Jake avait fini le droïde à coups de crosse. Pas spécialement délicat, mais au moins ça fonctionnait. Ils formaient une belle équipe d’improvisateurs, se dit Lloyd.

- Y’a pas d’quoi, répondit-il au mercenaire avec une moue vaguement gênée.

Ils ne se connaissaient pas très bien mais le Hapan aurait bien voulu éviter de saboter l’arme de celui qui était sensé les défendre. Il avait fallu de longues minutes pour mettre un terme à la vie du droïde agressif. Combien y en avait-il dans cette station qu’ils devraient encore affronter ?
Quant à Mat’, peut-être était-elle aussi déçue, mais en tout cas elle n’en laissa rien paraître. Elle souriait même et lui adressa un clin d’œil complice qu’il ne savait pas trop comment interpréter.

- De rien, plaisanta-t-il finalement, Jake reniflait un peu alors…

Comme le leur avait appris le mercenaire, autant détendre l’atmosphère dans des situations un peu compliquées – ça avait marché contre la bête de l’océan !

Lloyd obéit à son capitaine sans rechigner. Le guide était lourd, mais Jake avait besoin de ses mains libres pour les défendre, au cas où. Le Hapan tournait et retournait les possibilités offertes par un système utilisant l’eau comme mécanique pour la station : couplée à une électricité classique – dont l’eau était conductrice – probablement détenaient-ils là une énergie écologique et à la fois en quantité quasi illimité. Judicieux…

- Plus vite on trouv’ra, plus vite on s’ra rentré, répondit le Hapan à sa capitaine.

Et pour sa part, il n’était pas fatigué. L’adrénaline, sûrement, et la curiosité de cette station si étrange, le tenait fortement éveillé. Et puis, leur mouvement lui donnait une vague impression de sécurité.

Alors qu’ils venaient de passer un sas resté grand ouvert, des chuintements se firent entendre, puis un grincement de mécanique rouillé. Le son se termina par un grand « bang ! » qui fit sursauter Lloyd. Il jeta un œil en arrière.

- Hé ! La porte s’est refermée ! s’exclama-t-il, éberlué.

Il n’y avait pourtant d’autres présences qu’eux dans ce couloir. Quelqu’un avait-il commandé cette fermeture à distance ? Si c’était le cas, cela voulait dire que quelqu’un (ou quelque chose) dans son bureau savait où ils étaient. Et peut-être même pourquoi ils étaient là.
Lloyd échangea un regard inquiet en direction de ses acolytes : pouvaient-ils se parler ou étaient-ils même sur écoute ?

D’autres chuintements se firent entendre et Lloyd songea soudain qu’il serait tellement facile de les enfermer entre deux portes de couloir et de déverser l’eau du système pour les y noyer… Le Hapan jeta un œil au plafond en se demandant par où l’air s’échapperait, dans ce cas. Ses yeux accrochèrent une bouche d’aération, et espéra qu’ils n’aient pas à en venir à se déplacer à quatre pattes à l’intérieur. Déjà parce que cela voudrait dire que quelqu’un essayait de les tuer, et ensuite parce qu’ils ne pourraient certainement pas emmener le guide avec eux dans ces conditions…

Lloyd se pencha vers la capitaine, qui soutenait l’autre bras du guide.

- Si quelqu’un essaie de jouer avec nous, il va falloir feinter, lui murmura-t-il.

Leur faire croire qu’ils venaient pour autre chose, peut-être ? Ou du moins convaincre d’une manière ou d’une autre qu’il ne fallait pas les tuer… Enfin, peut-être n’était-ce pas une bonne idée. Peut-être que personne ne les observait d’ailleurs, et que tout cela n’était qu’une coïncidence ?

Lloyd essaya de sentir, par la Force, s’il y avait une présence non loin d’eux. Mais il lui semblait qu’il n’y avait qu’eux quatre au milieu de ses structures métalliques.
Le Hapan haussa les épaules en signe d’impuissance et attendit les ordres de son capitaine.

Les méninges de Lloyd s’activaient sévère. Il avait beau leur avoir fait prendre une jolie douche et être momentanément heureux d’avoir découvert le mystère de ses tuyaux courant le long des coursives, cela ne résolvait pas du tout leur problème à eux : trouver ces fichues informations et se carapater au plus vite. Malheureusement, ce n’était pas pour tout de suite : quelqu’un semblait décidé à leur mettre des bâtons dans les roues – voire à les éliminer. Jake n’avait pas l’air affolé du tout et par conséquent, le Hapan se devait d’essayer de rester décontracté, lui aussi. Sauf que c’était légèrement moins dans sa nature que pour le mercenaire et Lloyd sentait la nervosité commencer doucement à lui tordre les entrailles. Il n’avait même pas eu envie de faire remarquer Jake qu’il était bien évident que si tout le monde avait disparu, c’était que quelque chose clochait, sinon, on les aurait pas appelés…

- Heu, l’eau monte.

Triste constat. Cela lui rappelait soudain qu’ils étaient enfouis aux fins fonds d’un océan.

Mat’ eut de la présence d’esprit avant eux. Lloyd garda chargé sur son épaule le guide (il prenait des kilos au fur et à mesure ou quoi ?) tandis qu’elle installait un dispositif de son cru afin d’atteindre la seule grille du couloir. Heureusement, la bouche d’aération était grosse et ils pourraient en effet s’y faufiler – même si Lloyd aurait probablement besoin d’aide pour hisser le guide jusque là-haut. Mais Mat’ avait déjà pensé à tout : une corde pour monter leur inerte hôte…

Le temps pressait. Lloyd posa le guide assis par terre – les fesses dans l’eau, tant pis – et grimpa à son tour sur la caisse de métal. Il tâta la grille d’aération pour voir s’il ne pouvait pas tout simplement l’arracher mais elle était vissée solidement. Heureusement qu’il avait son sac… Il en tira rapidement un tournevis plat avant de s’attaquer aux vis. Il jetait parfois des regards derrière lui pendant son œuvre – lente et pas très intéressante tandis que l’eau parvenait presque aux genoux de ses coéquipiers.

- Me regarde pas comme ça Jake, j’fais aussi vite que je peux.

Mais c’était un poil long quand même. Pendant ce temps, ses coéquipiers avaient pu attacher le guide à l’aide de la corde.
Finalement, la grille céda et Lloyd la jeta négligemment par terre – ou plutôt, dans l’eau.

- C’est bon ! s’exclama-t-il soulagé, avant de grimper dans le petit orifice étroit et de grogner de frustration.

Le conduit était fort étroit. Ils pourraient s’y déplacer à quatre pattes, mais ils ne pourraient guère faire grand-chose de plus. Lloyd apercevait au loin un embranchement. L’eau était-il sensé se déverser dans ces conduites aussi ? Ce ne pouvait pas être possible…
En se cognant et se contorsionnant, le Hapan parvient à changer de sens pour repasser la tête dans la pièce où les autres tentaient déjà de le suivre. Grâce au système de Mat’, ils purent hisser le guide – non sans peine et sans manœuvre – puis se hisser à leur tour. Ils finirent entassés dans le petit conduit à se demander si l’eau allait les poursuivre jusque là. En tout cas, ils étaient de toute façon encore plus trempés qu’avant.

- Bon ben, je vous propose qu’on choisisse les chemins qui vont vers le haut, c’est plus prudent…

Lloyd se voyait mal descendre dans un conduit pour que l’eau les prenne au piège par le haut. Et l’avantage de ce chemin était qu’ils évitaient désormais toute caméra renseignant leur ennemi sur leur position. Le Hapan tenta de jeter un coup d’œil derrière lui pour apercevoir ses coéquipiers et évaluer s’ils étaient d’accord. Ils n’avaient pas vraiment beaucoup le choix, de toute façon.

- Je pense aussi qu’il nous faut atteindre le système central, lâcha-t-il en ouvrant la marche à quatre pattes. Je pourrais peut-être désactiver les mauvaises blagues de celui qui nous traque et on pourra peut-être télécharger les données de l’employeur. Encore faut-il trouver ce fichu système central…

Les coursives étaient légèrement grasses, ce qui n’était pas très agréable sous les mains. En plus, ils étaient un peu bruyants là-dedans. Leur corde était tendue à chacune de leurs avancées à cause du guide un peu négligemment traîné.

- J’trouve même qu’on devrait lui d’mander une prime si on s’en sort, pour lui avoir ramené son émissaire en vie, non ?

Enfin, ce serait la Capitaine qui aurait le dernier mot à ce sujet, pas Lloyd ni Jake. Mais Mat’ était très à leur écoute, trouvait-il, peut-être un peu trop. Si l’équipe venait à grandir, les autres membres ne seraient peut-être pas autant de bonne foi que Jake et le Hapan, et pourrait profiter de sa gentillesse… Mais bon, ils étaient un peu ses seconds, pensait-il, ils sauraient la défendre. Une jolie motivation pour eux, finalement, Mat’ savait mobiliser les siens autour d’elle…

Et dire qu’elle n’était qu’une adolescente poursuivie par la police si peu de temps auparavant, et maintenant elle lui paraissait plus vieille que lui…

Le Clonk ! de la tête de Lloyd percutant le haut du conduit le rappela à la réalité. Le premier embranchement s’offrait à eux, et le Hapan regarda dans les directions possibles.

- A droite ça descend, annonça-t-il. A gauche, ça monte… Mais il y a une hélice !

Le froid commençait doucement à gêner Lloyd. A cause de ses vêtements et cheveux humides, la température de son corps s’était effondrée et le Hapan devait faire un effort pour ne pas grelotter. De toute façon, il fallait rester qu’il reste concentré sur leur progression, et cela lui permettait de ne pas trop penser à ses membres engourdis par la position inconfortable et la fraîcheur. Néanmoins, il commençait à s’inquiéter vaguement de l’état de santé du guide : un coup sur la tête, à moins d’une commotion cérébrale, il s’en remettrait. Mais s’ils lui rajoutaient un coup de froid sur ça, ce n’était peut-être pas une bonne idée.

Toutefois, il y avait des priorités : survivre aux idées ingénieuses mais légèrement risquées de Jake, par exemple. Pourtant : l’opération s’avéra être un succès. Un succès bruyant certes, mais le ventilateur n’avait effectivement pas résisté à l’emmêlement de la corde autour du rotor.

- Ah, ben tu vois quand tu veux ! lâcha le Hapan au mercenaire en guise de reconnaissance mal assumée tandis que Mat’ repartait en tête de cortège.

Lloyd ajouta néanmoins une petite tape de gratitude dans le dos de Jake en suivant leur capitaine. De l’autre main, il s’efforçait de traîner leur inutile guide. Il était de bonne humeur, malgré la situation. Peut-être les remarques de Mat’ à leur égard y étaient-elles pour quelque chose.

- Ouais mais si on coupe l’alim’, ça devient dur de récupérer les données… Faudrait les trouver avant, si tu veux mon avis.

Le cortège avait continué son ascension sur plusieurs mètres. A plusieurs reprises, des courants d’air frais les avaient rassurés – mais bien refroidis aussi – et Mat’ avait su les orienter dans la bonne direction. Sa débrouillardise fascinait Lloyd. Chez lui, les femmes étaient plutôt du genre à faire faire et il s’était toujours imaginé qu’une petite Twi’lek voleuse comme Mat’ serait plutôt du genre à réussir dans la vie en parvenant elle aussi à faire faire aux hommes ce dont elle avait besoin. Il s’était trompé sur sa capitaine : elle semblait considérer Lloyd et Jake comme ses égaux. C’était d’autant plus perturbant que le Hapan n’avait connu que des situations inégales mais inversées entre Hapès et Coruscant. Être sur un pied d’égalité lui était peu familier mais il tâchait de n’en rien montrer, puisque Jake acceptait la situation avec une facilité déconcertante. Quelque part, il se demandait ce qui aurait pu mettre ce mercenaire-là mal à l’aise, de toute façon.

La voix de Mat’ s’était étranglée lorsqu’elle était arrivée devant une grille. Lloyd était prêt à intervenir pour déboulonner l’histoire, mais il comprit que le problème venait d’au-delà de ses quelques bouts de ferraille.

- Hé ? Qu’est-ce que tu vois ?

Mais il vint constater le décor par lui-même. Il eut la sensation que son estomac était tombé au fond de ses entrailles quand son cerveau réalisa ce qui s’étalait devant eux : une rangée de cadavres. Et dire qu’il avait pensé que l’odeur âcre provenait d’un simple encrassement des filtres du système d’aération…
Lloyd réprima un haut le cœur avant de se reculer. Il se plaqua contre la paroi sans un mot pour laisser Jake constater les dégâts par lui-même. Etrangement, Mat’, elle, n’avait pas momentanément perdu l’usage de la parole à son instar. Le Hapan l’écouta pour se raccrocher à quelque chose de moins perturbant que les morceaux de chair et d’os qu’il venait d’apercevoir.

Malgré ses tripes qui semblaient se tordre pour pouvoir sortir par son œsophage, Lloyd recouvrit enfin l’usage de la parole.

- Qu-quoi ?! Tu descends pas là-dedans, t’es folle ! s’écria-t-il, scandalisé.

De toute façon, il n’avait pas encore ouvert cette grille. Et il ne l’ouvrirait pas si leur capitaine persistait dans ses envies suicidaires. Même pour Jake, cela lui paraissait invraisemblable. Il interrogea le mercenaire du regard, mais aucune meilleure idée ne se pointait.

- La bestiole que t’as abattue tout à l’heure, c’était assez coriace, quand même. Et comme j’ai flingué ton arme… Il va falloir vraiment être prudent.

Il n’aimait pas le reconnaître, mais l’ennemi était plus puissant qu’eux. A contrecœur, le Hapan se mit finalement à s’occuper de la grille. Heureusement, les Mon Calamari avaient eu le bon sens d’utiliser un métal qui ne rouillait pas : avec l’humidité ambiante, la station aurait été un gouffre financier en termes de remplacement de pièces et en plus, ils auraient eu du mal à pouvoir démonter ce type d’installation.
La grille céda au bout de trois minutes, au terme desquels Lloyd n’avait toujours pas trouvé de meilleure solution que celle de Mat’. Mais tant qu’elle ne descendait pas en première, cela lui conviendrait. Sauf que si Jake se faisait dégommer, ils se retrouveraient tous les deux et il ne donnerait alors pas cher de leur peau…
Lloyd retint la grille et s’arrangea pour la faire entrer à l’intérieur de leur conduit. Il ne tenait pas spécialement à signaler leur position en faisant un boucan d’enfer.

- Il faut qu’on couvre Jake, signala Lloyd, la voix tendue.  

Le Hapan s’écarta pour le laisser passer. Il avait un mauvais pressentiment et pour une des rares fois, s’autorisa à sonder discrètement la Force pour percevoir les dangers qu’ils couraient…
Mais savoir que si tout se passait bien il serait obligé de les suivre près de ce tas de morceaux humains et aliens puants l'empêchait d'utiliser ses pouvoirs convenablement.

Si Lloyd admirait le courage de Jake, il se demandait parfois s’il n’avait pas été bercé trop près du mur étant petit : le mercenaire s’était jeté au bas de l’ouverture en piétinant les cadavres l’air de rien, tandis que le Hapan tentait encore à gros efforts de maîtriser les nausées qui menaçaient à tout moment de faire craquer son malheureux estomac. Heureusement vide.
Lloyd parvint finalement à pointer le bout de son nez par le trou créé par la grille et prendre sur lui pour observer ce qui se tramait là. Pour l’instant, rien, si ce n’était ce tas immonde de Maccabées. Quoique Jake leur avait trouvé une utilité : certains d’entre eux portaient encore de quoi se défendre et le mercenaire en tira une longue arme avec un visage illuminé d’une joie extatique.

Soudain, leur regard à tous fut happé par le couloir mal éclairé du bout de la pièce. Un drôle de bruit retentissait tandis que Jake allumait nonchalamment sa cigarette. Poussé par l’adrénaline, Lloyd suivit l’ordre sans ronchonner et se jeta à son tour dans la pièce à la recherche d’une arme un peu meilleure que son petit blaster. Il extirpa avec une mine dégoûtée une arme à feu portant la mention T18 un peu effacée. Le calibre avait l’air assez gros, et la jauge affichait la moitié de la charge. Ce devait être mieux que ce qu’il avait…  

… mais il n’y eut pas assez de temps pour comparer. Le couloir avait brusquement vomi une masse grouillante de créatures pas franchement sympathique, aux gueules pleines de temps et yeux étrécis par la cruauté. Sans réfléchir, Lloyd braqua son arme devant lui et fit feu. Il continua à tirer tout en se rabattant vers le mur opposait à celui où Jake s’était plaqué. Mat’ avait ingénieusement bâti un petit rempart de cadavres – la débrouillardise de sa capitaine était vraiment sans limite. Il n’aurait pas eu les tripes de faire une chose pareille lui-même, mais lui était reconnaissant de se montrer largement à la hauteur des deux brutes qu’ils étaient. Le mercenaire, quant à lui, avait l’air d’avoir fait ça toute sa vie. Peut-être que c’était le cas, maintenant qu’il y pensait.
Lloyd trébucha une fois sur une main putréfiée mais se rétablit heureusement rapidement pour continuer à tirer tout en rejoignant la Twi’lek derrière son barrage improvisé. Mais les bestioles arrivaient toujours et Lloyd n’en abattait pas du tout autant que Jake. Avec stupeur, il vit l’une des créatures à atteindre le mercenaire – mais l’instant suivant, un flot d’un liquide noir gicla autour de Jake et Lloyd comprit qu’il s’était défendu autrement.

- Arrange-toi pour pas mourir tout court, grogna Lloyd en réponse à la plaisanterie, car pour sa part il n’avait plus envie de rire du tout.

Mat’, elle, semblait dans le même état que Jake, pourtant. Quelle était cette étrange euphorie qui s’emparait d’eux, alors qu’il était terrifié à l’idée que leur défense cède et qu’ils se fassent tous dévorer et démembrer comme les êtres qui leur servaient de boucliers ? Mais il ne fallait pas penser à cela maintenant, non. Jake et Mat’ riaient avec la mort, tandis qu’il tenait la main de la Twi’lek (qu’elle était venue chercher toute seule !).
La dernière des créatures venait d’être abattue, il avait presque du mal à y croire. Il resta un instant bouche bée et son arme toujours braquée devant lui, persuadé que ce n’était qu’un gentil répit avant une nouvelle coulée de créatures. Mais elles ne vinrent pas, et Mat’ s’évertuait à pousser une porte qui refusait de céder.

- Laisse tomber Mat’, s’entendit-il dire. Des pistons à eau la maintiennent ouverte, on y arriverait pas même à trois sans casser le mécanisme.

Le Hapan désigna le haut de la porte coulissante du menton, pour montrer le fameux mécanisme. Le seul moyen devait être d’utiliser le système nerveux de la station… Sans lâcher son arme, Lloyd s’élança au pas de course vers le vieil ordinateur – mais d’une taille imposante – qui trônait à l’opposé de la pièce. Il allait devoir faire face à la sécurité de ce système, encore une fois, et ce ne serait pas facile d’extraire des données… Même fermer cette fichue porte, il serait peut-être délicat d’identifier l’objet…

Mais à peine Lloyd posa-t-il un doigt sur la commande de connexion que la porte se ferma avec un grondement impérieux. Le Hapan croisa les regards étonnés de ses coéquipiers et tourna ses paumes vers le plafond en signe d’innocence.

- Non mais j’ai rien eu le temps de faire, c’est pas moi !

Il aurait pourtant aimé être aussi efficace que cela !

Un grésillement le fit se retourner vers l’écran. Des lignes instables s’affichaient par intermittence, jusqu’à ce que soudain, un visage de femme apparût. Sans couleur, parfaitement symétrique malgré les quelques pixels morts qui tâchaient sa peau, ses pupilles et ses cheveux. Certainement pas une créature pouvant exister dans la vraie vie, décida Lloyd, vaguement mal à l’aise par ce regard vide qu’elle braquait sur lui.
Il allait se pencher sur la commande mais à ce moment, une voix s’éleva, étrangement caractérielle. Folle. Pour une intelligence artificielle, son comportement était bien étrange. Quant à Lloyd, il avait l’intuition que ce genre d’IA était un bijou de la technologie. Qui avait peut-être été un peu trop bidouillée, visiblement, car elle prenait bien des libertés…

- Hé mais.. commença-t-il avant de s’interrompre, indécis, avant de reprendre avec indignation. C’est vous qui avez essayé de nous tuer ?!

La voix émit un rire jubilatoire. Vraiment très anormal. Le Hapan échangea un nouveau regard avec ses compagnons, tout aussi désemparés que lui. Au moins, maintenant, la porte était fermée, il ne pourrait pas leur arriver grand-chose de plus dans l’immédiat…
C’était sans compter les plans de l’IA.

- Vous serez incapable de rouvrir cette porte par la force, expliqua la voix toujours aussi enthousiaste. Et je doute que le gaz ne se propage pas dans les conduits d’aération puis dans les autres pièces, d’ailleurs.
- Le gaz ?
- Oui, le gaz mortel que je vais répandre si vous ne résolvez pas correctement mon énigme. Le monoxyde de Phryk est incolore et inodore, mais pas tout à fait indolore, si vous voyez ce que je veux dire.

Lloyd sentit son estomac se serrer encore une fois. Il commençait à en avoir rudement marre, de cette station. Et si tout cela n’avait été qu’un vaste piège ? Non, ce ne pouvait pas être, l’employeur n’aurait pas envoyé son guide dans ces conditions…

- Mais ce n’est pas ça l’énigme. Sur Alderaan, Coruscant et Corellia, je passe à intervalles différents, je suis pourtant prévisible.

Le visage stoïque bougeait les lèvres lorsque la voix parlait sur l’écran, mais étant pourtant en total discordance avec la voix pleine de jubilation. Cette IA avait vraiment subi des dommages… Et malheureusement, serait probablement têtue comme un bantha.

Lloyd se retourna vers Jake et Mat’. Il n’avait aucune idée de la réponse.

Voilà donc que c’était le mercenaire aux muscles ronflants qui leur trouvait la réponse à une énigme. Il n’y avait vraiment plus rien qui tournait rond, dans cette station. La preuve en était cette IA complètement timbrée. Lloyd avait du mal à déterminer si elle éprouvait vraiment de la sympathie pour leur trio ou si elle se moquait d’eux. En tout cas, une chose était certaine : tant qu’ils continueraient à l’amuser, elle ne les tuerait pas. Dans une certaine mesure, donc, ils pouvaient gagner du temps. Le temps de trouver une manière d’être plus maline qu’elle…

Eau, air, électricité. Lloyd se muait les méninges en silence. Electricité, énergie, foudre…

- Heu, les nuages ? essaya-t-il en ne faisant que murmurer, de peur de se tromper. Les nuages sont faits d’air et d’eau et la foudre entre eux…

Il n’avait pas parlé assez fort, visiblement, car l’IA ne parut pas l’entendre. Il n’était pas sûr de sa réponse, de toute façon, mais cela lui donnait une indication intéressante : l’IA n’avait pas une ouïe très fine. Il y avait fort à parier qu’elle utilisait les microphones des caméras dans les différentes pièces en guise d’oreille, évalua-t-il, et ils n’étaient pas très puissants. Un avantage pour eux, mais il ne fallait pas jouer avec le feu : s’ils faisaient trop de messes basses, l’IA se douterait d’un complot en constatant que leurs lèvres remuaient. A moins qu’ils ne prennent garde à se mettre dos aux caméras lorsqu’ils…

Lloyd interrompit sa réflexion lorsque Mat’ prit la parole avec une douce assurance. Il fut étonné de la capacité de la Twi’lek à se transformer selon les situations, et cela ne le rassurait pas spécialement… Sauf en cet instant précis, où toute l’attention de l’IA s’était portée sur elle. Il l’écoutait distraitement quand soudain…

- LE COURANT ! s’exclama-t-il, triomphant avant de s’apercevoir que Jake le toisait. Bah ouais, le courant, comme courant d’air, courant d’eau…

Il se tut, conscient que si le mercenaire le regardait avec ces yeux-là, c’était plus pour lui intimer de la fermer que pour en savoir plus sur ses réflexions. En effet, l’IA était toute concentrée sur le discours de Mat’… Et à la grande surprise de Lloyd, elle marchait complètement dans le plan de Mat’. Le Hapan en resta bouche bée et croisa le regard de la « face de pixels » sur l’écran. Cette dernière eut un sourire mécanique auquel Lloyd tâcha de répondre par une grimace – comment ça «  danseuse verte » ?!

- C’est bien ça. Félicitations ! En voilà un qui aime jouer, n’est-ce pas ?
- Oh, heu, oui, balbutia le Hapan pris de court avant de se reprendre. Vous repenserez à jouer un peu avec nous, quand on sera remontés, hein ?
- Oh oui, bien sûr ! Que c’est chou. Je ne vous oublierai pas, nous jouerons. Mais il faut travailler d’abord, humanoïdes. Nous avons de grandes choses à construire !

Lloyd acquiesça vivement, mais il lança un œil inquiet à Jake. Ils emboîtèrent le pas à Mat’ qui passait dans la salle suivante… C’était une pièce sombre mais dont une baie vitrée immense offrait un spectacle à couper le souffle : l’océan Mon Calamarien dormait là, paisiblement devant eux. Quelques mammifères marins étaient parfois visibles, et Lloyd pria intérieurement pour que ne revienne pas leur rendre visite l’ami qui les avait joyeusement accueilli lorsqu’ils s’étaient immergés dans l’océan. Quand il put enfin détacher son regard de l’écran bleu magnifique et profond, Lloyd reporta son attention à l’intérieur de la pièce. Une série de moniteurs étaient alignés, dont certains munis de claviers et plaquettes tactiles. De nombreux fils et tuyaux semblaient les alimenter depuis le sol et le plafond. La salle de contrôle ! Ils l’avaient atteinte, finalement. D’une bien étrange manière, certes…

- Bon alors, heu, ça tombe bien, on a apporté de quoi craquer ça… fit-il en tendant la main vers Mat’ pour quelle lui donne de nouveau la clé sur laquelle se trouvait son programme de hacking.

Comme ils l’avaient fait pour la salle des plans, ils branchèrent l’appareil sur l’une des consoles et lancèrent le programme. L’IA riait étrangement. Elle paraissait joyeuse, mais nerveuse également.

- Alors, alors ? Pourquoi est-ce si long ? Les facultés de calcul de mes systèmes auraient certainement déjà trouvé l’algorithme déterminant la clé de sécurité !
- Nous ne pouvons pas nous servir de vos facultés pour déverrouiller le système, expliqua Lloyd avec précaution, mais une pointe d’angoisse apparaissait dans sa voix. Si le système s’attaque à sa propre sécurité… disons que cela forme une boucle d’attaque-défense qui risque de mettre en danger… le bon fonctionnement de l’ensemble.

Il avait failli dire « l’équilibrage », mais avait changé ses mots au dernier moment : cette IA n’était plus équilibrée depuis longtemps. Etait-ce dû à ce type de manœuvre ? S’était-elle corrompu elle-même, persuadée de sa toute-puissance ? Certainement, cette intelligence avait une faille qu’elle dissimulait bien et que Lloyd commençait à comprendre. Quant à Mat’, elle avait d’emblée trouver un moyen de s’emparer de la faiblesse issue de cette faille : un manque évident de discernement.

- Je le sais, répondit l’IA. Vous êtes de loin les plus intelligents que l’on m’ait envoyés jusqu’ici.

Penser que cette chose était à tout instant capable de changer totalement d’avis à leur sujet procura à Lloyd un frisson qu’il tenta de dissimuler en reportant son attention sur le programme en marche. Ce dernier tentait, rapidement certes, des milliers de combinaisons possibles pour la clé de sécurité. Et puis soudain, il y eut un petit bip et la voix explosa de joie.

- CELA A FONCTIONNE, N’EST-CE PAS ?
- Oui… oui, affirma Lloyd en se penchant sur le moniteur le plus proche après avoir sursauté.

Pourquoi tant de surprise ? L’IA n’avait visiblement pas accès à tout ce secteur, en particulier ce qui se passait dans certaines zones de contrôle. Pouvaient-ils la manipuler de là, ou bien était-ce un risque trop grand ?
Lloyd jeta un coup d’œil à Mat’ et chuchota du bout des lèvres un « viens voir » en espérant que cela ne paraisse pas trop suspect.

- Alors nous allons télécharger en deux exemplaires histoire d’être certains d’avoir une sauvegarde de secours, au cas où la première serait corrompue…
- Oui, oui, triangulation des supports, c’est parfait. C’est exactement ce que j’avais en tête, bien sûr…

Lloyd montra à Mat’ du doigt, sur l’écran, les différentes options que proposaient le moniteur tout en restant penché dessus, histoire de masquer de son corps les lignes que les caméras auraient pu lire…

Lloyd tourna la tête vers Jake et fit des yeux ronds qui se transformèrent bientôt en éclairs avertisseurs. Si le mercenaire se mettait à râler aussi que c’était long, autant directement dire à l’IA qu’ils étaient inutiles et qu’il fallait mieux les éliminer tout de suite !
Pas le temps de s’attarder sur ces bêtises, jugea toutefois le Hapan en se repenchant sur la console. Heureusement, Jake avait finalement trouvé une astuce pour faire patienter l’IA en lui posant une colle. Evidemment, la devinette ne fut pas au goût de la machine, mais Lloyd n’écoutait que d’une oreille. Le mercenaire était assez malin pour ne pas énerver trop leur ennemi – après tout, c’était à lui de les défendre si de nouvelles créatures débarquaient. Or, Jake était probablement amateur de défis et peut-être même légèrement inconscient, mais il n’était pas totalement fou non plus.

Le Hapan fronça les sourcils et cligna des yeux avant de comprendre que l’orthographe de Mat’ laissait juste un peu à désirer. Il oubliait parfois qu’elle avait eu une vie… Un peu spéciale. Il avait envie de lui poser des questions sur comment elle avait grandie, parfois, mais il avait peur de se heurter à sa pudeur. Fallait espérer qu’ils aient le temps d’en parler un jour. Vivants, très loin d’un océan.
Lloyd exécuta toutefois les ordres de sa capitaine sans rechigner. Mais les données, très volumineuses, prirent de longues minutes pendant lesquelles il sentait son sang battre à ses tempes.

Son cœur manqua brusquement un battement quand s’afficha à l’écran la phrase fatidique. Leurs respirations restèrent suspendues au-dessus de l’alerte. A son grand désespoir, l’IA perçut immédiatement que quelque chose n’allait pas.

- QUE SE PASSE-T-IL ? aboya-t-elle tandis que Lloyd déglutissait en rendant à Mat’ son regard interrogateur.
- Hum… Hé bien… Nous avons pu tout copier sauf… Une partie des données a été cryptée à un niveau de sécurité supérieur.

Il s’attendait presque à subir une tempête dans l’océan. Il voyait déjà des centaines de créatures débouler dans la salle pour les déchiqueter. Ils finiraient leurs munitions puis les bêtes auraient raison d’eux, comme de tous les autres visiteurs auparavant. Ou alors, l’IA serait tellement en colère qu’elle immergerait la station pour les noyer. Au moins, songea-t-il pour se consoler, se condamnerait-elle avec eux.

- AH, fit seulement la voix au bout de quelques secondes, sans émotion, et Lloyd devina qu’elle fouillait dans ses propres données en même temps qu’elle les observait.
- Oui… Il nous faudrait le mot de passe de la direction générale. Notre programme n’est pas assez puissant pour le craquer.

Nouveau silence suspendu. On entendait les chaussures de Jake clapoter de temps à autre.

- Cependant, je pense que l’entièreté de votre programme est téléchargé, signala Lloyd même s’il n’était absolument pas sûr de ce qu’il disait. Si nous arrêtons là les copies, nous ne perdrons que les dernières données des expériences génétiques, si vous voulez mon avis…
- Hors de question.

Cette fois, la voix était dure, sans appel. Lloyd eut un frisson et tomba quelques secondes dans un mutisme désemparé. Il croisa de nouveau le regard de Mat’ et espéra qu’elle n’était pas trop fâchée contre lui qui n’avait pas la solution. Merde, il était que mécano, pas hacker ! Et leur employeur ne leur avait pas parlé d’une telle sécurité. Si code ils devaient utiliser il aurait dû le leur envoyer d’une manière ou d’une…

- Le guide ! souffla Lloyd tandis que son visage s’éclairait. C’est lui qui doit avoir le code !
- LE GUIDE ?! éclata la voix comme si elle était insultée.
- Oui-oui, fit le Hapan précipitamment, le quatrième qui nous accompagne, j’ai vu qu’il avait un datapad ! Je vais… Je veux dire, est-ce que je peux aller voir cet objet ?
- Oui. Faites vite. Les deux autres restent ici, je les surveille.

Le Hapan s’éclipsa au pas de course, tout en priant intérieurement : pourvu que le code soit bien dans le datapad et qu’il n’ait pas été seulement mémorisé par le guide… Parce que le réveiller maintenant ne serait peut-être pas une mince affaire. Décidément, leurs chances de survie devenaient de plus en plus maigres…

Le guide se trouvait toujours là où ils l’avaient laissé, sous la bouche d’aération dans la salle où s’amoncelaient les cadavres nauséabonds. Lloyd dut réprimer un nouveau haut le cœur avant de se Ils l’avaient presque oublié, songea-t-il, et il remercia intérieurement Mat’ d’avoir insisté pour ne pas laisser crever le grand gaillard en armure derrière eux. Il était toujours inanimé. Sa respiration était régulière.

- T’en fais pas mon vieux, tu loupes rien, maugréa Lloyd en fouillant les poches du guide.

Il finit par trouver l’appareil qu’il désirait et par chance, il n’était pas verrouillé par un mot de passe. Il ouvrit rapidement les derniers fichiers consultés… et tomba sur un texte intitulé [MISSION MC KALSRA]. Il n’avait aucune idée de ce que signifiait Kalsra mais « mc » pouvait être l’abréviation de Mon Calamari et la mention « mission » correspondait à peu près à ce qu’ils étaient en train d’effectuer. Le Hapan se remit à courir pour rejoindre la salle des contrôles. Ce ne fut qu’une fois auprès de Mat’ qu’il put enfin véritablement lire le contenu du fichier.

Une série d’instructions en basic… Des données succinctes sur Mat’ (ça alors, l’employeur s’était rudement bien renseigné !) et sur la station dans laquelle il se trouvait. Et puis, tout en bas…

- ON L’A ! s’exclama Lloyd, n’en croyant pas ses yeux.
- ENTREZ LE CODE, reprit la voix sur un ton autoritaire mais visiblement moins contrarié qu’auparavant.

Le Hapan s’exécuta, fébrile.

- Altruisme... mes couilles oui … !

Pour le coup, Lloyd devait bien avouer qu'il était du même avis. Mat' n'aurait pas été là, le guide serait sûrement resté dans le sous-marin, d'ailleurs. Il avait eu du bol, le grand gaillard, que la Twi'lek fut leur capitaine. Quoique, même égaux, le Hapan n'était pas sûr que lui et Jake soient réellement capables de résister à ses demandes. C'était un peu ridicule, mais l'important à présent était surtout de s'en tirer vivant, l'air idiot ou pas.

L'IA les quitta en donnant des informations précieuses - BVF155, BVF155, il fallait aboslument bien retenir BVF155 - mais aussi des redoutables : une fois désactivée, elle ne contrôlerait plus toutes les créatures qui rôdaient dans la station... Lloyd déglutit en tournant le regard vers l'issue de la pièce. Il s'attendait presque à voir les bêtes débouler toutes ensemble d'un seul coup, comme si elles avaient su à l'avance ce qui allait se produire.

Les cris fusèrent autour d'eux et Lloyd courut ventre à terre pour aller récupérer leur malheureux guide. L'adrénaline qui s'insinuait dans ses veines l'aida à soulever le compagnon tandis qu'un sourd martèlement se rapprochait : les bêtes, elles étaient déjà toutes proches !

- Oh putain, marmonna fébrilement le Hapan en courant tant bien que mal à la suite de Mat'.

La tête du guide bringuebalait sur ses épaules et ses jambes molles faillirent faire trébucher Lloyd deux fois de suite. Il s'arrêta un instant pour hisser le corps sur son épaule - Jake venait-il vraiment de rire ou Lloyd avait rêvé ?? - avant de reprendre sa course à la suite de ses deux compagnons.

Peu à peu à leur suite, les corps jonchèrent le sol. Les tirs du mercenaire étaient impressionnamment précis. Lloyd comprenait soudain l'intérêt d'avoir ce genre de compétences à leurs yeux ! Et dire qu'il avait été frustré quand Mat' avait annoncé l'arrivée d'une troisième personne entre elle et lui, et que maintenant il la remerciait intérieurement d'avoir pensé à leur sécurité ! La valeur de Jake prenait tout son poids tandis que de nouvelles vagues de créatures affluaient.

Au terme d'une longue course où Lloyd n'entendait plus que son pouls contre ses tempes et les déflagrations de l'arme de Jake, ils parvinrent brusquement à leur point de départ : le hangar à sous-marins !

- BVF 155 ! beugla le Hapan à la Twi'lek devant lui, pour être sûr qu'ils ne prennent pas le mauvais véhicule.

Ce serait quand même un comble, après avoir parcouru tout ce chemin, de mourir dans une explosion au fond de l'océan. Ces imbéciles de Jedi et ces grognards de Sith continueraient à les chercher éternellement, sans jamais le retrouver. Voilà au moins qui pouvait être vaguement réconfortant.

Mat' avait déjà réussi à déverrouiller le sous-marin quand Lloyd arriva derrière elle. Sans ménagement, ils engouffrèrent le guide à l'intérieur - petit veinard qui ne se souviendrait de rien - et sautèrent dans le petit compartiment à leur tour. L'appareil n'était pas tout neuf mais au moins, il semblait en parfait état. Les commandes étaient les mêmes que celui de l'aller - voilà qui faciliterait leur trajet et Lloyd trébucha avant de parvenir à s'installer à la place du pilote. Tandis que Jake montait à bord, l'appareil tangua - pourvu que l'ouverture n'avale pas d'eau ou bien ils couleraient stupidement au fond du hangar ! - et Mat' parvint finalement à refermer le sous-marin. Fébrile, Lloyd vit Mat' enclancher le démarrage et ô miracle ! pas de problème en vue. Un doux vrombissement les accompagna tandis qu'ils s'enfoncèrent dans l'eau. Ils entendirent encore quelques minutes les glapissements des créatures et quelques "ploufs" qui semblaient indiquer que certains avaient été poussés à l'eau avant que l'opacité de l'océan ne les enferme dans un silence profond et apaisant.

Le Hapan se laissa glisser contre la paroi, haletant après leur course infernale. Alors comme ça, ils allaient vraiment s'en sortir ?

- Hors de question... fit-il entre deux respirations, qu'on partage... la paye avec ce connard !

Il ponctua sa déclaration d'un regard noir vers le guide. Après tout, sans lui, ils s'en seraient bien mieux sortis ! Alors il pouvait toujours courir pour gagner un seul cred' sur leur pactole !
Et un sacré pactole, en plus...

Lorsque sa respiration se fut calmée, Lloyd bidouilla le système de communication pour contacter leur employeur à la surface de Mon Calamari.

- Ici l'équipe du Soleil Vert, fit-il. La mission est accomplie. Je répète, la mission est accomplie. Soleil vert, terminé.

Il atteignit le communicateur avec un clic qui résonna quelques instants dans la pièce avant de s'installer à l'arrière. Il laissait Mat' piloter cette fois.

- Ok, Mat'. Je retire ce que j'ai dit sur Jake, il est pas si inutile, plaisanta-t-il en se tenant à l'écart du mercenaire.

Il frotta ses mains sur son visage après un sourire pour se détendre un peu. Il aurait bien du mal à croire qu'ils avaient vraiment fait tout ça.