Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
Messages : 302
Eclats Kyber : 0
Zerath jeta un œil sur sa gauche, un œil sur sa droite. Les gardes qui l'encadraient étaient muets comme des tombes. Ils progressaient, arme en main, comme encadrant un dangereux prisonnier. Leurs tenues étaient blanches, dans ce curieux plastique thermique qui, lui avait-on dit, était la meilleure défense contre les blasters. Ils portaient un casque qui occultait leurs expressions faciales, mais par leur stature le Kaleesh devinait qu'ils étaient tous humains – proche humains du moins. Cette garde n'était pas la sienne, car jamais n'avait-il eu d'escorte, d'aussi loin que remontait sa mémoire. Oh, il avait érigé des défenses contre ses ennemis, cela oui, sur son monde natal. Quel piètre général, quel pathétique stratège se serait offert sans au moins une garnison à une attaque adverse ou – pire ! Se serait élancé sur le front, au milieu du chaos, bafouant ainsi toute chaîne de commande pour la gloire éphémère et une mort certaine ? Mais en temps de paix, nul des siens jamais n'avait marché à ses côtés avec seul but de le protéger ; c'était pour implorer les faveurs des dieux que les siens venaient le quérir, car le prélat était conscient de réalités et de vérités qui échappaient aux simples mortels ; c'était pour l'aider à sa tâche que Cin, sa bien-aimée, restait à son côté ; et ç'avait été pour suivre ses ordres que les soldats toujours avaient marché au côté de Zerath.

Cette garde n'était pas la sienne, songea le Kaleesh. Les quatre hommes, toujours en silence, l'amenèrent le long d'un corridor richement décoré, aux meubles de bois et aux tapisseries fines. Le cyborg avançait plus lentement. Les vérins de ses jambes lui auraient sans doute permis une plus grande célérité que ceux qui l'encadraient en un carré serré, mais il peinait toujours à se mouvoir comme il le voulait ; les serres qui lui servaient de pied se posaient lourdement au sol, dérangeaient les fins tapis, retournaient les tissus de leurs griffes acérées, et sa démarche était exagérée, son équilibre n'était pas convenable. À la façon d'un étrange vieillard, il avançait courbé vers l'avant, comme si son dos de fer le faisait souffrir – mais c'était qu'en réalité il en contrôlait mal l'inclinaison. Sitôt tentait-il de se redresser qu'il finissait toujours malgré lui par reprendre cette posture avachie, qui lui donnait des airs de monstrueux accipitridé, un bossu gigantesque qui dépassait l'homme moyen de bien une tête et demi. Il s'appuyait de sa main droite sur son sceptre shoni, perle mat sous les précieux luminaires qui arboraient comme de lumineuses fontaines les murs, descendaient en cascades blanches des plafonds.

Comme une tache plus sombre dans un tableau de rouge et de chrome venait ainsi Zerath, emmitouflé de sa grande cape, ses bras mécaniques drapés de tissus qu'il avait récemment renouvelés – les précédents couverts de suie, de boue, de sang. Sur son avant-bras droit, il portait non sans panache une pièce d'armure ouvragée sombre, sertie de pierres qui tranchait avec son corps mécanique dont la teinte rouille suggérait une provenance étrangère aux terres républicaines. Parfois dans les couloirs, on se retournait face à cette étrange procession ; et le Kaleesh lui-même détaillait avec un intérêt marqué ces hommes et ces femmes en robes harmonieuses et aux coiffures surprenantes. C'étaient là des sénateurs, c'étaient là des secrétaires, c'étaient là des ministres, songeait le prélat ; c'étaient là ceux qui menaient la République et leurs visages étaient marqués de stupeur face à l'un de ceux qui la défendait.

L'Ular'Iim chassa cependant bien vite les passants de ses pensées. On le menait dans ce palais – dans cette cathédrale de luxe, d'opulence, de majesté qu'on appelait communément Sénat, pourtant il ignorait tout de la raison de sa convocation. Jamais de toute son existence Zerath n'était-il venu ici auparavant ; le soin que l'on avait apporté à la construction du bâtiment ainsi qu'à sa décoration était proprement impressionnante. Les architectes sans doute déjà anticipaient-ils les exceptionnelles existences à venir, qui fouleraient le Sénat, pour le grandir de leur présence ou pour le jeter du haut de ses fondations ? Il était certain qu'il ne s'agissait pourtant nullement des sénateurs qui, pour toutes leurs qualités, jouissaient pourtant d'une bien sombre réputation ; l'on soufflait que la corruption était partout derrière les bustes finement ciselés et les miroirs luisants du Sénat, que derrière les gants blancs des élus se tramaient des affaires noires, qu'enfin la guerre elle même n'était ourdie que par une poignée de conspirateurs qui jouaient un fin jeu, s'acoquinant tantôt à un côté, tantôt de l'autre, se lavant les mains dans le sang, couvrant leurs traces dans les flammes de mondes ravagés par des conflits qui ne visaient qu'à détruire les preuves sensibles.
La grandeur apparente du Sénat contrastait avec les rumeurs sur les petites personnes qui y œuvraient – en bien ou en mal. Le prélat ignorait parfaitement pourquoi on le menait à présent à travers ce lieu si prestigieux, mais il avait l'intime conviction que ce jour était inscrit dans les étoiles. Il pressentait que quelque chose dans l'ordre cosmique se trouverait bientôt chamboulé, par des façons qui échappaient à son esprit. Cependant, ce n'était pas la prédestinée curieuse écrite dans le cœur des nébuleuses qui était l'explication la plus directe à sa présence. Peut-être, songea-t-il, était-ce plutôt lié à la récente et féroce bataille de Dubrillion. Peut-être venait-on le blâmer, car il avait laissé le moff Stoker s'échapper. Peut-être venait-on le mettre aux fers même, car la population locale sans doute réclamait un responsable, un bouc émissaire pour tout le sang versé.

Le cyborg avisa. La bataille de Dubrillion s'était déroulée trois jours plus tôt. Les forces républicaines avaient rallié Coruscant dans la nuit suivant les derniers et meurtriers échanges. Depuis, on avait soumis les soldats blessés aux soins intensifs, on avait annoncé les morts à leurs familles, on avait envoyé les hommes également auprès de leurs psychiatres, car ceux sur le front jamais ne revenaient indemnes. Les officiers eux-mêmes vivaient avec un stress intense – traumatisant presque. Zerath s'était soumis à l'expérience, consultant également un psychiatre ainsi que le réclamaient les procédures républicaines standard, cependant son esprit Kaleesh était ancré dans la guerre comme un arbre dans le sol. Son esprit était indemne, cependant son corps avait eu besoin d'une nouvelle cure de bacta, toujours en rémission, plus de deux ans après son gravissime accident. C'était l'amiral Lair, encore hospitalisé, qui avait annoncé la nouvelle au cyborg, alors que celui-ci lui rendait visite. Comme il avait pris sa place pour commander en orbite de Destrillion la flotte, il devait prendre sa place pour une convocation spéciale au palais préfectoral. Et au bureau de la Chancellerie, de surcroît !

C'était certainement un honneur, songea Zerath. Mais serait-il favorable ou funeste, cela, l'ecclésiastique alien ne pouvait le dire.

Son escorte se stoppa face à une porte ouvragée qui probablement était dans l'un de ces matériaux précieux et purement décoratifs comme le bronzium – encore que des liserés argentés écartèrent le bronzium des potentiels candidats. On ouvrit devant lui les lourds battants derrière lesquels se dévoila un ample office, dont le luxe et les singulières décorations n'avaient rien à envier aux couloirs qui y menaient. Et directement face aux portes, au-delà de sofas et de canapés dont on soupçonnait le confort d'un simple regard, un bureau ciselé d'une main de maître, derrière lequel trônait une humaine.

« - Le sergent Ular'Iim. » tonna l'un des quatre humains dans son escorte improvisée. Quelle introduction bien pauvre, songea le Kaleesh. On lui aurait probablement arraché la langue pour un si grossier résumé. Zerath n'était pas qu'un sergent, il occupait un rôle autrement plus important que misérable sous-officier oubliable dans l'armée républicaine. Il était le prélat de la Lune ! Plus important représentant des dieux sur son monde natal, le héraut de leur volonté et le plus respecté de ses pairs ! Qu'était-ce là que cette présentation crue et...Cela était sans importance, conclut enfin l'alien âgé. La fierté patienterait un autre jour. Il tourna ses yeux d'or vers la femme qui occupait le bureau central. D'autres visages étaient présents dans la salle, mais c'était manifestement à elle qu'il était voué à s'adresser.

Il posa un genoux à terre, le gauche et y ramena sa main gauche, alors qu'il maintenant bien droit son sceptre d'os de son autre main. Il inclina sa tête en avant en signe de profonde révérence ; c'était là la façon cérémoniale dont son peuple saluait ceux pour qui ils éprouvaient un respect hiérarchique. Zerath, à la vérité, ne respectait pas encore la chancelière. Il ne l'avait jamais vue à l'oeuvre, aussi cette salutation était elle un contrat tacite : qu'à travers cette marque symbolique de confiance du prélat s'établisse une confiance mutuelle, et que personne ne trahisse cet accord – de valeurs intellectuelles comme martiales.


« - Je suis Zerath Ular'Iim, prélat de la Lune, représentant des miens et des dieux dans votre armée. Vous avez réclamé la présence de l'amiral Lair, mais celui-ci m'a mandé à sa place pour cette affaire – dont il ne m'a partagé aucun détail. À présent me voici face à vous, et aussi je vous demande : pour quelle raison réclamez vous mon service ? »
Emalia Kira
Emalia Kira
Messages : 697
Eclats Kyber : 0

Emalia se tenait debout face aux baies vitrées de son immense bureau. Ses yeux suivaient les couloirs aériens que les vaisseaux empruntaient avec une rapidité surprenante, fendant les nuages. L’air était chargé sur Coruscant, comme souvent lorsque la chaleur générait un surcroît de pollution qui s’échappait en volutes depuis les bas-fonds de la planète jusque dans le ciel. Des cheminées se formaient naturellement, et même le parc qui bordait le Sénat s’assombrissait alors. On arrivait néanmoins à y faire naître des parterres florissants et à entretenir des arbres centenaires, somptueux, qui paraissaient dans cette zone urbanisée comme des petits bijoux de nature.
Mais bien sûr, ce que l’on voyait surtout d’ici, c’étaient des colonnes et des colonnes de permabéton et de transparacier. Les plus grandes entreprises intergalactiques possédaient leur siège, sinon des bureaux de représentation, ici dans les beaux quartiers de la planète. Dans ces immeubles, l’on trouvait également les logements des individus les plus riches, des politiciens les plus en vogue, des managers et administrateurs les plus compétents. En-dessous, les commerces florissaient eux aussi : des agences de location de yachts aérospatiaux luxueux à la petite boutique de revente de speeders d’occasion, de l’Opéra à la cantina où les pires passes étaient réalisées… Jamais Emalia n’avait pris le temps de remarquer à quel point cette planète était chargée d’une vie économique et sociale qui faisait d’elle le cœur battant à tout rompre d’une République encore bien vivante.
Et si elle prenait le temps, ce jour, de contempler tout cela alors que des affaires urgentes, comme toujours, la pressaient, c’était parce qu’elle y cherchait le sens de tout ce qui venait se passer, et le courage d’y réagir.

Qu’arriverait-il si l’Empire, un jour, arrivait jusqu’à Coruscant ? Qu’arriverait-il si des Sith usant de la Force s’infiltrait dans les couloirs du Sénat ? Qu’arriverait-il si les choses continuaient à se dérouler ainsi, c’est-à-dire que leur ennemi continue à gagner invariablement du terrain ?

Un grésillement provenant de son bureau la fit sursauter, et elle se retourna prestement.

- Madame la Chancelière, votre rendez-vous est arrivé
,
fit une voix de droïde dans un petit communicateur disposé près de sa lampe de bureau.
- Faites-le entrer, fit-elle d’une voix presque aussi mécanique, tout en appuyant sur le petit bouton de l'appareil.

Avant que l’invité – plus tôt, le convoqué – n’arrivât, Emalia se pencha sur son bureau pour ouvrir le dossier relatif à cette entrevue, dans lequel quelqu’un avait, comme toujours, préparé une fiche à son intention pour lui donner quelques détails sur l’individu qu’elle allait rencontrer. Elle y jeta un œil en diagonale : un kaleesh quarantenaire, sergent, qui remplacerait l’amiral Lair. Suivait une liste de faits notables le concernant, malheureusement Emalia n’avait pas de temps à y consacrer. Il lui arrivait de travailler ces fiches lors de rencontres avec des officiels, mais cela avait moins d’importance lorsqu’il s’agissait d’obtenir quelque compte rendu d’un militaire. Et puis, elle aimait bien se faire une opinion personnelle des gens, qui ne soit pas basé ni sur le passé ni sur l’avis des autres.

Le militaire fut annoncé et quand la porte s’ouvrit, Emalia referma le dossier d’une main sèche, levant les yeux vers ceux qui entraient.
Au premier abord, elle se dit que l’espèce dont il était le représentant n’appelait rien à ses souvenirs. Avait-elle jamais rencontré de kaleesh auparavant ? Il lui semblait que oui. Pourtant, ce masque de métal, cette hauteur… Bref. Le cyborg s’inclina et se présenta, tandis qu’Emalia faisait le tour de son bureau pour se rapprocher de lui. Elle s’immobilisa à moins de deux mètres, et inclina légèrement le buste en signe de réponse.

- Prélat de la Lune, Sergent, je vous remercie d’avoir fait si rapidement le trajet jusque Coruscant, fit-elle, usant d’un ton élégant où perçait l’habitude des rencontres diplomatiques, avant qu’elle ne se tournât vers les soldats qui l’avaient accompagné. Merci.

Les soldats saluèrent et s’éclipsèrent, le son de leurs pas absorbés par les tapis pourpres qui habillaient les sols, et refermant derrière eux la lourde porte ouvragée. Sans attendre, Emalia se retourna vers le bureau, qu’elle rejoignit à pas vifs.

- Installez-vous, je vous prie. Dans quelques instants, nous rejoindrons une réunion privée avec d’autres représentants militaires afin de débriefer sur la coordination globale de nos forces pendant cette… bataille. Mais pour le moment, je voudrais avoir quelques retours sur ce qui s’est passé autour de Dubrillion.

Avant de poursuivre, elle laissa le kaleesh prendre place : il y avait des fauteuils de taille différente devant le bureau de la Chancelière et il choisirait celui qui lui siérait le mieux. A moins qu’il ne souhaitât rester debout, bien entendu. Emalia, elle, avait pris place dans son lourd fauteuil et posé les mains jointes sur le bureau. Presque comme si elle s’apprêtait à réaliser un interrogatoire… Ce qui n’était pas tout à fait loin d’être le cas, bien qu’il ne s’agissait pas pour autant de suspicion à l’égard du kaleesh.

- Mais avant cela, dites-moi, sergent… Prélat de la Lune, pourquoi l’Amiral Lair ne s’est-il pas présenté lui-même à cette convocation ?

Il perçait dans sa voix un léger soupçon de contrariété : Emalia n’avait pas apprécié que l’Amiral ne se présentât pas en personne comme elle l’avait demandé. Avait-il donc quelque chose à se reprocher ? Bien évidemment, ils n’avaient pas vraiment remporté la bataille de Dubrillion, mais Dathomir avait été pire encore. Que craindre alors ? L’Amiral avait intérêt à avoir un alibi qui convînt à la Chancelière.
Cette dernière fixait le masque de métal avec un regard intense, comme si elle cherchait à y lire quelque chose… Bien qu’elle sût qu’il serait plus difficile que d’ordinaire de deviner les émotions d’une telle créature. Néanmoins, elle ne le lâchait pas du regard, quand bien même ses sclères étaient-elles rosies par la fatigue et ses cernes apparaissaient quelque peu malgré son maquillage. Visiblement, Emalia avait eu du mal à trouver le sommeil ces dernières nuits.  
Zerath Ular'Iim
Zerath Ular'Iim
Messages : 302
Eclats Kyber : 0
« - Pour l’exacte raison de ma présence. » Répondit de sa lourde voix synthétique le prélat. Il ne s’était guère assis, mais alors enfin résolut-il à le faire ; il prit place dans l’un des confortables sofas, face à la Chancellière elle-même. Il reposa ses coudes et s’enfonça profondément dans le fauteuil sur lequel il avait jeté son dévolu, sans que ses yeux dorés ne quittent de leur mire reptilienne l’humaine à qui il devait vouer la plus parfaite allégeance.

« - Le combat de Dubrillion s’est engagé sous des auspices défavorables ; l’Empire a surgi d’hyperespace en nombre conséquent autour de l’orbite, nous a livré là féroce combat. Dans l’affrontement nous avons pu battre en retraite vers l’orbite de Destrillion, jumelle de Dubrillion autour de son astre, mais l’amiral Lair a été blessé durant notre retraite – gravement. »

Il marqua une pause avant de reprendre, inébranlablement calme tandis qu’il énonçait ses autres vérités plus sombres encore. Zerath parlait avec le détachement et la froideur d’un commandant qui dirigeait des pions et point des hommes ; ceci, par le manque notoire d’expression sur son visage, et l’immobilisme quasi parfait dont il faisait à présent preuve tandis qu’il s’exprimait. En réalité, le Kaleesh n’éprouvait guère qu’une légère sympathie pour les humains – aucunement de l’affection.

« - Les premières heures furent une débandade certaine, honteuse. Fort de la perte de Lair, le Féroce, navire amiral républicain se trouva sans commandement. Cependant, non sans la grâce par laquelle votre administration m’avait placé au côté de l’amiral avant qu’il ne soit incommodé hors de toute opportunité d’action, je prenai le contrôle de la flotte républicaine massée autour de Destrillion. Désireux de nous porter le coup de grâce, nos ennemis nous poursuivirent. Ils envoyèrent contre nous deux forces. La première était destinée à venir à bout de notre flotte, la seconde devait abattre une base militaire à la surface de la déserte Destrillion ; la première visait à abattre notre mobilité et notre centre névralgique de commandement tandis que la seconde devait abattre nos ultimes moyens de contre-offensive.

Et c’est dans cette volonté de nous abattre définitivement que l’Empire mobilisait le moff Vaas Stoker pour sceller notre destin, ainsi qu’une force restreinte pour ne pas briser leur blocus de Dubrillion. 
»

Les mains cybernétiques de Zerath se resserrèrent sur son siège. Le tissus grinça bruyamment sous l’emprise des griffes squelettiques. Son ton était devenu à présent sombre, empli d’un soupçon de vice qui mélangeait malice et amusement.

« - Le moff Stoker fut un adversaire de valeur. Il est certain que ce fut une âpre bataille, mais ultimement il battit en retraite. Néanmoins je ne suis pas parvenu à le capturer ; pour ceci vous avez Chancelière, ainsi que la République, mes excuses.

Suivant la retraite du moff, les troupes impériales massées autour de Dubrillion brisèrent leur immobilisme et se ruèrent à nous. Ce second affrontement fit pâlir le premier par sa violence; nous étions en désavantage numérique écrasant, et nous n’en réchappâmes que de justesse. L’amiral Baqstair perdit même son vaisseau amiral – de ceci certainement vous aurez au moins entendu parlé. Cependant, l’Empire finit par battre enfin en retraite, marquant la fin des assauts. Après dix huit heures, dont huit de combat continu, le siège de Dubrillion s’acheva enfin, aussi sanglant et bref qu’une exécution publique.

Je descendis sur la planète, et je n’y trouvai qu’un charnier sans nom, qui s’étendait où que je puisse porter mon regard. Certainement les purgatoires infernaux de vos dogmes et croyances ne diffèrent pas de ce que j’y trouvai ce jour-là ; mais ce purgatoire était bien réel.
 »

Le Kaleesh souleva sa main droite, tendant deux doigts décharnés en l’air.

« - Vous noterez cependant que je n’ai traité que la flotte du moff Stoker, car certainement vous désiriez savoir si nous avions mené bataille ou avions été défaits en tout point ; à présent sans doute vous serez convaincue que s’il n’y avait pas eu de réplique de notre part, vous et moi n’aurions pas cette discussion ; et à présent l’absence de l’amiral Lair est rendue limpide à vos yeux.

Mais vous n’aurez pas négligé qu’il y avait une deuxième flotte envoyée, qui échoua dans sa tâche ; celle qui devait détruire les forces au sol de Destrillion.

Cette flotte, Chancellière, n’était pas impériale. J’en ai observé l’insigne. Avant que nous ne quittions l’orbite, j’ai ordonné aux hommes valides et à l’état moral solide de procéder à une...Récupération. Des déchets célestes comme des corps. Nous avons trouvé là les corps désarticulés de machines produites à la chaîne, du matériel militaire que nous nommons couramment droïdes. Et sur les rares cadavres – ou ceux que le vide spatial avait préservés remarquablement bien, nous avons trouvé ceci. 
»

Là-dessus, Zerath sortit hors de son manteau ce qui semblait un vulgaire bout d’étoffe. Dessus était brodé un symbole qui n’était ni de l’Empire ni de la République.

« - J’ai mené quelques recherches les jours précédents. Il s’agit du symbole de Anoat. Vous désiriez mon avis, Chancelière. Permettez moi de l’énoncer. Nous ne réalisons pas encore pleinement la situation exacte. Il est une habile toile qui se tisse à notre insu ; et nous devons procéder avec soin pour en défaire les fils tortueux. Nous allons être très occupés, votre grâce. »

Les yeux de la liche d’acier alien brillaient à présent d’une lueur d’excitation pure, mais son ton demeurait cependant égal, maîtrisé à la perfection. Zerath guettait chaque réaction de son interlocutrice avec un intérêt qu’il masquait – sans grande difficulté – derrière l’auguste casque qui le maintenait en vie.

« - Un par un, nous devrons les éliminer, tous ceux qui menacent l’équilibre de notre monde. Que tous ceux qui nous blessent paient pour leur folie. Nous abattrons tout, qu’afin le silence et la paix que nous apprécions tant reviennent enfin. Telle est ma conviction sur notre situation actuelle, détachée de toute considération matérielle ou logistique ; car les miens sont forgés dans le combat pour apprendre à mieux chérir la paix. Mais la paix ne peut provenir de l’indécision. Vous devez vous entourer des plus redoutables, qu’enfin l’Empire redoute notre fureur. Et que Dubrillion soit le point de départ de notre riposte la plus cruelle. Soyez assurée que nous tracerons l’histoire, Chancelière. »

Ainsi avait parlé le prélat de la Lune, son masque mortuaire figé dans une expression de sinistre et impénétrable sourire. Ses yeux observaient pleinement celle qui dirigeait de sa volonté seule la République toute entière.
Emalia Kira
Emalia Kira
Messages : 697
Eclats Kyber : 0
La façon de s’exprimer du militaire parut à Emalia bien éloigné de ce à quoi elle s’était attendue. Certes, il était précis et concis, mais il avait aussi une élégance de langage qui trahissait que le titre de « Prélat de la lune » devait correspondre à quelque chose d’important sur sa planète. Elle n’en fut que plus confortée dans le fait qu’ils auraient de la facilité à se comprendre. Par ailleurs, elle appréciait qu’il ne la ménageait pas dans son compte-rendu. Emalia détestait qu’on la prît pour une petite fille qu’il conviendrait de protéger.
Elle s’absorba dans les propos du kaleesh, oubliant son apparence déconcertante.

- Vaas Stoker… répéta-t-elle pensivement. J’ai entendu ce nom bien trop de fois.

Coudes appuyés sur le bord du bureau, la Chancelière se mit à se masser les tempes. Dubrillion n’avait rien donné de mieux que Dathomir. Les mêmes scènes de défaite, de mort, de violence. La différence, c’était que Dubrillion n’avait pu être prise par l’Empire. Mais à quel prix ? Le tribut qu’ils payaient à cause de cet ennemi était chaque jour un peu plus lourd à porter.

- Pas impériale, vous dites ? Il existe nombre de mondes neutres autour de l’Empire qui ont pu prêter une flotte mais… Anoat ? Anoat est si loin.

Emalia soupira, ayant du mal à faire le lien. Anoat fournirait-elle du matériel à l’Empire ? Si c’était le cas, c’était bien peu judicieux de leur part, car Anoat pourrait facilement être isolée. Pourquoi aller chercher du matériel si loin ? En passant par l’espace Hutt ? Le transport par ces zones avaient un coût fastidieux. Il aurait fallu que cela revêt un intérêt particulier pour que cette nouvelle impératrice cherchât à acheter vaisseaux et droïdes à un monde si lointain.
La Chancelière releva les yeux après avoir observé le symbole, en écoutant la dernière tirade ardente du prélat, et rencontrer la lueur glaçante dans les orbites de métal. Cet effet brillant n’y était pas un peu plus tôt – à moins qu’elle ne l’eût pas remarqué ?
Pendant plusieurs minutes, elle resta silencieuse, et se laissa aller contre le dossier de son fauteuil. Quand enfin elle parla de nouveau, sa voix était dure comme de la glace.

- Je vous donne entièrement raison ; l’Empire est allé trop loin. Mais si nous devons riposter, je veux que cela soit avec une précision chirurgicale. Trop de nos soldats sont morts, dernièrement, Prélat. Et la vie de nos soldats est précieuse ; pas seulement en raison des compétences et du nombre que nous perdons, mais en raison des valeurs même de la République : je ne veux plus que nous perdions notre âme en envoyant à la mort maladroitement.

Le souvenir de la mort des membres de son escorte sur Dathomir lui brûlait la gorge et l’estomac. Plus elle avait avancé dans son mandat de Chancelière, plus proches avaient été les cadavres. Bientôt, elle le savait, elle serait confrontée à la mort sous ses yeux, et de cela l’Empire était responsable : pas seulement de tuer, mais d’envoyer les siens au trépas.
Emalia soupira, puis se redressa pour se pencher de nouveau sur son bureau.

[color=darksalmon]- Quoiqu’il en soit, vous avez conduit cette opération, il me semble, avec beaucoup de compétence et de loyauté. Sachez que cela n’est pas passé inaperçu. C’est une qualité que je n’oublie pas.

Elle avait martelé ces mots d’une voix davantage animée que précédemment, comme si cela la ramenait à la réalité, et à la possibilité d’agir plutôt que de se lamenter.
Finalement, songeait-elle, c’était peut-être une chance que l’Amiral Lair ne fût présent aujourd’hui. Le prélat avait une expérience de la stratégie qui l’intéressait davantage : plus proche du terrain, des soldats, de l’ennemi. Son avis serait précieux.

- Je vous remercie pour votre rapport. Je souhaite maintenant que vous m’accompagniez à la réunion qui va suivre, enchaîna-t-elle en se levant lentement de son bureau, une main indiquant une double porte sur sa droite. Sentez-vous libre d’y intervenir avec tous les détails que vous jugez être utile à notre réflexion.

Et sans attendre qu’il acceptât – qui refusait une invitation de la Chancelière ? – elle se dirigea vers la salle de réunion. Les double-portes s’ouvrirent d’elles-mêmes à son approche dans un crissement feutré, et donnèrent à voir la longue table des Ministres. Ovale et baignée de la lumière des baies vitrées, celle-ci comportait douze fauteuils, mais seulement deux étaient occupés… Le ministre S’orn et la vice-chancelière Anthana.

- Prélat, installez-vous, je vous prie. Je vous présente le sergent Ular’Iim, qui va assister à cette réunion. Puis, se tournant vers le droïde qui se tenait à l’autre bout de la salle : faites entrer les autres personnes, je vous prie.

Le droïde s’exécuta en actionnant le mécanisme d’une autre double-porte. De l’autre côté patientaient plusieurs militaires, dont notamment la capitaine Terressi qui avait assisté Emalia lors de la défense de Dathomir. Tous saluèrent avant de prendre place ainsi qu’il leur était intimé, et Emalia put enfin ouvrir la réunion.

- Bien. Je vous remercie d’avoir tous pu vous rendre disponibles si rapidement. Si j’ai souhaité faire une réunion si… martiale, c’est parce qu’il nous faut très rapidement décider d’une conduite à tenir pour se défendre de l’Empire. La propagande impériale fait état d’une nouvelle impératrice… Et qui dit nouveau chef, dit nouveaux modes opératoires. Je veux que tout cela soit analysé en détail de façon à avoir une stratégie PAR-FAITE contre l’Empire. Il est hors de question que nous perdions d’autres mondes que Dathomir à l’avenir ! Et je compte bien la récupérer, quand le moment sera venu.

Emalia s’assit, le buste droit et le regard farouche.

- J’attends vos suggestions, fit-elle avec hargne, comme si cet ordre impliquait aussi que les idées proposées fussent bien meilleures que celles auxquelles elle avait déjà pensé jusque-là.

Visiblement, elle portait beaucoup d’amertume à cause de cette dernière défaite. A quel point se l’attribuait-elle à elle-même ou aux autres, de cela elle ne laissait transparaître aucun indice.
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
skin made by
© jawn