandes plate-formes en métal détachées de vieux croiseurs explosés durant les guerres aux minuscules débris de plastiques rejetés par des croisiéristes spatiaux peu scrupuleux, tout s'y était mélangé dans un immense nuage informe, dont on devinait à peine les délimitations. Y naviguer relevait d'une sorte de miracles : les vaisseaux s'y croisaient dans des couloirs que l'on devinaient à peine, labyrinthiques et mouvants ; plusieurs fois, Oola se tassa dans son fauteuil par réflexe, comme si elle avait pu éviter qu'une poutre métallique lui déchira le crâne. Heureusement, les talents de Kazorof pour le pilotage étaient suffisamment développés pour leur éviter de se faire percuter par quelque chose de trop dangereux pour leur carlingue. Oola ne pouvait malgré tout s'empêcher de frissonner à chaque fois qu'un crissement était trop strident, s'accrochant aux accoudoirs en y plantant ses ongles - à tel point que le cuir du siège s'en souviendrait certainement.

- On... On arrive quand ? J'aime pas trop l'espace finalement...

Kazorof n'eut pas besoin de lui répondre. Ils dépassèrent un amas fait d'une drôle de matière spongieuse et blanche pour voir apparaître la structure métallique et pleines d'anfractuosité d'une série de plateforme d'atterrissage. De grands numéros étaient peints, assez maladroitement, en huttese. Oola déglutit.

- Y'a pas d'atmosphère, fit-elle d'une voix blanche.

Dans l'Anomalie, comme sur d'autres plateformes de l'Espace Hutt, la gravité était recréée à l'aide de grandes masses tournoyant légèrement, ce qui expliquait que les quais ne fussent jamais positionnés au même endroit, et permettait par là-même de créer une force centrale pour que tout individu puisse y marcher comme sur une planète à la gravité relativement basse. Pour autant, à part dans quelques lieux clos où des sas et des pompes à oxygène leur permettrait de respirer comme à l'air libre, il leur faudrait ici circuler comme tout le monde : avec des masques qui leur dévoreraient la moitié du visage. Certainement que Kazorof en était équipé.

Oola resta un moment silencieuse, à contempler l'objet étrange dont ils s'approchaient. Etonnamment, pour une fois, elle laissa le chiss faire ses manoeuvres sans le déranger. Elle gardait ses yeux stupéfaits fixés sur les silhouettes minuscules, puis de plus en plus grosses, qu'elle voyait circuler sur des passerelles, vers l'intérieur de la plateforme. Des néons lumineux éclairaient les passages, où l'on devinait des publicités criardes pour acheter ou vendre des pièces de vaisseau illégalement réparés et remis à la vente... Et d'autres services moins louables.

Lorsque le vaisseau toucha le quai 42B, une secousse légère, moins intense que sur une vraie planète à gravité forte, les fit osciller dans leur siège.

Oola ne retira pas sa ceinture.

- T'as déjà beaucoup piloté, hein.

Elle décrocha enfin son regard des sillhouettes qui s'affairaient désormais devant eux, dont un petit bith recouvert d'un scaphandre qui ne permettait pas de dissimuler ses grands yeux noirs idiots qui accourait vers eux - certainement pour leur proposer du carburant à bas prix - pour regarder Kazorof.

- Tu fais quel genre de travail, Kaz ?

Kazorof
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- Le genre qui paye, Cha'kin, il rétorqua du tac au tac en lui balançant un masque à oxygène. On s'met d'accord tout de suite. Tu négocie rien ici. J'veux pas t'entendre brailler. Pas de plan foireux, pas de Kaaaaaz ou de j'sais pas quoi. L'imitation avait quelque chose de franchement perturbant sur les traits du chiss, qui venait de faussement balancer un lekku inexistant vers l'arrière en posant une main sur sa hanche. Maintenant bouge. Et enfile ça. Il lui balança une ceinture dans laquelle avait été enfoncé le blaster avec lequel elle venait de s'entrainer à viser.

Kazorof ne fit plus grand cas de sa clandestine tandis qu'il se préparait à son tour, dans des gestes secs et assurés. Le masque s'imbriqua parfaitement sur son visage, bien qu'une buée légère l'envahit immédiatement. Son propre flingue conservait une place de choix à sa taille, et son long manteau était refermé sur de nombreuses grenades à fragmentations qu'il avait entassé dans les compartiments de sa ceinture. De ses deux bras il saisit la caisse, et ses mouvements se firent dès lors bien plus précautionneux, voire même délicats. La paire d'yeux écarlates fusa à l'encontre d'Oola tandis qu'il lui passait devant, et il souffla. Je sais pas si t'es familière avec l'essence de Rakghoul, ça kiffe pas l'agitation. Alors garde aussi tes distances avec moi tant que j'ai ça entre les mains, ou alors l'atmosphère ce sera nous.

Mercenaire. Telle était l'occupation principale de Kazorof. Un mot qui voulait tout et rien dire dans la gueule béante et insipide de l'Espace Hutt. Esclave, il occupait déjà la fonction, la seule différence étant que désormais les revenus lui retombaient directement dessus. Ça impliquait à peu près tout ce qu'il était possible de faire au milieu de la crasse qui l'avait vu grandir. Les crimes qu'il commettait comportait du risque le plus dérisoire au danger le plus mortel, et probablement que la contrebande d'essence de Rakghoul faisait davantage pencher la balance vers un décès prématuré.

Mais qui dit risque exceptionnel dit crédits exceptionnels, et telle était la motivation première du bougre.

Chiss ambitieux, il ne laisserait nullement la terrifiée, minuscule Oola Cha'kin, mettre en péril un business s'annonçant florissant. Déterminant. Les gains seraient peut-être déterminant. La cerise sur un gâteau préparé depuis sa plus tendre enfance, destiné à le voir définitivement décoller du système pour ne plus être mercenaire de Nar Shaddaa, mais pirate de l'espace. Le grand espace. Celui, infini, qui le narguait depuis des étoiles qu'il n'avait jamais exploré. Pas la moindre hésitation dans la démarche du chiss donc, tandis qu'il quittait son vaisseau, avec son gâteau, sa cerise, et la twi'lek infernale venue spécialement lui emmerder les noyaux.

- Non.

Le bith saisit l'injonction au vol, malgré une voix dénaturée par le masque à oxygène, et il lâcha l'affaire aussi sec.

- Je viens voir Zaraak Vossk.

Immobilisé dans sa course soudaine vers le prochain vaisseau auquel proposer ses services, le bith jette un bras vers une issue, énonçant un bruit crépitant que Kazorof associa a du bith. Parce qu'il fallait qu'il tombe sur le seul bith qui ne parlait que bith. Super. Levant les yeux au ciel, il échappa un vague grognement avant de commencer à marcher vers les portes épaisses les séparant de l'intérieur de l'Anomalie. Le quai sur lequel ils avaient atterri était pratiquement désert, mais l'ambiance changea radicalement dès lors qu'ils passèrent ce sas. Un dédale étroit s'offrait à eux, dans lequel s'entassait une population inquiétante, s'embrasant dans des conversations de faible volume sonore, et dans des langues plus diverses qu'il n'en avait jamais entendu à Nar Shaddaa.

On eut dit une prison au vu de leur posture, et de leur manière de se zieuter les uns les autres avec méfiance.

Kazorof se tendit légèrement en resserrant le caisson contre lui, et continua a avancer. Attendit d'arriver au bout du couloir pour harponner un type et prononcer le nom de Vossk, presque comme un aboiement. Un simple signe de tête lui montra la direction, et il poursuivit son avancée sans s'adresser à quiconque, surveillant occasionnellement que Oola était toujours sur ses talons. Elle n'avait pas l'air rassuré, ce qui était fondamental. C'était pas un endroit dans lequel il fallait être rassuré. Tout le monde était armé, et on aurait dit que l'ambiance était explosive. Le moindre mot de travers serait synonyme d'une bagarre. Bientôt, il n'y eut plus aucun doute quant à l'endroit vers lequel ils se dirigeaient. Le cœur même de l'Anomalie. Parfaitement gardé, mieux qu'un coffre fort Hutt.

- Marchandise pour Vossk, il annonça simplement en se plantant devant e Gamorréen qui surveillait l'entrée. Un gamorréen.
- Pas d'armes. Les armes restent là.
- Évidemment.

Kazorof eut un sourire sans vie. Il s'abaissa lentement pour déposer le caisson, retira la ceinture de son blaster avant de la déposer dramatiquement au pied du type.

- Pas d'armes du tout.

Le chiss s'abaissa pour tirer les lames de ses bottes, les laissa bruyamment tomber au sol. L'autre grogna.

- J'ai plus rien !

Kazorof leva les bras, observa brièvement Oola, puis le gamorréen s'écarta.

- Dix minutes.

Amplement suffisant. Le chiss s'abaissa pour attraper le caisson, et il fit signe à la twi'lek, désignant la porte.

- Ouvre.
Oola Cha'kin
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Sous son masque à oxygène et harnachée par la ceinture où pendait le blaster, Oola avait l'impression d'être une comédienne dans un holofilm d'aventures, la musique et la perspective de la victoire en moins : elle savait parfaitement ne pas savoir correctement se servir de l'arme et c'était la première fois qu'elle était affublée d'un dispositif de respiration artificielle. En plus d'angoisser sur la possibilité qu'il fût mal mis et qu'elle manquât d'oxygène à tout instant, elle avait l'impression d'être dans un déguisement que tout le monde détecterait à des kilomètres à la ronde. Pourtant, lorsqu'ils dépassèrent quelques aliens, aucun ne sembla remarquer autre chose que la jeunesse de son corps. Ce n'était pas ici bien différent de Shaddaa.
Oola s'était hâtée de suivre le chiss, ne le quittant pas d'une semelle, silencieuse uniquement parce qu'elle avait peur de trop faire bouger son masque à oxygène.

Le caisson de Kazorof l'inquiétait moins que le nombre affligeant de types désoeuvrés qui hantaient les couloirs du dédale dans lequel ils s'enfonçaient.
Lorsqu'ils parvinrent devant le gamoréen, elle n'eut d'autre choix que de se libérer à son tour de son blaster. Elle imita d'une manière la plus convaincante qu'elle pouvait le geste de Kazorof ; à savoir jeter sa ceinture aux pieds du monstre de graisse devant eux, mais elle se sentit aussitôt idiote et nue.
L'ordre de Kazorof apparut comme un sauvetage inattendu et elle se jeta sur la commande. Le panneau de métal glissa dans un grincement et dès que le chiss fut passé, elle s'engagea à son tour avant de se jeter sur le panneau de commande intérieur : aussitôt la porte se referma avec le même grincement caractéristique. Des jets de vapeur furent projetés à leurs pieds et après un bref instant de panique, Oola comprit qu'il ne s'agissait que d'un sas de pressurisation : ils allaient pouvoir bientôt respirer à l'air libre.

- Doe kwama dii yer'bo, annonça d'ailleurs subitement une voix féminine synthétique en Huttese.

Oola retira immédiatement son masque pour prendre une grande goulée d'air frais. Comme Kazorof n'en faisait pas autant, elle haussa les épaules et passa devant lui d'un pas rigide. Elle fusillait la porte opposée du regard.

- T'es pas obligé de me donner des ordres comme ça, non plus. On aurait dit que j'étais ton esclave.

Et tu sais ce qu'on fait aux esclaves, avait-elle envie d'ajouter, mais elle n'avait pas besoin de préciser cela. Avec des gestes secs, elle pianota sur le panneau de commande opposé à celui par lequel ils étaient entrés, et une nouvelle porte coulissa.

Aussitôt, une bouffée d'air chaud et humide les envahit, en même temps qu'une musique assourdissante leur sauta aux oreilles, provenant d'une pénombre agitée d'un brouhaha de conversations inintelligibles. Oola eut un mouvement de recul, et par un instinct bienvenu, elle se hâta de remettre sur sa bouche et son nez le masque à oxygène. Mais l'odeur épaisse de transpiration et d'autres relents lui donnèrent la nausée.
Ils s'enfoncèrent dans l'antre de Vossk comme s'ils connaissaient parfaitement les lieux.




Ils n'eurent pas à jouer des coudes pour traverser la foule : la plupart des âmes humanoïdes et aliens présentes étaient avachies sur des canapés, parfois même au sol, animés de conversations, les yeux exorbités et les voix éraillées.

- Ils sont shootés aux épices, avait glissé Oola à l'oreille de Kazorof, mais elle ne sut s'il l'avait entendu, à cause de la musique.

De toute façon, il le savait certainement. Ce que l'on désignait par "les épices" pouvait recouvrir toutes sortes de drogues dont Oola ne connaissait guère que quelques rares spécimens. Elle s'était toujours gardée d'y toucher malgré quelques opportunités. Moins à cause des mises en garde de sa mère que parce qu'elle avait vu l'état dans lequel se retrouvaient les femmes qui en consommaient. Mais c'était la première fois qu'elle assistait à un tel condensé d'âmes fébriles étalées à même le sol, parfois balbutiant des choses incompréhensibles la bave aux lèvres. Oola fronça le nez en portant une main à son masque, comme pour s'assurer qu'il ne tomberait pas, et ils poursuivirent leur déambulation.




Vossk était reconnaissable aisément. Assis au fond d'une pièce qui ressemblait beaucoup au salon d'un Hutt, il était toutefois beaucoup moins massif : il s'agissait d'un neimoidien à la face de crapaud, les traits reptiliens repliés autour de ses lèvres et de ses yeux comme un vieillard dont on devinait pourtant, à ses prunelles vives qui se posèrent sur eux, qu'il était encore dans la force de l'âge. C'était aussi l'un des rares, dans l'endroit, à ne pas avoir les pupilles injectées de sang. Autour de lui, plusieurs droïdes gravitaient, apportant là une boisson, repoussant là une femme à la démarche incertaine, comme pour dégager le passage. Oola regarda cette humaine s'effondrer à quatre pattes, à quelques pas d'elle, avec pitié.

- H'chu apenkee, pateesa ! les salua Vossk avec un sourire carnassier. Kazorof, quelle surprise ! Et... ?
- Tyri'gella, devança Oola, de peur que le chiss ne délivrât une information cruciale. J'accompagne Kazorof et sa marchandise.

Elle avait fait de son mieux pour dissimuler le tremblement de sa voix, mais ses mains trahissaient sa nervosité, alors elle les croisa sur sa poitrine. Vossk continua à sourire en la regardant.

- Charmant. Qu'est-ce qui vous amène ?
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