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Après le plaidoyer de la chancelière pour justifier son action à Dubrillion, qui avait plongé le Sénat dans un chaos fort prévisible, Lana rejoigna directement ses quartiers. Elle n'avait même plus la force de rejoindre ses appartements de la capitale, aussi préféra-t-elle se rendre directement dans ses quartiers au Sénat, où elle avait un bureau et une petite chambre comme tous ses confrères. Elle était épuisée, peu présentable, et elle avait mal partout. Même si elle s'en était plutôt bien tirée de son escapade sur Nar Shaddaa, elle n'avait pas eu le droit à plus d'une petite heure dans une cuve de bacta. Suffisamment pour faire disparaitre ses coupures et ses brûlures, trop peu pour soulager ses muscles endoloris et gommer les très nombreux hématomes qui couvraient son corps.

Elle entra dans ses quartiers, et congédia toute sa suite dans les quartiers des serviteurs, excepté une paire de gardes devant sa propre porte. Les hommes avaient l'instruction de ne la déranger qu'en cas d'évènements d'une extrême importance, ce qui malheureusement au Sénat avait tendance à arriver très fréquemment. Elle n'aspirait qu'au repos. Le bacta le reposait le corps en rien, et elle n'avait eu le temps que de voler quelques siestes inconfortables et en aucun cas reposantes sur le trajet de Nar Shaddaa. Son corps lui criait de s'arrêter et de s'effondrer quelque part, à l'abri des regards.

Lana se retrouva enfin seule dans les ténèbres de sa chambre. Elle tituba vaguement vers son lit, ses jambes endolories la retenant à grand peine. Elle prit tout de même le temps d'enlever sa robe avant de se laisser tomber dans les draps. Il y avait des affaires urgentes à régler maintenant qu'elle avait rejoint le Sénat, mais rien qui ne pouvait attendre le lendemain. Trop fatiguée pour ne serait-ce que s'étirer, son esprit s'éteignit très vite, ne cherchant qu'un peu de repos après ces derniers jours effrénés.

Bien entendu, il ne fallut pas attendre plus de trois heures pour qu'un des gardes viennent la réveiller pour lui annoncer la venue d'un visiteur. Ce devait être une conspiration à un niveau galactique pour l'empêcher de dormir. Ou simplement pour l'emmerder. Évidemment qu'elle avait des visiteurs, l'horaire standard de Coruscant indiquait en plein milieu de l'après-midi ! Les autres gens s'agitaient normalement. Ce garde devait être idiot pour la déranger ainsi. Elle enfouit la tête de son oreiller. Peut être que si elle faisait semblant de rester endormie, l'homme n'insisterait pas... Puis il annonça le nom de la chancelière, et Lana dût se résoudre à sortir de son lit. Ce devait réellement être important.

Elle avait l'impression d'être encore plus fatiguée qu'avant, comme si quelqu'un lui avait volé du sommeil entretemps. Le fait d'avoir été réveillée en plein sommeil, probablement. L'umbaranne se leva, et ses jambes commencèrent déjà à protester contre un tel traitement barbare. Elle avait l'impression qu'un troupeau de banthas était venu la piétiner, et qu'un mynock était ensuite venu crever dans sa bouche, telle la cerise sur le gâteau. Il y avait décidément des jours où ça ne passait pas. La chancelière était déjà dans son bureau. On ne faisait pas attendre la chancelière dans le couloir.

Sans camériste pour l'aider, et trop courbatue pour pouvoir se débrouiller en seulement quelques minutes, Lana dût se résoudre à enfiler une grossière robe d'intérieur de couleur sombre. Elle n'avait pas le temps de se coiffer ou de se maquiller sans faire attendre la chancelière. Tant pis, Emalia comprendrait, compte tenu de la situation. Et si elle ne comprenait pas... Et bien le ton montrait rapidement. La sénatrice se regarda un court instant dans un large miroir fixé au mur. Elle faisait peine à voir. Ses longs cheveux noirs lui tombaient sur les épaules, emmêlés et un peu sales. Son visage était tuméfié de façon plus ou moins prononcé en une bonne demi-douzaine d'endroits, surtout un large hématome sur sa pommette gauche qui était encore légèrement enflée. Elle ne portait ni bijou, ni aucun signe distinctif de son rang. Elle allait devoir se présenter devant la chancelière de la République ainsi. Emalia avait beau être ce que Lana avait de plus proche d'une amie, cela ne l’empêchait pas de ressentir une vague bouffée de honte.

La respiration encore lourde, elle finit par rejoindre la chancelière qui l'attendait dans la pièce attenante. Elle lui adressa un salut très expéditif de la tête, le dos bien trop raide pour s'incliner comme le voulait la bienséance, avant d'aller s'écrouler dans le fauteuil derrière son bureau, insensible à la pénombre qui régnait dans la pièce. Elle préférait s'asseoir avant que ses jambes ne la trahissent. Les muscles de ses cuisses continuèrent pourtant à la tirailler. Elle indiqua à Emalia un fauteuil où s'installer en face d'elle.


- Je vous écoute, Emalia. J'espère que c'est important, car le moment n'est pas particulièrement bien choisi... débuta-t-elle d'un ton raide.

C'était peut être un peu brutal, voire grossier, surtout quand on savait que son interlocutrice était LA chancelière, mais Lana ne se sentait pas du tout la force pour la bienséance et les banalités.
Emalia Kira
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Emalia se laissait porter par ses jambes tremblantes comme si celles-ci étaient dotées d’un mécanisme dont elle n’était plus maîtresse. Elle s’efforçait de rester stoïque, de serrer les doigts autour de son datapad pour qu’ils cessent de trembler. Il lui semblait qu’au détour de chaque couloir, elle recevait des regards hostiles ou quelque remarque désobligeante. Quelle ingratitude. Elle avait fait se mouvoir la République contre l’Empire, enfin, après des années d’immobilisme. Et c’était comme cela qu’elle était remerciée ?
Pourtant, la colère qui éclatait d’ordinaire chez elle si facilement se taisait cette fois-ci, comme tapie tout au fond d’elle, comme si elle avait eu peur de quelque chose.
La peur. Ce devait être cela. Il n’y avait pas d’autre explication à ce vide en elle, à son cœur qui battait la chamade et cette angoisse sourde qui l’étreignait lorsqu’elle pensait à ses enfants. Milésya. Ethan.

Tout en marchant, la souveraine activa son comlink pour contacter Mira, la gouvernante restée dans ses quartiers.

- Madame ?
- Mira, vous avez regardé les holonews ?
- Je… Nous… Nous avons vu des bribes. J’ai éteint les holonews, Madame, Milésya s’agitait.
- Vous avez bien fait.

Quoiqu’elle n’était plus très sûre du moment où sa petite fille devrait faire face à la réalité. Quand serait-elle assez grande, assez mature ? Elle était son bébé pour toujours.

- Mira, faites renvoyer Ethan au palais d’Iziz. Il y sera plus en sécurité. Accompagné d’Aristown et d’Alice.
- Bien, Madame, mais… Et Milésya ?
- Milésya restera ici. Elle doit apprendre auprès de Shoey. J’aurais aimé que ce fut dans une période plus douce mais… C’est une occasion rêvée qu’elle fasse ses premiers pas dans le milieu politique.

Et qu’elle laissât de côté sa naïveté enfantine. La pauvre allait être choquée de ce milieu. Mais c’était celui dans lequel elle nagerait un jour. Et si elle voulait qu’elle fût comme une nautolan dans l’eau, il fallait l’y confronter rapidement.

- Bien, Madame.
- Merci, Mira. Ce sera tout.

Elle coupa la communication au moment même où elle parvenait, affublée de ses gardes, à destination. Cette petite conversation avait au moins eu le mérite de rendre ce périple moins long. Les appartements de la Sénatrice de Kuat ne lui avait jamais semblés si éloignés de la Rotonde. Quelques heures à peine s’étaient écoulées depuis la séance extraordinaire qui l’avait vue dilapidée publiquement. Elle estimait avoir plus ou moins sauvé son mandat – temporairement – mais pas véritablement sa personne. Elle s’était condamnée elle-même. Pour acheter quoi ? Quelques mois de pouvoir supplémentaire. Quelques mois seulement, cela suffirait-il à écraser l’Empire ? Certainement pas. Mais elle mettrait tout en œuvre. Les livres d’Histoire Galactique lui feraient peut-être justice, au moins, un jour.

- Je viens voir la Sénatrice de Kuat, annonça-t-elle aux deux gardes postés devant la porte scellée. C’est très important, ajouta-t-elle devant leur hésitation.

L’un d’eux se hâta d’entrer à l’intérieur, et Emalia patientait en tâchant de contrôler sa respiration. N’était-ce pas ainsi que l’on conseillait les personnes pour qu’elles retrouvassent leur calme ? Inspirez, expirez. Aucun effet. Si elle trouvait le charlatan qui avait inventé ça, elle le secouerait jusqu’à ce que mort s’en suivît.
Finalement, le garde revint et l’invita à entrer, le visage fermé. Il la conduisit dans un bureau, où elle fut invitée à patienter de nouveau. Sa propre garde l’attendait dehors. Hors de question que qui que ce soit assistât à la conversation qui allait suivre. Emalia se demandait à quel point elle devrait se montrer persuasive. Elle était la femme la plus puissante de la galaxie ! Elle avait sûrement quelque chose à offrir à Lana en échange de ses… services.

La sénatrice se montra finalement, le visage fatigué. Même à travers la pénombre, on pouvait voir les traces et les contusions. Elle avait entendu le rapport fait à propos de Nar Shaddaa, mais elle ne s’était pas attendue à ce que Lana fût si atteinte personnellement.

- Oh, Lana ! s’exclama-t-elle, confuse, tout en se laissant choir à son tour sur le fauteuil indiqué. Vous avez l'air d'avoir tant souffert ! Vous avez besoin d’un médecin ? Je peux vous ouvrir mon carnet d’adresses, si nécessaire, je connais…

Mais elle s’interrompit. Ce n’était pas pour cela qu’elle était venue la voir, et Lana et elle s’étaient toujours entendues sur une chose : être sincère et aller droit au but.

- Oui, c’est important, dit-elle en forçant sa voix à retrouver son calme et sa fermeté habituelle malgré les tremblements incontrôlables. Excusez-moi, je suis encore bouleversée de la séance. J’ai… Je veux dire, nous avons réussi à trouver des voies pour sortir du conflit. Je vous remercie de m’avoir soutenue, Lana. Ces chiens kath ne rêvent que de leur vengeance, sans considération des conséquences.

Elle soupira, passa deux doigts sur l’une de ses tempes. L’intérieur de sa tête tambourinait à lui en faire éclater les vaisseaux. Mais elle ne pourrait toujours pas dormir. Pas maintenant. Et il était inutile de chercher à se justifier : elle l’avait déjà fait dans la Rotonde.

- Bref. Je dois désormais constituer un nouveau gouvernement de coalition. S’entend : avec des ministres extérieurs à mon parti.

Voilà comment son opposition de toujours, le FLR et le RR, allaient arriver au pouvoir grâce à elle-même. Un comble. Mais un comble plus supportable que de laisser la place aux partisans de celle qui l’avait trahie au beau milieu de la bataille.

- Je vais nommer plusieurs des sénateurs de l’opposition, expliqua-t-elle, quelques leaders et quelques partisans moins virulents. Personne qui me soit proche. Et sûrement personne qui ne soit clément.

Elle ne disait pas cela pour susciter la pitié. C’était un constat. Un constat qui l’amenait jusqu’ici, dans ces quartiers.

- Je vais avoir besoin de quelqu’un de confiance avec moi. Au moins une personne, dit-elle dans un souffle. Quelqu’un de capable, quelqu’un qui n’est pas obnubilé par le pouvoir, quelqu’un avec… des aptitudes exceptionnelles.

Elle retint sa respiration. Oui, Lana était la dernière personne en qui elle pouvait avoir confiance dans la Rotonde, avec probablement Shoey. Mais Shoey représentait Ondéron, et deux ondéroniennes au gouvernement ne ferait que faire ressurgir les critiques dont elle était l’objet. Et puis, Lana avait ces « aptitudes » bien spécifiques qui pourraient les aider…

- Je vous en prie, Lana, il faut que vous m’aidiez. Il n’y a que comme cela que je pourrais continuer à faire que la République se batte contre l’Empire.

Emalia sentit ses yeux se remplir de larmes de nouveau. Heureusement, la pénombre devait dissimuler cela au moins un peu. Elle les ravala, comme elle l’avait fait mille fois, lui semblait-il, depuis le début de cette journée.

- Lana, je suis venue vous demander de devenir mon bras droit dans ce gouvernement. Acceptez de devenir Vice-Chancelière.

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Emalia avait l'air dans un état bien pire que le sien. Si elle était dans un état physique et d'une apparence irréprochable, comme d'habitude, Lana la sentait en revanche beaucoup plus instable au niveau émotionnel. Si la chancelière s'imaginait pouvoir profiter de l'ombre pour cacher ses tremblements, elle avait visiblement oublié la raison de cette obscurité... Les yeux umbarans de la sénatrice pouvaient la détailler à loisir. Le léger tressautement de sa mâchoire serrée, son clignement trop fréquent des yeux pour en chasser un début de larmes. Ses doigts blêmes serrés sur le premier objet à sa portée, qui ne l'empêchait pas pour autant de trembler. La chancelière avait l'air au bord de l'effondrement émotionnel. Lana pouvait parfaitement le comprendre, vu comment la Rotonde l'avait lynchée un peu plus tôt dans la journée. Et malgré son propre état déplorable, l'umbaranne n'aurait échangé sa place avec celle d'Emalia pour rien au monde.

Si l'ondéronienne sembla s'inquiéter un instant pour son état, elle bifurqua bien vite pour parler de la raison de sa venue. Lana préférait. Elle était déjà épuisée, et sa patience viendrait assez vite à ses limites si on commençait à la prendre en pitié... Même si elle se voyait mal exploser devant la chancelière et la renvoyer aussi sec, il était des moments où l'on ne contrôlait plus ses émotions. Emalia commença à lui parler de la suite. Le remaniement ministérielle qu'elle devrait opérer. Lana, elle se serait mal vue faire de tels compromis pour garder sa place... Mais Lana était loin d'être la meilleure oratrice au Sénat, et n'aimait pas particulièrement débattre devant la Rotonde. Elle excellait bien plus dans les négociations individuelles. Cependant, elle ne voyait pas bien voulait où voulait en venir Emalia. Si elle était juste vidée son sac en tant que son "amie", ça allait barder.

Puis finalement, le cadeau surprise tomba. Le poste de vice-chancelière. Un cadeau surprise, ou bien un cadeau piégé ? Sincèrement, elle ne le savait pas, mais elle n'aimait pas les surprises quoi qu'il en soit... Elle soupira longuement, rejetant sa tête en arrière pour regarder le plafond. Son plan arrivait à son terme. Si elle avait approché Emalia au départ, si elle s'était donné la peine de devenir son amie, c'était précisement dans ce genre d'objectif. Acquérir du pouvoir. Pas un simple poste de ministre (de simples figurants), qu'elle avait déjà d'ailleurs refuser à plusieurs gouvernement, mais bien la vice-chancellerie ou la chancellerie. C'était dans ses gênes umbarans, elle ne pouvait s'en empêcher. Elle ne sortait des ombres que pour la place la plus importante. Bien sûr, Emalia s'était révélée une personne agréable, mais l'amitié de Lana n'était pas gratuite. Son prix était juste soigneusement dissimulé, même après l'encaissement.


- Emalia... commença-t-elle doucement, ramenant son regard sur son interlocutrice. C'est peut être beaucoup me demander.

Car à présent que son plan touchait au but, elle n'était pas sûre de vouloir empocher la mise. Le Sénat était devenu selon elle incontrôlable. L'opposition se faisait très agressive, des menaces et des actes inconscients s'effectuaient de part et d'autre... Et c'est à elle qu'Emalia venait demander pour calmer cette bande de dégénérés ?! Le fruit de ses soigneuses machinations s'avérait peut être empoisonné en fin de compte. Si elle réussissait, elle acquérait un prestige inestimable. Si elle échouait, elle ne savait pas jusqu'où s'étendraient ses pertes. Elle s'était arrangée depuis toutes ces années à paraitre neutre, la voix de la raison et de la République car n'appartenant à aucun gouvernement ni à aucun parti malgré sa propre influence. Cela lui avait évité tout revers trop sérieux...

- Vous me demandez de mettre le pied dans un piège trandoshan en espérant qu'il ne se referme pas pour me broyer la jambe. Bien que je sois flattée de la confiance que vous m'accordez, ce n'est pas une perspective très agréable.

Lana détestait qu'on la critique directement. Devenir vice-chancelière dans la situation actuelle reviendrait à se peindre une cible dans le dos. Elle se connaissait, si la situation restait aussi tendue mais avec elle en son centre, elle finirait pas faire tomber des têtes. Au sens propre. Elle avait un sabre laser après tout.

- Quand à mes... aptitudes... Elle répugnait toujours à en parler, même dans la sécurité de ses propres quartiers. Elles pourraient se retourner contre vous, et contre moi. Si quelqu'un était au courant, je serai pendue dans l'enceinte même du Sénat, et probablement vous aussi par ricochet. On m'a déjà accusée d'être une sith, et croyez moi, cette histoire ressortira.

Sa voix était terriblement froide, mais on sentait qu'elle avait longtemps réfléchie à la question. A ce niveau, elle n'aurait même pas le droit à un procès avant d'aller croupir en prison ou être lynchée en place publique. Même si les jedi étaient supposés la soutenir à présent, dans le cadre de leur petit accord mutuel, elle ne souhaitait pas outre mesure tester leur fragile alliance ! Elle soupira une nouvelle fois longuement, un peu rêveuse de son lit. Lana pensa alors que ce n'était pas par confiance mais par défaut qu'Emalia voulait la choisir. Peut être pourrait-elle tenter de la décourager...

- Êtes-vous bien sûr d'avoir tout pris en considération, Emalia ? Je pense être assez loin du profil idéal. Je... J'ai des antécédents devant la justice qui ont été assez... médiatisés pour rester dans les esprits. Je n'ai jamais été eu de charge dans un gouvernement, aussi n'ai-je aucun expérience sur la position que vous me proposez...
Emalia Kira
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Emalia avait retenu son souffle. Sans surprise, Lana n’allait pas être facile à convaincre. La Chancelière se mordit la lèvre. Elle savait déjà qu’elle n’abandonnerait pas si facilement : si la sénatrice refusait, elle userait d’autres tactiques. Elle avait besoin d’une alliée : c’était vital. Elle était donc prête à y mettre le prix… Et étrangement, dans son état actuel, elle ne s’inquiétait guère de ce que ce prix pouvait être. Il n’y avait pas grand-chose qu’elle n’était pas prête à donner de toute façon.

- Je me souviens du procès, admit-elle.

En ce temps, elle n’était que Reine d’Ondéron, et avait regardé d’un œil amusé la Rotonde tenter de faire tomber une sénatrice coriace. Elle en avait gardé une certaine admiration pour Lana, elle devait l’admettre.

- Mais votre culpabilité n’a pas été prouvée, ajouta-t-elle aussi fermement qu’elle le pouvait. Et je concentrerai très probablement la plupart des critiques, vu la… considération que j’inspire au Sénat. Au fond, ils n’ont rien contre vous, ils le sauront très bien.

Qui plus était, Lana avait toujours su esquiver les critiques, les traiter intelligemment. Au contraire, plus Lana questionnait Emalia sur la pertinence de l’idée, plus celle-ci était elle-même intimement convaincue que c’était la seule chose intelligente à faire.

- Quant à vos aptitudes, je ne vous demande pas de les utiliser. Vous savez mieux que moi ce qu’il conviendra d’en faire. Je vous promets que vous serez libre sur la question, et sur bien d’autres.

Elle ne se paierait pas le luxe d’utiliser Lana comme une subordonnée. Elle ne le pouvait pas : ce serait sa seule véritable alliée.

- Et vos compétences ! Lana, vous les avez davantage prouvé que ce que vous imaginez. Un cabinet est à notre service pour tout ce qui des questions juridiques et administratives, vous n’aurez pas d’ennui avec ça. Votre véritable rôle sera la négociation et quelques décisions stratégiques. Le poste se pliera à votre profil : si vous ne souhaitez pas représenter la République, vous ne prendrez pas ces tâches. Si vous ne souhaitez pas vous adresser à la Rotonde, je le ferai. Mais bon sang ! Venez auprès de moi, que je puisse avoir la certitude d’avoir à mes côtés une intelligence stratégique et tactique et qui soit de mon côté sans que je n’en doute jamais.

Car ce serait là tout l’ennui de ce nouveau gouvernement : tous ces nouveaux ministres seraient ravis d’avoir décroché le poste, mais à quel point l’utiliseraient-ils pour servir leurs intérêts et non ceux de la République ? Combien d’entre eux, songeant à la prochaine campagne électorale deux ans plus tard, se ferait un plaisir d’utiliser leur position pour briller au gouvernement tout en nuisant subtilement à l’image de la Chancelière pour mieux paraître être la figure dominante pour le prochain mandat ?
Non qu’elle ne pensât pas que Lana en fut elle-même incapable… Mais c’était différent. Lana était loyale. Si elle devait concourir à la Chancellerie d’ici quelques années, ce ne serait pas en se positionnant contre Emalia elle-même. Lana semblait ainsi : elle n’était jamais dans une opposition brutale et agressive : elle avait l’intelligence relationnelle et tactique qui faisait d’elle une figure persistante, jamais acquise à un camp ni à un autre. Une indépendante, en quelque sorte. Et c’était cela qu’Emalia recherchait : une indépendante par rapport à ce nouveau gouvernement, une personne qui ne pourrait non plus être corrompue par la nouvelle opposition montante…

La Chancelière joignit ses deux mains sur ses genoux, croisant les doigts comme dans une prière silencieuse. Elle ne savait plus très bien quelle carte jouer pour la convaincre… Ou plutôt, elle savait qu’il ne lui en restait plus qu’une seule.

- Je vous en prie Lana. Si vous ne le faites pas pour moi, faites-le pour la République. Vous l’avez vu : le Sénat menace de s’effondrer, et l’Empire d’en profiter pour prendre le dessus.

Et il était temps de montrer qu’elle était prête à payer le prix pour éviter que cela ne se produisît.

- Si vous souhaitez des garanties… Ou bien des choses en échange, je suis à votre écoute. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir.

D’un certain point de vue, Emalia était la femme la plus puissante de la galaxie. Si Lana désirait ardemment quelque chose, n’était-elle pas la plus à même de le lui offrir ? D’un certain point de vue seulement, cependant, car autrement que juridiquement, la Chancelière n’était plus tout à fait la personne la plus puissante : elle venait de s’enchaîner à un Sénat en colère, et devrait bâtir elle-même le contre-pouvoir de son poste par un gouvernement de coalition. Non. La personne la plus puissante de la galaxie, à cet instant, ne faisait aucun doute : c’était l’Impératrice. Elle avait beau avoir perdu une bataille, personne ne remettait son pouvoir en cause. Et dire que c’était cela même qui en faisait à la fois un tyran et l’individu la plus puissante de leur monde… C’était injuste, mais c’était ainsi.
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Emalia ne souhaitait pas en démordre. Bon, c'était normal. Elle ne serait pas ici sinon. Et Lana ne savait plus quoi penser. La chancelière venait quasiment la supplier pour un poste qu'elle avait secrètement souhaité, ce même poste qui l'avait poussé depuis quelques années à se rapprocher d'Emalia. Pourquoi hésitait-elle ? Elle aurait accepté avec plaisir, si cela ne revenait pas actuellement à plonger dans une marmite d'eau bouillante pour s'ajouter soi-même au ragoût. Emalia avait plongé le Sénat dans la confusion, et souhaitait maintenant que Lana vienne l'aider à y remettre de l'ordre. C'était donc cela, l'amitié ? Si elle avait su cela avant, elle n'aurait jamais essayé...

Elle regardait la chancelière en face d'elle, au bout du rouleau. Elle était prête à lui promettre tout ce qu'elle voulait visiblement. Si ce n'était pas un signe de désespoir... Elle était prête à adapter le poste à son besoin, à s'offrir comme cible pour détourner les attaques de Lana. A lui permettre de rester dans l'ombre si elle le désirait. Cela attira immédiatement l'attention un peu ensommeillée de Lana. Elle avait toujours préféré rester discrète dans ses manigances au Sénat, préférant les petites salles de réunion et les sous-commissions décisionnaires qu'aux grandes et clinquantes séances de la Rotonde. Alors qu'elle était sur le point de refuser tout net son aide à Emalia, elle revint sur ses considérations.

Après un petit moment d'un silence tendu, Lana plaqua les mains contre ses tempes et commença à se frictionner vigoureusement le crâne, s’ébouriffant encore un peu plus ses cheveux déjà peu ordonnés.

- Raaaaa, gémit-elle, pourquoi tout doit être si compliqué ?!

C'est vrai que son esprit épuisé et son corps endolori - qui n'attendait qu'une séance de bacta - ne l'aidait pas réellement à réfléchir... En temps normal, elle n'aurait décision dans un tel état physique, c'était la meilleure façon de provoquer des catastrophes. Cependant, elle voyait bien que la chancelière attendait une réponse immédiate. Tout ce qui se passait en ce moment au Sénat ne leur laissait pas le luxe d'y réfléchir très longtemps. Il avait fallu que cela concorde exactement avec le moment où Lana avait failli mourir dans l'espace Hutt, et où elle aurait bien eu besoin d'un peu de repos. S'il y avait un quelconque Dieu quelque part, c'était un sacré sadique.

Pourtant, au fond, Emalia avait raison. Il lui fallait quelqu'un de confiance et de compétence pour ce poste, afin de ramener le Sénat à la raison, avant que l'Empire n'en profite pour prendre l'avantage. Lana se jugeait - en toute modestie bien sûr - une des plus compétentes sénatrices de la Rotonde. Elle ne voyait pas qui d'autre pourrait le faire. Ah ! Qu'il était bon de se sentir désirable et indispensable ! Elle n'aimait pas particulièrement la République, mais elle avait décidé d'y vivre, un peu en tant que parasite finalement. Il fallait qu'elle s'assure que son hôte survive au conflit qui s'annonçait. Même si la tâche s'annonçait ingrate. Terriblement ingrate.

Lana sembla reprendre son calme, et repris d'une voix lasse, les yeux clos :


- J'aurai bien aimé pouvoir recevoir quelque chose de votre part... Mais il n'y a rien que vous ne puissiez faire pour moi. Et puis, vous devriez savoir que je ne fonctionne pas comme ça.


L'umbaranne était riche et influente, elle n'avait donc qu'un nombre d'envies et de problèmes très restreint. Cependant, elle ne tenait pas spécialement à ce que sa collègue commence à venir mettre son nez dans ses problèmes à engendrer un héritier, ou à ses tensions avec ses alliés de circonstances jedi... Elle sentait qu'elle pouvait s'ouvrir à Emalia, mais elle jugeait cela trop dangereux. Aussi fit-elle comme d'habitude et se referma sur elle-même. Personne ne l'avait jamais vraiment aidée, aussi résolvait-elle ses problèmes seule.

- Très bien, reprit-elle en maugréant. Je le regretterai sûrement, mais j'accède à votre demande. Je deviendrai votre vice-chancelière. Quand on vous accusera de collaborer avec une potentielle sith, vous ne viendrez pas vous plaindre.

Il était clair que Lana n'acceptait finalement que de mauvaise grâce. Aurait-elle eu le temps et l'énergie de peser le pour et le contre, sans la proximité d'Emalia, peut-être n'aurait-elle pas pris la même décision.

Mais les dés étaient jetés à présent. Elle s'affaissa un peu plus dans son fauteuil, comme si le poids de sa nouvelle charge pesait déjà sur ses épaules. A elle d'en tirer le meilleur parti.
Emalia Kira
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Emalia fut un instant embarrassée, avec l’illusion désirée que cet embarras ne pût être perçu sur son visage grâce à l’obscurité de la pièce… Mais c’était oublié qu’ici, Lana voyait comme en plein jour. La Chancelière n’avait pas eu le temps de réfléchir à sa proposition : elle avait étalé ses cartes devant elle en espérant convaincre son amie, sans penser qu’elle pouvait par ces propositions même l’offusquer.
Mais visiblement, Lana ne lui en tint pas rigueur : elle acceptait le poste.
Un bref instant, Emalia n’en crut pas ses oreilles : elle acceptait ! La Chancelière laissa échapper un soupir de soulagement.

- Voilà bien la première bonne nouvelle depuis des jours,
souffla-t-elle, l’émotion faisant trembler sa voix.

Elle ne savait pas vraiment pourquoi elle était d’ailleurs tellement émue. La fatigue des jours passés, certainement. Emalia fit un effort pour se contrôler et afficher un sourire le plus sincère possible.

- Oh, Lana, merci ! Vous ne savez pas à quel point votre présence à mes côtés me rassure. Si vous saviez comme je me fiche des qu’en dira-t-on maintenant ! Je serai fustigée quoique je fasse, alors je n’ai plus qu’à faire ce qui me semble être le plus juste sans plus me soucier des jugements que cela inspirera. La République n’a pas conscience du danger qu’elle court face à l’Empire. Un duo comme le nôtre est essentiel à sa protection, qu’elle en ait conscience ou non.

Ah, si sa grand-mère avait seulement idée du rôle qu’Emalia s’était mise à jouer dans la galaxie ! Il était difficile de savoir si elle en serait verte de contrariété ou rose de satisfaction. Une seule chose était sûre, la Reine d’Ondéron était sortie très loin du cercle confortable dans lequel elle était née, et peut-être commençait-elle à atteindre ses limites. Mais elle aurait étendu le cercle d’influence de la planète plus qu’aucune de ses ancêtres, et grâce à elle ses descendantes jouiraient d’un pouvoir et d’une histoire hors norme. A la force de ses convictions, elle traçait des chemins pour les futures générations d’ondéroniennes et de républicaines à travers la galaxie. Et cela avait bien plus d’importance que tous les crachats qu’elle pouvait recevoir de la Rotonde.

La Chancelière regarda de nouveau la Sénatrice, bientôt son alliée proche pour deux années au moins, en essayant de distinguer quelle émotion se traçait sur ses traits à elle. Mais l’obscurité l’empêchait d’en juger. Seule la fatigue et les contusions étaient clairement visibles dans la posture de sa nouvelle collaboratrice, affaissée dans son fauteuil. Emalia baissa les yeux pour ne pas paraître impolie.

- Je crois que je ne vais pas vous ennuyer plus longtemps, dit-elle en se levant, vous avez besoin de repos.

Elle ne s’inquiétait guère en réalité : Lana était coriace et reprendrait très vite du poil de la bête.
Emalia s’apprêtait à partir, mais hésita un bref instant.

- S’il se trouvait qu’un jour vous aviez besoin de quoique ce soit, ou que vous trouviez quelque chose que je puisse faire pour vous remercier… N’hésitez pas.

Un tel élan de bonté n’était pas coutume chez Emalia, qui, elle le savait, aurait dû rester dans ses habitudes prudentes et partir sans demander son reste après avoir obtenu le soutien de son amie sans rien avoir à donner en échange. Mais ce que Lana lui inspirait, ces temps-ci et en comparaison de tous les autres politiques qu’elle croisait de près de ou de loin, était proche d’une sensation de vérité commune, immuable et secrète aussi. La trace de celles qui avaient traversé d’autres épreuves, plus complexes, loin des apparences dont elles s’affublaient pour leur rang et surtout, cette sensation qu’elle pouvait s’autoriser, avec Lana, à agir selon ce en quoi elle croyait vraiment.

- Reposez-vous bien,
dit-elle avant de s’effacer.
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