On lui avait dit qu’il était guéri et que personne n’était mort. Que l’opération avait été un succès. Et Elkim ne demandait qu’à le croire. Après tout, si les adultes le disaient ce ne pouvait qu’être vrai non ? Alors pourquoi ne se sentait-il pas guérit ? Il avait une zone sombre dans le dos du crâne qui ne voulait pas disparaître. Des idées noires qui s’incrustaient alors même qu’il se savait mauvais avec les idées.

Durant tout le trajet, le blondinet s’était isolé, ne répondant que par monosyllabes à ceux qui lui rendaient visite. Les autres semblaient heureux et content d’eux ce qui l’enfermait encore plus dans un sentiment de détresse inavouée. Il avait juste pas envie de répondre parce qu’il se sentait coupable de ne pas être d’humeur à se réjouir. A tous les coups, il était malade. Parce que pour penser comme ça, il fallait bien que quelque chose cloche.

Ils arrivèrent finalement à destination et rien ne changea. Elkim se tourna sur sa couchette. Il n’avait pas envie de quitter l’abri du vaisseau mais savait qu’il allait bien devoir le faire un jour. Les bruits venant de dehors, résolument joyeux, ne lui disaient rien qui vaille. Il se leva, bougon et sombre et traîna les pieds à travers le vaisseau vide. Finalement, il arriva devant la porte. Tout le monde était sorti et plus personne ne faisait attention à lui pour son plus grand soulagement. Une petite voix dans sa tête lui souffla d’aller chercher Iki mais l’autre, plus sombre, lui dit de laisser son ami s’amuser tranquille puisque lui était heureux. Elkim se rembrunit et se faufila discrètement dans un coin noir de l’entrée. Ici, il pouvait rester à regarder les gens, il ne se ferait pas remarquer.

Parce que c’était surtout ça qu’il ne supportait plus. Etre le centre de l’attention. Comme s’il n’avait pas failli perdre son meilleur ami du côté obscur de la force. Comme s’il ne s’était pas fait battre à plate couture par un Six à peine plus âgés qu’eux. Comme si l’autre vilain méchant ne l’avait pas considéré comme un moins que rien. Il réprima sa colère. Avec la peur, elles étaient un chemin vers le côté obscur. Un chemin qu’il se refusait à prendre.

Le dos contre le mur de pierre, il se laissa glisser sur le sol et ferma les yeux. Il visualisa Hapes. Sa mère, les cultures, ses amis. La musique de la flûte d’Iki dans le temple en ruine, les moments de calme et de joie simple. Il ne voulait pas connaître la peur. Il ne voulait plus être en colère. Et plus que tout, il ne voulait plus penser. Plus jamais.

L'apparition tant attendu de Saï arriva enfin, le vieux maitre fut accueilli par les plus jeunes padawans avant de rencontrer les enfants de la jedi, des petites terreurs qui courraient de partout et manquèrent de le faire tomber. Elle fronça légèrement les sourcils et les rappela pour calmer leur ardeur. Ils étaient bien excités ce soir de voir tout ce monde mais ce n'était pas une raison pour faire des bêtises!

Saï lui fit un signe de la main auquel elle répondit avant de se retourner vers sa padawan, celle-ci semblait légèrement soucieuse, un petit doute ou un coup de fatigue ? La jedi tenterait d'élucider le mystère si demain, elle gardait cette mine déconfite.
Tandis que le vieux maitre prit la parole pour un petit discours sur leur victoire, il félicita nombre d'entre eux pour leur bravoure,leur courage et leur ténacité. Sa padawan en faisait et elle était décidément fière d'elle.
Puis Ellana assista comme tout le monde à l'adoubement de Lyrae O'Sil, la nomination au rang de chevalier jedi était un passage tellement sacré et attendu qu'elle pouvait encore se souvenir de la sienne.
Un silence royal régna dans la salle tandis que seules les paroles de Saï pouvaient se faire entendre distinctement. La cérémonie commença et se termina par des applaudissements et ainsi chacun reprit le cours de la fête qui n'en était que plus embelli.

La jeune femme abandonna sa padawan pour discuter un peu avec tout le monde. Des débats futiles, des encouragements, des félicitations, les exploits de certains étaient les sujets de discussion de ce soir. Ellana voulut se diriger vers Maitre Don mais celui-ci semblait plutôt bien entouré et ne voulut pas le déranger, de toute façon ils se rencontreraient bientôt. En effet, tous les problèmes étaient loin d'être résolus.

Toujours réceptive à ses enfants, elle entendit un bâillement de ses enfants qui tira la sonnette d'alarme, il était temps pour eux de se coucher et pour elle aussi, elle méritait bien un peu de repos. Elle entreprit de chercher ses enfants parmi toute la foule même les jedis étaient de moins en moins nombreux au fur et à mesure que le temps passait. Elle les retrouva en train de jouer avec des emballages en papier qui avaient surement servis pour les toasts. Fini les bêtises! Elle les prit dans ses bras et jeta un dernier à la salle. Sélène s'amusait bien et la jeune femme eut un sourire amusé avant de sortir de la salle vers la direction de ses appartements.

La Togruta constata qu'elle n'avait pas perdu l'attention de la petite avec son discourt, c'était rassurant. Elle vit avec plaisir la surprise de la Twi'lek et ne rajouta rien derrière son commentaire. Il lui restait bien des choses à découvrir, des surprises, elle en aurait encore beaucoup. Le Chevalier aimait toutefois voir ce genre d'expression sur le visage des plus jeunes padawan. Elle trouvait souvent que les maîtres voulaient vieillir bien trop vite ces enfants, sous le prétexte qu'ils deviendraient des Jedis. La Dame pensait que c'était justement parce qu'ils deviendraient des Jedis qu'ils avaient besoin de ne pas devenir adulte trop tôt. Comment former un individu sain, si on le privait d'enfance? Ce n'était pas impossible, car les individus étaient complexes, mais cela n'aidait pas.

La spontanéité de la fillette était juste craquante. Lyhin't aurait bien répondu à Aor'ashar qu'elle était également ravie de la rencontrer, le regard attendrit fit cependant vite place à un air d'incompréhension, pour finir par un éclat de rire. Les enfants arriveraient toujours à la surprendre. Leur imagination était souvent plus grande que celle d'un adulte et bien plus amusante. La Togruta ne pouvait s'empêcher de rire quand elle imaginait Maître Caldin avec le pont du vaisseau sous le bras, au sens propre du terme. La Dame retrouva son calme, pour répondre avec sa douceur coutumière.

« Prendre le pont signifies qu'elle prend la place du capitaine du vaisseau et que c'est elle qui a prit le contrôle, ou le commandement si tu préfères. Le Tarkona est d'ailleurs revenu avec notre flotte et les siths à l'intérieur ont été capturés, tués ou se sont enfuis. »

Le chevalier Na Tae ne semblait pas particulièrement fier quand elle énonçait la dernière phrase. Elle n'aimait pas la guerre, même si elle était nécessaire. Le cortège de morts et de prisonniers qui lui étaient associée ne lui donnaient donc aucune satisfaction. Elle préférait bien sûre que cela soit leurs ennemis et non les gens du temples. La Togruta n'en éprouvait pas pour autant de la joie. Toutes guerres partaient d'un échec, même celles dont on fêtait la victoire.

« Ramener, au sens strict non. Par contre nous pouvons faire des faux bras qui ressembleront exactement au vrai par exemple. Donc nous pouvons les remplacer à l'identique: c'est ce qu'on appelle des membres artificiels. »

Pendant qu'elle fournissait les explications à la Twi'lek, Maître Don passa et la salua. Elle rendit le salut d'un signe aussi bref et silencieux. La Jedi ne savait pas si Aora avait eu le temps de le croiser vu les derniers évènements. La gamine n'avait pas dû le voir.

« La personne âgée à qui je viens de dire bonjour est le maître du conseil des Jedis. Disons que c'est lui qui dirige le temple il s'appelle. »

Les coups pour attirer l'attention sur l'estrade retentirent. Rapidement et en chuchotant, la Togruta finit sa phrase

« Maître Don. »

Elle posa son doigt sur ses lèvres pour montrer à la gamine qu'il fallait à présent se taire et écouter.
La porte qui grinça et tomba juste après le commentaire sur les réparations du temple amusa la Togruta et si elle n'éclata pas d'un rire franc, son sourire et son regard pétillant n'en étaient pas moins expressifs. Le chevalier applaudit tout au long du discourt au même moment que la plupart que ses collègues, pour la proclamation de la victoire et après chaque chevalier cité. A un moment pourtant le plis de l'inquiétude passa sur son visage, ce fut au moment ou la maître parla des padawans qui s'étaient infiltrés. Elle avait vu àà l'infirmerie qu'ils avaient du mal à se remettre de cette épreuve, la Dame trouvait donc déplacé de se moquer d'eux maintenant. Une fois qu'ils pourraient en rire eux, alors tous pourraient en rire. Pour le moment, c'était encore trop tôt pour se réjouir. Quand son nom fut prononcé, elle baissa rapidement et simplement la tête en signe d'acceptation et de remerciement pour cette marque de reconnaissance.

Lyhin't fut heureuse de voir se dérouler l'adoubement sur scène. Il y avait un petit moment qu'elle n'en avait pas vu un. Ce n'était pas un événement si fréquent et il était tellement facile de les louper avec toutes les missions. Elle était d'autant plus contente devant la scène que quelques jours avant, l'adolescent avait frôlé la mort. L'infirmière aimait voir ses patients guérir de leur blessure, voir même les dépasser et en ressortir grandit. Devant cet événement, la Dame se remémorait toujours pourquoi elle aimait tant sa place de guérisseuse et ce qui lui tenait tant à cœur. Il n'y avait que les êtres vivants qui pouvaient continuer leur route et vivre des moments importants comme celui-ci. Un adoubement, c'était un bouleversement, un événement majeur, particulier et unique. C'était aussi un moment où tout padawan se retrouvait plus ou moins submergé pas bien des émotions et ils avaient souvent des têtes mignonnes ou amusantes, comme celle de Lyrae en ce moment.

Maître Don prononça la phrase de fin du rituel et la Togruta applaudit plus chaleureusement que précédemment, même si elle ne battait pas Misha pour ce qui était de l'extériorisation des sentiments. Lyhin't avait tout de même une certaine tenue. L'autre chevalier avait d'ailleurs hurlé un peu trop tôt, mais c'était à l'image de la trianii. Il serait bon ton qu'elle apprenne un jour à mieux contrôler son caractère survolté, cela viendrait probablement avec le temps...même si vu le caractère, elle ne serait jamais la plus calme des personnes, sauf évènements extraordinaire.

A la fin de l'adoubement, la Togruta se tourna vers son interlocutrice. Elle ne l'avait pas oublié.

« Ce n'est pas tout les jours que l'on assiste à un adoubement, mais tu vois, ça arrive plus vite que l'on ne pense. »

-Aah d'accord !

Sa bourde la fit mêler son rire à celui de la Dame Chevalier. Le Tarkona n'avait donc pas été ramené en kit comme elle l'avait d'abord cru. On l'avait même attrapé avec quelques uns de ses occupants qui pourraient peut-être servir les boissons et chauffer l'ambiance une fois leurs esprits convenablement nettoyés de la crasse Obscure qui les polluait. Comment des vaincus pourraient refuser une telle chance de se recycler à si bon compte ? Ceux qui s'étaient enfuis allaient regretter de ne pas s'être laissés capturés. Sans parler de ceux qui étaient morts. Au jugé de ce qu'elle savait de leur existence sans guillerets sentiments, passer ad patres n'était rien d'autre que transiter d'une obscurité à une autre où ils n'ennuyaient plus personne. Bon débarras. Si le Chevalier Na Tae n'avait pas l'air heureux en racontant ça, Aora trouvait qu'il y avait au contraire de quoi se réjouir. C'était toujours ça de moins occupé à déglinguer l'Univers.

Donc, il était certifié à l'intérêt scientifique de la petite fille qu'il était impossible de régénérer un organe à partir d'un moignon ou d'orbites vides, mais qu'il était concevable de faire comme ci. Jusqu'ici, elle n'avait constaté que du rafistolage mécanique plutôt voyant, même effrayant, sans doute parce que les faux mieux imités avaient échappé à son œil scrutateur. Malheureusement, son plan concernant les membres artificiels capota en cours d'élaboration.

Un pépé entra dans le champ visuel de sa supérieure hiérarchique. Petit vieux qui était en fait un vénérable ancien puisqu'il s'agissait du Maître des maîtres dont on lui avait parlé : le doyen Saï Don. Eh beh ! Qu'un individu aussi âgé ait pu resté au commandement si longtemps prouvait ses capacités dans le business Jedi. A moins que ce ne soit le témoignage du désintéressement total de ses subalternes en ce qui concernait les intrigues de pouvoir. En tout cas, papy était déterminé à obtenir le maximum d'attention pour son radotage. Aora fit silence comme on le lui intimait, résignée à devoir subir un laïus.

Au lieu de la vieille anecdote complètement HS, papy Saï se lança sur les sujets les plus d'actualité, recueillant tour à tour le rire ou la morosité. La Twi'lek avait tout de même du mal à suivre le fil du discours tout plein de mots et de gens inconnus. Comme quelqu'un prit dans un office religieux qu'il ne connaît absolument pas, la jeune fille finit par calquer ses réactions sur celles de ses plus proches voisins, ne s'animant réellement qu'aux sonorités assimilées désignant la Togruta. C'était la sienne !

Alors qu'elle pensait que tout le monde avait été passé en revue, maître Don ne s'arrêta pourtant pas dans son discours et l'enfant légèrement impatiente crut qu'ils allaient finalement y avoir droit, à l'anecdote. En fait, il était en train de se passer quelque chose qu'elle ne comprenait pas avec un drôle de protagoniste, qui lui non plus ne devait pas savoir qu'on pouvait faire des faux bras comme les vrais. Elle observa le rituel se dérouler avec un mélange de circonspection et un brin de surprise. Ça avait l'air rudement sérieux, dis donc ! C'était comme ça qu'on devenait Chevalier, alors ? Du blabla ? Pas de cadeaux ? Une bouteille d'un grand cru ? Une corbeille de fruits ? Une fille ? Un voyage sur Zeltros avant d'enquiller pour une vie entière de labeur et de tempérance ? Ils devaient garder tout leurs fonts en faveur de la reconstruction de l'architecture…Du moment que le dénommé Lyrae O'Sil était content avec son adoubement. Ça n'empêchait pas la petiote de rester un peu sur sa faim et de retourner un regard un peu déçu à maître Na Tae.

-J'imaginais ça plus enchanté. Une lueur qui entoure le Chevalier neuf, des chants qu'on sait pas d'où qu'ils viennent, une fontaine de lucioles, des paillettes qui voltinent…, décrivit la petite en ondulant des doigts, parfaitement convaincue qu'on ne pouvait rien faire de bien sans paillettes. Encore moins un bon sons et lumières féerique.

Ce qu'elle ne dit pas, c'était qu'elle doutait fortement que l'adoubement aille assez vite pour elle de toute façon. Elle serait bonne à quelque chose avant la date et plus que probablement déjà rentrée chez elle. A moins qu'on ne lui refile le titre et un nouveau costume pour la remercier d'être passée en guise de cadeau d'adieu.