Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Il y avait un cliché holographique un peu flou d’une silhouette verte à lekkus






- Bon, on recommence.

Dana avait retiré sa bure, libérant ses deux bras fins dont le gauche était encore parcouru d’un bleu violacé – seule trace de sa fracture sauvage. Son ventre parfaitement rond tirait sur un débardeur blanc, tâché par sa sueur et par du sang qui ne lui appartenait pas. Dans l’ombre, Kedrod se massait les phalanges. Ils se relayaient deux heures face à un bothan dont ils n’avaient pour le moment rien su tirer. Il portait des traces de brûlures qui carbonisaient son visage, là où les éclairs de Force du zabrak avaient déchiré sa chair. Une odeur de poils grillés emplissait désagréablement l’air.

L’Inquisitrice posa une jambe sur la table en face de laquelle le prisonnier se tenait. Elle le surplombait de toute sa carrure. Elle finit par déposer un datapad allumé devant les yeux fatigués et étrécis du coupable :

- Sur cette holographie, c’est ton rejeton, c’est ça ?
- N..non..
- Non ? Bon. L’Inquisiteur Kedrod pourra donc le chercher et le jeter en taule. Si c’est pas ton gosse, quelle importance.
- Il est innocent ! s’insurgea-t-il dans un excès de rage.

Comment une femme qui attendait un enfant pouvait-elle faire preuve de si peu d’empathie ? Elle se dégagea de la table et fit un signe à son collègue qui hocha sa tête cornue pour quitter la pièce. Ses pas résonnèrent sinistrement dans le couloir adjacent jusqu’à s’estomper. Au loin, des échos de cris douloureux, de suppliques…mais ils s’évaporaient si vite qu’on aurait pu croire à des mirages sonores. Shar plongea une main pâle dans sa bure pour en sortir un bâtonnet de sucre au lait bleu. Elle le pinça entre ses lèvres.

- Attendez…attendez…j’vous jure, je sais rien..je sais rien. Pas mon fils, par pitié.
- Pitié ? s’étonna-t-elle en mastiquant longuement sa sucrerie. T’es pas au bon endroit pour implorer de la pitié. Il va falloir cracher des noms, des adresses, des informations sur ton petit réseau. Et fallait penser à exfiltrer ton morveux avant de décider de lécher le cul de Ramken.

Il ne répondit rien, tremblant, encore sous le choc. Elle s’efforçait de garder la tête vide, mais à chaque minute de plus passée dans cette pièce minuscule, à interroger cet individu, elle perdait pied. Elle se souvenait le froid qui avait gagné ses mains, en même temps que l’état de choc l’avait mené à l’hypoxie sur les planches d’un théâtre. Elle empoigna rageusement la Force et propulsa le prisonnier contre un mur. Il émit un geignement de souffrance. Elle concentra son don autour de la cheville du bothan, pressant, pressant encore, dans un effort constant jusqu’à ce qu’un os craque sinistrement et que son articulation se retourne. Jusqu’à ce que son hurlement emplisse ses oreilles.

- Je vais te briser. Et tu vas agoniser longtemps. Très longtemps. Et juste avant que tu remettes ton dernier souffle, on fera venir un de nos télépathes. On lui fera sortir les noms de ta cervelle et Kedrod la grillera à petit feu ensuite. On aura ce qu’on voudra, t’inquiète pas. Mais tu peux choisir de nous le donner dans la dignité, ou dans la douleur absolue, ça regarde que toi.

Ses lèvres brillantes de rouge à lèvres suçotèrent encore le bâtonnet avant d’en arracher un morceau du bout de ses dents voraces. Inconsciemment, à chaque torture, à chaque interrogatoire, elle s'entraînait pour sa prochaine rencontre avec Maxence et sa petite bande. Ce n'était pas au bothan qu'elle s'adressait. Du plus profond de ses tripes, ces menaces étaient adressées à la mercenaire.

- Et ensuite, on enverra la tête de ton morveux à tes petits copains. Pour leur faire comprendre que l’Inquisition Sith arrive pour eux.

Au sol, le prisonnier contractait ses mâchoires. Il fixait le petit néon qui éclairait à peine la pièce.
Elle plaqua sa main contre un panneau de commande, les portes s’ouvrirent. D’un geste elle récupéra sa bure et quitta l’interrogatoire, se drapant de son manteau d’Inquisitrice. Il fallait le temps que les paroles détestables de l’Inquisitrice résonnent. Mais le temps, ils en manquaient cruellement. Elle traça dans la longue galerie voûtée et s’engagea sur une passerelle pour quitter un vaisseau impérial qui servait de centre de gestion de crise du Collège de la Purification. Des soldats inquisitoriaux s’inclinèrent sur son passage, tandis qu’elle rejoignait une ligne de défense dressée devant l’un des sanctuaires de la périphérie de Kaas City. Au loin, les lumières de la cité, étouffés par les nuages et leur brouillard permanent.


- Vous avez obtenu quelque chose, Inquisitrice Shar ? grésilla la voix de Kedrod dans son comlink.
- Pas encore. Ce sale fils de pute.
- Nous avons sécurisé tout le périmètre du sanctuaire. Les terroristes renégats n’ont aucun moyen de s’échapper sans nous affronter. Ils ne sont qu’une poignée.
- Ouais, mais le chef de leur petite bande a menacé de tout faire sauter, grinça Dana au milieu des forces spéciales impériales qui étaient intervenues dès que le braquage d’un des sanctuaires Sith, pourtant ultrasécurisé était venu aux oreilles des autorités. Le bâtiment comprenait des artefacts, des holocrons de haute-sécurité. Il y avait au moins un sensitif derrière ce coup audacieux. La Force était nécessaire pour déjouer toutes les précautions prises afin de sécuriser l’endroit.

L’inquisition avait pris en charge l’opération. Kedrod et Dana, sous la supervision d’un Maître Inquisiteur étaient arrivés sur les lieux avec, à bord de leur vaisseau, un suspect de première catégorie qui pouvait lâcher les identités des terroristes. Au cœur de l’Empire, les renégats – en infériorité numérique, n’hésitaient pas à harceler les autorités loyalistes pour rappeler le souvenir de Darth Ramken. Ce n’était pas le travail qui manquait depuis son retour sur Dromund Kaas. Et depuis le début de l’opération, elle avait eu l’honneur d’avoir été en contact comlink avec l’un des instigateurs de c cambriolage suicidaire. Le message était clair : Soit les possessions loyalistes tombaient entre leurs mains, soit elles disparaissaient. Ils souhaitaient un sauf-conduit. C’était mal connaître Dana Shar.

Elle porta les mains à son dos pour soulager ses douleurs lombaires. A l’avant, son ventre prenait de la masse, tout comme sa poitrine. Son dos en souffrait. Une jeune humaine en uniforme d’officier, casquette noire vissée sur son chignon strict arriva au pas de course pour la saluer.

- Lieutenant Mesh. Vos hommes ont trouvé une faille ?
- Aucune, Inquisitrice. Mais ils sont tous placés, rien de ce qui sortira de ce sanctuaire ne pourra nous échapper.
- Kedrod, souffla-t-elle dans son comlink.
- Oui, ils ont retourné les systèmes de défenses du sanctuaire. Il y a au moins un bon informaticien parmi eux. Ils ont bien préparé leur coup.
- Vous arriverez à neutraliser ça avec…la Foudre ?
- Ca veut dire m’approcher assez près. Ils pourraient tout faire sauter. Le Seigneur Belkhaar sera enragé si ça arrive. Je vais chercher le gamin du bothan, comme prévu.
- Ouais…

Elle coupa la communication, le regard rivé sur le bâtiment qui se dressait dans le paysage sombre de Dromund Kaas.

Les missions de ce genre, pour le compte de l’Inquisition Sith s’étaient enchaînées au fil des deux semaines qui s’étaient écoulées depuis ses adieux avec Lloyd Hope. Elle n’avait eu aucun répit. Runà lui avait à peine adressé la parole, si ce n’était par instructions via terminaux sécurisés. Elle était visiblement retenue ailleurs, par des prérogatives importantes et cela avait soulagée Dana qui n’était pas prête à lui expliquer pour la grossesse ou à lui raconter par le menu détail comment elle avait laissé partir le capitaine. Elle avait élu domicile au Grand Temple dans une chambre spartiate, mais individuelle, dont les dimensions modestes lui remémoraient le Sans-Visage. Elle avait accroché la guirlande au-dessus du lit, empiler les caissons dans un coin, sans trouver le courage de les déballer, de les ranger. Elle avait également commandé du maquillage pour reconstituer son trousseau précieux.

Les rapports avec Kedrod étaenit froidement cordiaux. Ils coopéraient avec efficacité et de manière professionnelle ; plus professionnelle qu’avait été sa collaboration avec l’hapien. Chaque soir, quand elle avait la chance de rentrer dans sa chambre et ne devait pas passer des nuits à transmettre des rapports, elle admirait une photographie récente, collée au miroir de sa coiffeuse. C’était un rituel auquel elle ne dérogeait pas. Puis, elle se douchait, s’installait sur son lit, flattait son ventre en pleine croissance. Elle ne s’endormait qu’après avoir senti plusieurs coups.












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- Le suspect a fini par parler, ce qui vous a permis de remonter la piste du groupe terroriste. Avec des informations, on a toutes les clefs pour reprendre les négociations en main. Les informations nous donnent les points de pression, nous disent où appuyer pour briser l’articulation.

Kedrod et Dana étaient debout, drapés de leur bure ample et sombre. Runà était assise à son bureau, un air satisfait sur son faciès mystérieux.

- Ouais dommage qu’une fois les informations obtenues, on nous a évincé pour laisser le Maître Inquisiteur se charger de la suite.
- Vous manquiez de compétences, pour la suite. Quand comptais-tu me parler de ta grossesse ?

Dana fustigea Kedrod d’un regard noir qui se contenta de demeurer impassible.

- Il ne m’a rien dit, rectifia-t-elle d’une voix froide. Mais crois-tu que je ne sentirai pas ces deux formes de vies qui grouillent dans ton ventre. Laissez-nous Kedrod.
- Bien sûr, maître Runà.

Sitôt l’Inquisiteur parti, Runà invita son apprentie à s’asseoir sur l’un des fauteuils de la pièce. Shar s’exécuta, le mouvement un peu raide, un air de défi enflammait ses prunelles dorées.

- Je présume que le père est Lloyd Hope.
- Le père a pas d’importance. Il n’y a que moi.
- Je vais devoir te missionner sur des tâches moins risquées, soupira la miraluka. J’aimerais que tes enfants naissent en bonne santé, n’est-ce pas ?
- Je ferai comment après ?
- Tu pourras les laisser au manoir, expliqua son maître d’un air détaché. J’engagerai une nourrice pour s’en occuper.
- Au manoir ? Mes enfants vont vivre dans votre piaule et moi ici ? C’est hors de question.
- Ce n’était pas une question, Dana. Passons à la suite. L’une de nos cibles suspectées. Darth Orcus. Ambitionnerait un acte de grande envergure contre la population de Kaas City.

Elle indiqua à sa protégée de lire son datapad où des informations confidentielles venaient d’atterrir concernant sa prochaine mission. Et au fur et à mesure de sa lecture, elle perdait des couleurs. Elle manqua de tourner de l’œil et sa main tremblante laissa échapper l’appareil qui percutait sèchement le marbre sombre qui revêtait le sol.

- Il…possède un échantillon du virus ? souffla-t-elle, prise de vertiges. Ce satané virus…
- Oui. C’est pour ça que, tu dois t’en occuper. Tu as déjà affronté ce virus, tu sais mieux que quiconque comment combattre ceux qui en sont infectés. Tu vas devoir infiltrer sa demeure, et étant une proche parente, cela te sera plus aisé. Il ne se méfiera pas de toi, aveuglé qu’il est par la haine qu’il te porte.
- Non…murmura-t-elle. Non ! Je veux bien négocier avec des terroristes, exécuter des gamins, tout ce que vous voulez mais ça. Non ! Tout a brûlé au camp Piya !
- - Et bien, comme tu le vois non.
- Vous disiez me missionner sur des tâches moins risquées, vous avez pensé à mes bébés ?! Si jamais ce foutu truc m’infectait !
- Orcus ne peut pas encore mettre son plan à exécution. Il attend le bon moment, ou un ordre de Ramken qui pourrait arriver à n’importe quel moment. L’échantillon du virus est forcément quelque part chez lui. Tu t’en empares et tu reviens avec et personne ne sera infecté.
- Je serai donc seule, ponctua sèchement l’Inquisitrice.
- Comme je l’ai dit, tu es une proche parente, Kedrod ne pourra pas te suivre là sans attirer les soupçons.

D’une impulsion enragée, Dana se redressa et se mit à arpenter le grand bureau, comme un lion en cage. Des bouffées de chaleur submergeaient sa gorge. Ce n’étaient pas des pleurs, mais des cris. Des hurlements de rage qu’elle contenait douloureusement dans sa poitrine. Derrière la dentelle pourpre qui masquait ses orbites vides, Runà semblait indifférente à l’état de son apprentie.

- Je n’ai pas la moindre...compassion ou empathie, pour la progéniture de ce chien. Mais…si je te confie cette mission c’est aussi en ton âme et conscience. Enfin, si tu as encore l’une ou l’autre.

Shar croisa les bras sous sa poitrine avant de se masser la tempe, excédée.

- Si tu n’avais pas fait tomber ce datapad, tu auras eu la liste des serviteurs du manoir de Darth Orcus. Tu aurais vu le nom de Mat’aenna.
- Que..quoi ?

Elle se précipita et tomba à genou au sol pour vérifier l’information de ses propres yeux. Dans le dossier confidentiel, visiblement remis par les services de renseignements, se trouvait la liste des esclaves et domestiques, érigée selon une surveillance stricte du domaine. Il y avait un cliché holographie un peu flou, d’une silhouette verte à lekkus .

- Elle est sous ta responsabilité après tout, depuis que tu as fait ton choix.
- Il ne l’a toujours pas retrouvé…murmura-t-elle pour elle-même, tétanisée.
- Ne tarde pas.

L’Inquisitrice ne répondit pas et se précipita dehors. Des centaines d’étages plus bas, dans un couloir menant aux dortoirs, elle percuta l’ombre de Kedrod qui la rattrapa d’une poigne ferme avant qu’elle ne chute de cette maladresse. Il la trouva un peu hagarde, un peu tremblante. Elle avait fouillé dans son datapad à la recherche des coordonnées de Lloyd Hope avant de se souvenir qu’elle les avait effacé.

- J’ai été affecté sur une mission de surveillance, lui expliqua-t-il alors qu’il l’avait raccompagné devant la porte de sa chambre. Une soirée de l’Etat-Major qui rassemble un peu le gratin. Ils fêtent plusieurs promotions de la Marine Impériale. Certains suspectés d’être de la vermine renégate infiltrés seront présents.
- Quoi ? C’est…C’est quand ?
- Demain soir.
- Je viens avec vous, percuta-t-elle en catastrophe.
- Ce ne sera pas nécessaire, un seul Inquisiteur a été accepté.
- Je serai pas là en tant qu’Inquisitrice, vous n’aurez qu’à me faire rentrer. C’est plus prudent.












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Des boucles écarlates dévalaient des épaules étroites en partie dénudée. Une robe dorée et moulante embrasait ses courbes et attira quelques regards. Les éclats de voix volaient haut tant le plafond de la salle de réception prenait naissance dans des hauteurs vertigineuses. Un orchestre de bonne renommée jouait un air classique, qui détendaient les oreilles. Les uniformes d’apparat et les tenues de soirées se mêlaient dans un festival de noirceur et de couleurs. Les dames avaient pendu à leurs oreilles des bijoux rutilants. Dana avisa Kedrod non loin d’un grand buffet. Les officiers portaient sur lui un regard dédaigneux, mais pour elle, il n’y avait que des sourires polis auxquels elle ne répondait pas.

Dans toute cette foule mondaine, elle cherchait Lloyd Hope. Son ventre arrondi distendait sa jolie robe au niveau de son abdomen, mais elle avait revêtu ce vêtement à dessein, pour qu’il puisse la repérer. C’était la robe de leur dernière soirée sur Jabiim ; elle serait comme un phare dans un océan déchaîné. Un haut-gradé aux tempes grisonnantes s’invita devant elle, et s’empara d’un verre de vin artorien pour le lui présenter, s’inclinant avec élégance :

- Je n’ai pas l’honneur de vous connaître, Dame ?
- Hickpens, Dana Hickpens….j’accompagne un officier qui doit être promu et je l’ai malheureusement perdu de vue, dit-elle rapidement en ignorant le verre.
- Je suis le Vice-Amiral Sierra. C’est…étrange parce que voyez-vous, les officiers que l’on honore ce soir ne sont pas encore arrivés.
Merde.
- Alors, je repose ma question. Dame ?
- Je…vais…m’éclipser, je ne me sens pas très bien.

Et elle tourna brusquement les talons. Le gradé fit signe à un sous-officier qui se lança immédiatement à la poursuite de l’intruse. Dana se mit à courir, à bousculer sous des geignements indignés. Son poursuivant accéléra également le pas. Elle ouvrit à la hâte des portes, traversa des couloirs. Derrière elle, le militaire s’était mis à lui crier dessus, mais elle n’entendait pas, son coeur tambourinait trop fort à ses oreilles. La course devint un sprint qu’elle eût du mal à supporter en raison de son état de grossesse. Elle détourna la figure pour voir son poursuivant se rapprocher et ne vit pas l’obstacle qu’elle cogna de plein fouet.

- Ah ! Capitaine ! s’écria le sous-officier. Il faut arrêter cette femme !

Elle s’exclama de surprise quand l’homme qu’elle avait bousculé empoigna son bras avec fermeté. Elle dressa son minois vers lui et son cœur arrêta de battre.

Deux émeraudes qu’encadrait une chevelure blonde parfaitement soignée et rangée avaient chuté contre elle.






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Les Feux du sacrifice


- La frégate de classe Rôdeur, placée sous mon commandement, sera baptisée…





Il était resté un moment tétanisé, sa main gantée un peu trop serrée autour du bras, les yeux écarquillés en contemplant la femme qu’on lui avait intimé d’arrêter. Dana.

- Qu’est-ce que tu…
- Capitaine !

Le sous-officier arriva à leur hauteur, légèrement essoufflé. C’était un quarren aux yeux perçants, aux tentacules gisant, bruns, sur le devant d’un uniforme impeccable, qu’arborait des galons de sergent. L’impérial considéra le hapien et l’uniforme de cérémonie : en plus des insignes impériaux alignés sur sa poitrine, il portait des gants noirs de velours, une casquette noire dans sa main libre, et sa veste était cintrée par une ceinture, dissimulant une chemise pourpre, boutonnée jusqu’au cou, devant rappeler les couleurs de l’Empire. Le quarren inclina respectueusement la tête avant de saisir Dana par l’autre bras.

- Merci mon capitaine, je vais m’en charger à partir de là.
- De quoi s’agit-il ? demanda Lloyd sans la lâcher non plus, tandis que derrière eux d’autres officiers s’avançaient dans ce même couloir pour apercevoir la scène étrange de cette femme à la robe dorée tenue par deux hommes comme une prisonnière.
- Une intruse… commença le sergent.
- Ce n’est pas une intruse, elle est avec moi.
- Ah. Mais c’est que le Vice-Amiral…
- Je vais lui dire, ne vous en faites pas.

Le quarren n’hésita pas une seule seconde. Il s’inclina de nouveau en s’excusant et disparut. Autour de Dana et Lloyd, d’autres officiers, vêtus comme le hapien, noyaient déjà les lieux et on jetait vers Dana des regards intéressés. Lloyd prit une inspiration en lâchant Dana, non sans lui intimer silencieusement d’avancer : derrière eux, des plus hauts gradés avançaient et il n’avait aucune envie de se retrouver pris dans les questions qui ne tarderaient pas à fuser.

Le couloir recracha le flot de nouveaux arrivants dans la salle principale ; une salle de cérémonie, que les tentures impériales décoraient de façon grandiose. Mais le hapien vit à peine cela. Il s’était avancé avec Dana et put enfin baisser les yeux sur sa robe, qui lui disait quelque chose. La robe de Jabiim. Il posa un bref instant le regard sur les courbes de l’Inquisitrice mais ne fit aucun commentaire. Soudain, devant eux, un haut-gradé aux tempes grisonnantes, qui sirotaient un verre de vin.

- Oh, tiens, vous nous ramenez… Ah, comment a-t-elle dit… Dana Hickpens, capitaine ?

Le hapien resta un bref instant interloqué. Hickpens ? Ça voulait dire : couverture. Elle était en mission. Il se reprit rapidement et tendit la main pour serrer celle de l’officier supérieur.

- Vice-Amiral Sierra, c’est un honneur de vous rencontrer. Ma… demi-sœur est venue me faire une surprise en souhaitant assister à la cérémonie, elle ne pensait pas à mal.
- Je vois, fit le gradé avec un petit sourire amusé. Vous avez raison, madame, de penser à votre famille. Et vous êtes ? ajouta-t-il à l’attention du hapien.
- Lloyd Hope, vice-amiral.
- Oh ! s’exclama l’officier avec un petit air surpris. Alors c’est vous le… Enfin le…

Le hapien serra sa mâchoire en un sourire contrit.

- Le Chien du Castellan ? Oui, c’est moi, grogna-t-il en tâchant de rester poli.
- Ha ha, s’amusa Sierra. Cela veut-il dire que Darth Laduim sera présent ce soir ?
- Non, non. Son excellence est très occupée. Et je ne suis qu’un officier parmi d’autres dans la Marine, désormais.
- Oh, vous parviendrez difficilement à vous faire oublier comme ça, commenta l’homme en se tournant vers l’estrade, où certains officiers prenaient déjà place. C’est le problème de la réputation, voyez-vous ; on a l’impression qu’on laisse une trace derrière soi, mais c’est plutôt devant que cela se passe : tous les hommes et les femmes de votre nouveau bâtiment auront une opinion sur vous avant même que vous ayez posé le pied sur le navire. Un paramètre de plus à gérer pour vous, en somme.

Lloyd répondit à ces mots de sagesse par un bref sourire courtois. Il espérait que le vice-amiral Sierra s’intéresserait à quelqu’un d’autre pour qu’il pût enfin parler à Dana – ce n’était pas le genre d’officier auquel on faussait compagnie – mais l’officier resta planté là, à côté d’eux, les minutes suivantes, et le hapien fut obligé de se décider à se rendre à son tour sur l’estrade, où les officiers à promouvoir s’alignaient. Les deux émeraudes percutèrent un bref instant les prunelles dorées de Dana, avant qu’il ne la laissât là, en compagnie du vice-amiral, pour aller grimper les marches de l’estrade.






Ils étaient une vingtaine, à porter ce même uniforme de cérémonie, de toutes races mais surtout des humains, de tous âges, des hommes comme des femmes, alignés sous les bannières de l’Empire, devant un public en tenue de gala. Pour le hapien, qui s’efforçait de tenir la posture du garde-à-vous comme les autres, de garder les yeux droit devant lui, il était impossible de ne pas voir la tâche dorée dans la périphérie de son regard. Il avait aperçu, aussi, l’Inquisiteur Kedrod à proximité d’un buffet. Ils étaient en mission ensemble. Il ne fallait pas y penser. La cérémonie serait vite terminée. Il serrerait quelques mains, resterait une heure ou deux, pour montrer qu’il était bien là, puis il s’éclipserait sans dire au revoir. Il avait déjà dit au revoir une fois, et avait eu du mal à s’en remettre, s’il s’en était remis. Alors recommencer, ce n’était pas possible. Dana était occupée. Il fallait qu’il s’occupât de ses affaires. Ne t’en mêle pas, Lloyd.

- Capitaine Lloyd Hope.

Il était le troisième à être appelé sur le devant de l’estrade. Comme les autres, il s’avança, gratifia l’amiral – un grand zabrak à la peau claire et aux rides marquant son front – d’un salut impérial.

- Capitaine, veuillez décliner votre identité, votre matricule, le nom de l’officier de mentorat que vous avez choisi, et le nom de baptême de votre bâtiment.

Au pied de l’estrade, le verre à la main, les convives écoutaient tranquillement les annonces, que l’on ponctuait parfois d’applaudissements, notamment lorsque les familles des concernés s’étaient présentés pour l’occasion. Pour Lloyd Hope, on s’était tu poliment. Il n’y avait pas de famille ou de camarades de l’armée venus saluer la promotion.

- Lloyd Hope, annonça-t-il. Né le le 22 kelona 21.540 dans le Consortium d’Hapès, matricule 128-3312. Mentorat sollicité auprès de l’Amiral Horakk Antarxarxès.

Il y eut quelques murmures. Antarxarxès, directement sous le mentorat d’un amiral. Les Sith étaient pistonnés, de toute façon, c’était bien connu. Sinon, pourquoi un tel officier aurait accepté de mentorer un tel larbin du Conseil Noir ? Le hapien n’entendit pas les commentaires, il les devinait. Ça ne le tracassait pas. Les rumeurs étaient ce qu’elles étaient. C’était autre chose qui le gênait. Mais il était trop tard.

- La frégate de classe Rôdeur, placée sous mon commandement, sera baptisée… Melantha.






Le temps de faire passer tous les nouveaux promus, de leur faire prêter serment, que les clichés destinés à la propagande impériale fussent faits, une heure s’écoula sans que Lloyd ne put descendre de l’estrade. Quand enfin il fut libéré, ses yeux ne purent s’empêcher de chercher la robe dorée, mais elle n’était plus à la même place. Il se laissa porter dans la salle par le flot des officiers qui descendaient rejoindre les leurs. Un serveur passa, lui proposa une coupe d’un alcool à bulles qu’il accepta avant d’aller se poster en périphérie de la salle, pour s’accouder, mal à l’aise, à l’une des tables rondes surélevées, prévues pour grignoter debout. Comme il ne la voyait toujours pas, il supposa qu’elle était partie. Il se décida à tremper ses lèvres dans le liquide.

Evidemment, c’était quand il buvait qu’elle réapparaissait, sa robe dorée réhaussant la couleur de ses grands yeux magnifiques. Une robe un peu tendue sur son corps dont les courbes s’étaient accentuées. Il reposa un peu brutalement le verre en se redressant, façon je me bourre pas la gueule je vois pas de quoi tu parles. Il y eut un moment de malaise.

- Alors t’es… T’es en mission ? commenta-t-il comme s’il voulait proposer une conversation anodine.

Ses yeux glissèrent plus bas, sur le ventre de l’Inquisitrice. Mais il ne savait pas s’il avait le droit de faire allusion à ce petit détail qui crevait les yeux. Tous les commentaires ou questions auxquels il pensait lui semblait ressembler à un début d’hostilités qu’il n’avait pas à cœur de mener.



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Les Feux du sacrifice

Melantha, c’est un nom parfait pour une frégate.






Elle ne répondit pas tout de suite, avisant le verre qu’il avait reposé. Tout un tas de jugement lui traversa le crâne : alcoolique, lâche. Elle prit une grande inspiration, tâchant de se calmer. Ce n’était qu’une coupe d’un breuvage alcoolisée comme il en transitait des dizaines de mains en mains. C’était une fête, après tout. On honorait les officiers impériaux et elle n’aurait jamais dû être là, en tenue de soirée, maquillée comme une princesse, coiffée comme une reine.

Devant son miroir, des heures plus tôt, elle avait défini ses boucles écarlates sans quitter la photographie du regard, pensive. Elle n’avait su pourquoi elle avait subitement décidé de mettre plus de rouge à lèvres, plus de khôl, plus de blush pour faire briller ses pommettes féminines. Quelque part une petite voix s’était moquée d’elle, qui se faisait si belle parce qu’elle espérait le revoir. Alors, elle avait eu honte et avait ressenti une faiblesse coupable. Elle avait pesé le pour et le contre : fuir, affronter. Partir ou rester. Elle aurait eu le temps, avant que Runà, ne le sache d’embarquer dans un transport pour une destination très lointaine. Elle aurait laissé Lloyd Hope, Mat’aenna, l’Empire. Dana s’imaginait très bien déserter à son tour, s’accorder le répit d’une autre vie. Elle ne connaîtrait plus la solitude. Elle aurait deux enfants pour briser cette bulle solitaire qui l’étouffait. Quand elle avait finalement chassé cette pensée absurde pour prendre la décision de servir, elle avait détaché la photographie du miroir et décroché la guirlande.

Maintenant que la clameur des festivités revenait brutalement à ses oreilles, elle tressaillit.

- T’avais vraiment une face de mynock sur cette scène, souffla-t-elle avant de le prendre par le coude pour l’entraîner à l’écart.

Il y avait le risque que Kedrod comprenne qu’elle avait prétexté le soutenir ce soir pour couvrir un autre motif impérieux : revoir Hope. Ses doigts s’enfonçaient dans le velours de l’uniforme impeccable et leur vernis pourpre captait la lueur les lustres étincelant. Elle l’aida à naviguer entre les convives assez nombreux pour dresser une forêt de silhouettes autour d’eux et les protéger de l’attention du zabrak ou du Vice-Amiral Sierra. Les deux étaient d’ailleurs en pleine conversation côté buffet.

Dana l’avait entraîné au pied de l’estrade où l’orchestre avait repris place pour lancer la mélodie d’une valse. Elle porta un regard circulaire vers les duos téméraires qui s’enlaçaient dans le respect des convenances pour débuter la danse. Sa poitrine se souleva tandis qu’elle inspirait profondément, guidant la paume du hapien contre sa taille et lui saisissant l’autre main. Ses doigts fins s’appuyaient sur l’épaule de son cavalier improvisé.

- C’est Kedrod qui est en mission, pas moi, répondit-elle après avoir aligné un pas incertain.
Se concentrer sur la valse et parler étaient deux choses extrêmement incompatibles, mais elle relevait le défi avec un certain courage et une élégance colorée par sa chevelure qui cascadait sur elle, comme des rivières de rubis. Les instruments à vent s’emballèrent brièvement et il fallut accélérer la cadence durant quelques secondes.

- Je devais te parler. Absolument. Tu poseras des questions que quand j’aurais terminé ok ? Darth Orcus, tu te rappelles ? C’est visiblement un traître renégat. Il a…il a le virus, en sa possession. Le virus.

Parce qu’il avait froncé les sourcils, prêt à la questionner, elle l’entraîna dans un pas plus technique, l’avertissant du regard.

- Il va s’en servir, j’dois aller subtiliser l’échantillon chez lui avant qu’il le fasse mais…Mat’aenna, c’est là qu’elle travaille. J’ai pas beaucoup de temps, mais je voulais te prévenir, pour que tu la sortes de là avant que ça dégénère.

Elle dût s’éloigner de lui quand les cavaliers firent virevolter leurs partenaires et les paroles de l’Inquisitrice, comme un électrochoc avaient tendu le capitaine qui s’était empressé de la ramener à lui, un peu maladroitement. Ils se percutèrent avec moins d’élégance que les couples alentours, mais n’en semblaient pas contrariés. L’Inquisitrice se concentraient sur les données qu’elle avait passé à rassembler et à lire la veille, dans sa chambre spartiate. Elle avait épluché le dossier préliminaire pour la mission, noté les failles de la demeure, les possibilités pour la twi’lek d’en sortir sans donner l’alerte.

- Le jardin d’Orcus donne sur le fleuve. Y’a moyen que tu t’y planques en boatspeeder. Dès que je serai à l’intérieur, je dirai à Mat’aenna de fuir vers le fond du jardin. Tu la récupères, vous remontez le fleuve. Tu la planques dans le Sans-Visage, où tu veux. C’est comme ça.

Nouveau mouvement ample où ils détachèrent leurs mains. Shar était gratifiée d’attentions admiratives et on murmurait que, pour une femme dans sa condition physique, elle se débrouillait bien. Quand les phalanges gantées de Lloyd s’arrimèrent de nouveau à sa taille, un frisson courut le long de son échine.

- J’occuperai Orcus s’il est là. T’as pas à t’inquiéter pour ça.

L’orchestre souffla l’ultime note de la valse et les applaudissements succédèrent, comme si tout le monde ovationnait le plan absurde de Dana Shar. Elle retira lentement sa main de l’épaule du Sith pour soutenir son propre ventre, un peu essoufflée par l’effort de la danse, maintenant que l’adrénaline retombait. Le jardin du manoir, pensait-elle en massant la courbe de son ventre, une légère grimace sur le minois, était une faille majeure de la demeure, mais n’en restait pas moins un terrain dangereux et impraticable : pas de droïde de combat, ou de soldats qui patrouillaient dans la végétation sombre, mais des bêtes sauvages et un terrain accidenté qui menait jusqu’au fleuve. Entre l’arrière du manoir et la berge, il fallait compter six cents bons mètres qui traversaient une forêt dense et des marécages artificiels. Un endroit charmant et romantique. Les musiciens accordaient leur instrument pour une future volte et elle s’éloigna s’appuyant sur un coin de la scène pour soulager son dos. L’ombre du hapien ne tarda pas à la recouvrir et elle s’efforça de se redresser.

- Voilà, j’ai terminé. Va falloir faire vite. J’serai seule pour ce travail. Kedrod est prié de pas m’accompagner.

Elle aurait aimé lui dire autre chose ce soir-là. Melantha, c’est un nom parfait pour une frégate. T’étais plutôt bel homme sur cette extrade, l’allure d’un vrai capitaine. Cependant avant de venir à cette réception où elle officiait parmi les persona non grata, elle avait entassé la guirlande et la photographie au fond d’un bidon d’acier dans l’une des cours du Grand Temple. Et elle y avait jeté son nouveau briquet pour y mettre le feu. Les flammes avaient dansé dans les larmes qui avaient inondé ses yeux. Elle se remémorait le bruit sec des ampoules qui explosaient, l’une après l’autre, sous la pression de la chaleur, l’odeur plastifiée du câble de la guirlande qui fondait.





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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


Elle n’était pas venue le voir pour le féliciter, ou pour lui dire qu’elle comptait garder l’enfant et qu’elle voulait qu’il ait un père.





Le hapien s’était disposé de façon à cacher de son corps l’Inquisitrice au reste de la salle, et ses poings fermés marquaient sa contrariété, parce qu’il sentait dans son dos les regards – et il était contrarié pour plein d’autres raisons aussi, dans lesquelles il n’arrivait pas spécialement à mettre de l’ordre.
En tous les cas, si Dana avait voulu rester discrète par rapport à Kedrod, c’était fichu, car ils avaient été l’objet de beaucoup d’attention : parce qu’elle était enceinte, parce qu’elle était belle parmi les couples, parce qu’il avait merdé tous ses pas sous le coup de toutes ces informations qui lui étaient tombé sur la figure au milieu de cette valse, et finalement aussi parce qu’elle avait eu l’air de souffrir, se tenant le dos après leur danse.

L’orchestre avait enchaîné sur le morceau suivant, et de nouveaux couples se formaient dans son dos. Il espéra que cela détournerait l’attention d’eux. Il prit une brève inspiration, prêt à remettre en cause les plans de Dana et à poser des questions, mais finalement il se ravisa. Ses yeux parcoururent un instant la jeune femme, sourcils froncés.

- Ok.

Voilà, c’était tout ce qu’il avait à dire. Après tout, ses décisions la concernant avaient déjà été prises. Il n’allait pas s’imposer. Elle n’était pas venue le voir pour le féliciter, ou pour lui dire qu’elle comptait garder l’enfant et qu’elle voulait qu’il ait un père, non. Pourquoi pensait-il même à ce genre de choses ? Elle était venue parce qu’elle avait eu des nouvelles de Mat’aenna. C’était fairplay.

- Accorde-moi une heure, le temps de trouver un boatspeeder, dit-il, jetant un regard autour d’eux, cherchant Kedrod du regard.

Il l’aperçut à proximité d’un buffet à rôder consciencieusement. Le hapien soupira en regardant Dana de nouveau. Elle était joliment apprêtée. Orcus le remarquerait certainement aussi, mais il tâcha de ne pas y penser.

- Profites-en pour manger un morceau, pars bien après moi, histoire que Kedrod ne nous soupçonne pas. Il n’est pas impossible qu’après…

Lloyd s’humecta les lèvres en s’interrompant. Déjà les hypothèses affluaient, concernant la réaction de Laduim à la disparition de Mat’, concernant ce qu’il allait devoir faire. Mais Dana voulait-elle entendre cela ? Il fallait compartimenter, désormais. Dana n’était plus sa coéquipière. Elle ne faisait que lui donner un coup de pouce, elle se fichait de ce qu’il adviendrait d’eux ensuite. Il décida donc d’abandonner sa phrase en suspens.

- Bref, merci. Et bonne chance pour Orcus. Montre-moi l’adresse, et je file.









Sur le fleuve qui traversait Kaas City, les ponts du centre-ville formaient des arches lumineuses, et l’eau tranquille reflétaient les décorations en milliers d’éclats blancs qui disparaissaient dans un brouillard épais à mesure que le regard suivait le déroulement du ruban que formait le cours d’eau. La nuit, sur Dromund Kaas, était toujours opaque, dense, d’où ce besoin de lumières sur chacun des ponts ; sauf ceux des quartiers périphériques, moins urbains, un peu abandonnés, où deux Sith s’étaient réfugiés des mois plus tôt. Et dire qu’à quelques kilomètres à peine, il y avait eu Mat’aenna, et qu’il ne le savait pas.

Une barge étroite comme une gondole mais plate comme une péniche remontait le courant dans la nuit, ses moteurs glougloutant silencieusement sous la surface. A bord, il n’y avait de la place que pour quelques caisses. Deux silhouettes, dont l’une était particulièrement rigide, se découpait au-dessus de l’eau, postées sur cet esquif que Lloyd avait choisi à la place d’un boatspeeder. Moins rapide, mais beaucoup plus silencieux et discret.

Voilà. Six ans plus tard, il allait chercher Mat’aenna. Une bonne fois pour toutes. Ils s’étaient vus au cours de ces six années, à raison d’une à deux fois par an, quand Darth Laduim le permettait. Le twi’lek avait veillé à ce que Lloyd, dans ces intervalles, ne pût oublier sa bien-aimée, en utilisant des méthodes que seul un Sith de son rang pouvait assumer. Et voilà, cette longue période de solitude allait toucher à sa fin. Ce qui commencerait ensuite, le hapien n’en avait aucune idée.

- On y est presque, souffla-t-il à l’attention de celui qui l’accompagnait. Eteins les moteurs.

Il avait eu le temps de repasser au vaisseau se changer à la hâte. Abandonner l’uniforme de cérémonie, qui le rendait repérable, celui dans lequel de toutes façons il avait une face de mynock. Et il se retrouvait avec ses vêtements usuels, plus pratiques, et son sabre laser à sa ceinture.
Les lumières du centre-ville, derrière eux, avaient disparu dans le brouillard. Il devenait difficile de s’orienter. Mais on devinait sur les rives les fenêtres illuminées de quelques demeures imposantes.
La barge percuta la rive bétonnée sous un nuage de branchages odorants. Le hapien attrapa l’une des branches solides, et fit passer autour de celle-ci un cordage léger, qu’il noua rapidement. Le petit esquif était désormais retenu et ne dériverait pas avec le courant. Le hapien dut crapahuter pour grimper le long de ce qui ressemblait à un rempart bétonné, s’aidant des branches pour réussir à atteindre le haut du mur. Il s’assit à califourchon, et ses yeux fouillèrent l’obscurité. Le jardin d’Orcus ressemblait plutôt à un morceau de jungle en pleine ville. Parfait pour se dissimuler, mais il redoutait ce qui pouvait s’y trouver. Lloyd se pencha vers le fleuve, où l’esquif se maintenait deux mètres plus bas.

- ES, chuchota-t-il, tu restes là, pas de bruit. Si Mat’aenna vient, tu la fais embarquer. Tu lui dis que j’assure nos arrières. Et vous partez immédiatement, vous ne m’attendez pas. Vous vous laissez porter par le courant pour retourner au centre-ville, vous débarquez et tu la ramènes au Sans Visage. Sans détour. Compris ?
- Ordres enregistrés, Lloyd Hope, tonna ES-72, ses deux yeux rouges visibles dans la nuit.
- Shhh, baisse ton volume ES !
- Volume baissé, Lloyd Hope.

Le hapien laissa échapper un soupir avant de se laisser glisser du mur, à l’intérieur de l’enceinte. Il atterrit de l’autre côté dans un terreau humide, au milieu des branches, et resta longuement aux aguets avant de commencer à progresser, pour trouver un chemin vers la demeure, le plus silencieusement possible. Et bonne chance pour Orcus. Dana avait-elle vraiment cru à sa déclaration ? Il n'était pas question de la laisser risquer sa vie, encore moins dans son état, sans qu'il s'en mêlât. C'est Mat' qui va être contente, tiens. Capitaine pervers arrive pour tout foutre en l'air, se gronda-t-il intérieurement, songeant à ce qu'aucune des deux femmes n'allait approuver son petit débarquement improvisé. Mais au point où il en était, de toute façon...

Et plus il avançait, plus son cœur battait fort, plus ses membres tremblaient.

Arrête, putain, commence pas.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Oh Dana Shar, pathétique créature.







Ok.
Et bonne chance pour Orcus.


Les mots de Lloyd tintaient désagréablement dans sa boîte crânienne. Elle n’aurait pas dû tant manger après son départ car elle n’était pas sûre de trouver chez le Seigneur Orcus de quoi lui retourner les tripes. Mais la faim la dévorait aussi sûrement que les fœtus prenaient de la place dans son ventre. Et avoir faim la rendait irascible et irraisonnable. Il était hors de question de compromettre une mission de cette envergure par orgueil. Elle avait décidé d’en terminer avec le virus, de refermer définitivement le livre de cette horreur en clôturant le dernier chapitre cette nuit. Puisqu’elle avait différé son départ de la réception, son passage au Temple se fit le temps d’un éclair. Elle avait enfilé sa bure sombre par-dessus la dorure de sa robe moulante et avait vissé sa vibro-dague à son avant-bras droit, la dissimulant savamment sous sa manche ample. Depuis son datapad, elle avait fait parvenir à Darth Runà un message l’informant du début de la mission.


Quelque part, dans l’une des nombreuses cours du Grand Temple, une grille s’actionna. Quatre yeux écarlates fustigèrent l’obscurité de la nuit et des babines contrariées dévoilèrent des rangées irrégulières de crocs. Luis avisa sa maîtresse qui se dressait, droite et glaciale dans l’air embrumé de Kaas City. Grâce à la Force qu’elle avait connectée à l’animal, elle put comprendre sa frustration d’avoir été enfermé dans une cage, à tourner en rond, à manger de la nourriture décrépie. Le nexu exprima sa frustration d’un grognement sordide et elle se dépêcha d’écraser la Force dans son esprit sauvage pour lui rappeler qui dominait.

- Tu vas te dégourdir les jambes ce soir, Luis.
Aouh
- Et tu auras un immense terrain de chasse, sourit-elle à l’ombre de sa large capuche rabattue sur sa figure maquillée.

Les soldats du Temple s’écartèrent avec déférence lorsqu’elle emprunta le chemin de la sortie, accompagnée de sa bête. Le seul être dont possédait la loyauté absolue. Il n’était visiblement plus nécessaire de compter sur Hope. Peut-être qu’un jour, les lettres qui ancraient la courbe de son sein n’auraient plus de signification pour elle ; qu’elles ne seraient qu’une cicatrice de plus dans sa chair, provoquée par l’abandon. Parce que la Force les connectait, Luis partagea l’amertume et la tristesse de la Sith. D’un léger bond en avant, il cogna sa tête contre la paume tremblante de l’Inquisitrice, comme pour lui signifier qu’il comprenait, lui aussi.







Dans la domesticité d’un manoir du quartier Nord de Kaas City, un silence absolu régnait. C’était une demeure à l’architecture luxueuse et sombre, réplique parfaite de dizaines d’autres qui constituaient une zone résidentielle placée sous haute-
surveillance. Afin d’y accéder, Dana dut présenter sa carte holographique d’identité, celle qui signait son appartenant au Clergé Sith. Les check-points n’avaient pas été un obstacle outre-mesure, bien que les miliciens garants des allées et venues avaient eu pour le nexu une attention suspecte. Cependant, on se gardait bien de contrarier une Inquisitrice Sith mandatée par les autorités cléricales. Maintenant qu’elle affrontait l’ombre du manoir d’Orcus, Dana avait peur. Elle était terrifiée et Luis s’aplatit au sol, contaminé par cette terreur irrationnelle. Elle leva ses yeux sur les étendards noirs qui retombaient sur la façade en acier et admira le symbole impérial dont ils étaient brodés. Darth Orcus était un traître. Comment l’aurait pris Damaya Shar ? Son propre époux, trahir la cause impériale. Les portes s’ouvrirent soudainement et Dana Shar fut avalée par la noirceur des lieux. Le bout de la queue du nexu disparut en dernier, glissant sur le sol avant de s’évaporer aussi.


- Je m’attendais à ta venue.

La voix d’Orcus avait vibré dans le hall principal. Dana était debout au centre d’un grand tapis écarlates aux arabesques noires de grandes qualités. Leurs finesses étaient telles qu’elles formaient un pattern harmonieux que l’Inquisitrice regrettait de fouler au sol. L’endroit était décoré sobrement, mais avec un goût qui ne fut pas sans lui remémorer sa sœur défunte. Le Seigneur Sith apparut soudainement en haut d’une volée d’escaliers qui menaient au reste de la demeure. Combien de fois Damaya avait-elle foulé le sol de cette demeure qui était devenue la sienne, pour voir cet être détestable se présenter à elle.

- Et je sais pourquoi cette venue. Cette bure d’Inquisitrice que tu portes et que tu ne mérites pas, ce regard suffisant, cet animal ridicule que ta chienne de sœur avait en horreur.

Elle encaissa la première insulte avec un calme qui l’étonna, mais les déductions d’Orcus l’avaient clouées misérablement dans un silence coupable. Avait-il deviné ? Des informateurs auraient trahi sa mission ? A la lueur des candélabres à plasma qui éclairaient le grand hall autant qu’ils le réchauffaient, l’homme fut enfin en face d’elle, la dépassant d’une bonne tête, l’écrasant de son aura supérieure.

- Ce n’est pas ici que tu trouveras des réponses, sur le sort de cette traîtresse. Runà m’a indiqué que tu t’es remis à enquêter sur sa mort, et m’a prévenue que tu viendrais comme une larve, fouiner dans ma demeure.

Le soulagement manqua de la faire chavirer. Il pensait que sa présence n’était motivée que par la recherche d’une vérité ; celle du décès de Damaya. Elle s’engageait en terrain glissant, compliqué, dangereux. Elle risquait de perdre l’équilibre et d’être entraînée dans une spirale de haine qui la dépassait complètement. Il fallait se concentrer sur les objectifs de sa mission : le virus.

- J’ai pas le droit de rendre visite à mon beau-frère, pour lui parler du bon vieux temps, hein ? Vous pouvez peut-être juste me laisser faire mon petit pèlerinage et fouiner, puisque je trouverais rien, lâcha-t-elle avec un mépris glacial.

Il tendit son bras et empoigna la gorge de Dana pour la soulever. Ses pieds quittèrent le sol et elle manqua rapidement d’air. Il la plaqua avec violence contre un mur, la contemplant au travers de la visière assombrie de son casque. Elle attrapa comme elle put le poignet qui l’étranglait, dans l’espoir de lui faire lâcher prise. Luis souhaita bondir mais elle l’en empêcha en faisant résonner la Force en lui.

- J’ai à faire, une réunion importante chez le Seigneur Varnak. Fouille autant que tu veux, mais si à mon retour, tu es encore là…

Il avança d’un pas, se plaquant à elle.

- Oh Dana Shar, pathétique créature, si tu es encore là à mon retour. Je t’ouvrirai en deux de toutes les manières possibles et je garderai ta tête en souvenir de cette chère Damaya.

Elle tomba à genou quand il la relâcha et se mit à tousser, massant son cou à la peau rougie. Une quinte de toux la secoua alors quand elle arriva enfin à inspirer de l’oxygène qui brûla sa trachée compressée. L’angoisse continuait de lui serrer la gorge, reliquat fantôme de la poigne du Seigneur. Ce dernier avait reculé pour donner des instructions à ses domestiques demeurés dans l’ombre et il quitta sa demeure. Pour une heure ou dix. Elle ne savait pas combien de temps elle avait devant elle, mais elle ne pouvait pas se permettre de rester plus longtemps à terre. Elle parcourut un ou deux mètres à quatre pattes avant de réussir à se redresser grâce à l’appui d’un meuble. Elle toussa plus fort, crachant un peu de salive brûlante, une main soutenant son petit ventre à travers sa bure, dans un geste pathétique pour rassurer sa progéniture. Ca, c'était oncle Orcus. Sympa, non ? Le genre à vous couvrir de cadeaux.

Et bonne chance avec Orcus.

Lloyd ne croyait pas si bien dire.


Il y eût du mouvement et au travers de sa vision encore un peu brouillée, elle devinait qu’on lui tendait un verre d’eau. Ses prunelles vacillèrent avant de réussir à se focaliser sur la personne qui lui venait en aide. Deux mains vertes tenaient en coupe le gobelet où rutilaient la surface d’une eau fraîche. Dana releva son attention, suivit la courbe de deux bras fins au derme olivâtre, découvrirent la pointe de lekkus doux qui s’élargissaient pour encadrer un visage qu’elle avait déjà admiré, sur papier glacé.

- Madame ?

Shar fut incapable de parler. Ses yeux parlaient pour elles et fixaient le moindre détail : des rubans noirs qui s’ourlaient avec élégance contre les lekkus graciles, à ses épaules étroites dévoilées par une robe légère, comme celles que portaient les esclaves de Ch’Hodos. Là encore, elle reconnut la touche de Damaya Shar qui avait sûrement décoré cette maison, habillé ses domestiques selon ses goûts. Des goûts qui avaient survécu à sa mort et qu’Orcus avaient conservé, comme on gardait jalousement pour soi un précieux trésor.

Un instant, la jalousie prit le pas sur la raison et étreignit son coeur avec une force qui la fit trembler. Une part d'elle, la moins glorieuse, la plus sombre, lui soufflait de ne pas se préoccuper de Mat'aenna, de quitter l'endroit, de laisser Darth Orcus mener son oeuvre sinistre dans l'espoir que Mat'aenna succombe parmi les milliers d'autres.

- Madame ?

La voix féminine bourdonna subitement à ses oreilles et elle tressaillit.

- Dana. Il faut m’appeler Dana.
- J’peux pas me permettre. Si le Maître apprenait ça, j’aurais des problèmes.
- Si tu quittes pas cette maison, ce sera le cadet de tes soucis.

Un silence gênant ponctua son avertissement. La domestique avait retroussé les lèvres, dans une moue contrariée. Shar comprit qu’elle ne pourrait pas décemment tout dévoiler, Mat’aenna ne la croirait pas et se méfierait.

- Mon nexu. Il a besoin de faire….ses petites affaires, dans le jardin. Ou bien il va salir le tapis et tout le reste. Emmène-le dans le jardin.

La twil’ek porta deux grands yeux ronds effarés vers la créature qui s’était mise à tourner en rond, pistant l’odeur d’Orcus.

- Il est dressé, il te fera rien, t’as ma parole. Alors maintenant, amène-le dehors. Ou il va vraiment être furieux.
- Bien…

Luis. Tu l’attires au bout du jardin, tout au bout. Et qu’il lui arrive rien.

Dana accepta enfin le verre d’eau et observa Mat’aenna guider avec précaution le nexu vers le chemin des jardins, un peu blême. Sitôt qu’ils disparurent, Shar avisa des escaliers et s’y précipita dans l’espoir de commencer à fouiller la maison.








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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


Il était là, pantelant, et elle semblait le regarder avec le même désarroi.





Lloyd s’enfonçait à pas de loup dans le jardin. Des allées de gravillons formaient des serpents au milieu d’une végétation sombre et dévorante, d’où n’émergeait aucune lumière, et il peinait à s’orienter. Les hapiens disposaient d’une vision nocturne amoindrie en comparaison des humains du reste de la galaxie, et il se maudit intérieurement de ne pas avoir pensé à emmener une torche ou quelque chose de ce genre. Parfois, entre les feuillages, il apercevait au loin les rectangles jaunes des fenêtres illuminées de la demeure, et ses bottes crissaient de nouveau sur les cailloux.

Quand du bruit parvint au bout d’une allée, la Force l’alertant également d’une présence imminente, il se hâta de s’enfoncer entre les troncs, grimaçant sous l’effet des lianes qui l’enveloppèrent, glissèrent désagréablement dans son col. Cette végétation était visqueuse et il avait parfois la sensation qu’elle se mouvait à son contact. Mais il ne savait comment était sécurisée la demeure et il préféra faire taire la répulsion qui l’assaillait, s’efforçait de rejeter les branches envahissantes en silence autour de lui, quand…

- Hé, le nexu, pas si loin ! Reviens par ici !

Lloyd se figea. Cette voix. C’était Mat’. Il en était sûr. Elle était là, ça y était. Qu’est-ce qu’il allait bien pouvoir dire ?
Les pas du nexu crissèrent tandis que la bête trottait et Lloyd sentait ses jambes s’ankyloser. Il ne voyait pas bien, mais il devinait la forme de la créature et au-delà, la forme d’une femme qui suivait le nexu comme elle le pouvait.
Il retint sa respiration.

Il n’allait pas l’intercepter, voilà, c’était plus simple, elle descendrait jusqu’à la barque, ES-72 la prendrait avec lui et d’ici là il réfléchirait à quoi lui dire et à comment explique les ch…

- Non, le nexu, pas par là !

Luis avait subitement bondi dans les fourrés et l’instant suivant, Lloyd reçut une bourrade qui le fit chuter en arrière. Le nexu était déjà sur lui quand il se retrouva le séant dans la terre, à frotter son crâne vigoureux contre le torse du hapien. Lloyd essaya de le repousser maladroitement !

- Shh, non, Luis, va-t-en !
- AOUW.
- Laisse-moi, barre-toi !
- Il… Il y a quelqu’un ?

Lloyd entendit le feuillage s’écarter plus qu’il ne le vit. La silhouette de la twi’lek se découpait dans la nuit, ses deux lekkus reposant tranquillement derrière ses épaules chétives.

- Qui… Qui est-ce ?!

La voix de Mat’ tremblait de terreur. Elle sembla chercher quelque chose dans ses vêtements légers, et Lloyd devina qu’elle cherchait à donner l’alerte.

- Non Mat’ arrête ! C’est moi !

La twi’lek s’immobilisa.

- C’est Lloyd.
- Qu… Lloyd ?!
- Oui, je suis venu te récupérer pour… Luis putain arrête !

Le hapien repoussa le nexu qui venait de le gratifier d’un coup de langue sur le visage et il se hâta de se relever et de s’essuyer d’un revers de manche. La silhouette de Mat’ avait reculé prestement et elle restait silencieuse, comme si elle n’en croyait pas ses yeux. Lloyd réussit à sortir de la végétation à son tour. Dans la nuit, il ne la voyait presque pas, si ce n’était ses yeux dont il devinait les nuances bleu océan, là où son esprit replaçait les bribes de souvenirs sur une réalité qui lui échappait à demi. Il sentait ses membres trembler, c’était absurde, ces retrouvailles, combien de fois en avait-il rêvé ? Passionnées, ou sereines. Ce n’était rien de tout ça. Il était là, pantelant, et elle semblait le regarder avec le même désarroi.

- Je… Lloyd, tu es venu ? répéta-t-elle avant de regarder autour d’elle, comme si elle s’était attendue à ce que surgisse quelqu’un venu lui signaler qu’il ne s’agissait que d’une mauvaise blague. Mais comment…

Mais ils étaient seuls, à l’exception du nexu qui se frotta une dernière fois à la jambe du hapien avant de s’intéresser à la végétation environnante.

- Dana Shar, l’Inquisitrice, on est… de mèche, disons. Ecoute, heu, tout en bas du jardin, il y a…

Il s’interrompit parce que subitement Mat’ s’était approchée pour se pendre à son cou. Elle l’avait enlacé et enfoui son visage silencieux contre son torse, et il referma à son tour ses bras autour de ce petit corps fragile. Cette odeur. Elle était familière et étrangère à la fois. Il sentait ses membres trembler, sa bouche s’assécher et il ne pouvait plus rien dire. Leur étreinte ne dura que quelques secondes, avant qu’il ne se décide à la séparer de lui, avant que tout ne devienne n’importe quoi. Il l’arracha doucement à cette étreinte, entendit le bref reniflement de la twi’lek émue quand il la maintint devant lui par les épaules.

- Ecoute, on n’a pas beaucoup de temps. Il faut que tu descendes tout en bas du jardin, il y a une barque avec un droïde, tu vas monter dessus et il t’emmènera à un vaisseau. Tu peux lui faire confiance, il est là pour te protéger.

Dans l’obscurité, Mat’aenna releva ses prunelles vers le hapien.

- Mais… Je suis censée partir comme ça, sans prendre mes affaires ni… Et toi ? Tu ne viens pas ?
- Je te rejoindrai plus tard. Il faut que j’aide Dana avant. D’ailleurs, Orcus, ton maître. Tu l’as entendu parler d’un virus ? Nous devons le retrouver et le détruire.
- Que… Mais de quoi tu parles Lloyd ? Orcus est un monstre ! Il ne faut pas croiser son chemin. Il faut qu’on s’enfuie !
- Que tu t’enfuies, moi je suis un Sith, je me débrouillerai. Dis-moi juste ce que tu sais, est-ce que tu as entendu parler d’un virus ?
- Non, mais non Lloyd ! Orcus a un laboratoire mais vous ne pourrez pas rentrer, il faut connaître les accès, il est bien caché !
- Où ça, explique !
- Mais je peux pas expliquer, c’est trop compliqué, il faut faire tout un arrangement au sous-sol pour que ça s’ouvre. Lloyd, oublie cette histoire, Darth Orcus est beaucoup trop puissant pour toi ! L’Inquisitrice va se faire tuer si elle essaie d’entrer, et toi aussi. Soit on y va maintenant, soit je ne pars pas.
- Pourquoi se faire tuer ? C’est dangereux cette entrée ?
- Si on se trompe, c’est mortel, oui. C’est un genre de piège, pour quiconque fouillerait un peu trop pour accéder au laboratoire…
- Merde. Tu sais l’ouvrir ?
- Oui, mais…
- Alors viens. Viens avec moi, il faut que tu nous ouvres !
- Lloyd…

Mat’aenna recula dans la nuit, se dégageant des mains du hapien.

- Je vais me faire tuer, s’il découvre que j’ai ouvert sans son accord.
- Non, je suis là, je serai là pour te protéger.

Il devina la grimace de la twi’lek dans la nuit.

- Tu veux dire, comme tu m’as protégée jusqu’ici ?

Le hapien soupira, exaspéré.

- Mat’, j’t’en prie. Pas maintenant. On règlera nos comptes plus tard, promis. Mais Dana Shar, elle m’a aidée à te trouver, c’est grâce à elle que je peux te récupérer aujourd’hui, je peux pas la laisser se faire tuer à cause de ça, tu vois ? On sera deux Sith à te protéger, tu ne crains rien, je te jure. Viens m’aider, s’il te plaît.

Mat’aenna parut considérer la demande. Elle jeta un coup d’œil vers la demeure, avant de soupirer.

- On lui ouvre, pour l’aider, à cette Dana Shar, et ensuite on s’en va. Loin.
- Parfait.








Luis protestait avec des glapissements contrariés quand ils entrèrent à pas de loups dans la demeure. Mat’ menait le cortège en trottinant de ses pieds nus et soudain, ils se trouvèrent dans un grand salon illuminé, cossu, encadré d’escaliers majestueux qui grimpaient dans les étages supérieurs et plongeaient aussi dans l’obscurité des fondations du manoir. Des chandeliers artificiels illuminaient l’endroit.
Un bref instant, Lloyd sentit son cœur s’affoler. La twi’lek, cette fois, lui était parfaitement visible. Sa peau verte comme les champs d’Artorias, sa posture musculeuse et fine à la fois, son menton rond d’enfant grandie trop vite, ses lekkus qui frémissaient contre sa robe d’esclave. D’esclave. Le hapien prit plusieurs inspirations, s’efforçant de penser à autre chose, de regarder ailleurs.

- Par ici, chuchota la twi’lek.

Il la suivit jusqu’aux escaliers, et ils se mirent à descendre en essayant de ne pas faire de bruit.

Le sous-sol ressemblait à un musée. Mat’aenna appuya sur un interrupteur et de multiples statues et cages de verre s’illuminèrent, exposant là des morceaux de roche exotiques, ici des objets anciens. Les expositions formaient des allées aux formes inégales, qui jetaient des ombres suspectes. La twi’lek s’engagea de son pas léger, suivie du hapien. Lloyd s’immobilisa quand Mat’aenna s’arrêta devant une statue de marbre. Elle représentait une humaine aux longs cheveux, une Sith au visage élégant.

- Damaya, souffla le hapien interloqué.
- Quoi ?
- La statue, c’est… Une représentation de Damaya Shar.
- Oui, c’était sa femme. Comment tu sais ça ?
- Longue histoire. Comment on ouvre ?

Mais Mat’ ne répondit pas. Elle dévisageait Lloyd, comme elle aussi ne le voyait réellement que maintenant, sous les lampes blanches du musée étrange.

- Quoi ?
- La dernière fois que je t’ai vu en holo, t’étais pas si… Si abimé. Oh Lloyd.

La twi’lek avait subitement les yeux remplis de larmes. Elle tendit sa main douce pour la passer sur la joue du hapien en se rapprochant de lui. Il sentit l’air lui manquer.

- Ton visage a changé avec toutes ces… marques.
- C’est… C’est rien Mat’, c’est parce que j’ai eu quelques… missions agitées, récemment. Ça va partir, s’empressa-t-il de répondre en déglutissant.

Mat’aenna se rapprocha doucement de lui, amenant son visage attendri près du sien, et il voyait ces yeux bleu océan, il revoyait les mille baisers de leurs jeunes années.

















Et il revoyait ses mains serrées autour du cou jusqu’à ce que la mort étreignît la twi’lek écarquillée d'horreur.









- Mat’ !

Il la repoussa un peu brusquement, mais déjà la sueur perlait à la lisière de ses cheveux, le souffle lui manquait.

- Mat’, on n’a pas, on n’a pas le temps, on n’a…

La twi’lek parut un bref instant ébahie, avant de froncer les sourcils.

- Lloyd. Tu t’es pas fait soigner, c'est ça ?

C’était moins une question qu’une réprobation. Le hapien s’essuya le visage pour en faire disparaître l’humidité formée sur son front et ses tempes. Il avait si chaud, soudain.

- Non, non, j’ai pas eu l’temps, c’est compliqué, avec l’armée, j’peux pas avoir ce genre de faiblesse dans mon dossier, c’est pas…

Il s’interrompit parce que le visage de Mat’ s’était fermé.

- Comment tu as pu me mentir ? Tu avais promis ! Et tu comptes faire quoi exactement ? demanda-t-elle sèchement.
- J’sais pas. Enfin, pour toi, si si, je vais acheter une maison quelque part, on discutera de ça plus tard, ok ?
- Non, je veux dire, tu vas faire quoi pour nous ? Tu vas me foutre dans une maison et tu viendras me voir une fois par an ? C’est ça en gros la vie que tu me proposes, là ? Et en attendant je vais avoir peur toutes les nuits que Darth Orcus débarque pour me tuer parce que je t’ai ouvert son laboratoire ?

Le hapien grogna en se détournant. Il fit quelques pas pour s’éloigner en se prenant la tête dans les mains, avant de revenir vers elle, mâchoire serrée. Il cherchait ses putains de mots.

- Mat’, t’auras tout ce qu’il faut, tu seras plus obligée d’être l’esclave d’un type horrible, tu pourras faire tout ce que tu veux, tu voulais reprendre tes études non ? Tu pourras faire ça, et…
- MAIS LLOYD ! Ouvre les yeux !! Tu es venu me chercher sur Byss, pour me proposer une vie avec TOI !

Il soupira, amer, avant de se mordre la lèvre.

- Oui, je sais. Mais là tout de suite, c’est compliqué.
- Et ça va être compliqué longtemps de baiser ta compagne ?
- Parle pas comme ça !
- Non parce qu’à la limite, si c’était que ça, je veux bien, mais si tu peux même pas me regarder dans les yeux une minute, Lloyd, je préfère quitter l’Empire.
- Quoi ?!
- Tu m’as très bien entendue. Refaire ma vie sur un monde où j’aurais ma chance. Avoir un métier, être indépendante…
- Mais tu peux faire ça dans l’Empire !

Soudain le visage de Mat’ se contracta, ses yeux se remplirent de larmes et elle gifla le hapien de toutes ses forces. Lloyd recula en portant une main à sa joue, excédé.

- Qu’est-ce qui te prend ?!
- Il me prend que je suis en train de dire que je veux partir et que toi, tu me dis oui sans même promettre de faire l’effort de nous retrouver ! se mit-elle à sangloter bruyamment. Toutes ces années à t’attendre, à espérer que tu redeviennes celui qui veillait sur moi ! Tout ça pour quoi ?! Pour voir que tu en as rien à foutre ! Tu veux pas me récupérer pour m’aider, Lloyd ! Tu veux me récupérer pour avoir la conscience tranquille !

Le hapien soupira en fermant les yeux. Il ne savait pas quoi répondre. Une part de ce qu’elle disait était vrai. Mais une part seulement.

- Mat’, tenta-t-il à voix basse, espérant que leur conversation animée n’avait pas ameuté d’autres esclaves – ou pire, une Inquisitrice. J’ai attendu ce moment depuis des années, moi aussi, mais voilà, j’ai plein de problèmes sur les bras, et je veux pas les faire peser sur toi. Si tu veux… Si tu veux on… On réessaiera.

Les joues de la twi’lek étaient noyées de larmes, mais elle se détourna sans lui répondre. Avec des gestes fébriles, ses mains parcoururent le corps de Damaya Shar, actionnant des mécanismes invisibles sur la statue, jusqu’à ce qu’un cliquetis se fît entendre. Alors, un pan de mur commença à coulisser à quelques pas d’eux.

Mais le hapien ne regardait pas dans cette direction. Il s’était retourné après avoir senti le fil ténu dans la Force, celui qui indiquait la présence de Dana Shar.




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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Comme bientôt d’autres phalanges efflanquées chercheraient à l’atteindre pour la dévorer.







Clac.

Clac.

Dana s’essoufflait en grimpant les marches, deux par deux. La traîne de sa bure glissait sur les arêtes de l’escalier au marbre son et poli. Son ombre s’étendait, déformée par les flambeaux artificiels qui balisaient son chemin. Et ses talons martelaient le sol à une cadence vive. Un compte à rebours désagréable tambourinait entre ses deux oreilles et elle sentait sa pression artérielle s’affoler. Sa tension haute avait fait rougir ses joues pâles et l’adrénaline aidait son cœur à pomper plus de sang, plus vite. Sitôt arrivée au sommet, elle s’engouffra dans l’étage au pas de course, essaya désespérément de forcer des portes avant de se rendre compte qu’elle paniquait, qu’elle n’avait pas de plans. Ses mains moites tremblaient contre les panneaux de commandes incrustés dans les murs. Elle n’arrivait pas à s’empêcher de penser à Lloyd Hope. Il avait dû récupérer Mat’aenna, ils devaient être en train de remonter le fleuve pour trouver un abri.

Elle avait fait ce choix. Pour une fois, elle avait laissé la raison l’emporter. Elle avait tu la passion et toutes ces choses absurdes qui ressemblaient à des brasiers incontrôlables. Finalement, elle avait réussi à reprendre le contrôle. Son cerveau s’en félicitait, mais son cœur ne suivait pas. Ses prunelles affolées captèrent un mouvement à l’angle du couloir et elle s’élança, bloquant des portes qui allaient se refermer pour pénétrer un vaste dortoir plongé dans la pénombre.

Elle devinait les robes légères et les uniformes protocolaires pliés au bord des lits alignés. C’étaient donc les quartiers des domestiques de la maisonnée. L’ombre qu’elle avait aperçu s’était réfugiée près d’une couche d’où une respiration pénible s’élevait. Régulant son souffle saccadé par l’effort, elle approcha à pas de loup pour découvrir une togruta penchée sur un jeune humain, un adolescent. Autour de ses lekkus rayés, le même ruban noir que celui de Mat’aenna.

- Tiens bon, souffla l’alien en déposant un linge humide sur le front de l’adolescent qui grimaça, le visage perlé de sueur, le teint beaucoup trop pâle et les lèvres si gercées qu’elles en étaient écarlates.

De la fièvre. Elle aurait à une simple coïncidence. Mais un fiévreux, ici, dans un manoir où se trouvait un échantillon du virus, cela ne pouvait être du hasard. La synchronicité de ces deux éléments était presque trop belle. Affreusement belle. Dana rompit sa discrétion, se rapprochant davantage et provoquant un sursaut chez la togruta qui se recroquevilla, apeurée.

- Que…que se passe-t-il ? s’efforça de demander Dana avec autorité, mais sa voix était rauque, blanche, mal maîtrisée et lui échappait.
- Josh est tombé malade, Dame, murmura-t-elle en évitant le regard de l’Inquisitrice dont elle avait reconnu la bure. Un vêtement annonciateur de malheur et de souffrance.
- Comment ?! Qu’est-ce qu’il a ?
- Je ne sais pas Dame…je…vous jure, il n’a pas voulu faire à mal il….est encore jeune, ne le punissez pas.
- Il a pas voulu faire à mal DE QUOI ? éructa-t-elle à bout de nerfs.
- Il…il s’est faufilé dans le laboratoire du Maître hier soir. Il…il a juré n’avoir touché à rien, mais…depuis, il est malade et..
- Un laboratoire…un LABORATOIRE ?

Sa raison vrillait dans tous les sens. Elle contourna le lit d’un côté, puis de l’autre, se retenant de tuer le malade, tant l’angoisse enserrait douloureusement sa poitrine. Ses mains s’agitèrent dans l’air dans une tentative vaine de s’apaiser. Elle devait remettre les choses en contexte. Darth Runà avait parlé d’un simple échantillon et elle se retrouvait avec un laboratoire. Une structure susceptible d’avoir la technologie nécessaire pour dupliquer le virus, le modifier, le tester. C’était quoi déjà la spécialité de Darth Orcus ? Elle réfléchissait vite, à s’en donner le tournis. L’alchimie, l’alchimie Sith, comme Tiamat. C’était un vrai cauchemar. Elle allait vomir. Elle était en train de vomir. Les morceaux du buffet de la réception des officiers promus s’éparpillèrent au sol dans un bruit inélégant. La togruta observait le spectacle, tétanisée.


- Il…il est où ce laboratoire ? questionna-t-elle, emportée par son souffle précipité. IL EST OU ?!
- En…en bas…dans le sous-sol…mais…je sais pas comment..
- COMMENT ON ENTRE ?
- Je sais pas…j’vous jure, ne nous punissez pas…supplia la domestique, les yeux gonflés de larmes pathétiques.

Dana se pencha furieusement pour attraper le gamin léthargique par les épaules et le secouer

- DIS-MOI COMMENT T’ES ENTRE ! DIS-MOI !

Aucune réponse. Elle le relâcha et il tomba lourdement en travers du lit. Soudain, une bouffée de chaleur l’accabla et elle porta ses paumes fébriles devant ses prunelles dorées. Elle avait touché un infecté. Elle l’avait touché. C’était foutu. Non. Ils avaient dit que ça se transmettait par la salive ou les fluides. L’Inquisitrice s’empressa d’essuyer ses mains contre sa bure et elle fit volte-face pour courir, retrouver les escaliers, les dévalés en sens inverse.





Elle avait erré au rez-de-chaussée, à la recherche des escaliers du sous-sol, reniflant de rage, prenant une pause pour saisir son ventre que le stress rendait douloureux, pour récupérer une respiration fuyante. Elle avait croisé deux droïdes protocolaires qui l’avaient salué sobrement et un domestique que la peur avait fait fuir. Les serviteurs vivaient ici dans la peur des Siths. Darth Orcus devait les traiter pour ce qu’ils étaient à ses yeux : de la chair malléable et remplaçable. Elle engageait un pas morne, mécanique et fantôme, le regard éteint quand Luis bondit devant elle en feulant. Elle cligna plusieurs fois des paupières. Il grogna, tourna en rond. Elle dut se reconnecter à la Force pour comprendre.

Il désirait lui montrer le chemin.

- Toutes …à t’attendre….celui qui……sur moi ! …..pour quoi ?! Pour…. tu en as rien à foutre ! Tu veux pas me récupérer…. Lloyd ! Tu veux me récupérer pour avoir la conscience tranquille !

Des éclats de voix féminines retentissaient contre les murs de la demeure ; tous les mots n’étaient pas compréhensibles mais elle en capta certains, dont le nom du capitaine. Son pas s’affola dans les marches qui dévalaient jusqu’au sous-sol. Elle manqua de se rompre le cou, sa cheville se tordit un bref instant, elle retrouva l’équilibre et elle s’engagea dans les allées de ce sinistre musée personnel, indifférente à c qui y était exposé. Elle ne voyait plus que la petit twi’lek du distrcit 2331 et l’adolescent nommé Josh : deux visages livides, deux fièvres brûlantes. Il y avait au moins un infecté dans cette demeure. Elle savait comment tout s’emballerait. Elle l’avait déjà affronté.

- J’ai attendu ce moment depuis des années, moi aussi, mais voilà, j’ai plein de problèmes sur les bras, et je veux pas les faire peser sur toi. Si tu veux… Si tu veux on… On réessaiera.

Dana émergea du coin d’une allée. Dans une paroi proche, non loin de la statue représentant sa sœur, une ouverture secrète s’était formée. Essoufflée, elle fit courir son attention de Lloyd à Mat’aenna, hagarde. Au sentiment d’urgence, de peur, de panique, s’étaient substitués la déception, la colère, la jalousie menant à un chagrin amer. Ce dernier ne fut qu’une main de plus aux longs décharnés qui pressa davantage son cœur pour l’essorer, comme bientôt d’autres phalanges efflanquées chercheraient à l’atteindre pour la dévorer.

- Qu’est-ce que vous faîtes là ? Faut que vous sortiez. Orcus va pas tarder à revenir et…putain, y’a un infecté. Lloyd. Cassez-vous, ou je devrais vous tuer avec les autres. Parce que dans quelques minutes, plus personne pourra sortir. Il va y avoir un foutu protocole BC dès que l’alerte sera donnée. C’est ce que tu veux pour elle ?! L’enfer qu’on a vécu au district 2331. Alors, DEGAGEZ !





Elle n’attendit pas de réponse et se précipita vers l’entrée du laboratoire pour la franchir et être engloutie dans l’inconnu.


Si tu veux…on réessaiera.

Alors que les néons s’enclenchaient automatique en détectant sa présence, elle s’appuya sur la première console venue. Derrière sa vision brouillée de sueur, elle devinait une salle de taille modeste mais très bien équipée, comme elle le redoutait. Il y avait un grand bureau entre une série de machines et de terminaux ainsi que des moniteurs holographiques qui diffusaient des séquences de données biologiques qu’elle ne comprenait pas. Des holoprojecteurs jetaient sur des pans de murs des articles de presse scientifique qui se reflétèrent sur sa figure quand elle passa devant, hébétée.

Si tu veux… Si tu veux on… On réessaiera.

Elle n’aurait jamais dû prévenir Lloyd Hope. Ses doigts tremblèrent se mirent à balayer une console à la recherche de commande, de compartiments où l’on pouvait cacher un échantillon de virus. A quoi ça ressemblait d’ailleurs un échantillon de virus ? Est-ce que c’était comme un amas de cellule, du genre de celui qu’elle avait dans le ventre ?

On réessaiera.

Elle essuya sa bouche d’un revers de la main, le geste sans élégance et réserva le même sort à ses yeux humides. Darth Runà l’avait envoyé sur une mission qui requérait des compétences, des connaissances qu’elle n’avait pas. Et quelque part, elle espérait bien y crever et que ce virus se répande, qu'il contamine tout, qu'il tue comme on avait tué tant de choses en elle. Il n'y aurait plus que la mort, la folie, la désolation. Elle n'était qu'une petite Inquisitrice. Il n'y avait plus d'équipe pour se dresser contre le risque d'épidémie mortelle.

On réess…

Un craquement sinistre mit fin aux répétitions absurdes de la voix de Lloyd. Elle releva son visage à la hâte vers un coin sombre du laboratoire. La Force l’avertit d’un tressaillement ténu. Il y avait quelqu’un d’autre. Son poignet droit se replia pour qu’elle sente sous son pouce le bouton permettant de déclencher sa vibro-dague. Les néons vacillèrent et dans un bruit d’agonie soudain s’éteignirent. Les écrans et les holoprojecteurs éclairaient à peine le laboratoire, plongé dans un noir presque absolu.







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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


- Lloyd, c’est un sacrifice à faire.





- Lloyd, c’est par là !

La twi’lek avait commencé à remonter les allées, mais elle s’était immobilisée en se retournant, constatant que le hapien ne suivait pas. Ce dernier regardait l’entrée du corridor qui s’était dégagé et où l’Inquisitrice avait disparu.

- Non, non attends, il faut que je la suive.
- Quoi ? Mais tu as entendu ce qu’elle a dit ? Et tu m’as promis tout à l’heure qu’on aurait juste à lui ouvrir !

Le hapien avait saisi la garde de son sabre laser pour l’extraire de sa ceinture, méfiant.

- Je pensais pas que le virus en était déjà à ce stade, d’avoir été inoculé. C’est trop dangereux de laisser Dana affronter ça seule ; si jamais elle choppe le virus…
- Mais de quoi tu parles ?!
- Mat’, remonte et fuis par le jardin. Tout au bout du jardin, la barque. S’il te plaît. Je te rejoindrai au vaisseau.

La twi’lek hésita un instant. Puis, soudain, elle avala les quelques mètres qui les séparait du hapien et l’attrapa par la veste, pressant son corps étroit contre celui du capitaine pris de court.

- Lloyd, c’est un sacrifice à faire. C’est notre chance. S’il y a vraiment un virus mortel et qu’ils vont tout brûler pour désinfecter ou quelque chose comme ça, tu comprends ce que ça veut dire ? On nous croira morts. Donc on peut fuir l’Empire, ce soir même, sans personne sur nos traces ! Avec cette histoire de guerre civile on nous aura vite oubliés !

Le hapien entrouvrit la bouche, sidéré. Il attrapa doucement les poignets de Mat’ pour la séparer de lui.

- De… Mat’ de quoi tu parles ? J’ai pas l’intention de quitter l’Empire. J’ai l’intention de me battre pour lui.
- Mais tu n’as plus besoin, Lloyd ! Maintenant que je suis là, tu n’as plus besoin de risquer ta vie pour eux ! On se trouvera un petit coin dans l’Espace Hutt, avec tes pouvoirs tu te feras vite un nom et…
- Mat’.
- Et… On pourra récupérer mon enfant, tu l’élèveras avec moi comme le tien.

Lloyd écarquilla les yeux.

- Quoi ? Qu’est-ce que tu viens de dire ?!
- On m’a empêché de te le dire Lloyd. J’ai eu un enfant. J’ai accouché il y a bientôt deux ans, expliqua Mat’aenna et un petit sourire naquit entre ses larmes. Je l’ai appelé Tuki-Rol, c’est un nom composé, ça veut dire…

Mais le hapien lâcha subitement la twi’lek dont le visage se figea de surprise, avec un hoquet de stupeur.

- Un enfant avec qui ?
- Avec… Est-ce que ça a vraiment de l’importance ? C’était pas ce que j’voulais Lloyd, tu sais quand on est esclave les maîtres…
- Un hybride ?

Mat’ fronça les sourcils, surprise par la question.

- Non non, un enfant de ma race, quelle importance ? Lloyd je t’en prie comprends-moi, on m’a imposé des relations…
- Avec un twi’lek ? UN SEIGNEUR SITH TWI’LEK T’A FAIT CA ?!

La voix du hapien avait explosé, il ne savait si c’était de rage ou de désespoir.

- Non, non, pas exactement, et pas Laduim non, écoute je t’expliquerai, mais cet enfant c’est une chance Lloyd, toi et moi on n’aurait pas pu, tu seras son père, son père de cœur, tu pourras…
- MAIS EST-CE QUE L’UNE D’ENTRE VOUS EN A QUOIQUE CE SOIT A FOUTRE DE CE QUE JE VEUX MOI HEIN ?? DE SI JE VEUX DES PUTAINS DE GOSSES OU PAS, CA VOUS TUERAIT DE ME DEMANDER MON AVIS ?

Mat’aenna s’était figée, terrifiée par les cris soudains. Elle resta silencieuse, interdite, recula d’un pas. Le hapien était à court de mots.

- Parce que tu crois qu’on m’a laissé le choix, gémit la twi’lek, de nouveau au bord des larmes. Et pourquoi tu dis l’une d’entre vous ? Ça veut dire quoi, ça ?
- Rien, rien, ça veut rien dire, rétorqua autoritairement le hapien qui s’était mis à faire les cent pas. Ecoute, j’ai pas l’temps. On discutera de tout ça plus tard, maintenant tu rentres au vaisseau. Tu passes par le jardin et tu suis le droïde. Point final.

Les traits de la twi’lek se tordirent entre ses larmes. Mais elle n’ajouta rien et s’enfuit de son pas souple. Lloyd s’engouffra dans le corridor en courant.







Les néons jetaient des lumières blanches sur les moniteurs du laboratoire. Tout cela rappelait à Lloyd les bureaux et cellules alignées du Stonx… Les cadavres au sol en moins.

- Dana ? appela-t-il.

Dans sa voix perçait encore la colère. Il serrait les dents en remontant les allées. Le laboratoire était grand et il ne savait comment réussir à s’orienter dans ce qui ressemblait à un labyrinthe souterrain. Et puis, subitement, l’éclairage vacilla, avant de s’éteindre. Le hapien s’immobilisa dans l’obscurité. Que se passait-il ? Il alluma son sabre laser et aussitôt, dans un crépitement sonore, les lueurs rouges de l’arme jetèrent des ombres sanglantes sur les moniteurs et les cuves qui s’alignaient à quelques pas de là. Le hapien continua de progresser en silence, jusqu’à tomber sur d’étranges cages de verre. Il faisait glisser son sabre le long des parois pour en voir le contenu. Les premières étaient vides mais au bout d’un moment, il tomba sur un enfant humain, pâle, qui était allongé et qui ne réagit même pas quand il vit s’approcher le sabre. Il respirait pourtant, mais ses yeux paraissaient vides, inexpressifs. Le hapien toqua à la vitre.

- Hé, tu m’entends ?

Le garçon ne réagit pas. Il était en tenue d’esclave et de la bave s’écoulait de ses lèvres, écumeuse. Le hapien essayait de l’observer d’un peu plus près quand subitement il entendit quelque chose derrière lui. Il sursauta et fit volte-face, brandissant son sabre, prêt à en découdre… Mais c’était l’Inquisitrice.

- Dana ! Putain tu m’as fait flipper ! s’exclama-t-il en baissant sa garde, le visage marqué par la colère. T’étais où ? Tu croyais quoi, là, que t’allais faire face au virus toute seule ? Et si t’es contaminée on fait comment ? Et pour ton gosse t’y as pensé au moins ? Enfin ton, faut l’dire vite, moi j’suis pas concerné apparemment. Dana, le gamin derrière il est déjà contaminé, faut tout brûler, c’est le plus simple, on met le feu et on se tire, c’est le plus efficace, il faut qu’il reste plus rien de tout ça ok ?

Il n’attendit pas sa réponse. Enragé, il se mit à fouiller les alentours, ouvrir les caisses qu’il trouvait sur son chemin, faisant sauter les cadenas d’un coup de sabre laser. Celles-ci étaient pleines de minuscules fioles – le virus dupliqué ? – mais il n’y prit pas garde, il cherchait autre chose. Il fit sauter une porte d’un coup de pied.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

- Qu’est-ce que t’es ?! Vivante ? Morte ?







Dana était tétanisée, le regard pâle, levé vers le plafond. Elle avait à peine porté attention aux reproches de Hope qui, dans cette situation, lui paraissaient complètement hors de propos et secondaires.

- Lloyd, arrête. Arrête de faire du bruit….murmura-t-elle, paralysée.

Elle sentait son cœur battre à vive allure et en écho, elle avait l’impression d’entendre ceux des deux êtres qui nageaient dans ses entrailles. Ses yeux écarquillés observaient les hauteurs du laboratoire, vacillant de terreur, car une figure famélique s’y tenait, accrochée comme une araignée, ses longs membres amaigris déployés, ses articulations tordues, ses os saillant sous une peau blafarde et translucide que parcouraient des veines violacées et mortes. Les moniteurs, la lueur du sabre, les rétines des holoprojecteurs arrivaient à l’éclairer assez pour que Shar comprenne. Il suffisait de voir ses cheveux longs et grands, dispersés par mèches sur son crâne déformé. Et ses iris vitreuses, enfoncées dans des orbites glaciales.

La même créature que celle qu’elle avait rencontré sous les combles du district 2331. Croc. Elle crut qu’elle allait perdre connaissance mais se rattrapa d’une main raide à une console.

C’était ça. L’échantillon du virus. Un autre monstre, plus évolué que les infectés de base qui se nourrissaient de chair et de sang.

- Lloyd….répéta-t-elle tandis que la chose demeurait immobile, comme un animal qui hibernait. Oui…oui…on doit…foutre le feu. En haut aussi, y’a un gamin infecté….faut que je….trouve de quoi mettre le feu, mais….tu dois suivre Mat’aenna. Si jamais l’infecté….

Un hurlement déchira l’air lointain. Il pouvait provenir des étages, comme du chemin que Mat’aenna avait emprunté. C’était un cri aigu, féminin. Dana fut agitée d’un hoquet de stupeur et vit la créature tourner lentement sa tête, dans une rotation, un angle, qu’elle n’aurait jamais cru anatomiquement possible. Elle se décala d’un pas latéral, longeant les machines, les bureaux, toujours appuyée contre ce mobilier d’une main. Elle arriva jusqu’à l’encadrement de la porte que Hope avait défoncé. Il était resté planté là, il avait vu la créature aussi. Elle tendit ses doigts blêmes, attrapa le poignet du hapien pour le faire reculer doucement avec elle, vers la sortie.

- C’est ma mission, souffla-t-elle sans quitter la menace du regard, avançant à tâtons dans la pénombre. C’était le deal…tu venais juste chercher Mat’aenna…Si..si elle n’avait pas été, je t’aurais jamais prévenu. Je dois le faire sans toi.

Sa main heurta enfin l’ouverture qui menait au sous-sol et son exposition lugubre. Un peu de lumière en filtrait. Au plafond, la créature avait suivi leur avancée. Dana pivota, ses prunelles dorées croisèrent l’émeraude d’un regard familier. Elle poussa Lloyd de toute ses forces hors du laboratoire et se dépêcha d’enclencher la fermeture des portes. Dans son dos, la créature avait grogné et avait bondi, mais le son tranchant d’une vibro-dague avait jailli et dans un réflexe in extremis, Shar réussit à bloquer l’attaque. Sa lame impériale s’enfonça dans le poitrail de la chose, un sang noir et poisseux traversa la chair nécrosée, s’épandit sur la main de l’Inquisitrice qui tenait toujours fermement son arme.

- Qu’est-ce que t’es ?! s’écria-t-elle en sondant la Force. Vivante ? Morte ?

Vivante. Elle contrôlerait son esprit. Morte, elle la réanimerait sous sa volonté. Mais les deux à la fois ? Il fallait modeler sa Sorcellerie, son don dans la Force, ce qui nécessitait énormément de concentration. Les ongles sales du monstre se tendirent vers elle, griffant la peau de sa gorge. La chose se débattait avec ardeur, malgré la vibro-dague qui vrombissait au cœur de sa poitrine. Dana rassembla la Force pour repousser son assaillant d’une onde télékinétique puissante et se dépêcha d’ouvrir les portes. Elle tapait sur le panneau d’ouverture, laissant des traînées de sang épais sur les commandes, sans succès. A des mètres de là, la créature geignit en se relevant.





L’Inquisitrice s’enfonçait dans le reste du laboratoire pour fuir. Elle passa les portes que Lloyd avait forcé d’un coup de pied, se cognant parfois à des parois, des meubles qu’elle ne reconnaissait pas dans la pénombre. Du feu. Elle devait mettre le feu. Elle essuyait sa main sur sa bure, s’efforçait de construire un plan dans sa tête. Ses doigts plongèrent dans l’une des poches de sa bure et elle en tira un comlink noir qu’elle plaqua à ses lèvres.

- Maître, Maître ! s’exclama-t-elle en se rendant compte qu’elle venait d’atterrir devant une impasse. Elle tâtonna le mur en face d’elle, incrédule.
- Dana. As-tu trouvé l’échantillon ? grésilla la voix de Runà.
- Oui, oui…il est en train de me pourchasser ! Faut…faut que quelqu’un vienne mettre le feu, faîtes votre foutu protocole BC. Y’a déjà des infectés.
- Fais. Ton. Travail.

Et la communication se rompit. Dana laissa échapper un grognement rageux et tâcha de s’orienter dans cette dernière partie du laboratoire, jusqu’à ce qu’une douleur plus vive que les autres contracte son ventre. Elle se plia en deux, le souffle coupé pour se concentrer sur sa respiration. Un grésillement sinistre fit écho à ses gémissements de souffrance et les néons s’allumèrent dans une série de chocs bruyants. Au-delà de sa vision déformée par la douleur, elle aperçut les morceaux de corps organiques : humains ou aliens, suspendus, marqués dans leur chair par des symboles sithese. D’autres moniteurs s’étaient éveillés, d’autres données défilaient. Une buée fine s’échappa de ses lèvres : elle se rendait seulement compte qu’il faisait froid. Dans le reflex d’une surface en inox parfaitement plane et propre, elle observa son reflet flou : les traces de son maquillage étalé sur sa figure trop blanche, sa chevelure défaite, les marques rouges sur sa gorge.

Maladroitement, elle reprit son comlink, le bout de ses doigts transpirants et sales réglèrent la fréquence.

1
2
2

6


- Lloyd. Dis-moi que t’es parti.

Elle déglutit.

- Je suis infectée. J’ai plus rien à perdre, alors je vais pouvoir détruire cette maison seule, avant que je…que je…T'es un capitaine de frégate, maintenant ok. T'as plus à faire le sale boulot.

La main qui tenait le comlink tremblait. Ses lèvres aussi. Sa voix aussi.

- Je vais pas le garder finalement, on dirait.

Et y’avait pas de code pour dire adieu. Elle éteignit l’appareil et s’accroupit derrière une table où gisaient des restes humains. La créature venait d’apparaître à l’autre bout et s’était mise à errer. Elle avait un marteau à la main qu’elle avait dû subtiliser sur l’une des étagères de maintenance. Dana retira ses bottines doucement, dont les talons risquaient de la faire repérer et contourna la salle, toujours accroupie. Progressivement, elle rassemblait les objectifs à atteindre : trouver de quoi mettre le feu. Elle avait déjà un briquet dans sa poche. Il manquait le combustible. Elle devait sortir du laboratoire et trouver la cuisine.

















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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


L’Inquisitrice était déjà repartie et il restait à l'écart, par la force des choses.





- PUTAIN DANA REVIENS !

Le hapien avait frappé la porte du laboratoire qui venait de se sceller d’un poing rageur.

- DANA !!

Il s’égosillait mais c’était peine perdue. L’Inquisitrice était déjà repartie et il restait à l'écart, par la force des choses. Il frappa encore, de toutes ses forces, mais c’était inutile ; le laboratoire était conçu pour ne pas laisser entrer – ou sortir ? – un quelconque intrus, aussi puissant fut-il physiquement. Il essaya quand même, haletant, jusqu’à ce que des cris lui parvinssent d’au-dessus, comme un peu plus tôt. Mat’ ?

Lloyd fit volte-face et se mit à courir comme un fou. Il traversa les rangées du musée souterrain, remonta les marches quatre à quatre pour émerger dans le salon majestueux, son sabre laser toujours en main. Là aussi, la pièce était plongée dans la pénombre, mais une togruta avait allumé une bâton lumineux qu’elle tenait dans sa main au-dessus de son visage, et le hapien devina Mat’aenna qui se serrait contre elle. Les deux femmes se tournèrent vers lui d’un même mouvement, leurs yeux écarquillés de terreur.

- Lloyd ! cria la twi’lek. Attention, il y a un gosse infecté ! Il a essayé de nous tuer, il a déjà… Il a dévoré un autre esclave !
- Où ça ? Il est parti où ?
- Vers les cuisines ! rétorqua la togruta en tendant un doigt sur le côté.

Les yeux du hapien suivirent la direction. Une porte béait, donnant sur un autre couloir obscur.

- Pourquoi y'a plus de lumière ?
- Plus d’électricité, ça arrive quand… Quand le laboratoire tire trop d’énergie. Quelque chose a dû s’activer en bas… Il faut aller rallumer, mais avec ce qui rôde…
- Ok, ok. Où est le tableau électrique ?
- Au fond des cuisines.
- Tu sais ouvrir le laboratoire, toi aussi ?
- Non, non, il n’y a que les… Que ceux qui assistent Maître Orcus dans leurs manipulations qui savent entrer.

Lloyd se rapprocha pour éclairer les deux femmes, et croisa le regard de Mat’.

- Tu l’as aidé… Dans ses manipulations ?!
- J’ai rien fait !
- C’est pas une accusation Mat’, putain, la porte s’est refermée, il faut que tu m’aides à rouvrir et que tu m’aides à comprendre, qu’est-ce qu’il…
- Lloyd. Dis-moi que t’es parti.

Le hapien sursauta, et de sa main libre se mit à chercher dans sa poche le petit comlink, où les paroles de Dana s’enchaînaient. Il actionna vivement le bouton pour parler à son tour.

- Infectée ?! s’exclama-t-il, le comlink presque pressé contre ses lèvres. Comment ça, infectée, Dana, t’es sûre ? Tu t’es fait mordre ? Elle t’a mordue ??

Mais la voix de Dana ne lui répondit pas.

- Si elle est infectée, c’est fichu, commenta Mat’ d’une voix blanche. La contamination ça va vite, d’ici quelques minutes elle va être fiévreuse, puis en quelques heures elle sera comme… Comme Josh.

Le hapien grogna de contrariété. S’il faisait descendre Mat’ avec lui pour lui faire rouvrir le laboratoire, il allait risquer la vie de la twi’lek. Et s’il partait avec elle, Dana était fichue. Mais ne l’était-elle pas déjà, si elle avait été mordue ?

- Bon, explique-moi comment on ouvre le laboratoire.
- Lloyd je t’ai déjà dit c’est pas possible d’expliquer c’est une combinaison de touches et…

Mat’ s’interrompit. Un fracas de bruit métallique venait de se faire entendre depuis la cuisine. Tous les trois s’étaient figés, aux aguets, et la togruta se mit à gémir de terreur.

- Chut, chut, lui intima Lloyd à voix basse. Le labo, on peut l’ouvrir de l’intérieur ?
- Oui.
- Bon, alors emmène-la avec toi. Tirez-vous toutes les deux, avec le nexu et le droïde pour vous protéger vous ne craignez rien ok ? Allez ouste, au fond du jardin !

La twi’lek tira son amie par le bras et toutes les deux s’enfuirent par la porte qui donnait sur l’arrière, tandis que le hapien levait de nouveau son sabre, pour prendre la direction des cuisines.
Il avança en silence, les lueurs rouges de sa lame éclairant pauvrement le chemin. Des bruits de vaisselle renversée se firent encore entendre, et Lloyd resserra sa prise sur son sabre en arrivant dans l’encadrement d’une vaste pièce encombrée d’éléments de cuisine en inox où se reflétait le rouge de son arme. Il perçut une silhouette se déplacer entre deux éléments, sans la moindre discrétion – une petite silhouette, de la taille d’un adolescent.

- RRRRRR ! cracha subitement la silhouette en se mettant à courir vers le hapien.

Lloyd sursauta mais mit fin à l’attaque de l’adolescent d’un coup de sabre rapide en travers du corps. L’adolescent s’effondra dans un gargouillis odieux, et le hapien n’attendit pas de voir ce qui adviendrait ensuite. Il enjamba le corps et se mit à courir vers le fond de la pièce, à la recherche du tableau électrique. Il longea des fours, des appareils réfrigérants tous silencieux, avant de tomber sur une porte de service qu’il ouvrit à la hâte. Une volée d’escaliers plongeait plus bas. Il descendit, sabre devant lui, le souffle haletant.

Ce n’était qu’un petit garde-manger, où s’alignaient des étagères pleines de conserves, des bonbonnes de gaz et … là ! Le tableau électrique.

Le hapien traversa la pièce et fit sauter la sécurité du tableau pour en retirer le couvercle avec un geste précipité. Il retrouva rapidement le bouton d’allumage général et l’enclencha.

TOUM.

L’éclairage était apparu dans le garde-manger, les cuisines déversant des lumières blanches sur les escaliers, parfait.



















POF.

Noir de nouveau. Tout s’était ré-éteint.

- Merde.

Lloyd cala le manche du sabre entre ses dents, la lame vrombissant à quelques centimètres à peine de son visage et il sentait la chaleur de l’arme se répandre sur sa joue et son épaule. Mais il s’intéressait au tableau, essayait de déchiffrer les petites étiquettes. Cuisine, pas besoin, Chambres, pas besoin, Aile invité, pas besoin, Quartier des domestiques, pas besoin. Et il désactivait un à un les commutateurs pour alléger les circuits électriques, laissant allumé entre autres les commutateurs de Quartiers privés, Atelier et Générateur secondaire, en espérant que le laboratoire soit compris là-dedans. Il actionna de nouveau le commutateur général.

TOUM.

L’éclairage réapparut, et le hapien attendit un bref instant, mais il ne parut pas y avoir d’autres coupures. Alors il s’empressa de tirer son comlink de nouveau après avoir éteint son sabre.

- Dana ? Tu me reçois ? Réponds-moi. Tu as la lumière de nouveau ? Est-ce que tu as été mordue, est-ce que tu as de la fièvre ? J’ai trouvé des bonbonnes de gaz. Je vais les descendre au labo. Mais il faut que tu reviennes m’ouvrir. On fait rouler les bonbonnes ouvertes à l’intérieur, on attend que ça se remplisse de gaz. A la moindre étincelle tout saute. Viens m’ouvrir le laboratoire, ok ? T’inquiète pas, si tu es infectée…

Il ferma les yeux, atterré.

- Je... Je m’occuperai de toi. Viens juste m’ouvrir. Dana ?

Silence.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Maintenant, il patientait, dans l’espoir que…quelque part au centre de l’horreur, une Inquisitrice eût entendu son appel et lui ouvrirait.







Dana tendit douloureusement son bras pour débrancher une console de son alimentation. Sitôt les câbles arrachés, elle serrra les dents et poussa le meuble éteint de toutes ses forces devant la porte que Lloyd avait forcé plus tôt et qui permettait d’accéder à l’autre partie du laboratoire. La créature ignoble errait toujours dans le fond du labo, Shar entendait parfois ses échos sinistres, quand elle était prise d’une étrange rare et frappait les parois et les objets avec son marteau.

Croc.

Elle étouffa un cri de douleur au moment où elle plaquait enfin l’obstacle au niveau de l’ouverture. La transpiration de l’effort avait plaqué ses cheveux humides contre son front blême où une ancienne blessure résonnait dans son crâne, fantomatique souffrance d’un traumatisme qu’elle pensait ne plus revivre. Elle se dépêcha de collecter d’autres objets pour les porter, non sans difficulté sur la console et aménagé une barricade de fortune qui, à défaut de retenir ce monstre, le ralentir fortement.

Fortement impactée par cette tension physique qui endolorissait son ventre arrondi, elle s’échoua sur un siège, devant un grand bureau, dans le clair-obscur du laboratoire. Elle tâchait de reprendre son souffle, de refreiner les tremblements de ses mains. Beaucoup de choses avaient changé depuis le fiasco de District 2331. Elle avait grandi dans la Force, s’était entraînée pour devenir plus puissante, plus forte, pour que plus jamais Lloyd Hope n’eût à se sacrificier seul pour solutionner les problèmes. Longtemps, leur équipe avait été un moteur de progression. Sans s’en rendre compte, le hapien l’avait défié à devenir plus forte, plus solide, plus sûre d’elle. Il avait représenté une concurrence, un challenge, mais surtout il avait été un coéquipier, un partenaire qu’elle avait désiré protéger. Esseulée dans cet endroit sordide, elle comprenait à quel point se sacrifier était difficile. Elle ressentait tout ce que Lloyd avait pu ressentir en l’abandonnant dans les bras de Jonas, des mois plus tôt. Elle regrettait que cette lucidité arrive trop tard. Sa paume massait son ventre alors que la douleur s’estompait sourdement.

Au-dessus d’elle, un néon dysfonctionnel clignotait avec irrégularité, l’auréolant parfois d’un peu de lumière. Il grésillait à l’image d’un sabre-laser et quand il rendit l’âme, le reste de l’éclairage s’était remis subitement en route. La luminosité soudaine lui picota les yeux et elle se releva avec précaution, grimaçant. La grossesse n’était pas quelque chose de fabuleux, ni une maladie. C’était le pire handicap qu’une femme comme elle pouvait subir. Elle se sentait diminuée, affaiblie. Elle avait l’impression que ces deux bébés pirataient une partie de son réseau d’énergie interne à leur seul profit, la laissant complètement démunie.


- Dana ? Tu me reçois ?

Son comlink s’était mis à crachoter la voix régulière de Hope.




















Puisque l’électricité courait à nouveau dans le système énergétique du laboratoire, toutes les fonctionnalités avaient retrouvé leurs pleines capacités. Elle n’entendait plus les échos morbides de la créature. On aurait dit qu’en l’absence de proie, elle s’était mise à hiberner. Ou peut-être que c’était juste une théorie en laquelle Dana souhaitait croire. Sa figure éprouvée faisait face aux panneaux de commandes d’ouverture des portes secrètes du laboratoire. Au-dessus de cette petite console incrustée dans le mur, un petit écran holographique qui projetait ce qui se passait de l’autre côté. Elle avait guetté là l’arrivée de Lloyd, avait senti son cœur louper quelques battements en le voyant revenir avec le combustible qui lui manquait. Maintenant, il patientait, dans l’espoir que…quelque part au centre de l’horreur, une Inquisitrice eût entendu son appel et lui ouvrirait. Alors, elle porta le comlink à ses lèvres.

- Lloyd.

Elle le vit froncer les sourcils et attraper son propre appareil de communication.

- Quand tu dis que tu t’occuperas de moi, c’est me tuer dont tu parles, n’est-ce pas ? Dis-moi que c’est ça, comme ça…je pourrais être certaine de t’ouvrir.

Elle attendit son assentiment, l’admirant toujours au travers de l’écran, puis ses doigts glissèrent sur les commandes pour actionner l’ouverture. Le Sith se précipita, portant le combustible à bout de bras et elle s’écarta. Il les déposa à la hâte, encore scellés et se détourna vers elle. Dana abaissa un peu le col de sa bure pour mieux lui montrer sa gorge à l’éclairage des puissants néons du laboratoire.

- Cette chose m’a griffé. Elle avait peut-être du sang sous ses ongles, qui s’est mêlé au mien. Faut me considérer comme hors de la partie, ok ? Au moindre signe suspect de ma part, il faut que tu t’occupes de moi. Et dans le doute, faudra sans doute me laisser brûler avec le manoir. D’ici là, il faut garder tes distances.

La transpiration formait une pellicule brûlante à la surface de sa peua, mais ce n’était pas de la fièvre, simplement les efforts immodérés qu’elle avait déployés jusque-là. Ses prunelles se tournèrent brièvement vers la barricade de fortune qui se dressait entre eux et le reste du laboratoire et d’où pouvait surgir leur ennemi à tout instant.

- Bon perdons pas de temps, enchaîna-t-elle rapidement en s’accroupissant près d’une première bonbonne.

Du gaz. C’était plutôt obsolète, mais les manoirs du quartier étaient vieux pour la plupart, bâtis des centenaires auparavant, par des lignées siths prestigieuses et dont les résidents actuels avaient hérité. Elle crut absurdement se remémorer qu’il y avait des poches de gaz à certains endroits de Dromund Kaas, sous sa surface. Il était possible d’en extraire le gaz et de s’en servir comme source d’énergie un peu archaïque. Ses doigts pincèrent la petite valve.

- C’était comment ? De la retrouver ? T’étais soulagé ?

Des petits cernes comblaient l’espace sous son regard doré, marquant sa fatigue accumulée au fil de cette nuit sans sommeil. Elle renifla un on-ne-sait quoi d’amer et ses doigts commencèrent à dévisser la valve avec précaution pour que le gaz s’en échappe lentement. Ils ne devraient pas tarder ; il y avait trop de matériels énergétiques ici, qui fonctionnait à l’électricité ou au plasma et qui pouvait créer l’étincelle ravageuse. Elle avait posé la question, mais n’attendait pas spécialement de réponse dans ces circonstances et parce qu’à juste titre, la vie privée de Lloyd ne la concernait plus. Sitôt qu’il eût fini d’ouvrir sa propre bonbonne, il lui fit signe et ils reculèrent avec prudence vers l’ouverture. L’odeur du gaz commençait à se répandre dans l’air et à donner l’illusion que tout n’était plus qu’un mirage.

Une fois de retour dans la salle des expositions, Dana continuait de reculer en fixant l’entrée du laboratoire. Elle extirpa son briquet de sa poche. Il suffirait de l’allumer et de le lancer assez fort. Après tout, c’était elle la spécialiste de l’allumage.

- Cette fois, on pourra dire adieu à ce maudit virus. Ca devient dangereux à chaque seconde passée ici. Dis juste bien à Runà que j’ai fait le putain de taff. Et qu’elle peut trouver quelqu’un d’autre pour boire son thé dégueulasse avec elle maintenant. Bon. Tu t’en vas ?

Derrière son assurance apparente, elle ne ressentait que de la peur et du chagrin. Elle était terrorisée à l’idée de mourir dans l’explosion du sous-sol. Elle ne savait pas si cela la tuerait sur le coup, si elle brûlerait simplement et agoniserait, la chair fondant sur ses os. Elle était peinée de savoir que la vie à laquelle elle avait cru et aspiré, serait sans doute pour Mat’aenna. Si tu veux…on réessaiera. Ca avait sonné comme un genre de promesse. Enfin, là où Dana Shar allait, ces considérations étaient désormais futiles. Une consolation perçait toute de même à travers son âme. Il y avait eu un dernier morceau d’équipe, un ultime petit boulot à deux.







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Lloyd Hope
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Bien sûr, que je te tuerai s’il le faut, sans problème.





Le hapien s’était précipité à l’intérieur du laboratoire avec les bouteilles, les déposant à la hâte, se chargeant de la sienne avec des gestes qui trahissaient son énervement. Bien sûr, que je te tuerai s’il le faut, sans problème. Juste, ouvre-moi. Dana avait accepté et c’était tout ce qui comptait. Désormais, elle posait des questions et il ne put empêcher un soupir d’agacement de s’échapper de ses lèvres, tandis qu’il dévissait à son tour la valve de sa bonbonne.

- Ben c’était pas exactement comme je l’avais imaginé, grommela-t-il sans cacher sa mauvaise humeur.

Il haussa les épaules, vérifia que le gaz s’échappait correctement avant de s’écarter en fronçant le nez. L’odeur était déjà forte.

- Mais j’imagine que j’serai content quand je réaliserai qu’à chacun de mes faux-pas je risque pas de terminer la vie de quelqu’un qui a rien demandé sauf à avoir eu la malchance de tomber sur un fameux connard.

Connard. Cette insulte avait pris une drôle de signification, ces dernières semaines. J’suis exactement le connard que vous décrivez. C’est pas le chien, le problème. C’est toujours la main qui le nourrit. Va te faire foutre Lloyd. Pourquoi avait-il écouté cet enregistrement à la con ? Il n’était plus le chien. Désormais il prenait ses décisions pour l’Empire. Et il allait se faire foutre tout seul comme un grand, oui.

Dès qu’ils furent sortis, du corridor, Lloyd se tourna vers l’Inquisitrice et d’un geste brusque, lui arracha le briquet des mains.

- Nan, fit-il sèchement avant de se détourner. Viens.

Il attrapa le poignet de Dana pour la tirer derrière lui, s’assurant ainsi qu’elle suivait, et il traversa la salle des expositions d’un pas déterminé, ignorant les remarques de l’Inquisitrice.

- Il y a un atelier dans cette baraque. Dans un atelier, y’a toujours de l’essence ou un carburant similaire. On va trouver un bidon, faire une traînée d’essence ou une longue mèche de cette salle jusqu’en haut, pour pouvoir allumer à distance et nous laisser le temps de nous enfuir tous les deux. Tu sais où est l’atelier ?

Le hapien ignora les protestations ou les plaintes, faisant la sourde oreille tandis qu’il remontait les escaliers, tirant Dana derrière lui, ignorant même s’il lui faisait peut-être mal.

- Pour l’instant, t’es pas malade, j’aviserai si tu le deviens. Tant que t’as pas de fièvre, je vais pas te faire un certificat médical juste pour pouvoir t’éviter un thé avec ton maître. Chacun ses devoirs.

Et le sien était de la tirer de là. Elle et ce qu’elle avait dans le ventre, quoique ce fut.
Mais quand ils parvinrent dans le petit salon, que l’éclairage illuminait de nouveau, Dana s’était courbée en avant, sous l’effet de la fatigue ou de la douleur. Il consentit alors à la lâcher.

- Assis-toi là, fit-il rudement en désignant un siège, avant de tirer son sabre de sa ceinture et de le fourrer dans la main de l’Inquisitrice. Et tu m’attends. Tu tends l’oreille et tu ouvres l'œil, il pourrait y avoir d’autres contaminés. Je reviens.

Il s’en alla vers les cuisines, mais finalement il revint pour pointer du doigt le visage de Dana en se penchant vers elle, son visage durci par la colère, ses yeux émeraudes plantés autoritairement dans l’étendue dorée.

- ET PAS DE SURPRISE. SI TU REDESCENDS JE VIENS TE CHERCHER MEME SI CA CRAME ET TU SURVIVRAS TOUTE BRULEE CA SERA PAS FUN CROIS MOI. C’EST COMPRIS ?

Lloyd attendit un bref instant, s’assurant qu’il y avait une forme d’assentiment sur le visage de l’Inquisitrice avant de repartir à grands pas. Ses bottes claquèrent dans le corridor qui conduisait aux cuisines.






Il avait deviné, à l’agencement de la maison, que l’atelier, s’il existait, devait se trouver derrière les cuisines, parce qu’on rassemblait habituellement dans ce genre de demeure toutes les pièces fréquentées par les domestiques. Il lui fallut néanmoins un bon moment avant de tomber sur la bonne porte de service, et il se retrouva au milieu d’une série de speeders de luxe éclairés par des néons blancs, entourés de droïdes de toute sorte. Le visage craintif d’un twi’lek à la peau orangée comme celle de Mumkin émergea de derrière le chambranle d’une porte. Un twi’lek ? C’est lui qui avait sauté Mat’ ?

- Toi, tu me files un bidon d’essence, ou un truc inflammable du même genre.
- Heu… C’est-à-dire que je n’ai pas le droit de…

Le hapien avala la distance qui les séparait en quelques enjambées. Il attrapa le technicien par la mâchoire et le fit reculer dans la petite pièce de l’atelier avant de lui faire percuter un mur avec une violence qui fit claquer des dents le twi’lek. Le technicien émit un gémissement plaintif mais Lloyd ne relâcha pas sa prise, comme un étau douloureux sur le visage de sa victime.

- TU ME FILES UN BIDON OU JE T’EXPLOSE LA CERVELLE ?
- Ou-oui j’ai des hydrocarbures juste à cô…

Plutôt que de le relâcher, le hapien envoya valser le twi’lek contre le bureau à proximité. Des objets en tous genres chutèrent bruyamment, mais le technicien réussit rapidement à se remettre sur pied et se mit à courir au fond de l’atelier. Il en extirpa un bidon blanc de ses mains tremblantes, l’un de ses lekkus exhibant déjà une tâche violette à l’arrière de son crâne.

- V-voilà…
- T’en as deux ?
- Ou-oui bien sûr.

Le twi’lek se baissa pour soulever un second bidon. Lloyd les prit tous les deux et repartit vers le salon au pas de course.





Dana était toujours là quand il avait traversé la pièce, puis il était descendu dans les escaliers pour rejoindre la salle des expositions. A proximité du corridor, l’odeur de gaz s’était faite plus intense. Le hapien ouvrit l’un des bidons et commença à en répartir une traînée copieuse en reculant vers les escaliers. Puis il récupéra le deuxième et le versa marche après marche, un tapis de velours l’aidant à faire un lien avantageux vers le haut des escaliers, où il émergea dans le salon avec un demi-bidon encore plein. Il fit une traînée jusqu’à la porte qui donnait sur le jardin puis, avec l’hydrocarbure restante, il aspergea les fauteuils et les rideaux avant de lancer le bidon au milieu de la pièce. Dana était toujours là, à le regarder.

- C’est bon, on sort.

Cette fois-ci, il n’eut pas besoin de la tirer derrière lui. A tout moment, une étincelle pouvait embraser le laboratoire et le feu remonterait jusqu’à eux. Ils se positionnèrent à la sortie de la pièce, et un instant les nuages épais de Dromund Kaas s’éclaircirent pour qu’une lune leur donnât un peu de lumière.

- Recule. RECULE.

Tant pis pour l’amabilité. Il s’accroupit devant la porte, au pied de laquelle luisait la flaque d’essence, et extirpa de sa poche le briquet. Il allait activer le petit objet quand soudain, il sentit la poche intérieure de sa veste grésiller.

- Lloyd Hope, problème d’incompatibilité des scénarios.
- Merde.

Le hapien fouilla sa poche, en extirpa le comlink.

- Qu’est-ce qui se passe ES ?
- L’individu identifié MAT’AENNA a rapporté deux individus non identifiés puis est remontée dans votre direction. Attente de nouvelles directives.
- QUOI ?! Mais c’est pas vrai !

Lloyd se redressa pour se retourner, fouillant le jardin du regard, mais il n’y avait pas de trace de la twi’lek.

- Mat ? MAT ?!

Aucune réponse.

- PUTAIN MAIS C'EST PAS POSSIBLE.

Le hapien jeta son pied dans la porte. Ça ne servait à rien, la porte ne serait plus là dans quelques minutes.

- Bon, Dana, tu descends, tu montes sur la barque et tu m’attends. VITE !

Jusqu’ici, elle avait obéi, courbée par ses douleurs. Ça ne durerait peut-être pas, mais il n’y avait plus le temps. Il essuierait les pots cassés plus tard.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

La lueur de l’astre lunaire ne parvenait pas à percer ses iris ternes, mais soulignait l’ombre creuse de ses joues faméliques.







- T’as perdu le sens des priorités Lloyd ! Que ce soit pour Mat’aenna ou pour moi ! T’as complétement déraillé et tu maîtrises plus rien du tout, tu vas juste te faire tuer, ok ?! Tu t’obstines à vouloir sauver tout le monde ! C’est complètement fou et absurde ! A chaque fois que tu tentes de sauver l’une, tu condamnes l’autre ! MAIS JE SUIS VENUE FAIRE MON TRAVAIL ! Tu devais attendre dans cette foutue barque que Mat’aenna arrive, tu devais la récupérer et me laisser faire ! REVEILLE-TOI UN PEU ! Tu vas retourner dans cette maison qui risque d’exploser d’une seconde à l’autre ?! Et si ta compagne est encore dans le jardin HEIN ?Il te faut un plan et….Lloyd !

Il lui avait tourné le dos et avait pénétré la grande maison déclenchant un désespoir soudain dans la poitrine de Dana.

- LLOYD ECOUTE-MOI ! hurla-t-elle, à court d’arguments. REVIENS !

Elle grimaça et se plia de nouveau en deux, le souffle coupé par l’angoisse et le stress. Deux facteurs qui augmentaient sa tension et endolorissaient tous les nerfs de son ventre.




Les nuages orageux de Dromund Kaas avaient avalé la lune et Dana était plongée dans l’obscurité la plus totale, au milieu d’une végétation dense. Elle traînait le pas le long d’un sentier rocailleux qui slalomait entre les arbres aux cimes empoisonnées. Elle se frictionnait les bras, les yeux dans le vague, cherchant son chemin en tâtonnant dans les ténèbres. De quel droit aurait-elle pu empêcher Lloyd Hope de récupérer Mat’aenna, au risque de mourir. Elle s’arrêta et jeta un regard par-dessus son épaule. Elle ne s’était pas encore assez éloignée du manoir, elle en distinguait parfaitement les fenêtres éclairées et la silhouette sombre qui se découpait dans la nuit.  Elle s’était attendue à ce qu’une explosion retentisse, à ce que l’enfer embrase cette partie de Kaas City. L’incendie serait sans doute magnifique : des flammes azurées par le gaz, rougeoyantes à leurs extrémités. Un rideau flamboyant qui danserait jusqu’aux cieux, la vie et l’héritage de Darth Orcus réduits à néant. Le virus exterminé. Des vies innocentes sacrifiées. Mais le silence régnait ce qui l’angoissait chaque minute un peu plus.

Ses ongles griffèrent l’écorce noire d’un tronc auquel elle s’appuyait pour soulager sa fatigue et sa souffrance. Elle leva encore un regard vers le manoir. Cette fiche bâtisse ne s’éloignerait donc jamais. Elle aurait voulu trouver le courage de faire demi-tour, mais elle n’était pas assez charitable. Elle avait déjà fait tout son possible pour la twi’lek. Elle avait prévenu Hope du danger imminent qui la guettait, au risque de compromettre sa propre mission. Elle avait souhaité se sacrifier pour eux. Elle avait tout fait pour une femme qu’elle détestait. Elle n’était pas aussi magnanime habituellement. Si Lloyd Hope refusait de faire un choix, s’il espérait avoir tous les bénéfices parce qu’il prenait tous les risques, alors elle ferait ce choix à sa place. Qu’il retrouve Mat’aenna, elle lui souhaitait sincèrement de réussir dans cette entreprise et s’il échouait, il trouverait sans doute la paix en ayant péri aux côtés de sa compagne, en l’ayant accompagné jusqu’au bout, au tout dernier instant. Et elle s’imaginait l’après. Dana ne trouverait jamais la paix après. Mais, la paix était un mensonge…il n’y avait que la passion.



Les nuages se dispersaient au gré des courants aériens et la lune triomphait de nouveau dans le ciel kaasi, jetant sur le jardin une lumière argentée et étincelante, quand elle la vit.








La lueur de l’astre lunaire ne parvenait pas à percer ses iris ternes, mais soulignait l’ombre creuse de ses joues faméliques. La créature immonde du laboratoire errait comme un démon cauchemardesque entre les arbres décharnés et les lianes visqueuses. La tête métallique de son marteau captait les rayons lunaires. Sa démarche raide faisait qu’elle avançait lentement, un peu au hasard. C’était impossible. L’arrière du laboratoire était un cul-de-sac, une voie sans issue, ou du moins l’avait-elle cru. Tout devenait possible, Mat’aenna pouvait très bien connaître cette entrée/sortie secrète et avoir regagné le manoir par ce biais des minutes plus tôt. A quelques dizaines de mètres d’elle, la chose grogna et détourna sa figure famélique pour la repérer.

La vue de Dana se brouilla alors qu’une bouffée de chaleur montait à son cerveau. Ses jambes ne la supportèrent plus et elle s’effondra, blême comme la lune qui disparaissait et réapparaissait entre les nuages. Etalée sur le dos, elle essayait de reprendre le dessus sur sa crise d’angoisse, mais l’oxygène se raréfiait et elle inspirait par saccades bruyantes et sifflantes. Entre deux larmes de sueur, elle percevait l’être difforme ramper vers elle.  Dana n’entendait plus rien, ses oreilles bourdonnaient d’un grésillement constant et sinistre. Lloyd n’était pas là. Personne ne lui viendrait en aide.

La créature se positionna soudainement au-dessus d’elle, effrayante, jetant son ombre putride sur le corps paralysé de l’Inquisitrice, dont les pieds nus râpaient les pierres du sentier. Il fallait invoquer la Force, mais elle avait l’impression de ne plus savoir faire. Le bras amaigri de la chose se leva, prêt à la rouer de coups de marteaux, la gueule désormais béantes. Il s’abattit mais rencontre la résistance d’une vibro-dague impériale. Dans la précipitation, Shar avait retrouvé un éclair de lucidité, portée par l’adrénaline, et avait opposé sa lame. Le poignet tenant le marteau fut coupé net et la Sith donna un nouveau coup, puis un autre. Le sang poisseux giclait en même temps que des morceaux de corps efflanqués se désolidarisaient du tronc de la créature. Dana s’appliquai, frappait plusieurs fois, prise d’une transe maladive, tremblante. Et sans prendre le temps de regarder son œuvre morbide, elle se redressa, chancela sur plusieurs mètres et se mit à courir vers le fond du jardin, quittant le sentie pour s’engager dans les zones marécageuses. Elle trébucha, tomba à genou et soutenant son ventre, se releva encore, les pieds enfoncés jusqu’aux chevilles dans la boue.

Elle se rendait compte qu’elle criait, couverte de sang noir. Elle criait des choses incompréhensibles, pour se donner du courage, pour exorciser sa terreur et sa colère et parce qu’elle était arrivée face à un rempart, un mur élevé qu’elle n’arriverait jamais à escalader dans son état. Elle plaqua ses paumes fébriles contre la paroi et les laissa glisser, à la recherche d’une ouverture, elle longea le mur quelques mètres dans un sens, puis dans l’autre, s’épuisant.  Elle frappa contre l’obstacle, mais n’arrivait plus à hurler.

Le sol trembla brusquement et le bruit d’une explosion à des centaines de mètres de là retentit à son ouïe. Elle se détourna en direction du manoir qui avait consumé un bout du ciel quand les flammes commencèrent à le dévorer. Elle glissa dans la fange du marécage pour faire demi-tour et se précipiter.

- LLOYD !

 






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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


Un feu d’artifice.





- MAT ! Mais t’es folle, qu’est-ce que tu fiches ?! J’allais tout faire sauter !

Il avait trouvé la twi’lek dans le corridor qui longeait la cuisine, avec l’autre twi’lek, qui s’était immobilisé, les yeux écarquillés, dès qu’il avait reconnu le hapien. Mat’aenna tirait le technicien par la main, l’air déterminée.

- J’pouvais pas le laisser, j’t’expliquerai ! lança Mat’ en dépassant Lloyd et le trio se mit en branle vers le salon.

Quelques instants plus tard, ils émergèrent devant le jardin. Le hapien tourna autour des deux twi’lek comme un fauve lâché hors de sa cage et les intercepta tous les deux en se plaçant sur leur chemin. Le technicien tremblait de tous ses membres.

- Non mais ça va pas ou quoi ?! Et j’suis venu en barque, pas en péniche ! Tu veux pas emporter quelques valises tant que t’y es !
- Lloyd t’es vraiment con quand tu t’y mets ! Regarde ce que tu lui as fait ! s’exclama Mat’ en s’arrêtant, désignant le lekku assombri et la lèvre fendue de son acolyte.
- Il avait qu’à coopérer !
- CAZNE M’A BEAUCOUP AIDEE FIGURE TOI IL MERITE PAS DE CREVER PARCE QUE TU ES PASSE PAR LA ! s’écria-t-elle brusquement.

Le hapien la fustigea du regard.

- Ah Cazne c’est son petit nom ? Et c’est quoi ton truc avec lui, c’est de lui ton gosse c’est ça ?

Mat’aenna vit rouge et, pour la seconde fois de la soirée, asséna au hapien une claque sonore. L’autre twi’lek recula d’un pas, en bégayant quelque chose d’incompréhensible. Lloyd encaissa sans une protestation.

- T’es devenu comme eux, Lloyd, l’accusa-t-elle, les yeux plein de larmes. Une brute violente.
- Nan, je le suis pas devenu, je l’ai toujours été, gronda-t-il.
- T’aurais jamais dû venir me chercher !
- Ah parce que tu préfères Orcus ?! Il était plus sympa ? Excuse-moi d’être un peu sur les nerfs on risque juste tous de crever d’un instant à l’autre, là ! Ecoute t’as le choix, vas-y, tu préfères quoi ?! Le manoir d’Orcus ou la liberté en passant par moi ?!
- J’te déteste ! cria Mat’, et elle s’éloigna en sanglotant, tirant Cazne derrière elle vers les jardins.

Lloyd attendit un bref instant à se mordre les lèvres.

- BEN VOUS AVEZ QU’A FAIRE UN CLUB AVEC DANA ! lui cria-t-il subitement.

Et il resta planté là, à regarder les deux twi’lek s’éloigner vers le fond du jardin. La colère faisait bouillonner son sang mais dès que Mat’aenna et Cazne disparurent de sa vue, il sentit retomber la haine. Elle s’était dissoute aussi subitement, aussi absurdement qu’elle était arrivée.







Un feu d’artifice. Il avait attendu quelques minutes, pour leur donner le temps de descendre le plus loin possible, avant de s’éloigner du manoir de quelques pas. Alors, il avait allumé le briquet, puis l’avait jeté dans la pièce, avant de s’éloigner en courant. Le feu mit quelques secondes à courir dans le salon, dévaler les escaliers, atteindre le laboratoire. Puis il y eut une explosion brutale qui força le hapien à se coucher sur les gravillons, la chaleur léchant ses vêtements et ses cheveux tandis que le feu s’était mis à illuminer follement les jardins. Un feu d’artifice.

Il s’était relevé dès que possible, étourdi par le souffle, la chute, toutes les informations de la soirée, de cette Dana en robe de Jabiim qui lui était rentrée dedans pour sa cérémonie de promotion à ces retrouvailles sans queue ni tête avec Mat’aenna. Ses oreilles sifflaient désagréablement ; il lui sembla entendre des cris, il lui sembla entendre son nom, mais il devait rêver. Le manoir était devenu un brasier immense, certains arbres à proximité s’étaient transformés en torches grandioses qui lui éclairait la voie.
Après les graviers, les lianes étranges et gluantes, il se retrouva les bottes embourbées dans les marécages, et il continua tout droit, jusqu’à voir les trois silhouettes près des remparts.

Tout s’était passé en silence ensuite. Mat’aenna réussit à grimper la première, et le technicien ensuite. Lloyd avait porté Dana le plus haut qu’il avait pu, il l’avait soulevée pour qu’elle pût s’asseoir sur son épaule, tendre la main vers Cazne qui la tira vers lui, puis Dana put mettre un pied sur l’épaule de Lloyd avant d’enjamber le rempart. Le trio était redescendu en glissant maladroitement vers la barge, et Lloyd avait réussi à escalader à son tour, sous les yeux rouges et confus d’ES-72 et Luis qui ne comprenaient pas vraiment tout ce que ce petit monde signifiait. Quoiqu’il en était, le hapien trancha la corde au sabre laser pour libérer le petit esquif alourdi de tous ses passagers – ils poussèrent quelques caisses à l’eau pour l’alléger un peu, et les moteurs se mirent à glouglouter, les poussant sous un pont pour prendre de la vitesse dans le courant. Deux twi’leks, un nexu, un hapien, une togruta, un droïde et une humaine avaient levé les yeux longuement vers le spectacle vertigineux de cette demeure qui partait en fumée. Au loin, des sirènes retentissaient, donnant l’alerte, mais les sept âmes sur le vaisseau silencieux ne pipaient mot, étourdis de tout ce qui s’était passé, et de tout ce qui s’était dit.






Au bout d’un long moment, le hapien se laissa tomber sur l’une des caisses, décidant de tourner le dos à tout le monde. Mat’aenna réconfortait la togruta, qui pleurait à chaudes larmes, et le technicien ne cessait de jeter des regards craintifs vers Luis, qui embrassait tout ce petit monde du regard en se léchant les babines.

- Dana Shar, dit subitement ES-72. Identité reconnue. Bonjour. Comment allez-vous depuis votre mésaventure avec Lloyd Hope ?
- ES, ta gueule.

Mat'aenna jeta vers le hapien un regard contrarié.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Le chagrin était revenu comme un vieil ami en quête de compagnie







Ils avaient vogué sur le fleuve une heure ou deux, réacteurs éteints pour ne pas attirer l’attention, se laissant dériver sur les courants impétueux avant de comprendre qu’ils avaient trop remonté. Il fallait « accoster » sur la berge et continuer à pied désormais, car sinon, ils s’éloigneraient de Kaas City pour s’enfoncer dans les terres sauvages de Dromund Kaas. De toute manière, plus en amont, ils rencontreraient un barrage de retenue d’eau conséquent.





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Au moment où le boatspeeder percuta une berge mal entretenue, que la végétation avait grignoté au fil des années, Dana leva ses prunelles vers la structure sous laquelle ils s’étaient arrêtés. C’était l’un des ponts principaux de la cité, celui qui permettait de relier une partie désaffectée de la ville à son centre dynamique. Au loin, les tours d’un Temple Sith servaient de repères. L’Inquisitrice quitta le transport en manquant de s’étaler par terre. Elle pataugea un peu dans l’eau boueuse de la rive avant de réussir à atteindre la terre ferme tandis que tout le monde débarquait à son tour. La rouquine s’isola à quelques mètres d’eux, contre l’un des immenses piliers du pont. Elle vit les esclaves se rassembler sous l’œil de Lloyd Hope qui échangeait quelques mots avec Mat’aenna.

Luis ne tarda pas à la rejoindre et elle se défit de sa bure sale. Sa robe intacte, comme la peau de ses bras et des jambes, se dévoilèrent à l’air brumeux, proies faciles pour le froid mordant de l’aube kaasi dont les rayons coloraient la surface du fleuve. Dana trempait des morceaux de sa bure dans une flaque d’eau proche pour s’essuyer le visage, frotter les couches de saletés, de sang, de sueur. Elle avait le geste mécanique et le regard fuyant. Plus elle effaçait, plus elle tremblait. Elle n’avait pas pris le risque de se laver à même l’eau du fleuve, si le sang de la créature était un vecteur de transmission, elle ne voulait pas qu’il se dilue dans l’eau et qu’un animal prenne le risque de se désaltérer au fleuve et de contaminer encore la population. Alors, elle frottait, à s’en faire rougir les joues et le front, se disant qu’elle brûlerait la bure. Bientôt, son visage redevint celui d’une humaine fatiguée. Sans son maquillage, elle perdait quelques années sur son âge véritable et apprêtée dans cette robe festive, elle ressemblait à une jeune fille kaasi qui avait simplement trop fait la fête et qui venait décuver en paix. Le glorieux portrait d’une Inquisitrice donc.

Avant de rejoindre le reste de cet étrange équipage, elle palpa son petit ventre, soucieuse, jusqu’à sentir un ou deux légers mouvements. Ce n’étaient pas les coups vigoureux qu’elle avait senti sur le Sans-Visage, mais ce fut suffisant pour la rassurer sur l’état de santé de ses bébés, ou du moins, lui donner l’illusion que tout allait bien.



- Bon, je vois qu’il vous manque plus qu’un barbecue, ironisa-t-elle froidement en les voyant ainsi rassemblés, mais personne ne sembla goûter à son humour alors elle se détourna vers Lloyd. Tu devrais appeler Mumkin, voir si…il sait pas venir vous prendre avec le Sans-Visage, la berge est assez grande. Je vais faire comme si ces deux-là (Elle désigna le twi’lek et la togruta) avaient péri dans l’incendie, ok. Mais t’es responsable d’eux. T’as intérêt à vérifier qu’ils ont pas été mordus ou contaminés. Quant à moi, je vais rester là et appeler Runà, pour que les hommes de Varnak viennent m’embarquer, je sais toujours pas si j’ai pas été infectée. Donc…vous avez tous intérêt à être partis d’ici là.



Sa voix était neutre quand elle n’était pas glaciale. Au soulagement d’avoir découvert que Lloyd avait survécu s’était superposée la colère. Et le chagrin était revenu comme un vieil ami en quête de compagnie. Sa solitude érigeait de nouveaux remparts autour d’elle. Mat’aenna semblait fixer le ventre seyant de l’Inquisitrice, les lèvres pincées pour retenir une nuée de questions. Elle regardait cette évidence puis se mettait à rudoyer le hapien d’un regard interrogatif.

- Bref, je pense pas qu’Orcus sache que t'étais là. S’il avait du matériel de surveillance il a dû être détruit, mais on sait pas si les holo-images sont pas stockées en temps réel sur un serveur sécurisé, mais le temps qu’il y accède pour les visionner. Je serai sa cible prioritaire. Il m’a toujours détesté. Je devais payer pour Damaya, bah, il me fera aussi payer pour le virus, le manoir, le esclaves morts ou en fuite. J’en ai pas grand-chose à faire. Donc vous pourrez vivre vos petites vies pathétiques et dormir sur vos deux oreilles.


Elle recula d’un pas ou deux, s’apprêta à faire volte-face mais une dernière amertume la retint et elle s’adressa à Mat’aenna.

- Surtout, pas la peine de me remercier.
- Quoi ?
- C’est pas comme si j’avais pas ramené ton compagnon pour que tu puisses vivre libre. Ou que j’avais risqué ma vie et celles que je porte en moi avec.
- J’ai rien demandé. Lloyd aurait pu me retrouver, seul. Si une Inquisitrice s’en était pas mêlée, y’aurait peut-être pas eu autant de vies gâchées.

Dana ne répliqua rien. Elle se contenta d’hocher du chef, complètement atterrée, mais cela n’avait plus d’importance, ce que pensait Mat’aenna. Shar avait décidé de faire un choix pour Hope, pour que tout soit plus simple. Dans ce silence froid, elle fit demi-tour pour retourner contre le pilier. Elle étendit ses jambes devant elle afin de soulager sa fatigue pesante et piocha dans la poche de sa bure roulé en boule pour extirper son comlink. Elle commença à parler, mais à quelques mètres de là sa voix retentit dans le comlink du hapien. Elle soupira d’agacement. Elle avait oublié de changer la fréquence pour la ligne de Darth Runà. Elle porta l’appareil devant ses yeux épuisés et manipula les petites commandes.






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Ce que pensait Mat’ de lui, ce que pensait Dana de lui, n’avait plus aucune importance.





Le hapien regarda Dana s’éloigner d’un œil sombre, les lèvres pincées. Mat’aenna avait croisé les bras sur sa poitrine, contrariée, et elle poussa un soupir sonore avant de se tourner vers Lloyd, comme visiblement il ne réagissait pas.

- Elle est complètement irresponsable, lâcha-t-elle. Risquer la vie de son bébé, c’est elle qui devrait nous remercier de la tirer de là.

Le hapien ne répondit rien. Ses yeux fouillèrent les alentours. Il reconnaissait le pont, bien sûr, comment ne pas le reconnaître ? Mais il avait pris ses décisions. Ce que pensait Mat’ de lui, ce que pensait Dana de lui, n’avait plus aucune importance. Ne devait pas en avoir. L’Inquisitrice avait raison : il était un capitaine de frégate désormais et il faudrait qu’il montrât à ses hommes qu’il ne faisait pas d’état d’âme. Autant s’entraîner tout de suite.

- Rejoins-la.
- Quoi ?!
- Oui, et les autres aussi, ajouta-t-il en indiquant le pont d’un geste bref. Tout le monde là-dessous. Allez on se dépêche.

Cazne et la togruta se hâtèrent, habitués à l’obéissance sans poser de questions. Luis avait rejoint sa maîtresse de son pas feutré, et se mit à suivre de son pas rigide.

- Qu’est-ce que tu fais ?!
- Rejoins-les.
- Tu crois pas qu’il faut qu’on discute ?
- Tu crois pas que c’est pas le moment ? J’ai dit : rejoins-les, décréta-t-il sèchement.

Le Sith se détourna pour marcher lui aussi vers le pont d’un pas raide, et la brume formait comme un cocon glacé autour d’eux. La twi’lek le suivit, atterrée. Lloyd lui indiqua de passer devant lui et elle obéit, plus inquiète que contrariée, désormais. Ce comportement ne lui disait rien qui vaille.

- ES, tu les surveilles. Le premier qui essaie de s’enfuir, tu tires. Le premier qui bave, qui a un comportement anormal ou agressif, tu tires. Si tu as un doute, tu me contactes. Personne ne doit s’éloigner, c’est clair ?
- Entendu, Lloyd Hope.
- Lloyd ?! Mais qu’est-ce que tu…
- Vous êtes en quarantaine. Désolé, j’ai pas mieux pour vous héberger pour l’instant. Alors vous restez calme. Vous bougez pas d’ici. Je reviens dans pas longtemps.

Il gratifia Dana et Mat’aenna d’un regard dur d’avertissement, avant de s’en aller, rigide. Sa silhouette fut avalée par le brouillard.









La togruta s’appelait Shyakerlin, mais on l’appelait habituellement juste Shy. Maintenant que le hapien les avait laissés là, Shy et Cazne s’étaient un peu détendus. Ils restaient néanmoins loin de l’Inquisitrice, par précaution. Les trois aliens s’étaient assis aussi, à quelques pas, serrés les uns contre les autres pour se tenir chaud, leurs yeux suivant parfois les mouvements de Luis avec une lueur inquiète. ES-72 était plongé dans le silence, ses yeux rouges veillant attentivement. Shy avait passé un bras autour des épaules de Mat’aenna, sur les joues de laquelle roulaient de grosses larmes silencieuses.

- C’était… C’était lui, alors ? Ton Lloyd.

La twi’lek renifla, hochant la tête en un signe positif.

- Mais il a… On dirait qu’il a beaucoup changé, constata-t-elle platement.

Elle s’essuya les yeux, essaya de grimacer un sourire, et Shy la serra contre elle avec gentillesse.

- Mais il est venu quand même. C’est que tu comptais pas pour rien. Laisse-lui le temps. Pour lui aussi, tu es probablement plus la même femme. Tu lui as dit, pour… ?
- Pour Tuki ? Oui. Il l’a mal pris. Il a cru que Cazne était le père.

Les deux twi’leks se mirent à rire. Elles faisaient contre mauvaise fortune bon cœur. Cazne les regarda, étonné de cette hilarité.

- Mais t’as raison, oui. Je vais être patiente. J’espère juste qu’il… Qu’il est pas déjà le meurtrier qu’ils voulaient faire de lui.

Il y eut un silence embarrassé. Shy ne savait pas quoi dire. Mat’aenna était avec un Sith. Malgré les histoires qu’elle avait racontées, les Sith n’étaient pas des êtres cléments et bienveillants. Et Lloyd ne lui semblait pas bien différent des autres Sith. Mais on ne pouvait pas dire ce genre de choses devant une Inquisitrice.

- Ça fait combien de temps ? Que vous êtes séparés.

La twi’lek grimaça.

- Six ans qu’on est revenus dans l’Empire, mais avant ça, on a été séparés presque deux ans. Ça fait … Huit ans en somme.

Shy et Cazne arrondirent leurs yeux d’alien.

- Ça fait un sacré paquet d’années, dis donc, tu m’étonnes que tu le reconnais pas.

Shy pensait que c’était une belle preuve d’amour. Cazne pensait que le type était un drôle d’obsédé, pour réapparaître si longtemps après. Mat’aenna ne savait pas quoi en penser. Elle tourna son regard mouillé vers l’Inquisitrice à quelques pas de là.

- Merci, du coup. Et ce merci-là est sincère. Mais…

Les yeux bleus de la twi’lek brillèrent dans la nuit, d’une drôle de détermination.

- Tu as l’air d’être un genre de… Collègue de travail. Tu peux peut-être me dire s’il compte garder sa fichue frégate, ou s’il compte arrêter avec sa carrière ?









A quelques kilomètres de là, le hapien entrait dans une boutique qui ressemblait à un bric à brac que les gens portant son uniforme ne fréquentaient pas. Un minuscule balosar, derrière le comptoir, agita ses antennes en le saluant fébrilement.

- Vous cherchez quoi ?
- Des couvertures, des thermomètres, et à manger.
- Tout de suite.

Le balosar traversa sa boutique en désordre, en extirpa toutes sortes de tissus, réussit à trouver une couverture, puis une autre.

- Combien ? De couvertures ?
- Quatre, ça serait bien.
- Ok ! Et de thermo ?
- Un seul.

Quelques allers-retours plus tard, le marchand posa tout sur le comptoir, ajouta au tas des barres vitaminées.

- Encore ?
- Oui, un peu plus.
- Et à boire ? demanda-t-il encore en rajoutant une poignée d’emballages flashy contenant les barres.
- Oui, si c’est léger.
- J’ai des jus de fruits comme ça, et du kishy.
- Du quoi ?
- Du kishy, c’est un alcool local.
- Ouais, je prends. Le jus et le kishy.

Il régla avec sa carte, avant de ressortir les bras chargés de sa montagne d’objets. Il traversa une rue, posa le tout sur un banc, avant de déployer une couverture pour tout empaqueter de façon plus pratique. Quand il eut fini, il ouvrit la bouteille de kishy. Le liquide avait une odeur fruitée très forte, comme un liqueur. Au moment où il la portait à ses lèvres, assis sur le banc, un couple d’humains élégants passa et la femme se pencha vers lui dans sa robe pourpre. Elle lui tendit un billet avec un clin d’œil et il le prit ahuri, pensant que c’était un mot.

Mais non, c’était un billet d’un crédit galactique. Le hapien regarda de nouveau le couple qui s’éloignait, ahuri. Il réalisa soudain que l’homme portait un uniforme de cérémonie de la Marine Impériale. Etait-ce l’un des autres promus, qui finissait la soirée d’humeur joyeuse avec son épouse avant d’embarquer pour ses nouvelles fonctions ? Lloyd baissa un bref instant les yeux sur lui-même. Ses vêtements que la boue avait sali, la couverture qui contenait quelques affaires, la bouteille à la main.

C’était donc à cela qu’il ressemblait.

Doucement, il se leva. Derrière le banc, le fleuve au-delà d’un parapet de béton s’écoulait, et soudain il jugea approprié de plier le billet, de l’insérer dans sa bouteille d’alcool qu’il n’avait pas vu. Il se baissa pour y mettre quelques pierres, qui coulèrent au fond de la bouteille. Enfin, il fouilla ses poches, et trouva une photo. Il la glissa aussi par le goulot, puis il prit une inspiration.

Il jeta la bouteille de toutes ses forces vers l’autre rive avec un cri de rage.



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Les Feux du sacrifice

L’attente fut longue et insupportable







- Il va la garder, parce que c’est un vrai Sith et qu’il est loyal. Ne me dis pas que tu espérais qu’il renonce à ce qu’il a mis tant d’années à construire, à la sueur de son front, au prix de sacrifices douloureux. Mais écoute, vos problèmes de couple, j’veux pas m’en mêler.

Dana avait répondu avec un détachement étrange. Elle avait enfin fini de régler la bonne fréquence et voulu enclencher la communication mais la togruta surnommée Shy, lâcha un gémissement de douleur. L’Inquisitrice renonça à sa liaison comlink et fronça les sourcils pour l’observer à trois mètres de là. Son visage coloré se contractait et Mat’aenna était déjà penchée sur elle, soucieuse.

- Shy ! Qu’est-ce que tu as…
- Ne la touche pas ! s’exclama Dana en roulant sans élégance sur son flanc pour s’accroupir et ramper vers le trio.

D’un geste sec du bras, elle repoussa la twi’lek verte et inspecta Shy d’un regard acéré. Ses doigts tremblants, au vernis écaillé par les épreuves, attrapèrent le tissu de la robe d’esclave pour la retrousser sans délicatesse.

- Qu’est-ce que vous faîtes ?! geignit Mat’ alors que Cazne la retenait entre ses bras, inquiet.
- Bordel..bordel…souffla la Sith.

Ses yeux écarquillés venaient de tomber sur une trace de morsure, au-dessus de sa cuisse, violaçant un derme couleur sable. Shy se mit à trembloter, apeurée et secoua la tête, faisant danser ses lekkus courts enrobés de soie noire. Là où des dents enragées s’étaient enfoncés, les chairs commençaient à se nécroser et à saigner, un peu purulentes.

- C’est l’adolescent, l’gamin là IL T’A MORDU ? T’AS RIEN DIT !
- Laissez-la !
- Elle est infectée ! s’écria Dana après avoir gratifié Mat’aenna d’une œillade enragée. Elle va mourir et tenter de nous dévorer après !
- Non…sanglota Shy. Attendez…
- Tu as travaillé dans le laboratoire d’Orcus hein ? poursuivit-elle sans prêter attention à la malade. TU SAIS DE QUOI sont capables ces trucs ou pas ?! Ils…meurent et se relèvent, sans Force, sans magie, sans technologie ! Ils reviennent et ils sont obsédés à l’idée de t’agresser de…de déchirer la peau ! Alors maintenant, on vous tous se déshabiller ! Et on va inspecter nos corps, pour voir si personne d’autres n’a été mordu !
- C’est ridicule !
- C’est du bon sens ! Enlevez vos vêtements, maintenant, ou je fais de la prévention autrement.

Ce qui signifiait les tuer, tout simplement. La menace voilée choqua les deux twi’lek. Cazne commença à obéir, dézippant la combinaison de technicien qu’il portait, les mains fébriles.

- Cazne..Arrête..t’es pas obligé de faire ça, supplia Mat’aenna.

Dana plaqua sa paume contre le front de Shy. Il devenait brûlant. Elle se mordit la lèvre inférieure et dévia son attention vers ES qui veillait toujours minitieusement. Avait-il des capteurs de chaleurs ? Ce n’était pas un droïde médical, avec un peu de chance il ne savait pas détecter une fièvre sans indication claire de son propriétaire. Elle porta son comlink à ses lèvres.

- Maître Runà. Maître ! Bordel !

Un grésillement, puis deux.

- Quel langage, Dana. J’allais te contacter, que s’est-il passé au manoir d’Orcus ? Les autorités parlent d’un acte terroriste…
- Vous déconnez ?! C’était le seul moyen de…d’endiguer ce qui se terrait là-bas, j’ai pas eu le choix.
- Et bien, tu as complètement raté ton coup. Dana tu devais ramener l’échantillon, c’était une preuve contre Orcus. Tu as maintenant détruit notre seule chance de prouver que c’était un traître. Rentre immédiatement me faire ton rapport.
- Je peux pas...je suis peut-être infectée et…les domestiques du manoir ici, ils le sont peut-être aussi.
- Les domestiques ? Ici ? Tu es avec des survivants ? Dana. Tu dois partir. Les domestiques des Seigneurs Sith ont une puce implantée qui permet à leur propriétaire de…les localiser en cas de fuite. Orcus va les retrouver s’ils sont encore en vie.
- C’est…c’est vrai ce qu’elle dit ? s’exclama-t-elle vers Mat’aenna et Cazne qui baissèrent le regard, s’emmurant dans un silence à la fois approbateur et désespéré. Vous comptiez nous le dire QUAND ?! Où..où elles sont ces puces ?
- Dana, c’est inutile, on ne peut pas les retirer sans une opération délicate.
- D’accord, d’accord…faîtes-venir les autorités alors, qu’elles nous trouvent avant Orcus pour nous mettre en quarantaine. Je vous en supplie, vous direz…au docteur Vega de leur retirer la puce je….
- Dana ressaisis-toi, cracha sèchement la voix de la Miraluka. Donne-moi ta localisation précise.
- Un pont…le premier qu’on voit depuis le Temple Sud de Kaas City, près de…la planque de Zal Ykis.
- Une patrouille est proche de vous, je vais leur donner des instructions.

La liaison se coupa et Dana se plia en deux dans un gémissement de souffrance. Le stress venait de planter milles aiguilles désagréables dans son ventre.


L’attente fut longue et insupportable. Ils s’étaient chacun inspectés. Cazne s’était montré pudique, mais avait coopéré. Aucune trace de morsure. Le corps de Mat’aenna avait dévoilé ses charmes persistants sous la matinée froide de Kaas, l’Inquisitrice avait inspecté ces courbes qui avaient dû ravir les yeux, les mains, les lèvres de Lloyd plus d’une fois. Aucune morsure. Et parce qu’elle était logée à la même enseigne, elle dût être examinée par les yeux bleutés de la Twi’lek qui secoua la tête. Aucune morsure. Ne restait plus que Shy. Il fallait décider de son sort, mais déjà des sirènes et des gyrophares saturaient l’air ambiant. Le speeder d’une patrouille militaire impériale s’échoua sur la berge près de leur position. Des soldats armés descendirent par l’arrière sous la supervision d’un sous-officier.

Et il y eût un premier tir.

ES venait de percevoir ces individus comme une menace pour les profils de Mat’aenna et Dana Shar. La twi’lek étouffa un cri de stupeur et se réfugia avec Cazne près du pilier tandis que les soldats s’étaient mis à répliquer sous le regard impuissant de Dana qui s’empressa de ramener Luis à ses côtés, sidérée par la tournure improbable des évènements. Elle aurait aimé réagir mais son ventre devenait trop pénible, trop douloureux, l’empêchait de se concentrer sur la Force ou sur une pensée cohérente. Sa vision se brouilla, tout ne devint qu’un tableau flou d’où les sons s’étiraient, lointains et fuyants. Elle tomba d’abord à genou, les tempes bourdonnantes, le cœur au ralenti, puis sa conscience sombra dans les ténèbres, emportant son corps à terre, inerte.

























Une cellule minuscule, éclairée par un néon crasseux qui se maintenait pauvrement au-dessus d’un évier en inox. A côté d’une couchette sommaire où la silhouette de Dana reposait, des toilettes obsolètes mais heureusement propres et à quatre mètres, une grille formée par des barreaux à énergie. L’Inquisitrice grogna en sortant de sa léthargie, elle pencha sa tête par-dessus la couchette et réussit à peu près à viser la cuvette quand elle régurgita ce qui lui restait sur l’estomac. Derrière le rideau de ses mèches écarlates désordonnées, elle aperçut de vagues silhouettes familières. Cazne et Mat’aenna blottis l’un contre l’autre pour se transmettre un peu de chaleur. Ils étaient assis à même le sol, non loin de l’évier, près des barreaux dont la lueur magnétique les illuminait discrètement. Elle se remit sur le dos et dans sa vision périphérique une troisième silhouette avait émergé. Elle se redressa sur un coude en catastrophe.

Lloyd Hope était là aussi, debout au pied de ce minuscule lit misérable, adossé à l’angle que formaient le mur et les barreaux, faisant face au duo twi’lek.

- Quoi…souffla-t-elle, interloquée avant d’avoir le tournis et de se laisser retomber sur le sommier inconfortable.






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Les Feux du sacrifice


Dans sa tête, il enterrait tout.





- On est tous en quarantaine, expliqua Lloyd quand Dana s’était redressée.

Ca rappelle des souvenirs, hein ? Le hapien détourna le regard pour poser les yeux sur l’allée qu’il distinguait au-delà des barreaux magnétiques, comme s’il surveillait l’endroit. En face, Mat’aenna et Cazne étaient plongés dans un silence pesant, les yeux baissés. Le temps s’écoulait, épais et visqueux, désagréable.

- Que… Hum… Votre excellence ? couina Cazne.
- L’appelle pas comme ça, murmura Mat’aenna, sombre. C’est Lloyd.

Mais le twi’lek ignora la remarque.

- Votre excellence, allez-vous nous rendre à Orcus ?

Le hapien refusa de le regarder. Il continuait à guetter le couloir, comme s’il n’avait rien entendu, mais finalement se décida à répondre.

- Toi, non, tu vas témoigner contre lui. Expliquer tout ce que tu as vu sur un enregistrement. Tu vas raconter le laboratoire, les esclaves qui disparaissent, le gosse dégénéré, et tout ce qui pourrait prouver qu’Orcus est un traître. Puis on va te retirer ta puce et tu seras vendu à une autre maison.
- Mais...
- Ce n’était pas une question. C’était un ordre.
- Mais Lloyd, fit Mat’aenna d’une petite voix, les paroles d’un esclave ne valent rien pour la justice impériale.
- Pour la justice peut-être pas, mais pour le renseignement militaire, ça va compter, crois-moi.

Ils retombèrent dans un silence empli de leurs souvenirs de la soirée.








Lloyd, Lloyd, arrête, ne fais pas ça, attend, on peut la sauver. Le hapien entendait encore les cris de Mat’ quand il avait sorti son sabre laser, après avoir interrompu ES dans sa défense, après avoir vu Dana écroulée, et Shy fiévreuse. Il avait laissé tomber par terre les couvertures dès qu’en arrivant à proximité du pont, il avait entendu les tirs de blaster, il avait vu les gyrophares des patrouilles. Il s’était jeté au milieu de la cohue, avait ordonné le cessez-le-feu, on ne l’avait pas écouté, il avait donc allumé sa lame rougeoyante et cela avait calmé les esprits. La patrouille avait dit qu’il fallait mettre tout ce petit monde en quarantaine, en tous cas les êtres organiques, ordre du Seigneur Varnak, et il avait obtempéré, sous la menace des blasters fébriles.
Les soldats avaient pris Cazne, ils avaient porté Dana, Luis n’était plus visible nulle part. Ils avaient voulu prendre Mat’, mais elle ne voulait pas lâcher la togruta, alors le hapien l’avait arrachée lui-même à son amie, l’avait forcé à reculer, elle avait crié encore, les yeux plein de larmes, et il avait attendu qu’elle fut montée dans le speeder et que la porte fut refermée sur elle avant de se retourner pour trancher d’un geste sec la gorge de Shy.

Puis les soldats l’avaient menotté à son tour, on l’avait fait monter dans un autre véhicule, il devait aller en quarantaine lui aussi. Il s’était laissé conduire en gardant le silence après bien insisté sur le fait que le corps de la togruta devait être récupéré et calciné.









Dans la cellule, un froid glacial s’était installé entre eux tous, pendant près d’une heure. Parfois, l’un des twi’lek allait boire. Au bout d’un long moment, Mat’aenna se leva, mais cette fois-ci, elle traversa doucement la pièce, pour s’approcher de Lloyd. Il resta immobile, comme s’il n’avait rien remarqué.

- Je… Je comprends, tu sais, souffla-t-elle avec un mine contrite.
- Tu comprends quoi.
- Que tu devais le faire. Pour Shy, je veux dire.

Le hapien ne répondit rien. Il s’obstinait dans sa contemplation, les yeux vides, du couloir. Mat’aenna prit une inspiration avant de glisser avec précaution sa main dans celle de Lloyd. Comme il ne réagissait pas, mais qu’il ne la repoussait pas non plus, elle posa sa tête sur son épaule, le visage triste.

- Je suis désolée Lloyd. Pour tous les… sacrifices douloureux.

Le hapien consentit à baisser les yeux vers la twi’lek, rencontra l’océan de son regard, qui brillait de détresse, et probablement aussi d’un peu d’espoir.

- Peut-être que c’est suffisant, Lloyd, chuchota-t-elle. Peut-être que tu en as fait assez. Après toutes ces années, toi et moi, on mérite notre repos loin de tout ça, tu crois pas ?

Elle glissa son autre main le long de la joue du hapien, puis se hissa sur la pointe des pieds pour l’embrasser.

Quel goût avaient les lèvres de Mat’aenna ?
Était-ce le même qu’autrefois ?


Leur baiser s’éteignit avec douceur. Puis le hapien laissa échapper une lente expiration, avant de reprendre sa contemplation du couloir.

- Toi tu le mérites sûrement, conclut-il à voix basse.

Du bruit dans le corridor les fit sursauter tous les quatre. Des bottes qui claquaient, déterminés, et Mat’aenna s’enfonça de nouveau vers le fond de la cellule comme si elle avait pu disparaître tandis que le hapien au contraire se redressait pour mieux accueillir les nouveaux arrivants. Cette fois-ci, il n’y avait pas le docteur qui s’était chargé de lui faire signer ce drôle de contrat. A la place, deux soldats des forces locales se présentèrent, l’un jeune et musclé, plus grand que le hapien, et l’autre, plus petit et les cheveux grisonnants. Ils n’ouvrirent pas immédiatement la cellule.

- Nous allons procéder aux auditions des esclaves, annonça le plus vieux des deux d’une voix désagréablement rocailleuse en s’adressant à Lloyd.
- Vous avez signalé l’évènement à Darth Laduim ?
- Oui, oui, comme vous nous l’avez demandé. Nous n’avons pas encore eu sa réponse. Nous vous passerons la communication si besoin.

Mat’aenna écarquilla les yeux et soudain elle bondit pour être auprès de Lloyd.

- QUOI ? Darth Laduim ?! Mais qu’est-ce que tu fais Lloyd, il va, il va me…
- Non, il n’en fera rien. La trahison de Darth Orcus l’occupera assez. Et par ailleurs, il saura bien vite que je t’ai retrouvée. Il vaut mieux qu’on aille aux devants des négociations.
- Mais tu es fou ! Lloyd ! Il va me reprendre ! Il va…
- Non. Je me charge de Laduim. Toi, tu témoignes concernant Orcus. Tu dis tout ce que tu as vu, dans les plus menus détails, concernant ce virus, et les activités d’Orcus.

La twi’lek sembla manquer d’air. Elle fit quelques pas en cercle, revint vers Lloyd avec un soupir.

- Alors… C’est pas exactement fini, on n’est pas encore tiré d’affaires, constata-t-elle avec amertume.
- Pas exactement, non. Mais ça viendra.

Ils se regardèrent, et Mat’aenna fit un signe négatif de la tête, comme si elle déposait les armes. Les deux soldats, dans l’intervalle, avaient déverrouillé les barreaux et le plus vigoureux d’entre eux entra pour passer des menottes électroniques à Mat’aenna, puis à Cazne. Les deux twi’leks sortirent, escortés, et les soldats refermèrent derrière eux, laissant Lloyd et Dana dans la pénombre d’une cellule qu’ils avaient l’impression de bien connaître.

Le hapien reprit son poste, croisant les bras, le visage fermé.











Au bout de longues minutes, son visage se tourna vers Dana. Il croisa son regard.

- J’ai envoyé ES à la suite de Luis. Il va le ramener jusqu’au Sans Visage, ou bien le suivre si ton nexu refuse de coopérer, pour ne pas le perdre. J’ai exécuté la togruta, son corps va être incinéré. Ils nous ont pris nos comlink. Si tout va bien, on sera libérés au petit matin.

Voilà, c’était toutes les informations utiles, lui semblait-il.

Pour le reste, ce n’était qu’un fatras de choses dont il n’était rien capable de dire.


Schrok.

Plof.

Schrok.

Plof.




Dans sa tête, il enterrait tout, et le son des pelles était le même que lorsqu'il avait enterré ces enfants, sur Artorias.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Tout avait déjà été compartimenté, rangé, précieusement archivé.







Dana n’avait rien dit, muette comme la spectatrice d’un holofilm dont l’histoire se faisait sans que ses mots, ses émotions ou même son regard ne puissent changer quoique ce soit à la fin inéluctable prévue par le scénariste. Au moins, elle avait eu une pudeur polie en détournant ses yeux dorés de l’étreinte qu’ils échangèrent, mais elle en avait vu assez. Darth Orcus, le virus, semblaient être des échos d’une autre vie, d’une réalité qui ne la concernait plus. Il n’y avait plus qu’elle et cette honte qui grandissait dans son ventre.

Elle s’était assise en tailleur sur son très modeste lit de princesse et avait détaché ses cheveux pour mieux les rattacher et se donner un air plus digne, moins défait. Elle avait eu le geste élégant en nouant sa chevelure flamboyante et elle inspirait, expirait pour détendre ses muscles, calmer son stress qui conduisait presque toujours à une perte de connaissance ridicule. L’or de sa robe, à l’instar de ses grands yeux, illuminait un peu l’obscurité régnante. Elle jeta un œil vers les barreaux énergétiques.

- Ok. Merci. Merci pour le coup de main, je veux dire, même si t’as été un parfait…con du début à la fin. Mais….c’est pas ta faute. J’aurais peut-être jamais dû te dire pour Mat’aenna, ç’aurait été plus sage. Vous étiez visiblement pas prêts et vos problèmes sont pas complètements réglés. Alors, je suis désolée si j’ai merdé, d’accord ? Je pensais juste bien faire. Et je sais ce que tu penses de mes bonnes intentions, ça va.

Elle abaissa ses prunelles vers ses chevilles croisées et maculées de boue sèche.

- Enfin, ta compagne est revenue maintenant. Plus besoin que ça te rende dingue de savoir qu’elle est retenue en esclave quelque part. C’était…

Dana détourna sa figure pour l’enfoncer un peu plus dans l’ombre des murs étroits de la cellule. Elle souhaitait lui cacher l’humidité qui avait conquis l’étendue dorée, mais sa voix perdait en assurance, chevrotait un peu alors qu’elle faisait son possible pour conserver sa dignité.

- C’était sensé être des vrais adieux, la dernière fois sur le Sans-Visage. A chaque fois, c’est sensé être des adieux. Quand on avait quitté une cellule semblable aussi, ça devait l’être. Enfin, tu devrais peut-être reconsidérer la chose.

Est-ce que t’as pensé une seconde à moi ? Quand j’étais complétement seule face à cette créature, quand j’avais mal. Les Siths pensent pas à ce genre de choses, c’est vrai. Le filtre posé entre sa raison et ses tripes s’abîmait. Il y avait trop de mots à traiter, à trier, entre ceux qui pouvaient franchir ses lèvres, ceux qu’il fallait rediriger au fond d’elle, dans un gouffre béant qui ne se refermait plus.

- Je regrette que ce soit pas moi, ok.

Le filtre s’affola, un court-circuit quelque part l’avait rendu complètement inutile. Elle sentit un coup vigoureux porté par l’un des êtres dans son ventre et elle grimaça avant de reprendre.

- Je t’ai trouvé…parfaitement à ta place sur cette scène tout à l’heure. Le…le nom de ta frégate, Melantha. Cette vieille chanson de l’armée impériale, c’était…osé comme choix. T’as pensé à ce que tes petits camarades capitaines diraient avec leur frégate de l’Enfer baptisées, Destructeurs de mondes ou Lightbreaker. (Un pâle sourire illumina ses lèvres avant de s’éteindre, comme une fleur qui fanait). Mais je sais que Melantha inspirera la terreur aux ennemis de l’Empire, car Melantha signifie le devoir du soldat, la loyauté envers ce que nous sommes et ce qui changera jamais. T’as été inspiré.

Elle posa une paume sur son ventre et baissa son visage. Les coups avaient cessé.

- J’aurais dû te dire, c’est vrai, c’était pas très malin. Mais j’étais perdue et..j’ai vraiment voulu m’en débarrasser, mais y’a eu cette mission…tout est allé trop vite et je savais plus quoi faire. Mais voilà, t’es pas responsable et tu le seras jamais. C’est dans mon corps, c’est à moi de gérer. T’as donné ton avis sur Sycris, t’as fait ta part. Le reste, ben…c’est à moi d’assumer seule les conséquences de mon choix, qui s’est fait au détriment du tien sans doute. Mais ça n’a plus d’importance ? Je sais que Mat’aenna, elle comprendra même quand elle verra qui tu es. Si même une femme comme moi a pu comprendre, elle comprendra aussi. Ca mettra juste un peu de temps, mais après huit ans, vous êtes sans doute plus à quelques mois près.

Son attention capta le coin d’une couverture miteuse. Elle se pencha pour la déplier et la ramener sur ses épaules dénudées, puiser un peu de chaleur dans la laine grossière qui irriterait sans doute son derme.

- C’est dommage que Damaya soit morte avant l’arrivée de Mat’aenna. Elle ne l’aurait sans doute pas traitée comme Orcus l’a fait. Dama’, c’était une Sith redoutable mais….elle avait un genre de clémence pour ses esclaves qui dégoûtait Papa et tous les autres Siths. Ca la faisait rire. C’est un peu elle qui m’a montré comment se comporter avec les esclaves. T’es plus très loin de compléter ton objectif du coup. J’ai toujours été un peu secondaire. Attends, pas que je me mette en position de victime, ok. C’est absurde. Mais bon, j’ai envie de mettre des trucs au clair, une dernière fois.

Elle se rallongea sur le dos, poussant un soupir d’aise et fixa le plafond, crut voir quelques insectes y ramper.

- J’ai pas enquêté sur toi, t'as jamais été une mission. C’est vrai, j’ai dit à Darth Runà que t’en valais la peine, mais j’ai fait que dire la vérité, j’pense pas qu’on puisse me blâmer ou m’accuser pour ça. Si cette putain de Maxence m’avait tué juste après tes accusations à la con, je serai partie comme ça. Et les derniers mots que j’aurais eu de Lloyd Hope me disaient que j’étais une pute manipulatrice, après tout ce qu’on avait fait l’un pour l’autre. J’ai dit que y’avait plus d’équipe, parce que j’avais appris pour mon état, parce que…si je te l’avais dit, c’est ce que t’aurais dit aussi. Pour le reste, tout est dans ton datapad, dans les derniers messages que je t’ai envoyés.

Voilà, elle semblait plus légère. Les choses étaient mises au clair, replacées là où elles devaient l’être. Il ferait ce qu’il veut de ces informations. Il pourrait s’en laver les mains ou déjà les avoir oubliées. Dana ferma les yeux pour voir autre chose qu’un plafond crasseux. Elle n’imagina pas le passé et ne ressassa pas les souvenirs. Tout avait déjà été compartimenté, rangé, précieusement archivé. Derrière ses paupières closes, elle admirait simplement un genre d’avenir, ou ce à quoi elle aspirait. Des voix d’enfants, peut-être, des cheveux blonds. Et à travers ces deux êtres, de quoi doubler les possibilités d’atteindre Dana Shar.






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Lloyd Hope
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Parce qu’ils avaient commis une folie. Ils en avaient payé un prix qu’il ne pouvait pas assumer.





Il avait tout écouté sans la regarder, à cligner des yeux.

Puis il n’avait rien répondu. Il était resté silencieux, à s’obstiner toujours, comme il s’était obstiné face aux tentatives de Mat’aenna. C’était sa résolution.






















Mais au bout d’un moment il baissa la tête en expirant un souffle de reddition, comme ce qu’il y avait en lui l’accablait physiquement, lui serrait la gorge et écrasait son thorax d’un étau contre lequel il ne pouvait lutter.

- J’suis désolé. Combien de fois j’ai dit ça ? J’suis désolé. J’suis désolé pour ce que j’ai dit sur Nar Kaaga, c’était juste insupportable d’imaginer que ça aurait pu ne pas être vrai pour toi, ce qu’on avait vécu ensemble.

Nar Kaaga. Pourquoi ce foutu jour était-il arrivé, et pourquoi à ce moment-là ? Parce qu’ils avaient commis une folie. Ils en avaient payé un prix qu’il ne pouvait pas assumer.

- Et pour… Pour l’enfant, s’efforça-t-il de prononcer, j’aurais voulu ne pas l’apprendre comme ça. J’aurais voulu être au courant avant Mumkin, mais je sais que j’ai pas aidé à ce que tu me dises la vérité, j’suis désolé pour ça aussi.

Il retomba dans un silence morne, à pincer les lèvres pour empêcher son visage de le trahir, à guetter le retour des deux esclaves ou des soldats pour la communication de Laduim, mais le corridor restait vide et silencieux.

Lui aussi avait cru que la fois dernière, les vrais adieux avaient été faits. Il se souvenait de la douleur qu’il avait essayé d’étouffer dans son oreiller, il se souvenait du courage qu’on ne peut avoir qu’en état de choc, quand il s’était habillé et préparé pour lui dire au revoir.

Tant de peine. Tant d’efforts pour qu’elle partît sur une image positive de lui. Et maintenant ? Maintenant elle voyait un autre Lloyd, un Lloyd incapable d’aligner trois mois réconfortants à une femme perdue par sa faute depuis huit ans – et d’ailleurs, comment connaissait-elle ce chiffre ? Mat’aenna et elle avaient-elles discuté des détails sordides de son histoire ?

Il posa sa tête sur le mur derrière lui en soupirant, les yeux fermés. Tellement du gâchis. Tout cela ne faisait que prouver qu’il était en train de prendre les bonnes décisions. Pour l’Empire, pour lui-même… Pour Mat’ et Dana.

Quand Lloyd rouvrit les yeux, ils étincelaient, et il se tourna vers l’Inquisitrice étendue sur la couchette, vit les larmes qui avaient coulé sur son visage et souffla de nouveau.

Soudain il quitta son poste, enfonça ses mains dans ses poches pour s’approcher d’elle, les yeux baissés comme s’il était venu faire une confession d’enfant turbulent. Il s’éclaircit la gorge.

- Dana, écoute. Ecoute-moi s’il te plaît, insista-t-il comme il voyait de nouvelles larmes sur le visage de l’Inquisitrice.

Il s’assit sur le bord de la couchette. Un tout petit bout de son corps touchait un tout petit bout du corps de Dana. Même à travers leurs vêtements, c’était comme un contact volé, quelque chose qu’ils avaient interdit, mais qui semblait quémander l’attention de la jeune femme. Il sortit les mains de ses poches pour les croiser en s’accoudant sur ses genoux, et détourna les yeux.

- Il y a eu… Il y a eu trois femmes dans ma vie, dit-il à voix basse. Trois femmes que j’ai aimé comme un fou. La première, elle s’est suicidée par ma faute. La seconde, elle est devenue domestique pour des Sith, elle a subi la vie d’esclave avec tout ce que ça comporte d’abus et tu les connais. Mat’ est un jouet cassé, comme je le suis maintenant. Alors…

Il inspira pour se donner du courage, et détacha l’une de ses mains pour la poser contre la joue de Dana. Du bout du pouce, il essuya les larmes en essayant de soutenir l’étendue dorée. Sur des joues rebondies, des joues qu’il connaissait si bien.

- Alors toi. Tu vois où je veux en venir. Je veux pas bousiller ta vie encore plus que ce que je l’ai déjà fait. Ça suffit, Dana. On a pris la bonne décision. Tu as pris la bonne décision. Il faut que tu vives ta vie. Tu vas être une grande Inquisitrice. Et l’enfant… Ce sera le tien, c’est le meilleur cadeau que tu puisses lui faire, crois-moi. Si quelqu’un sait qu’il est de moi, s’il l’est vraiment, on essaiera d’atteindre Lloyd Hope à travers lui. Et on veut pas ça. Ni toi, ni moi.

Le hapien grimaça un sourire, mais il était difficile à maintenir. Dana était jeune. Et magnifique. Elle retrouverait l’amour, se disait-il.

- Quant à moi… Je vais faire ce que je sais faire et arrêter le désastre que je crée à chaque fois que je cherche ce que je devrais pas avoir, poursuivit-il.

Ça ne servait plus à rien de retenir ses larmes. Elles roulaient sous ses yeux, comme si elles fuyaient le navire à l’approche du naufrage. Quitte à ce qu’ils se disent la vérité, autant qu’elle sache qu’il en avait pleuré d’être abandonné par elle, et qu’il en pleurerait encore. L’inspiration suivante fut un peu précipitée, mais il essaya de maîtriser sa voix.

- Ma prochaine et dernière femme, ce sera Melantha. Avec elle, j’ai encore une chance de faire quelque chose de bien. C’est comme t’as dit : maintenant c’est l’heure de défendre l’Empire, expliqua-t-il et sa voix se rompit subitement, mais il s’efforça de poursuivre, malgré le tressautement de son menton. Je penserai à toi à chaque putain de bataille, et j’espère que tu penseras à moi, au début, dans chaque putain d’astroport. Ok ?

Son visage ruisselait soudain, et les deux émeraudes qui n’avaient plus le droit de se réchauffer au soleil semblaient supplier l’étendue dorée de les bénir une dernière fois.

- Ok ? répéta-t-il.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Il fallait arrêter les conneries.







Une femme pendue. Dans cette spirale de mots et d'émotions, elle avait l'impression que cet aveu guidait son doigt sur quelque chose. Mais son coeur l'empêchait de raisonner, il se saoulait du moindre contact et buvait à même ce tout petit geste de tendresse que Lloyd avait esquissé en posant sa main sur la joue de la Sith. C'était aussi doux que plonger dans une eau fraîche par un temps caniculaire, quand on laissait son corps s'acclimater. C'était également douloureux, comme une brûlure fugace que rien ne pourrait apaiser et qui laisserait sa peau à vif.

Il y avait eu un silence durant lequel, on entendait les larmes couler. Elle eut un mouvement pour s’asseoir, être à sa hauteur, peut-être pour mieux distinguer ses pleurs ou tout simplement pour être plus proche de ses yeux émeraudes aux profondeurs infinies. Elle laissa courir ses doigts au-dessus de l’épaule de Lloyd, sans la toucher, singeant une caresse tendre. Puis son minois pâle s’était rapproché du sien, juste assez pour retrouver la sensation familière de son souffle mêlé à celui du hapien. Juste assez pour retrouver la sensation d’ivresse au bout de ces lèvres habituellement pincées et taciturnes. Leurs lèvres se frôlaient à peine, comme s’il y avait encore une barrière invisible qui les séparait, malgré le magnétisme irraisonnable, malgré l’attraction aussi puissante qu’une gravité inexorable. Mais elle baissait ses prunelles sur la bouche entrouverte du Sith et c’étaient les lippes de Mat’aenna qu’elle observait se poser dessus. Dana se demandait si ele pouvait effacer le goût des lèvres de la Twi’Lek, si elle pouvait y déposer le poison qui l’animait. Elle songeait à ce que cela déclencherait chez Lloyd Hope, ou à ce qu’elle voulait qu’un baiser provoque. Elle imaginait leurs soupirs exaltés, leurs râles précipités, la mesure de leurs corps assoiffés. Elle n’aurait eu qu’à l’embrasser, grimper sur ses genoux, le protéger du monde, devenir son monde.

Juste une minute.






Mais la réalité ne les laisserait pas faire. Dana dévia sa figure et sécha les larmes sur ses joues du bout des doigts. Son cœur avait décidé de se réveiller sous sa poitrine. Elle se rendait compte que c’était Lloyd Hope tout craché, tant de maladresse dans les mots et là on pouvait l’accuser de lâcheté, c’était juste un peu de naïveté et un brin de paranoïa.  Elle ne répondit pas et des bruits de pas agitèrent le silence du couloir. Des ombres se dressèrent devant la grille au champ magnétique dangereux et il se désactiva. Une combinaison antivirale complète et familière apparut, comme dans un songe étrange, flanquée de deux soldats.

- Dana Shar, tonna une voix féminine déformée par le comlink de son casque de protection. C’est l’heure des examens.

L’Inquisitrice se redressa sans un regard pour le hapien. La couverture glissa sur ses courbes, dévoila sa robe absurde dans un contexte pareil. Finalement, avant de suivre les gardes et le docteur Vega, elle se détourna vers Lloyd dans le même mouvement insensé qui l’avait fait basculer dans une cellule du Grand Temple, alors qu’elle devait remonter.

- J’aurais voulu…j’aurais voulu être la seule femme. Jai..J'ai aimé qu’un seul homme de toute ma vie.
- Dana Shar, répéta le médecin, d’un ton impatient et agacé.
- Et j’ai son nom sur mon sein.  J’aurais pas d’autres noms sur la peau c’est…

Ses mots se précipitaient, parce que la réalité l’avait finalement rattrapée et qu’elle n’était pas sûre d’être saine. Si elle était infectée, ce serait de vrais adieux. Avait-elle tout dit ? Elle avait peur d’oublier des mots. L’idée de quitter ce monde sans avoir pu tout dire la terrifiait.

- Bon.

Drea Vega fit un signe excédé vers les soldats qui pénétrèrent la petite pièce pour attraper Dana par les bras et rassembler ses poignets dans son dos, pour la menotter et la tirer vers la sortie. Les barreaux se formèrent dans un grésillement sec, découpant l’étendue doré qui admirait Hope au travers.

- Ok ! répondit-elle enfin, dans une exclamation spontanée lancée vers le Sith tandis qu’on l’arrachait à sa contemplation.

Jusqu’au dernier astroport de cette Galaxie.





Elle reposait sur une table d’examen équipée d’un medipod dernière génération. On lui avait inutilement attaché les poignets et les cheville pour qu’elle cesse de s’agiter. Finalement, Drea lui avait administré un léger calmant qui anesthésia sa combattivité et toute cette angoisse. Autour d’elle, des droïdes insensibles au virus tournaient autour d’elle dans un ballet flou et étrange. Elle distinguait les moniteurs alignés dans la pièce, ils lui remémoraient le sordide laboratoire de Darth Orcus.  Le docteur Vega avait tamponné les petites plaies au niveau de sa gorge et les échantillons étaient en cours d’analyse dans l’une des machines du cabinet médical sécurisé au cœur de ce bunker inconnu. La scientifique en avait également profité pour poser des sondes sur le ventre de la future-mère afin de procéder à une échographie en règle, contrôlant plusieurs paramètres sur son terminal.

- Ils sont chétifs, constata-t-elle sans émotion.
- Quoi ? geignit Dana, à moitié sonnée par le sédatif qui courait dans ses veines.
- Les fœtus. A ce stade-là d’une grossesse, ils devraient être plus grands, plus lourds.
- Il…il y a un problème ? répéta-t-elle d’une voix pâteuse.
- Il risque d’y en avoir.  Si on suit la courbe de croissance actuelle, ils ont très peu de chance de voir le jour en vie. Y’a eu des chocs, des traumatismes ? Vous mangez assez ?
- Je…tenta-t-elle d’expliquer mais elle n’avait plus les idées claires. J’ai…quelques missions.
- Ah les résultats sont arrivés, changea complètement de sujet la zeltronne dans sa combinaison tandis qu’un droïde lui transférait les données cryptées.

Plusieurs minutes s’écoulèrent durant lesquels Vega décryptaient les résultats du test de positivité au virus. Dana essayait de rassembler sa raison, de songer au diagnostic du médecin. Très peu de chance de voir le jour en vie ? Il fallait arrêter les conneries. De nouveau le vrombissement des moniteurs, le bruit léger des servomoteurs et la voix de Drea bourdonnèrent à ses oreilles.

- Inquisitrice Shar, vous m’entendez ? demanda sèchement la femme, pour la deuxième fois tout en lui retirant les sondes et les attaches qui l’entravaient. Votre test est négatif.
- Je…je fais quoi pour mes bébés ?
- Et bien, à part manger, vous reposer. Enfin, vous êtes quand même une grande fille, adulte, non ? Vous devez savoir prendre soin de vous, c’est juste de l’instinct de survie. Je peux vous prescrire des vitamines en compléments, mais ce sont que des cachets, ça protège pas des coups, des traumatismes ou du stress intense.
- J’ai…la Force

Drea ricana, franchement amusée.

- Oui bien sûr, le Seigneur Runà me fait aussi beaucoup rire quand elle me dit ça.









Les soldats se montrèrent moins brutaux quand ils l’escortèrent jusqu’à sa cellule où elle devait séjournée quelques heures, simple question de protocole et de paperasse administrative. Il fallait que Drea Vega fasse son rapport, reçoivent des instructions claires. Dana ne savait pas combien de temps elle avait passé sur cette table médicale, dix minutes, comme deux heures. A son retour dans l’espace exigü, Mat’aenna et Cazne étaient de retours, mais de Lloyd Hope, aucune trace. Les effets du calmant se dissipaient progressivement et elle s’assit sur le bord de la couchette, un peu hagarde. Les lekkus de la jolie twi’lek frémirent quand elle dressa sa figure olivâtre vers l’Inquisitrice :

- Ils l’ont emmené pour…un test et pour une communication. Ils vont nous enlever nos puces, on doit encore attendre.
- Oui…on dirait bien qu’il faut attendre, souffla Dana, un peu désorientée.
- On a dit ce qu’on pouvait pour Orcus, mais…si jamais c’était pas suffisant.
- Si c’est pas suffisant ? répéta-t-elle avant de percuter et de froncer les sourcils. Je l’éventre moi-même. C’est un rendez-vous qu’on a depuis longtemps lui et moi.

Il fallait arrêter les conneries. Sinon, ses bébés ne verraient jamais le jour. Elle pressa ses doigts inquiets contre son ventre.

- Je veux dire, il faut pas avoir peur de lui. On va vous enlever les puces, du coup, vous aurez plus rien en rapport avec lui.
- Et on va revendre Cazne…soupira Mat’aenna avec un peu de tristesse.
- Il y a des Seigneurs Siths plus raisonnables que Darth Orcus, grimaça Dana en se positionnant d’une manière qui n’arriva pas à la soulager.
- Il faut que vous vous allongiez sur le côté, ça soulage, déclara Mat’aenna. Et surtout pas sur le dos, sinon le poids de tout ça, ça vous écrase le dos.

L’Inquisitrice s’exécuta lentement, se plaçant sur le côté dans un soupir fatigué.

- Voilà, ça devrait aller mieux.







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Lloyd Hope
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Les Feux du sacrifice


Son corps était un peu douloureux – les vieilles blessures et les blessures plus récentes, la nuit agitée et les précédentes, mornes et vides, tout semblait s’être accumulé.





- … mais si ce que tu dis est vrai, Darth Orcus devra nous rendre des comptes, d’une manière ou d’une autre. Le considérer comme un renégat serait toutefois prématuré. Il aura pu souhaiter faire des recherches pour mille raisons dont toutes ne seraient pas anti-loyalistes, Lloyd.

La silhouette du twi’lek se découpait en lueurs rouges dans la noirceur d’une cellule sombre, qui ressemblait à une salle d’interrogatoire. En face du Castellan Noir, ce chien devenu un loup en uniforme sale était avachi sur une simple chaise de bois. Il essayait d’écouter son maître, mais sur sa peau ne cessait de se produire des souvenirs aussi doux qu’une nuit de tendresse et aussi brûlants que l’incendie d’un immeuble de Kaas City : le souffle de Dana contre ses lèvres, la chaleur due à la proximité de son corps, la moiteur de ses propres joues qu’il avait noyé au soleil de Ch’hodos, quelques instants plus tôt.

- Lloyd ?
- Oui, pardon. L’Inquisition pense pourtant qu’il comptait l’utiliser sur Dromund Kaas même. Pourquoi sinon aurait-il subtilisé un tel échantillon, et cherché à le reproduire à si grande échelle ?
- Est-on certain qu’il s’agit du même virus ? De nombreux Sith alchimistes travaillent à confectionner des poisons de toute…
- Oui, le coupa le hapien en fronçant les sourcils. J’ai vu plusieurs contaminés et c’étaient les mêmes que dans l’immeuble. Je vous rappelle que l’on m’a accusé, à tort, d’avoir été celui qui a sorti un échantillon du Stonx. Ce pourrait être Darth Orcus en personne. Je veux l’interroger.
- Certainement pas, trancha sèchement Laduim. S’il doit être interrogé, ce sera par quelqu’un qui saura faire face à un Sith de son rang.
- Mais je le peux ! s’indigna Lloyd en se redressant brusquement.
- Tu le pourrais, en effet, mais il me semble que tu viens d’être affecté à une frégate flambant neuve, Lloyd. Je m’occupe de Darth Orcus et toi, tu termines ta dernière mission et… tu mets de l’ordre dans tes affaires personnelles.

Le hapien laissa échapper un soupir de dépit en se laissant aller en arrière, rompant le contact visuel avec le twi’lek.

- Vous le saviez, hein, remarqua-t-il, la voix lasse.

Les lèvres de Darth Laduim s’étirèrent en un sourire entendu.

- Quoi donc ? interrogea-t-il innocemment.
- Que ce serait compliqué. Avec… Mat’aenna. Que ça ne fonctionnerait plus, ou plus vraiment. Ou plus comme avant.
- Ah, ça. Disons que cela fait partie des raisons pour lesquelles tu as enfin eu ton affectation. J’en ai eu la confirmation définitive lorsque, en t’annonçant ta promotion imminente, plutôt que de t’inquiéter de ce qu’il adviendrait d’elle, tu t’es plutôt soucié du rôle qu’avait joué l’Inquisition dans cette affectation.

Le visage de Lloyd se figea un instant, puis il expira en baissant les yeux. Darth Laduim avait raison : quelques années plus tôt, quelques mois peut-être, face à une telle nouvelle, sa première réaction aurait été de s’enquérir de la possibilité d’en profiter pour retrouver Mat’aenna. La vérité, c’était que ce jour-là, ce fameux jour où Dana était en train d’être capturée par une certaine Max, il n’avait eu aucune pensée pour la twi’lek. Il avait été obsédé par l’Inquisitrice. Aveuglé par elle et son besoin de la croire authentiquement liée à lui. Avec tout ce que cela leur avait coûté ensuite.
Le hapien ferma les yeux et passa une main sur son visage, comme pour oublier, penser à autre chose. En face de lui, l’hologramme de Darth Laduim s’était levé dans la pièce et faisait quelques pas. La silhouette du twi’lek s’immobilisa, dos à Lloyd, comme il regardait probablement l’horizon depuis son bureau de Korriban. Mais dans cette cellule, cet horizon était invisible, et seuls les murs gris et froids entouraient le hapien et son maître.

- Melantha, mmh, fit pensivement Darth Laduim. C’est un drôle de choix.

Lloyd s’était attendu à une remarque. Il s’était préparé à donner des explications, quelques jours plus tôt, lorsqu’il avait fait son choix. Mais tout ceci ne semblait plus avoir aucun sens.

- Bref. Vous remarquerez donc que je ne vous ai pas caché avoir récupéré Mat’aenna. Si je ne vous avais pas fait confiance, je me serai enfuie avec elle pour la cacher quelque part. Mais je ne l’ai pas fait, pour vous demander officiellement de ne plus l’utiliser contre moi. Je veux pouvoir lui offrir une vie quelque part, sans avoir de crainte que vous ne la pourchassiez ou quoique ce soit.

Darth Laduim resta un moment immobile, silencieux.

- Je veux pouvoir commander cette frégate sans être parasité par ce genre de considérations, abonda le hapien sur un ton pugnace, tapotant le bout de son index sur la table qui les séparait. Si vous voulez que je sois efficace, je dois pouvoir partir au front sans m’inquiéter de ce qui se trame dans mon foyer.

Le twi’lek hocha doucement la tête avant de se retourner.

- Accordé.

Lloyd croisa le regard de Darth Laduim, un bref instant étonné, suspendu dans son geste, doigt sur la table. Mais finalement il laissa retomber sa main avec soulagement. Mais sur son visage se peignait le doute, celui induit par la prudence.

- Aucun souci de ce côté-là, confirma son maître comme s’il avait lu en Lloyd. Tu en feras ce que tu voudras. Après tout elle t’appartient, désormais. Veille seulement à ne pas répéter les mêmes erreurs.

La silhouette du twi’lek parut grandir quand elle se rapprocha du hapien. Les lekkus de Laduim glissèrent sur ses épaules et se balancèrent entre eux deux quand il se pencha pour rapprocher son visage de celui de Lloyd.

- Quand on ne veut pas être un chien, Lloyd, il suffit de ne pas laisser trainer de laisse derrière soi. J’espère qu’au fil des années cette leçon aura été comprise.







Je présume qu’un chien qui se libère de sa laisse devient un loup. Le Loup de la Marine.

Et j’ai son nom sur mon sein.

J'ai aimé qu’un seul homme de toute ma vie.








Le hapien baissa les yeux en pinçant les lèvres. Mais finalement il acquiesça en silence, et Darth Laduim coupa la communication.









-------Quand le hapien fut ramené dans la cellule, non sans une prise de sang dont le docteur Vega lui avait affirmé que les résultats ne l’intéressaient guère en dehors de la présence du virus, Dana était couchée sur le côté, les yeux clos, et les deux twi’leks étaient de nouveau assis par terre. Mat’aenna se leva dès que les barreaux se refermèrent derrière Lloyd. Elle s’approcha de lui d’un pas léger pour venir lui parler à voix basse, comme si elle n’avait pas voulu éveiller l’Inquisitrice. Dormait-elle vraiment ?

- Alors ?
- Pour Orcus, il va voir. Il sera interrogé, Orcus se fiche de ses esclaves, je ne pense pas que vous craigniez quoique ce soit.

La twi’lek soupira et darda sur Lloyd des yeux sévères. Il était obligé de pencher la tête – elle était plus petite que Dana. Pourquoi faisait-il cette comparaison hors de propos ?

- Super, génial, merci. Sinon, à mon sujet. A notre sujet, vous en avez parlé ou… c’était pas si important que ça ?

Lloyd soupira. Il s’adossa au mur, jeta un coup d’œil vers Dana pour vérifier qu’elle avait les yeux clos. La poitrine de l’Inquisitrice se soulevait et se baissait sur un rythme calme, apaisé.

- Si, bien sûr. Il n’y aura plus de problème. Il ne te poursuivra pas. Et tu n’es plus une esclave. Tu es libre, maintenant.

Mat’aenna prit une longue inspiration avant de mettre une main devant sa bouche, puis la retira pour découvrir un sourire de joie. Lloyd partagea un instant cette sensation de légèreté, et un sourire en coin se dessina sur ses lèvres.

- C’est… J’ai du mal à y croire.
- Ouais, moi aussi, admit le hapien.

La twi’lek se rapprocha de lui, glissa ses mains sous ses bras pour se presser contre son torse et Lloyd l’enlaça doucement, posa son visage contre l’un des lekkus. La sensation de ce contact était étrange, inhabituelle, ramenait des souvenirs lointains.

Des souvenirs plus récents.

Le corps du hapien se tendit subitement, ses muscles se contractant tandis qu’il inspirait pour retenir sa respiration. Mais Mat’aenna se dégagea doucement pour faire un pas en arrière et se libérer sans brusquerie. Elle leva ses jolis yeux vers le hapien, dont le regard demeurait interdit.

- C’est pas grave, Lloyd, chuchota-t-elle avec douceur. On se débrouillera avec ça.

Elle lui offrit un maigre sourire avant de retourner s’asseoir près de Cazne.







-------Lloyd n’avait pu fermer l’œil durant les heures suivantes. Il s’était trouvé un coin à côté du lavabo contre lequel échouer, assis, les bras reposant sur ses genoux pliés devant lui, et ses yeux erraient parfois dans la cellule. Des traits lumineux, discrets, avaient commencé à émerger d’une lucarne, et déversait sur les corps des twi’lek une lumière qui révélait la couleur de leur peau chatoyante. A deux pas de lui, sur la couchette, le visage endormi de Dana était insupportable à regarder. Alors le hapien s’efforça de se relever. Son corps était un peu douloureux – les vieilles blessures et les blessures plus récentes, la nuit agitée et les précédentes, mornes et vides, tout semblait s’être accumulé. Mais il retrouva son poste, celui de la surveillance du couloir, juste au moment où le docteur Vega arrivait.

- J’ai tous vos résultats définitifs, claironna-t-elle en se plantant devant les barreaux, flanquée des deux soldats. Ils sont tous négatifs.
- Parfait. On peut sortir, donc ?
- Vous oui. Dana Shar aussi. Mais les deux esclaves, on doit encore les opérer.

Lloyd soupira.

- Ok, je vais attendre alors. Mais si je peux sortir hors de la cellule, au moins. Utiliser mon comlink, dans un endroit confortable, tout ça.
- Vous voulez pas qu’on vous serve un café, non plus ?

Le hapien plissa les yeux.

- En fait si, décréta-t-il, péremptoire.

Le docteur Vega fit la moue.



--------Quelques minutes plus tard, dans le hall d’entrée du poste des forces de l’ordre kaasi, le hapien ramenait deux gobelets fumant sur une table en métal de piètre qualité. Il en déposa une devant Dana Shar, pour qui visiblement le réveil avait été un peu difficile, avant de s’asseoir devant elle. Il essaya de tremper les lèvres dans le café pour se donner une contenance, mais se brûla et renonça avec un « tss » d’agacement.

- Je l’ai trop fait chauffer.

Il reposa le gobelet, s’imagina que Dana aurait voulu fumer. Il lui aurait bien fait rouler deux cigarras, avant d’utiliser son briquet pour lui intimer d’approcher. Que j’t’allume. Mais il devait arrêter de penser à ce genre de choses.

Il fronça les sourcils.

- J’ai un comlink, si tu veux appeler quelqu’un pour venir te chercher. J’ai eu Mum, tout à l’heure. ES a ramené Luis au vaisseau. Alors il l’a nourri. Il était… Il était content de s’en occuper. Si tu veux je peux lui demander de l’emmener et le déposer où ça t’arrange. Si jamais tu préfères pas repasser par le Sans Visage, je peux comprendre.

Il s’humecta les lèvres, fit tourner le café dans le gobelet d’un geste pensif, du bout des doigts. L’odeur du café se répandait, agréable, autour d’eux.

- Et aussi je propose qu’on se dise pas au revoir. On l’a déjà fait. Ce sera plus facile pour tous les deux.

Il avait baissé les yeux, évitant de croiser l’étendue dorée.



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Darth Hope
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Les Feux du sacrifice

Elle ne possédait aucun foyer, aucune maison, aucune tanière








- Tu te rappelles chez Zal Ykis la seconde fois que tu m’as parlé de Mat’aenna, t’avais...t’avais l’air désespéré et je t’ai dit toutes ces choses que t’arrivais pas à la protéger seul et que ‘ errais comme un chien. J’ai vraiment eu tort on dirait. J’ai, je t’ai entendu toi et Mat’. Je dormais pas vraiment. Je présume que, la vie de famille vient avec la carrière. Tout te réussit enfin après toutes ces années. Et je te félicite pour ça t’as été persévérant. T’as fait ça seul, et tu as acquis un rang maintenant, une situation. Une bonne situation. Elle sera bien je suis sûre, elle guérira. Les jouets cassés se réparent. Tu la présenteras peut-être sur Jabiim, je crois que Mumkin doit y retourner bientôt et c’est certain qu’il te cassera les pieds pour que tu l’accompagnes.


Elle porta la tasse usée à ses lèvres pâles et sèches. La température était parfaite. Elle lui brûla la langue, mais la sensation déversa en elle des souvenirs récents comme le goût fumé d’une barquette lyophilisée passée trop longtemps au four. Dana se rendait compte qu’elle aimait quand il faisait chauffer ses aliments si fort. Elle avait l’impression que c’était elle qu’il allumait, comme quand il faisait bouillir ses veines, son derme, sa voix lors de sa présence contre elle, sur elle, en elle. Elle prit une légère inspiration dans un tressaillement à peine perceptible qui illustra le trouble brûlant dans lequel ces souvenirs la plongeaient.

- J’ai personne à appeler, ajouta-t-elle, la bouche toujours suspendues au-dessus du breuvage, s’obstinant à en admirer la surface pour éviter le regard de Lloyd.


Personne ne viendrait la chercher cette fois-ci. Elle pourrait attendre là une éternité. Il la livrait à la solitude la plus complète. Elle ne possédait aucun foyer, aucune maison, aucune tanière. Alors, elle enviait Lloyd Hope, elle jalousait Mat’aenna, même Mumkin qui, quelque part, serait témoin de leur « bonheur ». Elle apprendrait à ne plus être rongée par ses sentiments, avec le temps. Ou bien elle ne s'y ferait jamais et aurait l'impression que ces ressentiments la laisseraient nue, arracheraient son âme pour la clouer sur le piloris, qu'elle chercherait à se cacher derrière un brin d'herbes, mais que tout le monde verrait à quel point était juste seule et pathétique.


- Je vais rentrer à pieds, l’air frais me fera du bien. Je vais devoir faire mon rapport sur le fiasco de cette nuit. Mais cela n’a plus d’importance. Pour Luis, est-ce que tu penses que...qu’il peut rester sur le Sans-Visage à l’occasion...si Mumkin pouvait le ramener sur Jabiim dans la forêt, il y serait bien. Il a une cage au Temple, et il y est pas très heureux. Je crois que...contrairement à Papa, j’aime pas voir toutes ces bêtes enfermées.

Dana ne savait pas où ils étaient, ni combien de kilomètres la séparaient du Grand Temple : des milliers, elle espérait. Elle était pieds nus, enceinte, épuisée. Marcher lui semblait être une tâche insurmontable, mais c’était ce que faisaient les individus seuls et sans foyer. Ils marchaient à la surface des mondes, ils erraient, faisaient leur travail et recommençaient à marcher. Elle chassa ce constat amer d’une gorgée de café. Fumer lui manquait. Depuis son retour sur Kaas, elle avait pris l’habitude de mastiquer des bâtonnets bourrés de sucre qui lui remémoraient le goût de la barbe à bantha et du soda pétillant d’Astroballe. Le sucre calmait sa faim et lui donnait l’énergie nécessaire pour rester debout. Elle s’en était servie comme d’un carburant et d’une drogue : pour torturer, pour tuer, pour pourchasser.


- Et j’aimerais racheter Cazne, si possible. Je lui trouverai un travail sécuritaire au Temple. Ce sera ma dernière contribution à cette belle histoire qu’est Mat’aenna. L’histoire de la photo, qui a commencé pour moi dans un immeuble du district pauvre et qui s’est terminé dans un manoir du quartier Nord. On se dit pas au revoir mais avant de se quitter on peut se dire ce qu’on compte faire. C’est plus pragmatique. Je vais sans doute, prendre quelques congés forcés ou un poste plus tranquille, peut être que je serai encore affectée sur le Lightbreaker pour y dénicher des traitres ou que j’irai surveiller l’entraînement de soldats inquisitoriaux sur Korriban. Et toi ? Tu vas donc regagner ta frégate, Mat’aenna va vivre sur le Sans-Visage avant que tu lui trouves une maison sûre je présume mais si tu veux mon avis aucun endroit n’est plus sûr que le Sans Visage, surtout quand, le Capitaine Hope tient la barre. Au moins, tu vas pouvoir arrêter le slick et les filles, ca ne fait pas bon ménage avec une compagne et avec....une frégate.

Ni avec des enfants.

Elle reposa la tasse dans laquelle ne restait plus qu’un fond de café qui avait refroidi de toute façon. Elle avait trop parlé. Elle n’avait jamais autant parlé à quelqu’un. Elle aurait aimé dire beaucoup de choses, encore. Lui confesser à quel point elle était terrifiée mais qu’elle n’en laissait rien paraître parce que ça avait toujours été la règle de survie à l’Académie, chez les Siths. Ne pas montrer sa peur. Ne pas avoir peur. Son âme n’était pourtant qu’une boule gonflée de terreur. Elle supposait qu’elle ferait simplement de son mieux, avec sa solitude, sa colère, son inconscience, son envie d’en découdre permanente pour faire payer le monde de l’avoir fait naître Dana Shar.

Elle ramena une mèche écarlate derrière son oreille et laissa ses propres doigts dévalés sa gorge, son décolleté, la courbe d’un sein pour échouer contre le tissu brillant de sa robe. Son mouvement sensuel avait été comme la flamme d’un briquet dans l’obscurité, prête à allumer. Il avait tracé un chemin que les lèvres de Hope avait emprunté quelques fois : une route vallonée, d’une extrême douceur, parfois inondée de slick. Enfin, elle releva ses prunelles pour les noyer dans le regard du hapien.








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Les Feux du sacrifice


- Je vais lui acheter un petit endroit, je pense sur Toprawa.





Le hapien avait écouté en guettant le mouvement des boucles sur les épaules de Dana, en contemplant les lèvres qui se mouvaient quand elle prenait une gorgée de café, en admirant l’étendue dorée qui se voilait de retenue, et probablement un peu de mélancolie. Il voyait aussi les cernes, la fatigue sur les traits de son visage, et les restes de cette nuit étrange : une trace noire sur sa peau dans son cou, du maquillage ayant coulé sur ses joues.
Lloyd soupira en baissant les yeux.

- Je t’appellerai un taxi. Tu vas pas marcher tout ça dans ton état, décida-t-il.

Ils retombèrent dans un silence morne. La lumière matinale éclairait la pièce. Ce n’était pas vraiment un salon agréable pour les visiteurs ; il s’agissait d’une simple salle d’attente avec des tables et des chaises usées, et des baies de plexiglass donnaient une vue sur l’entrée du poste. Un soldat unique était posté à l’entrée, et un droïde compilait des dossiers derrière un moniteur. Dans le dos de Lloyd, une fenêtre donnait une vue sur une rue grise, où des lambeaux de brouillard se dissipaient parfois, laissant entrevoir le bitume sur lequel, des mois auparavant, le hapien avait demandé à l’Inquisitrice à être déposé à l’astroport. Il chassa ce souvenir.

- Pas de souci, pour Luis. Je suis sûr que le clan des serpents t’accueillera avec plaisir si tu veux aller le voir de temps en temps. Et c’est une bonne idée, pour Cazne.

Le hapien baissa les yeux, se mordit un instant la lèvre. Dana parlait très sincèrement, depuis cette nuit. Il ne savait pas s’il était capable, ni s’il devait en faire autant. Il resserra ses doigts autour du gobelet, comme pour les réchauffer, avant d’essayer de mobiliser son courage.

- Je vais lui acheter un petit endroit, je pense sur Toprawa, expliqua-t-il.

Planète forestière mais avec des centres urbains, sans histoire, sans intérêt stratégique pour les renégats, et en même temps sur la voie Hydienne en cas de fuite nécessaire, un jour. Il soupira et secoua la tête en un signe négatif.

- Mat’ est pas faite pour vivre sur le Sans Visage. Ni sur une frégate, d’ailleurs. Je la laisserai reconstruire sa vie à partir de là comme elle l’entend. Et je vais lui laisser ES pour la protéger. Ce droïde me fout les jetons de toute façon.

Retournerait-il la voir, une fois qu’elle serait installée ? Il ne le savait pas lui-même. La vie que décrivait Dana, il n’était pas bien sûr d’être capable de l’assumer. Mais peut-être était-il plus simple qu’elle croit cela. Peut-être cette version aiderait l’Inquisitrice à tourner la page. Il le fallait. Quand elle aurait son enfant, elle penserait à l’avenir de Ch’Hodos, elle penserait à la sécurité de l’héritier, elle penserait aussi à sa carrière, et le hapien peu à peu serait oublié. C’était probablement ce qu’il y avait de mieux à lui souhaiter.

- Moi, il faut que je finisse mes livraisons avant de pouvoir embarquer sur Melantha. Je vais avoir quelques semaines chargées, je présume.

Il songea un instant à la possibilité affreuse que Mat’aenna découvrît ce qu’il y avait dans la soute du Sans Visage. Mais avec un nexu qui y rôderait, il avait bon espoir qu’elle n’y mît pas trop les pieds.

- Merci pour... Pour le compliment pour le nom. Je veux dire, personne d'autre n'a eu cette marque d'attention.

En même temps, personne n'aurait pu comprendre, supposait-il.

- Et je vais avoir aussi quelques semaines à bord de l’Egide de Krayiss. Je transmettrai tes salutations à l’Amiral Antarxarxès.

Le hapien eut un bref sourire amusé en la regardant de nouveau.

- C’était fou cette coïncidence, hein ? Le numéro de ma cabine, remarqua-t-il sur un ton désinvolte, mais aussitôt son visage redevint sérieux. T’inquiète pas pour ce que t’as dit, chez Ykis ou ailleurs. Des fois j’ai un peu besoin qu’on me bouscule pour que je me reprenne, je suppose.

Il baissa les yeux de nouveau sur son gobelet. Fini le slick, fini les filles. Ce n’était pas tellement ça qui allait lui manquer, de toute façon. Il déglutit.

- Tu trouveras un type bien, j’te jure, dit-il subitement. Qui te causera moins de souci et moins de problèmes.

Lloyd sentit la chaleur investir son derme. Son cou, ses oreilles. Il espérait qu’il ne rougissait pas trop, au moins. Il avala d’un trait le reste de son café pour s’occuper avant de jeter le gobelet vers une poubelle voisine.

- Il sera ni alcoolique, ni drogué, et puis il dira moins de conneries, et tout ça sera qu’un mauvais souvenir. Ou un joli souvenir. Un souvenir de ta jeunesse, où tu allumais des mauvais garçons.

Il lui sourit avant de se lever et de quitter la pièce. Des voix provenaient du couloir.






--------Un speeder s’immobilisa devant le poste des autorités. Comme convenu, il n’y eut pas d’au revoir. Le hapien était sorti pour régler la course, puis il s’était arrangé pour avoir quelque chose à dire à l’intérieur du poste, au docteur Vega, pendant que l’Inquisitrice grimpait à bord du taxi. A travers les vitres, tandis qu’il était accoudé au comptoir où Vega lui expliquait le détail de l’opération bénigne que les deux twi’lek avaient subie, Lloyd ne put s’empêcher cependant de regarder le véhicule partir. Il repensait à la dernière fois qu’elle était montée comme ça, dans un landspeeder, sans qu’il y ait d’au revoir : c’était devant le Grand Temple, des mois plus tôt et elle n’avait pas eu un regard pour lui. Il s’était senti si minuscule face à l’édifice, face aux évènements, face à l’Inquisitrice qui n’avait pas besoin de le regarder alors qu’il n’avait pu s’empêcher, comme à l’instant, d’essayer de distinguer sa silhouette à l’arrière du speeder, jusqu’à ce que le véhicule disparût.
Et en même temps, il s’en souvenait, il s’était senti si plein de cette nouvelle ivresse.

- J’ai vu, tu sais.

Lloyd sursauta en se retournant. Mat’aenna était apparue près de lui, dans la lueur blafarde du poste de police. Son front luisait des épreuves de la nuit passée, mais elle le regardait sans animosité. Peut-être y avait-il une trace de regret sur ces lèvres charnues, qui se pinçaient doucement.

- Comment tu la regardais.

Le hapien ne répondit rien. Puis il ouvrit la bouche, prêt à mentir, mais la twi’lek le devança.

- On va aller chercher Tuki, je veux l’emmener. Il est dans un orphelinat du sud de la ville, j’avais le droit d’aller le voir une fois par mois. Il va coûter cher, mais tu vas l’acheter. Et tu me promets de ne jamais toucher à un seul de ses cheveux, à ne jamais me reprocher de l’avoir eu. C’est mon fils. Ça pourra être le tien aussi, si… Si tu veux. Et en échange… Je te laisse aussi tranquille avec… Elle. Et d’éventuelles autres relations qui auraient eu lieu en mon absence. Comme ça, on repart de zéro, toi et moi. Deal ?

Lloyd sembla hésiter, mais un sourire contrit se peignit sur ses lèvres tandis qu’il acquiesçait doucement, en un discret signe de tête.

- Deal.
- Tu comptes pas la revoir, hein ?

Le hapien pinça les lèvres. Fort. Il empêcha son visage de trahir quoique ce soit. Puis il secoua négativement la tête.




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Les Feux du Sacrifice

Reviens-moi, Dana.








Le taxi-speeder s’arrêta sur le parvis du Grand Temple. En cette matinée brumeuse, une pluie froide s’abattait sur Kaas City. Le conducteur activa l’ouverture de la portière passager et un pied nu se glissa hors de l’habitacle. L’averse lava la boue qui en maculait le derme. Au milieu des sombres allées et venues des silhouettes qui quittaient et entraient dans l’édifice imposant, Dana était comme la lueur d’un phare. Une rivière d’or dévalait ses courbes arrondis par la maternité à venir. D’un geste confiant de la main, elle rabattit sa longue chevelure flamboyante derrière son épaule.

- Inquisitrice Shar, la reconnut l’un des prêtres, gardien de l’entrée.

Il ne s’étonnait ni de son allure, ni de son attitude décalée. Shar était reconnue pour son excentricité.

- Le Seigneur Runà vous attend dans son bureau.
- Je sais.

Sous la lourde bure noire, son interlocuteur s’inclina avec respect et lui céda le passage. Elle traversa le grand hall d’un pas conquérant, comme si elle ne portait pas une robe de soirée, mais une armure indestructible ; imperméable aux regards dédaigneux qu’on lui lançait. Elle s’engagea dans un turbolift et actionna la commande pour l’étage menant à l’aide dédiée au Collège de la Purification. Les portes se refermèrent sur ses prunelles à l’éclat rutilant qui ne cachaient plus qu’une âme éteinte, sans passion.




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Dana avait rarement vu Darth Runà hors d’elle. La première fois remontait à deux années, lorsque Shar avait raté les premiers tests pour entrer dans le Collège de la Purification. Et la deuxième fois se produisait actuellement tandis que la miraluka faisait les cent pas devant son bureau où un thé fumant dormait dans deux tasses en céramique noire. Les stores des baies d’observation étaient levés et on pouvait contemplait la brume rouge, humide, gommer les hauts sommets de Kaas City. Depuis ce promontoire, le maître et l’élève se faisaient face. Dana demeurait immobile sur un fauteuil, conservant le regard bas, épuisée.

- Tu as vraiment raté cette mission. Chose qui m’étonne puisqu’étrangement….Lloyd Hope était là. Je le pensais, à tort, être un gage de succès aux tâches que je te confiais. Qu'est-ce que tu n'avais pas compris dans mes menaces et dans la phrase : Tu le laisseras partir.
- Ce sont les rumeurs qui courent, ouais. Que j’peux rien accomplir sans lui.
- Et bien avec ou sans ce chien, tu as quand même échoué lamentablement, ponctua la Sith en s’installant sur son siège. Prends une pause. Expulse les choses immondes qu’il a mis en toi et reviens-moi, Dana.
- Je peux encore travailler.
- Non, s’opposa-t-elle après avoir levé une main autoritaire en l’air. Par pitié, stop. Tu es pathétique, tu es médiocre. Tu es en train de gâcher ta vie, et tout ce temps précieux que je t’ai accordé pour faire de toi une véritable Sith. Un être dévoué, ayant la foi dans le Côté Obscur. Ai-je eu tort ?
- Non, Maître.

Un silence s’installa entre elles. Les doigts délicats de la miraluka, gantés de dentelle blanche ouvrit un tiroir et elle jeta un paquet, petit, devant sa protégée. L’Inquisitrice consulta l’objet d’une œillade. Ce n’était pas du kolto. Constatant que son apprentie tardait à réagir, le maître se pencha pour repousser davantage la boîte vers sa destinataire.

- Une contraception. Pour après. Je sais que la Force ne t’a pas doté de dons de scrutation, mais franchement….la prévoyance, c’est simplement une histoire de bon sens.
- Ce sera pas nécessaire.
- Quelle plaie tu peux être, Dana Shar, siffla Runà. Ton pouvoir grandit, ta maîtrise de la Force aussi. Et tu te ridiculises devant tous tes pairs, incapable d’avancer, incapable d’obtenir un rang qui serait digne de ton sang. A la place, tu te sacrifices pour un vulgaire homme.
- Je me soumets au plus Fort.
- L’idée est que tu deviennes le plus fort, martela-t-elle avec amertume et déception. Je n’entraîne pas une esclave. Ta résignation me dégoûte. Serais-tu redevenu la gamine faiblarde cueillit par un tir de blaster anksali. Tu étais vulnérable et je t’ai enseigné à te protéger, à te construire une armure avec la Force ! Tu étais ignorante, et je t’ai ouvert les voies de la Sorcellerie. Alors dis-moi Dana Shar. Aurais-tu peur ?
- J’ai pas peur, articula Dana en clignant des yeux pour se maintenir éveillée, pour combattre la fatigue, la lourdeur de ses paupières.
- Avant de prendre ton congé. Je te prierai de te laver et te préparer pour une dernière tâche. Bois ton thé, maintenant.

Dana tendit une main vers sa tasse, le geste machinal. Son corps agissait mécaniquement, l’esprit en veille. Elle se rappelait avoir bu le thé d’une traite, en avoir détesté le goût amer et épicé. Ses pupilles s’étaient délitées sous l’effet des herbes qui avaient infusé dans l’eau tiède. Puis, elle s’était levée comme un automate et elle était partie se doucher, se changer.




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Les derniers niveaux des geôles de l’Inquisition étaient silencieux et insalubres. Ils couraient sur les parties les plus anciennes du Grand Temple et rampaient sous Kaas City. Généralement, le sang des torturés rejoignaient les réseaux d’égouts et d’épurations, parfois leurs chairs, leurs membres bouchaient certaines canalisations et les services devaient venir les retirer. Mais personne ne posait de question. L’Inquisition Sith était, en surface, glorifiée par une propagande unanime et lisse. Shar n’avait que peu visité les lieux, parce qu’elle n’était pas particulièrement avide de sensations morbides. Les géôliers et Inquisiteurs qui s’aventuraient à ces niveaux avaient pour grande passion la souffrance d’autrui. Dans un couloir sombre, éclairé par quelques néons écarlates, les silhouettes décharnées de condamnés avaient été alignées devant les cellules délabrées. On ne reconnaissait plus leur genre, ni leur race tant les tortures et les mois ou années passées dans ces entrailles lugubres les avaient digérés et conformisés. Certains avaient des orbites vides. Tant mieux, ce serait plus facile quand il faudrait presser sur la détente.

Dana pressa du pouce la commande permettant au blaster qu’on lui avait confié de basculer en mode léthal. Elle posa le canon sur le premier front et pressa la détente. Plus que huit autres. Derrière elle, Darth Runà observait son apprentie tuer, exécuter, ôter des vies. Et si la main de l’Inquisitrice tremblait par moments, c’était uniquement dû à la fatigue. Le dernier corps s’effondra, face contre sol. Une odeur de chair brûlée avait rendu l’air vicié et fétide.

- Voilà.
- Bien. Maintenant, réanime-les. Tous.
- J’ai pas l’énergie…
- Ce n’était pas une proposition à boire le thé, mais un ordre. Réanime-les, tous. Tu ne quitteras pas ces lieux tant que tu n’auras pas réussi.

La miraluka fit un pas pour être dans le dos de sa protégée et plaqua ses lippes vermeilles à son oreille :

- C’est à ce monde-là que tu appartiens et aucun autre.
- Oui, accepta Dana avant de tendre la main vers l’un des cadavres et de se concentrer.

La Force vibra. Il n’eût bientôt plus que le bruit de l’eau croupie qui gouttait depuis le plafond humide. Ploc, ploc. Elle ferma les yeux. Ploc. Ploc. Et les râles de colères : ceux de Luis Raidun, ceux de Lloyd Hope. Ploc, ploc. Leurs colères étaient devenues sa colère et figeaient son coeur dans une étreinte furieuse. Ploc, ploc. Boum, boum. Son cœur avait repris vie et un tressaillement dans la Force anima la carcasse d’un condamné sous le sourire satisfait de Runà.

- Continue.

Dana s’effondra, inconsciente, au septième cadavre réanimé.







Des heures plus tard, elle s’était réveillée dans son lit, au cœur de sa petite chambre spartiate. Elle avait attrapé son datapad et pianotait quelques mots sur l’écran holographique.





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Inquisitrice Bien Foutue



Salut Mumkin,

T’avais dit qu’on pouvait se serrer les coudes.
Ben voilà, serre ton coude, je veux m’enfuir.
Sur Jabiim.

Donne-moi un jour et une heure. Je te rejoindrai à l’Astroport.

D.






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