Luke Kayan
Luke Kayan
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Une main tenta de discipliner la crinière claire et épaisse, légèrement humide après une douches de circonstances. En vain. De longues mèches s'échappaient avec malice de l'élastique décidément trop petit pour contenir une telle masse. Abandonnant sur ses épaules, la queue de cheval à demi-défaite, le jeune homme repris sa marche d'un pas vif. Du moins, tant qu'il marchait dans les petites rues parallèles à l'artère principale de la ville. Ornée de décorations somptueuses et un peu prétentieuses pour la fin d'année, cette dernière avait attiré de nombreux badauds qui profitaient de ce vendredi après-midi avec la joie pressée de ceux qui savent que lundi, il faudra déjà recommencer à travailler. Le Hapien aurait volontiers évité la folie générale, les achats de fin d'années ainsi que les enfants qui courraient partout, mais impossible de faire autrement. Après une mission d'infiltration courte mais délicate parce qu'un étudiant était soupçonné de meurtre -rien que ça.- le jeune homme s'apprêtait à retrouver le Temple Jedi de Coruscant avec plaisir. Il avait décidé de rester dans la nouvelle structure jusqu'au dimanche voir plus si Ondéron n'avait pas besoin de lui afin d'aider un Maître archiviste, et peut-être aux réformes de l'infirmerie. Histoire de vérifier si tous les protocoles de sécurité s'appliquaient correctement. Quand Karm reviendrait de sa propre mission, le Chevalier rentrerait via navette au Temple originel, un voyage heureusement bien raccourci par un nouveau passage des navettes. Bref. Tout allait bien. L'étudiant sur qui il avait fallu enquêter aussi vite que discrètement avait été retiré de la circulation, quittant les rangs d'une section de paléontologie. Pour enterrer les os de ses victimes avait suggéré le commissaire assigna à cette zone avec cet humour gras, macabre un peu désespérant.

Luke s'était rapproché du suspect, soit-disant étudiant en criminologie, il avait fait mine de s'intéresser au côté obscur de sa propre voie. Psychologiquement malade ou psychopathe, l'humain avait démontré être aussi retors que méticuleux. Gagner sa confiance n'avait pas été simple bien que ce fut rapide car Luke avait utilisé ses connaissances en profilage pour se faire passer pour un sociopathe qui s'ignore. L'autre pensant avoir affaire à un frère de crime avait commencé à parler. L'assassin présumé, seul, avait à demi-mot confié ses désirs noirs. Avec un mélange de pitié -que Karm lui avait appris à avoir pour les coupables- et d'horreur, le Hapien avait pu précipiter l'arrestation du dérangé, donc.

C'était, par conséquent, toujours vêtu comme un étudiant -jean, chemise blanche en lin et veste grise- qu'il avait quitté sa chambre après une douche. L'affaire avait peu duré, une semaine, et il n'avait ni eu le temps, ni l'envie de s'attacher à qui que ce soit. C'était donc sans saluer personne sinon quelques professeurs le connaissant -après qu'il eut assisté à des cours de profilage pendant quelques mois- que le jeune homme s'apprêtait à retrouver sa vraie vie. Sa besace en cuir au fond de laquelle dormait un outil bien insolite pour un étudiant -son sabre-laser- se balançait au rythme de ses pas. Obligé de rejoindre l'artère principale à cause de travaux dans une petite rue parallèle, le Jedi avait déployé sa canne blanche afin de mieux se repérer mais aussi de former une sorte de bulle invisible autour de sa personne et ainsi éviter les bousculades désagréables. L'astuce marcha quelques temps, même s'il entendait certains badauds grommeler tout bas, se croyant inaudibles, jusqu'à ce qu'un choc lui prouve que la solution était vouée à l'échec.

Une chose molle par endroits, terriblement dure à d'autres frappa sa poitrine. Par réflexe Luke se saisit de ce qui se trouvait sur son passage -un bras auquel était relié le fameux coude criminel qui avait coupé sa respiration.- Doux mais ferme, il attendit une seconde que l'enfant se tranquillise avant de le lâcher. Sa peau fine de jeune -proche?- humain, sa présence bouillonnante, chaotique au sein de la Force obligea le Chevalier à s'intéresser à lui ou à elle. Dans cette foule, le gamin aurait-il perdu sa famille? Le dos bien droit, Luke s'accroupit pour atteindre le niveau dudit enfant.

- Bonjour, fais attention, tu pourrais te faire mal -c'était surtout ses propres côtes qui avaient souffert de la rencontre avec le maudit coude, mais il ne l'avouerait jamais- il y a beaucoup de monde et tu pourrais te perdre. Vois-tu tes parents?

D'une voix amicale quoiqu'un peu guindée, le jeune homme cherchai à rassurer l'enfant. Il avait naturellement du mal à le faire, connaissant peu la psychologie des gosses. Il avait donc omis de se présenter, demander le nom du ou de la concerné. Sa seule réaction honorable dû à ses réflexes avaient été de ne se saisir aucunement de l'enfant, de lui laisser sa liberté de partir bien que Luke craigne cette option. Il espérait qu'en donnant le "choix", l'enfant dont il ne connaissait pas le sexe et devinait très approximativement l'âge-soit en faute, resterait. De plus, il n'avait pas élevé la voix. Il ne voulait surtout pas que ce dernier fuit, s'éparpillant dans une foule capable de le piétiner ou de chuter contre un obstacle. C'est donc plutôt sur un ton sympathique que le blond s'était adressé au mini-ouragan qui courrait peut-être en s'imaginant héros, voleur, policier, Jedi, emporté par son imagination. Par réflexe, Luke se redressa, au milieu de la place, projetant la Force au-delà de la grande promenade. Malheureusement l'enfant étant Insensible il ne pouvait communiquer mentalement avec et avoir une description physique des géniteurs ne l'aiderait guère. Il se contenta donc d'éloigner le gamin de la circulation en se plaçant contre une fontaine toute proche. Dans leur "trou", ils étaient ainsi plus visibles pour les responsables du/ de la petit(e). Se souvenant de son propre dégoût du contact physique, le Jedi n'en imposa aucun à son nouveau protégé. Il espérait le maintenir à ses côtés jusqu'à l'arrivée des "sauveurs" par les mots.

- Regarde bien et dis-moi si tu vois quelqu'un que tu connais.

Annonça-t-il, pas très sûr qu'à cet âge un enfant lambda puisse saisir ce type d'ordres. La famille et lui ça faisait dix. Si un Padawan de 2 ou 3 ans était déjà en partie "dressé", habitué à obéir beaucoup mieux qu'un civil et surtout apte à communiquer de courtes sensations via la Force- par exemple d'une onde de Force, le garçon ou la fille aurait pu appeler ses parents eux-même sensibles ou communiquer son inquiétude ou apaisement à Luke. Ce dernier ne savait même pas d'ailleurs, si son protégé était vraiment perdu.-. Là, c'était silence radio, ou plutôt brouhaha discontinu au milieu d'une place bondée. Perdition totale.
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AuraTu ne seras plus jamais ma sœur !

Athénaïs lève les yeux au ciel, resserrant ses phalanges sur celles des jumelles. L’une marche à droite, l’autre à gauche. Elles se balancent des œillades venimeuses à tour de rôle, se tirant des fois la langue ou secouant leurs chevelures blondes avec dédain. Aura a les cheveux coupés courts comme sa mère, Garance les garde longs depuis toujours. Les emmener chez le coiffeur est toujours une séance de torture ; l’une obtempère pendant que l’autre se débat en hurlant, refusant encore et encore qu’on touche à sa crinière de lionne.
Athénaïs a renoncé depuis un moment déjà à l’idée de faire de Garance une poupée — Aura, elle, n’est pas aussi farouche. Souvent, la jeune femme pense que ses filles leur ressemblent, à elle et son frère au même âge. Ce n’est pas forcément une bonne chose quand on sait de quelle façon son jumeau a tourné. Elle soupire.

GaranceMocheté, va ! T’es si moche que les autres à l’école se moquent de toi !
AuraToi tu ressembles à un garçon ! Tu t’habilles mal et tu manges comme un cochon !

Leurs cris résonnent dans les rues et arrachent quelques regards aux passants. Les femmes elles-mêmes accompagnées de leurs marmots décochent à la mère Grimm un sourire plein de compassion pendant que les hommes ou les vipères célibataires grognent d’agacement. À ceux-là, Athénaïs rend seulement des ricanements teintés d’amertume et de dédain. Elle secoue sa chevelure dans un signe de provocation et leur passe devant comme s’ils n’étaient que des chiens.

AthénaïsOh, regardez ! Un marchand de glaces. Vous en voulez une ?
AuraJ’en veux une au chocolat, Maman. Je peux ?
La mère hoche la tête.
GaranceHey ! C’est moi qui aime le chocolat, Aura. T’es qu’une tricheuse. D’habitude tu prends la vanille.
AthénaïsVous n’avez qu’à en prendre une au chocolat toutes les deux, ce n’est pas un problème. Si ?
Garance lui envoie un regard plissé et colérique avant de repousser ses cheveux de la même façon que sa mère plus tôt.
GarancePas question que je mange la même chose que cette idiote.
AthénaïsÇa suffit.

Les jérémiades continuent et on passe devant le glacier sans s’arrêter. Des fois, Athénaïs regrette le temps où les jumelles n’étaient que des bébés incapables de parler. Là, au moins, les seuls coups qu’elles échangeaient étaient physiques et se résumaient à des balayettes dénuées de violence. Elle hausse les épaules et guide les mômes à travers la houle bruyante. Pourtant, la bagarre dégénère.

GaranceDe toute façon, toi, t’as pas de père ! T’es juste qu’une débile !
Athénaïs ouvre de gros yeux choqués et observe la môme au langage si familier. Elle la prend un peu vivement par le poignet, s’agenouille et l’attire vers elle.
AthénaïsQu’est-ce que je viens d’entendre ?
Garance se tasse sur elle-même en grondant. Elle secoue sa main, puis essaie de repousser celle de sa mère en la griffant.
GaranceC’est la vérité, elle n’a pas de père !
AthénaïsDans ce cas toi non plus. Vous venez toutes les deux de mon ventre, hein. Vous êtes nées le même jour, à la même heure, de la même mère et du même père.
Les yeux de la génitrice brillent d’une colère intense. Ça ne lui ressemble pas de s’énerver contre ses filles, mais ce jour-là Garance pousse le vice à un point qui ne peut pas être ignoré.
GaranceJe te déteste ! Moi j’ai un père mais pas de mère ! Non parce que toi la seule chose à laquelle tu penses c’est Aura ! Tout ça parce que Madame fait semblant d’être malade pour ne pas aller à l’école.

Décontenancée, Athénaïs relâche la pression exercée sur la main de sa gamine qui en profite pour lui échapper et s’enfuir en courant. Elle fend la foule sous les yeux médusés de sa mère qui reste là, interdite, sans pouvoir bouger. Aura, dont les joues sont maculées de larmes, commence à pleurer bruyamment. Elle pousse des cris qui réveillent la Grimm. Elle regarde un moment la petite blonde dont les boucles sauvages encadrent un visage malheureux, avant de lui caresser la tête. Elle l’attire entre ses bras et se relève en gardant sa progéniture serrée contre son cœur. Celui-là bat vite et fort, pulsant avec douleur.
On la bouscule un peu, pressant le pas autour d’elle alors que ses jambes vacillent. Elle fixe le chemin invisible par lequel Garance s’est enfuie. Elle devrait être paniquée, bien sûr, mais une partie d’elle-même ne peut s’empêcher d’éprouver du soulagement à l’idée que les choses soient terminées. Elle met quelques minutes à comprendre que sa gamine est en danger dans la houle des rues bondées ; et, une fois le constat dressé, l’inquiétude se dépêche de gonfler dans sa poitrine. Ses pieds se déplacent seuls, foulant le sol d’un pas vif et anxieux. Ses mouvements sont secs. Elle tourne la tête de tous les côtés, accentuant la pression sur le corps chétif de Aura qui se recroqueville dans ses bras.

Et sa bouche appelle.
Et sa bouche appelle.

✕ ✕ ✕


Garance ne comprend pas ce que sa mère trouve de si génial chez sa sœur. Elle est faible, vulnérable et n’a aucune personnalité. Elle s’écrase tout le temps devant elle, gémissant et pleurant dès que les choses lui échappent. Garance, elle, est plus capable. Elle a de bonnes notes à l’école, beaucoup d’amis qui se soumettent à son autorité, et du répondant à revendre. Alors… Pourquoi c’est toujours elle qu’on engueule ? La petite fille n’arrive pas à faire la lumière sur ses questions. Aussi, elle fonce simplement tout droit. Elle rentre dans les jambes des badauds, percute ceux qui traînent et lâche même quelques mots vulgaires quand ils ont le culot de vouloir la rabrouer. Quelqu’un l’attrape pourtant. Elle grimace au moment où, dans son élan, le bras part en arrière pendant que le reste de son corps avance. Elle émet un sifflement similaire au feulement d’un chat errant et se retourne brutalement vers l’individu qui a eu l’audace de l’arrêter. Elle le dévisage, lui qui se place à son niveau. Elle veut reculer d’un pas, le contourner et fuir à nouveau mais quelque chose l’empêche de bouger. Il a une drôle de présence. L’impression qu’il lui laisse est étrange.

Bonjour, fais attention, tu pourrais te faire mal. Il y a beaucoup de monde et tu pourrais te perdre. Vois-tu tes parents ?

Par réflexe, Garance reluque les environs des yeux mais n’aperçoit pas sa mère. Un sourire mauvais et amer apparaît sur ses lèvres. Sa mère ne l’a pas suivi. Elle n’a pas jugé bon de la rattraper malgré le danger qui plane. Elle hausse les épaules pour seule réponse, ne jugeant pas utile de dire la plus petite chose. Sans vraiment savoir pourquoi — peut-être pour énerver et désobéir une fois de plus à sa mère qui leur demande toujours de ne pas suivre des inconnus — Garance se laisse entraîner sur la petite place dotée d’une fontaine. Elles y vont souvent toutes les trois, ou à quatre avec « mamie » ; mais ce jour-là Garance est seule. Son cœur se serre un peu et son rythme cardiaque accélère. Elle n’aurait sûrement pas dû dire ses choses, mais Aura l’énerve. Aura la chouchoute de tout le monde. Elle baisse les yeux et rentre la tête dans les épaules, soufflant un petit nuage de buée.

Regarde bien et dis-moi si tu vois quelqu’un que tu connais.
GaranceMaman ne viendra pas me chercher. Tu devrais juste me laisser là et rentrer chez toi. Je vais te causer des ennuis à toi aussi de toute façon.

Elle se mange les lèvres et retient les larmes qui veulent couler. Elle n’aime pas la situation plus que sa mère qui se ronge les sangs dans la marée humaine, non. À la différence de sa mère, cependant, Garance n’a pas l’âge et la maturité nécessaires pour comprendre que les choses ne tournent pas exclusivement autour d’elle et que, de par ses études et la santé défaillante de Aura, Athénaïs ne peut pas être tout le temps à son chevet.
Elle pousse un soupir et se replie dans son moi intérieur, cherchant le réconfort en croisant les bras sur sa poitrine. Elle cherche depuis longtemps à se donner un air digne mais c’est l’inverse qui se produit.

✕ ✕ ✕


Son souffle est court et erratique. Athénaïs avance en poussant ses congénères, s’excusant à la hâte et demandant d’une voix brisée par la peur et la panique s’ils n’ont pas vu une petite fille haute comme deux pommes, aux yeux bleus et aux cheveux blonds. La course se prolonge indéfiniment et la mère pense avoir échoué, avoir perdu. Jusqu’à ce qu’une longue crinière blonde rappelant une cascade n’apparaisse dans son champ de vision. Athénaïs joue des coudes pour atteindre la petite place plus calme et découvre sa gamine aux côtés d’un homme un poil plus menu et plus petit qu’elle. Elle se précipite vers Garance en hurlant son nom. La môme lève les yeux, visiblement surprise de la voir débouler. Elle pose doucement Aura par terre et tombe à genoux devant la plus âgée des deux, elle plaque ses deux mains autour du visage fin et dépose des baisers sur ses joues, son front et ses cheveux. Elle la serre dans ses bras en pleurant tout bas, murmurant tous les surnoms qui lui passent alors par la tête ; « ma perle, mon bébé, mon trésor » franchissent tour à tour ses lèvres trempées de larmes. La petite fille se met à sangloter bruyamment, rapidement suivie par Aura qui les rejoint en s’engouffrant dans les bras maternels.

Au bout d’une minute, le brouhaha des descendants Grimm s’apaise et l’ensemble des trois filles retrouve son calme. Athénaïs se rappelle alors de l’homme, relevant les yeux en espérant croiser les siens. Elle n’arrive pourtant pas à les capter et se redresse. Elle pense d’abord à porter les jumelles, mais son corps ne le lui permet plus — ou plutôt, les gamines ont tellement grandi depuis leurs premières heures qu’elles n’y tiennent plus.
Il lui est étrangement familier, cet homme. Elle opte d’abord pour la méfiance. Après tout, qui aborde une petite fille dans la rue ? À moins que Garance soit allée vers lui elle-même, ce dont la mère doute franchement. Les mômes sont bien élevées (malgré ce que l’on peut en penser) et se jeter dans les jupons d’un inconnu ne leur ressemble pas. Elles serrent les petites mains dans les siennes en haussant un sourcil. Elle se racle la gorge.

AthénaïsHuh… Merci, j’imagine. Ma fille s’est-
Un long silence s’installe à mesure que les rouages de son cerveau tissent des liens invisibles. Des yeux dissemblables mais inertes, des cheveux blonds similaires à la soie d’araignée et une peau presque si blanche qu’on en voit les veines bleues en-dessous, une silhouette élancée, vaguement féminine. Athénaïs écarquille les yeux et ouvre la bouche à trois reprises avant de parvenir à articuler quoi que ce soit.
AthénaïsL-Luke ?
Sa voix n’est qu’un murmure fluet, hésitant et timide. Il rappelle le soupir d’un enfant qui a peur de se faire gronder s’il donne la mauvaise réponse au professeur ; mais quelque chose au fond de son cœur est persuadé qu’il ne s’agit pas là d’une erreur.
Luke Kayan
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- Allons. Toutes les mères...

Il aurait dû continuer avec ce dicton mais sa voix préféra s'éteindre avant de se briser. Luke envoya, légèrement désemparé, une onde de Force à la gamine. Aucun résultat. Il ne savait guère faire mieux, entouré d'enfants réceptifs à ses pouvoirs au Temple. Parler aux plus petits ? Karm savait, avec son charisme, son naturel, le faire bien mieux que lui. Alors le blond se contenta de poser doucement une main sur le premier morceau de chair trouvé -la main.- en espérant consoler l'enfant. Au fond de son esprit, une inquiétude soudaine, acide, le rongeait. Et si c'était un vrai appel au secours? Pas un caprice, sinon la tentative d'une fillette courageuse pour fuir les coups? Le Jedi se souvint de ses cours de psychologie théoriques, une matière assez superficiellement abordée mais juste suffisamment pour interroger des témoins mineurs. Les enfants mentaient, ou du moins balançaient une vérité erronée, persuadés que leur vision drastique du monde -rose ou noire- était la bonne. Il ne pouvait, ne devait pas songer au pire, juste parce que lui avait eu une mère qui n'était pas "toutes" ces mères du dicton. De celles qui se préoccupaient, aimaient.

La scène ne dura cependant et heureusement guère plus longtemps. Une aura que le Chevalier percevait faiblement -à cause de son insensibilité à la Force.- se détacha de la masse qui passait devant l'enfant et lui. Son aspect jeune et fragile l'avaient jusque là protégé de regards torves, voir sincèrement inquiets pour l'enfant. On pouvait, y compris, le prendre pour le grand frère à cause d'une vague ressemblance que lui ignorait, évidemment. Toujours est-il qu'une femme brava le flot de gens qui circulaient pour s'approcher de leur îlot. Perturbée, cette présence démontra rapidement être la génitrice de la gamine. Le bruit de sanglots mêlés aux douceurs lui permirent de se détendre légèrement. La fillette avait apparemment mal jugé sa propre génitrice, sans doute victime d'une colère dévastatrice toute enfantine.

- Oh. En fait elle courrait et s'est cognée contre moi. Ne souhaitant pas la laisser repartir, déboussolée dans la foule, je lui ai proposé de venir ici où sa mère, vous donc, pourriez la retrouver puisqu'hélas je ne pouvais partir à votre recherche, étant donné que je ne vo...

La phrase, encore une fois, mourut dans le fond de son gosier. Mais pas par envie d'éviter la brisure, sinon à cause d'une vraie extinction. Cette voix. Par définition elle lui était inconnue, et pourtant les intonations sous-jacentes n'étaient pas sans lui rappeler quelqu'un. Son nom n'avait pas été prononcé comme celui d'un ami, beaucoup trop profondément ancré dans cette gorge... Suppliante? En tout cas affligée, marquée par la découverte de sa propriétaire. Une fois de plus, par réflexe, le Hapien envoya la Force en éclaireuse, avec pour seul répercussion sur la mère, une petite brise venant chatouiller ses cheveux mi-longs. Frustré par cette voie décidément inexploitable, le Jedi recourut à des méthodes beaucoup plus traditionnelles de débrouillardise communes aux aveugles. La logique et la mémoire s'activèrent, bonnes camarades pour coopérer.

Luke n'avait pas beaucoup d'amis, encore moins de suffisamment proches pour employer un ton si solennel en retrouvant son nom. L'inconnue familière semblait aussi être une connaissance du passé. Elle n'avait, vu sa réaction, pas dû le voir depuis longtemps, seulement le Consulaire ne parvenait pas à se souvenir d'une proche ayant des enfants. Il songea à une femme qu'un jour il avait sauvé d'un conducteur ivre par pur hasard en la bousculant sur le passage piéton où elle était demeurée, tétanisée. Impossible. Elle l'appelait Chevalier Kayan, n'en démordant pas malgré ses propositions à l'époque de le nommer Luke, et puis n'avait-elle pas des garçons? Deux fils lui semblait-il.

L'évidence frappa au bout de quelques longues secondes de réflexions. Tandis qu'il délaissait la logique pour faire appel à son instinct, Luke sut replacer cette façon de parler, cette inflexion de voix où perçait une tendresse peu commune lorsque son propriétaire s'adressait à lui. Les enfants surprenaient, ne faisant pas parti de ses souvenirs et dérangeant sa jolie logique, mais ce ne pouvait être qu'elle.

- Athénaïs?

Elle avait bien dit "ma fille" en s'approchant de sa personne quand il était encore un inconnu. N'est-ce pas? Alors comme ça Athénaïs avait une petite fille? Encore sous le choc, le Chevalier n'avait pas détecté la présence d'une soeur, mêlant en fait sa présence à la foule qui continuait de voguer, tantôt nombreuse, tantôt réduite. Figé, il fixait l'enfant au visage, à l'aura encore baignées de larmes. Combien de chances y avait-il pour qu'en fin de mission, le Jedi retrouve sa demi-soeur? Encore surpris, le jeune homme dû accueillir de nouvelles émotions qui se battaient violemment: la joie et la gêne. Il n'était pas sensé avoir de contacts avec sa famille, et bien que les mœurs se soient adoucis au sein du Temple concernant les couples, elle restait pareille pour les proches, surtout ceux externes à l'Ordre.

- Je... Félicitations. Comment vas-tu? Et... Papa, Rose et Tom?

Demanda-t-il, toujours sonné, maladroit mais non moins sincère. Il prit conscience de ne pas porter la tenue traditionnelle des Jedis, être vêtu comme un étudiant sur le tard le fit se sentir presque pris en faute. Non pas qu'aller à l'université soit une honte, pas plus qu'il ne lui vint à l'idée que sa soeur puisse le penser rejeté par l'Ordre- d'autant plus que de nombreux Padawans échouaient aux drastiques sélections.-, mais il prenait la mesure du hasard qui les réunissaient, là, maintenant. Hors du temps dans cette grande rue parée pour fêter la nouvelle année, et les miracles que tout le monde attendait à cette époque. Athénaïs et Luke étaient-ils en train de vivre l'un d'eux avant la date? Discret, timide mais aussi beau que terriblement gênant, à côté de cette petite fontaine.
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Son cœur est en proie au doute. Il est confronté à ce qui est pour lui une évidence que sa tête pourtant cherche à nier. Son frère ne peut pas être là. Il ne peut pas être si proche après avoir été si loin durant toutes ces années. Elle se rappelle nettement l’avoir toujours trouvé très beau -au point de le juger plus féminin qu’elle à l’époque- mais le temps a effacé la précision de ses traits. Sa mémoire n’est plus qu’un amas d’images entrecoupées, généralement rapiécées par une imagination débordante ; elle se souvient de la chaleur de ses mains entre les siennes, de ses sourires un peu canailles qu’il a commencé à montrer après s’être soigné de ses craintes sibyllines.
Dans son esprit, le Kayan est resté un enfant pour l’éternité. Ce petit garçon que l’on a arraché à ses bras désespérés et dont on l’a privé si longtemps. Il n’a dès lors plus été là pour ses anniversaires qui se sont succédés dans l’indifférence de ce qu’elle pouvait éprouver.

Elle le dévisage, l’air franchement perdue. Elle n’arrive pas à se décider sur ce qu’elle éprouve et sur ce qu’il faut dire. Même sa voix a changé. Les questions se bousculent dans sa tête ; est-ce qu’il est heureux ? En bonne santé ? Est-ce qu’il mange bien ? A-t-il été confronté à ces horreurs dont elle aurait voulu le préserver ? Difficile d’ouvrir la bouche pour les articuler.

Luke : Athénaïs ?

Son cœur s’emballe. Il toque à la porte de sa gorge et veut se faire la belle ; c’est trop à supporter d’un coup pour lui alors il cherche le moyen de sortir. Elle sent un nœud se créer dans sa trachée et un autre se défaire dans son ventre. Elle est partagée entre le soulagement de le savoir là, bien en vie et vraiment différent de ce qu’elle a toujours vu en lui, et la douleur de tout ce temps perdu qu’ils ne pourront pas rattraper.
Elle avance d’un pas, lâchant avec une angoisse sourde les petites mains de ses trésors. Les gamines restent là, observant ce manège sans réellement savoir de quoi il s’agit.

Luke : Je… Félicitations. Comment vas-tu ? Et… Papa, Rose et Tom ?

Des larmes silencieuses roulent sur ses joues. Entendre leurs noms dans sa bouche a une saveur perturbante. Ils sont toujours sa famille, il se rappelle d’eux. Il se soucie d’eux. Forte de cette idée, Athénaïs rompt la distance qui les sépare -pas bien grande celle-là- et entoure maladroitement son frère de ses bras maternels. Elle le serre prudemment, avec une délicatesse motivée par son incompréhension et sa peur de le voir s’évaporer si elle le touche trop violemment. Le sentir contre son cœur chasse toutes les angoisses qui se sont accumulées avec les années.
L’enfant prodige est rentré à la maison.

Athénaïs : Je t’ai attendu tellement longtemps.

Elle bredouille au creux de son cou, respirant son odeur qui n’a finalement pas tant évolué. Il est toujours le même, en réalité, même s’ils ont tous les deux changés.

Athénaïs : J’ai eu si peur qu’il t’arrive quelque chose avec tout ce qu’il se passait. Et Papa qui ne trouvait jamais quoi me dire alors qu’il avait sûrement des anecdotes sur le bout de la langue. Ça se voyait qu’il mentait.

Elle recule un peu, prend doucement son visage entre ses phalanges et en caresse les joues avec ses pouces. Elle est émue et troublée mais se rappelle soudainement la présence de ses petites filles à ses côtés.

Athénaïs : Ok. Alors… Luke, je te présente mes deux filles, Garance et Aura. Des petites jumelles qui ont presque trois ans. Mes chéries, voilà votre oncle Luke !

Les filles observent avec curiosité ce membre de la famille dont elles ont seulement entendu parler.

Aura : Le tonton avec la Force ?
Athénaïs : Lui-même. Le très puissant disciple du Temple !

Elles s’émerveillent et se rapprochent pour toucher du bout de leurs petites mains tendues les doigts si frêles du bel homme. Elles sourient, sont désormais réconciliées sans un mot et pépient doucement sur les mille aventures qu’il a dû vivre depuis sa jeunesse.
La jeune mère tapote gentiment sur les deux crânes et indique de l’index l’air de jeux juste à côté où les deux enfants se précipitent sans trop se faire prier. Une fois laissés seuls, Athénaïs se donne le temps de répondre aux questions de son frère.

Athénaïs : Papa va bien. Il a un peu allégé son emploi du temps ses derniers mois pour nous consacrer plus de temps. Maman s’occupe souvent des filles. C’est une grand-mère adorable ! Elle est infatigable… Toujours occupée à des groupes de lecture, d’activités manuelles, de sorties en tout genre… Elle a même décidé de se lancer dans un grand voyage pour l’année prochaine ! Et euh… Tom...

Elle a un moment de pause. Une seconde durant laquelle elle ne peut pas avouer ce qu’il est devenu. Elle a un petit rire gêné et se reprend.

Athénaïs : Tom fait sa route, j’imagine ? Ahah. Et toi, qu’est-ce que tu deviens ? Tu sauves le monde ?
Luke Kayan
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Les silences pesaient lourds, mais les paroles n'étaient pas moins légères. Luke accusait encore le coup de ces retrouvailles. Ce qu'elles impliquaient. Au sein de la Force, bien que ce soit brouillon, peu défini, la tristesse et la joie galopaient hors d'Athénaïs pour l'entourer à l'instar d'une douce écharpe, capable de réchauffer et d'étrangler. Il se souvint vaguement avoir pleuré les premières nuits au Temple, réclamant indistinctement Rose et sa demi-soeur. Il ne faisait, à l'époque, que peu de différences entre les deux tant la seconde était chaleureuse, responsable, tendre. Après des débuts difficiles, il avait appris à ne plus craindre cette électrique petite personne. Femme-enfant. Mère vierge. Digne, adaptable, Luke n'avait pas révélé sa peine aux nouveaux Maîtres du Temple, d'ailleurs trop réservé envers eux, presque peureux pour démontrer quoique ce soit. Par la suite, au fur et à mesure qu'il se détendait, adoptait l'Ordre comme sa patrie, les souvenirs de sa famille, brefs, intenses, doux s'étaient dilués. Il avait appris à considérer que c'était mieux ainsi. Le sénateur Grimm, Rose, Rom et Athénaïs avaient une vie respectable de citoyens tandis que lui en avait une, également honorable mais différente d'enfant de la Force. Il avait besoin de cet éloignement pour respecter les règles de son Ordre et, paradoxalement se rapprocher des siens en les rendant fiers par procuration. Tout ce qu'il fallait, avait appris le Jedi, c'était conserver la distance afin de s'assurer qu'ils soient heureux, ne souffrent pas de son absence, l'oublient. Il aurait pourtant du comprendre que si lui ne pouvait effacer sa mémoire, eux non plus. Mais c'était dans les règles. Des lois qu'il avait plus ou moins transgressé avec Karm, frôlant les frontières, privilégié d'un adoucissement des moeurs. En ce qui concernait la famille ceci dit, aucun changement, aucune excuse.

Le Hapien hésita, déchiré entre ses principes mais aussi son instinct, cette fameuse interprétation qu'avait suggéré son amour, l'insufflant en lui. Une souffrance qui le rendait plus humain, plus compatissant, plus Jedi quelque part. Avec la belle excuse de ne pas blesser une innocente, le Chevalier resserra l'étreinte autour de ce corps. Ces os menus qui craquaient à la moindre pression abusive, ces cheveux de soies et l'énergie bouillonnant dans les veines, y compris au repos. Il les reconnaissaient sans mal. Les souvenirs revenaient, agressifs et tendres à la fois. démunis d'images mais rembourrés à grands coups d'émotions dont il ne comprenait certaines que maintenant.

- Tu... as donc des enfants. Félicitations!

L'information évidente dès leurs retrouvailles peinait pourtant à faire son chemin dans son esprit et il en vint à répéter ses voeux de bonheur déjà évoqué avant. Par chance, un minimum de savoir-vivre l'empêcha de demander quoique ce soit à propos d'un père non mentionné. Ces enfants, tout de même, c'était... Perturbant. Beau mais perturbant. Il n'était pas le seul à avoir grandi, c'était logique. Néanmoins, sa soeur lui semblait jeune. Mais qu'en savait-il, lui? De quand des citoyens avaient l'habitude d'avoir leur progéniture? Lui l'expert en lois, l'infiltré, parfois le combattant, et à la fois gosse qui avait cessé de courir le monde, de suivre les aiguilles ? Enfermé dans son Temple il avait évolué bien loin de ceux qu'il prétendait protégés et ignorait la plupart des réactions, des mœurs que ces gens, inquiétants, fascinants avaient. Des combattants du quotidien.

- Quelle éducation leur donnes-tu! Enfin! -S'exclama le Consulaire, heureux de pouvoir recourir à l'humour q'un joli sourire, timide mais sincère alimenta.- Je n'ai rien de puissant. Je ne suis qu'un Jedi parmi d'autres. D'ailleurs assez parlé de mes aventures, racontez-moi les vôtres.

Réclama-t-il non sans se rappeler qu'il appréciait lorsqu'Athénais, enfant lui racontait ses aventures à l'école. Trop fragile encore, lui-même n'y allait pas, et c'était sa belle-mère qui essayait de combler ses lacunes. Lui qui n'avait jamais appris à lire convenablement avait du repartir sur de nouvelles bases avec le braille. Contrairement à ce que Maria Kayan avait prédit y compris certains médecins sceptiques, le gosse avait très vite intégré le code des reliefs et des trous, démontrant les premiers signes de ce que les Jedis avaient finalement perçu chez lui: l'intelligence. Longtemps reniée, enfermée, asséchée comme une peau de chagrin dans un coin de son esprit martyrisé. Les deux enfants d'Athénaïs, à 3 ans étaient l'opposé de Luke. S'il se souvenait d'une baie ensoleillée et d'une langueur désespérante le concernant, il découvrait des petites filles pleines de vie et déjà très capables. Il était évident que sa demi-soeur faisait une bonne mère.

- Notre père, je suppose qu'il a essayé de vous protéger. Hum... En tout cas, notre vie n'est pas si terrible, ne t'en fais pas. - Il le pensait sincèrement, même si certaines associations s'étaient déjà outrées de savoir que des enfants en pleine croissance s'entraînaient autant. Sans parler des risques quotidiens, des efforts parfois surhumains exigés. Luke, habitué, lui ne s'en inquiétait guère alors qu'Athénaïs aurait pu être horrifiée par son éducation, ou ses missions actuelles. N'en ayant nulle conscience, le jeune Jedi n'essayait donc pas d'édulcorer la vérité. Il ne faisait que sincèrement s'exprimer, guère outré par les exigences de sa vocation. N'avait-il pas choisi? L'Ordre ne l'avait-il pas sauvé? Les Grimm avaient été un passage transitoire, une planche de plus vers le salut, une marche d'escalier, chatoyante, certes, mais une simple marche. Luke était alors trop enfoncé dans son monde, trop perdu pour réellement évoluer. Les plus fins psychologues du Temple et la Force l'avaient tiré réellement de son autisme. - Quant à Tom Je comprends.

Le silence jusque là enclume devint un vieux piano aux notes arrachées que l'on jette par la fenêtre. Risible métaphore appartenant aux dessins animés et pourtant réaliste dans leur cas. Luke se souvenait que Tom l'avait toujours un peu inquiété enfant. Qu'il perçoive déjà sa jalousie ou rechigne à communiquer avec un enfant assez sec, difficile à savoir, mais à l'époque déjpa, Luke évitait soigneusement de se confronter à son demi-frère. Ses seules véritables preuves de tendresse à son égard avaient consisté à acheter quelques menus cadeaux avec son argent de poche, celui que Rose avait commencé à lui donner. Quelques petites monnaies qui roulaient entre ses doigts encore hésitants. Des centimes qu'il avait ensuite cessé de recevoir au Temple, pour adopter le principe d'austérité.

- J'essaye. À plus petite échelle. Si je peux aider quelqu'un j'en suis déjà heureux, et ce n'est pas tous les jours simples.
- Sa voix se cassa légèrement. Ils évoluaient dans des mondes si différents. Impossible d'embrayer sur le détail d'une mission comme avec Karm. Elle ne saisirait pas ou aurait trop mal pour lui, s’inquiéterait. Tandis qu'en ce qui le concernait, c'était bien la vie quotidienne qu'elle menait qui l'effrayerait. Athénaïs était forte, il n'en doutait pas, mais dans sa Galaxie, celle où il était devenu oncle.

De fait, le Jedi savait qu'avec ses sourires, l'étudiante aidait aussi les gens, c'est ce qui l'avait toujours rendu fier d'elle. À chaque fois qu'il pensait à elle. Sans la contacter, pour la protéger, pour accomplir les attentes de ses supérieurs, de sa famille. Ne pas décevoir, c'était si important.

- Athenaïs. Nous pourrions aller prendre un verre si tu veux- Il n'avait pas le courage à la rejeter comme ça, de suite.- mais je ne suis pas sensé avoir de relation proche avec vous. Tu le sais. Je vous aime, je vous ai toujours aimé. Cependant, le code...

Il se sentait sale à ce moment, de rejeter ainsi sa demi-soeur alors qu'il avait cédé à la tendresse d'un homme. Mais Karm était toléré par l'Ordre, tandis que maintenir liens familiaux à l'extérieur du Temple ne s'étaient pas libéralisés. Il devait y avoir une raison, probablement le risque de faire souffrir ces dits proches. Au moins, Luke pouvait puiser son courage dans cette idée. En acceptant la fatalité, le jeune Jedi protégerait sa cadette. Quant à lui? Peu importait son désir de mieux connaître Aura et Garance, son envie d'en savoir plus sur Athenaïs, de la voir grandir, de ne plus perdre de temps. Il devait faire ce que son devoir lui dictait, pour le bien de tout le monde.

- Je connais une glacerie pas loin. Enfin si tu. Si vous voulez.

Tenta-t-il maladroit mais plein de bonne volonté, ayant l'air de tout sauf du "puissant disciple de la Force". Cependant, le jeune homme espérait avoir eu bon. Les enfants, ça aimait les glaces, non? Et puis une petite discussion avant de se perdre de vue, ce n'était pas si mal. N'est-ce pas? Il ne l'avouerait pas, mais en mourrait d'envie.
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Elle laissa son regard migrer lentement vers les filles hissées dans les jeux de l’aire. Elles n’étaient pas loin, ce qui rassurait beaucoup son cœur de mère. Malgré son apparence sûre, ses sourires immuables et ses regards pétillants, Athénaïs cachait pas mal d’angoisses profondes. Elle les poussait au fond de son bide, cherchant sans arrêt à fuir les nœuds créés dans sa nuque, ses épaules et son dos. Elle bossait énormément pour compenser. Pour oublier, aussi. Pour se sentir utile, peut-être, d’une manière ou d’une autre. Elle n’avait jamais jalousé les pouvoirs de son grand frère mais avait rapidement eu du chagrin à ne pas en posséder ; au moins, si elle avait été un peu plus comme lui et un peu moins « normale », elle aurait été en mesure de l’accompagner là-bas. De le protéger, aussi, des combats. De prendre sa place sur le champ de bataille ou de faire barrage avec son corps.
Mais Athénaïs savait — grâce au recul des années — que son besoin impérieux de le ménager ne l’aidait pas. Il n’aurait pas grandi dans de bonnes conditions, perpétuellement arraché aux souffrances, aux épreuves, aux examens. Elle-même avait souvent été testée ou éprouvée par le quotidien ; les blessures faisaient partie intégrante de leurs routines propres. Les gamine également finiraient par être abîmées par quelques choses méchantes, à commencer par leurs disputes récurrentes. Comme ses parents, comme Tom, comme Luke. Comme le reste du monde.

Elle se redressa bien droite pour soulager un peu son dos. Les longues heures de cours lui donnaient des foutues crampes que le poids des jumelles n’arrangeait pas. Elles leur adressaient des petits signes joyeux de leur arbre « géant », les appelant pour qu’ils se joignent à elles. Ils étaient devenus trop vieux pour ces jeux-là. Elle se souvenait de quelques moments passés dans les bacs à sable, cependant. Elle tirait Luke partout, à l’époque.

— J’essaye. À plus petite échelle. Si je peux aider quelqu’un j’en suis déjà heureux, et ce n’est pas tous les jours simples.

Elle hocha simplement la tête sans oser prendre le pari d’obtenir des détails. Elle connaissait leur mode de vie secret, le besoin de conserver leurs missions pour eux. Peut-être pour ne pas inquiéter leur entourage ou pour préserver des noms d’éventuelles répercussions ; en tout cas, elle le laissa continuer en silence. Ses yeux continuaient de briller doucement des dernières larmes qui refusaient de se décrocher. Elle avait arrêté de pleurer, cependant. Elle était trop forte et fière pour réellement sangloter pendant des heures. Elle le ferait en rentrant, le soir-même, après avoir couché les filles.
Il sembla éprouvé de la repousser, lui causant un petit pincement au cœur. Non pas car il venait gentiment de lui faire comprendre qu’ils ne se reverraient pas, mais simplement à cause de l’affliction mal cachée sur ses traits de poupée. Elle le trouvait moins blême que durant son enfance. Il semblait moins malade, moins rachitique. En revanche, sa beauté n’avait pas été altérée par les années.
Elle savait très bien qu’ils seraient obligés de se séparer. Elle lui adressa un sourire angélique, toujours pas réellement consciente qu’il ne les « voyait » pas. Elle ne rejetait pas son handicap, il était seulement un gosse normal à ses yeux. Quelqu’un qui n’était pas différent des autres. Quelqu’un qui ne méritait pas d’être moins aimé à cause des défauts que des monstres avaient balancé sur sa peau en heurtant. Elle aurait voulu pouvoir réparer ses belles prunelles comme elle avait soigné son cœur haletant mais la magie n’avait pas opéré.

— Allons-y. (Elle adressa un petit signe aux jumelles qui déboulèrent comme des fusées.) Je connais les règles. C’est pour ça que, malgré mon fort désir de retrouver mon grand frère, je n’ai jamais cédé. J’ai continué à avancer en m’assurant de devenir une personne digne de ce garçon avec qui j’ai vécu trop peu de temps !

Un air espiègle passa brièvement sur son visage doux. Elle attrapa ses phalanges entre les siennes, l’entraînant vers le fameux glacier du coin que la jeune femme connaissait très bien. Elle y avait ses petites habitudes avec Aura et Garance qui prenaient toujours la même chose. Elle, elle adorait les banana split du moment que le glacier n’oubliait pas de remplacer la boule fraise par une autre boule vanille. Elle s’engouffra dans le petit magasin intimiste.

— Mais je mentirais si je disais que ça ne me rend pas très heureuse de tomber accidentellement sur toi. Je ne remercierai jamais assez le destin pour ça !

Les filles trépignèrent aussitôt en sentant les effluves fraîches des glaces. Elles avaient les mains liées comme très souvent quand elles n’étaient pas fâchées. Ses jumelles leur ressemblaient beaucoup, à elle et Tom. Les jumeaux avaient été proches et l’étaient encore même si leur relation pâtissait de leurs modes de vie radicalement différents.

— Personnellement, je pense que les gens qui s’aiment assez sont amenés à reprendre les mêmes voies. C’est inévitable. Pour ma part, je suis convaincue que je te reverrai. On se reparlera encore comme aujourd’hui, comme si le temps n’avait pas réellement eu d’emprise sur nous. (Elle se laissa aller à rire, un peu gênée de son côté sentimental.) J’espère quand même que les mœurs changeront un jour ou l’autre. J’aimerais bien te faire visiter mon nouvel appartement, un jour ! Les chambres des jumelles sont magnifiques. On continue à fêter secrètement ton anniversaire avec Maman. Elle m’emmène manger un gâteau, un vieil album sous le bras, et on regarde les photos en se rappelant les anecdotes.

Elle se rappelait de toutes, selon elle. Elles lui étaient précieuses. Vraiment très précieuses. Ce rituel avait sans doute contribué à maintenir l’espoir en vie dans son cœur, même si ce n’était pas forcément super sain. Elle aimait bien ça, se remémorer les souvenirs. Elle hésita un peu, se lécha nerveusement les lèvres alors que leurs commandes venaient d’être posées sous leurs yeux. Elle tritura sa banane du bout de la cuillère.

— Je crois savoir que les Jedis n’ont pas le droit de fonder des familles mais je ne suis pas sûre. Tu as quelqu’un dans ta vie, du coup ? Tu n’es pas obligé d’en parler si ça te gêne ! C’est plus par curiosité.

Ses joues s’empourprèrent, elle trépigna sur sa chaise. Les jumelles mangeaient silencieusement leurs glaces en jouant à la « bataille des regards ».
Luke Kayan
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Devait-il lui avouer que maintenant qu'il reconnaissait son Aura, Luke était sensé l'éviter s'ils venaient à se retrouver? Impossible, car lui-même serait incapable de respecter aussi radicalement le code. Interpréter. N'était-ce pas ce que répétait souvent Karm? Un terme adoucissant, séduisant dont le Jedi avait parfois peur d'abuser, bien qu'aujourd'hui ce soit différent. Ne pas tourner la tête s'il en venait à croiser sa sœur relevait de la logique la plus élémentaire. L'humain avant le protocole. Doser serait le secret. Pareil pour ces premières retrouvailles rendues plus difficiles à cause de l'espace-temps, anormalement étiré pour eux qui faisaient partie de la même famille et s'appréciaient. Leur séparation n'avait rien eu de naturel, Luke avait également souffert de cette distance même si moins, en apparence, qu'Athénaïs. Dressé à oublier ses proches, le jeune homme les avaient mis dans un recoin de sa tête en se persuadant, lâchement peut-être, que ces derniers étaient bien plus heureux sans lui, qu'il avait hérité d'une chance incroyable le faisant débiteur envers cette société majoritairement Insensible. C'était dur mais si logique. Bien rangé. Tout était à sa place.

- Je pense aussi souvent à vous, surtout lorsqu'une nouvelle année commence.

Confia le Chevalier en levant la tête comme pour observer les décorations qui suggéraient justement cette époque. Il était curieux qu'Athénaïs et ses deux petits secrets croisent sa route tandis que son cerveau se remémorait de sa voix, des années passées chez les Grimm.

- Si ton appartement est proche, nous pourrions aller le voir avant que je parte.

Soupira le jeune Jedi qui cachait cette flexibilité dédiée à sa soeur derrière le pragmatisme. Il en profiterait pour raccompagner sa cadette dans la sécurité de son foyer avant de s'en aller. Ce n'était ni du temps perdu, ni une dérogation criminelle aux règles. Le plus pur des pragmatismes.

Le magasin éclaircit ses idées, enivré d'odeurs sucrées qui lui donnaient autant envie qu'elles ne l'écoeuraient, Luke laissa les gamines se précipiter sur les petites bombes caloriques tandis que sa soeur choisissait une banane enrobée de chocolat d'après ce qu'il avait compris de la commande. Ce n'était pas comme s'il était familier des pâtisseries et autres fantaisies culinaires. Lors de son passage chez son père et sa belle-mère le Hapien avait pu offrir à sa langue quelques unes de ces saveurs délicieuses: tartes aux pommes, aux fraises, gâteaux, Rose n'avait pas lésiné pour le chouchouter mais ça avait trop peu duré. Alors qu'il commençait à s'ouvrir et à saisir que la nourriture pouvait être une source de plaisir, non de torture où sa mère l'obligeait à parler correctement pour avoir le droit de manger, il était parti. Mais c'était une bonne chose. Sûrement la meilleure vu le niveau "d'autisme" atteint. Les Jedis, la Force avaient constitué ses bases pour construire une échelle apte à le sortir de son puits, même si c'était Rose et Athénaïs qui avaient planté les deux premières vis destinées à la soutenir.

Sa cuillère trifouillant quelque peut son petit yaourt naturel avec des "topping" à base de fruits boisés d'Alderaan, le jeune homme écoutait sa soeur. S'il avait apparemment reperdu l'habitude, le goût de manger quoique ce soit qui sorte de la norme de son régime presque exclusivement végétarien, Luke avait conservé celle de peu parler. Il avait beau casser les pieds, le nez et les doigts de ses interlocuteurs lorsqu'il s'agissait de philosopher sur la Force, le Consulaire restait peu prolixe en ce qui concernait les autres types de discussion. De plus, c'était sa manière d'aimer Athénaïs.: l'écouter encore et encore afin d'emmagasiner sa voix jusqu'à la prochaine éventuelle rencontre. Car il y croyait aussi, même s'il n'avait pas confirmé les propos de la petite blonde. Il n'était pas sûr de comment réagir à cet instant futur et ne souhaitait pas donner de faux espoirs non plus. Coruscant était une ville gigantesque où il résidait somme peu d'ailleurs, sans compter que les Jedis n'avaient pas une espérance de vie extrêmement élevée, à une époque aussi trouble. Était-ce une des raisons à son entorse au code concernant le lien avec les membres de la famille? Qu'en était-il pour l'autre règle? Celle que divers maîtres et chevaliers avaient déjà tordue sans convaincre le Jedi de faire pareil librement, au grand désespoir de son ami d'ailleurs.

La question manqua de l'achever avant un coup de sabre ennemi. Luke aurait pourtant dû s'y attendre, c'était comme ça, les soeurs. Mais comment aurait-il pu le savoir après tout? Athénaïs et lui avaient une relation difficile mais également idyllique, basée sur les souvenirs plus que le devoir de se supporter au jour le jour. Aurait-elle supporté son perpétuel besoin de secrets? Son silence? Sa dévotion à l'Ordre? Ses manies concernant la nourriture? Et lui aurait-il eu la patience pour deux gamines de cet âge, somme toute adorables mais indisciplinées, du moins en comparaison avec les Padawans de cet âge déjà très -trop?- bien éduqués? Il n'eût cependant pas le coeur à lui mentir et choisit la sincérité. Du moins, à demi. Pour le moment.

- Les moeurs se sont légèrement relâchés vis-à-vis de ça, suite à la relation entre deux Maîtres ou quelques Chevaliers. Certains ont même eu des enfants, mais cela reste déconseillé. C'est vaguement toléré du moment que nous soyons discrets et surtout, que nous sachions où est notre place, notre devoir.- Une onde puissante de reconnaissance sillonna son corps. Leur Communauté leur offrait une bribe de liberté, infime, parsemée de conditions, mais pour Luke et certainement la majorité des Jedis habitués à la plus grande austérité, c'était un immense cadeau. Offrez un carré de jardin à un Bantha de laboratoire enfermé dans une cage toute sa vie. Ce dernier valoriserait davantage son enclos qu'un pair sauvage ne le ferait pour les dunes de Tatooine étalées devant ses yeux depuis sa naissance. Mais certes, du coup il avait peur d'abuser, de se perdre dans son petit recoin de verdure.- Hum... Oui on peut dire ça. Et toi?

S'il était curieux, le Jedi n'était du genre à jouer les commères, cependant on n'avait pas soeurs tous les jours devant lui, enveloppée dans une odeur de banane au chocolat. Les deux gosses elles piochaient dans leur glace avec appétit. Luke les laissa achever la moitié de son yaourt avec plaisir, à condition qu'elles ne se disputent pas pour les bouts de fruits.

Un peu rêveur, en attendant la réponse d'Athénaïs, Luke se souvenait de ses propos concernant son anniversaire. Il se sentait touché et gêné à la fois, peinant à comprendre qu'il manquait "tant" à une famille sensée être plus heureuse sans lui. N'était-ce pas dans l'ordre des choses qu'il soit parti? Alors pourquoi sentait-il une forme de nostalgie dans leur façon de procéder? Ou même chez lui lorsque la fin d'année arrivait? En y repensant, c'était surtout envers Rose et sa demi-soeur d'ailleurs que ses songeries voguaient. Elles étaient celles qui lui manquaient le plus, même s'il serait éternellement reconnaissant envers son géniteur d'avoir ourdit un plan avec le médecin de Maria Kayan pour le sauver de ses griffes.

- Raconte-moi tout, sur toi, travailles-tu? Et ces deux petites?

Qu'elle lui parle de leur dernière représentation à l'école, il n'y comprendrait certainement pas grand chose, mais peu importe, Luke voulait entendre parler de sa soeur et des jumelles. Qu'il s'agisse de confidences sur le père, ou du dernier petit déjeuner, vraiment, peu importait. Il était même prêt à supporter des questions plus indiscrètes encore sur sa vie privée, des précisions... Il voulait juste qu'elle continue de parler, et enregistrer le ton de sa voix, les inflexions qui la sucraient.
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Il était si proche… à portée de ses mains. Athénaïs devait garder les siennes sur ses joues — une fois sa glace avalée — pour réprimer le besoin de le frôler, de lui caresser le bout des doigts. Il avait l’air réel, bien sûr, mais combien de fois avait-elle rêvé de le revoir puis pleuré au réveil en réalisant que les images n’avaient pas la même saveur que les véritables souvenirs ; elles avaient le goût épicé des mensonges, des illusions. Mais les différences soulevées par son apparence l’aidèrent à réaliser qu’il était vraiment là : son frère, à ses côtés. Elle soupira d’aise de façon peu audible, se cala confortablement dans son siège. Elle était d’autant plus heureuse qu’il proposait de venir chez elle, même un court instant. Il ne rejetait donc pas en bloc ce qu’Athénaïs représentait à ses yeux.
Il était prêt à prendre quelques risques pour passer un peu de temps avec elles trois. Cela éveilla un sentiment chassé depuis longtemps : l’espoir. Elle pouvait aussi bien trouver un moyen contourné de le voir plus souvent que « par hasard » ; il devait y exister des manières de se rapprocher des Jedis sans avoir la Force. Ils avaient sans doute besoin de personnalités fortes et compétentes pour quelque chose. Elle se promit intérieurement de fouiller ça dès leur séparation annoncée. Pas question de le laisser disparaître à nouveau, elle ne pouvait pas. Même si ça devait impliquer que la jeune femme s’éloigne à son tour de ses proches, qu’elle le pourchasse dans un Univers hanté, elle le ferait. Pour son grand frère qui protégeait les autres sans jamais demander qu’on veille sur lui en retour.

Elle sembla un peu rassurée de l’entendre évoquer une relation. Bien sûr, elle remarqua qu’il demeurait vague — très vague — et se cachait derrière un discours sur les règles de l’Ordre pour ne pas entrer dans les détails. Cela l’émoustilla et l’amusa beaucoup. Il ne se rappelait sans doute plus de quelle manière Athénaïs lui arrachait toujours subtilement les vers du nez durant l’enfance ; elle s’arrangeait pour qu’il pense que le geste venait de lui, et pas d’un quelconque subterfuge de la petite sœur encanaillée. Elle ne pipa mot, le laissant se décharger de tout ce qu’il voulait bien lui dire. Elle avait appris à meubler ses silences quand il ne savait plus quoi dire, mais aussi à respecter les moments où il osait ouvrir la bouche.
Elle le connaissait trop pour juger ses difficultés à verbaliser les choses. Il était intelligent mais si secret… Elle n’avait jamais eu à cœur de le changer, cependant. Elle préférait l’entraîner dans sa vie à elle, peut-être pour qu’il s’y sente un peu à sa place aussi, comme pour lui faire comprendre qu’il avait encore un nid ailleurs, loin des dangers de sa vocation.

— Mhhh. (Elle leva les yeux au plafond pour réfléchir un moment, nouant les bras sous ses seins menus.) Je ne sais pas par où commencer. J’ai rêvé de ce jour pendant des années, préparé ce que je voulais dire en priorité, mais au final j’ai oublié. J’ai mené une petite vie assez paisible, je dirais. J’ai eu quelques amis au collège, chassé beaucoup de mauvaises personnes qui rôdaient autour de Tom à cause de l’argent gagné par Papa. J’ai essayé d’être à la hauteur d’un frère Jedi ; j’ai milité à ma manière pour un monde meilleur. Il me semble qu’au décompte des combats de récréation, j’ai gagné haut la main sur Tom. Je défiais les grosses brutes. (Elle rigola en se rappelant des bleus, de son nez cassé par quatre fois et de ses côtes fêlées.) Je suis devenue une espèce de terreur qui protégeait les plus faibles. Aaah. Ça paraît si loin maintenant ! Tu n’aurais sûrement pas aimé l’école, je crois. Ça me semble très différent de la rigueur demandée aux jeunes Padawans. Ici, les gosses étaient méchants, un peu mauvais au fond. Comme des centaines d’aspirants psychopathes que les professeurs essayaient de garder dans le droit chemin. Tu vois le genre ? Mais il y a eu des moments drôles aussi. J’ai noué des amitiés qui marchent encore maintenant. Ma meilleure amie est même entrée en Politique, elle veut devenir sénatrice.

Elle se laissa une petite pause pour reprendre son souffle et rassembler ses pensées éparpillées. Les filles observèrent d’autres enfants à une table, ils semblaient faire un goûter d’anniversaire. Avec leur débrouillardise habituelle, les jumelles s’approchèrent du groupe qui se décala pour leur faire une place sans problème. Elles avaient ce don de se faufiler partout comme si elles étaient les meilleures amies du marié ; à croire que les gamines allaient devenir comme elle plus tard. Elle esquissa un sourire léonin en observant le manège. Les deux sœurs avaient un côté très « dominant », surtout Garance qui menait les autres enfants par le bout du nez.

— Moi, après le lycée, j’ai préféré me tourner vers l’Anthropologie. Je suis encore étudiante, du coup ; thésarde, plus précisément. À mon âge, je devrais être proche du diplôme mais mes deux sauterelles ont un peu retardé le projet. J’ai recommencé les cours dernièrement, après avoir réservé quelques années à leur éducation. Je voulais vraiment qu’elles soient entourées, qu’elles ne souffrent pas d’avoir une maman seule. Elles ont déjà vu leur père mais je doute qu’elles se rappellent. (Ses joues s’empourprèrent un peu.) Je n’en suis pas fière, il n’a été qu’une aventure assez brève. Je l’ai évidemment prévenu de la naissance, il est venu les embrasser à la maternité. Il les a même reconnu, officiellement. Mais ils ne les élèvent pas à mes côtés. On ne s’aime pas, on s’apprécie cependant. Il ramène des cadeaux quand il revient de ses longs voyages. Ça va faire un peu plus d’un an que je n’ai plus de nouvelles. (Un voile sombre encombra ses yeux un moment.) Je pense qu’il est mort, pour ma part. Les enquêtes menées n’ont jamais apporté de réponses mais, à l’époque, il avait été envoyé sur un chantier de fouilles avec de gros risques. Il a voulu les prendre, ma foi.

Sa voix chevrota doucement sur les dernières notes. Elle n’était pas indifférente à son sort, loin de là. Il était le père de ses filles, les choses les plus importantes pour elle. Ses deux trésors, ses anges. Elle poussa un long soupir résigné, faisant basculer doucement sa chaise pour se bercer. Elle ne regrettait pas l’absence de compagnon. Son cœur semblait être de pierre pour toute personne qui n’appartenait pas à sa famille.

— Je n’ai jamais eu de vraie relation stable, pour être honnête. (Elle rougit de nouveau, observa son grand frère à qui elle disait tout durant l’enfance. Pouvait-elle réellement lui parler de ça, aussi ?) J’ai longtemps pensé que j’aimais les femmes, pour tout te dire. Je ne sais pas pourquoi car je n’ai jamais été réellement attirée par l’une d’entre elle, mais les hommes m’ont laissé encore plus indifférente qu’elles. Peut-être parce que j’ai toujours été davantage « cajolée » par une femme que par un homme. Papa n’est pas un homme très démonstratif. Il ne l’a jamais été. Quant à Tom… Tom n’est pas ce que j’appellerai un homme. Il est resté aussi puéril qu’un petit garçon, incapable de changer ou de grandir.

Elle hésita encore un peu.

— Je ne dirais pas que j’ai « quelqu’un » dans le sens « être en couple » — même si ça me rassure d’apprendre que tu l’es, toi — parce que je n’arrive pas vraiment à m’engager. En revanche, j’ai une « compagne » ; je te la présenterai un jour ! Elle s’occupe souvent des jumelles. Ça m’aide beaucoup. Elle me soutient aussi dans les études, même si c’est une espèce de secret. (Athénaïs lâcha un rire nasal, les yeux brillants.) C’est l’une de mes profs. Pas très raisonnable, hein ? Comme si je l’avais déjà été !

Elle explosa d’un rire franc et vif, puis se reconcentra sur son frère.

— Raconte-moi, allez. Tout ce que tu veux, je prends n’importe quoi. Même ce que tu as mangé au petit-déjeuner.

Elle voulait seulement entendre sa voix encore une fois.
Luke Kayan
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Bien qu'il se délecte des mots de sa demi-soeur, Luke ne saisissait pas tous les concepts, preuve qu'ils appartenaient à deux mondes différents, sauvegardé par un lien ténu, tissé, réparé, soigné surtout par Athénaïs. Un fait qui n'empêchait pas le Jedi de savourer ses mots, au point d'en oublier les deux gamines, lesquelles vagabondaient désormais dans le restaurant, une chose qu'un Padawan de trois ans n'aurait jamais fait, évidemment. Mais les Jedis n'appartenaient pas à l'Univers réel, du moins pas totalement. Ils flottaient dans un entre-deux antique et avant-gardiste. Leur éducation était une des meilleures, surpassant celle de la majorité des universités, ils étaient aux faits des dernières méthodes d'investigation, tout en demeurant figés sur des valeurs de politesse, d'obéissance, de rigidité en noir et blanc.

- Vous faites la guerre avant l'entraînement.- Conclut le Hapien, quelque peu surpris par la sauvagerie qu'évoquait Athénaïs. Bien sûr, les Padawans étaient beaucoup plus contrôlés, afin qu'ils ne sombrent pas sur le long terme, mais surtout et évidemment afin d'éviter des morts. Des gosses pourvus de dons aux effets aléatoires qui se chamaillaient représentaient un danger parfois sous-estimé.- - À vrai dire, un Jedi apprend surtout à conserver son arme le plus longtemps possible dans son fourreau. Mais tu avais effectivement un esprit de justice très développé. Je n'aurais pas pu en attendre moins de la part de ma soeur.

La félicita Luke, plus amusé qu'inquiet même s'il espérait qu'Athénaïs ait perdu l'habitude de se défendre les poings en avant. Cette anecdote ceci dit révélait une vérité beaucoup moins burlesque ou charmante. Faible, Tom s'était laissé maltraité par les autres enfants, et, désormais il semblait se laisser aller tout court. En entendant ces propos, le Chevalier fronça légèrement les sourcils. À cette époque enfermé dans son cocon, il se rappelait surtout d'un gamin distant, surtout vis-à-vis de lui, dont l'attitude s'éclairait uniquement lorsque Luke cassait sa tirelire pour un quelconque gadget en guide de cadeau. En y réfléchissant, guidé par les explications de sa soeur, le jeune homme faisait la corrélation entre des preuves d'affection à son égard -parfois rejetées- et les colères abruptes de Tom. Il était devenu un enfant choyé que l'on avait souhaité épargner, davantage encore suite à l'arrivée de son demi-frère martyrisé, avec la crainte désespérée que le mal arrive à la maison. Une vague de honte parcourut l'échine de Luke, se détachant en petits morceaux jusqu'à se fondre dans ses os, sa chair. Elle réappaîtrait plus tard, lorsque le cas de Tom l'intéresserait vraiment. Après s'être aperçu que ni son demi-frère ni lui avaient un jour été proches, le Chevalier offrit de nouveau son intérêt à Athénaïs autour de laquelle un vide parlant planait. Les deux gamines pépiaient au loin, le blond en plein processsus d'enregistrement commençait à reconnaître leurs voix enchevêtrées à celles des autres, plus timides, plus basses. Elles avaient du caractère.

- Je suis désolé. - Pas fameux, cliché mais sincère. Qu'ajouter de plus? Athénaïs avait cette malchance de s'attacher à des gens presque constamment en danger, qui vivaient loin de ses yeux, proches de son coeur néanmoins. Le compromis avec le père des fillettes était digne d'être souligné au vu des déchirures nombreuses, parfois mortelles dont étaient affligés les coeurs amoureux, une des raisons pour lesquelles l'Ordre avait si longtemps déconseillé l'Union. Luke aurait pu proposer de rouvrir l'enquête en jouant sur ses contacts, mais en plus d'avoir de bonnes chances de ne pas servir, ce serait un manque de respect envers la petit blonde. Envers leurs valeurs familiales, mises en vigueur par Monsieur Grimm: un rang ne devait jamais servir à sauter les lois, à faciliter une voie. Il ne ferait donc rien en ce sens.-

Puis, des aveux. Luke manqua de rejoindre le géniteur des jumelles supposément en pleine exploration de l'au-delà. Par étouffement. Chance, habitué à manger de petites bouchées, la sensation de froid glissant dan sa gorge fut désagréable mais supportable. Des larmes perlant à l'interstice des paupières et des prunelles, il s'exclama bien malgré lui et d'une voix enrouée par l'attaque:

-- J'ai longtemps pensé que j'aimais les femmes
- Moi aussi!

Venant du placide Jedi, cette exclamation -relative, n'exagérons rien, d'autant plus que sa voix étouffée avait heureusement réduit la portée.- était plutôt surprenante. Secret plus par conviction que sa vie n'était pas intéressante que par propre volonté de cacher, il avait cependant toujours eu du mal avec ce thème. Son cerveau épargné par la glace, lui, parvint à penser que la coïncidence était trop grande pour être véridique. Les statistiques ne collaient pas. On lui avait déjà expliqué qu'hétéros ou pas, les Hapiens purs avaient souvent, malgré eux, des traits portant à confusion sur leurs préférences. Le jeune homme n'avait aucune idée de comment, vu que le concept d'image, d'apparence lui échappaient totalement, mais c'était un fait. Peut-être que victime de ce préjugé, sa demi-soeur avait décidé de confirmer cette hypothèse en prétextant avoir ce doute?

Non décida son éducation, contrecarrant sa paranoïa relativement développée à ce sujet. Non. Athénaïs n'était pas ainsi -en réalité un peu, mais Luke ne s'était jamais rendu compte de la manière dont elle arrivait à lui tirer les vers et la prose du nez.- et Non, il n'était pas une personnalité dont on souhaitait tout savoir. Qui gâcherait autant d'énergie à fomenter un plan tordu pour le faire avouer? Certainement pas la blonde en face de lui.

Alors ce devait être vrai, elle avait pensé être lesbienne, puis avait trouvé un homme avant de retourner vers une compagne? Surpris car la formulation passé laissait entendre qu'Athénaïs avait abandonné cette hypothèse, le Chevalier réfléchit à deux autres longues secondes -dont une lui servit à bien intégrer les mots de sa demi-soeur.- avant de répondre.

[color=yellow]- Je suis content. Du moment qu'elle se porte bien avec toi. [/colo]

Quel imbécile, comme si sa soeur vivant loin de sa personne depuis des années avait besoin de son approbation. Qu'il lui confirme que "ça ne lui posait pas de problèmes" et que "non je ne suis pas homophobe" était ridicule. Mais il ne savait pas que dire de plus, gêné, plus vis-à-vis du jeu de reflet de miroir que des confessions d'Aténaïs. Luke était à ce niveau, bien plus tolérant envers autrui que lui-même, ce qui d'ailleurs énervait Karm. C'était un peu comme féliciter son interlocuteur pour le fait d'assumer ses préférences sans avoir le courage de le faire, considérer cela acceptable voir beau chez un couple étranger au sien. De quoi se mettre en colère, se sentir humilié peut-être. Mais à ce niveau le blond avançait petit à petit.

- Pour tout à l'heure, euh, le "moi aussi", ça voulait dire que... Enfin bon. Ce matin j'ai mangé un bol de céréales. Écologiques, les céréales.

Et il rougit avec une telle intensité qu'il faudrait être cruche pour ne pas saisir qu'il y avait au moins Gizka sous roche voir carrément baleine sous le gravillon. Un maigre sourire apparut suite à sa petite blague concernant le déjeuner, mais il n'allait pas en rester là bien que ce soit tentant. Ce serait cruel de ne servir que ça à Athénaïs qui lui offrait tant, tout sur un plateau. Ceci dit le Hapien peinait à parler, il ne savait pas quelle information choisir, aucune, ironiquement ne paraissait atteindre la cheville de la "thésarde". Sa routine, hormis les missions, était effroyablement ennuyeuse, similaire. En fait parler de son petit-déjeuner paraissait finalement le plus excitant.

- Et bien, je m'occupe parfois des plus jeunes dans les dortoirs ou pour les cours, alors hum, j'ai aussi des enfants en quelque sorte.

Des gosses qui n'auraient jamais quitté la table, n'auraient pas "tourmenté" d'autres pour faire leur loi malgré une certaine tendance aux farces. Ils étaient après tout des être vivants avant d'être des Jedis, quoique nettement contrôlés. Chez Luke c'était presque radical, son manque d'humanité dans l'expression d'émotions pourtant réelles avait en partie convaincu le Conseil de l'adouber malgré sa relation avouée à l'époque. Il est vrai qu'aux côtés de Karm, le blond avançait. Jamais il n'aurait eu l'idée, la délicatesse de s'intéresser à l'appartement d'Athénaïs malgré une vraie joie de la retrouver. Les règles étaient les règles, mais l'Ark-Ni disait toujours qu'il fallait savoir les interpréter.
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