-Oh, on s'fait chier...

Alors que la voix de cool kid 2 fit son apparition sur le canal de communication pour la énième fois, la blondinette la coupa. Pas qu'il était casse couilles, mais il était un peu casse couilles à la fin. Dans son chasseur, Maxence ne savait pas trop à quoi s'attendre, de base, elle croyait se retrouver sur une planète complètement paumé trouvé par l'ExploCorp et maintenue dans le secret, mais rien. Quand les quatre Bâtiments apparurent, elle comprit sur l'instant.

-Est-ce que c'est bien c'que j'crois qu'c'est ?

-J'en ai bien l'impression. Je suis tout excité.

-T'es un droïde, tu peux pas l'être. T'es même pas un droïde, t'es une boîte dans un vaisseau.

-Les boîtes dans les vaisseaux ont des rêves, Maxence.

Et alors que sans communication -sans surprise-, elle s'approchait pour s'enfoncer dans le gros truc au milieu, elle galérait en regardant son tableau de bord. Rouspétant à l'approche.

-Mais qui donne ce genre de données de guidage ? C'est n'importe quoi, on dirait les types qui mettent le mois avant le jour dans les dates officielles.

Vraiment bizarres les gens qui font ça. À l'intérieur, la blondinette bondit, non sans une certaine classe, de son vaisseau pour atterrir au milieu d'une branlée de Torr aux visages plus ou moins similaires. Le manque d'UV se faisait largement ressentir sur leur peau et directement, les regards se tournèrent en direction de Maxence qui, n'allons pas nous mentir, faisait tache. Elle arborait un style bien différent de sa moyenne, donnant l'impression de sortir tout droit d'une fashion week impériale avec des coupes droites et des couleurs sombres, c'était tout nouveau pour elle parce qu'elle essayait de montrer au monde le changement qu'elle représentait. Il fallait dire que Maxence était connue principalement pour son goût de la mode féminine.

Elle approcha son ami, fist-bump de cool kid parce que le nom n'est pas là pour faire beau, finalement, à l'entente du nom, Luke apparut dans son champ de vision. Ses yeux s'écarquillèrent, puis elle ricana en s'approchant du suspect.

-Oh que non, monsieur le Jedi, vos petits tours de passe-passe mystiques ne m'auront pas.

Elle posa sa main mécanique sur le visage de Luke, croyant passer au travers comme une illusion, mais si la sensation n'était pas la même que la peau de chair et de sang, c'était bien un visage qu'elle sentit sous ses capteurs. Elle bondit en arrière, lâchant un petit cri mêlant surprise et effroi, sautillant sur une jambe, les bras proches de son torse.

-T'es encore plus moche que dans mes souvenirs.

Ça, c'était une petite insulte facile et ça voulait dire bonjour chez les Darkan, la seule famille de la galaxie où on pouvait accueillir quelqu'un en l'insultant. Ne préférant pas éterniser ses retrouvailles, elle suivit Karm pour aller voir Karm. Karm parlait exactement comme Karm, mais encore plus laconique que Karm. À moins que la dénomination exacte ne soit Torr... tout paraissait si simple et complexe à la fois. Donc, oui, Torr, sa mère.

-Aaaaah, ouiiiii. Ta mère. Avec un vagin. Je sais pas pourquoi j'me sens soudainement obligée d'le préciser.

Pour un ingénieur galactique de haute renommé, ce vaisseau était la plus grosse honte volante de la galaxie, pour Maxence, c'en était un véritable miracle d'ingéniosité. Dans la salle... d'attente ?... Maxence fit un petit signe à maman Torr avant de s'écrouler dans un siège à côté de son ami.

-Ah mais ça c'est sûr qu'avec ta mère ça a l'air d'être le putain d'amour fou, entre les têtes qui se hochent, les chuchotements et les dos tournés sans même un p'tit bécot sur la joue, j'ai commencé à être mal à l'aise face à tous ces sentiments quand elle t'a pas prise dans ses bras.

C'était sûr que Maxence était franchement mieux placée niveau amour familiale et qu'elle avait tous les droits de se foutre de sa gueule. Quant à la peur d'avoir une bombe sous les fesses, la blondinette grimaça un désintérêt décomplexé.

-Oh bah tu sais, j'suis une mercenaire sans foi ni loi qui déteste autant la République que l'Empire avec des rumeurs plus ou moins vraies. D'ailleurs, si t'as entendu cette histoire à la con, j'ai pas mangé l'chien, j'l'ai juste tué. Y' m'filait des puces. 'fin bref tout ça pour dire que j'suis pas à une bande de mini-Karm sanguinaires près qui veut ma peau.

-Et les parties de mon vaisseau.

-De mon vaisseau. J'te l'dis d'avance, Eos est aux anges, il est sûrement en train d'essayer d'ouvrir le contact sur les quais pour en apprendre plus.

-Comment dit-on : « Ne touchez pas à mes trains d'atterrissage ou j'ouvre le feu » en Ark-Ni ?

-Ouais, donc, comme t'as pu l'comprendre dans la communication, pour moi, c'est un sacré bordel, je savais pas qu'les minutes de silence pouvaient être aussi longues. De votre côté ça doit être la putain d'galère, non ? J'ai cru comprendre que quelques planètes voulaient bien vous accueillir, mais ça a pas l'air gagné d'avance. Sacré Grendo, toujours là pour la déconne. D'ailleurs pourquoi y' a l'truc qui t'sert de copain ici ? Nan, pardon, j'en perds mes bonnes manières. Pourquoi y' a l'truc aveugle qui t'sert de copain ici ?

Oui, voilà, mieux.

Si Luke ne put admirer la silhouette à la fois grotesque et admirable de ce bout de ferraille qui se prétendait -à raison- vaisseau, il eut tout le loisir de profiter du bruit tonitruant qui s'échappait des turbines. Les vibrations le poussèrent à s'accrocher, inquiet, une ou deux fois aux parois, mais sachant où il était, le jeune Jedi se reprenait vite. Les Ark-Nis, peuple des étoiles, n'avaient plus grand chose à apprendre de l'espace. Ils maîtrisaient leur art à la perfection, rien de mal ou plutôt de pire n'arriverait.

L'exil avait marqué Luke. Malgré ses entraînements, sa formation, son entêtement à méditer, à se rappeler des conseils de son maître, il avait pleuré, seul dans sa chambre. Saï Don, 95 ans, mis en prison parce qu'il avait décidé d'épouser la voie des Jedis. Lui et les membres du Conseil, victimes de cette même infamie, considérés comme des criminels sans autre forme de procès -littéralement d'ailleurs puisqu'ils n'en avaient eu aucun.

Tous ses idéaux, ses croyances s'écroulaient les uns après les autres. Aider les innocents avait toujours semblé légitime au Hapien, mais si la Galaxie ne voulait pas d'eux, à quoi bon s'acharner ? Puisque tout pouvait basculer au point de perdre leur demeure. Leur Ordre avait déjà essuyé bien des tempêtes, résisté à des cataclysmes, mais de là à se retrouver jeté par-dessus bord, sans patrie ? Le jeune homme avait beau prôner la séparation entre les deux institutions, arguant que les Jedis n'avaient rien à faire en politique, il était en faveur de la collaboration. Ils étaient tellement liés, depuis tant de siècles, mais Grendo S'orn avait balayé tout ça du revers de sa main osseuse et verdâtre (même si Luke ignorait ce que signifiait "verdâtre").

Dire que c'était lui qui avait essayé de défendre l'Ordre. Serait-ce son apparition à la télévision qui avait offert au Chancelier l'occasion de les virer ? Pourtant Aube Eleos semblait contente de son intervention... Mais, quelle autre explication que leurs déboires sur Ossus y avait-il ? Aucune, même la désobéissance de l'Ordre, blanchi de toute suspicion concernant l'attentat, ne constituait normalement pas une raison de valeur. Mais quand même. Dire que Luke avait osé lever la voie pour aviser le Conseil. Non, aller sur Ossus n'était pas une bonne idée. Non, ils n'avaient pas à intervenir pendant ce traité si on ne réquisitionnait pas leur aide. Certes, des ennemis des deux nations, opposés à toute paix devaient préparer un mauvais coup, mais on ne pouvait pas, à cause de supposition, ignorer une demande claire. "N'intervenez pas, on ne pourra rien faire qu'arriver après les dégâts pour soigner les blessés et recueillir des informations pour une enquête". C'était triste, fataliste mais réaliste. Et maintenant qu'ils étaient intervenus, que Luke avait lutté aux côtés de la Primadonna, sortant apparemment l'Ordre du pétrin... Ils n'avaient plus de chez eux.

- Ne t'en fais pas, tout va bien. Nata a été bien formée.

Fit Luke avec un sourire sincère mais néanmoins fardé d'une touche chagrine qui ne le quittait plus. Tandis qu'ils marchaient dans les coursives du Karm-Solu, le Hapien avait souhaité rassurer son compagnon une dernière fois. Dans d'autres circonstances, il aurait encore plus savouré ce côté responsable de son ami. Malgré ses propos, son peu d'engouement pour l'administration, Karm se retrouvait à administrer des bâtiments, des gens, et il se révélait fort consciencieux. Avec tendresse, le jeune homme considéra son aîné un instant avant de reprendre leur marche.

Les kilos que Luke avait repris semblaient s'être en partie évaporés, le stress de l'exil, l'organisation pour partir vite, son inquiétude pour Saï et le Conseil, les nuits de recherche pour s'opposer au Jexit ou la loi patriote. Il tenait le coup au nom des Jedis égarés qui débarquaient encore sur Dantooine, au nom de Karm qui avait besoin de sa présence, désormais et bien malgré lui, à la tête d'une Enclave surchargée, mais clairement il avait égaré une bonne partie de son entrain habituel. Il avait beau s'efforcer de songer aux paroles amicales de maître Eleos, son coeur était rongé par la culpabilité. Qu'avait-il fait , montrédans cet opéra pour que les Jedis ressortent d'Ossus sans demeure ?

La perspective de voir Maxence ne faisait qu'abîmer sa journée. Luke n'avait aucune envie de supporter cette petite prétentieuse vulgaire qui croyait avoir tout vécu, vu et souffert, mais encore une fois, pour l'Ark-Ni, il s'était promis de faire des efforts. Il se raidit violemment lorsque des doigts envahirent son visage, reculant d'un pas pour essayer de récupérer son espace personnel violé. Évidemment, c'était elle.

- Par chance, il semblerait que ce constat ne soit pas voué à me perturber plus que ça. Bonjour à toi aussi, Maxence.

Répondit le Chevalier, toujours étonné par le manque de respect de la mercenaire envers Karm. Ce dernier les avaient prévenu de la présence de l'un l'autre, vu ce que les Jedis vivaient en ce moment, il avait pensé que Maxence épargnerait son meilleur ami de querelles stupides. Lui en tout cas, ne comptait pas tomber dedans et, loin de se formaliser de l'insulte, il avait préféré hausser les épaules. En même temps, c'était vrai... Un miroir ne risquait pas d'offenser le si "moche" Luke. En réalité, le physique du concerné servait de réponse cinglante à la jeune femme. Bien qu'il se soit aminci, que son regard soit peiné, le blond demeurait beau. Ses traits de Hapien lui donnaient un air oscillant entre une mélancolie poétique et la tristesse innocente d'un enfant, surtout qu'il se retenait avec autant de dignité que possible. C'était très rare chez lui, mais il était habillé en civil, avec un jean simple, une chemise blanche et une veste passe-partout noire. Ses cheveux blonds étaient reliés en une queue de cheval sobre, hormis quelques mèches qui s'échappaient pour chatouiller de temps à autre son minois. Il fallait se faire une raison, l'époque qui les attendaient forcerait le Jedi à se vêtir en civil. Fini la toge confortable et discrète de l'Ordre tant affectionné. Désormais, sa vocation était devenue aussi criminelle que ne l'était celle de la mercenaire.

Cependant, Luke l'ignorait, tout comme il ignorait qu'en réalité, Maxence aussi était très jolie, particulièrement dans cette tenue qui lui donnait un air rebelle de Guérillero. Mais qu'importe au final.. À son grand soulagement, le Chevalier ne ressentit pas autant de dégoût qu'à son habitude. Il en avait sans doute trop donné à S'orn, considérant désormais Maxence comme une mouche énervante. Trop de vécu ces derniers temps pour s'offusquer des jeux d'une jalouse.

- Bonjour

Murmura Luke. Il n'était pas sûr de savoir comment saluer cette personne qui ne voulait pas être genrée, mais se rappelait au moins que les Ark-nis parlaient bas. Avec respect, il la salua de son mieux, essayant de respecter les coutumes de ce peuple qui avait accepté de les recevoir. Et puis, c'était la mère de son compagnon, incapable d'empêcher une crispation légère et étrangement bienfaitrice de lui parcourir l'échine. S'inquiéter de ne pas plaire à la génitrice de son petit ami, voilà qui était plutôt normal. De quoi retourner une seconde dans l'insouciance d'un quotidien non chamboulé par un exil.

- Nous vous remercions infiniment pour votre accueil.

Ajouta-t-il doucement avant de suivre le trio, avec certes quelques difficultés. Pour un aveugle, forcément, évoluer dans un monde où le bruit était ennemi tenait de la petite torture quotidienne. "Heureusement", Maxence était loin d'observer cette discrétion, elle parlait suffisamment pour que Luke suive la piste sans trop de difficultés.

- Et bien, félicitations pour ton vaisseau.

Se força à dire le jeune homme. Il avait beau ne pas aimer Maxence, le blond était toujours content d'apprendre que la blonde évoluait. Au moins ça faisait plaisir à Karm et ce dernier avait suffisamment de soucis pour accumuler les mauvaises nouvelles. Plus la femme devenait indépendante, moins elle aurait besoin d'être aux crochets du maître. Qu'ils soient amis ne posait pas de problème au Hapien, mais il craignait toujours qu'elle entraîne Karm dans une de ses affaires extrêmement louches. Son ami avait beaucoup de discernement, il était droit mais aussi loyal, trop (?) parfois.

- Je laisse Karm répondre à cette question, puisque je n'y suis pas invité.

Impossible de ne pas terminer par une petit soupir, gentillet cela dit au vue de l'insulte proférée. Luke voulait bien se comporter correctement, mais il y avait aussi des limites. Sa patience, mise à rude épreuve ces temps-ci ne supporterait pas toutes les remarques. Au fond d'ailleurs, c'était surtout au nom de Karm qu'il sentait l'énervement poindre. Quand est-ce que cette fille apprendrait à respecter son meilleur ami ?

- C'est en effet compliqué. Les critères ne correspondent pas tout à fait à la loi invoquée. L'Ordre n'a pas directement mis la République et le système en danger, il n'y a pas eu d'attaque directe ni même suspicion d'attentats selon les premiers rapports... Je pense que c'est une vengeance personnelle, et Grendo S'orn préparait cet exil depuis longtemps. Il accumule probablement des raisons depuis des mois, afin de les brandir si nous contestons sa décision.

Et cela ferait mal, car lors de leur rencontre avec Saï et lui, le Chancelier avait évoqué l'utilisation des enfants. Des mineurs soldats. Bien sûr, c'était faux et les Jedis ne "volaient" pas d'enfants, les parents ne désirant pas donner leurs fils et filles à l'Ordre n'y étaient pas forcés, les Padawans refusant de continuer était réintégrés à la société... De plus, que ferait-on de tous ces enfants potentiellement dangereux, munis de pouvoirs potentiellement dangereux, mais... Ça, Grendo y serait certainement insensible.

-Grendo réélection, comme dirait l'autre.

Elle ne savait pas trop quel genre de popularité le Chancelier de la République avait... peut-être pas excellente parmi les autres sénateurs, mais la populace devait l'adorer. Les leaders suprêmes en herbe ont toujours eu un charme dans l'histoire. Et il fallait dire que le charme physique du Chancelier S'orn jouait en sa faveur.

-Le grand chef de Dantooine va jouer les opportunistes pour affirmer sa puissance. Elle se pencha pour lui offrir une petite tape sur l'épaule comme tonton Gérard essayant de trouver complicité après une blague borderline. Pas vrai ?

Une opportunité amère, visiblement, pour son ami. Maxence ne voyait pas trop où était le problème dans tout ça, Karm semblait porter un intérêt tout particulier à garder une emprunte dans une République qui, en plus de ne pas vouloir d'eux, s'autodétruisait à petit feu. Ce qu'il avait dit dans son message était vrai, c'était une ex copine abusive qu'il fallait désormais oublier pour le meilleur comme pour le pire.

-J'crois qu'Kajidic ça veut dire clan ou famille... ou p't'être simplement Cartel en Huttesse. Ça revient au même, en gros. En général l'organisation est assez simple, on a des riches familles qui se lient au Cartel économiquement, on a des diplomates, des Hutts moins importants ayant prêté allégeance aux Djiilo. Pour le reste, on a des Lieutenants qui gèrent des bouts de terrains à leur échelle, des hommes, des ressources... un peu comme des employés polyvalents dans un fast-food.

Étrangement, on en oubliait presque le fait que les Lieutenants géraient aussi beaucoup de négociations. Le système bien moins libéral que la moyenne offrait presque une importance égale aux grands investisseurs sur le plan structurel du Cartel. Un peu comme une dictature communiste basée sur l'échange libéral au-delà des frontières. Peut-être. Avec moins de famine. Parce que si Maxence était un bras armé du Kajidic, d'autres avaient leur importance sur le plan de l'administration et de la comptabilité. Bon, il ne fallait pas oublier qu'ici, par comptabilité et administration, on parlait d'Épices, de drogues, d'armes, de contrebande en tout genre et, pour certains Kajidics, d'esclaves.

-Pour c'qui est d'rebattre les cartes, c'est un peu différent d'votre situation... tu sais, funérailles, deuil, fausses larmes, discours outrés, demande de justice, paroles en l'air principalement. Une réunion d'politicien version Cartel pour s'offrir les bonnes faveurs de la famille. Pas vraiment des trucs qui m'touche... quoi que, t'aurais dû m'voir avec le bandeau noir sur l'épaule, j'étais carrément sexy.

Comme quoi, il fallait d'un petit rien pour ne pas faire grand chose.

-Au niveau des Lieutenants, t'imagines pas comment c'est la merde, y' en a qui démissionnent, y' en a qui sont pas contents d'voir Jogga prendre la tête, y' en a qui s'chient dessus et y' en a qui en profitent comme jamais. C'est un peu l'bordel, certains sautent sur l'occasion pour prendre la place de leur chef de force et le Cartel est trop occupé pour s'en occuper, alors ils laissent faire. Genre, la Crique des Pillards, tu t'en souviens ? Bah, pas plus tard que quatre jours, un Lieutenant s'est fait cribler d'laser par ses hommes, un type du nom d'Icarus, qu'on surnomme Le Gobeur d'œil, a pris la tête de son groupe et maintenant y' gère pas mal de trucs là-bas.

D'ailleurs, la présence d'un homme comme ce Icarus n'inspirait rien de bon pour un Cartel qui s'endurcissait un peu plus en s'enfonçant dans la violence. Pour l'instant, les Djiilo laissaient couler, sauf qu'ils ne le feraient pas indéfiniment.

-Du coup, tu peux t'en douter, l'ambiance est plutôt tendue en c'moment, pour l'instant, t'as ceux qui sautent, ceux qui prennent leur place et ceux à qui l'avenir sourit. Et figure-toi qu'la p'tite Maxence Darkan à le vent en poupe. Les regards se tournent sur certains d'entre nous et de c'que j'ai cru comprendre, on mise sur moi.

Elle ne s'en plaignait pas et, pour tout dire, elle s'en étonnait. La réputation qu'elle avait gagné dans le Cartel s'était principalement faite grâce à son ancienne cheffe et maintenant, les rumeurs disaient que la petite blondinette était en train de faire renaître l'Estafette.

-Donc ouaip, t'en fais pas, j'suis en sécurité. D'ailleurs en parlant d'Cartel, vous êtes les suspects numéros un d'l'attentat là-bas. Je sais bien qu'c'est pas vrai, j'commence à vous connaître maintenant, vous êtes pas des tueurs et encore moins des terroristes, mais voilà...

Elle haussa les épaules en lançant un regard qui témoignait de son impuissance vis-à-vis de l'affaire, pour une fois que ce n'était pas de sa faute.

-J'essaye de faire comprendre à mon échelle que c'est pas vous qu'avez fait l'coup, mais hé, j'suis pas magicienne. Les plus futés d'entre-nous commencent à s'douter qu'c'est sûrement les Besadii, les Loyalistes ou les Renégats qu'ont fait l'coup, mais vous avez tendance à attirer la foudre des gens. Un comble pour les Jedis. J'pense pas qu'ce soit perdu d'avance, vous devriez essayer d'lancer des négociations avec le Cartel, je sais qu'l'idée d'fricoter avec c'que vous considérez comme des criminels, c'est pas très glamour, mais en même temps, les alliés commencent à s'faire rare de votre côté.

Même si clairement, Maxence avait du mal à imaginer Djiilo et Jedi main dans la main.

-'fin, du moins, éviter d'rester dans l'silence. Ça a tendance à attirer la suspicion, le silence.

À quoi bon. Organiser quoi ? Personne ne voulait d'eux, la République avait été claire. Chaque conséquence exprimée par Karm ne faisait qu'assaillir le coeur de Luke. Toutes les initiatives caritatives, les liens forgés avec des universités, des départements de la justice ou des institutions médicales étaient fichues. Certes, le Hapien savait que ceux-ci s'en remettraient. Ils trouveraient des chercheurs, des subventions, du soutien avec le temps. Personne n'était irremplaçable, surtout pas lui malgré son travail acharné, mais là, dans l'immédiat, des milliers de gens pâtiraient du départ des Jedis. L'AgriCorps laissait d'ingénieuses structures sur place mais toute la main d'oeuvre disparaissait. Les projets du MedCorps s'effondraient, les Guérisseurs avaient dû délaisser leur poste, y compris face à de violentes épidémies. La police se retrouverait débordée, avec mine de rien, un allié lointain en moins. Et que dire de Siths comme Noctis qui aurait entre ses doigts, un Monde incapable de comprendre la Force ?

Un nouveau frisson gagna le jeune homme lorsque son ami évoqua le "au cas où" il disparaîtrait. Sous ses apparences nonchalantes, lui aussi était touché par les événements. Bien sûr, comment aurait-il pu en être autrement ? Luke se retint de protester tel un enfant face à cette décision. Non, il ne serait jamais l'intermédiaire privilégié avec les Ark-Nis car le Maître ne disparaîtrait pas, juste parce que lui, le Chevalier Kayan en avait décidé ainsi, par caprice, parce que sans lui, il s'effondrerait. Cet attachement profond était tout sauf conseillé par l'Ordre mais au final... Qu'était l'Ordre aujourd'hui ? Un effort surhumain lui permit d'arracher une onde lumineuse à son corps, afin de l'envoyer vers Karm. Juste pour le soutenir car il savait combien ça avait dû lui coûter d'imaginer cette éventualité, Luke aussi souffrait rien qu'à cette idée, malheureusement c'était la vérité, ils étaient des criminels désormais. Même ces retrouvailles avaient un goût d'illégal, que pourrait-il leur arriver ? Violer les règles de la sorte n'était pas dans la nature du Hapien. Il était tendu rien qu'à cette idée mais ces nouvelles lois étaient injustes et il soutiendrait son compagnon coûte que coûte.

Étant donné les nouvelles responsabilités, énormes, du gérant du "complexe" de Dantooine, le blond ne pouvait qu'essayer de le seconder le plus efficacement et discrètement possible. Sans l'encombrer d'inquiétudes puérils. Il serait fort pour lui, pour les membres de l'Ordre égaré dont les plus jeunes qui vivaient un traumatisme bien inutile au milieu de leur Formation. Difficile d'imaginer leur perte totale concernant des idéaux forgés au long de leur enfance. Pour qui grandiraient-ils désormais ? Pourquoi aspirer à devenir Chevalier ? Non décidément, le blond n'avait pas la pire des situations, c'est pourquoi il devait tenir bon, au moins pour la gérance interne. Pour la politique externe, c'était bien plus difficile. Si doux soit le Consulaire, il avait des envies de meurtre à l'égard de Grendo S'orn. Pour tout dire, il n'avait aucune envie de se plonger à nouveau dans la lecture de cet immonde Jexit.

Au mieux, afin de faire honneur à la dignité de ses membres qui continuaient de se battre, Luke affichait une attitude neutre et professionnelle. Ce n'était pas lui qui allait se laisser à des confidences ou se cacher dans sa chambre. C'était tout ce que le jeune homme pouvait offrir : participer au combat du quotidien pour maintenir une certaine cohésion. C'était cette mentalité sans doute qui avait permis à Thann de copier les archives avec un camarade. L'Ordre était bien organisé, il était parvenu à déménager en trois semaines seulement, sauvant leurs documents et leurs reliques. En soi, le lieu de vie n'avait guère d'importance, Ondéron n'était qu'un territoire mais il y avait tous ces gens qui l'habitaient. Ondéron et bien plus encore : des dizaines de planètes Républicaines.

Poli mais détaché, le blond écouta les malheurs de Maxence. Il la trouvait objectivement courageuse de continuer à lutter de la sorte mais n'éprouvait guère de pitié pour la jeune femme. Karm lui avait donné de nombreux outils pour sortir de la délinquance, si elle continuait à fricoter des Cartels, c'était de sa propre volonté. Elle avait dû en faire des choses pour être recherchée.

- Concernant les décisions politiques, pour l'instant, je ne les saisis guère mieux que toi, malheureusement. C'est encore le fouillis. En apparence, plusieurs lois ont été allègrement violées, mais je doute que Grendo s'orn n'y ait pas songé. Je dois creuser davantage, ainsi que des diplomates plus expérimentés pour trouver une éventuelle faille et surtout... Interpréter, comprendre les raisons d'un tel choix controversé. Je ne suis plus à jour dans ce milieu, mais j'ai des connaissances qui pourraient m'affirmer ou m'infirmer que la majorité des électeurs n'auraient pas été en faveur de cette décision. Pourquoi donc aller contre l'électorat ? Si ce n'est pour obtenir l'aval de quelques Puissants qui lui suffisent. Diplomatiquement parlant, la stratégie est difficile à saisir, sauf s'il y avait complot... Mais ce seraient là des accusations sans fondements, dangereuses et immorales auxquelles je ne m'abaisserais pas sans preuve.

Pourtant, Luke commençait vraiment à se demander si le Chancelier n'avait pas pactisé avec l'Empire. Contre son propre gouvernement, ça semblait insensé... Ou alors un ennemi moins évident que le Jedi n'avait pas encore identifié. Quoiqu'il en soit, lorsqu'un dirigeant agissait contre l'opinion -probable- publique et le Sénat, au lieu de chercher à plaire à tout prix, il y avait de quoi se poser des questions. Pire encore, Saï, éminence du Conseil, objectivement apprécié des Républicains ou encore Karm pour ne citer que lui payaient à cause de ce choix précipité. Grendo n'avait pas dû se faire que des amis avec cet acte en apparence précipité. Une haine personnelle n'expliquait pas tout, ce crapaud était beaucoup plus intelligent que ça.

- Merci Maxence, d'essayer de nous déculpabiliser, c'est risqué d'agir de la sorte pourtant, ce qui rend ton entreprise d'autant plus méritoire.

Fut-il bien forcé de reconnaître avec toute l'honnêteté du monde. Pourvu que la jeune femme ne mente pas, le Jedi éprouvait une sincère gratitude pour ce geste. Ce n'était qu'une minuscule goutte d'eau salée dans leur désert. Au final, elle ne faisait qu'attiser davantage la soif, mais sur le moment, c'était bon de la savourer.

- Des négociations avec le Cartel ? C'est impossible. - S'exclama le Chevalier, surpris, avant de s'excuser et de reprendre plus doucement. Après tout, si imbuvable soit cette femme, elle restait possiblement de leur côté. Une de leur seule alliée qui "faisait de son mieux". Qu'elle l'insulte ne le dérangeait pas, tant qu'elle cherchait à les aider, y compris maladroitement. - Cela ne ferait que nous rendre davantage suspicieux ! Que les Jedis choisissent des alliés qu'ils ont toujours réprouvés simplement- Il avait soigneusement évité des termes offensants comme "criminels de la pire espèce".- parce que les temps sont durs... Voilà qui démontrerait que nous n'assumons pas nos valeurs. Quant à sortir du silence, ce serait en revanche une bonne idée... Mais nous n'avons aucun moyen d'enquêter sur les véritables coupables, ni d'étayer les pistes quoiqu'intéressantes que tu nous a donné. Aucun moyen d'aller sur place pour vérifier. Et... Au fond je ne sais pas si parler aiderait beaucoup. J'ai parlé avec Alysanne Méridan et Darth Khorog, j'ai même dû apparaître aux informations, Maître Eleos semblait satisfaite... Ceci dit, voilà le résultat.

La voix du jeune homme s'éteignit un peu. Il était persuadé d'avoir mal représenté l'Ordre, pas complètement non, puisque le conflit avait cessé mais... Il y avait quand même ce doute qui persistait. Après avoir "représenté" les siens pendant la crise, ils s'étaient faits virés en rentrant.

- Quand mon Maître et moi avons vu Grendo S'orn, nous avons discuté de la séparation entre la République et l'Ordre, mais uniquement dans ce qui relevait des décisions politiques, pas du reste. Cependant, cet homme nous a aussi demandé notre aide. En échange de quoi, il "ne nous ferait pas de mal". Autrement dit, du chantage, ouvert et conscient de sa part. Cet exil était en partie prévu d'avance. Quoique nous fassions, nous étions condamnés, même si certaines de nos décisions ont pu précipiter cela. Je ne suis pas sûr non plus que la preuve de notre innocence force le Gouvernement à faire marche arrière.

Il ajouta malgré lui, plus bas mais de façon audible.

- Je leur avais dit de ne pas aller sur Ossus.

Pour une fois que le Chevalier s'était élevé contre ses aînés, certes timidement et surtout, théoriquement, il ne regrettait pas. Malheureusement savoir qu'il aurait favorisé une observation lointaine, puis l'intervention le plus vite possible après de possibles dégâts ne le soulageait guère.

-Hé, du calme Sexy-Blondinet, j'suis d'ton côté de base. Les types du Cartel sont pas des salops... 'fin... bon, pas tous des salops. J'veux dire, les Djiilo, c'est quand même les types les plus cool de tout l'espace Hutt, pas d'esclavage, pas de... pas d'esclavage, franchement, c't'un bon début. Faut voir les choses comme elles sont, en temps normal, les Jedis ne sont pas tant méprisés qu'ça là-bas... évidemment, une Sentinelle qui travaille avec des flics, ça a tendance à faire tiquer, mais autres temps, autres mœurs.

Elle claqua la langue en haussant les épaules de façon étrangement extravagante avant de les laisser retomber lourdement sur ses cuisses.

-Tu t'accroches à quoi comme valeurs ? Celles qu'ont été balayées par un vieux Neimoidien un peu moche ? Ou celles qu'ont conduit au discours dans lequel il les a balayés ? Putain, j'vais l'faire... est-ce que j'le fais ? Ok, j'le fais. Vous avez merdé. Je sais pas qui a donné l'ordre de vous balancer sur Ossus, mais franchement, vous avez merdé. Et si moi, perso, j'm'en branle, c'est resté en travers de la gorge d'un paquet d'personnes. J'suis clairement pas la plus clean pour vous engueuler, sauf que j'suis bien celle qui pige que maintenant, va falloir peut-être revoir vos manières de faire. Alors excuse-moi mon grand si ton Ordre n'est pas en accord avec des dealeurs de bonheur -elle parlait de drogue- et des types à la morale douteuse -elle parlait de meurtre-, mais c'est à toi d'voir si tu veux t'sortir de la merde ou si tu veux continuer d'chialer dans ton coin en t'enfonçant dedans.

Froide. Glaciale. Euphémismes. Il fallait quand même dire que Maxence ne se la coulait pas douce et qu'elle pouvait aussi avoir quelques moments de pression ces temps si. Très peu pour elle de se mettre à discuter des préceptes rigides et primitifs qu'un aveugle un peu con adulait comme une gamine de quinze ans face à Justin Bieber. Ok, c'était cool pendant deux ans, mais faut se renouveler. Heureusement, le -légendaire- charisme de Karm rattrapa une discussion qui commençait d'ors et déjà à glisser salement.

-Merci Karm, enfin quelqu'un qui comprend.

La pique était toujours aussi froide. Quand il parlait de faire une enquête sur Ossus pour mettre les choses au clair, elle grimaça discrètement... s'ils apprenaient qu'elle avait cassé la gueule d'une Padawane dans un excès de colère, Luke aurait sûrement quelque chose de concret pour lui en vouloir. Heureusement, il ne s'attarda pas sur la question pour en revenir à l'organisation des Cartels qui, même pour Maxence, n'était pas toujours très simple à comprendre.

-L'espace Hutt, c'est un peu comme une planète avec des pays qui se font la gueule. C'est genre... compliqué. Y' a pas vraiment d'rassemblements de tous les big boss des Cartels, parce que j'imagine pas vraiment Jogga et Malaka se... Malaka c'est le boss des Besadii, précisa-t-elle au cas ou, donc, j'les vois pas trop s'partager une pinte en s'racontant des vieilles histoires de lycée. En gros, y' a des accords, entre certains Lieutenants qui prennent l'initiative, ou qu'il font directement à la demande du boss, avec les autres Cartels, pour se faciliter la vie. J'suppose que ouais, y' a dû y avoir quelques p'tites réunions de grosses têtes autour d'une table, mais l'appelle de Jogga à réunir les Cartels autour d'une même table après Ossus, c'est assez nouveau.

Une grande alliance des Cartels commenceraient sûrement à en faire suer plus d'un. Déjà séparément, ils avaient tendance à se montrer aussi collant qu'obstinés, donc sous un même drapeau, l'Empire allait devoir se tenir à carreau. Et en parlant de l'Empire...

-Ça, mon grand, c't'une énigme. Nan en fait c'est pas une énigme. Comme j'l'ai dit, les Cartels, c'est un peu comme une planète avec des pays qui s'font la gueule. Les Kossakii ont cherché la merde avec tout le monde et sur le coup, quand les premières planètes ont commencé à tomber, ils ont pas vraiment réagit, sauf que c'est allé super vite et là, on s'est rendu compte de la merde. Les Kossakii continuent d'se battre, principalement dans la résistance contre l'Empire maintenant... y' a quelques cellules influentes comme les Bouffes-Rouges ou le Lotus Noir.

Elle glissa sa main dans le col de son haut pour en ressortir un pendentif avec au bout, un petit lotus frappé dans un métal de basse qualité. Elle lui jeta pour qu'il puisse le voir de plus près. Ces cellules de résistance contre l'Empire existaient bien avant la conquête du territoire Kossakii, mais les membres du Cartel ont réussi à faire bouger la tendance à leur avantage.

-Taha'san avait ça autour du cou le jour de sa mort. Aucune idée d'pourquoi elle l'avait, mais je commence à avoir une piste. Le Lotus Noir a un chef à sa tête, une légende, c'est p't'être juste un nom inventé pour faire peur à l'Empire et brouiller les pistes. Hermann DeNoir. Elle secoua sa main en s'écoutant dériver. Bref. Les Besadii ont sûrement peur de se montrer inférieur au Djiilo en rejetant les accords économiques impériaux, les Dejsadii sont plutôt vénère par rapport à tout ça, mais... rien. Enfin...

Elle haussa les sourcils, elle et son sublime sourire malicieux qui vous ferait tomber des groupies par centaines.

-C'est possible qu'on a quelques plans en réserve pour récupérer trois ou quatre planètes. Maintenant qu'l'Empire s'est scindé, les Cartels reprennent du poil de la bête et commencent à se montrer de plus en plus en agressif... même les Besadii.

En même temps, se faire bouffer toute une partie de son territoire, ça n'enchantait pas spécialement les alliés économiques Hutts de l'Empire. Avec Ossus, une possible nouvelle guerre contre la République, une guerre interne et une guerre contre les Hutts, peut-être que la suprématie de l'Obscur allait devoir être revue à la baisse pour nos chers emburés en rouge. D'ailleurs, la mercenaire espérait vraiment que la réunion des Kajidics mènerait à un accord de paix entre Besadii et Djiilo pour tourner leurs regards colériques en direction de l'ancien territoire Kossakii.

-Pour l'AGPU, j'en ai aucune foutre idée. J'pense pas que Jogga se permettrait d'quitter un truc qui lui donne bonne figure. Et encore, rien n'affirmait que l'AGPU était voué à perdurer. L'avenir nous l'dira.

Un peu compliqué d'être médiateur de quoi que ce soit quand les parties politiques s'entêtaient plus à diaboliser Grendo qu'à chercher de vrais accords avec les Bothan ou les Djiilo. Autant dire, avec tout ce qu'avait expliqué Maxence, que du côté des Hutts, l'eau se réchauffait lentement et l’ébullition ferait sans aucun doute déborder la casserole... et dans tout ça, Maxence était l'une des meilleures agitatrices. Elle n'était peut-être pas d'un charisme incroyable, mais elle avait les mots justes pour tourner la haine en directement de l'Empire.

-Du coup, j'vous retourne un peu la question. Pour vous se sera quoi ? Devenir un état Jedi ? Rester une religion mystico-philosophique avec des accords sur les planètes où vous vous basez ? Vu qu'Grendo avait de base l'air plutôt chaud pour vous virer d'la République, 'doit bien y' avoir des plans d'secours pour aller faire du porte-à-porte sur certaines planètes neutres ? Nan ? Elle lança un regard insistant à Luke. J'ose même pas demander si les Cartels vous intéressent.

Quoi qu'après tout, la devise Jedi était : You only live once, alors prévoir des choses, c'était bien au-dessus de leurs têtes.

-D'ailleurs, maintenant qu'vous êtes plus ou moins indépendants, ce serait possible de s'trouver une place à l'AGPU ?

-Pourquoi j'propose les Cartels ? Parce que j'suis pas forcément une salope qui n'a envie que d'vous voir souffrir. Qu'est-ce que j'y peux, j'commence à bien vous aimer.

La présence de Karm dans l'Ordre bridait légèrement sa façon de penser, mais les Jedis étaient sûrement les dernières personnes qu'elle arrivait à supporter, malgré leurs manières détestables, leurs bures ridicules et leurs sabres lasers. Elle laissa avant tout son ami s'exprimer sur son point de vue, il était vrai qu'elle n'avait pas pensé au côté indépendant des planètes Hutt. Les habitants n'étaient pas tous des dealers et la population pouvait très vite se retrouver dans des situations plus que précaire avec un état Hutt qui n'avait que faire des plaintes de la plèbe.

-Tout comme il a dit. Fit-elle à l'attention de Luke. Vous pourrez toujours aider la veuve et l'orphelin comme vous adorez l'faire. Ils aimaient beaucoup se donner bonne conscience. Après, franchement, par rapport à c'que vous pourriez leur dire... j'en ai aucune foutre idée, j'suis pas diplomate, juste pragtamique.

-Pragmatique.

-Exactement. Pointez-vous en expliquant tout c'que vous savez sur l'affaire, la raison d'votre présence, des trucs pour montrer votre bonne fois. J'sais pas, j'suppose que vos Consulaires sauront quoi faire s'ils acceptent. S'ils acceptaient, en effet. J'suis pas sûre que les Djiilo voudront d'l'aide pour leurs petites querelles : on a une réputation à tenir, se pointer comme des assistés par les Jedis, ce serait super mal vu, j'pense que simplement d'la main d’œuvre en interne pour apporter un soutien à la population contre quelques coins sur les planètes où vous implanter, ce serait l'meilleur deal.

Le « petites querelles » n'était pas laissé au hasard par Maxence. Elle-même pensait qu'il n'était clairement pas temps de se faire la guerre en interne avec l'extérieur en train de partir en couille. L'Empire était le gros problème et il fallait se ressaisir pour arrêter de passer pour les abrutis de service. La mercenaire essayait d'arranger les négociations à son échelle avec les Kossakii, adoucir les relations avec l'Échange, calmer les ardeurs des Dejsadii... énormément de travail qui peinait largement à porter leurs fruits. Elle gardait tout de même la foi, elle n'avait plus que ça, avec sa montée fulgurante au sein de son Cartel, la réputation pouvait sans aucun doute faire pencher la balance à son avantage.

-Lannik, Roon et Rishi seraient sûrement super intéressées à l'idée d'recevoir des Jedis, sitôt qu'les choses seront réglées.

Ce n'était clairement pas gagné d'avance, si les Jedis se montraient aussi réfractaires que leur compère Kayan et les Djiilo rancunier sur l'affaire, les deux camps pouvaient d'ores et déjà faire une croix sur un accord mutuel. Ceci dit, comme l'affirma son ami, elle se tourna vers lui en arquant un sourcil. Elle était surprise à l'idée de voir Karm prêt à se lancer dans une guérilla à l'encontre de l'Empire. Maxence avait toujours cru qu'il ne portait aucun intérêt à s'attaquer directement aux emburés rouges. Après tout, maintenant qu'il ne faisait plus du tout partie de la République, la guerre semblait soudainement loin des priorités.

-Bah... euh... en fait... commença-t-elle avec tout le charisme du monde, c't'à dire qu'c'tun peu complexe quoi. J'ai pas vraiment d'contacts au sein d'la Résistance, j'm'y suis penchée que depuis peu. Le Lotus Noir, c'est pas les types les plus simples à aborder. J'connais un type... elle déglutit difficilement. Flakstaff. C'est pas son vrai nom, mais il s'est présenté comme ça la première fois qu'j'l'ai rencontré. Tu t'souviens sur Nal Hutta, quand on a piqué le prototype pour mes flingues ? Bah voilà, c'tait la première fois... pis on s'est revu après la mort de Taha... et quand j'ai perdu mon bras...

Elle passa sa main de chair sur son bras mécanique, elle se grattait, mais normalement, elle ne sentait rien.

-Lui et Taha s'connaissaient bien avant la création d'l'Estafette, si une personne peut nous permettre de contacter le Lotus Noir, c'est bien lui. Haussement d'épaules. Problème : Ce mec à plusieurs identités, il est littéralement intraçable, même pour mon réseau. Et ça, c'était un défi personnel qu'elle s'était jurée de relever. Après, faut pas croire, le Lotus Noir, c'est pas des enfants d'cœur. Ils sont connus pour leurs décapitations sommaires de Sith, de Moff, leurs massacres de soldats et les nombreux sabotages de transports Impériaux. Ils tuent avec comme simple revendication, le retrait d'l'Empire au sein des frontières Kossakii. Sinon pas d'pub, pas d'message, rien d'autre.

Les Bouffes-rouges se la pétaient, comme la véritable Résistance pro-Kossakii, le Lotus Noir, lui, n'en avait rien à faire de la pub, il agissait, détruisait, tuait avant de taguer ce même lotus sur le lieu de leur méfait et disparaître. Les membres du Lotus étaient de véritables monstres sans identité. Autant dire que derrière cette Résistance quasi-inatteignable se cachait de véritables terreurs.

-Le truc, c'est qu'l'organisation n'a pas de point d'encrage, pas d'place forte, tous les raids de l'inquisition à leur encontre se sont terminés par la découverte d'immenses salles complètement vides, sans même une seule emprunte de doigt dans un coin. Avec eux, tout est bon pour brouiller les pistes.

Et évidemment, si le Lotus Noir brouillait les pistes contre l'Empire, il brouillait aussi les pistes contre Maxence. C'était une recherche délicate dans laquelle elle se lançait, pas dangereuse, mais truffée de cul de sac. Elle ne pouvait que suivre les agissements de l'Inquisition, pour l'instant, dans le but d'en savoir autant qu'eux afin de les dépasser le moment venu.

-En gros, de c'que j'ai pigé, ils doivent pas être plus qu'un millier... mais parmi eux, beaucoup se revendiquent simplement Lotus Noir sans l'accord de l'organisation. Comment le savait-elle ? Ces types là sont les premiers à s'faire chopper et à terminer en interrogatoire musclé avec Darth Connard pour finir pendus en place publique. Voilà comment. Là où les organisations s'permettraient pas d'faire mauvaise figure avec des usurpateurs, eux, ça les arrange... elle haussa les épaules en souriant, parce que ça brouille les pistes.

La torture avait tendance à faire avouer des mensonges, juste pour que la souffrance s'arrête. La Résistance n'était pas une bande de Béni-oui-oui prête à combattre pacifiquement pour la liberté. En plus d'être en sous-effectif, elle manquait cruellement de ressources : la fin justifiait les moyens. Au-delà de : « Mourir pour la cause », c'était : « Sacrifier pour la cause ».

-Alors ouais, à mon avis, l'ennemi d'mon ennemi, ça leur va carrément. J'pense que l'idée d'se retrouver avec des Jedis les dérangerait pas du tout, mais pour les atteindre, va falloir mettre le paquet d'ressources, on parle de véritables radicaux hyper violents et fantomatiques. Leur dernier fait d'arme, c'était y' a quatre jours, sur Raxus, ils ont buté un Guerrier Sith et une escouade de militaires. 'videmment, y' a eu des morts côté Lotus et si l'Empire fait en sorte de garder l'identité des membres secrète pour ne pas leur accorder d'attention, moi j'les choppe. Tu veux voir les profiles ?

Elle navigua sur son bracelet pour trouver son dossier sur le Lotus Noir. Elle lui montra les différentes têtes, hommes, femmes, humains, proche-humains, aliens, c'était à peine s'il avait une famille, l'unique chose qui pouvait les lier était leur possible affiliation aux Kossakii, mais rien qui ne puisse éclairer une enquête sur le réseau de Résistants.

-L'une des pistes possibles, c'est d'fricoter avec les Kossakii. Elle laissa une seconde de silence, juste le temps de s'humecter les lèvres et vérifier qu'elle avait toujours l'attention de son public. Si vous voulez un réseau de Résistants qui font dans l'humanitaire, ce sera pas eux les premiers à contacter, par contre, si vous cherchez des opérations coup d'poing, vous frappez à la meilleure porte. Puis la question lui vînt à l'esprit en parlant. Les Jedis font quoi, au juste, comme mission au milieu de l'Empire ?

Elle ne voulait pas leur reprocher de ne pas savoir montrer les crocs, mais elle leur reprochait quand même de ne pas savoir montrer les crocs.

-Après tout, si vous êtes déjà allié à d'autres réseaux, vous devriez essayer d'chopper des infos là-bas, les réseaux s'connaissent plus ou moins entre eux. Sinon j'peux vous filer le peu d'contacts que j'me suis fait dans d'autre groupes.

-J'me doutais bien qu'le Lotus noir te botterait pas tant qu'ça. De toute façon, ils ont pas l'air hyper chaud non plus pour s'allier à qui qu'ce soit.

Ce qui était assez étrange venant d'une organisation en grande infériorité numérique. Les extrémistes avaient souvent du mal à admettre l'idée d'avoir un peu d'aide n'était pas si mauvais que ça, autant pour les affaires que pour la pub. L'appelle de la nourriture la détourna de ses pensées. Que pouvait bien manger les Ark-Ni ? De la bouffe lyophilisée fade ? Des parts à la hauteur de leur... taille ?... pour le coup. Avaient-ils déjà fait preuve de cannibalisme en période de disette ? Elle secoua la tête.

-Leurs motivations ? Bah je sais pas... ça peut paraître plus simple à la République de laisser tomber les armes et accepter de se faire bouffer par l'Empire, mais elle le fait pas. C'est la même chose pour le Lotus Noir. Des gens attachés à leurs valeurs, leurs terres, leur culture... ils comptent juste pas tout voir disparaître sous leurs yeux.

Elle ne savait pas trop comment appuyer son point de vue, elle-même n'avait pas suffisamment d'attache une quelconque nation pour pouvoir ressentir ce patriotisme menant à prendre les armes. Maxence considérait toujours la résistance comme une bande de rebelles prêts à tout pour retrouver leurs foyers tels qu'ils étaient, sans autre recherche. L'Empire ne se définissait pas non plus comme la nation la plus avenante à l'acceptation d'autrui, il prenait sans rien offrir, forçait à se soumettre et instaurait la peur de la Force à chaque coin de rue, pas étonnant que certains et certaines finissaient par décapiter des Siths, juste pour l'exemple.

-J'veux dire, c'est pas un choix au pif qu'ils font, c'est juste... j'sais pas, j'suppose que l'patriotisme est plus fort que c'qu'on pourrait imaginer. Des résistants ont vu leurs amis mourir pendant la conquête, d'autres ont perdu leur famille. C'est pas des Jedis, l'attachement, quand il est brisé, ça a tendance à donner d'la motivation pour botter des culs.

C'était un peu tout ce qu'elle pouvait lui proposer comme raison. Comme dit, elle ne s'y connaissait pas tant que ça, elle n'avait jamais directement interagi avec la Résistance.

-Pour l'instant, les Djiilo, c'est l'employeur du moment. C'est les seuls avec qui j'peux m'permettre de partager mes idées et ceux qu'je trouve les plus censés dans la galaxie. Elle en venait à trouver un Cartel plus censé que la République. Je sais pas si j'y resterai toute ma vie, j'suis comme tout l'monde, j'peux très bien décider d'changer d'projet professionnel... vous avez sûrement eu des Jedis qui s'sont tirés parce qu'ils avaient envie d'faire autre chose, non ? L'idée paraissait aussi vraisemblable qu'invraisemblable. Après, pour le fonctionnement complet, j'veux dire...

Elle grimaça en haussant les épaules. C'était alors qu'Eos fit son entrée magistrale pour aider à aiguiller le Jedi.

-Les Djiilo ne sont pas si différent de la République sur le point administratif. … En ignorant la partie émergée de l'iceberg qui, comme vous l'avez dit, correspond à une grosse entreprise criminelle. Mis à part le cas de Maxence et des Lieutenants, le Cartel possède une armée, une éducation propre, un système de santé, des salariés, de quoi faire tourner l'économie en interne.

Heureusement qu'il était là, la blondinette était complètement paumée. Karm posait des questions bien trop spécifiques, malgré la justesse de ses propos et son amour -platonique- fou vis-à-vis de la blondinette, ça n'était pas suffisant pour lui faire pousser des neurones d'économiste ou de politologue.

-Le Kadjidic se base sur un système de nationalisation des entreprises. Le but étant de garder la main mise sur toutes les transactions effectuées dans l'enceinte des frontières. Vous pouvez vous douter que Jogga, ou anciennement Jaliac, ne se permettrait pas de laisser les planètes faire comme bon leur semble. Toute transaction avec les Besadii est formellement interdite. Celles avec l'Empire sont fortement contrôlées et pour la grande majorité, refusées. Sans compter qu'il n'accepterait pas de voir les autres Kadjidics grignoter économiquement leur territoire dans l'impuissance totale.

Ce qui était un point que la mercenaire admit d'un hochement de tête entendu sans vraiment suivre.

-Pour vous implanter, ou ne serait-ce qu'apporter de l'aide à une population locale vivant dans le Kadjidic, vous devrez obligatoirement vous entretenir avec le Cartel. Du moins, si vous souhaitez le faire légalement. Je vous déconseille cependant de venir sans invitation...

-Si jamais on vous choppe, et j'veux dire par là, pas moi, mais les autres types du Cartel, vous êtes dans une sacrée merde. Ceci dit, elle n'était pas idiote, elle savait parfaitement qu'ils ne se permettraient pas cela. Du coup nan, j'fais pas fructifier mon argent où qu'ce soit, mais j'en ai pas vraiment besoin, j'en impose tellement qu'j'suis largement à la hauteur de mes efforts.

Tout ça pour dire qu'elle n'était pas spécialement à plaindre sur le plan financier. Si ça ne se voyait pas, c'était uniquement dû à une motivation inexistante quant à l'amélioration de son hygiène de vie, rien de plus. Eos reprit sans donner plus d'explication.

-Luke. Votre position de Consulaire et votre influence dans l'Ordre ne vous permettrait-elle pas d'obtenir une possible délégation de diplomates Jedis ? Liée aux connaissances de Karm et aux nombreux atouts que pourrait apporter l'implantation à l'échelle locale d'une cellule de Jedi, vous avez toutes les chances de vous épanouir dans l'espace Hutt sans participer aux activités illégales des Kadjidics.

À vrai dire, dans la théorie, si l'hypothèse de l'implantation des Jedis dans l'espace Hutt se faisait, ils n'aurait même pas à ce soucier du Cartel. Dans la théorie. Et si les Maîtres de l'Ordre l'acceptaient. Ce qui paraissait mission impossible pour Maxence.