Emalia Kira
Emalia Kira
Messages : 697
Eclats Kyber : 0
Emalia rapprocha son visage du miroir, corrigea ostensiblement son maquillage pour dissimuler ses cernes, malgré les mouvements du vaisseau qui la faisait parfois vaciller. Nul ne devait voir la moindre trace d’une quelconque faiblesse. Sur Coruscant, l’une de ses domestiques l’aidait chaque jour à se vêtir, se coiffer et se maquiller, mais à bord de la petite corvette hautement sécurisée, elle avait privilégiée la présence d’une garde rapprochée plutôt que d’une suite de servantes. La raison d’un si petit équipage ? La rapidité et la sécurité. Les deux allaient de pair : pour déjouer les potentiels pièges, mieux valait que son emploi du temps soit secret d’une part, et exécuté le plus rapidement d’autre part. Sans compter qu’elle était attendue au Sénat, où mille et un sujets d’étude avaient été soulevés. Heureusement, Shib’lecra était d’une efficacité redoutable, et elle pouvait en confiance se concentrer sur d’autres thèmes plus urgents encore. Comme ces annonces d’invasion des mondes neutres par l’Empire, ou ce qui s’en rapprochait. Ils venaient à peine de sortir de l’hyperespace.

*Biiip. Vous avez reçu – VINGT-DEUX – nouveaux messages. – CINQ – ont été catégorisés - IMPORTANTS – en raison de l’identité de leur émetteur. *

Emalia recula d’un pas, décida que son reflet était satisfaisant, puis enclencha un bouton sur son datapad pour écouter le message, tout en allant consulter la carte de leur voyage affichée sur un écran mural. Ondéron était si proche… Et elle ne s’y poserait même pas.

*Madame la Chancelière, ici Vanesta Holdoll. La flotte de surveillance est en place de Vinsoth à Muunilist, comme vous l’avez demandé. J’ai plusieurs suggestions à vous soumettre, notamment pour la protection de la branche d’Uba et du flanc de Yaga Minor. Nous avons également mis en place un observatoire sur Troiken, mais les ressources y sont limitées. Nous allons devoir rééquilibrer, peut-être piocher des forces spatiales parmi celles proches d’Ord Padron… Je sais que la surveillance de cette branche de l’Espace Hutt n’est pas à délaisser, mais nous pourrions envisager de nous reposer un peu plus sur l’Ordre Jedi à ce niveau. Surtout qu’il est périlleux de désarmer l’axe Bomis Koori-Bakura au vu du gel des flottes de la LMP, qui jouait un rôle dissuasif dans ce secteur. Bref, je vous envoie l’ensemble de mon rapport d’analyse par messagerie sécurisée. Concernant la LMP, l’ensemble des appareils semblent avoir répondu présents, même si l’inventaire de la flotte est légèrement chaotique et hétérogène, ce qui laisse à penser que des éléments pourraient nous échapper. Je suis confiante, malgré tout : c’est plutôt dans leur intérêt de se manifester vu les annonces de l’Empire… A votre disposition pour toute question, Madame la Chancelière. Holdoll, terminé.*

*Biiip.*

*Ici Invi Vamon, madame la Chancelière. Je viens de recevoir le rapport d’Holdoll. Il y a des choses qui me chiffonnent là-dedans : nos moyens sont misérables sur la passe corellienne ; si l’armée se retire, je ne sais pas ce que nous pourrons faire ! Il faut évoquer cette réorganisation en Conseil des Ministres… Invi Vamon, terminé.*

Emalia soupira, déverrouilla l’accès de son étroite cabine au-delà de laquelle un corridor conduisait directement au cockpit de leur petite corvette. Un pont étroit rassemblait la quasi-totalité de l'équipage.

*Biiip.*

*Ici le bureau des communications électroniques. La demande d’ouverture de comptes a été finalisée pour votre nouvelle organisation de cabinet. Pour toute demande supplémentaire, vous pouvez faire appel à ZN-232, à votre service.*

*Biiip.*

*Madame la Chancelière, madame Velcros du bureau de la Communication externe. La synthèse des demandes d’interviews par la presse républicaine est faite, je vous la transmets par messagerie. Toutefois, on m’a demandé de vous prévenir : les sources ne sont pas égales en qualité et en notoriété. Aurez-vous besoin d’une expertise pour faire votre choix ? Velcros, terminé.*

*Biiip.*

*Maman ? Môôômaaan !
- Ethan, arrête ! On t’a dit en cas d’urgence seulement ! Je suis terriblement désolée votre Majesté, ça ne se reproduira plus…
- OOOOUUUIIINNN -
*

*Biiip. Voulez-vous archiver, réécouter, ou supprimer ces messages ?*
- Supprimer.
*Messages supprimés. Vous avez - DIX-NEUF – nouveaux messages. - DIX-NEUF – ont été catégorisés non importants, en raison l’identité de de leur émetteur. Voulez-vous -*
- Supprimer.
*Messages supprimés. Vous avez – UN – nouveau message. – UN – a été catégorisé non impor-*
- AAAH !

Emalia attrapa son datapad et l’envoya balader à l’autre bout de la cabine. L’impact contre la paroi résonna désagréablement, mais au moins la voix s’était tue. Dans le corridor, l’équipage fit semblant de n’avoir rien entendu, et paraissait beaucoup trop sérieux lorsqu’elle les rejoignit. Seule la ministre Laz’ziark, assise près du cockpit, avait l’air réellement désintéressée de ses sautes d’humeur.

- Madame la Chancelière, nous avons obtenu l’autorisation du Star Home pour docker le vaisseau. Nous devrions être à quai d’ici quinze minutes grand maximum.
- Bien, commandant, merci, répondit Emalia avec un air approbateur.

Son agacement était déjà évaporé. Son entourage allait devoir s’y faire, comme s’y étaient faites sa cour et ses servantes : la Reine et Chancelière était une impulsive, et elle pouvait s’énerver très vite. Mais ses colères passaient aussi vite qu’elles étaient venues, et une fois le calme restauré, l’on travaillait comme si de rien n’était. Emalia n’en était pas le moins du monde gêné : ça rappelait aux uns et aux autres qui décidait d’une part, et d’autre part ça la soulageait. Sans compter qu’aucun de ses collaborateurs ou subalternes – absolument aucun – n’avait un caractère parfait. Il suffisait de l’admettre pour accepter la souveraine et dirigeante.

L’ondéronienne en question avait les yeux rivés sur la station spatiale qui se dessinait sous leurs yeux, grandioses. Emalia avait beau l’avoir vu une première fois lors du sommet pour la Paix, il n’en était pas moins somptueux de technologie et de raffinement. Elle échangea un regard avec Ress, à qui tout ce luxe ne siérait peut-être pas. Cela arrangeait bien la Chancelière : elle ne venait pas auprès de la Reine-Mère pour la brosser dans le sens du poil, mais bien pour négocier une collaboration fructueuse. Si l’Etoile du Soir voulait l’aide de la République, elle allait devoir descendre de son piédestal et donner du sien. Avoir aux côtés de la Chancelière une ministre prête à montrer les crocs, donnant une image implacable du Sénat, l’aiderait certainement. A côté de Madame Laz’ziazk, Emalia aurait l’air d’un agneau.

- Ress, vous êtes prête ?


Elle l’appelait par son prénom depuis son investiture à la Chancellerie. Pas par condescendance, mais parce que désormais, elles se côtoyaient presque tous les jours, et se passer des formalités lui faisait gagner du temps.

- Voici comment j’envisage le déroulé de cette réunion, enchaîna-t-elle. D’abord, nous allons mettre l’établissement de la coalition des mondes neutres sur le tapis. Vu son communiqué, l’intervention de l’Empire l’a suffisamment agacée pour qu’elle mette cela sur la table… Sinon, nous l’aborderons nous-mêmes. Je veux que cette organisation de coalition et le plan contre l’Empire soient faits de pair, que nous ne perdions pas de vue ni l’un ni l’autre. Les autres sujets peuvent être intéressants mais annexes. Nous ne repartirons pas d’ici sans une alliance solide qui nous permettra d’établir un plan de défense concerté avec les mondes neutres pour le jour où l’Empire passera à l’action.

S’il n’était pas déjà trop tard…

- N'hésitez pas à en demander un petit peu plus pour en obtenir un peu moins. Au vu de sa gourmandise lors de notre précédente rencontre sur cette même station... Je suis prête à parier qu'elle recommencera le même stratagème. Autant que nous jouions tous au même jeu.

Et dire que la dernière fois qu'elle s'était posée à bord du Star Home, elle n'était que Ministre et Reine de seconde zone. Et pourtant... l'Etoile du Soir n'avait pas réussi à la manipuler. Désormais, elle aurait un poids plus important encore. A cette idée, la Chancelière sourit.
Invité
Anonymous
Ress Laz’ziark détestait beaucoup de choses. A vrai dire, il aurait été nettement plus rapide de faire la liste de ce qu’elle appréciait, parce que cette dernière était beaucoup moins longue que la compilation de tous les objets de sa rancœur. Cependant, parmi son top dix de la détestation, on pouvait trouver les privilégiés hautains… et les voyages spatiaux. Manque de chance, elle se trouvait dans une corvette depuis quelques heures pour aller rencontrer une souveraine absolue qu’elle ne pouvait pas encadrer avant même de l’avoir vue, par simple réflexe de classe. Autant dire qu’elle était dans les meilleures conditions possibles pour une négociation.

Cette fois, échaudée par son expérience sur Bilbringi, elle avait pris la précaution d’avaler des comprimés anti-nauséeux pour se préparer au trajet, mais malgré cela, son estomac avait tendance à se contorsionner en tous sens, ce qui ne l’arrangeait pas, puisque ce fait achevait de la mettre d’une humeur de dogue. A moins que ce soit son caractère naturel. Parfois, il était difficile de le savoir. Quoiqu’il en soit, elle abordait cette réunion avec une certaine anticipation, comme un trouble-fête qui parvient à entrer dans la plus belle boîte de la ville avec l’intention de tout casser.

De toute manière, la sénatrice doutait que le choix de la nouvelle Chancelière soit anodin. A priori, ses collègues de la Défense ou de la Sécurité Intérieure, même, voir du Commerce ou de l’Economie auraient été plus appropriées pour siéger à ses côtés. La Justice… Certes, elle pouvait parler coopération des services, accords d’extradition, bien que plusieurs existent déjà entre la République et les mondes neutres visés, quoiqu’au cas par cas à chaque fois… Mais c’étaient là des problèmes éminemment subsidiaires au vu des interrogations qui seraient soulevées en premier lieu.

Alors pourquoi elle ? Sans pouvoir lire dans les pensées d’Emalia Kira, il lui restait quelques hypothèses guère complexes à formuler : premièrement, peut-être que la nouvelle dirigeante avait voulu s’adjoindre une adjointe calée dans les considérations juridiques et constitutionnelles pour mettre en place les engagements qui seraient pris. Deuxièmement, elle était, contrairement à la grande majorité des autres ministres, sénatrice en exercice de sa planète, la plupart étant d’anciens représentants ou de purs technocrates, c’était donc une manière d’avoir une représentante du Sénat à ses côtés, pour avaliser démocratiquement les choix effectués. Surtout qu’elle cumulait cette fonction avec celle de dirigeante de Balosar. Certes, sa planète avait l’importance dans la galaxie d’une fosse à purin, ce qu’elle était, mais au moins, il y avait vaguement une sorte de légitimité républicaine qui s’ajoutait. Et enfin, troisième et dernièrement… Elle était tout ce que pouvait exécrer la reine d’Hapès, et ne se priverait ans doute pas de dire haut et fort ce que la Chancelière ne pouvait prononcer.

En effet, il y avait à peu près autant en commun entre Astarta Espara et Ress Laz’ziark qu’entre un bantha et un nexu… Soit strictement rien. L’une était tout ce que l’autre haïssait, et réciproquement. En d’autres temps, la balosar aurait juré qu’Emalia Kira faisait tout pour mettre le feu aux poudres pour tenter de faire échouer les négociations en confrontant deux caractères pareils. Elle l’avait prévenue, avant son élection : si un jour elles étaient amenées à travailler ensemble, elle n’adoucirait certainement pas son caractère et encore moins ses manières. Sa rudesse et son franc-parler, elle y tenait et se voyait mal faire des ronds de jambe devant une personnalité dont elle exécrait les méthodes… et la simple existence. Que tout un système de planète soit soumis au bon vouloir d’une seule personne placée là par la grâce de la naissance et opprimant la moitié de la population en raison de son sexe la dépassait. Oui, d’accord, la République avait besoin d’alliés, et cette zone tampon pouvait offrir une occasion en or d’étendre son influence sans avoir l’air de le faire vraiment, ou d’obtenir le prétexte imparable pour enfin mettre toute la machinerie de cette lente démocratie en marge pour enfin prendre l’Empire à la gorge. Mais pas question de s’aplatir devant l’hapienne, parce que celle-ci avait beaucoup plus besoin d’eux qu’eux d’elle. C’était d’une logique douloureuse : Hapès n’avait pas les moyens de parvenir à ses fins seule. Alors que la République… Sans doute que si. Ce serait taxé d’impérialisme, peut-être, mais avec les menaces belliqueuses de l’Impératrice, la plupart des mondes neutres commençait discrètement à approcher les instances de leur puissant voisin pour tenter de se mettre à l’abri. Comme quoi, la sith, tout à ses désirs mal voilés de conquête, avait sans doute fourni les armes à ses ennemis pour continuer des négociations dont elle était exclue et qui pourraient mener à une ligue anti-Empire. Du moins, c’était à cela qu’aspirait Ress.

Curieusement, se perdre ainsi dans ses pensées avait réussi à oblitérer son mal des transports, aussi elle se contenta d’arquer un sourcil quand un fracas la sortit de ses songeries politiques. Manifestement, la Chancelière avait décidé de condamner un innocent communicateur. Paix à son âme. Il était amusant de constater qu’entre elles deux, la plupart des gens auraient parié que la plus caractérielle était l’avocate. En fait, il n’en était rien, apparemment. Bien sûr, la balosar était à peu près aussi facile à supporter qu’un volcan en éruption. Mais à la différence d’Emalia Kira, il était rare qu’elle passe ses humeurs en accès de rage. Elle se contentait d’agonir mentalement d’injures ce qui l’énervait puis de passer ses nerfs sur les interlocuteurs qu’elle exécrait en de longues diatribes dignes des plus grandes tirades propagandistes. Chacune ses méthodes, après tout.

« Je le serais dès que nous serons arrivées. Les voyages spatiaux me donnent la nausée. »

Au moins autant que les sénateurs ordinaires. Ce qui donnait une idée de son inconfort.

« Evitez d’écouter vos messages pendant les trajets, c’est tentant… Mais généralement, les trois-quarts sont énervants ou ont une tendance à rendre nostalgiques. Je passe le temps en relisant mes dossiers … ou la presse. Ca détend. Vous saviez que le sénateur de Bomor avait une nouvelle maîtresse ? C’est pas-sio-nant. »

Elle avait détaché les syllabes de son dernier mot de façon un peu ridicule pour montrer son interlocutrice qu’elle trouvait tout cela notoirement stupide et représentatif de la décadence des élites républicaines… Et puis, elle tentait aussi de la détendre un peu. Il ne servait à rien d’être aussi tendue qu’un chef de protocole hapien devant une réception à organiser.

Cependant, le sérieux reprit le dessus à l’énoncé des axes principaux de ce qui allait se tramer. Pensivement, Ress hocha la tête, voyant sa dernière confirmer par les ultimes propos de l’humaine. Donc, elle était là pour brailler le plus fort. Hum. C’était dans ses cordes. C’était même sa spécialité. Cependant, elle ne comptait pas se cantonner à cela et faire de la figuration.

« Je compte bien demander plus pour obtenir plus. L’Empire nous a bien servi en effrayant à ce point les mondes neutres. Plus qu’il ne l’aurait voulu, je gage. Certains sont prêts à se précipiter dans nos bras… Et pas dans ceux de Hapès.

Alors… Autant rappeler qui est en position de force. Nous pourrions nous passer du Consortium pour négocier pied à pied. Ce serait long, fastidieux, et un argument pour la propagande impériale. Et sans chance assurée de succès. Mais elle-seule ne peut rien à l’heure actuelle, car sa flotte seule est incapable de repousser l’intégralité des forces siths. »


Bravache, Ress ? Assurément. Et alors ? Au jeu de la querelle des egos, elle ne serait pas forcément la dernière. Tout en observant le Star Home désormais en vue, elle ne put s’empêcher de grincer, plus pour elle-même que pour son interlocutrice :

« Cette chose doit coûter autant que quinze fois le Produit Planétaire Brut de Balosar… »

Et tandis que leur corvette se positionnait et qu’elles étaient invitées à se lever, une petite comptine venait lui trotter dans la tête…

* Deux reines et une syndicaliste sont dans un vaisseau… Qui tombera dans l’espace ?*
Invité
Anonymous


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Immobile,
Comme transcendée par le moment, Astarta Espara fixait sont reflet. Assise sur une chaise, au centre de son boudoir, un grand miroir lui faisant face, elle subissait les soins attentifs de ses demoiselles, qui s’afféraient à la préparer pour les futures négociations. L’une lui maquillait les yeux, tandis qu’une autre lui tressait sa crinière, la ramenant en bas chignon tout en peignant certaines nattes d’une teinture dorée, et qu’une dernière lui proposait différents bijoux. Un collier d’émeraudes ? Non, trop tapageur. Son diadème arc-en-ciel ? Certainement pas, une image de vulnérabilité, d’innocence, s’en dégageait – elle devait sembler être tout sauf impotente, tout sauf chétive. Ses griffes dorées ? Trop agressif… Sans interruption, le défilé interminable de richesses suffisantes pour nourrir un monde durant près d’un an se poursuivait, l’amazone s’armant de la patience nécessaire pour peut-être satisfaire sa maîtresse.

Dans quel hall devrions-nous les faire patienter ?

Par-dessus son épaule, pianotant sur son datapad d’obscurs messages adressés à ses subalternes, Malya Helm peaufinait les derniers détails de la rencontre alors que sa suzeraine hésitait entre argent et or, entre saphirs et rubis. Où allait-elle les recevoir ? Pas dans la salle de leur dernière entrevue – oh, non, certainement pas. Ç’aurait été lui accorder un territoire familier, territoire qui ne lui avait été révélé qu’à cause du chaos animant l’espace de Columex. Non, ses invités n’allaient pas être introduites aux dédales du Star Home – elle ne leur faisait pas assez confiance pour leur offrir la moindre chance de commencer à s’y orienter. Sans doute les Républicains trouveraient utile de connaître les recoins de sa barge royale, sans doute aimeraient-ils pouvoir y circuler sans anicroches, mais les secrets de son vaisseau devaient leur demeurer occulter. À quoi bon leur ouvrir les étages inférieurs alors que les supérieurs étaient déjà suffisants pour les épater ? Songeuse, la Reine-Mère épousseta distraitement sa robe. Pour l’occasion, elle avait préféré se munir du plastron de la veuve, choisissant une toilette sombre, noire, propre à souligner son deuil, mais tout de même seyante, moulante, complimentant ses courbes. Une allure moins tapageuse que lors du Sommet pour la Paix, mais une allure tout de même appropriée pour une narcissique souveraine.

Les Onyx, Salmirassa.

Oui, Ereneda.

S’agenouillant devant elle, l’amazone lui présenta sur un coussin une paire de boucles d’oreilles, des larmes noires taillées. Étendant son bras et les enfilant l’une après l’autre, Astarta souffla faiblement la main de l’autre suivante d’une petite tape, ses yeux étant terminés. Tandis qu’elle harponnait l’oreille gauche, elle jeta un regard pensif à sa subalterne, sa nouvelle Grande Secrétaire.

Les Nymphées devraient suffire. Vous les accueillerez vous-même, sans trop les faire attendre inutilement. Il serait vain que de les échauffer dès leur arrivée sans que le besoin ne s’en fasse sentir – non, qu’elles se sentent aussi bienvenues que possible.

Devrions-nous leur fournir une musique d’ambiance ? Certaines de vos dames ont la chance fortuite d’avoir une très belle voix.

L’Étoile du Soir grimaça.

Les Nymphées n’ont pas l’acoustique nécessaire.

La bureaucrate hocha la tête, compréhensive. Si tapisser les murs latéraux d’une grande salle de gigantesques aquariums habités par des espèces marines hapiennes l’avantage certain de dresser un contraste époustouflant avec la vue offerte sur le vide galactique par les fenêtres renforcées opposées, cette caractéristique avait aussi pour désavantage l’impossibilité évidente de la tenue d’un concert ou même d’une réception dans la même pièce, la rendant tristement inutilisable, hors occasions spéciales. Mais, enfin, il s’agissait d’une occasion spéciale : elle allait recevoir la nouvelle Chancelière ainsi que l’une de ses ministres… De quoi justifier le dérangement des poissons exotiques.

Dois-je comprendre que vous les recevrez dans…

Oui, dans la salle Chioné.

D’un simple geste agacé, elle congédia son bras droit. Elle avait mieux à faire que de s’occuper des moindres détails de la rencontre, de s’assurer du respect du protocole et autres âneries; il s’agissait du rôle de Malya, après tout, pas du sien, et elle n’allait aucunement souffrir plus de questionnements sur le sujet. Sa coiffure étant bientôt prête, elle se résolut à finalement choisir une couronne. Définitivement pas son diadème, d’ailleurs. Non, pas même la tiare… Elle devait aller pour plus fort, plus imposant, plus intimidant – oui, celle-là allait être parfaite…

Salmirassa, la dorée. Kheldar ?

L’amazone hochant de la tête, ouvrant une armoire pour en tirer l’objet demandé, l’interpelé s’avança, s’éloignant de la porte près de laquelle il faisait garde. Grand, mais plus petit que la moyenne hapienne, beau, mais moins que le commun de leur race, son maître espion compensait ses tares physiques par une franche loyauté et une impeccable compétence – une rareté. Maestro derrière l’élimination de ses ennemis, de la mort de sa famille proche et du terrible décès de feu son époux, le Prince-Consort, celui auquel elle ne s’adressait que par son titre, Kheldar, pouvait s’estimer heureux d’être de son cercle restreint – un cercle encore plus réduit qu’avant les purges. Outre lui, sur qui pouvait-elle vraiment compter ? Malya ? Oui, elle était fidèle. Isolder ? À peine. Il ne demeurait à ses côtés que par la promesse de sa couche, que pour l’opportunité d’être géniteur de la future Reine; de la future Impératrice, si elle avait de la chance. Au final, Kheldar était le seul à demeurer à ses côtés par honnête endoctrinement : élevé depuis son enfance dans la révérence des matriarches hapiennes, il la considérait divine – ni plus, ni moins.

Leur navette..?

Devrait arriver à destination dans les cinq prochaines minutes. Les Dragons patrouillent et le Haut-Commandant attend votre bon plaisir dans votre salon, Ereneda.

Bien, pensa-t-elle. Tout était prêt pour recevoir ses invités…

Malya, allez accueillir nos invités. Selon nos instructions, les portes s’ouvriront à vous lorsque nous serons prête à les recevoir. Que nul ne leur adresse la parole et que les Nymphées soient vides, outre votre présence. J’ai parlé.

Et j’obéis, Ereneda.

Se levant finalement, ceignant la couronne que lui présentait son amazone, l’Étoile du Soir traversa dans son salon, son prochain amant se levant en l’apercevant. Un homme charmant qu’elle espérait allait se montrer moins décevant que son prédécesseur, le neveu de Malya. Peut-être n’allait-elle pas avoir à le faire assassiner, lui.

-*-

La salle Chioné était glabre, dénuée de fioritures, uniquement complimentée par la texture finement burinée de ses murs, qui donnait l’impression frappante que ceux-ci étaient sculptés dans la glace. Le plancher, noir translucide, la lumière des chandeliers s’y reflétant, complétait l’illusion, téméraires étant ceux qui ne craignaient pas y glisser. Se dressant derrière l’unique trône surélevé, le seul mobilier visible de la pièce, les hautes fenêtres semblaient opaques, comme envahies par le givre. À vrai dire, l’illusion souhaitée par la première Reine-Mère était réussie : plus que dans toute autre salle du Star Home, les convives peu habitués trouvaient ce hall frisquet – parfois même, glacial. Méprise ? Pas vraiment. La température y était réglée plus basse que la moyenne du vaisseau, rendant ainsi les invités inconfortables; un artifice parfois utile… Il allait sans dire qu’il s’agissait de la chambre préférée d’Astarta. Perchée sur son trône immaculé, cette dernière était solitaire, unique occupante du dais. Quelques marches plus bas, Isolder et Kheldar patientaient, chacun s’étant choisi un côté, encadrant ainsi leur maîtresse. Au pied dudit escalier, une rangée d’amazones venaient compléter la réception - comme si une tentative d’assassinat pouvait seulement être commise au sein du Star Home.

Son Excellence la Chancelière de la République Galactique, Emalia Kira, Reine d’Ondéron, et l’honorable Ress Laz’ziark, Ministre de la Justice et Sénatrice de Balosar.

La voix du héraut transperça le silence et les portes de la salle s’ouvrirent. Première arrivée, Malya s’avança de quelques pas avant de s’incliner, cédant la place aux deux invités, allant se poser sur un côté de l’escalier. Du même mouvement, les amazones formèrent deux lignes parallèles entourant les deux républicaines, puis quittèrent la salle.

Il est coutume pour les requérants de s’in…

Astarta leva sa main, coupant sec le héraut dans son discours. Se redressant, elle adressa à son homologue un sourire des plus cordialement froids.

Nous ne voyons nul requérants devant notre trône en ce jour – seulement de potentielles amies. Bienvenue, Chancelière Kira, sur le Star Home – ou plutôt devrions-nous dire « rebienvenue », votre dernière visite n’étant pas si lointaine. C’est avec beaucoup de plaisir que nous avons appris votre élection…

Beaucoup de plaisir, et un peu de bile.

… et c’est tout le Consortium de Hapès qui vous adresse ses félicitations. Sans nul doute que la République ne pourra que profiter de votre jugement éclairé,
réussit-elle à dire sans aucun sarcasme visible. Avant que nous ne commencions nos discussions, une demande doit néanmoins vous être adressée.

Se taisant, Astarta laissa sa Grande Secrétaire brièvement parler.

C’est avec beaucoup de tristesse que la Consortium de Hapès vit le deuil de son Prince-Consort, décédé la semaine dernière. Craignant que la nouvelle ne s’ébruite et ne faisant confiance aux canaux habituels, le Consortium de Hapès vous demande gracieusement de bien vouloir accepter de transmettre la nouvelle par le biais de vos rapports quotidiens avec l’Ordre Jedi à la cousine du défunt, l’Ex-Chancelière et Maître Jedi Alyria Von.

Laissant une courte pause s’écouler, Astarta reprit la parole.

Ceci étant dit, nous avons beaucoup à discuter – et proportionnellement très peu de temps pour le faire. Il semblerait qu’après le Sommet, l’Empire n’ait pas véritablement compris l’ampleur du message lui ayant été communiqué et aurait décidé de s’enfoncer directement dans la direction contre-indiquée. Chancelière, quelle réponse la République compte-t-elle donner aux provocations impériales ? Soyez consciente que le Consortium entend aller jusqu’au bout de sa parole et faire tout ce qui est en son pouvoir pour supporter ses frères non-affiliés.

Aurait-elle dû s’adresser aussi à la Ministre ? Inutile. Lorsque l’on ne peut aplatir une coquerelle, autant l’ignorer plutôt que de s’épuiser l’esprit sur sa présence. De toute façon…

Elle n’était qu’accessoire – vilain accessoire, certes, mais accessoire tout de même.


Emalia Kira
Emalia Kira
Messages : 697
Eclats Kyber : 0
Emalia hocha la tête, mais ses pensées restaient imperméables à la nausée de Ress et aux aventures amoureuses du Sénateur de Bomor. Elle ne pouvait tout simplement pas cesser de penser à ce qui allait se produire dans quelques minutes. Comme un film joué à l’avance, la Chancelière élaborait tous les scénarios possibles et leurs conséquences directes. Que se passerait-il si Espara demandait l’aval de la République pour avoir des avantages sur les autres mondes neutres ? Si Espara prévoyait de provoquer l’Empire pour déclencher la guerre qui planait au-dessus d’eux comme une épée de Damoclès ? Si Laz’ziark poussait Espara dans ses retranchements au point que celle-ci refusât de continuer le dialogue avec eux ? A chaque fois, elle imaginait les conséquences et ses choix possibles, de manière à se préparer à l’avance un large éventail de décisions et de stratégies pour s’adapter à la discussion qui aurait lieu avec celle qui aspirait à faire partie des Grandes. Car c’était ainsi qu’Emalia le voyait : il y avait deux Grandes femmes qui dirigeaient la galaxie : l’Impératrice Sith et elle-même. L’amas Hutt n’était qu’un ramassis désorganisé d’aliens cupides et corrompus jusqu’à l’os, qui s’entretuaient probablement entre eux à longueur de temps. Qu’en était-il du reste de la galaxie ? L’Espace Bothan et des mondes neutres… Il pouvait y avoir une nouvelle puissance qui naîtrait. A la tête de laquelle, peut-être, l’Etoile du Soir. Une troisième Grande. Qui pour l’instant était aussi minuscule que lorsqu’Emalia s’était présentée pour la première fois à la Rotonde en tant que Sénatrice d’Ondéron. Elle était la preuve vivante que des ascensions fulgurantes étaient possibles : il faudrait se méfier d’Espara. Contrôler son émergence. Et s’en servir contre l’Empire.

Sur ce point, Ress et elles étaient effectivement d’accord. La Chancelière était rassurée d’avoir à ses côtés quelqu’un qui partageait son point de vue. Malheureusement, de nombreuses personnalités du Sénat, et même du gouvernement, s’accrochait encore à une vision naïve d’une République indépendante des évènements hors de leur territoire, comme si l’Empire n’était qu’un voisin bruyant qu’il fallait accepter. Elle se souvenait avoir elle-même eu la tentation de penser ainsi. Mais depuis qu’Ondéron avait été vendue, elle avait compris que l’Empire n’était rien d’autre qu’un prédateur.

Et jouer les proies n’était plus dans ses plans depuis longtemps.


***


Sous les yeux de la Chancelière, un poisson aux couleurs vives perturba un banc d’un milliard de petites créatures argentées, qui s’éparpillèrent avec panique dans l’eau d’un bleu céleste. La scène rappela à Emalia le Sénat lors de l’annonce de l’avènement d’un Empire Sith près à les manger tout crus. Décidément, elle ne pouvait plus apprécier aucun luxe sans l’associer à ses machinations politiques. Même sa robe de satin, pourpre comme le sang mais sans fioriture, était un choix symbolique : au Sénat, les tons clairs, neutres, pour montrer son professionnalisme. Ici, la couleur du sang pour montrer qu’elle était loin d’avoir peur. Sur Ondéron, ses dentelles aux couleurs vives pour rappeler qu’elle était bien toujours la Reine jeune et fraîche de leur planète. Et dire qu’auparavant, elle s’inquiétait tant de la couleur à la mode, d’assortir les tons avec les nuances de ses yeux et de sa peau en hiver, ou de ses cheveux nouvellement colorés ! Aujourd’hui, plus rien en elle n’était plus fait pour le plaisir, mais pour servir ses plans. Le luxe n’était plus qu’un outil, et plutôt que d’admirer les aquariums gigantesques pour mieux en féliciter l’Etoile du Soir, elle n’y voyait que l’étalage de richesses exotiques destinées à les prédisposer à quelque chose. Que souhaitait Espara ? Qu’elle se sentit noyée, ensevelie ? Ou tout simplement qu’elle oublie l’espace profond tout autour d’eux, et avec lui les menaces qu’il apportait de toutes parts ?
Et ce silence, que signifiait-il ? Etait-ce pour les angoisser ? Emalia esquissa un sourire – plus grand-chose ne lui faisait peur depuis qu’on avait attenté à sa vie et à celle de ses enfants. Ou plutôt, elle était constamment étreinte par l’anxiété, si bien qu’elle était devenue une amie apprivoisée.

Heureusement, l’attente ne fut pas trop longue, et la Chancelière, la Ministre et une garde militaire étroite fut invitée à se diriger vers la salle suivante. Ils passèrent de l’eau à la glace. Emalia repéra le conditionnement. On ne cherchait pas à les mettre mal à l’aise, mais on jouait avec leurs sensations. La Chancelière réprima un frisson en se déplaçant précautionneusement sur le plancher noir et translucide, sur lequel ses talons résonnaient comme des coups d’estoc infligés à une sculpture de glace.

Mais ce son était totalement oblitéré par la vue offerte à leurs yeux. L’Etoile du Soir sur son trône, vêtue d’un noir aussi sombre et luisant que le plancher, et sa couronne scintillante, des pics levés par le ciel comme un animal cornu aurait été prêt à la transpercer. Autour d’elle, ses proches et sa garde. A quoi servaient ici les soldats républicains et ces amazones ? Le danger était loin d’être physique. Il était abstrait. Il était dans la stratégie, dans l’alliance potentielle ou l’inimitié déclarée qui décapiterait leur futur à tous… Mais la tête de la République tenait bien mieux sur ses épaules que celle des mondes neutres, encore enfant quasi-imaginaire.

Lorsque les amazones quittèrent la salle, Emalia fit signe à la garde républicaine de les laisser. Ils ne seraient pas bien loin – probablement patienteraient-ils dans le salon aux aquariums, mais si Espara acceptait de parlementer sans ses amazones, alors la Chancelière en ferait autant. Un plus petit comité les mettrait plus à l’aise.

Heureusement, il ne fut pas requis que la Chancelière s’inclinât. Elle ne l’aurait pas fait de toute manière. Elle ne venait rien requérir. Elle venait donner, pour demander en contrepartie et seulement si elle y consentait en fonction de leur négociation. Toutefois, l’accueil de l’Etoile du Soir ne fut en rien agressif. Elle fut félicitée pour sa prise de fonctions, et l’ego d’Emalia eut le confort de penser que cette approbation était sincère. Toutefois, la requête de la grande secrétaire la surprit quelque peu : elle n’avait pas été mise au courant du décès d’une personnalité proche de la Reine Mère pendant son voyage, et était encore moins au fait d’une relation particulière entre Astarta Espara et Alyria Von. Elle ne laissa toutefois rien paraître de sa surprise.

- Je vous remercie, votre Majesté. C’est avec un plaisir tout particulier que je reviens à bord du merveilleux Star Home, et la perspective d’une collaboration à la hauteur de tant de prestige, débuta Emalia en accordant elle aussi un sourire avenant à la Reine Mère, mais aussi à la Grande Secrétaire et au Héraut, et enfin aux deux autres personnes présentes, dont elle ne savait quel rôle potentiellement importants ils pouvaient jouer auprès de l’Etoile du Soir. Je suis navrée d’apprendre le décès de votre Prince-Consort, votre Majesté. Mes condoléances s’associent à votre douleur, qui doit être grande en pareil instant.

Supposément grande. Malgré les tons sombres de sa robe, Espara n’avait pas tant l’air d’être affligée de chagrin. Mais peut-être qu’à sa place, Emalia aurait été plutôt rongée par la colère, l’amertume, ou le désir de vengeance. La Reine Mère allait se montrer déraisonnable en raison de ces circonstances particulières ? Et était-ce un mal ou un bien pour la République ?

- Votre honorable requête, bien sûr, est acceptée,
ajouta-t-elle en se reconcentrant sur l’objet de leur visite. Vous me voyez ravie de pouvoir entrer si vite dans le vif du sujet. L’Impératrice joue les provocatrices, et ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle ne veuille démontrer sa puissance sur des mondes sans défense. Toutefois, il est possible aussi qu’elle cherche à provoquer chez nous une réaction précipitée, afin que nous agissions avec une stratégie déficiente.

Emalia se mit à marcher lentement, main derrière le dos. Faire ainsi face à un trône n’était pas spécialement une disposition confortable, mais la salle était spacieuse et elle comptait bien profiter de ce luxe pour se sentir libre. Elle arpenta le plancher noir et ténébreux de son pas précautionneux, ses talons cliquetant à chaque mot important de son exposé.

- Nous avons ordonné à l’Armée Républicaine de se regrouper le long de nos frontières, en particulier près de l’Empire et de l’Espace Hutt. Les manœuvres sont en cours et visent bien sûr à nous défendre et bien sûr à dissuader l’Empire de nous approcher de trop près. La flotte de la LMP a été absorbée par l’Armée et est en cours d’investigation. Plus aucun vaisseau de cette organisation interplanétaire ne subsiste dans la zone des mondes neutres séparant l’Empire de la République.

La Chancelière pivota, leva les yeux vers l’Etoile du Soir, toujours juchée sur son trône.

- Toutefois, rien n’a été décidé pour le moment pour venir en aide aux mondes neutres, pour la simple et bonne raison que le Sénat est un organe particulièrement lent à prendre des décisions, que de telles modalités n’ont jamais été définies jusqu’ici et aussi… Parce que nos négociations à bord de cette station même, il y a quelques semaines, n’ont pu aboutir à un texte me permettant de soumettre notre alliance au Sénat.

Emalia lui adressa un sourire cordial.

- Je ne doute pas cependant que nous y parvenions ce jour. Si je me rappelle bien, nous étions parvenues à un accord géographique que je trouve pour ma part toujours très pertinent : une voie commerciale bordant la République et la reliant durablement aux mondes neutres, ainsi qu’une coopération financière et militaire. Comme vous l’avez vous-même fait remarquer, nous ne disposons toutefois que de peu de temps pour nous organiser avant que l’Empire n’empiète sur ses territoires et se les approprie. Cela nous confère un avantage certain : celui de pouvoir plier rapidement les mondes neutres à nos volontés.

La Chancelière se remit à faire les cent pas, avec la lenteur du prédateur qui se meut dans la jungle d’Iziz.

- La République, bien entendu, doit pouvoir avoir des contreparties suffisantes. Autrement, le Sénat ne saurait accepter un accord dont il ne voit pas l’avantage, soupira-t-elle comme si les sénateurs, ces enfants gâtés, seraient particulièrement difficiles à convaincre si Espara était trop gourmande… Ce qui en soi n’était pas un mensonge. Si nous devons concevoir une alliance militaire afin de défendre les mondes neutres de l’Empire, il va de soi que la République demandera elle aussi à pouvoir requérir l’aide des forces militaires et de police des mondes adhérents et de la coalition en cas de conflit extérieur.

Admettons que l’Empire ne fût plus une menace un jour ou l’autre : le voisin que représenterait la coalition des mondes neutre pourrait-il se retirer dans sa tour d’ivoire en cas d’attaque provenant de l’Espace Hutt ? Certainement pas. La solidarité devait marcher à double sens.

- Si nous aidons financièrement la constitution d’une armée de ces territoires neutres, de même, la République exigera que celle-ci puisse être réquisitionnée temporairement en cas d’urgence interne ou externe. Vous comprendrez certainement que nous ne pouvons nous permettre, en des temps si durs, de donner sans espérer pouvoir avoir aucun retour sur investissement.

Nouveau sourire cordial. Oh, oui, elle pouvait être dure en affaires. La Ministre allait-elle renchérir sur toutes ces choses ? Oui, elle allait en venir à l’aspect juridique.

- Nous devons aussi parler de l’alliance liée à l’information contre l’Empire. Nos services de renseignements devront travailler de concert si nous souhaitons nous défendre face à eux, et face à tout autre ennemi potentiel. Ce qui implique que nos services également judiciaires doivent collaborer, eux aussi : vous ne verrez certainement pas d’inconvénient à ce que les mondes neutres participent à l’arrestation de criminels recherchés par la République sur leur territoire, n’est-ce pas ? Bien entendu, la République en fera autant au sein de son espace pour toute personne ou entité ayant bafoué les lois de la coalition neutre.

Petit détail, mais pas tout à fait anodin : ce faisant, Emalia ambitionnait d’étendre l’influence de la République, et son périmètre d’action.

- D’un point de vue économique, enchaîna-t-elle sans attendre, la construction de la voie commerciale de Hapès se faisant avec une grande part d’investissement républicain, nous souhaiterons que les bénéfices soient à la hauteur de notre contribution initiale. Le clan bancaire intergalactique pourrait être le garant dans la durée d’une répartition des richesses en fonction des apports initiaux de chacun, afin qu’un organe extérieur puisse départager les parties en cas de litige économique.

Si le Consortium de Hapès était particulièrement riche, ce n’était pas le cas de tous les mondes neutres en bordure de la frontière, qui ne pourrait pas contribuer à la hauteur des mondes républicains opulents. Etait-ce injuste de vouloir un peu plus de la moitié du gâteau si on apportait un peu plus de la moitié des ingrédients ? Pas si on offrait des voies d’évolution à ces mondes neutres, qui à force de travail et de bonne volonté conforme aux valeurs de la République, pourrait s’arroger à l’avenir de nouvelles parts, plus équitables.

- Bien sûr, ces mondes resteront tout à fait libres de rejoindre la République dans les années à venir afin de bénéficier de meilleurs rendements économiques, s’ils le souhaitent.

Autrement dit, pas de clause empêchant les mondes de quitter la coalition neutre dans l’organisation prévue par Espara. Est-ce que ça allait lui plaire ? Emalia eut un visage laissant présager qu’elle ne pensait pas que ce fut si dramatique. Elle interrompit toutefois sa marche après s’être de nouveau positionnée devant l’Etoile du Soir.

- Ah oui, à propos des modalités d’un « gouvernement » ou de tout autre organe dirigeant les mondes neutres… La République ne saurait soutenir, bien entendu, la formation d’un rassemblement qui ne se produise pas de manière démocratique. Le gouvernement que j’ai mis en place est particulièrement attaché à la voix du peuple, à l’indépendance des êtres. N’est-ce pas, Madame Laz’ziark ?


Elle avait joué sa partie du morceau. La partie raisonnable. Serait-ce déjà trop pour Espara ? Ress allait-elle en rajouter, ou bien laisser mijoter l’Etoile du Soir pour qu’elle fût à point pour la phase suivante ?
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
skin made by
© jawn