Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
C'était une journée comme une autre au sein du Sénat, si l'on omettait le trouble que le Hapien ressentait encore après une rencontre atypique. Darth Unus avait laissé sa sombre empreinte dans sa mémoire, laquelle agitait irrégulièrement l'échine de Luke. De l'extérieur, il n'en laissait rien paraître, professionnel, mais intérieurement l'inquiétude couvait. Tavaï, Noctis et maintenant cette nouvelle mégalomane à l'aura noircie outre mesure. De fait, le jeune homme ne saurait définir, qui dans son attitude était plus dérangeant entre le raffiné ex-Jedi et cette Méduse décharnée. En apparence -mais ça, Luke ne pouvait s'en rendre compte-, tout les opposait : l'éphèbe et le monstre, mais mentalement, ils se ressemblaient un peu trop. Du moins, dans une approche de profiler approximative que le Jedi avait à peine pu commencer à faire tant il avait été occupé. Cela faisait déjà au moins une semaine que Karm et lui se voyaient en coup de vent voire pas du tout malgré le fait qu'aucun ne soit véritablement en mission. L'un était sur Dantooine, l'autre végétait à Coruscant, galopant de l'université au Sénat et du Sénat au Temple. Le blond acceptait la situation résolument, tous deux savaient à quoi s'attendre avec leur travail, mieux, leur vocation, mais ça n'empêchait pas le manque, d'autant plus que le jeune homme avait hâte de parler d'Unus à son ami. Il avait hâte, mais aussi peur car cela ouvrait encore une intrigue les concernant, même si Luke restait persuadé que la Sith ne l'avait pas chassé personnellement. Elle avait plutôt saisi l'opportunité de déranger un Jedi et de nourrir son sadisme par la même occasion. En soi, c'était rassurant de savoir qu'un seuls des deux avait sa Némesis obsédée, et largement suffisant. D'ailleurs, Luke ne doutait absolument pas que Karm offrirait l'attention maladive de Noctis pour sa personne à n'importe qui d'autre. Aux héros, les deux jeunes gens laissaient volontiers la "gloire" d'un super vilain personnel.

Mis à part cette situation particulière, le quotidien restait vivable, même agréable du point de vue de l'optimiste Luke. (on ne dirait pas comme ça, mais si, si il était de nature à voir le verre à moitié plein). L'approbation de l'Ordre, un couple stable, la possibilité d'exercer son "métier" en aidant autrui, c'était le tronc principal de sa vie que de mauvaises langues jugeraient morne. Le Chevalier n'avait guère d'autres aspirations, peu importe finalement si certaines missions lui plaisaient moins. Tant qu'elles n'allaient pas à l'encontre de ses principes, il se pliait volontiers aux ordres, renâclant uniquement (et encore à mi-voix) quand on lui suggérait d'essayer à nouveau de prendre un Padawan.

C'était donc, hormis l'inquiétude qui froissait son humeur, plutôt serein que le Chevalier arpentait le Sénat. Il avait été mandaté par le Temple pour un énième rendez-vous interposé entre l'Ordre et la République. Pas d'enjeux majeurs, puisque seuls deux représentants s'étaient retrouvés : entre autre un conseiller de Grendo S'orn et Luke pour un point sur la situation entre les deux institutions. Le genre de travail laborieux qui ne faisait pas forcément changer les choses mais toutefois nécessaires au bon fonctionnement d'un État. Le blond avait perçu une tension palpable sous les atours courtois. Sans surprise. Après l'accusation ouverte de Grendo concernant l'éducation "d'enfants soldats" dans son bureau, suivi d'un chantage odieux, il ne fallait pas s'attendre à des relations faciles. Le Hapien avait été marqué par cette réunion où le Némoindien s'était révélé devant Saï, mais les trames de la politique exigeaient au jeune Jedi de se taire. Pour l'instant en tout cas, personne ne pouvait dévoiler les propos qui s'étaient tenus à huit-clos ni le manque de respect évident de S'orn pour son vénérable Maître. Ils devaient tâcher d'encore essayer de concilier les deux institutions, d'où ces fameuses rencontres, en apparence mineures, mais hautement importantes sur le long terme. Luke avait déjà demandé de ne plus s'approcher de la politique, cependant, il devait bien achever ce dossier après avoir été le témoin principal de la rencontre entre le Chef du Conseil et le Chancelier Suprême. Ainsi, il ne faillirait pas à sa tâche, et faute de mieux, s'en réjouissait car pleurer sur son sort ne résoudrait pas le problème. Il devrait quand même retrouver le conseiller d'ici 15 jours pour de nouveaux détails dont des hommes aussi importants que S'orn ou Maître Don ne sauraient s'occuper.

À peine Luke eut-il chassé de son esprit la fameuse Unus, retrouvant un rai de lumière dans son quotidien, certes ardu mais satisfaisant qu'il sentit un vent glacé s'infiltrer. S'il frissonna cette fois, ce n'était plus à cause de son étrange interlocutrice d'Ossus mais d'autre chose. C'était puissant et si le Hapien n'avait pas son pareil pour ressentir ce genre d'auras, même ténus, l'impression le percuta encore plus violemment. Là où il découvrait toujours l'obscurité quelques fractions de secondes avant les plus sensibles de ses pairs, il fut d'autant plus happé par cette corruption pourrissante qui dégoulinait le long des murs. Le jeune homme songea aussitôt à Unus, mais le cauchemar l'avait assez marqué pour qu'il reconnaisse son empreinte si particulière. Ce n'était pas elle, bien que la présence lui semble familière. Du moins, le noyau dur auquel il avait déjà eu affaire, parce qu'autour, l'empreinte avait grandi, forci, l'être s'était encore enfoncé dans la noirceur depuis leur éventuelle ultime rencontre. Le jeune homme ravala sa peur toute naturelle pour lever la tête.

Le blond choisit entre affiner ses sens et réduire sa propre aura (qu'il ne pouvait faire disparaître totalement hélas) et resta planté au milieu du Sénat quelques secondes. Puisque la seconde attitude n'avait pas été payante avec Unus, il avait opté pour la première et remontait désormais, à contre courant, la source sombre. Sans trop hésiter, il parvint à réduire le champs des possibles, repérant les nuances de concentration de noirceur pour remonter le fil. Par réflexe, le Chevalier évalua les alentours, hasard ou fleur de son potentiel ennemi, il avait choisi un endroit et un moment où les couloirs du Sénat étaient quasiment vides, toutefois, la possibilité d'une victime demeurait. Le Jedi craint aussitôt de se retrouver dans la même situation qu'avec Unus, mais il ne pouvait fuir, risquant de se retrouver en-dehors du bâtiment, dans un espace public bondé quant à lui. Il préféra donc surmonter sa peur naturelle, l'envelopper dans une chape lourde d'autocontrôles maîtrisés après des années d'entraînement pour aller plonger dans le possible piège. Autant aller à la rencontre de la corruption et il l'indiqua d'une onde de Force, démontrant être "prêt" à la rencontre, juste derrière ce gros pilier, là, au milieu d'une sorte de place marbrée.
Là, raidi, il attendit que la chose se dévoile, tous sens en éveil.
Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Et c’est une bonne situation, ça, garde du Sénat ?
Oh, vous savez, je ne dirais pas qu’il y a de bonnes et de mauvaises situations…
Vous êtes philosophe !
Ma foi, ma foi.

Le jeune Twi’Lek était entièrement subjugué. D’ordinaire, les politiciens qui passaient par les couloirs du Sénat Galactique étaient ventrus et antipathiques. Peut-être par préjugé, peut-être par l’effet d’un sens de l’observation désabusé, il trouvait qu’ils dégageaient tous quelque chose de malsain et d’inquiétant, comme si la corruption, véritable ou au moins possible, transformait leur visage autant que leur esprit.

Mais ce Dr. Thorn était différent. Il l’avait deviné du premier coup d’oeil. Cet homme-là avait même quelque chose… D’angélique. Alors quand le regard du visiteur qui, à ce qu’on racontait, et ce n’était pas rien, quittait le bureau du Chancellier, quand ce regard-là, si pur, si beau, presque surnaturel en un sens, avait croisé le sien, le jeune garde s’était aussitôt senti envahi par toutes ces rêveries qu’il n’osait avouer à ses compagnons d’armes, de peur qu’ils ne le rejettent.

Le Hapien avait engagé la conversation. Charmant et chaleureux. C’était un paisible économiste, qui conseillait une délégation hapienne, et se souciait par-dessus tout de la paix dans la Galaxie. Des hommes comme l’on en fait peu, en somme, de vrais altruistes, dévoué au bien-être de tous. Le Twi’Lek se surprenait alors à se demander si, peut-être, il y avait une infime chance pour que son intérêt soit réciproque, pour que…

Mais voilà que son brillant interlocuteur paraissait soudain distrait. Misère ! Il l’avait ennuyé, au bout du compte, lui le simple soldat.

Hmm, je crains de devoir vous abandonner, cher Ry’shek.
Je comprends, fit piteusement le jeune soldat, qui ne parvenait pas à cacher sa déception.
C’est qu’hélas je viens de me souvenir que j’avais encore une réunion.
Bien sûr, bien sûr, répond-t-il. Avec des gens importants sans aucun doute.
Beaucoup moins importants que vous, Ry’shek, et d’ailleurs… Si vous acceptiez, enfin…

C’était soudain lui qui paraissait timide, et cette fragilité dans un homme tel que lui était touchante.

… avant que je ne reparte pour le Consortium… Nous pourrions peut-être, vous savez. Poursuivre notre discussion.
Autour d’un verre ?

Ry’shek s’en voulut d’être soudain si peu professionnel, mais l’occasion était trop belle.

Autour de tout ce que vous voudrez.

Le jeune garde s’empressa de donner son numéro, Absalom lui sourit, et puis le Twi’Lek le suivit du regard, jusqu’à ce que l’angélique créature ne disparût au détour d’un couloir, auréolée à ses yeux de toute la pureté de son âme.

Quand il fut hors de vue de sa nouvelle conquête, Noctis, quant à lui, pressa le pas. Il avait ressenti une présence dans la Force, et en soi cela n’avait rien d’extraordinaire, car les Consulaires de l’Ordre fréquentaient hantaient souvent le Sénat, mais cette présence avait une inflexion particulière, et elle appartenait à quelqu’un vers qui ses pensées revenaient souvent.

Lui-même n’avait pas essayé de se cacher. C’eût été parfaitement inutile. Les ressources qu’il aurait fallu déployer pour dissimuler une aura comme la sienne, cet océan de noirceur calme et menaçant, comme des eaux trop profondes pour ne pas être inquiétantes, qui l’entourait, ces ressources étaient tout simplement hors de sa portée, et il avait depuis longtemps décidé que le travail acharné auquel il aurait dû consentir pour parvenir à se dissimuler au sein de la Force, étant ce qu’il était, revenait à sacrifier trop de recherches autrement plus importantes.

Alors il se laissa guider par la présence, dont il lui sembla qu’elle le cherchait aussi, et même qu’elle l’appelait. Curieuse attitude, qui le surprenait en vérité. Mais agréablement.

Ainsi, quelques minutes plus tard, tandis que Luke attendait avec son appréhension, Absalom Thorn se présentait à lui avec le sourire que l’on réserve à ses meilleurs amis et qui s’étendait jusque dans sa voix, chaleureuse et amicale, et en cela, aurait-on juré, d’une parfaite sincérité.

Ah, Luke ! Je ne pensais pas vous trouver ici, je dois bien le reconnaître, mais c’est un plaisir de vous revoir, après tout ce temps.

Tout ce temps, donc, qui s’était écoulé depuis la fois où il les avait kidnappés, Karm et lui. À l’entendre, on aurait juré qu’ils s’étaient tous quittés en excellents termes après une belle soirée à l’opéra.

Vous avez l’air tout pâle : l’air du Sénat ne vous réussit guère. Venez, marchons un peu, ça vous fera du bien. Je ne serais moi-même pas fâché de me dégourdir un peu les jambes, les réunions se succèdent et je dois bien vous avouer que j’ai fini par perdre l’habitude des délégations diplomatiques.

Qu’il ne regrettait guère, d’ailleurs.

J’imagine que vous vous interrogez sur ma présence, poursuivit-il. C’est que j’accompagne une mission hapienne qui vise à consolider les liens avec la République. Enfin, les consolider, c’est un bien grand mot, étant donné le caractère anecdotique des relations, mais enfin, vous saisissez le principe. Comme j’ai déjà contribué aux rapprochements avec l’université d’Alderaan, et puis Cadézia, j’ai été comme qui dirait désigné volontaire.

Et pour le coup, cela, c’était la stricte vérité : il était venu là sans la moindre arrière-pensée, si ce n’était d’entretenir ses bonnes relations avec la ministre des affaires étrangères du Consortium.

Bref, si ma présence vous inquiète, sachez que c’est sans raison. J’imagine bien que vous n’êtes pas porté à me faire confiance, mais ma présence ici n’a rien que de très honorable.

Pour une fois, diraient certains.

Et vous ? Comment vous portez-vous ? Vous n’êtes pas sur Dantooine avec votre compagnon ?
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
Évidemment

Luke aurait dû le prévoir, l'ironie, sa fidèle compagne ces derniers temps ne pouvait pas rater le coche. Un Absalom parfaitement légitime en ces lieux l'attendait. Si le jeune homme avait peiné à reconnaître l'aura autrement plus viciée qu'avant, il n'aurait oublié cette voix charmante, mielleuse au possible pour rien au monde. Cela dit, unique avantage comparé à Unus, l'homme ne se permettrait pas un massacre en public, il avait une image à tenir et un code d'honneur bien étrange qui n'appartenait qu'à lui, preuve en était, les deux Chevaliers jadis capturés étaient encore en vie et libres.

Comme d'habitude, le trentenaire faisait étalage de sa courtoisie parfaite, des manières enviables lorsqu'on ne connaissait pas le personnage ou que l'on ne percevait pas, à l'instar de Luke en cet instant, sa présence malsaine, dangereusement douce, tel un volcan qui n'attendait que les bons éléments pour exploser en une alchimie toxique. Au moins ne poussait-il pas le vice jusqu'à faire semblant jusqu'au bout. Il admettait volontiers que le jeune Jedi n'avait aucune raison de lui prêter confiance, ce que le concerné confirma d'un petit "en effet" neutre et froid. Rencontrer des mégalomanes, il commençait à en avoir assez. N'ayant rien de mieux à faire quoique dubitatif, le blond suivi la Nemesis de Karm, jusqu'à un certain point, optant plutôt pour une ruelle calme, quitte à se mettre lui, en danger. Réflexe de Jedi bien qu'il continue de penser que le Sith ne tuerait personne aujourd'hui. Curieux et dérangeant constat : sur ce point, Luke faisait confiance à l'ancien Chevalier.

- Je vais très bien. Merci

Hormis une raideur soudaine dans sa marche -et encore difficile de dire si ce n'était pas son handicap s'exprimant dans ces lieux inconnus qui en était la cause- le Chevalier n'en laissait rien paraître, mais il eut bien évidemment un haut-le-coeur. Comment cet homme était-il au courant de tant de choses ? Des déplacements de Karm, ou encore de sa nomination, avant lui d'ailleurs. Plus par automatisme que par conviction, le Hapien se défendit.

- Maître Torr vous voulez dire ? Apparemment non, puisque je suis là, en votre charmante compagnie, assez surprenante je dois l'avouer.

Question indirecte : pourquoi est-ce que le si honorable mandaté de mission Hapienne lui parlait. À lui, son ancien prisonnier, et compagnon, certes, de son obsession ? Le jeune homme avait cherché à percer à jour Absolom, surtout pendant que Karm était encore blessé, se remettant des blessures infligées par Tavaï. Rien de bien concluant si ce n'était un profilage approximatif désignant un homme narcissique, obéissant à ses propres valeurs, seul fait que le rendait plus ou moins fiable. La parole, le raffinement étaient important pour Thorn, ce qui en faisait un genre de caricature de Chevalier Servant des anciens temps. Luke avait repris ses recherches sans trop y croire après que Karm et lui aient ramené une Tavaï affaiblie, mourante même sur Coruscant. La renarde avait l'air si effrayée que s'en était bouleversant. Qu'une maîtresse d'armes, dure à la tâche pour ne pas dire versant dans la psychopathie peignait un portrait autrement différent que celui qu'offrait l'homme aujourd'hui. Se sachant incapable de rivaliser en jeux de mots, collecte d'informations directes avec Absolom, sûrement rôdée aux méthodes d'interrogatoires classiques, le Jedi opta pour la voie directe. Sa voix se fit moins sèche dans un effort de répondre aux critères de politesse du Sith. Tant que ce dernier était présent, autant jouer un minimum le jeu et titiller son égo. Luke n'était pas certain de réussir, mais qui sait si ça valait la peine d'essayer.

- Vu que vous semblez au courant de tout, je pense que vous connaissez l'état actuel de Maître Tavaï, elle est mourante et c'est étrangement vous qu'elle désigne. folies d'une malade sur le déclin ?

Tous deux savaient la vérité et Luke ne pensait pas parvenir à cacher que lui-même ne croyait pas en son hypothèse poliment émise. Absolom était un maître de l'esprit, autrement plus fin que le jeune Jedi pourtant lui aussi assez psychologue. Il manquait d'entraînement, d'expérience aussi sans doute, sans oublier le côté lumineux qui l'astreignait à des limites.

- Pardonnez que je n'ai pas vraiment confiance de ce fait. Nous ne nous étions pas réellement quitté en de bons termes, si je me rappelle bien. Mais apprenons à nous connaître dans ces conditions plus idéales si vous le voulez. Pourquoi vous intéressez-vous tant à la carrière de mon collègue ?

Osa l'interroger le Hapien, mentionnant certes que tous deux l'avaient remarqué, mais ce n'était pas comme si Thorn essayait d'être discret en abordant Karm le jour de sa nomination. Ainsi, sa dangereuse fixette n'était un secret pour aucun des Jedis, le pourquoi, lui par contre, demeurait un mystère. Le jeune homme pensait que le Maître était simplement inaccessible donc intéressant, un genre de caprice, un but inatteignable pour cet homme habitué à ce qu'on lui cède tout. De plus, il fallait l'admettre, Karm avait des capacités extraordinaires, il était voué à une grande destinée, logique dans l'illogisme de ce fou qu'il soit attiré par la lumière de l'explorateur.

Le blond occulta autant que possible son inquiétude. Bien sûr qu'il avait peur, dominé, écrasé par la présence impressionnante, sombre mais aussi charismatique de Noctis. Ce double jeu laissant voir deux hommes de la même race discutant gentiment dans une ruelle adjacente au Sénat cachait merveilleusement leur véritable identité : un Sith et un Jedi qui s'affrontait à renforts de mots polis, sous couvert d'une discussion banale. Le Hapien espérait que sa méthode, plus directe sans être trop agressive fonctionnerait. Un brin d'impatience l'avait aidé à se décider pour mener le dialogue vers le bât qui blessait, il faut dire que ces situations aux semblants statistiquement quasi impossibles à rencontrer venaient de lui tomber dessus deux fois de suite, il en avait assez. L'âge aussi lui avait imperceptiblement fait gagner en assurance, le tout surmonté d'un agacement à l'encontre de ceux qui se mêlaient de leur vie, mettant celle de Karm en charpie. Non vraiment, ça en deviendrait presque ennuyeux.

Étonné par sa propre hardiesse, encore jeune tout de même et surtout moins doté que Noctis, le jeune homme espérait ne pas avoir choisi la mauvaise voie en jouant à moitié, seulement, le jeu que l'ancien Jedi voulait leur imposer. Il n'était pas de taille face à ce psychopathe, qu'est-ce qui lui avait pris ? Un certain chaos régnait en son intérieur, et Luke bataillait pour ne rien laisser paraître en-dehors. Est-ce que la vie de son ami pâtirait de cette rencontre ? En cet instant où il savait que les piétons n'avaient plus rien à craindre, Luke n'avait peur que pour Karm, mais il s'efforçait de se contrôler : la peur menait au côté obscur, il ne laisserait pas Noctis envahir son esprit, le faire flancher. Pour lui, la lutte était officiellement lancée à partir de l'instant où cet homme l'avait abordé.
Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Les alentours du Sénat étaient dégagés car, dès que l’on s’éloignait des grandes avenues qui menaient aux esplanades desservies presque inlassablement par des speeders venus apportés leur lot d’assistants parlementaires, de lobbyistes, de diplomates ou de politiciens, les ruelles de service, elles, n’étaient guère peuplées qu’aux heures de livraison, quasi à l’insu de tous, car les mille petites mains nécessaires au fonctionnement de cette immense machine n’intéressaient guère ceux qui en profitaient.

Maître Tavaï est mourante ?

Absalom n’avait pas l’air choqué le moins du monde par l’approche directe choisie par le Chevalier, bien au contraire, mais en revanche il laissait transparaître une surprise qu’on aurait pu croire feinte, mais qui était sincère.

Voilà qui est inattendu, concéda-t-il. Mais pour tout vous avouer, toute cette histoire a quelque chose de singulier. Je l’ai bien croisée, il y a quelques mois de cela, sur une planète de l’Espace Hutt où je menais des recherches sur une tradition très minoritaire de la Force, vous savez, le genre de religions locales qui ont eu des intuitions précieuses, mais parcellaires. Des gens préoccupés essentiellement par le maniement des objets par la pensée, un domaine auquel je m’intéresse moi-même de façon particulière.

Dire que bien des Sentinelles avaient dû se battre pour déduire ce genre d’informations en espionnant la vie de cet ancien Chevalier passé à l’ennemi, et qu’il les livrait là, volontiers, sans effort, comme si c’était tout naturel !

Bref, j’épluchais des archives de bibliothèque universitaire. Rien de bien palpitant, mais vous savez ce que c’est : la recherche doit être méthodique, ce qui veut dire qu’elle est parfois fastidieuse. Un jour, dans la rue, je sens une présence menaçante. Et dès que je me suis retrouvé dans un endroit un peu isolé, Maître Tavaï s’est attaquée à moi. J’imagine par… Principe ? Elle m’a semblé…

L’homme chercha un instant le mot approprié.

Troublée. En quelque sorte. Enfin, je n’ai pas vraiment eu le temps de sonder les méandres de sa psychologie. Je me suis défendu, principalement en m’attaquant à son essence vitale, il est vrai, mais d’une façon dont les conséquences dussent être aussi drastiques que celles que vous décrivez. Elle aurait dû… Être affaiblie pour plusieurs jours. Tout au plus.

Il n’y avait pas de compassion dans sa voix, mais de la curiosité, pour cet intéressant problème qu’il s’agissait pour lui de disséquer et de mieux comprendre.

Elle devait être déjà affectée par quelque chose quand nous nous sommes rencontrés. L’âge n’expliquerait pas tout, il ne me semble pas qu’elle soit si vieille que cela pour une Amarane. Peut-être l’effondrement psychologique de voir sa quête se déliter un peu plus chaque jour. Sur le moment, j’ai supposé qu’elle me cherchait de façon particulière, quoique je serais bien incapable de dire pourquoi. Elle et moi n’avons jamais eu les mêmes centres d’intérêt.

À part Karm.
Bien entendu.

Et c’était d’ailleurs le sujet de la seconde question de Luke.

Hmm…

Ils étaient arrivés au bout de la ruelle et Absalom se retourna pour rebrousser chemin. Il y avait des endroits plus agréables pour faire les cent pas, mais c’était là que le Jedi avait choisi de les amener et il n’avait pas l’intention de prendre des initiatives que Luke aurait pu interpréter comme un signe d’hostilité.

Il y a plusieurs raisons et je ne suis pas disposé à toutes les discuter. D’une part, votre compagnon…

Il insistait pour utiliser ce terme, qui lui paraissait plus noble que celui de collègue, parce qu’il touchait à l’essence la plus précieuse de leur relation.

… est un spécimen unique et vous n’êtes sans doute pas sans vous rendre compte que l’intérêt que j’ai pour lui à ce titre est partagé par d’autres savants. Les Ark-Ni sont une ethnie rarissime au sein de la Galaxie et les Ark-Ni formés au maniement de la Force, encore plus. Je ne suis pas de ceux qui croient que tout se règle par la biologie, et que puisqu’on les classe parmi les humains, alors les effets de la Force sur eux et par eux sont les mains que sur les humains. Il y a des facteurs culturels qui rentrent en jeu. Imaginez être le seul de votre ethnie, de votre culture, le seul de votre origine à avoir jamais intégré l’Ordre Jedi. En tout cas, si l’on en croit les Archives.

À mesure que le Hapien parlait, il s’animait d’un enthousiasme de savant.

Imaginez apprendre à manier la Force exactement au même moment où vous apprenez le Basic, où vous apprenez ce qu’est une planète, mais surtout : imaginez qu’il a appris pleinement ce qu’était la Force au moment où il a découvert ce qu’était un arbre. Bien sûr, vous me direz, il y a des espèces naturellement sensibles à la Force qui ont cette expérience-là de façon systématique. Les Miralukas, par exemple. Mais cette expérience est façonnée, habituée par la culture. Karm Torr est peut-être l’une des rares personnes au monde à s’être retrouvé isolé face à la découverte indissociable de la Force Vivante et de la nature. Très franchement, que Maître Tavaï ait pensé à le former avant tout comme un guerrier, voilà qui est désespérant. Cet homme-là est fait pour être un voyant, un empathe, un gardien des choses naturelles.

Mais l’Amarane avait tenu à lui mettre un sabre dans la main et à le modeler à sa façon, en profitant de la docilité nécessairement irréprochable d’un garçon qui n’avait rien d’autre à quoi se raccrocher que la Maître qui l’avait tiré de son monde pour le jeter dans le tumulte de la Galaxie.

Ensuite, ses conceptions de l’Ordre résonnent avec mon histoire personnelle. Vous lirez sans doute dans les rapports des Sentinelles me concernant que j’ai quitté l’Ordre parce que je sombrais petit à petit dans le Côté Obscur et que je me sentais freiné par le carcan moral de l’institution. C’est sans doute en partie vrai, mais ce qui m’a surtout pesé, et la source de mon ressentiment pour l’Ordre, c’est son obstination à nous séparer de nos familles et à nous empêcher d’aimer. Je suis prêt à sacrifier beaucoup de choses à la poursuite de la Force et au service de l’institution qui me permettrait de progresser en la matière, mais certainement pas la compagnie des hommes que j’aime, ni celle de mes parents. Maître Torr a une vision beaucoup plus… Sensée. Et sensible.

L’ancien Sith jeta un regard en coin à son interlocuteur.

Parfois, vous savez, nos sympathies et nos antipathies sont plus complexes que le seul affrontement du mal absolu contre le bien absolu.
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
La confiance s'installerait presque, et avec elle, paradoxalement : la crainte. Parce que Noctis clamait des choses vraies. Il connaissait Karm, il avait raison. L'explorateur aurait été plus heureux sans connaître les champs de bataille, du moins pas ceux-ci. Ses vérités déroulées naturellement, débutant par le récit de Tavaï pour glisser jusqu'à son compagnon rendaient son discours solide, et le jeune Jedi avait beau y faire, il ne parvenait pas à si facilement croire en un simple tissu de mensonges. Que l'Amarane ait attaquée la première ? Le Hapien le pensait volontiers, et que Karm aurait été plus en accord avec lui en suivant cette voie : tout autant. Mais le plus dérangeant, c'était encore la description, presque tendre, admirative, de Thorn à propos de l'évolution de son aîné. Y avait-il seulement songé, lui ? Luke avait toujours su que son ami avait traversé de nombreuses épreuves, que s'intégrer était difficile mais que, vaillant, il s'y était essaye, même à contrecourants. Malgré ses origines, malgré Tavaï, son éducation déplorable, la maltraitance, malgré ses idées divergentes, l'Explorateur demeurait fidèle à son Ordre, à lui. Mais avait-il seulement été creuser jusqu'à cette image de la découverte simultanée entre le langage, la culture, la Force et la notion même de Vivant ? Comment ce Sith en était-il venu à cette conclusion bienveillante ? Avait-il passé de longues nuits à songer à Karm, tout jeune qui s'adaptait ? S'en serait presque touchant si ce n'était pas aussi dérangeant.

- Je vous crois. Pour Maître Tavaï.

Observa le jeune homme d'un ton neutre, résigné de beau joueur encore sur la défensive. Il avait noté, consciemment, le plus d'informations potentielles sur les recherches d'Absalom, sans avoir le coeur pour l'instant à les utiliser voire à se précipiter pour les révéler aux enquêteurs. Ceci dit, le blond n'allait pas non plus se laisser complètement attendrir : sous son visage charmant d'homme coopératif, sensible, presque lumineux, Noctis restait leur kidnappeur et... Le Boucher.

- Elle est en effet mourante. Soit elle était déjà malade, soit... Serait-il possible que, vous défendant, vous n'ayez pas contrôlé un pouvoir qui aurait grandi ? Croyez-vous qu'elle vous suivait ou que son attaque tenait du hasard, avec l'intention de détruire un être du camps ennemi sans discrimination ? Vous ne l'aviez pas senti vous suivre ?


C'était sans ironie que le jeune homme avait posé ces questions (dont certaines, effectivement, venait de son côté enquêteur) même si un frisson avait accompagné ses propos. Cette extraction d'essence vitale demeurait terrifiante, même pour quelqu'un comme lui, accoutumé à l'expression puissante de la Force. Il y avait quelque chose de malsain chez Absalom, de vraiment très malsain : comment avait-on ce réflexe de se défendre en volant la vie de quelqu'un ? Comment pouvait-on à la fois représenter la lumière et l'ombre ? Non, seulement la noirceur avait rectifié vivement le jeune Jedi. La lumière, il faisait semblant.

Quant à Karm...

- Comment savez-vous tout cela ? Je veux dire, il a bien fallu que vous le découvriez, l'existence d'un enfant Ark-Ni dans l'Ordre, je l'imagine, grâce aux archives lorsque vous étiez encore Jedi peut-être ? Mais son évolution, ce suivi, depuis quand... ?

Parce que les descriptions d'Absalom qui correspondaient parfaitement à son compagnon indiquaient une connaissance intime. Il avait bien fallu que l'obsession naisse puis grandisse. Où, quand ? Et surtout jusqu'à quand ? Noctis avait beau signifier être "innocent" et son discours aussi idyllique qu'un hippie de l'espace, il n'en avait pas moins provoqué cet enlèvement, jouant à il-ne-savait quel jeu avec Ekkt, devançant la mission pour les enlever. Quel serait la prochaine étape, surtout si Karm refusait d'entrer en contact avec lui ?

- J'entends bien vos … Ressemblances - ce mot, il l'avait arraché à sa gorge, avouons-le- ou plutôt votre identification, mais où est censé vous mener cette "sympathie" ? Parce que je ne pense pas qu'il y soit sensible, vous savez, et que votre attitude paraît tout sauf bien intentionnée contrairement à ce que vous assurez.

C'était en effet plutôt inquiétant de voir Noctis aligner les louanges sur son compagnon. Quand décrocherait-il ? Allait-il étudier le pauvre Ark-Ni qu'il le veuille ou non pendant sa vie entière ? Le jeune homme savait son ami très ouvert mais il ne le voyait pas se poser pour discuter quelques heures avec Absalom, à moins qu'il n'y soit contraint. Jusqu'où irait donc la curiosité et le travail de recherche du Hapien ?

Afin de ne pas juste "prendre", le Chevalier ne put que rendre un peu la pareille à Noctis en reconnaissant, presque rougissant (quelle honte!) certaines de ses affirmations, sans pouvoir s'empêcher, certes, de défendre un peu son institution.

- L'Ordre est désormais tolérant... Mais quoiqu'il en soit, si votre principal grief était la séparation des familles ainsi que le refus des relations amoureuses, vous n'aviez pas besoin de partir en sombrant. Je veux dire, vous l'avez signifié vous-même : vous êtes passé du côté obscur. Pourquoi ? Votre discours et votre aura sont dissonants, tout comme vos mots et vos actes.

Luke se donnait l'impression d'un interview avec le "grand méchant" de l'Histoire d'un mauvais holofilm, bien que certes, le personnage soit finement dessiné, avec une psychologie à la fois terrifiante et fascinante. Il s'en voulait de jouer le jeu, de poser des questions, de continuer à marcher dans cette ruelle au lieu de simplement partir. Il avait presque l'impression de trahir Karm, l'Ordre en discutant avec un Sith, pas un ancien, aujourd'hui en pleine rédemption, mais un vrai qui assumait des actes horribles comme le vol d'essence vitale. D'un autre côté, il récoltait des informations que personne ou presque jusque là n'aurait pu obtenir, comme ces études de peuples axés sur un aspect de la Force (ici la télékinésie). Mais quand basculerait-il ? Luke se doutait que cela fonctionnait en partie parce que Noctis le voulait bien. À la seconde où ce dernier déciderait de changer la donne, le plus jeune serait pris entre des phares si puissants qu'ils perceraient sa nuit éternelle pour le figer, telle une proie éblouie. Mais en même temps, il y avait cette fascination, une envie, déformation de profiler en herbe, de comprendre... C'était comme être un apprenti policier, balancé devant un des serial killers les plus intelligents, raffinés de son époque. Sauf que personne n'avait les preuves suffisantes pour l'enfermer, ce fameux psychopathe, uniquement des soupçons. Son intelligence fascinait, ses actes terrifiaient, la combinaison des deux rendrait presque fou.

- Quoiqu'il en soit, je suppose ... Merci ? De me répondre.

Vraiment, la situation était malaisante. Luke conservait son hostilité, il se méfiait toujours, mais difficile de conserver également une attitude pleinement fermée face à ce déploiement de coopération, jusque dans le choix de la ruelle. Évidemment, Noctis pouvait mentir à loisir sur ses informations, le Hapien le soupçonnait d'ailleurs de le diriger ailleurs concernant ses recherches, ou encore le fait qu'il ignore complètement que Tavaï allait l'attaquer (bien qu'il croit en cette attaque orchestrée par la fanatique), mais en effet, tout ne semblait pas être "le seul affrontement du mal contre le bien absolu."
Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Absalom secoua la tête, quand Luke suggéra que Tavaï avait été peut-être victime de l’excès d’un pouvoir devenu trop puissant.

Non, je ne pense pas, non. Je ne suis pas vraiment un impulsif, voyez-vous, sans doute vous avez lu cela dans les dossiers me concernant, ou alors les Sentinelles de l’Ordre sont tombées bien bas. Mes pouvoirs sont toujours méticuleusement contrôlés. En revanche, que je puisse ne pas avoir reconnu qu’elle était malade, ça, c’est entièrement crédible, et même, à ce que vous me dites, plus que probable.

En soi, rien de surprenant. Tavaï avait dû mener une existence rude, aux marges de la Galaxie, sans que jamais sa vie de Maître Jedi ne l’y ait vraiment préparé. Sans doute avait-elle longtemps campé avec les batailles, partagé les baraques frustes des soldats de la République, mais c’était autre chose que de se retrouver livrée à elle-même dans l’immensité chaotique des marges de la Galaxie.

J’ignore si elle me suivait, mais je dirais que c’est l’explication la plus logique. Elle s’inquiétait peut-être, comme vous, de mon intérêt pour son ancien Padawan. Ou bien elle voyait en moi l’opportunité d’une satisfaction immédiate, un Sith à tuer sans avoir à pénétrer dans les profondeurs de l’Empire, dans une période où, je crois comprendre, sa campagne personnelle ne portait guère ses fruits.

Noctis n’était pas très porté aux explications mystiques. Un autre que lui, Sith ou Jedi, aurait spontanément suggéré que la Force les avait réunis, dans un affrontement symbolique, eux qui étaient les facettes d’une même pièce : la guerrière qui se croyait du Côté Lumineux et s’abandonnait à une violence incontrôlée et le sorcier qui frôlait si souvent la Lumière et dont la patience était irréprochable.

Curieux, néanmoins, qu’elle m’ait sous-estimé de la sorte. Quand j’étais encore au sein de l’Ordre, elle passait pour une brillante tacticienne. Mais les réputations sont parfois construites sur des écrans de fumée et ses échecs de ces dernières années suggèrent peut-être que la sienne ne reposait pas sur grand-chose.

Il haussa les épaules. En l’espèce, Luke et lui manquaient d’éléments pour déterminer l’enchaînement de causes et de conséquences qui avait conduit Tavaï ce jour-là sur une planète reculée de l’Espace Hutt, et il lui paraissait par conséquent vain de spéculer inutilement.

Les autres questions du Chevalier attirèrent à ce dernier un regard qui paraissait sincèrement surpris.

Mais… enfin, je veux dire, ce que je sais de Maître Torr ne tient pas du mystère. J’étais encore membre de l’Ordre à l’époque où il y est entré lui-même, Padawan quand il était Initié, Chevalier quand il est devenu Padawan. Lui et moi avons vécu sur Ondéron ensemble, comme vous et moi d’ailleurs, quoique vous soyez encore un peu plus jeunes. Certes, nous ne nous fréquentions guère, à cause de la différence d’âge, mais enfin, le jeune Karm Torr ne passait pas précisément inaperçu.

Quelqu’un qui, à cinq ans, n’avait jamais mis les pieds sur une planète, jamais rencontré, à part Tavaï, quelqu’un d’une autre espèce, ou même tout simplement d’une autre ethnie : comment le jeune Absalom, porté déjà la méditation, n’aurait pas été fasciné par cette situation si singulière ?

Vous savez, j’ai très jeune décidé de me consacrer presque exclusivement à l’étude de la Force, et la Force se manifeste avant toute chose à travers ceux qui la manient. C’est donc tout naturellement que je m’intéresse, et de longue date, aux êtres qui, comme vous, comme lui, ont un rapport particulier avec elle. Le reste, sur la situation de Maître Torr, sur son rapport à la Force, son évolution, tout cela n’est que déductions. Ce sont des conséquences qui découlent de façon logique des causes premières.

Les dossiers que Luke avait pu lire à son propos faisaient état de ce tempérament logique, de cette faculté à l’analyse, que certains Maîtres, dès la jeunesse d’Absalom, jugeaient préoccupante, parce qu’ils lui trouvaient quelque chose de froid et d’inhumain.

Quant à ce que je pourrais espérer de ma curiosité…

Il haussa les épaules et dit d’un ton dégagé :

Vous ne pensez pas qu’il soit sensible à mon intérêt, et lui pense sans doute ne pas l’être, mais l’on est parfois les moins bons juges de soi-même. Loin de moi l’idée de créer une dissension entre vous, car il me semble que vous êtes parfaits l’un pour l’autre, et d’ailleurs j’espère de tout coeur que votre idylle se perpétue…

Rassurant.

… mais je crois qu’il éprouve pour moi, je ne veux dire personnellement bien sûr, mais pour ce que j’incarne et ce que je renferme, plus d’intérêt qu’il ne veut bien vous et se l’avouer. J’ai l’impression qu’il est homme à nouer des relations atypiques avec des personnes dont la moralité ne serait pas irréprochable.

C’était une allusion voilée à une certaine jeune mercenaire aux instincts pour le moins sanglants.

Quant à mon départ de l’Ordre… Oui, les questions familiales et amoureuses ont joué leur rôle, mais ce n’était pas la seule raison. Vous me considérez comme quelqu’un qui a sombré, je me vois comme un homme qui s’est libéré de ses chaînes. Vous considérez que le Côté Obscur comme une corruption, je le vois comme un sujet d’études aux richesses encore inexplorées. L’Ordre n’offre jamais aux siens la possibilité de parcourir qu’un périmètre très restreint du savoir, et de le faire selon des méthodes très partielles. L’Ordre Jedi, tel qu’il existe aujourd’hui, est une institution disciplinaire et para-carcérale, inféodée à la République, et destiner à réduire en esclavage volontaire celles et ceux dont les pouvoirs menaceraient sinon l’ordre politique et économique.

Presque aussitôt après, il précisa :

Ces propos vous choquent peut-être, mais je vous prie de croire que mon intention n’est pas de vous provoquer. J’expose simplement mon point de vue, dont j’imagine sans peine qu’il diverge profondément du vôtre. Mais selon moi, l’Ordre est une institution qui arrache les enfants à leurs familles, sous l’effet d’une loi, les forme sans contribution extérieure ou presque, dans une forme d’autarcie idéologique, puis les fait travailler jusqu’à leur mort, sans jamais les payer, sans leur permettre d’accroître leur fortune personnelle et donc leur indépendance, et exerçant un contrôle aussi systématique que possible sur leurs relations personnelles. Je ne crois pas que ce soit très exagéré de dire que nous avons affaire là la définition la plus simple de l’esclavage. Sans les coups de fouet laser et les indignités les plus manifestes, comme on en voit dans l’Espace Hutt et l’Empire. Mais de l’esclavage tout de même.
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
Luke haussa les épaules, vieux réflexe génétique ou de son passé pourtant lointain de voyant ? Aussi difficile à déterminer que l'origine de la faiblesse de l'Amarane. Portait-elle une maladie dans ses gênes depuis le début ou les expériences en avaient-ils déclenché une ? Songer à un trouble psychologique était toutefois un peu trop simple, et Luke ne voulait pas tomber dans le piège du fourre-tout cérébral. Il ignorait, ceci dit, ce qui aurait pu pousser la tacticienne à s'en prendre au Hapien, certes, vantard mais avec raison. Ce n'était pas comme si Absalom le Boucher était réputé comme étant du menu fretin, de plus ils devaient avoir à peu près le même âge. Les apprentis étaient nombreux mais connaissaient souvent de nom leurs pairs d'une génération égale, sans compter que si Noctis et elle avaient bien partagé une chose, c'était leur réputation. Chacun avait marqué les Chevaliers voire le Conseil de l'époque, ainsi l'Amarane aurait dû savoir à qui elle avait affaire. Serait-ce une montée de rage soudaine qui aurait menée l'ex Jedi à ignorer son instinct en se jetant stupidement entre les griffes de Noctis, ou ce dernier qui l'aurait manipulé en laissant croire à sa propre faiblesse ? Venant de l'individu tout était probable, c'était un manipulateur né et surtout un extraordinaire stratège. Ses capacités de déduction avaient, à l'époque, selon les rapports, impressionnés sans manquer d'effrayer les aînés.

- Et vous ne croyez pas qu'elle vous aurait attaqué à cause de Karm ? C'est quand même un gros point commun que vous partagez là.

S'avança le jeune homme, à la fois étourdi et indigné de partager cette discussion presque tranquille avec Absalom. C'était surréaliste : le Jedi, en tenue d'ailleurs et le faux civil mais réel politicien en train d'émettre des hypothèses concernant une "ennemie" commune. Luke frissonna de nouveau en imaginant qu'on aspirait son essence vitale. La punition lui semblait si radicale, l'une des pires corruptions qui soit : il fallait être réellement plongé dans les tréfonds de la noirceur pour se nourrir d'autrui tel un vampire.

- Pourquoi ce don ? Je veux dire, quand on se défend, la surprise mène généralement à utiliser la télékinésie, une vague de Force, mais l'aspiration d'essence vital. Il faut avoir pratiqué pour qu'elle soit aussi naturelle. Pourquoi avoir choisi de développer cette... Hum... Capacité ?

Luke ne savait pas s'il allait trop loin et risquait de déclencher l'impatience d'Absalom, mais difficile de s'en empêcher. Au-delà de son appréhension naturelle, le Chevalier était évidemment fasciné. Comme un psychiatre qui se retrouverait face à un malade très atteint mais lucide, apte à poser son propre diagnostic. Ou un policier qui discutait avec un psychopathe coopératif. Quant à un esprit en avance sur son temps, un de ces Jedis Gris dont il avait entendu parler et qui réfutaient leur appartenance à l'ombre comme à la lumière, Luke s'y refusait. Ce serait trop inquiétant d'imaginer qu'Absalom représente les prémisses d'une nouvelle ère : des genres d'ennemis beaucoup trop subtils, aptes aux mêmes autocontrôles que les Jedis sans en posséder les limites morales, comme Unus.

L'homme jouait si bien -ou pas?- qu'il était difficile de savoir si ses mots et sa surprise étaient réels. Pourtant, ça n'était pas normal. Qu'il s'intéresse à un être aussi particulier que Karm, d'accord, beaucoup de maîtres l'avaient certainement faits : Des biologistes, des explorateurs et des penseurs, sans aucun doute. Mais Absalom allait au-delà. Ce qui dérangeait Luke, c'était sa connaissance de ce qui aurait été le mieux pour son ami, son caractère, ses aspirations et finalement, sa manière de toujours s'immiscer dans leur relation. D'ailleurs, il en parlait encore, comme si le Hapien pouvait craindre que son aîné se sente attiré par Noctis. Ridicule, le jeune homme avait entièrement confiance en Karm qui ne fricoterait jamais...

Oups Maxence...

Enfin, presque jamais avec des gens sans morale. Mais encore une fois, comment était-il au courant ? Luke avait de suite capté la référence. Comment faire autrement alors que justement, il avait eu des genres de "démêlés" voilés avec la femme ? Jamais le Hapien ne dicterait à son compagnon qui il devait voir ou pas, mais... Maxence, c'est vrai, qu'elle était loin d'être irréprochable, et encore le blond était persuadé d'oublier beaucoup d'informations.

- Ce genre d'informations, par exemple, que vous avez obtenu on ne sait comment... Cela dépasse le simple intérêt scientifique derrière lequel vous vous protégez. Quant à un intérêt pour vous ? Il est comme le mien, je suppose. Professionnel. C'est vrai que vous êtes un cas à part... Un sujet d'études en soi, n'en soyez pas offensé.

Est-ce que Noctis espérait vraiment séduire le maître ? Par caprice ou sur plus long terme ? Il insistait beaucoup sur cet aspect. L'idée rendit Luke très mal à l'aise. Ce genre de vaudeville n'était pas fait pour lui, de base normalement condamné à n'aimer personne. On le laissait avoir une relation saine, durable, alors qu'on ne vienne pas en plus lui ajouter des épreuves que moults civils, certes, traversaient au quotidien.

- C'est vous qui avez dit "j'ai sombré". - Le jeune homme haussa les épaules à nouveau, son ton était plutôt détaché, et s'il prit aussi un peu personnellement les remarques d'Absalom sur l'Ordre (ça n'était jamais agréable de se faire traiter d'ancien esclave, et aujourd'hui d'esclavagiste.), il ne se sentait pas indigné. À vrai dire, les insinuations sur son couple le mettaient encore plus mal à l'aise. Était-ce parce qu'au fond, le Hapien plus âgé avait une part de raison ? Évidemment pas. C'était juste très gênant et malsain. Rien que ça.- Concernant l'esclavage, dont vous parlez. Chacun sa vision des choses, mais les Jedis sont volontaires comme vous le dites, mais n'est-ce pas un oxymore d'esclavage, je le suis pleinement, et nous aidons les jeunes qui ne veulent plus appartenir à l'Ordre à se réintégrer. De plus, contrairement aux stéréotypes archaïques, les familles peuvent ou non céder leurs enfants, lorsqu'ils sont en âge de comprendre, on leur demande aussi leur avis, mais je suppose que le débat, ici, est stérile. Je respecte votre vision des choses.

Et c'était vrai. Peut-être une des seules formes d'arrogance que possédait Luke, ou de pleine confiance, ou de fragilité (?). Il n'était pas prêt de se sentir touché par les remises en questions brutales d'un Sith. Karm parvenait avec douceur et philosophie à lui montrer que l'Ordre n'avait pas toujours raison, mais le Hapien savait ce dernier fidèle à son institution. Il voulait le meilleur pour elle, pas la détruire. Suivant les principes enseignés, bien que ce soit douloureux, il renonçait à la si facile assurance pour se demander des choses, réfléchir, voir s'opposer. Mais pas Absalom Thorn, lui avait le droit de critiquer, sans obtenir, toutefois, la considération du jeune Jedi.

- Une dernière question. Vous m'aviez reconnu semble-t-il... Pourquoi venir me parler ?

C'est vrai, ce n'était pas comme s'ils étaient amis de longue date. Luke ne faisait pas non plus partie de l'obsession de Noctis -et tant mieux !- Alors pourquoi prendre ce risque ? Au mieux, dans sa folie, un psychopathe n'aurait-il pas justement cherché à l'évinscer ? Certes, Absalom n'était pas n'importe lequel d'entre eux. Le Hapien s'en méfiait d'autant plus, car il savait l'homme redoutable, beaucoup plus intelligent que lui, puissant aussi, car la présence brute dans la Force ne comptait pas, face à l'expérience, ou si peu.

Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Si sa motivation avait été mon intérêt pour Karm, je doute qu’elle m’aurait attaqué. Elle doit se rendre compte qu’un combat entre nous deux ne saurait se solder que par la fuite ou la mort. Or, mes préoccupations à l’égard de son ancien apprenti doivent lui apparaître trop mystérieuses pour qu’elle ne veuille pas me capturer pour m’interroger, si c’est réellement ce qui la taraude. Peut-être n’était-elle pas en état de faire ce genre de calcul rationnel, mais la Tavaï que je connais est une tacticienne aguerrie que je vois mal commettre une erreur de ce genre.

Il devait bien avouer cela dit n’avoir que des conjectures sur les motivations de l’Amarane, et aucune qui lui apparaissait satisfaisante. D’une certaine façon, cette rencontre avait nourri ses craintes : ce n’était pas qu’il avait eu l’impression de frôler la mort, mais il avait contemplé la déchéance d’une Jedi puissante et celle-ci avait été un rappel que l’on pouvait se trouver un jour au sommet de son art, et quelques années plus tard plus incapable qu’un Chevalier fraîchement adoubé.

Vous me demandez pourquoi je m’intéresse à la vie ? Curieuse question, en particulier de votre part. Vous qui êtes, à ce qu’on raconte, un guérisseur talentueux, vous devez bien avoir conscience que la manipulation de la vie est la partie la plus fascinante de la Force. La plus essentielle. C’est la source de toute chose. Vous avez choisi de manipuler la vie pour priver les êtres de leur mort, j’ai choisi un autre chemin, mais ce que vous faites, pour beaucoup de monde, est tout aussi contre-nature que ce que je fais. Nous nous élevons tous les deux au-dessus de la condition mortelle.

La rumeur voulait que dans un rituel, il avait réussi, épauler par des dizaines d’autres sorciers sith, à drainer tout un continent de son énergie vitale. Et Luke, même sans le voir, pouvait sentir le paradoxe dans ce corps tout proche du sien : la vitalité qui irradiait de son interlocuteur n’était pas celle d’un homme qui approchait de la quarantaine. Il était intense et pulsatile, comme d’un jeune homme encore dans la force de l’âge.

Vous et moi, nous avons beaucoup en commun, vous savez. Notre espèce. Notre formation au sein de l’Ordre. Notre pratique de la diplomatie. Notre affinité peu commune avec la Force. Notre intérêt pour la vie. Notre art de la parole. Beaucoup des questions que vous me posez sur mon compte, vous pourriez en chercher les réponses en vous-même. Après tout, vous êtes un sujet d’étude, si je puis reprendre vos termes, tout aussi exceptionnel que moi.

Le petit prodige de Saï Don, le Padawan modèle et censément docile qui partait vagabonder dans la Bordure Extérieure avec un explorateur frondeur jusqu’à finir dans ses bras, le garçon calme qui tombait toujours dans des aventures romanesques. Absalom ne croyait pas au destin, mais il croyait aux circonstances extraordinaires, et celles-ci se concentraient autour de Luke Kayan.

Quand la discussion dériva sur le sujet de l’Ordre, le Hapien eut un sourire mélancolique.

Vous traitez de la chose comme si elle n’était qu’une affaire de choix individuels, mais ce n’est pas parce que l’on a la possibilité de choisir qu’on en a la liberté. Si vous êtes conditionné toute votre enfance à être quelque chose, comment décideriez-vous d’être autre chose ? Si l’on vous dit que le monde extérieur est dangereux, immoral, traversé par la duplicité, que vos dons s’y développeraient de manière violente, comment y pénétreriez-vous de votre propre chef ? Et si vous êtes le parent d’un enfant à qui l’on tient un discours préoccupant sur son avenir, en agitant le spectre de dangers incompréhensibles, comment choisiriez-vous autrement ? Il y a des portes qui ne sont ouvertes qu’en trompe-l’oeil.

Lui-même se considérait comme un miraculé de l’Ordre Jedi, qui l’aurait condamné selon lui à une vie de solitude et de médiocrité.

Mais je ne vous convaincrai pas, je le sais bien. Je ne peux que vous conseiller de consulter les statistiques. Le pourcentage de personnes qui refusent librement de donner leur enfant à l’Ordre. Le pourcentage de personnes formées par l’Ordre qui le quittent de leur plein gré. Et de comparer ces chiffres avec d’autres organisations. Je crois que vous vous rendrez compte sans peine que les chances d’y échapper sont mathématiquement infinitésimales et que la liberté que vous décrivez est plus théorique qu’effective. Non que les choses soient plus riantes du côté du Clergé Sith, entendons-nous bien, mais ma foi, je n’appartiens ni à l’un, ni à l’autre.

Testé, désapprouvé.

Non que tout soit à rejeter au sein de l’Ordre, bien entendu. Moi-même, je suis devenu ce que je suis en grande partie grâce aux enseignements que j’y ai réussi, et j’éprouve de la reconnaissance envers mes Maîtres pour cela. Sans elles et eux, je n’aurais jamais compris la Force comme je le fais aujourd’hui. Il me semble simplement que cet utile enseignement pourrait être dispensé dans d’autres structures sociales.

Il venait de dire sans ambages qu’il devait sa puissance au sein du Côté Obscur à l’Ordre Jedi, et c’était une déclaration à la fois sincère et insidieuse. Aux Temples de sa jeunesse, il devait son sens de la discipline, son esprit méthodique, sa croyance profonde dans la vertu du calme et du détachement dans l’exploration de la Force. Il se reconnaissait dans ce terme de Jedi Noir bien plus que dans celui de Sith, car au fond, ce qu’il avait eu dans l’Empire lui était demeuré étranger et exotique.

Et pourquoi ne viendrais-je pas vous parler ? Je ne doute pas que vous ayez senti ma présence. Devais-je vous laisser errer dans les couloirs du Sénat, à vous demander quelle sombre menace planait sur la coupole galactique ? C’eût été cruel de ma part : j’ai préféré venir vous rassurer, et puis votre conversation est toujours agréable, quoique vous vous méfiez de moi. Vous êtes l’un des Jedis les plus réceptifs aux personnes telles que moi que j’aie connus depuis longtemps.

Était-ce de la provocation ?

Et vous-même, pourquoi me parlez-vous ? Pour en apprendre plus et consigner tout cela dans un rapport ? Quelle utilité ? Tout le monde sait où je me trouve. Sur Hapès. Je ne doute pas que les Sentinelles aient mon adresse, très précisément. Qu’elles savent où je réside, en ce moment, sur Coruscant. Quelles informations peuvent-elles bien encore leur manquer ? N’est-ce pas plutôt une curiosité personnelle que vous êtes en train de satisfaire ? Et avec raison. On devrait toujours poursuivre sa curiosité.

C’était ce que disait le proverbe, non ? La curiosité est une belle vertu !

Vous devriez me rendre visite sur Hapès. C’est, après tout, votre monde à vous aussi. Vous pourriez me poser librement toutes les questions que vous souhaiteriez. Vous pourrez partir quand vous le souhaitez. Libre de vos mouvements. Une opportunité unique pour un enquêteur tel que vous. Approcher le monstre dans sa tanière, ça ne se refuse pas, n’est-ce pas ?
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
[HJ : désolée je trouve ça moyen. J'ai dû écrire en fragmenté Sad J'espère ne pas avoir gâché ou oublié trop de choses ! Et puis mes répliques sont moyennes. Difficile de faire face à Noctis !]

Luke assistait au déploiement de tout le charisme, l'intelligence d'Absalom, capable de transformer des concepts, jugés inacceptables par la société comme normaux. Pour se faire ? Une logique implacable qui remettait à égalité, un procédé, vu au contraire, comme merveilleux. Force était de constater que les guérisseurs trompaient eux aussi la nature en allongeant des vie. Le jeune homme voulut répondre, sur le coup de l'émotion, un simple, misérable "ce n'est pas pareil", mais il se retint. Face à cet interlocuteur talentueux, beaucoup trop éloquent, ce serait encore plus ridicule que ce que l'on pourrait penser.

- Certes, mais il faut aussi prendre en compte, des valeurs sociétales installées depuis des générations, sur la majorité des mondes. Les populations veulent être sauvées, pas mourir. Je n'ai jamais vu un patient, se débattre encore, pour ne pas être soigné. Évidemment, je n'en viens pas aux cas beaucoup trop particuliers de ceux qui souffrent d'une maladie incurable. C'est un thème trop lourd, trop délicat pour commettre le crime de les intégrer à de simples exemples. Du reste, en toute honnêteté, je n'ai pas d'avis arrêté sur ce sujet, n'y ayant pas assez bien réfléchi et manquant, je présume d'expérience. Comment en êtes-vous venu à vous dire que retirer l'essence vitale était légitime ? Que votre vie valait plus ? Ce n'est pas une attaque, sinon une question. Ça ne vous touche vraiment pas ? Je veux dire, lorsque l'essence vitale de quelqu'un s'arrache pour venir en vous. Cette souffrance...

Le blond se faisait horreur. Pourquoi se justifiait-il face au Boucher ? Ce qu'il accomplissait était bien. Il générait le bonheur, soulageait des familles. C'était le ciment de principes qui forgeaient l'être pensant comme la compassion, l'amour, la solidarité. La destruction accélérée pour obtenir cette indécente jeunesse, un but égoïste donc, était bien plus anti-naturel, s'il fallait quantifier ça. À peu près persuadé qu'Absalom lui rétorquerait quelque chose comme "la sélection naturelle veut que les meilleurs survivent, regardez les animaux" il n'ajouta rien de plus, mal à l'aise. Noctis avait le chic pour remettre en cause ce qui était pourtant déjà acquis. Heureusement, le Hapien était solidement ancré dans ses croyances. Karm appréciait ces actes, pareillement pour l'Ordre et les populations. Si cela ne faisait pas forcément de lui quelqu'un de bien, il pouvait au moins prétendre l'être. Mais d'ailleurs, pourquoi demandait-il des "détails" au Boucher ? Il n'avait pourtant pas envie.

- Mon appartenance à cette espèce n'a pas grand sens pour moi. Sans offense. Je ne me sens pas attaché à une patrie que je n'ai pas connu.

Ou plutôt qu'il avait trop bien connu d'ailleurs. S'il avait été ironiquement, l'un des héritiers mâles les plus attendus, les plus aimés de sa génération parce que Maria ne pouvait prétendre à une autre grossesse, les choses avaient vite dérapé. Plus subtil que le sexisme naturel, implacable appliqué sur Hapès, Luke avait été maltraité pour décevoir une folle mégalomane. Laissant sa vue là-bas, le jeune homme avait décidé de ne jamais dédier une seconde de sa vie à cette planète. Au fond, sans doute aurait-il méprisé sa race s'il n'avait pas reçu d'éducation Jedi. Sa formation avait eut le mérite de simplement anesthésier ses éventuels griefs. Aujourd'hui, sa génitrice était sortie de prison, il avait, par le plus purs des hasards, su qu'elle était en vie mais qu'importe. Son père aurait apparemment, de menus ennuis avec Maria qui réclamait encore de l'argent suite au divorce, au bord de la déchéance. Elle essayait paraissait-il, de réclamer les années de pension perdues lorsque la maltraitance sur Luke avait été avérée. C'était une pauvre âme, méchante, incapable de rédemption. Autant dire que le Hapien n'avait pas de temps à perdre avec elle, ou encore ce monde flétri, artificiel qui représentait tout ce en quoi il ne croirait jamais : le narcissisme, l'élitisme frelaté et le sexisme, quelque soit sa forme. Son second séjour là-bas aurait même pu le condamner à haïr Hapès s'il n'avait, encore une fois, pas été Jedi. Cette gamine déformée, rat de laboratoire, au nom de la beauté qui s'était effondrée dans ses bras, rendant son dernier soupir...

Luke était encore jeune, il avait naturellement un peu peur de vieillir, de s'affaiblir davantage, mais il s'était fait la promesse de l'accepter. Noctis, lui, resplendissait encore comme un jeun, bien que tôt ou tard, son âge le rattraperait... Ou pas, d'ailleurs, Luke n'avait jamais essayé d'en savoir plus sur les procédés de sorcellerie Sith. Le Conseil interdisait aux Padawans d'aller voir certaines archives pour de bonnes raisons, beaucoup avaient sombré à cause d'elles. Quelques ouvrages étaient si dangereux, d'ailleurs, que même de simples Chevaliers ne pouvaient y avoir accès. Quand on voyait Thorn, c'était compréhensible. Il attirait indubitablement, fascinait même les plus réfractaires comme Luke, si incorruptible soit-il.

- Le nombre d'êtres pensants peuplant ces Mondes augmentent les chances de profils semblables, même au sein des Sensibles, quoique moins nombreux, surtout lorsqu'on en cherche. S'il est vrai que certains points nous réunissent, beaucoup nous désunissent au contraire.

À commencer par l'espèce d'allergie étrange que Luke subissait à la moindre intrusion du côté obscur. Il était peut-être plus résistant face à une attaque pure de la Force corrompu mais surtout beaucoup plus sensible qu'un Jedi lambda à ses émanations. Une simple présence noire le rendait malade, ou sa propre colère d'ailleurs. On suggérait souvent, lui le premier, que c'était ce qui lui avait permis de rester lumineux malgré les mois sur Korriban. Là où un être normal aurait adopté l'obscurité, lui serait mort, rapidement consumé par une Force sombre beaucoup trop puissante pour le frêle socle qu'était son corps.

- Je ne suis pas assez puéril pour exagérer toutes mes différences avec vous, afin de me protéger de la manière la plus inefficace, aveugle qui soit... Non, mais les faits sont que je ne suis qu'un Chevalier Jedi comme tout autre, car j'ai décidé d'être ainsi. Le Taux de Midichloriens n'est pas l'assurance d'un rang ou d'un rôle, c'est ce qu'on en fait. Vous avez toujours aspiré à être au-delà des autres, n'est-ce pas ? Tout dans votre parcours indique la recherche de l'exception. En soi, je ne suis pas contre, bien que je préfère essayer d'être perfectionniste dans l'ombre.

Le Sith qui aimait la lumière et le Jedi qui recherchait l'ombre, c'était plutôt original, mais Luke avait toujours essayé de rester simple. Il était persuadé que c'était ce chemin, celui de la simplicité qui menait au bonheur. S'il essayait de toujours donner le meilleur de soi, c'était pour autrui, pas pour briller. Karm aussi avait un peu cette façon de faire, mais il était nettement plus -le pauvre- exposé à la lueur de ses exploits. C'était malgré lui, une véritable figure d'autorité. Subjectif Luke ? Peut-être mais il fallait reconnaître qu'obtenir un statut juste parce qu'il avait été le Padawan de... forçait à la modestie. S'il ne voulait aucun rang spécial, le blond voulait encore moins de celui-ci. Saï Don avait construit sa réputation, un peu malgré lui aussi d'ailleurs. La tranquillité, la simplicité, les bonnes statistiques de missions réussies sans vraiment sortir de la norme rassurait le jeune homme. Il aimait à croire que son chemin était plutôt classique, et que seuls les aléas l'avaient rendus un peu plus tumultueux que d'autres.

- C'est tentant, mais je suis désolé, je ne retournerai pas sur Hapès, outre le fait que j'y suis interdit de séjour. Pourquoi décider de m'emmener là-bas ? Vous parlez de discussion, d'envie de venir me parler, de me rassurer sur vos intentions, je vous en suis gré. Je pense que c'est suffisamment réussi pour que j'accède à répondre à certaines politesses comme prendre un café quelque part, éventuellement... Mais je n'irai pas sur votre terrain. Encore moins celui-ci. Que trouvez-vous à Hapès ? Cette planète n'est pas vraiment... Douce avec les hommes, d'autant moins, je suppose, avec ceux qui... Vous voyez, ne servent pas de reproducteurs pour ces dames. Vous qui arborez ce type d'injustice, qui vous empêcher d'aimer des hommes, comme vous le disiez, qu'avez-vous donc là-bas qui vous attire ?

Difficile de s'en empêcher, Luke avait quand même laissé voir son malaise à l'idée de retourner sur sa planète d'origine, celle qui avait fait souffrir son père, lui indirectement ainsi que des milliers d'hommes, voire des enfants car on tuait, disait-on, ceux qui n'étaient pas assez beaux. Le jeune homme frissonna légèrement, il ne parvenait toujours pas à croire que cette discussion avait vraiment lieu. Une partie de lui espérait qu'elle se termine, mais l'autre que Noctis accède à rester ici et continue.

- Je... Ne sais pas

c'était une très mauvaise chose que d'avouer son hésitation à un Sith mais sur le coup, le Hapien ne se voyait pas être malhonnête. La question précédente de Noctis l'avait désarçonné, plus que le reste en tout cas.

- Je ne sais pas pourquoi est-ce que je vous parle… Sans doute dans l'espoir de comprendre, pourquoi est-ce que vous… Poursuivez Karm ? Et indirectement nous. Peut-être que cela m'inquiète de ne pas saisir... ?

Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
C’est là l’une de nos différences les plus fondamentales, j’imagine : je pense en effet que la vie des Sensitifs a plus de valeur que celle des autres. Ce n’est pas que je nie aux gens communs le droit de vivre, ni que je juge que leur vie soit sans valeur. Simplement, la Force est le mystère de toute chose, elle est la clé à la fois de chaque existence particulière et de notre galaxie elle-même, et la connaître, la connaître absolument, dans ses moindres détails, voilà ce que je juge être notre devoir le plus impérieux. Nous avons encore tant à faire !


Nous, les Siths, les Jedis. Noctis trouvait des défauts à chacun des deux Ordres, ou plutôt le même défaut, celui du dogmatisme, mais il était bien placé pour reconnaître leurs contributions respectives à ce qu’il considérait être une grande aventure commune, une marche côte à côte, et parfois coude à coude, vers le savoir ultime.


Des dizaines de milliers d’années, sans doute plus, que des gens comme nous étudient la Force, et que savons-nous ? Si peu de choses, finalement. Nous soignons quelques blessures. Nous réparons quelques maisons. Mais si nous connaissions la Force pour ce qu’elle est vraiment, si nous la comprenions dans tous ses mécanismes, alors un jour s’aboliraient toutes les souffrances, toutes les injustices et toutes les médiocrités. C’est cet idéal que nous devons poursuivre. Or la science ne peut pas être contrainte par la morale d’une époque, et sacrifier pour des considérations passagères, et des existences éphémères, la possibilité de ce bonheur futur. Il faut regarder au-delà des générations que nous côtoyons et élever nos pensées jusqu’à l’idéal.


Qu’était-ce qu’une existence d’homme au regard de la marche de l’univers ? Ces gens qu’il avait tués, que pesaient-ils, même par dizaines, même par centaines, même par centaines de milliers, à côté de ce qu’il avait encore à accomplir et des secrets qu’il avait déjà découverts ?


Ces recherches, vous préféreriez peut-être que tous puissent les mener, mais la vérité, c’est que nous avons un don dont les autres sont privés, et que ce don nous oblige. Les savoirs que nous tirerons des secrets de la Force, nul autre que les gens comme nous ne peut les formuler. Je ne crois pas que nous soyons meilleurs ou supérieurs aux autres, mais bien que nous sommes plus nécessaires. Du reste, mes idées, de ce point de vue, n’ont rien d’exotique, car toutes les sociétés sont fondées sur l’inégalité des droits et des devoirs qu’elles reconnaissent leurs membres : je ne fais que dire sans détour ce que les autres dissimulent pour se donner bonne conscience.


Et la planète sur laquelle ils se trouvaient était précisément l’exemple le plus criant de cela, car la distance qui séparait les misérables des bas-fonds, privés de tout, même de la lumière de leur étoile, et le chancelier dans les hauteurs de la coupole du Sénat, était une différence pas même de degré, mais de nature : la vie des seconds ne valait rien pour une République qui ne dépensait pas un sou pour eux, tandis que celle du second était préservée par des moyens exorbitants.


Je crains ainsi que vous n’ayez tort quand vous pensez que je cherche à être meilleur que les autres. Ça n’a jamais été ma préoccupation. Je cherche à être meilleur que moi-même. Mon but n’est pas la supériorité, mais l’excellence. Sans doute suis-je froissé dans mon orgueil quand les mérites que je me crois ne me sont pas reconnus, mais je lutte contre des sentiments aussi mesquins, car ils sont une distraction pour le savant. Le chemin que j’ai choisi de parcourir n’est pas une complaisance, Chevalier Kayan, c’est une ascèse plus rigoureuse que la vôtre encore, car quand les Jedis peuvent se satisfaire de l’admiration qu’on leur porte, moi, je poursuis mes travaux malgré l’opprobre.


Un sourire passe alors sur ses lèvres et il dit :


Il y a en revanche un point sur lequel nous nous entendrons facilement : Hapès est à bien des égards une planète exécrable. J’aime ses beautés naturelles, mais tout le reste m’y déplaît. J’y suis d’abord parce que c’est le plus commode pour moi, que j’y jouis d’une certaine protection politique, après que l’Empire m’ait inexplicablement tourné le dos. Comme vous le savez sans doute, ma famille y est bien installée, ce qui a ses avantages, et puis c’est là que vivent mes parents, pour qui j’ai depuis toujours une affection sincère.


Il avait entretenu une correspondance avec eux quand il était encore au Temple et leur relation n’avait jamais été rompue. C’était l’un des fils qui l’avait tiré hors de l’Ordre Jedi.


Pour ma part, à choisir, je préfère des endroits plus sauvages. Ce n’est pas pour rien que j’ai passé toute ma carrière, au sein de l’Ordre comme de l’Empire, aux marges des territoires. J’aime la vie que l’on mène aux frontières de ce qui est connu. À Hapès, en revanche, tout est cartographié depuis très longtemps. Tout est bien rangé. Tout est en ordre. C’est désespérant mais c’est ainsi.


Ses interlocuteurs le prenaient souvent pour un homme délicat attaché à son confort et à la bonne société, mais rien n’était plus éloigné de la vérité : Absalom, à sa manière, était un être sauvage qui ne trouvait dans la civilisation que des outils pour parvenir à ses fins.


Quant à comprendre pourquoi je poursuis Karm… Dites donc, je ne le poursuis pas très ardemment. Je vous rappelle qu’il passe une bonne partie de sa vie loin du regard de l’Ordre, très au-delà des frontières de la République, et qu’il serait facile d’y provoquer des rencontres à l’insu de tous. J’ai un intérêt pour lui que je vous ai expliqué, j’ai un intérêt pour vous que je vous ai expliqué, il n’y a rien de très mystérieux là-dedans.


Il y avait de l’animation sur la place devant le Sénat. Une session parlementaire venait de se terminer et les speeders des délégations se bousculaient dans l’air tout autour d’eux, à mesure que le bâtiment se vidait.


Si je puis me permettre un conseil de sagesse, ou tout du moins d’expérience, dont vous verrez qu’il n’a rien de particulièrement obscur ni lumineux… Plus on progresse dans l’existence, et dans des disciplines intellectuelles comme, par exemple, la psychologie et l’investigation, plus on a tendance à chercher des explications complexes même aux phénomènes simples. C’est naturel : on a beaucoup investi dans son savoir et, plus ou moins consciemment, on cherche à le rentabiliser. Pourquoi s’être instruit plus, être devenu plus intelligent, si ce n’est pas pour résoudre des cas plus compliqués ?


Et sur ce point-là, il plaidait coupable.


Mais parfois, le réel est simple. Une intelligence véritablement mûre doit admettre que tous les phénomènes ne sont pas nécessairement tortueux ni grandioses. Le bon politicien doit admettre que toutes les affaires ne sont pas des complots, l’enquêteur que tous les crimes ne sont pas parfaits, le général que l’assaut frontal a parfois ses vertus. Vous cherchez à m’interpréter comme si j’étais un puzzle à mille pièces, mais pour être honnête, j’ai l’impression d’avoir au contraire une psychologie assez simple. Et entre vous et moi, contrairement à ce que pensent bien des gens, je mens aussi rarement que possible. Les mensonges sont coûteux à entretenir, la vérité est souvent plus efficace.
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
Luke ne savait pas ce qui était le plus dérangeant chez Absalom : son amabilité, qui, aux yeux des passants le rendaient certainement plus attrayant, rassurant que le Jedi en personne, ou son espèce d’incroyable tolérance. Une tolérance pour tout : le point de vue de son ennemi, ses choix, soutenus par une philosophie élitiste, certes visible dans la majorité des systèmes. Le Hapien aurait voulu expliquer que les inégalités étaient dûes aux circonstances, que tout le monde ne les acceptaient pas, qu’il existait de nombreuses structures pour aider les démunis mais force était de constater que ça n’était jamais assez. Comme si effectivement, les gouvernements se donnaient bonne conscience sans essayer de faire le maximum. Inutile de le nier, le jeune homme y avait déjà pensé. Comment défendre alors, sa profonde conviction : toute vie, y compris sans sensibilité était précieuse ? Il se hasarda à une réponse, plus vraiment sûr de savoir s’il se défendait ou philosophait.

- N'est-ce pas un peu pratique et hypocrite d'accorder le droit aux Insensibles le droit de vivre mais de s'octroyer le droit de la leur retirer ? La Force coule en nous tous, y compris en eux, d’ailleurs, elle intéragit avec eux bien que ce soit à leur Insu. S’il y a si peu de Sensibles au regard des populations mondiales... C’est sans doute pour une raison. La nature a toujours su équilibrer les choses pour que l’ensemble soit viable. Sans ces êtres “communs” comme vous dites, la vie telle que nous la connaissons ne serait pas. Alors certes, vous leur reconnaissez le droit d’exister mais à quel prix ? Celui d'être à votre service, une source de jouvence et de cobayes par intermittence ? Je pense que nous avons beaucoup à apprendre de la Force, mais il faut le faire dans les limites que cette dernière nous octroie, sans dérober ses secrets les plus intimes. À chaque époque ses progrès. Et s’ils sont lents, ce n’est parfois pas une simple question de technologie sinon de mentalité. Il faut du temps pour accepter ces vérités, ces changements, encore une fois la nature est bien faite, et peut-être ne devrions-nous pas trop nous précipiter sur le chemin des découvertes, surtout pas à des prix aussi élevés. Le maintien de l’équilibre pour l’endurance de nos mondes. Que ceux-ci nous survivent, est tout aussi essentiel. La préservation donc, de toute forme de vie, et leur respect au possible.

Le jeune homme préférait en effet s’intéresser aux vies qui hurlaient de douleur entre ses doigts aujourd’hui, que celles de demain, bien que les recherches, évidemment, l’intéressent. Luke avait toujours été intrigué par les découvertes, ému en sachant qu’un vaccin avait été crée mais il ne croyait pas moins qu’aucune fin ne justifiait aucun moyen. Les progrès étaient plus longs, mais au moins, on ne sacrifiait personne -ou presque-, ainsi, le chemin restait propre. Certes, il avait appris au fil des expériences que de nombreux médicaments voyaient le jour à cause de tests sur des animaux puis des cobayes dont on profitait de la misère financière... Mais s’il pouvait l’en empêcher, sans doute l’aurait-il fait, malgré le but louable. Cette route-là était difficile à entretenir, parsemée d’embûches, de tentations et de dilemmes cruels. Qui laisser vivre ? Le pauvre hère qui devrait, sans rien avoir demandé à personne, mourir au nom du progrès, ou l’être qui profiterait du résultat des recherches ? Luke soupira, comme toujours, il avait beau être convaincu intimement, ces questionnements continuaient d’affluer dans son esprit, à l’instar de nombreux guérisseurs, effarés par le pouvoir de certains virus.

- La vie ne sera jamais aussi parfaite, c’est illusoire et utopique. Quand les souffrances d’aujourd’hui auront disparu, grâce aux “progrès” viendront celles de demain. Peut-être que tout connaître de la force, en supposant que ce soit possible, créérait plus de conflits, des guerres ? Il y aura de nouvelles maladies, des défis médicaux insolubles... Ou qui sait, l’ennui de peuples jamais stimulés, vivant dans une bulle trop lisse ? Je suis pour les progrès, mais pas la quête utopique d’un Monde sans erreur. Car un monde sans aucune erreur ne serait aucunement équilibré, en plus d’avoir trop coûté.

Le blond finit par aviser un petit muret sur lequel il avait laissé courir sa main tandis qu’ils marchaient. Il s’y assit, toujours tendu mais à un degré moins fort. Absalom avait réellement un pouvoir terrifiant.

- Je vous le reconnais. On vous dit très travailleur, et je ne doute pas de vos propres sacrifices au nom de vos projets.

C’était d’ailleurs ce qui rendait Noctis si dangereux. Ekkt avait commis l’erreur de croire que ce n’était qu’un obsédé du sexe, narcissique, mais l’homme leur avait bien prouvé que non. Intelligent au possible, acharné, déterminé, ce Darth là était plus dangereux, semblait-il à Luke, que la dame noire qui siégeait sur Korriban ou encore l’ancien Seigneur noir des Siths qui l’avait maintenu prisonnier. Au moins, l’esprit de ce dernier était-il lisse. Cruel, vil, mais quelque part, prévisible. Absalom, lui savait convaincre et charmer. La preuve, même son ancienne victime daignait -quoiqu’un peu à reculons certes.- discuter avec.

- C’est peut-être simple, mais c’est dérangeant. Pour rester dans le simple... Allez-vous bientôt arrêter ? Non parce qu’à ce niveau, je ne vois guère ce que vous pourriez découvrir de plus.

Avoua le jeune jedi tandis que des bruits lui firent tourner la tête vers la place du Sénat. Les rues s’activaient, envahis de speeders et de gens. Par réflexe, Luke se raidit légèrement, mais ne quitta pas non plus son muret. Il avait assez “confiance” en Absalom pour tenir son rôle et n’attaquer personne. De fait, en y réfléchissant, ce dernier aurait beaucoup à perdre en dévoilant sa couverture.

- Il faut aussi parfois aller au-delà du "simple" et se poser des questions sur le teneur réelle de ses agissements. Je trouve que vos actes vont beaucoup plus loin que votre intérêt soi-disant purement philosophique ou scientifique. En tout cas, c'est mon point de vue. Vous êtes vous autant renseigné ? Avez-vous causé autant de rencontres et d'intrigues autour de tous vos sujets d'études ? Ce n'est pas une attaque, loin de là, mais les prémisses d'une réflexion que vous pourriez choisir de suivre ou d'ignorer...

En soi, c'était vrai. Le Hapien n'était curieusement pas vindicatif, plutôt "démuni". Il lui semblait tout à coup que cet homme avait perdu le contrôle de lui-même concernant Karm, qu'il se camouflait derrière des conseils. Mais était-ce vraiment possible ? Absalom pouvait-il réellement agir sans tout calculer ? Bien qu'une fois de plus -et c'était dérangeant- son aîné l'avait cerné, lui trouvant une tendance à trop complexifier, cherchant des réponses pour tout, Luke était persuadé que son intérêt n'était pas aussi simple que ne le prétendait Noctis.

Ce personnage était une oxymore à lui seul, l'illustration même ce ce mot qui désignait deux termes à la fois contraires et complémentaires. Une sorte d'ombre lumineuse qui n'hésitait pas à faire du mal pour ce qu'il pensait être le bien. Implacable mais tolérant. Glacial, hautain mais proche de sa famille. Définitivement "Sith" dans l'expression de ses pouvoirs, mais davantage ouvert aux autres factions. Cet homme avait gardé une parcelle d'âme Jedi et cela ne faisait que le rendre encore plus inquiétant, troublant.

- Je suis fort aise que vous ayiez gardé de bons contacts avec votre famille. Ce n'est pas toujours facile, les familles. Surtout sur Hapès.

Il était en effet plutôt étrange de savoir qu'à son instar, Noctis n'avait pas été complètement rejeté par sa mère alors que c'était un mâle. Un mâle "déviant" qui plus est. Leur histoire ensuite, s'était différenciée puisque Maria avait maltraité son fils en le croyant déficient. Ceci dit, encore une chose en commun : leur famille avait eu moins d'apriori sur leur sexe. Luke préféra ne pas s'étendre sur leur planète ou les proches, il n'était pas à l'aise avec ce thème. Depuis que l'Ordre avait assoupli ses règles, le Chevalier avait accepté de rares lettres de son père ou de sa belle-mère, ainsi qu'une ou deux rencontres restreintes avec sa demi-sœur mais il limitait le lien. Peut-être que Noctis avait raison : bien conditionné par l'Ordre, le blond était persuadé de faire le choix par lui-même. D'autant plus qu'en tant que diplomate fricotant parfois avec la police, il avait appris ce type de conditionnement : le syndrome de Stockholm. Là non plus, concernant l'Ordre, ses proches à lui donc, il n'était pas prêt à discuter.

- Comment va votre ami. Votre protégé Twi’’lek malade ?

Demanda soudain le Chevalier. Il ne se souvenait plus du nom de cet homme qui, au début lui avait donné des frissons (de mal-être) puis l’avait assez ému. Malade, récupéré par Noctis, il considérait évidemment le Hapien comme son sauveur. D’ailleurs ceux qui gravitaient autour de celui-ci éprouvaient un sentiment de reconnaissance absolu. C’était tellement contradictoire.

- Sait-il ? Savent-ils ? Ceux que vous aidez et hébergez que vous retirez la vie, là où vous avez sauvé la leur ? Et d’ailleurs sacrifiriez-vous leur vie au nom d’un plus grand projet ? Je veux dire, êtes-vous assez attaché à eux pour faire quelque chose de scientifiquement illogique ? De réfréner vos progrès pour eux ?

Désormais, tout le monde ou presque était sorti. Le ballet des vaisseaux s'était calmé, les retardataires sortaient des gradins en courant ou au contraire, en lambinant, ayant abandonné toute idée d'arriver à l'heure au prochain rendez- vous s'ils en avaient un.
Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Les gens ? Me servir ? Vous pensez que j’aspire à voir les gens plier l’échine devant moi ?


Spoiler:


Je trouve l’idée de la servitude révoltante. L’esclavage, en particulier, est à mes yeux l’une des pratiques les plus infâmes de la galaxie. Elle est de plus irrationnelle : l’être qui ne se voit pas d’avenir ne contribue que médiocrement à la société. Celles et ceux qui me suivent et m’assistent le font par conviction que mes recherches, et j’imagine mon enseignement, leur permettra de satisfaire leur désir de savoir. Ils m’obéissent par l’effet de leur libre-arbitre.

Un tableau bien idyllique d’un cercle d’acolytes fanatisés, que l’aura corruptrice de leur maître avait poussé au dernier degré d’une adoration maladive et qui étaient prêts à sacrifier tous leurs intérêts pour un seul regard de lui. Pourtant, Absalom était sincère, quand il affirmait détester l’esclavage, et des esclaves, il en avait personnellement libéré beaucoup.

Exercer du pouvoir sur les autres n’est pas quelque chose qui m’enthousiasme particulièrement, ni d’ailleurs, pour être tout à fait honnête, un exercice auquel je sois très doué. Vous avez l’air d’imaginer que je me promène dans les rues en assassinant à tour de bras, et que ceux que j’épargne, je les asservis, mais c’est très éloigné de la vérité. Je tue quand la nécessité l’impose, ou bien quand on me le demande.

Il avait simplement une définition fort étendue de ce qu’était cette nécessité.

En revanche, je reconnais volontiers que nos conceptions divergent quand il est question de l’univers et de la nature. Vous pensez qu’elle est bien faite et harmonieuse. Je ne pense pas que la nature soit faite du tout, il me semble qu’il n’y a ni ordre cosmique, ni nécessité naturelle. Le monde est un vaste chaos, violent et souvent cruel, où la compétition acharnée se mêle à un hasard aveugle et absurde. C’est notre désir de vivre dans une réalité bien ordonnée et qui ne nous soit pas trop hostile qui nous pousse à mettre dans l’ordre dans ce que nous percevons, mais pour cela nous faisons à notre tour violence à ce qui nous entoure : quand nous voyons des jungles, nous voulons en faire des jardins.

Lui, malgré toute la délicatesse de sa conversation et de ses manières, et la mesure de son tempérament, était un être sauvage.

De la même manière que les particules ne s’observent jamais telles qu’elles sont réellement, la nature cesse d’exister dès que nous posons les yeux sur elle, car notre intelligence la travaille toujours pour nous la rendre plus acceptable. Il n’y a pas d’ordre naturel que nous puissions ni ne devions suivre : il n’y a que des conceptions de l’ordre, souvent concurrentes, et chacun s’attache à rendre la sienne plus acceptable en la prétendant inscrite dans l’immuabilité éternelle des lois naturelles.

Ces considérations-là, on ne les trouvait certes pas dans les Archives des Temples et ce n’était pas à son passé de Jedi qu’il les devait. Absalom lui-même n’aurait su dire précisément à quel moment il avait commencé à s’éloigner des préceptes d’harmonie qui avaient guidé sa jeunesse. Sans doute n’y avait-il pas eu d’événements marquants. Il était allé au Côté Obscur petit à petit, insensiblement, par les rouages d’une réflexion qu’aucune considération morale ni sociale n’était parvenue à contenir.

La conversation cependant revint sur un terrain plus personnel, et l’ancien Sith haussa un sourcil quand Luke insista sur ce qu’il jugeait être le caractère exubérant de son intérêt pour Karm.

Vous trouvez que je vais un peu loin ? Je vous rappelle que, depuis que j’ai quitté l’Ordre Jedi, j’ai vu votre compagnie et vous-même très exactement deux fois chacun et une fois, je vous ai aidé, très indirectement, sur cette planète où nous nous trouvons présentement, quand Tavaï le recherchait. Si c’est ce que vous tenez pour un intérêt excessif, je vais finir par croire que pour les vôtres, vous manquez d’opiniâtreté.

Certes, certes, il y avait eu une petite affaire de kidnapping, mais on n’allait tout de même pas en faire toute une histoire !

J’aimerais beaucoup avoir une longue conversation avec lui, c’est vrai. Semblable par exemple à celle que nous sommes en train d’avoir. Peut-être observer la démonstration de ses pouvoirs, comme j’aimerais vous voir utiliser les vôtres. Mais on ne peut pas dire que je prenne des mesures très actives pour faire advenir une pareille situation et notez que notre propre rencontre, aujourd’hui, est purement fortuite. Très franchement, je crois que je ne prendrais pas beaucoup de risques à parier qu’il y a des hommes qui poursuivent votre compagnon avec beaucoup plus d’ardeur que moi.

Mais Luke ne se trompait pas : si Karm et lui avaient ressemblé à des Hutts, l’intérêt que Noctis prétendait être purement scientifique n’aurait pas duré aussi longtemps.

La remarque sur les familles n’était pas tombée dans l’oreille d’un sourd cependant et le Hapien se promit d’enquêter sur celle du Chevalier Jedi, une fois de retour sur Hapès. Il y avait là une histoire qui méritait sans doute d’être découverte et il était aussi curieux de découvrir si les parents de Luke témoignaient d’une quelconque disposition à la Force.

Skill. Il s’appelle Skill. Et il se porte beaucoup mieux, c’est gentil de demander. J’ai craint un instant que ma situation délicate avec l’Empire, en restreignant mes ressources, ne compromette son traitement, mais finalement, il n’en a rien été. Il s’est pris de passion pour l’exploration sous-marine. La zoologie et la botanique, je veux dire, il ne cherche pas des épaves pleines de trésor. Et…

Le psychopathe de service s’était lancé dans un discours tout attendri sur les passe-temps de son compagnon et, quand il se rendit compte qu’il était parti pour en parler pendant des heures si personne ne l’arrêtait, il se reprit, les joues un peu plus roses, et conclut :

Bref, tout va bien. Et oui, les hommes qui partagent ma vie savent très bien ce que je suis et ce que je fais. Je ne suis pas précisément un homme très anonyme, vous savez. On ne me reconnaît peut-être pas dans la rue, mais une rapide recherche sur l’Holonet suffit à exhumer bien des choses, dont une bonne partie de la propagande jedi, qui n’est guère flatteuse pour moi. Que voulez-vous, il semblerait que ça ne décourage pas tout le monde.

Et puis est-ce que ce n’était pas flatteur d’être aimé par un homme aussi dangereux ?

Et évidemment que pas une seule seconde je ne sacrifierais leur vie fût-ce au plus grand projet qui soit. Si demain l’on me disait que la mort de Skill m’apporterait l’immortalité immédiate, je la refuserais sans l’ombre d’une hésitation. Vous êtes bien placé pour savoir que l’amour vaut mieux que les principes, non ? Vous savez…

À quoi servirait-il d’être immortel si l’on avait tout perdu pour le devenir ?

… je ne veux pas vous faire de reproche, bien sûr, mais vous avez parfois l’air de me considérer comme si j’étais un personnage secondaire dans un mauvais roman, qui pourrait se réduire à un type abstrait et fonctionnel, mais comme tout un chacun, j’ai une âme avec ses nuances et ses complexités, et quelque déterminé que je sois à poursuivre un objectif que je juge important et supérieur, je n’en ai pas moins, moi aussi, ma vie à moi, mes amis et mes amours, mes loisirs, mes grandes et mes petites habitudes, irrationnelles ou indifférentes. Je donnerais l’univers aux hommes que j’aime, mais jamais les hommes que j’aime pour avoir l’univers.
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
- Comme vous l'avez dit. Bien conditionnés, nous sommes persuadés d'agir par choix, mais cela fonctionne aussi quand on les subjugue et vous avez... Un certain charisme.

Impossible de ne pas glisser cette petite pique à l'encontre de Noctis qui avait une sorte de véritable membres gravitant autour de sa personne. Skill, puisque tel était son nom, ne lui avait pas paru si libre. Il était bien traité, apprécié mais n'en restait pas moins un "serviteur", un homme absolument amoureux, aveuglé à Absalom dont les capacités de conviction n'avaient jamais été discuté. Autant, certains Jedis le pensaient simplement fou, d'autres mégalomane à qui on gonflait l'égo en lui prêtant trop d'intelligence tandis que les derniers le jugeaient plus dangereux que la Dame Noire des Siths elle-même. Luke comptait parmi ceux-ci, trouvant l'homme redoutable, dotée d'une extraordinaire capacité d'interprétation, saupoudrée d'une telle sûreté qu'il convaincrait probablement des spectateurs avertis de leur discussion. Diplomate ou non, le Chevalier n'en menait pas large face à son aîné. Il tentait, donnait le change mais ses répliques ne trouvaient écho que parce que Noctis le voulait bien, ironiquement, reconnaissant leurs différentes visions de la vie.

- Il y a parfois le chaos, des jungles hostiles à toute présence et que l'on ne devrait pas chercher à transformer. Des infras-mondes qui possèdent leur propre organisation, fermés sur eux-même volontairement. Mais il existe aussi des endroits naturellement paisibles, de magnifiques prairies calmes, où les espèces cohabitent voire s'entraident, ayant appris à le faire au fil des siècles. Les évolutions sont réfléchies dans le but unique de conserver et d'enrichir la vie.

Luke pensa à la pollinisation où chacun participait à une grande chaîne menant à la création d'une flore magnifique dont il pouvait seulement profiter des parfums. Il était d'accord avec Noctis sur un point : plus que préserver, les êtres pensants songeaient avant tout à transformer, mais il existait aussi des gens animés par l'idée de protéger, parfois certes, en éloignant la mort des plus faibles. Mais il faut dire que les voleurs, les assassins et autres criminels n'étaient pas des "prédateurs naturels". L'homme ne savait pas se réguler seul, il fallait bien contrebalancer avec un peu d'artificiel pour empêcher un monde, incapable de se rééquilibrer seul, de sombrer dans le chaos. Aucune prairie n'était destinée à devenir une jungle.

Et ce Skill, ces hommes perdus souvent, est-ce qu'Absalom les avaient vraiment sauvé ou "condamnés" ? Ils semblaient si heureux à ses côtés, leur vie s'était indéniablement amélioré. En tout cas il était surprenant et certes, un peu inquiétant de les imaginer prêts à accepter que leur "amour" était une personne violente, dangereuse. Il y avait sans doute de quoi se sentir flatté de faire partie de l'entourage d'un Sith, prêt à tuer pour ses convictions, d'être son protégé à tout prix, mais quand même... Les femmes acceptant que leur mari soit un tueur en série ne courraient pas les rues de Coruscant. Noctis savait donc si bien amener les choses qu'il n'avait même pas besoin de cacher sa nature.

- Si je suis votre raisonnement, donc, la vie des "communs" n'est pas suffisamment importante pour freiner la science. Par contre, celles d'hommes que vous appréciez, si. Du coup, vous sélectionnez, en quelques sortes, ceux qui ont un passe-droit. Pourquoi eux le mériteraient et pas d'autres ? Ceux qui sont tués, dépouillés de leur vie étaient également aimés par quelqu'un, une femme, des enfants, des amis... Qui pleurent comme vous pleureriez ces personnes pour qui vous ne voudriez pas l'univers. Y avez-vous songé ? ​Concernant Maître Torr, il sait comme moi où est la priorité, son devoir. Nous savons à quoi nous résoudre s'il le faut.

La dernière phrase était à la fois vraie et fausse. Luke y croyait, ils avaient tous deux portés serments, se séparaient volontairement des semaines, ne manquant jamais à leur devoir. Toutefois, il aurait en effet été prêt à beaucoup, dont une fois, refuser des ordres pour aider son ami et vice-versa. Jusque là, on ne leur avait jamais demandé de violer un règlement de la communauté ou l'ordre direct d'un maître, ils avaient eu de la chance... Mais il y avait quand même eu cette histoire avec Tavaï, quand Karm était parti sans prévenir et Luke, à demi, laissant l'Ordre devant le fait accompli avec un rapport pour justifier un minimum. Le jeune Hapien qui avait un jour avoué être prêt à quitter son cher Ordre par amour renoncerait-il à sauver l'univers pour secourir son compagnon ? Au fur et à mesure que les années passaient, leur abnégation demeurait-elle aussi puissante ? Malgré toutes les épreuves traversées, les Jedis n'y avaient pas encore été vraiment confrontés.

Le jeune homme s'arrêta une seconde, ses yeux se portèrent sur la ruelle, qui, de nouveau se vidait. Il sembla observer les derniers badauds avec une attention qu'il ne pouvait en réalité pas avoir, puis repris, haussant légèrement les épaules. Au moins, le Jedi était persuadé que Noctis ne voulait pas tuer Karm, et il avait entièrement confiance en ce dernier, sans compter qu'il n'était personne pour empêcher son ami de lui parler. Il préféra ne pas relever cette histoire d'hommes courant derrière l'explorateur. Certes, c'était une personne admirée, un maître exotique, excentrique en quelques sortes, talentueux aussi. Tous les ingrédients pour que bon nombre lui courent après, mais dans les termes évoqués par Noctis, Luke en doutait.

Où se croyait-il, ce Noctis ? Le monde ne tournait pas autour de pulsions sexuelles non plus. Comme s'ils n'avaient rien d'autres à faire de leur vie. Enfin, même si c'était vrai, encore une fois, le Jedi avait une absolue confiance en Karm. Tous deux avaient déjà parlé (difficilement certes) du thème. Luke avait exposé son point de vue : il ne pouvait pas être avec quelqu'un qui voyait d'autres personnes, bien qu'il n'y aurait nulle rancœur, il partirait si l'Ark-Ni choisissait de respecter sa culture. Finalement "rien" ne retenait Karm, et certainement pas des crises de jalousie. Après cette discussion où son ami avait fermement dit résister sans mal aux tentations, le Chevalier avait décidé de le croire. Quant à ceux qui éventuellement lui courraient après, l'explorateur n'y pouvait rien, il n'allait pas le blâmer. Mais quand même, quelle sordide habitude de croire que tous les hommes se courraient après. Luke retint une pique un brin moqueuse envers cette "obsession". De toutes manières, il n'était pas suffisamment à l'aise pour ça.

- J'aurais tendance à dire que je suis probablement le plus réfractaire des deux. De toutes manières, si vous avez envie d'essayer, vous le ferez. Vous verrez sa réponse.

Après tout, qu'on en finisse avant qu'Absalom ne se lasse et assassine le maître. Pour l'instant, celui-ci semblait avoir une étrange -et préoccupante- affection pour le couple. Luke avait même le droit à des confidences qu'il pensait honnêtes. Absalom "s'emportait" dans ses discours, ses convictions convergeaient (sauf peut-être cette notion de sacrifice du commun avant de se rétracter pour ses hommes, et puis d'abord, comment pouvait-on en aimer plusieurs à la fois de cette façon ?).

Enviait-il cet homme libre, fier de ses ressentis ? Sans que cela ne mène à une forte jalousie, jamais cultivée chez Luke, un peu probablement. Il était à la fois fasciné par Noctis qui n'hésitait pas à parler de relations homosexuelles polygames, en quelques sortes, l'idéal de Karm (?). Sans craindre de sa personne, vu la confiance aveugle qu'il plaçait en son ami, qui ne le trahirait jamais, ni lui ni l'Ordre, il se demanda furtivement si l'explorateur aurait préféré un petit ami comme ça. Évidemment, sans les deux charmants titres de Boucher et de scientifique fou. Bien sûr que non, si brillant, puissant soit Noctis, son compagnon préférait une personne de confiance, partageant ses principes et qui, malgré tout faisait des efforts pour s'adapter. Des efforts auxquels tous deux consentaient. Au final, dans un petit regain d'égo totalement étranger, Luke se dit qu'au final, c'étai cet homme qui n'y connaissait pas grand chose à l'amour. Ce ne fut qu'une fraction de secondes, puisque juste après, il se disait pouvoir juger Absalom selon ses actes hors-la-loi mais pas ses autres choix, du moment que ses partenaires étaient consentants (encore une contradiction, Noctis persuadait habilement mais sans jamais réellement forcer. Il kidnappait mais proposait aussitôt de libérer ses prisonniers entre autres.). Décidément, sa présence troublait même le plus tranquille des diplomates.

- Je reconnais que peu ont percé votre complexité. Nous en avons tous un panel de nuances, et j'ai toujours supposé le vôtre très étendu. Un vrai mystère. - Voilà qui devrait flatter un peu Noctis malgré lui.- mais je sous-estimais encore le personnage. En effet, vous êtes assez particulier, parfois contradictoire. L'amour et le dédain pour la vie. Rêver au final d'un monde sans souffrances, et accepter certaines souffrances d'autrui pour y parvenir, nourrir des inégalités en jugeant qui doit vivre ou mourir au nom de la science. Enfin, ne pas être si attaché que cela à nous connaître, mais nous aider ou nous kidnapper.

C'est qu'il deviendrait insolent, Luke. Ne risquait-il pas une fessée d'éclairs de l'homme ? Il recrachait sans doute, une certaine "colère" (si parler de ce sentiment le concernant était bien juste) après plusieurs rencontres néfastes de ce genre. Cette Unus encore, il y a peu, charmant masque hérissé de menaces qui avait joué avec ses nerfs. Quoiqu'il en soit, le Chevalier devait cependant reconnaître certaines qualités à Absalom et il se sentit contraint de les dire. Même avec "l'ennemi", il tendait à vouloir être juste.

- Au moins m'avez-vous laissé m'exprimer librement, sans menacer qui que ce soit, fidèle à votre parole. C'est un trait de caractère étrange venant d'un adepte du côté Obscur. Et je n'assène aucun cliché, je parle d'expérience. La mienne mais plus importante, surtout, celles de maîtres plus expérimentés.

Songeant que la fin de la discussion approchait, le jeune homme récapitula mentalement tout ce qu'il avait pu apprendre. Finalement, un bric à broc qu'il peinait à vouloir transmettre aux Ombres. L'espèce d'honneur d'Absalom l'avait en partie touchée bien que sa vision des choses lui semble toujours aussi dangereuse, un peu trop adaptée aux besoins du mégalomane malgré lui, avec des fins justifiant tous les moyens.

- Je ne sais que dire... Sans doute vous remercier pour ce... Hum dialogue ?

À vrai dire, il avait encore tant de questions, mais elles demeuraient, informulées ou informulables dans le fond de son être, se résumant à un grand "Pourquoi". Juste... Pourquoi ce Jedi de talent avait-il rejoint l'obscurité, cédé à des pulsions, alors qu'il était si raffiné et intelligent et pourquoi, encore une fois, ne les laissaient-ils pas en paix ou encore pourquoi lui parler, s'intéresser à la vie d'un Maître Jedi et d'un simple Chevalier qui, certes, avaient enfreint les plus vieux principes de l'Ordre.
Absalom Thorn
Absalom Thorn
Messages : 490
Eclats Kyber : 0
Bien sûr que les gens qui meurent par ma faute ont une famille. Croyez-vous sincèrement que je n’y ai jamais pensé ? Mais enfin, vous êtes un Jedi, votre Ordre ravage les champs de bataille depuis des milliers des années, il est de toutes les guerres de la République. Les Jedis, comme les autres, sont entourés de l’odeur de la chair brûlée par leurs sabres, et les soldats impériaux qui meurent sous leur coup eux aussi ont une famille. Des amis. Des compagnons.

Recevoir des leçons sur la considération que l’on doit à la vie de la part du représentant d’une institution aussi belliqueuse que l’Ordre Jedi avait quelque chose d’ironique aux yeux du Hapien.

Il en va ainsi de la galaxie. L’existence est violente. Chacun est un prédateur pour l’autre. Je fais servir ma prédation à une cause plus vaste, en laquelle je crois, et c’est ainsi aussi que procède l’Ordre Jedi. La seule différence, c’est qu’à ma petite mesure, je fais bien moins de victimes que lui.

La dernière phrase était un pur mensonge. En tout cas à l’échelle de sa vie. Le massacre de Kano-IV était incomparable avec les morts causées par les Jedis au service de la République.

Mais il n’y avait là nul terrain d’entente possible, et la conversation dériva vers des questions plus personnelles.

Absalom, pour sa part, n’avait pas l’impression d’être paradoxal, ni à vrai dire mystérieux. Il s’était donné très tôt quelques principes forts pour guider son existence, et depuis il les suivait, avec ce qu’il jugeait relever du pur esprit de la méthode. Ce que ses raisonnements pouvaient avoir de tortueux pour les autres, il ne le percevait pas clairement, mais comme il avait formulé ses propres observations sur le tempérament des deux Jedis, il laissa Luke faire de même sur le sien.

Je ne doute pas que nous aurons d’autres conversations à l’avenir, dit-il.

On aurait pu croire à une menace, mais les mots avaient été prononcés avec cordialité et, d’ailleurs, il ne chercha pas à retenir le jeune homme, quoiqu’il le suivît du regard alors que celui-ci s’éloignait. Pendant un moment, le sorcier resta assis là, à réfléchir à cette rencontre. Il ne croyait pas au destin, ni que la Force était l’architecte des événements, mais le hasard n’impliquait pas qu’il n’y avait jamais de leçons à tirer de ce genre de coïncidences.

Son regard dériva vers les tours du Temple Jedi, que l’on apercevait en face du Sénat. À l’origine de leurs constructions respectives, on avait sans doute voulu représenter là la symbiose entre un Ordre et la République qu’il défendait, mais désormais, les deux bâtiments paraissaient s’adresser un défi l’un à l’autre. S’il était demeuré au sein de l’Ordre Jedi, aurait-il siégé dans la tour de son Conseil, à l’heure qu’il était ?

Probablement.

Le sorcier se releva et, pendant plusieurs heures, il se contenta d’errer dans les rues de Coruscant. À n’en pas douter, il était suivi par les services de renseignement de la République. Le contraire eût été étonnant. Il ne chercha pas à les semer cela dit, et d’ailleurs il en eût été incapable. Ce soir-là, il n’avait rien à se reprocher. Tout ce qui l’intéressait, c’était de revoir cette planète où il n’avait pas remis les pieds depuis près de quinze ans.

Rien n’était plus semblable au passé, mais tout était à sa place. Son esprit vagabondait plus encore que son corps. Il effleurait les pensées des êtres qui l’entouraient, se frayaient un chemin dans leurs sensations, pour se laisser gagner par l’âme d’une population. Il ne cherchait rien en particulier, si ce n’était visiter leurs souvenirs en même temps que les siens.

Une fois, il croisa une Jedi en bure, mais celle-ci ne le reconnut pas. Elle avait senti sa présence, mais la foule était nombreuse, compacte, et son regard avait passé sur lui sans s’arrêter. Si un jour il parvenait véritablement à se réinstaller sur Coruscant, songea-t-il, il lui faudrait trouver un protocole pour de semblables rencontres. Tous les Chevaliers ne se montreraient pas aussi patients que Kayan.

Au début de la soirée, il revint à l’ambassade du Consortium, où toute la délégation séjournait pour la durée du séjour. La méfiance hapienne n’aurait pas permis qu’ils logent à l’hôtel. L’ambassade était comme Hapès, en un sens : une forteresse au milieu de la ville-monde. Cette nuit-là, ses murs, comme les frontières du Consortium, pesèrent sur l’esprit du sorcier.

FIN
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
skin made by
© jawn