Ubarhy Naash
Ubarhy Naash
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[Brentaal] Porter ses fruits

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[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]


Il faisait un noir d’encre, humide, l’air autour de moi était saturé d’un arôme oscillant entre le sucré et l’amertume. C’était à vomir. J’avais cru faire une bonne affaire en choisissant une caisse de fruits, mais je ne pensais pas que le voyage allait être si long. L’odeur si agréable pendant les premières heures me donnait à présent l’impression d’étouffer, comme si j’avais constamment le nez dans une bouteille de parfum. Pour ne pas aider, depuis que nous étions entrés dans l’atmosphère de je ne sais quelle planète, les secousses et les virages se faisaient sentir et me provoquaient haut le cœur après haut le cœur. Au moins je n’étais pas claustrophobe et j’avais les estomacs solides, sans quoi le trajet aurait été bien moins agréable…

Pourquoi je m’étais infiltré sur ce vaisseau cargo comme l’aurait fait un rat? Je ne me l’expliquais pas encore très bien, une intuition. J’aurais sans doute pu me trouver une autre méthode pour m'infiltrer, mais celle-ci m’avait semblé être la plus sécuritaire. Après ce qu’il s’était passé sur Ralltiir, j’essayais de faire profil bas, ne pas me faire remarquer et quitter cette planète sans qu’on ne puisse suivre ma trace.

Bien entendu, j’étais confient du professionnalisme de mon cher Torhyn quant à l’effacement des preuves, mais j’étais tout de même impliqué dans le meurtre d’un riche héritier Ralltiirien, Obélias Snively. Le trépassé était bien connu du publique, jeune médecin à qui tout réussissait et à qui on n’aurait supposé aucune malice, évidemment jusqu’à ce qu’on le retrouve mort dans son laboratoire secret. Oui, il avait l’air d’un ange Obélias et il s’était bien gardé de révéler qu’il jouait avec des cobayes conscients pour faire ses petites expériences. Les médias avaient conclu à un suicide après avoir découvert le cadavre, mais une enquête était toujours en cours et c’est ce qui m’avait poussé à prendre la poudre d’escampette au plus vite, car je savais bien que de suicide il n'en était rien. Bref, avec une si belle motivation, devenir passager clandestin dans une caisse de fruit ne m’avait pas semblé être un si mauvais sort.

Je ne savais pas exactement depuis combien de jours je m’étais enfermé, mon dos courbaturé me soufflait au moins trois, mon mal de tête une dizaine, mais une chose était certaine, j’allais vite devoir prendre une bouffée d’air frais. Partager mon précieux oxygène avec des meiloorun n’était franchement pas l’activité la plus excitante à laquelle je m’étais prêté dernièrement, tenter de dormir sur leur lit d’épines non-plus. Au moins, me consolais-je, j’avais de quoi largement me rassasier et je ne m’en étais pas privé. Autant joindre l’utile à l’agréable comme on dit.

Ha, enfin du mouvement! Je sentais ma caisse bouger, une légère angoisse rapidement surmontée par une fébrilité extatique d’enfin voir le soleil me prenant aux tripes. Des pas, une voix rauque, j’écoutais avec attention les indications annonçant ma libération prochaine.

- Alors va falloir apporter cette caisse à Cormond mon pt’it gars, Cyd hein? Ouais, tu sais d'jà l'adresse de t'façon. Faut faire vite, la livraison est en r’tard de trois jours. Et on sait tous les deux que c’est pas bon de faire attendre les clients… De t’façon j’tapprendrai pas à faire ton métier hein! J’suis que transporteur moi, la seule chose que j’peux te dire c’est de pas ouvrir le colis. Y paraît que les fruits sont sensibles au soleil ou à l’air j'sais plus… En tout cas faut pas ouvrir. Y’a trente meiloorun là d’dans et trois éclats de lune. J’veux pas t’mettre le feu au cul, mais ça périme vite ces beautés exotiques et des fruits trop mûr c’est pas bon pour le buisness.

Cyd Mandraq
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Les baffles de l’audioréveil hurlèrent dans ses oreilles à 9h30 pétantes. Branché automatiquement sur la radio locale, l’engin relayait à pleine puissance les vociférations du dernier groupe de trash zygerik à la mode. Se maudissant lui-même d’avoir oublié, la veille, de régler la puissance sonore de l’appareil, Cyd se leva en maugréant, tapant comme un Wookie sur l’infernale machine pour la faire taire.

La journée commençait bien.

Dans les vapes, un rapide tour d’horizon de sa chambre lui permit de se rappeler où il était, et de ce qu’il faisait ici. Allure miteuse, odeur de renfermé, papier peint au goût douteux : aucun doute, il était dans un motel minable de Keerania, ville industrielle au cœur de Brentaal. Il devait vraiment être exténué, la nuit dernière, pour parvenir à s’endormir dans un tel lieu. Une rapide douche (dans une salle de bain minuscule mais étonnamment propre) lui permit de reprendre tranquillement ses esprits, et de se remémorer les évènements des derniers jours. Son compte bancaire presque à sec, il avait fait halte sur Brentaal à la demande d’un de ses fixeurs – c'est à dire l’intermédiaire entre celui qui dépose le contrat et celui qui l’accepte -, Quesh, un Trandoshan à la mine patibulaire, qui lui avait fait miroiter un travail bien rémunéré. Quesh était une vieille connaissance à lui, qu’il avait rencontré il y a quelques années sur Umbara. A cette époque, le Trandoshan avait juré à Cyd qu’il le démembrerait, membre par membre, en raison d’un malentendu concernant une cargaison d’épices. Hormis ça, c’était un chic type.
En quittant sa chambre, le mercenaire fut presque pris de nausée face à l’épouvantable puanteur du quartier, odeur de rance typique de ces zones de la basse-ville. Même son casque ne parvenait à filtrer toutes les particules pollués de l’air. Heureusement, il n’aurait pas à remettre les pieds ici : Quesh lui avait promis un travail qui lui ferait « changer d’atmosphère », tous frais de déplacement et de repos payés.

Il trouva son fixeur devant le lieu convenu, une cantina située à l’ombre des tours délabrées du centre-ville. Le Trandoshan était alors aux prises avec un jeune Twil’ek, qu’il tenait fermement par le col. Celui ci semblait supplier son agresseur :

« S’il vous plaît, noble seigneur ! »

« Ah ! Moi, un seigneur ? Je ne suis pas sénateur, petit. Je n’édicte pas des lois, je brise des os. Et surtout ceux des mauvais payeurs, qu’importe leur âge, » tonna d’une voix menaçante le fixeur, tout en affichant dans un horrible sourire son impressionnante dentition, composés de crocs soigneusement acérés. Encore son habituel numéro de méchant lézard enragé, se dit Cyd.

Le mercenaire s’était silencieusement approché de Quesh, qui ne l’avait pas vu arriver. Il lui posa doucement une main sur l’épaule, avant de tenter de le raisonner :

« Lâche le, pateesa , dit-il au Trandoshan. Laisse passer, pour cette fois. Il y a plus urgent : on doit parler affaires ensemble. A moins que tu m’ait fait venir dans ce trou pour rien. »

« Ecoute, Cyd, ce gros fils de pute me doit 120 crédits. Et depuis bientôt 5 mois ! Il a suffisamment abusé de ma patience. J’essaye d’être aimable, d’être compréhensif, de faire preuve d’empathie, et tout ce que je reçois, c’est un crachat dans la gueule. Non, je dois lui faire la peau et me venger ! »

L’air tétanisé du Twil’ek, qui ne devait même pas avoir 18 ans, pris Cyd, malgré lui, en pitié.

« Tu n’auras qu’à déduire sa dette de mon prochain salaire, trancha le mercenaire dans un soupir. Et arrête de prêter de l’argent à n’importe qui, sans vérifier sa solvabilité. »

Quesh grogna, visiblement déçu de ne pouvoir aller au bout de ses menaces. Après un court instant d’intense réflexion, ponctué de temps en temps par de bruyants souffles nasaux, il relâcha brusquement le Twil’ek, qui s’écrasa au sol, hors d’haleine.

« Tu as de la chance, tu t'es trouvé un chevalier servant. Te tuer sur place ne me rendra pas mon argent, et on me paye même pour sauver ta misérable vie. Va, et que je ne te revois plus, nibd’en dah ! » , clama le Trandoshan de sa voix rocailleuse.

Le mauvais payeur eut juste le temps de balbutier un « merci » à Cyd avant de détaler à toutes jambes dans les rues mal bétonnés de Keerania.

« Je sais très bien que c’est son air juvénile qui t’a apitoyé, le Bien-Né. Mais ne te fie pas aux apparences : ce gosse a beau avoir 16 ans, c’était un ancien tueur de Reboj. Son maître mort, le voilà à la rue, sans rien, à mendier, à grapiller par-ci par-là des sous. Les autres bandes font la traque aux anciens chiens de gardes de leur ancien pire ennemi ; je ne donne pas cher de sa vie. Que ce soit de ma main ou de celle d’un autre, il sera de toute manière mort d’ici la fin de l’année. Tu n'as fait que prolonger un peu plus son existence, en bien ou en mal. »

Reboj était un ancien caïd de Keerania, connu pour sa brutalité et son caractère impitoyable. Il avait notamment fait massacrer la plupart de ses ennemis dans de violents affrontements de rue. Cyd avait entendu dire qu’il était mort il y a quelques mois, d’un kist qui s’était méchamment infecté et dont il avait négligé la dangerosité. Fin plutôt comique pour quelqu’un comme lui. Comme bon nombre de gangs, le sien avait implosé avec la mort de son chef, et voilà à présent ses anciens larbins éparpillés aux quatre vents, cherchant à nouveau seigneur à servir, ou du moins à assurer leur survie.

Mais un gosse de 16 ans ? Se livrer à une telle violence ?

Quesh savait très bien ce que signifiait le mutisme soudain de son ami, et à quoi il pensait en ce moment.

« Ah ! Tu m’étonneras toujours, Cyd. Toujours aussi bonne pâte et optimiste sur le monde. Mais que crois-tu ? La République nous délaisse, nous, les pauvres gens. Et la politique de l’actuel gouvernement n’arrange pas grand-chose. Rien n’est plus fertile comme terreau à la criminalité que la misère. Et celle-ci va en s’aggravant : les mineurs sans rien, avide de fric facile à faire et prêt à tout pour ça, car la société n'a rien à leur donner, sont de plus en plus nombreux et de plus en plus jeunes. Les générations prochaines seront pires que nous, leurs vies seront plus moroses. Ce gosse n'en ai qu'un premier aperçu. »

Cyd savait que le Trandoshan avait raison. La guerre contre les Sith avait contraint la République à faire des coupes budgétaires drastique dans le social ; pour ne rien arranger, la politique ultralibérale menée par le gouvernement s’ornien avaient renforcées et creusées davantage les inégalités. Partout, dans tous les lieux où Cyd avait pu se rendre, la paupérisation semblait s’être accentuée. Néanmoins, le ton presque prophétique qu'avait employé son ami n’avait pu l’empêcher de sourire. Il savait que Quesh n’était pas qu’une grosse brute reptilienne, rôle qu’il aimait se donner : c’était aussi quelqu’un qui savait se servir de sa tête, certes bien plus pour fomenter des mauvais coups que pour philosopher, et le voir aussi sérieux contrastait avec son habituel attitude, ce qui amusait toujours Cyd.

« Je ne te savais pas penseur à tes heures perdues, Quesh,, dit Cyd d’un ton plaisantin. Ni que tu appartenais aux « pauvres gens ». Mais assez traîné ; entrons à l’intérieur, nous avons à parler. »

***

Il se retrouvait donc à devoir « escorter des fruits ». Travail dégradant à ses yeux, mais comme Quesh s’était amusé à le lui rappeler, il était désormais sur la paille et ne pouvait pas faire la fine bouche quant aux propositions de contrat qu’il recevait. Pourquoi lui ? « Les déserts rocailleux de Brentaal sont dangereux. Je ne peux pas envoyer un simple contrebandier, un petit jeune du coin ; il se ferait descendre à peine sortie de la ville. Non, il me faut quelqu’un qui sache se défendre, et en qui j’ai confiance. C’est pourquoi j’ai pensé à toi. Beaucoup de crédits, juste en amenant une caisse d’un endroit à un autre », lui argua le reptile. Cyd avait accepté cette basse tâche, car le contrat était en effet très bien payé : l’employeur devait être un de ces riches de Brentaal, qui n’avait pas envie de se ruiner en frais d’importation, les fruits en question provenant de l’autre bout de la galaxie. Passer par le marché noir était alors plus avantageux par son moindre coût en comparaison du commerce légal. Et Cyd compris pourquoi, lorsqu’il réceptionna la caisse : elle devait bien peser plusieurs dizaines de kilos. Des dizaines de kilos de meiloorun. Qu’il allait devoir tracter jusqu’à Cormond, capitale planétaire de Brentaal, à quelques centaines de kilomètres de Keerania. Pourquoi ne pas avoir déchargé les fruits braconnés directement à Cormond ? « Je n’ai pas de contact à la douane aérospatiale de Cormond, lui précisa Quesh. Mais j’en ai à Keerania. C’est l’un de mes gars sur place qui te transmettra la caisse. Ensuite, tu l’apportes par véhicule jusqu’à la capitale : j’ai quelques amis à la douane terrestres, ils te feront passer sans soucis. Et le tour est joué ! Pas compliqué, non ? »

Le Trandoshan lui avait prêté pour l’occasion un landspeeder capable de tracter de lourdes charges. Cyd était désormais parti pour un long voyage. Et, il ne savait pas pourquoi, mais il sentait que celui-ci ne serait pas de tout repos, contrairement à ce que prétendait Quesh. Les ennuis ont toujours la fâcheuse tendance à êtres imprévisibles.

Ubarhy Naash
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Des éclats de lune? Je regardais -enfin, tâtais vu l’obscurité qui m’entourait- les fruits autour de moi sans remarquer autre chose que la forme ronde et charnue des meiloorun. C’était quoi au juste des éclats de lune? Avec un nom comme ça, ce devait être un met d’exception sur lequel j’étais impunément couché. Enfin, la cargaison était le moindre de mes soucis, je n’avais de pensées qu’à mon plan d’évasion de cette fichue caisse pour retrouver l’air libre. J’allais bien me trouver un moyen de déguerpir tôt ou tard, patience et débrouillardise étant deux qualités que j’exerçais quotidiennement.

- Hey p’tit tu m’écoutes? avait renchéri le transporteur à l’attention de son interlocuteur muet. Quesh m’avait bien dit qu’t’étais un drôle de loupiot. ‘Fin bon, les fruits c’est rendu ton problème. Un bruit de tapotement raisonna dans la caisse juste au-dessus de mes montrals. Me figeant par instinct, retenant mon souffle, mon soulagement ne se fit cependant pas attendre alors que l’homme reprenait d’un ton amusé. Allez j’te donne un peu d’huile de coude pour la forme et après tu te tires, j’ai du boulot.

J’entendis les petits propulseurs antigravité s’activer sous moi, la caisse se soulevant à quelques centimètres du sol avant de se mettre à bouger. Ce nouveau tour de manège eut le don de me mettre de mauvaise humeur comme je sentais la nausée revenir attaquer mes nerfs déjà à vif. Mon p’tit gars, j’espère que tu as prévu une très courte journée parce que sinon je te jure que dès que je sors de cette boîte de conserve, tes précieux fruits, je te les éclate dans le visage. Je n’étais pas d’un naturel agressif, mais le voyage avait si bien usé ma patience et ma bonne humeur que j’aurais passé ma rogne sur n’importe qui.

Ceci dit, je ravalais ma colère, comme mes haut le cœur, alors que je sentis l’accélération caractéristique d’un véhicule ayant commencé sa course. Nous étions finalement en route, les bruit de l’astroport se réduisant au murmure, puis à néant. Malgré ma joie d'enfin prendre le large et espérer m'en sortir, je pestais d’autant plus que les secousses faisaient cascader les meiloorun tantôt à gauche, tantôt à droite, une avalanche perpétuelle. Avec tout ce mouvement, j’étais encore heureux de ne porter que ma tenue olive faite d’un tissu assez solide pour résister aux incessants tourments des épines des végétaux. J’utilisais mon petit sac de voyage dans lequel reposait mes prothèses et tout mon maigre attirail de vie comme bouclier, s’aurait été dommage d’abîmer la plus précieuse marchandise de ce caisson, moi-même…

**

Il fallut ce qui m’avait parut une éternité, mais qui avait sans doute vraiment duré trois heures, avant que notre cadence ne ralentisse jusqu’à l’arrêt complet. Était-ce le soir? Le moment tant attendu de ma libération? Je tentais d’écouter pour discerner des paroles ou un signe quelconque qui me permettrait de filer en douce, mais il n’y avait rien à écouter. De ma cellule odorante, je ne percevais rien. Tant pis, n’y tenant plus, je tournais la manivelle permettant d’ouvrir la caisse et en souleva le couvercle de quelques centimètres, juste histoire d’au moins purger l’air. Avant de sentir le souffle chaud du vent, cependant, le soleil vint agresser ma rétine et me plongea dans un profond désespoir. J’allais encore devoir patienter longuement avant de pouvoir sortir à la faveur de la nuit, à moins que… Je jetais un regard rapide dans les alentours. De la roche grise, du sable, quelques arbustes tentant misérablement de survivre dans cet océan chaud et sec, mais surtout pas âme qui vive à l’horizon. Ce fameux Cyd avait-il abandonné sa cargaison?

Comme toute réponse, je vis une ombre soudainement entrer dans mon champ de vision. Je refermais de suite la caisse, les yeux grands comme des soucoupes, la main sur ma bouche pour étouffer le bruit de ma respiration. Il ne t’a pas repéré, t’inquiète, tu gère. Je me répétais ces mots en tentant de calmer les battements de mon cœur. Sur le qui-vive, je fomentais mes meilleurs mensonges pour me tirer du bourbier dans lequel je m’étais élégamment fourré.

Cyd Mandraq
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« Hey p’tit, tu m’écoutes? »

Impossible de ne pas prêter attention aux braillements rauques et insistants du docker. Non pas que Cyd ne voulait pas lui répondre, mais il ne le pouvait pas : depuis maintenant quelques heures, il était pris d’une affreuse douleur, qui avait pris racine dans son ventre avant de se propager lentement jusqu’à sa poitrine. Il n’était pas difficile de connaître l’origine du terrible mal qui le foudroyait. En effet, son malaise avait commencé peu de temps après qu’il eut quitté Quesh. Dès lors, rien de bien compliqué à établir une connexion logique entre la malbouffe de la cantina dans laquelle il avait discuté avec son fixeur et la bactérie qui le rongeait intérieurement. Ou alors, il était carrément allergique à l’air empesté de Keerania, ce qui n’était pas improbable.

Au moins, la discussion fut vite expédiée : une fois la caisse réceptionnée, le docker l’aida à la charger sur le landspeeder, puis, aussitôt son boulot fait, repartit sans mot dire. Cyd était maintenant libre de quitter l’entrepôt. Il s’installa au volant du landspeeder, pris ses aises, vérifia un moment sur l’écran de bord l’état des modules et du réservoir, puis, une fois les portes coulissantes du dépôt ouvertes à sa demande, pris la route, embarquant avec lui victuailles et gourdes d’eaux déposés sur la banquette arrière. Les hangars où la douane entreposait les marchandises se trouvant à la périphérie de Keerania, et donc à la limite de la vaste étendue désertique séparant la ville du reste de Brentaal, Cyd n'eut pas à conduire longtemps avant de quitter définitivement la zone urbaine. Il ne put s’empêcher d’accélérer pour mettre le plus de distance possible entre lui et cette foutue ville, qui, dans sa tête, était pleinement responsable de son état actuel.

Le soleil écrasant du désert lui fit presque un instant regretter le béton keeranian. Le mercenaire avait oublié qu’en cette période de l’année, Breental était agité, dans son hémisphère sud, d’une vague de chaleur étouffante : désert glacial les trois quarts de l’année, les étendues sans vie entourant Keerania devenaient une véritable fournaise durant l’espace de quelques semaines, en raison de la temporaire proximité de la planète avec l’astre solaire qui l’illuminait d’ordinaire. Heureusement, Cyd était équipé dans son casque d’une clim intégrée, et il eut le bon sens de partir en fin d’après-midi. La douce brise du soir viendrait naturellement le rafraîchir, tandis qu’il contemplerait, au loin devant lui, le lent coucher du soleil. Les rayons crépusculaires étaient apparemment de toute beauté en cette partie de Breentaal. De même, l’agréable parfum se dégageant de la caisse de fruits, tout imprégnée de l’odeur des meiloruun – quant aux éclats de lune, n'ayant aucune idée de quoi il s’agissait, il était incapable d’en déterminer l’arôme -, calmait son malaise.

En tout cas, si tout se passait bien – et jusque-là, ça n’allait pas trop mal -, il devrait parvenir près des environs de Cormond vers le milieu de la nuit.

Enfin, si tout se passait bien.

Or, son voyage l’obligeait à emprunter une passe rocailleuse, un chemin serpentant et dangereux, lieu rêvé pour une embuscade. Et le moment ne fut pas plus mal choisit pour qu’un soudain et brutal haut le cœur oblige Cyd à s’arrêter. Il était alors à l’approche de l’embouche, néanmoins toujours à portée suffisante pour être en danger. Pris de nausée, il sortit brusquement de son véhicule, et, par une pudeur inexpliquée, sûrement du à sa bonne éducation, il fit plusieurs pas droit devant lui, comme pour se cacher du regard des autres au cas où il en viendrait à recracher son repas du midi. A bout de souffle, il retira péniblement son casque pour sentir l’air frais sur son visage. Sa respiration coupée l’obligeait à se tenir penché, le temps de prendre quelques grandes bouffés d’oxygène. Il se tint là, haletant, plusieurs longues dizaines de secondes. Le soleil étant alors à son zénith, l’ardeur de ses rayons étaient moindres ; le jour céderait place à la nuit d’ici quelques dizaines de minutes. Et, face à ce spectacle crépusculaire de toute beauté, il se retrouvait presque à dégueuler sur ses bottes.

Quand, enfin, il se redressa après avoir regonflé ses poumons à bloc et expurgé quelque peu le mal qui le rongeait (ou du moins, il l'avait calmé pour un temps), Cyd ne put s’empêcher de remarquer quelque chose d’étrange concernant la caisse de fruits : il lui sembla que celle-ci avait bougé, remué. Or, ce n’était pas un peu de vent qui allait secouer une caisse en métal de plusieurs dizaines de kilos. De loin, avec la chaleur, peut-être était-ce seulement l’horizon tremblant qui jouait un tour à sa vision, se dit-il. Tandis qu’il regagnait son véhicule d’un pas trainant et fébrile, il constata à nouveau une anomalie : il était presque sûr que le couvercle du caisson s’était soulevé et refermé brutalement. Cette fois ci, sa vue ne le trompait pas : à moins que les meiloruun soient capables de se mouvoir, ce dont il doutait fort, il y avait quelqu’un, ou quelque chose, dans la caisse.

S’approchant à pas de loup, il s’empara délicatement de son fusil blaster, laissé à l’arrière du landspeeder, puis se mit face au caisson. Pointant celui-ci avec son arme, qu’il tenait d’une main, il actionna lentement de l’autre la manivelle d’ouverture…

Ubarhy Naash
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Une seconde. Silence. Mon esprit en ébullition. Mon cœur battant la chamade. Silence. Une inspiration étouffée. Silence.

Puis, un bruit. Le mécanisme de fermeture du caisson cédait lentement son allégeance à l’inconnu l’intimant d’obéir. L’engrenage s’était activé comme des bouches affamées se réveillant d’un trop long sommeil. Je m’étais fait voir, quel abruti d’andouille je faisais! La panique me noua le ventre alors que je cherchais une issue, mais à part sauter sur le malheureux qui m’avait découvert, je n’avais pas d’autres options de fuite. Il ne me fallut pas longtemps avant d’abandonner cette idée puisque lorsque la caisse s’ouvrit finalement, avant même de voir un visage, c’est la pointe d’un canon qui m’accueillit.

Comme si ce n’était pas assez, la lumière vint à nouveau m’aveugler alors que je me terrais dans le coin de la caisse, terrifié. Le bras devant les yeux pour me protéger du soleil, l’autre ayant agrippé mon maigre sac que je collais contre mon torse comme bouclier de fortune, je voyais poindre mon ultime imprudence. J’étais embarqué dans cette caisse comme la vermine, j’allais être abattu comme la vermine. Mes lekkus d’un habituel blanc immaculé étaient ternis de poussière, tout comme mes sobres habits, recroquevillé contre moi-même entouré de fruits, j'espérais peut-être me fondre dans la masse. Petit, je me faisais tout petit malgré l'évidence cruelle de ma présence.

Or, après quelques secondes où j’eut pensé que mon cœur allait m’exploser dans la poitrine, la détonation du blaster n’arriva pas. Me risquant à baisser lentement mon bras, animal effrayé au regard fuyant, mes grands yeux bleus se posèrent finalement sur un casque froid ne laissant passer aucune émotion. Ma respiration ne ralentissant pas sa course, le danger toujours bien présent faute de pouvoir deviner les intentions de l’inconnu, je savais pourtant que les miennes étaient limpides. La peur viscérale de mourir et la pulsion sauvage de fuir.

Il me fallut user de toute ma puissance interne pour maîtriser mes instincts et permettre à mon cerveau d’opérer. S’il n’avait pas tiré, c’est que j’avais une chance de m’en sortir et ça n’allait pas être en courant au hasard dans le désert avec un type armé à mes trousses. Malgré le tremblotement incontrôlable de mes membres, je saisis ma chance pendant qu’elle était encore à portée de main de ma voix androgyne teintée d’angoisse.

- Je fais parti de la livraison. J'avais soufflé ces mots comme on aurait annoncé la venue d'un bourreau. Baissant les yeux en être indigne de soutenir le regard, je poursuivis mes murmures. Je vous en supplie, ranger votre arme, refermez la caisse et faites comme si rien ne s’était passé. Je ne causerai plus d’ennui, promis.

Gros coup de bluff, mais je savais que ma terreur réelle allait jouer à mon avantage. Après tout, comment questionner l’honnêteté d’une créature si insignifiante et transit de peur?

Cyd Mandraq
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Cyd savait pertinemment, et ce depuis le début, qu’un imprévu allait se produire à un moment donné. Que quelque chose allait merder, et venir tout compliquer. Et, lorsqu’il ouvrit le caisson de fruits, il en eut la confirmation.

Un ou une Togruta (Cyd était incapable de déterminer le sexe de l’individu présent dans la caisse), relativement jeune, se tenait là, à moitié recroquevillé parmi les meiloruuns. Couvert de poussière, il avait visiblement cherché à se tasser, à se cacher parmi les fruits, de peur d’être découvert. Mais maintenant pris la main dans le sac, l’inconnu, qui affichait une mine effroyable, tremblait de tous ses membres, trahissant la terreur qui le traversait à l’instant ; sa tentative de dissimulation, bien que ridicule, avait été animé par un instinct de survie plus fort que toute pensée raisonnable. D’abord décontenancé devant sa trouvaille, Cyd ne dit mot, tout comme l’autre, qui était incontestablement paralysé par la peur. Ce silence gênant s’éternisa ainsi sur quelques secondes, avant que le passager clandestin ne se décide à le rompre par des paroles suppliantes, à peine prononcées plus fortes qu’un murmure.

"-Je fais parti de la livraison , lâcha t-il soudainement d'une voix rapide et haletante, comme si la peur avait relâché un instant son entrave, lui permettant de s'exprimer à nouveau. Je vous en supplie, ranger votre arme, refermez la caisse et faites comme si rien ne s’était passé. Je ne causerai plus d’ennui, promis."

Cyd n’avait pas remarqué qu’il avait toujours son fusil blaster pointé sur le pauvre bougre. En vérité, il ne savait pas comment réagir face à une telle situation, et les justifications du mystérieux individu, qui lui jurait qu’il faisait partie de la cargaison, lui semblaient douteuses : jamais Quesh ne l’aurait engagé en toute connaissance de cause, sachant parfaitement que Cyd refusait tout contrat en rapport avec le trafic d’êtres conscients. Et le Trandoshan, bien que véritable intriguant, n’aurait jamais joué un coup pareil à son ami.

De toute manière, le visage crispé d’effroi du ou de la Togruta et l’empathie naturelle qu'éprouvait d'ordinaire le mercenaire le firent vite trancher : peu importe les raisons de la présence de l’inconnu dans la caisson, le plus important était de ne pas continuer à l’effrayer. Il n’avait pas l’air de toute manière bien dangereux (il avait plutôt l’air carrément inoffensif), et Cyd se reconnaissait en cet étranger : lui-même avait déjà, par le passé, voyagé en clandestin, et il ne savait que trop ô combien une traversée faite en tant que passager indésirable pouvait être terrorisante. Il comprenait donc très bien ce que ressentait le Togruta en ce moment.

Se rendant soudainement compte du ridicule de la situation, et de la crainte qu’il inspirait malgré lui, Cyd baissa tout doucement son arme et la rabattit lentement dans son dos, sur son épaule. De même, le côté froid et implacable que lui donnait son casque n’était pas d’une grande aide pour rassurer son interlocuteur : il le retira donc lentement, laissant voir à l’inconnu son visage juvénile et compatissant.

« N’aie crainte, pateesa . Excuse mes manières brusques, mais je ne m’attendais pas à trouver quelqu’un ; je voulais juste laisser respirer les meiloruuns ».

Cyd ne plaçait pas de grands espoirs dans le ton humoristique et léger qu’il avait volontairement employé, mais il s’aperçut néanmoins que le Togruta, à défaut d’être détendu et apaisé, paraissait désormais moins apeuré. Cependant, un rapide regard jeté sur le reste du contenu du caisson – que le mercenaire avait un instant oublié, toute son attention étant accaparée par la présence de l’indésirable - lui fit constater que de nombreux fruits avaient été dévorés par l’intrus, sûrement pour assurer sa subsistance bien plus que par gourmandise. Cyd, bien malgré lui, ne put s’empêcher de le maudire intérieurement, tant son acte irréparable allait compliquer les choses.

« Je ne sais pas qui tu es, ni ce que tu fais là ; mais dans l’immédiat, tu devrais sortir d’ici, ça ne doit pas être très confortable. D'ailleurs, j’imagine que le nectar sucré de ses saloperies dont tu t’es gavé (il désigna d’un signe de tête les meiloruuns déchiquetés) a dû te donner grande soif. Heureusement, j’ai à boire et à manger avec moi. Mais, pendant que tu te rafraîchis, j’aimerai que tu me dises ce que tu fais vraiment ici. Et surtout, comment tu comptes réparer les dégâts que tu as causés. »



Ubarhy Naash
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Haletant, attendant avec nervosité ma sentence, le verdict tomba finalement lorsque l’inconnu abaissa son arme avec une infinie lenteur. J’y décelais un geste méfiant, tout à fait classique lors de la découverte d’une personne là où ne devait siéger que des fruits, mais tout de même je me permis une inspiration en voyant que je n’allais pas être abattu sur le champ. Lorsque l’arme source de toutes mes angoisses fut disparut, je chassais de mon esprit mes dernières brumes de terreurs pour laisser place à un environnement plus propice à la réflexion et la discussion. Même s’il n’avait pas décidé de me trouer le crâne, je n’avais pour le moment aucune garanti d’être sauf et j’allais devoir jouer de ma seule riposte; la ruse.

Bien que le détournement du blaster ait été un réel soulagement ayant eu comme conséquence immédiate de faire cesser mes tremblements, la révélation d’un visage se voulant rassurant sous son casque de métal me laissa sans mot. Je cachais de toute mon adresse ma perplexité. Autant je me figurais une âme charitable qui m’aurait dit de dégager en laissant tous mes avoirs en gage de remerciement, autant de se dévoiler et de rendre cet air compatissant cachait forcément quelque chose de louche. Trop souvent les pires démons se cachaient derrière un minois aimable et charitable…

- N’aie crainte, pateesa. Excuse mes manières brusques, mais je ne m’attendais pas à trouver quelqu’un ; je voulais juste laisser respirer les meiloruuns.

Mes yeux azurs se fixèrent dans les siens violacés -première fois que je voyais cette curieuse couleur dans les iris d’un homme- et laissèrent transparaître une méfiance toute naturelle de celui pris au piège. Il était loin d’être agressif, certes, mais pour le moment je devais attendre de bien cerner le personnage avant d’adopter le comportement adéquat à ma rapide et imminente fuite.

- Il n’y a rien à excuser, répondis-je poliment.

- Je ne sais pas qui tu es, ni ce que tu fais là ; mais dans l’immédiat, tu devrais sortir d’ici, ça ne doit pas être très confortable.

Sans avoir attendu sa permission, je m’étais en effet redressé avec précaution. Comme je n’avais pas l’intention de prendre mes jambes à mon cou, pas tout de suite, j’obtempéra et me laissa descendre à terre. Autant m’éviter les féroces caresses de meilooruns le temps de ma conversation avec le mercenaire.

- D'ailleurs, j’imagine que le nectar sucré de ses saloperies dont tu t’es gavé a dû te donner grande soif. Heureusement, j’ai à boire et à manger avec moi. Mais, pendant que tu te rafraîchis, j’aimerai que tu me dises ce que tu fais vraiment ici. Et surtout, comment tu comptes réparer les dégâts que tu as causés.

Suivant son regard vers les corps décharnés des quelques fruits que j’avais consumé, je relevais des yeux coupables avant de refermer le couvercle du caisson, comme pour soustraire mes méfaits aux yeux d’un parent.

- Les fruits sont sensibles à la lumière, dis-je en justification en restant un moment dos à mon interlocuteur.

J’avais opté pour une dynamique de gente dame en détresse, ou d’esclave à libérer, au choix. Avec mes habits sales, y compris ma jolie jupe sable à mon grand damne, mon corps fatigué par le voyage et ma capacité naturelle à détourner la vérité, je comptais bien me servir de la grande générosité de l’inconnu s’il était vraiment un simple bon gars perdu dans le désert. Mais pour le moment je ne devais pas être trop gourmand, garder mon rôle crédible de petite chose fragile.

- Je ne veux pas abuser de votre générosité, Monsieur Cyd, si je peux passer le voyage hors du caisson ce sera déjà un luxe auquel je n’ai que rarement goûté. Je m’étirais de tout mon long suite à ces mots, mes muscles se déliant douloureusement de ce traitement que je leur avais fait subir. Mais je fais vraiment parti de la cargaison. On va à Cormond n’est-ce pas? Au centre des congrès, pour une certaine Louzia qui est de passage sur Brentaal?

Comment pouvais-je en savoir autant si ce n’était de la vérité de mon histoire? Et bien ce que Cyd ignorait, c’était que l’équipage ne se soucie pas vraiment d’une caisse de fruits quand ils discutent des ragots juteux sur l’une ou l’autre des figures publiques lors de longues croisières. « Ha bon? Le patriarche de l’une des riche et puissante maison de Cormond se serait éperdument pris d’amour pour l’héritière d’une autre maison? Une Rodienne en plus! Et à ce qu’il paraît c’est le genre de fille qui traîne dans les quartiers chauds de la ville qund elle vient en visite voir son papounet. Je l’ai même vu moi-même j’te jure! Un puissant avec une pute alien et étrangère en plus, tu parles, c’est juste pour le fric et la frime. Tsé quoi? On devrait aller se la faire la Louzia. Question qu’elle ait le souvenir heureux d’une vraie bonne baise avant qu’elle se marie avec l’autre con qui en a plein les poches, mais rien dans l’pantalon! »

- Pour ce qui est de réparer les dégâts, repris-je doucement, et bien je n’ai pas grand-chose à proposer… En guise de bonne foi, j’ouvris ma maigre besace pour montrer le contenu au mercenaire. Quelques vêtements en boule, des petits flacons de poudre de maquillage, le minimum pour survivre. J’y fouillais néanmoins et sorti deux crédits du fond du sac que je tendis à Cyd. Je peux donner ça, mais je ne sais pas si c’est assez. Sinon, je peux proposer un autre type de dédommagement pour vous… et sur ces mots, je commençais à déboutonner maladroitement les premiers boutons de ma chemise, le regard baissé, sans grande gêne, comme si l’action m’était protocolaire.

Cyd Mandraq
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Cyd n’en crut pas ses yeux lorsqu’il vit le Togruta commencer à se dévêtir. Il écarquilla littéralement ses orbites oculaires tant sa stupéfaction était grande. Avec une moue d’embarras, il stoppa d’un geste l’inconnu dans sa lancée.

« Non, non, désolé, ce n’est pas ça qui m’intéresse. Je ne suis pas quelqu’un comme ça. »

Visiblement, le/la Togruta avait l’habitude de jouer le gigolo ou la prostituée pour se décarcasser de ses ennuis pour s’offrir aussi facilement à Cyd. Ce dernier éprouvait avant tout de la pitié, consterné de voir à quoi l’inconnu se rabaissait dans la présente situation. Mais pour autant, conformément à ce que lui indiquait son éthique, il tâchait de ne pas le juger : le clandestin n’était ni le premier, ni certainement le dernier, à vendre ainsi son corps. Cela en disait long quant à ce qu’il avait pu subir auparavant.

Le regard de Cyd se posa mollement sur la main tendue du Togruta, qui présentait au mercenaire la maigre pitance qu’il avait à sa disposition.

« Ce ne sont pas ces deux pauvres crédits qui se battent en duel au creux de ta main qui vont changer grand-chose… Garde ça, tu en auras plus besoin que moi à l’avenir, je pense », lâcha le mercenaire dans un soupir.

Malheureusement, démuni comme il l’était, il allait être difficile d’obtenir une compensation, même maigre, de la part du Togruta. Merde. Qu’allait-il dire à celui à qui il devait remettre la caisse ? Car celui-ci voudra l’inspecter avant de remettre sa paye au transporteur. Et qui sait quelles accusations ce dernier proférera à l’encontre de Cyd, ou de Quesh. Le jeune mercenaire espérait désormais au fond de lui que cet acte irréfléchi commis par le clandestin n’aurait pas de lourdes et macabres conséquences. Il n'avait aucune idée de qui l'avait employé, et il espérait désormais qu'il ne s'agissait pas d'un employeur un poil trop intransigeant.

Il prit un moment pour réfléchir avant de reprendre la parole. Que devait-il faire ? Il fallait se décider vite. Le désert restait un endroit dangereux, propice aux rencontres fortuite et non désirées. Dans l’attente, le Togruta affichait une mine ahurie, inquiète, comme l’air de quelqu’un qui attendait dans l’angoisse son implacable jugement. Cyd tentait difficilement de rassembler ses neurones encore quelque peu abruti par la chaleur pour produire une pensée rationnelle. Devant l’impasse évidente que représentait la situation, son humanisme naturel pris le dessus :

« Déjà, ne m’appelle pas « Monsieur Cyd », c’est juste Cyd. J’apprécie ta politesse, mais elle est dans le cas actuel malavisée. Bon, en ce qui concerne les meiloruuns, je doute qu’on me flinguera pour ce que tu as fait. Je dirais que certains fruits ont pourrit, voilà tout. On me retirera ça de ma paye, tout simplement, » dit-il dans un soupir encore plus désabusé que le précédent, tentant, peut être vainement, de se convaincre lui même plus qu'autre chose.

« Ecoute, je n’ai aucun moyen de démêler le vrai du faux dans ce que tu me racontes. Après tout, je comprends. Et à vrai dire, je m’en fiche. Je ne sais pas qui est cette Louzia dont tu parles, car je ne sais pas qui m'emploi. Tout ce que je sais, c’est que je dois amener ce caisson à Cormond, le remettre à un intermédiaire, recevoir mon salaire pour cette tâche ingrate, et repartir. »

Attendant une réaction du Togruta, il remarqua que celui-ci restait impassible. Il attendait toujours de savoir ce que Cyd comptait faire de lui.

« Certains de mes collègues n’hésiteraient pas à te descendre, ici et maintenant, et laisser ton cadavre pourrir au soleil. D’autres se considéreraient comme déjà suffisamment cléments en te laissant repartir, quitte à te laisser errer dans le désert. Moi, bien malgré moi, je ne suis pas comme ça. Te laisser seul ici, sans moyen de locomotion pour gagner la ville, c’est te laisser mourir à coup sûr. L’après-midi, il fait une chaleur à faire crever un Rancor. Donc, je te laisse m’accompagner jusqu’à la capitale ; une fois arrivée là-bas, nos routes se sépareront et tu feras ce que bon te semble. Ça te va ? Si oui, dépêche toi de monter dans le landspeeder. Je n’ai pas envie de m’attarder ici. Nous avons déjà perdu trop de temps. »

En montant à bord de son véhicule, laissant son interlocuteur pantois, Cyd fouilla sa banquette arrière, et en ressorti une gourde d’eau, qu’il lança au clandestin ; le Togruta rattrapa maladroitement la bouteille, visiblement déconcerté par la situation. Il restait planqué comme un piquet, ne sachant comment agir.

« Allez, grimpe. On part. Maintenant. A moins que tu ne veuilles rester moisir ici. Et en cas d’embrouille avec une bande de pilleurs du coin, je te confie le volant. J’espère que tu sais conduire ; car moins, je ne peux pas manier mon arme et mener la barque ».




Ubarhy Naash
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Je savais pertinemment que Cyd allait me stopper dans mes retraits d’habits, je pouvais flairer les pudiques et les fragiles des tripes à des kilomètres. Mon corps valait bien plus que les quelques fruits que j’avais mangé, j’en étais certain, alors malgré l'impression que j'avais donné je n'avais jamais eu dans l'idée de mettre à terme ma propre proposition. Comme à mon habitude j’avais calculé le coup. C’était une tactique que j’avais peaufiné pour mettre le mercenaire en pitié, toucher une corde sensible et remettre en question sa propre humanité. D’ailleurs, le pauvre homme tenta de se justifier, comme quoi il n’était pas un mec comme ça. Mensonges, pensais-je, sa nature d’homme était plus forte que sa raison, même s’il tentait de se convaincre autrement. Même, cet excès de pudeur me parut assez hypocrite, mais je n’avais pas la latitude de lui faire la morale. Non, je devais rester dans mon rôle, mon rôle de pauvre bétail qu’on devait protéger.

Il refusa également mes crédits, il semblait finalement être du type à voler au secours de la veuve et l’orphelin. Tant mieux! C’était d’autant plus facile de s’en tirer avec un garçon au grand cœur. J’acquiesçait donc à son conseil de garder ma piètre monnaie que je fourrais dans mon sac, le refermant avant de le hisser sur mon épaule. Comme si mes tentatives de remboursement n’avaient pas été suffisantes, je repris ma moue apeurée et fort convaincante en attendant que Cyd décide de la suite des évènements.

Je compris que j’avais une victoire de plus dans la poche lorsque le mercenaire soupira longuement. Ça voulait tout dire, le reste des explications étaient accessoires. Je me détendis donc en l’écoutant me sermonner comme un père à son enfant qui aurait volé une glace. Il avait l’excuse toute trouvée de dire que les fruits étaient périmés et à ma grande joie il se fichait éperdument de mon histoire d’amour entre deux riches familles. À la bonne heure, je n’allais pas avoir à broder plus de mensonges autour de ma présence clandestine. Je gardais cependant mon air stoïque durant les explications, agissement typique des esclaves à qui on ne demandait ni l’avis ni les états d’âme outre la peur.

- Certains de mes collègues n’hésiteraient pas à te descendre, ici et maintenant, et laisser ton cadavre pourrir au soleil. D’autres se considéreraient comme déjà suffisamment cléments en te laissant repartir, quitte à te laisser errer dans le désert. Moi, bien malgré moi, je ne suis pas comme ça. Te laisser seul ici, sans moyen de locomotion pour gagner la ville, c’est te laisser mourir à coup sûr. L’après-midi, il fait une chaleur à faire crever un Rancor. Donc, je te laisse m’accompagner jusqu’à la capitale ; une fois arrivée là-bas, nos routes se sépareront et tu feras ce que bon te semble. Ça te va ? Si oui, dépêche toi de monter dans le landspeeder. Je n’ai pas envie de m’attarder ici. Nous avons déjà perdu trop de temps.

- Ou-oui ça me va! J’avais ouvert de grands yeux comme si tant de bonté avait été un cadeau divin. C’est très généreux, merci beaucoup Monsi -je me repris de suite en me mordant la lèvre- Cyd, juste Cyd.

Puis, en dernier coup de théâtre, je restais un instant planté là comme un crétin, comme si je m’attendais à ce qu’il n’ait dit ses paroles que pour me torturer avant de partir en toute trombe. Mon ahurissement justifiait à nouveau ma place de bête, lorsque le mercenaire me lança sa gourde, j’arrêtais ma performance en l’attrapant. Sans demander mon reste, je trottais jusqu’au landspeeder pour prendre place dans le banc passager en avalant goulument quelques gorgées d’une eau fraîche bienvenue.

- Et en cas d’embrouille avec une bande de pilleurs du coin, je te confie le volant. J’espère que tu sais conduire ; car moins, je ne peux pas manier mon arme et mener la barque.

- Je devrais me débrouiller je crois. Ça n’avait pas l’air si compliqué, à le voir faire, il fallait juste tenir une manivelle et un volant... Mais il y a vraiment des bandits? Pour le coup une réelle pointe d’appréhension se faisait sentir. Autant je m’en tirais plus que bien avec Cyd, autant les chances s’amenuisaient en face de pilleurs.

Et comme si nous avions cruellement appelé le destin, quelques minutes plus tard alors que nous filions à toute berzingue vers l’embouchure du canyon j’aperçut une ombre venant de plus haut…

- On a de la compagnie!

Cyd m’avait pris de vitesse, ayant visiblement repéré les véhicules habités de part et d’autre de notre chemin, en hauteur. Et, comme si ce n’était pas assez, un troisième bolide apparut de nulle part pour nous bloquer la sortie de ce trou à rat.

- Laisse la caisse aux vautours et fais demi-tour, on ne peut pas les affronter! Avais-je couiné de mon immense courage alors que mon cœur s’affolait de nous voir nous rapprocher dangereusement de ce qui ne pouvait être autre chose que des pirates.

Cyd Mandraq
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D’instinct, Cyd sût qu’ils étaient suivit. Un rapide coup d’œil vers les hauteurs du canyon lui permit de confirmer ce qu’il redoutait : au moins deux landspeeders (peut être plus) les suivaient. Et, à peine eut-il le temps de prévenir son compagnon d’infortune – en qui il n’avait d’ailleurs une confiance limitée - de ce qui les attendaient, qu’un troisième véhicule vint bloquer le passage s’ouvrant droit devant eux. Ils se retrouvaient coincés et pris en tenaille, comme de vulgaires rats womp.

Leurs agresseurs étaient plutôt bien organisés : Cyd ne s’attendait pas à être pris en chasse par trois véhicules à la fois. Généralement, les pilleurs de Brentaal agissaient en groupe encore plus réduits, et la seule vue d’un homme armé, ou du moins en capacité de se défendre, suffisait à les maintenir à distance. Ils avaient dû les repérer depuis un moment, lors du bref intermède malaise puis découverte du passager clandestin s’étant déroulé à l’entrée de la passe. Les bandits avaient donc logiquement eu tout le temps de se raccorder pour mener l’embuscade.

Cyd devait rapidement les sortir de là, car dans peu de temps, ceux du dessus n’allaient pas tarder à les canarder. Le mercenaire avait ralenti la course de son bolide, ce qui lui laissait quelques dizaines de secondes avant le choc avec le landspeeder leur barrant la route.

- Laisse la caisse aux vautours et fais demi-tour, on ne peut pas les affronter ! , lança abruptement d’une voix apeurée le Togruta.

- Ne soit pas naïf ! lui rétorqua Cyd. Ils ont sûrement aussi bloqués le passage derrière nous, pour couper court à toute tentative de repli. Et bonne chance pour tenter un demi-tour dans un passage aussi étroit ! Non, il faut passer en force. Parfois, il faut braver son destin !

Il était hors de question pour lui d’abandonner la caisse. Il avait besoin de l’argent de cette prime, et ce n’était pas quelques bouseux en landspeeder qui allaient l’en empêcher.

Sans prendre plus de temps pour réfléchir, il saisit son fusil blaster laissé sur la banquette arrière, se redressa tant bien que mal sur ses deux jambes et, une fois debout, plongea son regard dans la lunette de son arme.

- Tiens un instant la barre et continue d’aller tout droit ! cria-t-il à l’autre.

Sans écouter les contestations et exclamations de refus qu’émettaient son co-pilote, Cyd prit une grande inspiration, afin de stabiliser le plus possible son corps malgré le mouvement de tangue du véhicule. Toute son attention était porté sur son objectif, à savoir le landspeeder droit devant eux. A premier coup d'oeil, c'était une vieillerie, un ancien modèle tout fracassé, loin du bolide fringuant neuf que Quesh lui avait prêté. A son bord, deux passagers, un conducteur et un tireur. Ce dernier semblait attendre que leurs proies s’approchent suffisamment près d’eux pour pouvoir se mettre tirer ; en somme, il était loin d’être un as de la gâchette comme l’était Cyd.

En quelques millisecondes, il trouva à travers son verre grossissant le réservoir du véhicule ennemi. Nouvelle inspiration. Il ne fallait surtout pas se rater. Tout ce qu’il devait faire, c’était provoquer un peu la chance. Créer un miracle pour qu’ils puissent s’en sortir, avec une grosse explosion en perspective. Avant d’appuyer sur la gâchette, dans le but de se donner du courage, il ne put s’empêcher comme à son habitude de fredonner quelques vers d’un poème qu’il affectionnait tout particulièrement :

"Muse, rappelle-moi quelle cause, quelle offense à sa volonté, quel chagrin poussa la reine des dieux à imposer à un héros d'une piété si insigne, de traverser tant d'aventures, d'affronter tant d'épreuves ? Les âmes des dieux éprouvent-elles de si grands ressentiments ?"

Il stoppa son souffle, pour éviter tout tremblement susceptible de faire dévier son tir. Puis il appuya sur la gâchette. Le coup partit en un trait fulgurant, et fit mouche. Le vieux véhicule implosa d’un coup, et ses restes s'élevèrent lourdement dans l’explosion. Sa carcasse délabrée retomba dans un bruit sourd sur le sol rocailleux. Cyd avait réussi.

- Attention, accroche toi !

Cyd se rabaissa soudainement et abrita sa tête derrière le pare-brise ; le Togruta, dans un mouvement de mimétisme, l’imita et fit de même. Le choc avec les restes fumants du tacot fut rude et les secoua assez violemment. Néanmoins, ils étaient passés tous deux, plutôt sain et sauf, à travers les flammes. Un véritable miracle.

Cependant, Cyd se refusa toute exclamation de joie, car leurs problèmes étaient loin d’être terminés : les landspeeders en hauteur n’avaient pas cessés de les suivre, et, contrairement à ce qu'avait d'abord crû Cyd, ils n’étaient pas que deux. Une demi-douzaine de bolides conduits par des pilotes enragés étaient en vérité à leurs trousses, s’accrochant éperdument à leurs traces. Vu leur caractère obstiné, les pilleurs comptaient sûrement emprunter des pentes situées en amont du passage que parcouraient Cyd et son co-pilote, pente qui leurs permettraient de rejoindre ledit passage et de se lancer à leur poursuite. Pour ne rien arranger, leurs ennemis commençaient à tirer, assez maladroitement certes, mais à tirer quand même, sur eux.

- Garde la barre, tu te débrouilles plutôt pas mal. Moi, je vais m’occuper d’eux. Tiens bon, nous devrions bientôt être sorti !

Ubarhy Naash
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- Ne soit pas naïf ! Ils ont sûrement aussi bloqués le passage derrière nous, pour couper court à toute tentative de repli. Et bonne chance pour tenter un demi-tour dans un passage aussi étroit ! Non, il faut passer en force. Parfois, il faut braver son destin !

- Tu es malade! M’écriais-je avec horreur à sa rétorque. Brave ton destin si ça te chante, mais ne m’entraîne pas dans ta chute! Or, le mercenaire faisait la sourde oreille à mes paroles pleines de bon sens et me mit les mains sur le volant à mon grand désespoir.

- Tiens un instant la barre et continue d’aller tout droit !


- Aller tout droit… facile à dire! Vociférais-je en tentant tant bien que mal de me redresser pour mieux saisir les manettes de pilotage. Premièrement je n’avais jamais fait ça de ma vie et les conditions n’étaient franchement pas optimales à l’apprentissage; J’étais arc bouté entre mon siège et celui qu’avait occupé Cyd, les bras tendus et tremblants, le cœur pompant si vite qu’il menaçait de sortir de ma poitrine. Ha, chère et tendre caisse de fruit, que je te regrette…

Alors que je tentais de tenir la barre, comme le triste débutant que j’étais, le landspeeder commença à serpenter de droite à gauche malgré tous mes efforts pour garder notre cap. Pendant ce temps, mon très aimé camarade faisait des cabrioles et chantonnait à son cœur plaisant de petits poèmes. Je n’osais pas quitter la route des yeux, mais je cherchais désespérément le moyen d’arrêter cette machine infernale avant qu’on ne fonce dans le véhicule du pirate devant nous qui se rapprochait inexorablement. Mais il est aveugle Cyd? Il attend quoi pour faire quelque chose?!

Enfin, par je ne sais quel miracle, l’engin en face de nous explosa avec ses occupants. Mes yeux s’étaient écarquillés de stupeur au bruit sourd de la détonation et j’eus juste le temps de me baisser avant qu’un débris de métal ne vole à quelques centimètres au-dessus de mes montrals. À vrai dire, je n'avais même pas entendu l'avertissement de Cyd. N’eut été de mes réflexes gagnés grâce à l’écholocation, je me serais pris le morceau de carlingue en pleine figure et vu notre vitesse… mieux valait ne pas y penser. Mes mains s’étaient resserrées sur le volant, si bien que mes jointures en étaient devenues blême alors que nous passions à toute vitesse dans le nuage fumant qu’avait été l’un de nos poursuivant.

- Garde la barre, tu te débrouilles plutôt pas mal. Moi, je vais m’occuper d’eux. Tiens bon, nous devrions bientôt être sorti !

- Qui ça eux?

Les premiers tirs se firent entendre et je quittais la route des yeux bien malgré moi. Ils étaient six, six bolides et leurs bandits qui nous avaient pris en chasse et nous tiraient dessus. Je n’ai pas fait tous ces sacrifices pour mourir comme un con dans le désert, merde!

- Commence par dégager de ton siège alors!
J’avais hurlé ces mots, certes encore terrifiés, mais plus déterminés que jamais à m’en sortir.

Cyd obtempéra à ma demande et je sautais sur son siège pour au moins avoir un semblant de contrôle de notre appareil, chose qui n’était pas tout à fait gagnée d’avance. D’ailleurs, malgré la place de choix, notre landspeeder commençait à zigzaguer d’autant plus, ondulant dans le désert qui au moins avait ça d’avantageux qu’on ne risquait pas de se prendre un arbre en pleine face. Mon inexpérience aidait peut-être à mettre nos ennemis en déroute, les tirs passant de part et d’autre de nous, mais toujours se rapprochant de leur cible.

Je n’avais jamais été confronté à une fusillade pareille de toute ma satanée existence. La peur au ventre, le bruit des détonations me semblait presque irréel. Ma vision s'était concentrée en un point à l’horizon, comme un tunnel, et je m’accrochais à la vie comme mes mains s’étaient soudées au volant. Puis, comme une épiphanie, j’eus un rapide coup d’œil sur le tableau de commande de notre engin. Il y avait bien un interrupteur annoté « aimant » qui attira mon attention...

- Je ne mourrai pas pour des putains de fruits.

Comme si le bouton m’avait appelé à lui, je ne réfléchis pas plus et actionna l’interrupteur. Il y eut une secousse, un bruit de métal criant son infortune, puis nous prîmes de la vitesse. C’était ce que j’avais espéré. Je venais de nous délester d’un poids considérable, la caisse de meilooruns s’éloignant dans notre sillage, larguée dans le désert pour que quiconque s’en repaître. Or, la caisse était le cadet de mes soucis comme nous allions certes plus vite, mais surtout moins droit.

Cyd Mandraq
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Les véhicules ennemis gagnaient du terrain sur eux. Comme Cyd l’avait anticipé, leurs poursuivants avaient quittés les hauteurs et les avaient rejoint par des pentes descendantes creusés dans la roche du canyon. Désormais, ils les talonnaient de très près. Et, surtout, leurs tiraient dessus comme du gibier en fuite.

Malgré tout son talent dans le tir à longue portée, le Metellosan était incapable de tirer correctement, notamment en raison de l’instabilité du véhicule, dont il avait laissé le contrôle au Togruta. Les nerfs fragiles de ce dernier inquiétait Cyd : si pour l’instant l’autre se débrouillait plutôt correctement (dans le sens où ils ne s’étaient toujours pas crashé par sa faute), le manque de sang froid flagrant de son co-pilote lui faisait redouter le pire. Ses mains étaient crispés et fermement accrochés au volant, comme si celui-ci constituait une extension de son corps.

« Bordel ! Je ne sais pas s’il conduit comme un pied ou si c’est un as du volant caché, mais impossible, avec tous ces zigzags, de viser. Au moins, les autres n’arrivent pas à nous toucher ».

Cyd parvint, malgré les désagréments du transort, à neutraliser un de leurs poursuivants, un des conducteurs, qui fit crasher son véhicule sur les parois rocheuses du détroit. L’explosion provoqua un immense souffle d’air chaud, qui vint déranger quelque peu sa visu, mais qui ne stoppa pas pour autant l’infernale course de leurs ennemis.

Aussitôt la passe rocailleuse franchie, les sables du désert s’étendaient à nouveau à perte de vue devant eux. La nouvelle configuration du terrain, qui contrastait avec l’étroit corridor du canyon, permit aux bolides des pilleurs de s’étendre en largeur. A partir de ce moment-là, les tirs ennemis se mirent à redoubler d’intensité. Plusieurs d’entre eux avaient déjà endommagés l’arrière de leur landspeeder. Cyd, qui s’était couché à l’arrière du véhicule pour mieux viser tout en étant quelque peu protégé, n’y voyait plus rien, en raison de la trainée de poussière de sable que soulevait leur passage. Il tirait maintenant à l’aveuglette, espérant faire quelques dégâts. Le cri d’agonie d’un des assaillants vint l’informer qu’il avait réussi, par le plus grand des hasards, à faire mouche. Mais cela ne suffirait pas : l’ardeur de l’offensive ne faiblissait pas, elle allait en s’accentuant. Les pilleurs s’accrochaient à eux comme un Rancor à son os.

« Ils finiront par se fatiguer. Si j’arrive à en neutraliser encore un ou deux, ils se lasseront et prendrons peur », se dit le mercenaire, optimiste.

C'était sans compter sur l'instinct de survie de son acolyte par intérim.

« Je ne mourrai pas pour des putains de fruits. »

Ce n’est pas tant la déclamation grandiloquente du Togruta que le bruit lourd et métallique de la caisse de meiloruun s’écrasant sur le sol qui attira l’attention de Cyd. Et qui lui fit pousser un « Putain de merde ! » rugissant.

Leur landspeeder allait maintenant beaucoup plus vite, et à peine eut-il le temps de sommer le Togruta de faire demi-tour, qu’ils étaient désormais parti à toute allure à travers le désert. Les pilleurs, trop content de voir le butin qu’ils convoitaient tant leur tomber entre les mains, stoppèrent leur poursuite ; au moins n’étaient-ils pas animés par l’idée d’une croisade vengeresse. Mais désormais, chaque seconde qui passait éloignait inexorablement Cyd des précieux meiloruuns.

« Arrête toi ! Mais arrête toi, bordel de chiottes ! »

Rien n’y faisait. Cyd avait beau hurler, l’autre s’accrochait éperdument à la manivelle, et refusait d’entendre quoi que ce soit : il comptait bien tracer sa route, droit devant lui. Alors, désemparé, en proie à la colère et à court de solution, le mercenaire, presque mécaniquement, donna un coup de crosse de son fusil blaster sur la tête du Togruta. ce qui eut non seulement pour effet de lui faire lâcher le volant, mais aussi de renverser le landspeeder, qui s’éleva perpendiculairement au sol, envoyant valdinguer les deux hommes sur le sable.

Le choc fut rude. Ejectés brutalement du véhicule, ils roulèrent sur plusieurs mètres, et restèrent ainsi tous deux par terre, sonnés, pendant un long moment. Au loin, le landspeeder avait arrêté sa folle course au bout de quelques dizaines de mètres. Cyd fut le premier à se redresser, non sans mal : s’il n’avait miraculeusement rien de cassé, il sentait que son corps était tout endolori par l’impact avec le sol. En se relevant péniblement, le mercenaire constata que sa vision était quelque peu trouble. Prix d’une soudaine quinte de toux, il se dépêcha de retirer son casque : à sa grande surprise, il cracha un filet de sang qui recouvrit de rouge la dorure du sable à ses pieds.

Son regard plein de ressentiment vint lentement se porter sur le responsable de tous ses ennuis : le clandestin. Celui-ci, mal en point, rampait à quatre pattes, pataugeant dans le sable sur lequel il tentait de prendre appui. Visiblement, il reprenait peu à peu ses esprits, marmonnant des phrases inaudibles. La collision n’avait pas du arranger son état, après le coup de crosse que Cyd lui avait asséné.

« Espèce de raclure de merde ! »

D’un pas lent mais déterminé, Cyd combla les quelques mètres de distance le séparant de l’autre. D’une main, il le redressa violemment par le col, et, de l’autre, il lui asséna un puissant coup de poing en pleine face, ce qui renvoya le Togruta s’écrouler sur le sol.

« Ca ne sert à rien, mais ça défoule. Je suis sûr que ta petite gueule d’amour n’a jamais pris une raclée comme ça, pas vrai ? Coo ya maya stupa ! »

Néanmoins, pris de vertige, Cyd ne put aller au bout de ses menaces. La baisse subite d’adrénaline qu’éprouvait son corps lui fit ressentir pleinement les blessures ouvertes par le heurt de l’accident. Sa douleur et son épuisement, à la fois physique et mental, le contraignirent à s’asseoir.

Là, seul le vent vint couvrir les râles de douleur des deux individus, seuls et abandonnés dans l’immensité désertique. Le jour laissait définitivement place à la nuit, et, haut dans le ciel, la lune venait de prendre la place de l’astre solaire. La fraîcheur de la brise n’était pas de refus, après l’éprouvante chaleur de la journée.

Cyd n’avait pas fière allure, avec son armure et sa cape couverte de poussière, à trôner le cul par terre sur son tas de sable. Il était à bout de souffle, les poumons complètement à sec. En vérité, il ne ressentait qu’une émotion : le désespoir. La mission devait être routinière, et pourtant, elle avait inévitablement mal tournée. Adieu les crédits facile . Comment allait-il pouvoir envoyer l'argent nécessaire pour la pension de sa fille ? Elle dont le bien être dépendait énormément de la capacité de Cyd à fournir régulièrement de l'argent à la mère de la petite ?

"Ah, tu ne voulais pas crever pour une caisse de fruits, pas vrai ?" interloqua t-il le Togruta d'une voix mauvaise. "C'est tout vu. Tu vas clamser ici, seul. A moins... A moins que tu ne m'aides. Et que tu rattrapes ton erreur" .




Ubarhy Naash
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J’entendais des murmures. Un brouhaha lointain alors que je fixais mon objectif ultime; l’horizon. Pourtant, la valse n’en devenait que plus infernale, notre landspeeder prenant en vitesse alors que je perdais en contrôle. Mais tout ça m’était lointain, je ne pouvais entendre que mon cœur tambourinant dans mes tempes, que ma respiration erratique qui tressaillait à chaque nouveau coup de feu qui par le plus grand des hasards avait raté sa cible. Qu’en serait-il du prochain?

Puis, ce fut la douleur et le chaos. Mes yeux s’écarquillèrent lorsque je senti l’impact puissant au milieu de mon crâne, juste dans la partie de chair molle entre mes montrals et le début de mes lekkus. Était-ce l’ultime décharge de blaster qui venait de mettre fin à ma misérable existence? Combien de temps resterais-je conscient avant de me vider de mon sang et que ma vie s’écoule sur le sable indifférent de ce désert prêt à m’engloutir? La vive douleur me fit fermer les yeux et lâcher le volant que j’avais si fermement tenu, me recroquevillant dans mes derniers espoirs de vie en attendant la sentence. Je me sentais quitter mon siège, pantin désarticulé volant disgracieusement dans les airs vers sa chute inévitable. Si ce n’était pas la tête, ça allait être tout mon corps disloqué par le choc qui allait achever ma piètre existence.

C’est mon épaule qui toucha terre en premier, amortissant le reste de mon corps qui roula dans le sable sur plusieurs mètres avant d’arrêter sa course au milieu du rien environnant. J’avais respiré du sable, je toussais à m’en arracher les poumons, pas assez conscient pour réfléchir, juste suffisamment pour tenter de m’accrocher à l’écrin de vie qui était encore à ma portée. J’avais un mal de crâne infernal, mais pas seulement. Tout mon corps criait souffrance alors que je suffoquais et tentait de dégager les saletés de mes voies respiratoires. Même, à force de tousser, mon estomac se tordis et je vomis mes tripes entre deux quintes de toux et mes soubresauts.

Malgré toute mes peines, je tentais tant bien que mal de me traîner un peu plus loin de mon site d’atterrissage. En animal blessé, je sentais l’urgence de me cacher pour panser mes blessures. Et… je réfléchissais là?

- Je ne suis pas mort?

Je pensais difficilement certes, mais si une rafale de blaster m’avait bien touché à la tête, ma cervelle explosée n’aurait pas été capable de telle prouesse. Comme incrédule à la soudaine réalisation que j’étais toujours vivant, je passais une main -non sans peine- derrière mon crâne. Pas de sang. Juste une douleur terrible.

- Je ne suis pas mort.

Bon, cette constatation faite, je n’étais pas non-plus tiré d’affaire. N’ayant pas la force de me réjouir, mon corps m’avertissant clairement que je n’étais pas sorti intact de l’éjection du véhicule, je pris tout de même une seconde pour jeter un coup d’œil autour de moi. Pas de bandits, notre landspeeder était enlisé dans le sable et fumant et Cyd venait de se relever. Je l’avais presque oublié lui. Enfin, lui ne m’avait pas oublié apparemment…

- Espèce de raclure de merde !

Ça ne pouvait pas être bon signe. Alors que Cyd se rapprochait, menaçant, je tentais tant bien que mal de fuir, mais c’était peine perdue. Le mercenaire me souleva de terre, je ne pouvais rien faire pour me défendre si ce n’était qu’espérer qu’il achève vite sa vengeance. Un coup de poing violent portant toute la colère de l’homme me fut asséné en plein visage, seule partie plus ou moins épargnée par le crash. Je reculais brusquement vers l’arrière, mes bras échouant à me retenir alors que ma tête revenait s’écraser dans le désert. J’avais la mâchoire en feu, complètement sonné, des larmes silencieuses roulant sur mes joues tant même gémir me faisait souffrir. L’autre me crachait encore son venin, mais encore une fois je ne l’entendais pas.

Je tournais de l’œil. La douleur à mon crâne et à mon épaule étaient si puissantes que je n’arrivais pas à réfléchir. J’eus à peine la force de me tourner la tête pour vomir de la bile sur le sol. Là, j’étais sérieusement mal en point. Plus que jamais à mon souvenir. Finalement, je me laissais sombré dans le noir de l'inconscience.

Au moins, lorsque je revins à moi, je vis que nous avions été graciés de l’arrivée de la nuit. Le soleil était allé crever dans cet horizon que j’avais tant voulu atteindre avec sa chaleur et mes espoirs. Je tentais de me redresser après avoir maladroitement essuyé le filet de bave acide qui m’était resté en travers de la joue. Or, à peine eus-je l’idée de m’accouder que mon épaule gauche m’arracha un couinement de douleur. Je tournais la tête vers mes vêtements déchirés de part et d’autre par l’impact, déboutonnant ma chemise pour laisser glisser mon haut et découvrir l’horreur; un hématome noir s’était formé de mon biceps jusqu’à ma clavicule, tachant ma peau ocre de ses veines violacées. N’évaluant pas la gravité de la blessure, ne supportant pas sa vue, je remontais promptement mon vêtement en sentant un vertige. Était-il dû à la peur terrifiante qui venait de m’enserrer le ventre? Ou aux coups que j’avais reçu sur la tête et qui m’avaient laissé avec un esprit confus aussi blessé que ma carcasse?

- Ah, tu ne voulais pas crever pour une caisse de fruits, pas vrai ? La voix venimeuse de mon acolyte vint percer de son dard la brume de mon esprit. J’étais resté muet depuis mon éveil, sachant que Cyd représentait à présent la plus grande menace pour mon intégrité. C'est tout vu. Tu vas clamser ici, seul. A moins... A moins que tu ne m'aides. Et que tu rattrapes ton erreur

Pour le coup, ça c’était une proposition surprenante. Mon cerveau se réactiva d’un seul coup de sa veille, c’était ma seule porte de sortie.

- Tu n’en as pas eu assez de me frapper? Répondis-je d’un ton aussi sec que l’air ambiant. Je ne retournerai pas me faire trouer le bide par des voleurs. Qu’est-ce que tu veux que je foute de toute façon? Ma propre colère vint alimenter mon instinct de survie qui, à défaut de pouvoir fuir, s’était prostré en position défensive toutes griffes dehors. Alors ouais, je vais t’aider, pas de soucis, je vais le faire en restant ici, en retrait, pendant que tu vas faire ton job de mercenaire. Parce que tu sais ce qui est important? C’est que TOUTE la cargaison soit rendue et je te rappelle que j’en fait partie. Déjà bien heureux que tu n’ai pas tout foutu en l'air en laissant tes pulsions de vengeances prendre le dessus. Finalement peut-être bien que mon cerveau ne s’était pas encore complètement remis de ses émotions. Je tremblais de rage et de terreur, mes paroles assassines comme seule arme contre mon adversaire qui avait tout le loisir d’achever ce que la chute avait commencée…

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