Yoni dévalait une à une les marches d’escalier ne s’attendant même plus à voir réapparaître une queue touffue ou une paire de lekku. Emportée par son élan, elle passa en trombe devant le palier ou la chienne avait dévié et réalisa une volée de marches plus bas qu’elle venait juste de doubler son amie et leur invitée surprise. Un cliquetis rapide de pattes griffues sur le sol de marbre lui indiqua le retour en force de la chienne qui avait dû voir passer la Pantoran rosifiée.

Son cylindre sous le bras et sa main sur la rampe de l’autre, Yoni repartit en trombe, dépassée à nouveau par l’animal qui sauta 2 marches d’un coup en lui frôlant les jambes. Croyant éviter une collision, la novice posa un pied dans le vide et bascula, déséquilibrée. La jeune fille ouvrit grand la bouche, terrifiée à l’idée de voir sa vie s’arrêter au terme d’une mauvaise chute dans les escaliers. Lâchant son récipient en plastex, elle s’agrippa de ses deux petites mains moites à la large rambarde sculptée, le pot à plantes s’échappant dans les escaliers, qu’il dégringola à la suite de l’animal tandis que la fillette finissait à croupetons, les bras noués à la rampe. Stabilisée, elle se pencha par-dessus le rebord de cette même rambarde et arrêta le cylindre dans sa chute en érigeant un filet immatériel où le récipient resta comme accroché en plein rebond.

Essayant de se dépêcher pour ne pas se faire redoubler, Yoni le rattrapa au passage et descendit aussi vite que ses petites jambes le lui permettait pour rejoindre le chien qui aboyait et jappait déjà en bas. Lui gratouillant la tête au passage, la petite fille s’engagea dans les couloirs peu fréquentés des buanderies où flottaient une odeur de produits lavants et des nappes de vapeurs blanches s’échappaient des quelques portes restées ouvertes. Yoni rentra dans une de ces salles où les droïdes s’activaient méticuleusement et commença à scruter les murs. Si elle devait en croire une conversation interceptée clandestinement, il y avait un moyen de sortir d’ici ! Là ! A côté d’une pile de draps pliés sur un meuble en métal ! Aussitôt, elle s’agenouilla et souleva une trappe d’aération mal scellée pour s’engouffrer dans les conduits qui devrait la mener jusque dans le parc si elle suivait les marques laissées par d’autres padawans. Sans se perdre dans les boyaux métalliques du grand Temple d’Ondéron.

Damned ! Où étaient-elles passées ? Plus de Yoni ni de quadrupède frétillant dans son horizon de vapeur d’eau. La petite Twi’lek les talonnait pourtant à deux enjambées près si on comptait en vrais pas de bantha. Et au détour du couloir, plus rien ! Ce n’était pas possible de se volatiliser comme ça. Aora zieuta à l’embrasure d’une longue salle envahie par les cliquetis mécaniques des machines et les pétillements mouillés qui accompagnent les jets de brouillard ménager. Rien d’autre que des silhouettes de droïdes d’entretien de classe 5, pas assez évolués pour communiquer avec les êtres conscients et recevoir autre chose que des ordres adaptés à leurs fonctions. Inutile d’espérer leur demander par où s’étaient faufilées la Pantoran et leur amie à fourrure. Même si leurs senseurs optiques avaient capté le passage de l’apprentie à la peau repeinte au fuchsia, il faudrait leur ouvrir la carcasse pour récupérer l’information dans leur mémoire holographique qui leur servait à accomplir leurs tâches. Et Aora n’avait pas le matériel adéquat accroché à sa ceinture pour jouer à l’as de la bidouille technologique.

Mais elle avait du flair. D’autres effluves devaient persister, plus distinctes que l’odeur de propre et de lessive fraîche qui régnait dans la salle et se répandait dans les couloirs. C’était quelque chose de ténu. Un soupçon de tisane sucrée flottait dans l’air récuré, comme un halo invisible qui commençait déjà à se volatiliser dans la grandeur de la pièce. La gamine sauta par-dessus un droïde nettoyeur de sol occupé à repasser sur les infimes traces de poussière que les intruses avaient pu laisser. La petite fille remonta la piste, de plus en plus nette, jusqu’à un mur…

Sur son monde natal, il n’y avait pas une ville qui n’avait pas ses passages secrets et il n’y avait bien que des esclaves consignés au domicile de leurs maîtres pour ne pas connaître les tunnels dérobés et chemins détournés utilisés pour se rendre à un endroit sans être vu ou atteindre quelques lieus secrets. Ces itinéraires clandestins étaient transmis d’initié à initié. Elle aurait dû penser que Yoni connaissait forcément ce genre de tuyau depuis le temps qu’elle était élevée au Temple !

Aora s’engouffra par la chatière à padawan et s’aventura à quatre pattes dans les conduits.