Karm Torr
Karm Torr
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Vous voulez une pipe, Maître ?

Karm écarquilla les yeux.
Pour avaler de travers son jus de betterave.
(C’est bon pour la santé.)

Après une violente quinte de toux sous le regard attentif de son ancien Padawan Loé, l’Ark-Ni parvint à lâcher :

J’te d’mande pardon ?
Je vous proposais une bonne pipe, répéta l’angélique Consulaire.
Ah ouais. Bien ce qui me semblait.
Et un drôle de chapeau.
Je sens qu’on se moque de moi, là…
Avec un imperméable.
T’as vraiment été mal éduqué, hein.
Par vous.
Certes.

Le jeune diplomate fit glisser sur la table du self une dataclé.

J’ai appris que vous alliez jouer les détectives sur Ossus.
D’où la pipe.
Voilà. Les Consulaires de l’Ordre vous supplient…
Je sais, je sais…
… vous conjurent avec toute l’humilité et néanmoins toute la fermeté du monde…
Je sais !
… d’éviter d’interférer lors de votre séjour sur place avec toute négociation diplomatique de haut niveau qui pourrait s’y tenir.
C’est presque vexant, t’sais ?
Tout le monde vous aime beaucoup, Maître.
Hmouais.
Sauf les politiciens.

Karm haussa les épaules, avant d’empocher la dataclé et de se mettre en quête de Galdur. Pas besoin de ses dons de devin pour pressentir d’où les mènerait l’enquête sur Ossus. Une certaine Max. Humaine. Blonde. Au tempérament explosif. Ancienne consultante de l’Ordre. Karm avait plus que des soupçons : il nourrissait une quasi certitude et cette certitude assombrissait parfois ses pensées.

Mais l’agression dont Galdur et Lauren avaient été les victimes sur Osssus demeurait à bien des égards un fragment de ce vaste mystère que constituaient les événements d’Ossus. Pourquoi le Conseil avait-il tenu à les y envoyer ? Pourquoi certaines sections de l’armée républicaine avaient-elles intégré les Jedis dans leurs rangs ? Que diable venaient y faire les kajidics ? Qui avait eu l’idée absurde d’admettre la présence de flottes si importantes à une rencontre diplomatique ?

Presque rien de tout cela n’avait de sens aux yeux de Karm et démêler les raisons de la présence de Maxence sur Ossus était un chemin parmi d’autres.

Galdur, demanda-t-il dans un couloir à une Padawane occupée à retirer des échardes de ses tentacules ?
Euh… Non, moi, c’est Fi’sh N’Tchips, Maître.
Non mais, je veux dire : tu as vu Galdur ?
En train de parler avec des fermiers du côté des enclos, je crois.
Cool. Merci, Fi’sh.

Dehors, sur l’une des esplanades de l’Enclave, Karm contourna un groupe de jeunes gens entre de s’exercer maladroitement à des katas avancés sous le regard vigilant d’une Chevalière squib. Un peu plus loin, des représentants de l’AgriCorps étaient occupés à dresser un grand chapiteau pour accueillir le Festival du Chou, un événement culturel de premier ordre qui ne manquerait pas d’attirer des visiteurs de tout Dantooine dans les semaines à venir. Karm s’était d’ailleurs personnellement engagé à présider le jury du concours de la meilleure potée de chou. Il faut savoir assumer ses responsabilités.

Maître ! Maître !
Ouais ?
Oh la la ! Oh la la !

Une gamine d’onze ou douze ans, vêtue d’une robe d’initiée, tentait de reprendre son souffle à ses côtés après avoir cavalé pour le rattraper.

Il s’est passé un truc ?
Hé ben ! J’ai vu Brhor qui embrassait Ju-jurg dans la remise du hangar à speeders.
OK.
Avec la langue, Maître !
C’est important que tu me tiennes au courant de ce genre d’infos capitales, pour sûr.
Vous allez les punir ?
Pourquoi ? Ils s’embrassaient si mal que ça ?
Mais non, mais… euh…
J’te laisse méditer la question, OK ? Moi, j’ai rendez-vous avec un pote trandoshan. J’te promets de pas tenter de le lui rouler une pelle dans les bottes de foin.
Ben de toute façon, il serait trop grand pour vous, non ?
Hey !

Trop tard : la gamine était déjà partie.

Les jeunes ont plus aucun sens du tact, de nos jours…

Fort heureusement, le Jedi parvint jusqu’aux enclos, et conséquemment à Galdur, qui n’était que très légèrement plus grand que lui.

Salut, fit Karm, en frôlant le torticolis pour lever les yeux jusqu’à ceux du Trandoshan.
Meeeeuh, répondit une éopie quelques pas de là.
À qui l’dis-tu, meuf, à qui l’dis-tu…

Mais ce serait un débat pour plus tard. Pour l’heure, Karm entraîna son régulier camarade d’aventures sur un sentier qui longeait les champs désormais exploités par une coopérative réunissant Enclave et fermiers du coin.

Donc, débuta-t-il en se dispensant de préambules de pure politesse. Thann et moi, on part bientôt pour Ossus, histoire de tirer toute cette histoire au clair. J’ai lu les rapports, mais bon, j’imagine que les lendemains de catastrophe, c’est pas l’idéal pour avoir les idées bien au net, et j’me dis que peut-être t’as des trucs qui te sont revenus depuis. J’suis pas contre que tu me racontes les événements tels que tu t’en souviens. Puis d’avoir ton interprétation des faits, aussi.

Galdur était un chasseur, pas un expert de la criminalité organisée, mais Karm avait été sur le terrain avec lui et il avait confiance en son sens du jugement.

Comment t’as perçu les choses, toi ?
Thann Sîdh
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21.577, 17 Centaxday II (Kelona) • Sous l’Ëarendil

« Thann ? … Thann ? – Je suis là. Non, pas là, ici. Une main sortit soudainement d’une ouverture ménagée dans le fuselage du vaisseau. Le blindage avait été soigneusement défait pour permettre une opération qui nécessitait visiblement que la propriétaire de l’engin se glissât elle-même dans les entrailles de son vaisseau. – Mais qu’est-ce que tu fais là-dedans ? – Bah… Je corrige le système de flux ionisant à particules trivalves. – Thann Sîdh. Tu sais très bien que ce n’était pas ma question. Un énorme soupire émergea de la cachette mécanique aménagée par l’étrange bête. – Oui, je sais… J’arrive. J’ai encore le temps, nous ne nous sommes donné rendez-vous qu’à treize heures. – Soit, dans trois minutes, Sentinelle. On entendit un bruit de glingue et de glangue, puis même, pour les oreilles les plus attentives, un léger juron lâcher sur la Force avant que la troglodyte ne se décidât à sortir. Thann se laissa tomber souplement sur le sol, à quelques mètres en contrebas de son aile, et lorsqu’elle se redressa, Seïid put constater qu’elle se frottait avec une certaine vigueur le sommet du crâne : certainement l’origine du clang. Elle s’approcha en souriant, ignora les marques noirs sur le visage de sa partenaire, lui saisit doucement les joues dans ses mains en coupe et l’obligea à baisser la tête pour déposer un baiser magique et guérisseur sur la bosse en devenir.

« Je sais que tu n’es pas à l’aise avec cette enquête. Et je sais que tu ne t’en sens pas capable depuis le simili échec de la précédente. Mais tu es un Sentinelle, Thann, et cela fait partie de tes prérogatives maintenant. Tu vas continuer d’apprendre sur le terrain, comme tout le monde, et tu vas réussir à garder à distance tous les sentiments qui pourraient parasiter ton jugement. Tu es plus sage que tu ne le crois et, quand bien même, tu as toujours la possibilité de faire accuser Karm pour tout fiasco, tu aurais toujours au moins en partie raison dans tes accusations. La Miraluka soupira de nouveau mais cette fois, elle souriait. – T’es bête… Laisse Oni tranquille, ce n’est pas toujours vraiment de sa faute. Bon… Cette fois, elle embrassa doucement les lèvres de son médecin, comme un papillon effleurant un pétale, puis elle attendit encore, malgré l’urgence, se perdit dans ses yeux, avant de céder et de se serrer contre elle, comme si le courage de faire ce qu’elle ne voulait pas faire pouvait se trouver sur son épaule. – Tu l’as vue dernièrement ? – Quelques fois, rapidement. Depuis que je suis revenue de mes voyages avec Kiva, je n’ai pas eu l’occasion de réellement parler avec elle. C’est peut-être ce qui me dérange le plus, qu’il aura fallu que le devoir m’impose de la voir, après m’avoir tenue trop longtemps loin d’elle. J’ai le sentiment d’avoir manqué à mon rôle d’amie. – Arrête d’être si sévère avec toi-même. Tu pourras y réfléchir, je te l’accorde, si elle-même t’en fait le reproche. Vis dans le présent. – A force d’entendre parler de tes exploits aux commandes de nos engins, j’en oublie combien tu es sage, en fait. » Elles rirent doucement de concert avant de se mettre de nouveau en branle.

🌿

« C’est bon, vous êtes parvenue à retirer tout le noir de vos joues, Thann. J’ai vu avec Eddy, pour terminer l’ajustement sur l’Ëarendil, l’appareil sera prêt à temps. – Parfait, Boute, comme toujours. Merci. Bon… Tu as aussi envoyé un message à Lauren pour décaler un peu notre rencontre ? – Aussitôt que vous me l’avez demandé. – Allez, arrête de t’inquiéter, c’est géré, tu y vas, tu fais ton job comme tu l’as toujours admirablement fait, et tu l’aimes et elle t’aime, et on s’aime, et je l’aime, et Bouteboute nous aime toutes, tout ira bien. » Elles s’échangèrent un sourire, un nouveau baiser et Thann quitta la chambre pour retrouver Lauren dans un coin familier dans lequel, plusieurs fois, elles s’étaient retrouvées : la petite aire de pique-nique, cachée dans un bosquet, le long de la plage. Sur Dantooïne, le milieu du printemps avait apporté toute sa douceur et toute sa verdure, ce cocon semblait s’être présenté à l’esprit de la Sentinelle comme une évidence. Lorsqu’elle arriva, Lauren était déjà là. Thann portait une de ses tenues de voyage les plus habituelles et était suivie de près par B0-UT. Lorsqu’elle s’approcha, Lauren se leva et, spontanément, elles s’enlacèrent en guise de salut. Elles s’installèrent à la table, un panier avec quelques gourmandises s’y trouvait. Plutôt que de repousser à l’infini le moment douloureux, Thann décida, avec un petit sourire contrit, de l’affronter bravement. « Si tu le veux bien, B0-UT va procéder à l’enregistrement de l’ensemble de notre entretien, pour que je puisse m’appuyer sur ton témoignage le plus exactement possible et pour pour nourrir le dossier d’enquête. Tu peux y aller à ton rythme, dans l’ordre des souvenirs, essaie simplement d’établir un semblant de chronologie entre les fragments, d’accord ? En tous les cas, je suis là, si c’est trop dur, nous procèderons sans cela, tu es là en qualité de victime et de témoin, tu n’as rien à te reprocher, d’accord ? » Instinctivement, Thann attrapa la main de Lauren pour la serrer dans la sienne. Bien qu’elle fût là en tant qu’enquêtrice, elle ne pouvait nier totalement son affection et s’enfermer dans une froideur toute protocolaire – qu’elle avait, de toute façon, depuis longtemps dédaigné. D’un signe de tête discret, elle transmis l’ordre à son assistant de débuter l’enregistrement. L’enquête s’ouvrait enfin après n’avoir que trop tardé.
Galdur
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Enquête Jedi sur Ossus




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Le moins que l’on puisse dire, c’était que autant Galdur était relativement content d’avoir été en mesure de racheter ce vieux domaine à bas prix de la part de ce vieux propriétaire qui partait en retraite, autant il n’avait pas vraiment prévu qu’il allait devoir se taper toutes les rénovations lui même. Le ranch prenait la forme d’une l’un de ces grands hangar auquel était jumelée un petit dôme d’habitation, le tout dans cette architecture typique Dantooïnienne, slalomant entre le plastacier et le ciment, et bon sang ce qu’il avait besoin d’un bon coup de peinture et d’enduit ! Le ciment se fissurait et l’isolation était foutue. Techniquement cela ne dérangeait pas Galdur, qui avait l’habitude de vivre en bivouac, tente et feu de camp, mais s' il voulait avoir un espace décent pour élever ces Varactyls et ouvrir sa pelleterie, il avait encore beaucoup de pain sur la planche.

Au moins, il avait eu le temps de replanter des enclos à l’aide de piquets en bois taillés de fortune. Cela suffirait pour garder les Varactyls sous contrôle le temps qu’il n’avise de meilleures solutions. Pour une des rares fois de sa vie armée d’un pinceau et d’enduit pour reboucher les trous, le trandoshan passait donc son temps à essayer de remettre en état les lieux.

Oh, bon… Il pouvait bien se permettre une pause non ? Surtout que Karm voulait le voir. Il posa donc ses outils et profita de l’occasion pour se déballer un peu de pemmican qu’il se mit à dévorer en rejoignant et accompagnant le Maître Jedi, se pliant à sa demande. Pas besoin de longues tirades, ils se connaissaient bien, maintenant, depuis le temps qu’ils bossaient ensemble.

-« Pfaah ! Sacrée histoire, sh’aulah ! C’est encore un peu flou dans ma tête, mais j’peux toujours essayer d’expliquer ce qui s’est passé… C’est aller vachement vite et c’était pas du tout prévu. À la base, moi et Lauren on avait été envoyés pour aider les gens à s’bouger et à évacuer la ville. Tu sais, la procédure standard quoi… »


Oh oui, tout avait été rapide, et la situation était bien vite devenue hors de contrôle. Galdur était toujours en colère à propos de ce jour. Déjà parce que cela avait eu lieu dans un endroit où il n’avait quasiment aucun joker pour lui, la ville était loin d’être son terrain privilégié, mais en plus parce que les salauds qui avaient attaqués ce jour-là avait fait preuve de la pire bassesse et manque de noblesse possible. Pour un T’doshok avide de son code d’honneur et de ses traditions, cela était passé pour une insulte.

-« Donc ben… On faisait notre travail avec Lauren, en aidant les citadins à s’barrer de chez eux. Et puis d’un coup, PAF, le choc. J’me suis pris une balle en pleine tête ! J’ai encore la cicatrice aujourd’hui j’crois ! Juste ici ! »


Il passa un doigt sur le côté supérieur droit de son crâne. La blessure avait eu le temps de soigner et avait surtout longé son os pariétal sans pénétrer le cerveau. N’en restait aujourd’hui qu’une sorte de longue estafilade sur le crâne du trandoshan, qui finirait par disparaître dans les temps suivants.

-« La gamine m’a mis à l’abri dans un bâtiment, l’temps que je retrouve mes esprits. Comme elle était sous ma responsabilité, j’ai pas voulu la mettre en danger et j’lui ai proposé de l’exfiltrer et d’fuir. C’était d’mon devoir la sortir de ce guêpier. Mais là… Y’a … Ce type, qui sortait de je sais pas où, un genre de cow-boy spatial… Il a commencé à tirer sur les civils dans la rue et à faire des otages. Qu’il exécutait à tour de bras si on sortait pas pour l’affronter. Pfah ! Pathétique wanka ! Sans doute des gens désarmés et effrayés étaient les seuls personnes qu’il pouvait trouver à sa hauteur… »


Définitivement ce qui avait largement provoqué la colère du trandoshan aussi, qui s’était retrouvé dans le conflit d’accomplir sa mission et de continuer à escorter Lauren hors de danger, ou bien de se mettre à l’assaut pour permettre aux civils de s’enfuir sans plus de victimes. La dernière option l’avait finalement emportée.

-« Y’avait aussi cette gonzesse… J’étais occupé à essayer de choper ce foutu tireur pour l’empêcher de tuer plus de civils. Pendant qu’j’avais le dos tourné, j’crois que Lauren a essayé de lui parler, mais l’autre donzelle l’a juste tabassé sans diplomatie. Eh ! Si tu veux mon avis, c’était peine perdue d’avance… Mais la p’tite était innocente. Elle n'avait pas encore appris que parfois, y’avait que la violence qui permettait de faire comprendre les choses aux gens. Si j’avais sû… J’aurais… Euh… »


Non il ne savait pas. Quelles étaient ses options ? Abandonner la poursuite du tireur et laisser ce dernier s’échapper au mieux, tuer d’autres civils au pire ? Continuer de le poursuivre ? Mais il prenait le risque que Miss Lauren se fasse tuer dans ce cas, ce qui était l’exact opposé de son objectif initial. Le trandoshan peint avait l’air visiblement frustré. C’était peu de temps après cet événement qu’il s’était décidé à retourner sur Trandosha et revêtir ses peintures.

-« J’ai pris plus d’tirs en une journée qu’en des mois et des mois d’opérations. Dans la tête, dans la jambe, et ensuite, j’ai pris une rafale dans l’bide pour empêcher Lauren d’se faire tuer. Fort heureusement, ma Tatanka est intervenue juste à temps et à repousser l’foutu tireur. Ma fifille lui a montré… Mais j’m’en veux de pas avoir été assez fort pour protéger Lauren, tu comprends ? Même si j’imagine que j’ai bien fais d’prendre les balles à sa place… Enfin… Lauren m’a dit que cette gonzesse s’appelait Max je crois. Apparemment une ancienne consultante de l’Ordre, uh ? Tu vois, c’pour ça que faut reprendre en main c’te foutu Ordre. »


Des mois plus tard, Galdur était comme neuf et sur le pied de guerre, mais sa constitution de T’doshok y était pour quelque chose. Les blessures et les plaies se régénéraient, ses organes aussi. Ce n’était pas le cas de Lauren qui avait fait un aller en soin intensif.

-« J’ai trop hésité, Hm'basa. J'aurais dû faire appel à mon feu intérieur et la force de la Déesse pour sortir mon tomahawk et scalper ces jetar madle dès que je le pouvais, au lieu d'me balader et d'essayer d'faire au mieux. Être diplomate était un aveux d'échec et de faiblesse. »




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Lauren Aresu
Lauren Aresu
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Deux suspenseurs, situés de part d'autre du lit, diffusaient dans la pièce une lumière tamisée ; sur le mur opposé, l'ombre de Lauren vacillait. Porte et volets automatiques clos, de ces deux petites sphères clignotantes émanait l’unique éclat. La jeune femme était agenouillée sur le lit, au-dessous, les couvertures en désordre, une pile de datapads allumés étalés au devant de ces jambes croisées, et s’absorbait dans la lecture de l’un d’eux.


Il y avait bien longtemps que Lauren s’adonnait à cette activité avec un plaisir renouvelé. C’était ce goût prononcé pour les mots qui l’avait encouragé à pratiquer l’art de la calligraphie qu’elle n’avait pourtant plus touché. Depuis les événements de Knossa, recluse dans sa chambre, elle lisait tout son saoul, plus encore que d’habitude, et trouvait là un remède temporaire aux blessures de l’esprit. Elle le nourrissait, encore et encore, de mots, de phrases et d’histoires, noyant le reste dans ce flot continu d’informations. A défaut de faire taire les sauvage rêves qui peuplaient ses paupières closes, la nuit, ce cataplasme de fables et de fantaisies la tranquillisait durant la journée.


L’un des datapads émit un son discret. Lauren frémit et reposa l’appareil. Dans le même mouvement, elle déplia ses jambes, s’extirpa du lit et se mit à faire les cent pas là où le sol n’était pas recouvert d’habits jetés négligemment. Après chaque aller-retour, une émotion supplémentaire semblait l’habiter et se jouer d’elle. Elle tremblait à présent sous les ruades des sanglots.


Lauren avait attendu ce message dès la seconde même où, au sortir de la cuve de bacta, ses pensées s’étaient assemblées pour tisser cette toile d’amertume, de colère et de culpabilité. Ce soir-là, le message lui était parvenu, quelques lignes qui allaient droit au but. Celles-ci ravivèrent en elle une peur indicible, bien qu’elle mourût d’envie de retrouver cette femme et de comprendre son geste. L’Echani rongea un ongle déjà bien entamé, réfléchit puis répondit un « D’accord. » laconique.



Lauren attendait, appuyée contre la table de pique-nique, précisément là où les deux jeunes femmes s’étaient retrouvées, il y avait de cela une éternité. Une bourrasque s’engouffra dans sa crinière détachée, elle maintint son pardessus d’une main et tenait de l’autre un panier gourmand acheté sur le chemin.


L’aire de pique-nique gardait le même charme naturel qu’alors. Seule la table, jadis en bois flotté, était dorénavant en permabéton immaculé. Elle le regretta. Le sang battait dans ses doigts, ses ongles rongées jusqu’à l’os. Bien curieusement, la sensation se répercutait dans sa main artificielle comme si elle avait aussi rongé ses doigts de fer. Son datapad vibra.


Elle resta un moment immobile, fit un pas, revint en arrière puis porta à nouveau sa main gauche à sa bouche. Résignée, elle s’en alla, oubliant son panier, puis rebroussa chemin. La honte affaissait ses épaules. Le vent traînait dans le ciel de grands nuages grisâtres qui s’amoncelaient petit à petit et annonçaient la pluie.


Enfin, le bruit léger de ses pas la précédant, Thann arriva, le visage grave. La padawane avait longuement réfléchi à ses mots, elle avait rejoué cent fois, de cents manières différentes, ce qu’elle dirait, son témoignage. Lauren ne savait pourtant que dire, désigna d’un geste timide la panier, enjoignant la Miraluka de se servir. Elle se sentait stupide.


Finalement, elles s’enlacèrent.


Thann semblait elle aussi mal à l’aise ; Lauren était assez familière avec son visage pour qu’elle pût y voir les signes du tourment. La padawane frotta sa main doucement le dos de son amie et prit la parole. Sa voix chevrotait.


Je te remercie, Thann, tu sais que tu… ça, enfin, je sais que… Merci.


Lauren déglutit difficilement et ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit. Tout affluait en désordre, mais ses lèvres refusaient d’articuler les mots comme si les prononcer ramènerait à la vie ces instants terribles, cette maison, ces civils ; les forcer de nouveau à vivre l’enfer.


D’accord, je… je veux t’aider, je vais t’aider.


Elles s’assirent, face à face.


J’ai été dépêchée à Knossa, intégrée au détachement de maître Eleos. Lorsque l’explosion a retenti, nous nous sommes engouffrés, par binômes, dans les rues de la ville. Je me souviens uniquement de la panique ambiante, tu sais, des gens affolés qui courraient partout et… (L’image du jeune homme s’imposa à elle.) il semblait nous détester ? Et je… enfin nous… c’est flou, je sais plus, je sais plus du tout là. Je…


Elle s’emballa et sentit la main apaisante de Thann sur la sienne.


On aidait une famille dans une maison et c’est à ce moment qu’on a tiré sur Galdur. On s’est réfugié dans la maison, je l’ai guéri comme j’ai pu. Une femme s’est jetée sur nous, je me souviens qu’elle me tenait si fort. On a réussi à se barricader dans l’une des pièces de la maison. Galdur, il voulait fuir, lui, il était décidé à fuir. On l’entendait, cette femme, celle qui m’avait agrippée, je sais pas, elle avait… elle avait… les cheveux blonds et elle semblait folle. Vraiment folle, je te jure. Elle a dit qu’elle était une ancienne consultante pour l’Ordre. J’y crois pas.


Thann pressa sa main ; sans qu’elle ne comprît pourquoi, Lauren s’irrita, elle criait presque.


Pourquoi hein ? Alors tu sais ce qu’ils ont fait ? Pour nous faire sortir, comme si on était de simples rats pour eux ? C’est là qu’on a comprit qu’il y avait vraiment une deuxième personne. Ils se sont mis à tirer au hasard dans la foule. Un tir volontaire, précis. L’autre aussi criait, il avait l’air sadique, si néfaste… Possédé. Ça me donnait la nausée. Et… là…


Lauren se détacha de Thann, doucement, comme si tous ses muscles s’étaient soudainement engourdis, se leva et fit face au lointain, au bord du petit chemin qui menait à l’aire. Elle se perdit ainsi, hagarde, pendant une bonne minute, puis reprit place, les joues rougies, le visage impassible. Tous les détails que la jeune femme s’était efforcée d’oublier revenaient, aussi vifs qu’alors ; elle aurait voulu tout résumer en deux phrases, prononcées du même souffle, mais elle n’y parvint pas, s’épanchant sans plus pouvoir s’arrêter. C’était comme s’il fallait absolument qu’elle raconte tout, chaque sentiment, chaque pensée, chaque frisson pour se persuader qu’elle n’était pas folle. La grisaille envahissait son âme de la même manière qu’elle avait envahi le ciel de Dantooïne et faisait gronder des promesses de pluie.


–- Veux-tu arrêter ? intervint Thann doucement. Prendre le temps de manger avant de poursuivre ? Tu n'es pas obligée, si les souvenirs sont trop pénibles. Personne ne t'en voudra, pire, ça me fendrait le cœur de te faire davantage de mal encore.


Non, ça ira, mentit Lauren.


Les cauchemars, pendant les prochains jours, reprendront une vivacité toute particulière, mais il le fallait.


J’arrive pas à oublier ces coups de feu, accompagnés d’un cri déchirant. Ça résonne encore, là, comme je t’entends. Ça résonnait dans ce vestibule. Il était si mignon, ce vestibule ; j’aimais bien la décoration, y avait ces petites fleurs un peu séchées, cette magnifique porte de bois, du vrai bois, du vrai de vrai…


D’un geste lent, l’Echani sortit deux gourmandises du petit panier, en plaça une devant Thann, une devant elle, mais n’y accorda finalement aucune attention. Elle continua son récit, la culpabilité aiguë l’assaillant ; la façon dont elle avait convaincu Galdur de se battre, qu’ils ne pouvaient abandonner à la mort ces innocents. Puis, Lauren avait perdu la trace du Trandoshan, poussant l’épaisse porte boisée pour y retrouver, dans le vestibule, la jeune femme au visage déformé par la fureur.


Elle m’a posé des questions, Max, c’était son prénom. Elle baragouinait littéralement, elle parlait à sa bombe artisanale. Ses questions… Je… Je m’en souviens plus… C’était décousu, ça faisait mal. Sa bombe a explosé, soufflant la totalité de la pièce. Je me souviens avoir pensé que personne n’aurait pu imaginer que ce vestibule vivrait ça un jour, après avoir accueilli tant de personnes. C’est stupide, hein ? Je me disais qu’il avait vu des gens rentrer du boulot, ou s’embrasser, ou pleurer, ou jeter leur manteau. Tout pétait et je pensais à ça...


Le combat, Lauren s’en souvenait avec une précision particulière. Ce flot de paroles ne se tarissait pas. Sans doute portée par l’extrême vigilance que requerrait alors la situation, ses sens en alerte, elle avait absorbé les émotions désordonnées de son ennemie, les douleurs qui vrillaient chacun de ses muscles, le vis de l’étagère disloquée par l’explosion qui s’enfonçait douloureusement dans son épaule, de son visage, à l’autre, si proche. Jusqu’à que les deux femmes ne traversent la fenêtre. Elle décrit tout cela, fuyant le regard de Thann, parfois focalisée sur Bouteboute qui semblait ne pas se formaliser de toute cette histoire.


Après, c’est… C’était confus. Je me souviens juste de Galdur et du varactyl. Et quelqu’un qui hurlait, plus loin, qui hurlait de douleur. Oui, c’était un cri strident. Enfin, c’était calme. Je m’attendais à paniquer ; quand j’y pense, là, je m’attends encore à paniquer et je me demande sincèrement pourquoi c’était si calme. Dans mon esprit, dans mon cœur. Putain, c’est cucul ce que je dis…


Bien qu’elle essayât vainement, depuis son arrivée sur Dantooïne, de se souvenir de cette sensation unique qui l’avait pénétrée, jamais elle n’y parvint.


Max était là, juste à côté de moi. Galdur, pas loin… Je crois… Sérieusement, je te dis, je te jure, j’ai cru que j’allais mourir. Y a un moment hors du temps qui a duré… si longtemps. Je sentais son blaster encore chaud. Je me souviens que je me suis dit que c’était fini, j’en étais curieusement soulagée, j’en avais plus rien à faire. Je crois… qu’il y avait plus aucune douleur, je les sentais plus. Je voyais plus. J’entendais plus, ça bourdonnait. J’ai pas revu ma vie, j’ai pas pleuré, j’ai même pas été fière ou en colère contre moi. C’était… nul ! Y avait rien. C’est là, il me semble, que les autres Jedi sont arrivés. Et euh… voilà.


Sa tête la démangeait, sa bouche était pâteuse ; Lauren se sentait comme fiévreuse, grappilla l’une des deux petits sachets de jus de fruits et but. Un long silence s’égrena entre elle. Il semblait à l’Echani qu’elle venait de raconter l’horreur – son horreur – et qu’aussitôt, elle reprenait contact avec une réalité normale, incompatible avec le reste. Ne sachant quelle réaction adopter, Lauren regardait sans voir, par la force des choses, hébétée.

Thann Sîdh
Thann Sîdh
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Thann observait, silencieuse, la bataille intérieure de son amie. Elle-même, à son retour d’Erebrö, elle avait traversé une de ces périodes sombres. Que pouvait-on dire alors ? Luke Kayan avait su trouver les mots pour elle. Même si le temps, sûrement, et la patience de tous avait été le facteur le plus déterminant. Cela faisait des semaines, à présent, qu’elles étaient revenues d’Ossus. Dans la mémoire de la Miraluka, le visage tuméfié et le corps flottant de Lauren, dans une cuve de Kolto, étaient encore clairs comme gravés à l’acide sur l’argent. Avaient-elles déjà entendu les bons mots ? était-ce le temps qui manquait encore ? Certainement… Il lui avait fallu des mois pour émerger de son traumatisme, pourquoi, malheureusement, les choses en iraient-ils autrement pour l’aspirante consulaire ? Simplement, c’était l’inquiétude qui la rendait impatiente. Elle l’avait compris après une conversation avec le Chevalier Zluburg, le guérisseur qui suivait de près son ancien mentor et avec qui, elle-même, avait fini par se lier doucement d’amitié. Elle tenait à Lauren, elle voyait celle-ci dans une tourmente constante sur laquelle elle n’avait aucune prise ; elle eût voulu pouvoir conjurer le mal en quelques semaines par une séquence de mots magiques capables de ramener l’équilibre dans l’âme de la blessée. Ils n’existaient tout simplement pas. Ce qui l’avait convaincue aujourd’hui d’imposer un tel traitement à l’objet de son inquiétude, c’était la quasi-certitude de tous les guérisseurs que la compréhension de la situation aiderait à la guérison. Ramener des éléments d’objectif, on l’espérait, devait au moins permettre de lutter contre le sentiment profond de culpabilité qui habitait les réflexions de Lauren.

La certitude d’œuvrer pour une fin bénéfique ne suffisait pourtant pas à endiguer totalement la tristesse et la culpabilité qui s’infiltraient dans l’esprit de Thann. Elle était le chirurgien, à ce moment précis, qui ouvrait dans l’urgence le corps meurtri pour en extirper la balle. Elle n’aimait pas cela. Elle n’aimait pas voir la tempête dans l’aura de Lauren. Elle n’aimait pas… cette situation dans son ensemble. Alors, plutôt que de chercher cette fameuse séquence de mots magiques qui n’existaient que dans les fables et les holofilms, elle préféra décortiquer doucement le chapeau du muffin au chocolat que l’Echani avait posé devant elle pour en avaler un bout, puis tendre l’autre, jusqu’au bord des lèvres de son amie, pour l’inviter à le manger, au moins par réflexe : que ne pouvaient pas le sucre et le chocolat sur un cœur blessé ? « Oui, voilà. On fait une pause, tu as déjà beaucoup dit, d’accord ? Je vais encore te poser quelques questions, simplement pour essayer de débrouiller un peu ce que les émotions ont mêlé, mais si ça t’est trop pénible, encore une fois, nous pouvons nous arrêter à tout moment. Les muffins sont excellents, c’est toi qui les as fait ? Thann ne manquait absolument pas, les muffins étaient très bons, mais elle cherchait surtout à soulager un peu les pensées de sa consœur en y apportant un peu de la trivialité dont leur conversation, jusqu’alors manquait cruellement. Comme par miracle, la remarque parvint à faire sourire l’Echani. – J'aurais aimé, mais j'aurais probablement tout brûlé... Et... Oui, autant en finir, je t'écoute. – Okay, mais d’abord… Elle se leva, gagna le banc qu’occupait Lauren et s’assit à l’extrémité de celui-ci, elle fit ensuite un geste à son amie, l’invita à s’allonger et à poser sa tête sur ses jambes afin de profiter, dans ce moment douloureux, des doigts de la Miraluka glissant dans ses cheveux. Elle hésita un instant puis finit par pivoter doucement sur le banc et se laisser aller en arrière jusqu’à atteindre le giron de son amie. Sûrement, à cet instant, ce seraient-elles regardé dans les yeux. Là, il n’y avait que la visière de Thann et son sourire. Elle commença à jouer avec les mèches, piochant parfois un nouveau morceau de gâteau, pour elle-même, puis pour elle. Elle poursuivit son va-et-vient jusqu’à ce que deux de ces précieuses pierres moelleuses eurent totalement disparu, puis elle balaya encore un peu les mèches de Lauren avant de reprendre. – Je sais qu’il est très difficile de se souvenir de choses précises. Moi-même, d’Erebrö, j’ai l’impression de ne garder qu’un magma de souvenirs, éclatant parfois en fragments tellement clairs, et parfois se fondant tout à fait dans une pâte épaisse, insaisissable. Si tu parvenais simplement à te souvenir de quelques choses d’assez précis pour nous permettre de localiser cette maison. Un magasin, u nom de rue entraperçue, peut-être un numéro ? N’importe quoi qui nous permettrait de localiser où, exactement, cette personne t’a prise par surprise. » Les événements qui avaient suivis Ossus étaient tels que, malheureusement, les rapports faits sur la situation avaient été largement amputés de trop nombreux détails. Les équipes Jedis s’étaient séparées, trouvées isolées les-unes des autres, et bien souvent, les lieux d’entrée comme d’extraction avaient été renseignés approximativement. Ils ne pouvaient se permettre, une fois sur place, de tourner en rond durant des jours afin de retrouver l’endroit. Si Lauren se souvenait de quelque chose, peut-être parviendrait-elle à faire gagner longtemps au tandem d’enquêteurs.

Malgré le réconfort tendre dans lequel Thann tentait de l’envelopper, les efforts se lisaient sur le visage de Lauren, de même la peine. « Je sais... Je sais que le camp se situait dans les faubourgs de Knossa et qu'on a maraudé, avec Galdur, depuis l'extérieur vers le centre-ville. Il y avait une grande rue, large, qu'on a remonté jusqu'à un carrefour. Oui, il y avait un carrefour, la maison où on s'est réfugiés était juste à côté ! Cette maison, deux personnes un peu âgées, c'était beau à l'intérieur, bien rangé, un peu trop décoré, mais avec soin. Et cette porte de bois. Devait-elle insister ? Les informations étaient floues. Thann tentait de se remémorer les plans qu’elle avait consulté, quelques temps plus tôt, pour suivre le cheminement que Lauren lui proposait mais n’y parvenait pas. Des éléments ne coïncidaient pas, et était-ce seulement étonnant ? Il fallait espérer que l’incendie ne s’était pas propagé au quartier, et que la bombe qu’elle avait évoquée n’avait pas fragilisé le bâtiment au point d’entraîner sa destruction préventive. Elle décida que ce n’était pas la peine. De toute façon, l’enquête allait être difficile, pourquoi continuer de soumettre Lauren à cette torture ? La Sentinelle préférait conserver le labeur pour elle. Soit, l’enquête serait plus dure, elle ne prendrait pas le risque de voir une nouvelle fois s’effondrer son amie pour une hypothétique possibilité d’informations. Elle sourit, continuant de jouer doucement avec les fils soyeux de ses cheveux. – Okay, c’est noté. On va s’en sortir avec tout ça. Pas la peine de continuer encore. T’es la meilleure. J’ai encore deux bonnes heures avant le rendez-vous avec Oni, tu veux qu’on reste ensemble jusque-là ? A manger des muffins, boire des jus et se papouiller les cheveux ? Lauren donna son assentiment silencieux à cette offre et se laissa aller à la douceur.

Quelques temps plus tard, alors qu’elle gardait les yeux fermés, Lauren reprit la parole. « Thann ? Je peux te poser une question ? Thann eut un souffle amusé et répondit, naturellement : – Pour toutes celles que je t'ai posées, je peux bien t'en concéder une. – Comment tu me vois, là, à travers tes… yeux ? Une grande question… Elle avait essayé de partager plusieurs fois l’expérience, plus jeune, et avec son Maître aussi. Mais ces expériences n’étaient pas très au point et il lui faudrait encore un temps avant de pouvoir réellement répondre à cette question. – Je ne peux pas juste te le dire. Ce serait comme te demander de m'expliquer les couleurs. Mais... Dis-toi que tu es comme une petite luciole. Tu as ta Lumière, là-dedans, et je la vois, comme je perçois celle d'Oni, la mienne, celle de Seïid. Mais... J'apprends, petit à petit. Un jour, je te le promets, je te montrerai, comment je te perçois. Je suis sûre que c'est possible. – Tu la vois encore, ma Lumière ? Tu penses que j’aurais pu éviter que… que tous ces gens meurent si j’étais sortie plus tôt ? Et Galdur, j’ai… j’ai pas osé aller le revoir, on lui a tiré dessus par ma faute. Je la sens plus, ma Lumière… Entendre la détresse de son amie lui fendait le cœur mais, aussi, l’injustice de la situation gonfla sa poitrine d’une puissance sourde. Elle ne pouvait laisser Lauren penser ainsi plus longtemps. Elle ne pouvait lui laisser croire qu’elle avait, victime qu’elle était, la moindre responsabilité à assumer dans le délire brutal contre lequel elle s’était dressée. – Lauren, ça n'a tellement rien à voir. Ces gens, tu n'as pas pu les sauver. Je n'ai pas pu sauver Kolin, non plus. Ni tous ces gens sur Erebrö. Suis-je devenue une mauvaise personne ? Parce que je n'ai pas su, par ma seule volonté, devenir une déesse omnipotente capable de protéger tout le monde ? Ton coeur n'a pas changé, Lauren. Il est toujours bon. Tu n'étais pas prête, tu as fait tout ce que tu as pu, tu t'es sacrifiée. Que peux-tu attendre de plus ? De toi ? De quiconque ? Tu as offert ta vie, pour tenter de sauver des inconnus. Je ne pense pas qu'on puisse juger quelqu'un en regard de ce qu'il est capable de faire, je pense qu'il est plus honnête de regarder ce que l'on donne en regard de ce que l'on possède et ce que l'on attend en retour. Tu as donné tout ce que tu avais, tu n'attendais rien d'eux sinon les préserver. Je sais que tu trouveras mes mots creux, tout de suite, mais peut-être seras-tu capable de les entendre plus tard : tu as agi en héroïne, Lauren. Tu as agi en Jedi. Et... je suis fière de toi et je t'admire pour ça. » Sa tirade enflammée avait peut-être fait mouche, à la peine succéda le soulagement. Lauren lui murmura un merci discret, bien que son visage restât marqué par le souci. Il n’y avait pas de séquence magique capable de désamorcer d’un coup pareil conflit intérieur. Pourtant, elle demeura silencieuse et, un temps, accepta le havre de douceur que lui proposait Thann.
Lauren Aresu
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Lauren rouvrit ses paupières alourdies par la fatigue. Le visage soucieux de Thann et le ciel gris s’offrirent à ses yeux. Son ventre gargouilla. Les mains de son amie jouaient de ses cheveux, l’apaisaient, l’arrimaient à la réalité ; chaque geste doux emportait avec lui une image cruelle, laissant à Lauren des mots, à cet instant dépourvus de sens. Elle narrait machinalement, spectatrice de son propre drame. Bien sûr que la padawane était fière de son geste téméraire, mais l’héroïsme charriait avec lui son lot de responsabilités et de culpabilité, fusillant le reste.


Tu as revu Galdur ? s’enquit-elle. Il va bien ?


Les deux compagnons ne s’étaient pas revus, le courage avait manqué à Lauren. Les souvenirs d’un Trandoshan gentil et affable ne suffisaient pas à la rassurer. Se sacrifier était certes courageux, mais l’Echani avait également fait ce choix en lieu et place de Galdur lorsqu’elle avait insisté pour qu’ils combattent. Elle ne se le pardonnait pas et fuyait aujourd’hui son devoir.


Je ne l'ai même jamais rencontré, mais j'imagine qu'Oni pourra me le dire, je te le dirai. C'est un Trandoshan, tu sais, il faudrait une tonne de détonateur thermique pour en venir à bout. Je suis sûre qu'il va bien. Et qu'il s'en veut autant pour toi que tu t'en veux pour lui.


Les blessures du corps sont bien peu comparées aux blessures de l’esprit, pensa Lauren. Elle soupira.


Et… Je sais pas comment te remercier, pour l’enquête, pour ton temps, pour tout. Par dessus tout, je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose ! (Ses traits se durcirent.) Je veux vous aider !


Il serait normal, après tout, se dit-elle, que j’aide à réparer les torts que j’ai causés, que je sois là pour eux car ils sont là pour moi. De plus, bien qu’elle ne se l’avouât pas, Lauren souhaitait ardemment revoir cette femme, qui la terrifiait, pour comprendre son geste.


Cependant, Thann doucha aussitôt son espoir.


Tu nous as déjà aidé, Lauren. Laisse-nous faire notre part, maintenant. C'est à nous de t'aider. La seule chose qu'il te reste à faire, c'est de te remettre de tout ça, d'accord ? Nous irons courir les étoiles ensemble, plus tard, si tu veux bien de moi.


« Nous irons courir les étoiles » ; la formule aurait pu arracher un sourire à Lauren si la frustration n’inhibait pas ses pensées.


Rester là pendant que vous prenez des risques, quelque part, contre des gens qui n'ont pas hésité une seconde... Je... (Elle déglutit, son ventre gargouilla de nouveau.) A trois, on serait plus forts !


Ne dis pas de bêtises. Déjà, rassure-toi, nous allons enquêter. Personne ne va attaquer personne. L'arrestation viendra plus tard, si nous parvenons à localiser ces méchantes gens et si, justement, nous ne risquons pas la vie des nôtres dans l'opération. Personne ne se mettra en danger inconsidérément, d'accord ?


Les muscles de la jeune femme se tendirent. Une bourrasque humide lui arracha un frisson, mais intérieurement, elle brûlait. Victime d’un caprice, toute lassitude, toute affliction, disparus, nourrissaient ce feu ardent.


Puisque j’ai pas le choix… souffla-t-elle. J’attendrai qu’on puisse courir les étoiles alors…


L’ironie perçait dans sa voix.


Tu n'as pas le choix, je ne te le laisse pas, dit Thann, péremptoire, mais je te promets que d'ici-là, tu auras ta place dans l'Ëarendil pour m'accompagner.


Lauren ravala son amertume, prenant conscience de son comportement injuste.


Bon… D’accord…. susurra-t-elle piteusement, puis : J’avais oublié, madame la Chevalière ! Ça veut dire quoi, d’ailleurs, « Ëarendil », demanda l’Echani en écorchant le nom.


Ça veut dire « L'Ami des Etoiles », en Miralukese, la langue de ma planète d'origine.


Et, alors que les sinistres nuages s’amassaient au-dessus de leurs têtes, ne se décidant point à pleuvoir leur tristesse en compagnie de Lauren, les deux amies profitèrent de ce moment doux et ce fut la première fois que Lauren ressentit ce vide en elle, même temporaire, le vide d’un cœur sans fardeau.


Finalement, Thann se leva, suivie par Lauren, dans un mouvement uniforme, et lança, rebroussant le chemin qu’elle avait emprunté à son arrivée :


Allez, je dois te laisser, il faut que j'aille m'assurer que l'Ëarendil est prêt pour le départ, les moteurs chauds, et je ne voudrais pas qu'Oni se retrouve seul dans le cockpit sans surveillance : on ne sait jamais quelle idée de bidouille peut bien lui venir dans un environnement mécanique trop bien agencé.


Je vais rester un peu ici, moi. Je… euh… Bon courage, dit Lauren, l’œil humide.

Karm Torr
Karm Torr
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Bizarre.

(Vous avez dit « bizarre » ?)

Bizarre…

(Comme c’est bizarre !)

Bizarre, bizarre…

Karm avait écouté le récit de Galdur avec cet air impassible qui était propre à son ethnie, et dont il essayait désormais de se défaire, par courtoisie, mais qui le rattrapait quand il devait se concentrer. Pas un hochement de tête, pas un « hmm hmm » plein d’emphase pour indiquer qu’il était attentif, mais le Trandoshan avait probablement l’habitude de son manque de réactions.

Peut-être que retrouver les mecs qui ont fait ça sera finalement pas la partie la plus difficile de toute cette histoire. Ce que j’ai du mal à capter, c’est l’intérêt qu’ils y ont trouvé. À moins que pour eux, ça ait été un rodéo sauvage dans les rues d’une ville en proie à la panique, mais je me méfie des explications un peu trop simplistes.

Le Jedi s’arrêta de marcher.

Quoi qu’il en soit…

Son regard se perdit dans le vague, les collines qui se succédaient, les fleurs des champs, venus fleurir les vallons à l’heure du printemps, et tout le calme simple et incompréhensible des campagnes de Dantooine.

P’têt bien qu’un guerrier ne connaît jamais la force suprême qu’au moment de sa dernière bataille. On chemine vers la gloire qu’en se confrontant à ses faiblesses, et le chasseur doit avoir l’humilité de savoir qu’avant qu’il ne porte le coup fatal, ça peut être lui, la proie.

Lui-même ne manquait pas de cicatrices pour se rappeler cette sobre réalité.

T’es vivante, Lauren est vivante, pas mal de gens sur Ossus sont probablement vivants grâce à vous. C’est plus qu’un paquet de cités ne peuvent en dire dans l’histoire de cette guerre. Puisse la Force nous permettre de comprendre nos erreurs, et de les dépasser.

Le Jedi se retourna vers le ranch qui coûtait tant d’efforts à son ami.

À mon retour, j’t’aiderai avec les enduits, dit-il avec gravité. J’suis pas très grand…

(Sans blague.)

… c’est pratique pour les finitions.

Sur le chemin qui le ramena vers les pistes de décollage des vaisseaux de l’Enclave, Karm ne put que considérer ses propres erreurs. Car une conclusion venait naturellement. Max. Une blonde. Jeune. Agitée de la gâchette. Ancienne consultante de l’Ordre. L’hypothèse était déjà solidement ancrée dans son esprit depuis qu’il avait lu les premiers rapports. Mais elle n’était qu’une pièce d’un puzzle plus vaste, et dont le dessin demeurait difficile à deviner.

Bip.
J’suis d’accord, fit-il en retrouvant son fidèle astromech au pied du vaisseau de son ancienne Padawan.
Bip bip.
Beaucoup trop propre…

Il se sentit même obligé de s’essuyer les pieds avant de monter à bord et d’abandonner son paquetage dans un coin de la soute, pour que Blip se charge de l’y harnacher avec soin, au cas où le vol serait agité.

Les mains dans les poches, l’Ark-Ni se promena dans l’appareil. Définitivement plus élégant et plus rassurant que l’Épave, son propre vaisseau qui, étrangement, malgré tous les efforts de Blip, continuait, d’amélioration en amélioration, à sembler à deux boulons du naufrage interstellaire.

Toto, soupira-t-il, j’ai l’impression qu’on n’est plus au Kansas…
Bip ?
Non, rien, laisse tomber.

Quand la jeune Sentinelle fit son apparition, Karm, installé dans le siège du copilote, avait héroïquement résisté à l’envie de caler ses pieds sur le tableau de bord.

J’ai été sage comme une image, dit-il préventivement. J’ai rien touché.

Le Gardien fit claquer sa langue. Machinalement.

’Fin, genre, presque rien. Ce bouton-là. Et peut-être celui-ci. Hé euh… Ouais, non. C’est plus ou moins tout.

Un ange.
(En somme.)

Il n’empêche qu’il faisait un solide copilote et il eut même la décence de ne prodiguer aucun conseil, ni faire aucune remarque, au moment du décollage. Thann n’était plus sa Padawane, et s’il lui arrivait encore de la couver d’un regard tout paternel, il avait appris à la laisser voler très littéralement de ses propres ailes.

Donc…, reprit-il quand ils eurent quitté l’orbite et que les calculs hyperspatiaux défilaient d’eux-mêmes sur les écrans de bord. J’ai parlé à Galdur. En gros… Ils avaient pour mission d’évacuer la ville. À un moment, quelqu’un lui tire dessus. En pleine tête. Lauren l’emmène dans un bâtiment pour le protéger. Il décide qu’il faut s’exfiltrer, mais avant qu’ils puissent agir, un mec genre mercenaire débarque dans la rue et prend des otages pour les forcer à sortir. Hyper chelou. Y a une meuf qui débarque. Blonde, humaine, j’crois, jeune. Qui bosse avec le mercenaire. Galdur essaie de choper le tireur, Lauren essaie de parler à la meuf. Peine perdue : la meuf la passe à tabac, la situation dégénère et ils se barrent de justesse.

Devant eux, l’espace avait commencé à se tordre et, quelques instants plus tard, ils s’engouffraient dans le premier des vortex qui devaient les conduire à Ossus.

Globalement, c’est pas hyper précis, comme on pouvait s’y attendre, mais relativement instructif, je trouve. Ça a pas l’air d’être un scénario du je suis au mauvais endroit au mauvais moment, ça tombe sur moi plutôt qu’un autre, t’sais ? D’abord on leur tire en pleine tronche, ensuite on fait le maximum pour les débusquer, ça ressemble à un objectif bien précis.

Plus précis et plus concerté, en tout cas, selon lui, que l’interprétation qui faisait de ces événements un symptôme d’une violence purement chaotique.

Et Lauren ? Ça a pas été… trop… tu sais, quoi… La dernière, je l’ai emmenée en balade, elle était encore, disons, en plein rétablissement.
Thann Sîdh
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Thann Sîdh – #FFC59A
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« Tu as bien tout enregistré ? On ne sait jamais… Un détail qui aurait pu m’échapper, et puis… Tu pourras essayer de comprendre sur place, essayer de reconstituer une carte des événements à partir des déclarations et... » Elle laissa la phrase mourir là, le petit droïde patienta un certain temps, il ne comprenait pas vraiment lorsque les organiques abandonnait ainsi la parole et il se contentait, au bout de quelques minutes de silence, de donner sa propre réplique en l’absence de fin logique à la réplique de son interlocuteur. – Avez-vous terminé, Thann ? – Oui, oui… Désolée, je suis un peu confuse. – Ce n’est rien, j’ai déduis de vos expressions que cette conversation avait été éprouvante pour vous. J’ai effectivement enregistré l’ensemble de l’échange, et je pourrais aussi réaliser des projections à partir des éléments géographiques proposé par Lauren une fois avoir effectué des relevés topographiques de la cité ; j’ai tenté de le faire à partir des plans glanés sur l’Holonet mais malheureusement soit que ceci sont faux, soit qu’ils ne sont plus à jour suite aux récents événements, soit que les indications de Lauren ne sont pas justes, mais je n’arrive pas à établir de un lien probant entre les deux. – Ce n’est pas bien grave, peut-être parviendrons-nous à l’établir une fois sur place, et peut-être aussi Lauren a-t-elle les souvenirs brouillés par le traumatisme. Moi-même, je ne suis plus bien sûr d’être capable de tracer une carte d’Erebrö, ni même de m’y retrouver si j’y revenais. Quand nous arriverons sur place, tu prendras de l’altitude pour scanner efficacement la zone, d’accord ? J’ignore si les autorités locales nous laisserons effectuer de telles analyses à l’aide de la sphère de l’Ëarendil. – Bien compris, Thann. » Elle sourit, étrangement réconforté par l’assurance toute droïdique de son partenaire. Rarement, pourtant, elle avait trouvé le chemin entre la plage et l’astroport si long. La Sentinelle avait déployé toute l’affection et toute la douceur qu’elle avait pu durant leur échange et pourtant, quelque part, une étrange culpabilité la titillait : elle ne pouvait pas s’empêcher de considérer la vanité de cet interrogatoire qui, loin d’amener des éléments tangibles et très pertinents, avait surtout replongé Lauren dans un état terrible.

🌿

L’ancienne Padawane sourit, amusée par les aveux de l’Arkni : il avait allumé les projecteurs de l’aile et augmenté le chauffage. Elle l’écouta ensuite patiemment faire son compte-rendu tandis qu’elle pilotait pour élever en douceur l’aile blanche dans le ciel. C’était la première fois qu’ils partaient ainsi à son bord, de concert. Bien qu’elle eût aimé revivre cela dans d’autres circonstances, elle ne chercha pas à réprimer l’enthousiasme qui la gagna alors, tout déplacé qu’il fût. La flamme ne résista pourtant pas au souffle de la question. Thann respira profondément avant d’y répondre. « Le traumatisme est encore vif, pour elle. Plusieurs fois, j’ai eu l’impression de la perdre, tandis qu’elle me racontait les choses, elle divaguait un peu, s’arrêter de parler. J’ai même cru, un moment, qu’elle allait simplement me laisser là et partir pour errer sur la plage. J’ai beau savoir qu’il n’ y a que le temps et l’amour pour guérir ses blessures, ça n’en est pas moins douloureux de la voir dans cet état.

Alors… Après qu’elle a témoigné, je suis juste restée. On a discuté de tout et de rien. J’espérais que cela lui avait fait du bien jusqu’à ce qu’elle insiste pour venir avec nous, mener l’enquête. Elle n’a pas arrêté de me dire qu’elle voulait aider. Et je l’ai laissée là. Je sais bien que je ne pouvais pas faire autrement mais… Cet interrogatoire était-il bien nécessaire ? J’ai eu l’impression de tourner et retourner le couteau dans la plaie, rien de plus.

Boute, s’il te plaît, tu peux projeter sur l’îlot central l’enregistrement de notre conversation avec Lauren ? Je vais aller vérifier un truc dans la salle des moteurs, je reviens. »
La sphère volante sortie d’une paroi de la sphère géante qui servait de cockpit. Pour qui avait un jour jeté les yeux sur les plans du vaisseau, rien de surprenant, une galerie traversait l’ensemble de l’appareil uniquement prévue pour les déplacements rapides et discrets de son co-pilote attitré. Elle se dirigea vers le centre de la sphère et s’exécuta, se branchant rapidement à l’ordinateur central. Thann, elle, alla vérifier ce fameux « truc » qui en réalité s’appeler un Jaipasenviederevoircettescèneetjensuisdésolée. Une pièce bien singulière que l’on retrouvait dans chaque moteur de chaque vaisseau de la galaxie. Elle s’occupa vaguement le temps qu’elle estima être le bon, elle méditait dans la Force tout en accomplissant les gestes habituels de l’entretien des moteurs. Quand elle revint, elle trouva son maître devant l’enregistrement qui s’achevait presque. Elle le laissa terminer le visionnage puis lui rapporta les conclusions de Boute : « Mon p’tit génie volant n’a pas réussi à établir de corrélation entre les paroles et les plans de la ville. Les souvenirs sont trop confus, mais peut-être en étant sur place… Je ne sais pas. J’espère juste ne pas lui avoir infligé une séance pareille pour rien. Ceci dit, nous en avons pour quatre jours de voyage. Si jamais vous aviez des théories à m’exposer ou simplement des histoires à me raconter… J’ai beaucoup aimé mon escapade avec la petite Kiva, et je n’ai même pas encore eu le temps de vous en parler, ceci dit. » Elle sourit faiblement, elle ne voulait pas se laisser abattre par la morosité, renouer avec le sentiment de joie qui l’avait envahi tandis qu’ils décollaient tous deux pour la première fois en tandem parmi les étoiles, homologues et non plus maître et apprentie.
Karm Torr
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Les bras croisés, Karm se concentra sur l’enregistrement que Bouteboute lui diffusait. Lui-même s’était bien gardé d’interroger Lauren sur ses souvenirs. De crainte de blesser plus que de soigner. Malgré tout, il lui sembla que son ancienne Padawane tirait des conclusions bien pessimistes de l’entrevue avec son amie. Il se fit rejouer deux ou trois passages, surtout ceux qui concernaient les événements qui avaient précédé l’attaque elle-même, avant de hocher la tête à l’attention du droïde, quand la Miraluka refit son apparition.

Quatre jours enfermée avec le vieux, qu’est-ce qu’il faut pas faire pour la recherche de la justice et de la vérité, hein ?

Le vénérable (mais insuffisamment vénéré !) Maître Jedi s’étira sur son siège avant de se relever.

Fais moi visiter ton bolide, pendant que je te raconte d’intéressantes paraboles qui sont la preuve de ma sagesse, de ma démence sénile ou d’un subtile mélange des deux.

Et alors qu’ils s’engageaient dans les coursives du vaisseau — que Karm aurait plus volontiers baptisé Le Globuleux, mais il ne cessait de s’étonner que son goût des noms pour les engins spatiaux ne soit pas largement partagé par le reste de l’Ordre —, l’Ark-Ni ouvrit le feu avec :

Quand un mec a eu les deux jambes cassées, qu’il a passé des mois dans le plâtre et tout ça, et que tu le vois un jour, il se promène avec des béquilles, il est, genre, hyper essoufflé, et puis il s’arrête tous les deux cents mètres pour se reposer sur un banc. Est-ce que tu te dis qu’il rechute ou qu’il est en train de guérir ?

Le Jedi eut un bref regard pour sa coéquipière.

Parler d’un épisode aussi traumatique aussi longuement, quand on a été catatonique, en parler en donner des détails, OK, peut-être pas hyper précis, peut-être pas utilisables tels quels, mais des détails quand même, une certaine séquence des événements, un peu d’analyse, même si on peut pas en parler pendant des heures et avec légèreté, c’est un peu comme sortir du plâtre. Et je crois que… Comment dire ? J’crois que, de la même manière que quand t’as eu les jambes cassées, ça fait plaisir quand un pote te propose de te promener sans insister pour te scotcher à une chaise anti-grav, quand t’as vécu un truc éprouvant, tu te sens peut-être plus valorisée quand les gens te traitent comme une solution à ton propre problème et un élément indispensable de l’investigation, plutôt que d’éviter le sujet comme si t’étais trop fragile pour jamais t’en remettre.

Karm laissa échapper un soupir.

C’était mieux syntaxiquement dans ma tête, hein… En ce moment, le basic et moi, c’t’un peu… ‘Fin bref.

Comme la plupart des Ark-Ni, Karm avait toujours bataillé avec les langues étrangères, et sa récente décision de se plonger dans le huttese à cause de la nouvelle situation de l’Ordre faisait l’effet d’un carambolage dans son cerveau.

Bref. Je serais toi, je verrais plutôt votre conversation comme un succès plutôt qu’un échec, et une étape sur la voie de la guérison qu’un danger de retour en arrière. Quant à mes théories…

Haussement d’épaules.

Ben, une meuf, humaine, jeune, un peu cinglée, qui s’appelle Max et qu’a été consultante pour l’Ordre, je suis pas sûr que y ait cinquante milles possibilités, hein. Cela dit… Je crois que y a plusieurs aspects dans cette affaire. Savoir qui a fait quoi. J’y reviendrai. Savoir qui a commandité quoi, c’est encore une autre paire de manches. En admettant que ça ait été ma mercenaire précédemment favorite, telle que je la connais, elle se lance pas sur un théâtre de guerre pour la beauté du geste et y a du fric derrière tout ça. Et même si c’est pas elle… À moins de supposer qu’on ait affaire à deux parfaits sadiques, une hypothèse que je trouve en général pas hyper féconde, y a probablement des gens derrière ces exécutants. Et ensuite… Quelles sont les motivations ?

J’crois que notre expérience collective sur Ossus a bien montré que personne n’y faisait vraiment ce qu’il était censé y faire et que les apparences y étaient souvent trompeuses. La République qu’arrive comme une oie blanche en confiant une partie de ses troupes aux Jedis avant de reprocher aux Jedis d’être là. Le Conseil Jedi qui décide de nous ramener sur place pour des raisons qu’on va charitablement qualifier d’un petit peu opaques. Les Siths qui ont l’air contre toute attente d’être les plus de bonne foi dans cette histoire, c’qui prouve quand même un sérieux laisser-aller niveau qualité psychopathique… ‘Fin bref.

J’suis pas machiavélique et puis j’ai pas une passion pour les mauvais films SM, mais si j’étais un Sith, par exemple, et que je cherchais à décrédibiliser l’Ordre Jedi aux yeux de la République, p’têt que ça me coûterait pas grand-chose d’embaucher une blonde pas trop regardante pour lui dire d’expliquer qu’elle s’appelle Max et qu’elle est consultante pour l’Ordre tandis qu’elle tabasse des gens de l’Ordre. Si j’étais un Chancelier véreux soucieux de décapiter le leadership Jedi, génération montante compris, en décrédibilisant les jeunes Maîtres pleins d’avenir et de charme ravageur, pareil. C’est pas le scénario le plus probable, mais c’est pas non plus impossible.

Comment on va arriver à trouver la vérité sur tout ça… Je sais pas trop. Fort heureusement, j’ai une Sentinelle avec moi, alors mon plan c’est surtout de te laisser faire tout le boulot, pendant que j’incarne l’autorité derrière toi, avec coolitude et décontraction.
Thann Sîdh
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Thann ne put dissimuler la surprise qui la saisit : était-ce seulement possible ? Que la Maxence Darkan de son mentor fût également celle qui avait infligé ce traitement à Lauren ? Comment était-ce seulement possible ? Pensable, même… « Mais... Je ne comprends pas. Comment aurait-elle pu ... ? N'êtes-vous pas proches ? Ne vous a-t-elle pas longuement aidé ? Comment ... ? A situation exceptionnelle, réaction exceptionnelle : les mots manquaient à la Sentinelle et c’était, s’il en fallait encore une, une nouvelle preuve de sa sidération. – Bonnes questions... Mais est-ce que la République, avec qui on est proche depuis des millénaires, vient pas de nous jeter comme des malpropres, pour des raisons absurdes, sans vrai justification, et sans que tous les gens qu'on comptait pour nos amis aient levé le petit doigt ? Je sais pas... J'suis pas le mieux... 'Fin tu sais, rapport à... Ce que j'veux dire, c'est que la loyauté, c't'un truc complexe, et on sait jamais tout à fait... Qui fait quoi pour qui et avec quelles contraintes... La stupeur passait, le sujet se déployait et les méninges de la Miraluka sortaient de leur immobilité. – La République, l'Ordre Jedi, ce ne sont pas des relations interpersonnelles, Oni. Je n'aime pas l'Ordre comme je vous aime. Ce n'est... pas pareil. Je veux dire, ce n'est pas la même façon de se lier. Certes, elle n'avait pas de devoir envers l'Ordre, j'imagine, mais... Enfin... Qu'est-ce que vous avez fait pour la fâcher à ce point ? Ou alors... Elle a failli tuer Lauren. Pire, je pense qu'elle l'a volontairement laissée en vie dans l'espoir de la briser. Comment ... ? Ses pensées étaient allé vers l’innommable, encore, et comme sur Erebrö, elle ne parvenait à concevoir l’horreur. Une telle noirceur, une telle volonté de nuire, d’annihiler, de voir souffrir. Cela la dépassait. C’était une idée que de le concevoir, c’en était une autre que de le saisir véritablement. – Qu'est-ce que j'ai fait pour... OK... Ben écoute, je sais pas. Je suis un abruti et un mauvais juge des caractères, qu'est-ce que tu veux que je te dise. C'est comme ça, c'est mon côté mec décevant... J'ai révoqué ses accréditions de l'Ordre l'année dernière, parce qu'elle avait fait cavalière seule en pleine mission. Elle a pété une durite, je pensais qu'on s'était plus ou moins réconciliés. Peut-être pas. Peut-être qu'elle est juste traumatisée par ses expériences avec les Siths. Peut-être que pour elle le boulot passe avant l'amitié. Accessoirement, probablement ce qu'elle pense de moi aussi, et dans un certain sens, elle aurait pas tort. »

Un silence lourd de culpabilité répondit aux aveux de l’Arkni, mais cette culpabilité était partagée et les lèvres pincées de Thann montrait sa contrition. Laborieusement, elle entama l’humble présentation de ses excuses : « Non, non, je ne t'accuse de rien. C'est juste que je cherche à comprendre, aussi, comment elle a pu ainsi basculer. Et puis... Je sais l'effet que tu fais sur certaines jeunes filles, Oni. Si quelqu’un doutait de la capacité de la Miraluka sitôt qu’il s’agissait de s’expliquer, sitôt qu’elle s’empêtrait dans ses sentiments, cette audace dans la présentation sincère de ses remords venait de lui confirmer combien les interactions sociales délicates n’étaient toujours pas devenues sa prédilection. Et je sais que souvent, cela te passe un peu au-dessus de la tête. Tu crois... Qu'elle aurait pu être déçue ? De votre relation ? Les passions déçues peuvent... Je sais pas. Je n'arrive pas à concevoir une telle malveillance sans cause. Si l'objectif des Cartels était de s'en prendre aux Jedis, j'ai l'impression... qu'elle a cherché à aller plus loin que cela avec Lauren - si jamais c'était bien elle. Ses mots ne firent pas tout à fait mouche, ils n’en furent pourtant pas tout à fait sans effet. – L'effet que ? M... Mais non ! Mais n'importe quoi ! Je suis... En plus j'ai pas... Et puis ! Eeeeuh... Hm... B-Bref. Y a quand même de la marge entre être légèrement frustrée que je refuse ses avances, euh... Charnelles. Et se mettre à tabasser des gens sans raison. Je sais pas. Dans ce genre de situations, j'ai toujours du mal à penser que les choses sont, genre, purement personnelles, tu vois ce que je veux dire ? Peut-être qu'elle a voulu s'en prendre spécifiquement à une Jedi. Que c'était une manière de passer ses nerfs. Mais pour des gens comme Max, dans une zone de guerre, toujours la même guerre, toujours le même affrontement, toujours les civils qui paient parce que les Siths et les Jedis se retrouvent dans la même pièce... La différence entre eux et nous, elle est anecdotique. On est les mecs avec des sabres qui mettent la galaxie à feu et à sang parce qu'ils sont pas foutus de régler leurs affaires en famille. Alors quand t'as été victime de ça jusqu'à en perdre un bras, peut-être que tu fais plus la distinction. » De là en à en nourrir une haine si puissante ? Maxence reprochait aux adeptes de la Force le mal qui lui avait été fait ? Et en réponse elle décidait d’en infligeait un bien plus grand sur des gens simplement semblables à ceux qui l’avaient autrefois blessée ? La Jedi éprouvait bien du mal à saisir le cheminement complexe de sentiments capables d’amener quelqu’un jusque-là.

« Ce qui veut dire que, finalement, nous sommes responsables, de loin en loin, de tout cela ? Nous sommes le remède parce que nous avons été le poison ? Décidément... Cette enquête promet de grande révélation. Un pâle sourire. En cela, j'imagine qu'il faut voir notre exil de la République comme une chance à saisir ? Une chance de... Revoir tout ça ? – Toi et moi, personnellement responsables ? Toi, certainement pas. Moi, peut-être, d'une certaine façon. Quant à notre exil... C'est injustice, pas une chance, mais même la malchance ouvre des opportunités. Si demain Bouteboute fourre tous mes vêtements dans l'incinérateur, c'est peut-être une opportunité pour moi de changer de style. J'pense qu'on peut être à la fois... Déterminés à créer quelque chose de nouveau et de meilleur sans se flageller pour un passé auquel on a pas eu tellement de part. – Je sais bien que le fait d'être une star te monte un peu à la tête, Oni, mais tu n'as pas plus de responsabilité que moi. Tout cela... Des millénaires de scission d'avec les Siths, des guerres à répétition et des paix qui n'ont jamais duré. La mémoire collective, nous n'y avons pas contribué plus que cela, mais la dette nous revient. Elle soupira. Depuis l’exil, Thann s’était efforcée de ne plus vraiment y penser, du moins, de ne plus retourner le problème en tous sens, de ne plus chercher à trouver les fautes, à compter les points. Le divorce était consommé, ils étaient des terroristes aux yeux de la moitié de la galaxie. – L'autre jour, Seïid me disait que la République, les Jedis, c'était comme une rupture. Qu'une rupture, ce n'était jamais une mauvaise chose, que c'était l'occasion pour chacun d'être à nouveau heureux lorsqu'ils avaient trop changé pour l'être encore pleinement ensemble. Une pause, puis elle reprit, incertaine. – Et puis on s'est souvenu de la tête du Chancelier et on a été un peu écœurée par cette image. » Certes la mesquinerie ne comptait pas aux nombres des vertus Jedi, mais elle avait parfois ses propres vertus au moins équivalente et, cette fois, elle permit à Thann de rire. Elle parvenait enfin à se détendre un peu. – Non mais je veux dire, responsable, dans le sens, par rapport à Max, quoi. Pas responsable de la situation générale. Justement. Je trouve que beaucoup des gens qui nous entourent... S'identifient beaucoup trop à nos institutions. C'est ça qui les rend en apparence immuables, c'est ça qui empêche la critique et l'innovation théologique, c'est ça qui... C'est important d'être lucide sur ses erreurs personnelles et collectives, mais c'est aussi important d'accepter qu'on peut à la fois hériter d'un truc, en concevoir une certaine fierté, et le juger imparfait. Améliorable. 'Fin bref. Notre relation avec la République était imparfaite, mais se faire mettre à la porte comme des malpropres parce qu'on a été là où l'armée a voulu qu'on soit et qu'une fois, on a eu un chancelier à la moralité douteuse, sans que tout ça fasse beaucoup frémir l'opinion publique, faut avouer que c'est un peu... Ouais. Spécial, comme rupture, hein. Psychédélique, même. – Le fait est qu'avoir associé le nom des Jedis aux débuts de la guerre ne nous aura clairement pas servi dans l'opinion public. Et puis, nous le savions tous les deux, nous n'arrêtions pas de nous le dire, que nous nous étions trop déracinés. Le coup de bâton est rude, mais... Je ne sais pas. Enfin, il nous reste surtout à faire au mieux pour retrouver une situation saine pour tous. » Elle sourit, comme si la bonne volonté allait seule suffire à réaliser ce travail titanesque.

Après un flottement, la Sentinelle réalisa qu’ils n’avaient finalement toujours pas quitté le cockpit, malgré leurs déclarations d’intention premières. « Tu veux une visite détaillée ou un simple ‘je t'amène quelque part, tu regardes avec de grands yeux à peine expressifs combien cela est trop propre et trop calibré pour ta fibre Arkni, mais tu me dis que je suis géniale quand même à la fin’ ? » Le taquina-t-elle avec le sourire. – Une visite détaillée, évidemment. Et je regarderai tout avec des yeux expressifs et des exclamations d'ébahissement, comme : "ah." et "OK. Cool." Bouteboute peut filmer pour la postérité. Très bien. Mais autant vous y habituez un peu maintenant, si nous parvenons à obtenir les financements, peut-être l'Ëarendil est-il le prototype d'une série de chasseur à destination des Sentinelles. Sa polyvalence, sa vitesse et sa furtivité le désigne comme tout indiqué pour cet emploi.

Donc… Ici, comme tu l’as deviné puisque c’est assez évident, nous sommes dans le cockpit. Cependant, ce cockpit à ceci d’étonnant qu’il est en fait le pivot autour duquel évolue l’ensemble du reste du vaisseau qui est en réalisé une aile. En effet, si tu regardes ici, ici, et ici.
Elle pointait différents endroits de la sphère en même temps qu’elle parlait. Tu constateras de la présence de verrous magnétiques d’une puissance remarquable maintenant l’intégrité de l’appareil tout en permettant au tout de glisser selon la volonté et les besoins du pilote. L’aile est cependant autonome, de même que la sphère, et tout à fait capable de se détacher pour que le cockpit seul puisse évoluer à son aise, se transformant ainsi en engin plus petit, plus discret, plus maniable et tout à fait autonome. Les parois en pyroxiverre blindé sont adaptables en opacité, si la luminosité extérieur venait à t’être désagréable, mais aussi pour arrêter la plupart des rayonnements – on ne peut cependant pas encore s’approcher des anomalies radioactives les plus saugrenues, j’y travaille…

Si vous voulez bien me suivre pour que nous puissions poursuivre la visite…
Elle souriait, présenter son bébé était un réel plaisir pour elle, surtout à Oni. – Comme tu peux le voir, il y a deux portes au cockpit, opposée l’une à l’autre, l’une menant à une salle de machine secondaire, on y trouve notamment tout l’équipement de communication, de détection, mais aussi l’un des réacteurs, et l’autre porte amène à la plus grande partie du vaisseau. Elle sortit de la sphère pour entrer dans un long couloir à l’épure notable. Les parois étaient pratiquement lisses, arrondies au niveau des angles, avec d’étranges entrelacs gravés dans les surfaces d’un blanc écru que Thann ne percevait qu’au travers de sa visière. – Le couloir principal dessert l’ensemble des pièces de l’aile. Tout le long, court un boyau tout juste adapté à B0-UT, ou à n’importe quel droïde assistant. Les lumières, ici, sont réglables en intensité comme en couleur : quand je vole seule, je les éteins par souci d’économie d’énergie. La première porte… Elle s’avança jusque-là et ouvrit d’un geste la porte pour dévoiler la zone de vie du vaisseau. Un petit salon, une alcôve avec un lit double, une autre avec trois couchettes simples superposées, une cuisine sommaire, une pièce d’eau qui n’avait d’aqueuse que le nom. – Comme pour la plupart des vaisseaux, par souci de praticité, j’ai été obligée d’opter pour une douche sonique, je n’avais pas la place pour une cuve d’eau destinée à la seule hygiène. Tu as ici mon lit, c’est le grand, tu l’auras compris, mais si ton dos te fait souffrir je peux consentir à te le céder, là, le tiens, quelques placards, de quoi nous faire à manger, le socle de recharge de Boute et la table est équipé d’un holoécran ainsi que de plusieurs dispositifs ludiques. Elle sourit et poursuivit plus loin dans le couloir, nouvelle porte, nouveau lieu. – Te voici dans la matière grise du vaisseau. Equipements scientifiques d’études diverses, scanners minéralogiques, scanners biologiques, différents scanners de masse, enfin… Pas loin de tout ce qu’on peut attendre d’un laboratoire d’explorateur en herbe. Je suis encore loin d’avoir tout ce dont je peux rêver, pour mes études loin de tout, mais je dois dire que je reste assez satisfaite de ce que cela a pu donner ; notamment quand je suis partie avec Kiva il y a quelques semaines. Encore quelques mètres plus loin et ils parvenaient au bout de l’aile. Cette fois, la porte n’était pas latérale mais bien en face, l’ensemble de la pointe de l’aile était occupée par la dernière pièce. – La salle des machines, slashes soute, slashes pièce d’entraînement et d’entretien du corps puis que tu l’auras remarqué il n’ y a guère d’autres lieux disposant de l’espace suffisant pour réaliser des katas et on se lasse vite de courir tout le tour du cockpit. Tu as ici le générateur des différents boucliers, les moteurs, l’accès extérieur, c’est d’ailleurs par-là que tu étais censé rentré, différents espaces de rangement de même que différents enclos capables de permettre le voyage d’espèce animal dont l’étude demanderait qu’on les emmène où même des végétaux dont je n’aimerais pas qu’il dépérisse avant de parvenir à nos collègues botanistes… Elle réfléchit un moment. L’ensemble des lieux était marqué par deux choses : un esprit de sobriété élégante et un souci d’économie de la place poussée à l’extrême. Toutes les transformations apportées au vaisseau avait demandé à Thann de se casser la tête pour réussir à faire passer l’équipement le plus performant des espaces toujours trop exigu. Par ailleurs, la propreté et la blancheur presque clinique des lieux tenaient moins de son goût personnel que de son incapacité à voir la couleur. Elle avait trouvé dans les formes et les étranges gravures, visibles partout, le moyen de décorer un peu son intérieur de façon à ce qu’elle le perçût pleinement, sans aucun doute bien plus qu’un individu ne percevant le monde qu’à travers le spectre visible. – Je crois avoir fait le tour… Tu as des questions ? Sans quoi… Je te propose de commencer par te montrer mes progrès au sabre… Après tout, nous en avons pour quatre jours et j’ai quelques tensions musculaires à dissiper, tu saurais m’y aider, comme avant ? J’aurais deux, trois choses à te demander à propos du Djem So, Lon-Tan m’a dit que tu ne t’y débrouillais pas trop mal. » Ainsi conclut-elle sa présentation sur un sourire nostalgique et plein d’une affection évidente.
Karm Torr
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Ah oui.





Hm hm.





Oh.





Joli.





Bien pensé.





Classe.





Ça sent le propre.


Bref, c’était l’exubérance dans les commentaires. Karm visita le vaisseau avec le même curieux qu’un parfait touriste. Tout cela, c’était au fond assez loin de son univers à lui. L’explorateur n’évoluait jamais que dans des appareils au bord du dernier souffle et il mettait un point d’honneur, au moment de choisir celui qui l’emporterait au bout de la Galaxie, de sélectionner l’aspect le plus piteux et les conceptions les plus disparates.

C’était sa manière à lui de retrouver le cadre familier et rassurant de son enfance, une nostalgie presque inconsciente de la Flotte où jamais aucun appareil n’avait été si bien agencé, si propre, si blanc ni si lisse que celui de la Chevalière. Mais au-delà des apparences, ce que Karm vit surtout ce jour-là, ce fut l’expression d’une intelligence solide et de la personnalité de son ancienne Padawane, et dans ses approbations silencieuses ou laconiques, il entrait une émotion imperceptible pour qui n’était pas sensible à la Force, mais réelle et intense.

C’est bien, conclut-il avec la conviction que la vérité se passait de dithyrambe et que Thann le connaissait assez pour savoir tout ce que ces trois mots valaient de sa part.

Les deux Jedis pénétrèrent dans la salle réservée aux entraînements. Karm s’y débarrassa de ses chaussures avant de décrocher le sabre à sa ceinture.

Sa dernière mission, dit-il. Probablement. Sous cette forme, en tout cas. Ça fait des semaines que les forgerons et moi on bosse sur… Un écrin digne du don qui m’a été fait. Porter les larmes de son Ordre, c’est pas une mince affaire.

La Larme Delphique restait pour l’heure dans une boite sur son bureau. Chaque matin et chaque soir, il méditait en sa compagnie. Sur les errances de son Ordre, sur ses luttes fratricides, sur la nécessité des armes, et leur sagesse, et leurs dangers. Il repoussait le moment de s’en servir, hanté par ses propres infirmités.

Djem So, donc.

La lame bleue apparut avec une rapidité peu commune parmi les sabres lasers.

Un sujet adapté à nos réflexions du moment. Tu connais les principes fondamentaux. Le combat doit être bref. L’attaque est la première des vertus. Combattre, c’est dominer. La violence est notre alliée.

Un sourire se dessina sur les lèvres du Maître.

Dingue qu’on m’ait pas encore expulsé de l’Ordre Jedi, hein ? Franchement, j’aurais dû devenir Seigneur Sith. Darth Olibrius. Ça en jette.

Durant la formation de Thann, Karm s’était surtout attaché à laisser la jeune femme explorer d’elle-même les formes qui lui paraissaient les plus appropriées. Il savait d’expérience qu’un style définitif n’était jamais le fruit que de la maturité et que ce serait à la Chevalière, non à la Padawane, de se forger ses propres opinions. Le rôle du Maître était de garder ouvert l’horizon de tous les possibles.

Mais la situation, désormais, se prêtait à la doctrine : il était l’un des Maîtres de la Forme V et c’était sur ce point qu’on le consultait.

J’te donne ma manière de voir les choses, mais c’est qu’un point de vue parmi d’autres, OK ? À mon sens, y a un danger inhérent dans la manière dont l’Ordre aborde le combat au sabre, qui est de lui attacher une valeur intrinsèque et de lui associer des choses comme… L’élégance, la noblesse de l’arme, la beauté de l’exécution. Ce genre de choses. Y a pas de beauté dans la guerre. La recherche de la beauté dans la violence est le chemin de la brutalité. La vie d’un Jedi est la vie d’un être infiniment plus violent que la majorité des gens de cette Galaxie, et dans l’exercice de sa violence, le Jedi doit pas se donner bonne conscience par la beauté : il doit rechercher l’efficacité et la proportionnalité. Tel est le premier des Préceptes déprimants de Maître Karm.

Illustrée par le jaillissement soudain et parfaitement déloyal d’un shoto encore attaché à sa ceinture, qui bondit par la télékinésie pour frôler de justesse la jeune Sentinelle, avant de revenir dans la main de son propriétaire, qui l’éteignit pour le ranger.

Deuxième précepte. Le duel, ça existe pas. La plupart des combats que tu auras dans ta vie, avec des sabreurs ou des tireurs, ce sera des combats au milieu de la vie des autres. Plus ces combats durent, plus y a des chances que des civils soient blessés. Plus un combat dure, plus un Sith te forcera à mettre en danger les autres. C’est ta responsabilité de rendre le combat le plus bref possible. Et c’est ta responsabilité de l’emporter pour écarter la menace. Ça implique d’attaquer. Ça implique l’intensité. Telle est la voie du Djem So. Ce qui nous défend met en danger les autres, ce qui nous met en danger défend les autres.

Et c’était un point auquel il réfléchissait souvent, depuis qu’ils avaient tous investi la modeste Dantooine.

Le précepte trois, ce sera pour un autre jour. Y a déjà plein d’interprétations à tirer des deux premiers. On va sur Ossus se plonger dans une histoire de violence, et j’crois qu’en tant qu’Ordre, on est mal préparés à réfléchir à la question. On préfère penser à la paix plutôt qu’à la guerre. Aux négociations plutôt qu’à la violence. Ça nous laisse tout démuni quand elle se produit. Quand on est les parties prenantes. Elle nous paraît incompréhensible. Foncièrement étrangère. Le Djem So et le Shien naissent dans l’histoire de notre sortie des Temples. De notre confrontation avec la violence de la Galaxie. Nous voilà jetés hors de nos Temples. C’est le moment d’y re-réfléchir.

Thann Sîdh
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Sans que personne n’en fût surprise, la sobriété des éloges de son mentor lui alla droit au cœur. Il acceptait sa différence, sa façon d’être, il l’encourageait sur la voie qui était la sienne, conscient de à quoi il avait participé en elle sans chercher à l’endiguer pour autant. Elle était l’arbre, il était le tuteur, mais un tuteur d’une infinie souplesse, d’une considération sans aucune limité, qui parvenait à s’adapter chaque fois et toujours à l’amener un peu plus haut, un peu plus forte. Tandis qu’il répondait positivement à sa requête de poursuivre les leçons, l’apprentie de toujours souriait. Elle n’eut pas un geste de recul lorsqu’il fit sa démonstration, ni même un frémissement d’inquiétude : elle le connaissait lorsqu’il entrait dans cet enthousiasme de celui qui consacrait sa vie à l’art martial. Longtemps, elle s’était interrogée sur ce paradoxe : l’avoir découvert si bon, si généreux, si tolérant et, tout à la fois, si prompt à prendre par devers soi la nécessité de la violence. Comment un maître si lumineux pouvait avoir eu tant à cœur de se parfaire dans cette mission, ô combien paradoxale, du combat pour défendre et servir. Apprendre à dominer tout à fait, par l’exercice le plus implacable de sa propre puissance, pour pouvoir se montrer garant de la liberté. Thann n’était pas encore tout à fait sûre d’avoir saisi l’essence de toute cette pensée, mais elle avait acquis certaines certitudes depuis le Conclave, bien qu’une certitude fût un bien grand mot pour elle qui ne tenait jamais rien pour absolue sinon la Force et la Lumière.

Loin d’être gagnée par le militarisme dont certains de ses homologues avaient fait la démonstration, elle avait surtout réalisé qu’elle ne voulait, à aucun moment, s’écarter de la nécessité martiale au point que d’autres fussent responsables d’elle et de sa survie. Ce qui était arrivée à Lauren eût tout aussi bien pu lui arriver, elle en était sûre. Trop longtemps, elle avait gardé loin d’elle cette responsabilité, trop longtemps elle avait cru trouver le moyen de défendre autrement, de préserver autrement. Et le réel s’était imposé : la guerre, l’exil, la folie. Le conflit n’était ni enviable, ni évitable. Il surgissait, parfois blond, toujours furieux, et vous assaillez sans qu’il fût possible à la parole de l’endiguer. Alors elle devait apprendre à le confronter. Elle devait apprendre à le souffler si puissamment et si vite que l’incendie ne pût pas prendre. Certes, elle n’avait pas formalisé sa pensée aussi claire que les principes qui venaient de lui être énoncés, mais elle n’en fut que plus troublé par l’écho qu’ils trouvèrent en elle et par l’évidence de laquelle ils se teintaient. Quelque chose résistait encore, pourtant. Après un instant d’hésitation, elle osa tenter de le formuler. « Je suis prête à le considérer ainsi, désormais. Mais… Je refuse toujours de tuer. Deviendrai-je dès lors un fardeau ? Je refuse de penser que, d'une façon ou d'une autre, je dispose de cette absolue morale qui me permettrait de rejeter à la Force un de ses Enfants. Dois-je en douter également ? ... J'y songe et pourtant, je m'en sais incapable. Combien de Kolin au-delà des frontières ? – Tuer, ça ne se choisit pas, ça s'impose à nous. Le sabre laser plus que bien d'autres est une arme qui permet d'éviter de donner la mort. Elle le fait cruellement. Par l'amputation. Mais elle le fait tout de même. Il est plus facile de neutraliser définitivement un ennemi sans le tuer avec un sabre qu'avec un blaster. La Jedi doit jamais se battre dans l'objectif de tuer. La mort, de quiconque, est une défaite. De notre morale et de notre technique. Mais il est des situations où... C'est le sacrifice de soi-même, et d'autres, ou le sacrifice de l'ennemi. – Je n'y arriverai pas, Oni. Je n'y arriverai pas. Je perçois... Je ne sais pas. Tout est si lié, tout ce que je sens, tout baigne dans la même eau ce serait... Je n'arrive pas à mettre le mot clairement dessus mais je ne me sens pas la force de mettre fin à la vie de quelqu'un. Je t'en prie, apprends-moi à faire autrement. Il n'y a que toi qui peut me former si bien. – Ah, mais j'ai rien à enseigner, moi, sur le sujet. L'indifférence face à la mort des gens horribles ? Je regrette toute vie que j'ai prise. C'est pas... Une question de se convaincre que c'est pas grave, ou que c'est pas une grande perte. C'est juste la douleur nécessaire du monde. Je pense pas que, comment dire ? Je pense pas que ce soit très moral, pour être honnête, d'être fondamentalement et par principe opposé à donner la mort à quelqu'un d'autre. Mais je pense que notre répugnance de principe est utile, parce que sans elle, aussi infondée et p'têt même coupable qu'elle soit, on s'exposerait à la tentation de bien des crimes. – Et quand avons-nous à juger qu'il est temps ? Quand s'arrête-t-on ? Quand décide-t-on qu'une main tranchée n'est plus suffisante, qu'il faut aussi faire céder la tête ? Quand doit-on faire tomber le couperet et se dire que désormais, pour lui ou pour elle, toute rédemption s'en est allée ? Ou doit-on se dédouaner ? Dire que cela était en fait un choix conscient ? Une exposition au danger ? Que dans le feu du côté obscur, dans son mariage aux ténèbres, l'autre a fait son choix de lui-même ?

Je n'arrive pas à y voir clair. Et si... Et si je tuais Maxence, par exemple ? N'est-ce pas ce qui aurait pu advenir, face à Lauren ? Si vous, vous aviez été là, face à elle, à devoir défendre Lauren ? Je...

Je me perds en hypothèse, la question est idiote...
– Ben y a pas de préceptes. C'est une banalité à dire, mais le champ de bataille est pas comme un livre des Archives Jedi. C'est pas une étude de cas non plus : tu l'as vu par toi-même. On sait pas, on comprend pas ce qui se passe, on réfléchit pas. On décide de rien, ou on décide en un instant. On fait parce qu'à un moment, y a une seule issue devant nos yeux. Peut-être qu'il en existait d'autres, qu'en étant plus malin, ou plus rapide, ou plus puissant, on aurait pu l'emporter autrement, mais derrière nous, y a dix gars qu'il faut protéger, ou une famille au milieu des ruines, ou notre propre vie, et dans la fraction qui fait suivre, c'est leur mort ou la mort de l'autre. Mais de la même manière que la Jedi doit être lucide sur sa propre valeur, ne pas surestimer son importance dans l'immensité de la Force et de la Galaxie, elle doit être lucide sur l'importance d'une autre vie. La guerre, c'est pas la psychanalyse. C'est une affaire sociale. Si la rédemption de notre adversaire doit toujours retenir notre bras, elle ne doit jamais l'arrêter. – J'ignore si j'en serai capable. Je ne sais pas si je souhaite en être capable. Une pointe de détresse perça dans la voix de la Sentinelle. Parfois, elle se sentait loin d’être Chevalière, malgré le titre décerné. C'est bien ce que j'te dis. Ne pas donner la mort est un impératif absolu. C'est un impératif qui naît de l'orgueil, c'est un impératif qui surestime la valeur d'une vie, c'est un impératif parfaitement déraisonnable, en tant que tel. Mais c'est un impératif qu'on cultive, car il est infiniment préférable à tout relativisme. Il faut toujours se sentir incapable de donner la mort, pour conserver une petite chance, quand on doit la donner, que ce soit la seule et l'ultime solution. – Alors me reste à prier de ne jamais avoir à regretter ni l'un ni l'autre choix, j'imagine ? ... J'aimerais commencer à bouger, mon corps me semble vouloir libérer la tension que mon esprit n'arrive pas à gérer. Une chose aussi qu’elle avait apprise auprès de lui. Elle ne supportait curieusement pas l’immobilisme ; elle trouvait une quiétude incroyablement plus grande dans le décrassage d’un moteur ou dans la réalisation de katas que dans le tailleur, le silence et les longues méditations. Elle sourit à l’Arkni, un peu triste de ne savoir quoi répondre, et tous deux s’animèrent bientôt de concert.


🌿

« Sortie d’hyperespace dans trois, deux, un… Le monde redevint tangible autour d’eux et la tubulure d’au-delà de la physique appréhendable par l’esprit disparut. Ossus, en contrebas, les attendait. Aussitôt, l’indicateur d’une transmission entrante s’activa. – Forces de sécurité d’Ossus, veuillez immédiatement transmettre votre identité et couper vos moteurs le temps que nous procédions à votre identification. Le ton était donné. – Ici la Chevalière Thann Sîdh, de l’Ëarendil, vaisseau de l’Ordre Jedi. Nous avons reçu les autorisations de la part du gouvernement de venir participer à l’effort d’enquête suite à l’agression de l’un de nos représentants sur votre territoire. Je vous transmets les codes d’identification de mon vaisseau et j’attends vos futures instructions. La capitaine pivota sur son fauteuil pour parler dans la direction de son co-pilote. – Nous avons rendez-vous avec le Capitaine Kivalà. Nous sommes totalement en règles, pour ce qui est de notre présence et de la coopération à venir, mais j’ai le sentiment d’une tension palpable… J’ignore s’ils nous laisseront absolument libre de nos mouvements, ni même s’ils ne nous demanderont pas d’écouter notre séjour, finalement. Quelques minutes passèrent quand finalement, la communication s’ouvrit à nouveau. – Tout est en ordre, Ëarendil, nous vous avons transmis les coordonnées de votre plate-forme d’atterrissage, veuillez procéder en suivant strictement l’itinéraire transmis. Tout écart vous vaudra immédiatement le retrait de toutes vos autorisations et vous serez immédiatement sommez de quitter l’orbite sous peine d’être pris en chasse par nos appareils. Tour de contrôle, terminé. La communication se coupa sans même attendre confirmation que tout était compris. Thann soupira et constata, un peu acide. – Il ne nous aura même pas laissé le plaisir d’un nom… Cela promet d’être un séjour enrichissant, humainement parlant. » Elle amorça ensuite la descente, avec souplesse, jusqu’à la capitale.
Karm Torr
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Intéressant, pas vrai, commenta Karm vautré… euh… dignement assis dans le siège de copilote, alors que le vaisseau entamait sa descente vers Knossa ? Tous les chemins de l’histoire se croisent et se recroisent. Les siècles passent et on en revient toujours aux mêmes endroits.

Ossus. Planète de Jedis. Planète de leurs grandeurs et de leurs défaites, de leurs monuments et de leurs gouffres. Karm ne désespérait pas d’y rebâtir une présence à la hauteur de ce qu’elle fut jadis. D’y construire une Enclave tout autour de la Grande Bibliothèque. Ériger avec patience ce qu’une guerre future détruirait sans doute en quelques secondes à peine.

Ils s’étaient engagés dans les passes montagneuses d’Eocho et Karm commença à se sentir gagné par un vertige d’abord inexplicable. Le paysage défilait autour d’eux, preuve que la vie l’emportait sur les plus grands des cataclysmes, et le regard du Jedi, de plus en plus trouble, allait au-delà. Machinalement, il plongea la main dans sa poche pour sentir sous ses doigts les contours polis de la Larme Delphique.

Aux défilés rocheux se substituèrent pour lui les formes difficiles à discerner d’un duel ancien, dont il gardait la relique contre sa paume. Il y avait la haine et la victoire, la lutte fratricide, l’ami de toujours qui trahit, et la possibilité d’une rédemption. Certainement, il l’aimait lui aussi comme une soeur. Faudrait-il se laisser tuer à la fin ?

Pardon ?

Karm cligna plusieurs fois des yeux avant de se rendre compte qu’ils avaient atterri. Ses oreilles bourdonnaient encore du bruit de lointains sabres laser et il avait le coeur serré, comme si lui-même venait de tuer son frère, à quelques pas de là.

Le jeune Maître passa une main dans ses cheveux gris, adressa à son ancienne Padawane un sourire vague et confus, puis se tira du siège pour embarquer son paquetage et gagner le tarmac, où le capitaine Kivala les attendait d’un pied ferme et légèrement robotique.

Maître, fit-il avec un geste de tête. Chevalière.

Kivala jeta un coup d’oeil par dessus son épaule, pour rappeler à l’ordre d’un regard impériaux les quatre jeunes soldats qui étaient groupés derrière lui et qui se poussaient du coude en échangeant des murmures admiratifs, les yeux fixés sur l’Ëarendil.

Je suis le capitaine Alteulä Kivala, dit le capitaine Kivala quand il fut à nouveau satisfait de la posture de ses hommes.

C’était un homme d’un peu plus de quarante ans, un humain à la peau sombre dont l’accent distingué, en partie affectée, ne cachait pas une éducation plus rude et plus simple. Une longue trace de brûlure courait sur sa joue gauche, tout à fait comme eût fait la pointe d’un sabre, et sa jambe droite avait été remplacée par une prothèse : on le devinait parfois à l’éclat métallique de sa cheville, quand il montait les escaliers et s’asseyait, et que son pantalon la laissai découverte.

Torr.
Oui… Nous sommes familiers de vos… Talents.

Le ton de sa voix avait quelque chose d’incrédule, mais Karm n’en prit pas ombrage, trop résigné à ne pas avoir la tête de l’emploi. Kivala se tourna vers Thann pour la laisser se présenter et, une fois accomplies ces formalités vaguement cordiales, ils grimpèrent tous les six sur une barge speeder qui prit la direction de l’astroport militaire.

Karm adressa un bref regard à sa coéquipière. On les avait fait atterrir tout au bout des pistes, dans une infrastructure de l’armée, et c’était assez dire qu’on cherchait à les empêcher de s’enfuir sur un coup de tête.

Votre aide pour cette enquête est évidemment bienvenue, débuta le capitaine alors qu’ils glissaient vers les bâtiments principaux. Comme vous pouvez l’imaginer, les forces de l’ordre sont débordées. La situation chaotique du sommet a offert un terrain propice à toutes sortes d’instincts prédateurs. Il y a eu des pillages, des morts suspectes, des émeutes. La meilleure pâtisserie de la ville a été incendiée.

Ce dernier point, en particulier, semblait peser sur le moral du capitaine.

Terrible…, murmura-t-il, le regard perdu dans le vague en direction d’un monde de choux à la crème désormais inaccessibles, Une situation terrible…
Et la reconstruction ?
La partie boulangerie devrait rouvrir dans quelques semaines.
J’voulais dire : de la ville. En général.
Ah ! Bien sûr, bien sûr… Les opérations avancent bien. À vrai dire…

(Pendant ce temps, l’un des quatre soldats s’efforçait d’adresser des sourires séducteurs à la jeune Miraluka.)

Non. Rien. Vous verrez par vous-mêmes.

La barge était parvenue à bon port et ils descendirent pour s’engager dans les couloirs dépouillés de la base.

Vous comprendrez que nous n’ayons guère de ressources à mettre à votre disposition pour vous aider dans votre enquête. Naturellement, les autorités vous assisteront avec les informations dont elles disposent, c’est-à-dire bien peu de choses, je le crains. Pour le reste… Comme je vous l’ai dit, tout le monde est déjà très mobilisé.

Il y avait quelque chose dans ce discours, une légère incohérence sur laquelle Karm ne parvenait pas encore à mettre tout à fait le doigt.

Nous vous demandons néanmoins…

Ils avaient atteint le hall de la base et le capitaine s’arrêta brusquement pour se tourner vers ses deux visiteurs.

… de ne pas faire usage de la force… Pardon, je veux dire, de la force physique… Enfin, je veux dire…
On a compris, promit Karm. Pas de méthode musclée.
La situation sociale ici est encore très délicate et il est important qu’un climat d’ordre et de paix civile, en toutes circonstances, restaure le sentiment de sécurité des sujets de Sa Majesté.
Bien compris.
L’un de mes hommes va vous…
Je suis volontaire, mon capitaine, s’exclama aussitôt avec empressement le solide gaillard brun qui coulait des regards charmeurs à Thann !
… conduire au centre ville pour vous épauler dans votre enquête.
Oh, on voudrait pas vous priver de l’un de vos hommes.
J’insiste.

Le ton du capitaine était sans appel.
Thann Sîdh
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« Oni ? … Oni ? Nous sommes arrivés. » Il avait fallu que Thann allât jusqu’à doucement presser l’épaule de l’Arkni pour que celui-ci se liât de nouveau au réel, ou du moins à son présent. Elle n’était pas sûre de ce qu’elle avait perçu à travers la Force et, de toute façon, les autorités planétaires, déjà présentes en contrebas, ne lui laissaient guère l’occasion de revenir sur l’étrangeté de ces derniers instants de vol. Le duo quitta l’Ëarendil par l’aile, et Thann ne bouda pas son plaisir lorsqu’elle constata de l’effet que son bébé avait pu avoir sur les gardes présents. Bien sûr, elle n’était pas responsable de l’ensemble de la physionomie de l’appareil, elle ne faisait que jouir du travail d’un autre esprit brillant, mais son choix avait été le bon et la vocation de l’appareil à incarner la paix, en symbole comme en action puisqu’il était absolument dépourvu d’un quelconque armement, trouvait là sa confirmation. B0-UT avait reçu l’ordre de rester dans le vaisseau. Au besoin, il allait être là l’opérateur de leur mission, le pôle scientifique de l’enquête. Il avait, au survol de la ville, effectuait, au moyen des appareils disponibles dans l’Ëarendil, le scanner de l’ensemble de la zone concernée ; mieux valait limiter au possible les frictions potentielles avec les locaux, ce que ne manquait jamais de générer un appareil capable d’enregistrer des images et des sons, et donc des témoignages.

Alors que le Capitaine Kivala se tournait vers elle pour l’entendre se présenter, elle contenta d’adopter le ton formel et légèrement souriant qu’elle prenait chaque fois : « Chevalière Sîdh, nous avons eu l’occasion d’échanger pour préparer notre arrivée. » Le chemin qui les séparait du cœur battant du bâtiment semblait excessif, d’autant que nombre de plateformes étaient laissées vacantes, et Thann comprit le regard glissé par son mentor un temps plus tôt : les Ossiens se méfiaient. En quoi était-ce bien différent du reste de la galaxie, finalement ? Bien que le monde fût neutre, il n’en demeurait pas moins qu’il était proche des autorités républicaines et qu’accueillir des ‘terroristes’ sur son sol pouvait favoriser les tensions politiques locales comme internationales. Les gens aspiraient à la paix, l’arrivée de deux Jedis n’en étaient plus le synonyme. Alors qu’elle détaillait par la pensée leur escorte, elle remarqua l’insistance des regards de l’un des hommes de l’escouade. Un peu gênée, elle adressa un « bonjour » muet à celui-ci, comme pour engager la parole, mais il n’eut d’autre réaction que de continuer ses sourires un brin insistant, faisant jaillir le feu sur les joues de la Chevalière peut habituée à pareil traitement. Avoir grandi à l’ombre d’une sommité comme Karm Torr l’avait, jusque-là, habituée à voir la lumière centrée sur lui plutôt que sur elle.

Elle pensait la situation rapidement réglée mais il fallait croire que celle allait perdurer puisque parvenus au seuil du bâtiment, à l’orée de la rue, le Capitaine leur imposa courtoisement la présence de ce volontaire tout à fait zélote. « Nous comprenons la situation, Capitaine, et croyez bien que nous nous plierons à l’ensemble de vos demandes. Votre homme vous fera des rapports réguliers et il sera partie prenante de nos décisions pour éviter la moindre de tes tensions avec la population. Nous sommes ici pour comprendre comme la paix s’est brisée, non pour alimenter des querelles dont nous sommes tout aussi las que vos gens. L’assurance de la Sentinelle était absolue jusqu’à ce qu’elle nota une nouvelle fois l’insistance de leur nouveau coéquipier ; elle n’était décidément pas très à l’aise malgré les progrès fulgurants qu’elle avait réalisé sous la tutelle d’Oni sur la question des relations interpersonnelles et des jeux de séduction. Le Capitaine n’ajouta rien et invita le trio à s’éloigner. Elle retint cependant un instant son homme pour lui communiquer, en privé, ce qui devait certainement être ses directives. – Vraiment, enrichissant humaine parlant, pour sûr… » murmura-t-elle à l’adresse de l’Arkni, incapable de savoir s’il avait noté l’attention dont elle avait été l’objet.

Parvenus dans la rue, leur guide et geôlier leur communiqua de nouvelles informations. Il dirigeait ses paroles vers Thann comme si elle avait été la seule à l’écouter. « Je suis Gat Sbyleumaniefik. Mais vous pouvez m’appelez Gat, simplement. Le Capitaine m’a chargé de vous informer que vous disposerez, en permanence, d’une fréquence directe avec lui, si jamais vous aviez des questions et des besoins d’informations. Je dois tout d’abord vous conduire au poste d’urgence central, où se concentre encore la plupart des décisions d’opérations : c’est là-bas que vous aurez notamment accès aux enregistrements et aux rapports d’enquêtes. Il est situé en périphérie du centre, dans une caserne de pompiers qui n’a pas été affectée par les incidents. Il faut notamment s’assurer que les bâtiments concernés par votre enquête sont sûrs et que la structure ne risque pas de s’effondrer sur vous durant votre enquête. Ensuite, si cette première condition est remplie, j’ai la permission de vous escorter sur les lieux. – Merci beaucoup pour votre diligence, Gat. Je suis heureuse de voir que vous ne partagez pas la défiance de l’ensemble de la population. – Faut dire que j’imaginais pas les Jedis comme vous. Enfin… Je veux dire. Vous et le Maître Torr, vous ne semblez pas terrifiants. Au contraire. – J’imagine que l’on peut s’accorder sur le fait que c’est un bien gentil compliment que vous nous faites là, Gat. constata la Miraluka, un brin de gêne coincée dans la voix. Elle n’osait même pas imaginé les pics railleuses auxquelles elle aurait droit si jamais elle osait en parler un jour à Seïid. – Ceci dit, peut-être pourriez-vous nous communiquer votre sentiment sur l’ensemble de la situation ? Parfois, un ressenti est aussi important que les faits, surtout quand il s’agit de traiter avec une population meurtrie. Nous ne voulons certainement pas alimenter les peines, au contraire. »
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Karm, pour sa part, s’était manifestement pris de passion pour un petit droïde d’entretien qui venait de faire son apparition à l’angle de couloir, si bien qu’il ne parut rien remarquer de la passion dévorante (au bas mot !) que son ancienne protégée avait allumée dans le coeur encore jeune et naïf, et peu habitué aux séductions des femmes, d’un soldat qui toute sa vie serait tourmenté par cet amour inextinguible, et douloureusement sans retour, jusqu’à chercher à abréger les souffrances de son âme dans les frissons d’une carrière de mercenaire, aux quatre coins d’une Galaxie aussi froide et indifférente qu’une belle Sentinelle Jedi, une Galaxie pleine à craquer de rancors prêts à le piétiner, comme son coeur, un jour, fut piétiné par Thann.

Mais ne nous égarons pas.

Tout en parlant, Gat les avait conduit dans un garage à speeders. À côté des machines impressionnantes qui devaient servir aux opérations des soldats, quelques engins plus ordinaires, mais aux couleurs de l’armée, servaient aux déplacements de tous les jours. Gat s’installa aux manettes de l’un d’entre eux et Karm, soucieux sans doute de ne pas diminuer la promotion de Thann en Chevalière en cherchant encore à imposer son autorité, céda obligeamment le place de passager à l’avant, pour s’installer sur la banquette arrière.

La situation ? Ben…

En allumant les moteurs, le jeune militaire eut l’air embarrassé.

Vous savez, je suis pas… Un proctologue, euh, politologue, j’veux dire, je suis pas un politologue qui sait analyser tout ça. Je lis des livres, hein, attention ! Rapport au fait si jamais on doit être déployés, vous comprenez, sur une autre planète, ben ça me parait important de pouvoir comprendre les gens, vous voyez ? Oh, pardon ! Vous voyez pas ! Enfin, je veux dire ! Non ! Euh…
On y va, demanda Karm en se penchant entre les deux sièges avant ?
Ah. Oui. Pardon, chef.
C’est rien.
Euh, Seigneur !
Hein ?
Maître ! Pardon, Maître !

Reprends-toi, Gat, c’est un naufrage.

Vous voulez que je pilote, proposa un Karm prévenant ?
Non non !

Et l’engin décolla enfin pour passer les portes du hangar et s’engager sur un chemin qui descendait vers la ville. La base avait été construire sur les plateaux rocheux, pour dominer la région : elle offrait un excellent avant-poste en cas d’invasions orbitales et toute une série de canons s’en tournait directement vers le ciel.

Et donc, la situation locale, vous en pensez quoi, demanda Karm en regardant le paysage, histoire de relancer le supplice de leur guide ?
Ben… Les gens sont très confus, hein, forcément. Personne ne sait très bien quoi croire dans toutes ces histoires, et je pense que pour beaucoup, tout le monde va dans le même sac, vous comprenez ? C’est pas contre vous, bien sûr ! Juste…
Vous vous retrouvez tous embarqués dans des histoires qui vous concernent pas ?
Voilà. Après, il y a…

Gat s’interrompit brusquement, comme quelqu’un qui se rend compte qu’il va trop en dire. Avec un haussement d’épaules, il se contenta de conclure :

Des gens qui pensent différemment.
Hmmm…

Le speeder eut tôt fait de rejoindre Knossa à proprement parler. Sur certains immeubles, les panneaux publicitaires holographiques montraient un groupe de jeunes gens au casting soigneusement divers, qui aidaient sur des chantiers de reconstruction. En dessous, une bande défilante disait : « Les ONG de la République s’engagent aux côtés d’Ossus ».

Un peu plus loin, un petit groupe de droïdes voletait devant un mur, pour y effacer les dernières traces d’un graffiti géant dont on n’apercevait déjà plus grand-chose. Gat y jeta un coup d’oeil un peu nerveux, avant d’accélérer insensiblement. Cinq minutes plus tard, ils se stabilisaient sur le toit de la caserne de pompiers.

À l’intérieur, l’agitation frénétique des premiers jours était retombée et l’organisation méthodique avait repris ses droits. Quelques spécialistes de la reconstruction étaient venus des quatre coins de la Galaxie : après tant d’années de guerre, ce n’était pas l’expérience qui manquait. Embauchés pour gérer la crise par le gouvernement local, ils avaient monté les postes de contrôle et distribuaient les tâches, avec cette capacité un peu glaçante, mais nécessaire et peut-être admirable à faire le tri entre les drames et à cerner les plus urgentes des détresses innombrables.

Ah, vous êtes les chanteurs folk !

Une jeune femme était sortie d’à peu près nulle part, pour leur fourrer des badges dans les mains.

C’est pas trop tôt ! Le concert caritatif commence dans moins d’une heure et vous êtes déjà censés…
Mam’zelle, tenta Gat.
… à l’autre bout de la ville. Soyez gentils avec les enfants, s’il vous plaît, posez pour les photos, c’est important pour notre plan social media…
Mam’zelle !
… et surtout, pas de drogue. On est d’accord ? Pas. De. Drogue. Non parce que Bubulle le Clown, l’autre jour, il s’est fait un rail d’épices au spectacle pour les veuves de la police…

Gat s’interposa héroïquement entre la community manager surcaféinée et les Jedis.

Ce sont les Jedis venus enquêter sur l’affaire de l’agression.
Ah !

La jeune femme considéra Thann avant de concéder :

Je me disais aussi que vous n’aviez pas trop le look folk.

Puis Karm.

Vous êtes majeur…?
Hey !
Paraît que la Superviseuse veut leur parler ?
Ah. Oui. Par ici.

Les deux visiteurs furent conduits à un bureau sur lequel une plaque indiquait : « Superviseuse Générale. Poste d’urgence centrale. Globuga l’Hétérodoxe ».

La meilleure spécialiste du domaine, assura la community manager, avant de s’éclipser pour hologramer quelqu’un d’autre.

Gat toqua à la porte avant d’entrer. L’instant d’après le trio se retrouvait face à un bureau, et derrière le bureau, une sorte de large tabouret, et sur le tabouret, une masse gélatineuse informe que quelqu’un avait posé là. Après avoir patienté quelques secondes, le jeune soldat, sentant la perplexité croissante du Maître Jedi à ses côtés, s’éclaircit la gorge.

M’dame ?

Soudain le blob fut parcouru d’un frémissement et un pseudopode terminé par un oeil en émergea, puis un autre, et encore un autre, tandis qu’une ouverte béante dessinait vaguement une bouche, laquelle bouche s’exclama :

Excellent, excellent ! Bienvenue, ô sérénissimes guerriers des lointains de la Galaxie. Je suis Globuga l’Hétérodoxe, grande vestale de l’Infini Recyclage.

Karm s’inclina légèrement face à l’Ugor, qui eut l’amabilité de produire un tentacule afin de les inviter d’un geste à s’asseoir devant eux.

Dans l’un de mes rares moments d’oisiveté, poursuivit Globuga l’Hétérodoxe, cette fois-ci par une seconde bouche qu’elle s’était manifestée pour que chaque Jedi pût avoir la sienne, j’ai pris la liberté de consulter nos rapports d’incidents pour compiler une liste de situations ressemblant au descriptif succinct que vous nous avez fait parvenir, même si les informations dont vous disposiez étaient…

L’Ugor ne finit pas sa phrase, sans doute pour éviter de se montrer désobligeante — une délicatesse rare, pour une membre de son espèce.

Bref. Ce jour-là, sur Ossus, la bataille faisait rage et une bonne dizaine de rapports font état de circonstances similaires à celles que vous nous avez décrites. Je crains que votre enquête ne s’annonce fastidieuse, d’autant plus que les affrontements ont détruit les serveurs centraux de l’holosurveillance urbaine et que toutes les données ont été perdues. Néanmoins, j’ai pris la liberté…

(Prendre des libertés, c’était donc un peu sa grande passion.)

… de dresser une carte avec tous les lieux concernés, l’état de délabrement des bâtiments, ceux qu’il est possible d’explorer et les autres nous, le nombre d’habitants, la production annuelle de déchets ménagers…

Ces deux derniers mots la plongèrent dans une sorte de rêverie extatique, avant qu’elle ne reprenne ses esprits.

… le tout organisé avec un code couleur. Et un tableau ! Un tableau à entrées multiples. J’imagine…

Les pseudopodes oculaires s’allongèrent démesurément pour passer par-dessus le bureau et venir fixer les Jedis de beaucoup plus près.

… que nous partageons vous et moi un respect religieux pour l’organisation. N’est-ce pas ? N’est-ce pas ? Excellent, excellent !
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« Pas trop le look folk ? murmura Thann avant de concentrer sa perception sur sa propre personne. Sa tenue n’était-elle pas jolie ? Certes, elle l’avait avant tout conçue pour être pratique, l’esthétique avait largement été relégué au second plan mais tout de même, elle n’imaginait pas faire si triste mine dans cet ensemble. – Moi, je la trouve très bien votre tenue. » La Sentinelle ne se retourna pas pour accueillir le commentaire que lui avait fait le soldat, avant tout pour que celui-ci ne pût constater de l’ensoleillement de ses joues, en cette instant de profonde confusion. Fort heureusement, personne ne sembla le remarquer et l’urgence de la rencontre avec Globuga l’Hétérodoxe lui permit de se focaliser de nouveau sur les raisons de leur venue.

Et quelle rencontre… Thann n’avait jamais eu l’occasion de percevoir un être à la substance si singulière. Sa perception de son corps, de sa conscience, de son aura. Tout rendait la Miraluka incroyablement curieuse et son cerveau incroyablement perplexe, elle se savait capable de rester dans un coin de la pièce à admirer cette étrange beauté absolument toute la journée, oublieuse du rôle qu’elle avait à jouer par ailleurs. « N’est-ce pas ? N’est-ce pas ? Excellent, excellent. – Oui, oui, ne vous inquiétez pas. Je suis pragmatique moi-même et travail de près avec bon nombre de collègues chercheurs, je tâcherai de vous transmettre des rapports aussi détaillés et organisés que vos propres travaux. – Evidemment, évidemment. Intérieurement, Thann comprit qu’elle venait effectivement de se charger spontanément de cette tâche, dans la mesure où Oni, tout brillant qu’il fut, était bien la dernière personne à qui confier la tâche de la rédaction d’un rapport détaillé dès lors que cette tâche entendait l’introduction, dans le document, de tableau à double ou même simple entrée. Elle laissa de côté ces futurs possibles pour ne plus se concentrer que sur les documents qu’on lui tendait à cet instant. Elle ne voulait pas prendre le risque de laisser passer une question qui eût pu surgir d’une analyse consciencieuse du document fourni et risquer, par-là, de déranger de nouveau cette archiviste si zélée.

« Si vous le désirez, je pense disposer d’un balayage scanner de la zone un peu plus récent que celui que vous nous offrez, de quelques heures je dirais, car cette rue a enfin été dégagée par vos services. – Plus d’informations est toujours bienvenue. Cela évitera que nous lancions, par ailleurs, notre propre vol, ce sera autant de carburant économiser pour nos sondes et d’équipe à redistribuer ailleurs. Faites, faites. Ici, l’accès à notre serveur. – Je fais ça immédiatement… Elle communiqua les directives à B0-UT qui aussitôt s’activa, le résultat ne se fit pas attendre et la masse gélatineuse de son interlocutrice fut traversée par une onde de contentement. – Bel et bien, ces relevés sont tout à fait bon. Vous disposez d’un matériel impressionnant, quelle précision, quelle précision. Serait-ce abuser de votre bonté que de procéder à un relevé similaire lors de votre départ ? – Avec plaisir. Un bras tentaculaire était venu exercer une pression sur l’un des nombreux postes qui entouraient l’éminence grise du lieu. – Bien, j’ai d’ores et déjà réaliser la mise à jour de vos données, sauf si vous avez des questions, il me faut vous inviter à gagner le terrain, de nouveaux flux d’informations viennent d’être ouverts, et je dois m’intéresser aux flux. Les flux… » Laissa-t-elle traîner, rêveuse.

Son mentor formula les au revoir attendu et le trio se retira, la Miraluka laissant trainer, jusqu’au dernier moment, son attention dans ce bureau merveilleux. Elle rata d’ailleurs les premiers instants de la conversation entre Karm et Gat, elle ne se rendit d’ailleurs pas compte qu’elle venait d’interrompre celle-ci en posant sa question : « Quelle personne extraordinaire, Oni, à quelle espèce appartient-elle ? Je… Je suis encore toute chamboulée de cette présence. Ma perception, dans la Force, sa conscience… C’était… Terriblement singulier. Elle remarqua alors le regard que lui lançait leur guide et son admiration devint aussitôt une profonde confusion qu’elle combattit vaillamment d’un robuste raclement de gorge. Elle activa le datapad qu’on venait de lui procurer et projeta la carte alors qu’ils marchaient de concert – Bon, d’après nos informations, notamment sur les points d’entrée de nos équipes, les sites B, C et E sont hautement improbables, trop loin de la zone potentielle de départ. Par contre, les sites A et D semblent concorder. Malheureusement, le premier sera très difficile d’accès car les bâtiments alentours sont parmi les plus endommagés du secteur et n’ont encore fait l’objet d’aucun travaux de stabilisation ou de destruction. Je crains aussi que le site F ne puisse correspondre, mais en ce cas, nous devrons parvenir à extraire des informations d’un champ absolu de débris. Les bâtiments ont été sapés, sur place, afin de les reconstruire totalement par souci d’économie. Je crains que si preuves il y a, elles ne pourront se manifester qu’à toi, Oni. As-tu encore beaucoup de visions ? Seraient-elles utiles, ici ? »
Karm Torr
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Ugor.

À vos souhaits.

La compétition, expliqua l’Ark-Ni quand la Sentinelle les interrogea sur l’espèce de leur précédente interlocutrice, et c’était une explication qui n’expliquait pas grand-chose.
Il paraît qu’elle est bannie des siens, glissa Gat sur le ton du commérage. Une histoire de différends religieux.

Karm attendit qu’ils fussent sortis de l’ancienne caserne de pompiers, et à nouveau à bord de leur speeder, pour expliquer :

Les Ugors sont une espèce de… Marchands et ingénieurs ? Quelque chose comme ça. Intéressés par les débris spatiaux. Tous les débris, en fait. Je ne sais pas grand-chose des détails de leur culture, juste que dans certaines zones de la Bordure, la compétition entre eux et nous est féroce.
L’Ordre Jedi est en compétition avec les Ugors, s’étonna leur chauffeur ?
Non, j’veux dire : les Ark-Ni.
Les quoi ?

Il y avait dans le regard du soldat cette lueur de curiosité rêveuse d’une jeunesse qui n’avait jamais quitté sa planète et qui songeait parfois aux immenses étrangetés de la Galaxie.

Mon peuple, répondit laconiquement le Jedi, avant de se tourner vers sa coéquipière, pour étudier les plans fournis par la coordinatrice. Pour sûr que j’ai encore des visions.
Vous voyez l’avenir, s’étonna le jeune militaire ?
L’avenir, le passé, répondit Karm sans détacher les yeux de la carte, la couleur des sous-vêtements des gens.

Cette dernière information plongea Gat dans des abîmes de perplexité.

J’imagine qu’on est pas spécialement pressés par le temps, alors autant faire tous ces sites dans l’ordre de difficulté. Et puis n’importe comment, même si c’est pas pertinent pour notre enquête, on apprendra toujours des choses utiles à l’Ordre. Site D, donc.

Gat considéra le trajet qui s’affichait sur l’écran de bord.

District République, donc, fit-il.

Le speeder vira de bord avant de s’élancer franchement dans les avenues de Knossa.

District République ?
C’est un nom informel, expliqua leur guide. La plupart des ONG républicaines ont installé leurs sièges temporaires là-bas, le temps des opérations de sauvetage et de reconstruction. Ça a pas échappé à l’ambassade de la République, qui a… Enfin, vous voyez, quoi… C’est un peu une vitrine.

Karm perçut une pointe de désapprobation dans la voix du jeune homme, mais il jugea plus prudent de ne pas pousser ses questions plus loin. Ils se connaissaient encore trop peu.

En quelques minutes, ils virent fleurir les préfabriqués bardés des logos des grandes organisations caritatives de la République : ici, c’était Solidarités Bordure, là, Première Urgence Galactique. Droïdes Sans Frontières avait, comme à ses habitudes, érigé un bâtiment temporaire à l’aspect futuriste, tandis que, plus loin, on pouvait apercevoir les installations bariolées des Clowns Pour la Paix. Le Maître de l’ExploCorps avait travaillé avec nombre d’entre elles pendant sa carrière, et elles lui offraient un spectacle à la fois familier et désormais lointain.

Eux, dit-il en pointant les préfabriqués de Première Urgence Galactique. Ils auront été là les premiers et ils en sauront probablement le plus sur ce qui s’est passé à ce moment-là. Et après, les Clowns.
Les clowns, répéta Gat d’un ton nerveux ?
Pas de meilleure source d’informations sur les habitants que les clowns.
Ah…

Le speeder se rangea devant les locaux de PUG. À l’intérieur, l’installation n’avait rien de très impressionnant : des dizaines de bureaux casés les uns contre les autres pour profiter de tout l’espace disponible, l’essentiel des ressources de l’organisation étant destiné aux activités sur le terrain. Karm s’approcha de ce qui avait l’air de faire office de réception, quand une voix puissante résonna derrière pour s’exprimer en ces termes :

Mais si c’est pas les plus jolies petites fesses du monde de l’exploration !
Sby, glissa Karm d’un ton flegmatique sans se retourner, je crois qu’on parle de vous.

Puis, une fois le soldat cramoisi, le Jedi se tourna pour faire face à la Besalisk en tenue de l’ONG qui s’avançait vers lui, bras nombreux et grand ouverts.

Totorr, vieille crapule, s’exclama-t-elle encore, avant de l’étreindre, ce qui impliqua de le soulever du sol au passage !
Mes poumons…, gémit Karm.

La Besalisk reposa l’explorateur par terre pour se tourner vers les deux autres.

C’est ta petite prodige, elle ?

Thann eut la difficile mission de survivre à une vigoureuse tape sur l’épaule.

Des années qu’on l’entend se vanter de toi, jeune fille, t’as intérêt d’être à la hauteur de ta réputation.
J’me vante pas, marmonna Karm, je constate.
Et lui…

La Besalisk considéra Gat, qui contracta aussitôt tous ses muscles, préventivement, pour résister à l’expression de sa sympathie.

Ben alors, Totorr, je croyais que ton mec, c’était le blondinet angélique dont tu m’as montré la ph…Krak, voici le Sbyleumaniefik, un soldat ossien, comme t’aurais habilement pu le déduire à, genre, je sais pas, moi, l’uniforme.
Hmm… Oui, oui. J’imagine. Venez.

Par quel miracle l’imposante Besalisk parvenait à se faufiler entre les bureaux serrés les uns contre les autres, ce fut un mystère, mais elle finit par les introduire dans un petit bureau où ils tenaient à peine tous les quatre. Karm expliqua en quelques mots l’objet de leur visite et la Besalisk hocha la tête.

Un bordel monstre, ces histoires, fit-elle gravement, un bordel monstre. Ce que la République vous a… Enfin, bref… T’imagines bien que…

Son embarras était perceptible. Comment assurer à son ami que le bannissement de son Ordre le révoltait, tout en admettant qu’elle ne comptait rien faire pour lutter contre, car l’ONG pour laquelle elle travaillait dépendait trop étroitement des financements de la République ?

Karm se contenta d’un haussement d’épaules pudique et le sujet fut pour l’heure évacué.

Les opérations de reconstruction sont pas si compliquées que ça, enchaîna Krak, et même le sauvetage était pas… C’était pas une zone de guerre comme on a pu en voir ailleurs, tu comprends ? Des scènes difficiles, mais d’un point de vue logistique, rien d’insurmontable. S’il y a débauche de moyens, c’est parce que le gouvernement républicain arrose comme c’est pas permis. Enfin, on va pas se plaindre, pour une fois qu’il faut pas quémander des crédits…

Elle embrassa la carte d’un geste de la main.

La plupart des victimes, c’est une histoire de bâtiments effondrés, de décombres, des structures fragilisées par les combats. Et, probablement, pour le sous-investissement chronique et les pratiques douteuses de la noblesse locale dans la gestion de l’immobilier. La crise a révélé bien des faillites structurelles de l’organisation locale.

La présence de Gat ne la dissuadait nullement de critiquer la société ossienne.

C’est là qu’on est intervenus. On voit clairement que certains bâtiments ont été victime d’une explosion organisée. Des trucs qui s’effondrent comme ça, bien proprement, à partir des fondations, j’en ai jamais vu que dans les attaques terroristes, et je peux te dire que des immeubles en miettes, j’en ai fréquenté des villes entières. Mais ce que vous décrivez là, des attaques au sniper, des exécutions en pleine rue, ça me dit rien. Vous devriez aller voir les AJR.
Avocats pour la Justice et la Reconnaissance, glissa Karm à l’attention des autres.
Ils parcourent les camps de réfugiés, compléta la Besalisk, les immeubles de relogement, ce genre de choses, pour parler aux gens, identifier des victimes de possibles crimes de guerre et monter des actions en justice. Si quelqu’un a exécuté quelqu’un dans le coin, c’est encore eux qui en sauront le plus long.
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Thann grava profondément dans son esprit les quatre lettres de ce nom et nota de même, avec un certainement amusement, la complexité infinie que cachait la facilité déconcertante de ce nom. D’ailleurs, était-ce seulement ainsi qu’ils se désignaient eux-mêmes ? Ou était-ce l’un de ces nombreux termes, projetés par des cultures à la langue moins audacieuse ? Son esprit erra un temps sur le courant de l’hypothétique et de l’étrangeté de leur nom véritable. Non pas qu’elle les considéra comme étranger, mais bien fondamentalement différent d’elle et en cela, irrémédiablement fascinant. Comme le monde était-il perçu lorsque l’entièreté de son être semblait si peu tangible ? Si malléable ? Percevait-elle seulement la lumière ? Ou, à son exemple, était-ce d’autres réalités physiques sur lesquelles sa perception s’appuyait ? Elle rêvait encore à toutes ces choses quand le speeder s’arrêta devant les locaux de Première Urgence Galactique.

Tous s’approchaient du comptoir de la réception, ou du moins de l’assemblage un peu curieux d’éléments qui semblait se donner ce rôle, lorsque le trio fut intercepté par un élément astronomique bien plus massif qu’eux trois réunis. Thann fut-elle étonnée que le postérieur de son mentor fut aussitôt mis en avant ? Pas le moins du monde. Leur acolyte des forces ossiennes, a contrario, sembla plus surpris par la grivoiserie de l’approche, et l’humour piquant du Maître Jedi n’aida en rien mais amusa beaucoup la Miraluka. Son amusement fut chassé d’un coup sec et vigoureux administré à l’épaule. Jeune prodige ? « J’imagine que l’avoir dépassée de pratiquement vingt centimètre me situe déjà dans des hautes considérables ? » Oui… Elle avait hérité de son sens de l’humour aussi. La Besalisk rit avant de passer à la suite.

Krak était une femme de terrain et elle le démontra avec une forme de majesté singulière, d’abord en évoluant avec l’aisance d’une ballerine au milieu d’un champ de mine puis en leur dévoilant avec un grand savoir-faire l’état du secteur. « Donc, il n’y a aucun doute à avoir, nous avons bien eu affaire à un acte terroriste délibéré ; maintenant que nous sommes certains de la méthode et du symptôme, peut-être aurons-nous plus de facilité à comprendre la volonté derrière ces destructions, le chaos n’a certainement pas été orchestrée par pur plaisir de le voir à l’œuvre. Elle marqua une pause, continua de se concentrer sur les images. C’était rare de voir la Miraluka obligée de tourner le regard, mais cette fois, l’hologramme lui étant imperceptible, il lui fallait diriger convenablement sa visière pour que celle-ci lui traduisit le monde dans des nuances énergétiques qu’elle pût capter. – Ce que vous appelez les camps de réfugiés, ce sont ces alignements de baraquements, ici, ici et là ? – Pour ne rien te cacher. – Y a-t-il une logique derrière leur installation ou se sont-ils dressés spontanément ? Je veux dire, l’état est-il intervenu pour favoriser l’emplacement des réfugiés considérant leurs anciens lieux d’habitats ? Ou la répartition a suivi d’autres logiques ? – Il y a eu deux tendances, d’abord cette question géographique mais après, on a laissé pas mal de famille se rassembler. – Il s’agirait donc de commencer par le camp le plus proche de nos sites, nous y trouverions potentiellement les témoins les plus directs, et sans quoi, certainement les gens des AJR sauront nous être d’un quelconque recours. Nous devrions tout de même commencer par arpenter quelque peu les sites eux-mêmes, histoire de saisir le paysage qui devrait accueillir les témoignages. Tous assentirent à ces évidences mais Krak ne manqua d’y ajouter les mises en garde attendues : – Vous allez arpenter de larges zones de débris, non seulement il ne faudra pas s’aventurer n’importe comment sur les monticules, mais en plus certaines fondations, en sous-sol, ont également morflé, alors soyez très vigilant. Essayez de prendre les repères que vous pouvez mais n’oubliez pas que ces gens ont toujours vécus ces lieux avec des rues, des murs et des vitrines, autant vous dire qu’il va être difficile pour vous de vous faire une idée à quoi ça ressembler. Vous avez d’la chance, les choses sont tombées relativement proprement, mais n’oubliez quand même pas que si vous trouvez un panneau quelque part, il peut aussi bien avoir été projeté sur plusieurs centaines de mètres avant de retomber là. Le mieux, ce serait qu’un droïde vous accompagne et projette sur le terrain les plans. – J’imagine que Fugueur saura remplir ce rôle avec talent. Merci pour votre aide. – Y a pas d’quoi… Suffisamment d’trucs graves dans la Galaxie pour qu’on se serre tous les coudes, hein ? … Euh… Bon, si vous avez besoin d’me recontacter, au cas où, voilà ma fréquence com’link. Si vous voulez bien m’excusez, chers hôtes, j’ai affaire. Totorr, tu me dois toujours une bouteille de ‘sky ! J’ai pas oublié. » Une nouvelle tape monumentale dans le dos fut envoyée, en guise d’au revoir, et le trio se mit à nouveau en branle une forme de respiration retrouvée après avoir été si violemment coupée.

🌿

Quinze minutes plus tard, sur le premier site, le constat est sans appel : c’était la plus grande meule de foin que Thann n’avait jamais fouillée. Il fallait au moins admettre cela, il y avait eu une certaine expertise dans la destruction. « Bien, j’imagine que je vais me concentrer sur les relever topographiques et la reconnaissance des lieux pendant que vous tentez de faire émerger les visions ? Gat, je suis une grande fille, je saurais m’occuper de moi-même, par contre, les visions peuvent être… Prenante. Alors ne le lâcher pas des yeux ou vous risquez de me voir très contrariée à mon retour. »
Karm Torr
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Comment ça, des visions ?

C’était une perspective si étonnante qu’elle avait réussi à persuader Gat de détourner le regard de la Chevalière Jedi occupée à ses relevés topographiques, pour fixer le Maître, qui pour sa part s’attachait à programmer sa sonde d’exploration afin de reconnaître le terrain.

Vous avez vraiment des visions ?
Yep.
Vous pouvez voir le passé ?
Yep.
Et l’avenir ?
Yep.
Et sous mes vêtements ?

Karm pressa un dernier bouton sur son datapad et Fugueur prit son envol.

Yep, fit-il en se relevant.

C’est cette dernière information surtout qui plongea le jeune soldat dans des abîmes de perplexité et Karm le vit discrètement se tâter les abdominaux, comme pour s’assurer que tout était aussi ferme que prévu et qu’il offrait donc un spectacle convenable aux indiscrétions surnaturelles de ceux qui l’entouraient.

Et la Chevalière ?
Yep.
Comment ça, yep ?
Venez : on va crapahuter.

Et ils crapahutèrent, sans que Gat n’eût la réponse à sa question. C’était un vaste champ de décombres dans lequel le Jedi se déplaçait avec agilité et où le militaire, lui, se montrait plus circonspect. Néanmoins, il avait l’air de savoir où mettre les pieds et Karm en déduisit qu’il avait dû être mis à contribution, comme le reste de l’armée, aux opérations de déblaiement.

On pouvait voir ici ou là des monticules de matériaux artificiels crevés par de grosses tranchées qui trahissaient les opérations de sauvetage, quand on avait employé des droïdes pour se frayer un chemin vers de pauvres gens enfouis sous leur immeuble.

Vous avez perdu des proches, demanda soudain Karm au jeune homme qui l’accompagnait ?

Gat secoua la tête.

Je viens pas de la capitale, répondit-il. Ma famille est de la campagne. À deux cents, trois cents kilomètres d’ici. Mes parents sont artistes.
Vos parents sont artistes ?
Sculpteurs.
Et vous avez choisi de devenir militaire ?

Gat haussa les épaules, alors Karm laissa de côté le reste de ses questions.

Il s’était laissé guider par la Force, ou peut-être le hasard, ou peut-être qu’il n’y avait pas de différence. C’était là. C’était le bon endroit. Fugueur continue à voler au-dessus des décombres et, parfois, il se posait de sa propre initiative, sa configuration se métamorphosait et il se faufilait sous les gravats pour mener ses propres investigations.

Karm, lui, s’assit en tailleur dans un espace relativement dégagé, entre des poutrelles métalliques tordues par le choc et la chaleur, et ses paupières se mirent à trembler. Gat ne put retenir un mouvement inquiet en voyant le cou du Jedi se relâcher et sa tête rouler sur ses épaules, comme en plein malaise. Les mots formaient des mots inaudibles, et probablement incompréhensibles, de toute façon.

Et Karm les vit. La rue, le jour de la bataille. Les gens à leurs fenêtres, le regard levé vers le ciel, à tenter d’apercevoir les combats orbitaux, et d’autres qui se pressaient pour rentrer leur speeder dans les garages. L’inquiétude calme, et puis soudain la panique. Un mouvement inexplicable, qui se répandait comme une rumeur. Peut-être simplement quelqu’un avait-il commencé à courir, et que sa fuite avait entraîné toutes les autres. C’était la cohue dans la rue, la précipitation générale pour échapper à un danger encore difficile à s’expliquer, et puis soudain les trottoirs se soulevèrent, boursoufflés par une onde de choc dans la terre, et un torrent de débris brûlants se déversa dans la rue.

L’image devint plus vive. Karm sentit précisément la douleur et la mort qui se répercutaient dans la Force — impression familière de chair carbonisée, comme sur les champs de bataille quand les sabres laser étaient de sortie, même si ce fut ce jour-là moins précis et moins chirurgical. Il sentit les os qui craquaient, la sensation de s’effondrer soi-même comme un immeuble, l’incrédulité quand on passait les yeux pour se rendre compte qu’on avait une rampe d’escalier en travers de l’estomac.

Euh… M… Maître Torr ? Chevalière ? Chevalière, je suis pas sûr que…

Mais il avait vu quelque chose. Avant cela. Dans la peur. Sa respiration était devenue courte et difficile. Avant l’explosion, les conversations des gens dans la rue, la rumeur : c’était la rumeur qui les intéressait. Il s’était passé quelque chose, ailleurs, disait-on. On se transmettait ça de balcon en place de parking. Des gens tiraient sur la foule. Des snipers. On s’en prenait aux civils. Pourquoi, par les dieux, pourquoi ? Les gens n’avaient-ils donc aucune pitié ?

Karm rouvrit brusquement les yeux et il vit face à lui un Gat blanc comme un linge.

Vous… Vous m’entendez ? C… Combien j’ai de doigts ?
Dix ? Je suppose.
Ah, zut. Et là, fit-il en montrant trois doigts ?
Toujours dix.
Vous… euh… vous saignez…

Le voyant s’essuya le nez dont coulait du sang d’un revers de manche, avant de se relever, non sans tituber, à cause d’un léger vertige.

Vous… euh… vous avez vu des trucs ?
Voir est un terme un peu aseptisé pour ce genre d’expériences. Mais ouais. Pas l’endroit qu’on cherche, mais définitivement des rumeurs sur l’attaque de civils par des snipers. Ça concorde avec ce que nos collègues nous ont raconté. Mais faut encore remonter à la source…
Thann Sîdh
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« Boute, tu me reçois ? – Oui, Thann. Puis-je être utile ? – J’aurais besoin que tu enregistres les images que je t’envoie depuis ma visière, et que tu construises une représentation holographique complète à partir des images. Il faut qu’on puisse se promener à l’intérieur, d’accord ? Et mieux, si jamais on parvient à se les procurer, superposer avec des images d’avant la catastrophe. – Bien. Essayez de ne pas trop balayer le paysage, favorisez les angles ouverts, et considérez que je ne pourrais rien capter si vous vous enfoncez par trop dans les débris. – Bien compris. Ne t’inquiète pas trop si le résultat n’est pas parfait, Fugueur fait également des relevés, à trois, nous devrions obtenir quelque chose de probant. – Très bien. Lorsque vous voudrez interrompre le travail, bipez-moi simplement sur la visière. – Tu sais que tu es un super assistant, Boute ? – Pourquoi semblez-vous étonnée, Thann ? N’est-ce pas vous qui m’avez programmé ? » Elle rit. Impossible de savoir si ce retour était un compliment avéré ou un simple constat droïdique. Au fond d’elle, elle espérait profondément qu’il s’agissait de la première hypothèse ; non pas qu’elle désirait entendre ses éloges, mais plus que tout, elle voulait voir chez Boute surgir une forme d’indépendance et de caractère artificiel. Certains étaient horrifiés à cette idée de voir se développer une forme de pensée chez les êtres artificiels de leur conception – c’était d’ailleurs l’une des premières inquiétudes des grandes firmes qui conseillaient, pour un fonctionnement optimal de leurs appareils, de veiller à la remise à zéro des blocs mémoriels mensuelles. Il était justement là, le pas d’écart que marquait Thann dans sa façon d’avoir conçu B0-UT une seconde fois : elle n’avait pas produit un « appareil ». Pas même ne l’avait-elle laisser rester un « appareil » dans sa forme originelle. Il était son compagnon de toujours, presque une extension d’elle-même. Alors elle souriait, parce qu’elle l’espérait, à sa façon à lui, bien en vie.

Pleine de ce bonheur tranquille, elle s’ouvrit à la Force, se concentra et s’élança d’un bond vers une hauteur. Là-haut, sur un étage éventré s’ouvrant sur les alentours, elle procéda au balayage régulier de la zone, afin que sa visière captât le plus possible d’informations. C’était une chose étrange pour elle d’avoir à focaliser sa perception sur une ère aussi restreinte, mais c’était aussi le seul moyen qu’elle avait de procéder méthodiquement. Il lui faudrait concevoir, plus tard, un moyen plus efficace de capter le monde et de saisir ce que son esprit ne pouvait voir. Une fois satisfaite de ses premiers relevés, elle descendit, invoquant toujours la Force pour garantir sa chute, et s’enfonça un peu plus dans le dédale de ruines et de décombres. C’était d’ailleurs curieux de constater que dans le chaos indescriptible de l’explosion, parfois, se formaient des semblants de canyons parmi les décombres. Alors qu’elle suivait l’un de ces longs corridors surgis du néant, la Sentinelle se retrouva à constater que ce qui avait été prédit devait advenir : sitôt qu’une chape de permabéton et de duracier se forma au-dessus de sa tête, à la façon d’une voûte, elle perdit le contact avec B0-UT. Elle hésita un instant, sur le pas d’un long tunnel, avant de s’y engager. Du propre aveu de Krak, ces zones avaient à peine été fouillées, s’il fallait y trouver quelque chose, ce n’était pas en en effleurant simplement la surface.

Ici, le noir était complet, mais son regard de fille d’Alpheridies ne s’en émut pas et elle continua d’avancer aussi bien qu’en pleine lumière. Elle examinait les forces en présence, la façon dont certains grillages, profondément mêlés au solide, était parvenu à retenir en partie celui-ci, sans céder. Une singulière cathédrale dont, elle le sentait, l’équilibre était aussi prodigieux qu’instable. Trop peu de temps avait passé encore, ces amas n’avaient pas été suffisamment secoués, éprouvés par le temps. Certainement, à l’intérieur de ce plafond, des blocs entiers de matière attendaient la moindre secousse pour lâcher prise et entraîner avec eux une foule de confrères qui viendraient terminer de tasser le tout, non sans transformer profondément l’architecture du lieu. Thann décida, en son for intérieur, de ne pas être cette secousse tandis qu’elle avançait, peu ou prou dans le boyau qui allait s’amincissant. Elle finit par atteindre ce qui avait été autrefois un morceau de la rue originelle, elle l’identifia aisément à la plaque d’égout sur laquelle son pied se posa, et identifia une porte, lourdement bardées par d’énormes poutres métalliques. Elle laissa sa pensée aller alentour, afin de repérer davantage l’endroit, mais elle constata rapidement que deux choix lui étaient offerts : revenir sur ses pas ou s’approcher de cette porte. Sa curiosité l’amena à choisir le nouveau plutôt que l’ancien. Thann s’approcha, passa ses mains sur les épaisses poutres de duracier, constata de leurs solides appuis : certainement même toute la puissance de l’une de ses vagues télékinétiques n’aurait pas suffi à amorcer le début d’un déplacement. La Force, non pas le hasard, pourtant, l’avait menée là. Elle respira plus doucement, sentit toute la poussière de l’endroit, déploya son esprit vers le monde, se pencha toute entière sur ce que la Force avait à lui montrer. Au-delà de la porte, bien qu’indistinct, elle saisit une image. Elle soupira profondément, murmura une prière adressée à la Force vivante en qui tous se retrouvent et s’éloigna. Toutes les voies ne mènent pas à l’heureux.

🌿


« Boute ? – Le contact est rétabli, Thann. – Bien. Peux-tu joindre Madame Globuga, s’il te plaît, et lui signaler ces coordonnées ? Il y a des corps, là-bas, mais la PUG seule ne saura jamais sécuriser l’ensemble. Il faut orchestrer l’intervention de plusieurs pour les atteindre et leur donner une sépulture décente. Ils doivent aussi être signalés comme retrouvés, peut-être quelqu’un espérait-il encore. – Le message est envoyé. – Merci. Je vais tâcher de contacter les autres et de voir où ils en sont. – Madame Globuga a répondu. Elle vous remercie pour ces informations. – Des informations… » La Jedi laissa mourir sa voix sur ce constat et recommença d’avancer. De nouveau, elle invoqua la Force et cette fois, plana tranquillement jusqu’au sommet d’un monticule. Il n'était pas le plus élevé de la zone mais du moins espérait-elle que, de-là, elle parviendrait à établir un contact sensoriel avec le reste de son équipe.

« Ici Thann, vous me recevez ? – Ici Gat, on vous reçoit. Euh… Je ne sais pas comment dire ça mais votre collègue, il saigne du nez et il a eu ses visions. Apparemment, nous ne sommes pas au bon endroit. J’ai essayé de vous contacter deux fois mais je ne vous captais plus. – Oui, désolée, j’aurais dû vous prévenir, je me suis enfoncée sous les décombres. Je vous rejoins. Puis, après un temps, elle ajoute. – Ceci dit, ne soyez pas surpris de mon arrivée. Comme pour les saignements de nez et les visions, cela va vous sortir de votre ordinaire, d’accord ? » Elle ne reçut pas de réponse et se dit, qu’en conséquence, elle pouvait se permettre de revenir, de sommets de débris en sommet de débris, en ‘planant’ tranquillement jusqu’à eux.
Karm Torr
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Est-ce un oiseau ?
Hein ?
Est-ce une X-Wing ?
Mais…
Mais non, c’est Super-Thann !

Quand la Chevalière se parvint jusqu’à eux, le soldat se pencha vers elle et lui glissa sur le ton de la confidence :

J’ai peur qu’il soit neurologiquement atteint.
J’vous entends, vous savez.

Et Gat de rougir.

J’entends tout.
Non mais moi, je dis ça, c’est pour votre propre bien, vous savez…

Karm hocha la tête d’un air grave, qui ne contribua pas beaucoup à rassurer son interlocuteur sur son état mental, avant d’interroger son ancienne Padawane du regard. Leur exploration avait été tristement fructueuse, mais pas de la manière qui leur importait le plus. Le Gardien laissa un instant courir son regard sur le paysage tristement familier, pour un vétéran de temps de bataille, de ces ruines urbaines.

Direction le site D, donc.

Pendant tout le chemin qui les ramena à leur speeder, Gat continua à couver le Maître Jedi d’un regard protecteur. Si son supérieur l’avait affecté à cette mission, selon toute vraisemblance, pour surveiller les deux Jedis, il était évident que le jeune homme en avait une autre conception et qu’il se sentait plutôt responsable de leur sécurité.

Bientôt, ils s’élevaient à nouveau au-dessous du sol empoussiéré de la ville. Leur voyage les amenait vers des quartiers moins sinistrés ou, en tout les cas, où les droïdes de chantier avaient pu faire leur oeuvre et organiser quelque peu le chaos de la ville. Il y avait là le spectacle toujours étonnant de la vie qui reprenait son cours : une boutique rouverte à côté d’un immeuble incendié, des gens qui vivaient au-dessus d’un étage aux fenêtres pulvérisées et des enfants qui s’imaginaient des châteaux dans des tas de gravats.

La zone à couvrir demeurait vaste et il était malaisé d’y reproduire la trajectoire de Lauren et Galdur. Les informations fournies demeuraient trop précises pour se décider à coup sûr pour telle rue plutôt que telle autre. Les deux Jedis rencontraient là les limites de leurs tentatives topographiques et, après avoir mis pied à terre et errer pendant un petit moment dans les enchevêtrements tortueux d’un quartier ancien, Karm déclara :

J’crois qu’il est temps de partir à la pêche aux informations.

Une sorte de bazar avait envahi un peu plus loin le quartier. Comme certains grands centres commerciaux avaient été soufflés dans les explosions, et d’autres pillés dans la panique, on se retrouvait là à vendre tout et n’importe quoi, et parfois peut-être bien des objets qu’on avait subtilisés à ses voisins, en profitant de la confusion. Les boutiquiers bien organisés côtoyaient les simples particuliers qui avaient monté un stand de bric et de broc pour essayer de vendre trois paires de bottes de l’armée républicaine, un soit-disant cristal de sabre laser pas du tout en plastique et d’authentiques déclarations de blessure pour faire valoir ses droits auprès des autorités.

Karm se laissa dériver au petit bonheur la chance jusqu’à un stand où un monsieur joufflu le fixa un instant avant de déclarer d’un air très assuré :

Vous. Vous, je sais ce qu’il vous faut, vous.
Ah ouais ?

Monsieur Joufflu se pencha au-dessus de son stand, produisit un prodigieux clin d’oeil et murmura :

On se comprend, hein ? On se comprend !
Ben ouais, totalement.

Le type se mit à fouiller dans un grand sac en plastique à ses côtés pour en tirer trois datadisks qu’il tendit à Karm avec un air conspirateur.

Récupérés sur le chasseur personnel d’un dignitaire impérial par l’équipe de maintenance.
Cool.

Silence.

Et c’est quoi ?

Les cent derniers numéros de Sith & Sexy.
Hé ben dites donc…
Je vous conseille le 28.
Vous m’en direz tant…
Numéro spéciale « toute nue sous ma bure ».
Tenez, Gat, c’est pour vous.
Mais… Mais non, mais… mais pas du tout, enfin ! Moi ? Ce genre de choses ? Vous n’y pensez p…
Et sinon, enchaîna Karm, paraît que y a eu de sacrés combats, dans le coin, hein ?
Ah ben ça !
Comme vous dites. Genre, des armes militaires. Le mec qui dégommait les gens avec un sniper ? Truc de dingue.
On vit dans un de ces mondes…
C’est clair. Et donc ? Y a, je sais pas… Des petits chargeurs de sniper blaster retrouvés sur un toit ? Des grenades égarées ? Hmm… ?

L’ »expression de Joufflu se fit aussitôt méfiante et son regard dériva inévitablement sur Gat et son treillis.

C’est un mercenaire que j’ai engagé, assura Karm.
Hmmm…
Un mec complètement sanglant. Un disjoncté. Mais c’est pour ma sécurité, quoi…
Si vous le dites…, fit Joufflu d’un ton peu convaincu. Mais moi, voyez-vous, je ne sais rien de ce genre de choses…

Karm plissa un instant les paupières et il sentit à travers la Force que c’était un pieux mensonge.

Et y a quelqu’un qui sait, peut-être ?

L’homme se mit à balayer le reste du bazar du regard, à la recherche d’un concurrent à jeter dans la gueule du loup et de la loi.

Ses yeux finirent par s’arrêter avec une insistance dépourvue d’ambiguïté sur cinq Brubbs qui s’activaient à quelques dizaines de mètres, pour vendre à leur clientèle un assortiment de casseroles, de sacs de nourriture et de vêtements.
Thann Sîdh
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B0-UT aka Bouteboute – #EDF888
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Le premier marchand – #F0E8A5
La cousine de génie – #A4E7D2

« C’est fou, ça... Moi, quand il y a des choses dont j’ignore tout, je serai bien incapable d’indiquer qui que ce soit ; parce que, justement, je ne connais rien à ces choses. Genre, demain, je souhaite trouver de l’épice, je ne sais même pas par où commencer… Le grand sourire qu’elle adressa au vendeur finit de lui fermer totalement le visage. C’était comme si l’inquiétude était seule parvenue à faire rentrer tout le joufflu de ses joues à l’intérieur de lui, une façon peut-être de se cacher à la façon d’un gastéropode dans une coquille hermétique. – Ecoutez, ce ne sont rien de plus que des on-dit et moi, j’essaie d’vous aider alors… bon, bon ! Si de toutes façons rien ne vous intéresse, permettez que je renseigne mon autre client ? J’ai quelqu’un qui regarde, là-bas. Bien, bonne journée. Thann n’avait pas besoin de se tourner pour percevoir que personne ne regardait quoi que ce soit de l’autre côté de l’étal, direction qu’avait pourtant emprunté le vendeur. – Je crois que vous l’avez un peu braqué. – Mmmhhh… Apparemment, la Force ne m’a pas donnée les talents de persuasion de mon collègue. Je crois que ça vient de sa façon de tout murmurer, quelque part, ça doit chuinter les capacités de méfiance de ses interlocuteurs. – Vraiment ? Elle rit de bon cœur. – Peut-être, qui sait ? » Leur pauvre gardien la regarda, visiblement confus, bien incapable de réussir à établir son idée fixe quant aux deux gens qu’il accompagnait et ce qu’ils étaient ou non capables de faire.

Malgré les perditions du grand gaillard, l’enquête devait suivre son cours et puisque la source s’était tarie, il fallait aller puiser le savoir dans une autre fontaine. Elle s’éloigna de l’étale du marchand, notant avec amusement la façon dont le marchand s’activait à présent à leur tourner ostensiblement le dos, quitte à fixer une partie singulièrement vide du marché, et s’approcha avec une certaine nonchalance du stand qui leur avait été indiqué. Des cinq individus, deux étaient occupés à discuter avec des clients, deux autres s’affairaient, non sans pester, à bricoler ce qui semblait être un régulateur d’atmosphère un peu en retrait, si bien qu’il n’en restait qu’un pour les accueillir d’un sourire affable. Jamais la Sentinelle n’avait eu l’occasion de rencontrer cette espèce et, malgré elle, elle ne put s’empêcher une comparaison avec une pomme de terre qu’on aurait affublé d’un sourire, de quatre membres et d’yeux. Curieusement, même, elle trouva qu’il manquait à son interlocuteur à venir une moustache. Une belle et large moustache, au-dessus de ses lèvres charnues. « Bien le bonjour, madame, messieurs, que puis-je pour vous ? Thann laissa sa conscience courir le long de l’étale. Effectivement, la plupart de ce qui était proposé ici était d’ordre électronique, mécanique et, surtout, de seconde, de tierce voire de quatrième main ; aucun doute sur le fait que ces gens disposaient d’une profonde conscience écologique pour pousser jusque-là l’usage du recyclage. – Bien le bonjour, Monsieur. J’ai cru entendre, de la part de l’un de vos homologues, que vous étiez les plus qualifiés lorsqu’il s’agissait de récupération. – Aucun doute là-dessus, c’est sûr ! Mais, attention, qu’on s’entende bien, la récupération, oui, mais avant garanti de fonctionnement et de maintenance pour les deux années galactiques à venir ! Nous ne sommes pas des escrocs, mes ancêtres me tueraient. D’ailleurs, nous avons des certificats de probité remis par le gouvernement, et nous avons même l’une des meilleures ouvrières d’Ossus parmi nous, la p’tite dame qui discute là-bas. C’est ma cousine. Une championne, j’vous l’assure. Enfin ! Je parle, je parle, et je ne sais toujours pas pourquoi vous êtes là. » Alors qu’il parlait et parlait, d’ailleurs, un de ceux qui traficotaient sur le générateur s’en était arraché en jurant pour venir chercher la championne en question. Elle s’excusa poliment auprès de ses clients, les laissant aux mains de son collègue pour aller elle-même tenter d’opérer la machine défectueuse.

« C’est que notre demande est assez singulière, et on doit d’abord vous assurez que nous ne cherchons pas du tout à vous attirer des ennuis. Le fronçage de sourcil dantesque était apparemment un trait commun à de nombreuses espèces de la galaxie. Etait-ce par mimétisme avec les Humains, l’espèce la plus courante ? En tous les cas, le scepticisme du marchand se trouva largement marqué. Ne vous inquiétez pas, vraiment. Elle baissa d’un ton. Nous sommes Jedi et certains des nôtres ont été violemment agressés lors de la catastrophe… Nous aimerions simplement éclaircir les événements et certainement pas vous apporter le moindre ennui. S’il continuait ainsi à froncer les sourcils, les deux traits écailleux allaient finir par passer derrière sa tête. – Je ne vois pas en quoi nous pourrions vous êtes utiles, et, en toute franchise, je serais vous, je ne m’éterniserais pas ici. Les gens du coin… Ils ont des appréhensions sur les gens comme vous. Thann soupira et passa une main devant son visage pour attraper l’une de ses mèches et la glisser de nouveau derrière son oreille avant de continuer, sur le ton de la confidence. – Ecoutez, j’ai l’occasion de travailler régulièrement avec des gens de votre domaine, je suis moi-même une férue de clef hydraulique. Je sais aussi que vous n’avez pas votre pareil pour dénicher les choses qui se perdent. Nous voulons un échange de bons procédés, vraiment, rien de plus. Regardez, je vous propose un accord : j’aide votre championne à s’en sortir avec votre générateur d’atmosphère pour habitat particulier et vous, en échange, vous glisser à l’oreille de mon collègue, ou dans un petit sac, ce qui nous aiderait. Le scepticisme céda un peu à la surprise. Il faut dire, et Thann le savait, qu’identifier la nature de l’objet à cette distance avait quelque chose de remarquable, d’autant que les Miraluka étaient suffisamment rares pour qu’elle soit généralement confondu avec une Humaine, lesquels seraient bien incapables de décortiquer mentalement, comme elle l’avait fait, l’engin à cette distance. La tactique fut d’autant plus efficace que la cousine aux doigts de fée venait à son tour de commencer à pester contre la machine qui continuait de résister bravement à toute forme de réparation. La Jedi, d’un geste de la main, demanda si elle avait la permission de s’exécuter et, d’un mouvement de tête sans cou – ce qui revenait à un ample mouvement de tout le buste, le marchand accepta l’offre et invita la jeune femme à aller prêter main forte à ses comparses, restant seul avec les deux hommes qu’il jugeait d’un air méfiant.

Alors qu’elle s’approchait, les deux Brubbs qui s’affairaient autour de la machine s’arrêtèrent un instant de l’insulter dans leur langue natale – car il n’y avait aucun doute sur la nature des propos qui lui était adressé quand bien même Thann n’en comprenait pas un – pour se tourner vers la nouvelle venue, attendant qu’elle leur expliquât sa présence. « Bonjour, je suis Thann, votre cousin m’a proposé de regarder à votre machine, voir si je peux vous aider à la remettre en marche. Un échange de bon procédé, comme qui dirait. – Euh… Ouais… Vous vous y connaissez en… – Générateurs d’atmosphère ? Un peu. J’ai eu l’occasion, récemment, de participer à l’élaboration d’une structure d’accueil où beaucoup d'espèces différentes ont à cohabiter. De fait, en installer a été une nécessité. Etait-ce le désespoir d’heures vaines passées sur la machine ? Ou la pause repas qui commençait à peser sérieusement sur leur patience et leur résilience ? Les deux comparses se laissèrent convaincre et firent une place à Thann autour de l’engin, laquelle s’accroupit pour juger avec plus de minutie de l’état de l’engin à la façon d’une Humaine. Vous avez déjà des pistes ? Après un soupire à faire fondre même les volontés d’acier, la mécanicienne livra son analyse. – C’est pas hydraulique, déjà, pas de fuites, j’ai déjà vidanger le système, vérifier les pressions, tout ça, c’est nickel. J’ai du mal à savoir si c’est mécanique ou électrique, à vrai dire. Les pompes fonctionnent, le fluide tourne, mais il finit toujours par tousser et s’arrêter, comme si… Comme si j’en sais rien. J’ai essayé de trouver les plans, mais sans la marque de l’engin ni son matricule, car l’abruti qui s’en est occupé avant qu’on le retrouve dans les décombres s’est dit que c’était une super idée de retirer le renfort qui portait justement la plaque d’identification afin, certainement, de l’insérer dans un espace quelconque dans lequel il passait pas, et ce double abruti, en plus, n’a pas refixé la plaque. – J’imagine qu’il ne s’était pas imaginer voir sa maison sous une tonne de permabéton lorsqu’il a fait ça. Je vais envoyer des captures d’image à mon droïde, il est dans mon vaisseau, il saura peut-être nous retrouver les plans de l’engin sur l’holonet en faisant des comparaisons rapides avec les schémas qu’il trouvera en ligne. Si au moins, le tout est étanche, on a déjà un problème majeur d’écarter… Boute, est-ce que tu me reçois ? … »

🌿

« Vas-y, envoie le jus… Quelques précieuses minutes de tension s’écoulèrent lorsqu’enfin, la cousine s’exclama, grandiloquente : – PUTAIN DE BORDEL ! ça marche ! J’en reviens pas, quelle merde ! avant de balancer une claque amicale monumentale dans le dos de Thann qui crut choir sous la brutalité sympathique du geste. – Je le ferais quand même revoir par un expert avant de tenter de le revendre, afin de vérifier qu’il est conforme aux performances attendues de la gamme, mais je pense qu’on a réussi. – Tu m’as économisé des heures de boulot à tout démonter, t’as un drôle de sens de l’intuition. Si jamais tu cherches du boulot, j’t’embauche quand tu veux, quoiqu’en dise le cousin. Elle se tourna d’ailleurs vers lui, qui depuis longtemps, avait vaqué à ses occupations tandis que les deux hommes les avaient rejoints pour suivre l’avancement des travaux. Le soleil avait depuis un moment maintenant passé la ligne virtuel, dans le ciel, qui indiquait la midi. – Kraesus, c’est bon ! Tu peux leur faire la ristourne du siècle, la rouquine a assuré ! Et la rouquine en question de se tourner vers ses propres collègues, un grand sourire sur le visage, parfaitement inconsciente des traces de noir qui lui maculaient les joues. Certes, elle était plutôt mauvaise lorsqu’il s’agissait de négocier avec le vivant et de lui soutirer des informations à coup de sourire et de miel, mais au moins, elle savait monnayer son secours et s’attirer les bonnes grâces des marchands avisés. – C'est aussi un de vos pouvoirs ? – On va dire que c'est davantage de la passion. »
Karm Torr
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Ouais, et donc là, la meuf, elle me sort un tentacule !
Pas possible !
Mais si ! Un machin énorme ! J’te jure ! Alors moi, je dis pas, j’ai rien contre les expériences exotiques, hein, mais…

Pendant que la Chevalière travaillait dur, sous le regard attentif de Gat qui prenait son rôle de garde du corps fort au sérieux, Karm, lui, racontait des histoires plus ou moins abracadabrantesques à des Brubbs eux-mêmes tout à fait disposés à partager les multiples anecdotes de leur vie de semi-nomades.

Après avoir considérablement glandé… euh… enquêté, après avoir consciencieusement enquêté, le Maître rejoignit sa mécanicienne favorite pour observer le moment de grâce et le redémarrage du générateur d’atmosphère. Passé l’excitation du succès, l’un des Brubbs posa sur eux un regard soucieux et pensif. Mais il dût finalement juger que sa dette était réelle et, d’un geste, il leur fit signe de le suivre.

Les trois visiteurs passèrent à travers une grande bâche en plastique. Montée sur une architecture métallique bricolée avec des débris divers, elle couvrait l’arrière-boutique des Brubbs, pour la protéger des intempéries et des regards indiscrets. Là régnait un ordre méthodique bien différent du chaos du bazar extérieur et deux Brubbs supplémentaires s’y consacraient exclusivement au nettoyage, à l’identification et au tri des objets récupérés.

C’t’une sacrée opération, tout de même…, commenta Karm, qui avait lui-même assez dirigé de missions d’exploration pour prendre la mesure de toute ce que cela impliquait.
Quand on a la passion du métier ! Est-ce que vous ne trouvez pas cela fascinant ? Hein ? Fascinant ? Toute cette matière à qui donner une seconde vie, tous ces objets qu’on peut pousser encore un petit peu plus loin ! Dire qu’il y a des gens qui n’aiment que le neuf…

Karm approuva d’un hochement de tête, dont le Brubb n’avait nul besoin pour continuer sur sa lance. Les trois visiteurs eurent le droit à un long discours sur les joies de mettre de l’ordre dans les gravats, de tirer de l’utile du détruit, d’imaginer de nouvelles vies à ce qui avait été abîmé. Et l’explorateur, pour sa part, l’écoutait volontiers, car il y avait de la philosophie dans cet enthousiasme d’artisan et de marchand.

Bon…

Leur guide s’était arrêté près de caisses noires qui ressemblaient à s’y méprendre à celles que l’armée hapienne utilisait soixante ans plus tôt pour le transport de ses munitions.

Je vous fais confiance, n’est-ce pas ? N’est-ce pas ?

Le regard expressif du marchand sonda tour à tour chacun des trois visiteurs, et en particulier Gat, dont l’uniforme n’était pas fait pour apaiser les inquiétudes d’un trafiquant.

Promis juré !

C’était une parole de Jedi et le Brubb s’en satisfit. Il entreprit de composer un interminable digicode pour ouvrir les caisses. À l’intérieur, du matériel militaire attendait d’éventuels acheteurs, dans de petits lots séparés les uns des autres par de la mousse protectrice. Pour une bonne part, il s’agissait d’armes de poing, sans nul récupéré sur les cadavres des malheureux qui avaient perdu la vie dans les combats, mais il y avait aussi quelques explosifs, des outils de génie militaire et des uniformes soigneusement pliés et classés par armée d’obédience.

Et euh… Vous revendez ça à qui, en général, exactement ?

Avant de poser sa question, Karm avait jeté un regard à Gat et le jeune soldat arborait une expression choquée.

Des mercenaires, fit le Brubb d’une voix mal assurée, des fermiers de la Bordure Extérieure, qui ont besoin d’avoir de quoi se défendre. Des entreprises de sécurité. C’est une galaxie dangereuse et les gens ne peuvent pas toujours se reposer sur les pouvoirs publics. N’est-ce pas ? N’est-ce pas ?
Certes…

Et en vérité, quelle aurait été l’alternative ? Désarmer la totalité de la Galaxie ? Pure utopie.

Et donc ? Ce qui nous intéresse ? Le sniper, tout ça…
Oui, oui… Ce n’était pas très loin d’ici et on ne sait pas grand-chose sur ce qui s’est passé. Des explosions, ça, c’est sûr, et des combats dans la rue. Un chargeur vide…

Le Brubb disparut à moitié de la caisse pour extirper du fond une petite pochette étiquetée dans une langue étrange, dont il tira un chargeur de fusil d’assaut.

On peut y remettre de l’énergie, si vous voulez : ça vous coûtera toujours moins cher qu’un chargeur neuf.
Ça ira, merci, murmura Karm en examinant l’objet, avant de le passer à Gat. Ça vous dit quelque chose ?

Le soldat, plus ou moins remis de sa surprise, étudia à son tour l’objet.

Hmm… Pas utilisé par les forces armées d’Ossus, ça, c’est sûr.
C’est du matériel de la Czerka, intervint le Brubb. Mais interopérable, bien sûr, avec tous les modèles standards et…
La Czerka, dit Karm en coupant l’argumentaire de vente ?
C’est une entreprise multiplanétaire.
Ouais, ouais, je suis familier de leurs… activités.

Comme tous les habitués de la Bordure Extérieure.

Et vous avez trouvé ça où ?

Le Brubb dégaina un datapad pour afficher une carte de la capitale qui, pour certains quartiers, n’entretenait plus qu’un rapport lointain avec la réalité des rues dévastées. Mais il put leur indiquer précisément le lieu de sa découverte.[/color]

Ici, il y avait des débris de grenade, mais rien d’exploitable, même par nous.
Czerka ou impériales, les grenades ?
Difficile à dire. Peut-être qu’un laboratoire pourrait les examiner de plus près que nous ?
’Tendez, mais vous les avez encore ?

Nouveau plongeon dans la caisse, nouveau sachet en plastique que le marchand tendit à Karm. Le regard du Jedi se fit plus perçant que de coutume.

Donc c’est inutilisable mais vous les avez quand même conservées ?

Son interlocuteur se prit soudainement de passion pour son datapad.

Est-ce que par hasard, vous vous seriez pas dit que quelqu’un viendrait poser des questions et vous racheter des indices ?
Hé bien… c’était… un spectacle assez inhabituel, même en zone de guerre, et nous nous devons de rester ouverts à toutes les opportunités. S’il est possible de contribuer modestement à une enquête qui, je l’espère, permettra d’arrêter les coupables, d’offrir un peu de réconfort aux victimes et de restaurer un semblant de justice dans cette galaxie froide et cruelle où nous sommes comme des astéroïdes égarés dans l’immensité…
C’est bon, c’est bon, soupira le Jedi. On va les prendre aussi, vos débris, pour voir si on peut en attester la provenance. Et le chargeur.
Ah, vous ne le regretterez pas, s’enthousiasma le marchand ! Je vous fais un paquet cadeau ?
Thann Sîdh
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« Ouais… L’cousin, il a le sens des affaires. On a l’air d’faire des trucs pas propres, là, mais en même temps, si tout n’était pas si cher… Sans mentir, s’il avait pas été là, j’me retrouvais endettée à vie juste pour mes études. Alors, bon, pas d’jugements, hein ? – Non, pas de jugements… D’autant que, si vous n’aviez pas été là, peut-être ces choses ce seraient-elles perdues dans la gueule d’une pelle mécanique lors d’un déblaiement, ou autre… J’ignorais que les études revenaient si chères. – Vous n’avez pas idée… Faut dire, dans votre truc base de Jedi, là, c’t’un autre monde. Mais, mais… J’veux pas me montrer désobligeante, hein ! Vous avez l’air moins… coincés ? Que ce à quoi je m’attendais. J’l’ai entendu parler, tantôt, de trucs avec des tentacules… J’aurais jamais cru. – Faut croire que nos années sous cloches finissent par nous donner une forme de curiosité un peu extrême ? » Les deux femmes se tenaient un peu en retrait du trio d’affaire. La remarque, vis-à-vis du prix d’une éducation de qualité, l’avait quelque peu ébranlée. C’était pourtant une évidence, et, à dire vrai, sûrement celle-ci lui serait venue si elle avait pris le temps d’y penser un instant avant de laisser s’échapper les mots. Pourtant… C’était peut-être le risque que représentait la possibilité d’être inquiété pour entrave à l’exercice de la justice, ou quelque chose d’apparenté, qui lui semblait terriblement conséquent face à la nécessité du remboursement de cet emprunt : des gens tout à fait compétents étaient donc obligés d’en arriver à ces limites légales pour parvenir à l’instruction. Des échos de l’Enclave lui revinrent, de la nécessité de s’enraciner davantage dans l’humus de la Galaxie ; celui qui lui donnait sa vigueur, celui qui la faisait tenir face au vent.

« D’ailleurs, pourquoi qu’il vous intéresse ce matériel ? La question ramena l’esprit de Thann dans l’immédiat. – Une consœur a été l’objet d’une agression extrêmement grave, ainsi qu’un autre d’entre nous. Sans compter l’assassinat de civils lors de cette altercation. Puisque les services de la République ont… Elle était en train de chercher des mots objectifs pour désigner la situation mais l’ingénieure lui vint en aide. – … décidé de vous la mettre au fond du… – … nous sommes donc obligés de mener notre propre investigation afin de communiquer les preuves aux tribunaux compétents mais aussi pour identifier les menaces auxquelles nous faisons face. Des choses ce sont passés ce jour-là que nous n’arrivons pas bien à comprendre. – D’mon point d’vue, ça fait cinq cent ans qu’on y comprend plus rien, dans toutes ces sphères. J’préfère encore m’taper le front contre des générateurs atmos’ tous les jours de toute ma vie. – Je crois comprendre ce que vous voulez dire… Mais on y travaille, j’vous assure. On s’est certainement égaré en chemin mais on… Elle n’eut pas le temps de finir, la proposition d’un emballage cadeau venait d’être faite et tout le petit groupe s’activait de nouveau, des sacs d’emplettes bien singulières pendouillant au bout des bras. Des sourires s’échangèrent, des « bonne journée à vous » en pagaille et bientôt le trio d’enquêteurs voler à nouveau vers des horizons plus sombres.

« C’est… souvent comme ça ? La Miraluka s’était une nouvelle fois mystérieusement trouvée à devoir se placer devant, aux côtés du pilote. – Souvent comment ? – Et bien… Ces gens… Ces preuves… Ce qu’ils ont fait… – Ce qu’ils ont fait ? Ont-ils fait quelque chose de mal ? – Bien sûr ! Nous avons constaté de la transgression de nombreuses lois, dans cette boîte. Je n’ai rien dit parce que je ne voulais pas nuire à votre enquête mais… – Ce n’est pas ce que je vous ai demandé. Je vous ai demandé s’il avait fait quelque chose de mal. Ne sommes-nous pas finalement sortis tous gagnants de tout cela ? Le bien commun n’a-t-il pas été respecté ? Plus il passait de temps avec eux, plus Gat semblait se perdre dans des abimes de perplexités. – Vous… vous pensez ? – Je ne sais pas. C’est bien pour cela que je vous le demande. » Un sourire aussi amusé qu’énigmatique, pour la première fois, c’était à la Sentinelle de provoquer une rougeur à la surface des joues du gaillard et peut-être même la manœuvre avait été pleinement consciente.

🌿

« Bon… Si le témoignage de Lauren est exact, on pourrait reconnaître ici la grande rue dont elle m’a parlé, avec plus haut… Plusieurs carrefours. Je vais essayer de parcourir les alentours, de cartographier un peu, de calculer quelques angles pour voir les positions potentielles du tireur. Je vais encore t’emprunter ton petit pote droïde, Oni, ses relevés seront plus performants que ceux que je pourrais faire avec ma visière. Tu t’occupes de refaire ton truc ? Et cette fois, essaye de ne pas trop saigner du nez, tu rends soucieux notre petit camarade. » Sur un croissant de lune rieur, elle quitta le speeder qui venait juste de se poser et de s’éteindre afin de procéder à ces relevés. Elle n’en avait aucune preuve tangible encore mais, effectivement, quelque part, elle sentait qu’ils étaient sur le point de toucher quelque chose du doigt. Que le matériel appartînt à la Czerka ne voulait pas dire grand-chose tant le matériel de cette entreprise était courant entre les mains des mercenaires de la Galaxie. Du moins, justement, cela vaudrait au moins cela : ce n’était pas du matériel militaire. Elle ne s’y connaissait pas vraiment en balistique, de fait elle avait même plutôt la plupart des armes en répugnance, mais elle ne doutait pas qu’au Temple ils trouveraient le soutien nécessaire à pousser plus loin l’investigation et, sûrement, la Force les guiderait à travers son mentor sur les bons chemins. Avec minutie, elle commença à monter de toit en toit, tentant d’identifier le fameux « croisement » évoqué par son amie. Régulièrement, elle invoquait l’aide de Fugueur et transmettait ses résultats à B0-UT. Aucun doute, l’équipe scientifique des experts venaient d’arriver sur les lieux du crime, bien décidée à résoudre cette affaire.

Karm Torr
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Vous pensez que je serais qui ?
Je vous demande pardon ?

Gat eut la présence d’esprit d’enfin détacher son regard de la jeune Chevalière qui venait de s’éloigner.

Si on était dans Les Experts : Coruscant, vous pensez que je serais qui ? Comme perso ?

Le jeune soldat ouvrit la bouche pour répondre, mais comme aucune solution très diplomatique ne lui vint pour se sortir de cette conversation, il haussa les épaules et secoua la tête d’un air indécis.

Ouais. Vous avez raison. Un indic prostitué tout en sensualité pour lequel le policier sexy développe une attirance torride sans vouloir se l’avouer.
Eeeeeeuuuuuh…

Karm haussa le sourcil (gauche) pour se donner une mine faussement vexée.

S… Sûrement, Maître Torr, sûrement.

Tout en parlant, ils remontaient la rue entièrement déserte. Les fenêtres avaient été barricadées et les bâtiments évacués. De temps en temps, on voyait une ombre à la fenêtre, quelqu’un qui avait réintégré son logement avant que les autorités ne leur en donnent l’autorisation. C’était l’obstination de la vie quotidienne face aux orages du présent.

Vous avez une copine, Gat ? Un mec, peut-être ?

Le pauvre jeune homme ouvrit des yeux ronds.

Ben euh non mais euh mais euh… je… je suis flatté, Maître Torr, mais vous savez, euh… je ne suis pas… enfin, vous êtes sans doute très… euh… pour les gens qui aiment ce genre de choses…
Ce genre de choses ?
Non mais c’est pas ce que je voulais dire !
Je suis pas en train de vous inviter à un rencard, hein.
Ah !

Le soulagement fut réel.

On est pas censés enquêter ?
C’est ce qu’on fait.
En parlant de ma vie sentimentale ?
En parlant de la vie de tous les jours face à l’horreur d’un instant.

Gat resta un instant muet face à la soudaine mélancolie de ces considérations.

Pensez à toutes ces petites choses normales, poursuivit Karm d’une voix de plus en plus lointaine, le soldat en permission qui embrasse sa petite amie qui se penche par la fenêtre du rez-de-chaussée, les pots de fleur qui s’alignent sur le rebord du fenêtre, le voisin qui se racle les sabots sur le balcon, le vieux monsieur qui essaie de faire démarrer son vieux speeder. Et soudain les cris, les explosions, toute la confusion et l’inexplicable violence de notre petit bout de rue dans l’inexplicable violence de la galaxie immense, et ce crime effroyable qui est un pont entre les deux : quelqu’un qui tire sur la foule avec un fusil sniper.

Et ce fut à cet instant que le soldat comprit que le Jedi n’était pas en train d’inventer une scène typique, mais de décrire ce qu’il était en train de voir. Sa marche était devenue erratique.

Et là, toute la peur, et toute l’incompréhension, et toute la colère, pour ceux qui en arrivent jusque-là, qui ont la ressource de dépasser l’horreur de l’instant pour remonter jusqu’à la morale, tout ça, ça se grave dans la Force. Y a des événements qui s’enfuient, des petits filets d’eau dont on peut pas retrouver les traces, et puis il y a le gros torrent de l’histoire qui creuse d’un coup son lit énorme sur la face des planètes. Ici.

Karm s’arrêta brusquement sur une petite place.

Ici les gens sont morts. Pour absolument aucune raison.
Vous… vous devriez pas vous asseoir ?
Une seconde.

Les paupières désormais fermées du Jedi se mirent à trembler.

Je la vois.
Thann ?
Maxence.

Fidèle à elle-même. Et occupée à traquer une Jedi. À traquer quelqu’un de sa famille à lui, avec la joie sordide du meurtre. Il la voyait nettement, et puis soudain, plus du tout, parce que la Force l’attirait dans une direction bien différente : à des années et des années-lumières de là, quand il était un tout jeune Chevalier, et que le Conseil l’avait convoqué pour lui apprendre que celle qui l’avait formé venait de déserter. Et dans une autre direction encore, et à une époque bien plus lointaine, dans un souvenir qui n’était pas le sien, où un frère trahissait un frère, sans savoir que bientôt, l’un allait tuer l’autre.

Sans s’en rendre compte, Karm serrait dans son poing la larme delphique, et les arrêtes du cristal s’imprimaient dans la paume dans sa main. Il fallut la douleur pour le ramener brusquement à la réalité et pour que, devant ses yeux d’abord égarés, se recompose petit à petit le paysage calme et silencieux de la rue abandonnée.

Vous… vous allez bien ?
Oui, oui, rassurez-vous : pas besoin de me faire du bouche-à-bouche.
Vous avez vu quelque chose d’utile ?
La confirmation de mes soupçons. Et peut-être aussi de la futilité de certains de mes espoirs.

Karm détacha lentement son comlink de sa ceinture. Pour faire défiler les numéros sur l’écran, jusqu’à s’arrêter à celui de Maxence. Trois messages composés et trois messages effacés plus tard, il descendit encore en peu la liste jusqu’à trouver Thann et lui envoyer :

C’était bien Darkan.
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