Luke Kayan
Luke Kayan
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- D'après ce que les gens disent, humpf, ça semble compliqué. Et puis tu es bien trop célèbre. Tout le monde te connais!


Yalek et bien d'autres saluaient de prime abord Karm, ignorant parfois qui était le jeune homme blond qui l'accompagnait. Tout apprenti de Saï Don qu'il fut, le Hapien disposait d'une relative célébrité, alors que grâce à ses propres mérites ou divergences, la réputation de son compagnon n'avait de cesse de croître. Discret et plutôt conventionnel exception faite de son lien si puissant avec la Force et quelques jolis succès, lui stagnait. Sa carrière moins brillante, moins scandaleuse le rendaient, de manière inattendue étant donné son physique-ses yeux vairons, sa cécité, sa race.- plus passe-partout que l'Ark-Ni. C'était parfois un sujet de taquineries entre les deux amis sans qu'aucune jalousie ne s'immisce. Loin de s'en offusquer, le Chevalier se réjouissait de passer inaperçu, beaucoup trop timide pour se sentir à l'aise face à des compliments, voir la simple reconnaissance. Il aimait faire les choses dans l'ordre: se présenter, attendre que l'autre le fasse, se connaître.

Un éclat de rire soudain traversa les lèvres de Luke, le tirant des prochaines moqueries qu'il élaborait dans sa tête pour les jeter à la tête de la célébrité qui devait, de toute évidence, renoncer à se fondre dans la masse. Il abandonna le sujet pour se rappeler de leur rencontre, marquée, hélas, par la mort mais aussi une improbable, minuscule lueur d'espoir qui avait poussé un blessé grave à reconstruire un vaisseau de fortune, tandis que l'aveugle lui avait reconstruit le poumon. Ce jour-là, ils s'étaient surpassés, au nom d'un instinct de survie primaire, saupoudré de quelque chose de beaucoup plus subtil dont ils ignoraient presque tout.

- Vu notre mode de vie, en réalité, si l'on s'accrochait à cette théorie, je pense que tous les Jedis seraient en couple.

Affirma le jeune homme en se souvenant des livres d'histoires relatant des aventures d'Anciens. Noires, sublimes, chagrines ou rocambolesques, à l'évidence devenir Jedi impliquait transformer l'extraordinaire en ordinaire. L'improbable en quotidien, y compris pour les Diplomates tels que lui, pourtant de base destinés à la paperasserie. L'époque contemporaine mettait plus que jamais les membres de l'Ordre à l'épreuve, les menant au bout de leurs capacités, aux frontières de leur raison, et nombreux étaient ceux qui chutaient. Morts ou assombris. Donc, morts, aussi d'une certaine façon.

- Les Padawans sont envoyés au front de plus en plus jeunes -déplora-t-il- et c'est parfois le front qui vient à eux.- Une pointe amère perça ses paroles tandis qu'il songeait à l'attaque du Temple lors de ses 13 ans. Ceci dit, ne voulant pas gâcher leur fin d'après-midi, le jeune Jedi acheva la conversation d'un haussement d'épaules.- À mon avis, mieux vaut ne rien encourager, juste laisser les circonstances faire et accepter l'union tant qu'elle est viable.- Que le Hapien soit en faveur du cas par cas ressemblait à un petit miracle en soit, sachant qu'il était réfractaire à toute relation et culpabilisait énormément de s'être laissé attrapé -littéralement- par l'amour. Influencé par Karm, le blond acceptait avec prudence quelques exceptions devant toutefois, donner chaque jour, beaucoup plus de preuves que n'importe qui de leur implication au sein de la communauté.- Et puis de toutes façons, je ne sais pas jusqu'à quel point il est réconfortant de ne pas se sentir seul dans cette situation. Pour ma part, j'étais plutôt soulagé de savoir que j'étais le seul à avoir des "problèmes". Au moins mes camarades étaient épargnés.- Comme il avait considéré être malade, il n'avait désiré à personne de subir la même chose, surtout pas à son Ordre de supporter une vague de déviance. Oui. À l'époque, Luke avait une façon de penser encore plus étrange, tordue et probablement radicale que maintenant.- En tout cas, ne pas avoir d'exemples m'a aidé à renoncer à tout ça, à me concentrer sur mes études, même si ça a resurgit après.- Plus facile de se faire à l'idée, de refouler lorsque personne n'était là pour tenter. Luke pensait parfois qu'en faisant plus d'efforts il n'aurait pas succombé face à Jason. Ceci dit, cela aurait aussi impliqué de ne pas connaître Karm de cette manière. Il s'était alors rabattu sur le constat qu'à l'époque de l'adolescence, avoir été incité à éteindre toute songerie à ce propos avait été positif. D'ailleurs ça ne l'avait pas du tout marqué! Aujourd'hui il était parfaitement équilibré, il assumait tout dans le calme et la pondération. N'est-ce pas?

Après avoir échappé à d'éventuels droïdes-poules, les deux Chevaliers s'étaient, comme si souvent, retrouvés dans la chambre spartiate de l'Explorateur. Luke y pénétra sans ralentir l'allure, à l'aise dans cet espace qu'il savait dépouillé de vicieux obstacles, en résumé un lieu qu'il connaissait étrangement très bien.

- Pauvre chou. Contrarié par une toge.

S'amusa à nouveau Luke en abordant une moue vaguement peinée, plus par réflexe que parce qu'il s'en souvenait. Un sourcil froncé tandis qu'il écoutait le vacarme d'un tissu beaucoup trop froissé, il attendit patiemment que Karm achève son fastidieux travail pour fouiller l'espace, retrouver la fameuse bure et la déplier complètement.

- Une Jedi styliste? - Autant dire que le concept lui échappait un peu malgré sa connaissance et son respect pour les artisans. Si le jeune homme approuvait les améliorations en matière d'armements, alors qu'il détestait le sabre-laser, les techniques de méditation, la rédaction de livres, voire la naissance de peintures/sculptures témoins de leur Histoire, il peinait à saisir l'intérêt de retoucher leurs habits. Certes, leur longue toge brune n'était pas spécialement pratique pour se battre, mais il leur suffisait de la retirer pour se retrouver vêtu d'une tunique large, confortable, aux coutures simples mais efficaces.- C'est. Hum. Original. Est-ce que tu aimes ses croquis?

Sans doute que l'intérêt de cette pratique lui échappait, pauvre aveugle, de surcroît amant d'habitudes rassurantes. Préférant ne pas émettre de jugement faussé, le Chevalier avait choisi de se montrer curieux. Il n'en viendrait certainement pas à demander de jouer les mannequins pour l'adolescente, mais l'avis de Karm à ce propos, réfractaire à leur tenue habituelle, ne manquait pas d'intérêt et puis le Hapien aimait toujours connaître des anecdotes à propos de son ami ou de ses proches.

- Justement. Qui dit rétablissement dit repos. C'est le pilier de toute convalescence, le plus efficace de tous les médicaments. Le reste n'est qu'ajout et aide à l'organisme.

S'amusa le Jedi tout en pliant méthodiquement les habits dont son compagnon, fidèle à sa réputation, s'était rapidement défait. Résistant au désir de l'embrasser, il décida de le faire rager un peu et s'appliqua davantage encore à finir lentement son travail. Il fallait bien punir cet insolent chevalier, incapable de respecter les vêtements d'autrui, qui plus est, porteurs de symbole.

Retrouver son camarade, amusant -et un peu turbulent, certes!- lui faisait un bien énorme. Alors qu'il avait failli perdre ce derniers des heures avant, ses mots résonnaient enfin dans ses oreilles, mais il y avait aussi, sous forme de murmures, autre chose. Les sentiments, le passé de Karm s'étaient mêlés à ses propres souvenirs, lui donnant une impression confuse d'inquiétude et de désir d'en savoir plus, allié au sentiment qu'il ne connaissait pas si bien l'Ark-Ni. Était-ce réciproque d'ailleurs? Lui-même était en général peu enclin à partager la profondeur de ses émotions, plutôt calme, sur la réserve et suiveur, il préférait largement se concentrer sur autrui que sa propre personne. Sous son allure de philosophe débonnaire, ne refoulait-il pas son vrai "lui", cet enfant martyrisé auquel il était difficile de se confronter? Par chance, Saï aidé des soigneurs du Temple avaient su rendre à Luke un certain équilibre, mâtiné de symptômes discrets, dont son goût pour le contrôle de chaque domaine dans lequel il mettait le nez, sa méthode et sa grande douceur, presque agaçante. Il se cachait depuis toujours de la lumière, appréciant l'ombre rassurante de l'anonymat, suivant les principes de l'Ordre comme s'ils reflétaient exactement sa manière de penser, gommant une personnalité peut-être parfois divergente. Pour toutes ces raisons probablement, on le laissait côtoyer Karm, mais Luke n'en avait guère conscience. Quoique peu à l'aise à l'idée et se sentant en dette avec son ami, il proposa.

- Un jour. Si tu veux, on pourra le faire à l'inverse.- Loin d'être apte à prendre conscience de la double signification de sa phrase étant donné le thème "subtilement" abordé par son ami, Luke continua naturellement. Ses joues avaient pris une jolie teinte rosée, confessant son embarras.- Toi, dans mon. Hum. Esprit?

Pourquoi se mit-il carrément à rougir? Et pourquoi pensa-t-il, la toge désormais serrée entre ses doigts que son cher et tendre était justement à moitié dénudé?
Karm Torr
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Hmmm… Je sais pas trop.


Il avait jeté un œil à quelques croquis de Thann mais, jusqu’à présent, la jeune fille ne lui avait pas vraiment demandé son avis sur la question et il ne comptait pas se montrer indiscret. Il ne croyait pas qu’un Maître dût s’immiscer dans tous les aspects de l’existence de sa Padawane et il était probablement sain qu’une adolescente ait ses propres divertissements, des centres d’intérêt qu’elle poursuivait seule, avec plus d’indépendance que celle que lui offrait sa formation.

J’suis pas sûr d’avoir un sens esthétique très prononcé en matière vestimentaire, quoi. Mes tenues d’explorateur, c’est plutôt pratique, quoi. Et pour les voyages pas d’exploration, ben je cherche surtout à m’adapter à ce que les gens font sur place, pour pas détonner plus que ça. Du coup, la mode, j’y connais pas grand-chose.

Rien dans la culture de son enfance, ni vraiment dans celle du Temple, ne le disposait à se pencher sur ce genre de sujets. Désormais assis sur le lit, calé contre le mur avec son oreiller, sans paraître pressé d’enfiler autre chose que son boxer, il surveillait Luke et ses activités de pressing du coin de l’œil, tout en parcourant les messages en souffrance sur son datapad.

Heureusement, rien d’urgent ne paraissait s’être produit pendant son accident.

Après, de manière générale, j’suis convaincu que la vie esthétique est un aspect important de la Voie du Jedi, qui est parfois négligé au profit de projets plus utilitaires. L’esthétique est un aspect important de la vie spirituelle, et du coup, ben, du lien avec la Force. Par la musique, par la peinture, par l’architecture, par les jardins, par les histoires. Dans ces temps de guerre, où tout le monde est préoccupé par l’urgence des situations, je trouve ça pas mal qu’on se souvienne que l’Ordre Jedi, c’est plus que des guerriers et des diplomates, mais aussi toute une culture, avec ses profondeurs.

Tout en parlant, il avait rédigé quelques messages laconiques mais informatifs pour régler les affaires les plus pressantes et il put enfin abandonner son datapad sur le bureau. Contempler Luke, fût-ce préoccupé par ses obsessions ménagères, était un spectacle somme toute infiniment plus intéressant que d’arbitrer les problèmes budgétaires de la prochaine expédition.

D’ailleurs, j’pense que c’est le recul de notre pensée esthétique qui nous empêche de voir l’intérêt spirituel de la romance. Aimer quelqu’un, c’est aussi le trouver beau. Beau spirituellement, beau physiquement, à la vue, ou à l’oreille, ou au toucher. Quand on considère le désir seulement comme une pulsion basse, sans admettre ce qu’il dit aussi de notre sens esthétique, ça nous empêche de voir que le sentiment amoureux peut ouvrir la voie à l’élévation de l’âme vers la Force.

Dire qu’on ne lui avait à l’origine posé qu’une question simple sur les vêtements.

’Fin bref, ça, c’t’une parenthèse. Je comprends pas grand-chose au stylisme, mais ça me paraît pas une préoccupation vaine. Inutile, en un sens pragmatique et immédiat, sans doute, mais précieuse pour, disons, notre santé mentale collective.

Avec un sourire, il rajouta :

Merci de veiller à ce que les collègues ne me prennent pas pour un souillon.

La robe était plus impeccablement pliée qu’il n’aurait jamais su le faire mais, en contrepartie, il n’avait pas son pareil pour expédier le remballage des campements dans des circonstances extrêmes. Chacun ses spécialités. Karm aimait l’ordre aussi, sans doute plus par habitude que par tempérament.

L’hésitation soudaine de Luke lui arracha un haussement de sourcil et le sujet que son ami aborda était trop grave et sérieux pour que l’Ark-Ni ne se laisse distraire pour la rougeur adorablement équivoque qui envahissait les joues de son compagnon. Après un moment de réflexion, il murmura d’une voix douce :

J’aimerais beaucoup. Viens.

Il s’était relevé pour prendre la robe des mains de Luke et la poser sur le bureau, avant d’entraîner le Consulaire à s’asseoir au bord du lit, tout à côté de lui. Gardant les mains de l’Hapien dans les siennes, il confessa :

Je t’avoue qu’en émergeant tout à fait, quand je me suis rendu compte de ce qui s’était passé, j’ai un peu… Ouais, ça m’a fait peur. De savoir que tu avais été dans mon esprit, que peut-être t’avais pu voir le moindre de mes secrets. Même si au fond, je sais pas, j’ai pas l’impression de vraiment avoir des secrets. Certainement pas pour toi. Mais c’t’une chose de te parler de certains trucs, et une autre que tu les éprouves par toi-même, directement à la source. C’est super effrayant. Je me suis senti… Je me sens encore très vulnérable. Exposé. Tu comprends ?

Un sentiment sans doute fort compréhensible.

Y a quelque chose aussi de très… humiliant. Dans le bon sens, je veux dire, dans le sens que ça rend humble, à l’idée que quelqu’un d’autre a pu pénétrer nos secrets et lire clairement en nous. Et, ben… Quelque part, je suis content. ‘Fin, que ce soit toi, je veux dire. T’avoir à l’intérieur de moi, me livrer à toi, progresser dans la Force grâce à toi, entièrement nu, à fleur de peau, c’est… c’est très beau.

Ce n’était probablement pas un hasard si ces derniers mots avaient été aussi fort érotiques : Karm avait de la Force une approche très sensualiste et, quand il faisait l’amour avec Luke, il se sentait plonger dans la Force vivante. Pour lui, leur sexualité était une pratique méditative à part entière, qui résonnait avec l’expérience qu’ils venaient d’avoir, dans l’infirmerie.

Et inverser les rôles, c’est… Une sacrée preuve de confiance de ta part. Et de maturité. Et… ‘Fin, voilà, j’en suis très honoré. Je découvre avec toi, à l’intérieur de toi, autour de toi, contre toi, des aspects de la vie, de la Force, que j’aurais jamais imaginés…
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Luke Kayan
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- Moi non plus je n'y connais pas grand chose si ça peut te rassurer. 

Répliqua le Hapien, un nouvel éclat de rire fleurissant sur ses lèvres. Outre le noir, il ne pouvait prétendre savoir assembler les couleurs, ni donner son avis sur la coupe de tel ou tel vêtement. C'était en partie pourquoi il aimait la tenue traditionnelle de l'Ordre: simple, ample, qui enlaçait parfaitement sa taille et d'une matière connue, consistante, rassurante. Le type de vêtement que l'on pouvait porter les jours de froid, emitouflé dans la toge, comme de chaud avec la fine tunique beige. Quant aux bottes anti-dérapentes, elles faisaient le bonheur d'un aveugle au pied naturellement moins sûr que qui que ce soit d'autre. Définitivement, il ne saisissait pas bien l'importance de changer le vestiaire de l'Ordre ou de s'y intéresser- pareillement pour l'architecture, trop élaborée du Temple de ce qu'il en savait, loin de respecter leur voeu d'austérité. Voyant, il aurait sans doute été un classisite convaincu, favorisant les statues simples et épurées, faites de matériaux naturels, résistants, nobles sans être luxueux.- mais des notions devaient lui échapper. Avec prudence, le Chevalier clos le sujet. 

- La musique, l'écriture, la peinture même -d'après ce qu'on en dit.- je peux comprendre, le reste j'ai plus de mal, mais je n'ai jamais approfondi, et je ne suis pas le mieux placé pour apprécier les retombées positives de l'esthétique, je suppose qu'il me faudrait entendre l'opinion d'une personne qui y est sensible pour me permettre un avis, et encore, partiellement.

Il haussa les épaules, signe que la conversation venait de s'épuiser. Karm n'aurait pas plus à apporter vraissemblablement étant donné qu'il laissait son espace à Thann, une bonne chose songeait Luke qui accordait une liberté similaire à Eckthor. Avide de protéger certains aspects de son quotidien, le Chevalier était le premier à ne jamais poser certaines questions, peu importe les prémisses d'inquiétude qui pouvaient naître. En ce qui concernait la formation, laisser l'adolescent s'exprimer était une chose, respecter le protocole en était une autre: le blond était intransigeant sur la tenue du garçon, son phrasé, et il attendait toujours un comportement exemplaire. Si la mode ne lui importait guère, Luke essayait d'avoir des habits propres, repassés et une coiffure au moins correcte. Le maintien lui semblait aussi important, surtout devant les aînés ou en mission quelqu'elle fut, devant des politiciens comme le peuple, en toutes circonstances ils étaient des Jedis, pondérés, cultivés et capables d'apporter soulagement ou éclaircissement à leurs interlocuteurs. Il n'aurait pas supporté l'insolence de la Miraluka ni toléré des prises de paroles dérobées. Karm et lui étaient si différents sur certains points, pourtant ils s'entendaient parfaitement.

- Hum. Et je parie que tu m'as regardé pour savoir la prochaine fois, le faire toi-même. Pas vrai?

Fit Luke, malgré lui amusé par le comportement parfois enfantin de son compagnon. En mission, l'Ark-Ni était précis, rigoureux, organisé, mais en-dehors, au sein du Temple, surtout lorsque cela concernait des thèmes qui ne lui importaient guère -comme cette pauvre tenue traditionnelle- il était parfois rebelle. Quoiqu'outré au début, le Consulaire avait fini par s'habituer, et la majorité du temps il en riait, là où Eckthor, certes, aurait été réprimandé sévèrement. Une fois adulte, il ferait ce qu'il voulait, mais sous son aile, le garçon avait intérêt de bien se tenir. C'était un peu la manière de Luke de lui démontrer une discrète mais réelle affection, il voulait lui donner le meilleur. Karm avait un peu plus de chance, obtenant le statut de chouchou au point de se faire plier sa tenue et à peine grondé.

- Hey je n'avais pas term... - La robe avait beau être parfaite, il n'avait pas pu assez s'en assurer pour se sentir satisfait, seulement Karm avait retiré le tissu de ses mains, encore surprises de ne pas avoir pu effectuer leur tour de vérification habituel. Le Jedi renonça sans trop de difficultés toutefois, sans doute apaisé par la chaleur autrement plus réconfortante de doigts bien connus. L'index légèrement ployé de Luke explora inconsciemment les ridules qui formaient les paumes de Karm, tandis que sa mémoire récitait la direction, l'angle que chacune prenait. Il connaissait par coeur les plis de cette main, quelles veines effleuraient la peau et où elles s'entrecroisaient. Pourtant, il leur restait, à tous deux, encore beaucoup de choses à apprendre.-

- Je trouve ça... Juste. Et... Je ne sais pas.

En toute honnêteté, Luke n'était pas certain d'être prêt à livrer tout un pan de sa vie à Karm, ni ses secrets, mais vu que ce dernier y avait été obligé, il était de bon aloi de s'offrir. Sans compter que le Hapien préférait aussi que ce soit ce dernier qui lise en lui, complètement. Si le Chevalier Turquoise ne fuyait pas, le blond serait au moins rassuré de ne pas être un psychopathe. L'idée, qui n'était pas sans rappeler sa discussion précédente avec son ami, le fit sourire malgré la solennité présumée de la conversation.

- Au fond, j'en ai peut-être envie, aussi. Me rassurer en te rassurant? Mais pas aujourd'hui, ou du moins, pas maintenant.- Corrigea le Chevalier en se souvenant de l'extraordinaire capacité de récupération que possédait Karm.- Je me sentirais plus tranquille si je pouvais rester. En qualité de médecin, é.v.i.d.e.m.m.e.n.t.

Un sourcil froncé, le Jedi libéra un doigt pour l'agiter devant son ami -ou le drap sans doute, mais l'idée restait claire.- en guise d'avertissement. Karm sous sa coupe devrait se reposer, vraiment se reposer. Malgré de longues heures passées à dormir dans l'infirmerie, il estimait que ce dernier n'avait pas totalement récupéré, oubliant que lui-même avait été assez chamboulé.

Joues rosissantes au fur et à mesure que le Gardien se déclarait -ne pas faire l'amalgame devenait impossible, sauf pour un véritable benêt.- Luke tourna la tête pour "observer" le mur d'en face, vêtu de passionnantes, sublimes nuances de noir. Dans le même temps il s'était laissé glisser sur le lit, avait ramené ses jambes contre lui pour qu'elles ne pendent plus. Détendu, le regard fixé sur le plafond, il s'autorisa un soupir. C'était dans la chambre de l'Ark-Ni, plus que dans la sienne presaue, que le Chevalier se sentait à l'aise, à l'abri des regards, jugements et séparations forcées.

- Qu'est-ce que tu t'attends à trouver dans ma tête?

Demanda-t-il, prêt à corriger le Gardien s'il était trop idéaliste. Aurait-il peur que ce dernier songe à fuir en découvrant une réalité très éloignée de la réalité? Et s'il était déçu par un esprit trop conventionnel, tranquille ou au contraire, étonamment torturé derrière la panoplie du parfait petit Jedi?
Karm Torr
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Les joues rosies de Luke ne firent rien pour calmer l’enthousiasme érotico-mystique de Karm, qui contempla son ami avec une passion renouvelée. Il se souvenait précisément du jour où, sur une planète lointaine, à l’abri d’une tente, Luke l’avait pénétré pour la première fois et où il avait senti la Force couler en lui d’une manière nouvelle.


Depuis qu’il avait rencontré le Consulaire, le Jedi réfléchissait chaque jour plus sérieusement à tout ce qu’il éprouvait quand ils faisaient l’amour et à la manière dont le plaisir pouvait résonner dans la Force. Souvent, les traités d’agriculture ou de biologie des Jedis décrivaient le lien entre la sexualité et la Force à l’aune de la génération : c’était parce que la sexualité créait la vie et que la Force, en un certain sens, était la vie qu’il se passait quelque chose de singulier quand deux êtres vivants mêlaient leurs corps de la sorte.


Mais ni Luke ni lui ne tomberaient jamais enceints de leurs ébats, à moins que la Force ne cache encore des secrets que personne n’avait jamais soupçonné. C’était donc qu’il y avait quelque chose d’autre. Peut-être était-ce simplement que le plaisir, en surchargeant l’esprit d’hormones, aidait à se débarrasser des limitations de la conscience et de la raison, un peu comme dans n’importe quelle méditation, et ouvrait la voie vers la Force. C’était l’explication qu’auraient fournie les Jedis les plus matérialistes, ceux pour lesquels la Force était une fonction de la matière, et seulement cela.


Elle ne satisfait pas Karm entièrement. Et, ce jour-là, après avoir senti Luke visiter son esprit, le pénétrer dans son âme comme il l’avait fait dans son corps, et en éprouvant la vulnérabilité d’être soumis aux pensées de son ami comme il l’avait été, sous cette tente, à ses gestes, il lui semblait être confirmé dans ses hypothèses : il y avait quelque chose de semblable entre faire l’amour par le corps et faire l’amour par l’esprit.


L’Ark-Ni se laissa aller à son tour dans le lit.


Hmm…


À quoi s’attendait-il ? Une main sous la nuque, les yeux aussi fixés au plafond, Karm laisse son autre main caresser les longs cheveux blonds de son compagnon. Sur la tête en question.


Je t’aime.


Techniquement, ce n’était pas la réponse à la question, mais ça ne faisait pas de mal de le rappeler. Après mûre réflexion, il concéda :


Déjà, je suppose que le plus intrigant pour moi, c’est de savoir comment tu te constitues des souvenirs. ‘Fin, je veux dire. Dans ma tête à moi, y a beaucoup de formes, de couleurs, tout est assez visuel. J’ai du mal à me représenter comment le monde s’exprime spontanément dans ton esprit à toi. Même dans celui de Thann, je ne suis pas trop sûr. J’ai l’impression que si je sentais le monde par tes sens, ce serait une expérience précieuse. Pour mieux te comprendre toi, déjà. Pour mieux la comprendre elle, aussi, même si sa situation est évidemment super différente. Et pour mieux comprendre le monde. Tu fais forcément attention à d’autres trucs que moi. C’est précieux.


Parfois, il fermait les yeux pour essayer de se représenter tout ça. C’était même un exercice que lui avait préconisé Maître Tavaï, dès le début de son entraînement. Se battre les yeux fermés. Pour s’habituer, au cas où, en cas d’extrême obscurité ou de blessure. C’était une technique très utile, qui lui avait aussi servi pendant les explorations. Mais c’était différent de savoir le faire, quand les circonstances l’imposaient, et de vivre tout le temps comme ça.


Et… bon… c’est probablement égocentrique, mais j’ai un peu de curiosité… ‘fin, beaucoup, OK. Beaucoup de curiosité par rapport à ce que tu ressens pour moi. Moi, je sais tout ce que ça me fait d’être avec toi, mais on est super différents, et y a une bonne part de mystère dans ce que je te fais à toi. Je me demande si… Si tu penses souvent à moi ou… ‘Fin…


Les joues de l’Ark-Ni rougirent et il murmura évasivement, d’un ton embarrassé :


… des trucs comme ça…


Ce qui intriguait surtout Karm, c’était le désir de Luke. S’éveillait-il parfois spontanément ? Arrivait-il à l’Hapien, seul, de penser à son compagnon et se sentir possédé par l’excitation et le désir ? Ou bien ne répondait-il qu’à sa présence ? Comment ce corps plaisait-il à Luke ? Était-ce sa voix, ses gestes ? Ses muscles, sa souplesse ? Ou bien tous ces détails étaient-ils si profondément refoulés que Luke lui-même n’en avait pas conscience ?


Et je m’attends à y trouver… Des choses beaucoup plus compliquées que ce que tu laisses paraître, je crois. Pas mal de doutes, d’incertitudes, de la peur, peut-être du ressentiment. Des ressources inexploitées, je pense. T’as un courage hors du commun que tu refuses de t’avouer à toi-même et un goût pour la prise de risques que tu t’obstines à nier, et je me demande ce que tu en perçois dans ton propre esprit. Je me demande comment ça s’organise.


Karm se tourna finalement sur le côté pour se glisser dans les bras de Luke et, la tête sur l’épaule du Consulaire, une main sur son ventre et une jambe passée par dessus les siennes, il expliqua, avec un ton où se mélangeaient tout à la fois le respect, la tendresse et l’amusement :


T’as beau dire que tu es soporifique, casanier, ennuyeux et tout ça, factuellement, tu es un Consulaire aveugle qui s’entraîne dur au sabre, qui mène des missions d’enquêtes et d’infiltrations souvent rocambolesques avec des talents d’acteur assez saisissants, qui fricote avec l’un des rebelles de l’Ordre aux habitudes excentriques et qui mène de drôles d’expérience dans la Force. Du coup, moi, tu sais, l’histoire du Luke Kayan parfait petit fonctionnaire, j’y crois pas trop non plus.
Luke Kayan
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Inconsciemment, l'annonce préalable aux aveux entraîna un adorable tortillement de corps du Hapien, discret mais efficace, destiné à se rapprocher davantage de l'auteur. Si les ingrédients demeuraient les mêmes, les doses avaient changé, ainsi, la culpabilité, toujours présente, s'était beaucoup adoucie, devenant le délicieux glaçage d'une sucrerie dont il ne se lassait guère. Le plaisir mâtiné d'une assurance renforcée l'enveloppaient lorsque dans l'intimité d'un lieu fermé à toute oreille et tout esprit, Karm ou plutôt Tam lui disait "je t'aime". C'était judicieux, sans doute pas calculé mais judicieux quand même de débuter ce genre de conversation si sérieuse par la promesse sans équivoque. Quoiqu'il imaginait, et peut-être quoiqu'il arrivait, donc, le Gardien continuerait de l'aimer.

- Je n'ai aucune idée de la manière dont je garde mes souvenirs comparés à toi, en effet.

Reprit Luke en un écho, tandis qu'il s'efforçait de fouiller sa mémoire. Évidemment, les références auditives pullulaient dans son esprit doté, d'ailleurs, d'une bonne capacité de stockage. Il avait toujours possédé des souvenirs solides, capables de pallier en partie son handicap. Des formes? Si elles étaient géométriques, il avait conscience de leur existence pour constamment vivre, comme quiconque, à leur contact: un pommeau de douche rond, un stylo droit et fin, un manche de sabre-laser, une tasse ovale. une feuille rectangulaire. Outre cela, il ignorait si Karm pourrait percevoir autre chose.

- J'ai visité ton esprit avec mon regard défaillant, nulle image, à moins que tu ne me les ai offertes sans que je puisse, faute d'habitude, les identifier? J'avoue ignorer et me demander si tu pourrais voir mes souvenirs avec tes yeux, à toi, du moins pendant ma prime jeunesse où les miens fonctionnaient.

Son cerveau pouvait-il posséder des épisodes colorés remontant à sa petite enfance? Si bien enfouis qu'il les avaient oubliés, à moins qu'il soit juste devenu incapable de les interpréter. Toujours est-il qu'au-delà d'une crainte naturelle, le Chevalier commençait à éprouver une certaine curiosité pour l'expérience. C'était ainsi presque à chaque fois: Karm éveillait sa propre fibre d'explorateur. Il devenait plus ouvert à la nouveauté, même curieux, alors que seul, le Hapien préférait suivre les sentiers tracés par leurs Ancêtres. Quoiqu'en dise son ami, sans lui, Luke restait en majeure partie, casanier et prévisible. Du moins, il se percevait de la sorte, acceptant ce fait sans larmoyer sur son sort depuis l'adolescence. Chacun sa personnalité.

- La peur mène au côté obscur.- Récita-t-il machinalement d'une voix très basse sur un ton qui ressemblait à une excuse. Impossible de se mentir sur ce point, Karm avait raison, il y avait des doutes, de la crainte en lui. Heureusement, ce sentiment découlait de l'envie d'être utile à son Ordre, de protéger les innocents, d'accomplir ses promesses, tenir ses engagements. Ce trait était tempéré par un manque d'ambition parfois désolant. La puissance pure ne l'intéressait guère, et malgré ses "drôles d'expériences" au sein de la Force, Luke la respectait, voir la craignait trop pour pousser trop loin. Il préférait améliorer sa technique plutôt que d'augmenter ses pouvoirs.

- Bien sûr que je pense à toi! - Aussitôt, la rougeur de ses joues qui avait commencé à disparaître repris de la superbe, virant même au cramoisi. Force lui était de reconnaître que parfois, ses douces pensées innocentes avaient dérivées au point qu'il nécessite une douche froide- dont il avait pourtant horreur. Hormis ces petites digressions, le jeune homme pensait effectivement très souvent à Karm, ce qu'il dirait, ferait, conseillerait dans telle ou telle situation, ainsi qu'à des scènes vécues ensemble si la situation paraissait la même, chose qui arrivait régulièrement.

Craignant d'être vu comme un pervers, il épargna Karm quant à ces quelques fois qui avaient provoqué, chez lui, des sensations gênantes auxquelles il avait échappée adolescent. Son cerveau se rappelait très bien d'un certain explorateur, de la sensation de plaisir généré au contact de tout son être, muscles, cheveux, jusqu'à l'odeur. C'était avant tout la simple présence de l'homme qui déclenchait le processus, son esprit tant apprécie, son caractère, défauts comme qualités qui engendraient des souvenirs sensuels. Mais ça, Luke ne saurait l'expliquer, son cerveau lui-même se le cachait peut-être tant c'était, pour lui, complexe de lutter contre son éducation, son propre caractère effectivement timoré, prudent et délicat.

- Enfin. Des trucs comme ça. Oui.

La belle équipe, jambes enlacées, aux couleurs rosissantes assorties allait bien ensemble. Outre leurs différences évidentes, ils possédaient de nombreux points communs qui les rapprochaient indubitablement, dont leur gêne, leur éducation pudibonde à certains sujets, et, peut-être, l'esprit plus aventurier que prévu du blond. Ou sa flexibilité, parce que Luke disposait de cette capacité à moduler ses envies selon celles de ses proches. S'il possédait son propre caractère qui lui imposait -heureusement- des limites à ce sujet, le blond était du genre suiveur. Il était évident pour qui connaissait Saï Don que Luke, à travers ses expressions, ses idées et sa manière de faire avait été son apprenti. Et de deviner aussi, qu'à travers ses nouvelles activités, Karm apparaissait en transparence. Aurait-il eu ce goût inavoué pour certaines "drôles d'expériences" sans son rebelle favori? Peu probable. Mais il fallait bien un esprit flexible pour accepter les divergences d'un excentrique de l'Ordre qui accomplissait quotidiennement le miracle d'attirer à la fois méfiance et satisfaction.

- C'est sûr que tu m'as fait changer - Un petit sourire nerveux maquilla les lèvres du Jedi qui se demandait comment le Conseil appréciait ces nouveautés. Pour l'instant on les laissaient ensemble, c'était un point sur lequel Luke se focalisait lorsque le stress l'envahissait, histoire de se contrôler un peu. Ça marchait en règle générale. Mieux qu'avant où la culpabilité dominait en présence de Karm. Au moins déchargé d'une partie de ce poids, le jeune homme avait fait quelques progrès qui se traduisaient par un rendu de câlins, tendresses et autres cajoleries qu'avait déploré son aîné à la Cité des Deux Soleils. À de rares occasions, il avait même pris les devants, même si Luke restait Luke, axé amour platonique, sérieux et timide. Sans ces traits de caractère, ceci dit, conserverait-il tout son charme?

- Donc Monsieur se considère comme un rebelle et l'Ordre et revendique fièrement ce titre. Nous verrons jusqu'à quel point tu as été une mauvaise influence sur moi dans quelques jours.


Signant définitivement son offre, si téméraire, terrifiante lui paraissait-elle, Luke ne put s'empêcher de songer qu'il espérait qu'ils feraient l'expérience dans quelques années plutôt. Tout en espérant qu'elle ait lieu dès demain. C'était très contradictoire, mais cela reflétait aussi sa façon véritable d'éprouver du désir pour cet homme, au-delà, bien au-delà du physique. Il voulait que celui-ci approuve ses choix, approuve ses souvenirs, son caractère, tout ou presque, hormis quelques points inflexibles qui formaient la base de son caractère.

- Je t'aime aussi.

Et il fini de parapher le contrat de lecture d'esprit par un baiser, plus long que ce qu'il avait prévu, profond aussi. Lui qui voulait achever la conversation et la journée venait surtout de mettre un terme à la première. Quant à la journée, rien n'était moins sûr. Son corps était devait être jaloux qu'on ait uniquement parlé de l'esprit jusque là. Une chaleur soudaine émana de la paume de Karm, posée sur son ventre et s'étendit jusqu'à son bassin d'une part, jusqu'à sa poitrine de l'autre. Son baiser continua encore, s’essoufflant uniquement lorsque son auteur eut besoin de recouvrer sa respiration.

Pas très sérieux pour un infirmier d'inciter un patient déjà rebelle à retarder son heure de repos.
Karm Torr
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Je veux bien que je t’aie fait changer… Euh… C’est correct, grammaticalement, ça ? ‘Fin bref. Je veux bien, mais on transforme pas un arbre en souris. J’ai juste révélé des choses qui étaient là chez toi, comme toi t’as fait pour moi. Avant de te rencontrer, j’étais plutôt… Pas individualiste, ‘fin… Je me disais pas que j’allais prendre des responsabilités, avec ce que ça peut impliquer de pression sociale, puis d’administratif, et tout ça. Tu m’as donné le courage de me dire que je pouvais m’impliquer comme ça aussi dans l’Ordre. C’était probablement un truc que j’avais déjà en moi, mais qui sans toi ce serait peut-être jamais révélé.

De bien des façons, Luke avait donné confiance à Karm. Désormais, il se sentait moins intimidé à la perspective d’exposer ses idées, dans des conversations et des écrits. Il avait appris à les construire avec plus de diplomatie, à sa manière, et à considérer l’Ordre dans ce qu’il avait d’immuable et de protocolaire. L’Ark-Ni n’était sans doute pas moins radical dans ses projets et dans ses conceptions, mais il avait mûri dans ses procédés.

En tout cas, c’est comme les guérisseurs ont dit. On se connaît déjà beaucoup et c’est sans doute pour ça que ce genre de méditation, ça marche facilement pour nous. ‘Fin, facilement, pas tant que ça, mais tu saisis ce que je veux dire. En tout cas, je trouve ça précieux, entre nous. Et puis aussi, évidemment, de manière plus générale, assez fascinant.

Pour Karm, la perspective que des esprits puissent se mêler à travers la Force était riche en symbolisme. En bon Ark-Ni, il concevait la communauté de façon organique. Au sein de son Ordre idéal à lui, chacun avait le droit à exprimer son individualité de façon forte et déterminante, mais chacun appartenait aussi à une vaste fraternité, dont tous les membres cultivaient une sorte d’esprit collectif. En somme, aux yeux de Karm, l’Ordre Jedi avait une âme, comme un être vivant, et cette âme était aussi une fonction de la Force — et de leur sensibilité collective à elle.

Mais c’était une théorie qu’il était encore loin d’avoir formulée très clairement pour lui-même et l’heure n’était apparemment pas à l’analyse philosophique. Les lèvres de Luke avaient rejoint les siennes, leurs langues jouaient déjà l’une contre l’autre et les bras du Gardien se refermèrent instinctivement autour de son compagnon. Le baiser était plus enthousiaste qu’il ne s’y était attendu et, dans la Force, il sentait le désir de Luke, comme une chaleur pressante, une demande, un appel.

Son corps se cambra contre celui de son ami au-dessus de lui et, presque entièrement déshabillé comme il l’était, il ne pouvait guère cacher tout l’effet que lui faisait le baiser. D’un mouvement de hanche, il renversa Luke sur le dos pour se retrouver au-dessus de lui à son tour. Le baiser rompu, son front resta contre celui du blond et son souffle continua à caresser les lèvres de l’Hapien.

… je sens ton corps dans la Force et c’est comme tout un monde pour moi, murmura-t-il, encore plus bas que d’habitude, la voix travaillée par le désir.

Parfois, il nourrissait le rêve sans doute irréaliste de pouvoir un jour sentir chacun des midichloriens dans les cellules de Luke. C’était un extrême, mais leurs étreintes lui révélaient chaque fois un peu plus les profondeurs de la Force vivante, de la manière de cette puissance souvent impalpable s’incarnait dans la matière du monde — à moins que ce ne fût la matière qui émanait de la Force.

Il se redressa et, à cheval sur les cuisses de Luke, il retira au Consulaire le haut de sa tunique. Ses paumes se posèrent sur la peau pâle mais parfaite de l’Hapien. Luke n’était-il pas la preuve que la Force dominait irréductiblement toute vie ? Lui, conçu sur Hapès, créé par la science, généré par l’artifice, comme beaucoup de ses congénères, était plus profondément lié à la Force que la plupart des autres Jedis. Un paradoxe.

Les mains de Karm remontaient lentement des flancs de Luke jusqu’à son torse. Il en connaissait bien les muscles. Les détails. Les articulations. Il avait même étudié le physique de Luke avec beaucoup de soins, pour les entraînements, pour être en mesure de bien conseiller son ami, quant aux exercices à effectuer. Et leurs combats dans les salles à tatami du Temple étaient des rencontres physiques et sensuelles aussi.

Tu sais…

L’une de ses mains caressait désormais le cou de l’Hapien, effleurait du bout des doigts ses lèvres. Dans la Force, le désir de Karm était envahissant, tumultueux, passionné. C’était comme un grand brasier lumineux et pur, mais incarné. Pourtant, le jeune homme paraissait n’avoir aucune difficulté à s’empêcher de se jeter purement et simplement sur Luke.

… y a une autre manière de comprendre que la peur, la colère, tout ça, ça mène au Côté Obscur. C’est que ça ne mène pas seulement à ça. De la même manière que la maîtrise de la Force peut amener au Côté Obscur par le désir de la puissance, la peur peut y amener par la volonté de se prémunir de tout. Mais la maîtrise de la Force peut amener à la sagesse, et la peur aussi. Quand on nous dit que la peur mène au Côté Obscur, par exemple, ça veut dire : voici quelque chose d’utile, mais qu’il faut comprendre et bien cerner.

Qui nierait, d’ailleurs, que la peur était parfois la simple expression du bon sens, le mouvement de l’intuition, quand elle s’était livrée d’elle-même à un calcul défavorable des chances ?
Karm se pencha pour embrasser le cou de Luke et, entre deux baisers, il souffla :

Tes peurs te rendront sage, Luke

Il avait prononcé ce prénom avec l’intimité ark-ni, comme d’autres auraient dit « mon amour ».

… parce que je veillerai toujours à ce qu’elles ne te perdent pas.
Luke Kayan
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- Tsss: Je veux bien admettre t'avoir changé. Ou "imaginons que je t'aies fait changé".

Un éclat de rire, incongru pour n'importe qui, qui n'était pas eux, justement. Parce qu'ils avaient l'habitude d'entrecouper diverses conversations illogiques dans des situations qui les rendaient encore plus étranges. C'était leur façon de communiquer, exigeant spontanéité, vie et sincérité, humour aussi, d'autant plus que Karm avait également révélé une certaine capacité de pince-sans-rire chez Luke. Un vrai métisse Ark-Ni qui s'ignorait.

- On a encore du travail pour révéler le fin littéraire qui se cache, pardon, qui se terre au plus profond de toi.

Afin d'illustrer ses propos, le Chevalier avait posé sa main sur l'estomac, là où, sensément le fameux amant des lettres se cachait, terrorisé par l'Explorateur qui avait la triste manie de manger les syllabes. Un détail qui exaspérait le diplomate, tout en séduisant l'homme. Corriger son ami en deviendrait presque une déchirure parfois, mais Luke n'oubliait pas ce qui avait achevé de nouer leur relation: son devoir d'aider Karm à s'exprimer devant un jury. Il y tenait et finirait par transformer ce rustre en un orateur talentueux, d'autant plus que, côtoyant son propre Padawan qui l'admirait, l'Ark-Ni avait une mauvaise influence linguistique dessus.

- Hum, j'étais donc un kamicaze refoulé... Ou un Gardien Inavoué. Et toi, un futur Maître du Conseil.

Il était vrai qu'en se rappelant de ses premières semaines aux côtés de Karm, jamais le Hapien ne l'aurait imaginé avoir des ambitions d'un tel genre: prendre un Padawan, avoir des responsabilités, s'impliquer en tant que maître. Il avait d'ailleurs hésité à donner son appui ou gentiment désamorcer de faux espoirs, ne connaissant pas encore assez l'Ark-Ni. C'était sans hésitation qu'aujourd'hui le Hapien le soutenait, convaincu de ses capacités en tant que Maître. Parce que si Karm était rebelle, il était altruiste, honnête et profondément impliqué dans la vie de l'Ordre. Aidé par ce côté studieux que seuls le côtoyant lui connaissaient, il pourrait apporter beaucoup au Temple, si effrayé puisse parfois être le pauvre Luke par ses idées révolutionnaires. Son aîné avait des idées innovantes promptes à provoquer des crises cardiaques à un pauvre traditionnel comme lui, mais avec le recul, il fallait bien constater que la majeure partie de ces évolutions avaient été profitables. Luke avait avancé en butant, en se hérissant parfois, plus rarement en se fâchant, mais lorsqu'il le faisait, il avait pu remarquer que, le coup au coeur passé, il avait franchi des étapes.

Au fur et à mesure des réussites, le Chevalier avait appris à lâcher un peu la rassurante barrière de son circuit habituel pour essayer de patiner au centre de la piste. Sans y être accro, loin s'en faut, le jeune Jedi commençait à apprécier l'adrénaline qui coulait en lui lors de certaines missions ou simplement, frôlements de frontières desquelles il ne se serait même pas approché jadis. La désobéissance -contrôlée- avait effectivement quelque chose de séduisant et même au-delà, de fructueux, lorsqu'elle était conseillée par une personne souhaitant votre bien. Évidemment.

Ainsi, la théorie de Karm concernant la peur ne le surprit qu'à demi, et il accepta de l'écouter, parce que ça venait de lui, ça lui ressemblait, obéissant à sa logique ... Karménienne. Et finalement, une logique tellement basique qu'on pouvait s'étonner qu'un Jedi, surtout Consulaire, n'y ait pas songé avant. Prudemment, le jeune homme considéra les propos de son ami, réfléchissant à ce que cette nouvelle perspective supposait. Valoriser, presque apprécier une crainte le rendant sensément plus sage? L'idée était aussi tentante que terrifiante pour un gamin éduqué à, justement, craindre la peur. On lui avait offert de nombreux euphémismes acceptables afin de ne pas cultiver la folie: prudence, modestie, au pire des hésitations. Mais la peur? On avait jusque là toujours prôner son immédiate élimination par des séances de méditation, des entretiens avec des aînés.

- Du moment que nous continuons de veiller l'un sur l'autre.

Répondit-il en un écho, les joues habillées de la honte que provoquait le manque d'habitude. Montrer son attachement, le voir comme quelque chose de positif allait à l'encontre de ce qu'on lui avait enseigné, du moins en théorie. En pratique, Saï Don en personne dérogeait à ce pilier de l'Ordre, pareillement pour la majorité des duos Padawans/Maîtres, lesquels peinaient ironiquement à fonctionner lorsqu'il n'y avait aucun sentiment. Cette logique si basique, si profondément enracinée dans leur nature d'êtres sociaux, c'était Karm qui lui l'avait démontrée, d'une manière implacable, si simple qu'elle en était devenu irréfutable. En guise de gratitude à retardement, le Hapien avait donc osé formuler son attachement, si puissant que ce qui lui importait le plus était de continuer sa route aux côtés de Karm. Jusqu'à ce que la mort les séparent, sans doute. Et encore. La Force qui ne semblait pas s'opposer à leur union serait bien capable de franchir cette limite bassement matérielle, naturelle. Si leurs esprits se connectaient maintenant, pourraient-ils continuer à le faire au-delà? Mais le jeune homme stoppa les pensées un peu trop euphoriques, étranges pour ne pas dire mystiques menaçant de l'envahir. Il se contenterait du présent, de la confiance renouvelée du Gardien qui leur permettaient de poursuivre leur route. Lui qui avait toujours été préoccupé par le futur parvint à se dire que si les choses continuaient de la sorte, il n'y avait aucune raison pour que leur monde s'écroule. Du moins dans l'immédiat. Alors tout allait bien. N'est-ce pas?

- Se perdre, est-ce si grave?

Parvint-il à murmurer, se demandant si effectivement, en un sens s'égarer ne pouvait pas être positif. Était-ce prétentieux de croire qu'ils pourraient continuer à frôler les limites sans les outrepasser? Les avaient-ils seulement atteintes, eux si profondément Jedis, aimant leur Ordre? Il faudrait faire attention quand même, se montrer humbles mais force était de constater qu'ils ne s'étaient pas mal débrouillés jusque là. Oui. Et l'admettre était aussi grisant que préoccupant pour le blond qui se demandait, comme d'habitude, s'il n'était pas trop arrogant?

Par chance, il n'explora guère plus loin la teneur de ses "flatteries" à l'égard de leur couple, tandis que justement son corps lui rappelait de s'occuper de leur union, en cet instant. Les multiples caresses de Karm faisaient voler en éclats questions raisonnables comme réponses folles. En se concentrant, il parvenait aussi à sentir l'esprit de son ami se rapprocher du sien. L'expérience quelques heures auparavant semblaient les rendre plus prompts encore à se fondre l'un dans l'autre, comme s'ils avaient décodé une partie du cerveau de l'autre et qu'il leur suffisait de saisir de double de la clé sous le paillasson, puis de tourner la serrure.

Un peu taquin, le jeune Jedi ralentit leur course même si Karm était très doué pour se contrôler. Le désir avait beau exploser autour de sa personne, il savait toujours se maintenir, mais Luke, pareil. Il avait toujours eu un tempérament calme et une patience proverbiale, pour tout. Absolument tout. Des années d'entraînement, renforcées par son caractère et finalement, certes, des privations nutritives ou de sommeil pour rédiger ses mémoires avaient forgé un corps obéissant, plutôt docile au bon vouloir d'un propriétaire parfois ingrat. Il retarda donc l'échéance en jouant avec les draps, en embrassant l'Ark-Ni ou en bloquant ses gestes -comme dans un combat, en beaucoup plus doux et subtil.- jusqu'à lui donner l'autorisation, voir même l'invitation suprême. Calé entre ses jambes, son aîné pour peu, de manière diffuse, se dessiner devant Luke. C'était évidemment une impression, offerte par la connaissance exhaustive de son corps. Il anticipait chaque mouvement ou presque, se rappelait de la distance entre les articulations, la longueur de ses mains ou le placement de ses muscles, l'épaisseur de ses cheveux. De quoi faire apparaître, devant ses yeux, un genre de silhouette un peu moins sombre que le reste de la nuit qui s'étendait devant lui.

- Viens. On part.

Ensemble, en voyage. L'un dans l'autre. L'un à côté de l'autre.
Karm Torr
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Pauvre Luke ! Lui qui appréciait tant les vêtements bien pliés et bien rangés devait affronter en éparpillement anarchique dans les règles de l’art et, malgré la tempérance malicieux de l’Hapien, les deux Jedis s’étaient retrouvés nus, à l’abri des regards. Leurs corps se caressaient, s’épousaient et se mêlaient ; bientôt, ils furent étroitement unis, et, en sentant son amant l’accueillir, Karm eut l’impression que déjà son esprit aussi pénétrait le sien.

Quelque fatigue qu’il eût éprouvé après son expérience de la veille, l’ardeur dont il fit preuve n’en fut pas moins considérable. Il puisait dans la Force autant que dans son désir. Comme à chacune de leurs étreintes, il sentit ses pouvoirs se déployer : ses sens devenaient plus aiguisés, son endurance plus considérable, et chaque réaction du corps de Luke, beaucoup plus claire. Toutes ses compétences, toutes ces techniques de Force qu’il avait développés pour le servir dans les combats puis les explorations étaient sublimées et il en comprenait encore une fois un peu plus la subtilité, la complexité et la valeur.

Le corps fragile de l’Hapien serré dans ses bras, refermé sur lui, leurs lèvres perdues dans les baisers le guidaient de seconde en seconde sur la voie de la Force vivante. Lorsqu’un soupir de plaisir lui échappait, au creux de l’oreille de Luke, c’était aussi une vague de Force qui passait contre l’esprit de son amant. Au fond, Karm n’avait pas de point de comparaison. Il n’avait jamais connu que Luke. Il ignorait à quel point leur étreinte échappait aux règles ordinaires de la chose et à quel point leur plaisir, qui résonnait dans la Force, surpassait les jouissances ordinaires que goûtaient à chaque instant d’autres couples aux quatre coins de la Galaxie ; s’il l’avait su, il aurait été plus convaincu encore de la valeur mystique de leur amour.

Plus le plaisir de Luke devenait impérieux, plus celui de Karm lui répondait. Ils avaient changé de position trois, quatre, cinq fois, et leurs corps en sueur continuaient à s’embrasser l’un l’autre, un peu comme lors des entraînements au sabre. Karm sentit clairement Luke sur le point de s’abandonner pour de bon à ses sensations et il ordonna son propre plaisir à celui de l’Hapien — enfin, ils se laissèrent aller en même temps, le coeur battant à tout rompre, dans une harmonie rare qu’on les invitait à rechercher dans la Force, sans jamais leur conseiller cette technique très particulière pour l’atteindre.

Quelques secondes passèrent, pendant lesquelles Karm, le souffle court, contempla le corps nu et fatigué de Luke, à ses yeux plus beau que la plus belle des œuvres que les Jedis Artisans concevaient depuis des siècles pour orner les Temples. Et puis, lentement, il se retira de lui, mais leurs corps ne se séparèrent pas tout-à-fait, ni leurs esprits non plus, parce qu’étendu sur le lit, il attira aussitôt le jeune homme dans ses bras, pour refermer autour de lui des bras endoloris par l’effort, mais encore assez solides pour l’étreindre.

Un long moment passa en silence troublé seulement par leurs respirations qui s’apaisaient. Les paupières un peu lourdes, Karm contemplait en lui-même l’effilochement des sensations supérieures que la Force lui avait soufflées, par le désir et le plaisir, et tentait de leur donner un sens plus rationnel et de mieux les comprendre. La pierre qui l’avait conduit à l’infirmerie et l’étreinte brûlante avec Luke avaient ceci en commun de le pousser au-delà de ses aptitudes ordinaires.

… je comprends pas très bien les prophéties…, finit-il par murmurer tout bas, d’une voix un peu rauque.

Il laissa quelques secondes passer, comme si sa déclaration était évidente, avant de se souvenir que, tout intimes qu’ils fussent, Luke ne lisait pas encore entièrement dans ses pensées.

Je veux dire… Je ne comprends jamais mieux la Force que dans le moment présent. Quand on fait l’amour, c’est… C’est les moments de toute ma vie où je suis le plus en sa présence, où je la sens le plus clairement. Pour moi, la Force, ma sensation de la Force plutôt, elle procède de mon corps et de ses activités présentes. Dans le combat, par exemple, dans le souffle méditatif et, plus encore, dans la jouissance avec toi. Mais la prophétie… La prophétie, par définition, elle manifeste dans la Force quelque chose qui en un sens n’existe pas encore, en tout cas physiquement. J’ai du mal à concilier les deux.

Il y avait des gens qui fumaient après l’amour, mais Karm, son truc, c’était plutôt la philosophie et la théologie.

Pourtant, j’suis convaincu que les Voyants Jedis sont vraiment des voyants, pas des charlatans, et qu’ils perçoivent de fait des trucs en rapport avec l’avenir. Faudrait sans doute que je discute plus avec eux. Pour comprendre…
Luke Kayan
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Même si son expérience restait limitée, Luke, lui avait eu l'occasion d'entrer dans les comparaisons. Lorsque son chaste cerveau ne brandissait pas une barrière devant sa mémoire. Pris de cours par de vagues souvenirs, assailli de sensations, le jeune Jedi se rendait compte de la différence entre sa relation avec Jason et celle avec Karm. À ce propos il ne regrettait qu'une chose: ne pas avoir connu uniquement le second. Le premier l'avait souillé de ses tromperies, mensonges, de sa trahison, envers lui mais aussi ceux que le blond s'était promis de protéger. Il n'avait donc pu échapper à un sentiment de satisfaction et de gêne entremêlés en s'apercevant qu'y compris, physiquement, leur union avait été bien terne. Si le chevalier peinait encore à accepter pleinement de vivre son bonheur -égoïste?- avec l'explorateur, il savait que si ce dernier manquait un jour, il n'y aurait plus personne d'autre. Relativement peu éveillé sexuellement ou capable d'un grand contrôle, l'acte en soi n'était pas vital. D'ailleurs son plaisir bassement matériel découlait plutôt du son amour envers son aîné, sa tendresse pour ses pensées semblables aux siennes, son admiration pour celle qu'il différait. Sans Karm, il n'éprouverait aucun besoin de se dénuder pour se rejoindre. La chaleur qui bouillonnait dans ses veines, l'état de ses connecteurs neuronales plus sensibles que jamais étaient du à leur union psychique plus qu'au talent du gardien -et pourtant, ce dernier en avait.-. Cela expliquait sans doute l'impossibilité de Luke à se défaire de cette relation, même s'il l'avait voulu d'ailleurs. Sa promesse face au Conseil alors qu'il était encore avec Jason, il serait tout bonnement incapable de l'accomplir, alors que l'effrayante hypothèse de quitter l'Ordre si besoin l'avait effleuré. Il y penserait de longues heures avant de hurler le "non" tonitruant que toute communauté attendait de ses fidèles membres. Était-ce mal? Sans doute, mais heureusement, une partie du charme de son aîné résidait dans sa propre dévotion -particulière, certes- envers les Jedis.

Pour l'instant donc, tous deux avançaient dans la même direction, tant et si bien que le jeune Consulaire craignait parfois l'inévitable carrefour qui les forceraient à choisir une route. Celle qui correspondait à leurs convictions, entières et profondes, ou celle de l'autre qu'ils se résigneraient à prendre, quitte à laisser un petit bout d'eux sur l'ancien chemin. Lâche, Luke évitait d'y penser, bloquant lui-même son cerveau lorsque le questionnement apparaissait. Et quant il ne le pouvait vraiment pas, il se souvenait d'instant comme ceux-ci, ceux qui le rassuraient malgré son esprit plutôt cartésien voir fataliste: tout irait bien. Leur relation était trop belle pour disparaître, elle pouvait se plier, s'égratigner mais se briser, hormis via la mort, cela semblait impossible.

Le souffle court et le coeur battant la chamade, Luke accueillit son ami contre lui, rempli de gratitude. Le seul dont il appréciait pleinement le contact physique, une corvée qu'il supportait si nécessaire avec autrui. Même les pauvres hères victimes d'une mauvaise nouvelle et qui, étonnamment choisissaient de se jeter contre son épaule étaient reçus par des muscles raidis. Son passé allié à son éducation stricte, spartiate, privilégiant une affection sincère mais discrète et platonique avec ses pairs -surtout son maître- en faisaient quelqu'un de prime abord froid. Certains allaient jusqu'à interpréter son langage recherché, sa tenue ou ses manies comme un signe d'arrogance. Karm révélait sa véritable capacité d'empathie, de tendresse pour autrui, bien que lui seul en ait l'accès direct. Dans ses étreintes, ses preuves de tendresse, Luke était de plus en plus expressif, même si son plaisir s'exprimait plus discrètement que celui de l'explorateur.

Les yeux clos, attentif à la danse de son organe vital encore agité, le Hapien respira profondément l'odeur de l'homme qui l'enlaçait. Karm pouvait bien ne pas avoir le corps bodybuildé du "protecteur viril", il se sentait plus en sécurité entre ces bras que n'importe quels autres. La force de son compagnon émanait surtout de son esprit décidé, déterminé, celui qu'il avait visité quelques heures avant. Connaître ses confusions, ses faiblesses n'avaient pas amoindri la considération que Luke avait pour son aîné. Avec tout ce que ce dernier avait vécu, il se demandait comment il parvenait à être aussi équilibré. Si bénéfique serait une visite, voire plusieurs, à un membre du Medcorps, le Hapien trouvait que l'Explorateur avait surmonté d'incroyables obstacles. Il n'avait jamais pu faire la comparaison -Jason n'était pas du genre musclé, même s'il était un peu plus grand.- mais ne le désirait nullement. Il ne manquait de rien avec Karm, pas même de réflexions philosophiques tardives sensées muscler son cerveau après les efforts fournis par son corps entre les draps.

- Humpf. Ce serait insultant d'expliquer ces prophéties par un réseau de conjonctures qui se rejoignent et plus ou moins calculées par les Voyants.


À l'instar de Karm, Luke peinait à saisir la prévision du futur. Cela relevait de la science-fiction, un genre que le jeune Chevalier ne connaissait guère ni ne désirait approfondir. Rêveur mais scientifique, il favorisait une interprétation au jour le jour de la Force, et encore, là aussi il préconisait la prudence. On était loin de l'enfant qui jugeait que la grande puissance qui coulait en eux était sa mère ou une amie qui le guidait. Désormais, il pensait qu'elle le faisait uniquement lorsque cela allait dans son intérêt. Un "animal", une alliée qui souhaitait protéger son hôte tout en ayant ses limites. Un enfant qui ne maîtrisait pas ses dons pouvait rejeter un agresseur d'une belle vague télékinésique qui jaillissait de ses mains sans être capable de la contrôler. Lors d'un combat, elle les guidait, leur faisant pressentir un danger immédiat. En revanche, La Force pouvait abandonner un corps instable, le laissant dériver dans ses profondeurs noirâtres sans essayer de le repêcher, le consumant juste beaucoup plus vite, avec plus d'ardeur, devenant acide corrosif et gourmand. De nombreux Jedis avaient cédé au côté obscur sans que la Force elle-même n'y trouve quelque chose à redire, comme si elle s'adaptait au choix, aux circonstances de l'être et le suivait dans sa chute. Alors avait-elle réellement la capacité d'écrire des prophéties ou du moins, aider les Voyants à les déchiffrer? Le Chevalier en doutait parfois, sans pour autant parvenir à considérer ces derniers comme des Charlatans. Parce qu'ils faisaient partie de l'Ordre. Parce que certaines choses réellement étranges s'étaient produites au fil des temps. Peu ceci dit.

- Les accomplissements effectifs de ces prophéties ne sont pas retranscris, ou du moins très peu le sont, et ceux qui le sont restent obscurs. J'y crois, je veux dire, en partie... Mais... Hormis le manque de rigueur que j'ai constaté -j'avoue toutefois ne pas m'être vraiment plongé dans ce domaine donc je peux me tromper.- je n'ai simplement pas envie d'y croire. Ce serait trop... Triste. Sommes-nous absolument condamnés à accomplir la prophétie, souvent funeste, qui pèse sur nous si nous en sommes un malheureux élu?

Le folklore jouait un certain rôle dans son appréhension, le Chevalier ne le niait pas, mais en attendant il craignait ce type de dons "déviants", aussi étranges qu'inexplicables. Inaccessibles à la majorité des enfants de la Force. De quoi faire ce que l'on voulait avec les âmes que les écrits avaient attrapés dans leurs filets. Fascinant et terrifiant.

À demi somnolant, Luke eut une pensée un peu déplacée pour ses vêtements en vrac. Il aurait voulu se lever pour bien les ranger, s'assurer de les retrouver en l'état le lendemain -ou de les retrouver tout court.- mais il renonça, enfoui contre Karm. Il faudrait penser à prendre une douche aussi. Mais dans 5 minutes, sans doute. Peut-être.
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