Invité
Anonymous
Le Funeste Vecteur portait bien son nom, il avait l'allure d'un poignard prêt à transpercer le cœur du monde qu'il approchait, un poignard enduit du plus abject des poisons. Mais Ziost n'avait pas de cœur, seulement un abîme prêt à accueillir tous les poignards et tous les poisons. Il n'y avait pas à épiloguer outre mesure sur cette planète, c'était très loin d'être sa première visite après tout. Avec Korriban, elle formait le duo sacro-saint des mondes Sith, le cœur de leur empire, ancien et nouveau. Et avec la guerre, elles étaient devenues des sœurs ennemies. Leur dynamique lui rappelait celle entre Socorro et Neftali, mais elle avait ressasser cette occurrence suffisamment de fois pour que celle-ci ne lui arrache même plus un rictus.

Son vaisseau était mal éclairé, mal chauffé et son agencement un chaos parfaitement ordonné, tout ceci à dessein. C'était une leçon et un rappel, qu'au-delà de cette bulle de métal et de gaz pressurisé, il y avait le vide, éternel et inconcevable, n'attendant que de les dévorer ; mais aussi un autre, plus personnel, de cette épave à la dérive où elle avait connue l'épiphanie qui lui avait permis de se libérer des chaînes de ses maîtres.

Elle pilotait elle-même son navire, une vieille habitude qui remontait à ses années en tant que pirate, exécutant une approche qui était devenue un réflexe pour elle. Rien ne semblait différent, même les croiseurs montant la garde en orbite semblait être les mêmes, la jaugeant en silence, prêts à la réduire en poussière si elle ne montrait pas les bonnes autorisations, ou l'inverse, on n'était jamais à l'abri d'une bonne vieille trahison. Pourtant, tout était différent, ceux qui pensaient le contraire étaient des imbéciles et des cadavres en devenir.

C'était la guerre, et Ziost était la capitale des Renégats, en l'approchant comme elle le faisait, elle commettait un acte de trahison. Ceci, méritait un rictus par contre. Après tout, est-ce trahir quand l'on n'a jamais été loyale en premier lieu ? Comme si Bekhaar et son clergé putride méritaient la moindre once de fidélité de sa part, certes, elle avait travaillé avec eux, mais jamais pour eux, et ce fut plus souvent contrainte et forcée qu'autrement. Non, ce n'était pas une trahison, elle ne faisait qu'enfin choisir son camp.

L'obscurité du globe vint à la rencontre de la sienne, une forme d'identification plus ésotérique et infaillible que la valse des codes, cryptages et autres identifications. Après cela, Malhazar arriva en vue. Le complexe était égal à lui-même, semblable à un prédateur des grandes profondeurs prêt à l'engloutir dans sa gueule immense. La familiarité de tout ceci réduisait l'effet à néant, comme une lame émoussé à force d'avoir été tirée trop de fois. Pourtant, elle sentait que quelque chose avait irrémédiablement changé, mais elle ne saurait exactement quoi qu'une fois qu'elle aurait mit le pied à terre.

Elle ne venait pas seule, ses deux apprentis, Harken et Ssinsva, l'accompagnaient, de même que son droïde et Narthox, bien que ce dernier ne quitterait pas le vaisseau, étant supposé être mort. Avec son aîné et les trois petites dernières qui l'attendaient au complexe, la famille serait à nouveau complète.

À son arrivée, point de comité d'accueil, l'aire de débarquement était aussi déserte que silencieuse, ce qui ne manqua pas de faire tiquer ses vieux instincts. Le temps qu'elle déploie ses sens, qu'elle comprenne finalement ce qui manquait réellement à tout ceci, ce qui avait irrémédiablement changé, deux lames écarlate étaient apparus, une collée contre sa gorge, l'autre à la base de son dos ; se tenait derrière elle la forme insectoïde cramoisie de Darth Shriek, directeur du complexe de Malhazar et collaborateur passablement réticent.

Sa suite voulue intervenir, mai elle les en dissuada d'une injonction mentale, Shriek était le sith le plus rapide qu'elle connaissait, l'une des seules capables de la surprendre ainsi, ils ne seraient pas capables d'intervenir à temps. Cependant, il ne quittait que rarement son nid, d'où il pouvait surveiller l'ensemble de sa précieuse prison, ce qui rendait son action plus révélatrice que mille mots.

« Vous savez ce que j’apprécie chez vous, Shriek ? » Elle s'adressait à lui sur le ton de la conversation, comme s'ils conversaient autour d'une tasse de stimthé, pourtant, tous pouvaient sentir la tension sourde qui était en train de monter.

« Ce n'est pas votre relative intelligence, ou votre pragmatisme, ce n'est pas non plus la passion que vous mettez dans l'accomplissement du but que vous vous êtes fixé, non, c'est que vous ne vous dérobez jamais face aux conséquences de vos actions, vous les anticipez pour mieux aller à leur rencontre.

« Cela dit, et même si, au vu de la culpabilité qui suinte par toutes les jointures de votre carapace, je me doute déjà de la réponse, je vais quand même posé la question... Où-est-mon-fils ? »


La charpente de l'esprit du Culisetto trembla quand les mots de sa prisonnière résonnèrent à l'intérieur, en signe d'avertissement, il raidit un peu plus sa prise sur ses sabres.

« Il a été transféré dans un autre établissement, répondit-il avec l'accent bruissant d'un non-humanoïde qui parlait une langue qui avait été conçu par des êtres disposant de mâchoires et qui lui donnait l'impression d'être perpétuellement ennuyé. J'ignore lequel, cette information ne m'a pas été transmise pour des raisons évidentes. Les personnes qui sont venues pour lui avaient toute l'autorité nécessaire, elles ont procédé selon mes indications aussi l'intégrité de son caisson n'a pas été compromise, c'est moi qui l'ai conçu après tout. »

« Et qui étaient donc ces personnes ? Ou plutôt, quelle était cette autorité à laquelle vous ne pouviez que vous soumettre ? »

« J'ai bien peur qu'il s'agisse de la mienne. »

Là où il n'y avait jusque-là que du vide, se tenait à présent un homme qui ne ressemblait à aucune autre, un qu'on ne voudrait pas croiser dans ses cauchemars. Tout dans son aspect n'était que contraste et contradiction. Il portait le noir des Sith, mais la coupe de son habit rappelait plus un directeur de banque et était apprêté avec une sobriété soigneusement ouvragée. Son visage blême rappelait celui d'Unus, avec cette peau parcheminée qui semblait tendue à l’extrême sur les os de son crâne et ces yeux fixes enfoncés dans leurs orbites, des yeux prédateurs qui brûlaient d'un jaune nauséeux. Il affichait une moustache grisonnante coupée en brosse de façon millimétrique qui surlignait un sourire affable presque imperceptible. Ses cheveux étaient courts et arrangés, eux aussi, de façon impeccable. Il semblait âgé, pourtant, sa carrure et son maintien évoquait une vitalité dangereuse, s'il manquait la majesté écrasante d'autres, il brandissait son allure distinguée comme une menace silencieuse.

« M. Minuit. Vous ici, quelle surprise. Vous roulez pour Ramken à présent ? »

Minuit, tel était le seul nom auquel il répondait, Monsieur Minuit. Elle l'avait rencontré pour la première fois lors de la fondation de Malhazar et depuis ce jour, il avait toujours été... Là, comme une sorte d'ombre ancrer à cette endroit, à sa personne. Tantôt superviseur distant mais à la vigilance implacable, tantôt chasseur de têtes qui lui apportait des individus dignes d'intérêt pour ses expériences.

« Qu'est-ce qui a bien pu vous amener à une telle conclusion ? »

Il parlait avec le ton apprêté d'un serveur de grand restaurant qui proposait la carte des vins à un client peu satisfait. Il avait toujours été comme ça, avec ses manières de majordome échappé d'une holo-série.

« Vous êtes ici. »

« Je suis ici parce que vous-même vous l'êtes, très chère, en a-t-il jamais été autrement ? »

Elle n'allait pas insister. Même après toutes ces années, elle n'était jamais parvenue à le percer à jour, pas plus qu'à déterminer envers qui il répondait. Ses manières volontairement mystérieuses laissaient à penser qu'il pourrait appartenir à la clique de l'Ombre de l'Empire, mais ce n'était que pure spéculation de sa part, à la toute fin, elle ne savait pas qui il était, en fait, elle n'était même pas certaine de ce qu'il était. Quand elle tentait de le sonder, elle n'y trouvait que du vide ou une sorte de convergence de Ténèbres.

« Mon fils. »

« Aucun mal ne lui a été fait et son repos n'a pas été perturbé, comme vous l'a d'ailleurs dit le Directeur Shriek. »

« Pourquoi ? »

« Cela fait un moment que nous travaillons ensemble, votre profil psychologique a été établi depuis un moment. Nous savons que votre loyauté va en premier lieu à vous-même, ce n'était pas trop un problème à l'époque où il n'y avait qu'un seul empire, mais maintenant... Nous avons préféré nous doter de la garantie que l'on ne vous fera pas une meilleure offre... En devenant tout simplement la meilleure offre possible. Si vous étiez à notre place, vous auriez fait exactement la même chose. »

Un silence glacial précéda sa réponse.

« Possiblement... Je me permets cependant de vous avertir, d'autres avant vous ont déjà tenté de me prendre mon fils, cela ne s'est pas bien terminé pour eux. »

« Allons, allons, inutile de sombrer dans les mesquineries puériles, une fois que cette regrettable divergence d'opinions sera résolue, et tant que vous continuerez à accomplir votre travail avec le même niveau d'excellence qu'auparavant, votre fils vous sera rendu sans coup férir. »

Elle afficha un rictus amusé.

« Est-ce dont ce que vous avez pour me garder à vos côtés, des menaces et le simple fait que vous n'êtes pas le clergé ? Vous m'excuserez si je trouve cela un peu... petit. »

« Oh, détrompez-vous, dans les semaines et les mois à venir, nous vous fournirons amplement de quoi, sans nul doute, vous conforter dans votre décision, faite-nous confiance sur ce point. Quant à votre fils, ce n'est qu'un filet de sécurité, ne le prenez pas trop personnellement. »

« Fort bien. Pourquoi ne pas commencer tout de suite ? Avec quelques modifications de mes conditions de travail par exemple »

« Développez. »

« Je veux avoir accès aux sensitifs, vu que les baiseurs de statue ne sont plus là, il n'y a plus de raison de suivre leurs règles poussiéreuses, ne pensez-vous pas. »

Minuit parut considérer la question pendant quelques secondes avant de répondre.

« Accordé. Autre chose ? »

« Oui, je veux des Miraluka. »

« Sensitifs ? »

« Quelques spécimens de base suffiront pour apprendre comment fonctionne leur caboche, mais pour la finalité de la chose, des sensitifs seront en effet nécessaire. »

« Entendu, je vais voir ce que je peux faire. »

« À la bonne heure, ce n'était pas si compliqué finalement. Par contre, cette petite mise en scène va encore durer longtemps ? Parce que le pauvre Shriek va commencer à avoir des crampes. »

« Non, nous en avons fini. Bon retour à Malhazar, très chère, vous trouverez tout comme vous l'avez laissé, nous n'avons rien touché. L'Empire se languit de vos monstres, anciens comme nouveaux.

« Je vous demanderais, cependant, de rester dans l'enceinte du complexe pour l'instant, le temps que nous réglions les dernières formalités administratives, vous savez tout comme moi comment sont ces tracasseries. »


Comprendre par là qu'elle allait être sous surveillance rapprochée pendant un moment et qu'on ne voulait pas qu'elle se balade un peu partout dans le territoire renégat.

Minuit se détourna d'elle et fit mine de s'éloigner avant de brusquement s’arrêter et lui adresser un regard par-dessus son épaule.

« Une dernière petite chose... Comment c'est passé votre entretient avec le Grand Inquisiteur ? »

Son rictus se mua en un sourire crispé.

« Décevant. » Et elle n'ajouta rien d'autre, pas plus que Minuit.

Là où il y avait eu un homme, il n'y avait à présent plus que du vide, Shriek lui aussi avait disparu, ainsi que ses lames. Ne restait à nouveau plus qu'elle, seule sur cette aire de débarquement avec ses suivants. Elle quitta l'endroit avec une hâte hargneuse, défonçant des portes tardèrent à s'ouvrir. En effet, tout était différent à présent.
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
skin made by
© jawn