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[hj : 'début de l'aventure']


Emotion...


Cette odeur si particulière, cette architecture, cette atmosphère... Tout semblait si identique, et si différent à la fois.


Emotion...


En cette fin d'après midi, dans la salle déserte du conseil, une vieille femme vêtue d'une longue robe terne semblait prise de vertige, appuyée sur le dossier lisse et robuste d'un siège vide.


Emotion...


La géronte tituba jusqu'à l'une des larges baies vitrées offrant une vue imprenable sur le jardin du temple, et se laissa tomber à genoux dans un long expire et dans un bruit feutré. Elle demeura ainsi, immobile et émue, observant ce jardin paisible en contrebas.
Toujours contemplative, elle laissa son corps frêle prendre appui contre la vitre tiède, avec douceur, tandis que sa main noueuse s'agrippait sa poitrine.


Emotion...


L'espace d'un court instant, en cette vieille femme défraîchie par les années, apparut la jeune sentinelle jedi qu'elle fut autrefois. Que le temps passait vite... Elle se laissa absorber par la lente danse des feuilles sur les grands arbres, au travers desquels filtrait les paresseux rayons d'un astre diurne déclinant.
Le jardin commençait à se vider de ses promeneurs et la salle du conseil baignait à présent dans une chaude lueur orangée. La vieille femme immobile observait les petites têtes des enfants trottiner vers leurs aînés dans le jardin. Le futur était là, dans ces jeunes esprits malléables...

Elle demeura encore un long moment en place, retardant le moment où elle devrait aller à la rencontre des responsables des lieux pour négocier une chambre et un poste convenant à une dame de son âge. Sa vieille main relâcha un peu son étreinte sur la robe qui enveloppait sa silhouette longiligne.


Silence...
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Silence.

Où était il caché ? Keth le savait, elle pouvait le savoir. La petite padawan observait un silence concentré au beau milieu d’un couloir. Un de ses camarades padawan lui avait proposé de jouer à cache cache après le cours commun, ce qu’elle avait accepté, c’étaient des enfants, il fallait bien qu’ils se détendent un peu !
Déclic, il devait être par là ! Forcément, cette petite intuition inspirée par la Force lui était bien connu, depuis fort longtemps, elle savait où trouver les gens qu’elle connaissait. Et Jem était forcément… Derrière le poteau dans le couloir de droite ! La petite Keth se hâta dans cette direction, et Jem quitta sa cachette pour s’enfuir. Et oui, Môsieur Jem considérait que pour être trouvé, fallait être aussi attrapé.
Mais Keth courait plus vite ! Elle commençait à le rattraper, seulement elle n’eut pas le temps de le saisir alors qu’il rata une marche dans les escaliers le conduisant à l’étage du dessous. Alors qu’il dégringolait sur les quelques dernières marches, Keth se précipitait à sa suite :


« Ca va ? Tu t’es fait mal ?
_Aïiiie, j’me suis foulé le poignet, c’est malin…
_Tu ferais mieux d’aller à l’infirmerie alors !
_Mouaip, mais je devais rendre un holo-livre à mon maître avant ce soir… Tu pourrais aller le faire le temps que je suis à l’infirmerie ?
_Ca pourrait pas attendre ?
_Nan, il en a besoin… »


Mais bien sûr.
Keth savait très bien pourquoi Jem ne voulait pas rendre lui-même son truc : du peu qu’elle connaissait Maitre Dunon, c’était un homme assez ronchon et qui réprimandait facilement, en somme, Jem essayait de faire en sorte qu’il passa ses nerfs sur Keth… Le saloupiot. Et le pire, c’était qu’il avait effectivement l’excuse implacable. Soupirant, Keth prit l’holo-livre et se dirigea vers la bibliothèque où le maitre de Jem avait l’habitude de passer le plus claire de son temps entre deux missions… Elle lui rendrait le livre et avant qu’il n’ait eu le temps de dire « ouf » elle s’éclipsera vite fait bien fait.

Silence.

Tiens ? Le maître n’était pas là ? Où pouvait-il bien être alors ? Trouver quelqu’un que l’on ne connaissait que de visu était difficile, quand son don l’abandonnait, il ne lui restait plus qu’à agir avec logique… Voyons, s’il n’était pas là, peut être que le maître s’était rendu à la salle du conseil ? Keth suivit donc cette nouvelle directive. Et alla s’enquérir de cela auprès d’un chevalier Jedi qui passait par là. Oui, il lui semblait avoir vu Maître Dunon se diriger vers la salle du conseil. Après, s’il y allait effectivement, c’était une toute autre histoire… Ne restait qu’à aller voir alors.

Silence.

Aucun son ne franchissait la porte de la salle du conseil. C’était troublant, Keth ne savait pas si elle pouvait se permettre de rentrer. Mais cela faisait un petit moment qu’elle poireautait devant, et sa patience avait ses limites, et la Force savait qu’elles étaient proches ses limites… C’était trop pour la petite boule d’énergie qu’elle était que de devoir rester statique sur place alors qu’elle pouvait ouvrir la porte. Prenant son courage à deux mains, elle rentra dans la salle du conseil. Après tout, elle cherchait juste Maitre Dunon.

Fracas.

La petite Keth se ramassa merveilleusement la figure en rentrant dans la salle… C’était ce qui arrivait souvent quand on regardait ailleurs et qu’on se précipitait trop. Il fallait aussi dire qu’elle ne venait pas dans la salle du conseil tous les 4 matins, alors son regard et son attention vaquaient ailleurs qu’à ses pieds. Se redressant prestement, elle se tourna vers les sièges afin de voir auprès de qui elle devrait s’excuser de son entrée pour le moins bruyante.
Personne… Ah, si, une dame âgée se tenait devant la baie vitrée. C’était étrange, Keth ne l’avait jamais vu au temple durant ses 4 ans précédentes années… Elle était accroupie, peut être qu’elle avait dérangé en pleine méditation ? Aie aie, Keth allait avoir droit à une soufflante si c’était le cas, elle s’empressa donc de s’excuser pour son intrusion.


« Aheum.… Bonjour maître, excusez-moi si je vous ai dérangé… »

Elle s’apprêtait à faire demi tour prestement, mais un déclic lui vint à l’esprit : quitte à avoir déranger cette personne, peut être pouvait elle lui demander au moins si elle n’aurait pas vu la personne qu’elle cherchait ? Adoptant un ton badaud comme si sa présence était normale, elle reprit la parole :

« … Vous ne sauriez pas à tout hasard où se trouve Maître Dunon ? »

Elle regardait la géronte tout en se demandant quand celle-ci avait cessé d’être padawan ? Il ya longtemps, bien longtemps, sans doute.


[hj : si mon post te dérange ou ma présence indésirée, ne pas hésiter à me mp Wink ]
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Fracas salvateur pour la vieille femme qui avait été finalement arrachée à des souvenirs trop vivaces à son goût...

Il était plus que temps de faire le deuil du passé, la nostalgie était une terre chaleureuse mais stérile, nourrissant d'illusions celui qui trop longtemps y demeurait.

C'est dans un doux son de frottement d'étoffes que la carcasse de l'être chenu s'était dépliée pour se dresser comme un i, et porter un regard énigmatique sur la fillette qui avait parlé.


« Il n'y a pas de maître dans cette salle, jeune fille, seulement une vieille femme... et toi. » entama d'une voix rauque la vieille femme, tout en venant se poster devant sa turbulente interlocutrice.

« Dunon... Est-ce là le nom de la personne qui te forme et t'enseigne la précipitation ? »

Il s'agissait là autant d'une question que d'un reproche, ce qui paraissait tout de même scandaleux venant d'une personne qui un instant plus tôt se tenait avachie contre la vitre et en proie à une vive nostalgie. Non, la vieille femme n'était un modèle de justice morale et mettait d'ailleurs un point d'honneur à rester injuste. Seule la justice naturelle importait à ces yeux, car elle seule lui paraissait bien fondée. Bercer les jeunes esprits avec de grandes idées de justice morale ne les confrontait pas à la réalité dans laquelle ils devraient oeuvrer.


La vieille faillit en rester là et congédier la gamine, mais se ravisa :


« Je sais où se trouve la personne que tu recherches... Elle s'est absentée pour le moment mais sera rapidement de retour. »

Ce qui était bien entendu un mensonge éhonté. Ce dénommé Dunon lui était absolument inconnu et pour le moment dénué d'intérêt, mais sa courte « absence », en revanche, pouvait être l'occasion de sonder un peu cet enfant turbulent. La turbulence était un signe d'énergie, et donc de force, selon la vieille tout du moins. Elle comptait sonder tous les jeunes esprits qu'abritait ce temple, autant commencer rapidement. Le corps de la femme, tel une statue de cire, restait parfaitement immobile pendant la discussion.

« Pourquoi ne pas attendre cet illustre maître ici ? Nous avions convenu d'une entrevue ici même dans quelque temps... Dis moi, pour quelle raison le cherches-tu avec tant d'émoi ? »

Tout en parlant, elle semblait scruter la fillette, son attitude, son visage, ses yeux et peut-être au delà...
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« Ah non non ! Maître Dunon ne me forme pas… »

Cette idée faisait sourire Keth, maître Dunon n’aurait jamais voulu de la petite boule d’énergie instable qu’elle était. D’ailleurs, les rares fois où ils s’étaient croisés, il n’avait jamais manqué à le lui rappeler… Et ce trait de son caractère était manifestement bien visible, vu que l’éternel reproche qu’on lui faisait venait encore de lui être imputer de la part de quelqu’un qu’elle rencontrait pour la première fois…

*Bravo Keth, elle sait déjà tout de toi, quelle belle image tu donnes, tiens…*

« Pour la précipitation, il parait que j’apprends ça très bien toute seule… »


Le vague sourire du départ s’était mu en une moue penaude et son regard se fit distrait, Keth arborait toujours cette expression quand on lui adressait ce reproche là. Elle écoutait toutes les autres remarques qu’on lui adressait et essayait de s’améliorer, mais quand cela concernait son propre caractère, elle faisait toujours mine « ce n’est pas le plus important. » ou « oui oui, j’essayerai de changer », ce qui en général muait une fois la tempête passée en « non non, je ne changerais pas. ».
Un petit silence gênant s’était installé, et la gamine crut un instant qu’elle n’aurait pas de réponse à sa question… Alors qu’elle commençait à se triturer les mains, la vieille femme reprit la parole pour lui annoncer ce qui était pour elle une bonne nouvelle.


« C’est vrai ? Génial ! »

Et voilà que de nouveau, Keth radiait de bonne humeur et affichait un sourire rassuré. Tant mieux, elle n’aurait plus à le chercher bien longtemps, et il aurait son holo-livre à temps, mission presque accomplie. Dans sa tête, elle ne remit pas un instant en cause les paroles de la géronte… Car elle n’aurait jamais imaginé que celle-ci eut un intérêt à cela, enfance, douce enfance…
Le parallèle entre la géronte et la gamine étant étonnant à observer. Si l’aînée restait de marbre et n’observait aucun mouvement, Keth a son habitude réalisait tout un tas de petits mouvements, allant de la mimique, jusqu'à un léger balancement des bras, exultant ainsi son ressenti et son énergie. Elle s’en rendait bien compte, et ne douta pas qu’elle eut reçu une soufflante si le maître des cours communs eut été présent. Puis la géronte reprit derechef la parole.


« Et bien, oui, je vous remercie de me laisser l’attendre dans la salle du conseil, je vous rassure, je ne vous dérangerais pas pour votre entrevue, ce ne sera pas long. En fait, j’dois juste lui rendre son holo-livre. »

Keth observa un petit silence réfléchi. Devait-elle répondre aussi au mot « émoi » ? Cela pouvait semblait idiot comme question, mais à l’image du reproche précipitation, elle ne se douta pas qu’elle faisait suffisamment montre de son caractère expansif. Peut être que si elle prenait les devant, au moins elle montrerait qu’elle a conscience de ce défaut, et que le reproche qui ne manquerait peut être pas de venir serait moins dur. Après tout, son aînée avait déjà découvert son premier défaut, relever le second devait lui être très facile.

« …Pour l’emoi, là aussi, il parait que je suis tout le temps comme ça. Ah ! Et puis au fait, comment dois je vous appeler si ‘maître’ n’est pas adapté ? »

Ou comment caser une question l’air de rien. Parce que Keth se voyait mal dire « madame la vielle femme » en pleine conversation.
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L'assombrissement de la mine de la gamine, lorsque lui avait été adressé le reproche, n'avait pas échappé à son interlocutrice qui l'observait avec attention, pas plus que son rapide changement d'expression et ses incessantes gesticulations. La femme lui adressa un sourire poli :

« Tu peux m'appeler 'dame Mitra', puisque Mitra est mon nom. »

Elle laissa un court silence s'étendre sur la salle tranquille avant de s'assoir sur l'accoudoir du siège le plus proche avec désinvolture.

« Puisque nous attendons toutes deux la même personne, nous pourrions discuter un peu... » annonça-t-elle en tendant une main en direction d'un siège voisin, invitant l'enfant à y prendre place et notant sa réaction à cette invitation.

« Certaines... rumeurs... circulent dans le temple. Elles affirment que des jeunes, des padawans, manquent à l'appel... L'enseignement dispensé dans le temps n'est peut-être pas adapté aux élèves auxquels il se destine... Penses-tu que l'enseignement, dans sa forme ou son contenu, soit discutable ? »

Ses mains vinrent se superposer sur son genou :

« Rassures-toi, tu peux parler librement, je ne suis pas un 'maître' et ne te jugerai pas ni ne te ferai de reproche, quoi que tu dises. Je veux connaître ton... ressenti... au sujet de ce que tu apprends ici, et savoir pourquoi tu désires devenir un Jedi... car tu le désires, n'est-pas ? »


C'était là des questions gravitant autour d'un sujet préoccupant et potentiellement angoissant pour un padawan. Il ne devait pas être aisé de s'endormir sans la garantie de se réveiller au même endroit le lendemain. Peut-être les enfants n'étaient-ils pas mis au courant de ce phénomène et les berçait-on de mensonge lorsque l'un des leurs venait à disparaître... La femme chenue n'en savait rien et comptait bien l'apprendre. Il devait bien y avoir des rumeurs chez les enfants aussi, certains avaient l'ouïe plus fine que d'autres et entendaient parfois les bribes d'un discours qui ne leur était pas destiné.

La jeunesse représentait l'avenir de l'Ordre, et ce dernier semblait présenter de sérieuses lacunes en ce qui concernait sa surveillance. Quel pathétisme, les Siths devaient se gausser de ces pantins incompétents... Qu'il s'agisse d'enlèvement ou de désertion, cette erreur coûterait cher à l'Ordre. Faisant d'une pierre deux coups, la géronte espérait en apprendre plus non seulement sur les méthodes actuelles des Jedis, mais sur la personnalité de cette émotive enfant.
Ses travers représenteraient peut-être un inestimable atout dans cette énigme de disparition, Mitra en était convaincue. Elle esquissa un demi sourire avant de reporter son attention sur son interlocutrice dont elle étudiait avec attention la résonance dans la Force.
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La géronte se présenta sous le nom de Mitra, ce qui confirma à Keth qu’elle n’avait jamais rencontré cette personne de toute sa jeune vie au temple. La padawan jugea que la politesse exigeait maintenant qu’elle se présenta elle-même, c’était la moindre des choses.

« Bien Dame Mitra, moi, je m’appelle Keth. »

Elle acquiesça d’un signe de tête enjoué à l’invitation de Mitra à la discussion pour patienter et s’installa dans le fauteuil indiqué. Keth était quelqu’un d’ouvert à la discussion, et surtout en ce moment précis où la parole restait la meilleure arme dans l’attente. La géronte prit la peine de lancer elle-même un sujet, sujet bien connu au temple, le drame des deux enlèvements.

« Ah… Oui, Maître Caldin a fait une annonce pour expliquer cela à tous… En fait, ils auraient été enlevés dans la jungle d’Iziz par des Siths… »

La question qui suivit eut pour effet de grandement surprendre la padawan, il fallait dire qu’elle ne faisait pas de lien entre ses malheureux événements et l’éducation dispensé au temple Jedi. Keth arbora alors une mine réfléchie, bien différente encore des nombreux visages qu’elle avait arboré… Néanmoins, ce n’était pas tant sur le fait si elle devait en parler ou pas, Keth n’avait jamais eu la langue dans sa poche et il lui était déjà arrivé de râler quelques fois en cours, ce qui lui avait valu en général le double du travail habituel. Non, elle réfléchissait vraiment sur la question qui lui était posé. La jeune padawan observa donc un silence concerté durant un instant avant de répondre à son interlocutrice sur un ton avenant :

« Pour l’enseignement… Bah, je suis encore jeune, donc je ne connais encore que le cours commun, il parait que cela change beaucoup une fois que l’on a un maître. L’enseignement devient plus… Personnel et adapté je pense, il est toujours plus facile de s’occuper de un que de beaucoup. J’aime bien ce que j’apprends ici, sur les liens de tous avec la Force par exemple, ou alors d’autres cours plus divers pratiques. Mais bon, cela reste des cours génériques, les bases quoi, on s’arrête pas encore sur ce qui fait les spécificités de chaque padawan. J’aime moins la théorie, y’a trop de « peut être » dedans…
Mais ce qui me manque le plus, ce serait de voir sur place… »


L’esprit de Keth fonctionnait de façon plus séquentielle que globale, prenant les informations au fur et à mesure et les traitants, ainsi arriva dans sa tête la question qu’elle aurait pu se poser des milliers de fois mais qu’elle n’avait pas fait… Pour la raison qu’elle exclama à voix haute et non dans ses pensées :

« Pourquoi je veux devenir Jedi ? Parce que c’est dans l’ordre des choses. »

Lors d’une lueur de réflexion, elle se dit que ce n’était sans doute pas ça ce que souhaitait savoir Mitra, et pourtant, c’était sans doute parce qu’elle ne se voyait pas faire autre chose qu’apprendre la Force et les préceptes Jedi qu’elle souhaitait le devenir. C'était évident, enfin, cela le lui semblait. Elle reprit la parole pour tenter d’étayer sa précédente réponse :

« Euh… Et puis aussi, parce que Jedi c’est quelqu’un à qui l’on enseigne à se protéger et à protéger les autres, moi, j’aimerais bien pouvoir au moins essayer de faire quelque chose si on faisait du mal à quelqu’un que j’apprécie… J’veux plus être une spectatrice... »

Ses souvenirs de tendre enfance lui remontait en mémoire, et cela avait été son tout premier motif même si le temps avait effacé l'émotion qui s'y était rattaché. Keth vivait assez peu dans la passé. Puis elle se rendit compte qu'elle parlait, elle parlait, mais n'étayait guère la conversation en retour. Alors elle posa la question qui la taraudait d'un certain coté :

"Vous aussi, vous avez étudié ici n'est ce pas ? L'education était si différente ?"
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Le discours de la fillette en avait appris un peu plus à la vieille femme au sujet de cette disparition qui était donc un enlèvement et non une désertion. Ainsi les Siths n'étaient pas capable d'élever eux-même leurs disciples, et avaient du recourir au stratagème de l'ancien philosophe qui préconisait de prendre chez l'ennemi les armes qui venait à manquer chez soi.
Quant au passage sur la teneur de l'enseignement, force était de constater qu'il ne présentait aucun élément contredisant la théorie de l'enlèvement.
Par ailleurs, cette enfant semblait apprécier sa situation, et c'était là une excellente nouvelle. Petit à petit, un curieux plan s'échafaudait dans l'esprit un peu alambiqué de l'ancienne.

Son vieux sourcil s'était arqué lorsque la gamine s'était exclamée, mais elle l'avait laissé parlé, buvant ses mots comme s'ils étaient un précieux élixir de jeunesse.


« C'est exact, j'ai étudié ici, jadis. L'éducation n'était pas différente de celle que tu as évoquée. Beaucoup de théorie... Si la théorie est ton ennemie, tu dois la vaincre. Les principes qui sous-tendent la guerre sont les mêmes quelque soit le champs de bataille. Mets à profit l'enseignement théorique martial qu'on te dispense, et applique le sur le champs de bataille de l'intellect. »

Son regard glissa vers le sol. Peut-être cette ensfant était-elle encore trop jeune pour ces idées. Elle reprit en élevant légèrement la voix, pour marquer la fin de la parenthèse et revenir au sujet initial :

« Je ne m'étonne guère, finalement, que l'enseignement soit resté inchangé. L'Ordre a toujours présenté cette... tendance... conservatrice. Il ne jure que par la tradition, et finira par s'étrangler avec. »

Elle laissa planer un silence avant de quitter l'accoudoir de son siège pour faire quelques pas au centre de la pièce, choisissant ses mots tranquillement avant de reprendre la parole pour aborder un point qui avait attiré son attention lors du discourt de la fillette :

« Méfie toi de ce que tu nommes l'ordre des choses... Les 'choses' prennent l'ordre que tu leur donnes, ou que tu leur laisses prendre... »

La longue et ample robe ternie glissait sur le sol lisse dans un doux frottement. Pas à pas la silhouette se dirigeait vers la baie vitrée donnant sur le parc. Ce n'est que lorsqu'elle fit face à cette vitre, qui laissait les rayons d'un soleil mourant la nimber d'un halo safrané, qu'elle fit halte, dos à son jeune auditoire.

« Les... 'choses'... sont comme ce jardin. Si tu y plantes de l'herbe, il y poussera de l'herbe, et si tu n'y plantes rien, il y poussera n'importe quoi. Ce jardin est comme ton corps, qui se sculpte selon la discipline à laquelle tu le soumets ou selon le laxisme dont tu fais preuve à son égard. Ton corps est semblable à ton esprit qui entretient les pensées que tu lui permets, ou celles que tu laisses s'insinuer en lui.
Ton esprit n'est pas différent de ton corps, ton corps n'est pas différent du jardin, et le jardin n'est pas différent de ton esprit. Comprends-tu cela jeune Keth ? Le comprendre c'est déjà faire un pas vers l'appréhension des principes universels. »


L'oratrice, toujours face à la vitre, fit un geste de la main pour stopper le nouveau sujet qu'elle avait entamé, trop emportée dans son élan.

« Laissons là les principes universels... »

La vieille femme se retourna alors vers son auditrice :

« Maintenant dis moi, où penses-tu être assise en cet instant où nous parlons ? »
Saï Don
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[HRP : Toutes mes excuses pour le temps que j'ai mis à répondre, j'ai été débordée, mais me voici ^^]



Dans le couloir résonnaient les pas cadencés d’un vieil homme. Son visage, d’habitude illuminé de curiosité et de distraction, avait cette fois-ci adopté des traits un peu plus ternes, accusant le poids des années. Deux doigts asticotant sa barbe et l’autre main fermée dans son dos, le Maître suivait le couloir sans le voir, ses pieds le ramenant par habitude à son lieu principal de travail sans qu’il n’ait à y songer. Il croisa dans un escalier un chevalier qui lui posa une question, à laquelle Maître Don avait répondu d’un signe de tête approximatif, ne s’apercevant guère qu’il n’avait même pas saisi le sens de la question.
C’était qu’un jeune padawan tué par un Maître Sith, une autre padawan qu’ils avaient ramené au Temple en urgence, une Maître Jedi dans un coma profond au centre médical et le Prince de Kuat, seigneur sith aguerri, presque libre d’aller et venir à l’intérieur du Temple, tout ça n’était pas pour lui faire des journées de tout repos. Que de décisions à prendre ! Et presque toutes se valaient. Quoiqu’il décide, des chevaliers et des maîtres seraient probablement contre ses mesures, mais il y avait des périodes de crise où l’on n’avait pas vraiment le choix.
Il soupira lorsque sa main, tel une automate indépendante, quitta sa barbe pour pousser l’une des portes de la Chambre du Conseil.
Et le vieil homme fut cette fois bien forcé de quitter toutes ses réflexions.

Dans la pièce se tenait une vieille femme au visage ridé, une coiffure étrange et des grosses boucles d’oreille décalées lui donnant une allure de voyante des rues. Pourtant, il n’y avait pas de doute, cette vieille femme n’était pas inconnue au bataillon. Ce regard qui semblait pouvoir transpercer les murs, le Maître était absolument certain de l’avoir déjà croisé. Mais où ?
Sur un siège, non loin, était assise une très jeune padawan, un livre sur les genoux. Son nom lui échappait, à elle aussi. Elle était arrivée très jeune au Temple, du temps où lui-même n’était toujours que par monts et par vaux avec son précédent padawan.
Après un court instant de silence et les avoir dévisagées toutes les deux, le vieil homme s’adressa à la dame.

- Bonjour, Madame. A qui ai-je donc l’honneur ? Demanda-t-il avec courtoisie.

Sans la quitter des yeux, il alla s’installer sur son siège habituel, soulageant son dos fatigué. La femme qui se tenait là devait maîtriser la Force, et peut-être même aussi bien que lui.
Les yeux bleus du vieil homme cherchèrent dans ceux de l’inconnue des éléments de réponse. Peut-être de vieux souvenirs la concernant voleraient-ils à son secours ?
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Ce fut un silence qui fit écho à la voix du vieux maître, un silence au cours duquel les regards des deux aînés demeurèrent rivés l'un sur l'autre, s'imprégnant l'un de l'autre pour y puiser une réponse.

Le menton de la vieille Mitra se redressa imperceptiblement. Se pouvait-il qu'elle ait croisé cet homme auparavant ? Cette présence dans la force... Cette voix chaleureuse... Elle jeta un regard en direction de l'enfant et revint au vieil homme avant de faire quelques pas lents pour venir se rapprocher d'un siège derrière lequel elle se posta, et sur le dossier duquel elle vint déposer l'une sur l'autre des mains pâles comme l'ivoire, serties dans de ternes bandages.

C'était peut-être ces bandages sombres qui offriraient au vieux Don un indice au sujet de cette femme qui le dévisageait en silence. De mémoire de Mitra, rares étaient ceux qui, du temps où elle foulait le sol du temple en tant que chevalier, avaient rangé leur sabre dans un coffre pour se vouer aux arts martiaux désarmés, et sans doute plus rares encore étaient ceux d'entre eux qui s'étaient retirés de l'ordre pour méditer à l'écart de son influence.
La recherche martiale du vieil homme, du temps où il était un chevalier obnubilé par le fantôme de son défunt jumeau, l'avait peut-être, à un moment ou à un autre, amené à croiser le chemin de la sentinelle aux cheveux encore noirs et hirsutes, alors reconnue pour fréquenter assidument la salle d'armes et pour sa promptitude à échanger autour de la science martiale... Ou peut-être était-ce plus tard, lorsque Don s'était affranchi de ses démons intérieurs et tourné vers la philosophie, que les deux individus s'étaient croisés. Peut-être même avait-il été l'un de ses confidents lorsqu'elle peinait à faire face aux questionnements qui la conduisirent plus tard à se retirer de l'ordre. Peut-être, enfin, ne s'étaient-ils qu'entre aperçus au détour d'un couloir...
Il n'était pas aisé de ramener à la surface des souvenirs vieux de plus de trente longues années, mainte fois recouverts par d'autres plus récents... Toutefois, les images finirent par se préciser doucement dans l'esprit de la vieille femme dont l'attitude générale parut changer subtilement sur le coup de l'émotion, achevant probablement, si c'était était encore nécessaire, de conduire le vieux Don à deviner l'identité de son interlocutrice.


- Bonjour, Saï... finit par répondre la femme de sa voix grave.

Immobile, elle observait à présent avec plus d'attention l'expression du vieil homme, cherchant à savoir s'il possédant la réponse à sa propre question. Si tel était le cas il devinerait alors probablement qu'elle était revenue avec l'idée de réintégrer l'Ordre...
Saï Don
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[Pfiou, je suis navrée, j'essairai d'être un peu plus rapide la prochaine fois... :S ...]




La voix grave et timbrée de la vieille femme plongea dans l’esprit de Maître Don pour en secouer tous vieux souvenirs. Il se revit jeune padawan au Temple, il se revit avec son maître partir pour se première mission… D’où venait donc cette voix ? Elle semblait ressurgir d’outre-tombe… Ces yeux profonds non plus n’étaient pas si inconnus. Et ces bandages…
La mémoire du vieille homme traça enfin une jeune fille aux longs cheveux clairs qui accompagnait souvent un zabrak. Oui… La jeune fille était devenue une femme et l’on ne l’avait plus vu avec un sabre laser à la main pendant de longues années. Saï et elle, bien que d’âge proche, n’avaient jamais été réellement en contact. Lui-même à l’époque ne nouait que peu de liens avec ses semblables. Pourtant, pour une fois, sa mémoire ne lui joua pas son habituel mauvais tour.

- Mitra… C’est bien vous, n’est-ce pas ?


La question n’en était pas une. Mitra n’avait plus fréquenté le Temple durant de longues années, et Saï aurait bien été en peine de s’en rappeler la raison. Mais il n’avait aucun doute quant à l’identité de cette revenante.

- Je suis navré de ne vous avoir reconnue plus tôt,
s’excusa-t-il avec un sourire heureux.

Il sembla à Saï que la femme avait porté jusqu’ici un masque d’impassibilité. Il se surprit à espérer qu’elle ne le garderait pas.

- Voilà bien longtemps, si je ne m’abuse, que vous n’aviez pas rendu visite au Temple. Avez-vous fait de beaux voyages, Mitra ?

Non loin de là, l’enfant était restée assise en silence, son livre toujours sur ses genoux. En croisant son regard, Saï lui adressa un clin d’œil avant de lui chuchoter :

- Les conversations des ancêtres ne sont pas toujours passionnantes… Es-tu ici pour une urgence ?


Il se doutait bien que non, à l’air calme de la padawan. Mais si elle était là pour un détail, peut-être était-il tout à fait inutile de lui faire endurer leur conversation.
Les yeux du vieil homme pétillaient en allant du regard de Mitra à celui de Keth. Avant d’être nommé à ce poste, il n’aurait jamais cru qu’être Maître du Conseil Jedi le destinerait à tant de surprises quotidiennes.
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De beaux voyages... Un demi sourire vint adoucir les traits du visage de la géronte qui fit glisser une main le long du dossier du fauteuil sur lequel elle prenait appui. Seul le prénom de l'homme qui l'observait lui était apparu, à travers la Force et à travers quelques images fantomatiques qui s'agitaient lascivement dans son esprit. Elle n'en demanda pas plus au sujet de son interlocuteur.

« Mitra est bien mon nom et Sri mon prénom. Ne soyez point contrit des lacunes de votre mémoire, j'ai cru comprendre que l'Ordre avait bien d'autres soucis en pouvoir de vous navrer davantage... »

En prononçant ces mots, aucune animosité ne transparaissait dans sa voix, mais il restait cependant clair que le sarcasme n'était pas loin. Le visage de la vieille femme s'abaissa légèrement lorsqu'elle poursuivit.

« De beaux voyages, en effet... Quoi que, comme bien des choses, la beauté d'un voyage n'existe sans doute que dans le regard de l'être qui prend le temps de s'adonner à la contemplation... »

Ses doigts s'entrecroisèrent sur le dossier quelques instant avant qu'elle ne vienne finalement s'assoir doucement sur le dossier de l'un des sièges, retrouvant une position qu'elle adoptait bien souvent lorsqu'elle servait en tant que sentinelle, une position qui, peut-être, conférerait à son allure une note plutôt informelle.


« Il est parfois surprenant de constater à quel point certaines personnes doivent voyager loin pour apprendre que la destination qu'ils cherchent tant se cache finalement en eux-même... »

Alors qu'elle parlait, les petites rides autour de sa bouche s'animaient avec fluidité. Que le temps passait vite, et quelle curieuse métamorphose provoquait-il en ceux qui en ressentait les affres !

« Je suis fatiguée de voyager, Saï. L'Ordre a-t-il encore un rôle à confier à une vieille femme qui l'a mis de côté de si nombreuses années ? »

C'est un regard las qui accompagnait ses paroles en cet instant. Dans un froissement doux, les plis de sa toge s'animèrent lorsqu'elle se laissa aller légèrement en arrière, toujours assise sur l'accoudoir du siège.

« Avec la perte tragique de la bibliothèque d'Ossus, j'imagine que l'archivage redouble d'effort pour restaurer une base de connaissance précieuse... Je n'ai plus la vivacité qu'on peut attendre d'une sentinelle, hélas. le temps fait son office, et la Force n'est pas un vulgaire outil destiné à paliers aux inconforts d'un corps vieillissant. Je viens vous proposer mon soutien dans toute tâche qui conviendrait à une femme de mon âge. »

Elle laissa planer un court silence avant de poursuivre :

« S'il faut à l'ordre une archiviste, je pourrai être cette archiviste. S'il vous faut des enseignants, je transmettrai ce que je peux transmettre. Je n'aspire qu'à voir l'Ordre devenir plus fort. S'il me faut subir un examen pour le réintégrer après cette longue absence, je le subirai... »

Après un coup d'oeil en direction de la fillette, elle revint à son interlocuteur :

« Cette enfant est venue remettre un ouvrage au Jedi Dunon. Peut être pourrait-elle vous confier ledit document ? »
Saï Don
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Sri Mitra, oui… C’était bien elle, il n’y avait aucun doute là-dessus à présent. Ces bandages, cette voix grave et déterminée, tout cela lui revenait en mémoire. Elle avait beaucoup changé, mais probablement se disait-elle la même chose à son sujet.
Le vieil homme l’écouta plusieurs minutes sans ciller ni l’interrompre. La dame se disait fatiguée, et il voulait bien la croire. Peut-être ressentait-elle la même fatigue que lui-même avait subi lorsque, rentrant de ses voyages, il avait espéré trouver un peu paix et de repos au sein du Temple. Mais il n’avait trouvé que désolation, une chambre du Conseil vide et des padawans livrés à eux-mêmes, sous la menace silencieuse de l’Ordre Sith. Oh, oui, l’Ordre avait eu bien des soucis, et en avait encore.
Maître Don ne répondit pas immédiatement aux propos de Sri Mitra. Il tendit la main vers la petite padawan pour l’inviter à lui remettre le document. Bien sûr qu’il s’en chargerait, cela allait de soi.

- En réalité, le Temple a besoin de toute l’aide qu’il pourra réunir, et si, après tant d’années d’absence, je ne peux vous confier un poste à responsabilités, je pense qu’une archiviste dans notre bibliothèque ne serait pas de trop.

Il songea sans en souffler mot qu’une dame, Jedi, Jedi gris ou autre, qui avait voyagé tant d’années et cherché les mystères de la Force pouvait être une interlocutrice fort intéressante; peut-être aurait-elle un effet bénéfique sur les petits curieux du Temple. Et peut-être même sur les plus grands !
En son for intérieur, une petite voix lui soufflait qu’en d’autres temps, le Conseil Jedi aurait été bien plus méfiant à l’égard d’une exilée. Il la fit taire.

- Je n’ai pas envie de vous faire passer un quelconque examen, Sri… Si vous permettez que je vous appelle ainsi. Néanmoins, j’aimerais que vous me parliez des raisons qui vous ont poussée à quitter l’Ordre… Et celles qui vous ont poussée à revenir. Etiez-vous à la recherche de quelque chose ? L’avez-vous donc trouvé ?

Si lui-même, en grand sentimental qu’il était, n’avait pu quitter l’Ordre et l’honneur que celui-ci lui inspirait, il n’en était pas moins curieux de comprendre ceux qui, contrairement à lui, avait osé couper les ponts pour s’immerger dans une solitude absolue, au travers de cette vaste galaxie.
Le vieil homme cligna deux fois des yeux en regardant la dame qui se tenait toujours debout devant lui.

- Combien de temps cela fait-il, déjà ?
Invité
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Au son de son prénom, la vieille femme n'avait montré aucun signe de malaise, laissant clairement comprendre au vieux sage clignant des yeux qu'il pouvait en user à sa guise. Elle observait tranquillement le vieillard :

« Une trentaine d'années standard... Sans doute... »

Son regard se perdit un instant par delà la baie vitrée à sa gauche :

« Il n'y a pas d'ignorance, il y a la connaissance... »

Soupir.

« La connaissance de quoi...? » murmura-t-elle.

Elle revint finalement à son interlocuteur avec dans sa voix rauque un timbre de douceur, et peut-être, aussi, de lassitude :


« La connaissance des civilisations...? La connaissance des philosophies...? Des outils...? »

Son visage s'inclina légèrement.

« Tout cela ne fait pas d'un Jedi un être meilleur, et peut même en faire un redoutable fou, l'Histoire en regorge. Non... Ce qui est primordial pour un Jedi, c'est d'abord de se connaître lui-même. Voilà ce que j'ai été chercher avant tout, sans le savoir, il y a trente ans. »

Son regard quitta le tracé du motif ornant le parterre pour revenir aux yeux clairs du vieil homme :

« Je suis partie avec un besoin de réponses, de convictions qui me soient propres, sur l'enseignement, sur la tradition, sur la voie, sur la Force, sur la nature même des choses... Au sein de l'ordre, il était si aisé d'endosser les certitudes des anciens, et de justifier par elles chacun de ses actes. »

C'est après que la fillette ait remis son ouvrage au vieux maître et quitté la pièce, accompagnée à la porte par la vieille femme, que cette dernière reprit son discours en revenant vers son interlocuteur dans un doux froissement de tissus :

« Nous enlevons à leur foyer de jeunes êtres, marquons à tout jamais nombre de vies, nous tuons, nous bâtissons, au nom d'un idéal. Tout cela est si naturel, lorsqu'on vit au sein de l'ordre, mais une telle responsabilité nécessite tout de même une réflexion. Trente années sont bien peu en comparaison de l'emprunte qu'un Jedi laisse dans son sillage.
Certains ont fait le choix de chercher leurs réponses dans la civilisation, d'autres dans la Force, je suis de ceux qui les recherchent dans l'isolement qui laisse la parole à la nature même des choses. On ne peut réellement fonder une philosophie ni sur la Force, ni sur la civilisation... L'un comme l'autre sait nous faire défaut, et tous deux sont au final supplantés par la nature même des choses. Ecouter en silence la nature même des choses, voilà pourquoi je me suis retirée. »


Elle vint à nouveau s'assoir sur l'accoudoir du siège voisin de celui du vieux maître.

« Ce ne sont pas des vérités, ni même des réponses, que je rapporte à l'ordre aujourd'hui... »

C'était vrai, en un sens. Ce qu'elle rapportait n'était pas destiné à cet ordre-ci, mais à l'ordre futur, celui qu'elle voulait voir éclore. Quelle présomption dans ce coeur qui avait trop rêvé...

« Je lui rapporte seulement une vieille femme qui se connait un peu mieux que lorsqu'elle l'avait quitté, et qui vient honorer une promesse avant de recevoir la mort. C'est aux racines de son arbre que le fruit vient mourir... »

Silence.

« Vous savez écouter... C'est la marque des sages... »

Un sourire fit son apparition sur le visage de la vieille femme, un sourire sincère. S'il était une chose que sa retraite ne lui avait pas accordé, c'était un interlocuteur. C'était sans doute la force de la civilisation que d'avoir la possibilité d'enrichir son propre point de vue par celui de l'autre dans un échange conscient et consentent...

« Croyez-vous qu'il soit possible d'évaluer la valeur universelle de ses idéaux en ne quittant pas la bulle de la civilisation ? »
Saï Don
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Longtemps, bien longtemps auparavant, Maître Don se souvenait avoir enduré de longues années de doute. Les questions avaient afflué des années durant, défilant dans son esprit et ne lui laissant que de rares instants de répit. Ce phénomène avait commencé peu après le début de son adolescence, et s'était renforcé à la mort de son jumeau. Pourtant, depuis une trentaine d'années, justement, des réponses s'étaient peu à peu formées. Les questions qui n'avaient trouvé de solutions s'étaient lentement effacé pour laisser au vieil homme la possibilité de vivre pleinement l'instant présent, lui permettant de réfléchir rapidement et efficacement dans toutes les situations qu'il vivait.

Il n'avait jamais réfléchi aux causes de ce brusque changement d'état d'esprit, mais il lui semblait qu'il s'agissait simplement de la sagesse que l'âge lui avait permis d'acquérir.

Si tous les Chevaliers, à son époque, ne se posaient pas tant de questions, Mitra paraissait faire partie de ceux qui avaient beaucoup réfléchi. En l'occurrence, il semblait qu'elle réfléchissait encore beaucoup.
Elle ferait certainement une archiviste cultivée et de qualité.

Le vieil homme accepta son compliment sans un mot.

- Nos idéaux sont fondés sur des principes moraux, fit-il remarquer sérieusement. La valeur principale de notre civilisation est le respect de l'autre. Si vous quittez la bulle de la civilisation, Mitra, j'ai bien peur que ce principe n'ait plus aucun sens, puisque « l'autre » n'existe plus hors de la civilisation.

En son for intérieur, Maître Don se promit d'inviter Mitra au prochain cours de philosophie qu'il donnerait au Temple. Elle apporterait sans aucun doute des arguments croustillants qui affûteraient l'esprit des élèves intéressés par le débat.

- Mais j'imagine que l'exil doit apporter de nombreuses réflexions sur la valeur de nos relations sociales. Il serait peut-être pertinent de suivre une piste dans ce sens : nos idéaux ont-ils une véritable valeur sans le reste de la civilisation ? En outre, si vous parlez de valeur universelle, comment pouvons-nous réfléchir à ce sujet dans la solitude ? C'est à l'opposé d'une valeur universelle, il ne vous semble pas ?


Les yeux du vieil homme s'étaient allumés d'intérêt tandis qu'il ramenait son buste en avant, les coudes posés sur les genoux. Dans la pièce, la lumière du soleil couchant éclairait les deux personnages ridés.

- Toutefois, je dois admettre que je n'ai jamais tenté un exil aussi long que le vôtre. Ma plus longue expérience coupée du monde se résume à quelques semaines d'errance sur Tatooïne. A part la chaleur et le souvenir d'avoir fini par tourner en rond dans mes pensées, sans plus entrevoir aucune issue, je n'en ai pas tiré grande leçon. Probablement n'avais-je pas votre détermination !
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Basculant à en avant à son tour, la grise vint déposer l'un de ses avant-bras sur ses jambes qu'elle venait de croiser.

« Probablement aviez-vous des responsabilités à assurer vis à vis de l'ordre, j'ai du abandonner les miennes pour me risquer à cette longue retraite. La détermination est une précieuse alliée qui m'a maintes fois fait défaut, croyez-le. Cependant, avec le temps d'autres alliées viennent se joindre elle. La folie fut probablement l'une d'elle pendant certaines périodes... L'isolement pousse parfois la raison à créer des chimères pour survivre. »

Elle laissa, sur ces mots, planer un court silence qu'elle mit à profit pour baigner son visage dans le halo tiède et fatigué du soleil de fin de journée. La folie l'avait plus d'une fois gagnée durant sa retraite, son amour propre avait encore fort à faire pour accepter l'être qu'elle avait été dans ces sombres moments de son existence. Ces moments, plus encore que ceux qui l'avaient vu sombrer dans le côté obscur de la Force, avaient laissé en elle une plaie béante et honteuse que son ego ne savait appréhender. Le fait même d'en reconnaître l'existence lui avait pris de nombreuses années de travail, et elle était encore loin d'être prête à aborder le détail de la sinistre expérience. Elle poursuivit donc sans plus s'attarder :


« Hors de la civilisation, '' l'autre '' ne suit pas les mêmes codes, et parce qu'il ne les suit pas, il tend à devenir invisible. La nature est ainsi faite que nous perdons la capacité à percevoir ce dont nous nous détournons trop longtemps. La solitude est rarement absolue... Etre absolument seul s'avère bien souvent une illusion, et plutôt qu'être seul, il s'agit peut-être d'être aveugle.
Hors de la civilisation, '' l'autre '' est peut-être alors cet arbre sous lequel se rassemble régulièrement des groupes de réflexion, dans le parc. '' L'autre '' est peut-être cette bête sauvage qui attend l'imprudent celui quittera l'enceinte d'Iziz. '' L'autre '' est peut-être cet air que nous respirons...
Affirmer qu'un Jedi sert la civilisation de façon exclusive, c'est l'autoriser, en quelque sorte, à massacrer des écosystèmes entiers si l'envie l'en prenait, à la seul condition que n'en souffre pas la civilisation. Il n'en est rien, fort heureusement. »


Son regard, perdu au travers des vitres, revint aux yeux bleus et cernés du vieil homme. La civilisation était chère à l'ordre Jedi, car souvent considérée comme seule origine de la paix dont l'ordre se faisait le défenseur. Cette paix, pour laquelle la femme aux blancs cheveux avait autrefois oeuvré avec ferveur, n'éveillait plus en elle la même dévotion. Sri ne croyait plus en la paix, pas plus qu'en une justice morale, ces artifices de civilisation ne trouvaient plus en elle l'écho d'une vérité ni d'une quelconque authenticité. La paix comme la justice étaient systématiquement supplantées à ses yeux par les principes universels auxquels ces concepts ne pouvaient se soustraire.
Toujours appuyée sur son genou, elle reprit son discours, qui visait à présent à souligner l'absence de contradiction qu'elle percevait dans un isolement destiné à appréhender les choses sous un angle, sinon universel, tout au moins plus large :


« Dans la voie de la Force, l'adepte apprend à faire taire sa voix intérieure pour entendre le chant de la Force. Dans la voie martiale, l'adepte apprend à se départir de son désir propre pour percevoir celui de celui auquel il se confronte...
La civilisation n'est-elle pas, dans une certaine mesure, une voix tonitruante, un maelström de désirs, un torrent d'idées ? Celui qui cherche à toucher du doigt la nature même des choses, à appréhender l'universel, ne devrait-il pas lui aussi se soustraire à ce qui émane des siens, pour mieux percevoir ce qui émane du reste ? »


La vieille femme parlait ainsi qu'elle le faisait jadis lorsqu'elle échangeais des points de vue au cours des échanges philosophiques qui étaient organisés du temps où elle servait l'ordre en tant que sentinelle. Ses affirmations et ses question ne cherchaient pas tant à convaincre qu'à attirer la réflexion sur un point donné. Avec le temps la vieille femme avait une très fâcheuse tendance à imposer ses idées comme des vérités, mais il n'en était rien ici, sans doute parce que son interlocuteur était aussi âgé qu'elle, sinon plus, et qu'il semblait partager son goût pour la réflexion. Toutefois, s'il n'émanait pas d'intention de convaincre à tout prix, l'intérêt que semblait porter la vieille femme pour ces question était palpable, à en juger par le ton de sa voix et le brin de folie dans son regard.

Le vieux maître avait d'ailleurs mis le doigt sur un point qu'elle n'avait pas encore abordé, à savoir la valeur des idéaux Jedi sans la civilisation pour les supporter. C'était là un point des plus délicats pour son interlocutrice, dans la mesure où elle en était venue à renoncer à certains préceptes de l'ordre précisément parce qu'ils ne présentaient à ses yeux aucune valeur dans un contexte plus vaste que celui de la civilisation, contexte qu'elle jugeait aussi étriqué que partial. Elle se restreignit donc pour l'heure à exprimer un avis relativement partiel sur la question :


« L'enseignement du respect, de l'autodiscipline, du discernement, de l'harmonie, du contrôle de ses émotions, de la connaissance, peut trouver sa place hors de la civilisation. Si la civilisation mettait en péril le reste des êtres, l'ordre la servirait-il encore ?
Les civilisations évoluent... parfois vers la sagesse, parfois vers la folie. Lorsque se présentera le changement, l'ordre devra-t-il lui aussi réviser ses idéaux pour favoriser sa sagesse comme sa folie ? »
Saï Don
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Le vieux Maître plissait ses yeux tandis qu'il concentrait son attention sur la parole de Mitra, tentant d'en saisir tout le sens. La folie disait-elle...

- Chacun porte sa propre folie, peut-être plus encore lorsqu'il est baigné dans la civilisation. L'exil n'a peut-être fait que mettre à jour ce que vous appelez ces chimères. Je ne doute pas qu'elles soient présentes en chacun de nous, à tout instant. Et que nous pouvons tous être trompé par elle, à plus forte raison si aucun recul ne nous a jamais permis d'en mesurer la profondeur.

Pendant quelques minutes, il écouta ensuite la vieille femme raconter son exil, l'expérience étrange que lui n'avait jamais connu. Il sourit à l'évocation de ses propres cours de philosophie sous le vieil arbre. Pour de tels évènements, aussi insignifiants soient-ils, il ne pourrait probablement pas renoncer à la vie au Temple Jedi. Peut-être plus tard. Peut-être plus tard, lorsqu'il n'aurait plus de padawan à former, ni de responsabilités au Conseil, peut-être qu'alors il irait s'exiler, entrer dans une ultime réflexions, coucher sur papier ses dernières conclusions au sujet de l'Ordre Jedi, de la galaxie, de la vie et de la République, et rejoindre la Force dans un silence que l'univers bruyant masquerait de tous.
Mais ce n'était pas pour maintenant.

Il prit quelques secondes de réflexion avant de répondre à la nouvelle archiviste.

- Tous ces enseignements, respect, discipline et les autres cités, sont toutefois difficiles à transmettre sans les structures de la civilisation. Même les peuples les plus primitifs s'organisent entre eux de manière à survivre au mieux, et c'est de ces premières intentions que les espèces intelligentes ont entrepris d'inculquer la discipline, le contrôle des émotions, la connaissance et l'harmonie : sans ces éléments la civilisation s'autodétruit. Mais comment l'enseigner aux plus jeunes s'ils ne peuvent voir leurs semblables agir de même pour le bien d'une société ? Si l'être qui apprend est en exil, ce respect de l'autre ne peut exister. L'être vivra selon un égoïsme que l'on ne peut blâmer. Peut-être me trompé-je, mais j'aurais tendance à penser que si vous n'êtes pas tombée dans une telle situation, si vous vous êtes efforcée de respecter flore et faune, de continuer à réfléchir et acquérir des connaissances sur ce qui vous entourait, c'est en grande partie à cause d'une éducation au sein de la civilisation...

Il marqua une pause tandis qu'en son for intérieur, les pensées poursuivaient leur cours rapide.

- Néanmoins, je suis d'accord avec vous sur la dangerosité de cette civilisation. La folie de la civilisation est toujours présente et nous pouvons en observer les conséquences dans tous les lieux qui l'ont connu et ceux qui la connaissent encore. Le devoir de l'Ordre, selon moi, est plus lié à la protection de la civilisation contre elle-même que contre quoique ce soit d'autre. Elle-même engendre ses propres maux, et nous ne facilite pas la tâche.

Son esprit revint aux mots de Mitra au sujet de la sagesse et de la folie, mais il se doutait que nul ici ni ailleurs n'avait la capacité de déterminer la limite entre folie et sagesse. Selon lui, la folie pouvait apporter, par l'imagination qu'elle suscitait et malgré le danger qu'elle représentait, des éléments constructifs à la sagesse. Mais il aurait été incapable d'expliquer pourquoi une telle conviction. Il savait donc sur quoi porteraient ses prochaines méditations.
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