Le Masque de la Force
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“L’Empire contre-attaque”


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  • Point de vue impérial – Horakk Antarxarxès


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Branle-bas de combat. Les équipages des différents bâtiments de la Marine impériale stationnés dans l’orbite d’Ossus se tenaient fin prêts, étant donné qu’ils allaient recevoir une transmission de la plus haute importance. Personne, pas même les décideurs, ne savait à quoi s’attendre ; la situation sur la planète leur était toujours inconnue, tant les informations contenues dans les différents rapports leur parvenaient au compte-goutte et étaient contradictoires. Les visages étaient crispés, les poings serrés, néanmoins militaires de rang comme officiers se tenaient tous droit, au garde-à-vous devant les holocommunicateurs de l’Égide de Krayiss, le vaisseau amiral de la Cinquième flotte. Devant les prunelles concentrées des hommes et femmes ayant plus ou moins choisi de servir sous les drapeaux de l’Empire, un hologramme de l’intimidant Darth Laduim avait jailli.


« Soldats, la République Galactique a manqué à ses obligations. Nous avions, à tort, placé notre confiance dans un traité de paix ; cependant, cette confiance était, vous vous en doutez, très limitée. La félonie de nos ennemis n’est ainsi guère une surprise, nous nous y étions préparés. Inconscients, les républicains ont commis une grave erreur en s’attaquant à vos vaillants frères d’armes. Alliés aux Jedi, ils grouillent sur Ossus telle de la vermine parasite. Ils vont payer un lourd tribut pour leur affront et regretteront d’avoir trahi le noble Empire Sith. Que toutes les unités actuellement déployées au sol regagnent leurs vaisseaux, la bataille que nous allons mener sera spatiale. Votre mission est désormais d'annihiler la flotte républicaine, réduisez chacun de leurs vaisseaux en miettes et ne laissez personne s’enfuir, en particulier ces chiens de Jedi. L’époque où nous les faisions prisonniers est révolue, ne vous souciez plus jamais de laisser des survivants. C’est un combat à mort. »


Le Conseil noir venait de sonner le clairon de la guerre. Tout l’Égide se mit à trembler, du pont de commandement au pont des opérations, en passant par les postes d’artillerie, les soldats impériaux rejoignirent religieusement leurs postes de combat. Les officiers de surveillance détectèrent tout de suite, sur leurs radars, la présence du Payara, bâtiment de guerre républicain.

- Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu.



  • Point de vue républicain – Zerath Ular'Iim


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Au même moment, à bord du Payara, un croiseur de classe Hammerhead, les militaires républicains tendaient l’oreille en direction des dernières nouvelles d’Ossus. Les explosions qui avaient ravagé l’AGPU étaient visiblement responsables d’un nombre très important de victimes, parmi lesquelles de hauts responsables de l’institution pour la Paix, mais également des diplomates de la délégation représentant la République. Les membres de l’équipage du Payara n’avaient malheureusement pas le temps de s'apitoyer sur leur sort, car au vue des manœuvres impériales, il fallait agir vite pour sauver leur peau. Pourtant, l’État-major républicain, sous le choc, demeurait dans un état léthargique et ne donnait aucune directive. Plongé dans les réflexions, il n’avait proposé qu’une seule consigne : éviter, à tout prix, la confrontation directe avec les vaisseaux impériaux. Cela se traduirait-il pas un long jeu du chat et de la souris, puisqu’il était dans le même temps tout à fait impossible d’abandonner à leur sort les Jedi et les soldats républicains au sol ? Les officiers du Payara exposaient tous leur petite analyse de comptoir et proposaient diverses attitudes à adopter. Certains accordaient du crédit aux plus folles rumeurs, pour eux les impériaux souhaitaient tout bonnement une nouvelle guerre, leur tactique était déjà rodée et la tyrannique facilité avec laquelle étaient prises les décisions jouerait en leur faveur. Pour d’autres, il était inconcevable que le conflit reprenne après tous les efforts que le Chancelier S’orn avait mis en œuvre et tous les gages qu’il avait offerts pour construire une précaire paix. Certes, l’incertitude s’installait dans quelques esprits et l’angoisse s'aggravait, toutefois, la majorité des soldats en poste sur le Payara se devait de rester sereine. Après tout, la reprise des hostilités n’était pas si terrifiante.


- Commander Ular'Iim ! Nous avons un souci ! s’écria l’un des officiers du pont de commandement alors que rugissaient les alarmes. Je vous signale qu’un croiseur impérial répondant au nom d’Égide de Krayiss vient de nous verrouiller dans son faisceau de tir !



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A noter que :
  • Le RP se terminera dans un mois et deux semaines, soit le 23/06/2021 à 23h59.
    Autrement dit vous n'aurez que six semaines à compter d'aujourd'hui pour développer vos intrigues, venir à bout de vos adversaires et atteindre l'objectif imposé par le staff. Tout message posté après la date de fin sera considéré comme nul. Chaque joueur dispose de quatre jours pour répondre à ses partenaires de jeu. Au-delà de ce délai, c’est au prochain joueur de répondre et ce sans demander l'accord du staff. Si un joueur vient à ne pas répondre par deux fois consécutives, ou à dépasser le délai fixé, il sera automatiquement disqualifié.

    Attention, la cohérence et le réalisme sont de mise. Dans le cadre d’un combat spatial, il vous est exceptionnellement permis d’incarner les membres de vos équipages respectifs, mais ils ne doivent en rien vous permettre de substituer des compétences dont vous ne disposez pas (ex. commandement, stratégie, etc…), ou de pallier vos lacunes. Nous comptons sur votre sens du fairplay, de la narration, ainsi que sur votre connaissance des règles et du système de jeu pour vous amuser et offrir au lecteur une agréable bataille spatiale.

    - Vaisseaux : Dans le cadre de vos fonctions (Amiral et Commander), nous vous laissons la possibilité, en fonction de vos compétences, de définir vous-mêmes vos forces en présence. Gardez tout de même en tête que l’orbite d’Ossus était un espace que l’Empire et la République sécurisaient en commun : vos gouvernements n’y ont point envoyé le gros de leurs flottes.

    - Terrain : La confrontation se déroule dans une partie de l’orbite d’Ossus. Vous désengager des lieux mènera de facto à la disqualification.


  • Conditions de victoire
    - Équipe impériale (loyaliste) : Remporter le combat.
    - Équipe républicaine : Remporter le combat.


  • Ordre de passage :
    - Horakk Antarxarxès
    - Zerath Ular'Iim




May the force be with you !
Horakk Antarxarxès
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• Event XV - l'Empire Contre-Attaque •






Thème musical:




" Soldats, la République Galactique a manqué à ses obligations. Nous avions, à tort, placé notre confiance dans un traité de paix. "


La Paix est un Mensonge.





Le sergent Mii'Shel et son petit quintal de nerfs et de muscles ouvraient la voie, trousseau technique en main, avec comme une ombre dans son sillage la petite silhouette rectangulaire d'Antarxarxès. Le pas rythmé des deux impériaux ponctuaient les lourdes phrases inintelligible de la gigantesque mécanique qui les surplombait.

" Avez-vous entendu l'hymne de notre nouvelle petite dernière, amiral ? commenta l'imposant technicien d'un air bonhomme, perso je trouve qu'il dépote !

-J'ai cru comprendre, oui, affirma Antarxarxès d'un ton léger, Le chant de Melantha, c'est bien cela ?

-Tout à fait ! D'ailleurs, ça m'a rappelé qu'on lui avait pas fait chanter le nôtre, au Capitaine, vous savez ? Pas une seule fois, vous vous rendez un peu compte ?!

-Hélas ! Un grand tort à notre actif, sans nul doute ! fit le rishii avec une expression faussement contrite. "

L'attachement de Mii'Shel à l’Égide et à ses traditions de bord n'était un secret pour personne, et certainement pas pour lui. L'idée de le savoir peiné de ne pas avoir pu enseigner à Hope l'intégralité des 10 couplets de l'Aegida Aeterna durant les quelques maigres jours - surchargés - que le jeune Sith avait passé à bord, avait cependant bien manqué de le faire rire. Il fallait en général plus de deux semaines à n'importe quelle recrue pour l'apprendre : on avait fortuitement épargné ce bizutage marin à Hope. Qui s'en plaindrait ?

" Une chanson d'amour pour faire la guerre, fallait oser quand même !

-Vous m'en direz tant. "

Ils achevèrent leur descente au rythme de l'écho de leurs pas sur les escaliers, métalliques, en canon, comme le prélude à toute autre mélodie. La large paume gantée du rishii se posa sur l'épaule, tout aussi massive, de son sous-officier. Il se pencha, et lui dit sur le ton d'une confidence badine :

" Mon cher sergent, sachez bien qu'il est dit depuis longtemps que l'amour est une guerre, et des plus terribles ! Et aussi, voyez-vous, que la guerre n'est en fin de compte qu'un amour trop brutal pour ne pas être fatal, tant à son auteur qu'à son objet. Entre nous, que ce soit vrai ou non, personne ne pourra nier que les registres musicaux sont bien souvent fort similaires ! "

Sur cet échange étrange, il laissa son technicien à ses réflexions, inspectant à son tour avec minutie chaque coin du propulseur que la passerelle technique lui permettait d'atteindre. Dans cette enceinte écrasante par ses dimensions et sa blancheur, son propre plumage paraissait gris.

Les poings sur les hanches, le petit homme décocha un air rêveur aux innombrables tuyauteries rutilantes qui formaient d'abscons motifs sur l'arrière du blindage.

" Bah. C'que j'en sais moi ! "

Avec un haussement d'épaule caractéristique, il attrapa le datapad à sa ceinture et se mit à l'ouvrage.

Lorsqu'Horakk regagna les coursives plusieurs minutes plus tard, quelques notes discrètes filtraient depuis les abysses des fosses de maintenance, entrecoupé des lourds grondements des turbines.

Il sourit. Le fantôme de la voix de ténor de Mii'Shel l'accompagna encore le long du corridor désert, jusqu'à ce qu'il ne fut plus qu'une empreinte rythmique dans un coin de sa tête. Sa propre voix de baryton se mit alors à entonner sourdement la mélodie qui flottait, en prenant mentalement le soin d'imprimer une demi fréquence de décalage à son propre phrasé.


Un chant en canon.








Il n'y a que la Passion.

" Cependant, cette confiance était, vous vous en doutez, très limitée. La félonie de nos ennemis n’est ainsi guère une surprise, nous nous y étions préparés."




Sans doute y avait-il quelque chose de ridiculement métaphorique dans l’élégante et silencieuse danse des mastodontes en suspension, tenus au silence, dérivant avec paresse au gré des forces gravitationnelles, alors que chacun d’entre eux possédait en son cœur la puissance brute capable de rayer toutes les villes d’Ossus d’un souffle. Un poétique et délicat équilibre, maintenu par on ne savait trop quelle magie, et qui pourtant, oscillait chaque minute à la manière d'un gigantesque pendule.

Il n'était question que d'enraciner une paix restée précaire. De montrer toute sa bonne foi, pour qu'on ne doutât plus de sa véracité, après tant de précédentes tentatives restées infructueuses.


Les forces envoyées par chaque camp n’avait rien d’extraordinaire au regard de celles jadis déployées durant la guerre. Ainsi, ce n’était ni la pionnière première flotte, ni la célèbre septième flotte expéditionnaire, mais une hybride bien moins médiatisée. La cinquième flotte d’assaut Sith, sous l’avatar de sa troisième force de combat, avait été choisie par l’Inquisition pour escorter ses délégations lors d’un évènement d’envergure. Elle venait ainsi prendre le relais des précédentes IV et VI flotte dans le système d’Ossus. Un roulement incessant depuis qu'il avait fallu charrier par délégations entières gardes et diplomates vers les nouvelles instances reconnues par le pouvoir impérial.






" Inconscients, les républicains ont commis une grave erreur en s’attaquant à vos vaillants frères d’armes. Alliés aux Jedi, ils grouillent sur Ossus telle de la vermine parasite."





" J’en peux plus. "

Le murmure plein d’exaspération filtra entre les bruits réguliers des consoles du pont de commandement. Les têtes alignées devant leurs écrans n’avaient rien entendu, concentrées sur leurs tâches respectives.

" J’en peux plus de ces hypocrites qui se pavanent dans leurs rafiots comme s'ils se baladaient sur une plage… Regarde-moi ça "

Dans le viseur du canon turbolaser, la silhouette vectorisée d’un transporteur aux cicatrices vaillantes défila lentement dans le collimateur virtuel, alors que Darus Harsh appuyait rageusement sur la touche « valid. » de son immense clavier de technicien de bord, le regard noir d’une agressivité difficilement contenue.

" PAM !! Plus rien ! Si seulement ces petits cons se retranchaient pas derrière leurs traités de paix de m…

-Arrête ça ! " fit son collègue de droite en désengageant promptement la procédure initiée par le technicien d’un geste expert. Son regard, à peine ombré par sa visière, semblait encore noirci par les cernes qui le soulignaient.

" Je peux savoir ce qui t’arrives, Darus ?! Qu’est-ce que tu fous, tu cherches à te faire exécuter ?! C’est quoi ce délire ?!

-Mon... problème ?... Mon PrObLèMe ?! Mon problème, c’est que j’en ai ma claque de cette mascarade ! On sert à rien, ici ! Regarde moi ça ! Un putain de vaisseau de guerre qui sert de plante verre à un parterre de cloches diplomatiques ! C’est juste une perte de temps… C'est juste... Insupportable !

-Ferme-la. Tu te calmes, ok ?! T’es un gosse, ou quoi ?! T’es dans la marine impériale, mon garçon, pas dans un putain de commando de nettoyage des quais de Dromund Kaas ! T'avise surtout pas de recommencer, sinon... "

Une fraction de seconde plus tard, le son métallique d’une botte contre le pont de commandement mis fin à l’échange.

Darus Harsh reprit sa surveillance. Immobile, interdit.




Par la Passion, j'ai la Puissance.




" Ils vont payer un lourd tribut pour leur affront et regretteront d’avoir trahi le noble Empire Sith. Que toutes les unités actuellement déployées au sol regagnent leurs vaisseaux, la bataille que nous allons mener sera spatiale. "


Par la Puissance...





" Tout ceci touchera bientôt à sa fin, Horakk. "

Les lèvres sèches et pincées d’Adonay Antarxarxès s’écartèrent sur un sourire plein d’une énigmatique malice.

A chaque fois, la joie de revoir ce visage était la même.

A chaque fois aussi, l’inquiétude était plus grande d’y déceler davantage de rides, davantage de raideur. Mais face au sourire radieux de l’hologramme, Horakk ne montra rien de l’accablante tristesse qui l’avait brusquement saisie.

" Darth Ramken, tout Sith qu’il soit, ne pourra pas tenir tête au Conseil Noir dans son ensemble. Il semble oublié que malgré la toile qu’il a pu tisser en secret, elle s’insère dans une mécanique remplie de ciseaux qui ne lui appartiennent pas.

- J’aimerai avoir encore vos certitudes, père. Mais mener l'assaut contre nos propres rangs a entamé nos forces, alors même que nous les avions recouvertes après tant d’efforts. Un tel gâchis... Même tous nos esprits combinés peinent à envisager toutes les conséquences à long terme d’une telle félonie sur nos propres terres… "

Adonay se passa une main songeuse sur le bas de son menton carré. Ses yeux d’un vert transcendant perçaient même au travers de l’hologramme. C’était cette présence unique, toujours intacte malgré les ans et les affres, qui fascinait encore Horakk comme au premier jour.

" Vous en sortirez tous grandis, affirma l’ancien général comme s’il s’agissait là d’une évidence, purger les éléments indésirables est énergivore et chronophage… Mais quelle chance, en vérité, Horakk ! Notre armée sera débarrassée de ceux sur qui, en définitive, elle n’aurait pu compter lors qu’elle aurait dû ! Quelle perte cela peut-il bien constituer ? Franchement ! "

Il balaya l’idée d’un revers de main. Son rire se mua en une toux précipitée qu’il fit taire de son mieux.

" Je ne peux que vous rejoindre sur ce point, murmura le rishii en tachant de cacher l’air sombre qui menaçait de poindre sur ses traits d’avien, mais vouloir ignorer le problème nous conduirait à prendre des risques inconsidérés. La purge, père, en réalité, n’est pas terminée.

-Non, elle ne l’est pas ! Mais le terme est proche.

-En quoi pouvez-vous en être si sûr ?

-Par l'observation de leurs actes, Horakk. En prenant du recul sur cette situation inepte ! Si Ramken était destiné à triompher, il l’aurait déjà fait. Sa rhétorique d’agitateur ne reposait que sur la haine d’Ysanne Ha’Mi et ses décisions ineptes quant à une paix illusoire. Maintenant que le trône est vide et prêt à être revendiqué, le voilà qui s’enlise dans un conflit qui n’a plus lieu d’être ? Quel chef de guerre ferait cela, s’il était convaincu de vaincre ?! Aucun ! Il dissimule ses desseins personnels de Seigneur Sith derrière une manipulation grossière. Il n’est pas besoin de l’observer longtemps pour le comprendre. Seul, il ne peut triompher, alors il espère que la colère d'un peuple trop fier le fera à sa place ! Puisse sa pitoyable tentative nous servir de leçon pour les siècles à venir. "

Il laissa un lourd soupir ponctuer sa phrase, dont la hargne avait visiblement entamé ses maigres forces. Il continua de pester, comme pour lui-même, emporté par ses pensées.

" Honte éternelle à ceux qui l’ont cru, et qui ont poignardé leurs frères d’armes pour ces chimères ! Ils ne méritent que notre mépris et notre plus grande fermeté. Je gage que le Conseil Noir saura mettre un terme à cette rébellion de pacotille comme il se doit.

-Les renégats tendent à se retrancher sur leurs bases arrière. Ils ont délaissé les assauts pour tenter de consolider les positions déjà prises. Mais je me méfie de cet apparent repli.

-Ils sont isolés jusque chez eux, en défense, alors même qu'ils n'ont aucun système logistique digne de ce nom ! Combien de temps veux-tu qu’ils tiennent ? C’est stupide. Si le Conseil Noir décide de se charger personnellement du cas de Darth Ramken, les seigneurs qui l’ont suivi ne formeront aucun ensemble cohérent, et se disputeront les charognes. Quant à nos armées : elles sauront quoi faire pour nettoyer de leurs rangs les éléments gâtés. Du moins, je ne peux que l’espérer… Tout ceci n'est plus de mon ressort. "

Sa voix ne charriait étrangement aucune déception à ce constat. Un grand détachement avait fini par le gagner, alors qu'il s'était éloigné du système impérial, relégué à l'état de vieille légende. Ce monde, pouvait-on dire, n'était plus qu'à moitié le sien. Sans qu'il n'en dit un mot, Horakk l'avait senti. L'adopté repassait alors le fil de ses souvenirs, à la manière d'un tisserand, pour se remémorer longuement leur chemin commun. Lui, l'alien sorti du néant, jeté en pâture à la vie, et lui, le vieux militaire revanchard et aigri. Un tandem improbable, incongru. Que personne n'avait donné gagnant.

Près de quarante ans plus tard, ils étaient là, l'un au crépuscule de sa vie, l'autre au sommet d'une carrière que beaucoup auraient envié. Ils avaient, par la force de leur volonté, défié ouvertement toutes les statistiques, et Horakk y avait vu son idéal.

Je choisis qui je deviens.

Mais qui voulait-il devenir ? Aujourd'hui, d'une façon paradoxale, la question revenait avec brutalité dans son quotidien. Ses anciennes certitudes malmenées par les évènements. Etait-il vraiment le digne héritier d'un homme comme Antarxarxès ? Il peinait à s'en persuader. Le reflet du miroir ne lui renvoyait pas la gloire à laquelle il aspirait. Ou peut-être... était-il simplement un individu impossible à satisfaire.

" Si l’ordre nous en avait été donné, père, sans doute notre flotte se serait-elle illustrée à l’assaut des derniers bastillons de la Caldeira. Mais il semblerait que la priorité soit ailleurs.

-Est-ce de l’amertume, derrière tes mots, Horakk ?

-Oui, sans doute. Non que je ne remette en cause les décisions de l'Ordre. Je les questionne, simplement, pour mon compte personnel.

-C’est pourtant ce que tu as toujours fait. Non ? Questionner. "

La malice était de retour sur les traits tirés du général. Les plumes du rishii frissonnèrent.

" Je n’ai jamais pensé à mal. Je ne sais sans doute pas assez discipliner mon esprit pour l’empêcher de s’égarer en conjectures inutiles…

-Entendons-nous, ce n’était pas une critique.

-En d’autres temps, père, vous n’auriez pas toléré une telle effronterie. Pas plus que je ne l’aurais toléré moi-même… Mes égarements se font au détriment de…

-Mais tu as tout dit. Je ne suis plus à la tête de cette armée depuis longtemps, et tu n’es pas mon soldat. Tu as un rôle qui demande de toi la plus grande perspicacité à tout instant. Que ton esprit cherche des réponses est donc normal, et souhaitable ! Qui voudrait d’un officier qui ne cherche jamais les liens de cause à conséquence ? Quel sérieux donner à une tête pareille ? Non. Tâche seulement de ne pas t’attarder sur le pourquoi le jour où l’on te demande le quoi – ni l’inverse, d’ailleurs. En chaque temps la bonne action – je crois l’avoir déjà dit, il y a longtemps... "

La brève leçon de morale était donnée sur un ton trop léger pourqu’Horakk ne sente pas ses propres commissures remontées. Une profonde nostalgie s'empara de lui

" Eisne a raison, père. A courir la gloire, j’en ai délaissé mon rôle d’héritier. Le domaine n’a cessé de se dégrader, et toutes mes actions entreprises au dernier été n’ont pas suffi à redonner le moindre lustre à nos terres. J’ai sacrifié tout mon temps à l’Empire, et je n’ai rien donné aux miens. Peut-être suis-je trop négligeant pour mériter votre nom. Peut-être, au fond, ne suis-je pas celui qu'il vous fallait.

-Au diable ce foutu domaine et ces titres de malheur, Horakk ! Serenno a suffisamment de nobles pour jouer l’intendance sur ces plaines, crois-moi. La marine, elle, a réellement besoin de chacun de ses héros ! Eisne ne voit les étoiles se lever qu’à sa propre porte, sans considérer la globalité de la situation. Elle n’a tout simplement pas conscience de tout ce que toi et tes hommes avaient accomplis toutes ces années… Ni de l’importance du pourquoi. Je ne pourrais sans doute jamais la raisonner sur ce point, son aversion pour les armées n’a que trop grandi. Mais ? Est-ce au final l’essentiel ? "


Il y eut un long silence interrogatif, durant lequel l’attention d’Horakk alla progressivement de l’air songeur de son père adoptif aux formes, discrètes en bord d’hologramme, d’une paire d’accoudoir en métal.

" Tu m’as déjà rendu plus fier que je ne l’avais jamais escompté Horakk ! Ne doute pas de toi : un officier de ta trempe ne peut se le permettre. "

Le compliment prit le rishii au dépourvu. Les oreilles plumeuses pivotèrent brusquement sur son crâne, une lueur nouvelle s’alluma dans son regard éteint, et il remonta le long de l’hologramme, à la recherche de l’éclat viridien.

Il y trouva un sentiment grave, presque douloureux.

" Souviens-toi, mon fils, de tout ce que tu as déjà traversé pour arriver là où tu es aujourd’hui. Souviens-toi de là d’où je t’ais sorti. Ce que tu as prouvé durant toutes ces années. Crois-tu que j’aurais placé ma confiance en toi si tu m’avais déçu ? Crois-tu que j’aurais légué un tel héritage à un incapable ? "

La question rhétorique resta en suspend. Adonay cherchait, fouillait dans le regard si dissemblable au sien, l'indice qui lui permettrait de trouver le levier à actionner. Comment peux-tu croire tes propres mots ?

Adonay se fit tranchant, et ses mots, rendus rauques par l’émotion, s’enflammèrent comme jamais auparavant.

" Tu es l’amiral de la Ve flotte, l’héritier que j’ai moi-même nommé contre des siècles de traditions, la figure de proue de l’Égide de Krayiss, le Phénix de l’Hécatombe ! Tu es un meneur et un survivant ! Combien parmi tous tes détracteurs peuvent en dire autant ?! Comment peux-tu encore laisser le moindre doute t’habiter ? Tu dois combler toutes ces failles, les noyer sous les remblais de ta volonté ! "

Silencieux, attentif, Horakk buvait chaque mot en prenant le miel et le fiel, en y plongeant le regard scrutateur de son esprit comme s’il redoutait d’y déceler la moindre incohérence, la moindre trace de mensonge. Jamais, même au cours de son adolescence sur Serenno, Adonay n’avait mis tant d’ardeur à le galvaniser.

" Oui, murmura-t-il, je suis tout cela. Mais... rien de plus qu’un mortel parmi d’autres, père.

-Il n’y a aucune présomption à affirmer qui tu es, martela le vieil homme, c’est ton devoir en tant que responsable. Tes hommes n’ont pas seulement besoin d’un meneur intelligent et habile, Horakk : ils ont besoin de symboles. Regarde l, regarde les arcanes Sith : tout est affaire de symbole. C’est à travers eux que nous transcendons l’ordinaire pour nous relier à ce qui dépasse nos propres limites. Ils sont nos voies vers l’intangible, les sources de toute forme de puissance.

L'espace de ce moment hors du temps, il n'avait plus rien eu du vieil homme fatigué et voûté. La distance qui les séparait avait elle aussi fondue. Se seraient-ils parlé tête bêche que l'échange n'en aurait été plus intense. Les années s'étaient évaporées, et Adonay Antarxarxès avait revêtu l'antique uniforme des forces de Darth Ynnitach, ses cheveux d'un blanc presque pur redevenu d'un blond cendré, tirés en arrière, ses yeux d'une dureté diamantine empli de la vigueur d'une jeunesse éternelle. La figure intelligente et terrible s'était tourné vers lui, exempte du moindre sourire, grave et silencieuse. Le charisme d'un homme tel qu'il n'en avait plus connu depuis. Une simple forme de chair devenu par l'exercice de on imaginaire l'incarnation d'une très subjective perfection.


Horakk se redressa, et tout son être respira de nouveau. La gravité n'avait plus cours. A peine sentait-il le poids du comlink au creux de sa paume. Le brasier venait d'être ravivé, et quel brasier ! Les discrètes commissures grises de son bec remontèrent imperceptiblement. L'enfant en lui avait ressuscité au simple contact de cette réalité, oubliée sous le poids des évènements. Horakk contempla longuement cette création de son esprit, ce mélange sorti de sa mémoire et qui cristallisait si bien tout son idéal.


" Je vous remercie du fond du cœur, père. Je crois… que j’avais besoin de l’entendre. "

Le visage fatigué d’Adonay se durcit. L'image retomba dans l'oubli de sa mémoire, remplacée par la silhouette décharnée du vieillard... Il ne se souvenait pas qu'Adonay ait eu un fauteuil à répulseur lors de sa dernière visite. Il ne m'en a rien dit.


" Oui. Tout le monde, un jour, a eu besoin de se souvenir de son grand Pourquoi, Horakk. Toi, moi... Tout le monde. "





"... J'ai le Pouvoir.


" Votre mission est désormais d'annihiler la flotte républicaine, réduisez chacun de leurs vaisseaux en miettes et ne laissez personne s’enfuir, en particulier ces chiens de Jedi."







En tête de l'escorte déployée sur les talons de l'Inquisition, détachée pour prendre le relais sur les positions assignées aux forces impériales, l’Égide de Krayiss et son vaisseau second, le Sibyllin, menait la petite nuée de vaisseaux en ordre de marche jusque aux abords de la désormais célèbre Ossus. Un monde qui, à présent, dans l’inconscient collectif, cristallisait autant la réussite que l’échec, la risée que l’admiration, le courroux que l’espoir. Un endroit qui n’avait guère attiré l’attention de la grande histoire, jusqu’à très récemment.

Antarxarxès avait découvert le lieu avec toute la curiosité qui était naturellement la sienne.

L’astrogateur passionné qu’il était ne se lassait pas de découvrir chaque nouveau site spatial. Il avait ainsi tué le temps qui les séparait de l’échange de prisonniers en étudiant longuement les cartes du secteur et ses configurations astronomiques avec une rigueur presque ridicule compte tenu du contexte. L’amour pour une science que ne partageait guère son second sur l’Égide. Granath, de son passé dans les usines d’armement, se passionnait davantage pour les améliorations techniques que pour les trajectoires des comètes ou la présence de champs d’astéroïdes… Cependant, il se savait mal avisé de faire un commentaire quelconque sur les longs quasi-monologues d’Horakk, perclus de commentaires et de réflexions personnelles sur les spécificités de l’endroit où on les avait stationnés.

Au travers de l’immense baie vitrée, l’amiral avait longuement observé le lent balai de Mim et Nerit, les deux petites lunes d’Ossus. Comme deux parèdres aux étoiles jumelles Adega Prime et Adega Besh, qui éclairaient avec un contraste saisissant tout ce petit monde, elles circulaient sur des orbites largement inclinées l’une par rapport à l’autre. La lenteur du tournoiement des objets célestes n’étaient qu’une illusion crée par les distances et les tailles, d’un ordre tout autre que celui de leurs vaisseaux.

En réalité, Horakk le savait, chacun de ses êtres minéraux voyageaient à des vitesses affolantes, et se trouver sur leur route équivalait à se placer sciemment sur la trajectoire d’une faux de trois mètres de rayon. Malgré toute leur puissance de feu, les monstres de transparacier qui les transportaient n'aurait pas fait un pli.

Quelle ironie.


" Dites-moi, Virdis ? J'aurais une question pour vous.

- Une seule, amiral ? Dois-je m'en inquiéter ? "






Par le Pouvoir, j'ai la Victoire.



" L’époque où nous les faisions prisonniers est révolue, ne vous souciez plus jamais de laisser des survivants. "










" Êtes-vous certains que vos officiers supérieurs sont à même de se coordonner sereinement, amiral ? "

La question, déclamée sur un ton parfaitement plat, émanait de l’imposant hologramme du cyborg, dont la silhouette immense restait démesurée, même réduite par l'imagerie artificielle.

" J'ai conscience que les apparences sont contre eux, amiral Kardrak. Mais je puis vous assurer que, depuis cinq ans que ces deux individus traversent les conflits à mes côtés, leurs différences sont une authentique complémentarité dont je suis le premier satisfait. Leurs griefs tiennent davantage des chamailleries infantiles que de véritables antagonismes. Je vous prie de ne pas vous focaliser sur ces menues altercations : elles sont monnaies courantes, et n’ont jamais eu de quelconque répercussion négative au sein de nos centres de décision.

-Je vous crois volontiers. N’oubliez pas pour autant que ce choix vous revient : nous pouvons dépêcher sur votre flotte des officiers tout aussi compétents, et dont le caractère sera sans doute plus… compatible, avec la tâche qui vous incombe. Un tel changement pourrait s'avérer des plus bénéfiques, tant sur le plan relationnel que sur le plan stratégique.

-Je vous en remercie, mais ce ne sera pas nécessaire. Je connais mes hommes. Ma confiance est pleine et entière, et la réciproque l’est tout autant.

-Certes. Parfois, cependant, le changement a du bon. Il peut vous permettre d’évoluer en dehors de votre zone de confort. A trop compter sur ce qui est établi de longue date, vous vous enfermez dans une facilité malvenue. Une routine. D'une prévisibilité et d'une mécanicité dommageable à vos aptitudes communes.

-J’approuve votre raisonnement. J'objecte néanmoins que l’expérience apporte des bienfaits méconnus et multiples, qu’une simple compétence supplémentaire, aussi rare soit-elle, ne saurait remplacer. La facilité ne tient qu'à celle que nous avons à Les commandants Pyre et Dremicol se connaissent très bien, et me connaissent sans doute autant. Notre synergie a fait la marque de la troisième force de combat, toutes ces années : jusqu’à ce que l’expérience parvienne à me prouver le contraire, je tiens à mobiliser cette harmonie encore dans le futur. "

Les yeux inexpressifs du cyborg restèrent une trop longue seconde plantés dans les siens. Il y avait une telle absence d’expressivité sur ce visage qu'en deviner les émotions revenait à jouer au sabbacc sans regarder son propre jeu.

Il semblait pourtant que son immobilité soudaine traduisait une contrariété, ou, tout du moins, une réflexion un peu trop longue.

" Soit. Faites comme vous l’entendez : il en va de votre responsabilité au sein de la marine. Vos résultats seront seuls juges de la pertinence de tels choix. "

Les deux officiers se jaugèrent encore un bref instant, avant que l’initiateur de l’entrevue n’y mette finalement fin, sans le moindre superflus.

" Darth Khorog vous recontactera pour l’organisation de ce déplacement. Terminé. "








" C’est un combat à mort. "










Comme une longue litanie émanant d'outre-tombe, la voix désincarnée répétait son refrain sinistre au travers de tous les haut-parleurs de tous les ponts de l'entièreté du détachement envoyé par l'Empire Sith.

" Ici l’Égide de Krayiss. A tous les postes de commandement. Initialisation des protocoles de combat. A tous les vaisseaux, en formation : code 478-47-47. Dérivation des transmissions intra-flotte vers les centres de cryptages multicanaux à segmentation plurielle déclenché. Aucun décollage d'unités légères autorisé, attendez les instructions. A toutes les unités lourdes, chargement de l'armement principal, pré-chargement de tous les équipements secondaires. Terminé.

Amdusias Dremilcol, depuis le pont de son croiseur observait sans ciller les vaisseaux impériaux quitter leurs positions avec l'ordre et la rigueur d'un mécanisme invisible. Peu de spectacle le satisfaisaient autant que celui-ci. Il appuya presque négligemment sur l'interrupteur :

" Sibyllin à Égide. Formation 478-47-47, manœuvres en cours, protocoles de combat déclenchés, systèmes opérationnels à 100%. Sibyllin en position, vecteurs communiqués. Attendons vos instructions. Terminé. "

Sur les projections tridimensionnelles de la console, le modèle du Melantha apparut aux côtés de l'imposant Harrower.

L'oeil noir du commandant le détailla une brève seconde, un sourire froid se fendant sur son faciès anguleux. Lorsque ses officiers de bord prirent le relais, il s'avança jusqu'à la baie pour contempler à son tour la vue particulière d'Ossus et de son balais de vaisseaux affolés.


" J'espère que votre magnifique poulain et ses troupes de choc connaissent les particularités de la 47-47, amiral. Si tel n'est pas le cas, la belle et terrible Melantha risque d'être étrennée plus vite que prévu. Le lustre du neuf et du scolaire n'a pas que du bon... Mh ? "

Il y avait comme une vague trace de sadisme dans son monologue.











En silence, le regard bigarade se posa sur le Payara. Un iconique Hammerhead, une silhouette reconnaissable par sa seule géométrie, même vectorisée et commentée de toute part dans les collimateurs des canons de l’Égide. Une avant-garde, qui n'avait cependant pas eu pour fonction d'endosser un tel rôle.

Lui, ou un autre. Quelle importance ? Celui-là avait simplement la particularité d'être au mauvais endroit au mauvais moment.

Mais pouvait-il encore y avoir un hasard, dans cette galaxie ?


Partout, sur le pont, en-dessous, sur les passerelles, dans les tourelles, dans les hangars, sur l’Égide et sur la vingtaine de vaisseaux impériaux stationnés là, il semblait que tous les regards s'étaient braqués vers lui. Le temps menaçait de s'effondrer sur lui-même sous la densité écrasante de la tension entre les cœurs. L'ordre avait été donné. La surprise de la décision avait fait place à la clameur, à l'exclamation.

La bête s'était arquée de toutes ses forces dans la fragile muselière qui la faisait taire depuis deux ans. Ses yeux fous dardaient vers lui un espoir chaotique empli d'écumeuse rage. Donne m'en l'ordre, petit maître, et j'y vais, j'y cours. Libère moi !


Par la victoire, je brise mes chaines !


Depuis tout ce temps. Depuis tout ce temps...





Pourtant. Tout n’était pas si clair.


Il avait toujours eu cette faculté de démêler les grands schémas des situations confuses. Certains pensaient qu'il en allait d'une vocation. Il avait, au contraire de toutes les âmes laissées derrière, sur les bas-côtés des longues routes de sa vie, put survoler par la déduction nombre de choses. Et là, dans l’intensité de l’action, le calme qui lui revenait où d’autres se consumaient dans l’ardeur faisait que sa pensée galopait, libre. Il fallait penser.


Mais l'instinct est têtu, et il martèle, infatigable ! Allez ! Brise les chaînes. Libère la colère !


Que sont quelques accords, quelques paroles, quelques stupides poignées de main sans conviction... contre le feu... contre la foudre... contre le vide... contre le flot d'émotions de milliers de conscience ? Contre la rage de centaines de nations ? Contre le cours insensé de l'Histoire, qui vous piétine en riant ?

Rien de toute cette tragicomédie sur le sol d'Ossus - présente, passée, future - n’avait plus d’importance si eux, faces sévères suspendues entre deux cieux, décidaient, ici et maintenant, de lâcher la fureur brûlante qui dormait au creux de leurs antres inertes, sur leurs navires comme sur la surface délicate de la terre au-dessous.

Qu’ils se démènent ou qu’ils se lamentent, qu’ils s’enfuient ou s’interposent, se cachent ou courent les rues, s’entraident ou s’entretuent, en définitive…

Qu’il y eut des haines ou des amours à faire lever les morts, le feu du ciel ne faisait jamais de distinction entre les corps.



Souviens-toi du Pourquoi.



C'était pour des instants tels que celui-ci qu'Horakk Antarxarxès avait vécu. Avait survécu.
Mourrait encore. Revivrait toujours.

Les doigts noirs aux phalanges armées de serres effleurèrent la garde blême de la lame sagement rangée au côté. L'esprit caressa en silence les six lettres gravées sur son âme sombre.



" Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu. "



[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]





Descriptif des forces impériales en présence:


Récapitulatif de la situation en orbite:

Schémas explicatifs:
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
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Eclats Kyber : 0
C’est une pluie tiède qui tombe sur la grande cathédrale. L’orage gronde au dehors, roule dans le ciel en vagues graves. Parfois, il s’échoue sur un rivage noir; les grondements deviennent silence, les ténèbres deviennent lumière. Au loin zèbre un éclair, puis le tonnerre - lointains tambours - qui résonnent, révèlent les arbres tropicaux secoués par les vents, les feuilles trempées et luisantes, un instant perlées de blanc. La furieuse mousson, tombée sur les landes, un nuage liquide qui de son bras de tempête balaie le jour, noie les souffles, accable les cimes, déracine les arbres millénaires, excave les pierres. Ce monstre abominable vient de son antre par-delà l’horizon tous les dix ans; Gaw’l Navik le nomme-t-on, l’Océan Ogre. Première des calamités, grande fureur des dieux, épreuve de l’eau, baptême du feu.

Le vent hurlant pourtant trouve à ses tambours orageux une réponse. Entre les orages, comme un mont inaltérable, roc gravé à même la pierre se dresse un temple de blocs noirs. L’eau ruisselle sur ses pierres taillées où les vents se dispersent sans autre effet, coule sur les arabesques complexes gravées, amulettes sans âge qui ont achevé de lier le lieu aux royaumes célestes. Au sein, l’on entend, à mesure qu’on gravit son millier de marches larges des percussions. Des cordes vibres, des cors soufflent. C’est une marche martiale, un air de guerre! Les tambours se font plus lourds. On frappe des mains. On chante! Au coeur du temple, entre les alcôves, sous les arches massives et les statues héroïques, une troupe est là, debout. Chacun d’un instrument, chacun d’un geste, chacun d’une voix, tout cet ensemble vivant et dansant mène une mélodie sans concertation; des airs anciens, de temps immémoriaux où encore n’existaient pas les mots mais déjà était la voix. Des notes rudes, des sons qui allaient droit au coeur, à faire vibrer la poitrine, à en jouer des heures. L’appel des cors fait vaciller les lumières, les paumes frappant sans cesse sur les peaux tendues sont engourdies. Les jambes sont douloureuses, les muscles tirent - mais c’est une bonne fatigue, une fatigue de sueur, la lassitude qui purifie le corps et éclaircit l’esprit.

Les danseurs jouent tour à tour de leur corps, tour à tour de leurs instruments; les mains, les pieds, les voix, tambourins, svaati - curieuses flûtes enflées à l’extrémité d’une gourde, taillée en os - cordes, tout se mêle, s’enfle alors que monte progressivement la fièvre commune, sans concertation. En cercles concentriques qui à chaque anneau changent de sens de rotation, on échange de partenaire, on se passe même les instruments dans un balais de plumes chatoyantes - fauves sous les lumières de flammes. L’oreille musicienne aura remarqué le détail le plus amusant de cette parade surnaturelle: que tous ces rythmes se basent sur une mesure imaginaire dont les temps sont battus par le tonnerre.
Tous sont bipèdes, tous sont masqués; des visages blanc os, peints à chacun un motif différent. Tous sont vêtus, pas un n’est pareil à son voisin. Tous sont armés, mais chacun à sa manière.
Au centre, dans le dernier cercle, entre les étoffes et les habits militaires, entre les tambours et les fusils lasers, au cœur de la rueda endiablée qui n’entend de Gaw’l Navik qu’une lointaine mélopée, deux voguent sur le rythme.

Lui chatoie de bleu, de rouge, de noir, qui virevolte de longues manches à chaque geste; elle d’or, d’argent, d’acier, de vert, qu’elle rend par gestes à son mari. Leurs yeux sont plongés l’un dans l’autre; le premier cercle suit la rotation de l’homme, le deuxième de la femme, et chaque autre alterne. Au centre, les effluves de chaleur oscillent dans l’air brûlant, lourd d’orage, humide de festivités. La femme tend une main vers l’autre. Il avance, trois pas, sur la gauche. Ils se saisissent, s’enlacent, se rejettent en tournoyant, vifs; n’importe qui remarquera une étrange contradiction. Ce n’est pas une danse qu’ils font là. Leurs mouvements sont gracieux, leurs mouvements sont harmonieux, leurs corps dialoguent et font écho à la mélopée furieuse - non, c’est l’orchestre vivant entier qui répond à leurs gestes, comme par instinct...Mais ce n’est pas qu’une danse. Ils vont de pair, mais leurs gestes sont tantôt d’amants, tantôt d’adversaires.

Bientôt l’on comprend. Ce n’est pas une simple danse: c’est une guerre! Les prises, voltiges, lancers, sont autant de mimes de combat, rapidement désamorcés; la musique et les parures abusent on pourrait s’y tromper, car aucun monde ne semble cette tradition répéter. Elle le saisit par le bras, l’attire, lui tourne, se dérobe au sol. Elle bondit, vient avec grâce, se rattraper, fait une marche rythmée alors qu’il revient sur elle en pas triolets. Rien n’arrête le couple; pas d’hésitation ni le moindre doute. Elle bat des bras, ses habits multicolores envoûtent le regard. L’or, le rouge, le vert se mêlent, se fondent, se séparent.
Soudain lui perd son masque; elle envoie le sien quelque part. D’entre les arabesques d’étoffes surgissent ses mains; sa jambe furtive fauche, et lui chute dans ses bras. Elle lui vole un baiser, le repousse puis se met à tournoyer. Trois tours, elle s’arrête. Son mari l’imite et ainsi s’achève la danse martiale de fête.

Tout le public dansant explose d’applaudissements. Zerath, encore démasqué, sourit profondément à sa bien-aimée. Sur son visage, un sourire espiègle flotte entre ses lèvres essoufflées. Ils sortent du cercle, laissent derrière eux les percussions qui, plus calmes, entament à présent de simples chants assis. Masques en mains, ils quittent le hall principal, progressent dans une coursive tempérée. Enfin, ils gagnent les hauteurs du temple. De grandes ouvertures - qu’on aurait qualifié de baie vitrée si vitre et non air les constituaient - donnent sur les forêts dévorées par Gaw’l Navik. La pluie tombe par torrents furieux, jusqu’à un mètre à l’intérieur de la pièce. Pourtant, la reptile s’en moque, s’assoie pieds dans le vide à travers la large cavité. L’autre grand reptile vient s’asseoir à son côté.

“(Traduit du Kaleesh)- Le Soleil triomphe sur la Lune, sourit-elle calmement.”

Zerath pose avec affection sa main sur celle de Cin.

- Je ne pensais pas que tu pourrais un jour à nouveau si bien danser.

- Ce n’est pas encore achevé, déclame d’un rire le prêtre. Tu as réussi encore une fois à me démasquer, c’est que ma guérison n’est pas parfaite.

- En vingt ans tu n’as jamais réussi à gagner!” dit-elle en lui frappant les côtes, joueuse. Zerath rit, observe le poing de sa femme contre son grand corps de métal. Son sourire se charge d’une pointe de tristesse. Combien d’années a-t-il perdues, où il ne peut plus sentir de ce contact charnel, de cette proximité qu’il tenait pour acquise et qui à présent est peut-être partie à tout jamais?

- Tu es superbe ainsi, Zerath.” dit Cin doucement en caressant son visage. Elle s’arrête, subitement, surprise. “- Mais...tes cicatrices? Ont-elles...?

L’Ular’Iim, pour seule réponse, entame l’ouverture de son armure. La gangue de métal, mue d’une force invisible, se déverrouille, des loquets cachés cèdent, les plaques pivotent et se rétractent. Il dévoile son torse, à nu, musclé. Les doigts de sa bien-aimée passent sur ses écailles, constatent avec émerveillement. Là où couraient de grandes balafres noires, qui jamais n’avaient régressé, la couleur commence à revenir. La noirceur recule - assiégée par une chair neuve.

- Le kolto a commencé à faire effet.

Elle lui adresse un sourire chargé de mille mots. Ils se lovent l’un contre l’autre, à observer en silence au dehors, qui arrache arbres comme voyageurs égarés la colère intangible de Gaw’l Navik. Les minutes s’écoulent paresseusement, sans personne pour les compter, si ce n’est peut-être pour regretter la vitesse à laquelle elles sont passées.
Brusquement, Cin bondit sur ses jambes!

- Cette mélodie...C’est la danse de An’mia Tha’l Awt!

Le couple redescend masqué joindre la sarabande colorée. Les deux prêtres dans leur temple, dansant la tempête, dansant les astres. Le temps s’écoule sans jour ni nuit, pour les deux kaleesh qui n’ont qu’eux seuls dans toute la galaxie.



***





C’est un cabinet faste, pétri de boiseries, tentures, tapis en soie. À l’arrière de l’étude trône une grande bibliothèque courbée sous nombre d’holo livres sur la guerre, la paix, l’administration de la nation et la gestion de l’état, sur la psychologie et l’histoire, sur la géographie et le pouvoir.Un bureau central où trône un holoprojecteur est encerclé de fauteuils aux formes ovaloïdes, sorte de gros oeufs rouges épurés que quelque artiste curieux aurait estimé la nouvelle forme de siège à libérer sur le marché. La pièce est ceinturée de fenêtres d’où un jour morne filtre; le matin pointe à peine sur Coruscant. Pour le binôme, c’est le sacre d’une fin de nuit. Sur un petit canapé, ils sont assis face à face, entre eux - minuscule - une table. À sa surface, étalés en désordre, dossiers sur dossiers, cartes galactiques sur région stratégiques. La femme arbore l’uniforme blanc de la marine. Tenue serrée, sans un pli, hérissée de médailles, au sein droit son grade: c’est une grande amirale, répondant au nom de Alya Vostyr.

De ses mains fines et pâles elle dépose un portrait sur la table. Sans hésitation, elle le place sur une pile, parmi deux; la première pile regroupe tous les profils militaires qu’ils estiment - fort du peu d’information - contre Ramken. La seconde, elle, groupe ceux qui sont du côté du renégat. Le nouveau visage qui vient d’apparaître parmi les rebelles est maladif, aux yeux multiples, sombres à la façon d’une araignée.

- Magamoth.” commente en face le grand cyborg. Face à lui l’humaine aux cheveux de jais hoche affirmativement de la tête.

- Il est certainement une des clés à Ramken et la compréhension de ce qui se passe en Empire Sith.

- Ceux faits captifs sur Murkhana craignaient ce nom. C’est ce général qui a fait tomber sous la coupe impériale les mondes des cartels. Mais il l’a fait avant pourtant que ne se déclare son maître. Il peut l’avoir joint lorsque ce dernier s’est dévoilé ou a feint l’allégeance au Trône jusqu’à ce que vienne le moment opportun de dévoiler sa traîtrise.

- Ses méthodes sont brutales et sanglantes. Capture de civils, otages, exécutions publiques...Tout ce qui permet de faire tomber une ville sans en donner le siège.

L’Ular’Iim observe le portrait, pensif. Qu’est-ce qui qualifie un individu au combat? Sur Kalee, il existe une règle fondamentale: celui qui porte le masque ne doit s’en prendre qu’à celui qui à son tour est masqué. Il faut vaincre une bête mumuu en lutte sacrée, pour prouver ensuite par son crâne dépouillé qu’on est prêt à batailles livrer. On ne combat pas les enfants encore sans masques; c’est là peut-être la plus importante et ancienne règle qui soit observée. Mais la galaxie ne semble pas partager cette vision. Il entend encore et toujours le fait d’utiliser les civils, mais est-ce un crime? Celui qui ne livre pas bataille s’interdit le choix de devenir immortel; faut-il donc que les civils disparaissent dans le néant éternel? Non, il y a plus à cela qu’une simple distinction: il y a la question des législations.

Si curieux et étrange, ils ont érigé des lois qui disposent qui choisit ses armes, stipulent en défense comme en attaque qui de droit.

- ...Utilisations, même, de gaz toxiques.

Zerath soupire. Gaz toxiques...Cela lui rappelle trop éminemment l’orbite de Arda-2. Comment pourrait-il oublier le subterfuge par lequel son ennemi s’est dérobé à l’affrontement? Plutôt que d’oser de front l’affronter, il a choisi à travers une opinion publique mal informée de lancer une rumeur, une frayeur qui aurait pu la force entière du prélat dénigrer. Un bien piètre ressort, une victimisation parce qu’on ne pouvait à la guerre mettre aucun effort. Et à présent, les généraux prêts à combattre ne savent faire rien d’autre que de ne pas même laisser l’ennemi se battre?

- Ils disgracient l’art de la guerre...Mais pour son annonce grandiloquente, à présent Ramken a sombré dans le mutisme.

S’il avait accédé au trône, déjà les annonces viendraient. Ce n’est pas une information qui aurait pu rester longtemps cachée; réfugiés comme espions auraient fini par en entendre parler. Ce serait certainement un avantage pour Ramken, à maintenir le mystère. Ses ennemis ainsi penseraient encore l’Empire en proie à la guerre, il pourrait réunir ses forces, lancer les usines, ensuite seulement son annonce faire.

- L’échange d’Ossus sera une occasion merveilleuse pour en apprendre plus sur la situation. Avez-vous préparé une belle tenue pour le bal?

- Ahah, que n’attendent que les halls du palais car mon arrivée sera brillante! Mais je prendrai cependant de chauds vêtements, car Anoat est une contrée dont je ne garde qu’un souvenir glacial.

- Commander, vous n’irez pas là-bas. On a besoin de vous sur Ossus. Votre présence rassurera les hommes.

- Suis-je donc stratège ou étendard, à devoir m’exposer aux yeux des soldats pour tenir haut les coeurs?

Alya lui sourit. Elle se lève et va vers son bureau, fouille à la recherche de quelque objet, dans ses tiroirs. Elle poursuit sans se troubler:

- Qu’est-ce qui tient le soldat en rang ordonné quand commencent à cracher les canons, Commander? Est-ce la peur ou la loyauté?

L’esprit, au moment où le monde menace de s’écrouler oublie le passé. Le temps se suspend, un instant la personnalité est piétinée: dans l’urgence les attraits et bonnes moeurs se ratatinent au creux du coeur qui cesse de battre. Ne demeurent que l’instinct, acquis autant qu’il est forgé. Mais aux hommes, il est autre chose qui les tient droits, debout et disciplinés.

- La fierté.

L’âme s’impose à l’univers, démontre qu’elle est par ce simple mécanisme: c’est ce besoin d’appartenance, cette nécessite de faire corps avec les autres - tout à fait innée - qui tient le soldat à ses pairs quand l’homme sain se serait déjà retranché loin sous la terre. C’est ce besoin de ne pas faillir, de se tenir lancé et de ne pas dire qu’on est celui qui a échoué.

- Oui, envers soi mais aussi envers ce à quoi l’on appartient. Tout l’amour-propre du monde ne peut tenir au loin la honte d’obéir à un régime qui est désapprouvé par nos pairs.

- Les coeurs se gonflent lorsqu’ils sont en accord. La foi et la conviction permettent la mise au diapason.

Il s’arrête alors, saisissant pleinement où elle veut en venir. Oui, la foi et la conviction: ce sont les deux ingrédients qu’il incarne à lui seul. Héraut des dieux, nonce de l’astre nocturne; mais il a depuis bien longtemps saisi que jamais il ne pourrait convertir à ses manières ses subordonnés. Il peut leur enseigner la façon de mourir, mais pas celle de prier. Et pourtant...Pourtant, n’est-ce pas de cela qu’il faut, pour élancer dans une direction commune les esprits? Qu’est-ce qui met en vibration l’âme, sinon le symbole, le concept qui transcende le temps, au delà des sons et paroles?

Alya tire de son bureau un grand tissu blanc, liseré de bleu. Les couleurs de la Marine, qui font un dégradé plus sombre à l’intérieur du vêtement. Elle le déplie, et dévoile dans le dos, brodé en plein centre, impossible à manquer: le symbole de leur ordre, le drapeau de la République.

- Il faut aux soldats comme aux hommes de paix une image sur laquelle s’appuyer. On vous appelle le conquérant. Venez avec moi, Ular’Iim. Soyez un pilier inspirant. Nous avons énormément à gagner, si nous oeuvrons ensemble; nous rendrons à la galaxie son éclat d’antan!




***






Les alarmes hurlent. Zerath arpente les couloirs, rattrapant d’une main un pan de sa cape qui s’envole sur le côté. Entre les boyaux de tuyaux, sur les ciels de grilles, sous les plafonds de fils, il passe pressé. Les hommes courent de gauche et de droite, chacun rejoint son poste au trot; l’on croirait là qu’il y a une hâte désordonnée mais au contraire ce rythme est précisément calibré. Une compagnie aéroportée, casques et tenues lustrées part vers les rampes, rejoindre leurs chasseurs. Là, les techniciens accompagnés de grands droïdes, qui descendent vers les canons. La machinerie s’ébranle, section après section. Le Payara prend vie, gigantesque monstre endormi. Son puissant âtre se met à vibrer, comme un grondement d’appétit; ses senseurs s’éveillent, son armement pulse bientôt d’envie.

Et autour, les sirènes, leur mesure démente, à en donner un frisson de tourmente, à chaque pulsation qui font monter la tension. L’Ular’Iim arrive enfin au pont de commandement. Les regards se portent sur lui. Une instant, la hantise redescend. Il est enfin là! Cela ne fait pas même deux minutes, mais le temps a semblé une véritable éternité; cent vingt secondes, et à présent on indique au Commander, tiré de sa nuit, les nouvelles.

Une explosion a ravagé la salle de gala; beaucoup de morts, on ignore les auteurs de l’assassinat. Mais ce sont certainement les Sith, l’Empire, ces traîtres! Leur flotte se mobilise, ils se préparent à la guerre. Une missive est venue de la planète mère, Commander. Nos hommes ne sont pas autorisés à attaquer, il faut à tout prix reculer - mais l’on ne peut s’avouer vaincu. Et par la missive, par la situation, l’on réclame au grand cyborg, on l’implore silencieusement: parle et ordonne, libère nous du paradoxe de la défense sans assaut. Il inspire en silence et observe au dehors la lente danse des astres. L’on croirait l’espace figé, à voir si lentement comme il bouge. Mais il est, bien souvent, une vérité cachée. Un océan, invisible, où baignent les navires; depuis le centre solaire, par vagues immenses viennent des ondulations chatoyantes, invisibles aurores qui lèchent les coques, baignent les flottes - inconscientes - de leur chaleur distante. Par-delà le visible, ce sont ces présages que le prêtre détaille. Il voit les traces des trajectoires; signatures qui indiquent où les navires achèveront leur voyage. Il cligne des yeux, se lance aux préparatifs de la bataille:

- Themis enclenchez vos relais orbitaux. Formation V7-38, repère inférieur: le Payara.

Un hologramme apparaît. Un gand tiré aux quatre épingles d’un uniforme soigné apparaît en nuances de bleu. C’est le commandant Zurukk. À son côté, un second hologramme se matérialise: un humain mâle, l’air grave. Le commandant Marbo. Ces deux individus sont les bras-droits de la grande amirale Vostyr dans cette opération - l’étaient, jusqu’à ce que Alya juge bon de placer Zerath à son côté pour ce transfert de prisonniers. Une décision éclairée; un coup du sort.

- Commander Ular’Iim, mâchonne avec un dégoût à peine retenu l’alien sous son masque respiratoire. Avec tout votre respect, monsieur, les instructions de l’Etat Major sont clairs: nous devons éviter l’affrontement, quoi qu’il en coûte. Une V7-38 serait contraire à ces ordres. Je suggère que nous battions en retraite.

Disgracieux. Une retraite tactique est une chose; c’est un subterfuge, un gain de temps pour attirer l’ennemi ailleurs, ce n’est pas une fuite mais une pause. Mais de déserter la guerre, totalement? D’abandonner tous les soldats qui combattent encore vaillamment? L’on ne déserte jamais le combat: on le temporise, on le dévie, mais sitôt qu’il est engagé il doit être livré, de son commencement à sa fin. Il en va de l’âme immortel, il en va de l’accès aux portes du divin. Le zélote, cependant, répond simplement:

- Observez la position des lunes et des étoiles, commandant.

Le point de déploiement républicain n’est pas un hasard: le Payara se situe en réalité sur un point géospatial tout particulier, qu’il a maintenu depuis ses cinq jours de déploiement farouchement. Ce point est celui où les attractions solaires, lunaires et planétaires se compensent à la perfection.

- Nous nous tenons là où l’espace et le temps s’équilibrent; nous tombons, autour de Aydux*, perpétuellement car ainsi le veulent les astres. Mais nul ne chutera contre l’Empire. Voulez-vous fuir? Choisissez donc un point du système, nommez le et observez que tout ce que nous faisons, nous le faisons à main ouverte: dressez un plan et l’adversaire aura tôt fait de le déjouer. Coruscant est loin, et nos ennemis trop proches. Écoutez mes ordres et nous vivrons pour voir un nouveau clair de lune. À vos postes, mes soldats.

Éviter l’assaut, quelle sombre farce; a-t-on oublié qu’il n’existe aucune cachette dans l’espace? Et cette obéissance aveugle à ceux qui ne sont pas même sur le champ de bataille, quelle ineptie est-ce là? Les deux commandants distribuent les ordres pour que débute la lente sarabande mortelle des bâtiments, suspendus dans la chute perpétuelle que dicte - déesse facétieuse - la gravité. Mais Zerath, cependant, note leurs tons, leur remarque. Il ne peut contrevenir pleinement aux ordres généraux; il aurait sinon une mutinerie sur le dos. Mais il est un mystère qui se doit d’être élucidé; du même geste, il faut qu’il puisse s’assurer de l’état de son armée. Nul ne gagne une guerre sans soldats, mais on ne se lance pas plus à la gorge d’un ennemi sur de nébuleuses accusations de coup bas. L’Empire attaque, c’est donc à l’Ular’Iim de défendre.

La formation qu’emprunte l’Empire est curieuse. Plusieurs croiseurs sont isolés. Est-ce pour l’attirer? Ou peut-être qu’en les éloignant, les généraux adverses espèrent les soustraire à la fureur des tirs? L’on est à distance si grande que l’oeil nu ne peut pas même percevoir les navires. Il faut s’en tenir aux instruments, leur vouer une confiance totale. Comme l’on ferait sous mer, fondamentalement. Mais il est autre chose, songe le vieux prêtre. En se maintenant au point où la gravité ne le fait chuter nul part, là où tout se compense, il est dans une anomalie; sur de telles distances même les turbolasers n’ont plus de trajectoire rectiligne. Et la gravité, alors, à son tour vient à les affecter.

C’est là à nouveau le plus grand des paradoxes; car lui pour tirer laisserait œuvrer l’attraction des astres. Il suffirait de viser, puis de laisser le laser “chuter”, droit vers sa cible - et cela les ordinateurs de bord savent le faire. Mais l’inverse, contre-intuitivement n’est pas vrai; tirer sur le Payara sans erreurs initiales serait bien ardu, comme de lancer une balle le long d’une pente et d’espérer que d’elle même elle remonte.

Zerath n'entend pas toute la théorie de la gravité et de la chute des corps; son esprit cependant observe les cartes de gravité estimées par les ordinateurs de bord. Il voit les reliefs, et son esprit rodé à l'exercice, rodé au terrain, rodé à la position n'y voit qu'une chose et une seule: où se placer pour triompher.


Sa manoeuvre est ainsi; puisque ses adversaires se sont séparés, il jouera leur jeu et tombera sur le premier groupe - le plus massif. Il se positionnera ainsi en premier lieu au loin de l'aile où se trouve le Melantha, que ses tirs ne l'atteignent pas. En outre, il faut tromper leurs senseurs. Il place ses navires par paire: chaque navire se dispose derrière un similaire. Les radars opèrent loin, mais on peut tromper leur flair.

Il ne sème pas ses troupes au hasard: les instruments le guident, il se dispose là où les fluctuations de l’espace-temps sont les moins marquées. Les projectiles seront naturellement déviés, attirés par Ossus. Qu’ainsi tout projectile sombre dans les puits plus massifs, chutent oui, mais à côté. Ce ne sera pas infaillible, ça ne sera qu’aux premiers tirs, mais en guerre spatiale comme sur terre le premier échange peut parfois tout déterminer. Le temps n’est pas leur allié; la course des astres viendra tôt ou tard tout bouleverser.

En réalité les tirs impériaux, à la fin de leur course, vont s’accélérer, mais Zerath ne l'a pas pleinement réalisé: il voit l'espace-temps comme un nouveau terrain mais n'en a pas encore saisi toutes les subtilités.

Les tirs républicains, eux souffiront d'une vitesse initiale sera plus faible, mais leur direction les poussera à s’éloigner de la planète et ainsi fileront-ils sans discontinuer. Il est bien naturellement la gravité des étoiles à considérer. Leur rotation perpétuelle fait fluctuer en vagues l’espace-temps - un océan véritable. C’est un lieu fascinant autant que complexe, lui qui se jetterait au combat prématurément y trouverait vite sa perte.


- Themis prêt, Commander.

La Themis est une frégate de soutien. Ses prérogatives sont multiples, mais aujourd’hui ses puissants émetteurs et récepteurs serviront à contacter ceux qui peuvent encore parler, loin sous les nuages d’Ossus. Le ciel n’abandonnerait pas la terre à la première explosion; qu’est-ce après tout, qu’une maigre déflagration? Suffit-il que si ridicule souffle en vienne à tomber trois maisons pour qu’un gouvernement entier perde la raison? Précaire château de cartes.

Soyez un pilier inspirant.

Le monstrueux cyborg, perché sur son sceptre, ordonne:

- Établissez une communication vers le sol.

On lui fait signe. Un canal sécurisé a été ouvert.

- Ici le Commander Ular’Iim. Si vous recevez cette transmission, répondez.

Son index squelettique pointe vers le commandant Marbo, grand homme vieillissant à l’impeccable coupe en brosse, vétéran des Forces Spéciales.

- Marbo, je veux un couloir d’extraction dégagé vers le sol et un visuel de votre régiment. Nous sécuriserons la proximité du sinistre.

Il passe au second hologramme.

- Zurukk, les troupes Sith stationnées au sol entament une remontée atmosphérique. Je les veux interceptées. Leur flotte ne se réunira pas, ou je ne suis pas prélat.

- Ce sera fait, Commander.

- Le moindre mot de la grande amirale?

Il jette un regard à ses hommes, dans les fosses profondes, qui à chaque instant relaient les messages, tiennent le réseau informé. L’amirale était descendue au sol aujourd’hui, pour le discours du représentant des Alliances Unies, le vieux Théophilius. Descendue avec ses meilleurs hommes, parmi les civils pour montrer patte blanche. Une action rassurante, montrer un visage humain souriant, une armée propre, une République plaisante. Si elle était là, elle commanderait toute l’opération, mais depuis les premières déflagrations c’est le silence radio.

Hochement négatif, rien. Où qu’elle soit, on ne sait pas.

- Commander Ular’Iim! Nous avons un souci !”, beugle le capitaine Muler - en charge du Payara. Un malheur n’arrive jamais seul, disent les humains. Les dieux aiment multiplier les épreuves, disent les Kaleesh.

- Je vous signale qu’un croiseur impérial répondant au nom de l’Égide de Krayiss vient de nous verrouiller dans son faisceau de tir.

Zerath pivote lentement son regard vers les bâtiments impériaux, à une distance cosmique si élevée qu’on peut à peine les distinguer. Ses yeux dorés se teintent de noirceur.




***






- Horakk Antarxarxès.” déclame subitement Ayla, droite devant la baie principale de l’Eclat de Naboo - croiseur principal de la flottille en orbite d’Ossus.

- Je ne suis guère familier des anciens dialectes humains. Est-ce un de vos proverbes?

- C’est un amiral impérial. Un redoutable stratège, un aguerri militaire. Les services du renseignement ont fait bonne oeuvre, vous les menez comme il se doit. Mais puisque nous nous sommes séparés le travail, je dois vous dire que ce nom est revenu plusieurs fois dans mes recherches.

- Vous auriez donc trouvé un nouvel allié à Ramken en cet amiral.

- À l’inverse. Son profil suggère un individu fier, rodé à l’exercice de la guerre. Pourtant ce n’est pas lui que Ramken a envoyé contre les Hutts. Et s’il était de son côté, sans doute Ramken serait-il déjà sur le trône.

Zerath détaille les traits de sa supérieure, observe sous la peau comme voyage d’une joue à l’autre la chaleur.

- Vous craignez cet amiral.

- Et comment! Il n’y a que vous pour ne craindre personne. S’il venait à nous attaquer, je ne suis pas sûre de ce qu’il faudrait faire.

- Ce que demandent les dieux, déclame religieusement le zélote. Que faire sinon leur répondre?

Ayla s’abîme dans la contemplation du système d’étoiles binaires autour duquel, en orbite irrégulière, gravite Ossus. Quelle force étrange, qui puisse tenir ainsi l’un vers l’autre les grands Incandescents; comme ils tournent, ils s’éclipsent mutuellement. Comme ils changent, leurs éclats se combinent. Si lointains sont-ils, mais Zerath n’est pas dupe; s’ils s’en approchaient suffisamment leur simple présence disloquerait sa force entière aux vents astraux. Et pourtant...Pourtant on est pas attiré par une force - c’est là toute la singularité. Les secondes s’étirent paresseusement, en apesanteur. Un grand penseur Kalee un jour a dit “Puisque la Lune est sans cesse autour du monde, cela signifie-t-il que pour l’éternité elle tombe?”.

Des mots qui semblent sots, qui cachent pourtant une vérité profonde, qui dépasse la simple perception. Tout homme de la marine l’aura observé: un blaster et un rocher lâchés loin de l’atmosphère tombent à la même vélocité. Et cela, le philosophe d’antan l’avait bien soupçonné. C’est affaire curieuse, mais même dans le vide, le monde a des creux; loin d’être plane, loin d’être uniforme, loin d’être un néant à la forme unique, il se tord et se distend, s’étire lentement. Et la Lune chute, oui, car autour de son orbite l’espace-temps décrit une pente. Une pente qui descend inlassablement, une pente infinie, une pente en cercle aussi. C’est là toute la beauté insaisissable du monde: partout, cachés, se trouvent les dieux qui agissent.

Partout, aussi, des indices divins pour le kaleesh.

Ses yeux ne peuvent discerner la courbure que prend le monde, mais les instruments, eux, le peuvent. Ce qui semblerait un terrain plat pour le novice, pour l’expert s’étire en réalité de plaines en abysses.

- Il faudra être prudents si nous voulons récupérer nos hommes sains et saufs.

Zerath observe les vents astraux - visibles à son regard qui perce jusque dans l’intime chaleur. Il fronce les sourcils. Quelle est donc cette forme, qu’il aperçoit, s’étire en volutes et lentement se détache? Cela ressemblerait à s’y méprendre à...Il cligne du regard, l’augure disparaît. Troublé, le grand cyborg recule d’un pas. Son plus grand outil - son intuition - s’éveille, lui dicte ce que sa raison et son expérience réfutent encore. Il observe, encore. À nouveau, entre les astres...! Il apparaît! Une, deux, trois fois, irrégulier, furtif. Mais à l’œil du prêtre, toujours il se dévoile, car le religieux maîtrise l’exercice. Le doute n’est pas permis.

- Commander...?

- Je dois communier avec mes dieux.

Il quitte en hâte le pont, troublé et dans le mystère. Mais ce que le vieux prêtre a aperçu, dans les rayons des étoiles, nul ne le sait car il n’en parle pas, pas même par prières.




***






Voici les hommes en rang serré; bottes fermement groupées, dos droits, organisés en irréprochables carrés. Deux murailles, l’une face à l’autre - un schisme infrangible, deux mondes qui s’observent mais jamais ne se mélangent, eau et huile, uniformes noirs et uniformes blancs, Empire et République. Brusquement le rang républicain se fend en son centre: les grandes armures, les blasters fermement tenus, tout le monde pivote en angle droit. L’armée se sépare en deux rectangles parfaitement ordonnés, dessine un couloir droit pour ses officiers. Alors, les hommes et femmes se mettent à chanter. Les meilleures voix de la compagnie, jointes à l’unisson, à la quinte diminuée. Il n’est que les tambours, fournissant la marche binaire militaire et une contrebasse discrète qui donne la mesure - à deux temps. Seule la voix, la voix de la République, à en faire trembler la pierre:

Mes frères d’armes,
Vous qui m’avez quitté,
Dans vos geôles froides,
Comment saurais-je si vous versiez une larme?

Adieu, encore, ma chère patrie.
Si dur d’imaginer votre départ, vos familles et filles laissées dans la perte.
Mes frères d’armes, mes doux amis,
Trop injustement enlevés, laissé votre femme veuve et abandonné votre fille cadette.

Chers frères d’armes, saints camarades,
De Coruscant, sur nos navires,
Nous viendrons, vous secourir.

Adieu encore, ma chère patrie.
Si dur d’imaginer votre départ, vos familles et filles laissées dans la perte.
Mes frères d’armes, mes doux amis,
Aujourd’hui est venu le temps de vous rendre à vos cadettes.

Amirale nous libérera,
Sans peur et sans soucis.

Amirale, chère République,
Mes frères d’armes, mes doux amis,
Bientôt nous serons à nouveau réunis!



Dans la chorale, d’un pas égal avance Ayla Vostyr. C’est une femme élancée, la figure musclée, disciplinée de caractère et de corps. Jeune, mais à l’expression froide comme les mers d’Endor. Elle est grande: un mètre soixante quatorze. Elle est jeune, qu’on regarde à son visage comme à son uniforme on ne trouve pas une ride. La grande amirale ne manque ni de diplomatie ni de tactique. Le bon commandant sait s’entourer afin qu’en compétences comme en connaissances il ne vienne à manquer de rien.

Un pas en retrait, le grand cyborg. Vêtu d’azur sur lequel courent des nuages rouges, luisants comme d’incandescents talismans, il porte sur ses épaules une grande cape blanche, frappée au dos des emblèmes de la République. À son poignet, son grand brassard ouvragé, serti de gemmes. À chacun de ses avant-bras, jusqu’au bout de ses doigts, de longues bandes. Et entre ses doigts, son long sceptre d’os. Ah, quelle expérience vivifiante. Les choeurs ne chantent pas son nom, mais pourtant que c’est grisant. C’est cela qu’il veut, songe-t-il, c’est cela qui lui manque; un orchestre avec la parole pour seul instrument, une harmonie parfaite entre ses soldats. La mélopée de la guerre se transcende en musiques; le champ de bataille n’est-il pas qu’une vaste partition où l’on compose un air féroce?
Derrière le duo viennent les deux bras droits de Ayla, la mine pincée - invisibles derrière les énormes épaules du colosse mécanique.

Le détachement marche le long de l’allée humaine, jusqu’à arriver en bout de compagnie; à la frontière entre les deux armées, les commandants arrivent face à face. Le tempo des chants est calqué sur leur marche. Et ainsi arrivent-ils face à leurs adversaires qu’on arrive au dernier couplet. Les grandes orbites dorées du prélat tombent sur les frêles humains, et sur un être dont la parenté tient peut-être de l’aigle. Face à face, comme à la veille d’un duel, d’un salut militaire respectueux, les artisans de la guerre.




***






- Commander, nous avons de nombreuses victimes au sol!

Vos ordres?

- Commander, escadre Longre, plusieurs navires adverses en position de tir, en attente d’instructions!

Vos ordres?

- Commander, nous avons identifié une flotte de bombardiers, vecteur d’approche A8-19...

Vos ordres?

Au dehors, la chasse furieuse des machines sera bientôt lancée; les premiers lasers cinglent, à plus d’une centaine de kilomètres, commencent à cingler l’espace. Bientôt l’on verra les vaisseaux individuels en traquenard, une danse macabre, une valse sombre. Les premiers corps chuteront dans le vide, premières déflagrations. Et l’amirale, toujours disparue. Où êtes-vous donc, Ayla? Vous deviez être là, à mener les hommes qui ont placé en vous leurs vies et leur foi. Ce n’est pas le rôle du meneur, que de mourir avant même de lancer l’escarmouche dans ses premières heures. Zerath observe le monde, prêt à vaciller.

Soyez un pilier inspirant.

La bataille s’est amplement déroulée en amont; à présent, que sont quelques minutes, si ce n’est la logique résolution? À qui donnera l’ordre, qui osera souffler le bon mot, au commandant qui prendra la bonne décision: la victoire - à l’autre le néant. L’Ular’Iim se dresse. Un mot, un seul, pour enflammer les coeurs, carboniser l’atmosphère. Une phrase - à peine, et que chantent les canons! Que se déverse la démence, à l’unisson. La fin du monde, la guerre qui en éclipsera jusqu’à l’horizon. À une distance astronomique, le duel le plus crucial de cet instant galactique; les volontés se jaugent, on sent qu’il se trame quelque chose.

Alors, Zerath lève la main. Sera-t-il tempête? Sera-t-il Gaw’l Navik, premier parmi les fléaux, avalant morts comme vivants dans sa fureur prophétique?

Soyez un pilier inspirant.

- Tenez la formation. Toutes les unités, préparez vous à concentrer le feu sur les bombardiers. Longre, activez vos boucliers.

Puis il se tourne vers ses hommes, dans la fosse.

- Désactivez nos canons et activez les boucliers de front, pleine puissance. Je veux qu’on ouvre une communication.

- Avec le sol, Commander?

- Avec l’Égide de Krayiss.
*: Ancienne façon de désigner Ossus, déformation linguistique kaleesh.




***





Au sujet de la gravité:

Descriptif des forces républicaines:

Récapitulatif des manœuvres:

Schémas explicatifs:
Horakk Antarxarxès
Horakk Antarxarxès
Messages : 147
Eclats Kyber : 0







[…] Il est une façon simple de brouiller les desseins que les politiques emploient à loisir.

De tous temps, les civilisations ont accouché d’esprits forts étroits, que les idées simples contentent amplement. De même, elles ont façonné des esprits larges et complexes, que les idées les plus alambiquées ne rebutent nullement.

Mais, comme à toutes choses l’on donne toujours et forces et faiblesses, chacune de ces familles d’esprits ne se dirige d'elle-même que vers ce qui l’attire avec grand naturel. Le reste ne se fait qu’avec efforts, voire avec peine - en conscience, ou parfois même, sous la conduite d’une éducation poussée uniquement.

Ainsi, donnez une idée simple à un esprit simple, et une idée complexe à un esprit complexe. Ils en seront tous deux ravis, et traiteront leurs affaires avec efficacité.

A présent, donnez à un esprit simple une idée complexe : il s’en trouvera paralysé, désemparé, ou se contentera peut-être d’une simplification sans issue. Donnez de même une idée simple à un esprit complexe, il tentera désespérément d’y dénicher le complexe, jusqu’au désespoir, à la folie, plein de rage de n’y trouver que du vide.

Ceci non pas par une quelconque incapacité, mais plutôt par affinité naturelle, sans doute dirait-on " par magnétisme intellectuel ", selon le terme propre au professeur Koesh'ura. […]

Voilà pourquoi l’âme politique sait s’inventer tour à tour un verbiage cabalistique propre à désarmer les plus simples, et sait tout autant agir avec une grossièreté et une évidence telle qu’elle en prend les plus avertis au dépourvu.

Je dirais donc, en définitive, en paraphrasant l’illustre Uuth’Olgor’Itha, que le brouillage mental qui en résulte n’est guère qu’une affaire de déphasage, et qu’en physique comme en politique, nous ne ressentons les choses qu’en terme de synchronicités.
[…]


Yvan Tarbanak, Essai sur la chose sociale galactique, tome 2 - réédition augmentée et commentée, an 21 544




Dans le silence feutré de sa chambre, Horakk éteignit le bloc de données.


Il demeura ainsi coi une longue minute, jambes étendues sur les épaisses couvertures, le regard fixé sur le plafonnier, plongé dans l'une de ces réflexions à la fois intense et détendue que procurait la sensation d'avoir mis le doigt sur une notion importante. Pourtant encore incertain d'en avoir mesuré la véracité ou l'orientation cachée.


A l'évocation des paragraphes au ton très professoral sur les " raisons des incompréhensions réciproques entre esprits complexes ", il lui revenait un nom, accompagné d'un visage, d'une foule de souvenirs disparates.



Leonora Soelenn.


Si une relation n'avait pas été de tout repos dans sa vie, c'était celle-ci. A se remémorer leur parcours étrangement parallèle, le rishii peinait à se détacher de la peine et de la culpabilité qu'il ressentait à chaque évocation muette de son ancienne camarade. La rivale du cadet qu'il avait été, sa forte-en-thème revancharde et cynique, son écueil infranchissable durant des années... Et finalement, sans doute l'une de ses plus belles victoires personnelles. De celles qui jalonnent l'existence d'un jeune ambitieux.

Celle à qui, en définitive, il devait d'être encore en vie.



Un sourire triste se peignit sur sa commissure grise.
Que n'avait-il pas ressassé ce souvenir-là...







" Si y en a qu’un seul qui peut s’en sortir, Horakk : c’est toi. Ok ? Tu cours jusque-là bas pendant que je les ralentis, ok ?

-T’es malade.

-Sois pas débile ! Il n’y a qu’une place dans ce putain de vaisseau ! Entre toi et moi, qui a le plus de chance de survie aux commandes de ce truc, d’après toi ? J'ai pas la moitié de ton talent en pilotage ! Alors tu y vas !

-Leonora : je te laissera pas derrière ! Je ne suis pas comme ça ! On peut y arriver, tu n’as pas à…

-Faut que je te menace, c’est ça ? Horakk, fous le camp, bordel… ! FOUS LE CAMP ! "









J'ai pas la moitié de ton talent en pilotage.

Combien de fois l'avait-elle battu, autrefois, sur les larges échiquiers holographiques de l'académie ? Combien de fois avait-il ravalé sa rage face à sa suffisance ? Elle avait été l'un de ses plus grands défis à elle seule. Elle avait changé. Lui aussi. Ils avaient vécu, et ils s'étaient retrouvés, bien des années plus tard, leurs galons de capitaine aux épaules, sur le pont de l'antique Hécatombe.

Aujourd'hui, elle n'était plus que poussière sous vents solaires quelque part dans le vide, et lui était là, incarné, conscient, fixé dans la matière, émotions contradictoires chevillées aux tripes.

Son destin aurait-il été différent s'ils avaient été synchrones ? S'ils s'étaient entendu dès le début ? Quel rôle, en définitive, avait-il joué dans la vie de cette humaine ? Quel rôle avait-elle tenu dans la sienne ?

La voix légèrement rauque lui revenait aux oreilles avec une telle précision qu'il ne pouvait plus se détacher de son souvenir.


Quel esprit était le sien ?

Avait-il laissé son esprit simple se laisser submergé par la complexité des principes de la brillante élève qu'elle avait été ? Son esprit complexe avait-il souvent été abusé par la clarté si simple d'un raisonnement épuré ? Ni l'un ni l'autre ?


Le sommeil finit par le cueillir, épuisé par ses propres errances sans fin.






" Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu. "









" Pourquoi tu veux gagner ? "

Seuls, dans l'étroit bureau sombre, ils se jaugeaient d'une manière nouvelle. Decker ne se privait jamais de le dévisager. Mais cette fois, pour la première fois, sans doute, le jeune Horakk lui tenait tête. Avec timidité. Mais son regard ne déviait pas.

" Pour l'Empire, amiral. Pour qu'on puisse un jour faire régner l'ordre sur l'ensemble de la galaxie.

Decker dénia du chef.

" Non, plumeau. C'est très fervent de ta part, mais ça n'a rien de personnel. N'importe qui ici dirait ça,. Donc. Je répète la question : pourquoi tu veux gagner ? "

Horakk fut pris d'une peur incompréhensible. En quoi sa réponse n'avait pas paru sincère ? Il n'avait même pas eu à réfléchir. L'oeil d'un bleu dur ne bougeait toujours pas. Le rishii le savait, l'officier était capable de passer une nuit entière à lui poser indéfiniment la même question. Alors, il se concentra. Il réfléchit.

Après un silence interminable, il parvint enfin à articuler une réponse qui, cette fois, lui parut presque douloureuse à révéler.

" Pour que mon père soit fier de moi, affirma-t-il, comme l'enfant qu'il était encore au fond de lui. Pour qu'il puisse être fier de m'avoir choisi... moi. "

Decker ne répondit rien. Il prit le temps de terminer la cigarra, détachant enfin son regard scrutateur de son jeune officier. Lorsqu'il n'y eut plus que des cendres, il parla de nouveau.

" C'est mieux. Mais c'est une mauvaise réponse quand même. "

Les yeux oranges s'arrondirent d'incompréhension.

" Je ne comprends pas, amiral. "


" Moi aussi, j'ai voulu que la galaxie entière soit fière de moi, gamin. C'est normal. Un moteur puissant, oui. Mais, dis-moi : le jour où ton père sera plus là pour te regarder. Pourquoi tu te battras ? Tu crois vraiment que conditionner ton désir de victoire à un paramètre qui dépend pas de toi, c'est une bonne idée ? Réfléchis, l'oiseau. Le jour où le regard des autres cesse d'être valorisant : est-ce que tu cesseras de vouloir la victoire ? Quelle conviction en carton ! Attendre des autres qu'ils alimentent ta volonté, Horakk, c'est être un suiveur. pas un meneur. Alors, repose-toi encore une fois la question, et encore, et encore. Pourquoi je veux gagner ? "

Un vent de compréhension, à la lueur de ce commentaire, agita les eaux noires de la pensée d'Horakk. Un paramètre extérieur. Conditionner ses désirs. Le rishii répétait mentalement les mots, les tournaient, les retournaient pour en extraire tout le sens. Ses pupilles allaient et venaient dans le vide. En face de lui, l'humain avait esquissé un rictus.

" Réfléchis bien à cette question, le bleu. Savoir pourquoi on veut gagner, c'est déjà décider si on gagne ou si on perd. Réfléchis-y, le matin en te levant, le soir en te couchant, et à chaque fois que tu parleras. Pourquoi veux-tu gagner ? "

Et quand tu te seras répondu, tu gagneras. Parce que cette raison n'émanera de rien ni personne d'autre que toi.





" Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu. "




Le Feu.

Oui, faire feu ! Comme on allume une torche. Comme on active une lampe d'un geste. Un fiat lux réitéré indéfiniment. Qui relance encore le cycle des création-destruction, à la manière d'une structure fractale de l'Univers en lui-même.

L'image lui plaisait.




" Alors, Blake Decker, ce n'est pas votre vrai nom. N'est-ce pas ? "

Les feuilles du locomdrier bruissait au-dessus de leur tête, couvrant le murmure de leur lointaine conversation au gré des chemins du parc. Il allait bientôt faire nuit noire, et au loin déjà, on avait ravivé le chatoiement merveilleux des milles candélabres à néons de Saffia la Paisible. Depuis les hauteurs du plateau, pour peu que l'on prenne le temps de se hisser confortablement sur les anciens remparts sans âge du domaine, on pouvait les contempler sans limite, s'étalant avec grâce sur tout le bras du fleuve.

Chaque soir, ils illuminaient la vallée, et chaque matin, ils cédaient leurs lueurs à celle d'un unique soleil. C'était un rite immuable, à la régularité apaisante, au sein d'une époque si troublée. Loin, très loin des tracas et des luttes, ce coin-là, sans prétention ni orgueil, renfermait l'âme ancienne d'une civilisation précieuse. Un paradis perdu, plein d'intime nostalgie pas tout à fait sienne, mais qui lui était pourtant si cher.

" Oui et non. "

Le regard de l'amiral avait enregistré la lueur émanant des fenêtres du premier étage, de l'autre côté de la grande friche qui avait maintenant remplacé les somptueux jardins du domaine des Antarxarxès. Bizarrement, cet état de délabrement ne lui avait tiré aucun commentaire. Le vétéran s'était contenté d'observer les alentours sans faire la moindre remarque acide ou désobligeante à son encontre. Le calme plein de murmure de la nuit approchante l'avait incité à plus de retenue que d'ordinaire, lui qui n'avait de cesse de s'imposer par la voix et par le verbe - qu'il avait toujours eu trachant.

" Aujourd'hui, c'est mon nom. Ici, dans la marine, chez les Sith, sur toutes les planètes de cet espace, je n'en ai pas d'autre. Mais si le sens de ta question c'est "est-ce que vous vous êtes toujours appelé comme ça ? " Tu sais maintenant que la réponse est "non". Et ça s'arrête là. Mon ancienne identité est morte, pour moi comme pour le reste de la galaxie. Je n'ai plus rien à faire avec ça. Anaxès est une partie définitivement révolue de mon passé. La République aussi. Point barre. "

Un point et une barre que son jeune commandant ne se serait pas risqué à défier. Mais lorsqu'Horakk eut saisi que Decker ne le relancerait pas, il repartit de lui-même à la charge, estimant que la barre était assez loin derrière eux.

" Pourquoi me l'avouer ? Pourquoi à moi, maintenant ?

-Pourquoi pas ? T'as l'intention de me dénoncer à qui ? J'estime que t'en as déjà assez fait pour moi pour mériter d'être au fait de l'origine de pas mal de mes opinions. La franchise, sur un navire, c'est autant de problèmes évités.

-Je saurais me montrer digne de cet honneur.

-Laisse l'honneur à tes coutumes de passéiste ! Entre un mentor et son disciple, ça s'appelle juste la confiance. Je fais la connerie de la placer sur ta tête, je saurais où te trouver si tu la gâches, tu peux me croire. "

Il eut un rire étrange. Il regardait ses pieds. Le pavé, à cet endroit, avait dû être orné un jour de grands motifs élégants, dont il ne restait que quelques couleurs délavées.

" Je vais te raconter un truc, le bleu. Tu vas comprendre. "

Blake lui fit signe d'avancer, et ils quittèrent l'abri du grand arbre pour longer la rive du lac.

" Sur Anaxès, la guerre, c'est bien plus qu'une industrie. C'est toute une culture. Comme ici, sur Serenno, le duel au vibro-sabre est une institution sacrée. Chaque monde a ses petits trucs. A Fort Anaxès, la vie ne tourne qu'autour des armées, cette planète n'existerait tout simplement pas sans elles. Ce n'est qu'un gros cailloux plutôt stérile, par ailleurs. Mais diablement bien situé !

Jadis, elle était l'épicentre d'un empire tel qu'on en fait plus de nos jours. L'Empire d'Azure.
"

L'humain enfouit pensivement ses deux mains dans les larges poches de son manteau d'officier, usé par le temps.

" Un Empire tel que la République n'a plus jamais su en faire, commenta Horakk avec un fantôme de point d'interrogation,

- La République, mon cadet, c'est juste un fossile qui continue de voir son fantôme de vie dans un miroir. "

La voix s'était teintée de quelque chose de sombre, de douloureux. Le rishii peina à détacher son regard du profil fermé de l'amiral. Il le fit, juste à temps pour ne pas buter contre une racine qui traversait le chemin pavé.

" Un théâtre d'ombre où quelques planètes de peigne-culs entretiennent savamment l'illusion que tout le monde est égal. Coruscant est à l'image de tout ce foutoir : un mille-feuille indigeste de tout un tas de grand n'importe quoi, où quelques mièvreries humanistes d'une minorité parvient à faire gober à la majorité qu'elle a des droits !

L'idée de départ était elle-même une chimère. A laquelle des mondes jeunes et naïfs à la recherche d'un idéal ont cru. Et puis l'Histoire a suivi son cours. Je crois bien que si les Jedi et leur Force ne s'en était pas mêlé, ce grand manège aurait rompu bien avant les guerres Mandalorienne, ne serait-ce que par les tensions économiques entre des systèmes en perpétuelle concurrence !
"

Le terme "Jedi" attira l'attention d'Horakk. Les rares fois où leur nom était venu dans ses conversations, c'était à l'initiative des Sith. Jamais Decker ni aucun de ses officiers n'avaient évoqué ces guerriers mystiques dont l'Ordre Sith se ventait d'être l'éternelle Némésis.

" Voilà pourquoi l'Empire est parvenu à sa forme actuelle, même avec le peu de moyen dont les dernières dynasties disposaient. Voilà pourquoi il est notre dernière chance de voir une vraie civilisation galactique émerger. Parce qu'il est encore la seule forme aboutie de gouvernement qui ait la moindre chance d'imposer l'ordre à travers la propagation du chaos. Et non pas de propager le chaos en tentant vainement de maintenir l'ordre. Les Sith, parce qu'ils sont instables par nature, trouveront toujours le moyen de renouveler le pouvoir central, alors que la structure externe de nos armées a été repensée depuis la base, sur des piliers on ne peut plus solides. A l'inverse de la vieille démocratie, qui sert à intervalle régulier de refuge à d'indéboulonnables incompétents, appuyant leur pouvoir inexistant sur celui de forces armées composée au gré de l'Histoire avec des planètes aux mœurs et aux valeurs souvent contradictoires ! "

Horakk pesait lentement chacune des paroles de son invité du soir. Decker s'était rarement montré aussi bavard au sujet de son passé que depuis qu'il avait mis les pieds dans ce petit bastion reculé qu'était le domaine. Le fond de l'air était frais, mais il n'avait pas froid, malgré la légèreté de la veste qu'il portait. Tout, dans la poésie du paysage luxuriant qui les entourait, concourrait à rendre cet échange agréable. Même s'il devait bien avouer que la gravité des sujets abordés n'avait guère été anticipée.

" Vous pensez que la République s'effondrera de l'intérieur ? Parce que sa structure politique ne tient plus ?

-C'est une possibilité. Sans doute l'une des théories les plus intéressantes quand on connaît ses institutions. Mais nos générations ont-elles vraiment envie d'attendre qu'un lent pourrissement en vienne à bout ? J'ai déjà trop souffert en mon temps de ce spectacle atterrant. Toute la Bordure frémit d'une exaspération grandissante depuis des siècles ! Depuis que je hante l’État-major d'Ynnitach, je n'ai entendu que les mêmes discours de revanche et de frustration. Des centaines de monde n'attendent qu'une occasion d'en remontrer à Coruscant et au Noyau. On ne peut pas défaire des millénaires d'incompréhension par un siège au Sénat ! Le Sénat... Parlons-en. Est-ce que tu en as déjà entendu parler ?

-Oui. Mais de lui, je ne sais pas grand chose, je crains. On m'a instruit des institutions politiques républicaines, mais seulement de façon fort académique. Je ne sais que l'essentiel.

-Alors c'est tant mieux ! On pourrait en parler pendant des heures, et tout ça pour ne rien dire. Il est l'ultime symbole de tout ce que j'exècre dans ce système décadent et inepte... L'exemple même d'une forme de gouvernement absurde pour des gens incompétents. Quant à son armée, son histoire récente ressemble plus à un rodéo sur fond de musique Bith qu'à une chronologie. Les changements de gouvernement ont été, durant plus de deux siècles, une véritable plaie pour tout le monde... "

L'acidité des propos faisait écho à tout ce qu'Horakk connaissait de la République Galactique. Qu'il n'avait, au demeurant, connue qu'au travers de la propagande impériale, des histoires relatées par les impériaux eux-mêmes... et les fuyards d'antan, comme l'homme qui cheminait à ses côtés ce soir-là. Mais pourquoi aurait-il seulement remis tout cela en doute ? Trop de choses s'alignaient. Trop de rancœurs s'ajoutaient. Et tout ceci ne pouvait que retranscrire une profonde vérité, fut-elle ensevelie sous des siècles de mensonges.

" Vous étiez dans la marine anaxasi ? C'est bien cela ?

-Je pense qu'on va arrêter la conversation ici, si tu veux bien. Je pense que j'en ai déjà trop dit.

-Je suis navré, amiral. Je pensais simplement que vos griefs envers la République était lié à ce passé-ci. Je me suis sans doute trop avancé. "

Il y eut un nouveau silence entre eux, qui dura cette fois suffisamment pour qu'ils parviennent à boucler le tour de l'immense terrain.

" On en reparlera, Horakk. Mais pas aujourd'hui. J'ai encore beaucoup de chose à refourguer aux suivants avant de partir, mais ça, c'est une partie de l'histoire qu'il vaut mieux ne pas mélanger avec le reste. D'ailleurs ? J'ai la dalle. Pas toi ? "





Au milieu de l'esplanade écrasée par les soleils ossiens, il s'était souvenu de cette soirée d'été, et de sa tranquille obscurité. Le regard plissé pour ne pas être gêné par les éclats aveuglant d'une si somptueuse journée, Antarxarxès remontait l'allée formée par les rangs infinis des soldats impériaux divisés en sections impeccables. Il y avait toujours en lui cette allégresse particulière à constater avec plénitude l'exactitude et la symétrie de ces géométries d'hommes et de femmes, comme d'immenses champs dont chaque brin isolé ne pouvait que se mouvoir en accord avec tous ses voisins.

C'est ainsi que cet après-midi, au rythme des tambours de guerre, on venait signer la paix. Et Horakk, se dirigeant droit sur les rangs républicains, repensait à feu Blake Decker et à ses mots.


La République avait pour elle l'ancienneté - la vénérabilité, aurait-on pu dire, peut-être - face à cette jeune impétueuse impatiente qu'était l'armée Sith. Elle avait derrière elle des millénaires à son actif, bien que sa forme et ses corps aient permutés et mués un nombre incalculable de fois au cours d'une si longue existence.


Mais, à l'instar de toutes les choses restées trop longtemps immobiles au même endroit, il parut à Horakk que son âge avancé lui conférait une apparente apathie que tout en lui récriait. Ses gens étaient là. Ils ne se souciaient sans doute plus de faire de grandes nations, sinon de seulement conserver leurs routes commerciales et leurs astroports. De son pas cadencé et de ses chants, la sagesse et l'expérience peinaient à faire encore ressentir une profonde envie de gloire.

On y parlait d'adieux, d'abandons, de familles laissées derrière, de larmes et de secours. Une chanson automnale dont le lexique renvoyait soudain Horakk aux concertos déchirants sur les terrasses de Carrannia, à l'aube d'un vieil hiver sec et glacé.

Pourquoi un tel choix ? Il lui sembla pourtant qu'au cours de ses conversations diverses, il lui fut rapporté par les diplomates et autres colporteurs que la diversité du répertoire républicain leur donnait la possibilité d'entonner, comme eux, des hymnes autrement plus martiaux.

Mais qu'importe toutes les questions, dans l'attente. Elles seront balayées, comme toujours, par la vague de l'action.

Face à la reine galactique indétrônable du Noyau, ayant tout à perdre et plus grand chose à gagner, se tenait désormais sa terrible cadette issue des ombres de l'Espace Sauvage, ayant tout à gagner et rien à perdre. Une dichotomie presque parfaite, un tableau si troublant de symbolisme qu'aucune holocaméra ne parvenait à en capturer ni le sens, ni l'essence.

C'était une démonstration telle qu'il les chérissait.

Indifférents aux média, fermés et imperturbables, les commandements des deux puissances venues ici pour mettre un terme à des mois d'incertitude se faisaient désormais face. Il y avait peu de surprise. Tout, maintenant, était planifié avec tous, pour tous. C'était du moins les termes que la royauté d'Ossus privilégiait lorsqu'il s'agissait de l'AGPU.


Mais, derrière tous les atours et l'enveloppe artificielle, demeuraient intacts deux miroirs qui ne trompaient pas sur leur nature.

Deux yeux de reptile.

Cette information à elle seule, devenait un élément central. De son regard lointain, Horakk dévisagea avec une parfaite neutralité les traits si particuliers du commander, dont le seul regard paraissait au-delà de ce qui ressemblait à un masque. Peu au fait des coutumes d'un tel peuple, Antarxarxès n'y vit qu'une curiosité. Quand ils approchèrent enfin, il avait saisi, compris, l'atout posé devant lui par une République venue elle-aussi en représentation.

Alors, on parlait ici du désormais glorifié Conquérant d'Arda. Que l'on avait, sans doute à juste titre, couronné en place publique pour ses hauts faits. Une histoire comme les armées en raffolaient toutes. La figure unique derrière laquelle on venait se réfugier pour quérir encore de l'assurance : voilà ce que l'on pouvait voir en cet alien éprouvé par la vie.

A ses côtés, sa supérieure, pourtant rayonnante, paraissait invisible. Malgré la prestance qui était la sienne, la figure humaine de Vostyr peinait à ne pas se laisser écraser par la taille et la carrure du cyborg qui l'escortait.

Dans le silence qui précédait toute chose, il sembla que les lointains badauds qui observaient ce prodigieux spectacle martial pouvaient sentir jusque sur leurs bras dénudés par la chaleur toute la tension qui emplissait les lieux.




Sans un mot, les deux amiraux se saluent. Symétrique. En phase. Trop conscients, bien plus que quiconque sans doute, de la valeur d'un tel salut.






Tout est une question de synchronisation.




Tout est rythme.




Cette phrase revenait désormais en écho dans son esprit.

" Adversaire en formation amiral, nota Dremilcol d'une voix parfaitement égale. Signature de la grande amirale Vostyr, si je ne m'abuse ? Tout ceci semble me rappeler vaguement quelque chose... Cette situation m'en rapelle une autre. "

Amdusias Dremilcol observait en parallèle toutes les manœuvres dans son champ de vision, depuis sa vue imprenable, la silhouette d'Antarxarxès à moitié tournée vers lui,. La froideur qui caractérisait toujours les attitudes sournoises et désinvoltes de l'homme en désarçonnaient souvent plus d'un. Mais pas celui qui le fréquentait depuis si longtemps. Indifférent aux suggestions du ton de son subordonné, Horakk se concentrait maintenant sur l'essentiel. Le fond, bien plus que la forme.

" Ils vont tenter de nous leurrer : d'après les derniers rapports, il y a une décorrélation très nette entre les données actuelles de nos radars et les informations rapportées depuis les observations des derniers jours.

-Rien d'étonnant à cela. Leur position leur permet d'établir une défense solide. Ils s'y étaient préparé, comme nous l'avons fait... "

Amdusias tenta d'y voir une forme de lassitude, mais cela ne collait guère avec ce qu'il connaissait du rishii.

" Non, mais cela dit... ce n'est pas le plus important à l'instant. Il semblerait que l'intégration de Melantha se soit faite avec trop de rapidité. Le capitaine Hope affirme qu'il n'a pas reçu les instructions relatives à la 47-47, et fait m'a fait la requête expresse de lui exposer notre doctrine en la matière ! A l'heure où il devrait déjà être en position ! Nous avons un décalage de 0.24 points d'alignement avec l'Omerta dès le départ, amiral. Sauf votre respect, j'avais compté sur plus de rigueur de la part d'un tel officier. "

La voix habituellement grave et chaude d'Antarxarxès sembla devenir aussi cassante que du verre. Malgré lui, le vieil du Sibyllin eut un vague frisson.

" Comment un tel manquement est-il possible, commandant ? Tous les documents confidentiels devant être transmis au capitaine Hope avaient été compilés à cet effet par les services du Castellan Noir. Il aurait dû les avoir depuis plus d'une semaine standard !

-Je n'ai pas la moindre explication à cette anomalie, amiral. Soit il s'agit, et je pense qu'il ne faudra guère de temps au Castellan pour corriger cela, soit nous avons affaire à une tentative de sabotage visant le Melantha. Dans tous les cas, nous ne pouvons nous permettre de mener l'enquête maintenant !

-Peu importe. Continuez le déploiement comme convenu, commandant. Contactez l'agent 17. Je me charge de Melantha.

-A vos ordres. "

Alors que la communication allait prendre fin, Dremilcol fit mine de se souvenir d'un détail.

" Au fait. "

Un index capital souligna son exclamation.

" Le Melantha a subi un abordage. L'un des transports ennemis a préféré tenter le tout pour le tout plutôt que de risquer la dislocation. Le capitaine Hope a cru bon de m'en informer. "

La voix chantante de Dremilcol tranchait avec la gravité de ses propos. Comme toujours.

" La situation est-elle maîtrisée ? s'enquit Horakk sans laisser paraître la moindre émotion,

-D'après les dire du capitaine, ce sera le cas très bientôt. "

Il y avait tant d'ironie dans la voix de son commandant qu'Antarxarxès haussa une arcade dubitative. Hope n'avait intégré leur escadre pour l'occasion que très tardivement, avec la bénédiction de son encombrant maître et celle, plus tacite, de l'Inquisition.

" Mettez le capitaine Trojant sur l'affaire, qu'il compile ces données au plus vite pour cerner le problème efficacement. Melantha ne doit pas être mise hors d'état, commandant. Sous aucun prétexte. Cette frégate doit jouer son rôle, du début à la fin.

-Elle ne le sera pas, amiral. Elle répondra à l'appel, même s'il faut pour cela que le capitaine Hope donne ses ordres sabre à la main ! "

Et cette remarque semblait le faire presque rire.

" Capitaine Helska, lieutenant Parnet, déclenchement de la configuration 1-A au signal, je vous prie.

-A vos ordres, commandant. L'unité de préparation nous indique que le Fantôme est prêt à décoller. En attente du signal.

-Très bien. Toujours aucune donnée du Melantha ?

-Non commandant.

-Mon commandant ! Évolution notable des vecteurs globaux de la formation républicaine : constat d'un déplacement

-Corrigez notre position. Maintenez la distance constante. "


Maintenez la phase.













" Dézoomez sur le système d'Ossus, capitaine.

-De combien, amiral ?

-Au minimum, je veux la totalité du système en visuel. "

Fost pianota fébrilement sur la console, et la maquette tridimensionnelle valsa à plusieurs reprises avant de se stabiliser à nouveau. Satisfait, Horakk l'arrêta d'un geste.

Réuni au grand complet, le commandement de l'Egide ainsi que nombre des meneurs étaient alignés sur le pont. Le calme régnait, et l'ambiance était cette fois studieuse.

" Voici la configuration particulière dans laquelle nous allons devoir évoluer durant ce court séjour, déclara l'amiral, en veillant à ce que sa voix projetée par le micro soit entendue de tous, le système d'Ossus est un système globalement sans surprise, évoluant dans la norme galactique de cette région. Il ne compte aucune anomalie spatiale, des champs gravitationnels stables et un désaxement hyperspatial périodique de +166 jours standards. Voilà pour ce qui est de l’introduction générale concernant les lieux. Comme vous le savez tous, notre présence ici a été voulue purement préventive. Darth Khorog et les délégations impériales seront débarquées sur Ossus dès que les autorisations émises par l'AGPU nous seront parvenues. "

Il était resté parfaitement neutre et égal sur ce constat. Mais derrière le faciès indéchiffrable de l'avien, une sourde colère rampait. Eux, subordonnés désormais à de la vulgaire paperasserie civile. On les faisait mander, et on leur donnait à présent un ticket de manège pour qu'il vienne récupérer les leurs, comme si le reste de cette galaxie avait eu les moyens de se payer ainsi leur propre tête. Pour beaucoup, sans doute, Makem Te et Lorrd devaient être bien loin.

" Cependant, comme vous le savez de même, la prévention est aussi l'art d'anticiper. Si les accords qui nous lient aujourd'hui à la République nous confinent à un rôle passif défensif, nous devons rester alerte, comme toujours, conscient qu'en dehors de nos frontières et face à un adversaire perfide, rien n'est jamais acquis. La paix d'aujourd'hui sera peut-être la guerre de demain. S'il nous faut agir, nous devrons le faire en toute connaissance de cause. J'exige donc de vous la même rigueur et la même hargne que si demain, ce débarquement était celui d'une nouvelle conquête. Votre état d'esprit ne doit en rien différer. "

Comme toujours lorsqu'il exigeait d'être obéi, Antarxarxès prit le temps de laisser le silence clore sa déclaration, passant en revue l'assemblée d'un large regard circulaire.

" L'étude astronomique du système ossien montre que les paramètres de notre villégiature entre dans la catégorie des systèmes bi-stellaires à triple orbite non-coplanaire. Un point d'équilibre quintuple, ici, deux points de pseudo-équilibre triple et six points double. Les plans des elliptiques évoluent selon : je vous demanderais de lancer régulièrement des évaluations à ce sujet, afin de maximiser la coordination de notre formation lorsque nous aurons à nous déplacer jusqu'à notre position finale. Nous avons également des vents solaires tels que modélisés ici en amplitude maximale. Non négligeable, comme vous le constatez : raison pour laquelle je serais intransigeant sur la mise en place des dérivations plurielles de vos canaux de communication : hors de question que l'un de nos appareils se désynchronisent sous l'effet de l'un de ces vents. Prenez également en compte l'interaction active de ces deux étoiles. Pour ceux d'entre vous ayant déjà été amené à naviguer dans les systèmes bi-stellaires, je ne peux que vous enjoindre à communiquer sur vos propres retours d'expérience avec vos pilotes. En accord avec les officiers de l'armée terrestre et l'Inquisition, nous effectuerons plusieurs sorties d'entrainement pour les escadrons nouvellement affectés... ainsi que pour notre nouvelle frégate. Le Grand Inquisiteur Darth Khorog, le seigneur Asgar, le colonel Howl, l'agent 17, le commandant Granath ainsi que moi-même recevront un exemplaire du rapport compilé de l'ensemble des données émises par vos appareils en vol lors de ces séances, afin de confronter les données théoriques avec la réalité.

Horakk voguait sur la carte holographique avec rapidité, ses mains d'alien guidant les affichages au fur et à mesure de ses mots. Son aisance toute professionnelle se ressentait jusque dans le moelleux de ses mots, déclamés avec conviction. Chaque officier prenait note des différents paramètres dans ses propres carnets informatiques dans un religieux silence.


" La République est déjà établie dans le système depuis déjà plusieurs mois, selon la propre alternance de ses flottes. Nos propres forces ont à plusieurs reprises changé leur point d'ancrage, tandis que le leur est resté quasiment fixe. La raison de cette fixité n'avait pas été étudiée de près par les flottes précédentes, par manque de temps et d'intérêt. L'étude astronomique nous en fournit l'explication. Néanmoins, je vous prierai de ne pas négliger votre propre étude de la question : notez toutes vos observations. La situation évolue en permanence, les délégations vont et vienne, et contre toute apparence, c'est précisément durant ces phases de latence qu'il faut être les plus vigilants, afin de ne pas laisser de place à la surprise.

Cette donne est sans doute l'une des plus classiques qu'il nous sera désormais fréquent de rencontrer sur notre route. Si nous devons un jour reprendre notre marche vers le Noyau et ses institutions, il nous faudra apprendre à briser des systèmes défensifs d'un tout autre acabit que ceux de Lorrd ou Columex, soldats. Voici l'occasion pour chacun d'entre vous de prendre la mesure, sur un cas somme toute factice, des possibilités qui pourraient s'offrir à nous si nous devions faire tomber Ossus et sa garde prétorienne.
"

Factice. Si seulement.

" Mon amiral ! Permission de parler.

- Accordée, lieutenant.

-S'ils devaient défendre Ossus, ils auraient sans doute une flotte plus conséquente, amiral !

-En effet. Et sans doute ne serions nous pas qu'une simple demi-escadre, lieutenant.

-Cela ne fait aucun doute, amiral. Ils ont des croiseurs, mais peu de soutien, et pas de base arrière. Ils se sont acculés à l'orbite pour filtrer leurs arrivées et nous sommes totalement hors de portée. En quoi cette situation peut-elle nous permettre de nous préparer à une affrontement ?

-Précisément parce qu'elle rend notre champ de bataille lisible, lieutenant. Peut-être même trop. Et qu'au delà du fait que nous sommes hors de portée, observer leur choix depuis notre point de vue est à mon sens d'un très grand intérêt. Voyez plutôt."


Ce rôle de professeur ne lui était venu que récemment. Il n'avait jamais envisager qu'exposer ainsi ses propres raisonnement et observations puissent à ce point lui plaire.









" Les informations sont contradictoires, amiral. Impossible pour l'heure, sans avoir préalablement rétabli le pont des communications avec la surface, de savoir de quoi il retourne. Je peux simplement vous dire qu'il y a eu une attaque. L'AGPU a été soufflée... Un chaos épouvantable s'en est suivi, les installations sont hors d'usage.

-Vous n'avez pas réussi à trianguler les balises des vaisseaux au sol ? Aucune émission depuis le sol ? C'est à peine croyable !

-Les procédures sont lancées, mais c'est une pagaille sans nom. Les écroulements qui ont suivi ont compliqué de beaucoup toute forme de scan terrain. Et l'éloignement de la flotte ne nous a pas facilité la tâche. Ossus n'est pas vraiment une planète suréquipé en matière d’émission-réception, et...

-Les vaisseaux jedi aperçu au sol ?

-Ils n'ont pas redécollé a priori. Je...

-Retentez encore. Nous devons avoir davantage d'informations sur ce qui vient de se passer. La gravité des faits nous oblige à réagir : faites en sorte que nous en sachions plus !

- Amiral !

-Qu'y a-t-il ?

-Une entrée sur canal prioritaire ! De... du Conseil Noir ! "

La surprise d'Antarxarxès ne dura qu'une fraction de seconde :

" Ouvrez la communication.

-La demande sollicite tous les canaux de la flotte, amiral.

-Eh bien dans ce cas, lancez les communications en parallèle sur tous les vaisseaux. Exécution immédiate. "

Quel qu'ait été le message, on ne faisait jamais attendre un Conseiller. Même après un attentat à la bombe sur une institution galactique. Alors, il ne fut pas dit que Darth Laduim ait eu à souffrir du moindre retard. Dans tous les vaisseaux impériaux, le visage crispé de haine de l'imposant twi'lek donna ses ordres.

A l'aube, il n'y aurait plus que le chaos et la dévastation.






" Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu. "




Cette fois, nous y sommes. Tout ceci n'aura finalement servi à rien. Mais tu sais quoi, le bleu ? Au fond, on la veut tous, cette guerre. Parce que si on pouvait régler tout ça par une signature en bas d'un holo...


Ce serait déjà fait depuis longtemps, non ?




Les yeux rivés sur la foule de paramètres relayés sur l'affichage, le rishii demeurait pensif. Quand ne l'était-il pas ? Cependant, plusieurs décisions venaient d'être prises, plusieurs informations d'importance, échangées, et tout ceci allait constituer la base de leur travail des prochaines heures.

" A toutes les unités, vecteurs frontaux en synchronisation active. Mouvement coordonné de la flotte sur les coordonnées du plan d'avancée retenu. Synchronisation des secondes et troisième lignes.

-Amiral, une communication entrante sur le canal principal. "

Ce ne pouvait encore être le Castellan. Qui, alors ?

" La demande émane... du vaisseau républicain le Payara, amiral. "

Une vague d'interrogation muette parcourut le pont. Horakk jeta un regard perçant à la baie vitrée. Une idée, d'abord vague. Puis, il en eut le sentiment pressant et puissant.




" Activez la fonction d'enregistrement de l'holosurveillance du pont, capitaine. Je veux pouvoir garder trace de ce qui va se dire ici. "

Avec une moue interdite, Fost se retourna vers l'un des techniciens. Intrigué, le commandant Granath coula un regard à son supérieur.

" Vous voulez envoyer votre échange mémorable au Castellan Noir ? s'amusa-t-il,

-Les paroles s'évanouissent, Virdis. Les écrits restent... Mais nous n'allons pas nous écrire, n'est-il pas ?

-Je... non, amiral. Bien sûr que non. "

Ils échangèrent un bref regard, et Horakk fit un signe de tête :


" Acceptez leur requête. Ouvrez le canal sécurisé vers le Payara. "

On appliqua doctement l'ordre donné, et tandis que le commandement de l’Égide se regroupait autour de l'holoprojecteur, les figures de leurs homologues se matérialisèrent au-dessus de la console.

Mais ce ne fut pas la figure pâle d'Alya Vostyr qui apparut : ce fut celle, tout aussi pâle mais pour d'autres raisons, du Commander Ular'lim.


Les oreilles pointues de Granath pivotèrent vers l'avant, trahissant subtilement son intérêt soudain.

On ne rencontrait pas un cyborg kaleesh muni d'une cane en os tous les jours.


" Commander Ular'lim. Mes hommages. "




[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]




Récapitulatif des manœuvres :

Schéma explicatif :
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
Messages : 302
Eclats Kyber : 0
Les informations pleuvent. Des appels, parsemés dans la capitale: les hommes au sol ne sont pas encore morts. Même Atraïde est là-bas, loin sous la crête des nuages, vivant et entier. Les communications sont instables. Zerath, interpellé, fait signe. L’explosion au sol a soulevé des particules haut dans l’air qui doivent probablement faire bouclier électro-magnétique. Les communications ne peuvent passer que très difficilement depuis l’orbite. L’Ular’Iim songe un instant à la marche à suivre. Il ne peut donc pas s’appuyer sur les canaux militaires habituels...Il lui faut autre chose. Autre chose pour raviver les coeurs, taire les ardeurs, amener le calme là où naît la terreur. Pour le meilleur comme le pire, il a juré d’obéir en ce jour aux souhaits de l’amirale Vostyr. L’honneur réclame qu’il ne se laisse pas aller à ses propres désirs. Lui ne souhaite que la bataille - mais ce lieu n’est pas sien, cette place est à défendre mais il n’y mènera pas de croisade. Sa première priorité ainsi est à la terre ferme d’abord, à l’espace ensuite.

Comment, donc, honorer les ordres de l’amirale disparue? La communication avec l’Égide, le temps que toute la procédure se mette en branle, prendra bien quelques minutes. Il a le temps de l’action, mais sa réflexion doit être rapide s’il veut atteindre son but.

Une officière traverse le pont. Son visage se découpe entre deux teintes; le rouge sanglant des alarmes qui tonnent, et le blanc aseptisé des néons au plafond. Elle s’arrête, bottes de cuir serrées l’une contre l’autre, rigide comme une statue de marbre devant le titan.

- Commander, une de nos navettes BT-7 Thunderclap s’est arrimée à la frégate de guerre Melantha pendant les échanges initiaux. Un petit détachement a été mobilisé pour désactiver le croiseur. La navette de transport elle-même est en protocole de furtivité.

Zerath observe l’humaine, une seconde incrédule. La situation n’a-t-elle donc de cesse de devenir toujours plus complexe? Cela signifie qu’il doit à présent, tout en gérant la crise de l’orbite, tout en veillant sur ses hommes au sol, parvenir à garantir la survie de ceux qui ont infiltré à eux seuls une forteresse de guerre? Non, leur survie n’est pas même l’enjeu; il doit les pousser au succès.
Mais cette tâche supplémentaire n’est pas une mauvaise nouvelle; au contraire même. S’il les appuie comme il se doit, un bâtiment entier pourra tomber par l’action de quatre hommes armés. C’est un espoir fou, un miracle même; mais Zerath suit la voie sacrée. N’est-ce pas le propre de celui qui aspire au divin que du simple geste au miracle exaucer?

Cependant, il n’est pas beaucoup de mesures à distance qui puissent être effectuées. La cyberguerre n’est pas chose aisée, pour une raison simple et sensée. Fort du nombre de droïdes qui arpentent la galaxie, tout engin de guerre se doit de pouvoir y résister. Est-ce par des algorithmes de protection poussée? Est-ce par des architectures réseaux terriblement sophistiquées? Ni l’un ni l’autre. La façon la plus efficace pour qu’un système ne craigne pas d’être attaqué sur un réseau est encore de ne pas l’y connecter. Les systèmes de communication sont ainsi, parfaitement découplés de tout ce qui pourrait affecter de façon critique le navire lui-même. Ce n’est pas que surcharger un système critique à distance soit terriblement compliqué: les concepteurs navals ont eu la sagesse de l’isoler totalement. On peut rendre un navire aveugle en trompant ses senseurs. On peut le rendre sourd en stoppant ses communications. Mais jamais on ne pourra à distance faire stopper ses réacteurs; on ne pourra pas lui faire baisser ses boucliers, stopper ses canons, ou déconnecter son hyperdrive. C’est un concept qui tire ses fondements dans l’architecture électronique, à laquelle Zerath n’entend pas tous les détails. Il a saisi instinctivement, toutes ces années de combat, de guerre et d’apprentissage, ce qui lui est nécessaire: la base.

On peut tromper les capteurs, on peut fausser les communications. On peut décrypter les ordres, on peut obscurcir ses actions. Mais on ne peut conduire un navire à sa propre destruction.

Toutes ces règles, cependant, s’effritent à une condition: qu’on pose pied à bord de sa cible. Mais, même une fois à bord la tâche n’est toujours pas facile. Il faut en premier lieu connaître les systèmes. Zerath sait à présent comment aider ses hommes.

- Trouvez les plans de ce navire et les points pour le mettre hors tension. Je veux savoir où frapper pour désactiver les boucliers, les réacteurs, les canons voire l'oxygène. Si des accès permettent de n’en désactiver qu’une partie je les veux aussi. Que nos hommes n’en désactivent qu’un seul et cette frégate sera nôtre. Dès que vous aurez les plans, transmettez les à la navette. Je ne veux qu’une seule communication. Et je la veux synchronisée sur les miennes, que l’émission énergétique ne compromette pas sa position.

- Bien Commander.

L’officière repart en sens inverse, commence à distribuer à un petit détachement d’opérateurs dans la fosse leurs prochaines instructions. Zerath observe l’espace. Quelque part, bien au-delà de ce que ses yeux peuvent percevoir, une équipe contre un équipage entier. Luttez, mes soldats. Prouvez votre valeur. Élevez-vous, au-delà de la peur, au-delà de la raison, où vivent les dieux.




***





- Qu’est-ce qui doit encore être fait avant d’échanger les prisonniers?

C’est Zurukk, le gand, qui a posé la question. Dans la salle de réunion, les officiers supérieurs se sont tous réunis: capitaines, commandants, pas un ne manque à l’appel. Tout le monde s’est assis en rangées ordonnées, sur des chaises inconfortables qu’on a alignées pour l’occasion. Alya, seule debout, expose les derniers détails de l’opération.

- Il faut d’abord que le président Theophilius fasse son discours. Ensuite, chaque représentant des deux délégations, impériale et républicaine, fera à son tour un discours. Ceci fait, il faudra prendre des holo images, pour les diffuser sur l’HoloNet. Un message de paix en sommes, pour signaler à la galaxie que l’Empire et la République peuvent cohabiter. Il devrait y avoir beaucoup d’intervenants. On attend un discours de chaque officier supérieur en charge de l’échange, en plus des ambassadeurs, pour montrer que les armées non plus n’ont pas d’animosité.

Son dernier mot est gorgé d’ironie, la salle entière ricane. Elle fait un clin d'oeil.

- Enfin, on est jamais trop prudents avec l’Empire quand il s’agit de négocier.

“- Vous pensez qu’ils oseraient nous attaquer?”

- Ça ne coûte rien d’y être préparés. Attaquer en plein sommet pour la paix ne serait pas exactement étrange pour des impériaux, même s’ils courent le risque d’être à tout jamais stigmatisés comme une nation sanguinaire avec qui on ne peut dialoguer...La réputation n’arrête pas la conquête.

Les partenaires économiques sont une autre affaire, mais Voltyr n’est pas ici pour donner des cours de géopolitiques. Tout le monde dans la pièce sait ce que l’Empire a à perdre plutôt qu’à gagner s’il venait à tenter de frapper à cette réunion si longuement anticipée. Cependant...

- Ce serait négliger leur guerre civile.

Ramken a décrété l’Empire comme seule nation avec la légitimité d’exister. À tous les autres la mort, à tous les ennemis, la guerre. Peu de choses ont transparu, mais son discours initial a laissé saisir des indices profonds de sa psychologie. Il existe ainsi un risque qui ne peut être négligé: qu’il mobilise des troupes, feignant la docilité, pour ensuite frapper sur Ossus d’un coup ses ennemis assemblés. Une félonie condamnée par toutes les lois du ciel, mais il est Sith et hérétique - il ne suivra jamais les voies providentielles. C’est sur ce risque, cette possibilité non négligeable que Voltyr a demandé au Commander de l’accompagner; non pas pour se laisser flotter sur l’oisiveté de la paix, mais car lui saura naviguer à travers la cruelle besogne de la guerre. La question? Quel objectif aurait Ramken dans une telle affaire?

Il est sanguinaire, mais même l’homme le plus insensé réfléchit à capturer la place-forte plutôt qu’en raser les fondations. Il est sans honneur, mais même le pire profane saisit l’importance d’une bonne position.

L’amirale décrit brièvement les scénarios que son esprit et celui du kaleesh ont considérés. Une projection de la portion dite “nord” de la galaxie derrière elle découpe sa silhouette élancée. Les mains dans le dos, d’un ton clair elle débute.

- Plusieurs possibilités sont envisagées. Les scénarios, que vous étudierez avec soin dans les prochains heures. Nous effectuerons des simulations de chacun d’eux tout particulièrement pour organiser la défense planétaire. Le discours aura lieu dans cinq jours.
Columex et nos mondes nous offrent une protection contre de potentiels renforts impériaux depuis leur espace ouest. Ils ne peuvent passer tant que Columex est gardée. Leur flotte ne s’est pas encore retirée, mais nous y avons amené la nôtre et les bases de défense anti-orbitales nous assurent qu’ils ne pourront pas prendre la planète sans le payer.

Le premier scénario, que vous trouverez en page dix de vos rapports prévisionnels, est un assaut sur Ossus ravitaillé par le cluster de Tion. L’absence de voies hyperspatiales implique un ravitaillement lent. Les armées mobilisées par le général Magamoth en Espace Hutt pourraient être redirigées sur Ossus pour servir de renforts.

Des observateurs placés sur Murkhana nous indiquent cependant qu’aucun mouvement suspect n’a été observé dans les dernières semaines. Les troupes de Magamoth sont malgré tout en permanence sur le pied de guerre. Ils pourraient se mettre en route maintenant et arriver en fin de semaine. Cependant et en l’absence de routes hyperspatiales bien tracées, nous aurions tout le loisir d’être prévenus de leur arrivée.

Le second scénario, en page trente, se décline en deux variations. Un assaut en provenance de nos routes hyperspatiales, soit depuis le secteur de Phelleem, soit du secteur de Tion. Néanmoins le déploiement de nos troupes en prévision des assauts impériaux en fait une hypothèse extrêmement peu probable: leurs troupes seraient piégées dès leur arrivée.


Les possibilités, Vostyr ne les a pas établies seule: c’est pour cela qu’elle a oeuvré de concert avec Zerath longuement en amont, pour démêler quels officiers seraient à la botte de Ramken et lesquels lui seraient opposés. C’est pour cela qu’elle a fait appel à son esprit aiguisé et son intuition qui en de maintes occasions plus que la réflexion lui ont permis de faire ses troupes triompher.


- Le troisième scénario, en page cinquante-huit, décrit une autre approche. Tous les précédents partent du principe que l’Empire attaquerait avant de récupérer ses prisonniers. Il est cependant tout à fait imaginable que sitôt l’échange effectué, les impériaux nous attaquent. Tous les autres, en effet, signifient que l’Empire accepte d’abandonner ses prisonniers. Ce ne serait pas exactement surprenant.

Un grommellement désapprobateur parcourt l’assemblée. On songe à la façon d’opérer de l’Ennemi plein de perfidie. Il en serait bien capable, cet Empire sanglant et sans honneur.

- Ils pourraient aussi poser une bombe, comme sur Flydon Maxima!” intervient un officier du rang.

- C’est un terroriste anonyme qui a posé la bombe. Les impériaux - au moins dans ce cas - étaient innocents.” corrige sévèrement Alya.

Zerath observe en silence. Il y a l’absence de Mid E’Roïb dans toute cette affaire qui est curieuse. Le Kaleesh l’aurait parié, il était sûr d’avoir saisi le dessein du cyborg et que l’Empire finirait tôt ou tard par attaquer à nouveau Columex, ignorant trêve et traités. Force est de constater qu’il s’est trompé. Aucun assaut déploré, aucune menace parvenue au gouvernement.

- Ils pourraient très bien poser une bombe et s’assurer de laisser aucune preuve. Un détonateur thermique assez gros, ça laisse aucune empreinte.

- Et puis ça serait bien le genre de l’Empire.

- Si j’étais Ramken, je poserais une bombe pour tuer tout le monde et avec la flotte je détruirais les vaisseaux restants.”, tonne un jeune capitaine au milieu des objections. Ayla laisse couler, mais ses yeux sont droit sur Zerath. Elle laisse ses hommes parler librement pour qu’il saisisse ce à quoi il aura à faire face, tôt ou tard dans sa carrière. Les humains gardent longtemps rancune. Ils ne sont pas comme les kaleesh, qui tiennent la guerre comme le trappeur tient la chasse; les hommes y voient une horreur et détestent leurs ennemis avec ardeur; c’est nécessaire car ils n’ont sinon pas le caractère pour s’entretuer.

Ce n’est pas une conviction individuelle. C’est un esprit de corps, c’est une vague, c’est un malaise entier de la société, qui donne soif de sang, qui attise la haine. Il n’y a rien de sacré, c’est un instinct lointain, une violence qui s’accumule derrière le barrage diplomatique, derrière l’espoir de la paix. Mais tôt ou tard, l’eau carmine finit par monter; tôt ou tard la pierre se fissure et le barrage est prêt à céder, pour le ras-de-marée qui noie familles, patries et volontés.

Zerath, lui, n’y perçoit qu’une chose une seule: il est besoin aux humains d’évacuer leur frustration plutôt que l’internaliser. Ce n’est pas par manque de respect pour la hiérarchie que les jeunes officiers parlent ainsi, mais bien pour préserver leur esprit, qui ne sait concilier l’existence d’un ennemi qu’ils abhorrent avec une cohabitation forcée. Il leur faut un coupable, il leur faut une cible à frapper - comme si l’ordre cosmique à chaque action décidait d’une origine unique, comme si à chaque rouage on pouvait désigner un nom et un seul responsable des rotations de la galaxie dans ses plus fines mécaniques.

Une bombe, suivie d’un assaut est une possibilité - mais ce serait certainement la pire de toutes. Ce serait se légitimer en coupable, en meurtrier sans honneur et se priver à tout jamais de l’éternité divine. C’est le septième scénario majeur envisagé, le moins vraisemblable.

Chacun profite de l’exercice. C’est comme une curieuse réunion stratégique; chaque officier partage sa théorie, prend un moment l’uniforme impérial et indique ce qu’il ferait pour faire le plus de mal. La salle est calme, on se succède poliment dans cette improbable alternance de suppositions. Chaque idée naît des précédentes, toujours plus aboutie, toujours plus complexe. Un mécanisme rassurant, de chacun son avis, de chacun son interprétation de Ramken et de l’Empire, de chacun l’occasion de mobiliser toujours plus de contexte. L’exercice passe - étrange fièvre intellectuelle - par toutes les têtes. Dans les officiers assis, elle arrive au dernier patient sain de l’assemblée, sur qui tous les regards se portent, avec un sourire amusé. On attend à présent l’hypothèse la plus compliquée de toutes, du parler le plus obscur: on regarde le prélat, gigantesque sur sa chaise minuscule. Mais il répond avec toute la simplicité du monde:

- Le berger peut-il en portant la peau de son mouton en dénouer la pensée?

Il se peut qu’il n’ait pas saisi pleinement le caractère de ses adversaires...Cela, cependant, n’est pas important. “Saisir le caractère d’un ennemi est important, pour comprendre son intention et s’y préparer” est une erreur où trébuche plus d’un débutant. L’on ne doit pas anticiper le dessein que cherche à atteindre un adversaire; on court alors le risque de prendre une erreur pour une volonté, de voir en tous lieux des pièges et embuscades et de se condamner à l’inaction, de peur d’échouer, oubliant que l’incompétence autant que la hâte peuvent parfois tout expliquer plutôt qu’un intellect développé et des plans mûrement préparés. Celui qui cherche la victoire ne s’inquiète pas de savoir ce que son ennemi désire. Il s’inquiète d’où il se situe, en quel nombre, il s’inquiète des conditions pour ses troupes.

- Un combat n’est pas une négociation; que l’adversaire soit fou comme sensé le seul objectif est au triomphe. Formulez votre stratégie sur un caractère; vous serez l’équivalent d’un peindre tentant une chef d’œuvre sur une toile d’air.




***





- Commander Ular’Iim, nous recevons une transmission du sol.

Il lève la main, autorise la diffusion. Face à lui, le visage d’un homme, couvert de suie, en uniforme d’apparat complet. Il tousse, visiblement secoué. Il ouvre des yeux surpris, dévisage l’hologramme un instant incrédule puis parle d’une voix forte.

- Ular’Iim? C’vous qui me répondez?! Où est Vostyr?

Un filet de sang coule le long de son arcade sourcilière gauche, macule son oeil clos. On entend au loin des cris, des tirs dans la distance, loin au delà de ce que fixe la projection holographique. Dans le secret d’Ossus, on assassine à ciel ouvert.

- Je vous ai connu en meilleur état, capitaine Darsch. Votre communicateur est intact, semble-t-il?

- Mes côtes ont encaissé, ouais. (Il tousse). Mais personne m’répond sur les fréquences. Vous m’boudez?

- Une fumée importune perturbe les transmissions. Nous avons tracé un couloir d’évacuation et de déploiement afin que nos soldats et médecins agissent; tant que ma voix ne pourra être entendue de tous il sera inutile.

L’image grésille.

- Écoutez Ular’Iim, c’est l’chaos là en bas. Émeutes, mouvements de foules, fusillades...À croire que tous les salopards d’la galaxie sont v’nus participer à la fête. J’espère qu’vos renforts sont musclés.

- Ai-je déjà déployé moins que ce que je ne devais?

L’homme toussote, se racle la gorge, éponge son front ensanglanté.

- Un point pour vous. Et là haut, vous gagnez?

- L’État Major réclame que nous évitions les hostilités.

Il peste, s’éponge une fois de plus le front, chasse le sang qui s’accumule sur ses paupières.

- Ils ont rien compris à qui vous êtes hein? Montrer le ventre et se rendre, ils ont demandé à la mauvaise personne. C’est des sénateurs qui vous ont parlé?

Il a un rictus amer.

- Bon, et vot’ idée? Z’avez forcément une idée, c’est vot’ truc les idées.

L’Ular’Iim sourit; son masque demeure dans son expression éternellement figée.

- Au sud de votre position repose une tour radio, nommée SilverSky. Elle est destinée à la publicité, et sa position vous est transmise tandis que nous parlons. Ses antennes puissantes pourront être utilisées pour nos propres besoins. Vous devez vous assurer qu’elles demeurent fonctionnelles. Atteignez la, et tournez ses systèmes à notre écoute.

L’homme rit entre ses dents. Il se tient l’épaule gauche.

- Ce sera fait. Oh et que vous sachiez -

Son image grésille et saute. Zerath se tourne vers les opérateurs, interroge du regard en silence.

- Le nuage, Commander. Il a dû bouger avec le vent, on a perdu la communication!

- Poursuivez vos essais.

Alors que les experts en holocommunications se lancent au labeur, le cyborg s’interroge un instant. Que fera-t-il si le bon Darsch périssait à présent? Il balaie la pensée. L’on ne peut se garder de tous les coups du sort et aucun plan ne formule toutes les possibilités. Le capitaine est un battant, la seule aide que puisse lui apporter Zerath est la confiance: Darsch survivra aux épreuves que les dieux lui soumettent...

- Mon Commander, la communication vers l’Égide est prête.

...Et Zerath aux siennes.




***





Mes hommages.
Zerath tourne la phrase dans son esprit, à la façon d’une sphère sémantique, tentant d’en trouver les nuances, d’en saisir le sens plein et entier. S’agit-il d’une simple politesse, salutation cordiale dénuée de volonté, la valeur d’un hochement de tête sans sentiment ni émotion, un geste mécanique que l’on effectue non pas parce que la situation l’exige mais par automatisme curieux, fixé? S’agit-il d’une menace? Car n’est-ce point aux morts que l’on rend également hommage? S’agit-il d’un salut respectueux, une marque d’honneur à un pair reconnu?

L’hologramme dépeint ces officiers, vêtus du sombre uniforme impérial. Ils se sont massés - religieux cortège - autour de leur saint amiral, cet oiseau de proie, ce faucon aux plumes nacrées; mais tout est bleu dans l’image artificielle. Point de couleur, guère de chaleur. Une représentation fausse, incomplète, crue: on ne voit pas l’âme, seulement l’enveloppe charnelle. Toute la cour impériale, qui à présent attend dans sa cathédrale de fer ce que dira bien le grand monstre dans ses tenues chatoyantes. L’habit ne fait pas le moine, et ce prêtre n’a rien d’un officier.

Pendant quelques secondes, le secteur entier tient son souffle: les tirs impériaux ont stoppé. Les forces se toisent. Les hostilités sont en apesanteur; les turbolasers suspendus. Quelques minutes, à peine, de répit - mais nul n’est en paix. Cette discussion est un -funeste - funambule suspendu au-dessus du vide. Un mauvais mot pour que s’effectue le grand saut, dans l’Abysse et dans la destruction absolue, par la rage des hommes, par les redoutables super vaisseaux.

Les mots du rapace sont un matin de printemps; emplis d’une civilité douce et mesurée. Le paroxysme de la civilisation, le sacre de l’humain qui porte son langage et ses intonations en exergue. Il n’a pas d’accent, il parle à la perfection. L’on attend qu’une chose: la réponse de Zerath. Ce dernier, pendant une seconde, pèse sa décision.

Il peut d’un ton miséricordieux s’entretenir avec l’amiral, réclamer la trêve, la paix, qu’on cesse l’assaut et surtout que point on ne l’harcèle. Les hommes sont blessés, le monde est meurtri, certainement l’escarmouche ne peut être livrée ici. Ce serait bon, ce serait respecter le souhait de l’État Major...

Ce ne serait pas honorable; car ce serait trahir tout ce à quoi adhère le prélat - et au nom de quoi, une ankylose qui a peur d’oser, qui redoute d’avoir tort? Le grand alien plisse les yeux; non, il ne se laissera pas contaminer par cette pestilence de la faiblesse et de la paresse. Vous avez raison, Darsch, ces officiers effrayés qui redoutent quand faire la guerre n’ont pas saisi à qui ils s’adressaient.

Après le parler élégant et noble de l’admirable amiral un silence feutré s’installe, quelques secondes.
Soudain: les nuages d’orage; un tonnerre grondant roule, s’élève, résonne en échos - comme se répercutant sur d’invisibles monts. C’est la voix de cette créature d’outre-monde, cette liche d’acier à la chair impossible - image surréaliste de la vie dans la machine, d’une mécanique artificielle, figée et morne qui pulse d’une alchimique flamme naturelle. Entre le rouge de sang des alertes incessantes, le bleu stellaire des projections hologramme, cette figure surnaturelle.

- Temps heureux à vous, brebis créées par l’impie Dieu né de l’humain! À vous tous en ce temps et ce lieu, je vous souhaite la bienvenue à ce saint festival.

La griffe de sa main gauche jaillit de sous les mers chatoyantes d’étoffes, couvert de bandes blanches. Il désigne Horakk.

- L’enfant choisi par la Causalité divine: le faucon.

Le rituel est entamé; pour la première fois le prêtre l’énonce hors des sphères de sa terre mère, la guerre sacrée est prête à commencer. Ces mots ne sont pas tout à fait ceux réservés à ses frères; car les impériaux adversaires ne suivent pas la voie de Shrupak, ils sont aveugles, athées, profanes. Mais il le faut à présent; Zerath s’est dévoilé, le temps est venu. Le temps de la prière est passé, maintenant il se liera, sous le regard des dieux, d’un accord d’honneur avec son adversaire. Telle est la façon dont on débute la guerre: un dialogue entre les commandants superstitieux. L’Ular’Iim, profondément convaincu par ses rites, s’est fait à l’idée. Cela fait depuis le début même de la trêve qu’il n’a de cesse de la préparer: tôt ou tard, l’Empire et la République doivent à nouveau s’entre-déchirer. Mais il ne peut se lier en cérémonie avec ceux sans valeur.

Son visage inexpressif se penche en avant. Il doit les évaluer. Au rite sacré ceux qui prouveront leur honneur; à l’Abysse tous les autres, qu’ils sombrent dans l’oubli du néant et de ses horreurs.

- Ô brise-serments, langues de malice, vous qui apportâtes aux ingénus la mort; félins d’infortune, craignîtes tant de revoir vos frères, que vous précipitassiez votre propre chute et une nouvelle saison de guerre? Est-ce ici la véritable couleur de votre tempérament?

Le regard monstrueux tombe sur l’amiral Antarxarxès. Son ton est teinté de ce qui semble une étrange déception.

- L’on me promit un officier réfléchi, mais qu’est-ce là? Nourrissiez-vous si peu de confiance en vous hommes pour qu’alors que les regards emplis d’angoisse se portaient au sol vous passiez à un assaut démesuré? Êtes-vous guerrier ou pantin, à accomplir aveuglément les désirs d’un autre à vous en damner? Songiez-vous qu’une confusion de la sorte vous permettrait de nous terrasser? Nous n’avons fait que défendre, souhaitez-vous que nous commencions à répliquer? Parlez pleinement, officier. Nous expierons vos façons, nous libérerons les vies que vous avez d’un coup félon broyées; parlez, car les dieux vous écoutent, mais mentez d’un mot un seul et je le saurai.

Ce n’est pas tout à fait vrai; Zerath pourrait certainement le déterminer sur les humains qu’il côtoie depuis maintenant tant d’années. Sur une espèce étrangère, il ne saurait certainement pas si bien y faire; et l’hologramme rend en réalité la tâche impossible car ne transmettant pas les infrarouges - clé de la vérité, clé du corps qui s’actionne, clé de l’âme dans les rouages.

- Notre rencontre était écrite dans ce système même. Un présage noir, une déloyauté prophétisée dans les astres. Vous avez des ailes, ce n’est pas pour ramper! Parlez vrai amiral, votre délivrance et le début du grand festival sont proches. Et ainsi je vous interroge: désirez-vous tant le néant, pour après avoir frappé les innocents au sol s’en prendre à mes hommes dans le deuil et le chagrin? Parlez vrai amiral; vous ignoriez peut-être le crime odieux à l’Immortel que vous commettiez; parlez je vous en conjure - il en va de votre honneur et de votre âme.

L’Ular’Iim ne s’éclaboussera pas à considérer comme égal celui qui n’observe pas parole. Mais il lui faut cependant délier le vrai du faux; et pour cela il ne peut laisser les langues mielleuses avoir le dernier mot. Il a déjà expérimenté tant le ministre vipère que le naïf roi solaire; il s’est entretenu avec Grendo S’Orn, et Virgille-Auguste de très loin son cadet. Les humains sont faibles à leur égo; frapper fort est une bonne méthode pour leur faire cracher un avis extrême et résumé en peu de mots. Parfois peuvent-ils s’expliquer longuement et se justifier. Ils seront vexés, mais le grand cyborg n’en a cure; il n’éprouve pour ceux qui brisent leur parole pas le moindre respect.

À présent amiral, de quelle nature êtes-vous? De celui qui sacrifie ses valeurs pour à tout prix triompher, à en dénaturer le monde, ou de ceux qui contre vents et marées demeurent justes, des parangons de conviction que rien ne saurait altérer.

Peu importe votre nature: vil comme bon, Zerath n’a qu'un projet, par les armes et les corps dans l’Abysse vous jeter.
Récapitulatif des manœuvres:
Horakk Antarxarxès
Horakk Antarxarxès
Messages : 147
Eclats Kyber : 0







Vous êtes le Ciel.
Le reste ?
Ma foi, c'est juste le temps qu'il fait.

Pema Chödrön




Un religieux.



Ce fut la première idée que son esprit formula, lorsque le verbe guttural jaillit des haut-parleurs disposés autour de la console. Arda avait cédé sous les pas d'un mystique : bien qu'il l'ait su de manière formelle, ce fait n'avait jamais pris autant corps dans son esprit qu'à ce moment précis. Le titre de prélat n'avait guère de sens, ni sur Serenno, ni sur la plupart des mondes qu'il avait côtoyé. Antarxarxès pouvait à présent y poser une image concrète : celle d'Ular'Iim.

" Temps heureux à vous, brebis créées par l’impie Dieu né de l’humain ! À vous tous en ce temps et ce lieu, je vous souhaite la bienvenue à ce saint festival. "

Festival claqua dans l'air déjà lourd des deux vaisseaux. Festival, festif, fête, réjouissance : le mot tranchait par son seul sens. Que venait-il faire ici ? Il n'en fallait jamais beaucoup pour attiser une curiosité toujours vive malgré les ans. De quelle espèce était-il ? D'où provenait tout cet attirail ? Malgré sa culture, les connaissances ethnologiques n'avaient pas été la part belle de ses recherches personnelles.

L'ouverture théâtrale retomba dans un silence de cathédrale. Le commander Ular'Iim, dépassant de plus d'une tête tous les autres hologrammes, les toisait à présent d'un regard dont l'apparence même défiait l'intrusion indiscrète. Que pouvait penser un regard semblable ? Bien peu d'humains auraient été en mesure de le deviner. Le rishii, lui, ne s'y risquait pas. Il était curieusement plus attiré par le choix de vesture de l'officier.

Sous le pli soigné des étoffes, l'exosquelette lui parut d'une facture inhabituelle. Habitué aux prothèses diverses et nombreuses dans les rangs impériaux, Horakk sut déceler, au travers de son regard si particulier, de subtiles différences. Ceci n'était pas le produit d'une industrie de masse, mais tenait bien davantage de l'artisanat. Le reste semblait dédié au décorum, assemblé avec soin, avec une préférence évidente pour le symbolisme mystique. Tout ceci constituait des choix, conscients et inconscients : et les choix, pour Horakk Antarxarxès, n'était ni plus ni moins que la révélation de l'insaisissable anima intrinsèque de l'individu.

Demeurait, au dedans des atours chatoyants, l'impression tenace que tout ceci n'était que poudre aux yeux. On avait encore tenté de plaquer l'apparence de la vie sur un quasi-automate. Mais que demeurait-il de vivant là-dessous ?

Comme la Lune était le miroir des astres et dépendaient d'eux pour luire, le porte-voix d'un régime devenait à dessein son visage, mais demeurait attaché à son approbation pour briller. Et quel étrange tableau, considérait le rishii en repensant brièvement aux derniers jours, tandis que les mots du kaleesh grondaient au travers des hauts-parleurs.

La grande maîtresse de lumière leur avait envoyé un mutilé - un reptilien il semblait - courbé sur un sceptre, engoncé dans une gangue métallique qui semblait être le dernier rempart d'un corps menaçant à tout moment de s'écouler sur le sol. Qu'elle qu'ait été l'histoire d'un tel soldat, il incarnait bien malgré lui une image d'une troublante acuité.

La symbolique en était si puissante qu'elle ne put passer inaperçue à ses yeux. Elle le frappa à la lueur de l'évènement, alors que, quelques temps plus tôt encore, la cape qui avait couvert le corps du cyborg sur les larges esplanades ossiennes n'avaient que peu laissé entrevoir la particularité de son physique.

La respiration de la créature était lourde, difficile. Les rares saillies dans l'exosquelette artificiel ne laissaient voir qu'un spectacle de douloureuse survie. Ses mouvements saccadés, parfois trop vifs, . Les lueurs affolantes qui passaient sur sa silhouette se traduisaient en hologramme par un jeu d'ombre et de lumière alternée qui ne l'en rendait que plus maladif encore.

Horakk observait avec détachement, avec le regard tranquille de celui qui se tait, celui que la République s'était choisie comme visage. Une image surprenante, et qui en disait infiniment plus long sur son état que tous les rapports qu'il avait pu lire. La voix rauque au parfum de cigarra lui revenait encore, tandis que le regard vipérin brodé de vert l'épiait depuis l'autre versant du front.


La République, c'est juste un fossile qui continue de voir son fantôme de vie dans un miroir.


Zerath Ular'Iim était la métaphore parfaite du dernier rempart lyrique d'une folie collective que l'on nommait sans doute " la démocratie " en des lieux exotiques. Lieux qu'il n'avait guère eu l'occasion de visiter autrement qu'à bord d'un croiseur - et qui, étrangement, ne l'avaient jamais véritablement attiré.

" L’enfant choisi par la Causalité divine: le faucon. "

L'index osseux s'était pointé sur lui. Avec attention, il écoutait. Chacune des deux oreilles de plumes aux pointes dorées s'étaient orientées de telle manière à percevoir pleinement les sons qui émanaient de la scène.

Déjà, il avait senti les interrogations muettes de ceux qui dardaient regards et attentes sur ses épaules. Etait-ce réellement là l'adversaire du jour ? L'avait-on drogué, fait boire ? Ossus tout entière était-elle devenu ivre pour confier les commandes à semblable excentrique ? Mais Antarxarxès demeurait silencieux, immuable dans la pièce comme s'il avait été seul.

C'était en réalité avec la plus intense et la plus pragmatique attention qu'il entendait mots, accents, intonations, et toute cette foule de choses disparates que raconte le corps tandis que l'on parle. Le silence était tout aussi, sinon davantage, crucial, qu'un tonnerre de mots.

" Ô brise-serments, langues de malice, vous qui apportâtes aux ingénus la mort; félins d’infortune, craignîtes tant de revoir vos frères, que vous précipitassiez votre propre chute et une nouvelle saison de guerre? Est-ce ici la véritable couleur de votre tempérament ? "

Peut-être avait-on, lui ou un autre, pensé qu'une telle apparence aurait de quoi effrayer les rangs adverses, déranger l'esprit au point de faire douter. De par sa taille et son charisme, l'automate argenté pouvait marquer les esprits influençables, détourner les cœurs les moins sûrs.

Une tactique somme toute très Sith. Ironique.

Tandis que, par le truchement des chaînes ininterrompues de causes et de conséquences dont personne ne connaissait les arcanes, c'était finalement lui, le petit avien d'un modeste mètre soixante-quinze, dont l'uniforme sombre et sobre reflétait toute la mentalité ascétique en un tel instant, que la cruelle hydre impériale s'était choisie pour oriflamme.

Comme un éclair d'un blanc pur sur l'horizon noir, minuscule au devant de tous leurs mondes de duracier poli, le porteur de l'épée venait au devant d'un singulier dragon.

Égide et Payara, l'arme divine, contre la créature des tréfonds : il y avait là tant à dire, dans cette distribution des rôles. Cette cinglante et symphonique symbolique.

" Notre rencontre était écrite dans ce système même. Un présage noir, une déloyauté prophétisée dans les astres. "

Avec prémonition, il sentit qu'aux passages des mots emportés de l'oeil vert, il y avait un fond de vérité.

Le serpent, le dragon sans aile. L’ombre manifestée, le Grand Ennemi. " Le non-manifesté qu’il faut porter au jour devant sa face ", aurait écrit l’éminent Yvan Tarbanak dans l’une de ses interminables dissertations… pour triompher et vaincre ses propres démons intérieurs.

Fallait-il donc qu’Horakk ait intégré de tels schémas, pour avoir ainsi dédié l’entièreté de sa vie à la guerre. Avait-il finalement conclut qu’autant de combats extérieurs auraient la vertu de purifier sa psyché ? Au son de cette voix si particulière, gutturale et sombre, il lui revenait ces récits mythiques anciens, où l’on terrassait des dragons diaboliques aux pouvoirs maléfiques. On lui en avait donné un, et dans sa main, l'épée pour le pourfendre.













" Je me souviens de toutes ces histoires, où le Blanc et le Noir viennent à s’affronter. La trame en est toujours plus ou moins la même... La forme évolue seulement avec le temps et le lieu, en fonction des peuples et des cultures.

Il y a deux entités, par leur nature similaires, mais par leur polarité inversées. L’une a des ailes et, légère, vive, feu, provient des cieux, du chaud et du sec, du vif et du souple. L’autre en est dépourvue, et, lourde, monolithique, eau, provient des tréfonds, des abysses, de l’humide et du froid, du lent et du solide, du rigide et du dur.

Leurs puissances sont complémentaires, en tout point opposées et équilibrées en dépit des apparences, car rien dans leurs attributs ne suffirait à les départager. Ce que l’une possède, l’autre en manque, et vice versa.


-Et laquelle des créatures gagne, papa ?

-Aucune, fiston ! Jamais aucune ! Si l’une d’elle gagnait, l’existence cesserait. Elles ne sont que pour s’affronter, toujours, car de l'opposition perpétuelle de leurs forces opposées provient la rotation du Monde. "










Dans l'ombre presque dense de l'espace, les lignes impériales progressaient lentement, à la manière d'une vague silencieuse. Trop lentement pour que son mouvement ne puisse être perceptible, mais suffisamment pour que les données défilants silencieusement sur les milliers d'écrans s'implémentent, minutes après minutes. Les forces impériales descendues plus tôt sur Ossus tardent à venir : on se doute qu'autre chose est à l’œuvre.

Tout le soin apporté à la préparation de cette entrevue n'a cependant pas été aussi vain qu'il pouvait y paraître à un œil extérieur. Sous la mer limpide, les bêtes abyssales dansent. Dans les files de chiffres, les maillages et les commentaires, Amdusias guette les paramètres qu'Antarxarxès lui a indiqué, à la manière d'un studieux étudiant.

Effectivement, à l'orée de cette calme réflexion, il comprend désormais toute l'utilité de l'astrogation. Domaine jadis si rébarbatif... Le malin promoteur de la République avait positionné son barrage sur des nœuds invisibles dont, sans l'aide de connaissances quelque peut abstraites, il n'aurait pu soupçonné l'existence.

Cependant, et là était toute la délicatesse de leur situation, ce choix les condamnait à demeurer en mouvement pour rester fixe, sous peine de perdre leur avantage sournois. Mieux, L'Univers étant un modèle de paresse à tous étages, quitter un lieu si confortable énergétiquement risquait de leur coûter un surplus d'énergie. Un sacrifice qu'il leur faudrait bien faire, tôt ou tard. Restait seulement à décider à leur place du tôt ou du tard. Tel était l'instruction qu'il avait, et dont il s’acquittait sans tambour, sans éclat, en secret. Tel était l'adage du Sibyllin.


Pour autant, l'Inquisition n'avait toujours pas donné signe de vie. Les perturbations atmosphériques tardaient à se tasser, et les troupes en surface auraient déjà dû leur revenir. Une succession d'incohérences et de difficultés accumulées. Le Melantha, de surcroît, alors que personne n'aurait dû comprendre qu'un Sith en tenait la barre, était la cible d'une opération isolée. Chirurgicale, même : trop, d'ailleurs. Leur nouvel as bien gardé avait été dévoilé trop tôt. Aucune probabilité n'aurait tenu face à cela.

Pour les esprits circonspects, cela n'a qu'une sorte de signification. Une pièce du puzzle manque. Un élément perturbateur s'est glissé, peut-être même camouflé avec adresse, dans la belle mécanique. Lequel ? Les recherches sont lancées. Tout pointe vers une connivence, mais sa nature exacte reste à déterminer.

A ceci près que tout ce déroulement mental reste en arrière plan, effacé par les nécessités d'une bataille que chaque nouveau kilomètre avalé rend plus imminente à chaque seconde écoulée,


" Seuil de lancement atteint, commandant. Dois-je donner le signal ? "

La voix trainante de son sous-officier tira Dremilcol de ses sombres calculs. Son regard balaya rapidement la carte qui trônait à côté de lui, puis, presque machinalement, vers la forme claire et frappante d'Ossus, devant eux.

" Hm. Eh bien en l'absence de contre-ordre, nous connaissons la suite jusqu'ici. Lancez le Fantôme. "

Le, car ses hangars n'en comptaient qu'un : celui d'une rousse flamboyante qu'il n'aimait qu'à fréquenter que de loin. Il ne la connaissait pas davantage, sinon par son matricule, et n'avait affaire à elle que pour ce genre de missions très précises, et cela, à elle comme à lui, leur allait fort bien. Il se contenta de lui confier ses instructions par données interposées, en suivant l'avancée du décollage. Lorsque le point du Fantôme disparut définitivement de son écran radar, il passa à autre chose, conscient qu'aucun élément séparément ne devait compromettre l'ensemble.

Un ensemble dont il souhaitait présentement joindre la tête.

" Commandant, l’Égide est entrée en communication avec le Payara. "

Inattendu.

" En communication ? "

Dremilcol considère la chose une courte seconde. Avant de laisser courir toute conclusion hâtive : il n'a pas cette carte-là en main, elle n'est donc pas de son ressort. Lui, devra se contenter de scruter scrupuleusement ses variables et l'entièreté de ses lignes de vaisseaux.

" Oh, amiral, vraiment. Je doute que les ordres de Darth Laduim aient inclus de prendre le thé avec le tout républicain... Nous sommes sensés faire un massacre, pas une garden party... "

Il laisse sa fausse plainte mourir dans le silence relatif qui l'entoure. Au fond, que sait-il vraiment d'Antarxarxès ? Malgré leur proximité toutes ces années, il est des mystères qui séparent les espèces les unes des autres. L'homme que le rishii s'évertue à incarner ne demeure au fond qu'une création de l'esprit, et non de matière. Dremilcol consulte de nouveau la carte, dézoome, pour suivre de visu la course globale de tout leur petit monde. Il n'a jamais eu la patience de l'oiseau pour les choses célestes, mais il comprend sa fascination.

" Bien. L'avance est suffisante et la formation adverse toujours en bonne place. Je pense que... "

Un bip discret sortit de la poche de son uniforme. D'un geste preste, l'homme activa son comlink : un sourire narquois se peignit sur ses lèvres, alors qu'il acceptait la communication.

" Commandant Drillian. Vous allez rater la fête. "

La communication sauta à plusieurs reprises, et tant bien que mal, l'hologramme vacillant du Commandant Drillian, plantée à des parsecs de là, jaillissait du petit appareil.

" Au diable votre humour insupportable, Dremilcol ! L'amiral ne répond pas ! Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?! Pourquoi tous ces rapports se contredisent les uns les autres ?! Pourquoi le Conseil Noir n'a-t-il pas lancer une contre-offensive sur la Perlemienne pour défoncer ce foutu corridor et gagner Ossus ?! Je suis sensée continuer de monter la garde ici avec le reste de la flotte, pendant que vous faites tout le travail avec trois coquilles de noix en orbite ?! Où est donc passé la devise de la Ve flotte, nom d'un Kath ?!

-Je sais que vous êtes déçue. Mais voyez le bon côté des choses : vous avez le meilleur point de vue ! Et je serais ravi de notifier à notre cher amiral que l’Égide est une coquille de noix. Il en sera fort flatté !

-Je vais tâché de vous garder en vie la prochaine fois que je vous croise, vraiment... Vous savez tout comme moi que tout ceci est un coup monté ! Tous les mouvements de la flotte républicaine de ses derniers mois le prouvent ! Qu'attendons-nous pour répliquer massivement ?!

-Ils avaient simplement peur qu'Ossus soit une cible, soupira Dremilcol, soulignant ce qui pour lui était l'évidence même, ce qui aujourd'hui fait plutôt sens, non ?

-Qu'essayez-vous de me faire dire, exactement ?! Vous n'allez tout de même pas dédouaner ces raclures d'une énième fourberie diplomatique ?! Nous voulions une démonstration de l'utilité de ces fadaises, eh bien nous en avons une !

-En l'absence d'ordre de nos instances, une initiative de votre part risque de déséquilibrer les points clefs retenus par l'Inquisition et la marine, bon sang, commandant ! Que voulez-vous que nous sacrifions pour ce cailloux qu'est Ossus ? Les coups d'éclats ne suffisent pas à conquérir une galaxie entière, cela se saurait. L'AGPU n'existe plus ! Et toutes nos délégations se débattent pour sortir de ce bourbier avant que le conflit de ne réduise au même statut de plaie béante que Dubrillion ! Je doute que nous nous éternisions ici une fois que Darth Laduim aura eu son quota de morts... Tenir un tel saillant sans contrôler Columex ne nous serait pas profitable. Contentons-nous de faire du dégât et de dégoûter à jamais nos piégeurs de réitérer l'opération. Qu'en pensez-vous ?

-[color=#f45406]J'en pense qu'aucune de nos flottes ne va rester sagement assise à la frontière et regarder la République agir sans rien faire ! Antarxarxès serait le premier à me demander de rameuter nos forces pour nettoyer cette zone, et vous le savez.

-Pas si le Conseil a d'autres desseins. Doutiez-vous que nous puissions bouter la République de ce système sans votre aide, ma chère ? Pensiez-vous que nos équipages - dont vous aviez pourtant fait l'éloge - ne sache pas manoeuvrer face à un ennemi tel que celui-ci ?

-Commandant, lorsque vous êtes attiré dans un piège, vous ne maîtrisez pas les paramètres de votre environnement ! Je me doute bien que vous êtes une lamproie vicieuse, je crois encore bien vous connaître, Dremilcol. Ce n'est pas notre première bataille, loin s'en faut ! Mais à un niveau plus large, ce que nous gagions tous deux depuis le sommet de Radama s'est réalisé : toute la Perlemienne est en tension. Je ne peux pas croire une seule seconde que les renégats n'aient rien à voir là-dedans : Magamoth lui-même aurait voulu être à votre place en cet instant ! Nous avons encore en tête tous ces discours sur la faiblesse et l'inaction ! Alors pourquoi sont-ils encore aussi silencieux, d'après vous ?! Où sont passées leurs jacasseries permanentes sur nos ondes ?! S'ils ne sont pas à l'origine de ce qu'il est advenu ici, croyez-moi, ils ont mis la main à la poche, c'est certain !

-Je suppose que je me dois de m'incliner devant une telle clairvoyance... Mais trêve de bavardages. Ne soyez pas sotte, commandant. Vous engagez dans cette entreprise ne nous fera gagner ni temps, ni soutien. Et risque fort de mettre votre carrière à l'arrêt pour un bout de temps, ce dont nous n'avons ni envie, ni besoin.

-Merci de remettre en doute ma santé mentale, une fois n'est pas coutume. Vous savez bien que je ne peux agir sans l'aval de l'amiral. Pas plus que lui sans l'aval du Castellan.

- Mh. L'ordre a été donné, il est clair. Mais si vous souhaitez y prendre part, il va falloir faire le tour, je le crains !

-Vous êtes insupportable. Les forces républicaines tiennent toujours Columex, en dépit des efforts de nos dernières campagnes. Mais elles ne pourront pas être à trois endroits à la fois si nous attaquons sur plusieurs segments.

-Le temps que vous parveniez à franchir ce gué, Drillian, tout ceci sera terminé.

-Rien ne sera terminé ! Pas tant que l'Empire ne sera pas de nouveau sain et uni, Dremilcol ! J'en fais une affaire personnelle ! Ossus et la République n'étaient que des symptômes : nous devons définitivement prouver à ces rapaces d'un autre âge que non seulement nous n'avons pas faibli, mais que nous avons retenu les leçons de l'Histoire. Nous avons de la rage à revendre, servons-nous en ! "

Derrière son éternel sourire cynique, Amdusias ne put s'empêcher d'apprécier le panache de cette impossible alliée. Un caractère comme le sien : il n'y avait qu'un oiseau pour pouvoir s'en débrouiller...

Mais pour l'heure, les considérations stratégiques de Drillian ne suffisaient plus : c'était à la tactique, cet éternel présent, qu'il devait se dédier. Et pour l'heure, le manège incompréhensible d'Antarxarxès et son interlocuteur républicain ne pouvait que le contrarier. Ce n'était pas dans les habitudes impériales que de s'adonner à d'aussi longues entrevues. Ils avaient une phase à respecter.

Et, à ce sujet, une ombre demeurait au tableau :

" Sibyllin à Melantha. Répondez : où en est la circonscription de l'intrusion ? Nous allons devoir engager de nouveaux plans tactiques, j'ai besoin de connaître votre état actuel de façon précise. Si vous avez besoin de renforts... il serait sans doute temps de nous le notifier."

La fierté d'un Sith valait-elle une frégate ? Ils n'allaient pas tarder à le savoir...











Il avait parlé le premier.

L'autre avait répondu. Il avait longtemps parlé, énoncé beaucoup de choses, comme étant des vérités, alors qu'elles n'étaient que des points de vue.


C'est à son tour, l'autre attend une réponse.

C'est un exercice qu'il connaît. Qu'il maîtrise, dans lequel, aussi, il se reconnaît, comme dans celui du vol et des explorations stellaires. Celui-ci, en revanche, au contraire de l'étude solitaire, nécessite un partenaire. En de telles circonstances, oui, il devra fusionner les deux faces irréconciliables d'une même pièce.


S'il l'a oublié, dans les recoins poussiéreux de sa mémoire, son corps s'en souvient pour lui : Horakk n'a ni l'anatomie ni la physiologie d'un être humain. Son espèce, sauvage et libre, a su construire sa force sur la sociabilité. Il est ici en des lieux connus, étrangement familier. Les siens sont d'incorrigibles philosophes mondains, sous leurs us arriérés. Cela, il ne s'en souviens pas, et peu lui importe. Il ne s'émeut plus depuis longtemps de sa propre ingratitude envers les atouts que la nature lui a livrée, lui qui en a déjà tant troqué pour atteindre son idéal.

La lutte des navires devient soudain celle des mots. Le verbe fuse, docile, comme autant d'échos aux coups de canons. Le décor pouvait alors s'effacer, disparaître, n'être plus qu'un fond d'étoiles distantes, les paroles n'en auraient pas été changées.



" Ainsi, donc. Si prompt à l'aubade et à la diatribe, que je me dois de ne pas prendre ombrage de si peu de politesse ?

En mon propre pays, Commander, s'avancer masqué est une marque de rouerie et de malhonnêteté. Celui qui n'a rien à cacher ne cache rien, et certainement pas sa propre face. Ne point retourner son salut à son hôte est une marque de défiance. Mais je gage que vos coutumes et les miennes ne se valent pas sur ce point.
"

Reprendre avec une patience méthodique les termes d'Ular'Iim n'était pas qu'un simple moyen de lui montrer qu'il avait écouté chacune de ses phrases tricotées. Il y avait là une rhétorique, une psychologie qui

" On m'avait promis un meneur. Voici que l'on m'envoie un prêcheur. "


Miroirs, jeux réfléchissants.


" Votre cause est-elle à ce point perdue que vous dussiez vous en remettre à un obscur supernel pour quérir assistance ? Quel théâtre est-ce là ? Vous jouez un jeu qui ne sied guère à vos prérogatives, Commander. "

Il le pensait avec toute la rudesse de son éducation impériale. Qu'avait-on à mêler dieux, présages, signes, et autres rites à cela ? Horakk avait intérieurement tranché : il ne laisserait pas la forme prendre le pas sur le fond, que l'adversaire eut tenté de le mystifier, ou d'être curieusement sincère. Pour cela, avec un aplomb et une verve qui avaient fait sa signature.

" Mais soit. Nos choix définissent ce que nous sommes, et les vôtres ne regardent que vous. A qui dois-je m’adresser, donc ?

A la figure d’autorité religieuse d'un peuple qui m'est inconnu ? Ou à l’officier que vous êtes ?
"

Pas une seule vague de colère n'agitait ses mots.

La sonorité profonde de sa voix, autant choisie que travaillée, avait pris le chemin qui lui était connu. Celui d'un calme ni froid ni austère, mais bien plus en adéquation avec la teinte flamboyante de son regard aux pupilles circulaires. Chaude d'une insondable conviction, comme enracinée quelque part sous leurs pieds, remontant en rameaux hérissés de pics embrasés tendus vers les cieux. Là où le républicain n'avait fait qu'affirmer et asséner avec une autorité qu'il n'avait guère en dehors de ses propres frontières, Horakk questionnait, et, bien pire, remettait en question.

" Au nom de qui parlez-vous ?

Est-ce ici la grande amirale qui, par votre entremise, nous sommes de faire preuve d’une humilité qu’elle n’a pas elle-même ? La République, en tant qu’entité immatérielle, que ces atours et ses couleurs sur vos épaules entendent symboliser, qui vient encore clamer une innocence qu’elle n’a jamais eue ?

Est-ce le terrible Sénat et ses porte-drapeaux munis de mitres, qui vous envoient nous tancer, comme s’ils pouvaient seulement se le permettre ? Au nom de quoi ? Leurs intérêts ne sont pas plus légitimes que les nôtres.

Ni ici, ni nulle part.

Ni maintenant, ni jamais.
"

Le mot, lourd, pesant, d'une fermeté monolithique, sanctionna la fin de sa phrase comme l'on referme les portes colossales d'un temple. D'un large geste horizontal, Horakk balaya l'air au devant de lui pour matérialiser l'arrêt net qu'il mettait à toute tentative de subjectivité outrageuse.

" Vous n'avez pas plus autorité sur moi que je n'en ai sur vous. Nous sommes libres, qu'importe nos charges, d'obéir ou non, et si nous le faisons, nous avons tous nos raisons propres. Si pour vous la charge de soldat est synonyme de marionnettiste, Commander, alors je plains vos équipages. Celui qui obéit sans comprendre la raison profonde d'une telle abnégation est condamné, soit à la mort psychique, soit à l'opprobre de la trahison. Dans les deux cas, c'est une impasse.

Mon honneur va à mon nom, à sa terre. Mon âme n'est pas de ce monde et sa nature échappe à tout entendement. Il n'est rien ici donc qui ne vous concerne.

Vous parlez d'un Absolu que vous semblez côtoyer avec une facilité que la galaxie devrait vous envier. Alors même que votre statut d'être réel, imparfait, relatif, vous condamne comme nous tous à ne jamais le contempler que de loin, qu'au travers des voiles déformants de la pensée subjective. Ayez l'humilité de voir que vos sermons ne concernent que vos propres pensées, et non celle de la galaxie toute entière.

Après tout ce temps à nous tourner autours ? Contempliez-vous avec gourmandise le moment où vous pourriez nous accuser, sots ingénus, d'un crime tout choisi par vous ? Après tout, sans nul doute estimiez-vous, à raison, que nous ne laisserions pas ce piège éculé se refermer de nouveau sur nous.

Et à présent que nous refusons encore d'endosser ce manteau usé aux emmanchures, vous souhaiteriez que nous présentions quelques excuses pour nous être trop vite emportés ?

Non. Assez de ces jeux infantiles qui ne servent qu'à entretenir un savant statut quo. J'attends bien davantage d'un adversaire tel que vous.

Vous nous dites vouloir parler vrai.

Fort bien. Voici donc l'occasion pour vous de joindre l'acte à la parole.
"

A son tour, il désigna Zerath, mais son index n'avait pas la volatilité dramatique de celle du prélat, mais bien l'autoritaire jugement de celui qui prend au mot.

" Qui a permis aux Jedi, dont il était stipulé qu'ils n'étaient nullement admis ici, de venir semer le trouble au sein de cet évènement ? Alors même que votre flotte avait toute latitude de les stopper ?

Qui a donné l'ordre à vos chasseurs d'abattre ceux des nôtres qui tentaient de quitter l’atmosphère ?
"

Un court silence, où courait encore les implications implicites de ses questions rhétoriques. Et comme s'il n'avait attendu pour donner sa version du sermon, il reprit le terme, précis, employé, sans doute en connaissance de cause, du prélat.

" La vérité, devant vos hommes et devant les miens. Vos dieux vous regardent, Ular'Iim, et voient si vous pouvez tenir devant eux vos propres engagements. Ce que votre iconique République, elle, n'a jamais été en capacité de faire. Allant désormais jusqu'à devoir condamner une ancienne dirigeante qui signât d'une main un traité qu'elle déchirât de l'autre !

Pourquoi réclamer la vérité, si vous êtes si certains de déjà la détenir ? A moins que vous n'en pensiez rien, sous le couvert de vos capes.

Vous plus qu'un autre, devriez le savoir : le faucon a pour lui l’œil intérieur, qui ne se ferme devant aucune illusion, qu’aucun artifice ne saurait voiler. Il perce et il scrute avec l’impassibilité de celui qui va droit au but. Inutile donc d’agiter ce creux outrage qui, s'il dessine fort bien vos paroles, ne hante aucunement vos gestes ou vos regards. Vous ne trompez personne. Inutile de vous encombrer de ce pantomime d'affliction hypocrite. Il est sans effet.

Ossus, les mondes neutres avec elle, la République toujours derrière à la manœuvre, les Jedi enfin, même et surtout lorsqu'ils ne sont pas désirés : tout ce beau monde n'a offert que des mots en échange d'actes tangibles de notre part. Faut-il avoir la mémoire courte.

L'excuse piteuse de défier notre honneur de combattant pour nous a déjà fonctionné. mais une ruse de diplomate a le désavantage de faire perdre toute crédibilité à son utilisateur lorsqu'elle est réitérée.

Les apparences sont trompeuses, dit-on, mais l'apparence d'un attentat envers l'Inquisition Sith et nos propres forces n'a pour nous pas d'autre signification q'une déclaration de guerre.
"

Comme autrefois, sur ce même pont, où sa voix de meneur d'hommes avait si longuement résonné, il vibrait à l'unisson avec ses mots, les portant autant que lui ne les portait. Les années avaient passé, son talent pour l'expression avait grandi avec lui.

" Ici, maintenant, prélat ou commander, ou quelque soit le titre que l'on vous octroie - à la lueur de tout ceci, répondez à votre tour : la République, qui clame vouloir la paix à corps et à cris. N'a-t-elle jamais espéré rien d'autre que la guerre ?

N'a-t-elle, jamais, au fond, menti ouvertement, pour mieux se prévaloir d'une victoire facile sur un adversaire endormi ?
"

Ainsi parlait Antarxarxès. Et rien, n'aurait pu faire seulement dévier le fil si étroit et acéré de ce regard hypnotique de concentricité, où se confondaient l'ardente foi du fanatique acquis à une cause, et la volonté adamante d'un cœur roué aux terreurs de l'esprit.




Un jour, jadis, les portes de la mort s’étaient ouvertes pour lui. Allongé sur le siège du petit chasseur éventré, face au vide, il les avait contemplés avec le calme absolu que confère la fatalité. Le froid, le manque d’oxygène avaient rendu son corps si léger et si sec qu’il ne l’avait plus senti. Pendant l'instant qui séparait le jamais du toujours, il s'était senti réduit à sa plus simple expression. Une sensation d'abord douloureuse, infiniment, puis...


Face à l’Autre Côté, il avait trouvé sa réponse.
Sur le seuil,


Il s'était répondu.

Et il en était revenu, pour le clamer haut et fort.











Un souvenir, un encore, lui revint à l'occasion de cette ultime sentence.


Sur le bas de la page, la phrase qu'il avait pieusement découpée dans le livre antique, gardée désormais bien en vue sur la face intacte de l'immense miroir de la chambre.



On ne vit jamais qu'au présent.




[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]





HRP - Récapitulatif des manœuvres :
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
Messages : 302
Eclats Kyber : 0
Marbo a fort à faire. Droit sur son pont, il distribue une à une les directives. On continue les opérations, conformément aux ordres de l’Ular’Iim. Le sol doit être sécurisé, il faut coordonner une à une les escadrilles. En orbite basse, on livre une féroce chasse, à l’impérial comme au navire non identifié. L’approche du ciel, pour des troupes en espace aérien non familier, offrent un avantage tactique, mais ce n’est pas tout. Car dans la formation déployée par l’Ular’Iim, on a désormais mis en oeuvre une seconde phase. Il l’a suggérée depuis plusieurs semaines, et la grande amirale souhaitait la mettre à l’ouvrage. C’est une tactique simple, d’aucun la jugerait basique, mais qui n’est pas systématique et s’avère redoutable. Les frégates de soutien ont plusieurs rôles et parmi eux, celui d’émettre sur les fréquences, en relais de secours si les bâtiments principaux souffraient de quelque dysfonctionnement ou assaut.

L’intérêt de la formation employée par Zerath n’est pas si évident. Elle s’appuie sur le paramètre de distance. Les turbolasers sont effectifs à des distances où aucun oeil galactique ne peut voir. Il n’est guère que le capteur artificiel pour déceler dans la noirceur glacé spatiale les corps lointains. Ces capteurs, ainsi, peuvent être trompés: comme le regard ne voit pas au-delà d’un obstacle opaque, les capteurs n’ont aucune puissance pour ce qui est caché. Les navires, superposés l’un derrière l’autre, provoquent une anomalie sur la taille de la flotte. On doute de la force déployée; les ordinateurs et leurs historiques ont-ils fait de mauvaises estimations? Pire, comment ajuster son déploiement lorsqu’on ignore où se cache quel bâtiment?

L’espace stellaire, c’est ainsi, n’a pas de cachettes. Cependant il suffit de se fournir soi même un obstacle, la moindre coque de métal jetée dans le vide et on peut là où existait la certitude faire germer le doute. Mais est-ce suffisant pour générer une furtivité? Non. Cela est loin de suffire, au contraire. Une flotte entière et ses capteurs, après la course technologique des dernières guerres, aurait tôt fait d’envoyer des éclaireurs. Leurs capteurs avaleraient la distance et lèveraient les doutes.

Deux possibilités existent alors. La première est de se fondre, à travers les capteurs. Pour cela, on peut investir dans des blindages complexes qui dévient les ondes et les radars. Il n’existe aucun profil qui puisse couvrir toutes les plages simultanément cependant. La puissance de tels fuselages est à la surprise, sur des installations où l’alerte n’a pas encore été sonnée. Une telle option est prohibée contre l’Empire, si ce n’est pour mobiliser des troupes pas encore déployées. Cela concerne quelques chasseurs et si l’option est terriblement tentante pour des bombardiers, ce serait sous-estimer la vigilance d’un ennemi, alors que les combats se sont un moment apaisés dans la haute orbite, loin au-dessus des nuages, là où le ciel est noir.

La seconde option, c’est au constat de départ: on ne peut s’appuyer sur ses yeux à de telles distances. Il faut s’en remettre aux instruments; ceux-ci peuvent être défaits, si on les perturbe de la manière appropriée. Mais il faut pour cela avoir connaissance de la technologie adverse, il faut savoir ce qui est mobilisé. La technologie aurait-elle pu sensément évoluer de façon marquée?

Là repose un point clé: depuis les luttes autour d’Arda, où Zerath et ses hommes ont cannibalisé les carcasses déchiquetées des vaisseaux vaincus, un élément crucial s’est déroulé en terre ennemie. La guerre intestine du peuple contre lui même, l’apparition inopinée de Ramken. Un avantage stratégique non négligeable pour la République car l’Empire s’est ainsi d’une cause unique et d’une trajectoire rectiligne trouvé à non plus regarder avec appétit au dehors mais avec hantise au-dedans. Les industries qui manufacturent inlassablement leurs grands armements, quelques mois s’en est trouvée en eaux troublées, à ne savoir qui servir d’un régime légitime ou de son nouveau prétendant.

Est-ce un essoufflement? Est-il si manifeste qu’il puisse aujourd’hui faire la différence? Cela, aucun homme sensé ne saurait le prédire avec discernement. Cependant on peut jauger que les connaissances acquises sur les technologies récupérées, fort de l’évolution industrielle ralentie, ne sont pas encore tombées en obsolescence.

Ces hypothèses, soumises à leur arrivée en orbite, ont été complétées par un rapport détaillé. Le Commander, derrière ses atours primitifs, saisit on ne peut mieux l’importance des armes. Peut-être est-ce au contraire parce qu’il a vécu la transition de l’épée au blaster qu’il sent instinctivement le besoin de toujours conserver sinon une avance une égalité technologique? Il a du moins fourni à l’amirale - étrange cadeau - ce qu’on avait pu apprendre des navires récupérés; du monstrueux Harrower démantelé après la prise d’Arda-2 comme de chacun des chasseurs à son bord.

On a appris ainsi comme fonctionnent leurs senseurs. À la façon du chirurgien qui le premier ouvre l’oeil et découvre derrière la cornée les cônes et les bâtonnets, on a percé à jour les méthodes dont opèrent les détections. Ainsi l’on sait ce qu’il faut pour les perturber, les noyer dans les flots de données qui les empêchent purement et simplement de fonctionner. Désormais, ainsi qu’on sait comment voir dans l’espace, on sait prodiguer la cécité.

Et tout ça, grâce aux informations que le monstre d’acier a récupérées dans une bataille passée.

Effrayant, songe Marbo. Ce prélat de la Lune est un être effrayant. Chaque affrontement, il semble être toujours plus attentif au monde qui l’entoure, comme doté d’un appétit sans fin: les ennemis sont une nourriture intellectuelle qu’il dévore avec avidité, suce jusqu’aux os pour toujours mieux évoluer. Mais il faut le reconnaître, ses méthodes pourraient bien payer.

- Aile Levante, concentrez toutes vos ressources sur la phase 2: conformation LSX, rayon cent dix kilomètres. Rayonnant IV, conformation Ligma.

La deuxième phase du plan de l’Ular’Iim est ainsi faite: une fois la plupart de la flotte dissimulée aux capteurs adverses, il existe pour l'ennemi deux options. La première c’est de s’engager aveuglément dans une force qui vient de diminuer - un mouvement courageux mais potentiellement suicidaire. La seconde, c’est de lever le doute, de trouver les navires manquants. Cela ne peut se faire qu’en faisant avancer certaines pièces; des éclaireurs, donc.

Mais les éclaireurs ne seront pas des vaisseaux capitaux: ce serait les exposer à un risque inconsidéré. L’on enverra plutôt des escadrilles - et à une distance respectable. Cependant les chasseurs n’ont pas les puissants détecteurs de leurs monstrueux confrères stellaires les croiseurs. Ainsi, bien que plus agiles ils devront s’approcher plus près. Or, l’on sait la portée de ces détecteurs. Qu’adviendrait-il si ces derniers venaient à ne pas fonctionner? C’est là toute l’idée de Zerath: brouiller les capteurs environnants impériaux - après tout, on connaît leur fonctionnement! afin que toute reconnaissance s’en trouve caduque. Une escadrille ainsi devra s’approcher, car si l’électronique ne fonctionne plus il ne reste guère que le contrôle à l’œil nu; s’approcher donc, quitter le couvert de sa flotte, avancer dans le vide, se porter dans l’ombre des troupes adverses et espérer d’un regard - ingénu - apercevoir les navires manquants - et surtout survivre.

Cependant c'est insuffisant. Si l'Aile Levante dédie toutes ses ressources à cette tâche extrêmement délicate, une deuxième vague de guerre de l'information est mobilisée par le second navire de soutien; c'est un brouillage des communications. Ainsi, les navires qui seraient trop proches n'auront pas loisir de transmettre la moindre information. Ils perdront un temps précieux - réduisant d'autant leurs chances d'échapper aux regards inquisiteurs des mastodontes républicains suspendus dans la noirceur entre les cieux.

Et si les croiseurs adverses viennent se mêler tôt ou tard à la fête? Eh bien, il faudra que les autres grands navires de la flotte viennent suppléer les deux frégates de soutien. Mais cette éventualité n'est pas encore présente.

- Sergente Amill, EDB.

Une voix grésillante répond. En altitude basse, plusieurs milliers de kilomètres plus bas, la sergente et son escadrille sèment la mort parmi les transports impériaux. Sous son masque à oxygène, nécessaire pour opérer dans le ciel, loin sous les nuages, la sergente répond et sa voix presque instantanément parvient à Marbo; nasillarde à cause du masque, corrompue par foule de parasites.

- 20. Hostiles en rupture. Maintien 70 portée 3 kilomètres à ange 10. Amill terminé.

Marbo caresse son menton. EDB signifie estimation de dégâts de bataille. En d’autres termes, sur une échelle allant de zéro à cent, combien d’ennemis ont été détruits. S’agissant de troupes au sol prises au dépourvu, vingt sur cent est un nombre relativement faible. La rupture désigne le fait que les ennemis fuient le champ d’affrontement. Leur trajectoire, fixée en relation au palais à présent détruit est à un angle de soixante dix degrés - le zéro étant le nord, et les angles pris dans le sens horaire. Trois kilomètres indique la distance au palais vu depuis le ciel. Ange 10 signifie à 10 000 mètres d’altitude. Les transports initiaux ont probablement été détruits par la descente républicaine et maintenant ils fuient.

- Amill, entamez poursuite hostiles, buster. PT-7 interception pitbull.

- Roger. Amill terminé.

Il y a deux ordres ici; le premier est de voler à vitesse maximale constante après les ennemis. Le second est adressé aux redoutables chasseurs PT-7 de la chasse républicaine: lorsqu’ils intercepteront les hostiles, ils devront utiliser leurs missiles protoniques pour les mettre hors d’état de nuire. Ces manœuvres ont été longuement répétées et travaillées. Les simulations ont été effectuées avec la grande amirale mais aussi le grand cyborg. Marbo ne prend aucune initiative; il applique simplement ce que ses supérieurs ont estimé nécessaire dans leur discernement.

Il tourne son regard vers les hologrammes du grand squelette en armure, drapé de ses soies si curieuses, face au torse - presque humain - de cet aigle qui se dresse avec désinvolture. La discussion s’engage très mal.




***





Le supposé traître, penché sur son sceptre comme un monstrueux oiseau de proie, détaille et écoute, attentif. Ses expressions faciales tenues en laisse sous son masque mortuaire, il n’offre que son regard - prédateur - comme fenêtre vers son esprit. L'adversaire se défend admirablement; loin de se décontenancer il répond ardemment, d'un calme serein délie ses arguments - si bien s'enchaîne sa pensée qu'on la penserait presque longuement travaillée. Quelle tristesse que le Kaleesh ne l'ait pas sous ses yeux véritables plutôt que ces hologrammes détestables; il pourrait percer à travers ses chairs, déceler ce qui est faux et ce que l'autre choisit de taire. Il écoute le profane, reniant les dieux; il écoute l'impie qui se damne auprès des cieux, remet en cause - c'est assez usuel - la légitimité du prêtre à parler au nom de l'immortel.
Combien de fois a-t-il mené cet exercice? Combien de jeunes kaleesh comme d'anciens aigris ont questionné la raison pour laquelle lui portait la broche et l'habit sacré, de quel droit il se permettait des signes énoncer? Ce n'est qu'une question d'éducation; une ignorance profonde, qu'on corrige volontiers auprès d'un enfant égaré. Cela fait longtemps que l'Ular'Iim ne prend plus ombrage de telles questions. Il est dans la nature du curieux de tout interroger. "Pourquoi les dieux? Comment les dieux? Pourquoi vois-tu et moi non?", ces questions sont ancrées dans le monde depuis qu'existe la pensée. Il est passé à travers pires insultes. Ne porte-t-il pas en armure, signe de gratitude, le chef d'oeuvre né d'un culte d'artisans ? Là réside tout le paradoxe de son esprit; tolérant sur l'ignorance des autres, mais inflexible en ses propres croyances. Et bien fragile la foi qui s'ébranle sitôt qu'elle est discutée: n'est-ce pas la nature du démon de renier lorsqu'il les voit les anges, de décrier les prophètes, de semer le doute parmi les croyants?

Cet Horakk, cet oiseau de malheur, cet impérial profanateur n'est qu'un test de plus; de sa foi, de ses convictions, de ce qui fixe à travers le temps, à travers l'espace, à travers tous les mondes le grand cyborg ici en ce pont. Il songe un moment; continue à écouter, tente peu à peu de discerner la vérité qui s'esquisse un instant, replonge sous la surface d'accusations. Autour, les autres officiers bouillonnent; tous les dires de l'amiral confirment le vice qui ronge l'ennemi.
Quelle audace, de venir attaquer, d'oser jeter sur la République la culpabilité de leurs propres méfaits! Les deux titans sont huile et eau immiscibles. Leurs méthodes, leurs idéologies, leurs attitudes le rendent à présent évident: la paix est impossible. On tourne les yeux sur le grand prêtre, qui demeure dans l'immobilité parfaite que lui octroie son corps d'acier. Sur lui, nul tremblement de main, nul geste de la tête trahissant son agacement - statue décorée, pavillon républicain, grand roc sur lesquelles les plus grandes vagues viennent s'écraser sans jamais l'ébranler.

Zerath, attentif, prête l’oreille, pleinement concentré à une tâche qu’il n’a pas l’habitude de mener autrement que par son regard. Il doit œuvrer sans s’appuyer sur le corps et ses indices, un exercice cruel, terriblement difficile. Mais ses armes sont multiples. Et ce qu’il ne peut savoir par le corps, il le saura par l’histoire.


Beaucoup est à apprendre du passé. Le grand général est à observer ses prédécesseurs pour savoir comment l’emporter; mais il ne doit pas négliger non plus ses ennemis pour savoir ce qui doit être fait. Que dit le passé de cette créature, exhumé de l’oubli galactique? Que disent ses bottes de cuir? Zerath a les informations, mais il appartient à lui seul d’en tirer les conclusions. Quelle attitude, à la lumière de ce que l’on sait de la vie de cet homme? Il s’est mutilé, cela est manifeste; il a rongé son être, s’est conformé au moule que l’Empire lui avait imposé, a courbé la tête, rentré les épaules, s’est laissé absorber jusqu’à perdre ce qui le caractérisait.

Mais ce n’est pas tout ce que les services républicains ont pu exhumer. Ce Rishii - tel est le nom de son espèce - a été adopté dans une maison noble de Serenno, la famille de l’amiral Adonay Antarxarxès - aujourd’hui retraité. Sa fidélité stellaire à la marine impériale étend son service de Darth Ynnitach à la nouvelle impératrice. Sa carrière est constellée de quelques points clés; la mort de son mentor, et une bataille tragique dont il a miraculeusement réchappé. Mais on ne sert pas tels maîtres si longtemps sans conviction. Le vieux reptile le gage; son passé dénote d’une fidélité sans faille à son ordre. Sa première mort fut contre des pirates, aussi n’est-ce pas une haine de la République qui l’anime. Il est probable qu’il serve simplement en bon outil les ordres de celui qui dirige. Une obéissance parfaite et aveugle au régime, mais pour quelle raison?

Alors que s’achève le soliloque de l’oiseau aux plumes perlées, le grand prêtre n’est pas entièrement satisfait. Il a échoué à obtenir l’information qu’il voulait. Il est manifeste que cette...Créature face à lui est ou bien fort habile des mots ou bien dans une détresse psychologique particulière. Reniant avec violence ce que réclame Zerath, se lançant dans des assauts répétés et multiples, il s’agit certainement d’un phénomène psychologique singulier.

Un phénomène, pourtant, qu’il a déjà observé, tant en mercenaire qu’en meneur, tant en soldat qu’en général. Les humains ne sont pas des êtres rationnels; ils sont tout l’inverse. Vains, impulsifs, tumultueux - ils ont une part de kaleesh en eux. Mais ils la renient admirablement. Tous leurs instincts sauvages, ils les tempèrent, mais lorsqu’ils y cèdent ils lancent alors un exercice curieux. Comme se refusant à l’admettre, ils trouvent des raisons qu’ils n’avaient pas caressées jusque lors, comme si leur esprit se sentait le besoin pour maintenir leur identité de se trouver justification, après avoir agi et non avant. Un avocat curieux que cet esprit rationalisant plutôt que rationalisé; à partir d’un faisceau de preuves qu’on est seul à inspecter l’on peut absolument tout justifier. Et c’est là le plus intéressant: on se justifie à soi-même comment l’on a pas failli à l’image qu’on tient de soi même.

Et ce vautour tombe dans cet écueil, mot après mot, phrase après phrase. Il parle, oui, mais ce n’est que pour défendre une vision qui est tout sauf vérité. Ses valeurs intrinsèques sont contrariées. Il a le choix entre les renier ou les accepter. C’est ce qui est nommé dissonance cognitive par les psychologues; l’impérial a eu le choix entre accepter la vérité proposée par Zerath ou plonger dans sa vision en rejetant la première totalement.

Cependant il est un soucis. L’Ular’Iim n’a toujours pas obtenu ce qu’il désirait. Tant que cette information ne vient pas, il ne peut se lancer pleinement au combat. Tant que subsistera ce voile d’incertitude sur l’allégeance de l’amiral, il ne sera pas raisonnable de disloquer sa flotte et lancer son corps aux étoiles. La voix grondante du monstre de métal s’élève:

- Pitoyable. Je vous saluerai lorsque vous serez digne.
Pensiez-vous que je sois quelque diplomate timide venu lécher vos bottes en espoir de clémence? Vous osez lever vos armes contre moi et réclamer ensuite de quel droit je donne la mort à vos soldats? Oui, vos chasseurs tombent sur mes ordres en contrebas - s’agit-il donc d’une surprise? Ils sont tombés en honneur et les vôtres pourront célébrer leurs corps sanctifiés. Vous parlez fort bien, pourtant vos mots sont vides; aussi creux que cet uniforme que vous arborez avec la substance d’un humain qui ne vous convient pas. Vous avez été adopté par une famille aimante je gage, mais ne vous leurrez pas à vous penser des leurs. Renié ce que vous étiez, dégradé ce que la nature vous avait offert pour vous conformer à ce petit moule étriqué; approprié que vous discutiez la nature du réel, de votre cage à oiseau claustrophobe et cadenassée. Un faucon qui s’est coupé les ailes, un Icare qui aurait pu se brûler au Soleil mais a choisi à la place de ramper dans la boue parmi les mortels.

Votre œil voit-il loin, je m’interroge, à vous qui semblez pouvoir ne percevoir un être que d’une facette ou d’une autre sans en apprécier la complémentarité. Prêtre ou officier, est-il besoin de séparer? Ne vouez-vous pas culte suffisant à vos maîtres pour qu’on puisse vous qualifier des deux et sans se tromper?

Votre œil voit-il bien, je m’interroge. Il semble plus probable qu’il voit ce que vous avez appris à regarder depuis un monde qui n’a jamais consenti qu’à vous apprendre à marcher quand votre destin était dans les canopées. Vous portez les plumes de l’aigle, mais votre regard s’est limité dans cette matrice illusoire où vous avez tenté de vous adapter. Un oeil d'aigle, mais un cerveau humain. Demandez à vos savants, combien vaut un microscope placé dans les mains d'un qui ne sait rien.

Jedi, oui, et qu’en est-il? L’un des miens a choisi de les laisser passer, et j’en accepte pleinement la responsabilité; qu’en est-il donc dites moi, qui ait à voir avec les turbolasers et chasseurs que vous lâchiez tout à l’heure contre moi? Je ne vois aucun sabre allumé à mon bord pas plus qu’au vôtre. Faut-il donc toujours que votre genre invoque ce nom, comme une malédiction et sublime justification à vos actes?

Est-ce donc cela la réponse qu’il vous faut toujours invoquer à qui veut bien l’entendre? Épargnez moi ces sophismes regrettables; ces fragments de Force n’ont jamais fait usage d’explosifs et vous ne faites que pointer tour à tour de faux responsables. Vous n’avez pas la mémoire courte, mais assurément l’esprit sénile pour de telles billevesées. Penseriez-vous sincèrement que si j’avais à dessein de réduire votre flotte à néant, j’aurais attendu patiemment après un attentat fort peu discret que vous veniez me frapper pour ensuite répliquer?

Non, il faudrait être bien sot pour cela. La confusion initiale des bombes aurait amplement été suffisante pour vous prendre au dépourvu; pourtant voyez qui a porté l’assaut de nous deux?

Jedi dites-vous, mais je ne suis guère Ossus; il n’appartient qu’au monde qui garde ses propres frontières d’accorder ou refuser le passage à des invités indésirables. Ou devrais-je me substituer à toutes les autorités de l’univers, venir chez mon voisin imposer mes propres idées et règles comme vos maîtres semblent si bien le faire? Nous avons observé de nous placer en cette orbite si les vôtres se sentaient l’envie non pas de faire parler les diplomates mais chanter les canons; et quelle singulière symphonie vous nous avez livré. Il semble qu’en ce point nous ne nous soyons pas trompé.


Je suis prélat de la Lune autant que je suis Commander, amiral. Je ne suis pas marionnettiste, et ma voix n’est pas celle de la République entière.
Mes hommes ont leur esprit et leur âme. Il n’est nul ordre qu’ils ne puissent désobéir si celui-ci contrevient à leurs aspirations - car je suis commandant mais j’ai le devoir d’observer mon honneur autant que celui de mes hommes. L’on n’ordonne pas à autrui ce que l’on n’est pas disposé à faire; et l’on ne commande pas à d’autres ce qui contrevient à nos valeurs. Qu’en est-il des vôtres, qui se lancent - chiens enragés - à l’affrontement décérébré, trahissent une trêve pourtant si bien observée pour que vous veniez ensuite m’interroger - quelle audace ! - de la raison pour laquelle je les abats?

Espériez vous peut-être que je leur accorde un pardon compassé? Que, mieux encore, je me laisse docilement poignarder? Si telle est l’image que vous attendiez des nôtres, vous avez combattu de bien piètres officiers. Il n’est nul compte que je n’ai à vous rendre; si vous n’êtes pas disposé à sauver votre âme des pratiques que les vôtres ont rendues détestables, à votre guise.

La République veut-elle la guerre? Vous parlez là de milliers de systèmes. S’il est un sot sur cette terre pour prétendre connaître les pensées d’une galaxie entière, celui là alors doit vivre un bien terrible calvaire. Je ne sais guère ce que désirent les mondes, amiral. Les mondes, eux-mêmes le savent-ils seulement? Le cœur crée une impulsion, que l’esprit justifie ensuite d’une raison. Est-elle alors valide, ou simple illusion d’une autre vérité plus naïve?

Ceux qui mènent la République désirent-ils la guerre? Il est certain du reste que votre expansion agressive et sanguinaire n’a rien pour plaire. Certainement, les Hutts auront gardé un souvenir amer de vos conquêtes récentes sur leurs terres. Peut-être encore votre haute sorcière, qui a perdu la tête de la main trop pressée de votre maître.

C’est curieux n’est-ce pas? Sitôt faut-il que nous cessions d’être activement à la lutte, que vous vous sentiez - comme désœuvrés - le besoin de vous créer vos propres ennemis et vous lancer à des guerres intestines. Ne pensez vous pas que, si nous le souhaitions, nous aurions pris cet élan pour vous écraser, exsangues, sur la botte de notre talon?

Sans doute est-ce là la preuve qu’il vous faut, amiral; que la République fantasme la guerre ou qu’elle désire la paix, qu’elle soit timide pour ne pas assumer son aspiration ou honnête mais faillible, fait est que vos mondes ne sont assiégés que par vos hommes, et que les morts récents se sont causés par ceux qui arboraient le même uniforme.

C’est chose navrante; car s’ils ne s’étaient pas livrés à des massacres inconsidérés, les vôtres n’auraient fait que des escarmouches sommes toutes sacrées. À la place, ce ne sont que des collections de meurtres, d’infanticides, d'actions parjures, de morts acides.

Vous souhaitiez la vérité, ainsi la voici, simple et nue. Du destin de vos hommes, de la présence des Jedi, autant que des aspirations de paix de ceux qui forgent le blason sur mes épaules.


Zerath s’arrête une seconde, songeur. Sa voix s’est déliée, phrase après phrase, dans une mélopée continue d’où ne transparaissait aucune émotion, seulement d’accidentelles inflexions de son lointain accent étranger. Il est une chose, pourtant qui n’est pas logique. Darth Ramken est fanfaron. Il aurait été dans ses façons, après cet attentat, de se moquer de l’impuissance de ses adversaires, qui bien que tous présents n’ont rien pu faire pour sauver leurs plus grands meneurs. Il est donc fort probable que cet amiral ne soit pas des siens. Il faut pourtant en être pleinement assuré.

- D’une vérité absolue il n’est qu’une qui importe, puisque vous ne souhaitez pas le salut: Ramken est-il celui qui a guidé votre méfait plus bas, puisqu’il ne s’agit ni des Jedi ni de moi?

Ne faites pas d’erreur, amiral. Je n’entends guère de paix. Vous avez attaqué les miens, et pour cela vous serez dûment châtié.

Vous avez réchappé de l’Hécatombe, mais sur cette orbite poursuivez votre assaut et, par Shrupak, je vous ferai quitter ce monde.





Résumé des manœuvres:
Horakk Antarxarxès
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" S’il suffisait d’être bien renseigné pour réussir sa vie, mais bordel corniaud, ça se saurait ! "

Sergent Mii’Shel, coordinateur maintenance, cinquième flotte d’assaut Sith – an 21.576





L'ère post-Ynnitach qui s'ouvrait à présent, n'affichait guère d'aussi glorieuses perspectives au regard extérieur. Le lent travail d'unification qui avait duré plusieurs décennies avait cédé, tant sous les coups des meneurs machiavéliques se disputant le pouvoir, que sous l'effet de contraste d'un immobilisme auquel jamais telle nation n'était vouée.



Pourtant.



L'Empire Sith qui s'ébrouait dans ses propres cendres suite à la trahison d'Ysanne Ha'Mi avait une allure étrange, bigarrée, presque discordante. C'était une mutation. Une métamorphose lente, douloureuse et en bien des aspects monstrueuse. Mais qui pouvait prédire quel organisme allait émerger de cette mue-là ? Qui aurait voulu l'achever aurait dû compter que la créature, même dans sa chitine craquelée, comptait encore bien trop de crocs et de venin pour être inoffensive. A la manière d'une , peut-être, certaines ombres attendaient-elles que la proie se soit suffisamment enhardie pour lancer ses dards tels des harpons.

Jusqu'au sein de l'Empire lui-même, on était allé en conjectures si loin et si fort que plusieurs tomes de dissertation collective sur le sujet n'aurait suffi à en résumer toutes les idées. Seuls les prophètes du Côté Obscur ou quelques uns des prêtres les plus avancés se seraient risqué à affirmer quoi que ce soit en la matière. Trop de choses évoluaient en même temps, parfois en sens inverse, refluaient, pour revenir le lendemain. Les mouvements des forces déchirées avaient été erratiques, sans cohérence, parant au plus pressé, collectionnant les initiatives personnelles ou tactiques le temps qu'un nouvel équilibre finisse par apparaître. Car tout en revenait invariablement à cela...

Dans la nuée, une foule de choses aussi fausses que vraies avaient subitement noyé un espace autrement muré dans un mutisme qui lui tenait lieu de profession de foi. La guerre civile laisserait longtemps des traces, mais... lesquelles ? Ils y avaient perdu une part importante de leurs ressources et de leur superbe. Ils y avaient gagné la vigilance et la prestesse accrue de ceux forcés de faire beaucoup avec peu.

Les mois qui avaient couru depuis l'entrée tonitruante du Renégat de Ziost avaient vu la Ve flotte et ses équipages aller au devant d'un danger qui leur était jusque-là inconnu : leur propre armée.


Le vieux poster défraîchi sur le mur du poste de maintenance, au fin fond de la coursive n°478-F74, surplombait avec orgueil la console informatique, flanquée d'un établi étroit et encombré. " Ynnitach, ton nom est ma gloire ! " y clamait-on à grand renfort d'effets graphiques désuets sur fond de portrait stylisé de l'ancienne impératrice au teint écarlate.

" Pourquoi on fait chauffer si on tire pas ? " grondait la voix impérieuse de la faleen, avachie sous le regard terrible d'une anzat en papier froissé. Elle bataillait seule contre la carte électronique récalcitrante d'un séquenceur, sous le regard blasé de sa collègue.

Cleric, rousse comme un feu de forêt, la dévisageait avec une moue patinée d'ennui. Elles étaient de repos pour les quinze prochaines minutes... Une éternité, en de pareils moments. Sauf que, sans que la raison ne leur fusse révélée, la rude bataille qui avait débuté... n'avait pas débuté. Ou peut-être que si. Ou peut-être que non. Ou bien alors...

" On va tirer, andouille.

- Oui, mais pourquoi on chauffe maintenant ?

-Eh bah parce qu'on va tirer !

-Mais non, on tire pas.

-J'te dis que si !

-Et moi j'te dis que non.

-Et pourquoi on chauffe, alors ?

-C'est ton cul qui va chauffer, dans moins d'une minute. "

La discussion aurait pu s'éterniser. Aurait pu, si l'imposante silhouette du sergent n'avait brusquement fait irruption dans le carré métallique qui tenait lieu de poste de pause. En sursaut, les deux mécanos manquèrent d'emporter le bric-à-brac déposé sous leurs coudes.

" Ramenez vos fesses plutôt que vos grandes gueules, soldats ! Ou par les calebards de Behkaar, vous allez entendre parler du pays ! Toutes les deux, avec moi sur la nacelle des réacteurs 1 et 2 ! Exécution ! "

Montées sur ressort, les deux techniciennes exécutèrent un salut réflexe, avant d'échanger un regard stupéfait. Aucun haut-parleur n'avait rien soufflé, aucun officier n'avait ordonné au travers d'aucun comlink. Seul l'infernal sergent et ses neuf doigts s'étaient finalement ramené dans les moindres recoins des couloirs de l'artillerie pour mettre tout le monde sur le pied de guerre. La célérité du petit homme avait de quoi surprendre même le plus imposant des zabrak.

" Alors, on tire ?! demanda Gharissa,

-Non, lui répondit avec fermeté la voix de tonnerre de Mii'Shel, dont les doigts habiles avaient déjà agrippé ses clefs magnétiques, on bouge ! "

Un silence interdit le suivit.

" Euh... mais c'était pas ce qu'on faisait déjà ? "




En cadence, le pas des impériaux martelait le sol métallique de l’Égide, alors que les rangs des artilleurs s'écoulaient en bon ordre dans toutes les veines de l'immense croiseur encore silencieux, voguant comme une antique trière sur les vagues invisibles qui le portaient vers Ossus, vers les rangs encore seulement suggérés des lignes adverses.

En écho au travers de l'espace, la même mélodie s'était répétée en décalage de phase. Comme le prélude à une ode autrement plus rythmée. Un meumeument discret et profond, une lame de fond qui roulait avec lenteur et intensité, entêtante.

" Soyez comme toujours, mon brave sergent : le gardien du Foyer, le Veilleur. C'est un titre que je vous vois porter avec raison ! Que jamais notre feu ne s'éteigne. Toujours prêt, même, et surtout au creux de notre sommeil. On ne sait jamais trop quand surviendra le réveil. "

Mii'Shel avait encore en tête les quelques mots d'Antarxarxès, la veille, au conclure de leur quotidien tour de vérification. Des routines qu'ils avaient mise en place à l'époque où le rishii avait inauguré leur actuel habitacle, et qui dès lors n'avaient cessé d'évoluer, au gré de leur quotidien tantôt tranquille, tantôt chaotique. Un rite authentique, entre un gradé et l'un de ses plus habiles techniciens. Au sortir de chacune de leur nouvelle ronde, unis dans une même volonté de se surpasser et de ne pas tomber dans la lassitude du commun, le sergent et l'amiral convenait de listes de points d'amélioration, de nouvelles tentatives, de changements de protocoles, et toutes choses qui faisaient que nombre d'officiers préféraient de loin déléguer tout cela loin de leurs postes de commandement. Comme Decker avant lui, Horakk avait appris tôt de l'importance de veiller à la face cachée des navires. Car à quoi servait-il d'avoir moult fabuleuses idées, si pour la moindre manœuvre périlleuse, vos réacteurs secondaires fuyaient, vos moments gyroscopiques perdaient la tête, et que vos calculateurs de gravité artificielle ne suivaient plus la cadence ? A la manière d'un athlète qui ne sait dompter que la théorie et non son propre corps, la parole ne savait jamais supplanter l'action au terme d'une course réelle. Et l'une des clefs du trousseau d'Antarxarxès en la matière se résumait au petit quintal et à la voix terrible d'un sergent aux mains noires.

Un homme de son acabit avait à son actif un nombre incalculable d'heures de vol spatial, et au moins autant de réparations diverses, de prognostiques, bricolage, essais, améliorations diverses. L'image d’Épinal du roboticien émérite ayant fait ses premières armes sur des carcasses de droïdes vendus par des jawa... A qui, non pas dénué d'intentions, l'armée impériale avait donné bien d'autres systèmes autrement plus complexes à administrer. D e quoi réjouir un cœur animé par la passion.

Même avec un doigt en moins, les mains du petit kaasi restaient d'une dextérité qui avaient toujours fasciné Horakk. Le vernis théorique et pratique que l'amiral avait acquis sur les arcanes impénétrables de cette fantastique machinerie, lui venait en grande partie de ses interminables rondes en compagnie de la franche bonhommie de l'humain. Antarxarxès savait ce qu'il lui devait, à lui comme à eux tous, les milliers de mains agiles qui actionnaient les grandes orgues du monstre de métal. A eux, il avait dédié nombre de leurs victoires, grandes comme modestes. Les escadrons invisibles, dont les armes favorites étaient les clefs supradynamométriques et les plénipotentiomètres. Il était d'une rigidité et d'une exigence toute impériale. Mais pas ingrat pour tous les crédits de la galaxie.

La 47-47, Mii'Shel l'avait pratiquée - et pas nécessairement comme il fallait. Elle et pléthore d'autres. Depuis ses postes multiples et changeants, plus que tous les capitaines, il en comprenait l'essence.

Oui, de toutes ses multiples carrières depuis la création de la marine, l'anonyme sergent n'aurait troqué celle à bord de l’Égide pour rien au monde. Pourtant, son patriotisme n'était pas le plus échevelé de l'équipage. La Ve flotte n'avait jamais joui du prestige de certaines de ses sœurs. La paye était bonne, mais n'avait rien à envier à celle d'un poste administratif planqué sur Dromund Kaas. Alors, à quoi tenait cet attachement à sa brave machine ? Quelle étrange passion le poussait chaque jour à réitérer ses exploits professionnels de la veille avec la même rigueur ? Se montrer si proactif où d'autres se seraient contenter de cocher des cases sur un holopad ?

La réponse, Mii'Shel la chantait en canon, avec la voix fantôme d'Antarxarxès dans les coursives, alors que les propulseurs, à température, ondoyaient paresseusement à quelques petits pourcents de leur réelles capacités... tandis qu'éternellement, ils "chutaient vers Aydux."

Que jamais notre feu ne s'éteigne.

Avec un sourire, il tapota d'une large main la culasse en titanium rutilant qu'il dépassait d'un pas preste.

La braise n'avait jamais cessé de couver, et comme promis, le Foyer brûlait en temps et en heure dans les entrailles de l’Égide comme partout ailleurs. L'immense horlogerie du croiseur était à l'heure.






Mais tant dis que l'Aiguille marchait, sa trotteuse montrait des signaux inquiétants.

" Non commandant, le rapport du Melantha n'a pas été édité. Leurs communications sont toujours actives et leurs statuts externes n'ont pas changé.

-Pénible. "

Sur le pont du Sibyllin, on attendait le retour des données de la mission. En parallèle, comme un cours d'eau suit son cours, Dremilcol avait continué de compiler les données astronomiques et demandées par Antarxarxès. Une continuité de leur travail commencé des jours plus tôt. Les variables qu'il guettait, dans la totalité de ces paramètres, étaient lié aux travaux effectués quelques temps plus tôt, sur l'ensemble du système dans lequel ils naviguaient sans ingénuité.

" Mais je suppose que nous allons devoir composer avec, comme toujours. "

Comme il s'y était attendu, bonhomme, Dremilcol avait essuyé un refus poli et froid du jeune Hope et sa superbe toute Sith. Dommage qu'il n'ait pas eu ni le temps ni le loisir de parier : sans doute aurait-il emporter le prix d'une frégate nouvelle génération. Et il n'était pas du genre à cracher dans la soupe. Hélas, il n'était pas certain que le Conseil Noir leur octroie autre chose qu'un blâme ou une salve d'éclairs de Force pour avoir perdu, au choix, le Melantha, Hope, ou Hope ET le Melantha. Le colonnel Howl, embarqué peut-être trop fortuitement sur le bâtiment neuf, n'aurait sans doute pas apprécié de se savoir relégué si loin derrière un jeune capitaine. Derrière cette considération caustique, le vieil homme mesurait en silence combien la République avait eu la capacité étrange et fort à propos de frapper juste. Peu croyaient au hasard, dans leurs rangs.

" Nous ne pouvons pas nous permettre d'être mis en défaut par une frégate, mon commandant, tenta de raisonner l'hologramme du capitaine Elbar depuis le pont de l'Omerta, qu'il s'agisse du Melantha ou d'aucune autre ! Lançons une permutation pour couper court à toute tentative de désorganisation par son entremise.

-L'amiral ne nous pardonnera pas d'abandonner le Melantha. Et certainement pas Hope...

-Le capitaine Hope est un Sith. Ne l'oubliez pas, notait froidement Dremilcol, le regard toujours rivé sur ses cartes et ses données, Antarxarxès ne l'a pas assigné à nos côtés pour le seul loisir de me donner du fil à retordre. Cependant, si le sabotage dont cette frégate est l'objet devait s'avérer critique, nous n'aurions guère le choix. Pas alors que avons de tels ordres. "

Il soupira lourdement. Ce détail-là, l'amiral n'avait pas donné grande précision sur la marche à suivre " en cas de problème". Et avec les Sith, les problèmes étaient sans doute la chose dont vous manquiez le moins.

" Toujours aucune communication de l’Égide, j'imagine ?

-Non commandant. ils sont encore en communication sécurisée. "

Un "hm" un peu las ponctua la déclaration.

" Mon commandant ! Anomalie détectée ! "

Amdusias manqua de sursauter, exécutant un demi tour sur les talons pour faire face à l'auteur de l'exclamation tonitruante.

" Précisez ?

-Décorrellation des superpositions des cartes radars en deux... non, en cinq points commandant ! Les données pour les angles à T0 et T+24 sur nos triangulations longue portée ne correspondent pas !

-Eh bien. Voyez-vous ça... "

Il le voyait, en effet. Leur progression lente était à présent suffisante pour que leur excentration trahisse

" Mh... Ce n'est pas encore assez probant pour obtenir le détail. Mais enfin, compatriotes, voici la preuve que nous avions raison d'être méfiants. Ces tristes sieurs ne s'étaient donc pas volatilisés ! Bien, je pense qu'il est de mon devoir de faire le maximum avant d'envisager de continuer. "

Avec tout le zèle qui le caractérisait, Dremilcol transféra les données de leur découverte sur le pont de l’Égide, avec cette fois un commentaire conséquent.

" Sibyllin à Melantha, déclama platement Dremilcol sans rien cacher de son agacement, ceci est notre dernière communication avant d'enclencher une permutation des positions. Nous avons besoin de connaître ... "








Horakk avait été rempli d'une onde glacée, lorsqu'avait éclaté le scandale.

La vision de Ramken, sur le parvis du grand temple de Ziost, brandissant cette tête qu'il avait autrefois pu croiser, bien vivante, au sein des murs de l'immense Citadelle de Dromund Kaas, avait provoqué en lui une foule de sentiments contradictoires.

L'incompréhension, d'abord, car le coup, préparé avec le soin que seuls les Sith savaient y mettre, était sorti de nulle part, sans qu'ils n'aient pu le voir venir. Du moins, sans qu'on ne leur en laissât la possibilité. Orchestré d'une main de maître, le coup d'éclat du Prêtre des Purs avait mis à mal une unité chèrement acquise. La colère, ensuite, quand il avait réalisé l'ensemble des conséquences dramatiques d'un appel à l’insurrection.


Mais, de tous, c'était bien la trahison qui l'avait emporté. En refusant de se soumettre aux règles qu'il avait pourtant lui-même choisi Darth Ramken se rangeait désormais dans les rangs des individus qu'Antarxarxès considéraient comme déjà morts.

Car la vigilance de l'oiseau de proie allait autant à son nid qu'aux frontières de son terrain de chasse. Là où l'Ordre Sith n'avait, lui et ses fidèles seconds avaient regardé avec alarme les frontières encore mouvantes de leur nouvelle nation. Les fers encore rouge de leurs canons n'avaient pas encore refroidi de leurs derniers efforts, les systèmes conquis n'en étaient pas encore à leur reconstruction, qu'un homme, seul, avait par de savantes entremises, estimé qu'il pouvait d'un coup renié toutes règles et toute loi pour s'autoproclamer empereur.

L’œuvre de ses pairs, celle de son père avant toute autre, l'union sacrée et consacrée par les anciens Sith en la personne de Darth Ynnitach, avait été piétinée d'une manière si égoïste et sotte qu'il lui avait fallu toute sa tête et tout son sang-froid pour ne pas se lancer dans un assaut perdu contre l'usurpateur et ses damnés.

De cela, aucun pardon n'était possible. Sauvegarder les apparences, encore - mais en son fort intérieur, il n'y avait jamais eu de place pour la traîtrise. Les conséquences étaient encore inconnues, mais Horakk n'avait que trop trimé pour n'en tirer autre chose que de l'amertume et du ressentiment.

Qui pouvait lire entre les lignes avait accès à une autre vérité, sur un plan dont la portée était hors de tout cadre spatiotemporel.




L'Idéal qui était le sien ne souffrait aucune contrefaçon.



" Ici Fantôme. Pour Sibyllin, 17 - 000 - 123. Scans impossibles : l'ennemi a brouillé nos spectres de fréquence à moyenne portée. "

La voix vocodée de l'agent 17 attira immédiatement l'attention de l'ensemble de l'équipe, qui de là, s'était plongée dans ses récentes découvertes. Le minuscule transport était réapparu sur leurs écrans... beaucoup plus tôt que prévu. Beaucoup trop tôt. La quête s'annonçait mal, et ce n'était pas le genre de nouvelles à rendre l'atmosphère plus guillerette.

" Négatif, Fantôme. Nous avons besoin de davantage de données. Celles-ci sont infiniment trop parcellaires pour être exploitées.

-A Sibylllin : je répète, la récolte de donnée selon le protocole initial est impossible. A moins que vous ne puissiez procéder à la modification de toute une plage d'utilisation de mon matériel dans les prochaines minutes. Le champ de déploiement du brouillage m'oblige à me porter à découvert. Ma mission est compromise, je demande une réévaluation des objectifs tactiques. "

Sur le pont de commandement, on dévisageait Dremilcol sans mot dire. L’Égide avait reçu les maigres données récoltées par l'éclaireur, mais rien qui ne fut à la hauteur de ce qui était prévu. Pour autant, Dremilcol savait que cette non-donnée en serait une pour son supérieur : donnez-moi les silences entre les notes, par pitié. Il n'y a qu'ainsi que l'on pourra écrire une mélodie. Alors, il ferait de son mieux pour transcrire également les silences. Ce qu'il fit, en envoyant le tout sur l'un des canaux secondaires du vaisseau amiral. Accompagné d'un simple commentaire écrit :

" Bien. Voilà qui a le mérite d'être clair : quelque soit l'origine de cette tactique, il paraît évident qu'un saut technologique s'impose. Mais ce sera pour une autre fois... ce n'est pas comme si nous avions du temps pour la recherche technique aujourd'hui. Voyons : appliquons nos propres doctrines en la matière... "

Il fouilla rapidement dans la totalité des notes échangées avec Antarxarxès et ses officiers les jours précédents. Une compilation effectuée dans un ordre qui lui était personnel, et qui n'avait rien d'alphabétique. Après un temps de réflexion, de tension aussi pour les visages attentifs qui guettaient les expressions de son visage.

" Sibyllin à Fantôme : annulation du protocole initial. Nous vous chargeons d'infiltrer la surface, de descendre au-delà des retombées qui obstruent encore l'atmosphère pour localiser les troupes au sol. Veuillez utiliser les codes du Major Ovin pour ce faire, je vous ai transféré les données correspondantes. Le colonnel Howl, en charge de cette organisation, a stationné son XXe bataillon d'infanterie sur la banlieue nord de Knossa. En toute logique, s'ils n'ont pas pu décoller, ils y sont toujours : aucune manœuvre n'a été ordonnée depuis l'orbite. Établir la jonction par leur biais peut nous permettre de contourner la difficulté initiale d'une communication laborieuse. L'amiral en sera sans doute satisfait : usez de votre discrétion pour ce faire, ne compromettez pas votre mission une seconde fois. "

Le silence leur répondit. Une seconde, le vieil aristocrate fronça le sourcil, dubitatif. Puis, dans un léger grésillement, la voix presque désincarnée conclut leur échange, sans autre formalité :

" Bien reçu, Sibyllin. Lancement du nouveau protocole en cours. Objectifs et données cibles compilées, trajectoire d'approche déterminée - RAS. Pour Fantôme, terminé. "
















Pitoyable.

Ainsi, sans même réellement en avoir conscience, le prélat venait se ranger à la suite de milliers d’autres illustres ou anonymes, et rejoindre en silence la grandissante pile des visages qui l’avaient un jour méprisé. Par sa seule attitude, il livrait au regard intérieur un paysage d’une toute autre nature que celui qu’Antarxarxès avait d’ordinaire l’occasion de contempler chez un officier. S’en rependrait-il un jour ? Horakk n’y songeait même pas, las de cette éternelle incompréhension dont il était l’objet. Cela, n’avait, en définitive, aucune importance.

Demeurez-donc si tel est votre souhait.
Perdurez dans votre être.

Plongé dans le calme d'une mer miroitante, il réfléchissait. Le balancier de sa queue était métronome, hypnotique. Avec la politesse et la discrétion auquel le confinait sa bienséance, il avait à son tour écouté, sans l'interrompre, le long fleuve de paroles qui reprenaient les siennes, dans ce jeu si mécaniquement rythmé. Et il avait déchanté.

Il avait face à lui la même obtuse que celle d’un prêtre sith, récitant à qui voulait l’entendre que celui qui n’est pas de son bord n’entend rien ni ne comprend rien. Etait-ce le lot de tous les hommes de foi ? Des militaires religieux en particulier ? Quel discours tenir à un esprit semblable ? Quelle issue à l’opposition quasi parfaite de leurs concepts respectifs, indéfiniment, répétés sous milles formes, mais sans que le fond n’en dévia d’un degré ?

Pourquoi ? Pourquoi le mettait-on invariablement face au même obstacle ? Cet Ular’Iim semblait à présent en incarner la quintessence, plus rigide que toutes les formes que ses démons avaient pu prendre auparavant. Toute sa vie, il avait repoussé ce mur, à en démonter patiemment les briques lourdes. Sa ténacité à l'exercice en devenait obstination. Et donc, devenait-il à l'image de ceux qu'il critiquait ?


Mais, en définitive, cela aurait pu en rester là. Une simple incompréhension.


" Vous avez réchappé de l’Hécatombe, mais sur cette orbite poursuivez votre assaut et, par Shrupak, je vous ferai quitter ce monde.


Une menace. En énième, et quelle menace ? Parsangbleu, d'autres seraient déjà morts pour bien moins...

Sa pensée caressa de nouveau le fil affilé de la silencieuse gardienne à ses côtés, passant en songe l'énigmatique acronyme qui la nommait.

Par la passion...

Qu'il aurait été aisé de se laisser aller à la colère, face à tant de suffisance. Quel animal soulagement cela aurait-il pu être, de renverser l'acidité d'une haine corrosive sur ces propos injurieux, méprisants, dont les sous-entendus l'étaient tout autant !
Quelle chance pour lui, pour ce corps artificiel d'une élégante facture, qu'il n'ait été qu'un lointain hologramme. S'il en avait été autrement, d'un geste long et souple, son ire aurait dégainé pour lui l'arme antique, saisie avec une habileté encore trop jeune pour tromper sur le peu de pratique qui avait été la sienne en cette époque troublée - mais avec tant de vigueur et de volonté qu'un œil non averti en aurait été confondu.

...j'ai la puissance.

En passer le fil d'un trait sur les pièces métalliques qui joignaient encore cette tête bien faite avec le reste si recousu de technique, sentir les vibrations par milliers grignoter la matière sans pitié.

Satisfaire à la coutume séculaire qui voulait que celui qui osât souhaiter la mort d'un Antarxarxès la reçoive en premier.

Tout dans le discours lui sembla construit pour la provocation à l'outrage, tous les biais évoqués pour le présenter, lui, comme coupable idéal. La vision du prêtre était une symétrie contorsionnée, déployée pour présenter les faits sous l'angle Rarement, Horakk n'avait senti pareil sentiment d'hilarité acerbe. Le piège était grossier, mais l'irrévérence républicaine telle que la forme finissait invariablement par desservir le fond.

Halas.


Mais l'interrogation qui était né du nom supplanta bientôt l'orage qui avait point dans le noir de ses prunelles. D'où tenait-il ce nom ? Seuls les vétérans impériaux avaient encore en tête l'antique navire qui avait un jour manqué de causer sa perte. Doucement, en silence, il prit conscience d'une dimension nouvelle chez ce militaire-là : il en savait trop. Quel message essayait-il en vain de faire passer ? Y en avait-il seulement un ? A dévoiler ainsi l'étendue de sa connaissance, il ne venait que de le rendre plus attentif encore aux indices qui laissait entendre quel genre de guerre il menait. Il y avait ici beaucoup de mains en trop.




" Un nom que vous prononcez comme on prononcerait le nom d'une femme inconnue. En tentant à grand peine d'y coller une image incorrecte.

Je devrais sans nul doute me trouver bien aise qu'un grand adulé tel que vous daigne me porter un tel intérêt. Au point d'en être si bien renseigné qu'il veuille me démontrer sa sapience sur le sujet. Que nenni, je n'en ai cure. Que vos petites mains se rassurent, ce qu'elles ont pu vous rapporter sur mon compte est bien vrai. Et en cela, vous ne serez pas avancé davantage, si vous persévérez sur la voie du mépris qui est le vôtre aujourd'hui.

Vous me permettrez de n’user d’aucun qualificatif de la sorte vous concernant. Mon étiquette me l’interdit. Libre à vous de vous compromettre entre les injures voilées et les jugements méprisants si tel est votre souhait. Je ne m’abaisserais pas à jouer un jeu si puéril en de si sérieux instants.

Sachez qu'on ne menace pas impunément un Antarxarxès. Vos jugements ne sont pas les miens, et vos châtiments ne m'effraient guère : si c'est à ma personne que vous entendez bafouer, alors ni l'Empire ni la République n'ont plus rien à voir ici.

Il y aurait trop à dire, des conclusions que vous semblez tirer. Du reste, me lancer dans une contredite stérile de vos divers commentaires désobligeants n'est pas de mes loisirs : si vous assumez pleinement d'avoir bafoué les clauses explicites d'un traité et que cela ne vous procure aucune gêne, qui a-t-il d'autre à dire ?

Est-il réellement nécessaire de rappeler l'Histoire pour montrer le schéma récurrent qui s'y présente ? Par le passé, leur présence a maintes fois été synonyme de troubles, à un point tel que la République elle-même songea à les exclure. Mais selon vous, ce n'est que mauvaise foi de notre part ?
"


Il se souvint alors, de manière diffuse, de cette imprécise sensation qui l'avait étreinte lorsqu'il avait entendu l'ordre. L'accusation si directe qu'elle n'avait aucun doute à faire valoir. Ceci, sans même qu'aucune information n'ait pu leur parvenir.


Pourtant. Tout n’était pas si clair.



Le prélat assénait ses propres vérités avec tant de persuasion qu'il lui parut évident qu'une telle manœuvre n'avait rien de sa prétendue innocence. Mais le Castellan savait-il déjà tout de l'affaire au point de lui démontrer l'existence d'un casus belli, alors que lui-même, et ses coreligionnaires, avaient poussé Ha'Mi à cette paix illusoire et bancale plusieurs années durant, en ignorant leurs propres mises en garde ? Le jeu du traître à l'Empire était ici pleinement à l’œuvre. Horakk ne pouvait l’ignorer, et ne le faisait pas. Le commander adverse avait curieusement accès à ces jeux de pouvoir, et il en usait. Tant de coïncidences.

" Étrange, cette vérité qui vous est soudain indispensable. Après tout ce que vous avez cru bon de dire d'une traite en vous moquant des conséquences, vous vous inquiétez désormais de savoir qui je sers ?

Vous n'êtes pas marionnettiste, mais cependant, vous vous mêlez de politique étrangère à un point tel qu'on ne peut que suspecter quelque dessein non révélé. Quelle est donc l'origine de votre requête ? Vous êtes fort bien renseigné, pour une innocente victime.

Avez-vous donc des preuves que nous devrions connaître, qu'il y a là un acte perpétré par celui que vous nommez séant ? Qui soutienne vos accusations envers ma personne ? De tous ce que vous affirmez, quelle part est celle qui peut être prouvée ?
"

Que l'existence de Darth Ramken fut parvenue à filtrer en dehors des frontières de l'Empire ne l’étonnât guère. De la part d'un renseignement républicain agressif, encore moins. Trop de ficelles avaient été tirées ci et là par les Sith eux-mêmes pour que l'omerta soit totale. Mais, en définitive, cette toile n'avait peut-être pas fini de s'étendre. L'idée que les renégats pouvaient avoir eux-même provoqué cet attentat n'était pas absurde, loin s'en fallait.

Mais, pour Horakk comme pour beaucoup des siens, il y avait un autre calcul : la République ne profitait-elle pas pleinement de l'insurrection des partisans de l'usurpateur ? L'usurpateur lui-même aurait-il finalement conclut quelque pacte avec elle, sous couvert de la haïr, pour parvenir finalement au pouvoir en brouillant les pistes ? Les pièces du puzzle s'emboîtaient décidément d'une élégante manière.

Il tenait là quelque chose, et le quelqu'un qui lui faisait face lui apparut soudain si à propos qu'il ne lui était plus permis de reculer. Un piégeur. Un retord, qui s'il se souvenait des rapports rageur de Darth Khorog à son sujet, était la plus vile créature, capable de tous les coups montés les plus habiles. Peut-être cette neutralité appliquée dans les mots ne l'était-elle qu'avec le concours d'un goût prononcé pour le [i]théâtre
.

Tels étaient les prêtres, après tout. Et lui disait ne faire aucune part entre ses propres personnages...

" Ni vous ni les Jedi. Nous sommes priés de vous croire sur parole - comme au temps jadis, où les traités n'ont été que de vains mots. Mais la vérité en est que de cela, ni vous ni moi n'avons pour l'heure les moyens d'apporter une preuve quelconque. Ma parole contre la vôtre, comme depuis que nous sommes ici, pour justifier l'injustifiable.

Tout ceci devra cesser, et la lumière sur les circonstances devra être faite, par un moyen, ou un autre.

L'Empire ne se fera pas leurrer une fois de plus par les connivences occultes. Les Jedi, les instances républicaines et les mondes neutres ont maintes fois joué les innocentes victimes pour mieux manipuler leur propre foule et la nôtre. Mais nous sommes une nation née dans la guerre, et par elle : il n'est nulle difficulté que nous ne saurons surmonter. Notre nature est ainsi. Nous resterons debout face à la félonie.

Je l'ai énoncé, et l’énoncerait une fois encore : nous ne nous laisserons pas manipuler, ni par vous, ni par vos autorités. Vos promesses éhontées de châtiment sont sans objet. Les dégâts causés à nos délégations et à nos forces au sol ne passeront pas sous silence. Nos morts vaudront ceux des autres. Nous ne paierons pas pour un crime que nous n'avons pas commis. Et nous porterons le fer contre quiconque entendra se jouer de nous en nous pensant affaibli.
"


Il mettrait à jour les ombres pour mieux les chasser.


" En attendant, la vérité puisque telle est ma parole et qu'elle me lie : je suis aux ordres de l'ordre et de la loi telle qu'édictée par Darth Ynnitach, de celle qui s'est établie par l'unification, la conquête et l'érection d'une société qui perdurera au-delà des frasques de l'Histoire.

Si vous osez penser qu'il existe deux Empire, alors, c'est que le "vide dans cet uniforme" que vous méprisez est image de votre compréhension des véritables puissances intérieurs qui nous animent. C'est pour l'unique et éternel Empire que j'ai donné parole.

Et c'est en son nom que je combattrais, que je trouverais la traitrise et le mensonge, et qu'ils périront une fois de plus. Mia shpadà parlerà per me.*
"


La métaphore, était toujours la plus sincère des images qu'Antarxarxès appréciait.










* "Mon épée parlera pour moi" - expression serenienne désignant les pratiques pour laver un affront

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]






Récapitulatif des manœuvres" :
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
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Zerath est à présent mû par une certitude nouvelle. Ce militaire n’est pas comme le Darth qu’il avait brisé sur Arda. Il n’est guère plus un S’Orn ou un jeune roi. Il n’a pas le vice d’un Mid’E Roïb, sans non plus l’appétit pour le sang d’un Magamoth. Celui-ci est un militaire neutre, poli. Bercé d’un amour profond à une cause dont il se sent investi, ce ne sont pas des pulsations de haines qui font battre son coeur , mais l’amour profond à sa nation. Il a résisté plusieurs fois à ses ardeurs, s’est tenu à un calme compassé admirable, comme un parapluie qu’on maintient fermement pendant l’orage. Les provocations, cependant, ont eu un effet: cet être, déclamant son amour pour son ordre, a dévoilé la plus importante mention depuis le début de la discussion.

Il ne sert pas Ramken.

Ce point crucial stratégique a une implication sublime. La flotte impériale - égale en force à celle du Kaleesh, ce groupe encore si loin qu’il n’est pas même encore visible, cette force qui a tiré la première et qui maintenant avance avec apathie dans sa direction...

Cette force est isolée.

Les territoires Hutt, sous la coupe de Magamoth, ne sont pas alliés à l’amiral rapace. La voie hydienne leur est interdite, car c’est là l’espace de la République. En un mot comme en cent, il suffirait d’un simple renfort républicain pour que toute complication où se trouve même le prélat n’en devienne qu’une escarmouche triviale. Ceci, bien sûr, si l’Etat-Major consentait à pareil effort. C’est là toute la difficulté pourtant. Ce serait la bonne chose, bien sûr. Des troupes fraîches, même en bordure du système, éroderaient immédiatement cette folle confiance où s’est trouvé l’Empire. Ils se sauraient alors démunis, isolés, piégés; ce serait le choix entre continuer à follement guerroyer, à s’en damner, ou à fuir, piteux, en leur propre espace. Seulement voilà: ce serait convenir à accepter une nouvelle guerre. Et les rouages politiques et législatifs broient la machine républicaine - la paralysent dans une inertie monolithique. Certainement est-ce ici l’effet du procès de l’ancienne chancelière, qui a envoyé à tous un message clair: contrevenez aux valeurs si paradoxales que nous avons décidées, et vous serez dûment châtiés.

Ce serait pourtant si tentant...Si aisé aussi, que d’écouter ses plus anciennes façons; il connaît les ordres à délivrer. Sa stratégie est décidée. Les préparations ont été amplement faites. Ne reste désormais qu’étudier la tactique, mais ceci aussi a été traité; les simulations ont amplement parlé. Les forces au sol, par chance ou mégarde, sont muettes des deux côtés. Mais, pour combien de temps encore? Le capitaine Darsch doit à présent progresser dans le chaos de Knossa livrée à son sinistre, livrée à sa panique. Les autorités ossiennes parviendront-elles à ramener l’ordre? Cela, l’Ular’Iim ne le sait, il s’est fait prêtre mais il n’est pas devin. Mais s’il est une chose certaine, c’est que le chaos initial durera encore longuement. Peut-être aussi prendra-t-on en prisonniers les survivants dirigeants; afin que chaque gouvernement y trouve sa responsabilité et qu’on puisse par un jeu subtile d’otages juridiques tout désamorcer.

Faudra-t-il aller les secourir? Non, ça ne serait pas bon, car ce serait véritablement déclarer une guerre au beau milieu d’un premier conflit. Se diviser est s’affaiblir. Et la première leçon de la tactique est que l’ennemi qui se port trop aux extrémités peut être terrassé en découvrant son centre. Zerath a-t-il fait une erreur, en stoppant toute remontée vers l’orbite de la force impériale? Pour le prélat, cela semble pourtant aubaine. Ses hommes ont leur directive et ont plongé maintenant vers les nuages, retranchés à leurs propres radios. Ils frapperont un ennemi laissé sans directives. Un oiseau posé qui ne pourra se lever que trop tard. Geste cruel, mais qui sera peut-être fatidique. Car si l’Empire ne peut se réunir, si ses troupes sont clouées à lorgner - impuissantes - l’orbite, le lent ballet des croiseurs se trouvera en deux phases: d’abord sur celle initiale, à troupes égales, à s’engager chacun à sa tactique. Ensuite, aux renforcements républicains, aux chasseurs ayant achevé leur oeuvre et remontant par leur couloir d’assaut.

Les pièces sont en place et avancent simultanément. D’une part, briser les troupes au sol, ce qui passe par la destruction de leurs moyens logistiques; véhicules, bases, il n’en subsistera rien si les bombardiers font correctement leur office. D’autre part, rétablir le lien entre le sol et l’orbite. Darsch, lui, s’y attelle. S’il réussit, alors la coordination républicaine n’en sera que plus efficace. La chaîne de commandement sera pleinement rétablie, la machine de guerre pourra devenir entre les griffes de Zerath monstre de métal vorace. Naturellement, il faut pour cela que l’ennemi ne comprenne pas pleinement la tactique orbitale. Que son regard, perplexe, se porte face à lui, entre les distantes étoiles, tente de percer à jour ce que prépare le Commander depuis sa cathédrale.

La logistique est la première des phases critiques de la stratégie; mais en matière de tactique on mène un jeu de prestidigitation. Le bon général mène à la vue adverse un jeu de fumées et de miroirs; ses mains pointent sans cesse là où il n’y a rien à voir pour que surgisse enfin son stratagème - trop tard pour qu’on puisse le stopper. Zerath a porté aux disparitions de ses navires une attention soudaine, mais c’est la préparation à la phase suivante, qui sera la plus importante. L’adversaire doute de ses yeux, il s’approche pour confirmer son doute. L’ennemi n’entend plus de nouvelles de son sol et soupçonne l’assaut sur ses chasseurs. Zerath le lui confirme volontiers. Ainsi son regard est-il détourné du bon capitaine Darsch qui bientôt rendra à l’appareil républicain sa voix et donc ses yeux. Les plus grands avantages ne sont pas toujours les plus visibles. Cela, aussi, est une importante leçon de stratégie.

Maintenant vient la question critique; tandis que s’exprime le faucon, avec l’élégance propre et mesurée qui le caractérise, blanc de politesse, au pelage de noblesse, les yeux du Kaleesh se détachent un instant, observent au delà de l’hologramme les visages de ses propres hommes. Il s’est volontairement montré acerbe envers son ennemi, mais il est fait psychologique indiscutable: ses subordonnés, s’il venait maintenant à ordonner l’attaque, le blâmeraient comme unique responsable. Il a encore le pouvoir de désamorcer la situation. De sa voix en échos retentissants, tomber dans le calme qui souvent est sa marque, de part ses nombreuses méditations. Car s’il les entraînait à la bataille, ses hommes dont il n’a pas encore gagné la loyauté...Viendraient sans le moindre doute à douter - qui sait, peut-être même à se retourner. Et toute cette merveilleuse toile qu’il aurait alors tissée s’en trouverait...Défaite. Il faut voir au-delà de cette unique bataille. Il faut investir, servir du long terme pour convaincre ces humains qu’il agit dans leur intérêt et non dans celui de ses propres panthéons. Il doit diriger par l’exemple; se placer là où les siens ne seront pas en danger, à pouvoir à loisir l’observer. Il doit pourtant mettre l’ennemi en position similaire.


Mais comment peut-il faire?


-Et c'est en son nom que je combattrai, que je trouverai la traîtrise et le mensonge, et qu'ils périront une fois de plus.

Zerath ouvre de grands yeux, qui reviennent sur l’oiseau au pelage lumineux. Bien sûr...Cela est si évident. À la façon des siens, une tradition amenée au monde moderne en quelque sorte.

- Ainsi en sera-t-il.

Vous avez un nom à laver; j’ai mes hommes tombés et blessés à honorer. Nous n’engagerons pas les nôtres dans notre sillage vers l’enfer. Vous êtes né de la guerre dites-vous; et ce sont là mes rites entiers qui l’ont durant des siècles façonnée. Nous combattrons, amiral. Vous et moi.
Afin que vous ne redoutiez pas de piège, j’amènerai entre nos deux flottes les prisonniers - les vôtres et monterai personnellement à bord du vaisseau. Faites de même. En gage de bonne volonté, nous combattrons parmi les soldats que vous devez me restituer; qu’ainsi vous ne redoutiez nulle perfidie de ma part. Choisissez votre arme, je choisirai la mienne. Et disposez dans ce navire assez de caméras; nous transmettrons à nos hommes notre combat. Je ne parle qu’en mon nom: et c’est en mon nom seul que je vous affronterai, pour que vous puissiez vous confronter à tous les affronts que je vous ai fait.

Je vous attendrai, amiral. Et enfin vous aurez vos réponses.


C’est cela, sa solution. Il faut montrer l’exemple à ses hommes: pour cela il doit combattre. Ne serait-ce pas comble de l’hypocrisie que de leur intimer de le suivre dans un affrontement causé par sa seule vanité? La guerre est affaire sacrée; on ne la provoque pas à la légère. Cette orbite est un présage sombre, la saison n’est pas encore venue. Non, il ne peut pour l’heure que se livrer à sa propre bataille. Il défiera en duel cet amiral; montrera à ses hommes qu’il est dirigeant digne de respect. Qu’ils ont à bénéficier grandement à lui être fidèle.

En gage de confiance, il livrera les plans de bataille aux deux commandants. Ainsi pétris des responsabilités que l’arrivée subit de Zerath leur aurait usurpées, ils s’en trouveront flattés et satisfaits; vous êtes propres à ma confiance et ma confidence, ainsi à vous je confie de triompher sur la bataille. Tel sera le message à ses deux subordonnés dans cette campagne. Ils n’auront que leur ego et leur compétence auxquelles s’accrocher. L’échec sera ainsi tenu au loin, faute de quiconque à blâmer - Zerath sera, après tout, à mobiliser le dirigeant adverse et ôter en apparences à la flotte la plus importante pièce de l’échiquier.

Apparences, naturellement, car chaque meneur a sous ses ordres des tacticiens qu’il aura choisi pour leur efficacité plutôt que leur renommée.

Ainsi et par ce coup, l’Ular’Iim s’assure du moyen terme; il s’illustrera devant ces humains, leur démontrant qu’il est prompt à ordonner mais également à effectuer de sa propre main; qu’il n’est pas être à la langue d’or et à la main oisive. Il leur montrera qu’il se met en danger afin de leur épargner pareil trouble; à ces deux égards il obtiendra leur loyauté. Par ailleurs, il ne contreviendra guère aux ordres de l’Etat Major, au contraire les appliquera religieusement; car les armées ne s’affronteront pas - ou trop peu car ce serait courir le risque d’abattre les généraux d’un tir égaré malheureux.




***




Et ainsi Zerath descend-il les marches du Payara; après avoir convaincu ses subordonnés, transmis toutes les instructions nécessaires pour que se poursuivent sans accroc toutes ses affaires. Ils triompheront, assure le prêtre. Il effectue une dernière requête; il lui faut son arme, mais il n’a pas encore assez d’entraînement pour pouvoir manier un blaster. Une lame serait hors de propos par ailleurs, et l’on a de toute façon pas de tel matériel à bord. Cela ne lui laisse guère qu’un seul objet. Une arme curieuse, paradoxale dirait-on même - mais il sait que cela peut fonctionner.

L’arrière du navire s’ouvre bientôt, gigantesque mâchoire, pour cracher une petite navette, qui rallie bientôt un autre transport jusque là dissimulé derrière le reste de la flotte. De l’océan noir spatial, transparent et pourtant insondable, vient s’avancer un modeste navire. Il n’a rien d’un bâtiment de guerre et s’il possède certes des blindages, il est manifeste qu’il finirait déchiqueté par les turbolasers adverses en un rien de temps. Dans les couloirs grillagés d’acier, le grand prêtre avance, sa large cape se découpe aveuglante dans l’éclairage blême. Chaque pas, il arrive devant un nouveau cachot, porte transparente où l’on a logé les prisonniers impériaux. Aux demandes tant de Zerath que de Vostyr, on leur a accordé le soin qui relève de la plus grande dignité; ils ont eu droit aux mêmes repas qu’on aurait donné aux soldats de la loyale armée. Leurs uniformes ont été lavés, repassés. Ils sont prisonniers, oui, mais n’ont souffert aucun outrage. Ainsi le commande l’honneur. Mais il n’y a aucun regard d’amour pour le prélat alors qu’il arpente les coursives et que ses jambes contre-nature s’avancent à un rythme mécanique. Faits prisonniers sur Arda, capturés encore sur Destrillion dans les meurtrières batailles, volés à leurs foyers, ces hommes et femmes n’ont que de l’animosité pour le cyborg qui les a dérobés à leurs amours et leurs amitiés.

L’Ular’Iim parvient jusqu’au poste de pilotage. Ayant livré la suite des manoeuvres aux deux commandants, il ne reste à présent plus qu’à poursuivre ce curieux épisode. Avec lui vient une odeur rance; le géant exsude un encens mystérieux, odorant, sucré, un mariage de parfums qui n’a rien de commun dans une galaxie déjà peu uniformisée. Ses mains, disparues sous ses étoffes, laissent parfois échapper au sol des gouttes d’un liquide translucide - c’est certainement le coupable de l’odeur. C’est assurément encore un des rites du bien étrange Commander. La pilote, une jeune humaine fichée d’un grand casque sur le haut du visage, accueille, les mains sur la barre de pilotage:

- Commander. Nous serons bientôt au point de rendez-vous annoncé.

Elle inspire laborieusement, affectée par les multiples odeurs.

- Excellent travail. Si la bataille venait à éclater, vous avez permission de vous désengager pour rejoindre votre position initiale.

- Sauf votre respect, monsieur, vous avez dit que nous pouvions désobéir aux ordres qui nous paraissent illogiques. Je n’abandonnerai pas mon Commander en pleine bataille, monsieur.

Zerath, sous son masque, sourit. Quelle brave loyauté commence à se former.

- Devrai-je donc punir votre insubordination à mon retour?

- Vous aurez pas d’aut’ choix que revenir en effet monsieur.

L’Ular’Iim, après avoir observé les lunes et les étoiles un instant, replonge vers les méandres de la grande geôle spatiale. Il entonne bientôt ses premiers chants, se préparant à son rituel. Il inspire, souffle, s’échauffe et s’apaise. Zerath est mû par une conviction nouvelle; en cette orbite il n’aura pas de serviteur de Ramken. Puisque l’amiral n’est pas coupable du piège mortel de Knossa, ne reste plus qu’à laver son assaut prématuré - regrettable coup bas. Et pour cela, il n’est qu’une façon sanctifiée par les façons Kaleesh: celle du combat.



Résumé des manoeuvres:
Horakk Antarxarxès
Horakk Antarxarxès
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" Mais qu'est-ce qu'ils foutent...

-T'inquiète, ils font toujours ça, les officiers. Tu vois, c'est un peu comme les Sith avant de se balancer leurs sabres... Il faut toujours qu'ils se racontent leur vie pour savoir qui a eu l'enfance la plus malheureuse ! "

Devant l'expression dubitative de son collègue, le technicien se pencha sur lui.

" La guerre, je te dis : c'est tout dans la tête, nota-t-il, un index tapotant sa tempe d'un air entendu. "

L'autre le dévisagea, interdit. Avant finalement d'acquiescer, avec l'une de ces moues faussement impressionnées qui ne trompaient personne.

"Oh... Je vois. "








Il avait répondu avec la sincérité du cœur - incongrue. Mais encore, un adversaire méfiant aurait voulu penser à une comédie de bonne facture. C'était décidément bien facile. Cette amabilité issue à l'en croire d'une longue habitude et d'une bonne éducation était-elle honnête en tout point ? Parfois, pour révéler les pièges et les façons des braconniers de l'esprit, vous n'aviez d'autres choix que de les confronter en prenant le risque de vous y brûler. Mais une fois le chausse-trappe déclenché, alors seulement le problème pouvait être traité. On disait la franchise désarmante, et pour beaucoup, elle l'était.

Les pupilles froides s'étaient dilatées avec un curieux mélange de surprise et d'une mystique illumination. Le prélat avait eu une révélation parmi ses propres pensées, et Horakk n'eut guère à attendre pour en découvrir l'aboutissement.

Il était, et de loin, le premier gradé républicain à réagir de la sorte. Etait-il possible qu'il demeure en cette décadence organisée qu'était la République des individus ayant encore un semblant de respect pour de si anciennes coutumes ? Ou tout ceci n'était que façade, certes bien présentée, mais au demeurant aussi creuse et factice qu'un décors de théâtre ? Comme cela avait été le cas tant de fois par le passé ? L'Empire n'entendait plus avoir à louvoyer pour le savoir : il trancherait dans le vif et ne se ferait plus mystifier - au sens propre comme au figuré.

" Vous avez un nom à laver; j’ai mes hommes tombés et blessés à honorer. Nous n’engagerons pas les nôtres dans notre sillage vers l’enfer. Vous êtes né de la guerre dites-vous; et ce sont là mes rites entiers qui l’ont durant des siècles façonnée. Nous combattrons, amiral. Vous et moi. "

Non seulement il saisissait, mais : il acceptait, donc. Un sentiment étrange, qui ne lui était plus venu depuis des lustres, courut un instant sous son impeccable plumage. Le défi était relevé, et si les codes de leurs civilisations respectives n'étaient pas sans différences, à des parsecs l'un de l'autre, ils s'étaient étrangement compris. Satisfaire à cette antique coutume n'avait rien d'un caprice suicidaire d'un individu frappé de démence : c'était, comme Horakk l'avait appris à présent par l'observation de ceux qui l'avaient précédé sur cette voie étroite et périlleuse, affaire de symboles. Des armes, qui bien qu'invisibles, pouvaient renverser des mondes.

Horakk considéra les paroles de son vis à vis une seconde, impassible. Puis, d'un bref acquiescement du chef, scella l'accord tacite entre eux :

" Ci fait, commander, qu'il en soit selon les usages nobles, et je porterai mes couleurs comme vous porterez les vôtres. Que la galaxie nous soit témoin, car cette fois, il n'y aura nulle tricherie. En adversaires nous combattrons, et en adversaires nous prouverons qui nous sommes.

A cet effet, il est de mise que toute symétrie entre parties soit scrupuleusement respectée, et si vos captifs ont à voir, les nôtres le devront également. Ainsi, nul lieu pour l'arrangement : le terrain sera le même pour tous, et les seules différences se feront par nos actes.
"


Ainsi, serait, l'espace d'un instant suspendu et presque anachronique, tout le contexte inextricable dans lequel la galaxie s'était jetée. Le choix eut fait bondir un Sith. Mais Horakk n'en était pas un, les mystères de sa pensée parfois surprenante était d'une autre nature. Les oreilles d'un rishii étaient tout aussi excellentes que ses yeux, et leur spectre plus étendu. Il avait toujours eu une mémoire auditive, davantage que visuelle.







Je n'entends point de paix.







La lecture des cartes galactiques avait la préférence de tous les gradés de la galaxie. Mais ces cartes-là n'avaient que leur nom en commun avec celles dont on usait pour la Bonne Aventure. Même si, trop souvent, on y attachait une telle importance qu'on s'enhardissait vite à leur contact. On y voyait toutes les réponses, on y faisait ses calculs avec une précision déconcertante : pourtant, tant de savant calcul n'avait jamais empêché l'Histoire de surprendre quiconque.

Si muove.

Elle bouge. La carte. En permanence, elle évolue, et parfois trop vite pour que les calculs de l'avant veille soit encore valables le jour même. Les choses changent. Et il leur fallait bouger de même, en rythme, sous peine de disparaître. Ne supposez jamais que vous savez où est l'ennemi. S'il y avait bel et bien une seule et unique leçon à recevoir de l'insurrection des Ramkenites, c'était celle-ci. Et faute d'être un quelconque génie stricto sensu, Horakk avait toujours été bon élève. Aussi vif et rapide à l'apprentissage qu'il ne le fut jadis à la chasse aérienne.

Par deux fois, le contrôle de la colonne vertébrale qu'était la Perlemienne leur avait échappé. Makem Te d'abord, Columex, ensuite. A chaque fois, le schéma s'était répété et rien de tout cela n'avait pu convenir à Antarxarxès. Pourtant, avait affirmé Horakk, il leur faudrait bien réussir. Cette frontière hyperspatiale ne tiendrait pas éternellement.

Son défaut était d'ordre structurel : elle était l'une des voies hyperspatiales les plus longues de la galaxie, ralliant le lointain amas de Tion à Coruscant, exposée à un nombre impressionnant d'aléas. Ainsi, certaines de ses portions traversaient des parsecs où les systèmes stellaires se faisaient très rares, voire inexistants. Les zones de défense spatiale n'étaient donc jamais continues : cela, tous les contrebandiers et pirates de la galaxie se devaient de l'apprendre très vite. Derrière l'autoroute hyperspatiale qu'elle représentait pour tous les vaisseaux, la Route Commerciale Perlemienne était aussi une zone de passage transverse, pour qui connaissait les Passes et autres Poches de Douaniers, comme on les nommaient avec cynisme dans la Bordure Extérieure. L'une d'elle, le rishii la connaissait bien. Malgré les ans, jamais il n'aurais pu l'oublier, et pour cause.

Elle lui avait un jour coûté son frère.

Et bien après encore, intercepter ces fameux convois clandestins avait été son travail durant près de quatre années pleines. Si une seule chose pouvait différentier Horakk d'un Kraaz ou d'un Stevens, c'était sa connaissance de ces choses-là, délaissées par bien trop d'officiers à son goût. Ce n'était une évidence que pour bien peu de monde en cette galaxie : toute flotte avait pour elle des armées de techniciens et d'ordinateurs versés dans l'astrogation. On déléguait la pensée consciente à la machine, à un point tel qu'on finissait par oublier. Cela avait pour conséquence que les anciennes techniques et astuces des anciens astrogateurs étaient à présent l'apanage d'un très petit nombre. Parmi eux, les clandestins des étoiles, les pirates et les nomades.

Toute cette complexité n'apparaissait pas sur les cartes d'astrogations du commerce, bien entendu, mais encore, même les compilations les plus complètes demeuraient parcellaires. Peut-être n'aurait-on jamais fini d'explorer la galaxie ? L'implication de cette superposition de voies et d'impasses en de multiples dimensions faisait qu'un trajet en ligne droite ne l'était que rarement.

Ainsi, toutes les pièces du plateau spatial ainsi disposées n'avaient en définitive ni les mêmes vitesses, ni les mêmes modalités de déplacement. Tout à fait au fait de ces particularités, Horakk ne regardait jamais plus ces magnifiques représentations stellaires avec les yeux innocents qu'il avait eu autrefois. Il savait donc que chaque saut hyperspatial devait être calculé en avance de phase, prendre en compte non seulement l'évolution des positions relatives des systèmes entre eux, mais encore, les mouvements des dimensions au delà de la dimension trois, un domaine où seuls les yeux abstraits des hypercalculateurs pouvaient scruter les changements, dont certains s'avéraient périodiques, comme la majorité des mouvements au sein d'une galaxie. Peut-être même de l'Univers.









17 avait finalement atterri. Assurément pas en la villégiature la plus seyante du pays. Mais, suivant ses ordres de mission, le sommet d’une montagne chauve comme le pic de l'Echoc n’était pas proscrit : c’était même, au vu des circonstances, un terrain plutôt bienvenu pour ce qu’elle devait désormais faire. Le fait qu'elle ait pu à cet instant fouler un sol sacré aux yeux des ossiens ne lui faisait ni chaud ni froid. Au-dessus du ciel empli de fumées et de poussières de la vieille Knossa, des kilomètres plus loin, en contrebas, la première altercation avait laissé place à une attente insupportable. Une tension telle que l’on jurait entendre gronder la foudre...

Dans le silence de l’étendue morte, le Fantôme et ses formes oblongues disparaissaient presque dans la grisaille de la pierre. La petite cyborg n’avait pas choisi une aire si délicate à aborder par hasard : loin des combats qui venaient de s’ouvrir au-dessus et aux alentours de Knossa, elle n’avait pris aucun risque. Le prix à payer était le temps : manœuvres amples, détours nombreux pour contourner la zone litigieuse. Cela faisait trop longtemps que les Sith survivants de l’attentat, pris entre le feu républicain qui les avait intercepté, et le sol où régnait le chaos, avait besoin d’entendre.

Mais elle avait respecté l’ordre de mission inscrit sur son bloc à la lettre. Elle n’était ni un soldat, ni un pilote de chasseur, et se compromettre en tentant d’interférer avec les actions des uns et des autres n’était pas son genre. C’était bien toute leur force et toute leur faiblesse : la discipline… Mais le jugement ne faisait pas partie de ses attributions. Ayant laissé son vaisseau sur l’ubac, contre le vent froid qui griffait la peau, 17 entreprit de gravir les quelques dizaines de mètres qui la séparaient du sommet, d’où le point de vue prometteur l’intéressait en réalité bien moins que le ciel propre et clair à cet endroit. Repérer la position des forces impériales constituait la première ligne de sa liste.


Au dessus de [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien], son regard accrocha les arabesques graciles que dessinaient encore l'immense volute qui avait fulminé vers les cieux lorsque s'était écroulé l'énorme complexe de l'AGPU, et tout son quartier avec. La gravité reprenait à présent le dessus, évasant le lourd nuage opaque à la manière d'une fleur éclose. Hormis les sillons noirs des chasseurs qui zigzaguaient furieusement entre les nuages, rien ne venait plus troubler le silence de mort qui avait enveloppé la capitale.

Traiter ce premier point par le visuel était exclu. Elle entra donc les coordonnées de l’homme de main du colonel Howl. Elle ne le connaissait pas. Il ne la connaissait pas. Leur seul point commun ? L’Empire. En de telles circonstances, c’était amplement suffisant. Elle devait agir vite et bien. Comme toujours.








La lueur de l'holocom s'était éteinte, et instantanément, tous les regards s'étaient braqués sur lui avec une synchronicité déconcertante. Difficile de décrypter ce que tous ces visages voulaient dire. Et il n'avait guère le temps de les lire. Un officier impérial ne s'expliquait ni ne justifiait ses choix. Il en assumait pleinement les conséquences. Néanmoins, Horakk, aguerri aux méthodes de la propagande Sith, connaissait par cœur le chemin des viscères qui pouvaient, de la même façon qu'un moteur, propulser tantôt vers l'avant, tantôt vers l'arrière. La peur ou l'envie, le désir ou l'angoisse : il fallait savoir jouer des deux.

" Soldats : voici venu l'heure de mettre un terme aux tribulations machiavéliques qui nous ont conduit ici. Je sais ce que vos yeux essaient de me dire : vous n'aurez pas à subir les reproches du Castellan pour avoir suspendu son ordre au profit du mien. Je serais le seul à subir son courroux si notre flotte venait à pâtir de ma décision. Je ne vous ai jamais fait défaut, je compte sur chacun d'entre vous pour continuer l'ouvrage !

Là où je me rends, nul ne me suit : les règles de ce combat ne sont pas celle d'une bataille. Que l'on règle séant la suite de nos opérations, je dois me retirer. Exécution !
"

La perplexité et le silence sidéré qui avait suivi cette échange d'un autre monde pour eux fut instantanément brisé par un "à vos ordres" déclamé sur dix tons différents. On reprit son poste avec sérieux, non sans jeter un regard étonné au dos d'où dépassait une tête aux oreilles de plumes. D'un pas feutré, le commandant Granath se posta à ses côtés, ses talons claquant avec une rigueur réflexe.

" Permission de poser une question, amiral.

-Accordée, si la réponse n'excède pas dix secondes, commandant.

-Hm... Pourquoi ? "

Horakk laissa sa tête pivoter d'une curieuse façon, silencieux, captant toute l'essence de l'expression indéchiffrable du cathar.

" Cela excède largement les dix secondes, commandant. La réponse attendra. "

Et il se retourna, non sans s'autoriser un vague sourire.




Que la République ne profita de l'ouverture du second front, même gardée discrète par toute la junte impériale, avait été depuis le début leur premier sujet d'inquiétude, et aussi, leur premier reproche aux renégats. Leur motif de jugement, l'épitaphe qui demeurerait à jamais inscrite sur leur frontispice écroulé quand l'heure de la réunification aurait sonnée.

Le fragile équilibre qui n'avait cessé de caresser ses limites durant les dernières heures était en réalité de cette nature : le tout premier domino d'un jeu gigantesque qui ne demandait qu'une seule étincelle pour finir en brasier. Le Perturbateur - si tant était qu'il fût au singulier - qu'elle qu'ait été son allégeance, quel qu'ait été son dessein final, avait choisi cet instant d'une manière fort précise. D'une exquise justesse, sans nul doute aux yeux des Sith.

Darth Laduim, [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien], avait établi une stratégie claire avec l'état-major resté fidèle. Quand Dromund Kaas avait été la cible des Renégats les plus audacieux, Antarxarxès, comme d'autres, avaient affiché leur alignement sans compromission en prenant les armes. Ils y avaient gagné de nombreux ennemis, mais également une part de confiance supplémentaire auprès de leurs instables dirigeants. Derrière ses ardeurs sanguinaires dont il ne s'était jamais caché, Darth Laduim avait su demeurer un chef militaire capable. Il avait tôt fait de leur résumer les problèmes, du plus évident au plus délicat.


Aujourd'hui, pourtant, c'était bel et bien ce même Castellan qui, par ses milliers d'hologrammes parallèlement projetés sur tous les navires de leur détachement, avait renié toute sa propre stratégie pour leur donner l'ordre de se porter, armes déchaînées, contre cette même république, alors que sur leur flanc, la balafre ouverte à Khar Delba saignait encore. Défier une République coupable d'avoir une fois de plus provoqué l'esclandre par quelque discrète manœuvre tout sauf ingénue : il y avait cru, parce qu'il s'y était attendu tout du long. Les plus acerbes y auraient vu un tournemain de S'Orn l'opportuniste.

Ce qu'ils avaient prophétisé de par leurs craintes légitimes depuis des mois se concrétisait-il ? Alors, la seule question qui aurait dû se poser : étaient-ils prêts ?



Tout n'était pas si clair.



Mais là était tout le glaçant génie de cet attentat : le temps avait fait bon œuvre. Conscient qu'ils ne pourraient se retirer d'un saillant aussi intenable stratégiquement qu'Ossus, envoyer par delà le seuil qui les avait jusque-là retenu un simple détachement pour leurs dignitaires se résumait à les livrer à toute machination visant à séparer l'avant de l'arrière. Quel tacticien l'aurait toléré ? Cet échange de prisonnier avait été un grand sujet de discussions. L'Inquisition, tout autant que l'Armée et la Marine s'y étaient mêlées, avançant leurs batteries d'arguments. La manœuvre diplomatique s'était accompagnée de ses pendants militaires, et elles avaient été délicates : concilier la possibilité d'intervention rapide avec l'impossibilité de se démobiliser totalement pour ce faire.

Pourquoi, alors, ne pas réinvestir ce qu'ils avaient appris à leur dépend : changer leur manière d'aborder les combats. Ne plus seulement utiliser la grande doctrine qui avait toujours été la leur de ne compter que sur l'écrasement par le nombre et celui de leurs canons. Car désormais, leur division interne ne leur permettait plus de garantir le succès de telles tactiques. Horakk, agile, avait attrapé ses leçons au vol.





L'hologramme tressaillant de Dremicol avait jailli comme une flammèche de la console à peine éteinte de l’Égide, comme si, toujours en embuscade, le visage saillant du vieil homme avait dû faire le pied de grue en attendant que cesse ces billevesées. A peine remarqua-t-il l'ambiance qui régnait à présent sur l’Égide.

" Amiral ! Navré de vous interrompre en un instant visiblement vital.

-Vous n'interrompez rien, commandant. Nous en avions terminé. Mais soyez bref, le temps m'est compté.

-Fort bien. J'ai... une bonne, et une mauvaise nouvelle. "

Même contrarié, Dremilcol avait cette faculté à parler d'un ton nonchalant et désinvolte qui lui avait souvent attiré un subtil mélange de crainte et de mépris de la part d'individus susceptibles. Horakk n'eut aucune hésitation :

" Toujours commencer par la mauvaise : les problèmes ne souffrent guère d'être traités en retard.

-Le Melantha est en difficulté. Un... Jedi... fait parti des infiltrés. Et il s'en est pris au capitaine Hope. "

Le mot n'était pas passé inaperçu : Jedi. Les oreilles mordorées du rishii remontèrent brusquement. Le visage de Fost se tordit de hargne, alors que les mots acerbes du reptile avait encore sifflé à leurs oreilles de loyalistes.

" Un jedi ! Ainsi, nous avions raison sur toute la ligne : ce n'est pas pour profiter des bars ossiens que ces intriguant ont déchiré un traité de paix galactique... "

Sa voix avait subrepticement glissée vers un son plus... métallique.

" Sans l'appui de l'Inquisition, neutraliser cette menace sera bien plus délicat. Préparez le commando des opérations spéciales sur le quai 14, qu'ils se tiennent prêt à embarquer. Nous ne laisserons pas l'apprenti du Castellan être la cible de l'Ordre Jedi sans agir ! Il en va de notre responsabilité !

-Hope n'est sans doute pas en posture de recevoir nos ordres, amiral : il serait plus prudent de compter sur l'appui du colonnel Howl, toujours à bord.

-Faites : s'il est encore en mesure de mener ses troupes, alors peut-être cela suffira-t-il à neutraliser le jedi. "

Amdusias se contenta d'opiner sobrement du chef. Son visage pivota vers l'arrière, invisible sur l'hologramme, et il transmit la directive à sa suite.

" Vous disiez avoir une bonne nouvelle.

-En effet ! La communication avec Ossus a été partiellement rétablie par le relais de l'agent 17. Nous avons encore du mal à stabiliser la communication avec la distance, mais avec le relais du Fantôme, nous avons enfin pu avoir un signe de vie d'Ossus ! Je dois vous avouer que je n'espérais plus.

-Excellent : je veux un état de la situation le plus exhaustif possible avant de quitter l’Égide. Sait-on quoi que ce soit de l'Inquisition ? Du seigneur Khorog ? "

Une hésitation fugace :

" De Dana Shar ?

-Malheureusement, aucun contact n'a été établi entre la délégation et les troupes depuis l'attentat. 17 est le premier contact qu'Ovin est parvenu à joindre ! La ville, de par sa construction si spécifique, s'est effondrée en son milieu et plusieurs quartiers entiers ont été dévastés lorsque le Galaxy a cédé... Ce n'est pas un champ de bataille, amiral : c'est un cimetière. Parcourir la ville à pied est un marathon que nos soldats se sont refusés à faire sans savoir si cela aurait un quelconque bénéfice : chaque rue est un traquenard où le sol menace de céder autant que les gratte-ciels. Apparemment les malfrats des cartels coincés au sol sèment le chaos comme jamais !

Selon le rapport du Major, les pertes parmi nos chasseurs sont conséquentes, mais sans doute moins catastrophiques que nous ne le redoutions... Du moins, pour l'instant. Je vous ai transféré les données qu'il est parvenu à nous transmettre avant que : jugez-en par vous même.


Ce qu'Horakk ne perdit pas une seconde à faire : il avait réclamé qu'on préparât un transport, et il n'avait guère le temps de divaguer.

" Je vois. Mettez les Raiders en charge de multiplexer le signal sur les relais du Fantôme : si elle peut conserver sa position, qu'elle le fasse. Mettez tout en œuvre pour amplifier son signal et regrouper nos troupes.

-Bien compris. Ceci dit, il demeure un problème de taille : les escadrons de chasseurs de la République n'ont pas cessé l'assaut.

-Quelle surprise... Des précisions ?

-Ils rabattent à présent les chasseurs interceptés sur la remontée vers Knossa ! Les communications avec le sol mentionne une... tactique, nouvelle, quelque chose qui a pu être observé depuis le sol, qui a mis plusieurs chasseurs à terre et provoqué des désengagements ayant fatalement conduit au désordre. Sans transmission du commandement, ces hommes ont simplement tenté de contacter le sol pour gérer l'urgence et riposter. Ce rapport est la seule chose sur laquelle appuyer une action, amiral... C'est très peu, mais suffisant pour tenter quelque chose. "

Horakk s'avança vers la console et y chercha les fichiers communiqués par Dremilcol. Un rapport, visiblement rédigé dans des conditions compliquées, comprenait des listes de coordonnées en guise d'unique pièce jointe. En quelques actions menées de sa propre main, il dupliqua les données vers les rangs des corvettes Raider. Là, la machine avait tout pouvoir pour faire ce que jamais ils n'auraient eu le temps de faire de tête.

Rapport d'Ovin:


" Mais, amiral, une chose. "

Le regard insondable de Dremicol s'attarda avec un éclat inquiet sur celui d'Antarxarxès. Et soudain, le calme qu'il y trouvait paru à l'humain autrement plus terrifiant qu'une tempétueuse colère.

" S'il advenait que le Jedi et ses sbires parviennent à leurs fins... que devons-nous faire de Melantha ? Quels sont vos ordres ?"

Derrière sa pudique question, se cachait une demande dont il savait qu'aucune réponse ne serait aisée. Pourtant, le rishii ne prit guère qu'une courte inspiration avant de lui répondre, avec cet aplomb métallique qui caractérisait le plein déploiement de ses capacités de commandement :

" Reprenez le contrôle de cette frégate par tous les moyens : ceux-ci ne vous manquent pas. Si le pont de commandement ne répond pas, utilisez les consoles de secours et les réseaux secondaires. Relayez à l'Omerta le soin de palier la coordination à bord du Melantha s'il s'avère que la situation dégénère, et tentez de savoir quel est l'état actuel de ses systèmes centraux. Si Hope tient toujours sa barre malgré l'attaque. "

Il y eut un temps de réflexion, nécessaire, mais au fond, la marine impériale avait toujours eu les réponses les plus radicales quand la situation l'exigeait :

" Si toutes fois toutes vos tentatives échouaient : ne laissez pas le Melantha aux mains de nos ennemis. Appliquez la règle numéro quarante-deux.

-Très bien, amiral. A vos ordres. "


A son tour, parmi ceux qu'il connaissait si bien - mais qui découvraient à présent qu'eux ne le connaissait peut-être pas, en définitive - il entreprit de jouer ce rôle si gratifiant mais si délicat de chef d'orchestre, où il fallait penser et agir à la fois. Il donna au Fantôme les instructions pour Ovin et leurs forces seules dans la tourmente, comme un message qui pouvait, peut-être encore seulement, leur permettre de survivre. Il donna le soin à ses capitaines de corvette de suivre l'évolution de la situation, de continuer le lent travail de support, tournées vers le point unique du sommet de l'Echoc.



En apparence, rien ne changeait, et pourtant tout changeait.



Comme il le leur avait promis des jours plus tôt, il les avait préparé au choc. Pas seulement à la façon dont on habitue le sportif à l'effort : d'une manière tout à fait mécanique. Il avait posé son regard, non sur les lointains allées et venues de la République, mais sur son propre fort intérieur. Dans ses rangs, dans ses machines, il avait de nouveau creusé ce minerais qu'il connaissait si bien, et pourtant, si mal. Chaque nouveau déplacement de flotte voyait ses paramètres évoluer. Il voulait surtout ne jamais être simple spectateur, mais suivre le flot, s'inscrire dans le mouvement. Se fondre avec. Pour cela, il fallait d'abord sentir : baisser la garde de la raison raisonnante, et accepter de plonger dans l'irrationnel. Ensuite, la perplexité initiale se décantait, comme un précipité au milieu d'une eau claire.

C'était l'action du temps. A une époque où la lenteur était devenue synonyme de faiblesse ou de laisser-aller, où l'on ne jurait plus que par la vitesse-lumière, les actions de fond n'avaient souvent pas la préférence des jeunes générations.

Mais Horakk, tout vif volatil pouvait-il demeurer dans sa nature, avec découvert sur la douceur des vertes prairies de l'ancien fief des Antarxarxès, tout le miracle que pouvait sans effort accomplir la marche lourde, lente, et pourtant irrépressible du temps. Il avait appris la vertu de la patience, alors qu'il ne l'aurai guère eue en d'autres temps.

La paix, qui leur avait causé tant de chagrin et de dilemmes, leur avait donné cela : du temps.

A la manière dont on érige une digue, en drainant le sol mètre par mètre, en repoussant toujours plus loin la marée pour se dégager l'espace asséché, ils avaient consolidé leurs avancées de ces dernières années. Marqué d'un sceau indélébile des dizaines de nouveaux mondes qui, mêmes mineurs, demeuraient à présent des membres à part entière de leur empire. En fidèle héritier d'un visionnaire, [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien] avec un entrain non feint aux réformes voulues par le Maître des Forges et l'Inquisition. Passer au stade supérieure que voulait toute nation grandissante. Après l'éclosion, venait la croissance, et avec elle la solidification de son squelette.

Il leur fallait devenir, ou périr.

Mais qui périssait cessait fatalement de devenir. Jadis, le capitaine Antarxarxès n'aurait eu cure d'un tel détail : sa hargne n'aurait eu d'égal que la fureur des canons du Cavalier Seul. Il aurait encore conservé de sa jeunesse son impavide fougue. Aujourd’hui, beaucoup de choses étaient différentes. Les ans avaient filé. Les rishii, beaucoup d'hommes l'oubliaient, ne vivaient que rarement aussi longtemps que les êtres humains. Une réalité dont il n'avait jamais tout à fait pris conscience, peu porté sur l'ethnologie de sa propre espèce. Ce décalage biologique lui avait donné tôt une maturité que d'autres individus n'avaient possédé qu'à un âge plus tardif. Une capacité à faire silence et à se concentré à un âge où les hormones de bien des espèces oblitèrent tout bon sens.

Sur les nouveaux sentiers de la guerre, Horakk, donc, n'avait plus rien d'un adolescent fougueux. Et si la vieillesse ne l'avait pas encore marqué, il avait vu certaines de ses priorités changer. D'abord imperceptiblement. Puis de façon plus évidente.






Il était seul, à présent. Seul, il avait quitté le pont de commandement. Seul, toujours, il avait regagné son antre discrète à bord. Là où ses pensées, toujours, s'élevaient. Loin de l'urgence, où le temps paraissait parfois lui laisser un répit, comme pour permettre à d'autres dimensions de pénétrer sa métronome vie. A son tour, il avait entamé un rite, d'une nature moins ostensible, plus laïque. Mais en essence, aussi, avait rendu hommage en silence. Ses pensées s'étaient calquées sur ses actes, méthodiques et précis. Il avait resongé, repassé au lent balais des souvenirs.










Mais pouvait-il mettre ses choix actuels sur le seul compte d'un plus grand âge ? Ce serait d'une grande hypocrisie. Horakk n'avait pas menti le moins du monde en déclarant au kaleesh qu'il disposait de l’œil intérieur. Expression galvaudée.

Car s'il avait volontiers appuyé son commentaire sur le sens subtilement ésotérique qu'un religieux n'aurait manqué de relever, la vérité était autrement plus simple, et moins sujette à controverse. Bien moins remarquable aussi. De ces mois interminables de déchirement douloureux, autant pour leurs troupes que pour leurs convictions propres, les officiers loyalistes avaient été forcé de renoncer à leurs vieux travers. Les renégats n’étaient rien d'autres que ceux avec qui ils avaient, pas même un instant avant, partagé toutes leurs armes et leurs plans de bataille. Une telle expérience menait sans faillir à la réflexion, souvent de force.

Le regard d'Antarxarxès s'était très longuement porté sur lui-même, sur son équipage, sur la Ve flotte, sur toutes les autres flottes... sur l'Empire et sa hiérarchie, enfin. Un long travail introspectif qui n'avait pas encore trouvé son aboutissement, si tant était qu'il puisse le trouver un jour. Une longue traversée du désert.

Mais encore, d'autres choses avaient fini de forger des choses nouvelles. Le Cavalier Seul avait vu émerger de la guerre les jeunes générations qui n'avaient connu qu'elle. Qui n'avait vécu qu'à travers elle. Avec ces nouveaux sangs qui emplissaient les rangs, une figure avait, discrètement, gagné la force de la familiarité dans son environnement mental. Un individu que les chemins détournés avaient menés sur l’Égide, et puis, un jour, comme l'oiseau, avait volé de ses propres ailes. Aujourd'hui, Horakk et la vieille Égide n'étaient plus seuls. Il y avait Lloyd Hope et Melantha.





D'un revers de paume, il avait avec application plaqué les plumes indisciplinées de sa tête, de son cou, de ses poignets, de telle sorte à ce que, d'aspect mat, elle paraisse presque lisse, légèrement durcies. Disciplinées.






Au lendemain de son coup d'éclat sur Khar Delba, et ce malgré le revers infligé par les forces de Malevolus, Magamoth avait cru bon de s'en prendre directement au cœur névralgique de l'Empire. Mauvais calcul.

Il n'y avait pas réussi. Aujourd'hui encore, l'âme loyaliste - paradoxe ultime, même privée de sa tête - avait continué de repousser ses assauts sauvages. Érodant peu à peu les réserves que Darth Ramken avait mis tant d'ardeur à accumuler en silence, et qui, sans doute peut-être, aurait dû lui assurer une victoire rapide sur des rivaux dolents. D'abord repliées en défense suite aux déclenchements des feux multiples par les révoltés, les flottes des suivants du Conseil Noir avaient concentré leurs efforts à maintenir le contrôle des axes de circulation majeurs, empêchant les poches renégates de bénéficier d'une logistique stable, les contraignant à ruser en permanence pour continuer d'alimenter leurs besoins croissants au sein d'un territoire devenu instable. Ils avaient ainsi maintenu la majorité de leur invisible système sanguin à flot. Coupant court à toute issue simple et rapide pour les Ramkenites.

Les forces loyalistes et renégates, depuis lors, n'avaient eu de cesse de se harceler les unes les autres, dans une guerre d'un genre nouveau, auquel ici, personne n'eut pu être habitué. Il fallait avoir des yeux partout, au sein même d'un espace qu'ils avaient si souvent arpenté. Le conflit, fatalement, s'était enlisé.

Ils avaient tenu, maintenu une pression constante, libéré les passages, repoussé les assauts, harcelé les bastillons révoltés. En face, les renégats avaient multiplié les traquenards, repris certaines positions, mené attaques surprises et feintes, saboté, manié la corruption et l'intimidation. La confusion du conflit, la superposition des intérêts divergents, la guérilla, avait rendu les cartes illisibles. Démêler le vrai du faux revenait désormais à considérer qu'il y avait un vrai, qu'il y avait un faux, alors que deux camps versaient en permanence leur version personnelle de ce que devait être une vérité.

Ne demeurait qu'une certitude : aucune des deux factions ne semblait prête à rendre les armes. Les loyalistes trop profondément ancrés depuis le temps, les renégats roués aux manœuvres traitresses et soutenus par des mondes disparates. Des visions aussi diamétralement opposées que ne pouvaient l'être deux versions d'un unique chaos.

Au fil des jours, des semaines, des mois... Ne voyant pas Ramken mettre à mal ni le Conseil Noir, ni ses sbires, les forces renégates avaient cessé de croître. La ferveur provoquée par le coup d'éclat initial avait fatalement laissé place au doute. La surprise avait échouée à permettre au prêtre de prendre le pouvoir par le seul truchement d'une émeute. Dès lors, il lui avait fallu changer de stratégie. Son impitoyable bras droit, aussi sauvage eut-il été, n'avait pas le don d'ubiquité, et les forces loyalistes, appuyées par un appareil étatique qui lui appartenait encore en grande partie, eurent tôt fait de prouver qu'elles n'étaient en rien décidée à céder. La cause renégate, très disparate et maintenue artificiellement par des Sith désireux de trôner toujours plus haut, peinait à renverser quelque chose qui, pour beaucoup, demeurait difficile à cerner. Mais qui, pour Antarxarxès, était l'évidence même. Une évidence qui lui avait fait


On ne réclamait pas le trône impérial à la foule en colère : on le prenait pour soi, par ses propres moyens, selon le rite immuable du soleil mourant tué par la nuit et renaissant par elle le jour suivant. Dans l'esprit d'Horakk comme de tous les fanatiques de la même trempe, aucune légitimité ne pouvait être accordée à celui qui n'avait jamais eu l'intention que de défier le Conseil Noir à la déloyale. Typiquement Sith, auraient répondu certains. Mais, existait-il seulement une façon d'être Sith ? Grande question.






Sur l'uniforme impérial, il avait épinglé la cape pourpre et simple, agrémentée seulement de ses chaînes qui les maintenaient en place avec élégance.






Tout ceci, Horakk ne l'avait ni supposé, ni relevé d'une observation détachée avec froide méthode. Non. Il avait nagé dans la tourmente, à en boire la tasse. Il avait trempé dans les océans de fiel, déversés par une nation disloquée qui s'en voulait encore d'avoir laissé un quelconque jeu de pouvoir mettre à sa tête une figure qui avait échoué à les mener sur le long terme. Quelques batailles remportées ne faisaient pas un trône. L'Idéal n'avait pas été incarné : la chaîne de transmission du pouvoir avait été brisée, et qui pouvait maintenant prédire quand se présenterait de nouveau une âme capable d'égaler, ou de surpasser, ses prédécesseurs ? Byss était bien loin...

Mais en définitive, la crise n'aurait pu être qu'un épisode de purge sanglante comme il en avait existé de tous temps. Et la machinerie sans âme, elle, continuer l’œuvre qu'on lui avait attribué avec docilité. Seulement, les ficelles tirées en travers de toutes les institutions par jeu d'influence avait compromis l'ensemble de la construction. Par quelle fragilité si peu évidente le Sith était-il parvenu à ébranler si facilement l'édifice de ses anciens maîtres ? Comment était-il parvenu à délier autant de langues, alors même que l'annonce d'une paix avait provoqué un roulement de tonnerre chez ceux qui théorisaient l'avènement de la guerre éclair pour enfin gagner le Noyau.

Toute cette agitation avait des racines multiples, des causes qui ne dépendaient pas toutes de l'Usurpateur.

Les évènements de la dernière année Ils avaient regardé la République refermer ses rangs sur Columex - alors qu'ils avaient tant saigné pour la tenir ! Cette rétrocession avait ulcéré nombre de militaires impériaux. Sans doute était-ce là l'un des terreaux fertiles qu'avait su ensemencer le verbe vipérin de Ramken.

Ainsi, si l'Empire avait échoué à "briser la colonne Perlemienne", si stratégique, il n'en avait pas moins gagné de nombreux territoires depuis l'éviction des Kossakii. Des espaces le plus souvent sauvages, et dont les systèmes stellaires n'étaient ni les plus nourriciers, ni nécessairement les plus enviables en termes astronomiques. Mais dont l'intégration avait ouverts le champ des possibles. Les régions de l'extrême bordure de la galaxie renfermaient souvent nombre d'anomalies spatiales à même de compliquer de beaucoup la navigation. Cependant, elles avaient l'avantage d'être aussi un lieu bien plus difficile à cerner.

Cet espace avait vu l'un de ses centres névralgiques ralliés aux renégats, par l'empreinte puissante que le général Magamoth avait laissée, alors qu'il avait mené la conquête de nombre de ces mondes. Une gloire qu'il avait cependant eu à partager avec l'un des fidèles de l'Héritière, Darth Nesanto. Dellalt, cependant, luttait à son tour contre un manque de cohérence sur les plans logistiques et économiques. Isolée, elle l'était plus encore que les anecdotiques Jaminere et Jabiim, qui pourtant, avait vu à plusieurs reprises les forces loyalistes s'y implanter un taux d'urbanisation anecdotique. Des bases arrières, qui prises séparément, n'aurait guère suffi à appuyer longtemps le feu d'une guerre ouverte. Mais, ô combien de flèches multipliées ainsi sur un front de plus de mille parsecs ? Des temps de déplacement pouvant se calculer sur certains itinéraires en moins de cinq sauts dits de moyenne portée. Une action qui n'aurait pu être motivée que par un contexte des plus contrains. Mais, cette possibilité, ils avaient été plusieurs à la dessiner. Le " Défilé de la Mâchoire " entre Desevro et Makem Te, surnommé ainsi après les annexions Sith sur les Kossakii, demeurait un lieu d'autant plus périlleux pour les flottes républicaines que le conflit Sith tendait à accélérer les prises de risque des belligérants à ce niveau précis. Dès lors, un défilé criblé n'aurait pas permis à Ossus d'obtenir grand chose en si peu de temps.

Ces forces, en réalité, n'était pas stationnée comme pouvait l'être alors la Ve flotte, en embuscade sur la trajectoire du vecteur hyperspatial principal qui les avait présentement mené de leur position précédente à Ossus, afin de pouvoir tout de go, couper court à toute incursion, ou, probabilité aussi envisagée, devoir se "porter en avant" en un saut unique. A l'avenant, surgissant comme une volée de flèches dans leur dos, ou bien encore, barrant la route et provoquant derechef de sanglants remous par sortie intempestive de l'Hyperespace par l'activation intempestive des systèmes de sécurités hyperdrive par détection gravifique. Une méthode tout à fait... pirate.

Par pure nécessité le plus souvent, les forces loyalistes avaient dû souvent changer leurs blasters de hanche. En mouvement, souvent par petites escadres pour parer aux escarmouches des renégats, elles arpentaient leur domaine en se réunissant et se séparant à intervalle régulier, de telle façon qu'il soit impossible aux unités renégates tentant de passer d'un point à un autre, de savoir si l'effectif aperçu était bien seul, ou si le double était à craindre. Des manœuvres plus coûteuses en ressources, mais qui avaient permis à leur groupe d'indéboulonnable défenseurs de ralentir drastiquement la propagation Ramkenite depuis quelques temps.





Chaque pli avait été éradiqué. Dans le revers de sa botte, jamais la minuscule lame qui y demeurait n'avait bougée, garante de sa vie pour qui voulait la prendre.





A la guerre, il fallait, oui, bien compter ses ennemis. Mais aussi, le découvrait-on amèrement, presque avec ironie : pouvoir compter dessus. S'il avait fallu qu'Horakk pariât sur la réponse à "sur qui l'armada renégat aurait tiré en premier en débarquant ?", il n'aurait pas été sûr de revoir sa paye.

Car, fi de ses méthodes répugnantes, fi de son appétit pour le sang pur et des idioties vieilles comme la Sith, fi encore : Darth Ramken demeurait le Prêtre Sith qu'il avait toujours été, à déclarer avec morgue que la [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien] et que la conquête était un droit absolu. Là était toute la dure ambiguïté qui faisait que comprendre le conflit Sith depuis l'extérieur des frontières était sans aucun doute se payer un mal de crâne soutenu. Qui pouvait prédire encore les allégeance de telles personnalités ? Quel sacrilège envers ses propres principes... La seule chose était qu'on pouvait espérer, par la ruse ou bien le hasard, en tirer bénéfice.




Ses doigts aux couteaux crochus maladroits en guise d'ongle, firent un travail d'une curieuse méticulosité, lorsqu'il fallut boutonner sur les manches les revers.





Que l'un bouge, et l'autre suivrait. Qu'on s'avise à la hâte de penser avoir champ libre, et il aurait fallu regarder à Coruscant et Dromund Kaas pour viser tout à la fois. Derrière l'apparente simplicité de leur position actuelle, avait été tracé plusieurs triangles -où, nonobstant la gente renégate sans doute elle aussi à l'affût, on pouvait, si le besoin l'exigeait, quitté le couvert de systèmes secondaires pour rallier les nœuds du conflit.

Si Ossus pouvait bien demeurer seule, sans doute serait-ce parce que le reste flammes habilement attisée par toutes les parties dans leur volontés commune de se prémunir les unes des autres. Par un effet de domino, les mouvements de l'un engendrait les mouvements de l'autre. L'équilibre brisé, la réaction en chaîne se déclencherait à la manière d'une machinerie. Une poudrière de plus dans les siècles les plus agités depuis des éons.

Les renégats, dont le seul mot d'ordre avait été... la guerre ! Ces mêmes renégats, ne voulaient-ils pas avant tout, surtout, reprendre la marche ? L'occasion d'ouvrir la brèche de la Perlemienne, ce même écueil qui les avait encore arrêté, était réelle. Mais à quel prix.





D'un geste unique, délié, continu, le bras long et solide dégaine la lame millénaire qui veille à son côté, la présente, la contemple. Le métal vibrant chante encore.





Fallait-il finalement qu'ils aient été dispersés aux quatre coins, pour finalement redevenir la nation qu'ils avaient cru ne jamais pouvoir redevenir ? Puissant paradoxe. C'était la question qui hantait Horakk, alors qu'il avait regagné sa cabine pour y préparer l'improbable défi que le kaleesh avait relevé. Fallait-il qu'on leur brisât le cœur, pour que du cœur surgisse le renouveau de leur rage véritable ?

La flotte républicaine tenait toujours sa position, et le chaos n'avait été que de courte durée, avant qu'une attente improbable ne s'installe. On avait entamé une discussion plutôt qu'une mutuelle mutilation. Mais, curieusement, nulle incrédulité sur les traits impériaux. Seulement l'attente. A peine les plus jeunes et les nouvelles recrues, parfois au bord de l'insubordination, déclamaient-elles qu'ordre leur avait été donné de détruire toute forme de vie en face !

S'il n'anéantissait pas la flotte d'Ular'Iim comme cela le lui avait été expressément ordonné, Antarxarxès le savait. Darth Laduim n'y verrait qu'un échec - pire, une désobéissance. Il ne retiendrait qu'un seul responsable, et la sentence serait sans commune mesure à celle d'un rite kaleesh. Que Laduim lui-même ait montré les signes inquiétant d'une incohérence envers ses propres stratégies n'était peut-être, en définitive, que la marque que sa maîtrise du Côté Obscur avait fatalement conduit au seuil de la folie. Un mal commun, chez les gens de pouvoir.


Alors.
Quel choix lui restait-il, cette fois ?




La lame remonta lentement, pivotant sur l'axe rigide de son poignet. Dans le miroir, elle n'était plus qu'une ligne noire, unique. Une ligne de symétrie qui dessinait sa droite et sa gauche.



" Per voi, illustri. Per tie, padre. In questo giornei, onorerio il tuo nome.* "







La porte de la cabine s'était refermée, emportant ses secrets. Les dés étaient jetés. Il laissait derrière lui, ses hommes, son vaisseau, sa flotte.


Sa flotte, son vaisseau, ses hommes : tout ces possessifs ne pouvaient trahir qu'une seule chose. Horakk était devenu la Ve flotte, la Ve flotte était devenu Horakk. Par sa personnalité et son histoire, il en était le résumé à lui seul. Rien n'était caché, tout était lisible à qui voulait voir : les meilleurs secrets sont parfois ceux qui s'affichent avec ostentation. Tant et si bien que l'on finit par ne plus les voir. Pour lui, là était le seul véritable secret qui donnait alors la preuve que l'Empire était dans le vrai. Même débarrassé de l'incarnation du pouvoir, il tenait. Que cela lui démontrait-il ? Qu'en réalité, l'incarnation avait été sublimée, rendue à l'état d'archétype, trônant là où elle s'était finalement toujours trouvé : au-delà de la conception étriquée des corps. Un point invisible, le sommet de la pyramide : qui ne pouvait être atteint, seulement approché.


L'Idéal.


La minuscule silhouette disparut dans l'ombre de la navette, laissant en seul témoin dans cette cabine vide qu'un datapad ouvert sur un document que l'infortuné capitaine Hope aurait dû recevoir, et n'avait pas reçu... En lignes rouges sur fond noir, comme un testament presque tendre à l'égard de celui qu'il venait à peine de rencontrer, on pouvait y lire les réflexions d'Antarxarxès sur l'utilité et l'usage d'une 47-47. Un bien maigre leg pour qui devait affronter les lames de lumières.







En réalité, derrière les apparences du jeu d'égo, tout ceci ne dépendait plus d'eux. Bien avant leurs habiles manœuvre dans le cadre de leurs fonctions, les forces à l’œuvre -colossales et sans doute bien plus étendues qu'ils ne se l'imaginaient - eux, pauvres serviteurs sur ce plateau immense -avaient décidé pour eux du quand et du comment. Mais, mû par un instinct cryptique, peut-être lié par un destin quelconque, les deux âmes de guerre avait soudain introduit un paramètre improbable.

Comme l'oiseau file dans un nuage d'orage dont il ne peut contrer l'irrésistible force ascensionnelle, Horakk allait au devant du combat. Un appel auquel il n'aurait su résister. Il avait assumé jusqu'au bout cette chevalerie désuète, trouvée si souvent mièvre par les peuples étrangers, qui taxaient les siens de passéistes naïfs et d'arrogants maniérés. Bien imprudent aurait été celui incapable de discerner cette flamme au creux de son œil, car elle n'avait que peu en commun avec une colère ivre. C'était celle d'une résolution froide : il était temps.



Sur la large étendue métallique qui avait été dégagée de tout obstacle, un cercle parfait avait été laissé pour eux, de telle façon à ce que rien ne puisse contraindre leur avance respective depuis les deux hangars opposés.

Nul hymne, nulle alarme. Seulement l'écho rythmé de leurs pas sur le sol froid et dur.

Tout en lui s'était succédé. Il avait regroupé en un solide bagage tout ce que cette chronologie irrégulière lui avait appris, tout ce qu'il y puisait encore aujourd'hui. Mais on laissait au passé ses détours, car désormais se jouait une partie que l'on regardait avec perplexité, tant les raisons qui l'avait amenée apparaissaient obscures sans la lecture du synopsys. Lequel, même dans le cœur plein de passions virulentes de Virdis Granath, avait une qu'il pouvait se solder par la mort du brave petit soldat blanc.


Tous derrière et lui, devant.


Comme une flèche unique, l’Égide relâcha son guide dans le vide, le laissant filer vers un destin pour lequel il semblait avoir acquis des certitudes qui n'étaient pas de l'ordre de la simple pensée.


Le vaisseau impérial, en miroir de son homologue, vogua vers le milieu de l'étendue vide, où il s'arrêta, finalement, luttant contre les courants invisibles. On respecta les vœux des deux autorités militaires. Il n'y avait pas de décorum, pas de lumières, rien qui ne confinât au drame. Ni tapis ni estrades, ni machines, ni droïdes. Seulement quelques yeux, destinés à prouver par leur indiscrétion que les deux belligérants avaient respecté tous deux leur propre parole. Quand tout fut prêt, que les visages incrédules de ceux qui ne comprenaient pas se furent tourné vers la scène - car qu'était-ce, sinon ? - ils purent avancer vers le centre. Le hangar portait désormais en échos tous ce qui voudrait y sonner.



Qui l'aurait donc donné gagnant, ce pauvre fou ? A le regarder se mouvoir comme s'il ne pesait rien - et pour un homme, cela eut été le cas, car il avait les os creux de ses ancêtres - on ne donnait pas cher de son insolente blancheur. Avait-il donc l'âme d'un martyr, pour laisser ainsi ses fidèles manœuvrer pour lui en se jetant inconsidérément dans pareil combat ? Quel genre de conviction devait-on avoir pour se cheviller une telle détermination ? Après tout, il n'était qu'un alien, qui n'avait plus guère pratiqué de formes martiales autre que ses pieux exercices quotidien. Il n'était plus un soldat du rang depuis longtemps, et n'avait pas eu le loisir de devenir l'épéiste émérite qu'il avait un jour naïvement rêvé d'être. Rien qui ne fasse de l'ombre à un cyborg.

A peine toisait-il de quoi ne pas se tordre le cou pour soutenir le regard du dragon aux pupilles acides qui lui faisait désormais face sans aucun autre artifice. La machine, ruisselante d'un métal à peine dissimulé par ses vêtements, avait l'allure de ces forteresses de guerre qui se lançaient à l'assaut depuis les lignes Sith, d'un pas lourd promettant de broyer tout ce qui aurait le malheur de croiser leur routes. Elle avait les saccades des broyeurs mécaniques et le souffle d'une forge. Il devait bien atteindre les deux mètres, songeait Horakk en observant avec toute son acuité visuelle la scène qui se présentait maintenant. Une odeur s'en dégageait, qui n'avait que peu en commun avec les fragrances dont raffolaient les aristocraties qu'il connaissait.

Leurs âmes si différentes et pourtant si ironiquement complémentaires se confrontant véritablement pour la première fois. La Grande Histoire des comptines innocentes prenait soudain corps dans une configuration qui interrogeait les conventions.










Il était fin prêt pour la valse. Mais nulle loraccidée à sa poitrine, cette fois.

Les broches gravées du soleil rayonnant qui couronnait l'oiseau** sur l'épaule, une armée dans le cœur, cette fois, Antarxarxès ferait de nouveau Cavalier Seul.



















*" Pour vous, illustres. Pour toi, mon père. En ce jour, j’honorerai votre nom. "
** Référence au blason des Antarxarxès

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Récapitulatif des manœuvres:
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
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Ainsi sont-ils, face à face. Un espace libre, nu - pur a été dégagé. Un sol honnête, uniforme et sans pentes aucunes, une arène rectangulaire pareille à celles d’antan, sertie de lampes blanches cadavériques qui jettent sur cette scène leur lumière mortuaire. Un rivage où se sont échouées deux âmes, portées par le destin d’une galaxie. Sur leurs épaules, le poids de milliers de regards. Dans les ombres, de discrètes caméras. Pas un être de la flotte ne les verra pas. Ici ne se joue rien; que triomphe ou que tombe, les armées ne se lanceront pas à l’assaut. Mais les conquérants ont atteint un profond désaccord. Et leur seule entente est de le purger à ce combat.

Ainsi sont-ils, l’un devant l’autre, le grand reptile et le rapace. L’étincelante droiture, rigide, disciplinée du monde civilisé. L’élégance raffinée, la finesse incarnée par une lame fine comme un rayon lunaire entre les doigts gantés de l’officier; ses pupilles sont aussi droites que son arme, deux traits noirs qui découpent l’obscurité. Sur ses épaules une cape d’aristocrate, une broche sertie de son emblème. C’est en son nom bafoué qu’il viendra combattre et se venger, cet amiral. Cette lame...

Zerath la détaille du regard. Un tranchant d’ombre, un acier noir et pourtant ce manche si particulier...Ce n’est pas une arme impériale. S’il s’était penché plus avant sur les origines profondes de l’amiral, peut-être saurait-il comment appréhender cet objet qu’il n’a jusque là jamais observé. Son ennemi a une distance étrange c’est...Ah, bien sûr: il est gaucher. Un combat d’honneur, de chevaliers: à Zerath l’armure, à Horakk l’épée.

Car le Kaleesh ne porte dans ses griffes aucune lame, point de blaster ni même de bouclier. D’un geste il dégrafe sa cape, ôte son bracelet sacré. Le vêtement tombe en volutes dans l’air, dévoile en dessous l’habit précis du prêtre. Une robe curieuse aux manches en T, bleue comme l’aurore, parsemée de symboles rouges en langue étrange. Ce sont des talismans, qui miroitent sous la lumière, liserés de quelque argent jusque dans leurs fibres. Aux hanches, une ceinture robuste attache le vêtement à un pantalon noir bouffant. Les bras du titan sont avalés sous ses bandages blancs, quasi translucides car gorgés de leur épais liquide. Avec son étrange parfum d’encens et de plantes, de résines ou de quelque mélange savant de toxines, l’ancien seigneur de guerre s’avance vers son adversaire et d’une révérence profonde:

-Aal’iat tabt’sim Shrupak ‘fi dhaha aylai’jti mae. (Shrupak sourit sur cette rencontre) Je suis Zerath Ular’Iim, prélat de la Lune, gardien du temple de Shrupak. Pour les dieux et mes hommes, je vous montrerai flamme.

Il se met ainsi sans un mot de plus en position, inspire et apaise son esprit. Il peut faire confiance à ses membres. Il peut avoir confiance en ce corps qui est le sien. Inspirer, écraser l’égo, se libérer du soi...

Le prêtre se courbe mentalement sur l’instant, ferme les yeux.




***





“- (Traduit du Kaleesh) Une épreuve...?

Face à Zerath sont réunis dix des siens. Tous sont masqués, vêtus d’une couleur différente. Chacun porte un sceptre osseux, drapé de symboles. Il ne manque aux douze que deux: Zerath, agenouillé devant ses pairs, et Cin - encore en besoin de se reposer.

Ils se tiennent au sommet du grand temple, arrangés en demi cercle, l’Ular’Iim en son centre. Le toit est plat, couvert de disques concentriques gravés. À chaque extrémité où le bâtiment s’interrompt pour plonger dans le vide, des statues ont été sculptées, sortes de grandes ovoïdes creux. D’anciens mécanismes les font léviter, séparés éternellement de la terre ferme dans une danse infiniment lente - le rythme de l’éternité.

Les pluies et l’entretien régulier ont fait naître de belles plantes grimpantes colorées qui s’étendent en toiles luxuriantes. Un vent léger fait flotter en l’air le parfum du début d’été.
Tous se sont réunis, alors que la nuit est bien avancée. Les étoiles sont claires, on distingue dans le ciel aux teintes arctiques les nuances plus claires de la distante galaxie; ses bras constellés forment une ligne blanche où l’infini outremer devient presque saphir. Les onze se tiennent ainsi dans la confidence de l’obscurité; leurs yeux n’ont nul besoin de lumière pour se distinguer. Et ils n’ont là qu’à coeur de s’exprimer en pleine honnêteté: c’est affaire sérieuse pour laquelle on doit en cette nuit parler au gardien du temple.

- Vous n’êtes plus simple prêtre, ô lui d’Acier. Nous nous tenons à ce qui peut-être marque la fin d’une époque, mais vous êtes déjà tourné sur le monde extérieur; vous prenez part déjà aux grands rituels qui doivent s’y livrer. Vous devez prouver que vous êtes prêt à vous élever.

L’Ular’Iim demeure interdit, tandis qu’on amène devant lui une grande robe, de bleu et de rouge. Les mots s’y délient, sa langue natale telle qu’elle était utilisée il y a de cela sept siècles. Il sent son coeur se serrer au creux de sa poitrine. Cet habit est un linceul mortuaire, le Qath’br Aal’najm, la tombe des étoiles. On le réservait autrefois à ceux et celles qui venaient de trépasser; parfois aussi, à ceux qui attendaient un combat à mort, désespéré. Ses talismans encerclent l’âme pour lui assurer un voyage jusque dans les sphères astrales.

- Mon oeuvre n’est pas terminée.” commente froidement l’Ular’Iim. “- Il est encore des serviteurs des dieux mauvais qu’il me faut affronter. Loin de Kalee, dans des orbites où les étoiles sont étranges; tout ne fait que commencer. Il est trop tôt pour m’arrêter. Cette conquête ne fait que débuter...

- Vous ne pouvez vous arrêter, mais il vous faut renaître. Votre chrysalide vous a trop d’années enfermé. Pourtant vous avez devant nous effectué un miracle, ô lui d’Acier. Montrez nous en un second. Prouvez que vous pouvez effectuer la dernière forme de An’mia Tha’l Awt.

Zerath ouvre de grands yeux.

- La dernière forme?! Shaaz’rak parlerait-il par vos bouches? Il n’existe aucun Kaleesh qui puisse effectuer la dernière forme dans le respect strict de la tradition. Aucun qui ait jamais pu y survivre.

- Votre condition et vos miracles récents ont amené un doute, lui d’Acier. Si nous sommes les premiers à voir un prodige quand il s’est manifesté, d’autres pourraient songer là connivence avec celui qui a trompé...Si vous consentiez à provoquer nouvel exploit, alors certainement il n’y aurait plus le moindre doute sur votre légitimité.

Le vent fait bruisser les feuillages sur la toiture. Le frisson végétal est accompagné du souffle tiède de la nuit chaude.

- Xyrhydpakoï est vaincu. Sa menace est éliminée. L’honneur commandait et l’honneur a vaincu. N’ai-je pas assez donné, que sitôt triomphé l’on doive me questionner?

Il comprend, pourtant, trop bien et trop profondément. Ce n’est pas le fait que le paria ait été vaincu qui soit d’intérêt. Ce sont les monstrueuses choses qu’il commandait, ces monstres synthétiques qui ont posé un pied neuf sur Kalee; laissées derrière elles l’empreinte de la machine, une balafre ouverte à l’honneur de tous les guerriers. Zerath avait certes triomphé, mais il subsistait certainement un doute à présent parmi les siens, une appréhension qui existait depuis des âges et qui à présent s’était cristallisée.

Lui qui était machine, quelle preuve était-il qu’il fut encore celui qu’il avait été?

Longtemps, il avait été un estropié, en convalescence, perpétuellement torturé par ses brûlures qui ne pouvaient pas cicatriser, tout juste restées fraîches car exposées à la quantité inappropriée de bacta cicatrisant. Ensuite avait-il voyagé hors de son monde, vers ses croisades et ses conquêtes. La question de ses exploits arrivait parfois jusqu’à son monde distant, mais désormais il était revenu, dans le sillon de Xyrhydpakoï et de ses soldats sanguinaires. Et avec, plus que jamais le doute s’était ranimé.

Était-il légitimité à ce que ce qui n’était décidément plus un Kaleesh puisse encore au nom des dieux parler?

- Nous savons, plus que quiconque tout ce que vous avez fait...Mais quel autre miracle pourriez-vous effectuer, qui soit plus marquant, plus flagrant que celui-ci? Trouvez adversaire de valeur, lui d’Acier, et effectuez An’mia Tha’l Awt dans son intégralité. Revenez, de là d’où personne n’est jamais revenu et vous pourrez reprendre votre couleur ainsi qu’il devait toujours en être.

- Je dois ainsi prouver à ceux que j’ai sauvé ma propre valeur...En me soumettant à une danse mortelle, dont aucun n’est jamais revenu, face à un adversaire qui sera de mon choix et qui certainement désirera ardemment ma perte...C’est cela, l’épreuve des miens? De résister non pas à une, mais deux morts? Est-ce ceci que la gratitude pour vous avoir soustraits à votre abîme ?

- Ceci même. Niez votre épreuve, mais cela ne fera que doutes alimenter. À terme, un nouveau Xyrhydpakoï serait formé, de ces appréhensions qui menacent notre société.

Un silence s’installe.

Zerath considère et médite, silencieusement, les conséquences d’un refus ou d’une acceptation sur son monde et sur son histoire. Son mot et ses actes peuvent, maintenant et à tout jamais tout changer. Il se suffit parfois d’un rien, pour que s’enclenchent les grands rouages de la Causalité.

- Devant les dieux, sous la Lune mon symbole; j’accepte de me soumettre à l’examen de An’mia Tha’l Awt. Mais vous jouerez les prochains jours ses mélodies: je ne veux point m’y lancer sans faire un avec ses rythmes. À mon retour, vous me tempérerez à vos meilleurs brasiers.




***





Et maintenant voici Zerath, face à son adversaire de choix, cet impérial armé. Il inspire, délie ses bras, écoute attentivement sa mémoire à la recherche des musiques. Son cœur est lesté de stress. Comment pourrait-il seulement effectuer la danse, désarmé et maladroit contre un leste amiral, prêt et adroit? Il fait tourner ses mains, comme s’il manipulait quelque liquide invisible en apesanteur. Éteindre l’égo, noyer le soi. N’écouter que la musique, se lancer bercer et porter uniquement par ses inflexions. Sa main sera guidée par la Causalité et tout ce qui doit en ce lieu sera déroulé, savamment enregistré; les siens assisteront à son combat - fut-il même le dernier.

Il inspire à nouveau, tire hors de sa mémoire d’abord les tambours. Ensuite, les coquilles en os bardées de billes, les sarcas. Les glaars, cordes frottées, résonnent en accords.

Puis Zerath fait trois pas en avant, un sur le côté. Il s’arrête, se met en équilibre, et la danse martiale débute.

Ce n’est pas la forme stricte, cela il le sait; il a gagné en confiance, envers son propre corps, mais il n’a pourtant pas assez de pratique martiale. Ses mouvements sont gauches. Il étend les bras, sur les côtés, invite à l’assaut, se dérobe, mais ses tours manquent encore de vivacité. Sa seule grâce salvatrice est certainement ce rythme étonnant, inégal, surprenant avec lequel il se déplace. Aucun guerrier n’attendrait d’un cyborg monstrueux des mouvements pareils, moins encore de danse. Autour de lui, le liquide perle et gicle en grosses gouttes humides, éclabousse son propre corps autant que le sol. Le parfum capiteux transporte vers des landes étranges, une odeur piquante, agressive et ancienne.

Le prêtre, qui tenait ses mains devant lui, change sa pose. Fin du premier appel, et ses gestes se font différents. De l’assaut à base de ses bras, il passe soudain à ses jambes! Piétine le sol, frappe de son poing gauche l’air. Aucun coup ne trouve sa cible; ses mouvements sont trop amples, ses mouvements encore trop télégraphiés. La danse dans laquelle il est absorbé a le bénéfice de n’être une mélopée connue que de son propre esprit, mais il faut plus qu’une chorégraphie pour faire un guerrier. La lame de son ennemi, simple, rapide, tranche déjà à l’épaule, déchire les étoffes, bat en retrait tandis que le grand cyborg bat vainement l’air là où se trouvait son adversaire.

Gauche, droite, non, il faut feinter, il ne doit pas faire la chorégraphie bêtement. Songer à la façon dont il a pratiqué ces danses, on ne fait pas les séquences bêtement répétées.

Zerath, brusquement, prend conscience de l’assaut. Deux pas croisés, retour en arrière. Il perd son rythme, Vorpale manque de peu les hanches en vrombissant. La taille gigantesque de Zerath contre son ennemi plus modeste lui donne à défaut d’un avantage offensif un de défense: son allonge largement supérieure. Il respire, contrôle son souffle. Reprenons à la prochaine portée.

Puis il se relance à l’assaut. Doit-il tenter un coup de pied? Non, il perdrait l’équilibre, se cantonne à une feinte, suivie d’un coup de poing. Ce n’est pas la danse du vent ici. La première forme de An’mia Tha’l Awt est une danse de pluie et en effet, Zerath aussi bien que les alentours sont bientôt fort humides. Mais cet amiral, lui, n’a subi aucun coup. Il est ainsi que Balian...Non, non il est certainement plus faible. Mais cette lame...Les griffes de l’Ular’Iim palpent son masque de métal, où une entaille a été faite. Cette lame peut le tuer. Dans ce combat, il court un véritable danger.

Ô Shrupak. Vois ton gardien, prêt à s’élever.

Zerath fait trois pas chassés en avant, reprend à contre-temps, frappe mais la lame - c’est singulier! le dévie. Son bras gauche fait un geste brusque, une tentative d’éclabousser le visage de son ennemi mais la hauteur est mauvaise, Horakk est trop petit. Sa lame, Vorpale, entre ses doigts vrombit. L’Ular’Iim, instinctivement, ramène sa main au contact de l’épée. Cruelle erreur. Entre ses phalanges, la lame mord le métal, le découpe, dévore centimètre par centimètre, tranche la métacarpe artificielle, avale jusqu’au poignet, remonte, presque jusqu’à l’articulation. Les vibrations haute-fréquence, plongées dans un milieu humide, font des pluies de gouttelettes qui éclaboussent presque totalement le prêtre. Ce n’est en outre que par la résistance immense de son corps unique que Vorpale n’a pas déjà tranché le bras pour remonter jusqu’à sa nuque.

Le prélat, de son poing libre, tente un assaut. Horakk, svelte et agile, libère sa lame et prend un moment une retraite. La main gauche du Kaleesh est désormais proprement inutilisable; ses doigts bougent erratiquement, le poignet se tord, épileptique. Mais cet Horakk...Malgré ses plumes...Cet aigle, aux serres mutilés...

- Vous combattez comme un homme, admirablement frappé.

Sa seule main restante - la droite - vient au niveau de son poignet mutilé. Avec un crissement et pourtant une aisance déconcertante, l’articulation se brise. Le monstrueux alien de métal arrache sa main, libère pleinement son avant-bras, à présent séparé en deux moitiés parallèles, comme un cours d’anatomie étrange où l’on assisterait à la démonstration du radius et du cubitus sur quelque maquette. Entre les filins d’acier, distendus par la main arrachée, des fils - veines étonnantes - pendouillent mollement dans l’air...Crépitent encore d’énergie.

Il est temps. Les premiers mouvements n’ont pas marché. Maintenant son ennemi sait à quoi s’attendre, il ne peut plus mener cette mélopée ou il sera simplement terrassé. Il doit passer au mouvement suivant, à celui mortel.

Il amène son bras intact à l’horizontale devant lui, comme s’il se fut accoudé. Au-dessus, exactement superposé, son bras gauche et ses fils suspendus.

- Mais combattre comme un homme pourra-t-il vous sauver...?

Depuis les fils, les étincelles bondissent, droit sur les tissus blancs en dessous, détrempés et odorants.




***





Sur le pont de l’Horizon Écarlate, Zurukk observe le duel, mais coordonne surtout ses équipes. Ses hommes sont rivés sur l’hologramme, à raison, mais il faut bien continuer à mener l’opération. Ular’Iim, cet imbécile, est parti à ses duels à mort droit dans un piège au milieu des troupes adverses, mais on a toujours des hommes engagés, il ne faut pas l’oublier. Des hommes infiltrés dans le Melantha, qu’il va bien falloir d’une façon ou d’une autre exfiltrer. C’est d’ailleurs la réflexion actuelle du commandant.

- Nous ne pouvons tout simplement pas approcher la flotte maintenant qu’elle est réunie, ça serait de la pure folie. Un second transport est donc hors de propos.

- Mais on ne peut pas décemment les laisser en plein cœur adverse. Ils se feront tuer si rien n’est fait.

- Un mouvement vers l’Empire pourrait être très mal interprété et relancer directement les hostilités.

- Quels étaient les ordres du Commander à ce sujet?

Zurukk s’agace un moment puis concède:

- Il veut que la tour SilverLine serve aussi de relai à l’Empire, pour exploiter le moment où leurs communications seront de retour. Leur attention sera focalisée sur les nouvelles entre sol et orbite pendant quelques secondes, ce qui pourrait donner au transporteur Thunderclap une fenêtre pour passer en hyperespace.

- Un cadeau empoisonné sommes toutes.

- Commandant, communication entrante du sol.

Le gand se déride sous son masque un moment, alors qu’apparaît l’image d’un humain trapu. Le visage trempé de sang qu’il est à présent en train d’essuyer, il effectue un salut neutre du menton.

- Capitaine Darsch au rapport, la tour SilverLine est nô-...Mais...Commandant Zurukk? Où est Ular’Iim?

- Il a demandé un duel honorable contre l’amiral impérial et s’en donne à présent à coeur joie.

Le capitaine ouvre des yeux médusés puis se masse les tempes.

- Oui...Bon, les communications sont prêtes à être relayées, quand vous voulez.

Zurukk se tourne vers les fosses, à ses techniciens il indique de se brancher sur SilverLine. D’ici quelques minutes, on retrouvera enfin pleinement contact avec le sol. L’information honnête, entière et pleine.

- Excellent travail capitaine. Maintenant que le relai est ouvert, assurez vous que la zone demeure sécurisée.

- Dépêchez vous d’envoyer du secours, commandant. C’est vraiment le chaos en centre-ville. Y’a pas que des impériaux, tous les rats sont de sortie.

L’hologramme disparaît. Marbo commente immédiatement:

- On a le couloir d’évacuation, maintenant faut décider des priorités.

- Remettre de l’ordre dans la capitale.

Une matelot vient, lourd dossier en main. Salut militaire, le dos droit elle annonce tout en tendant la tablette:

- Commandant, nous avons reçu des communications officielles de l’AGPU.

Zurukk avec un remerciement s’en empare, consulte avidement les lignes, que son collègue reçoit certainement au même instant sur son propre navire. L’Empire ordonne la retraite de ses troupes, et l’AGPU souhaiterait que la République fasse de même? Que l’Empire s’en aille, Zurukk peut le concevoir, mais la République? Et abandonner tous ses hommes et dignitaires à leur sort, dans un chaos dont on ne comprend pas encore pleinement l’étendue?

- Contactez madame Méridan. Il faut en savoir plus.

Sitôt dit, sitôt fait; le visage maquillé et élégant de la femme à la carrière politique tumultueuse apparaît bientôt face au gand.

- Madame Méridan, mes respects. Je suis le commandant Zurukk.

- Bonjour commandant, Je pense deviner la raison de votre appel, vous avez sans doute écouté mon intervention et vous avez sûrement besoin de précisions. Sachez que la situation sur terre est critique, ainsi je ne passerai pas par quatre chemins : je vous implore de vous retirer dès le départ de la flotte impériale. Je compte sur votre bonne volonté, personne ne vient en fait sauver Ossus. Aucune flotte coalisée n'est en chemin, ce n'était qu'un coup de bluff pour forcer la main de l'Empire. Seule notre République est réellement en mesure de défendre les Mondes neutres, ils ne feront jamais le poids eux-mêmes. Allez, partez, ainsi nous conserverons le beau rôle et resterons alliés avec eux.

Il fronce les sourcils. Le beau rôle? Des vies sont en jeu, il n’est pas de son rôle de décider de la politique. Les ordres de l’État-Major sont d’éviter l’affrontement, mais pas de laisser des victimes à leur sort. L’amirale est toujours en bas, quelque part...Peut-être à souffrir. Et l’ancienne sénatrice voudrait...qu’on abandonnât-là tous les camarades qui continuent à livrer le combat, isolés et perdus?

- Madame Méridan, j'ai reçu des rapports inquiétants du sol. Voudriez vous que nous abandonnions nos hommes à un tel chaos? Le Commander a...Réussi à stopper les hostilités avec la flotte impériale. C'est l'occasion pour faire descendre nos équipes médicales, sécuriser le périmètre, ramener l'ordre. Ossus fait-elle seulement quoi que ce soit à cet égard?

- Depuis les explosions, plusieurs groupuscules se livrent bataille à travers tout Knossa. Rassurez-vous cependant, les autorités ossiennes ont les ressources pour faire face. Il est vrai que nous manquons de personnel pour porter assistance aux personnes mal en point ici. Pourriez-vous donc préparer vos équipes médicales, mais ne pas les déployer avant que je vous le dise. Aussi, faites s'il vous plaît en sorte que celles-ci revêtent des vêtements neutres ou leurs habits civils. Il est préférable qu'il n'y ait aucun militaire armée et aucun bâtiment équipé de canons sur le sol d'Ossus.

Avant que je vous le dise? La ralltiirienne pense-t-elle commander maintenant l’armée? Peu amène de devoir suivre les ordres de Ular’Iim, Zurukk ne va certainement pas ployer l’échine devant une femme civile qui n’a pas place au gouvernement - encore moins à l’État Major. Laisser la direction d’un déploiement à quelqu’un sans la moindre formation, la moindre expertise, la moindre intuition? Autant se lancer à la nage dans l’espace sans combinaison et espérer que cela fonctionne!

- Je crains que le déploiement ne puisse être mis à la charge de votre autorité, si respectable soit-elle. Les délais militaires ne sont pas ceux civils, et il faut traiter avec urgence toute blessure blaster. Nous avons établi et sécurisé un couloir de débarquement médical, mais les canons sont nécessaires. Vous dites vous mêmes que des groupuscules bataillent, on envoie pas les médecins sans une couverture militaire acceptable. Nos hommes n'ont par ailleurs pas le loisir d'une garde-robe fournie, je crains que l'habit civil ne soit hors de propos.

- Dans ce cas, je crains que vous ne soyez obligés de passer par les autorités locales, et celles-ci ne vous autoriseront pas à débarquer.

Elle a certainement raison. Knossa ne se défend pas en orbite à cause de la surprise d’une part, de l’inexpérience aussi sans doute des flottes de Ossus et de leur nombre restreint qui empêche toute riposte contre les mastodontes républicains et impériaux. Mais décrier la République comme l’Empire ensuite, cela serait probablement dans les cordes de tout le beau monde. Et Ular’Iim ayant laissé la responsabilité de la flotte à Zurukk et Mabro, nul doute qu’en cas de soucis c’est à eux qu’on fera la peau. Il faut être plus futé.

- Madame, mon supérieur est en train de lutter pour épargner aux populations locales une bataille qui ferait. (Il désigne l’hologramme derrière lui. Le Commander gigantesque affronte à mains nues le petit amiral éclatant à la fine lame. Ses mouvements sont étranges, mais il ne parvient jamais à toucher et semble plus un buffle harcelé par une guêpe qui n’a de cesse de le piquer.) Faites ce que vous avez à faire avec les autorités ossiennes, mais sachez que je ne peux tolérer de retards pour la survie de mes hommes et que c’est là ma priorité. D’ici dix minutes, il me faudra les autorisations pour poser mes équipes au sol,, sans quoi le bilan de morts ne fera qu’augmenter - et vous en conviendrez ce n’est même pas de notre fait.

Un sourire amusé déride les traits de l’ancienne politicienne au visage pouponné.

- Mon bon monsieur, j'apprécie que vous me fassiez part d'un spectacle assez divertissant digne des plus grands duels de lucha libre. Je suis cependant au regret de vous annoncer que je ne peux pas vous servir de messagère. Pour obtenir de telles autorisations, vous devrez directement traiter avec le gouvernement ossien et la police locale qui sont déjà en train de reprendre la situation en main et de s'occuper de nos soldats.

Mais pour qui donc se prend cette femme, s’interroge Zurukk. Cependant s’il n’a pas à traiter avec elle et son insolence, la situation n’en sera que plus facile. Il ne manque qu’à donner les ordres et raccrocher cet appel après quelque politesse sommaire...

Des cris surpris sur le reste du pont font pivoter le commandant sur son axe. On montre, on pointe, vers l’hologramme du duel. Ular’Iim serait-il donc mort ou vaincu? Enfin, songe l’officier. Cela ferait certainement du bien à l’armée, un en moins chez les illuminés. Mais Zurukk est stupéfait. La tablette résumant les communications tombe de ses mains.




***





L’étincelle bondit, avec la lenteur de mille années, touche le tissus amplement humidifié. Le coeur du prêtre bat la chamade. Cet en cet instant que tout doit basculer. Maintenant, maintenant il est lancé. Les tambours de sa mémoire sont loin. L’univers est prêt à chavirer.

Des flammes écarlates déchirent soudain les flancs des bandages autrefois blancs, s’ouvrent en langues ronflantes, tout le textile s’engouffre en grandes lampées, de rouge, de vert, même ici de crépitements bleutés. Les lumières blanches cadavériques trouvent sur leur scène une nouvelle lueur, un dragon onirique.

An’mia Tha’l Awt: la danse de l’Étoile Mourante.

Le Kaleesh avale la distance, son coeur prêt à éclater dans son torse. Ses yeux sont chauffés à blanc par les flots de nuées aux nuages ardents. La danse n’a plus court, à présent, c’est le dernier mouvement, la mort du guerrier, l’ultime souffle de celui décidé à se sacrifier. L’Ular’Iim, pour la première fois depuis des années ressent un sentiment longuement oublié.

La peur.

Ces flammes amènent un souvenir mordant, un traumatisme profond que son corps n’a jamais pu oublier. Et sa peur, cette terreur sourde, pourtant, le plonge dans un état d’inconscience suprême - une transe sublime. Il frappe par-terre, rageur. Les langues brûlantes naissent et fleurissent sur le sol. Il manque Horakk, se nimbe, toujours plus brûlant, brutalise, tournoie, martèle, son désespoir et sa détresse se muent et se subliment en frénésie.

Il n’a plus conscience du monde qui l’entoure. Les vaisseaux, flottes, guerres, croisades, tout disparaît.

Ne compte plus qu’une chose et une seule; la chaleur qui l’aveugle, son ennemi qui tombera, ici et aujourd’hui.

Les multiples éclaboussures, bientôt prennent braise. L’habit tout entier, des pieds aux épaules, devient une gangue d’asphyxie. Zerath inspire les vapeurs brûlantes. Les lointaines blessures reviennent immédiatement en mémoire. Un frisson de rage et de démence. Il hurle, frappe. L’étrange machine dansante s’est éclipsée: au loin les mots, au loin les mouvements chorégraphiés, méthodiques et bien pensés. Il ne demeure qu’un monstre halluciné, démon frénétique et déchaîné, une vision surnaturelle que seule une planète de folie décadente aurait pu seulement imaginer.

Chaque coup est toujours plus effréné, à mesure que grandissent les flammes et que disparaît le jour artificiel. Chaque pas fait naître un nouveau brasier où se démène dans une brutalité rarement dévoilée l’alien aux yeux gorgés de fièvre épouvantée et furieuse. Les habits n’ont plus qu’une substance; ils ruissellent en étincelles et en braises, à mesure que grandit - torrent impétueux - le feu souverain.

Sur les ailes de la folie et d’une envergure embrasée Zerath tournoie, frappe aussi bien de son poing que de son bras disloqué, tonne, inspire, hurle, s’échine puis se redresse dans son plumage incandescent, déboussolé et attiré par le mouvement. L’incendie ronronne de contentement, les flammes réclament: plus! Plus! Plus! Aspect extravagant d’un dieu malfaisant, l’Ular’Iim s’envole et retombe, ses griffes déchirent le sol, la bienséance s’est consumée dans le bûcher de ses anciennes peurs. Ne reste dans les cendres qu’un instinct déchaîné, le Démon de la Guerre pleinement libéré, sans conscience et pour seule âme la fureur. L’image la plus nette du Berserker. Il n’a plus connaissance de son nom, de sa fonction, ni même de ses aspirations: tout s’effrite, tout disparaît.

Plus! Plus! Plus! Réclament les flammes!
Étoile mourante, étoile brillante.
Dans ton sillage, dévore les mondes!
Arrache les cieux et la terre!
Détruis comme tu éclairais l’univers.
Consume tes amours, sacrifie ton âme!



Soudain descend du ciel une pluie inespérée. Les alarmes résonnent, bientôt toute la zone devient vapeur chaude et fumées noires, tandis que les dispositifs anti flammes se déclenchent en douches froides. Des nuages blancs roulent du sol, deviennent gris en s’élevant, s’étirent en murs brumeux.
Zerath reprend pleinement conscience de son lieu, tandis que la dernière étincelle achève de périr, inspire profondément, tousse dans les vapeurs toxiques, s’observe un instant. Tous ses habits ont disparu, laissant des marques noires de suies, qui descendent à présent en torrents sales, sous la pluie torrentielle qui baigne la salle.
Cela était fou - c’était même parfaitement insensé. Et pourtant...

Pourtant sa conscience ne s’est-elle pas un instant complètement abandonnée à ses instincts? N’est-ce pas cela, finalement, que son âme...? Il...A-t-il réussi...? Il observe la brume blanche. Son Qath’br Aal’najm a été complètement consumé. Il s’est libéré de la tombe des étoiles. Il a survécu à la danse de l’Étoile Mourante. Il...

Ses yeux remarquent alors, dépassant entre son torse et son abdomen, un manche, une poignée.

Une garde d’épée. L’armure a été profondément pénétrée, la morsure est nette. Alors que l’adrénaline redescend, Zerath sent un flot de douleur remonter de son torse jusqu’à son épaule. C’est...C’est son foie qui a été transpercé. De part en part. Il sent qui s’étend comme du pétrole dans une mer sombre, la souffrance, ramper dans son dos, monter jusqu’à l’omoplate. L’angoisse, avec, qui empoisonne ses veines.

Sans jambes pour s’effondrer, le colosse reste debout. Sans visage à montrer, sa pâleur reste dissimulée derrière une expression figée. Ses yeux sont trempés sous la pluie continuelle et glacée. Après les nuées infernales, un orage glacial pour noyer les ardeurs, tempérer les clameurs. Cette douche froide ramène le vieux prêtre à son calme compassé. Il ne sent pas de particulière fatigue physique, mais la retombée d’adrénaline, pourtant, l’a comme ankylosé - peut-être surtout est-ce la blessure, une lassitude mentale aussi. Cela il ne saurait le dire.

La lame ne vibre pas. Sans doute faut-il la tenir et presser un interrupteur spécifique pour cela.

Il...Il sent sa conscience qui lentement s’échappe...Le monde qui est prêt à disparaître...Va-t-il mourir...?Profonde inspiration.

Éteindre l’égo, faire disparaître le soi. Son esprit est intact. Il a traversé pire épreuve; qu’est-ce qu’une lame muette, contre des tonnes de gravats incandescents? Une piqûre de moustique certainement!

Comme pour se forcer à se maintenir conscient, l’esprit du Kaleesh s’accroche à ses interrogations, tandis que l’eau en torrents continue à s’écouler de chaque pore de son armure, ruisselle, perle le long de la garde et de cette mortelle ouverture dans son corps. Là s’écoule à petit flot un mélange rouge et bleu; le sang qui se mêle au kolto. Pour quelle raison son adversaire aux plumes de lumière a-t-il abandonné sa lame ainsi plantée? Peut-être a-t-il frappé alors que les flammes ne commençaient qu’à naître. La chaleur menaçante de Zerath l’aura fait battre temporairement en retraite, où l’astucieux amiral aura attendu que son adversaire devenu féral ne se consume dans ses propres flammes? Il serait ambitieux de penser avoir réussi à ne serait-ce que le toucher.

Le cyborg immobile, ses jambes verrouillées, sent la souffrance qui le martèle constamment. Cela n’est rien, rationalise son esprit. Des années durant, il passait nuits et jours avec l’impression que ses chairs se liquéfiaient de brûlures. Non, ce n’est rien, relativise-t-il. Si ce n’est que de la douleur, le Commander ne s’arrêtera pas. Le brouillard apaise ses yeux meurtris. La vision thermique n’a pas que des avantages; voir de si près des flammes a toujours été un spectacle absolument douloureux. Et inspirer les vapeurs...Nul doute que les médecins seront furieux. Mais cela est certainement pour le mieux.

Ainsi se tient le colosse de fer, prélat de la Lune. Son bras gauche est lacéré presque jusqu’au coude, sa main est arrachée. Les fils en pendent mollement, crépitent au contact de l’eau. Son corps entier est maculé de suie, qui peu à peu disparaît, s’écoule en ruisseaux sombres. Et en son torse, ancrée - comme en ayant toujours fait partie - cette longue lame noire. L’épée a trouvé son armure.

Alors que les brumes commencent à retomber, l’Ular’Iim aperçoit se découpant dans les vapeurs, plus blanche encore, la silhouette de son adversaire. Il inspire profondément - s’arrache une quinte douloureuse - et se met poings en avant, au bord des limites de sa conscience, retenu debout par sa seule volonté. Il peut supporter cette douleur...Il le doit. Il n’est pas encore vaincu. Et par les dieux, il sera celui encore debout.

- K’hoti. (Viens)

Les règles sont inchangées; l’un contre l’autre, à qui voudra bien l’emporter. Mais cette fois, Zerath ramasse dans les cendres un petit objet: c’est un couteau orné, couvert de suie noire. Un cadeau d’autrefois, un cadeau d’Arda. Son manche orné dit “Seules les eaux calmes reflètent la Lune”.
Et dans cette curieuse symétrie erronée, où l’on a étrangement les armes inversées, sous cette pluie artificielle, Zerath a pleinement repris son calme.


Spoiler:
Horakk Antarxarxès
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Unité de temps, unité de lieu, unité d'action.


Leur théâtre avait le dénuement qui convenait : dans le cadre de l'affrontement selon les rites les plus immémoriaux traitant des questions d'honneur, on retrouvait immuablement ce "retour au centre", de l'individu contre l'individu, de la restriction des recours à un unique choix. Celui de l'arme. Rien, sinon les témoins donnés pour attester de la réalité du respect des règles tacites.

Au milieu de ce néant proprement aménagé, les yeux électroniques retraçaient leur parcours solitaire en silence. L'écho lointain des réacteurs et des activités du vaisseau étaient désormais les seuls signes de vie autour d'eux. Dans ce mutisme pesant, leurs pas s'étaient peu à peu éteints, alors que la distance qui les séparait avait achevé de décroître. La fin étrange d'une première phrase d'un curieux discours.

Derrière les rideaux symboliques, le public militaire partout fut invité à regarder. Mais que voyait-il ? Que comprenait-il de tout ceci ? Sur les visages hétéroclites, on pouvait lire tout le spectre des sentiments nés des consciences. La surprise, la perplexité, la fascination, la colère, l'anxiété, le rire, la moquerie, le mépris, la haine, le désespoir, l'indifférence, la lassitude...

C'était une déferlante de commentaires, de pronostics, de questions sans réponses. L'absurdité de la scène sautait aux yeux de certains : pourquoi confier le soin de régler ce genre de conflit à deux meneurs somme toute bien peu combattants eux-mêmes ? De tous les champions de la flotte, fallait-il risquer de perdre le commandement pour des motifs somme toute obscurs ? Si leurs armes les plus impressionnantes ne peuvent suffire à départager franchement les parties prenantes de ce différent, en quoi leurs étendards pouvaient-ils y remédier en s'étripant mutuellement ? Dans les rangs, la jeunesse des spectateurs rendaient l'aspect traditionnel et symbolique de cette lutte singulière illisible.

Sur l’Égide, on savait Antarxarxès adepte d'us et coutumes désuets, de sa culture on connaissait les aspects les plus extérieurs, de par le rayonnement ancien de son monde d'adoption. Mais l'aurait-on pour autant cru capable de s'avancer ainsi seul, dénué de protections, même minimale, arme vétuste à la main, marchant avec sa rigidité martiale droit sur le républicain, sans l'once d'une hésitation ? Quel carambolage d'interrogations se produisait dans les esprits de ceux qu'il avait côtoyé tout du long, lorsqu'il dévoilait ainsi un contradictoire mélange de sagesse et de folie furieuse ? De courage suicidaire et de fierté mal placée ? Qui était-il donc, ce grand amateur de discours si flamboyants, dont le calme souverain leur faisait d'ordinaire tant d'effet, pour se laisser soudain emporter à se battre contre un autre officier ?

Sur le pont de commandement dont il avait à présent la charge, Virdis Granath ne pouvait s'empêcher de contempler régulièrement l'hologramme. Le sergent Mii'Shel refusait de croire ce qu'il voyait : ce devait être une diversion, ou un artifice quelconque. Le jeune capitaine Fost était livide, incapable de comprendre une telle décision. Depuis le Sibyllin, la stupéfaite fascination de Dremilcol aurait été complexe à reproduire tant elle relevait d'un improbable mélange.

L'image en elle-même était si frappante qu'elle avait eu l'effet escompté.

De parfaitement ridicule pour les détracteurs des traditions guerrières, de monumentale à ceux qui les glorifiaient, l'holographie des deux silhouettes en face à face n'en avait pas fini d'alimenter les avis de milliers de paires d'yeux. Sans doute pour des années.

Tel était leur but inavoué, et pourtant si tacitement révélé à qui voulait bien le voir. De simples meneurs de flotte, ils étaient devenus symboles pour les leurs.

Mais dans le secret du cœur, était-ce différent ?

Comme à travers un rêve, une moitié de réalité plongée dans la brume d'une foule de pensées, Antarxarxès était tout à la fois présent et absent. Plus présent que jamais, de par ses sens parés à appréhender le plus proche, sur le qui vive, avec cette lucidité particulière qui précède toute les épreuves auxquelles il se préparait. Totalement absent en lui-même, car en esprit planant très haut, ailes déployées, contemplant avec cette petite nostalgie à la fois le passé et le futur, les sillons extraordinaire qu'on y avait dessiné pour les lier.

Parvenu au seuil du combat, Horakk avait lentement rassemblé tout son être, comme on se ramasse avant de bondir.

Il le savait. Seule, jamais sa force ne lui permettrait de venir à bout d'une telle masse de métal animé. Eut-il passé ses derniers mois dans les salles d'entrainement à gravité double que sa masse musculaire n'y aurait suffi. Il n'était pas un gamorréen, ni un wookie. Non, ses atouts étaient ailleurs, et il lui fallait en user avec finesse.



L’une a des ailes et, légère, vive, feu, provient des cieux, du chaud et du sec, du vif et du souple. L’autre en est dépourvue, et, lourde, monolithique, eau, provient des tréfonds, des abysses, de l’humide et du froid, du lent et du solide, du rigide et du dur.



Il avait donc fait son choix. Qui n'avait pas été bien complexe. Comme jadis sur les terrasses ensoleillées de Saffia, il devrait devenir le vif et le souple, sa seule chance d'égaler en puissance le rigide et le dur que la marche du monde lui opposait. Ce choix pouvait à lui seul résumer tous les autres, peut-être.


Il sentait sous la paume rugueuse de sa main le relief discret de la garde de la Vorpale. Depuis quand n'avait-elle plus été maniée par cette même main ? Des mois, des ans ? Horakk se savait rouillé. Il savait aussi toute la complexité insoupçonnée de la relation qui s'était discrètement établie entre l'arme et lui. Son apprentissage de l'escrime avec les vieux sabres d'entrainement d'Adonay ne souffrait pas la comparaison avec tout le délicat apprivoisement de l'animal sombre qu'était cette lame antique.

Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?

Lame dont il avait hérité, lui, improbable ajout à cette lignée dont on perdait la trace dans la spirale du temps. D'où venait-elle ? Qu'était-elle ? Comment était-elle parvenue jusqu'à lui ? Il s'était souvent posé ces questions-là. Sa vie lui avait donné peu d'occasion d'en explorer les possibles réponses.

C'était pourtant à cette arme-là qu'il confiait sa vie. A ce mystère-ci qu'il allait laissé le soin de faire ce pourquoi elle avait été forgée : défendre, attaquer, et châtier au nom d'un Antarxarxès.










" Ma gaucherie est grotesque, enfin ! Je suis las de me ridiculiser ainsi devant vous, Enechias. Laissons donc ce genre d'exercice pour un temps où je serais un adversaire un tant soit peu intéressant...!

-Que nenni, mon bon élève : que vous apprend-t-on dans cette marine ? Que les choses faciles sont préférables aux vrais progrès coûteux pour votre personne ? Ramassez-la. Recommençons, encore : le soleil ne se couchera pas avant trois longues heures. C'est plus qu'il ne m'en faudra pour vous forger d'autres postures, je vous l'assure !

-A quel prix ? Devrais-je encore boiter pendant des jours pour cela ?

-Et plus encore ! Dussé-je vous faire vous rouler à bas de votre lit pendant des mois, Horakk, je ne vous lâcherai pas. J'en ai fait la promesse à votre protecteur, et je ne suis pas du genre à me défaire d'une parole, croyez-moi. "

Le visage tronqué d'Enechias Malvern tentait vainement de rire. Son teint maladif et sa mâchoire artificielle étincelante donnaient à cet élan spontané à l'échec assuré une telle aura de tristesse qu'Horakk en eut mal. Il fit de son mieux pour rendre l

" Fort bien... Recommençons, donc. "

Son bras endoloris vint chercher au sol le vieux sabre élimé, dépourvu de tout tranchant et de tout appareil qui aurait pu lui donner les qualités d'une authentique vibro-épée. Son être, déchiré par les courbatures et les coups dont il venait d'écoper toute l'après-midi durant, le supplia avec ses propres maux de laisser là son entrainement. Le poids de son arme factice avait triplé depuis qu'ils avaient commencé.

Il fallait ne jamais rester parfaitement immobile. On bondissait du bout des pieds, sans jamais poser son talon, avec une vivacité qui, lorsqu'elle prenait les couleurs d'une véritable maîtrise, mettait l’œil au défit de suivre. On contrôlait ses deux bras, sans jamais avoir à les regarder, l'attention mobile partout à la fois, prêt à frapper jusque dans son propre dos. Les poignets et les chevilles se devaient de ne presque pas exister, d'être si lâche et si tonique à la fois qu'un manque de constance pouvait se solder par des blessures irréversibles chez un être humain. Horakk, en revanche, avait l'avantage de n'avoir pas à craindre quelque chose d'aussi grave, de par l'épaisseur de ses membres plus robustes que ceux des hommes.

Le jeune rishii, la vingtaine, léger, preste, se déplaçait pourtant avec de moins en moins de facilité à mesure que la fatigue le gagnait. Attentif aux indications, comprenant à chaque répétition ce qui n'allait pas, il ne parvenait néanmoins pas à anticiper autrement qu'en pure possibilité mentale. Son corps ne suivait guère, et son arme de fortune ne se plaçait que rarement au bon endroit au bon moment. Ses postures, trop académiques et encore empreinte de la naïveté d'une théorie peu habitée, ne lui suffisait plus face à un bretteur de cet acabit. Son professeur avait une patience infinie, et presque, aurait-on pu dire, une passion pour cette nouvelle tâche qu'on lui avait confié. L'homme prenait son temps, commentait chaque action avec force détail, et ne se privait pas d'appuyer ses démonstrations par l'action. Horakk apprenait à un rythme soutenu, se défendait de son mieux.

Mais, invariablement, la vitesse de l'ancien Sith le prenait par surprise. Tout en retenue, le cadet des Malvern restait un fléau une arme à la main, et sa véritable nature finissait par ressurgir, passé le cinquième ou le sixième coup. Il lâchait alors la bride à ses gestes, qui, de précis et méthodique, devenait fulgurant et chirurgicaux. Le frappant toujours aux points critiques, là où la douleur surgissait comme un cri, le faisait lâcher prise et parfois, tomber à terre. Fulminant de rage et tâchant de n'en rien montrer. Enechias s'excusait. Et recommençait, le malmenant avec une allégresse et une bonhommie qui, pour quiconque, serait passée pour une bonne part de sadisme.

" C'était bien tenté ! Mais cette feinte ne peut pas fonctionner à partir d'une Seconde, Horakk. Non. Votre flanc est découvert, le mouvement n'y change rien : il vous faut d'abord apprendre à couvrir toutes vos ouvertures avant de tenter de complexifier vos assauts. Tenez, essayons comme ça. "

L'air chaud du soir ébouriffait ses plumes, et Horakk se remettait en garde, épuisé, couverts de bleu. Mais, intimement reconnaissant de toutes ces choses, aveugle à ses propres déboires si futiles, alors que la vie lui avait tant offert.














La sensation se fondait avec le présent.

L'adversaire se dévoilait à ses yeux perçants dans toute sa dimension. A présent que les imperfections de la transmission holographique n'avaient plus cours, il le voyait pleinement. Chaque détail, chaque ornement de sa personne pouvait maintenant permettre à Horakk de confronter sa vision.

La tête, petite en comparaison du reste, tenait encore solidement aux larges épaules blindées recouvertes de la cape claire. Le tronc, plus large que haut, laissait à peine entrevoir ses particularités sous l'habit. C'était un assemblage étonnant, une composition audacieuse. La curiosité du rishii se nourrissait de cette vision, non pas à la manière d'un séquenceur rigide et analytique, mais à travers l'imagerie changeante d'un artiste.

Face à lui, le commander exécutait son propre rite, une introduction courte au phrasé toujours aussi particulier, accompagné d'une révérence. On devinait que ses actes, aussi abstrus, procédait d'un protocole particulier qui n'était connu que de lui. Horakk l'acceptait, tout comme il se réservait de faire selon les usages qu'on lui avait enseigné, et qu'il avait de tout cœur intégré à son être. Cependant, il demeurait un détail - ou plutôt, une absence de détail - qui avait éveillé tout son intérêt. Du choix de son arme, le cyborg n'avait rien amené, sinon son propre corps. L'équation paraissait bien simple.


Je vous monterai flamme.


Avait-il finalement trouvé dans la plus grande adversité ce qu'il cherchait le plus : un adversaire de valeur ? Dans le marasme d'une époque sanglante, venait-il de tenir enfin le défi presque mythique que les chants folkloriques de centaines de mondes récitaient en leurs langues respectives ? Les commissures de son bec s'étirèrent imperceptiblement. Quelque chose de puissant venait de naitre, quelque part au fond de lui. Une chose dont il prenait à peine conscience, encore prisonnier du présent immédiat.

Antarxarxès porta la main à son côté et y tira son arme. Un don, un leg d'une inestimable valeur, et qui pourtant constituait encore pour lui une insondable énigme. Au travers de son discret reflet sépulcral, la lame sombre paraît absorber ce qui l'entoure.

" Zerath Ular'Iim, Prélat de la Lune et Commander de la flotte de la République Galactique. Moi, Horakk Antarxarxès, légataire par agrégation de la sept-cent-trente-quatrième génération de la noble maison des Antarxarxès, héritier d'Adonay Estian Valès Antarxarxès, amiral de la Ve flotte d'assaut de l'Empire Sith, te provoque en combat singulier. En ce jour, tu répondras des menaces et des insultes que tu as proféré à mon encontre, et à travers moi, à tous ceux qui ont porté nos titres avant moi. Par le sang, tu payeras cette dette, ici et maintenant. J'ai dit. "

Et nul dieu ne t'en préservera, ajoutait en silence son regard d'un jaspe iridescent.

Sa voix profonde avait déclamé les paroles avec la gravité que l'on concédait volontiers à la prière. Son talon droit claqua brusquement contre le métal du sol, et tout son être s'anima, prenant une pose codifiée, le regard fiché dans celui de l'adversaire.

" En garde. "

Et il fit selon ses mots : d'une sixte exécutée avec une rigidité par trop didactique, Antarxarxès se mit lui-même en garde. Et ouvrit le champ des possibles.















Son bras droit s'envola souplement devant lui, décrivant une courbe lente et maîtrisée tandis qu'il courbait l'échine et reculait son pied droit d'un pas, le croisant légèrement derrière le gauche.

Il avait exécuté cette figure avec la fluidité que seule confère une longue habitude.

" Mademoiselle. " l'invita-t-il avec un fantôme d'accent que seule une oreille habituée pouvait noter.
















Leur danse ne correspondait à rien de connu. C'était un puzzle, une composition entre diverses cultures que peu de choses liaient, si ce n'était, justement, l'art de la danse, qui comme l'art de la guerre, n'était qu'une musique entre l'espace et le temps. Un spectacle oscillant entre l'impressionnant et le navrant, tant les âmes usées par la vie qu'ils étaient, à différents niveaux, donnait cette impression que leurs mouvements bien trop dépourvue de maestria, ne tenaient leur efficacité que de la puissance intérieure qui étaient la leur.

La maladresse du cyborg ne trompait pas la vigilance du vétéran qu'il était. Trop conscient de ses propres limites, Horakk minimisait ses déplacements, trop peut-être, tâchant d'éviter au mieux les assauts puissants, mais trop lents, d'Ular'Iim. L'attrition, sans doute, ne fonctionnerait pas sur un corps presque entièrement artificiel. Mais elle jouait sur lui, et le rishii s'en méfiait. Il gardait donc ses forces, tachant par ses quelques flèches et feintes de localiser les failles, ces ouvertures mouvantes et changeantes chez l'adversaire, au travers desquelles sa lame pourrait, par le jeu d'un coup décisif, infliger cette froide vengeance qu'il couvait dans le creux de ses tripes. Il usait de toute sa mémoire pour se remémorer ses longues années où l'impitoyable estropié l'avait éprouvé, où ses bras et ses jambes avaient acquis l'adresse et l'agilité du vent. Ce style, si inimitable qu'il avait bâti leur légende jusque dans le noyau, Horakk ne l'avait plus pratiqué assidument depuis des années. Et, avec une rage triste, il constatait combien sa négligence lui coûtait, désormais. Pour l’œil du commun, il bougeait avec l'élégance d'un danseur, les semelles lisses de ses bottes glissant avec grâce sur le sol du hangar. Pour le regard sévère d'un escrimeur, ses erreurs étaient inacceptables, ses gestes lourds et gauches, la position de son épée incorrecte, ses ouvertures trop facile à retourner contre lui.

Pourtant, son art fonctionnait encore, après tout ce temps. Son ennemi, sa ruse et ses artifices n'en venaient pas à bout. Il calculait avec prudence chacun de ses pas, sachant que jamais, de son peu d'entrainement actuel, il ne pourrait rivaliser par l'endurance. Sachant que Vorpale, loin d'être innocente même pour lui, pouvait à tout moment se retourner contre un maître dont elle désapprouverait le manque de virtuosité. Ainsi pouvait-on interpréter la retenue circonspecte avec laquelle Antarxarxès tenait son épée, le vibrateur portatif aux réglages inconnus désactivé, qu'il n'enclenchait qu'au dernier moment, où le contact avec l'armure devenait inévitable. C'était la froideur de sa résolution qui guidait ses choix, la clameur qui montait du rang de ses ancêtres, autant spirituels que biologiques, qui faisait battre à ses tempes plumeuses l'écho de l'adrénaline. Il maîtrisait son souffle, équilibrait ses bonds de sa main libre et de sa queue, jouait avec les appuis réduits de ses pieds comme un humain virevoltant sur de la glace. Sa cape tournoyait sur l'axe de son épaule, masquant tour à tour son bras armé et celui, plus énigmatique, dont la main était vide.

En réalité, c'était bien de ce vide d'où tout était généré. De cette innocente absence venait tout l'art dil shpadà escrimara, de cette cape fine et simple dont on aurait voulu moqué la futilité coquette, venait toute la cruelle efficacité de cet art qui avait, disait-on, fait un jour reculer les Sith eux-mêmes sans que la Force n'eut à intercéder. De cette danse macabre dont ils avaient fait leur fierté, dont le redoutable Makashi des arts de l'Ordre procédait par adaptation.


Par cette lame, Horakk maîtrisait la distance, l'air entre eux. Le Vide.

Il était là où l'autre n'était pas, l'autre venait là où il n'était plus, et ils allaient ainsi, dessinant de larges étoiles au sol, minutes après minutes. Échauffé, empreint d'une assurance nouvelle, l'amiral avait, littéralement, fait le tour. Alors, il laissa venir l'adversaire à lui, bien plus qu'il ne vint à lui. Toujours maître de lui-même, s'essayant visiblement à une succession de combinaisons de son art cultuel, Ular'Iim abattit de nouveau son bras immense sur lui, poing armé, prêt à lui déboîter le bec d'un seul assaut. Prendre l'attaque de face aurait signifié, au mieux, un vol plané de plusieurs mètres.

Mais sa nature et son art l'en préservèrent : comme l'oiseau sent le vent tourner, Antarxarxès n'était déjà plus sur le trajet de la main mortelle du prélat. Ses hanches pivotèrent, et d'un fouetté cinglant, Vorpale fusa droit sur la tête du dragon républicain. La maîtrise encore timide de l'impitoyable estramaçon dont il faisait preuve ne suffit guère qu'à écorner le métal. Mais le son du choc, clair et glaçant, lui confirma que malgré son relatif échec, la touche était bonne. Vif, il fut de nouveau le vide, parti encore de l'autre côté, échappé, toujours aussi dangereux.

Mais la danse continuait, prenant vitesse et ampleur. Le rythme en devenait frénétique. Après avoir tenté d'innover, feintes et coups imprévisibles s'étant enchaînés sans grand succès, le kaleesh eut une brève hésitation. Comme si, l'espace d'un instant, il n'avait su trop que faire de son propre corps de titan. L'esprit alerte d'Antarxarxès fondit en piqué sur cette opportunité unique, lame en avant. Réactif, le cyborg eut le réflexe de parer sa fente. Décidé à percer, le doigt crochu d'Horakk activa la lame, qui se mit à chanter à ses oreilles d'avien.

La Vorpale mordit la carapace inviolable du commander sans la moindre pitié. L'oeil féroce d'Horakk se teinta d'une lueur mauvaise.

Ainsi. Le dragon des âges n'est pas invincible, même dans cet attirail si moderne.


La brèche était ouverte. En bondissant de nouveau sur ses pieds écourtés, le rishii contemplait l’œuvre inachevée de sa lame. Une boucherie sans la moindre grâce, une taille presque fortuite tant elle avait menacé de l'emporter avec elle, mais le spectacle qui s'offrait à lui fit naître un sentiment farouche. En écho, partout, au loin, sans qu'il ne les entendit, les clameurs mélangées du public impuissant de leur joute.


Au sol, à présent visible de tous, gisait la main squelettique et ouverte en vain de Zerath.


Un homme, en d'autre temps, serait tombé à genoux, les vêtements tapissés de sang, maîtrisant à grand peine le tison cruel d'une souffrance indicible. Mais, exempt de terminaison nerveuse, le membre sectionné ne parut pas affecter le cyborg le moins du monde. A peine Horakk avait-il senti poindre la surprise, alors que le républicain se rétablissait de nouveau face à lui, son bras écourté battant l'air. Un tel avantage avait de quoi rappeler à quiconque que la machine demeurait un danger parfois autrement plus grand que le vivant...

Vous combattez comme un homme, admirablement frappé.

Horakk plissa les yeux, sa garde toujours haute, sa méfiance éveillée par le seul fait que l'autre eut de nouveau pris la parole. Au-delà d'une simple ironie désagréable, il y voyait une tentative. Il ne se laisserait pas mystifier.

Mais combattre comme un homme pourra-t-il vous sauver...?

Observant le cyborg depuis son profil méfiant, Antarxarxès se déplaçait d'un entre-chat prudent, sa lame en pronation, prête à fendre l'air à nouveau. Une tension nouvelle grandit, alors que le temps autour d'eux se figeait. Une sensation de détresse alarmante apparut, alors qu'il réalisait presque malgré lui ce qui était en train de se produire.














Et le Dragon délivra son Feu sur le Belligérant, le mettant au défi de passer outre et de vivre encore suffisamment pour vaincre.








Figé, Antarxarxès fut privé de ce qui avait jusque-là fait sa prouesse. Le mouvement. Le Feu.













Amiral Antarxarxès, nous n’attendons plus que votre instruction de faire feu.














Sous les milliers de regards effarés, l'idole infernale se ruait comme une avalanche sur l'amiral, livré sans protection aucune à la furie de la conflagration. La mort aurait pu le prendre, là, statufié par un trop grand moment de surprise, de confusion, de terreur atavique venue du fond des âges.

Tout se déclenche comme une précieuse mécanique. Oblitérés, la raison, le calcul, la prudence.


L'âme sauvage avait sauvé sa peau. Son corps agit avant sa pensée. Il se ramasse et saute, l'uniforme enflammé cédant sous l'action de ses bras. Les larges plumes, toujours sagement rangées, disciplinées, s'étaient libérées de leur éternelle prison de tissu. Sa botte heurta le dernier poing valide du cyborg, et il fut en l'air, bras écarté, suspendu, soudain immense en longueur et en largeur, toutes plumes déployées, le feu rayonnant sur lui.











Il vole. Il brûle.

Il est Phénix.











D'un vol, en réalité, il ne fut question que d'un saut porté par son envergure ainsi révélée. Spectaculaire, saisissant, de par la taille insoupçonnée des ailes qu'abritaient en réalité ces manches un peu larges. Mais qui ne lui permit pas de s'épargner une chute douloureuse dans le dos du prélat. Son cri unique, de fureur et de souffrance, fut étouffé par les exclamations inhumaines du kaleesh déchaîné.

Avec la fureur conférée par la douleur de la brûlure et la panique, Horakk lacéra son propre vêtement, cet uniforme qu'il avait si savamment entretenu toutes ces années, dans le seul espoir d'en étouffer la flamme. Il roula contre le sol, étouffant le feu avec le revers de la cape. A terre l'espace d'un instant trop long, il vit Ular'Iim, à l'envers, se livrer à un déchaînement digne de la Force elle-même.

Libéré de l’instant de stupeur par ce renversement, le rishii réalisa en une fraction de seconde ce qui venait de se produire, là, à quelques pas devant lui. Le prélat s’était immolé, délivrant le piège qu’il avait à cette fin gardé dans ses manches odorantes. Prêt à se sacrifier pour porter la mort, décidé à détruire quitte à s’autodétruire : c’était donc là le seul et unique visage qui demeurait derrière ce masque gravé.







Celui d’un fou extatique.







Les hurlements du monstre de feu résonnèrent dans la cage de fer, emplissant tout le vaisseau comme le grondement d’une éruption soudaine. Rendus à ses réflexes de survie, Horakk plongea sans réfléchir, esquivant maladroitement les bras enflammés aux doigts saillants qui se tendaient vers lui la seconde d’avant. Ular’Iim tournoyait sur lui-même dans un cyclone de flammes, emporté par sa propre transe. Il délirait, possédé, exempt de toute limite, rendu à la plus simple expression de son individualité.

Horakk bondit, encore, ses articulations hurlaient sous l'effort. Il arrivait au terme de sa maigre endurance.

Son œil avisa la Vorpale échouée à quelques centimètres de sa main posée au sol. Ular'Iim devant lui, s'était mis à vociférer une langue qu'un Sith n'aurait pas renié. Le cœur dans la gorge, le corps tendu comme un arc, Horakk s'en saisit. D'un mouvement du large balancier de sa queue de plumes, il fondit vers l'avant, dans le vide créé entre deux nuages brûlants.










La proue noire du Pourfendeur jaillit des gaz brûlants, et à pleine vitesse, éventre le flanc blindé du navire.










La scène perd toute cohérence, tout se précipite. Brûlées, les savantes démarches, aux cendres, les tentatives de prendre le dessus par d’habiles calculs. Le vernis civilisé se fend, et apparait bientôt la mêlée des bêtes sous la mer. Ne demeure que les volontés brutes, dépouillées de tout artifice, présentées comme les âmes nues sur les balances des entités cosmiques pour quelque jugement final.



Avec un rugissement, Antarxarxès arme son dernier courage, la face avalée par la chaleur. La Vorpale, inactive, fend ses devants comme l'éperon de l’Égide fendait le vide.



Il vise le plexus, la fente lui vient, simple, naturelle. Peut-être trop.






Mais, brusquement, l'arme sembla lui échapper. Etait-ce elle, ou lui, qui soudain, au cœur de l'action, signifiait par un simple dévoiement, que quelque chose n'était pas encore prêt. Aujourd'hui, ce coup unique ne serait pas le sien. Il n'était pas prêt.









Il n’y eut plus que son propre souffle, saccadé, rendu sifflant par l’effort. Un rythme affolant, une batterie d'infanterie, une charge de cavalerie, le témoin sonore des limites qu'il venait de repousser. Serrant avec lui cette réserve d'énergie qu'il avait tenté de préserver, Antarxarxès se releva, sa silhouette confondue avec les nuages d'un blanc laiteux que la chaleur brûlante du sol porté à température créait au contact de l'eau glacée des systèmes anti-incendie.



Le clapotis de l'eau le ramena à la réalité. Le prélat, tout aussi ruisselant que lui sous cette pluie incongrue au milieu de l'espace, avait retourné ses yeux de nouveau lucides vers lui. Dans le concert presque inaudible de la pluie, l'accent d'outre-tombe du commander le provoquait une dernière fois.


K’hoti.


Il n'entendait pas cette langue-là. Mais certains langages parlent bien au-delà des frontières : le geste, le regard, tout dans la posture du cyborg n'était que provocation. Malgré ses blessures, malgré le danger, il appelait encore le combat de ses vœux. Horakk l'observa, attentif, aux aguets. Quelque chose d'ancien, de profond, remontait à la surface de son être.

Son regard se fit étroit, focalisé une seconde, non pas sur la lame étincelante que brandissait désormais la seule main valide d'Ular'Iim - mais toujours sur celle, sombre, fichée profondément entre les deux larges plates, glissées comme un message furtif dans le composite qui les lient. Comme un appel fantomatique, la garde luisante de l'arme antique le narguait.




Viens donc, si tu l'oses, toi qui te prétend mon maître.
Viens donc : je ne reconnais que ceux qui font face.
Renonces, et tu me perds.
Souffre pour moi ! Et j'obéis.





Celle qui était en mouvement, libre, est désormais figée, fixée, immobile. Celui qui était désarmé est armé, celui qui était armé est désarmé. Celui qui était plein d'ardeur et déchaîné, le voici apaisé, par l'effort consumé. En face, celui qui s'est replié s'éveille, se redresse, se déploie à nouveau.


La rotation immuable continue : car il n'y a que le mouvement, perpétuel, dont seul le centre invisible demeure immobile.


Le plumage collé, l'épaule et les cotes calcinées rendues à sa peau d'un gris mat où sans nul doute aucune plume ne pourrait repousser, seulement vêtu de son pantalon d'officier et de ses bottes cirées, Horakk misérable, conservait cette dignité sobre que lui conférait sa droiture. Mais sous la surface, le tonnerre roulait, libre.

Lentement, sa large main pleine de serres s'empara de la cape républicaine, gisant au sol, détrempée. L'expression de ses traits énigmatiques se durcit. Ses yeux, emplis d'une douloureuse fatigue quelques secondes auparavant, s'allumèrent de nouveau, brillant d'une étincelle dangereuse.



Dans le brasier immatériel de ses entrailles, la douleur, la rage, la peur, la tristesse et la détermination se fondirent en une unique forme, instable, indéterminée. Noire. De la Passion, Horakk se forgea une nouvelle arme, comme un écho à la première, alors que de loin en loin, la musique tribale émergeait autre chose. Un chant, porteur d'un sens qui lui était propre, qui n'appartenait plus ni au passé ni au présent, et qui aurait pu être indifféremment chanté par ses fidèles de la marine, que par des visages inconnus d'une Histoire depuis longtemps révolue...

Thème musical:




Le Phénix, consumé, renaissait de la cendre.
Toujours debout.




Trop souvent, par la pâleur de son plumage, on lui prêtait l’innocence. Par l’habileté de son verbe d’aristocrate, on lui concédait l’amabilité. Par la finesse de ses manières, on lui attribuait la bonté. C’était ce qu’il était, ce qu’il avait choisi.

Mais dans quel moule avait-on fondu ce plomb-là ?

Dans celui des allées de Dromund Kaas elle-même. Dans l'ombre feutrée du Temple Noir. Dans les conduits encrassés qui rampaient sous la jungle. Dans les forêts ravagées de pluie, hantée par la faune tordue née de l’alchimie. Dans les fossés des lignes fragiles qui avaient défendu la première Kaas City. Dans les geôles putrides des prisons impériales et de l’Inquisition, où l’on ne dormait jamais que définitivement. Il était le soldat de l'Empire. Forgé au supplice et dompté à l’ores de préceptes qui pliaient toute moralité devant le pouvoir et la puissance.
Impitoyable, Antarxarxès l'avait toujours avant tout été envers lui-même.
Sa botte claqua contre le sol lorsqu'il prit son élan.







S'il ne triomphait par le feu, alors, l'eau l'y aiderait.







Horakk avait regardé, avait réfléchi. Il aurait pu céder. Accéder à cette volonté muette du provocateur : redevenir l'enfant sauvage. Si facile... Alors que la rage lui consumait le coeur. Laisser les pulsions et les instincts reprendre le dessus.


De la brume blanchâtre provoquée par la rencontre du feu et de l'eau, au milieu de ce brouhaha thermique qu'Ular'Iim avait lui-même provoqué par sa danse infernale, Antarxarxès jaillit de nouveau, tel un faucon en piqué.

Sa charge, brutale et soudaine, déstabilise tant il semblait prompt à s'effondrer l'instant précédent. Elle le propulsa au devant du prélat et de son dard lunaire. La danse reprenait sans prévenir, cette fois, selon une symétrie inversée.

Mais Horakka savait qu'il n'était plus temps pour lui de valser.
Il feinta donc, de toute sa vitesse acquise depuis les brumes, et vrilla, se dégageant sur le côté, tandis que frappait le bras cybernétique à quelques centimètres de lui. Il tomba, littéralement, au sol. Les semelles de ses bottes ripèrent sur le sol lisse du vaisseau, le film fluide le faisant glisser presque sans effort. Ses plumes laquées faisant de son corps à demi-nu une forme sans aspérité, il fusa entre les jambes mécaniques sans s'arrêter, dérapant sur plusieurs mètres au milieu des flaques au prix d'une chute douloureuse mais nécessaire. Retourné sans grâce à plat ventre, d'un coup de hanches où sa queue avait servi de large balancier, il visa son prochain objectif avec la hargne de celui qui a goûté le sang et y revient.

Il semait la confusion par ses glissades, laissait le démon fendre l'air de sa lame claire comme l'astre de nuit. Désormais sans l'abri de son uniforme, il sentit à deux reprises le fil acéré du coutelas mordre sa chair, et se contorsionna au plus près du monstre de métal pour se dégager.

Il avait en vue ces fils crépitants qui volaient, fusaient au-dessus de sa tête alors que les os artificiels bringuebalaient dangereusement. Fallait-il encore que les mouvement saccadés du bras armé ne s'interposassent pas.




Mais pour cela, il lui fallait chevaucher le Dragon.



L'effort fut énorme, la souffrance, au-delà de ce qu'il avait escompté. Tout son corps hurla lorsque, arque-bouté sur ses longs bras ailés, il se propulsa de nouveau en avant, dans le dos de la créature. Sous les ruisseaux de gouttes froides, il sentit les larmes lui venir. Jusqu'au bout, l'impérial qu'il était s'éperonna sans pitié pour continuer. Gêné dans ce mouvement délicat par la présence acerbe de la Vorpale dans ses chairs meurtries, son ennemi ne put le rattraper suffisamment vite. Ce décalage fut la seule condition qui put lui permettre d'avoir le temps légitime de sauter, avant que l'autre ne tentât de le tailler encore, et encore.

Ses doigts recourbés en crochets meurtriers s’agrippèrent fermement aux omoplates de métal, qui avait encore un temps supporté les couleurs de la République. La réaction ne se fit pas attendre. Le coutelas aux reflets fantomatiques fusa par dessus, à la façon d'un aiguillon de scorpion, mortel. Il se jeta sur le côté, reçut une nouvelle balafre qui perça ses plumes blanches d'un sillon carmin. L'échec signalait un nouveau changement de tactique, et Antarxarxès n'avait pas l'intention de laisser passer sa chance.

D'un mouvement du poignet qu'il connaissait si bien, exécuté avec la méthode d'un bon élève, sans fioriture ni frivolité, il fit claquer sa cape ramassée en une torsade souple en s'exécutant d'un fouetté en direction du bras amputé. L'eau qui alourdissait le tissu lui permit de s'enrouler avec force bruit autour des os, les enserrant à la volée, alors que l'eau lui gifflait le visage.

Horakk récupéra l'extrémité et maintint sa prise sur les deux bouts croisés de la cape, ramenant brusquement le bras privé de son actionneur mécanique contre le kaleesh lui-même. Une seconde, il n'y eut plus que la sensation d'un effort interminable, tandis qu'il menaçait de tomber de son dangereux perchoir.



Un bruit, unique, un léger vrombissement, et il y eu de nouveau une étincelle, unique, bleue. Le rishii bascula vers l'avant, par-dessus le cou massif, et chut de nouveau. Cette fois, il s'y était préparé : il se retourna pour faire face. Dans sa ligne de mire : la garde noire, imbibée d'un liquide visqueux dont l'odeur lui était connue... Du kolto.

L'alien se rua en avant, heurta Ular'Iim de l'épaule sans que la carcasse n'en bougeat, et se cramponna à la garde de la Vorpale. Son ongle trouva le bouton d'activation. Son allié chanta de nouveau, et il tira vers lui avec un grognement furieux pour parer in extremis la ligne du poignard qui revenait sur sa tête. la mêlée dura le temps d'un souffle, le temps d'une nouvelle glissade de ses bottes sur le métal, et il fut de nouveau dans le dos de sa cible.



Il tituba, pitoyable, avant de parvenir à se remettre sur pied, un genoux après l'autre. Jamais il n'avait dévié son regard noir de la silhouette trapue d'Ular'Iim. Les oreilles rabattues, collées de pluie, il laissa s'échapper un fantôme de rire sans joie. Lentement, il réalisait. Il prenait conscience de nouvelles dimensions dans ses propres schémas. Un pas, puis un autre, alors que le poignard qui l'avait blessé brillait encore. Mais Antarxarxès n'avait jamais ménagé sa propre personne lorsqu'il lui fallait agir.

" Je devrais peut-être vous féliciter pour votre rouerie... mais il n'en sera rien. Toute votre ruse n'y suffira pas : vous ne vaincrez pas. "


Sa main ne tremblait plus lorsqu'il pointa de nouveau son arme vers le cyborg, comme pour abattre une sentence qu'il ne formulait encore qu'en pensée.

" J'exige des réponses ! Et je saurais les obtenir. "

Avait-il lavé cet affront ? La souffrance du kaleesh suffisait-elle selon les anciens usages ? La sienne avait-elle apaisé un quelconque esprit ? Loin d'eux, comme en écho, on venait de supplier d'arrêter les massacres.

Eux y semblaient sourds. Emporté dans leur propre spirale.









Horakk n'attend aucune réponse. C'est une question rhétorique, car de nouveau, le contact avec la garde noire l'avait convaincu que son pourquoi valait son sacrifice.


Épuisé, courbatu, brûlé, tordu, trempé.




Vivant.
Debout.




Puisant dans ses dernières forces, impavide, Antarxarxès se fend.


















Et contre-attaque.





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Récapitulatif des manœuvres :
Le Masque de la Force
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Eclats Kyber : 0
Un combat de titans avait eu lieu. L’Amiral Antarxarxès et le Commander Ular’Im n’avaient eu aucune pitié l’un pour l’autre. Et malgré la spectaculaire tentative flamboyante du Prélat de la Lune, le Rishii avait su reprendre le dessus et mettre en application ses entraînements, armé de sa redoutable Vorpale. Le Géant d’acier ressortit de ce combat gravement blessé, alors qu'une incitation de cesser le feu leur parvenait.

Leur honneur respectif était-il lavé ? En attendant de le savoir, chacun devrait regagner ses pénates, suivi de ses prisonniers. Mais dans sa navette, le Commander se trouvait mal. De retour sur le Payara, ce fut la débandade !

- Le Commander est blessé !! Vite, le Commandeur est blessé !

- Que.. quoi ? Mais.. comment ?

- Peu importe !! Son bras est salement amoché et il a été transpercé de part en part ! Il faut le conduire d’urgence à l’Unité médicale !

- Ces maudits impériaux ! Je savais bien que c’était une mauvaise idée ce duel ! Allez, emmenez-le !

La question la plus pressante était en effet de savoir.. comment l’extirper de la navette où il aurait fini par succomber à ses blessures.

- Il nous faut un chariot à répulseurs.

- Faut déjà le sortir de là.

En chiens de faïence, on se regarda.. et finalement il n’y avait pas trente-six solutions.
Pendant qu’on sortait les muscles pour tenter de transporter le Commander inconscient à l’Unité médicale :

- On a un contact, une équipe spéciale au sol.

- Enfin une bonne nouvelle ! Ouvrez-leur un canal.

- Tout de suite !

Les réponses venant des troupes au sol fusaient. Les nouvelles n’étaient pas bonnes. Visiblement des mercenaires avaient mis à mal les militaires.

- Raptor au Payara, on a une navette au sol, des blessés, dont un diplomate impérial. Plus grave encore, on a un VIP blessé et un sous-officier du service de santé qui ont été enlevés par un ennemi encore non identifié.

- Merde.. quel bourbier… Quand le Commander va apprendre cela…

De son côté, Horakk Antaraxarxès n'était pas non plus remonté indemne sur l’Egide. Ce combat l’avait ébranlé, ce Commander Ular’Iim lui avait infligé bien des blessures… Comment avait-il osé utiliser du feu ? Ses hommes se précipitèrent pour soutenir leur amiral.

- Bravo, monsieur ! Vous avez donné une bonne leçon à ce Républicain. Mais vous êtes blessé ! Amenez-moi tout de suite une équipe médicale !

- Que se passe-t-il ?

- Darth Khorog a ordonné un cessé le feu…Nous essayons de contacter le Conseil Noir pou en apprendre davantage.


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A noter que : Chaque joueur a de nouveau la possibilité de publier une réponse, selon l'ordre de passage initialement défini. Si vous vous trouvez actuellement en vacances, ou que vous ne pensez pas être en mesure de répondre dans les temps, n'hésitez pas à en informer vos camarades. L’idée est que vous puissiez faire réagir votre personnage aux nouveaux éléments que nous avons apportés et que vous l'intégriez à la présente conclusion. Nous clôturerons définitivement l'Event le 10 août, date à laquelle l'épilogue sera publié et les récompenses attribuées.
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