Voyl Clawback
Voyl Clawback
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Ondéron - Iziz - Palais Royal - 2:10 pm

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Ondéron était un monde singulier. Depuis son arrivée, Voyl le constatait chaque heure un peu plus. En réalité, le banquier ne savait guère ce qu'il devait en penser. L'architecture, même si bien loin des canons harnaidani, n'était pas désagréable à l'oeil, conservant une grande part de la verticalité stricte si appréciée des muun. Néanmoins, le climat d'Iziz possédait cette moiteur insupportable des mondes exotiques, et l'être d'intérieur qu'il était n'appréciait pas vraiment d'y être exposé. Heureusement pour lui, et les quelques muuns qui l'accompagnaient pour ces démarches, le palais disposait encore de suffisamment de ressources pour leur octroyer le confort nécessaire, et une fois les portes franchies, ils n'avaient pas eu à souffrir des inconvénients du climat.

En cela, leur court séjour avait jusque-là été plaisant. L'hospitalité des Kira s'était montrée à la hauteur des rumeurs, bien que la planète n'ait plus eu les moyens d'organiser les venues des hôtes de marques comme au temps jadis. Mais Clawback ne s'en était pas formalisé : lorsqu'il était question d'affaire et de relations, ce genre de détail pouvait fort bien passer au second plan. En l’occurrence, le numéro deux du Clan Bancaire savait se passer des apprêts dont sa caste de privilégiés avait l'habitude. Le seul bémol à leur tableau était sans doute la tension palpable qui régnait sur la planète.

Bien que peu versé dans les chamaillas sociaux, Voyl avait bien cru comprendre que la position d'Ondéron au ban de la République suite à la retentissante affaire Kira n'y était pas étrangère. Les ondéronniens n'avaient plus la République et le Sénat en odeur de sainteté. Il régnait dans les rues de la capitale une, et l'apparation des navettes floquées aux couleurs du C.B.I. avait soulevé quelques indignations populaires qui n'avaient pas été au goût de la délégation. Outre les classiques spécistes traitant les muuns de voleurs, on y avait enjoint des mentions de "vendus du Sénat", "pourris du FLR", "mercenaires de S'orn et compagnie", et autres titres inventés par les gens du cru. Rien qui ne méritât que l'on s'en inquiète, mais tout pour rendre le début du voyage plutôt morose. Un début qui s'était cependant éclipsé au profit des échanges privés avec le gouvernement monarchique, seul véritable but de tout ce déplacement.

La délégation du Clan Bancaire sortait donc, en ce début d'après-midi, sur l'immense parvis du palais royal d'Iziz, après y avoir été raccompagnée selon les usages. Clawback, entouré de son service de sécurité habituel, entamait donc d'un bon pas le trajet du retour vers l'astroport. Il n'avait pas prévu de s'arrêter pour faire du tourisme, même s'il soupçonnait volontiers Reshord et Droomos d'avoir entretenu quelques fantasmes à ce sujet : l'exotisme des lieux s'y prêtait. Ils avaient descendu le grand escalier qui séparait l'immense édifice millénaire du reste de la ville, prenant simplement la première allée ombragée qui les ramenait vers leur objectif. Quelques regards curieux ou soupçonneux s'éveillaient au passage de cette délégation aux airs faussement militaires, de ce carré serré et ordonné dont le directeur adjoint formait le centre.

" Vous devez être monsieur Clawback, c'est bien cela ? "

La voix leur était parvenue depuis l'ombre projetée des murailles. Un homme seul s'y tenait appuyé sur un balais, le regard porté droit sur le muun en costume. A l'évocation de son nom, le banquier avait stoppé net, forçant tous ceux qui l'accompagnaient à faire de même. Les gardes du corps échangèrent un regard perplexe. En apparence, l'inconnu était seul, sa mise de peu de valeur laissant penser à un domestique, ou un prolétaire désœuvré. Voyl, toujours sur la défensive, toisa l'individu de toute sa hauteur :

" En effet. Puis-je savoir à qui j'ai l'honneur ? demanda-t-il d'un ton frais et distant,

-Oh, un humble roturier, je le crains, fit le petit homme brun avec un sourire d'excuse, mais je n'ai pas pu m'empêcher... eh bien, d'écouter votre échange avec Sa Majesté. Et... comment dire, j'ai une information qui devrait vous intéresser. "

Le choix des mots était symptomatique d'un esprit cherchant à persuader. Une telle tentative eut la vertu principale de mettre instinctivement les muuns sur leur garde. On ne cherchait à manipuler que dans l'espoir d'obtenir - et un avare comme Clawback détestait donner, surtout sans contrepartie claire et satisfaisante. Voyl lissa le devant de sa veste d'une main pensive, le regard brillant d'une condescendante ironie :

" Un "roturier" qui écoute aux portes de son souverain ? nota-t-il avec un air faussement étonné, voyez-vous cela. Je pense que vous comprendrez dans quelle mesure votre comportement peut s'apparenter à de l'espionnage ? "

Il ne chercha pas à voiler la menace sous-jacente que contenait sa remarque. Vraiment, ces humains étaient inconséquents... Laisser son personnel écouter aux portes ! Et des domestiques visiblement peu enclins à respecter l'intimité de leurs maîtres... Voyl enregistra longuement l'apparence anodine de l'humain, histoire, à l'avenir, de pouvoir faire remonter l'information à qui de droit. Rien ne pouvait hérisser davantage l'ancien Vice-directeur du Département des Communications, et ses charges de gardien de la sécurité et du contre-espionnage économique que d'être témoin direct de telles indiscrétions. Paradoxalement, son esprit n’exclut pas cependant d'en être le bénéficiaire tout aussi direct.

" Je m'excuse platement, je ne pensais faire du tort à personne... C'est un malentendu : en fait, je m'étonnais simplement que la visite du palais n'ait pas inclus l'une de ses parties historiques les plus intéressantes. Surtout que j'ai cru comprendre que, eh bien, vous cherchiez à l'acquérir pour aider Sa Majesté à payer ses dettes ?

-Ce n'est pas exactement ce dont il est question, corrigea le banquier d'un ton égal, mais continuez, je vous prie : des parties historiques ? Quoi donc ?

-Vous n'êtes donc pas au courant... Ah, je suis embêté. Mais, franchement ? De tout le respect que je peux avoir pour notre reine, je trouve cela malhonnête ! Malhonnête de sa part qu'elle vous ait caché cela à vous. Qui voulez l'aider.

-Mais de quoi parlez-vous, à la fin ? Je n'ai pas toute la soirée ! Expliquez-vous ! "

L'attitude sinueuse de son interlocuteur rendait Clawback irascible. Il perdait du temps. Et tout le monde le savait : son temps à lui valait de l'or. Littéralement.

" Mais, messieurs, on ne vous montre que ce que l’on veut bien vous montrer ! C'est pourtant une évidence ! Ici, tout est beau et prestigieux… tant qu’on ne prend pas le temps de regarder l’envers du décor ! C'est bien tout ce que j'exècre chez ces politiques : la malhonnêteté... La dissimulation, le complot. C'est nauséabond. "

Il fit un grand geste, arborant un sourire ironique. Le muun haussa une arcade dubitative.

" Que voulez-vous dire par "envers du décor" ?

-Je veux dire par là que ce palais est en ruine, monsieur Clawback ! Ses fondations sont pourries, monsieur. Les sous-sols s’effondrent ! Les anciennes constructions qui le soutiennent ne sont pas de facture moderne, et elles ne sont plus entretenues depuis longtemps ! Ce palais est maintes fois millénaires. Si vous espérez avoir de solides garanties à Iziz, vous vous trompez ! Et l’on fait tout pour que vous ne vous posiez pas la question ! Tout cet apparat, c’est du bluff, excellence. "

Le ton avait brusquement changé, et l'attitude de l'homme également.

" Quelles preuves avez-vous pour avancer pareille affirmation avec tant d’aplomb ? C'est terrible ! Et passible de diffamation, vous en êtes conscient ?!

-Une seule, monsieur… Je suis l’un des derniers ici à connaître un passage vers ces fondations dont je vous parle. Si vous voulez, je vous y mène ! Et vous pourrez constater par vous-même que je ne mens pas ! "

-Si ce que dit cet homme est vrai, c'est un véritable scandale...

-Et s'il cherche à nous faire perdre notre temps, c'est gagné. " gronda Barkran en croisant les bras, résigné.

La troupe s'était tout naturellement retournée vers Clawback, toujours immobile. Livré à un calcul silencieux, le muun observait son interlocuteur avec une vigilance redoublée, indécis quant àl'attitude à adopter devant une telle proposition.

" Vous m'affirmez que vous ne mentez pas, et croyez bien que je ne suis pas homme à croire quoi que ce soit : je suis de ceux qui démontrent ou prouvent. Que vous mentiez est une chose ! Mais dans quel but ? Pourquoi vouloir que de possibles aides financières soient refusées par notre biais alors que votre situation est si précaire ? C'est un non sens.

-Oh, ce serait très long à vous expliquer en détail. Mais comme je vous l'ai dit : rien ne me fait plus honte que de penser que nos souverains puissent s'avilir en vous masquant une vérité que tous nos concitoyens mériteraient de connaître ! Tout le monde n'est pas béat d'admiration devant Emalia Kira, monsieur, aussi curieux que cela puisse paraître ! Non. Ses actes nous ont coûté très cher... Et en un sens, elle vient chercher l'aide ailleurs, comme pour s'en dédouaner. Sa tentative de vous paraître bien sous tous rapports est dangereuse.

-Vous avez conscience qu'un refus de rachat laisserait votre planète dans l'état précaire dans lequel elle se trouve aujourd'hui ? Votre acte, bien qu'honorable nous concernant, est contre-productif.

-Et j'ai conscience que cela nous portera encore plus préjudice à l'avenir si vous et les vôtres êtes lésés ! Je vous prie de ne pas le prendre mal, mais le peuple d'Ondéron n'a jamais eu besoin de personne pour s'en sortir. Nous n'avons pas besoin de l'argent d'une banque étrangère. "

Une longue minute, Clawback sembla considérer la chose. Gardant ses réflexions pour lui-même, il changea de sujet :

" Et que suggérez-vous pour nous confier cette "preuve" ?

-De la plus simple des manières : ma famille sert les Kira depuis des siècles. Nous sommes parmi les derniers à connaître des passages datant de l'ère de Nadd et des chevaucheurs, monsieur. Je peux vous montrer les antiques fondations du palais ! Vous montrer pourquoi il est important que vous soyez au courant de ce qui se trouve sous les belles dorures...

-Une visite ? Je suppose qu'elle n'est pas gratuite ?

-Oh, si, elle l'est ! Je ne suis pas marchand, je travaille au palais... Ma maigre paie me suffit bien. Je fais cela par conviction et devoir, pas par appât du gain !

-Vraiment ? Décidément, les mœurs de vos gens sont des plus surprenantes ! "

Mais en son fort intérieur, Voyl n'était pas convaincu. Il connaissait trop les humains pour savoir qu'ils étaient rarement aussi désintéressés qu'ils ne l'avouaient. La proposition incongrue de l'inconnu le laissait pourtant sur sa faim. Et si Kira ne leur avait effectivement pas tout dit ? Les motivations du serviteur avaient beau être troubles, celles de n'importe quel politicien l'étaient tout autant. Considérant que perdre quelques minutes de son précieux temps pouvait, au pire retarder le décollage, au mieux l'empêcher d'accepter naïvement un marché truqué, Clawback finit par accepter. Après tout : ils étaient huit, lourdement armés, et en lien permanent avec leur flotte commerciale. Que pouvait-il bien leur arriver ?


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La délégation suivit donc son nouveau et mystérieux guide, qui leur fit contourner les remparts sur un bon kilomètre. Ils finirent par entrer dans une arrière cours qui semblait ne pas communiquer avec les cours intérieures qu'ils connaissaient déjà. Des remises, des hangars, rien qui ne soit d'un grand intérêt. Cependant, le petit homme les mena sans coup frémir jusque dans un sous-sol servant de réserve. Là, ils assistèrent à l'ouverture d'un authentique "passage secret", dissimulé avec soin dans le magnifique dallage du sous-sol. L'homme descendit en premier, puis leur fit signe de le suivre. Avec une appréhension visible, Clawback franchit le seuil de la nouvelle ouverture.

Durant dix bonnes minutes, ils plongèrent dans ce qui ressemblait aux catacombes d'Iziz. Aux lueurs de leurs torches et datapad, les visiteurs découvrirent, stupéfait, un véritable labyrinthe sous le palais, dont la structure laissait à penser qu'il y avait eu, en réalité, plusieurs palais, construits les uns par-dessus les autres au cours de l'histoire d'Ondéron. La découverte plongea Voyl dans une réflexion tout à la fois méditative et furieuse. Il ne s'y connaissait guère en archéologie, ou même en génie civil. Mais plus ils avançaient, plus l'allure des murs qui les entouraient devenait antique, humide, délabrée... Rien de très rassurant pour lui, habitué des gigantesques structures en marbre vérifiée de fond en comble deux fois l'an.

" Attention à vous : ça devient très étroit, après. Mais l'état de cette salle vous en dira déjà très long... Allez-y, allez-y ! C'est une salle, vous pourrez y circuler librement. Je vous garantie que vous n'allez pas être déçu du voyage ! "

Dromoos, le regard dissimulé derrière ses lunettes, observa leur guide une seconde, avant de prendre les devants. Il fut suivi par Barkran et ses soldats, puis par les muuns. Clawback jeta un oeil interrogateur à l'humain :

" Monsieur. Après vous. "

Voyl considéra la porte à son tour, avant de s'avancer dans la pièce sur laquelle ils débouchaient.
Un étrange pressentiment s'empara de lui, alors qu'il franchissait le seuil de vieille pierre à la suite de ses protecteurs. L'endroit embaumait la poussière et la moisissure : rien de bien engageant. Le silence des lieux était tout relatif : on pouvait entendre d'étranges échos au loin, des gouttes, un sifflement léger, des cris d'animaux portés depuis les tréfonds de la jungle. Les visiteurs entraient un par un dans la salle, découvrant avec stupéfaction que leur guide n'avait en rien menti. Le palais d'Iziz courait sur une surface bien plus étendues qu'ils n'auraient jamais pu le deviner, et l'état des fondations plurimillénaires avait de quoi laisser Voyl interdit.

Soudain, un énorme bruit résonna dans leur dos : comme si la bâtisse tout entière s'était mise à trembler. Voyl sursauta, faisant volte-face sur le coup.

Derrière eux, il n'y avait plus rien d'autre qu'un mur lisse, tombé au droit du vieux mur de pierre.

" Par le Trésor, j'ai bien cru que ces pierres allaient nous choir sur la tête ! Qu'est-ce que ça veut dire ?

-Merde ! C'est pas vrai, ça c'est refermé !" aboya Droomos en tentant de forcer sur ce qu'il restait de l'ancien encadrement.

Mais même muni de sa force physique colossale, le karkarodon ne parvint pas à faire bouger le moins du monde le battant de l'antique passage. Le mécanique fonctionnait à sens unique. Barkan et les deux iotréens se joignirent à lui, forçant autant que leurs bras le leur permettait sur les fines jointures. Rien. Tout était comme si le passage tout entier s'était effondré derrière le mur coulissant.

" Mais qu'est-ce que c'est que ce cirque ?! s'emporta Clawback, les bras au ciel, où nous a-t-on amené ?! Qu'est-ce que c'est que cet endroit, à la fin ?!

-Si c'est un piège, il est grotesque ! pesta Barkran sous son casque,

-Grotesque, mais efficace, conclut le requin en costume avec un air fataliste, on repassera pas par là... Faut trouver une autre issue.

-Balivernes ! Soldats, défoncez-moi cette fichue porte ! C'est pas du permabéton, ce truc-là ! Rien face à un bon fusil blaster !

-Vous êtes fou ?! s'exclama Reshord, vous voulez que ces ruines nous tombent sur la tête ?!

-Réflexion faite, chef Barkran, ce n'est certes pas l'idée la plus lumineuse... L'état de ce ciment est alarmante.

-Comme vous voulez. Mais je vois pas comment faire autrement, sauf votre respect ! "

La nouvelle fut accueillie avec une collection de mines atterrées. Les muuns se regardèrent, interloqués, alors que les gardes tournaient en rond dans la petite salle pour trouver par où sortir. Un écho résonna alors depuis un point qui semblait presque au-dessus de leurs têtes :

" Vous ne sortirez jamais d'ici, étrangers ! Ces catacombes seront bientôt les vôtres ! Vous n'auriez jamais dû venir ici ! Ondéron a été, est, et restera à jamais la propriété de son peuple ! Vos machinations n’aboutiront jamais ! Nous en faisons le serment ! VIVE ONDERON LIBRE ! A MORT LES CONSPIRATEURS ! "

De nouveaux grondements inexpliqués ébranlèrent l'antique fondation du palais, puis ce fut de nouveau le silence total. Dans l'antichambre millénaire, plus personne n'osait bouger. Reshord semblait sous le choc. Clawback, attentif au moindre bruit, finit par se précipiter à son tour sur le passage condamné pour en faire le tour, fébrile. On les avait volontairement enfermé... Un piège. Il existait des passages secrets verrouillés unilatéralement sous le palais d'Iziz ! Cette découverte l'aurait sans doute bigrement intéressée dans d'autres circonstances. En l’occurrence, Voyl était partagé entre un pur sentiment de haine glaciale à l'encontre de celui qui avait osé le rouler si stupidement, et la panique totale de ne trouver aucun moyen de sortir de cet endroit infâme.

" Bon sang, ne me dites pas qu'il n'y a rien à faire !

-Patron, j'veux pas vous affoler, mais là, on s'est quand même fichu dans un beau merdier.

-Que voulez-vous dire par là, exactement ? Vous avez toujours vos comlinks ? Réfléchissons un peu, voulez-vous ?!

-On est trop loin sous terre : la communication passe pas. Je reçois rien...

-Je crois que l'expression humaine pour ça, c'est : "faits comme des rats". Je n'aime pas du tout cette expression. "

Malgré son indifférence apparente, Voyl pâlit. Silencieux, il se passa une main lasse sur le visage.

" Il ne manquait plus que ça... "

Combien de temps allait-il s'écouler avant que quiconque, à la surface, se pose la question de savoir où ils avaient bien pu passer ? Le palais les pensait partis... La navette ne les attendrait pas éternellement. Seule l'unité de la sécurité restée en haut pouvait intercéder en leur faveur... Un tableau des plus réjouissants.

Atterré, incrédule devant une situation si hautement improbable, le muun s'adossa au mur, les yeux tournés vers le plafond : les pierres, ici, devaient dater d'une ère si lointaine que leur apparence presque intacte tenait du miracle. Dans la pénombre, son regard suivi les formes des murs et des piliers qui les entouraient.

" Attendez : il y a quelque chose, là-bas ! "


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- Plusieurs semaines auparavant -


" Je me fiche du comment : débrouillez-vous ! Je vous paye pour ça. "

Assise dans son large fauteuil en velours, Alicia Kira tensait vertement la petite silhouette holographique qui trônait sur le petit guéridon à ses côtés. Malgré la douceur du climat et son large éventail à plumes, la cousine royale avait du mal à ne pas transpirer. Elle metait ceci sur le compte de la moiteur ambiante. Sans s'avouer le moins du monde qu'une telle situation la rendait on ne peut plus nerveuse : elle n'avait plus droit à l'erreur.

" Vous savez comment sont vos gens, Alicia ! Je comprends que vous soyez frustrée... Mais si je dois gagner leur confiance - et c'est bien ce que vous me demandez ? - Je dois d'abord être crédible avant de pouvoir être efficace ! "

Dans la pénombre de la pièce, le visage de l'aristocrate n'en paraissait que plus effrayant, éclairé d'en dessous par le bleu criard de l'hologramme :

" Votre Excellence ! Pas Alicia ! C'est Votre Excellence ! Et non, je ne sais pas ! répliqua-t-elle sèchement en refermant l'éventail d'un coup sec, et je ne veux pas le savoir ! C'est votre travail, votre problème ! Je me démène pour vous apporter toutes les conditions nécessaires à votre réussite ! Alors j'exige des résultats ! Et vite ! Sinon...

-Sinon ? Vous quoi ? Vous voulez que votre coup monté sorte dans la presse parce qu'il échoue lamentablement ?

-Du chantage ? Vraiment ? Ah ! C'est une blague, j'espère ?!

-Un simple avertissement : je suis mercenaire, je suis un professionnel. Pas magicien, ni sorcier, ni tête de turc attitrée d'ailleurs... Juste que les choses soient claires entre nous. Je fais mon travail, et je le fais bien. Laissez-moi seulement le temps dont j'ai besoin. "

Le clawdite croisa les bras avec une mine blasée. L'ondéronnienne fronça le museau, furieuse.

" Et de combien de temps avez-vous besoin, exactement ? Leur fichu rendez-vous a lieu dans moins d'une semaine !

-Ce sera amplement suffisant. Je reviens vers vous dès que j'ai du nouveau. "

L'alien coupa la communication de son propre chef, laissant sa cliente vociférer après lui sans l'entendre davantage.

" Triple imbécile. Je vais devoir m'en mêler moi-même, si ça continue ! "

Sauf que... Non, elle ne pouvait pas. S'exposer à être mêlée de près ou de loin à ce qui se préparait était bien trop dangereux pour sa réputation, et celle de son rejeton. Jonas. Ce petit ingrat ! Elle se pliait en quatre pour lui, elle faisait littéralement des pieds et des mains pour que sa médiocre carrière décolle... Et lui prenait un malin plaisir à tomber dans tous les pièges qu'on lui tendait ! C'était à croire qu'il se régalait de la voir enrager dans l'ombre !

Emalia. La simple évocation de sa cousine força Alicia à se lever pour arpenter la pièce. Même après toutes ces années, la rancune était là. Intacte, comme au premier jour. Elle avait bien essayé de s'en détourner, avec sincérité. Mais rien n'y avait fait. Une Kira était peut-être incapable de pardonner, il devait sans doute y avoir un point de génétique là-dedans...

La grande dame poudrée inspira. Elle devait se calmer : après tout, rien n'était encore joué ! Si le clawdite parvenait à s'infiltrer parmi ces rebelles à deux crédits, alors, elle pouvait croire en la réussite de son petit plan mesquin. Restait à savoir si Voyl Clawback tomberait bel et bien dans le piège qui lui était destiné. De cela, elle ne pouvait en être certaine : le moindre imprévu, le moindre doute, et l'anguille lui filerait entre les doigts, et sa chance de compromettre la reine tout de go.

Oh, elle n'avait rien contre cet espèce de grand échalas à la mine d'enterrement... pas directement. Elle ne savait d'ailleurs pas grand chose de lui. Mais il avait eu le malheur de répondre favorablement à une requête de cette infâme petite enquiquineuse : il allait donc bien malgré lui manger son chapeau. Il était hors de question que le plan d'Emalia aboutisse... C'était elle, Alicia Kira, qui sauverait Ondéron, et Jonas qui en récolterait les lauriers ! Il ne pouvait en être autrement : elle ne le permettrait pas.

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Hrp : Merci à Emalia pour son PNJ, j'espère qu'il est à la hauteur ! Very Happy
Luke Kayan
Luke Kayan
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- Les gens pensent qu'il leur faut voyager dans des contrées lointaines, dangereuses pour rencontrer l'Histoire. Sous prétexte de nombreux ouvrages, de sa proximité et de ses ruines soit-disant très connues, Ondéron est méprisée des chercheurs. Je suis pourtant sûre qu'elles recèlent de secrets inavoués, de détails passionnants. La faune, la flore, l'archéologie, l'histoire, Iziz est si riche et sa proximité avec Dxun ne fait qu'épaissir le mystère. Quel est l'impact de cette Force Obscure, pourquoi, comment les lieux maintiennent-ils cette négativité ? Bien entendu ça n'est pas mon domaine et je n'irai pas plus loin, mais je suis fasciné par cette nature qui semble épargnée de toute calcination. Là où l'homme qui manie la Force Noire se consume, elle s'adapte, jaillit, naît et grandit. Et les ruines mes chers élèves. Ces ruines autrefois majestueuses, dévorées sans complexe par une riche flore qui n'a que faire de la richesse de pierres ornementales. L'artificiel importé pour dresser un véritable palais aux rois s'est mêlé au naturel pour donner naissance, j'en suis sûr à un nouveau type de sédiments. Imaginez si nous découvrions une nouvelle fusion, une composition qui maintiendrait l'Histoire figée dans le temps et qui nous attendait. Ah les enfants, passionnante est l'histoire racontée de la bouche des Anciens Écrits, des Hommes qui l'ont vécu, mais authentique, fidèle et objective, trop souvent ignorée est l'Histoire dont la nature parle.


On aurait pu confondre le professeur Bô avec les pierres cabossées qui chutaient encore parfois du haut de leur tas de ruines. Aussi voûté, la peau dure et la démarche lente comme un rocher tangue puis glisse au fil de l'érosion du haut de sa falaise, l'ancien universitaire continuait pourtant ses recherches. Indéfectible amoureux de sa matière, l'Adarien s'arrêtait pour sonder le vent qui passait au travers du trou de son crâne, lui chantant des histoires de météos présentes et de tragédies passées. L'homme s'était spécialisé dans l'Histoire et l'Archéologie. Il étudiait le terrain, les herbes, le type de sable, si besoin les fossiles et les pierres (naturelles ou issues de constructions) pour déterminer comment les choses s'étaient passées. L'Ordre avait profité de son expédition, assez modeste (3 anciens étudiants fidèle à leur professeur et le professeur en question) pour prendre des échantillons, des notes et seconder l'ex-universitaire. Un Padawan, voyant de préférence, aurait sans doute été plus adéquat mais l'Adarien avait insisté pour que ce soit Luke.

Il avait aidé, à une époque, l'Ordre à crédibiliser l'entrée du Hapien à l'université en tant que Calisto, étudiant en criminologie. Sous ses airs placides, le vieil homme cachait de nombreuses vies, dont certaines incluaient une collaboration avec la police. Difficile donc, de refuser au professeur Bô, ce petit caprice. Ni la lenteur de l'homme, ni son débit incroyable de paroles sur de magnifiques couches de terres et de pierres amoncelées (auquel il ne comprenait rien) ne dérangeaient Luke. Le chemin escarpé et rocailleux en revanche... Au début, il utilisait la Force comme un radar pour se guider mais maintenir l'exercice devint vite difficile. Les pierres n'étaient que des objets inanimés, impossible ou presque de sentir leur présence, sauf si on passait au degré au-dessus et qu'on cherchait les organismes qui les habitaient. De plus, comme elles ne représentaient aucun danger immédiat, le Hapien n'était pas prévenu par sa fidèle Amie Mystique. En un mot, il galérait.

- Vous plus que quiconque devriez sentir les pierres mon cher élève - puisqu'il avait fallut le faire entrer à l'école comme tel, le professeur ne se faisait pas prier pour traiter le Chevalier à l'instar d'un autre étudiant. Besoin de maintenir la couverture ou pas. Par déférence et parce que le statut d'apprenti n'avait jamais été une insulte, Luke n'avait jamais repris le vieil Adarien.- Laissez la plante de vos pieds épouser les formes de la pierre, pressentez la pente avant qu'elle n'arrive. Un petit mouvement de va et viens, infime, pour se prémunir des pierres vacillantes, voilà. Oh surtout pas comme ça malheureux, jamais face à la pente. Sur le côté.

Les -vrais- étudiants observaient le spectacle, médusé, du professeur Bô et du Jedi. C'était à se demander qui tomberait le premier. L'Adarien avait de l'expérience mais sa race le condamnait à un vieillissement prématuré. À 65 ans, certains ne se déplaçaient même plus. Quant au second, son entraînement quotidien lui offrait des appuis souples, de jolis rattrapages mais sa vue encore plus mauvaise que le vieux chercheur lui jouait des tours. Finalement, aucun ne chuta, Bô parvint, après une jolie glissade précédée de jolis gravillons au pied de la pente en premier. L'une de ses étudiantes toussa à cause de la poussière.

- Voilà jeune fille, ça vous apprendra à ouvrir les paris sur qui se cassera la binette le premier.

Dans une ambiance bonne enfant quoique studieuse, le quintor travailla de longues heures entrecoupées de rares pauses. Luke récoltait autant de données que possibles pour le Temple. Même si un autre Jedi, plus fin connaisseur de la nature ou de l'archéologie aurait mieux fait ce travail sans doute, il y mettait du cœur. Son temps appartenait toujours à l'Ordre, pas question de le gâcher à prendre des vacances. Émie, une des étudiantes l'aidait gentiment à classer les échantillons. Certains iraient dans la partie botanique, d'autres en laboratoire pour être examinées. Lui, enfin, se réservait quelques prélèvements de plantes, y compris des mauvaises herbes pour une prochaine méditation. Il espérait alimenter son deuxième mémoire toujours en cours (vu la croissance exponentielle de ses missions pratiques sur tout genre de terrains, ses travaux avançaient plus doucement que les premiers), en comparant la réaction, la santé et toutes sortes d'autres conséquences de la présence de la Force plus ou moins intense sur différents lieux de la Galaxie. Il se concentrait cette fois, surtout sur l'absence de cette dernière, d'où son terrifiant voyage à Myrrk il y avait un an mais il fallait bien comparer.

- Dis donc mon petit, ce ne serait pas ton comlink qui sonne ? Je serais toi, j'irais faire un chekup pour tes oreilles aussi, ça devient inquiétant. Hihi

Luke remercia le vieil homme tout en abandonnant ce qu'il faisait. Il reconnaissait la vibration légèrement plus rapide du comlink de l'Ordre, ce devait donc être un appel officiel. Le jeune Jedi tâcha d'avoir l'air naturel. Dans le cas presque improbable où les anciennes étudiants retourneraient à l'université et y reconnaîtraient Luke, ce dernier était venu en tant que Calisto. Il ne voulait donc pas attirer l'attention.

Aussi bien pour maintenir la couverture que pour l'aider dans ses déplacements, le jeune homme portait un pantalon brun clair souple mais serrés aux chevilles. Des bottes semblables à celle de sa tenue de Jedi mais à la semelle plus fine lui permettaient de bien sentir les chemins escarpés. Ses cheveux blonds attachés en une queue de cheval retombaient sur une doudoune blanche à la capuche. Une besace en cuir profonde, pleine de poches ceignait son côté droit. À l'intérieur, les tubes à essais plein d'échantillons, son carnet de note, une solide corde, son sabre-laser, une lampe-torche (pas pour lui évidemment, sinon pour un éventuel camarade en détresse), une balise de secours, un localisateur, un comlink de rechange et une trousse de secours se partageaient gentiment l'espace.

Par chance, songeait Luke en tâtonnant dans ce fameux sac pour y trouver son comlink, la mission de recherche touchait à sa fin. Si on lui demandait de rentrer au Temple, il pourrait s'exécuter sans problème et sans interférer avec les fouilles.

- Ce doit être mes parents.

Annonça Luke - qui n'avait rien trouvé de mieux sur le coup- d'un air dégagé en décrochant. En bruit de fond, Muñoz, un des ex-étudiants se moquait gentiment du fils-à-maman qui devait sûrement se faire appeler pour rassurer ses parents ou pour qu'il n'oublie pas son goûter.
Voyl Clawback
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Ondéron - Jungle d'Iziz - Quelque part sous terre - 2:34 pm cadran planétaire

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Comment en étaient-ils arrivés là ?

Indifférent aux trésors d'Histoire qui défilaient sous ses yeux, peu habitués à une telle obscurité, le muun ruminait silencieusement, alors que sa garde rapprochée explorait le tunnel dans lequel ils n'avaient eu d'autre choix que de s'engager, après que Barkran et sa finesse légendaire ait eu raison d'une partie du fragile plafond de pierre à coup de blaster. Leur misérable tentative s'était soldée par un monumental échec - leurs connaissances en matière d'édifice ancien étant nulle - toute la délégation se replia sur l'une des brèches que le temps avait causée dans la paroi du fond. Laquelle débouchait sur un nouveau réseau de salles oubliées depuis des temps immémoriaux.

Jamais, de toute son existence, Clawback ne s'était autant posé de questions. Pourtant, lui seul savait si sa longue carrière avait été égrenée de situations improbables. Être représentant d'une firme galactique était loin d'être le long fleuve tranquille imaginé par les gens extérieurs au métier ! Mais cette fois, le taux d'improbabilité avait littéralement explosé.

Non pas qu'ils aient été pris dans un piège d'une grossièreté abyssale... Mais surtout : que la chose eut été ourdie contre eux. Facilitées par leur longue marche dans le noir, sa réflexion tortueuse de vieil aigri fit rejaillir sa paranoïa grandissante. L'affaire d'Aargau, puis celles de Kuat, de Coruscant. Nombreuses avaient été les fois où l'on avait tenté de lui nuire, malgré tout le soin qu'il avait mis, lui, et son entreprise, à protéger ses allées et venues au travers de la galaxie. On ne gravissait pas les échelons sans se faire tôt ou tard des ennemis mortels. Clawback aurait pu en citer des dizaines - dont certains, même au fond de leurs cellules, continuaient san aucun doute de nourir de noirs espoirs de vengeance. Peut-être vouloir mettre les pieds sur Ondéron avait été sa hardiesse de trop.

" On dirait que ça descend... J'ai l'impression que le sol s'enfonce. Faites gaffe ! "

Le moindre de leurs mots faisait écho à l'infini. Un détail qui n'échappa pas à l'esprit entièrement analytique de Voyl, qui en conclut rapidement que la suite du voyage allait se doubler d'un parcours beaucoup moins agréable qu'un simple couloir de vieille pierre. Parvenu à un renfoncement dans le mur, il s'y adossa un bref instant et émit à haute voix son propre constat :

" Nous devons arriver aux limites orientales de l'ancien palais, si mon orientation n'est pas si mauvaise... Peut-être cette vieille ruine communique-t-elle avec un réseau de grottes ?

-Ce ne serait pas si étonnant. On dirait que toute cette partie avait été adossée à... Hm... Le terme, je crois, est "paroi calcaire" ?

-Si c'est l'cas, soit on trouvera une sortie dans la jungle, soit on finira au centre d'la planète. L'un ou l'autre, on peut plus reculer, maintenant ! "

N'ayant d'autre choix que de partir à l'aventure dans ces sous-sols qui semblaient sans fond, la petite troupe se mit à circuler en file indienne entre les parois humides. Plus ils avançaient dans l'inconnu, plus un sentiment bizarre, oppressant. Tout ce qu'il exécrait... Tout pour achever de le mettre dans une humeur massacrante. Cette journée, qui avait si bien commencé, allait s'achever en une apothéose de désastres en chaîne.

Soudain, le vieux banquier s'arrêta net. Il lui sembla que ses cœurs s'emballaient sans raison, et il se concentra avec quelque mal pour réguler à nouveau son flux sanguin, d'ordinaire si contrôlé. Il porta machinalement sa main droite à sa poitrine, une expression subitement douloureuse venant fendre son masque impassible.

" Monsieur ? Un problème ? "

La voix de son secrétaire lui parvint de très loin, comme déformée par un océan translucide. Voyl se sentait inexplicablement mal, mais plus étrange encore : les autres visages ne semblaient pas affectés comme il l'était. Il voulut parler, mais aucun son ne s'échappa de sa gorge sèche. Lentement, de légers murmures serpentèrent jusqu'à sa conscience. Il les ignora tout d'abord... Jusqu'à ce que leur volume ne puisse plus lui en laisser le loisir.


Tsioâ diu tadti'... Tsioâ diu irwasasosûti... Tsioâ diu ru unsin is dzi tsiu...


Ce qui n'était qu'un crissement inarticulé devint syllabes, mots, phrases. Voyl ne comprenait pas un traitre mot de ces sifflements aux accents gutturaux, mais leur seule sonorité avait de quoi inquiéter n'importe quel esprit civilisé.

" V... Vous n'entendez pas ? parvint-il à articuler avec une peine audible,

-Non... Vous êtes sûr que ça va ? "

Voyl déglutit, se forçant de manière visible à tenter d'articuler quelque chose de compréhensible. Les murmures continuaient, et les mêmes sons se répétaient indéfiniment, comme une sombre lithanie. Le grand alien réalisa alors qu'il n'entendait pas : le volume des mots croissaient, devenaient envahissant... Personne n'aurait pu les ignorer.

Les voix venaient de l'intérieur.

Clawback se sentit brusquement nauséeux, et tituba sans parvenir à rétablir son équilibre. Il fut ratrapé in extremis par ses subordonnés, avant qu'il ne s'écroule, incapable de tenir sur ses jambes. Livide, hébété, le muun se sentait partir, les voix envahissant totalement son esprit paniqué.

" Monsieur Clawback ?! Bordel, mais qu'est-ce qui lui prend ?! Il allait très bien il y a une minute !

-Maintenez-le bon sang, je n'en ai pas la force...!

-Faut trouver une sortie, et vite ! Là, ça va pas le faire ! "

Dans l'esprit malmené de Voyl, les paroles alentours se mélangeaient, englouties par les murmures menaçants venus de nulle part. S'il en avait eu la force, il aurait donné cher pour pouvoir s'arracher la peau du crâne et en extirper les voix et leurs sifflements atroces avec les ongles...

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Ondéron - Astroport d'Iziz - Quai n°3 - 3:02 pm cadran planétaire

--

Raide comme un piquet, l'iotréen en faction devant la navette du Clan Bancaire attendait. C'était sans doute ce qu'il savait faire de mieux, avec le tabassage en règle, également. Mais en l’occurrence, le soleil de plomb de cette magnifique journée ne lui facilitait pas le travail. Dans le vaisseau derrière lui, on entendait à présent quelques éclats de voix. Il tendit l'oreille, curieux et enclin à se distraire d'un ennui total.

" Toujours aucune nouvelle ? C'est à peine croyable, enfin... L'horaire est dépassé !

-Incompréhensible : jamais Clawback ne se permettrait de faire un détour sans l'avoir signalé ! L'étoile la plus proche exploserait qu'il ne serait pas en retard !

-Je sais bien, monsieur. Mais comme je vous l'ai dit, la triangulation du signal n'a pas aboutie ! Les comlink sont injoignables... La dernière position connue de la délégation, et c'était il y a plus de vingt minutes !

-Contactez le palais : nous devons savoir ce qui se passe. "

Il n'ajouta rien, tout à ses pensées. Rien, quelques minutes auparavant, n'avait présagé du vent de panique qui allait souffler sur les services de sécurité de la flotte du CBI. Il y eut alors une effervescence nouvelle. Les techniciens et les délégués assaillirent les autorités locales de demandes, tentant de retrouver trace des muuns et de leurs gardes partout en ville. Le palais d'Iziz fut prompt à répondre, au grand soulagement de tout le monde.

" Nous avons bel et bien raccompagné votre délégation à l'extérieur du palais. Sa Majesté en personne nous l'a confirmée. Il n'y a donc aucun doute possible : vos ressortissants et Monsieur Clawback ne sont pas dans nos murs.

-Le signal de leurs appareils de communication est introuvable ! Comment ont-ils pu s'évaporer entre l'entrée du palais et l'astroport ?! J'exige votre entière coopération sur cette affaire ! Nous devons les retrouver séant.

-Nous allons faire notre possible pour enquêter : la garde va fouiller les alentours du palais ! Ils n'ont pas pu disparaître, c'est invraisemblable... Je contacte de ce pas le Temple Jedi : leurs hôtes ne sont certes pas en odeur de sainteté auprès de la couronne ces derniers temps... Mais ils sont loyaux et fiables. Ils connaissent la jungle alentours comme personne, à force de s'y entrainer et d'y chercher... Eh bien, toutes sortes de choses ! Vous savez comment sont ces mystiques.

-Alors j'espère que leur aide nous sera utile. Monsieur Clawback est un administrateur d'une rigueur exemplaire : son absence n'a strictement rien de normal, et je crains qu'il ne lui soit arrivé quelque chose. "

Les mots du subordonné passaient auprès de l'ondéronnien pour un curieux attachement. En réalité, il n'en était rien. Voyl Clawback n'était pas le plus apprécié des cadre de l'entreprise... Son caractère revêche et son intransigeance draconienne laissaient encore bien souvent une mauvaise impression à ceux qui avaient le malheur de ne pas satisfaire les attentes irréalistes du banquier. En son pays, il était une figure aussi crainte pour son influence au sein de la firme que respectée pour sa fortune et sa carrière reconnue... On ne pouvait pas reprocher à l'héritier des Clawback un manque de résultats. Son poste et ses compétences n'en faisait pas un dégât collatéral sans conséquence. Qu'allait-on dire du département des Collectes s'ils ne parvenaient pas à assurer la sécurité du directeur adjoint sur une planète aussi calme qu'Ondéron ? La risée de toute la galaxie : c'était proprement impensable.

Luke Kayan
Luke Kayan
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- Sous le palais... La triangulation émane de sous le palais.

Hoqueta l'expert dont l'appareil tremblotait entre ses doigts. Puisque la délégation n'appelait pas, Luke avait décidé de se baser sur les ondes électriques émises par la signature de leurs appareils. Le cadrillage selon les horaires, les vus et des "pas vu" des gens avaient pris du temps, mais une fois arrivé sur place, le pari risqué auquel le Hapien croyait peu (mais ils n'avaient pas vraiment d'autres solution) avait finalement porté ses fruits. Le signal particulier du numéro de comlink du Muun émanait d'une zone plutôt originale. D'abord on avait cru que le banquier se trouvait dans le palais, cependant personne ne l'y avait remarqué et un étranger, si prestigieux soit-il était toujours accueilli par des gardes et sa panoplie de vérifications. Alors une délégation...

- Avez-vous capté le signal GPS ?
- Ce n'est pas aussi précis que s'ils répondaient à un appel, d'autant plus que leurs appareils sont souvent coupés de leur réseau mais... À peu près oui.

L'expert n'était pas bien sûr de ce que lui faisait faire le Chevalier. De base, c'était un scientifique civil dépêché sur place par les autorités locales, Luke s'était servi de lui pour appliquer un processus de localisation très commun dans la police. Il espérait ainsi faire parler les murs qui avaient kidnappé le Muun, bien que les données le laissaient perplexes. Sous les catacombes ? Il n'y avait rien d'autres que des dalles humides soutenant une ancienne bâtisse en ruines, et encore, tout le monde ou presque pensait que c'était inaccessible. Comment donc, et pourquoi la délégation s'y était fourrée ?

C'était ce que le subordonné de Clawback se tuait à répéter à l'autre bout de son comlink : ce n'était pas le genre de ce dernier de se faufiler sous terre à la recherche de trésors archéologiques. Encore moins de jouer les adolescents fugueurs qui ne préviennent pas. Les autorités aussi étaient formelles : impossible de "tomber dans un trou" par inadvertance. Pour les occuper et éviter que diverses personnalités du coin ne rameutent, le Consulaire envoya ses confrères de la police chercher des informations sur leur guide. Malheureusement, il songeait de plus en plus que son action n'était pas juste un moyen d'éloigner les curieux. Il y avait quelque chose de louche dans l'enclenchement puis le développement de cette histoire. Collaborer avec le service de police de Coruscant pendant 3 ans avait initié le Jedi au profilage et, ingénieux dans son genre, il avait tendance à appliquer ses apprentissages à beaucoup de situations quotidiennes. Au lieu d'un potentiel meurtrier, c'était la victime qui était passée sous son savoir analytique, et conclusion : l'accident ne correspondait en rien à la personnalité de l'individu. Les chances d'un accident de ce genre explosaient les statistiques... Du côté négatif. Jamais l'enchaînement n'aurait dû se produire. Ajouté à cela la célébrité, assez sinistre, d'un banquier réputée, ça commençait à sentir le crime.

Ceci dit, l'urgence était de trouver comment sortir les Muuns de là-dessous, sans attirer l'attention ni faire s'effondrer les ruines. Luke poussa un soupir, l'obligation de mener l'enquête discrètement, le risque de faire chuter le plafond sur la tête chauve de Voyl, tout l'engageait à y aller. Cette situation n'était pas sans lui rappeler la rencontre inopinée avec le quinquagénaire dans un bâtiment victime d'un attentat. Décidément, le jeu des statistiques était tellement forcé qu'il en devenait ridicule.

- Mes appareils ne fonctionnent plus là-dessous, je crains que vous ne deviez y aller...
- À l'aveugle, j'ai l'habitude, ça ira. Vous, tenez-vous prêt au cas où si j'arrive à faire émettre les comlinks ou la balise de secours, et vous.- Luke avisa de jeunes policiers un peu perdus, restés sur place- Vérifiez qu'aucun civil présent ne transmette l'information, je pense notamment à l'expert-

- Vous voulez qu'il ne parle pas ? - Bégaya l'incrédule. Le blond retint un soupir. Croyant à un canular ou faire du babysitting pour Muun dispersés et sans respect pour les honnêtes travailleurs, les autorités avaient envoyé des bleus.-

- Mais non, nous ne sommes pas sous dictature. Expliquez-lui simplement que les détails de l'enquête restent confidentiels. Enregistrez un engagement audio officiel de confidentialité. Et surtout, empêchez les oreilles de la presse d'arriver jusqu'ici.

Le policier allait demander "comment on faisait tout ça" que déjà le chevalier s'engageait par une entrée ménagée. Ça avait été long vu que les catacombes dormaient sous un édifice historique, proche de la royauté mais Luke avait quelques contacts (notamment grâce à Saï) au Sénat. Il se demandait encore par quel miracle seule une petite dizaine de personnes se tenaient devant le trou suffisamment petit pour qu'il doive lui-même se courber légèrement. Déjà fatigué d'avoir dû ergoter avec les autorités pour prouver que ses suspicions d'accidents étaient fondées, le Consulaire finit par rentrer. Le couloir étroit débouchait sur un labyrinthe où quiconque se servant de ses yeux se perdrait. Heureusement pour une fois, Luke avait l'avantage. Outre les éraflures causées par les inhospitalières parois, il se fiait à ses sens. Les courants d'air si rares, les bruits mais également la Force.

La chance le mena enfin, après une longue expédition d'une heure au moins à sentir quelque chose. Un paquet d'auras à peine dissociables qui brillaient de terreur. Le Hapien pris soin de s'annoncer, il espérait trouver la délégation en assez bonne santé et... Disposition car sortir serait loin d'être facile. Son comlink ne fonctionnait plus, perturbé par la profondeur des lieux, le réseau en outre, coupé. Personne n'avait eu le temps de trouver les anciens plans des ruines, lesquels se seraient révélés bien incomplets d'ailleurs vu les allées secrètes sillonnant des catacombes que les natifs croyaient beaucoup plus sommaires. Voyl serait ravi, sans doute, de savoir qu'il avait découvert des passages insoupçonnés.

Le Jedi retint un soupir d'impatience. Il avait eu du mal à croire cet appel sérieux tandis qu'il s'apprêtait à rentrer des fouilles. Sérieusement ? On l'envoyait lui , chercher puis guider un groupe de civils encore plus guindés que la moyenne ? Le chef de la police locale avait simplement haussé les épaules "une taupe pour des galeries souterraines, parfait", ne cachant pas son hostilité pour les Jedis. La garde royale avait été plus distinguée mais aussi froide, prouvant à quel point les relations entre Ondéron et l'Ordre s'étaient dégradés, surtout côté faille royale. Le Temple lui avait dit que le but était surtout de sauver des vies, non sans glisser quelques mots par rapport aux conséquences diplomatiques dépendant de l'issue de l'affaire. On ne lui mettait pas du tout la pression là. Dire que le Chevalier avait juste eu la malchance d'être le Jedi le plus proche des lieux et qu'aucun explorateur ou gardien n'était disponible assez vite. Il avait vraiment le chic pour se retrouver où il ne fallait pas.

- Monsieur Clawback ? Monsieur Stone ? - Luke espérait encore que le guide soit un faux criminel soupçonné à tort, ou un vrai mais qui ne se serait pas encore révélé.- Vous êtes là ? Tout le monde va bien ? Y a-t-il des blessés ? Je suis le Chevalier Jedi Kayan, j'ai été envoyé pour vous chercher.

Luke fit passer sa besace par un passage étroit en tirant un peu. Cette dernière pesait lourd, garnie qu'elle était de soins de premiers secours, de capsules nutritives, d'eau et de lampes torches (pour les Muuns évidemment), sans oublier une balise de secours assez encombrantes. L'avantage, avait péroré le scientifique envieux de la faire breveter puis vendre grâce à cet inopiné sauvetage, c'est qu'elle fonctionnait même sans réseaux et dans les entrailles profondes de la terre.

Passablement échevelé, son élastique tenant une queue de cheval presque entièrement défaite, le visage griffé, le sauveur apparut aux yeux des victimes.
Voyl Clawback
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Stone avait disparu du champ de vision des holocaméras qui bordaient le Palais. Les yeux artificiels de la police ne l'avaient retrouvé que près de cinq heures plus tard, à plusieurs kilomètres du palais. Les déplacements des citoyens ondéronniens, fins connaisseurs pour beaucoup du passé de leur capitale et ses passages historiques à la dérobée, rendaient le travail d'un enquêteur autrement plus compliqué lorsqu'il s'agissait d'un autochtone. Le trouble-fête le savait bien. Il escomptait bien d'ailleurs que le temps que l'on retrouve - si on les retrouvait ! - les muuns et leurs gardes, il serait loin d'Iziz, dans la ferme familiale, à des centaines de kilomètres du remue-ménage. Un bon petit plan bien rodé, digne des plus grands casses. Il n'avait jamais rien eu d'un meneur révolutionnaire, mais il se plaisait à découvrir ses quelques talents en la matière, et la perspective de jouer un rôle dans la grande histoire d'Ondéron lui faisait parfois perdre le sens de la modestie.

" Ne t’inquiète pas. Avec ce qui leur est tombé sur le coin de la figure… "

Stone releva le menton, les traits de son visage à peine adulte soulignés par les ombres inquiétantes que projetait le maigre néon du plafond.

" … Nous ne les reverrons pas de si tôt, je te le garantis !

- Attends un peu… Qu’est-ce que tu veux dire par " avec ce qui leur est tombé sur le coin de la figure" ? On était pas juste sensé les paumer dans la jungle pour leur foutre la trouille ? C'était quoi, cette idée ? Je te suis plus, Stone ?

-Tu te souviens du passage vers le Gouffre, dont je t’avais parlé ? J’ai réussi à les y mener… Je t’avoue que je n’aurais jamais pensé que ce serait si facile ! Ahah ! Je me suis étonné moi-même, vois-tu. Ces types sont tellement sûrs d'eux, avec leur attirail dernier cri, qu'ils n'ont même pas vu le truc venir. Du gâteau ! "

L'homme parlait avec une joie visible, à l'image d'un enfant venant de faire une bonne farce à l'un de ses camarades. Son collègue, lui, ne partageait visiblement pas son enthousiasme.

" Ces muuns ne sont vraiment que d’odieux rapaces. Tu aurais vu son regard quand je lui ai parlé des fondations qui s’effondrent… ! Ahahah ! Pour le coup, j’ai cru que c’était lui, qui s’effondrait ! "

Son rire fut rapidement partagé par un autre jeune homme, avant que l'un des autres personnages présents ne lui jette un regard furibard. Lequel se tourna ensuite vers Stone, stupéfait :

" Tu veux dire que t'as pas respecté le plan ?

- Eh non, j'ai apporté... ma touche personnelle ! Et je compte bien ne pas m'arrêter en si bon chemin.

-Tu as emmené les aliens sous le palais ? Ils sont coincés là-bas ?!

-Exactement, l'ami. "

L'ondéronnien parut atterré, son regard inquiet accrochant celui des autres rebelles assis à leur table. Visiblement, l'initiative de Stone ne soulevait pas un enthousiasme délirant...

" Alors, tu les as…?! Ils sont... Non, t'as quand même pas fait ça ?

-S’ils ne l’ont pas été lorsque le plafond s’est affaissé, ils doivent l’être à l’heure actuelle. Personne ne survivrait longtemps sans eau ni nourriture dans une souricière pareille. "

Un silence lourd et malaisant s’abattit sur la petite assemblée réunie dans la cave. Stone leva les bras, un large sourire à peine ironique sur ses lèvres brillantes d'alcool :

" Croyez-moi, les gars. C'était peut-être pas très propre, mais c'était encore le mieux à faire ! Messieurs... à une Ondéron LIBRE ET INDÉPENDANTE ! "


--


Droomos avait précautionneusement soulevé la silhouette décharnée du muun sur les troncs qui lui servaient de bras. Le garde du corps déambulait donc à pas comptés dans le noir, Clawback inconscient dans les bras. Jamais il n’aurait imaginé un tel dénouement à ce qui s’était jusque-là apparenté à un petit voyage en terre exotique…

La situation avait dégénéré en un temps record. Il fallait dire que leur méfiance avait été considérablement amoindrie après cette journée somme toute banale dans un lieu confortable et protégé. Peut-être avaient-ils trop longtemps courru les palais et les palaces, ces derniers mois, pour avoir été préparé à un tel piège. Le karkarodon faisait tourner ses maigres méninges à toutes vitesses, essayant avec une rage presque désespérée de comprendre où avait commencé sa négligence. Pire : comment n'avait-il pas pu voir un piège aussi grotesque ?

Alors qu'il ruminait en silence, il manqua de heurter le dos massif de Barkran, qui venait de stopper net.

" Wow... Alors, celle-là... On me l'avait encore jamais faite, lâcha le chef de la sécurité en observant le sol un peu plus loin. "

Partout, à perte de vue : des ossements. Blanchis par le temps, secs comme du bois mort. De toutes tailles et de toutes formes. La roche moite qu'ils avaient sous les pieds en était ensevelie, ne laissant rien entrevoir d'un possible chemin de traverse dans l'obscurité presque solide qui les devançait. Dans un silence plein de leur étonnement sidéré, les membres infortunés du groupe d'explorateur s'avança jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus oser s'aventurer plus loin sans fouler aux pieds les restes inconnus.

" Par tous les crédits de la galaxie, souffla Reshord, statufié par les bribes de vision morbides que lui avaient offerts les rayons des torches des iotréens, qu'est-ce que c'est que cet endroit...?!

-J'aurais envie de dire... un charnier, gronda le karkarodon en tentant de percer l'obscurité devant lui, ou... un vieux champ de bataille. Allez savoir... "

Spectateurs indécis et tétanisés, conscient qu'ils ne pouvaient espérer s'affranchir d'une telle épreuve, les explorateurs contre leur gré tentèrent de traverser la zone envahie de fossiles sur la pointe des pieds.

Barkran, en tête de la troupe, avançait gaillardement en faisant craquer les restes momifiés sous ses lourdes bottes, indifférent au carnage archéologique qu'il générait. Au contraire, Goodfellow faisait tout son possible pour ne pas toucher à ce qu'il considérait comme des restes pestiférés. Mais plus ils avançaient, plus le tunnel qu'ils quittaient s'ouvrait sur un lieu dont la largeur et la hauteur indiquaient que la terre elle-même devait avoir souffert à cet endroit. Le sol plongeait de nouveau, et les murs de roche s'ouvrirent sur une salle dont les dimensions ne pouvaient plus se deviner dans une telle obscurité. Un simple courant d'air froid leur parvint, signe que l'abysse devant eux n'était pas factice. L'ossuaire prenait ici une toute autre envergure : des éboulis avaient partiellement noyé les restes pêle-mêle sur des centaines de mètre, formant une gangue glissante et instable.

" Cul d'Bantha et pisse de Reek, lâcha l'iotréen sous son casque, j'en ai vu des endroits louches... Mais là !

-Regardez-moi ça : il y en a d'autres ! Le sol est couvert de...Eeeaahrrk... Oh bon sang...!

-Les ondéronniens sont au courant qu'ils vivent au-dessus d'un charnier ?!

-Vu la profondeur du truc, ça m'étonnerait... ça doit faire des siècles que la forêt à recouvert toute cette merde... "

Un court silence ponctua son constat, chacun tentant à sa façon d’appréhender à son niveau la situation dans laquelle ils étaient tous, désormais.

" Je ne voudrais pas faire mon délicat, nota Goodfellow en quittant son prudent mutisme, mais cet endroit me met profondément mal à l'aise... Ne pourrait-on pas hâter le pas ?

-Pourquoi, vous avez une idée du chemin à emprunter, peut-être ? Je ne suis pas presser de tomber dans l'un de ces puits sans fond, pour ma part !

-Je... non, c'est simplement que... eh bien cet endroit m'oppresse au plus haut point ! Aucune raison de s'y attarder, non ?!

-Je me souviens d'avoir lu quelques chroniques sur l'Histoire de cette planète, commenta alors Reshord en parcourant les environs du regard, le passé d'Ondéron est lourd et méconnu. La dynastie des Kira est liée à la présence d'une secte Sith établie ici il y a des millénaires... Celle d'un certain Freedon Nadd.

-Qu'est-ce que les Sith viennent foutre là-dedans ?

-Je ne suis pas un féru de récits du passé, rigola le muun à l'adresse du garde, il faudra vous munir de bons datas sur le sujet si vous voulez connaître ces détails. Mais du peu qui m'a marqué dans ces chroniques, le lien assez confus entre les Kira et ce Sith est sans doute une pièce majeure dans l'établissement de la monarchie actuelle comme pouvoir absolu face aux chevaucheurs, qui jusque-là étaient les véritables maîtres d'Ondéron. "

Droomos jeta un regard intrigué au muun : il n'aurait jamais deviné que Hex Reshord lisait des traités d'histoire à ses heures perdues. Avait-il seulement des heures perdues, celui-là ? Puis, les mots prononcés par le secrétaire trouvèrent inopinément un écho dans ses propres souvenirs. Ondéron, les légendes qui lui étaient associés dans la presse vulgarisatrice, les récents évènements et l'accession de Kira au pouvoir avaient jeté une lumière nouvelle sur tous ces récits sur la petite planète de la lointaine région d'expension. Des choses qui, en d'autres circonstances, seraient restées l'apanage des seuls férus d'histoire galactique.

" Les chevaucheurs de bêtes, lâcha alors Shfal comme si c'était une évidence, ça doit être l'une de leurs dernières batailles. Vous avez vu la tête de certains de ces squelettes ? Il y a de tout, des humains, des bêtes...

-Oh.. Vous êtes connaisseur ?

-Euh, non, pas spécialement... C'est ultra connu, quoi. Le genre de détails que la galaxie retient quand il s'agit de transformer une histoire en légende... "

La réflexion parut laisser le secrétaire rêveur.

" Attendez : vous pensez que cet endroit pourrait être... ?

Reshord haussa les épaules, une lueur d'intérêt dansant dans son regard jaune.

" ... les vestiges de l'une des anciennes batailles des izizians contre les chevaucheurs ? Pourquoi pas ? Nous sommes vraisemblablement sur les anciennes limites du premier palais. La paroi qui soutient la version la plus récente de l'édifice est sans doute à plus d'un demi-kilomètre derrière nous... C'est impressionnant.

Shfal sursauta : dans ses bras, le corps inerte du vieux muun avait tressaillit. En catastrophe, il le déposa à terre, alors que Voyl ouvrait un oeil vitreux. Reshord se pencha nerveusement sur son supérieur, partagé entre l'inquiétude et un certain soulagement.

" Monsieur ? "

Le visage émacié et blême de Clawback renvoya une expression de perplexité hébétée. Il semblait perdu, encore à moitié de ce monde. Il se passa une main glacée sur le visage, reconnaissant à peine les visages qui se penchaient sur lui. Il avait encore la nausée.

" ...Où sommes-nous ? Qu-qu'est-ce qui m'arrive ? Tout est... flou... "

Lorsque Droomos le déposa sur ses deux pieds, il ne tint qu'une poignées de seconde avant de devoir s'accrocher au bras du garde. On le fit asseoir tant bien que mal contre la paroi la plus proche.

" Aucune idée, patron : vous vous êtes senti mal... Peut-être le manque d'oxygène ? On commence à étouffer, par ici. "

Voyl se massa les tempes, qu'il gardait encore douloureuses. La lucidité lui revenait avec une lenteur anormale. La sensation glaçante qui avait accompagné son malaise peina à se dissiper. Les commentaires de ses partenaires d'infortune lui parvenait avec un léger décalage.

" Des... Des voix, se souvint-il, j'ai entendu des voix.

-Quoi ? Il y avait des gens près d'ici ?!

-Non ! Non non... "

Avec une grimace de douleur, le muun s’agrippa au mur pour éviter de chuter de nouveau. Il désigna sa tête de l'index :

" Des hallucinations auditives. "

C'était la seule explication plausible que son esprit était parvenue à trouver. Le commentaire de Voyl plongea le groupe dans une perplexité alarmée. Droomos considéra le vieux muun avec étonnement : de mémoire, jamais Clawback n'avait été sujet à ce genre de problèmes. L'âge l'affectait-il déjà à ce point ? Il resta interdit, le temps de réaliser que son employeur, dans un état encore alarmant, tentait de se remettre de lui-même sur pied.

" Regardez pas en bas, patron. C'est pas beau à voir. "

Le ton presque désolé du karkarodon l'alarma plus que de raison. Bien loin d'obéir au conseil, son esprit n'eut pas de meilleur réflexe que de se focaliser instantanément sur le sol devant lui.

Voyl poussa une exclamation de stupeur et d'horreur toute mélangée.

Sa chaussure ripa sur l'un des os à ses pieds et il manqua d'en tomber encore une fois à la renverse. Incapable de contenir toute la révulsion que la scène lui procurait, il recula jusqu'à ce que son dos heurte la roche derrière lui.

" Par le Trésor... murmura-t-il en prenant conscience de la découverte, que... qu'est-ce que c'est que cette horreur... ?!

Son regard courut entre les jambes des personnes qui l'entouraient, avec la même sidération que celle qui avait été celle de Reshord et Goodfellow avant lui. Son regard effaré accrocha celui, vide, d'un crâne à moitié fracassé. Voyl ramena ses bras contre lui en une vaine tentative de se reconstituer un semblant d'assurance.

" On a traversé une espèce de fosse commune pleine de ces trucs-là pendant qu'vous étiez dans les vapes, ponctua Barkran d'un ton blasé, et m'est d'avis qu'y en a d'autres encore.

-D'autres ?! D'autre... quoi, encore davantage de squelettes ? Vous êtes en train de me dire, que ces galeries ont été bâties sur...

-Sur le résultat d'une bonne grosse baston d'il y a un bout de temps, sans doute...

Maigre réconfort : les voix fantomatiques semblaient avoir déserté sa tête. Le muun continua de les guetter presque inconsciemment durant de longues minutes, avant de soupirer d'aise en constatant que le phénomène ne se reproduisait pas. Il en venait à oublier les raisons premières de sa venue sur une planète pareille : une négociation de prêt pour le palais. En contemplant la scène qui s'offrait à lui, le directeur adjoint du Clan Bancaire repassait mentalement en revue nombre de détails troublants qui avaient jalonné cette journée catastrophique.

Qui, subitement, lui en rappela des dizaines d'autres.



La rencontre avec Arl Ansal sur Correlia. L'attaque des mercenaires et leur fuite avec l'aide de la Corsec...
Ce dîner d'affaire sur Kuat. L'attentat. Lana à l'hôpital...
La tentative de meurtre contre Doyle, sur Telerath.
Cette réunion au sommet de la Veragi's Road tower, et l'attaque de Dubrillion le jour même.




Et désormais, il était ici, dans les tréfonds d'Iziz. Là où il n'aurait jamais dû être !

Les dernières années de sa vie avait été jalonnée par des catastrophes, toutes plus dramatiques les unes que les autres. A chaque plainte de Shiney, il n'avait répondu que d'une manière froide et évasive, arguant que ses ambitions méritaient les risques...

Vraiment ?

Au final, si les muuns ne voyageaient pas, songeait Voyl, c'était bien qu'il y avait une bonne raison derrière tout cela. Il touchait aux limites de ses fonctions de représentant, et cette excursion dans la jungle ondéronnienne serait peut-être bien la dernière de ses nombreuses erreurs. Lui qui se targuait d'être un mathématicien hors pair, se laissait attraper comme un jeune naïf par un excès de zèle. La leçon apprise valait-elle le prix qu'il payait à présent ? Que devait-il comprendre ? Devait-il réellement se ranger à l'avis de ses proches et cesser de traiter lui-même en se mettant en danger comme il l'avait fait si souvent ?

Sous leurs pieds, le sol semblait s'être brusquement effondré, ne leur laissant comme champ de vision qu'un abysse béant brodé de pics et d'éboulis d'une taille considérable. Très loin au-dessus d'eux, des failles couraient jusqu'à la surface, laissant filtrer quelques minces rayons de lumière.

" J'crois qu'on est mal barré. " constata froidement Barkran.

Voyl leva les yeux au ciel, ses épaules s’affaissant en une posture de pur supplice.

" Combien d'années d'études avaient vous fait pour pouvoir nous sortir une si magistrale conclusion ? " grinca-t-il, acide.

Passablement irrité, il réajusta nerveusement sa mise et pris l'initiative de s'enfoncer de lui-même sur le sentier étroit qui longeait le gouffre.

--

" Vous avez QUOI ?!! "

Sa voix avait brusquement déraillé, manquant de fêler le verre en cristal de Naboo qu’elle tenait. Au travers du comlink, la silhouette bleutée du clawdite tressautait au gré des fantaisies de la retransmission.

" L’initiative est venu du rebelle, madame, elle était impossible à prévoir. Il a saisi sa chance... Lui-même a été étonné que ses visiteurs parviennent à le suivre jusque-là dessous. Je ne sais pas grand chose de plus...

-VOTRE EXCELLENCE ! PAS MADAME ! " s’égosilla-t-elle au-dessus du micro, hystérique.

Le verre fut jeté avec force au travers de la pièce.

" Vous n’êtes qu’un incapable, un raté, un stupide petit... !! Vous étiez sensé les éloigner de cette planète… Faire un scandale !! PAS LES TUER !! "

Sa voix avait déraillé dans les aigus sous le coup de la panique. Une Kira ne devait pas perdre son sang froid, non... Pourtant, en cet instant, Alicia ne s'était jamais sentie aussi peu Kira. Il ne lui venait pas assez d'adjectifs... Le dictionnaire basic standard ne pouvait contenir assez de mots pour qualifier l'hystérie qui la prenait devant autant d'incompétence.

" Avez-vous la moindre idée des moyens dont dispose le Clan Bancaire, abruti ?! Le muun que vous avez enterré sous ce palais est le bras droit de son directeur !! C'est un représentant officiel connu jusqu'au sénat !!! Cette planète va bientôt grouiller de tout ce que la galaxie compte de fouille-fange et de miliciens ! Ils vont lancer des enquêtes à tour de bras pour savoir ce qui est arrivé ! Retourner chaque parterre de fleurs pour les retrouver ! C’est une CATASTROPHE ! VOUS ÊTES UNE CATASTROPHE AMBULANTE !! "

Ils allaient fouiller, fouiner, tout retourner... Et, fatalement… Ils remonteraient une piste. Sa paranoïa atteignait des sommets, elle claquait des dents rien que d’y songer. Pourquoi avait-elle confié une telle mission à un étranger ?! Si jamais le nom de Kira apparaissait dans le collimateur des limiers, elle savait par avance qu’Emalia ne mettrait pas trois cent dix ans à faire son calcul.

" Alors, votre objectif change dès maintenant, Ubolc ! fit-elle en le pointant rageusement du doigt, à partir de maintenant, vous allez méticuleusement m’éliminer tous les responsables de ce fiasco ! Je ne veux plus un seul témoin en mesure de fournir la moindre information concernant ce foutu plan idiot ! "

Ses chances s'amenuisaient au fur et à mesure que le temps s'écoulait. Sa robe s'avachit avec un bruit mat sur le large siège décoré.

Pourquoi ? Pourquoi fallait-il TOUJOURS qu'elle tombe sur des incapables ? Pourquoi un seul de ses plans géniaux ne pouvait-il pas, pour une fois dans l'histoire, se dérouler comme prévu ?

Elle en étouffait des larmes de rage. Il allait falloir tout reprendre de zéro... Effacer toutes les traces. Alicia considéra le comlink qu'elle tenait avec un mélange de fureur et de peur. L'appareil manqua de céder sous sa poigne.

--

Dans les boyaux noirs, loin sous le sol du palais millénaire, l'atmosphère s'était considérablement alourdie. Ils avaient lentement contourné le gouffre, progressant tant bien que mal sur le terrain glissant des ossements mélangés aux gravats et autres reliques d'un passé mouvementé.

" Ces tunnels ne font pas partie du palais, affirma-t-il alors, catégorique, ils ont été creusés bien plus récemment. Sans doute par des animaux.

-Comment vous pouvez-vous parvenir à une telle déduction ?

-A l'aide de l'outil le plus commun de notre civilisation, mon cher Goodfellow : la logique. Regardez un peu la manière dont ces couloirs sont agencés, et osez me dire qu'un esprit un tant soit peu cohérent aurait pu concevoir une aussi piètre géométrie ? "

Maintenant pleinement revenu à lui, Clawback avait progressivement repris l'ascendant sur ses nerfs, et réfléchissait en silence à toutes leurs récentes découvertes, au fur et à mesure de leur marche. Ils n'avaient toujours aucune idée de l'endroit exact où ils se trouvaient, ni de combien de temps ils devraient arpenter les profondeurs d'Iziz avant de pouvoir espérer en sortir. Néanmoins, ils n'avaient pas encore rencontré de cul-de-sac, ce qui leur laissait encore quelque espoir de trouver une issue à cette prison de pierre.


Loin, très loin, quelque part au-dessus de leur tête, une voix résonna en échos dispersés dans les cavités de la terre.



"... Vous êtes là ? Tout le ...onde va ...en ? ... "



Un instant, Voyl crut avoir rêvé.


"...Je suis le ....yan, j'ai ... env...vous ...ercher. "



Il pensa même au retour inopiné des voix murmurantes. Mais non : tout le monde se dévisageait avec surprise, signe qu'ils avaient tous bien entendu. avec une joie soudaine, le groupe se mit à manifester sa présence de toutes ses forces :


" ICI !! SOUS VOS PIEDS !!

-PAR ICI ! EN DESSOUS !!

-EH OH !!

-ON EST LA ! SORTEZ-NOUS D'ICI !! "

Ils s'arrêtèrent, guettant une réponse, les coeurs battants. Et une réponse vint !

Mais... elle n'émanait pas de la surface. Plutôt des profondeurs. Quelque chose de sourd, de puissant... de profondément angoissant.

" Qu'est-ce que c'était ? " siffla Clawback, figé en vol.

Toutes les têtes se tournèrent vers les abords de l'abysse qu'ils venaient de quitter. Le silence revenu, toutes les oreilles aux aguets purent alors capter un grondement sourd, suivi des échos inquiétants d'effondrements dans le lointain.

" Vous aviez p'têtre raison en fait, conclut Droomos, la main portée à son blaster, y a bien des bestioles par ici... "

Le karkarodon se retourna vers le gouffre auquel ils avaient espéré pouvoir tourner le dos. Clawback battit en retraite derrière les rangs des gardes, incertain de la conduite à tenir devant autant de nouvelles données en si peu de temps. Barkran, un oeil sur Droomos à sa droite, explora avec prudence le noir devant lui à l'aide du viseur de son blaster. Un pas, puis deux, en direction du vide. Le temps de comprendre que sa manoeuvre n'avait jamais été une bonne idée.

L'iotréen, mû par un instinct sans doute bien plus sûr que celui des muuns, arrêta brusquement sa course et hurla :

" ATTENTION !!! "

Dans un craquement assourdissant, la roche sous leurs pieds céda.

Voyl sentit la gravité l'écraser, la surprise et la terreur provoquées par cette sensation le prenant au dépourvu. Une courte exclamation d'effroi plus tard, il était précipité plusieurs mètres en contrebas, roulant sans pouvoir s'arrêter sur les pentes rocheuses du gouffre. Il ne dut son salut qu'à la présence hasardeuse d'une stalagmite sur un surplomb précaire.

Durant de longues minutes, il n'y eut plus rien d'audible depuis les tréfonds que les échos infinis du fracas de leur chute.

Lorsqu'il revint à lui, complètement sonné, Voyl loucha sur le vide immense et noir qui lui faisait face. Allongé le long d'une corniche qui avait arrêté sa descente, le bras gauche pendant dans le vide, il ne s'en était fallu que d'une poignée de centimètres... L'adrénaline le fit se relever plus surement qu'une piqûre de médipacs. Mais ses forces l'abandonnèrent aussitôt, et les douleurs réveillées de ses anciennes blessures le laissèrent de nouveau à terre, brisé, la respiration désespérément haletante. Les plaies de ses bras et de ses jambes constellaient ses vêtements de sang à chacun de ses mouvements, le brûlant aussi sûrement que des flammèches. Sa main écorchée tâtonna avec nervosité vers le revers de son veston, y cherchant ses effets personnels. Il trouva avec un soupir de soulagement la forme familière de son brouilleur, son pistolet de secours... En revanche, la poche extérieure de son manteau avait été déchirée, et son comlink resta introuvable.

" Dites moi que c'est un cauchemar... je vais me réveiller... " gémit-il en tentant de s’agripper aux rochers au-dessus de lui.

Dans un état pitoyable, Clawback s'échina à ramper hors de la faille où il s'était écrasé. Tout son corps fin et maladif souffrait de la chute, son costume - un de plus - déchiré et couvert de poussière. L'air était lourd et chargé, rendant sa respiration d'autant plus difficile et saccadée.

" A l'aide ! " lança-t-il en désespoir de cause, la tête tournée vers les hauteurs d'où avait émané la voix providentielle, s'il-vous-plaît...argh... que quelqu'un nous vienne en aide ! Je... "

Il cessa soudain de respirer, le regard figé devant lui.

Dans l'ombre du gouffre, quelque chose d’absolument gigantesque s'était mit à bouger. Les trois cœurs du muun s'arrêtèrent de battre. En un instant, Voyl s'était statufié, épouvanté par la taille de ce qu'il pensait apercevoir.

" Qu'est-ce... que ? " murmura-t-il en reculant le plus lentement possible.

A plusieurs longueurs de lui, la chose avait senti sa présence inconvenante. Un œil rouge - puis deux, puis trois... s'ouvrirent dans le noir, se fixant sur la minuscule chose contre la roche.
Une tête de près de trois fois sa propre taille émergea , visiblement abîmée par les éboulis rocheux. Une paire de mandibules tout aussi démesurées claquèrent avec agressivité.

GROS problème:

Voyl ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit.





Quelle fin stupide pour un homme tel que lui. Vraiment.


--

Hrp:
Luke Kayan
Luke Kayan
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Au creux de cette double obscurité -la sienne et celle du monde souterrain qui les entourait- Luke perçut plusieurs voix. L'espoir renaissait, il y avait plusieurs âmes à sauver, ce ne serait pas aisé, mais en progressant doucem...

L'effondrement résonna jusque dans les tempes du Chevalier qui s'était crispé contre sa paroi, participant mentalement à la chute. Suivant les traces des hommes, la Force voltigea, plongeante, vers les auras qu'il avait accroché avant. Un faible écho lui promit que les prisonniers demeuraient, encore en vie, sans préciser leur état. Le destin choisit cet instant pour donner un coup de main ironique au Jedi, répondant à l'effroyable chute précédente. Fissurées de l'intérieur, les parois auxquelles Luke se tenaient craquèrent, de longs sillons préoccupants se dessinèrent soudain, accompagnés de bruits cauchemardesques. Une seconde plus tard, le sol se dérobait sous les pieds du Consulaire qui glissa, traversant les étages plus vite qu'aucun archéologue habile ne l'eût fait.

Par réflexe, il roula contre la surface qui se présentait, dure, sous son corps meurtri. Ses pouvoirs s'activèrent, faisant flotter les éboulis qui tentaient de l'écraser. Par chance, les pierres, relativement menues ne lui coûtèrent que peu d'efforts à maintenir en l'air avant qu'il ne les dégage sur le côté. Dans un passage étroit, Luke glissa, tantôt debout, tantôt sur les fesses enchaîna de capricieuses montagnes russes et de facétieux tobogans. Guidé par les bruits des hommes qui s'étaient éveillés, le Chevalier parvint jusqu'à eux. Son visage était largement griffé, tout comme ses coudes, ses genoux, tout ce qu'il avait choisi de sacrifier pour avancer plus vite dans les catacombes.

Tandis que Reshord pointait une créature immense en tremblant, inutile indication, le chef de sécurité eut la bonne idée d'expliquer la situation. Malgré son professionnalisme évident, l'inquiétude perçait dans sa voix, et personne ne le lui reprocherait vu la série d'événements qui infectait toute forme d'optimisme.

Un troisième cri rendit réelle l'arrivée de Luke au milieu du petit groupe. Jusque là, on ne l'avait pas vraiment remarqué, ou crut en sa présence d'ailleurs. Si loin, dans les tréfonds d'une terre inconnue, peu encore pensaient leur salut possible. Pour une fois, la petite taille de leur sauveur ne les découragèrent pas. Ils n'eurent pas le temps de juger son minois de premier de la classe, simplement heureux de voir quelqu'un de l'extérieur.

- Cachez-vous dans une faille étroite, ne bougez plus et si vous avez un produit alimentaire, jetez-les loin de vous.

S'exclama Luke dont l'autorité, inhabituelle, s'exprima avec une rare efficacité. Le chef de la sécurité indiqua l'endroit où se trouvait Voyl. Le Hapien ne l'épargna pas, direct pour leur sécurité à tous.

- Je suis aveugle, guidez-moi.

Un glapissement rugit des entrailles de Reshord mais le garde l'empêcha d'un regard d'en dire plus. Il avait vu des Jedis à l'oeuvre et les savaient capables de prouesses. Quant aux autres, ils préféraient simplement ne pas y penser. Mieux ne valait pas se lamenter sur leur sort dépendant d'un handicapé.

À demi-guidé par les ordres secs et précis du chef de sécurité et la Force, Luke entreprit de descendre. Il chutait souvent mais se rattrapait grâce à ses dons. Ses mains étaient devenus des crochets ensanglantés mais déterminés qui agrippaient les roches. Son corps entier épousait les formes inégales de la caverne, poids-plume tout à fait acceptable malgré les lieux friables. Le blond stoppa une seconde, essoufflé. Il utilisait la Force comme un radar, l'envoyant ricocher contre le mur terreux. Un retour signifiait un obstacle, tandis que si l'onde s'évanouissait, il comprenait que c'était vide. Plus nuancée encore, l'interprétation de retours plus ou moins lents, indiquant une faille profonde ou superficielle. Juste de quoi poser ses pieds pour continuer la descente infernale. Utiliser ses pouvoirs avec une telle précision épuisait Luke. Par chance, il était endurant et surtout, profitait de ses capacités de guérison. Impossible de soigner toutes ces plaies brûlantes, cisaillées par le roche et saupoudrées de poussières, mais le minimum lui permettait de continuer.

De Voyl, il émanait de puissantes ondes de terreur compréhensibles. Le blond bondit de sa dernière roche pour arriver devant le Muun. La bête, boule de fureur, l'avait malgré lui guidé jusqu'à la scène digne d'un holofilm d'horreur. La plateforme tint bon malgré un petit tremblement. Si seulement Karm avait été là, il savait apaiser les animaux lui, encore plus ces cauchemardesques exemplaires. Le jeune homme hissa une barrière invisible entre le Munn et la bête, maintenant ce mur de Force qui ne durerait pas.

- Est-ce qu'il y a de quoi se raccrocher en-dessous ? Une chute serait mortelle ?

Le Chevalier ne se voyait pas combattre le Drexl dans cet endroit aussi exigu, sabre fendant l'air tout proche du visage sans nez du civil.

- Monsieur Clawback, si c'est le cas... Nous allons descendre très vite.

Luke réfléchissait à toute vitesse, il n'aimait pas faire participer les civils à leur propre sauvetage. Non seulement c'était son devoir de les protéger mais ils n'étaient pas formés à ce genre de situation périlleuse. Malheureusement, les options étaient limitées. Le Hapien ne voulait pas risquer de faire s'effondrer les parois, sous peine de faire chuter encore les hommes restés au-dessus, et surtout, il ne pouvait pas se battre dans un lieu aussi étroit. Les pattes du monstre crocheraient bien le Muun au passage et sa propre arme pourrait faire des dégâts.

- Je limiterai notre chute avec la Force autant que possible... Il va falloir me faire confiance et tenir occupé la bête quelques fractions de secondes en criant, juste le temps que je coupe la roche qui nous maintient.

Indiqua le blond. D'après les dires du chef de sécurité, la créature était ailée mais les catacombes étaient justement... Encombrées, et sa grosse tête ne devrait pas lui permettre de fouiller le sol irrégulier où Luke comptait trouver une cachette parmi les éboulis. Pendant un temps, Voyl pourrait s'y réfugier et lui, sortir si nécessaire pour affronter le Drexl dans un endroit plus spacieux. Était-ce risqué ? Parfaitement. Surtout que dans son souvenir, Clawback ne s'était pas exactement plié à ses exigences.

- Je vais vous protéger, quoiqu'il arrive, je ne laisserai pas la créature vous atteindre.

Indiqua le Jedi, capable, il le savait (et le devait) d'avoir les réflexes suffisants pour scier la branche sur laquelle ils étaient malencontreusement posés. Furtivement, le Consulaire frôla le corps du Muun, sans avoir les détails exacts, incapable de se concentrer vraiment tandis qu'il maintenait le mur invisible -sur lequel le Drexl avait commencé à s'acharner, donnant de grands coups de tête, de cornes et de griffes- il nota juste que Voyl était apte à faire ça. Il n'était pas en danger de mort immédiat, aucune blessure n'était suffisamment grave pour le condamner derechef. Il devait souffrir mais l'heure n'était pas à la compassion. Tendu, le Jedi attendit, la porte de quelques millimètres lui permettant d'agir.
Voyl Clawback
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Il avait tant travaillé. Toute une vie… A bien des égards pour le commun, il aurait été celui qui avait « réussi sa vie », même si son perfectionnisme névrotique lui dictait qu’il n’en était rien. Tant investi, tant réalisé… Mais que cela pouvait-il bien valoir, lorsque la seule ligne d’horizon qui lui restait était une barrière de crocs de dix pieds de long ? S’il avait eu la maîtrise de ses cœurs en cet instant, Voyl en aurait ri. De ce rire affreux et glacé qui avait si souvent été le sien lorsque le ridicule de la situation l’envahissait comme un air empoisonné. Ridicule, oui… Comment pouvait-on se retrouver si sottement dans une telle impasse ? Mourir pour avoir suivi un guide trop zélé. Si cette arnaque était le complot auquel il pensait, il paierait cher pour voir le responsable crucifié vif en haut d'une tour. Une vague de haine et de fureur détraqua de nouveau son rythme cardiaque, et il sembla à Voyl que l'Univers se désagrégeait autour de lui. Non... Il lui fallait impérativement se reprendre... Il ne pouvait pas finir de cette façon... Cette sensation lui était déjà connue. Ce sursaut qui accompagnait la sensation épouvantable des drilles de la mort qui vous saisissait les chevilles.

Sa longue main livide serrait désespérément le minuscule pistolet de secours, glissée dans la doublure de sa veste. C’était tout ce qui lui restait, désormais, pour défendre l'existence qui était la sienne. Quelle chance lui aurait-on donné, donc ? Aucune ! Il n’avait aucune chance, il était définitivement piégé. Loin de lui, les systèmes de sécurité et les portes blindées, les appartements imprenables et les armées privées. Les quelques gardes sensés défendre pour lui cette vie-là étaient soit quelque part en contrebas, soit encore accrochés par le haut, sans doute en aussi mauvaise posture.

Dans le velours moiré de l’obscurité, la chose s’ébroua, furieuse.

Voyl, en deux dimensions contre la roche, tentait désespérément de fusionner avec son ombre… quand soudain, un bruit, sourd, perça à quelques mètres au-dessus de lui. Un grattement, un autre, puis un autre – le tout ponctué de grognements à peine perceptible pour son ouïe
La bête semblait vouloir extraire le bas de son corps d’un réduit pour les dominer de toute sa taille. Ils étaient les insectes, elle était le pavé. La rencontre des deux ne pouvait en aucun cas être sans danger.

" Est-ce qu'il y a de quoi se raccrocher en-dessous ? Une chute serait mortelle ? "

Il manqua de sursauter : la voix était si proche ! Comment quiconque avait pu se rendre ici en un seul morceau ? Alors que lui-même n’y était parvenu qu’avec un coup de pied magistral du destin ?

" Monsieur Clawback, si c'est le cas... Nous allons descendre très vite.

-Très dr… Attendez, qui… ? Vous connaissez mon nom ?! Qui vous envoie ?! Comment êtes-vous arrivé dans un endroit pareil ?! "

Sa voix nasillarde, rendue vibrante par la peur, peinait à laisser intelligible ses mots débités à toute allure. Un cri terrifiant coupa court à son méli-mélo de question, et il plaqua sa main contre sa bouche en un vain réflexe, conscient qu’il venait d’attirer à lui une attention qu’il avait jusqu’ici tout fait pour ne pas mériter… Un membre – une patte ? une aile ? Il ne sut le dire – venait de monter au-dessus d’eux, et la roche gronda de nouveau sous l’ajout d’une nouvelle charge.

" Et où êtes-vous d’abord ?! grogna-t-il soudain avec une mauvaise humeur presque incongrue, bon sang, je n’y vois rien ! "

Comme unique réponse, une main, plutôt petite et fine, vint soudain effleurer son épaule, au hasard de ses prises sur la roche. Dans le noir, il crut distinguer une chevelure claire : un humain, donc ? Il tressaillit. Cette voix… Il connaissait cette voix. Puisant dans ce contact imprévu pour tenter de dompter l’effroi qui avait paralysé toute son intelligence analytique, Clawback fouilla dans sa mécanique mémoire. La voix, chaude, chantante, maîtrisée, tentait visiblement d’apaiser sa panique :

" Je limiterai notre chute avec la Force autant que possible... Il va falloir me faire confiance et tenir occupé la bête quelques fractions de secondes en criant, juste le temps que je coupe la roche qui nous maintient. "

La Force… Un Jedi ! La surprise manqua de le déstabiliser de nouveau. Il sentit l’individu le plaquer légèrement en arrière, alors qu’une charge phénoménale venait d’ébranler tout leur maigre support : mais ils tinrent bon. C’était surprenant, peu compréhensible pour Voyl, qui, privé de tout moyen d'appréhender la Force, ne pouvait faire le lien entre les vaines tentatives du monstre et les gestes du Jedi. Saissant néanmoins la teneur de la demande du moine guerrier, Clawback fit de son mieux pour juguler la terreur qui le liait à la paroi et tenta de générer quelque écho sur la roche. Mais renoncer si facilement à disparaître aux yeux de la créature... alors que dix secondes auparavant, il priait l'Espace et le Temps qu'elle ne le broyât pas ? C'était lutter contre l'instinct primaire le plus puissant de son espèce : celui de conservation. Ainsi, sa tentative fut... molle, pétrie d'hésitations, et bien sûr, trop tardive. Il hésita à lancer l'un des gravats à sa portée... mais sa main resta cramponnée à la paroi.

" Je vais vous protéger, quoiqu'il arrive, je ne laisserai pas la créature vous atteindre. "

Il émanait de cette simple sentence une confiance étrange. Quelques miettes de lucidité retrouvée par l’apparition providentielle lui permirent de retrouver la logique de cette situation. Bien sûr, ils étaient là sur Ondéron, à Iziz… Leur temple n’était qu’à quelques kilomètres dans la jungle. Qu’un Jedi ait pu leur parvenir, c’était en réalité la seule explication de la présence de ce… ce… ? Un nom lui revint brusquement.

Des décombres.
De la poussière, des nuages entiers, le chaos…
Le noir, l’impossibilité de progresser autrement qu’à tâtons.
La douleur.


Il y était : c'était sur Dubrillion.






Je m'appelle Luke, je suis chevalier Jedi...







[Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien] De tous les Jedi de la galaxie, cette voix était celle de Luke Kayan ! Quel hypermathématicien aurait eu le cran de parier sur une telle probabilité ? Sur une galaxie comptant des trilliards d'individus, et des milliards de mondes ? Le jedi qu’il avait laissé derrière un mur de permabéton effondré, qu’il n’avait eu d’autre choix que d’abandonner aux soins de ses co-légionnaires… Une fouine indécollable qui l'avait pisté jusque dans les tréfonds de la Veragi's Road Tower en le traitant de suspect...

Une curiosité que Clawback avait longtemps pensé lui avoir été fatale : il n'en était rien. Le jedi était bel et bien vivant, et visiblement, à même de réitérer l'exploit de venir encore s'enterrer vivant avec lui en d'autres lieux ! C'était à s'en taper la tête contre les murs !

Je vais vous protéger, quoiqu'il arrive...

Le protéger ? L'esprit du muun ne sut que faire de cette donnée imprévue. Voyl avait été habitué à être protéger, autant qu’à se protéger lui-même, toute sa vie. Mais il y avait là une différence de taille : le Jedi n’était pas payé pour cela. Il n’était ni l’un de ses gardes du corps, ni même un membre d’une milice quelconque.

" Pourquoi faites-vous cela ? demanda-t-il alors, seule interrogation pleine d'une méfiante stupéfaction - au beau milieu d'un silence de mauvaise augure, pourquoi êtes-vous... ici ? "

Avec moi ? eut-il envie d'ajouter, mais ses cordes vocales étaient bien trop serrées. Sa question était mue par une perplexité soudaine, incontrôlable, résurgence chaotique de son mental si désireux de tout contrôler, toujours. Il lui fallait recoller toute cette incohérence, c'était inadmissible ! Aucun être sensé n’aurait risqué sa peau face à une horreur pareille pour… pour quoi, au juste ? Le sentiment d’avoir sauvé un type aussi ingrat et revêche que lui ? L’espérance de recevoir une grâce prime pour service rendu ? C’était bien mal connaître les oligarques de sa trempe… C’était bien mal connaître Clawback tout court.

Durant ce laps de temps, le Drexl avait cessé de s’acharner sur le mur invisible. Même si son intellect limité ne saisissait pas la raison pour laquelle les parasites en face de lui restaient impossibles à attraper, il relevait d’une espèce suffisamment finaude pour ne pas se limiter à un unique schéma d’attaque inutile et coûteux en énergie… Il lui fallait trouver une autre solution.

Le problème, avec les spécimens les plus âgés, c’était qu’ils avaient l’expérience à leur actif… Et des proies vicieuses, sans doute le monstre en avait-il déjà affronté de bien plus coriaces !
Avec quelques claquements de mandibules rageurs, l’énorme dragon insectoïde s’agrippa sur les falaises à sa portée et entrepris de s’élever dans le gouffre, son corps gigantesque raclant la roche au passage. Tout menaçait de céder à nouveau… et il semblait que c’était là la tactique retenue par le Drexl : gratter. D’énormes griffes noires, recourbées, dentelées, se mirent à cisailler la surface déjà endommagée de la paroi qui les soutenait. Un coup après l’autre, à la manière d’un chat se faisant les griffes, le Drexl entamait les plaques de roche. L’une d’elle finit par se détacher, et avec une vague d'air froid annonciatrice d'une fin violente et rude, entama sa tonitruante dégringolade jusque dans les entrailles d'Ondéron.

" Je crois... que... ça ne va pas suffire ! s'étrangla Voyl en se recroquevillant comme il le pouvait. "

Comme s'il avait pu répondre sciemment à ce constat défaitiste, le Drexl rugit. L'onde de son cri strident ricocha en échos dans toute la cavité... avant d'être couverts par de nouveaux fracas et cris. La stalagmite qui avait tenu jusqu'ici la mort en échec pour Voyl se désagrégea, les pieds du muun se retrouvèrent une fois encore dans le vide. Le plan de Luke Kayan prenait une avance inconvenante sur le calendrier... En une seconde, la gravité s'empara de toute son immense stature pour l'attirer vers le fond.


D'un geste réflexe, le vieux banquier s'agrippa à la bure du Jedi au passage, et l'entraîna tout de go dans sa chute.




Loin au dessus, les six yeux écarlates s'agitèrent de fureur : où était passé le quatre-heure ?
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