Luke Kayan
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- Comment ça vous ne pouvez pas m'emmener à l'adresse indiquée. Non mais... Attendez, je ne connais pas cet end... Bon bon ça va je descends, mais je ne suis même pas sûr que ce soit très légal de rompre le contr...

Contrat. La portière avait claqué au nez de Luke qui ne se priva pas pour insulter vertement l'individu -rendez-vous comte, un Malendrin osa sortir de ses lèvres. Il était vraiment fâché.- Et dire que ce méprisable chauffeur avait gardé tout l'argent versé sur son compte via datapad. Ah les taxis de Coruscant, pourquoi fallait-il que le Hapien ait des ennuis avec eux une fois sur deux ? Précisement lorsqu'il était habillé en civil comme aujourd'hui.

Mais inutile de brûler son karma en s'énervant contre ces rustres. Le jeune Jedi soupira tout en ayant le très stupide réflexe de jeter un coup d'oeil circulaire pour essayer de se repérer : À droite du noir, à gauche pareil, devant un paysage semblable nuancé de quelques bruits de klaxon. Des klaxons qui se rapprochaient. Luke se précipita sur le trottoir, échappant au dernier instant à une collision. Le taxi aurait-il vraiment osé l'arrêter côté route ? De fait, le Hapien se rendit compte que la marge était particulièrement étroite. Les petites navettes filaient devant lui, si proches que des mèches blondes balayaient brutalement son visage. Deux ou trois coups de klaxons achevèrent de le convaincre : le malotru l'avait éjecté de son taxi sans se fatiguer à le stopper de l'autre côté, là où s'étendaient les restaurants, les bars sagement alignés sur un confortable trottoir bien large. Le Hapien se permit un gros juron- comprenez un ZUT bien senti.- et déploya ses sens. L'ouïe n'était pas suffisante, un civil handicapé lambda aurait dû appeler les autorités mais un brin de fierté mal placé l'en empêcha. Ou la peur de déranger pour rien. Quoiqu'il en soit, ce fut sous les cris de quelques passants qui lui hurlaient "attention" que Luke profita d'un minuscule trou pour passer. Il évita de justesse une petite navette qui n'avait pas eu besoin de freiner car il avait bien calculé. Avec sa canne blanche cependant, Luke compris bien vite l'inquiétude des gens qui essayaient de lui hurler "Ne traversez pas ! On appelle la police !".

Le jeune homme repris son souffle, s'apercevant qu'il n'avait pas vraiment respiré pendant son passage. Il s'était uniquement servi de la Force, comme un radar, sur ce tronçon et l'épuisement montait dans ses veines, tel un poison ou une ambroisie. Dérouté par cette sensation de crainte mêlé au soulagement, Luke venait de prendre, mais ce humble voir timorié garçon en avait-il besoin ?, une nouvelle leçon d'humilité. Jedi ou non, il était limité dans la vie quotidienne là où des civils sans entraînement n'auraient aucun problème.

Gentiment, il repoussa les badauds qui s'inquiétaient sincèrement pour sa personne, repris son souffle et respira à fond pour repartir. Un souci de réglé, au suivant : perdu, Luke était perdu dans ce coin. Peut-être n'était-il pas trop éloigné de l'endroit où les gentils taxis avaient l'habitude de le déposer, ou alors il était vraiment à l'autre bout. Incapable de se repérer, le jeune homme erra un temps avant d'oser demanquer quelque chose à qui que ce soit. C'était dans l'autre sens que ça devait se faire... Lui qui se précipitait sur une personne épuisée pour s'inquiéter de sa santé, lui qui aidait... Mais aujourd'hui, le blond endossait le rôle du petit être fragile qui s'était fait arnaqué, avait failli se faire écrser et maintenant errait. Il avait l'impression que sa carte indiquant son statut au sein de l'Ordre était une fausse, de déranger cette société pleine de ses propres problèmes. Il désorganisait les gens qui se poussaient pour le laisser passer et allait, c'était enfin décidé, voler son temps à un agent pour demander son chemin... Sans oublier la possibilité de devoir arrêter quelqu'un pour l'aider à trouver un représentant de l'autorité. Ça en devenait ridicule !

Le jeune homme posa les pieds sur le marbre d'un grand centre commercial. Une genre de galerie où se réunissaient de nombreux magasins, boutiques, restaurants, coiffeurs. C'était l'heure de déjeuner et les gens affluaient des quartiers des affaires pour se retrouver dans ce coin plus touristique, en tout cas dédiés aux loisirs pour manger avant de retourner travailler. Un échappatoire, une heure ou deux dans une des jolies cafétérias dépaysantes. Luke n'avait parcouru que 100 mètres depuis son arrivée sur le trottoir après son épique traversée, jusque là retenu par de bons samaritains voulant absolument appeler une ambulance. 100 mètres donc, et il n'alla pas plus loin puisque levant la tête, à l'affût d'un bruit (il ne savait pas trop bien comment !) qui lui indiquerait la présence d'un agent ou d'un point d'informations, il se cogna dans quelque chose de mou. Sa canne glissa au sol et Luke avec. Ah ce n'était vraiment pas sa journée !

- Je suis désolé, vraiment... J'étais distrait. Je ne vous ai pas fait mal au moins ?

Pourvu que ce ne soit pas une de ces travailleuses armée de grosses piles de dossiers dans une main et d'un café dans l'autre, histoire de ne pas avoir ruiné des heures, des jours, des semaines de boulot. Manquerait plus que ça. Le jeune Jedi se redressa, plia sa canne vite fait pour la ranger dans son sac en bandoulière et ainsi dégager ses mains pour en tendre une à l'inconnue. Oui c'était une fille certainement, au parfum qui émanait de sa silhouette et qui avait un peu imprégnñe ses habits.

- S'il y a des dégâts je vous donne mon numéro et je réparerai.

Chevalier Jedi les 3/4 du temps, ingénu gentil petit garçon que la Capitale aurait vite fait de dévorer le reste, Luke n'avait jamais imaginé qu'en se prédisposant à réparer ses erreurs, un autre arnaqueur aurait pu saisir l'occasion. Prétendre des gros dégâts sur des fichiers importants, une blessure, qu'importe. Le jeune Jedi était soumis à l'interprétation de son interlocutrice quant au résultat de ce choc, heureusement amoindrie par sa propre silhouette loin d'être imposante.

Le parfum envahit ses narines à nouveau, lors d'un probable mouvement de la femme. Luke eut la vague impression de s'en souvenir mais vu son état d'aujourd'hui, il devait probablement rêver.
Evadné Publius
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La Grenouille Bleue était une cantina moderne et lumineuse, tout ce qu’il y avait de plus cosy. Située dans la galerie commerciale d’un grand centre économique de Coruscant, dans un district récréatif, elle charmait les jeunes salariés du quartier des Affaires limitrophe. Sa décoration était plutôt sobre, fondée sur des tons chaleureux et bruns, mais ses banquettes et fauteuils de cuir molletonnés donnaient un aspect élégant à la salle de restauration. Peu de végétations, le designer d’intérieur avait privilégié une touche industrielle. Il y avait aussi cet immense comptoir à emporter, garni de pâtisseries et de sandwiches aux différentes saveurs. L’établissement ne proposait aucune spécialité aux blumfruits, mais il préparait un breuvage qu’Evadné avait en affection. Et pour ce dernier, elle était prête à faire un crochet de plusieurs kilomètres en taxi-speeder.

C’était une boisson chaude dont la mousse de lait était parfumée aux violettes de Cadézia. Et un sirop sucré agrémentait le stim-thé qui s’y mêlait. La femme du propriétaire était cadézienne et lui avait susurré cette idée de recette à l’oreille. Et la toute blonde dénotait dans ce lieu de simplicité, par la douceur de sa robe immaculée. En général, le timing ne lui permettait pas de s’attarder sur place pour déguster une tasse. Le personnel lui préparait le tout dans un mug propice au déplacement. Elle avait tout juste le temps de récupérer le récipient et de courir après un taxi-speeder pour rejoindre le District Sénatorial et siroter son stim-thé à la violette et au lait de bantha entre deux réunions.

Et elle pensait à l’échéance de ces réunions en retraversant la galerie commerciale, quittant le cocon agréable de la Grenouille Bleue où elle avait échangé quelques mots en créole cadézien avec la compagne du gérant. Elle grimaça un peu quand un faux mouvement réveilla une vieille douleur dans ses côtes, lui coupant le souffle durant une fraction de seconde. Et le choc qui suivit n’arrangea pas ses affaires. Elle eut le temps de voir un visage pâle, le liquide de sa tasse s’envoler pour se renverser sur elle, brûlant la peau de son décolleté et sa gorge gracile. Evadné émit une plainte surprise lorsqu’en perdant l’équilibre, elle était tombée contre le dallage de marbre.

- Je suis désolé, vraiment... J'étais distrait. Je ne vous ai pas fait mal au moins ? S'il y a des dégâts je vous donne mon numéro et je réparerai.

Admirant les dégâts sur son derme et sa tenue blanche, elle n’avait pas encore relevé les yeux sur le responsable. Il lui fallait un carré de tissu, ou n’importe quoi qui s’y apparentait pour éponger le stim-thé qui séchait. Le sirop ne tarderait pas à coller à sa peau – rougie par la température du breuvage, et deviendrait plus délicat à nettoyer.

-Non..ce n’est rien…souffla-t-elle, mug vide encore en main, moue déconfite.

Elle avisa la paume tendue et y glissa la sienne pour se relever d’une impulsion incertaine.

-Merci…j’étais distraite également et…

Ses prunelles azurées venaient de croiser celles du coupable et elle cligna des yeux, étonnée.

-Monsieur Kayan ? Oh, je suis vraiment navrée. Vous n’avez rien ? C’est Evadné Publius, vous..vous souvenez ?

La culpabilité avait galopé à vitesse grand V dans l’esprit de la politicienne dès qu’elle l’eut reconnu. Ils s’étaient rencontrés sur Ralltiir. Elle replaçait la familiarité de ses traits hapiens, de son regard aveugle. Elle lui opposa un sourire qu’il ne put voir, et conserva ses doigts autour des siens, consciente de son handicap pour lequel elle ressentait la plus grande compassion.

-Je…j’ai juste renversé ma boisson. Le sol est tâché, quel gâchis…mais..

Elle ne souhaitait pas lui révéler que la boisson avait plutôt gâché sa robe et sali sa peau.

-Je serai ravie qu’en dédommagement, je puisse vous en offrir une en ma compagnie et m’assurer que vous allez bien.

Elle serait en retard auprès de la sénatrice et Ashford le lui remémorerait pour les mois à venir, mais se présenter dans cet état n’était pas une meilleure idée. Le repli stratégique pour éponger les dégâts était préférable. Avec son accord, elle guida le Jedi à travers la foule compacte du centre commercial jusqu’à rejoindre l’enseigne chaleureuse de La Grenouille Bleue. Elle n’était jamais à l’aise en présence d’un Jedi, mais les aventures cocasses partagées dans le secteur de Darpa avaient réussi à mater sa méfiance envers le Consulaire. Evadné se demandait surtout ce qu’il faisait ici, en plein Coruscant, dans une tenue civile.


Luke Kayan
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Luke se découvrit un défaut jusque là insoupçonné : l'égoïsme. Car si l'odeur d'un breuvage avait volé vers ses narines, il n'avait nullement partagé l'éclaboussure. Pas la moindre goutte. En revanche, il avait reconnu le fumet caractéristique des boissons chaudes. La personne s'était-elle brûlée ? Le Hapien s'en inquiéta aussitôt, à peine soulagé de la réaction honorable de cette dernière. À cette heure où chacun essayait de gagner de précieuses minutes libres -en se pressant, ironiquement- avant de retourner au travail, c'était rare, presque impossible à trouver. Luke avait beau être en plein processus de pardon pour cette planète ayant accentué pas mal de ses problèmes dont des missions retournées sur le dos, il n'aimait pas cette cohue. Au Temple, certes, à certaines heures certes, les toges bruissaient, se frôlaient, les pas cavalaient sur le sol marbré et les Padawans haussaient le ton en étude à la bibliothèque, mais ce chahus lui paraissait plus cohérent. Il y avait une idée de direction commune, et surtout, pas d'égoïsme exhacerbé avec des fonctionnaires qui jouaient des coudes, quitte à volontiers faire tomber leur voisin pour avancer plus vite. Une place sur une banquette des nombreuses brasseries se prétendant traditionnelles, le combat pour un plat prépréparé où les gens payaient le cadre trop chic, vaniteux (même si question style, ce ne serait pas Luke qui pourrait donner son avis.)... Les gens vêtissaient une parure de guerriers journaliers alors qu'un peu d'harminie suffirait, selon le Hapien à gagner du temps, faire disparaître le stress, mais forcément, il faudrait que chacun sacrifie une parcelle de son bien-être (ou semblant de bien-être) du midi.

Et bien elle, elle s'était arrêtée... Elle avait pardonné sa maladresse, l'aidait et... Le reconnaissait. Luke laissa filtrer quelques secondes avant de se rappeler de la porteuse du parfum qui lui disait quelque chose. Désormais, son eau de colonne était un peu gâchée, du moins étouffée par le fumet de la boisson chaude, mais le jeune Jedi se souvint effectivement de la métisse. Le souvenir de leur soirée particulière avec un homme non moins particulier lui arracha un sourire.

- Oui je e rappelle

Répondit-il en captant le ton d'Évadné avec quelques secondes de retard. "Vous... vous souvenez ?" La demoiselle était-elle au courant du cliché, pour une fois vrai concernant la mémoire d'un aveugle. Luke comme la majorité d'entre eux, avait développé ses autres sens ainsi que sa mémoire pour pallier son handicap. Il disposait donc, d'une excellente capacité, d'ailleurs ravie de réciter des articles complets de lois à n'importe quelle oreille. Ses cours aussi quand il enseignait, pour le plus grand bonheur -hum hum- de ses élèves.

- Euh.

* Ce ne sera pas nécessaire *

Mais en fait si, peut-être, pour se poser, reprendre ses esprits -parce que le Consulaire ne le pensait pas, mais cette chute lui avait fait prendre conscience que récupérer serait une option raisonnable.- et enfin découvrir où il avait atterri. De plus, force était de reconnaître que leur aventure si spéciale avec Sensi l'avait amusé après coup. Parler à sa "complice", témoin de la défaire de l'attachant arrogant le tentait bien qu'il ne sache pas du tout si aborder le thème ou non. Un peu gêné par cette main entourant la sienne, le Jedi hésita à la retirer avant de se raviser. Si ses collègues avaient l'habitude de le voir déambuler en suivant leur aura sans presque douter ou buter, une civile s'en étonnerait. Non pas qu'il craigne qu'elle le prenne pour un faux handicapé, mais c'était simplement... Plus facile. Pour l'instant du moins car le Hapien n'avait en réalité aucune idée de la culpabilité injustifiée que ressentait Évadné. Après tout, c'était lui qui l'avait fait tomber.

Tous deux se dirigèrent vers le fameux bar "la Grenouille bleue". Luke essayait de repérer le moindre indice dans les propos de la politicienne. Comme dans une enquête mais pour l'instant, aucun lieu cité, rien ne lui disait quoique ce soit. C'était bien sa chance, il avait été éjecté dans un quartier inconnu. En y repensant, la réaction du taxi était invraisemblable, il y avait une explication.

Le buit typique des titres des Holonews couvrit un instant le débit des clients avant que la Cadézienne qui le tenait ne décide de baisser le son. Cependant Evadné et Luke s'étaient installés à un endroit où les mots de la journaliste, une enthousiaste Twi'Lek qui portait très bien sa quarantaine avancée énonçait les titres.

"Course-poursuite entre la police et un taxi accusé d'arrondir ses fins de mois en vendant des bâtons de la mort sur Coruscant. Il aurait rejeté un de ses clients sur le bord de la route afin de mieux prendre la fuite, paniqué. Les caméras ne donnent pas assez d'informations mais si vous êtes cette personne, laissée sur le trottoir de la A - 254, quartier Est 678 appelez le comissariat. Vous n'encourez aucun risque et il ne vous sera posé quelques questions de routine."

- Hey, c'est mon taxi !

S'exclama le Chevalier, tandis qu'ils déposaient leurs affaires, surpris d'avoir la réponse à ses interrogations vagues une quinzaine de minutes après se les être posées.

- Je revenais d'une passionnante conférence qui avait malheureusement lieu dans un coin perdu.
-Forcément il n'y avait que lui et une dizaine de passionnés qui s'intéressaient à des recherches si pointilleuses. Encore moins qui le faisaient lors d'une de leurs journées libres, mais pour Luke oui, c'était un vrai passe-temps ! Comme la conférence abordait le thème de la Force, il avait préféré y aller en civil afin de ne pas mettre à mal à l'aise le jeune Rodien en fin d'années d'études (connu comme très prometteur par les gens du domaine, c'est-à-dire une centaines, pas plus.) - j'ai pris un taxi pour rentrer au Temple mais me suis retrouvé jeté dehors. Je savais bien que ça ne pouvait pas juste être pour rogner quelques crédits sur la course. Hum... Bref, j'appelerai plus tard. Ils seront déçus de m'entendre témoigner sur ce que j'ai vu, les pauvres.

On allait certainement lui demander de décrire l'intérieur de la voiture, s'il y avait effectivement des paquets suspetcs, quelle allure avait le taxi... Si la navette était homologuée. Autant de questions auxquelles Luke n'avait pas la réponse. L'identité du bonhomme, ils l'avaient sans doute pour lui avoir donné la chasse, alors ce n'était pas le Hapien, si Jedi soit-il qui pourrait les aider. Pourquoi ce genre de truc improbable n'arrivait-il qu'à lui ? Et puis quartier Est 678 ils étaient bien gentils aux Holonews... Ça n'allait certainement pas aider Luke à se repérer. Mais ce dernier n'en oubliait pas la Cadézienne (la victime du stim-thé renversé, pas la femme du patron.)

- Hum excusez-moi... Allez donc vous laver aux toilettes, si vous avez besoin d'aide -Oups...- euh je veux dire... Je vais aller passer commande. Comme ça tout sera prêt quand vous sortirez.

Voilà voilà ce qu'était l'habitude de proposer son aide à tout le monde. Et, horriblement gêné, Luke se dirigea vers le comptoir, sans savoir quelle était la commande d'Évadné... Et encore, il avait eu de la chance car au bruit, il s'était instinctivement bien dirigé vers la jolie barre où trônait amusée la femme du patron qui regardait sa compatriote d'un air amusé. Où l'avait-elle déniché celui.ci ?
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Il arrivait parfois qu’Esmer remplace son époux à La Grenouille Bleue. Il avait des obligations ailleurs depuis qu’il avait décidé d’ouvrir une seconde cantina – dans le quartier sénatorial. C’était un projet honnête, qui demandait beaucoup d’investissements et de temps. La réalité s’avérait moins sérieuse puisqu’il utilisait ce prétexte pour convoler avec une maîtresse, à l’autre bout de Coruscant. Il n’y avait jamais eu de seconde enseigne, mais la cadézienne trompée ne s’en doutait pas. A l’aube de la cinquantaine, elle avait pensé que les épreuves de la vie étaient toutes passées. Elle avait offert à son mari un foyer bien entretenu, un soutien inconditionnel dans les affaires et trois enfants en bonne santé dont deux étudiaient brillamment à l’université de Fobosi. Dès la première année de ses noces, elle avait accepté de quitter le confort familier de Cadézia pour vivre l’aventure coruscanti. Rien ne lui laissait présager que son ménage battait de l’aile. Ses jolis yeux en amande, aux pattes d’oie marquées riaient du lever au coucher et elle aimait interpeller les clients en lang cadeza afin de donner un peu de cachet à l’établissement.

Lorsqu’elle vit Evadné revenir au bras d’un homme magnifique, elle ne put s’empêcher de penser qu’il s’agissait là de « Ja’ar », le compagnon dont elle lui avait parlé laconiquement entre deux prises de commandes. Etrangement, elle l’avait imaginé plus grand et moins…aveugle ? Elle les observa s’installer à une table proche du comptoir. Il n’avait pas l’air d’un mécanicien, songea-t-elle en plissant les yeux. Et puis, un mécano aveugle, avec une canne ? La petite docteure ne serait-elle pas en train de vivre deux liaisons passionnées ? Dans l’esprit d’Esmer, les scénarios intrépides et romantiques se bousculèrent. Peut-être que ce beau blond était un riche prétendant imposé par la famille intransigeante des Publius. Oh, elle les connaissait bien ces loustiques. Sa mère avait travaillé comme hôtesse d’accueil dans l’un des guichets de la Stellaire Compagnie. Et puis, la gérante avait un faible pour les histoires d’amour tragique si l’on en croyait sa consommation excessive pour les holoséries à l’eau de rose. Elle n’hésitait pas à les diffuser dans la cantina quand son mari était absente, comme aujourd’hui. Après le flash info, l’épisode de la saison finale dévoilerait le dénouement insupportable des aventures d’une Twi’Lek malchanceuse.

"Course-poursuite entre la police et un taxi accusé d'arrondir ses fins de mois en vendant des bâtons de la mort sur Coruscant. Il aurait rejeté un de ses clients sur le bord de la route afin de mieux prendre la fuite, paniqué. Les caméras ne donnent pas assez d'informations mais si vous êtes cette personne, laissée sur le trottoir de la A - 254, quartier Est 678 appelez le commissariat. Vous n'encourez aucun risque et il ne vous sera posé quelques questions de routine."

Les prunelles de la toute blonde quittèrent le portrait du Jedi pour s’intéresser aux informations. Encore un fou furieux du volant. Son père avait toujours détesté qu’elle prenne les taxi-speeder. Il avait mis à sa disposition un chauffeur et une navette privative dès son arrivée sur Coruscant. Elle avait été rapidement stigmatisée par ces camarades de promotion et s’était résolue à révoquer ce privilège pour prendre à bras le corps le défi que représentaient les transports publics et privés coruscantis. Les premiers mois, elle était tombée sur plusieurs chauffeurs lubriques et faisait l’expérience désagréable de leur modus operandi, elle avait appris à repérer les transporteurs les plus fiables : notamment en mémorisant une bonne partie des immatriculations. L’autre solution, dont elle était peu fière, consistait à se rapprocher des taxi-speeders dont les conducteurs appartenaient à une espèce asexuée ou dénuée d’intérêt sexuel envers les proches-humains – mais elles étaient rares.

- Hey, c'est mon taxi ! Je revenais d'une passionnante conférence qui avait malheureusement lieu dans un coin perdu. j'ai pris un taxi pour rentrer au Temple mais me suis retrouvé jeté dehors. Je savais bien que ça ne pouvait pas juste être pour rogner quelques crédits sur la course. Hum... Bref, j'appellerai plus tard. Ils seront déçus de m'entendre témoigner sur ce que j'ai vu, les pauvres.

Elle cacha un sourire amusé derrière sa paume avant de se rendre compte du ridicule de son geste et se pinça les lèvres pour éviter qu’il n’entende un début de rire qui, loin d’être moqueur, compatissait joyeusement à sa mésaventure. L’épisode de l’holosérie romantique s’apprêtait à débuter mais Esmer ne remonta pas le son de l’holoprojecteur pour autant. La curiosité des relations qu’entretenaient sa cliente avec ce bel inconnu primait sur sa passion pour les histoires romantiques. Elle tendait une oreille discrète vers eux et fit comme si de rien n’était quand Luke approcha du comptoir. Se parant d’un rictus aussi amusé que chaleureux, elle se tint prête à prendre sa commande.

-Alors, au cas où vous ne soyez pas Ja’ar, je vais vous dire que sa boisson préférée c’est le stim-thé à la violette cadézienne. Vous marquerez des points si vous lui en commander. Mais si vous êtes Ja’ar, alors vous devez le savoir. Non pas qu’elle a l’habitude de venir accompagner, non pas du tout. Je pensais même qu’elle préférait les femmes..mais ne voyant pas de femmes à l’horizon, je me disais que peut-être, elle était vous savez…dans une secte où tout ça est interdit…y’en a une pas loin et….enfin, deux stim-thé à la violette donc ?

A l’ombre du néon capricieux des toilettes pour genre féminin, Evadné inspectait les dégâts de l’accident dans un miroir propret. Elle constata la brûlure bénigne qui rougissait sa gorge et son décolleté. En l’absence de soins adéquat, elle resterait écrevisse un bon moment. Le tissu de sa robe élégante présentait ci et là des tâches disgracieuses que GG86 ne réussirait jamais à rattraper, avec toute la bonne volonté du monde.


De retour dans la salle de restauration, quelques clients impatients faisaient la file derrière Kayan – qui semblait accaparer toute l’attention de la gérante.

-Non et puis, les cadéziennes, ce qu’elles aiment bien ce sont les grandes déclarations d’amour. Vous devriez vous en inspirer pour la séduire définitivement. Enfin, je dis ça…remarquez, les bourgeoises je ne sais pas trop si c’est leur truc.

Elle fit une moue dubitative, partagée entre l’envie de mettre fin au supplice de Luke et celui d’en rire. Finalement, elle opta pour la clémence et intervint.

-Oye, Esmer. C’est encore moi. Comme vous le voyez, un petit accident. Mais je vois que Monsieur Kayan a déjà commandé la boisson dont il m’a lésée un peu plus tôt.

-Ah, il savait déjà ce que vous aimiez, Mademoiselle Evadné, s’exclama Esmer en faisant un clin d’œil inutile vers le Jedi.

-Oui, c’est un homme très prévenant, affirma Eva en saisissant à pleines mains les deux tasses de stim-thé. Mais nous allons vous laisser travailler. S’il vous plaît, posez votre main sur mon bras, Monsieur Kayan, je vais vous reconduire à notre table.

-Oh oui, pas de problème. Bonne dégustation hein ! fit-elle alors qu’ils s’éloignaient.

L’expression amusée, Publius déposa le breuvage devant Luke une fois qu’ils furent de nouveau installés. De leurs mugs s’échappaient des volutes de fumées chaudes et aromatisées. La senteur que dégageait la boisson était un peu amère mais des relents de sucre s’y diffusaient subtilement. Evadné adorait ce parfum, elle aurait pu rester des heures à humer l’arôme du stim-thé ; c’était quelque chose qui détendait son esprit. Progressivement le calme revenait au comptoir tout proche. Les derniers clients de la file furent servis et Esmer visionnait distraitement l’épisode de sa holosérie préférée. De temps à autre, elle jetait un coup d’œil vers eux et secouait la tête, attristée.

Luke Kayan
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Évadné était partie aux toilettes, et elle tardait... Beaucoup. En réalité, Luke ne se serait jamais posé la question en temps normal, c'était un garçon patient, docile et très entraîné à attendre que les plus vieux maîtres, parfois presque paralysés (mais le Hapien les soupçonnaient d'empirer leur lenteur pour "l'effet") ne viennent à lui. Si de nature, il avait toujours été patient, chez les Jedis, on ne faisait que cultiver cette vertu. Malheureusement, aujourd'hui la vie avait décidé de mettre un obstacle assez particulier sur le chemin du Consulaire, sans doute pour tester son engagement dans sa voie, et cette épreuve s'appelait Esmer.

- Je ne suis ce Monsieur Ja'ar dont vous me parlez et... Euh oui, c'est gentil de vouloir m'aider à marquer des points comme vous dites auprès de Mademoiselle Publius mais... Je ne comprends pas trop l'intérêt. Nous ne cotôyons pas assez pour qu'elle m'en veuille de...

Attendez, Évadné était bien cette charmante jeune femme qui, lors de leur rencontre avait réussi à se vexer parce qu'un aveugle semblait défaire les propos de son ami sur sa beauté ? Alors oui, elle serait capable de s'énerver qu'il ne devine pas sa boisson favorite. Après, elle était gentille, la blonde, à un détail près, non deux : c'était une fille et c'était une civile. Rendez-vous compte... Une de ces personnes compliquées qui met du parfum, se maquille, aspire à mieux que juste méditer, accomplir de dangereuses missions pour les autres sans jamais penser à soi. Un peu décalé le pauvre Chevalier, car la Cadézienne était en vérité une personne toute à fait normale, peut-être plus saine qu'un enfant éduqué à retenir ses émotions, combattre et s'oublier en permanence. Dis comme ça, on pourrait presque croire que l'Ordre peinait à éduquer des jeunes gens qui s'adaptaient en société.

- Une... Une déclaration d'amour ?

C'était donc ça ? Non parce que suivant le schéma du spécialiste des hors-sujets, Luke était persuadée que la femme du patron cherchait à sceller leur amitié ! Ses conseils complètement intrusifs partaient d'un bon sentiment pour... Les faire devenir amis. Naturel de penser ça. Tout le monde aurait suivi le même cheminement, n'est-ce pas ? Pas Esmer. Le Hapien, pourtant habitué au contrôle des émotions rougit malgré lui. C'était compliqué les filles civiles. Encore, une Jedi, ça se baladait en toge, se battait, ne s'inquiétant guère de l'amour, des déclarations ou de leur beauté, c'était simple, mais une civile... Aidée par une autre civile d'ailleurs. Pauvre Luke, les Siths venaient de trouver leur arme fatale contre leurs ennemis naturels : les destabiliser en les introduisant dans le monde du comérage.

- Vous vous fourvoyez !

Silence. Évadné venait de sortir des toilettes pour voler à son secours en courageuse chevalière. Un peu trop même. Poser sa main sur le bras de la politicienne avait un effet plutôt paradoxal. Peu habitué, le jeune homme avait tendance à trébucher, incapable de calculer la bonne distance pour ne pas que leurs jambes s'entremêlent. Et puis, il était gêné. Au temple, on leur apprenait à ne pas porter de jugement sur la différence, le handicap, mais pas à supporter celui des autres. Bien qu'il n'en voit aucun, Luke sentait peser les regards sur leur étrange couple. Il se rappelait malgré le temps, de cette façon spécifique d'être guidé à l'hôpital. Une canne blanche encore, c'était lui qui la gérait, assumer sa déficience visuelle n'était pas un problème, dépendre des autres... Pas quand on avait été éduqué -presque- comme un voyant par un maître doux mais sans concession, qu'on avait grandi dans cet Ordre exigeant. Véritable famille qui offrait tout en demandant un retour. Au moins, sa cécité lui épargnait l'air stupidement éthéré d'Esmer.

- Est-ce que ça va ?

D'habitude, le Hapien aimait le silence. Il pouvait penser à loisir, se ressourcer, mais ça c'était quand le lieu était connu, la tâche indiquée. Dans ce bar entouré de sons qui sortaient de n'importe où, des rires aux tonalités étranges, des conversations sans retenue, parfois sans respect pour les voisins, entouré d'odeurs trop sucrées, trop riches, difficile d'échapper au désir de déclencher le son de la seule voix connue.

- Je veux dire, les vêtements et euh... Les probables tâches. -Un concept un peu difficile à comprendre pour Luke qui associait quand même cette conséquence à une odeur désagréable de salissure. On lui avait ainsi inculqué l'importance d'être propre et de se changer si on lui disait "tu as une tâche". Du coup, il avait suffisamment intégré l'idée pour faire attention en mangeant ou en faisant certaines activités dehors. Quand les circonstances le permettaient évidemment !- Et... Je suis désolé, pour la serveuse. Je n'ai rien dit ou fait qui puisse déclencher ce genre d'inepties. J'en suis confus.

Oups, et si Évadné était vexée à cause du petit numéro monté ? Il y avait de quoi après tout. Revenir des toilettes et entendre ça... Sa réputation pourrait en prendre un coup, et puis il y avait ce Ja'ar. Si Luke était un peu retardé niveau comportement et relations sociaux, il n'était pas stupide à ce point. Ja'ar devait être le petit ami d'Évadné... Mais n'empêche alors, pourquoi cette serveuse lui avait parlé de déclaration d'amour ? On n'en faisait pas, voyons, aux personnes en couple. Bizarres ces civils. Le jeune homme trempa ses lèvres dans le breuvage et recula un peu. Il n'avait pas souvent eu l'occasion de boire quelque chose d'aussi crémeux et justement, l'onctueuse chantilly venait d'assaillir ses lèvres. Ni dans les galas, ni au temple on ne buvait ce genre de choses. Bizarres ces boissons de civils.
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-Ne vous inquiétez pas. Cette robe est probablement bonne à jeter désormais, mais tant que vous ne vous êtes pas blessé, il n’y a pas de mal.

Evadné observa un instant Esmer qui avait repris le travail derrière l’immense comptoir rempli de promesses savoureuses. Lorsqu’elle travaillait ainsi, les plis de son visage s’accentuaient pour former un masque de concentration qui lui donnait des airs fatigués. Elle éprouva un élan de tendresse pour cette femme courageuse, au sourire perpétuel et à la bienveillance maladroite.

-Vous savez, ce n’est pas grave. A force de venir ici, j’ai fini par nouer une relation cordiale avec elle. Et, elle est très sociable. Elle espérait que je trouve une espèce de prince charmant directement sorti d’une holosérie.

Elle pouffa un rire délicat et se reprit, secouant la tête doucement. Elle avait cette impression que Luke découvrait une terre inconnue habitée par une peuplade étrange. Le comportement typique d’un Jedi qui avait passé sa vie dans un Temple reclus, ne vivant que pour les missions parfois peu excitantes qui se présentaient. Longtemps, elle avait pensé que tous les êtres sensibles à la Force étaient à son image : distants, songeurs, complètement coupés des réalités du monde. Puis, Ja’ar lui était tombé dessus avant que trois tonnes d’acier qui formaient une colonne ne le fassent. Il lui avait prouvé qu’il existait une autre voie pour les personnes atteintes de ce don, ou de cette malédiction – selon le point de vue. Une voie dans laquelle, vivre une existence banale était possible malgré les difficultés. Elle considérait la sensibilité à la Force comme un handicap, ou une maladie chronique. L’Ordre, le Temple n’étaient que des institutions destinées à s’occuper de ceux dont la vie ne serait plus jamais la même et qui pourraient présenter un danger pour eux-mêmes ou pour les autres, s’ils étaient laissés à l’abandon. Elle avait assisté aux résultats des fameuses prises de sang sur les nouveaux-nés de la maternité du centre de soin universitaire. Le regard désespéré des mères et des pères à qui l’on annonçait, rarement heureusement, ce lien tenu que leur progéniture fragile possédait avec un concept qui leur échappait complètement. Venait ensuite l’idée de la séparation, d’avoir mis au monde un individu qu’ils ne pourraient jamais voir grandir. Cette pensée remuait toujours le même sentiment d’injustice chez la toute blonde.

Le stim-thé au lait était parfait. L’arôme de la violette cadézienne se diffusait de manière uniforme dans le breuvage et la température avait atteint le seuil de tolérance des papilles de la jeune politicienne. Entre deux gorgées, elle contemplait attentivement Luke – consciente qu’il sentirait tout de même son regard peser sur lui, elle finit par détourner son attention vers la salle qui se désemplissait après une nouvelle vague de clients. La plupart ne restaient pas consommer sur place. Une jeune femme brune avait pris un siège et sirotait une boisson relevée tout en tapotant sur un datapad dernier cri. A deux tables d’elle, un couple s’était installé et partageait amoureusement une pâtisserie, se tenant la main avec affection.

-Je ne vous l’ai peut-être pas dit, pardonnez-moi cette impolitesse. Mais nous sommes à La Grenouille Bleue. C’est modeste, mais charmant. Il y a une ambiance cosy et familiale. Et en fréquentant l’établissement, je soutiens une infime petite partie de la diaspora cadézienne sur Coruscant.

Un sourire amusé fleurit sur ses lèvres qu’elle trempa à nouveau dans son mug, impatiente d’en retrouver la saveur amère-sucrée si addictive.

-Peut-être pourriez-vous me parler de cette conférence passionnante mais….dans un coin perdu ? Je suis définitivement en retard à la réunion des assistants-sénateurs. Mais l’ordre du jour concernait la mise en place des nouvelles réformes du gouvernement S’Orn. Autant vous dire que je ne suis pas pressée de me jeter dans ces considérations.

Parce que beaucoup de ces Réformes seraient terriblement complexes à mettre en place au niveau local sur Cadezia. Et cette dernière n’était pas la seule planète isolée qui rencontrerait cette difficulté. Le FLR pouvait se montrer particulièrement ignorant des réalités de terrains des mondes dits « oubliés ». En tous les cas, Ashford lui rappellerait longtemps son absence à cette débriefing curcial. Elle comptait sur Evadné pour abattre le plus gros du travail puisqu’elle s’était contentée de voter pour et d’assumer le mal de crâne qui en avait résulté.

-Et surtout, vous pourriez me dire comment vous allez depuis la dernière fois ? Votre ami se porte bien ? Vous savez, celui qui dispense les précieux conseils sur la manière d’utiliser votre canne.

Avec le recul sur cette fameuse soirée Ralltiirienne, Eva arrivait à en rire. Non loin d’eux, Esmer essuyait la surface d’une table qu’un client venait de quitter. Une nouvelle théorie avait fait son cheminement dans son esprit. A bien regarder le duo, elle leur trouva une ressemblance troublante. La même blondeur, la beauté si parfaite des hapiens, la finesse de leur trait, leur petit nez retroussé. Pourquoi n’y avait-elle pas pensé plus tôt ! Le jeune homme devait être son frère caché. Elle fut choquée par sa propre découverte. Comment n’y avait-elle pas pensé plus tôt. Ce fumier de Publius avait dû faire un mari horrible et la mère d’Evadné se serait réfugiée dans les bras d’un prince hapien. Elle aurait donné naissance au fruit de leur union secrète. Et aujourd’hui, les deux se retrouvaient dans un lieu commun pour ne pas attirer l’attention. Une tragédie véritable se jouait dans son modeste établissement et elle en fut émue.



Luke Kayan
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- Oh. J'en suis désolé. Je voudrais participer au remboursement bien que...

Un léger silence plana, le jeune Jedi ne s'y connaissait pas en mode, mais il se doutait, Consulaire qu'il était, que cette femme allant au travail quand il l'avait brûlamment interrompue portait des vêtements de marque. Un Chevalier ayant fait voeu d'austérité n'avait que quelques crédits personnels accumulés dans un compte bancaire, s'il en avait. Dû à ses missions d'infiltration, Luke en possédait bien un mais ce dernier, malgré ses chiffres soigneusement maintenus dans le positif restait affamé. Le Hapien ne l'alimentait pas, évidemment et il avait eu quelques disputes gentillettes avec sa soeur qui, par de sombres procédés avait obtenu le numéro et le remplissait pour son anniversaire. L'accord avait été tacite : quelques piécettes et il la laissait faire. Pas de quoi s'acheter une robe de gala, donc.

- Je n'aurai sûrement pas assez.

Il sourit faiblement, les Jedis n'avaient pas non plus d'assurance ou de responsabilité civile [HJ : ça se note tant que ça que je galère avec ces immondes papiers pour mon retour en France?].

- Néanmoins, j'insiste.

Acheva le jeune homme légèrement plus ferme. L'expression "ne plus oser se regarder dans un miroir après ça" ne fonctionnait pas vraiment avec lui, mais l'idée était là. Les mains serrées contre sa boisson, Luke apprécia la chaleur diffuse qui envahissait ses doigts. Il était assez sensible aux trop fortes chaleurs dûs à un dérèglement hormonal jamais expliqué mais le froid aussi le faisait frissonner. Sa constitution très mince, cependant, expliquait facilement ses réactions aux intempéries. Sa formation avait beau avoir renforcé le Consulaire, les températures basses ou hautes ne lui plaisaient pas pour autant.

Le tableau étaut charmant ou désespérant, selon le point de vue. Comment ce fragile garçon pouvait prétendre avoir 28 ans et encore moins être, à ses heures, un charismatique diplomate de l'Ordre Jedi capable de se battre ?

- Mais... Mais pourquoi ?

Oh oui, il était réellement compliqué de croire que Luke oeuvrait dans un domaine qui exigeait une certaine capacité sociale. L'observation lui était déjà impossible, mais il semblait que l'interprétation aussi. Du moins, en ce qui concernait les cas les plus basiques et c'est là que la formation des Jedis montrait une faille pointée par Karm. Parler avec des politiciens de grande envergures, des entrepreneurs, des commerciaux honnêtes ou verreux, découvrir la vérité dans une trame tordue menée par un groupe d'idéalistes dangereux. Repérer les menteurs, les tricheurs, pister les criminels et libérer les otages, tout ça était plus simple à saisir pour un Consulaire que la volonté d'Esmer à s'occuper de la vie privée, pire encore, amoureuse d'Évadné. C'était donc assez naturellement que le pourquoi avait surgi des lèvres du blond. Un voleur cherchait la richesse, un politicien le pouvoir, un artiste la reconnaissance mais la tenancière n'avait aucun but logique. Encore moins en sachant que sa compatriote était censée être avec ce Ja'ar. Pour le coup, c'était le trio incongru formé par Evadné Luke et Esmer, donc, qui semblaient plongés dans une holosérie. Le Hapien connaissait vaguement leur réputation à travers des expressions, des comparaisons faites par des policiers à propos de cas... Des cas parfois aussi incroyablement illogiques que la réaction d'Esmer d'ailleurs : Un amant qui tuait le mari de leur copine, laquelle avait en fait tout manipulé. Que de complications.

- Oh et bien -Si Luke ignorait beaucoup de choses, voire tout des codes amoureux, il était très au fait de certains codes sociaux, comme la politesse. Il se méfiait un peu d'Évadné qui semblait assez charmante pour faire mine de s'intéresser à sa conférence. Avec le temps, le Jedi avait saisi que ses centres d'intérêt fatiguaient les autres, même certains consulaires, alors il les gardait pour lui. Du coup, il avait perdu l'habitude de raconter et surtout de s'étaler dans les détails. - Ce n'était hélas pas très pertinent d'un point de vue scientifique mais intéressant du côté humain et personnel. Une conférence sur la perception de la Force par des non-Sensibles ayant cherché à appuyer ou infirmer son existence et son influence sur les êtres vivants passifs comme les plantes ou actifs comme les Sensibles non-entraînés et ceux qui le sont.

Il y avait aussi eu des sous-parties traitant des gens ayant trop peu de midichloriens pour devenir Jedis, ou ceux qui en avaient assez pour éventuellement être candidats mais qui ne l'étaient jamais devenus, sans oublier les "basiquement entraînés" soit des aspirants refoulés. Le chapitre de l'existence avait vite été clos positivement puisque le Gouvernement en soi reconnaissait l'Ordre, fondé autour de la Force mais la partie sur la validation de révélations soufflées aux Jedis et non-entraînés par un tribunal s'était révélée passionnante. Luke décida toutefois de ne pas s'éterniser.

- Oh merci pour la description, peu prennent le temps ou pensent, et c'est normal, de le faire- Fit le Hapien bienheureux même si le plein sens de "cosy" lui échappait un peu. Au moins connaissait-il le mot grâce à lexique si riche qu'on pouvait oublier sa cécité parfois.

- La grenouille, c'est ce petit batracien relativement répandue sur les planètes tempérées et ou à tendances humides aux couleurs diverses, voire diversifiées sur le corps d'un seul individu, indication qu'il est venimeux. -
Récita Luke avec un ton légèrement songeur prouvant un petit manque d'assurance au début. La nature avait toutefois moins de secrets depuis que Karm lui parlait des petites et grosses bêtes de différents habitats. Son ami était assez patient et imaginatif pour lui faire entrevoir une faune dont il ne connaissait, ne comprenait rien au début. Ses examens en biologie dans l'enfance s'en ressentaient. Comme beaucoup de sujets, il récitait sans saisir.- En tout cas, la population, si j'ai bien compris, peu nombreuse à s'être établie sur Coruscant est plutôt solidaire, c'est une bonne chose.

Les tendances du marché, la solidarité des travailleurs libéraux expatriés, voilà qui parlait plus au Hapien qui avait dû se familiariser avec ce monde au fur et à mesure des enquêtes sur le terrain. Au fur et à mesure que sa carrière prenait une tournure plus policière, il apprenait du monde des citoyens, le vrai monde bien que sur le coup, les histoires d'amour ratées, dramatiques, ce n'était pas encore rentré dans son crâne.

Luke adorait qu'on lui décrive l'environnement des planètes. Certains savaient le faire assez habilement pour qu'il saisisse l'athmosphère, l'ambiance qui y régnaient, d'autres moins mais le Hapien avait son public : Saï et son ami. Quant à lui, il éprouvait beaucoup d'enthousiasme à leur parler de ses découvertes.

- Comment est Cadézia ? Si c'est bien le nom de votre planète, hélas je ne la connais pas, elle est trop loin de ma juridiction. Vous semblez lui porter beaucoup d'affection, elle doit vous manquer.

- Mon ami... Ahhh ! - Il avait mis du temps à comprendre, il faut dire que le saut était assez magistral, sachant que Luke connaissait ses "amis" à cause d'une infiltration. Ses moments de vraie vie sous couvert d'une mission étaient vite oubliés mais celui avec Sensi et Evadné, difficile. Pareil pour le "cas" sans gêne qui avait proposé directement ou presque à Luke de draguer la jolie blonde. Un sourire naquit sur les lèvres du blond qui cacha une légère gêne en buvant une gorgée. -Il va très bien ! Preuve en est, dès que l'occasion se présente, il continue de me dispenser des conseils concernant ma canne. Je dirais presque qu'il est jaloux.


S'amusa le Hapien qui commençait à se détendre mallgré un coup de stress à l'idée qu'Evadné soit en retard à une réunion aussi importante à cause de lui. Et un peu parce que la politicienne semblait se moquer de ce fait. Quel manque de sérieux ! Mais pour une fois Luke ne dit rien, trop respectueux avec cette femme rencontrée il y a peu, assez proche à cause de circonstances aussi farfelues qu'extraordinaires mais aussi parce qu'au fond, il était content de partage ce moment. Sa sale aventure l'avait fatigué plus que prévu. Ou alors c'était l'ambiance cosy et familiale du bar, allez savoir.

- Je comprends, l'énonciation de réformes peut parfois être hum... Ardue et s'étendre en longueur. Ceci dit, si vous souhaitez y répondre seulement, que pensez-vous des réformes précédentes ? Monsieur S'Orn en propose beaucoup ces derniers temps, je serais curieux de connaître les nouvelles qui se préparent.

Curieux et un peu inquiet aussi.
Evadné Publius
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Aussi…original et marginal fut-il, le sujet de cette conférence fit tiquer légèrement la toute blonde. Cachant son trouble derrière un geste fébrile visant à replacer une mèche de cheveux qui balafrait son front, elle se questionna. La Force. Il semblait que tous les événements récents de sa vie la poussaient dans les bras de cette dernière. Que ce fut une allusion aussi fortuite que sa rencontre du jour ou ses puissants sentiments pour un de ses manipulateurs. Elle ne savait plus trop que penser. Un jour, elle voulait tout savoir de ce phénomène incroyable, un autre, elle voulait l’oublier et ne plus jamais en entendre parler.

-Des Non-Sensibles ont eu la capacité d’entrevoir la Force? Si je ne me trompe pas, les Jedis du Temple qui viennent recueillir certains enfants ont toujours basé leur perception de la Force sur le taux de midi-chloriens. Mais peut-être que ce taux n’est décisif que pour pouvoir la manipuler ? Cela devait être intéressant. Je pense qu’en tant que médecin, je devrais pouvoir comprendre cette spécificité chez certains être conscients. Enfin, je veux dire…la plupart des scientifiques éludent cela et laissent cette question aux gens qu’ils pensent, à tort, les plus compétents. Soit les Jedis. Je serai ravie d’avoir votre point de vue dessus. Nous n’avons pas vraiment eu le temps de discuter de tout cela, la dernière fois.

Elle dévia son faciès habituellement radieux pour couvrir, par réflexe, une grimace de tristesse, qu’il ne put voir mais peut-être ressentir. Elle avait tant de mal à étouffer ses états d’âmes. La fatigue qui avait succédé aux épreuves passées la fragilisait encore et elle n’arrivait plus à ériger cette forteresse de politesse, ce masque de cire que son éducation bourgeoise avait coulé sur ses traits sublimes. Et le souvenir de Cadézia n’apaisa pas cette anxiété latente. Elle admira Esmer qui lui sourit timidement depuis le comptoir. Elle lui répondit par un petit signe de la main, amical. Eva se sentait proche du peuple cadézien. Elle avait vécu et grandi sur Cadézia mais….avait toujours été coupé de ses habitants les plus modestes. Sur-protégés, elle n’avait vu le paysage planétaire qu’au travers de vitres sécurisées et de gardes armés. Heureusement, sa rencontre avec quelques représentants de l’Alliance des Classes Extérieures avaient permis d’élargir sa vision de la société cadézienne. Inaros lui avait appris à piloter et à travers son créole fleuri, lui avait transmis l’envie d’apprendre le dialecte de son monde. Puis Jung avait servi de professeur, philosophe et sarcastique, il avait en l’espace de deux années transformé la jeune fille en véritable cadezalowa. Sans oublier l’influence discrète mais présente de Camina Ashford.

-Cadézia est…tout l’inverse de Coruscant. Nous avons des cités grouillantes de vie et d’acier, bien sûr…mais elles ne sont que des tâches urbaines sur un tableau sauvage. Il y a par exemple un endroit, tout au Nord qui se nomme l’océan des chagrins. Ce n’est pas vraiment un océan, vous savez mais…une vaste étendue de sable sombre. Avant, il y a plusieurs siècles, il y avait une ville à cet endroit et la nature cadézienne de cette région l’a reconquis, parcelle par parcelle. Et puis…(Elle pressait ses propres mains l’une contre l’autre, puisant un peu d’inspiration.) la région que je préfère est celle de Mariner Valley, les canyons pourpres, on a l’impression que le soleil se couche perpétuellement là-bas et il y règne presque le même silence que dans l’Espace, sauf lorsque les tempêtes se lèvent et brassent les poussières toxiques. Mon père est originaire d’Ilus IV, la capitale. Le ciel y est toujours bleu et les contreforts d’acier de ses immeubles rutilent de milles feux grâce aux rayons solaires qui se reflètent à la surface du lac gelé non loin. Puis, nous avons également…enfin nous, nos ancêtres, plutôt. Construits plusieurs stations sur des astéroïdes pris au piège dans l’orbite cadézienne. Certaines de ces stations sont devenus de vraies villes.

Elle marqua une pause pour consoler sa gorge avec un peu de stim-thé.

-Il y aussi de sombres parties sur Cadézia. Comme les niveaux inférieurs d’Ilus IV ou de certaines autres cités. C’est comme une face cachée et on ne sait pas toujours ce qu’elle y recèle.

Esmer s’était rapproché de la tablée, soucieuse de savoir si tout se passait bien. Evidemment, sa curiosité malvenue avait motivé sa décision. Elle avait réussi à attraper au vol quelques mots sur son monde d’origine et eut un immense sourire.

-Tout se déroule comme vous le voulez ? Vous évoquiez Cadézia, qué ya ? Mademoiselle, c’est le mal du pays ça, qu’on dit.

-Taki, Esmer. Tout est correct. Monsieur Kayan me demandait simplement comment était Cadézia et je me suis laissé emporter.

-Ah. Bon, sourit-elle avec malice avant d’essuyer ses mains contre son tablier, amusée. Je vais vous offrir une pâtisserie maison alors, ca sera cadeau et ça vous f’ra passer le mal du pays.

Evadné la remercia d’un regard reconnaissant et revint à Luke, incertaine.

-Je serai ravie et honorée que vous puissiez, un jour, visiter Cadezia. Je m’arrangerai pour que vous soyez bien reçu. Vous savez, on ne connaît pas très bien les Jedis là-bas. Et les populations peuvent toujours s’avérer vaches face à l’inconnu. Mais culturellement parlant, des lieux notables méritent d’être visite : comme le Musée des Glaces ou le siège social de la Stellaire Compagnie.

Ils reçurent leur pâtisserie, servies respectivement dans des petites assiettes de porcelaine aux peintures bleues. Le gâteau était généreusement servi, et il dégageait le même arôme que le thé. Toutefois, l’amertume de la violette était noyée sous une couche de sucre fondant et glacé qui reflétait le moindre rayon de lumière. Evadné préférait les aliments aux Blumfruits, mais la violette cadézienne remportait une deuxième place méritée dans son cœur. Si les blumfruits étaient aussi doux que sucrés, les violettes perçaient les papilles d’un goût amer déroutant pour qui n’était pas habitué. Deux saveurs aussi simples complexes ; deux pendants d’un même esprit qu’était celui de la jeune femme. Elle avait l’impression que sa vie entière n’était qu’une balance qu’il fallait perpétuellement tenir en équilibre.

-Concernant votre ami, je suis persuadée qu’il mourait d’envie d’avoir votre regard et votre canne, plaisanta-t-elle avant que le sujet politique ne la rende sérieuse. -Je ne voudrais pas vous assommer avec ça. La nouvelle loi Ozmac possède du bon et du très moins bons, voire du carrément mauvais pour les couvertures sociales en général. Nous avons dû batailler pour faire modifier certains paraphes inquiétants. Des mondes républicains éloignés comme Cadézia, sont les premières victimes de ces réformes économiques centralistes. J’espère assister à du mieux dans l’avenir, en tout cas, je compte travailler dur pour .

Luke Kayan
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- Oui et non. -Admis Luke, légèrement pris de court par les propos d'Evadné, il avait pensé qu'elle passerait par-dessus le résumé de la conférence comme on franchissait une barrière de courtoisie. En réalité, la demoiselle semblait s'être suffisamment intéressée au thème pour en retirer des problématiques pertinentes, plutôt fines d'ailleurs.- Si je le décidais et que je procédais assez fort, vous pourriez sentir un coup de vent inexplicable, en intérieur, portes fermées, balayer vos cheveux. Quelques personnes font aussi état d'une impression de douce chaleur lors de soins prodigués par un Sensible. Ceci dit... Il est impossible, sous un certain seuil de taux de Midichloriens de ressentir activement la Force, c'est pourquoi les Jedis se basent en majeure partie sur ce critère. -Expliqua tranquillement Luke, ayant à cœur grâce à ses sous-entendus, de signaler que non, ce fameux pourcentage n'était pas l'unique base pour recruter un élève.- Ce taux est inamovible. On ne peut ni l'augmenter, ni le perdre -Sauf procédé obscur qui tenait plus de la légende que de la réalité mais le Hapien n'allait pas entrer dans ses détails, surtout qu'il peinait à croire en cette folie.- Lorsqu'on dispose d'une certaine sensibilité, on peut évoluer dans le domaine du possible... Soit la laisser inexploitée et ressentir, parfois, les courants de la Force, des actions menées par d'autres, posséder un intuition affinée et autres "symptômes", soit apprendre à la sublimer... Un peu comme les capacités naturelles physiques de quelqu'un. Tout le monde n'est pas fait pour courir un marathon ou chanter comme un ange dès sa naissance. Nous faisons avec ce que nous avons. Ceci dit, quelques chercheurs non-sensibles ont relevé des données importantes voire essentielles dans la compréhension de la Force. Reconnus et tous aussi valorisés que les Jedis, leur voix fait foi dans les congrès. Leur "cécité" ne les rend pas inaptes, mieux, des fois elle leur offre une neutralité, une objectivité qui fait défaut aux Jedis. Je suis personnellement pour la démocratisation de ce sujet.

Autrement dit, les Jedis avaient beau naturellement disposer des outils pour connaître plus efficacement les subtilités de la Force, ils pouvaient aussi se fourvoyer, passer à côtés d'éléments intéressants à cause d'une approche inadéquate. Luke était persuadé que peu de Non-Sensibles avaient révélé leurs talents de recherches simplement parce qu'ils n'étaient pas très connus ou car peu s'y intéressaient. De fait, c'était souvent le public qui pointait au chômage dans les congrès ou au sein d'associations agonisantes sur le sujet. C'était sans doute déprimant d'en apprendre plus sur un mystérieux courant ô combien étonnant, magique, dont l'existence était prouvé mais qu'aucun d'eux ne sentirait dans ses veines. L'esprit philosophe de Luke regrettait ce manque d'intérêt mais impossible de les blâmer. Il serait le premier à rechigner gentiment devant un musée d'arts, car formé ou non, sauf si ce lieu inspirait le bien-être à un proche, les couleurs étaient un sujet qui le touchait peu.

- Les scientifiques qui se sentent intimidés par la supposée suprématie des Jedis dans ce domaine devraient s'ouvrir à l'Ordre, ou directement étudier la Force, en parler... Personne n'a le monopole, elle est beaucoup trop libre, mystérieuse pour appartenir à une poignée de Sensibles. De fait, la vie fleurit grâce à elle. Lesdits Non-Sensibles sont également traversés, soutenues par elle. Leur taux de midichloriens est juste trop bas pour qu'ils la perçoivent mais cela les concerne tout autant que les Jedis. Ils sont donc très légitimes.

Certes, quand leurs études étaient bien faites, or autant avouer que dans le domaine, bon nombre hurluberlus avaient contribué à ridiculiser la communauté scientifique. Peu étonnant que l'on prête aux derniers vaillants les salles de conférence les plus reculées.

Alors qu'Evadné décrivait Cadézia, Luke était si concentré qu'il avait failli ne pas remarquer la serveuse. Le parfum acidulé du dessert finit par l'avertir que quelque chose avait changé devant son nez. Il se rattrapa, sortant de sa transe en remerciant avec politesse Esmer. Très vite oubliée, la femme laissa de nouveau place aux effluves accompagnées de pauvres images sûrement faussées que Luke pouvait se faire des lieux. Il en ressortit un point commun : de l'amertume. Mais aucun paysage ne pouvait porter cette ambiance, et encore moins tous. C'était la manière dont Evadné parlait qui imprégnait Cadézia de ce chagrin à peine dissimulé, agrémenté de fatigue.

- Est-ce la mal du pays ou autre chose ?

Demanda le jeune homme, non sans l'avoir remercié et félicité pour ses talents de conteuse. Lui se servirait, assurément de sa mémoire pour parler de Cadézia à son maître. S'il avait été plus tactile, la main du Chevalier aurait glissé sur celle de la jolie blonde pour la rassurer mais le Hapien avait toujours préféré les mots accompagnés d'actes. Sur son visage qui avait pourtant perdu l'habitude de lire les expressions, la sienne affichait clairement sa préoccupation pour la politicienne. Ses mots suivants concernant des couvertures sociales trouées -évidemment, l'argent manquant était souvent pioché chez ceux qui en auraient eu besoin.- ne rassurèrent pas Luke. Il s'était toujours dit que certains politiciens étaient beaucoup trop jeunes pour supporter l'immense poids sur leurs épaules. Lui-même, fatigué des intrigues s'était beaucoup retiré, choisissant des enquêtes au goût plus policier que diplomatique.

Luke se garda bien, toutefois, de sous-entendre quoique ce soit. Son "ou autre chose ?" invitait déjà à s'ouvrir sans se forcer. Il lui laissait le choix de s'exprimer ou de passer à autre chose.

- Je serais enchanté de visiter Cadézia, je ne suis d'ailleurs pas forcé d'y aller en tant que Jedi afin d'éviter de froisser les habitants. Une planète aussi chère à vos yeux, je ne voudrais surtout pas entacher son mode de vie par une bévue. Quoiqu'il en soit, sachez qu'un petit hôtel modeste suffirait à mon bonheur, votre présence serait aller au-delà de toutes mes espérances mais devinant votre emploi du temps, ce serait abusif.

Le blond ne pensait pas faire du tourisme seul. Prendre des vacances pour flâner dans le Musée des Glaces n'était vraiment pas son genre, mais il pourrait guetter une mission diplomatique là-bas, ou y aller, effectivement sur invitation officielle. En repensant à la description qu'avait fait Evadné de son monde, le Jedi frissonna légèrement. L'océan des Chagrins, ces tempêtes soulevant des nuées toxiques, tant d'horreur côtoyant le beau... Un beau que la femme affectionnait particulièrement.

- Concernant les lois, vous ne m'assommez pas. Elles sont ma passion, notre structure et nos gardiennes, à condition d'être soigneusement érigées par des gens désintéressés, honnêtes, francs défenseurs de l'éthique. On les dit ennuyeuse, mais c'est nous qui les rendons ainsi, fastidieuses, souvent à cause de la paperasse.

Glissa-t-il sur un air entendu, presque voyou qui laissait sous-entendre qu'il avait vraiment dit une bêtise inconcevable. Critiquer l'administration, le système, mais voyons Luke... Le voilà rebelle fou, si personne ne le retenait, il allait finir par ajouter de la chantilly à sa boisson déjà bien mousseuse.

Un coup de dents dans le gâteau d'ailleurs, et Luke recula son visage. Ce dernier expressif semblait soudain surpris, noyant sous le choc, toute trace de sa fausse rébellion. Une moustache tiède de mousse couvrait ses lèvres supérieures là où aucun duvet masculin n'avait jamais daigné pousser. Le voici éberlué. Cette sensation si simple, enfantine, il n'avait jamais eu l'occasion de la vivre au sein de son Temple, juste mais austère avec les enfants où les gâteaux à la crème n'étaient que très rarement distribués -et qu'il n'aurait jamais pris d'ailleurs.-
Evadné Publius
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Nous sommes tous concernés par la Force. Elle aurait voulu croire que non. Elle aurait aimé ne jamais connaître l’existence de ce concept. La Force traversait toute vie. Pour la scientifique qu’elle était, cette thèse restait à prouver. La capacité inhérente de quelques êtres à faire étalage de dons supérieurs et exceptionnels ne devait pas occulter la rationalité. L’amertume parlait pour elle. L’existence des Jedis la frustrait, de leur pendant obscurs’ tout autant. Parce qu’elle ne comprenait pas, malgré toutes ses tentatives, elle ne comprenait pas. C’était un échec, dur à avaler. La personne qu’elle chérissait le plus au monde maîtrisait la Force et elle ne comprenait. Elle avait l’impression qu’une partie de Ja’ar lui échapperait tant qu’elle ne comprendrait pas. Une nouvelle bouchée de pâtisserie dissipa le goût amer de sa réflexion. Entre temps parasitée par Cadezia et par les nouvelles lois du Sénat.

La réaction de Luke ne lui échappa pas et elle eut un sourire tendre, de ceux qu’elle réservait à ses jeunes patients.

-Je crois deviner que les excès déconseillés par l’Ordre Jedi ne concernent pas seulement l’amour ou la haine, mais également les plaisirs de la gourmandise. Esmer met beaucoup trop de sucre dans ses gâteaux, mais je ne m’en plains pas. Ici…je peux me permettre de risquer le diabète. Rien ne compte davantage que l’amour et la patience qu’Esmer a mis dans la préparation de ces mets.

Puis elle marqua une pause, se rendant compte subitement de sa passion inconditionnelle pour la nourriture. Un discret soupir franchit ses lèvres et elle secoua la tête avant d’observer le Jedi. Près du comptoir, l’holoprojecteur tournait toujours. Sur l’écran défilait des publicités agressives et les hauts-parleurs déversaient le son des slogans et de leur mélodie avec indécence. Esmer faisait de nouveau face à une horde de clients. Le temps s’était écoulé avec indifférence depuis leur rencontre. La fin des heures de bureau sonnait et chacun passait par le centre commercial pour des emplettes avant de regagner le confort d’un foyer. Une bande de jeunes riaient fort tandis qu’ils patientaient dans la file, insouciants et naïfs, ils n’avaient aucun regard pour leur environnement.

-Vous savez, reprit-elle après un coup d’œil global sur la Grenouille Bleue, ses occupants, son atmosphère, Je suis médecin avant tout. Ma carrière politique est un lourd héritage familale. Je ne pense pas être douée pour discuter des lois, alors en façonner. J’espère juste qu’on tende vers le meilleur équilibre possible, que l’on évite une répression trop cruelle ou un laxisme débordant.

Cette obsession du juste milieu, elle l’avait hérité de son père. Ce dernier l’avait toujours éduqué dans la mesure des choses, ayant en horreur les extrêmes qu’ils fussent d’un bord ou de l’autre. Sans être neutres pour autant, les Publius trouvaient une certaine satisfaction à être au centre.

-J’ai toutefois l’impression d’être bien naïve.

Elle se conforta contre le dossier de sa chaise et se permit un léger relâchement, détendant ses muscles.

-Je devrais davantage prendre position, c’est ce que n’arrête pas de répéter la Sénatrice Ashford. Faire un choix au détriment d’un autre est toujours difficile. D’un côté il faut encourager la croissance de l’économie pour permettre aux mondes de prospérer, de l’autre il faut conserver les acquis sociaux pour permettre de protéger les populations de ces mêmes mondes. Je comprends les libéraux, mais je comprends tout autant leur opposants. Mais en tant que médecin ma vision est biaisée, j’aurais tendance à faire passer la vie des êtres conscients avant tout de chose.

Son thé était tiède désormais, presque froid. Elle abaissa ses yeux à la surface du liquide ambré, rendu opaque par le lait de bantha. Elle se demandait comment faire la part des choses. Le destin était bien ironique. Dans le reflet de sa boisson, le visage surpris et agonisant du Chevalier Hautfays apparut, comme s’il voulait lui délivrer un message. Mais la Jedi Izavel Hautfays était morte. Elle ne délivrait pas de message. Ce n’était qu’une énième hallucination, l’énième soubresaut d’un traumatisme encore bien présents. Malgré les années, malgré les épreuves, rien effacerait ce sordide souvenir. La culpabilité était présente.

-Avez-vous des rites funéraires chez les Jedis ? Demanda-t-elle soudainement.

Elle s’interrogeait. Izavel avait-elle une tombe ? L’avait-on brûlé ? Incinérée ? Quels hommages avaient bien pu lui être rendus ? Eva ne l’avait jamais su et regrettait encore de n’avoir pu y participer. Consciente que sa question prenait de court, elle eut un air embarrassé.

-Pardonnez-moi, c’est juste que…

Elle ne termina pas sa phrase et étouffa sa voix sous une gorgée de stim-thé. Il y avait des souvenirs qu’il ne valait mieux pas remuer. Des plaies pas encore refermées qu’il ne fallait pas solliciter. Evadné tentait souvent de faire face au fantôme du passé, mais à chaque tentative la peur paralysait son courage. Elle ignora la fébrilité qui s’était emparée de ses mains, comme elle ignora la lumière bleutée qui irradia plusieurs fois de son communicateur personnel. Camina avait laissé de multiples messages : inquiets, menaçant, encoléré. La Sénatrice redoutait une nouvelle fugue de son assistante, ou une nouvelle mise en danger. Un jour, on finirait par revenir à cette époque où son père la flanquait du premier mercenaire venu ou de Jedis missionnés par le Temple pour sa protection.

Luke Kayan
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La friandise était crémeuse, mais elle donnait surtout soif. Après avoir apprécié comme il le pouvait deux bouchées, Luke se sentait mal à l'aise, alourdi et il avait très envie de s'abreuver. Beaucoup de sucre ? Voilà, ce devait être ça. Le gâteau avait été trop généreusement garni de cette substance que le Jedi connaissait à peine. Par acquis de conscience, le jeune homme termina sa pâtisserie. Elle avait beau être faite avec amour, le sucre ça ne passait vraiment pas.

- Ça s'est bien démocratisé côté gourmandise
- Amusé par l'amour difficilement contenu d'Evadné pour la nourriture, le Chevalier avait répondu d'un ton léger. Il était surpris de voir que les civils avaient leurs propres tabous, hontes, alors que toutes les émotions leurs étaient permises. Pourquoi s'arrêter en pleine expression de sa passion ? Selon ses cours de psychologie, la pression sociale y était pour quelque chose. Ça ne faisait pas bien d'avoir l'air trop gourmand, ou trop... Tout. Bizarre. En tout cas, le sujet amusait plutôt Luke qui repensait au pêché mignon de vieux Jedis. Sans aller dans l'excès, certains avaient des goûts affirmés et la joie se voyait sur leur visage quand ils avaient un de leur met favori. Les Consulaires surtout étaient victimes de ce gentil excès car ils côtoyaient fatalement le monde civil dans ses abus alimentaires, par exemple en gala. Luke avait lui-même dû manger des plats honteusement chers afin de ne pas paraître impoli aux yeux du gratin de la société, mais il n'avait jamais appris, contrairement à quelques collègues, à apprécier la bonne chaire. Au contraire, un problème enfoui de longue date avec la nourriture faisait de ces repas un supplice. En revanche, pour l'Amour, il ne pouvait que rougir de ses propres excès, certes plutôt légers car ni Karm ni lui n'abusaient en faisant passer leur carrière après leur amour. Ceci dit, en vérité, il ne respectait pas les principes si austères de l'Ordre traditionnel. Malgré un accord implicite du Conseil (Luke admettait enfin que leur relation "commençait" à se savoir) qui continuait de les laisser partir en mission ensemble ou de les considérer comme des Chevaliers dignes de confiance, dans des instants comme celui-ci, le Hapien retrouvait sa honte originelle. Evadné semblait le porter aux nues, le croire blanc, pur mais ce n'était pas le cas.

- Je comprends votre sentiment. Moi-même très optimiste concernant l'intégrité de politiciens, j'en ai été réduit à la prudence. Je ne crois pas qu'il faille toutefois s'enfermer dans le désespoir ou le cynisme. Derrière cette couche de sentiments négatifs dont on ne peut dénier l'existence, il existe des gens bons, altruistes et prêts à tout pour leur peuple.

Il se remémora ensuite les paroles d'Evadné. Médecin donc, voilà qui était original mais très ressemblant à la carrière d'une certaine personne qu'il connaissait assez bien.

- Décidément ! On pourrait dire que je fais partie des Jedis qui s'occupent de la diplomatie, incluant les sphères politiques, du moins, davantage avant... Mais le hasard de la vie m'a aussi mené à apprendre la médecine. Voilà qui scinde notre parcours de façon si originale qu'elle rend d'autant plus spéciaux et étonnants nos points communs.


- C'est pas comme ça que tu vas pêcho mon vieux !

Un des gamins bruyants qui venait d'envahir le salon peu approprié à son style profitait d'être dans la file pour s'amuser aux dépends du jeune "couple". Ce que l'histoire ne révélait pas, c'est que l'individu en question, un garçon d'à peine 20 ans, aurait tout donné pour se retrouver à la place du bellâtre blond. Lequel certes, possédait un physique très attrayant mais visiblement un discours complètement répulsif. La beauté de la Cadézienne, semi-Hapienne la rendait très désirable et plus jeune qu'on ne l'aurait pensé, du moins aux yeux du jeunôt. Luke l'ignora royalement. Jamais un Padawan ne se serait permis ce genre de choses, du coup, les vieux ados de ce genre continuaient de le surprendre ou... Comme aujourd'hui, de le blaser. La situation changeante l'avait toutefois aidé à réprimer une mise au point calme mais sévère et culpabilisante (à laquelle le garçon aurait sûrement répondu par un rire gras, soyons honnête). L'atmosphère de la Grenouille Bleue s'était soudain ternie. Luke trouva rapidement l'origine de son déclin : des rites funéraires ? Ses paroles, sa voix cassée, son aura dans la Force, tout exprimait une soudaine brisure chez Evadné. Le Hapien qui comptait parler médecine ou peut-être ressentis politiques se retrouva démunis. Le garçon de la file lui envoya un coup d'épaule en passant, il l'ignora encore plus sublimement qu'avant avec un dédain digne qui fit éclater de rire les "potes" du fauteur de troubles.

- Nous en avons, oui. Ils sont assez simples, c'est une crémation à l'air libre. Nous accompagnons l'être qui part rejoindre la Force en pensant à lui et en... Unissant nos auras.

Difficile d'expliquer ça avec délicatesse et surtout de but en blanc. La voix de Luke s'était faite plus douce mais il se demandait s'il n'avait pas été un peu sommaire dans son explication... Obscur aussi, parce qu'unir ses auras, ça faisait légèrement mystique. Ceci dit, ça l'était, mais impossible de démontrer à une Insensible combien le terme était littéral. Lorsque des Jedis s'unissaient de la sorte, ils résonnaient dans la Force, leurs auras, surtout celles de proches, s'entremêlaient, s'enlaçaient, portant aux nues le corps de l'être perdu. Leur code avait beau stipuler "il n'y a pas de mort, il y a la Force", le chagrin de perdre un ami ou un maître était présent. De l'extérieur, difficile de voir autre chose qu'un recueillement solennel, mais de l'intérieur... Il y avait la peine contenue, la puissance d'une Force baignée d'une pureté spéciale. L'amour, la réunion. Les Jedis étaient tournés, unis en un seul point de rupture : cette personne qui les avaient quitté. Il était donc peu étonnant que les prières à haute voix ou les rites "visibles" soient rares et discrets, austères de fait. Tout se passait au sein de la Force.

- Souhaitez-vous en parler ? J'ai du temps ne vous inquiétez pas. Je peux aussi vous raccompagner, même si... Hum, il ne faudra pas compter sur moi pour vous montrer la route.

Luke tenta un léger sourire pour la forme. Un peu dérouté et ne sachant pas comment on pouvait consoler quelqu'un, il sortit de sa poche un mouchoir en tissu immaculé tout simple.

Evadné Publius
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Ainsi le corps meurtri d’Izavel Hautfays, chevalier Jedi, avait été incinéré. Ainsi, elle avait eu droit à un peu de réconfort et d’intimité, entourée par les siens. Evadné relativisa son appréhension des Jedis grâce à cette pensée réconfortante. Toutefois, elle se demandait si jamais, les parents d’Izavel, sa famille, ses proches…avaient pu assister à ce dernier départ. Etaient-ils seulement au courant de sa mort ? Elle sentit l’amertume occasionnée par les pratiques de l’Ordre remonter à son esprit. Une légère nausée chamboula ses pensées et elle se réfugia derrière une nouvelle part de gâteau, laissant le sucre et la violette cadézienne chasser tout ce qui était amer en elle.

-Merci pour ces précisions…

Face aux regards insistants des jeunes qui chahutaient au comptoir, elle préféra l’option de la retraite.

-J’accepte que vous me raccompagniez avec plaisir, sourit-elle en terminant toutefois son dessert et sa boisson.

Le temps avait filé. Son retard au Sénat s’était mué en absence. Il était vain de retourner au quartier Sénatorial. Elle optera pour le retour au bercail, dans le cocon de l’appartement paternel. Peut-être retrouvera-t-elle Ja’ar ? Elle se demandait si elle pourrait lui parler de Luke Kayan, lui expliquer qu’il était le seul Jedi qu’elle connaissait à peu près. Elle avait peur que cette information soit source de conflits. Elle comme le mécanicien avaient un passif assez controversé avec les membres de l’Ordre. Mieux valait ne pas remuer certaines plaies, trop récentes, ou trop profonde.

-Je reviens tout de suite et nous pourrons y aller.



Elle se dirigea vers le comptoir afin de saluer Esmer et de régler la note. Il était hors de question que le chevalier paie le moindre crédit. Elle s’était faite un plaisir de lui faire découvrir un bout de son monde cadézien. Elle avait un peu honte de ne pas lui avoir avoué ses intentions de régler la note entièrement et d’avoir, de ce fait, profiter de son handicap pour être la première au comptoir. La gérante était occupée à servir d’autres clients. Les jeunes patientaient pour leur commande tout comme Eva patientait pour le ticker. L’un d’entre eux, sans doute le plus téméraire et le plus acquis aux charmes de la semi-hapienne se permit une nouvelle remarque :

-Alors, il a réussi à conclure ?

Evadné avait, hélas, l’habitude des propos désobligeants. Ses gènes hapiens avaient toujours joué un rôle contreproductif, lui attirant les tentatives de séduction pathétiques ou adorables selon le contexte. Sa meilleure parade était d’ignorer. Aussi fit-elle mine de s’intéresser à l’écran qui diffusait toujours la holosérie dont Esmer raffolait. Le jeune homme adressa un rictus hilare à sa bande qui se contenta de rire sous cape.

-Sinon…

Assez l’habitude pour anticiper la suite et elle se dépêcha de lui couper l’herbe sous le pied, la voix douce mais déterminée :

-Merci, mais ce ne sont pas vos affaires.

Quelques onomatopées de fausse surprise. Des airs faussement impressionnés par la répartie de la blondinette. Puis des souffles moqueurs.

-Tu dois être aussi ennuyante que lui de toute façon, fit-il en haussant les épaules avant de se détourner.





Après quelques minutes où tout le monde fut servi, Esmer s’approcha de la silhouette vagabonde d’Eva. Elles se sourirent et Publius remarqua un peu de tristesse dans les rides qu’avaient creusé ce sourire chez la patronne cadézienne. Elle régla la note en silence, s’assurant d’une œillade que Luke Kayan était toujours bien assis à la table qu’elle avait quittée. La gérante suivit le regard et soupira :

-Vous savez Mademoiselle Eva, parfois on est mieux seule que mal accompagnée.

La toute blonde fut surprise par la remarque et se contenta d’une mimique polie, sans verbaliser son étonnement. Quelle mouche lui piquait soudainement à Esmer ? Elle dont l’enjouement permanent commandait presque au soleil ? Elle laissa un pourboire conséquent, soucieuse de soutenir le commerce.

-Parfois, on est seul et mal accompagné quand même. Parce que notre propre compagnie nous désespère.
-Je comprends mieux pourquoi vous travaillez au Sénat, que yà ? Les beaux mots ça vous connaît ! rit Esmer, ce qui soulagea la jeune politicienne.
-Prenez soin de vous, Esmer.




De retour près de Luke, elle lui proposa gentiment de l’aider à se guider et à se déplacer, s’il le souhaitait. Ils furent bientôt hors du brouaha du centre commercial, de retour dans l’avenue bondée du district. Les clameurs explosaient de partout : des voix, des bruits de réacteurs, des sons sortant de spots publicitaires. Il s’y mêlaient l’odeur de Coruscant, si polluée, si particulièrement et la beauté de ses immeubles qui avalaient le monde, qui devenaient le monde.

-Je sais que vous pourriez être réticent à reprendre un taxispeeder mais…vous pouvez me faire confiance.

Et elle leva le bras, hélant l’un des nombreux landspeeders pour une nouvelle course.

Installés sur la banquette arrière, elle avait fini de lui décrire le paysage qui défilait et la route qu’ils empruntaient. Le chauffeur semblait correct et sérieux. Après un court silence, Evadné déclara :

-J’aimerais beaucoup vous en parlez, mais je crains ne pas encore être prête à verbaliser ça. C’est une longue et profonde histoire, je suis navrée de vous avoir embêté avec ça. Je sais que mes prochains mots vont paraître inconvenants, mais je n’ai pas pour habitude de fréquenter des Jedis, de près ou de loin. Mais je vous apprécie. Vous semblez être un homme tout à fait honnête et soucieux de son prochain, c’est ce qui compte le plus.

Elle marqua un nouveau silence et s’intéressa aux décors familiers du quartier Fobosi. Elle avait atteint sa destination.

-Je suis arrivée. Monsieur Kayan, je suis ravie de vous avoir croisé aujourd’hui. Merci de m’avoir accordé un congé surprise cet après-midi. Prenez soin de vous. N’hésitez pas à me contacter si jamais vous avez besoin d’assistance à l’avenir.

Quelques instants plus tard, la portière du véhicule claquait et Evadné regarda ce dernier s’élancer dans le trafic bondé.

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