Luke Kayan
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Luke tiqua, haussant un sourcil, puis l'autre lorsqu'après une hésitation, son ami lui avoua quelque chose d'assez déroutant.

- J'espère bien. Et ne t'avise pas d'embrasser quelqu'un d'autre.- Fit-il d'un ton faussement sévère. Au fur et à mesure, il avait bien compris que Karm disait des choses vraiment choquantes sans le vouloir, ni même saisir le concept. Il faisait donc preuve de patience avec lui, d'autant plus que le Chevalier ne mentait pas, ça avait toujours été eux deux, personne d'autre. Par ailleurs, en ce sens, l'Ark-Ni semblait même plus exclusif que Luke.- Ici, je veux dire, au sein de la République et même de la grande majorité des mondes, le baiser sur les lèvres appartient au conjoint ou à la conjointe, c'est un signe exclusif de tendresse. J'ai entendu dire que certains peuvent avoir des relations d'un soir et ne jamais embrasser leur conquête car c'est une chose vraiment intime. Enfin, cette signification si profonde s'est étiolée avec les siècles. Les jeunes d'aujourd'hui ne respectent plus rien.

Acheva le vieux ronchon de 24 ans, les sourcils désormais froncés et l'air aussi sérieusement déçu qu'un de ces patriarches dignes dans les holofilms. Il perdit tout air ressemblant lorsque son ami s'aventura sur un terrain bien plus glissant. Comment dire... Luke n'avait aucune idée de ce genre de choses. Ou du moins, trop, en ce qui concernait l'homophobie que son ami réduisait de façon si ingénue et charmante.

- Le problème n'est pas le terme "gay" mais ce qu'il génère, le dégoût qu'il entraîne ou les confusions. Un jour, j'ai aidé un apprenti qui peinait à faire un exercice et j'ai voulu l'aider à se positionner, il tremblait de peur, mais pas à l'idée de rater son exercice, sinon que selon les rumeurs, je serais capable de m'adonner à des attouchements. Je n'ai jamais été aussi humilié de ma vie, sachant qu'en plus, mes préférences n'étaient que le fruits de rumeurs, mais cela lui avait suffit à imaginer de telles dérives. Te rappelles-tu à la cité des Deux Soleils, cet agent qui éprouvait du mépris pour les Jedis et qui refusa de nous venir en aide? Et bien imagine le même dédain en dix fois pire, s'il avait su, lui ou une autre personne qui déteste les homosexuels. Certains meurent d'aimer les hommes ou "tout le monde" comme tu le suggères. Saisis-tu? Hapès, pour ne pas aller plus loin, est une planète où les hommes ne sont rien. Imagine deux ensemble, Jason, quoiqu'il ait fait, a pris beaucoup de risques en sortant avec moi. Ce qui augmente le mystère Noctis d'ailleurs, lequel ne semble pas souffrir du féminisme et ne cache pas ses préférences. Je me demande s'il a vraiment un lien avec les laboratoires de la planète, surtout que normalement ce sont les femmes qui y travaillent. Soit il n'a aucun lien avec ses origines, auquel cas sa race devient une anecdote peu importante, soit il est si puissant que les femmes de la planète le respectent... Et là nous avons affaire à un personnage aussi influent que dangereux.

Passer outre des millénaires de traditions, s'afficher comme homme libre, travaillant dans le domaine le plus prestigieux qui soit pour un Hapien, cela signifiait tout sauf un manque d'assurance ou de charisme de la part de Noctis-pour y revenir.- mais le grand méchant de l'histoire devrait attendre vu les questions de l'Ark-Ni. Mal à l'aise mais plus détendu désormais que la dispute s'était réglée, le jeune Jedi prit le temps de réfléchir. Les préférences étaient aussi un mystère pour lui.

- J'ai eu une amie, Elora Faren, qui était amoureuse de moi, j'ignore la raison. Seulement lorsqu'elle me fit glisser une main sous son haut, non seulement j'avais vraiment honte, mais en plus je me suis aperçu que sa poitrine ne déclenchait rien chez moi. Pas plus que certaines discussions de dortoir, certaines étant loin d'être chastes pourtant, sans parler de suffisamment détaillées pour en arriver à "voir" le corps de la beauté décrite. Le plus curieux fut quand une camarade Fallen eut la bonté de tester sur ma demande, ses hormones. Aucun mâle n'y échappe, moi si. Je me suis senti seulement irrité par sa présence trop féminine. J'ai supposé être totalement immunisé au désir de la chair et j'admets avoir ressenti un grande fierté, peut-être même suis-je devenu arrogant dans ce domaine un temps. J'imaginais qu'il était facile d'échapper aux affres du matérialisme. Puis il y a eu quelques approches avec un adolescent. Son parfum, sa poitrine plate... Ses lèvres. Je ne me l'explique pas en réalité. Peut-être que j'aurais pu aimer une femme... Je l'ignore? C'est bien plus difficile pour moi de m'attacher. Avant ton physique, j'ai naturellement aimé ton aura, ton caractère. Quant au reste, si je suis vraiment condamné à aimer les hommes, ce que je pense, et bien... Ta voix, ton parfum, ton corps en général, et hum... Bref, tu es quand même masculin, moi aussi, je me considère comme tel, bien que je ne sois pas non plus viril. Ça suffit, je suppose.

Oui, il allait en rester là, définitivement. Sans décrire ces courbes délicieuses, harmonieuses, sans grands détours, la vallée d'une poitrine simple qui se soulevait sous sa main, une bouche capable d'offrir des baisers fermes. Ce n'était pas comme s'il pouvait vraiment faire la comparaison avec des femmes, sachant que les seules qui l'avaient approchées ou embrassées- deux Siths.- à part Elora l'avaient frappé à l'endroit le plus sensible. Ah, il y avait aussi cet accouchement pendant lequel il avait pu se rendre compte de l'anatomie d'une femme. Non, ça ne l'attirait pas vraiment de s'unir à une personne de ce sexe. Que ce soit à cause de leur physique ou de son passé assez traumatisant avec toutes les filles de sa vie, mieux valait éviter de trop creuser.

- Elora, mon amie Miraluka a disparu du Temple quand je lui ai dit. Ce fut si difficile, pour elle je suppose mais aussi pour moi. Je n'ai pas compris à cette époque qu'elle me refuse ce toucher, si proche, que nous avions, à mes yeux alors innocent. Tout s'est arrêté. Notre complicité. Notre amitié. Elle a retrouvé le Temple qui lui offrit une nouvelle chance, mais plus rien ne fut comme avant. Désormais nous nous croisons à peine, et lorsque c'est le cas, nous demeurons comme deux anciens camarades de classe, forcés de se côtoyer par pur hasard, courtois, prudents, distants.

L'Amour faisait souvent souffrir. Il pouvait aider à grandir, apprendre et offrir le bonheur mais pas sans la souffrance de sa propre victime ou des gens qui gravitaient autour. Elora et lui avaient bien essayé de se reparler à la cantine, seulement tout était vicié, et, avant que la rancœur ne reprenne le dessus, chacun avait préféré suivre sa route. Dire qu'ils avaient été fusionnels. Luke avait-il rompu un lien puissant ou révélé la fragilité cachée de ce dernier?

- Allez, que je te borde.

S'amusa le jeune homme, également heureux de trouver une distraction. Le sujet d'Elora lui provoquait une certaine culpabilité car il pensait qu'il aurait pu faire davantage d'efforts, mais aussi une grande déception car un ami n'était pas sensé fournir autant d'efforts pour obtenir la compréhension d'une proche. Enfin, c'était ainsi, les années avaient passé, ils avaient grandi chacun de leur côté, ce qui signifiait qu'au fond, ils n'avaient jamais été réellement amis, ou qu'ils n'auraient pas pu continuer à l'être.
Karm Torr
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— Luke…

Allongé dans son lit, bordé comme un enfant, Karm avait réfléchi un moment et, alors que son ami s’apprêtait à quitter la chambre, la tête pleine d’explications qui avaient encore bien du mal à faire sens pour lui, le Jedi s’était redressé sur ses coudes.

— Je te protègerai. Contre… Tout. Je te protègerai.

C’est ça, Karm, c’est ça.
Maintenant, au dodo.

D’ailleurs, l’Ark-Ni ne tarda pas à se laisser gagner par le sommeil, lorsqu’il retomba contre ses oreillers immenses et, le lendemain matin, dans le mess réservé, au sein du petit dispensaire préfabriqué, aux infirmiers, aux bénévoles et aux docteurs, il avait l’air de se porter beaucoup mieux. Troquer sa blouse d’hôpital contre ses habits d’explorateur et retrouver son sabre laser — celui de Luke, tout du moins — à ses côtés fut assurément un soulagement profond.

Il bavardait avec Luke depuis plusieurs minutes quand Assayanah vint s’asseoir à côté d’eux.

— Vou savez l'air en forme.
— Ça va vach… beaucoup mieux, merci.
— Je suppose qu’il est inutile pour moi d’insister pour que vous n’alliez pas visiter la Tombe et attendiez d’être pleinement rétabli ?
— Le devoir nous appelle et puis, tu… vous semblez avoir la situation bien en main ici.
— Effectivement, si j’en crois les rapports du personnel de nuit.

La conversation s’engagea sur les derniers développements de la nuit, tous très encourageants, et sur l’enquête des forces polices, qui avait commencé. Le gouvernement central de la planète avait envoyé ses meilleurs inspecteurs pour faire toute la lumière sur la situation et, dans quelques heures, on attendait l’arrivée de ceux de la République même. Les premières observations des Jedis finiraient donc entre des mains de confiance, même si Karm comptait bien communiquer toutes leurs conclusions aux Ombres, les plus indiquées pour venir à bout de la question.

Bientôt, Luke et lui se retrouvaient dans un speeder piloté par un factionnaire de la police. Dans l’étroit appareil, qui n’avait jamais qu’une place de front, Karm s’était tourné sur la sienne pour parler à Luke. Alors qu’ils échangeaient encore de nouvelles hypothèses sur ce qu’ils étaient susceptibles de trouver à la Tombe.

La Tombe avait été fondée par les Rakatas et, pour tout dire, elle demeurait largement inexplorée. Cette prison labyrinthique s’étendait un inextricable réseau de couloirs mystérieux et de cellules improbables, que la République avait tenté de domestiquer, avec des succès inégaux. Là rôdaient les droïdes si violents des Rakatas, qui continuaient à accomplir leur tâche dangereuse et nécessaire, en surveillant les geôles où des créatures anciennes et terribles étaient maintenues dans un état de stase perpétuel.

La République y avait joint elle-même ses prisonniers, plus récents, peut-être non moins inquiétants, et elle maintenait l’illusion de s’assurer un contrôle sur un établissement dont elle avait pourtant bien conscience de ne pas connaître la moitié en joignant quelques gardes bien vivants à l’équipe des droïdes. Nul ne savait, au fond, jusqu’à où s’étendait la Tombe ni les noms de celles et ceux que les Rakatas y avaient d’abord renfermés. Mais c’était de la partie purement républicaine que les deux associés de Noctis avaient été exfiltrés.

Alors qu’ils débarquaient du speeder, Karm posa une main sur l’épaule de Luke, les sourcils froncés. Une intuition de Jedi l’appelait à la frontière de sa conscience, murmure fuyant qui se délitait au milieu de ses pensées volontaires, et qu’il tenta de traquer, mais sans succès, en faisant le vide dans son esprit.

— … non… non, rien…

La main revint dans sa poche et ils se mirent en route. La surcouche républicaine du complexe ressemblait à certains égards à bien des prisons de la Galaxie, quoique Karm n’en ait pas visité beaucoup, mais la Tombe existait au-delà et en-dessous, comme une menace indéchiffrable qui les entourait. Un homme d’une quarantaine d’années, la coupe typique de l’armée républicaine, la carrure athlétique, contrôla leurs identités puis, laissant le policier derrière eux, les deux Jedis pénétrèrent dans le complexe proprement dit, jusqu’à être guidé dans le bureau de la directrice du pénitencier.

Cette humaine entre deux âges du nom de Vajda Kolski s’était illustrée en organisant les mesures de détention des prisonniers de guerre en pleine bataille. Elle était rompue à l’administration des emprisonnements exceptionnels et des mesures d’urgence et, depuis plus de deux ans désormais, on lui avait confié la mission de poursuivre l’exploration et la modernisation de la Tombe, une tâche difficile pour laquelle elle avait d’abord manqué de moyens mais que la guerre renouvelée contre l’Empire commençait à rendre prioritaire.

À ses traits tirés, on devinait facilement qu’elle n’avait pas dormi de la nuit, et cependant elle faisait preuve d’un professionnalisme irréprochable, et même d’une courtoisie inattendue, pour une femme qui avait passé l’essentiel de sa vie à emprisonner des gens, sur des champs de bataille. C’était une personnalité méthodique et calme, qui accueillait avec plaisir les visites de l’extérieur, isolée qu’elle l’était dans ce monde reculé.

— Chevalier Torr, Chevalier Kayan, bienvenue. J’ai pris la liberté de consulter vos états de service avant votre arrivée, pour savoir quel genre de familiarité vous aviez avec une situation comme la nôtre et l’étendue des explications qui vous seraient nécessaires et j’ai préparé un rapport préliminaire qui devrait vous être adapté. Voici en basic. Voici en braille.

Bref, c’était une fonctionnaire qui n’avait pas volé ses promotions.

— Croyez bien que je regrette que les failles de mon système vous aient détourné de votre mission première. J’imagine que l’Ordre diligentera une enquête plus approfondie. Par des Ombres, je présume ?
— C’est probable. On essaie juste de débroussailler le terrain.
— Moi de même, répliqua Kolski d’un ton songeur, moi de même. Pour tout dire, je soupçonne la complicité intérieure. Peut-être pas un de mes hommes, encore que rien ne soit à exclure, mais un droïde rakata qui aurait été reprogrammé d’une manière ou d’une autre. Au moins pour donner des informations sur la disposition des lieux, qui est largement ignorée du monde extérieur, mais que l’équipe d’extraction semblait naviguer sans la moindre difficulté.
Luke Kayan
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[HJ: J'ai essayé de ne pas trop m'avancer sur Noctis, si quelque chose ne va pas, dit-le moi!]

- Soeur Assayanah, prenez soin de vous. On reste en contact.

- Oui, promis.

Luke reçut avec surprise la femme au teint mat contre sa poitrine. Il l'enlaça avec tendresse et la laissa poser sa tête sur son épaule. Une goutte mouillée fit frisonner son cou non protégé par sa tunique. Lui-même dut faire un effort pour ne pas laisser perler son émotion. La repoussant gentiment, le Hapien maintint fermement les bras de la religieuse, comme pour la forcer à se tenir droite.

- Tu fais un travail formidable. Continue. Continuez. Merci.

Le "merci" raisonnait encore en écho dans l'esprit de Luke, lorsqu'il laissa cette infirmière compétente dotée d'un coeur pur, vraiment pur comme il pensait que tous l'étaient à l'adolescence. Une dernière pensée, une ultime Onde de Force voyagea dans les couloirs de l'installation, tandis que les deux Chevaliers quittaient définitivement les lieux. Assayanah ne ressentit probablement rien, peut-être une brise. Dans tous les cas, l'onde retomba, s'affaiblit, puis mourut sur le seuil de l’hôpital où Karm avait été celui qui avait failli s'éteindre à tout jamais. Luke s'engouffra dans le speeder du fonctionnaire et les Chevaliers partirent vers la suite de leur mission.

Le contact avec la main de Karm provoqua un léger sursaut qu'il se retint d'exprimer, ne souhaitant pas inquiéter son compagnon. Ce dernier évoqua un "non... rien" en revanche assez préoccupant. Aussitôt Luke le sonda, cherchant une trace de maladie. Avait-il encore un coup de chaud? Heureusement, il ne perçut rien et pensa que son camarade s'était trompé. Après tout, lui aussi sentait parfois un danger quand il n'y en avait aucun immédiat. Ils étaient de toutes manières sans cesse menacés sur cette planète, sans oublier les relents du virus. Luke chercha à se convaincre. C'était le stress qui perturbait sa propre interprétation, car au fond, lui non plus ne se sentait pas tranquille. Et il y avait de quoi...

En effet, la Tombe était un endroit aux proportions formidables, même Luke qui possédait une bonne mémoire géographique commença à s'emmêler après de nombreux détours. Il notait instinctivement chaque détail, tel le son du carrelage ou d'un autre sol en terre battue, encore en chantier. Les murs, solides et plein d'aspérités égratigneraient volontiers ses doigts s'il forçait davantage le contact. Leurs pas résonnant en un écho avaient le don de le perdre un peu plus, car il se repérait habituellement grâce à l'origine des bruits précise. Heureusement l'aura de Karm était un guide fiable et Luke parvint à maintenir le rythme jusqu'au bureau de la directrice de la prison. Lorsqu'elle remit entre ses mains, la copie en braille, le Hapien la salua d'un franc hochement de tête. Il appréciait sincèrement le geste si peu habituel. Pour une fois, il allait pouvoir suivre la conversation, lire son rapport comme un grand au lieu de courir après les infos une fois la réunion terminée. Profitant d'un des rares avantages de la cécité, Luke fit courir agilement ses doigts sur les fiches, tandis que ses yeux vairons restaient posés dans la direction de Vajda, comme s'il la regardait -en louchant, certes.-

- Avez-vous eu le temps de faire réviser toutes les dernières manipulations informatiques des droïdes? Bien sûr, on peut songer qu'avec une échappée aussi bien préparée, nos chers évadés aient pris le temps d'effacer leurs ultimes actions mais ça ne coûte rien d'essayer.

En visualisant les données des robots, leurs chargements, leurs itinéraires et ce qu'ils avaient vu en dernier instance, il y avait de quoi trouver des informations bien que ce travail pouvait être fastidieux. Non seulement il fallait mettre la patte sur le bon robot, mais en plus visualiser un certain temps d'enregistrement afin de capter une manipulation suspecte possiblement vieille de plusieurs semaines. Heureusement ils pouvaient aussi comparer certaines données informatiques de façon automatique, en ordonnant à la centrale de leur montrer les actions suspectes dans la mémoire des droïdes.

- Et vos hommes, accepteraient-ils de passer par le détecteur de mensonges, à commencer, en priorité, par ceux qui interagissaient avec prisonniers du secteur d'où se sont évadés les prisonniers. D'ailleurs, si nous pouvions visiter leur cellule, ce serait une petite avancée. Je me doute que vous avez déjà dû envisager ces options et fouillé les lieux clés, mais nous aimerions nous faire une idée, s'il vous plaît.

Vajda évalua un moment le jeune homme, elle hésita à se demander s'il doutait de son travail, mais finit par fléchir, saisissant que ni Karm, ni Luke ne voulaient lui faire du mal. Ils semblaient plutôt modestes étant donné les dernières paroles de l'Ark-Ni, admettant n'être là que pour "débroussailler". Ils étaient dans le même camps. Avec un soupir, lassée par la situation et envieuse de régler la situation, en retrouvant les prisonniers espérait-elle, la femme se leva pour guider les Jedis jusqu'à l'endroit en question. Luke sentit des reflux de Force sombre. Un Sith ou quelque chose s'y approchant avait traîné dans les parages. Évidemment, l’acolyte. Cela dit, l'aura laissée semblait plus puissante que celle d'un jeunôt de 20 ans.

- Comme vous le remarquerez, il n'y a pas de signe évident de forçage, ce qui indique clairement la présence d'un ou de plusieurs complices. C'était soigneusement préparé, et si vous voulez mon avis les failles de mon système en corrélation avec ce fameux virus n'est pas dû au hasard.

- C'est ce que nous croyons aussi. - Confia Luke.- Surtout que nous savons que ce dernier épargnait la race d'un possible commanditaire.

- Noctis?

Évidemment, elle était au courant. Luke hocha la tête. Appréciant que les deux Jedis partagent aussi leurs infos, elle se détendit, se laissant un peu plus aller sur un plan plus personnel. Aussi émue qu'énervée par le sujet, sa voix s'était faite froide, dure comme la roche qui entourait la prison tordue de la Tombe. Telle une promesse, un couperet, la directrice condamna un homme que Karm et Luke commençaient à connaître.

- Il faut être prudent. Officiellement, personne n'a rien contre lui. Il n'y a aucune façon de le relier aux évadés, mais j'ai relu des centaines de fois le rapport, quoique peu garni, de Noctis. Ce fut un hasard, mais lorsque j'ai reçu ces deux cas, j'ai fait quelques rapprochements, temporels notamment, entre leur rapport et celui de Noctis. Ce peut être un hasard, après tout on ne sait presque rien de cet homme, mais... Je suis intimement persuadée que le Boucher a à voir avec cette évasion. En tout cas, il en a les capacités. Ah ce petit sacripant, si je l'avais ici, on verrait bien s'il ferait le malin.

Le Hapien tourna la tête vers l'explorateur, gardant pour lui le fait qu'il songeait que "petit sacripant" était un terme qui convenait peu à Noctis. Là tout de suite, sans yeux, il ne pouvait pas vraiment procéder à une quelconque observation.
Karm Torr
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— Donc, quatre gardiens en tout, par tranche de sept heures, plus deux droïdes, en permanence ?
— C’est ça. On est en train de démonter les droïdes, mais ça prend du temps. La technologie rakata est efficace, mais pas facile à comprendre, et surtout ancienne. La moindre maladresse et nous perdrions de précieuses données. Et un outil précieux.

La cellule n’était ni spacieuse, ni fort décorée, et en réalité Luke ne perdait pas grand-chose. L’inspection de ses moindres recoins était une affaire vite réglée et, en dehors de la présence lancinante du Côté Obscur, à cause de l’Acolyte et probablement d’un membre du commando, ou bien d’un artefact qu’ils auraient apporté avec eux, pour faciliter l’évasion, rien d’extraordinaire ne sautait aux yeux. À part…

— Qu’est-ce que c’est, demanda Karm en désignant une tâche brune près des générateurs de la barrière de plasma ?
— Du sang. Celui de Sto, je l’ai fait analysé. Il a probablement été blessé pendant l’évasion.
— Probablement, murmura Karm d’un ton pensif, avant de se redresser pour qu’ils puissent gagner l’autre cellule.
— La cellule de Darth Antara, commenta la directrice, pour tout dire, une prisonnière assez agréable, compte tenu des circonstances et de son identité. Jamais un mot plus haut que l’autre, jamais une plainte. Elle faisait même la conversation. Pas que mes gardes soient particulièrement chaleureux, au demeurant, mais ça ne paraissait pas la décourager.
— C’est elle qui s’est évadée en premier.
— Impossible de le dire, aucun enregistrement ne fonctionnait, le gardien en faction est mort et le droïde de service désactivé.

Mais le commentaire de Karm n’avait pas pris la forme d’une question. Il était grimpé sur le lit et il gratta l’index de la rainure entre le plafond et le mur de la cellule, avant de renifler son doigt. Darth Antara était botaniste : elle et lui parlaient le même langage. Une fois redescendu du lit, il s’accroupit face aux générateurs à plasma. Debout à côté de Luke, la directrice observait patiemment tout ce petit ménage. Le Chevalier lui paraissait bien un peu étrange mais elle préférait de loin les excentriques bien informés que les conventionnels qui n’apportaient rien de plus.

— …hm…

Après quelques minutes d’une inspection silencieuse pendant laquelle Karm avait sorti sa vibrolame pour démonter le générateur, Kolski se risqua à un :

— Chevalier ?
— Des champignons.
— Plaît-il ?
— Des champignons, insista Karm en se redressant avec une pièce du générateur, pour la montrer Kolski, Voyez, là, c’est un résidu de matière organique, cramée par le générateur, mais qui pour un temps a dû suffire à couper le champ de force et permettre à Antara de sortir. Là-haut, dans les fissures, y a des traces de spores. Ça a rangé un peu les murs aussi. Elle a développé un champignon ici, grâce à la Force, jusque dans le générateur. C’est minuscule, ça passe sous les détecteurs, et si c’est repéré par l’analyse chimique, ça reste jamais qu’un truc très courant dans une planète à moitié tropicale. Elle a eu le temps de le faire prospérer semaine après semaine et, le moment venu, ça a coupé les générateurs. Elle a ensuite dû tuer le gardien, désactiver le droïde et libérer l’acolyte, pour se tenir prêts à l’arrivée de l’équipe d’extraction. Gagnant un temps précieux.
— C’est…

Un champignon magique ?

— … rocambolesque, admit la directrice, mais j’ai déjà vu des choses plus étranges de la part des Siths.
— Cela dit, ça ne nous avance pas beaucoup.
— Vous plaisantez ? Identifier les failles de sécurité, c’est un sacré coup de main. Ne faites pas le modeste. Allons voir les trois gardiens survivants. Ils se sont soumis bien volontiers à l’interrogatoire et pour l’instant, je ne suspecte rien. Enfin, je les soupçonne tous collectivement, bien entendu, parce que c’est la procédure, mais il n’y a rien de très saillant.

Elle avait rouvert la voie et les deux Jedis lui emboitaient le pas. Karm était fasciné par la méthode d’évasion de la botaniste Sith. Les champignons étaient assurément des organismes simples, et en cela plus faciles que d’autres à manipuler à travers la Force, mais si la méthode ne trahissait pas une puissance pure, elle relevait assurément d’une profonde ingéniosité, d’une patience à toute épreuve et d’une grande connaissance du vivant. Quand il avait dû s’évader de prison hutt pour sa part, l’année précédente, il avait simplement recouru au combat.

— Les gardiens, j’te les laisse, souffla-t-il à Luke alors que la directrice les précédait de quelques pas, les interrogatoires c’est plus ton truc. Je jetterai un œil aux deux droïdes, même si la technologie locale est de fait un peu… exotique. Mais on a l’habitude de ça, par chez nous, l’exotique.

Certains vaisseaux ark-ni étaient après tout des antiquités qui continuaient à voler par on ne savait trop quel miracle.
Luke Kayan
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Antara avait fait preuve d'une imagination sans borne, mais pas suffisamment pour Karm. En cet instant, le blond se sentit particulièrement fier de ce dernier, il lui envoya une onde de Force chaleureuse pour le lui faire savoir. Luke n'était pas du genre à complimenter sans cesse, toutefois il avait envie de souligner l'exploit de son ami qui manquait toujours de confiance en lui. Le Hapien hocha la tête dans le vide, vieux réflexe de voyant, mais aussi de Jedi. Il fallait discret en toutes circonstances, y compris face à la directrice. Dévoiler certaines cartes, pas toutes, exactement ce que Vajda devait penser.

Laissant son compagnon s'occuper des droïdes, Luke se laissa guider vers les gardiens. Le premier ne donna rien, ni le second, mais le suivant paraissait un peu trop rétif à se faire interroger. Luke avait saisi son dossier, irréprochable évidemment, sans quoi l'excellente Kolski ne l'aurait pas engagé ou conservé. L'humain, un vieux de la vieille, le cheveu rare mais la verve vive répondait sans vergogne à ce jeune premier qui se permettait de l'interroger. Encore 15 ans à tirer pensait Georges Turner, gardien depuis 25 autres années. Même risques, même gamelle, même barreaux pourris et surtout même salaire. Pas spécialement exemplaire, l'homme se maintenait à la frontière du correct, s'échappant dès que possible pour prendre un café sans pour autant déroger à ses horaires ou si peu.

L'homme se balançait sur sa chaise, l'air ennuyé, il semblait aussi musclé qu'un ancien sportif, possédant un bel héritage, même si cela ne restait qu'un vestige du passé. Des bras tendus aux extrêmes, gonflés par des années de sport, et le ventre rempli de bière corrélienne. Luke entendit son interlocuteur se gratter une barbe de deux ou trois jours.
- Bonjour
- 'Jour, ils nous ont déjà envoyé la République pour interroger, pourquoi vous passez derrière? J'leur ai tout dit.
- Oui en ce qui concernait les évadés. Mais aujourd'hui, c'est vous qui m'intéressez.
- Croyez qu'j'suis coupable? Petit impertinent, 30 ans de bons et loyaux services!

La chaise retomba en un claquement sec sur ses 4 appuis.

- Je n'ai jamais dit ça. Vous sentiriez-vous mal à l'aise?
- Bah nan, j'me sens bien avec ma conscience mais pourquooi tu m'parlerais sinan? Tu veux mon numéro, minette?
- Vous parlez à un représentant de l'Ordre Jedi, veuillez modérer vos propos.
- Bah quoi? J'ai rien dit. Tu te sens mal à l'aise? [...]
Avec la misère qu'on gagne, faut en plus qu'on subisse les questions d'un morveux qui sait pas s'il est mâle ou femelle. Tu t'plairais bien ici le jeune, les prisonniers aiment les belles blondes.

Exactement ce dont Luke parlait encore la veille avec Karm. Par chance ce dernier n'était pas là et ne devait pas subir avec politesse, tous ces jolis compliments.

- Qu'est-ce que vous pensiez de celle que l'on dénomme Antara?

- Une p'tite délinquante qui s'prenait pour une jeunette. Type scientifique folle avec un grain de séduction. Elle s'croyait belle. Moi j'faisais mon boulot, pas la causette avec. J'la connais pas. Elle se portait bien, on a jamais du la réduire.

Réponse typique. Mais le Hapien ne s'intéressait guère aux paroles de l'individu, sinon à ce que ses pensées les plus profondes lui révéleraient. Sa cécité était une excuse parfaite pour rester là, à fixer les gens sans passer pour un illuminé ou un lubrique. En réalité, le blond captait l'essence de Georges, fouillant dans ses cellules. Contrairement à ce que bon nombre de civils croyaient, il ne pouvait évidemment pas lire dans ses pensées, sinon ce serait bien simple de capturer les criminels. En revanche, il recevait en vrac tout un amalgame d'émotions dont ressortaient la frustration et l'admiration mêlés. Luke imagina que le premier allait pour son travail à la prison voir plus personnellement sa directrice, et que le second se dirigeait à l'endroit d'Antara. Pour aiguiller davantage ses premières perceptions, le jeune Jedi posa quelques questions à Turner sur l’acolyte Sith. Il ne perçut qu'un violent mépris, peut-être un peu trop profond cela dit, pour un simple gardien à l'encontre d'un hors-la-loi. Un rival dans sa fantaisie avec Antara?

Luke laissa passer le tour de Georges, interrogea quelques autres gardiens mais en se concentrant cette fois sur leurs relations entre collègues. Comme il le supposait, les amitiés étaient rares voir inexistantes, même si normalement tous se respectaient. En général cependant, quelques critiques discrètes, presque imperceptibles fusaient à l'encontre de Georges, l'Ancien, disait-ils en riant. Celui qui en faisait le moins possible, le roi de la débrouille pour flemmarder. Luke ne voyait pas les yeux qui se dérobaient, les mimiques de culpabilité qui envahissaient ceux sensés faire front, se soutenir entre gardiens, mais il sentait leurs auras.

Après un dur labeur d'interrogatoires, le jeune homme retrouva Karm pour échanger des impressions. Par chance Vajda Kolski n'était pas de la partie. Luke l'appréciait mais il préférait critiquer ses gardiens en son absence, afin d'observer la scène avec le plus d’objectivité possible.

- Paul Ñinez, rien à dire, encore jeune et mal assuré. Il aurait pu être influencé ou manipulé par la peur mais beaucoup trop flou pour envisager ne serait-ce qu'un suspicion. Antonieta Ka'a, Twi''Lek ravie de son travail, ancienne esclave. Elle donnerait sa vie pour Vajda Kolski qui lui a donné cette opportunité. Orak Jeanski, un peu râleur mais pas agressif. Par contre Georges Turner, humain de 47 ans me semblait bien vindicatif, plainte à propos du salaire, du traitement imposé aux gardiens, de la dureté de l'emploi avec un soupçon, il me semble, d'admiration pour cette chère Antara. Ils n'ont pas eu beaucoup d'échanges selon son emploi du temps, il venait seulement prendre la relève à l'occasion. Cela dit, j'ai pris la liberté d'en discuter puis de faire vérifier sur les caméras de surveillance, on n'a eu que quelques extraits puisque toutes les bandes ne sont pas encore disponibles... Il a plusieurs fois rôdé autour du secteur d'Antara et de l'Acolyte. Aucun de ses collègues ne le croit capable de trahir la Tombe, surtout que c'est un peureux derrière ses airs de gros durs, leur théorie est qu'en bon froussard, l'expectative d'adrénaline sans danger l'attirait, les pires criminels le fascinaient. Seulement Antara était réputé exemplaire, pas de quoi régaler son voyeurisme. Il s'est en plus souvent arrêté à sa cellule. Ils ont un peu échangé, fait plutôt normal quand on sait qu'elle aimait faire la conversation aux gardes, seulement il était un des rares à lui répondre. Or je sais que ce n'est pas le type d'intellectuel à apprécier parler de sciences. Que pouvaient-ils bien se raconter? C'est ce qu'il me reste à découvrir.

Le jeune Jedi se tut et tira un chaise pour Karm, l'invitant à s’asseoir dans cette salle de repos, moderne, propre mais sobre. Il choisit pour sa part, un tabouret assez haut, jetant une mine légèrement déconfite vers l'origine d'un bruit de machine à café. Là maintenant, il n'aurait pas dit non à un petit breuvage pour occuper ses mains et assouplir ses cordes vocales après avoir tant parlé, parfois haussé le ton -ne déclenchant bien souvent qu'un regard moqueur.-, seulement ces objets restaient hors de sa portée. La pièce de monnaie à introduire, la tasse à bien situer dessous, le chemin à parcourir. Mieux valait éviter la catastrophe et de toutes façons, ils avaient du boulot, beaucoup de boulot.

- Turner pourrait aussi être un bon bouc émissaire. Le gardien ronchon typique, entre deux âges, fatigué de ne pas travailler, ayant épuisé toutes ses méthodes pour flemmarder. Il fait un coupable idéal, et ses collègues l'ont tous plus ou moins incriminés, directement ou pas. Donc il faut faire attention à ce qu'il ne soit pas le coupable idéal. Pfft un vrai sac de noeud. Des fois, j'aimerais être plus doué au sabre-laser ou en technologie, juste pour ne pas avoir à traiter avec des vivants. Mais ces droïdes ont l'air coriaces aussi. Tu as pu en tirer quelque chose ?

Il leva les yeux vers la fenêtre, captant un imperceptible courant d'air, artificiel ou naturel, peut-être.
Karm Torr
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— C’est magnifique !
— C’est déprimant, soupira le jeune ingénieur de la Tombe, de l’autre côté du droïde désossé face auquel s’extasiait Karm. Non mais sérieusement, regarde moi ce foutoir, rajouta-t-il en agitant une poignée de câbles manifestement retenus entre eux par une bande adhésive.
— Ouais, c’est vraiment émouvant.

B.A. Spog était tout juste sorti de l’une des meilleures écoles d’ingénieurs de Coruscant, l’un de ces établissements à dix milles crédits l’année, qui formait l’élite scientifique de la République. Et, assurément, être affecté à la sortie de son premier stage dans un établissement pénitentiaire d’exception constituait un début prometteur. Deux ou trois ans à la Tombe, à bricoler la technologie rakata, et il finirait à n’en pas douter sur un destroyer de premier plan, peut-être même au ministère.

S’il survivait, toutefois, à sa présente affectation sans faire de dépression nerveuse. Les droïdes rakata, bricolés génération après génération, modifiés au gré d’interventions plus ou moins fantasques, sur la foi d’une compréhension souvent fort approximative de leur fonctionnement interne, avaient finalement échoué entre les mains de la République dans un état qui était aux règles fondamentales de la saine robotique ce que les peintures de l’avant-garde contemporaine calamari étaient à l’art classique.

— Regarde, ça, là, c’est probablement un découpleur d’alternatif, et peut-être que si on branche ça comme ça ici et ensuite…
— Probablement ? Peut-être ?
— Ouais, faut y aller un peu au feeling, la robotique, c’est pas une science, c’est comme… C’est comme une musique qu’on improvise !

Spog fixa Karm avec des yeux ronds. Et des yeux, ils en avaient trois.

— Mais mais mais…
— Et c’est parti !

Le droïde fut pris de violentes convulsions, ce qui ne déstabilisa pas l’Ark-Ni, qui grimpa sur la table pour le chevaucher. S’ensuivit un improbable rodéo entre le Jedi et la machine, alors que Karm soudait on ne savait trop quoi on ne savait trop comment, sous le regard effaré de l’ancien étudiant, qui venait de faire la découverte de l’ingénierie ark-ni, cet art-science bien au-delà des limites du raisonnable, qui avait conduit Karm, lors de sa première rencontre avec Luke, a fabriqué un vaisseau hyperspatial avec une porte de hangar et une navette orbitale.

— Et voilà, claironna Karm positivement extatique et couvert d’huile de moteur.

Un bon moment plus tard, dans la salle de repos, avec Luke, il était donc d’excellente humeur.

— C’était, genre, mais méga trop cool !

Au moins ça.

L’aura de l’Ark-Ni rayonnait tellement à travers la pièce qu’on aurait pu jurer qu’il venait de passer une heure à papouiller le chaton le plus mignon de la Galaxie. Il quitta sa chaise pour se diriger vers la machine à café, sans vraiment réfléchir, parce qu’il avait perçu intuitivement, dans ce monde que Luke et lui partageaient en permanence, à l’insu de la plupart, quelque chose des désirs de son compagnon.

— Sérieux, ces robots, c’est trop génial. On dirait les pires épaves de la flotte ark-ni, de vraies œuvres d’art. ‘Fin bref. Y en a un qui a été clairement modifié, avec un programme externe, pour percevoir en passif des signaux et les répercuter aux antennes relais, ensuite direction l’espace.

Ce n’était pas exactement très clair.

— Euh, attends.

Une fois le café obtenu, Karm vint le placer dans la main de Luke, laissant ses doigts effleurer ceux de l’Hapien une fraction de seconde de plus, avant de se rasseoir dans son fauteuil.

— Oui, donc. Il sont un peu transformé le robot en micro-relais. Quelque chose de très simple, presque primitif, pour passer en-dessous des détections standards. Il était capable de transmettre des données vraiment minimales, des séquences sonores très limitées. À mon avis, quelque chose comme un code binaire frappé, un genre de morse, qui a permis aux deux Siths de communiquer avec l’extérieur, pour leur dire quand agir. Quand les spores mycologiques seraient prêts, notamment. Faut nécessairement que quelqu’un ait chargé le programme sur le droïde. Ça demande pas une technique particulière, juste l’opportunité d’accéder au robot pendant la maintenance. Ton gardien suspect, là, il aurait pu s’en charger.

Les yeux fixés sur Luke, Karm était tout aussi admiratif qu’il était enthousiaste. Jamais il n’aurait été capable d’extraire la moindre information des gardiens, même les plus coopératifs, et Luke avait navigué dans leurs secrets et leurs relations difficiles avec une aisance irréprochable. Cet homme-là était décidément parfait.

— Tu penses qu’Antara, elle aurait pu, tu sais, contrôler son esprit ? Les Siths sont capables de ça. Elle aurait pas eu besoin de grand-chose. Juste qu’il récupère un datapad, qu’il le branche au droïde. Je me rends pas bien compte, j’avoue, les pouvoirs des siths, c’est pas exactement mon domaine de prédilection. Mais j’ai entendu des tas d’histoire à ce sujet.
Luke Kayan
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L'humeur assombrie de Luke s'illumina petit à petit. Il avait été positivement surpris de sentir l'aura chaleureuse qui émanait d'un Karm, hier, au bord de la fin puis de la dépression. Un sourire se posa sur ses lèvres tandis que ses doigts étonnés de ressentir un chaleur plus terrienne s'étaient entrouverts, s'apprêtant à s'échapper, fieffés habitués aux brûlures en tout genre, agiles proies, avant de se refermer sur le plastique. Ah, un petit rêve tout simple qui allait s'accomplir, comme n'importe qui, Luke allait pouvoir goûter à un café de la machine. Il remercia son compagnon en laissant la pulpe de ses doigts s'attarder sur ceux, salvateurs, venus au secours de sa soif, puis goûta le met. Une petite grimace s'afficha sur ses traits fins. L'expectative d'essayer un café dans une de ces inaccessibles machines avait été meilleur que le breuvage en soi, amer. Le jeune homme ne put s'empêcher de rire un peu, étonnant le peu de gardiens aux alentours. Ici, personne n'avait l'habitude d'afficher sa bonne humeur, contrairement aux deux Jedis qui semblaient en vacances. Luke perçut une vague d'agacement mâtiné d'un léger attendrissement de la part d'une femme de la quarantaine, bien que paradoxalement, lui, ignorait que s'en était une, à défaut de capter le brouillon de ses pensées profondes.

- Donc quelqu'un a forcément manipulé le droïd, mais de loin était-ce possible? Ou lors de contacts restreints, comme, quelqu'un depuis sa cellule par exemple, ou y-a-t-il forcément eu une interaction extérieure? - Première question, totalement en accord avec le contexte de la mission.- Comment as-tu découvert tout ça? La technologie Rakata doit être très différente, un peu comme une autre langue j'imagine? Comment est-ce que tu expliques ce rapprochement avec la technologie Ark-Ni? -S'intéressa ensuite Luke, peinant un peu à imaginer l'art de la technologie mais désireux de s'ouvrir à ce qui passionnait Karm. De fait, lui qui n'aimait pas trop la robotique se surprenait à lui être reconnaissante de permettre ainsi à son ami de prendre confiance en lui et de s'exprimer. L'idée de demander à Karm si son ancien sabre-laser lui convenait avait parfois traversé l'esprit du Hapien car il savait ce dernier basique, solide mais sans fioriture, vraiment le minimum de soudures et de câblages. Pour sa part, peu adepte de l'arme mystique des Jedis, il n'avait pas encore allumé celui du Chevalier Turquoise. Sa seule consolation était que le fait qu'il provienne de ce dernier lui donnait un peu plus confiance. Sans doute serait-il un peu meilleur, sauvegardé par la lumière du Jedi gardien. - Et ce droïd modifié, il aurait pu l'être pour une raison autre que pour programmer une évasion? Par le service de la prison je veux dire. Si non, il faudrait le conserver, c'est une preuve circonstancielle de choix. Quant aux autres, je suppose que nous devrions préconiser l'élaboration d'un programme beaucoup plus solide, afin de protéger cette technologie de toute corruption. Tu pourrais le créer?


C'était quand même décevant de la part de la Tombe que les droïds soient -difficilement ou pas- corruptibles. Maintenant ils allaient devoir s'attendre à des représailles.

- Ils le peuvent, et nous aussi, en théorie, mais l'esprit doit être faible pour être sûr que cela marche. Du moins pour l'influencer, pour le contrôle c'est encore plus complexe. Ce serait donc possible, mais si c'est bien de Turner que l'on parle, le plus probant aurait été de le séduire, tout simplement. Une aptitude féminine qui passe outre l'utilisation de la Force.- Et il en savait quelque chose, entre Jenny qui avait joué les sex appeal avec lui, drogué jusqu'aux yeux, au point de voir des tâches de couleurs, ou encore l'autre Sith qui lui parlait, cette fois sans résultat, d'une voix suave en envoyant ses phéromones de Zeltronne.- et qui se transmet de génération en génération. Cela semble correspondre au profil type de la maison Noctis, et c'est beaucoup moins gourmand en énergie.

Plutôt marginale parmi ses pairs, Antara avait apparemment été ouverte et agréable, il devait y avoir une raison en plus de l'ennui en attendant que son fameux champignon pousse.

- Cela dit, là où je bloque, c'est que toute manipulation un minimum complexe ne siérait pas à Georges Turner. C'est le genre cas désespéré, QI limité et je ne le dis pas seulement parce qu'il m'attire peu de sympathie. Outre le jugement personnel, je ne le pense pas capable de suivre des instructions un peu complexes, surtout en technologie.

Luke n'avait évidemment pas pu étudier la question en profondeur, sans compter que beaucoup d'être intelligents retors savaient jouer les diminués de la cervelle afin de ne lever aucun soupçon. Toutefois, lorsque le Hapien avait fouillé dans cet esprit simple, il n'avait pas décelé une grande activité, et plus inquiétant encore, une préoccupation importante. Et si Turner n'était vraiment qu'un bouc émissaire? Les humains étaient parfois plus compliqués que des câbles à haut voltage. Une simple querelle qui s'allongeait pouvait mener des collègues à haïr l'un d'eux, le fainéant, et finir par le lui faire payer en lui mettant une évasion sur le dos. Opportuniste, la majeure partie des races de l'Univers ne réfléchissaient pas plus loin que l'argent gagné avec en prime, l'occasion de se débarrasser de la seule épine dans le pied au sein de cette vie parfaite.

- Je vais aller visiter les comptes bancaires des gardiens à la recherche d'un gain digne du loto ou de dépenses extraordinaires. Certains sont bien malins et ne laissent filtrer aucune trace du payement, en revanche ils ne pensant -presque-jamais à cacher les folies qu'ils se permettent.

Récompensant leur cerveau d'une bonne dose d'endorphines via des achats compulsifs, cherchant aussi souvent à minimiser leur geste, les filous ponctuels, les hors-la-loi peu habitués à la fraude étaient les plus faciles à attraper. Parfois, il s'agissait de fonctionnaires qu'on avait parvenu à convaincre qu'ils méritaient un plus, surtout avec la retraite misérable à laquelle ils auraient le droit.

- L'Amour, l'argent et la mésentente. Trois motifs de meurtre ou de fraudes graves. Dans cet ordre.

Énuméra le blond qui évaluait déjà la possibilité raisonnable qu'Antara soit encore en contact avec sa victime. Peu importait à la Sith de laisser son contact exsangue, puis que ce dernier parle ensuite, évidemment. C'était déjà une criminelle recherchée, alors charger davantage son curriculum ou envoyer son cher gardien dans la même prison mais de l'autre côté -sans salaire cette fois, pas même restreint.- il se pouvait donc qu'elle s'aide encore dudit Gardien en exerçant son charme sur lui, promettant une vie meilleure et en couple à ce dernier après que tout soit retombé. L'Amour, un filtre bien plus puissant que la persuasion via la Force et surtout inépuisable.

- J'aurais une autre mission technologique pour toi. Je me charge des permis. Le gouvernement sera évidemment frileux mais je les convaincrai, le virus aidera. Il suffit de bien leur faire peur. J'aimerais mettre sur écoute les moyens de contacts éventuels de Turner, voir des trois autres si c'est possible. Crois-tu que tu pourrais organiser ça? Aurais-tu le matériel disponible? Si Antara tient le suspect par l'Amour, je ne pense pas qu'on trouve de transaction financière. Par contre il pourrait chercher à la contacter, nerveux, car tout ne se passe évidemment pas comme prévu. Je suppose que cette personne voulait ou devait fuir en même temps que sa chère et tendre, pourtant il est toujours bloqué là, sous nos yeux. Donc il souhaitera se rassurer, demander des comptes, bref. Si c'est pour l'argent, Antara pourrait lui commanditer une prochaine mission, user son pion jusqu'à la lie, y compris pour trouver un appartement. Elle est recherchée partout, son acolyte aussi. Ils ne sont donc pas tout à fait libre, et si Noctis n'est pas ici, il a moins de manières de les aider. En plus, je le vois plutôt laisser ses si habiles sous-fifres se débrouiller afin de ne pas laisser de traces.


Supposa Luke qui réfléchissait tout en buvant une gorgée de son café, la chaleur apaisait sa gorge enflammée d'avoir tant parlé, sans compter les ordres presque criés dans le feu de l'action la veille.
Karm Torr
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— Ça en fait des questions, observa tranquillement l’Ark-Ni, dont l’enthousiasme n’entamait pas tout fait le flegme naturel, alors que Luke en revenant à son café.

— Alors, euh… Aucune idée de comment on met des gens sur écoute, désolé. C’est pas tellement dans mes missions habituelles et mon truc à moi, c’est surtout l’astromécanique et les robots. ‘Fin, OK, la mécanique en général, mais c’est quand même vachement éloigné de la surveillance des télécommunications.

Karm soupçonnait Luke d’être de ces personnes qui pensaient qu’un « informaticien » pouvait tout à faire, de la réparation des holoprojecteurs en passant par la cryptographie sub-spatiale. C’était tout à fait attendrissant. Certes, de bonne humeur comme il l’était, Karm aurait trouvé n’importe quelle attitude de Luke attendrissante. Ou sexy. Ou les deux. D’ailleurs, il se voyait bien le plaquer, là, contre le casier de la salle de repos…

— Hmm, soupira l’Ark-Ni rêveur. On disait quoi ? Ah, ouais. J’pense que les flics locaux doivent avoir tout ce qu’il faut dans le domaine, et, franchement, la perspective de voir leur planète envahie par les repris de justice qui s’échapperaient d’une hypothétique passoire, ça devrait pas les rendre très difficiles, niveau autorisation. De toute façon, j’suppose que l’Ordre finira par envoyer une Ombre ici.

Il était même prêt à parier que la relève était déjà en route. Les relations de l’Ark-Ni avec ces Sentinelles spécialisées, qui avaient passé diix jours à l’interroger, en s’invitant dans les moindres recoins de sa conscience, n’étaient pas excellentes mais, d’un naturel après tout peu rancunier, il n’attendait pas avec moins d’impatience qu’un véritable professionnel vienne prendre les choses en main.

— Pour le robot, faudrait quand même que le mec, il ait su où regarder, quoi. Parce que bon, c’est une chose de savoir qu’il faut brancher son datapad sur le hub de processeurs principaux et laisser faire la machine, c’en est une autre de localiser le hub en question, et encore une autre quand le hub ressemble à tout sauf à ce qu’on peut s’attendre à trouver dans un droïde normal. J’dis pas nécessairement qu’il faut être un génie de la mécanique, hein…

(Comme lui ?)

— … mais quelques solides notions, c’est pas du luxe. Et ça c’est certainement pas fait à distance. Faut faire des petits branchements particuliers, tu peux pas hacker ça hors site. P’t’être tu devrais voir l’ingénieur en chef. ‘Fin, l’ingénieur unique, en l’occurrence, c’t’un gamin sorti des écoles, il m’a eu l’air un peu dépassé par la situation, mais peut-être qu’il cache bien son jeu et qu’il est de mèches. Ou peut-être que…

Karm essaya d’imaginer comment un Sith aurait pu avoir accès au robot depuis l’extérieur de la prison mais, comme il n’avait pas l’esprit retors ni l’habitude de ce genre d’enquêtes, il resta un peu court.

— En tout cas, il m’a eu l’air un peu largué mais il est probablement habitué à des trucs conventionnels. Là, c’est pas tant que ça rassemble dans le détail à de la techno ark-ni mais disons que c’est un peu, j’sais pas, le même esprit, tu sais ? Le bricolage créatif plutôt que les protocoles et les schémas d’assemblage. C’t’assez difficile. Disons que ça a été fait au feeling, petit à petit, avec le temps. Et ça me parle.

Du créatif et du feeling, c’était aussi un peu la manière dont Karm vivait sa relation avec Luke et dont il s’accommodait de la plupart des protocoles. Sa perception de la technologie reflétait sa philosophie de vie.

— ‘Fin bref. J’pense pas pouvoir créer une protection, j’suis pas vraiment programmeur, mais là comme ça, j’dirais pas que ce sera vachement compliqué. La République trouvera un informaticien, et maintenant qu’ils savent où faut regarder et le genre de faiblesses, ça devrait aller tout seul. En fait…
— Ah, vous voilà.

La porte de la salle de repos s’ouvrit sur la directrice de la prison, accompagnée d’un Trandoshan en bure de Jedi. La mine peu avenante, l’aura de Force à peine perceptible et le regard inquisiteur trahissaient l’Ombre bien entrainée.

— Apparemment, vos chefs vous ont envoyé des renforts.

Kolski, qui n’était pas au fait des rouages de la politique interne du Temple, ignorait s’il s’agissait pour les deux Chevaliers, qu’elle avait trouvés après tout fort sympathiques et surtout des plus professionnels, d’une bonne ou d’une mauvaise nouvelle, mais Karm se fendit d’un sourire rassurant.

— Maître Ekkt.
— Chevalier Karm. Chevalier Kayan. Il semblerait que vous ayez été au bon endroit au bon moment.
— En l’occurrence, on a pas empêché grand-chose.
— Ce que la Force veut advient toujours, répliqua le Trandoshan d’un ton égal, Votre présence a permis d’appréhender l’un des mercenaires, d’établir une partie de la méthode d’évasion et sans doute de récolter des indices supplémentaires. Quand on considère que vous avez été victime vous-même de la maladie, c’est très certainement un exploit de la part de votre partenaire. Chevalier Kayan, je suis admiratif. Maître Don a une haute opinion de vous et vous la méritez de toute évidence.

Karm, qui connaissait peu le Maître Ekkt, en le voyant débarquer avec sa mine renfrognée, s’était attendu à l’un de ces Sentinelles sévères et renfermés, comme il y en avait beaucoup, surtout parmi les chasseurs de Siths. En réalité, le Trandoshan était fort affable et jamais avare de compliments, parce qu’il considérait que les jeunes Jedis s’épanouissaient d’autant mieux qu’ils étaient plus soutenus.

— Et du reste, ceux qui se posent des questions sur votre tandem feraient bien de consulter vos états de service récents, qui témoignent de votre efficacité.

Est-ce qu'il venait bien de leur parler de leur couple ? Karm, toujours un grand adepte de la poker face, ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes mais l’expression du reptilien demeura absolument indéchiffrable. D’ailleurs, il enchaîna aussitôt :

— La directrice m'a dit que vous avez respectivement poursuivi l’enquête avec les gardiens et les droïdes. Dites moi ce que vous avez appris et ensuite, nous prendrons les mesures appropriées. Vous m’appuierez ici le temps qu’il sera nécessaire pour explorer toutes les pistes et s’ils s’avèrent qu’il faille poursuivre au-delà de cette planète et que l’enquête devait s’éterniser, des Ombres reprendront le flambeau, pour que vous ne soyez pas éloignés trop longtemps de vos domaines de spécialité. Nous vous écoutons.

Karm commença en premier son exposé.
Luke Kayan
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- Désolé, j'ai mis les pieds en plein dans les stéréotypes. Humpf.

Effectivement, Luke habituellement intuitif, avait tendance à croire qu'un manipulateur de robots était un manipulateur de toutes sortes de résistances, cartes mères et câbles. Il rougit un peu lorsque son compagnon commenta son nombre de questions. Sous son flegme apparent, le Hapien exprimait son implication couplé à son désir de résoudre l’énigme. Prenant également conscience du raccourci simpliste qu'il avait prit, le jeune homme resta silencieux un moment après ses excuses, aussi sobres que sincères.-Finalement c'était comme si un imbécile heureux avait jugé que ses propres compétences de Diplomate ou de Consulaire en faisaient un parfait candidat pour négocier avec les criminels lors de prises d'otages. Ridicule. Il avait été ridicule.- avant de hocher la tète. Passer par la police semblait être une bonne alternative bien que Luke aimait en général fonctionner en interne. Il n'appréciait guère les compétences justicières externes à l'Ordre, probablement échaudé par des membres grossiers tels que Korgan Kessel. De ce point de vue, le blond pouvait se montrer un poil élitiste, jugeant que l'Ordre recrutait plus finement et que les risques de tomber sur des têtes dures s'en retrouvait diminué. Il était aussi peu friand de toute paperasserie à faire, les suppliques pour avoir du matériel. Heureusement et malheureusement à la fois, la situation, aujourd'hui, faciliterait le processus.

En parlant d'aide externe, Vajda Kolski les retrouva et leur coupa la parole pour leur présenter un nouvel arrivant. Luke reconnut que la créature maniait la Force bien que son aura soit en grande partie occultée. À vrai dire, il ignorait si Maître Ekkt était un de ces Jedis possédant le nombre minimal de midichloriens et spécialisé dans le maniement du sabre-laser ou un habile spécialiste de la discrétion. Après l'énonciation de son curriculum, bref mais évocateur, il opta pour le second choix et les mots du reptile lui prouvèrent qu'il avait raison. Les Ombres étaient donc déjà là, et pas seules. Fait surprenant, un de ces êtres réputés froids, à la frontière de l'obscur les abreuva de compliments. Luke, plus sensible à ce type de mots lorsqu'ils venaient d'un Jedi rougit délicatement bien qu'il ne tarda pas à se récupérer.

- Bonjour Maître Ekkt. - Il sortit sa carte d'un petit compartiment par réflexe, invitant implicitement l'Ombre à faire de même bien qu'il s'en sentit honteux de suite après. Cela dit, l'autre avait beau être un aîné, le protocole exigeait ce genre de vérification. Un vieux protocole plein de poussières, enfoui sous des tas de papiers que personne ne respectait. Certes.- Hum. Enchanté.

- Je n'ai fait que suivre la piste donné epar le Chevalier Torr, Karm.

Admit-il, sachant que l'appeler "chevalier" était ridicule. Deux collègues travaillant en tandem depuis longtemps s'appelaient par leur prénom, en plus, il avait promis de faire des efforts pour ne plus autant cacher ses sentiments. Une chose de toutes manières inutiles vu les dernières paroles du Trandoshan. Un peu dans la même optique que Karm, le Hapien offrit à leur visiteur une tête de bantha apeuré par des phares de speeder- un très gros speeder.- qui voulait à peu près tout dire, à une ombre davantage encore.

- Merci.

Il ne savait pas vraiment quoi ajouter de plus, sinon que la fierté envahissait son cœur-et un peu d'inquiétude encore, à cause de la référence à leur tandem, juste à côté de Saï.-. Rares étaient ceux qui pouvaient le faire battre ainsi la chamade, à part son maître et Karm, presque personne. Luke n'était pas un être froid, mais il restait sélectif, presque élitiste, choisissant avec grande prudence ceux qui devaient influencer son jugement, le faire changer, lui apprendre.

Cela dit, tout inconnu qu'il soit, le reptile leur fit un grand honneur, et Luke en eut conscience. Il était fatigué à cause des événements d'hier, seulement avoir l'occasion de suivre le travail d'une Ombre qui leur faisait confiance était une chance à ne pas laisser échapper. Karm et lui pourraient étendre leur apprentissage dans une branche avec laquelle ils n'étaient pas accoutumés. Sachant que le Maître ne semblait pas avoir de souci avec la présence de Kolski, Luke ne se rebiffa pas, et il résuma également ses découvertes face à la directrice, laquelle lui inspirait aussi un certain degré de confiance. Il expliqua donc où il en était de ses recherches, impliquant Georges Turner mais aussi ses autres collègues qui auraient pu se servir de ce vieux bougon.

- Karm émettait l'idée que... Humpf - Un peu gêné d'implique ainsi un autre membre de l'équipe de Vajda, le Hapien douta puis finit par partager.- l'ingénieur pourrait cacher son nom et avoir reprogrammé le droïde en cause, celui que Karm a identifié donc, comme modifié. Je pensais aller fouiner dans les comptes bancaires des suspects afin de vérifier les derniers virements, mais aussi d'étendre les interrogatoires. Je soupçonne toujours un gardien, cela dit, il faudrait avoir des connaissances assez basiques mais précises sur comment procéder pour manipuler le droïde. Du coup mon suspect n'entre pas dans la catégorie, à moins que je ne le sous-estime vraiment.

- Faites donc.

En grande professionnelle Kolski avala l'accusation, faisant passer le tout avec un peu de sa fierté avant d'accepter les faits. Deux Siths s'étaient évadés de sa prison, peut-être même avaient-ils quittés le territoire, de fait personne n'en savait rien, ce qui était d'autant plus inquiétant. Elle ne pouvait pas se vanter de ses états de services quoiqu'ils furent excellents et devait baisser la tête, accepter ses erreurs. Élevée dans l'honneur, encadrée par des valeurs strictes, l'humaine était incroyablement modeste. Luke était, malgré le contexte, heureux de compter sur cette équipe. Après Soeur Assayanah, Noctis semblait leur offrir de nouvelles belles rencontres sur un plateau, même s'il ne fallait pas hurler de joie. Pas encore. Les apparences étaient parfois trompeuses comme l'illustrait bien le si sympathique Trandoshan au physique beaucoup moins avenant. Bien sûr, le Hapien n'avait aucune idée de ce fait, seulement rassuré de minute en minute sur son identité.

- Nous pensons que derrière cette évasion, se cache un Sith dénommé Noctis mais rien ne le relie aux deux évadés, ni au virus, si ce n'est que ce dernier ne s'activait pas chez les Hapiens, une race, au passage, pas franchement réputée pour sa résistance biologique. Et que Noctis en est un. De Hapien je veux dire. Ce sont donc des preuves circonstancielles, rien de suffisamment concret pour inquiéter le maître obscur sur son trône. Mais en partant d'Antara et de son acolyte, surtout d'Antara qui semble avoir plus d'incidence dans cette échappée, nous espérions remonter le filon, qu'il mène à Noctis ou à un autre. Si nous trouvions le chaînon le plus faible, c'est à dire celui qui a reprogrammé le droïde, il y aurait éventuellement moyen de le faire parler. Cela reste mince, mais... Avec vos connaissances...

Le jeune Jedi leva les yeux vers l'individu à la voix rocailleuse, presque inquiétante, ce qui contrastait avec son ton chaleureux.

- Très bien. Chevalier Torr j'ai cru comprendre que vous étiez un spécialiste en mécanique mais aussi en exploration, donc la faune et en flore étrangère ne devrait pas vous être inconnues, n'est-ce pas? Pourriez-vous tirer autre chose de ces champignons? S'ils croissent naturellement et facilement dans une prison où si elle a du faire venir des germes d'ailleurs... Par exemple une boutique ou une forêt sur la planète. Cela reste léger mais ce serait un début. Ont-ils utilisé d'autres outils pour s'échapper?

- Je vous fournirai tout ce dont vous avez besoin.

- Merci Madame Kolski. S'il vous plaît ne vous inquiétez pas plus, en ce qui vous concerne vous avez agi correctement, en adéquation avec le protocole. Personne ne pouvait prévoir cette évasion et l'arrêter, j'en doute. Si vous le pouvez, apportez-nous un plan de la partie républicaine de la prison mais aussi de l'autre. À voir si le ou les conspirateurs n'auraient pas caché du matériel ou quoique ce soit là-bas.

Pendant que Luke exposait un vague idée, le Trandoshan réfléchissait à d'autres alternatives. Malheureusement le champignon était sûrement commun mais il fallait essayer. Si la plante n'était pas directement issu des murs de la prison sommes toutes bien entretenu dans la partie Républicaine, trouver leur origine pourrait éventuellement les mener quelque part. Ce n'était pas comme si ce cas offrait beaucoup de pistes à explorer d'entrée de jeu. Le Trandoshan tira une chaise, sous les yeux littéralement fascinés de Vajda, il s'apprêta à raconter ce qu'il savait de Noctis.

Luke était assis calmement, les mains disposées de part et d'autre de la moitié de café qu'il lui restait. Sous son attitude flegmatique, Karm pourrait probablement sentir son inquiétude mais aussi son enthousiasme. Les Ombres n'étaient pas réputées pour suivre ces chers ordres qu'il adorait, mais c'était une occasion unique de collaborer avec un de ces Maîtres qui avait tant de connaissance et ne semblait pas les snober qui plus est.
Karm Torr
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Du travail de Maître Ekkt, Karm n’était guère familier. Les Ombres qu’il croisait le plus souvent étaient celles qui s’occupaient des anciens artefacts siths, qu’il lui arrivait régulièrement de croiser lors de ses explorations. Il suivait à cet égard un protocole immuable : une fois les lieux reconnus, l’alerte était donnée. L’Ordre envoyait des spécialistes tandis que, pour sa part, il se tenait éloigné des lieux et des objets maudits. En réalité, jamais aucune de ces ruines mystérieuses et inquiétantes n’avait eu le moindre effet sur lui mais c’était l’un de ces exploits dont il n’était pas conscient, persuadé que la prudence et la faible exposition expliquaient seules sa bonne fortune.

Ekkt, pour sa part, ne s’occupait guère d’archéologie : c’était un spécialiste reconnu des opérations clandestines, et surtout de l’analyse de celle des autres. Il était l’un de ceux que l’on appelait quand on cherchait à comprendre ce qui s’était produit, et comment, et avec l’aide de qui, après le passage de tel ou tel commando. Son champ d’expertise recouvrait cette partie indécise de la vie souterraine de la Galaxie qui concernait un peu les réseaux criminelles, un peu les forces spéciales, et beaucoup l’espionnage.

Loin du type de l’espion taciturne cependant, il était d’un naturel ouvert et avenant, et la perspicacité légendaire qui lui avait permis de s’élever au sein de l’Ordre et d’exceller dans son domaine, celui du renseignement, s’exprimait aussi à travers une curiosité sincère pour les autres. Si l’essentiel de ses activités demeurait, par nécessité, obscurs au reste de ses frères et sœurs de l’Ordre, il mettait un point d’honneur à participer activement à la formation à la fois des Novices, dans les modules consacrés à la réflexion logique et à l’esprit critique, et des jeunes Chevaliers qui choisissaient de devenir Ombres.

Garder Luke et Karm à ses côtés pour l’assister n’était que l’une des manières par lesquelles il exprimait sa conviction que l’Ordre, pour bien fonctionner, devait faire preuve de souplesse, de solidarité et de pédagogie. La relation amoureuse entre les deux Jedis ne lui avait pas échappé. Peu de choses, en vérité, lui échappaient. Il ne les en jugeait pas plus mal pour autant, bien au contraire : habitué à vivre dans un monde sans absolus moraux, il jugeait ce qui se présentait à lui moins sur la foi de principes généraux qu’à partir des caractéristiques particulières de chaque situation. Ce qu’il voyait donc surtout, c’était que les deux Chevaliers progressaient constamment : Luke aidait Karm à s’intégrer dans les logiques de l’Ordre et à se rendre plus utile en étant plus compréhensif et Karm permettait à Luke de prendre ses distances avec des protocoles pour lesquels une fidélité trop scrupuleuse pouvait s’avérer stérile.

Sa grande silhouette enfin tassée sur une chaise, il débuta son récit.

— Absalom, puisque c’était son nom à l’époque où je l’ai connu, fut l’un de nos Padawans les plus talentueux. Un esprit exceptionnel et tout à fait différent de ce que l’on pourrait attendre d’un Sith. Sans doute la raison pour laquelle il a échappé aux mailles du filet. Ça, et un Padawanat passé pour l’essentiel hors des Temples, de mission diplomatique en mission diplomatique, avec un Maître peut-être trop âgé et trop peu humain pour bien comprendre les signes avant-coureurs. Quoi qu’il en soit, Absalom n’est pas un homme colérique. Impulsif à bien des égards, mais plutôt dans le domaine de l’amour que de la violence.

Ses réflexions sont labyrinthiques et il y a souvent plusieurs raisons à chacune de ses actions. Sa principale préoccupation est le savoir, surtout d’ordre mystique, mais il n’est pas traditionnaliste : pour lui, un rituel, une habitude, n’ont de valeur que tant qu’ils permettent de progresser dans la connaissance de la Force. Dès qu’il a jugé que la voie des Jedis ne pouvait pas lui permettre d’apprendre ce qu’il cherchait, il s’en est éloigné, mais au fond, je ne suis pas sûr que pour lui, ce fût une trahison. Plutôt… Une étape supplémentaire.

Sa puissance repose en partie sur un vaste réseau diplomatique, criminel et économique. Absalom est un homme serviable qui veille à ce qu’on lui retourne les faveurs qu’il a faites. Et à cet égard, il est extrêmement patient. Dès que l’occasion de rendre service à quelqu’un se présente, il le fera, même sans avoir une idée précise de l’utilité que ce contact pourrait revêtir trois, quatre, dix ans plus tard. Il cultive la fidélité par l’admiration et la reconnaissance plutôt que la peur, et ceux qui forment son cercle personnel lui vouent une admiration qui confine parfois à l’idolâtrie.

À mon avis, il n’est pas impossible que les événements récents servent pour lui, comme souvent, plusieurs objectifs. Nous avons tendance évidemment à considérer l’évasion comme le cœur du projet mas il est tout à fait possible que le test épidémiologique ait été un objectif à part entière. Peut-être même principale. Ou alors c’est l’efficacité du vaccin et des médicaments qui l’intéressait. Et de ces fameux spores que vous avez retrouvés. Ou de la modification du robot. Probablement tout cela à la fois. Autant d’éléments qui trouveront, plus tard, pour lui, dans d’autres circonstances, des applications nouvelles.


Karm avait l’impression d’entendre la description machiavélique de l’un de ces sages Maîtres Jedis, qui prenaient toujours cinq décisions quand ils paraissaient en prendre une seule et qui voyait, dans une mission, tout à la fois l’occasion de résoudre un problème précis, de nouer des liens avec une culture étrangère, d’acquérir de nouvelles connaissances fondamentales et de former un peu plus les Jedis qui s’en chargeaient. Précisément ce qu’était en train de faire Ekkt, d’ailleurs, en menant l’enquête, en les instruisant et en permettant à Kolski de rester, pour nouer une relation significative avec elle. C’était le genre de pensée complexe que l’Ark-Ni jugeait devoir apprendre à développer lui-même.

— Bref, nous nous concentrerons pour l’heure sur l’évasion mais Luke, vous qui paraissez être un soignant prometteur, vous vous pencherez à nouveau, plus tard, dans une ou deux semaines, sur les rapports médicaux pour tenter de dresser une chronologie claire de l’épidémie et d’en cerner les tenants et les aboutissants. Quant à vous, Karm, je compte sur votre perspicacité de botaniste de l’extrême pour faire toute la lumière sur ces fameux spores. Pour l’heure, Karm, vous en traquerez l’origine, Luke, vous vous concentrerez sur ces fonds, madame la directrice, vous m’aiderez à identifier dans la Tombe des zones d’intérêt que j’irai explorer moi-même. Entendu ?
— Entendu, confirma pour sa part l’explorateur.
— Bien. Nous nous retrouvons dans cinq heures à l’hôtel pour faire le point. En attendant, restez en contact et tenez moi au courant de vos déplacements respectifs. Que la Force soit avec vous.

Et sur ces bonnes paroles, le reptilien se releva, pour emboîter le pas à Kolski. Quand la porte se fut refermée derrière lui, Karm souffla :

— La classe.
Luke Kayan
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La connaissance sans limite. Dans un sens, Luke pouvait comprendre, dans l'autre, il ne tolérait pas le manque de discipline de ce prétendu prodige. Le savoir sans l'auto-contrôle lui paraissait tout bonnement impossible. Pourtant curieux, le jeune Chevalier ne s'était jamais aventuré -ni y avait songé d'ailleurs.- à lire des ouvrages interdits lorsqu'il était Padawans, de même maintenant. Il s'éloignait prudemment de ce que le Conseil désapprouvait bien qu'il n'ait, certes, pas pu résister à l'appel de l'Amour. Fidèle et protocolaire, un peu ennuyeux sur les bords, le blond se sécurisait en suivant un chemin tout tracé par ses bons vieux protocoles, et sans doute aidé par cette espèce d'allergie au Côté Obscur qui l'affaiblissait lors de ses rares excès de colère, il en concevait une certaine crainte. L'étape supplémentaire d'Absalom était une trahison. Un peu comme celle d'un certain Kaze.

- J'ai connu un Padawan comme ça. Enfin ex. Il avait aussi quitté les Jedis pour se rendre sur Korriban et lors de mon emprisonnement à l'Académie Sith, j'ai dû me confronté à sa curiosité malsaine. Son principal moteur était l'ennui. Il cherchait constamment une source d'amusement et de connaissance, puis je l'ai retrouvé des années plus tard dans la prison d'Iziz, toujours aussi joueur, aussi imprudent. Serait-il possible de tendre un piège à Noctis? Il semble être d'un autre acabit encore que ce Kaze Toldran, mais jouer sur sa soif de connaissances pourrait être un début.

Luke approuva ensuite les propos du Trandoshan, enregistrant silencieusement ses ordres. Un soignant prometteur, il ne le savait pas, après tout c'était Karm qui avait ouvert la voie pour trouver les origines du virus, et Luke n'avait pas eu le temps de découvrir le vaccin. De fait, sans Harmonia, des centaines de citoyens auraient péri. Cependant, il ne remettrait pas en cause les ordres d'un supérieur, s'en trouvant même motivé pour se surpasser. Il étudierait chaque particule en redoublant d'attention, même si du coup le pauvre Karm ne le verrait qu'en coup de vent. Heureusement son compagnon était aussi du genre travailleur, il comprendrait parfaitement la situation. Le devoir avant tout. C'était pour cela qu'on les laissaient ensemble, Luke en était sûr, en plus d'aimer naturellement travailler.

- Je confirme. Cette voie m'a toujours intrigué sans qu'elle ne m'attire. Trop de tentations. Comment font-ils pour ne pas céder à l'appel de la vie civile qui leur tend les bras? Ou celle de voyous? Cela ne fait que confirmer qu'il n'existe guère d'excuses pour ceux qui sombrent. Souffrance et passé difficile ne sont pas des circonstances acceptables.

Avec le temps, le Hapien était devenu plus dur envers les Siths, surtout depuis que cette apprentie s'était jouée de lui, lui faisant croire à une hypothétique rédemption. La dernière, venue au Temple, oscillait encore entre l'ombre et la lumière. Elle devait être une des rares exceptions à laquelle Luke donnait une chance de retrouver la voie. Pour lui, si l'on avait un jour connu la lumière, rien n'expliquait que l'on sombre. Il se permettait d'être aussi inflexible après avoir survécu dans l'académie Sith pendant plusieurs mois à 13 ans. Tout le monde, il refusait de croire le contraire, avait un Maître Don, un proche, un souvenir auquel s'accrocher pour lutter. Était-il arrogant? Involontairement, sans doute.

Haussant les épaules après cette petite réflexion personnelle, le Jedi se leva à son tour, prêt à affronter des données et des chiffres pendant les 5 h à venir. Il laissa une onde chaleureuse traverser son corps pour s'évanouir contre la barrière naturelle formée par le corps de son ami, en douceur. Malgré la dureté de l'entreprise, c'était dans ces moments-là que Luke revivait totalement, une mission, une possibilité d'améliorer le monde, de confronter son esprit à celui, retors, d'une scientifique ou d'un traître.

- S'il y a quoique ce soit, appelle-moi.

Suggéra le jeune homme en guise d'au-revoir provisoire, non sans une certaine douceur sous-jacente. Pour travailler, il allait devoir s'enfermer dans un petit bureau avec un ordinateur adapté, si possible rapide et puissant. Rien de réjouissant, mais Luke avait tout de même hâte de vérifier sa théorie.

****

- Compte bancaire de Georges Turner, citoyen Républicain, Gardien de la Tombe.

Le site seulement disponible à certaines unités de la justice comme la police ou les Jedis mua d'écran sous les yeux impassibles de Luke, tandis qu'apparaissait une petite case vide que le logiciel pour aveugles signala-Il ignorait pourquoi mais c'était toujours des femmes qui prêtaient leur voix pour ce type de programme.-

- Code exigé, veuillez entrer le code de sécurité pour accéder au dossier.

Dans un souci de préserver l'intimité des citoyens, les barrières étaient nombreuses, et encore seulement pour observer en détail la liste des entrées et sorties de crédits. Luke ne pouvait naturellement pas jouer avec l'argent du gardien bougon. Le serveur crissa légèrement tandis qu'il accédait au site de la Banque, forcée de partager ses données avec la justice. La voix monotone commença à énumérer les chiffres.

- Rien d'autre?

Avec une moue déçue, Luke continua son enquête, il visita les comptes bancaires des 4 gardiens ainsi que celui de l'ingénieur. En ce qui concernait ce dernier, il releva l'achat d'un speeder de bonne qualité, mais ce n'était pas un véritable signe. Un jeune informaticien gagnait un salaire convenable, et son âge se prêtait à ce type d'achats, quoique l'engin selon les données sur Holonet, était un peu clinquant et un peu cher.

- Vraiment rien?!
- Je suis désolée, je ne comprends pas votre requête, veuillez réitérer la commande.
- Je sais. Je réfléchis juste à haute voix.
- Je suis désolée, je ne comprends pas votre requête, veuillez réitérer la commande.
- Rahhhh.
- Je suis désolée, je ne comp...bzzz

Luke coupa l’application vocale et se laissa aller en arrière sur son siège. Karm et Maître Ekkt, sans parler de Vajda Kolski comptaient sur lui. Il devait sortir des sentiers battus. Voir l'invisible.

- L'invisible? Mais oui c'est ça!

Sur le clavier, aidé par la touche en relief, le Hapien tapa rapidement le nom d'une gardienne dans le moteur de recherche de la banque. Les données s'affichèrent, Luke ralluma la voix, qui, quelque peu éraillée après avoir été coupée si promptement repris sa lecture.

- Et bien Antonieta Ka'a, nous feriez-vous une petite grève de la faim?


D'un air satisfait, Luke attrapa son comlink pour composer un numéro trouvé dans le fichier des données personnelles de la Twi''Lek rose cette fois. Il y avait peu d'informations sur cette quadragénaire, mère de deux enfants métisses humains. Séparée depuis quelques années, la femme était entrée très tard dans les dossiers de la République, étant donné son passif d'esclave. Sur Coruscant, elle avait rencontré un humain, s'était mariée, avait eu deux enfants puis s'était séparée. Elle vivait désormais avec eux dans un petit appartement de 40 m2 qu'elle louait depuis des années. Luke fit relire l'adresse à la voix synthétique puis s'appliqua à composer le numéro du propriétaire des lieux, un vieil homme de 72 ans.

- Oui, allô?
- Bonjour, Monsieur Jim Harris?
- Je ne suis pas intéressé par vos foutus aspi-lévitateurs. C'est des cochonneries tout ça. Et comment est-ce que vous avez eu mon numéro? Je vous préviens je vais appeler la police si vous continuez de me harceler!
- Hum, je suis justement un représentant de la police. Enfin presque. Bref, je m'appelle Luke Kayan, je suis chevalier Jedi et j'aurais besoin d'une information concernant Antonieta Ka'a, votre locataire.
La voix bravache du retraité -un honnête ancien professeur.- bravache jusque là perdit en vigueur.
- Que lui est-il arrivé?
- Elle est en bonne santé rassurez-vous, mais dans le cadre d'une enquête ayant trait à sa profession, j'ai besoin que vous me disiez si elle continue de vous payer le loyer?
- Je ne comprends pas. Ma petite Antonieta est un ange, jamais elle ne ferait...
- Répondez à la question s'il vous plaît.
- Bon bon. Voilà. Ne pressez pas. C'est normal que je m'inquiète non? Vous savez, je la connais depuis son arrivée sur Belsavis, cette pauvre gamine, elle était si effrayée. Heureusement que cette femme, quoique je pense d'elle, l'accompagnait. Après l'avoir aidée à s'installer, elle a disparu. Ah oui, le loyer. Elle paye toujours rubis sur ongle, brave petite. D'ailleurs elle a même tendance à s'impatienter si je tarde à lui transmettre les factures, elle déteste avoir des dettes, une obsession chez elle. Mais c'est curieux que vous me le demandiez maintenant. Avant la banque faisait un transfert automatique, mais depuis quelques mois, Antonieta m'a demandé si elle pouvait me payer en liquide. Ce n'est pas illégal, hein?
- Non, ça ne l'est pas.- Dit Luke d'un ton rassurant. Dans le combiné l'homme put entendre une voix robotique -encore féminine- annoncer l'heure. Il restait trois heures.- Merci pour l'information, est-ce que je pourrais passer vous voir?

Hésitant mais toutefois ravi d'accueillir quelqu'un qui ne soit pas un vendeur ambulant, Jim accéda. Par chance l'appartement du vieil homme était proche. Pour ne pas impressionner le vieil homme et ne pas donner trop d'importance au thème-Le Jedi avait vaguement pressenti un fouineur de première, plus dangereux encore, un fouineur qui s'ennuyait.- il avait rapidement pris une douche, puis vêtu un ensemble élégant mais simple et surtout neutre En outre, le Hapien ne souhaitait pas ébranler l'autochtone sûrement peu coutumier de l'Ordre Jedi, et, peut-être pas croyant en cette magie- ou sorcellerie- appelée la Force. La canne d'aveugle lui faisait perdre en crédibilité, mais pour l'occasion, cela lui convenait, aussi la déploya-t-il pour frapper à la porte. Le stratagème fonctionna, une fois que Monsieur Harris eut regardé avec une attention presque exagérée sa carte, il fut accueilli avec de vieux gâteaux mou et un café à moitié froid. Le Consulaire remercia chaleureusement son hôte, fier de lui, qui s'assit après un grognement de douleur. L'atmosphère professionnelle s'était rapidement évanouie, les deux interlocuteurs ressemblaient à de vieux amis, y compris un papi et son petit-fils.

- Hrrr cette vieillesse. Alors pourquoi êtes-vous venu? C'était pas une question que vous deviez me poser jeune homme? -La méfiance première avait cédé à l'orgueil de se sentir important, suffisamment pour qu'un gardien de la loi se déplace.-
- C'est une phrase au comlink qui m'a interpellé. Vous parliez d'une femme qui a aidé Antonieta à s'installer, vous vouliez dire Vajda Kolski?
- La directrice de la prison? Non, Antonieta l'apprécie, car c'est une chef juste. Mais celle dont je vous parle l'a littéralement sauvé de l'esclavage.
- C'est-à-dire?
- Je ne connais pas les détails, elle me l'a raconté mais vaguement, comprenez c'est un souvenir douloureux. Quoiqu'il en soit, il me semble que cette femme ait été sur sa planète un de ces jours et l'a tirée des griffes de son propriétaire. Une sorte de Jedi tiens, maintenant que j'y pense. C'est bien vous qui maniez la Force, nan? Les Jedis?
Luke hocha brièvement la tête, peu envieux de s'étendre sur le chemin, les diverses branches et subtilités concernant les enfants de la Force, lumineux ou sombres. Au lieu de ça, il continua sur sa lancée.
- Cette femme lui aurait donc sauvé la vie, et l'aurait amenée ici.
- Oui. C'est aussi elle, qui lui a suggéré de travailler à la prison, il me semble, ils recrutaient à l'époque. Si vous voulez mon avis, j'ai trouvé étrange qu'Antonieta se marie. L'autre femme était toujours là, au début. Elle l'a aussi aidée à s'installer, elle restait dans l'appartement. C'est louche, vous savez, type relation un peu déviante comme c'est la mode chez les jeunes d'aujourd'hui.
- Oui, une véritable mode.- Confirma Luke un brin sarcastique, pas assez toutefois pour que l'homme ne le note.
- Entendez-moi bien, Antonieta, je l'apprécie, et je me moquais un peu de ce qu'elle faisait de son derrière, mais c'est sûr que j'ai trouvé ça plus sain, lorsque cette femme est partie, et puis elle me fichait un peu la trouille. Je ne la voyais pas souvent, elle devait partir de nuit. Avouez que ce n'est pas net.
Nouveau hochement de tête. Le blond croqua dans un biscuit sans laisser paraître ce qu'il pensait du goût pâteux.
- A-t-elle gardé contact avec cette femme? Vous souvenez-vous de son nom, de sa profession?
- Ciel, non. La Force me préserve d'être une commère. - L'homme se signa tout en adoptant pourtant le ton de confidences des adorateurs de rumeurs. S'il ne savait pas son prénom, c'était qu'il n'avait pas pu l'obtenir, voilà tout.- - Je crois cependant qu'elle travaillait dans une filière scientifique. J'ai du la voir une fois avec sa blouse, oh ça ne veut rien dire. Mais ça et les rares commentaires d'Antonieta à son sujet... J'ai toujours flairé une intello, avec un boulot d'intello, qui rapportait beaucoup. -Le retraité resta un instant songeur, puis il ajouta, comme si c'était important.- Vraiment beaucoup. Encore un peu de café?
- Non merci. Je vais devoir m'en aller.
- Oh déjà? J'allais vous partager d'autres suspicions que j'ai sur cette femme.
Le vieux renard avait compris que c'était après la scientifique que la justice en avait. Il était soulagé d'une part car cela ne concernait guère sa chère Antonieta. Cependant, bien que l'autre semblait avoir disparu des radars, il devrait la prévenir de ne jamais chercher à retrouver cette hurluberlu qui avait cherché à entraîner sa locataire et protégée dans des voies de déviance.

- Vraiment, mes collègues m'attendent. Encore merci.

Luke se leva et serra la main du vieil homme qui dû se déplacer pour lui éviter de tendre bêtement ses doigts dans le vide. Le Hapien sentit ses muscles détendus et sourit intérieurement. Jim voudrait certainement prévenir Antonieta mais cette dernière était encore au travail. Avec un peu de chance, il avait quitté un peu d'importance à l'événement, suffisamment pour qu'il ne l'appelle pas à la prison et souhaite attendre le soir. Vu son comportement, il prenait Luke pour un petit employé de rien du tout, limite un traqueur de fraudes aveugles, un de ces "quotas handicapés" que le public devait embaucher. Enfin bref, un traqueur de fraudes fiscales qui courrait- avec sa canne d'aveugle- après une femme du passé qu'il n'avait jamais aimé. Plus jouissif encore, la justice ne voulait rien à Antonieta, seulement celle qui l'avait éclaboussée. Fier d'avoir flairé le filon avant tout le monde, le vieux monsieur referma doucement la porte de son appartement. Luke, lui, rangea son comlink après avoir douté. Non. Mieux valait ne prévenir personne encore.

Il rentra aussi vite que possible, le vent acheva de sécher ses cheveux encore légèrement humides. Sa montre lui indiqua que son escapade avait duré un certain temps, suffisamment pour qu'il arrive tout juste pour vérifier quelques données, taper un prémisse de rapport et courir au lieu de rendez-vous. Évidemment, démêler les révélations intéressantes des superficielles d'un vieil homme, le presser sans le bousculer, sans oublier le voyage lui avait demandé deux heures. Et encore, il avait eu de la chance que l'appartement du propriétaire se trouve à côté. Profitant des 50 minutes restantes pour préparer un dossier qu'il jugea forcément trop léger -alors qu'il était très détaillé et soigneusement rédigé, surtout en ce temps réduit.- afin de mettre au courant Karm et Maître Ekkt. Il hésita mais imprima un troisième, au cas où si Kolski faisait partie de la réunion.

L'heure venue, le Jedi apparut à la minute près, ponctuel alors qu'il ne l'espérait plus. Un peu échevelé, Luke posa sa canne repliée dans un "ouff" et se laissa tomber sur un tabouret. Ses vêtements ainsi que son bâton-guide prouvaient qu'il n'avait pas fait que rendre visite à l'ordinateur. Attendant qu'on l'interroge, le Hapien laissa glisser le rapport préliminaire à chacun, tandis qu'il les commentait à voix haute.

- Au début, je n'ai rien trouvé d'anormal, ni chez Turner, ni chez l'ingénieur, ni personne à vraie dire. Puis, j'ai remarqué qu'Antonieta Ka'a, l'employée fidèle, ne semblait plus "manger" ni payer son loyer, ni rien du tout. Pourtant elle a deux enfants, cela génère forcément des frais, sans compter qu'elle est mère célibataire. Rien sur son compte si ce n'est, ces derniers mois, le versement de la pension alimentaire. En remontant l'historique je me suis rendue compte que, les habitudes ayant la vie dure, elle faisait ses courses dans les mêmes magasins à des dates semblables, deux fois voir trois par mois, pour un montant plus ou moins semblables. Elle visitait aussi épisodiquement des boutiques de vêtements, disposant après tout d'un salaire de gardienne dans une zone dangereuse, la prime risque lui permettait d'avoir une vie assez confortable quoique non exagérée, et des enfants, cela grandit. Or, ces derniers temps, le salaire demeure intact. Pareil pour la pension alimentaire. Je suis allé voir en personne son locataire qui m'a assuré qu'elle continuait de payer son loyer mais en liquide. Rien de concret, mais c'est suspect, non? Si on ajoute les frais d'alimentation et de vêtements qui ont disparu. Mais plus intéressant encore, la raison pour laquelle je me suis permis de me déplacer jusqu'à chez lui... Monsieur Jim Harris m'a raconté qu'au début, une femme a aidé A'ka, une présumée scientifique, de l'âge d'Antara qui l'aurait sauvé de l'esclavage. Si quelqu'un vous donne du travail après une vie de misère, et si vous êtes une personne plus ou moins normale, vous vous sentez reconnaissant, mais... Plus encore envers celle qui vous a offert la liberté ET un nouveau départ. Je n'ai aucune preuve qu'Antara se soit un jour rendue sur Ryloth mais ce sont des données faciles à effacer. Les premiers mois, Antonieta n'a pas payé de loyer car elle faisait le ménage chez Monsieur Harris qui a eut pitié d'elle. Ensuite, il a assuré recevoir de l'argent à partir de janvier, il y a qix-sept ans de cela, sauf que cela ne se reflète sur les prélevés bancaires qu'à partir de mai. Qui a payé Jim Harris, sachant qu'il recevait le loyer par transfert bancaire?

Le jeune homme indiqua une page sur son propre dossier, un robot-lecteur projetait le rapport sur un mur blanc, tout en le traduisant instantanément en basic pour voyants. Lui, faisait courir ses doigts sur les pages ponctués de petits trous et lignes en relief.

- L'argent arrivait d'un compte, celui de Cerise Harton, sûrement un faux nom car il n'y a aucun dossier sur elle, pas de permis de conduire, aucune visite chez le médecin ni même un acte de naissance. Celui qui a crée ce personnage n'a pas pris vraiment soin de le rendre crédible, mais si, de cacher soigneusement ses traces. Je n'ai pas pu remonter la piste.


Déplora le Jedi, dépité. Il conserva la tête droite, le visage vaguement illuminé par la lueur blême du projecteur.

- Un dernier détail. Avant que sa bienfaitrice ne guide Antonieta vers son travail honnête et payant de gardienne, elle avait suivi une formation basique en ingéniererie informatique et mécanique, elle aussi grassement payé. Elle aurait abandonnée selon son université -que j'ai appelé.- à cause de ses difficultés à lire et à écrire. Toutefois elle s'efforçait et était parvenue à atteindre la deuxième année en enregistrant les cours sur bande.

Après un petit soupir, à la fois fatigué et soulagé, Luke attendit que les autres lui fassent part de leurs découvertes.
Karm Torr
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Tout était lié. Tout respirait, tout vivait ensemble. Les yeux fermés, assis en tailleur au milieu de la cellule d'Antara, Karm avait laissé sa respiration se perdre au limite de l'inconscience et son esprit, peu à peu libéré des contraintes immédiates de la réflexion méthodique et rationnelle, s'étendait dans les interstices du monde. Le jeune Jedi ne se rendait pas tout à fait compte de combien sa technique de méditation, raffinée dans les paysages grandioses et solitaires où le conduisaient souvent ses missions, tranchait avec le vide abstrait que prônait l'orthodoxie jedi. Plus les années passaient, plus Karm s'engageait résolument sur son propre chemin, un chemin perpétuellement lumineux, mais marginal. Son silence contemplatif tenait ainsi bien plus de la transe chamanique que de ce que l'on enseignait aux Padawans sur Ondéron.

Et c'était là. Au milieu de l'Obscurité, de la séduction d'Antara, de la cruauté, de l'attente, sous la pierre et les gardiens alentours, cette trace infime qu'il cherchait : le champignon. Il n'y avait pas d'esprit, et malgré tout une présence dans la Force. Une vie bien différente de celles qu'ils étaient entrainés à repérer, eux, les Gardiens, mais une vie, simple, ancienne et primitive. Une vie sui résistait à tout. Et surtout à la glace.

Et ce fut ainsi que lorsque, bien des heures plus tard, il pénétra dans la petite chambre d'hôtel de Maitre Ekkt qui leur servait de salle de réunion de fortune, Karm fut auréolé de froid. L'Ark-Ni abandonna ses gants, ses bottes et son lourd manteau dans l'entrée, pour prendre la tisane fumante que le Trandoshan lui tendit miraculeusement, comme s'il avait eu vent de son expédition. Karm fut bien content de ne pas avoir à parler tout de suite, le temps de se réchauffer la gorge, pendant que Luke menait son exposé.

— Excellent travail, s'enthousiasma l'Ombre, excellent travail en vérité, Luke. Et qui recoupe ce que j'ai découvert moi-même. Voyez-vous, avec l'aide de la directrice, j'ai pu accéder à certaines parties anciennes de la Tombe, là où les grands criminels sont maintenus en stase depuis des générations par les techniques des Rakatas. Pas un geste, pas une pensée ne se forme pour eux mais leur esprit, leurs mémoires, sont maintenus là, suspendus comme... Comme dans le vide. Et certains de ces esprits ont eu des visiteurs. Une visiteuse, en l'occurrence. C'était une théorie que j'avais avant d'arriver et qui se confirme ici : Antara a préparé de longue date son emprisonnement dans la Tombe, en y plaçant une gardienne fidèle, et tout me porte à croire que sa capture fut volontaire.
— Pour accéder aux souvenirs des prisonniers ?
— Exactement ! Bien des secrets de ces empires disparus demeurent à découvrir et, pour la beauté de la science ou la recherche du pouvoir, probablement les deux, Noctis a envoyé Antara les exhumer. En réalité, le cas n'est pas inédit. Il arrive que dans les évasions de haut vol, les gens aient cherché à entrer avant de chercher à sortir. Les prisons renferment des criminels et, fatalement, elles enferment avec eux des connaissances qui suscitent bien des convoitises. Vos informations, Luke, viennent confirmer que la présence d'Antara dans la Tombe n'avait rien de volontaire mais faisait partie d'un plan plus vaste.
— Et l'acolyte ?
— Difficile à dire. Peut-être était-il impliqué d'une manière ou d'une autre. Peut-être sa libération était-elle un hasard heureux pour nos adversaires. Sur ce point, je crains de ne pas avoir de théorie véritablement définitive.

Karm demeura silencieux et, pour tout dire, un peu secoué. Après la suggestion de Luke, plus tôt ce jour-là, il s'était pris à imaginer le genre de pièges qu'ils auraient pu tendre à Noctis et ses sbires. Mais face à des esprits aussi tortueux, qui agissaient avec tant de patience et tant de détours, comment pouvaient-ils jamais espérer l'emporter par la ruse ? Karm trouvait les perspectives que les rapports de Luke et du Maître Jedi ouvraient plus glaçantes que le récit de batailles perdues. Au moins, il comprenait comment faire la guerre.

— Ne vous laissez pas décourager, Karm, siffla le reptilien, toujours très direct avec ses confrères, nous avançons méthodiquement, nous collectons les informations et c'est déjà beaucoup. Racontez-nous votre journée.
— Ben... Ouais, j'suis retourné dans la cellule d'Antara, pour percevoir la trace des champignons, bien cerner le truc quoi, et j'ai eu la certitude qu'il fallait chercher du côté des glaciers. J'me suis équipé, j'suis sorti de la ville, j'ai fait une expédition souterraine dans les réseaux de galeries glaciaires. Et de fait, y a des niches de champignons, genre une sorte de mousse, qui pousse là. Ça se développe dans l'obscurité la plus complète et ça résiste super bien au froid, fatalement. Si vous voulez mon avis, y a des exploitations à faire pour l'utiliser dans l'espace du coup. Alors j'ai collecté des échantillons.
— Et c'est probablement une autre raison de l'intérêt d'Antara et Noctis pour cette planète. Je ne sais pas qui de la Tombe ou de ces spores extraordinaires ont d'abord attiré l'attention de celle-ci mais, comme je vous le disais ce matin, les plans du Seigneur Sith ont souvent plusieurs objectifs et il semblerait que celui-ci combine l'extraction d'informations criminelles, le test d'armes bactériologiques et les études botaniques. Mais dites moi, Karm, vous avez traqué ce végétal à travers la Force ?
— Ben. Ouais. Normal quoi.
— Normal, répéta Ekkt avec un sourire que sa physionomie rendait bien malgré lui assez inquiétant.

Le regard de la Sentinelle passa tour à tour sur les deux Chevaliers et Karm aurait pu jurer qu'il sondait aussi leur présence dans la Force. Au bout de quelques secondes de silence qui le mirent quelque peu mal à l'aise, Ekkt reprit la parole.

— Jeunes gens, ce que j'ai entendu dire à votre propos est tout à fait justifié. Vous pouvez être fiers de vous. Bien. Ce soir, repos, détente. Tâchez de vous délasser l'esprit pour être alertes et disponibles demain. Demain, nous remonterons la filière Twi'Lek. Qui sait, en embarquant peut-être jusqu'à Coruscant. Pour ma part, je vais faire un peu de tourisme.

Décidément, Maitre Ekkt avait le don de déjouer les attentes.
Luke Kayan
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Luke souffla discrètement, tandis qu'il profitait de l'effet souvent négligé et pourtant salvateur d'épaules qui se décontractaient. Ekkt était satisfait voir plus. Pas de quoi s'en étonner, Luke avait été lui-même très surpris par les dires de son ami, il aurait d'ailleurs volontiers appuyé l'ultime remarque du Trandoshan, qui, sous ses aspects un brin moqueuse soulignait un fait exceptionnel. Heureusement la jalousie n'était pas dans la nature du Hapien, car il aurait pu "mal" le prendre, normalement il était le spécialiste de la Force, profitant d'un taux de midichloriens nettement supérieur à la norme ainsi qu'une relation presque fusionnelle avec cette puissance mystique qu'il considérait comme une amie plus jeune. Il avait sacrifié ses capacités au sabre-laser, stagnant au même niveau qu'un Padawan en fin de formation pour se consacrer, briller via sa maîtrise de ses dons. C'était habituellement chez lui que l'on observait d'étranges réactions ou manifestations extraordinaires comme le coma dans lequel Karm, en phase avec la Force, s'était plongé, ou cette traque aux champignons. Le plus étonnant encore restait l'attitude de l'explorateur qui n'avait apparemment fourni aucun effort pour y parvenir. Décidément, son aîné se faisait remarquer partout quoiqu'il en dise, en combat, en exploration et maintenant dans le domaine de la Force. Luke se sentait heureux qu'Ekkt ait considéré son travail comme fourni, quoiqu'il s'était surpris vu la rapidité avec laquelle il avait rédigé un rapport à ses yeux trop légers. Cependant, il savait aussi qu'un bon enquêteur de la police serait parvenu à des résultats semblables.

Par chance, Luke pouvait se sentir un peu gêné de ne pas être à la hauteur, mais il n'était pas jaloux. Au contraire fier du Chevalier Turquoise il lui offrit un grand sourire -rarement aussi spontanés et prononcés chez lui.- puis se redressa, récupérant après quelques tâtonnements sa canne repliée qui avait roulé sur la surface.

- Je vais aussi devoir te demander des cours dans le domaine de la Force.

Fit-il, rêveur. S'il pouvait se motiver et suivre les pas de Karm, Luke n'hésiterait pas une seconde à commencer à travailler davantage encore. Il adorait la Force et toute possibilité de la comprendre davantage était un songe pour lui. C'était encore plus fort que la satisfaction de plaire à un Maître ou cette supériorité -pas toujours recommandable.- que le blond pouvait ressentir face au "vilain" attrapé et finalement enfermé. S'il avait été seul, le jeune homme aurait probablement continué à travailler pour présenter nonchalamment ses résultats au Trandoshan d'un air flegmatique en prétextant s'être détendu. Oui, l'étudiant en Luke ne s'était jamais vraiment apaisé. Il avait toujours ressenti ce besoin d'être utile aux nécessiteux, égaux et supérieurs pour justifier sa présence dans ce merveilleux Ordre. Il avait toujours eu un esprit particulièrement scolaire, au point que certains professeurs devaient lui ordonner de se reposer plus que le lui proposer. Tout extrême était mauvais après tout, et Karm arrivait subtilement à contrôler cette obsession d'avancer encore, jusqu'à épuisement, sachant que seul le côté vraiment protocolaire et son bon coeur avaient réussi à freiner cette curiosité insatiable, un peu semblable à celle de Noctis.

- Bon, puisqu'on doit se reposer, que dirais-tu d'aller dîner dehors?

Proposa le jeune homme en se souvenant de leur retour de la cité des deux Soleils. C'était la seule fois où il avait consenti de prendre le risque à manger en tête à tête avec Karm. Jugeant que ce dernier le méritait bien, et poussé lui-même par ce désir, le Hapien avait choisi de lui offrir cette optique sans connaître sa réaction. D'une vague de Force, il chercha à réchauffer son ami, plus efficacement que cette tisane pourtant bienfaitrice.

- Je suis fier de toi.

Bien sûr, la conscience de Luke lui rappela, désagréable, que son opinion importait beaucoup moins qu'une Ombre aussi reconnue qu'Ekkt - oui il avait ouvert le fichier de ce dernier, et dévoré le peu d'infos disponibles à ce propos.- mais il le sentait sincèrement, tout comme il avait eu besoin de le préciser à haute voix, malgré le fait qu'hier déjà Karm avait reçu ce compliment. Deviendrait-il fleur bleue? Contaminé par son cher et tendre habituellement beaucoup plus expressif que lui? À cette idée, le blond sourit intérieurement tandis que ses joues se coloraient un peu de rouge, bien visibles depuis l'extérieur quant à elle.

- Au fait, si tu as autre chose à proposer, n'hésite pas.

Malgré une certaine fatigue, Luke se sentait suffisamment en forme pour songer à faire autre chose. L'approbation discrète d'Ekkt lui donnait la force suffisante pour lutter contre sa timidité. Les bouts d'infos qu'ils avaient conquis aujourd'hui, couplé à cette sensation encore bien présente d'avoir failli perdre son compagnon lui permettaient d'ouvrir son esprit si rigide. Plus que des efforts, aujourd'hui, il avait sincèrement envie de faire autre chose que de se plonger dans ses dossiers ou rester dans la chambre d'hôtel, simple mais propre, qu'on avait loué pour eux.
Karm Torr
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- C’est vrai ?

Ce n’était pas que l’avis de Luke comptât pour lui plus que celui d’Ekkt mais simplement, leurs fiertés respectives jouaient dans deux domaines différents. Karm voulait briller pour l’Hapien mais, du Maître, il cherchait surtout la confirmation qu’il se trouvait sur la bonne voie. Un sourire enthousiaste se dessina sur ses lèvres et sa bonne humeur n’en devint que plus contagieuse. Entre ses expériences robotiques et l’opportunité d’explorer un nouvel environnement naturel, l’enquête lui livrait des satisfactions à la mesure de ses passions et de sa curiosité.

- Qu’est-ce que je devrais dire, moi ? Ton rapport, c’était quand même trop la classe. Je sais pas comment tu fais pour arriver à suivre une piste aussi méthodiquement, c’est, genre, trop impressionnant. Puis tu fais ça avec tellement de professionnalisme, c’t’un truc de fou. J’ai quand même vachement de chance que tu sois là pour me montrer le chemin. Allez, viens, faut que j’me change, j’vais finir par crever de chaud.

Leur chambre était quasiment identique à celle d’Ekkt, dont le seul privilège devait être la solitude. Chacun y avait son petit lit simple mais Karm se promit de les pousser l’un contre l’autre. Ce ne serait pas l’idéal mais il était hors de question de perdre une occasion d’avoir Luke dans ses bras.

- J’suis pas contre un dîner. Bon, après, tu me connais, je suis pas le gastronome du siècle.

Karm mangeait pour se nourrir et, dans ce domaine-là plus que dans d’autres s’exprimait sa discipline austère. Celle qui l’avait formé lui avait appris à bien connaître son régime, à considérer les aliments pour ce qu’ils apportaient, et à calculer soigneusement les potréines et les glucides, les vitamines et les acides aminés. C’était une diète d’athlète, à laquelle manquait entièrement l’éducation aux saveurs, et si Karm avait beaucoup de bienveillance pour les plaisirs sexuels, parce qu’ils participaient à ses yeux de la Force Vitale, il jugeait beaucoup plus durement les plaisirs de la table ou de la bouteille. Le dîner avec Luke avait donc surtout pour lui le charme de la compagnie.

[color=#00ccff]- J’aime bien Maître Ekkt. Je le connaissais pas trop et mes expériences avec les Ombres, bon, tu sais, c’était pas trop ça. J’ai sans doute encore trop de préjugés sur les autres parties de l’Ordre, j’devrais essayer de faire quelques missions ici ou là pour découvrir un peu leurs méthodes. Viens.[/navy]

Il s’était débarrassé de ses vêtements et, d’évidence, le dîner était remis à plus tard, puisqu’il venait de voler la canne de Luke pour entrainer l’Hapien dans la salle de bain. C’était une petite pièce exiguë mais fonctionnelle, avec un lavabo, une cabine de douche et des toilettes. La propreté rutilante était le luxe de cet hôtel et, pour Karm, c’était déjà beaucoup. Dans un murmure un peu malicieux, alors qu’il commençait à défaire les vêtements de son compagnon, l’Ark-Ni murmura :

- On peut pas sortir en sentant le bantha.

La belle excuse. Ses doigts volaient sur les vêtements de Luke, ouvrant les boutons, défaisant les lacets, glissant les fermetures, pour découvrir petit à petit le corps du jeune homme, tandis qu’il expliquait :

- Je t’échange des cours de botanique contre des cours de médecine. Pour la pratique standard mais aussi la guérison de Force. Moi, j’suis surtout dans l’urgence des champs de bataille mais maintenant que j’explore, j’pense que ce serait pas mal que je pousse ça plus à fond et t’as l’air vraiment calé dans le domaine.

Luke était nu et le regard de l’Ark-Ni courut sur le corps que d’aucuns auraient jugé trop frêle, et certainement trop peu viril, mais qu’il trouvait sublime, l’amour aidant. Il déposa un baiser dans le cou de Luke avant de l’entrainer dans la cabine de douche, beaucoup trop étroite pour qu’ils n’y soient pas aussitôt serrés l’un contre l’autre. Les bras de l’Ark-Ni se refermèrent autour du corps de son ami.

- Médiane plus, plafonnier, savon peau sensible, lança-t-il à l’intention de l’ordinateur de la chambre, avant d’embrasser Luke, alors que l’eau savonneuse tombait sur leurs corps enlacés.

Sa langue jouait avec celle de son compagnon et, dans la Force, son aura se mêlait à celle de Luke. Les compliments d’Ekkt, la satisfaction du travail accompli, le soulagement d’avoir survécu au virus, les explications sincères auxquelles ils avaient consenti ces dernières heures, tout s’associait pour lui permettre de profiter avec une sérénité renouvellée de leur intimité. Le baiser ne s’interrompit pas et ses mains couraient sur le corps de Luke : l’une s’arrêta, un peu possessive, au creux de ses reins, l’autre sur sa nuque.

Quand leurs lèvres se séparèrent, Karm souffla :

- Luke.

Culture ark-ni oblige, ce prénom avait été prononcé comme une brûlante déclaration d’amour.

- Jamais je ne pourrais être assez reconnaissant à la Force d’avoir fait se croiser nos chemins.

Pour lui, c’était évident : leur rencontre était le fruit de la destinée, un signe de la Force qui devait mener à leur accomplissement respectif, et leurs sentiments étaient de ces intuitions impérieuses que les Jedis devaient apprendre à écouter.
Luke Kayan
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- N'importe quel policier bien entraîné y parviendrait.- Assura Luke dans un accès peut-être trop zélé mais bien sincère d'humilité.- alors que cette maîtrise de la Force... Mais bon, laissons-là les compliments.

Le Hapien jugea bon de retrouver un semblant de modestie Jedi et d'austérité, qu'il pensait conserver lors du repas d'ailleurs. Amusé, il s'empressa de corriger son ami, de le rassurer aussi probablement. De nature simple lui aussi, Luke abordait une silhouette particulièrement fine, en partie dû à son passé duquel il n'avait jamais tout à fait récupéré mais aussi de part son mode de vie Jedi. S'il possédait quelques modalités en matière de nourriture, c'était surtout à cause d'un apprentissage visant à le mener dans de grands banquets ou galas pour dégoter des informations. Au début Luke s'était insurgé, notamment lors d'une mission sur Alderaan. Le blond était alors en fin d'adolescence et s'était montré ostensiblement mécontent pour la première fois. Saï ne l'avait curieusement pas mal pris, saluant l'éveil de sa personnalité. Il avait fallu du temps avant que le Chevalier admette que sa branche nécessitait le délaissement provisoire de sa chère austérité Jedi pour accepter de s'extasier sur la finesse de mets. Toutefois, aujourd'hui Luke n'avait heureusement pas l'intention de dîner avec un sénateur, et encore moins un certain ambassadeur frauduleux, menteur et peut-être criminel. Comparé à il y avait deux ans, le Hapien était nettement plus heureux, en phase avec un amour qu'il n'attendait plus et n'avait par ailleurs jamais demandé.

- Nous pouvons choisir un petit restaurant simple. J'ai juste envie d'aller en ville, sentir le monde qui s'y promène.- Bien qu'il n'y aurait probablement pas foule le lendemain du virus. À moins que désireux de faire un pied de nez à leurs agresseurs, la population décide de sortir expressément, en un hymne à la vie et au courage du quotidien. Luke avait lu une telle histoire dans un hololivre relatant le passé d'une civilisation extraordinaire. Suite à un massacre, en guise de révolution, les citoyens étaient sortis en masse dès le lendemain à la terrasses des cafés ou pour des spectacles de rue improvisés. Cette planète avait, en outre, l'habitude de célébrer ses défaites à la guerre au nom de la résistance, parce qu'ils avaient essayé. Les lieutenants ayant échoué n'étaient pas vu comme des traîtres, c'était une vision des choses impressionnante, idéale tout en restant difficile à saisir. [HJ: Vive les traductions sur la Hongrie]

Soudain tiré de ses pensées par un Karm particulièrement pressé, Luke émit de vagues protestations.

- Mais j'ai pris une douche il y a à peine trois heures.

Par ailleurs, le vent de Belsavis, d'humeur guerrière cet après-midi, avait aidé ses longs cheveux à sécher alors qu'il revenait de sa discussion avec Jim Harris. Malgré lui entraîné, le Hapien toujours un peu innocent dans le domaine et donc persuadé que son ami le croyait vraiment sale, se débattit. Juste ce qu'il faut bien sûr. En fin de compte, il se laissa faire, rendant même son baiser à l'instigateur de son emprisonnement dans cette espèce de boîte de conserve qui leur servait de plateau de douche.

Luke plaqua une main sur celle, baladeuse, de son ami. Il sourit d'un air provocateur -certes, il souriait surtout à la cabine en cet instant, peinant à situer exactement Karm dans cette position tordue.- comme pour l'obliger à stopper tout en l'invitant à continuer.- Son corps très mince ne semblait pourtant pas encore condamné au rachitisme. Tant ses muscles de Jedi quoique légers comme son physique de Hapien rattrapaient un peu le désastre que ça aurait pu être. Du côté de Karm, Luke n'avait rien à dire. Fin mais athlétique, au début il s'était senti mal en comparant leurs deux silhouettes, craignant de ne pas plaire, aujourd'hui seule demeurait la gêne du timide à l'idée de se retrouver nu avec toutes les connotations que cela sous-entendait.

- Moi aussi. Je n'attendais plus rien. Pourtant je dois t'avouer avoir souffert, maudit ta présence, mon amour grandissant au début. Moi qui croyais avoir appris la leçon, être apte à me maîtriser. Finalement il y a surtout une chose de différent qui m'a permis de me rendre compte que notre union est positive. Je grandis. J'apprends et je sers mieux nos idéaux. Du moins, c'est ce que je compte faire sur le long terme et ça tu me l'enseignes chaque jour. Mon autre relation était stérile, tournée envers le plaisir de l'autre seulement. Jason ne comprenait pas mon désir d'évoluer, que notre amour éclabousse l'extérieur. C'est sûrement très fleur bleue, exactement comme ces holofilms du dimanche soir que je n'ai jamais vu- mais on m'a dit qu'ils ne volent vraiment pas hauts.- mais c'est ce que je ressens.

N'avait-il pas dit que stop aux compliments et à l'auto-satisfaction? Apparemment arrêter n'était pas simple. Seulement après la tempête, qu'ils aient failli se perdre l'un l'autre à cause de la mort, purement, simplement, cela faisait clairement du bien, quitte à apparaître comme des personnages de mauvais feuilletons.

- Vendu pour les cours.- Luke venait de se rappeler de la proposition d'échange de Karm. Le deal lui paraissant honnête, prometteur de belles avancées comme toujours.- mais je n'aimerais pas t'en donner un en matière d'habillement.

Avec malice couplée à une agilité surprenante, Luke se déroba une fois la mousse de son -deuxième- shampooing. Il fit coulisser le panneau et se dirigea le plus vite possible vers le lit pour mettre une tenue sobre mais élégante, l'un de ses seuls ensembles civils pour sortir, si une mission le requérait. Un pantalon et une unique d'un vert si sombre que le tout paraissait presque noir. Un ruban servait de ceinture, associé à un autre sensé attacher ses cheveux pour l'instant dégoulinants. Il n'allait pas laisser Karm obtenir ce qu'il voulait dès maintenant, ce ne serait pas drôle de passer la soirée en compagnie d'un homme tranquille, repu. Et puis, il avait vraiment faim, car mis à part les gâteaux mous du vieux propriétaire, il n'avait pas avalé grand chose.

- Bon, je te laisse me guider, nous entrerons dans le restaurant où tu te sens à l'aise. À moins que tu ne veuilles quelques leçons sur les manières à adopter en haute société.

Il sourit, imaginant Karm se débattre avec les trois fourchettes, comme lui, au Galactiquement Vôtre sur Coruscant. Et cette fois où le serveur tiré à quatre épingles -sachant que l'un d'elles avait dû percer son cerveau.- lui avait servit un homard. Ce jour-là, quoiqu'il ait fait, Jason l'avait sauvé en échangeant élégamment leurs plats. En tout cas, voir ou du moins percevoir l'Ark-Ni s'emmêler dans tous les codes, s'insurger comme il avait pu le faire de cette frivolité pourrait être amusant, tandis que l'avoir, à l'aise, en face de lui dans une petite auberge sympa serait attendrissant. L'expérience pourtant simple était presque inédite pour les deux Jedis, et c'est en toute simplicité que Luke savourait l'expectative de cette soirée où ils "joueraient" à être comme tout le monde. Excepté qu'ils étaient deux hommes en couple, certes. Jusque là néanmoins l'aura de Karm leur portait chance, jamais encore le Hapien n'avait fait face au rejet ou du moins pas directement en sa compagnie. Ce soir, malgré sa crainte naturelle, le blond se promit de faire des efforts pour ne pas trop cacher leur relation.
Karm Torr
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- C’est ça, fuis, lança Karm d’un ton léger alors que Luke se faufilait hors de la douche, moi je n’avais que des intentions chastes, pures et innocentes.

Ben voyons.

Toujours un peu excité, Karm demeura sage dans la douche, au contraire de ces fois où, il fallait bien l’avouer, seul dans sa salle de bain du Temple d’Ondéron, ses pensées vagabondaient jusqu’à Luke, et où s’il abandonnait à des caresses solitaires et peu chastes, l’esprit plein des charmes de son compagnon. C’était pour lui une attitude évidemment tout à fait naturelle et, dans le plaisir presque mystique qu’il trouvait à s’abandonner à ces désirs, il n’était pas rare qu’au moment suprême, quand la jouissance balayait pour quelques secondes toutes ses pensées rationnelles, la Force vive lui soufflât d’importants conseils. Il avait assisté à des accouplements rituels dans des tribus sur des planètes isolées, à des rituels de fertilité aussi, où le chaman du village libérait sa semence sur les blés, et il supposait que ces magies primitives puisaient à la même source : c’était une méditation, bien différente de celle enseignée par les Jedis, bien différente aussi de la rage des Siths, mais qui, dans son attention scrupuleuse au corps, n’était pas sans rapport avec les techniques que lui avaient enseignées Tavaï.

Ce jour-là cependant, ses mains ne furent occupées qu’au shampoing et au savon. L’expédition dans les grottes de glace de la planète avait été rude, même s’il ne s’était pas étendu sur les difficultés de l’opération, et l’eau chaude qui délaissait ses muscles et ses articulations fut salvatrice. Quand il émergea enfin de la salle de bain, toujours nu, Luke était resplendissant, comme à son habitude.

- J’ai pas… j’ai pas de tenues aussi jolies, ‘fin, classes, tu sais…

Luke ne s’en rendrait pas compte, évidemment. Karm s’approcha pour déposer un baiser sur la joue de son ami et murmurer :

- T’es parfait.

Pour sa part, il revêtit l’une de ces tenues jeunes et urbaines grâce auxquelles il se fondait en général dans la foule des spatioports surpeuplés, semblables à bien des touristes de son âge, à la recherche de la prochaine rave party galactique ou du dernier club à la mode. Karm n’avait jamais été un grand adepte des bures jedis : elles marquaient trop selon lui le désir douteux de se distinguer du reste de la société et il était persuadé que dans cette uniforme, qui annonçait le héros aux pouvoirs mystérieux, il rentrait finalement beaucoup plus d’orgueil que de modestie. Le dépouillement matériel était souvent à ses yeux une excuse pour les parures spirituelles et il préférait suivre les modes communes, pour ne pas attirer l’attention, que de signaler partout qu’il n’était pas un homme comme les autres.

Les deux Jedis quittèrent le petit hôtel, situé dans le centre-ville, d’ailleurs peu vaste, de la ville de province où ils s’étaient établis. La chaleur toujours tropicale permettait aux terrasses d’être peuplées même pendant la nuit et les conversations allaient bon train. Les citoyens devaient avoir une confiance certaine en leurs autorités, puisqu’ils étaient encore nombreux, ce soir-là, à profiter du plaisir des bars et des restaurants, une fois l’annonce de l’épidémie passée. C’était sans doute une manière d’exorciser l’angoisse et de retrouver, ensemble, la normalité d’un quotidien ordinairement sans histoire.

Alors qu’ils arpentaient les rues, Karm raconta plus en détails son expédition spéologique, évoquant ses impressions, les miracles de la nature, les épreuves traversées, tous ces éléments qui donnaient corps à son expérience mais qui n’avaient pas eu un intérêt immédiat pour son rapport. Finalement, ils passèrent la porte automatique d’un petit restaurant qui ne payait pas de mine, où ils furent accueillis par un droïde circonspect.

PAS DE. CANARD. PAS DE. CANARD.
- V3, reviens ici. Reviens. Non ! Tu… ah, mais, bougre de casserole, s’emporta une dame de cinquante ans, qui venait de courser le droïde à travers l’établissement, avant que celui-ci ne disparaisse dans un couloir de service. Elle s’arrêta en face des deux visiteurs. Ah, c’est vous, les Jedis ! Désolée pour le droïde protocolaire. Ca fait trois semaines que j’ai commandé les pièces de rechange mais les livraisons sont pas rapides.

L’Ark-Ni se retint de proposer de jeter un oeil à la machine. Cette soirée, c’était la sienne, avec Luke.

- Une table pour deux ou votre collègue vous rejoindra ?
- Maitre Ekkt ? Non, il doit flâner dans la jungle.

La patrone fut un peu soulagée. Pour être honnête, un reptile géant, elle ne savait pas exactement ce que ça pouvait bien manger. Elle conduisit les deux garçons à une petite table en terrasse, avant de leur fourrer un menu dans les mains.

- En apéritif, je vous conseille du vin de pomanier, c’est un arbre qui pousse dans la jungle, ça donne une liqueur légère mais délicieuse.
- Plutôt quelque chose de sans alcool.
- Ah. Oui. Bien sûr, bien sûr. Evidemment.

Probablement un interdit religieux, se dit-elle. Après avoir conseillé des jus de fruits, elle s’éclipsa et Karm entreprit de faire la lecture de la carte à Luke. Une opération à vrai dire à peu près inutile, pour lui comme pour l’Hapien, puisque l’essentiel des plats leur était étranger et, dans cette ville peu touristique, aucune explication sur leur composition ne venait au secours des étrangers.

- J’crois qu’on va choisir un peu au hasard, hein. Avec un peu de chance, c’est très pimenté.

Karm reposa la carte pour fixer Luke et, avec sa sincérité habituelle, avoua candidement :

- OK, j’suis peut-être un tout petit peu stressé, là maintenant, de pas arriver à te faire la conversation. Au bout d’un moment, tu vas bien finir par te laisser de mes histoires d’explorateur. Et je doute que mes aventures guerrières t’intéresse beaucoup.

D’ailleurs, Karm n’évoquait presque jamais son passé de Gardien impliqué dans les batailles.
Luke Kayan
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- Ne t'inquiète pas, c'est une tenue d'Alderaan, mais elle est simple.

Luke rassura son ami d'un petit sourire -cette fois offert au mur, un peu à gauche derrière Karm.- il savait que l'exotisme relative de l'ensemble lui donnait une impression de chic, et la qualité du tissu doux y contribuait, pourtant ce cadeau offert par [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien] bien après leur retour sur Coruscant, lors de cette même mission que Luke avait d'abord jugé inutile était sobre, à sa demande. Sur ses instructions, le garçon avait choisi une tenue désormais pratique pour le blond, même si elle pouvait attirer les regards en-dehors de la planète fertile. Ne souhaitant pas que Karm s'inquiète, le jeune homme appuya ses propos d'une caresse dans la Force. De toutes manières, Luke préférait la toge Jedi, notamment pour cela, parce que c'était un tissu encore plus simple et surtout un uniforme qui les rendaient tous égaux. La tunique, ample, cachait les formes, enlaçant sa taille fine sans en tracer vraiment les détours. Luke sentait alors qu'il appartenait à un Ordre, une famille, sans compter que ces vêtements portaient un message clair, n'importe quel citoyen en difficulté pouvaient les arrêter pour leur demander de l'aide. Le Hapien appréciait le contact avec la population malgré une certaine timidité voir rigidité apparente. Il aimait qu'on lui fasse confiance pour essayer de régler un problème. C'était sa place, l'ordre des choses. Il devait payer son droit d'accès à la Force, merveilleuse, assumer ses responsabilités. Pour une soirée cependant, se mélanger aux autres lui plaisait. Il se sentait égoïste mais tâchait de ne pas culpabiliser ou de penser à quelqu'un ayant besoin d'aide qui passerait outre le couple, cherchant un agent de la loi. Cette soirée était à eux, même Ekkt avait insisté sur le fait qu'il était important de se reposer.

- Toi aussi tu es très bien.

Évidemment, le Jedi ne se référait pas au jean dont il avait senti la texture lors d'un frôlement involontaire, sinon à l'état d'esprit qui jaillissait dans la pièce. L'explorateur était parfait, encore joyeux, enthousiaste et même sûr de lui.- du moins plus que d'habitude.- après les compliments d'Ekkt. Le jeune homme s'en contentait largement, surtout qu'il n'avait aucune idée des éventuelles différences de présentations entre lui et l'Ark-Ni. À son âme et à ses yeux, Karm était la personne la plus séduisante ce soir. Son esprit habituellement alambiqué était, dans ce domaine, on ne peut plus simple, pour ne pas dire simpliste. Il appréciait le Chevalier aux cheveux argentés nulle idée de regarder ailleurs ne lui viendrait, et pas parce qu'il ne le voulait pas, sinon parce que selon lui, il n'y avait aucune raison de le faire.

Lorsqu'ils entrèrent dans un petit restaurant, Karm ayant donc renoncé à l'apprentissage des modalités de la haute société, ils furent à moitié bousculé par un droïd qui donnait du fil à retordre à une serveuse ou à la propriétaire.

- Au moins, on sait qu'il n'y a pas de canard.

Lança Luke, compatissant envers la femme- sans voir sa tenue, il ignorait son véritable rang.- qui essayait de tout faire pour que ses rares clients ne fuient pas sa gargote. Inconsciemment, le jeune homme s'était un peu accroché au bras de Karm, pas vraiment sûr en ce qui concernait la trajectoire hasardeuse du robot. Les missions, le travail, l'entraînement, ils effaçaient souvent les inquiétudes banales d'un aveugle banal, lesquelles resurgissaient dans des scènes simples comme celles-ci: Luke détestait les mouvements rapides et incohérents dans un lieu inconnu. Sans se départir pourtant de son calme, le Jedi offrit un hochement de tête à la tenancière, accueillant avec soulagement la chaise où le robot ne pourrait pas venir vicieusement le bousculer.

Luke approuva le choix de Karm en matière de boisson, il ne buvait jamais. Un verre de vin sur Alderaan parce qu'on lui avait forcé la main, c'était tout ce qu'il avait consommé en la matière, rigoureux dans sa discipline, le Hapien ne cédait que lorsqu'il y avait conflit d'intérêt, c'est-à-dire qu'un sénateur superficiel prenne suffisamment mal son refus pour mettre en danger les négociations.

- Faisons confiance à la serveuse. Au fait- Le Hapien laissa invoqua la Force pour fouiller le restaurant. Il découvrit que celle qui les avaient accueilli était loin.- Comment sait-elle que nous sommes Jedis?

Le jeune homme avait conscience de la puissance des rumeurs mais il sous-estimait en partie leur pouvoir car il ignorait totalement l'aspect visuel qui facilitait encore la circulation. En tout cas il était un peu déçu qu'on les reconnaisse. Soudain attendri par les aveux de son ami, Luke abandonna ses recherches sur l'art de cette femme à connaître leur identité -incluant celle du discret Monsieur Ekkt.- pour répondre à Karm. Se sentant lui aussi pris en otage par ses promesses, malgré son habituelle crainte, il se risqua à montrer leur relation, au moins à laisser le doute planer, voir atterrir en plein entre leurs deux assiettes encore vides.

- Ne t'inquiète pas, on n'est pas toujours forcé de parler, de "trouver de quoi faire la conversation". C'est simplement naturel. Peut-être que tu vas avoir envie de parler de quelque chose, un détail que tu vois, ou moi et le silence se rompra. On ne doit pas toujours philosopher ou entretenir. Et que puis-je dire de mes "aventures informatiques?", cet après-midi je suis allé voir un vieux monsieur, il m'a offert des gâteaux affreux, mais j'ai du faire bonne figure afin de gratter quelques miettes d'informations. Tu vois, tu as aussi de quoi te lasser. Fie-toi à ce que tu ressens - Se disant, le Consulaire espérait que Karm ne ressentait justement pas cet ennui dont il parlait.- et songe que c'est pareil en ce qui me concerne. Personnellement je suis bien avec toi, et surtout, je ne suis pas avec toi pour tes missions. Ça c'est un bonus!

Le monde avait tendance à toujours vouloir être actif, tourner 24 heures sur 24, comme le faisaient les planètes. Il fallait se montrer actif, inventif et surfer sur la vague de l'élégance, la surprise ou le scoop. Luke appréciait le silence, frôler l'aura de son ami, attendre le plat en écoutant le bruit de pas de la serveuse, sentir le fumet ou même les boulons un peu rouillés du droïd rebelle qui, en arrière-cuisine, continuait apparemment de faire des siennes.

- Est-ce que vous avez choisi?

La femme se stoppa à quelques pas de la table, ayant peur de déranger à un moment intime ou dérangé par la nature de celui-ci, Luke l'ignorait. Professionnelle, elle parvint en grande partie à cacher sa gêne et alluma son datapad pour prendre note.

- Pour ma part, je vous ferai confiance, mais un plat simple si possible, sans sauce.

Le Jedi sortit sa canne de sa besace en cuir pour la poser délicatement sur la nappe au cas où si la serveuse n'avait rien détecté malgré la manière un peu rigide de se déplacer du Hapien, le dos parfaitement droit et le regard fixe. Sur le plan nutritif, Luke était un peu "lâche", il aimait la nouveauté mais il préférait éviter ce qui était trop saucé ou contrairement à ce qu'avait sous-entendu Karm. - sûrement sur le ton de la plaisanterie- trop épicé. Malgré ses sages propos, lui aussi espérait plaire à son ami, en-dehors de sa simple compagnie. Il faisait inconsciemment à sa manière de se tenir, à maîtriser parfaitement l'emplacement de ses couvert. Il se sentait comme un adolescent mal à l'aise, craignant de tout renverser. Même habitué à cet exercice, la tâche restait ardue pour lui, encore une preuve que parfois, les Jedis se confrontaient à des problèmes tout à fait humains, malgré la Force.

- Ah d'accord. Entendu et pour vous?


Karm Torr
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- Y a des trucs épicés ?

Oui parce qu’il ne plaisantait pas. En bon guerrier et en explorateur de l’extrême, Karm aimait les sensations fortes et, à défaut d’être assez éduqué pour apprécier les plats les plus raffinés et l’infinie nuance de leurs saveurs, il était friand des spécialités locales au goût surprenant.

- Oui mais ce n’est pas exactement… Enfin, c’est assez particulier, vous savez, précisa la serveuse, avec assez de diplomatie pour ne pas froisser le sens de la virilité de son client, parce qu’elle savait que certains hommes mettaient un point d’honneur à montrer qu’il pouvait croquer dans des piments crus sans pleurer.
- Encore mieux, s’exclama le jeune homme.

Puisque le client était roi, la serveuse tapota sur son datapad avant de laisser les deux jus de fruit derrière elle et les Jedis reprendre leur conversation. Rassuré par les propos de Luke, Karm se contenta d’abord de fixer son compagnon avec un sourire un peu benêt qui ne laissait guère planer de doute sur la nature de leur relation. L’Ark-Ni n’était définitivement pas la recrue idéale pour les missions d’infiltration.

- Euh, oui, donc, reprit Karm, dont les pensées de moins en moins innocentes mais de plus en plus admiratives étaient venues caresser Luke à travers la Force, je pense pas que les gens aient beaucoup de mal à nous repérer, t’sais. Disons que… C’est pas qu’ils se ressemblent tous ni rien mais on détonne clairement dans le paysage, visuellement, j’veux dire. Toi, t’es objectivement le plus canon à des kilomètres à la ronde. Et moi… Ben, tu sais, j’ai les cheveux gris. Enfin. D’une couleur bizarre, oui. Et mes yeux sont… Un peu comme des lampes. Hmouais, y aurait sans doute une manière plus poétique de tourner la chose.

En réalité, Karm n’était pas trop mal dans son genre, pour peu qu’on ne fût pas rebuté par les traits androgynes et les regards étranges. Le Chevalier avait d’ailleurs un petit succès auprès des Padawans adolescentes de l’Ordre, qui venaient moitié de son physique, moitié de sa réputation de guerrier, mais il ne s’en rendait pas vraiment compte. Il était habitué à penser à son apparence en termes stratégiques, comme le lui avait enseigné Tavaï : ne pas avoir l’air menaçant ménageait de précieux effets de surprise.

- Quant à Ekkt, c’est un Tandoshan, donc, hm. Un reptile géant. Il passe difficilement inaperçu. Même si je parie que quand il le veut, personne ne remarque qu’il est là. Mais c’est pas grave, les gens ont pas l’air spécialement hostile. Reconnaissants, plutôt, je dirais, et probablement rassurés qu’on soit là. ‘Fin, j’espère qu’Assayanah récolte l’essentiel du mérite, quand même, c’est elle qui est là depuis u[/n moment.

La reconnaissance publique ne l’avait jamais beaucoup touché, si ce n’était comme l’assurance qu’il avait bien agi. Karm était sartisfait par la conformité qu’il sentait en lui-même entre ses actions et ses principes moraux et la quiétude de sa conscience était une satisfaction suffisante à ses yeux.

[color=#00ccff]- J’avoue que je préfère quand les gens savent pas que je suis un Jedi. ‘Fin, nan, c’est pas ça, c’est juste… Y a tellement de gens au sein de l’Ordre qui se sentent spéciaux. Et c’est vrai, on est vachement spéciaux, mais c’est pas forcément… Ce que je veux dire, c’est qu’on prône le détachement, la sobriété, et tout ça, mais il me semble qu’on se méfie pas assez de l’orgueil. Y a parfois même de l’orgueil dans l’humilité excessive. Je sais pas comment dire. J’imagine que..[/navy]

Comme Luke avait pu s’en rendre compte bien des fois, les discussions parfois les plus anodines avec Karm pouvaient prendre brutalement une profondeur toute philosophique, au gré des raisonnements compliqués et, il fallait bien l’avouer, un peu obscurs de l’Ark-Ni. On aurait juré que le cerveau de Karm carburait à plein régime en permanence, mais avec une logique bien à lui qui ne se laissait pas toujours attraper par les mots. Ce qui était certain, c’était que le jeune homme réfléchissait beaucoup, et intensément, sur l’Ordre, sur ses principes et sur les différents aspects de leur sacerdoce.

Il eut le soupir caractéristique qu’il avait toujours quand il renonçait à exprimer les idées qui se bousculaient dans sa tête. Trop compliquées.

- ‘Fin bref. Je saurais pas expliquer. En fait, t’sais quoi, je vais égoïstement te forcer à apprendre l’ark-ni. Après, faut avouer qu’on est peu nombreux, c’est pas la compétence linguistique la plus utile du monde.

Il s’interrompit parce que la patronne apportait les plats. Un remerciement plus tard et la conversation pouvait reprendre.

- Il paraît que le Conseil va relancer la mission diplomatique. Avec la Flotte. Probablement nous la confier à nouveau. Si jamais ça t’intéresse toujours, j’veux dire. Mais j’pense que tu serais parfait pour ça. T’as un petit côté ark-ni toi-même. Bon, t’as plein de côtés qui le sont pas du tout, mais alors vraiment pas, mais c’est ce qui te rend encore plus intéressant.
Luke Kayan
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[HJ: J'ai voulu te mettre des trucs dégoûtants dans le plat huhu mais je n'ai pas osé! Donc je laisse Karm découvrir ce qu'il y a dans son potage!]

Luke rit à l'évocation des yeux-lampes de son ami. Il ne savait pas vraiment comment se les représenter mais vu l'utilité de cet objet (on avait eu du mal à lui expliquer qu'il existait quelque chose pour aider des voyants à voir encore mieux, petit, il avait alors rétorqué qu'avec l'une d'entre elles, il devrait alors réussir à voir légèrement puisque c'était sensé améliorer cette capacité naturelle.), le regard de son ami était certainement insolite, lié à ce dernier.

- C'est pour équilibrer, les yeux lampes, puisque les miens sont éteints, on fait la paire.
- Était-ce là, la tournure poétique que cherchait Karm? Luke haussa ensuite les épaules lorsque son ami le décrivit comme étant objectivement le plus canon à des kilomètres. Il resta ensuite pensif un moment. On lui avait enseigné les couleurs via le toucher. Le rouge était le feu, le vert l'herbe, le blanc le coton etc.- Le gris est doux comme de la laine. J'aime le gris.




- Objectif, hein.- Railla-t-il, persuadé que le Chevalier en faisait des tonnes, des tonnes à propos d'un concept échappant toujours à Luke d'ailleurs, bien qu'il le prenne comme un compliment. Il aimait être "canon" pour Karm.- C'est ça... Par contre, j'espère effectivement que Soeur Assayanah recevra les lauriers. Heureusement nous nous sommes promis de garder contact, donc nous pourrons avoir de ses nouvelles. - Cela n'arrivait pas souvent, surtout que l'initiative dépassait les prérogatives professionnelles, cependant la religieuse était parvenue à vraiment toucher le coeur de Luke.-

Bien vite, et contrairement à ce que croyait l'Ark-Ni, la conversation fut alimentée- avant eux- par des sujets aussi diverses qu'intéressants. Malgré son intonation parfois rustique, l’aîné du duo possédait également des capacités de réflexions intéressantes, de quoi rendre jaloux le second, car encore une fois, on touchait à l'un de ses domaines de prédilection. Au lieu de ça, Luke se sentait juste un peu gêné parfois d'être avec quelqu'un capable de se défendre sur autant de fronts, et fier aussi. Avec un petit sourire semblant dire "tu vois" à Karm qui s'inquiétait d'être ennuyeux, Luke entreprit de répliquer. Tous deux avaient une vision des choses assez différente en ce qui concernait l'Ordre, sur certains points, autant qu'un voyant et un aveugle, littéralement et philosophiquement parlant. Par contre, aucun n'attaquait, ils aimaient juste chacun à leur manière leur cause. Le Consulaire avait eu peur au début, puis il avait fini par se rassurer en se rendant compte de l'implication de son ami. De fait, Karm était au moins aussi sérieux, professionnel et fidèle que lui, l'opposition entre eux était donc aussi douce qu'enrichissante, rien à voir avec Jason qui ne parvenait qu'à mettre son jeune amant sur la défensive.- et il en fallait pour raidir Luke de la sorte.-

- J'ai déjà vu l'orgueil aussi chez les nôtres et je crains constamment de m'y adonner. Cela dit, lorsque l'idée seulement s'approche de mon cerveau, je me pose et je réfléchis. Quel mérite avons-nous à part la chance ? C'est la discipline qui nous permet de nous entraîner mais sans la Force rien ne serait possible. Communiquer avec elle est un privilège offert par le hasard, donc nulle raison d'être fier. Un enfant de la Force n'est pas choisi parce qu'il est exceptionnel à la naissance, il peut se laisser influencer par les mêmes tentations qu'un autre, voir y succomber plus rapidement encore. Nous ne sommes que des hommes que la Force a accepté d'aider.

Luke pensait effectivement que les civils et les Jedis étaient égaux, en fait il donnerait même une légère supériorité aux humains, capables de s'adapter dans aucune aide.

- Tu sais, un handicapé sans la Force me semble bien mieux armé, plus méritant que moi car je triche honteusement.

Si le Chevalier était limité mais il pouvait quand même se promener sans canne dans un lieu relativement bondé et inconnu, pareillement, il arrivait à courir sur quelques centaines de mètres, bien que souvent, il finisse à terre.

- Enfin tout cela, c'est ce que j'essaye d'expliquer aux Padawans qui se montrent trop orgueilleux, et les réflexions que je m'impose si je vois que mon égo prend du volume.

Là où le Hapien cependant ne se rendait pas compte de son mépris, c'était envers les Siths. Après avoir eu un passé trouble, puis été kidnappé chez eux, il estimait que sauf exception ces derniers refusaient d'affronter les difficultés et se tournaient vers la voie facile, celle des sentiments en désordre, d'une discipline chaotique, sans parler de pulsions animales qui insultaient souvent les propres animaux. Le jeune homme n'avait que très peu de tolérance ou de larmes face aux histoires parfois cruelles des apprentis Siths. Il pouvait à la rigueur compatir avec l'un d'entre eux condamnés dès tous petits, mais certainement pas les enrôlés de plus de 15 ans et encore moins les ex-Jedis. Ceux-ci étaient de la pire espèce, ils ne méritaient que la considération froide, professionnelle de l'agent de la loi qui les capturaient puis les enfermaient. Sans préconiser leur torture évidemment, ni leur éradication, Luke n'éprouvait aucune pitié pour eux, pas plus qu'il n'en avait eu pour feu Lord Janos qui s'était arraché les yeux.

- En ce qui concerne ce soir, j'aurais aussi préféré que la serveuse ne connaisse pas notre identité car je n'aime pas la déférence avec laquelle on nous traite parfois. Nous sommes tous égaux comme je le disais, mais les citoyens ont tendance à mésestimer leur vie, leur propre valeur. Enfin je crois. C'est peut-être pour cela qu'ils achètent tant, recherchent les propriétés, les véhicules chers ou les plats hors de prix. Peut-être est-ce aussi comme la beauté? Cette fameuse beauté, invisible à mes yeux, indéchiffrable. Tout ça, toutes ces possessions sont-elles si belles qu'il est difficile de leur résister?

Interrogea le Hapien tout en s'interrogeant aussi lui-même.

- J'aime me sentir Jedi parce que c'est notre Ordre.
- "Notre famille"... Mais ils n'étaient pas sensés s'attacher autant, n'est-ce pas?- et cela me rappelle nos devoirs. Cela dit, c'est vrai que dans un monde idéal, seuls ceux qui ont besoin de notre aide pourraient nous repérer.

Comme si l'urgence pouvait donner un accès provisoire à la Force, laissant les curieux, les aigris ou les mielleux à distance. Rêve fou, songe de gamin. Luke sourit pour lui-même tandis que la serveuse revenait, jetant un regard de biais à Karm. Elle semblait lui demander " vous en êtes vraiment sûr?" tout en tendant un grand bol où flottait une soupe épaisse brune, saupoudrée de rouge, la couleur inter-galactique des plus puissants piments, comme un avertissement universel. Quant au breuvage, son épaisseur ne laissait pas deviner ce qui y nageait, l'Ark-Ni aurait le loisir d'y découvrir ce qui s'y trouvait. Le fumet préoccupa légèrement le Jedi plus prudent qui reçut avec grand soulagement une salade avec du fromage d'une espèce locale, des noix et autres fruits secs. Un repas aussi diététique que commun, le Hapien se sentit légèrement peiné de ne pas profiter de son séjour mais avec sa cécité, il préférait largement rester sur des choses simples, sans sauce ou épices ayant tendance à salir ou s'éparpiller, dans le domaine culinaire, il n'avait jamais été courageux.

- Quant à la modestie abusive [HJ: Merci de me rappeler que j'ai une adorable élève très douée rendue à un stade +++ de cette maladie demain première heure Razz] - elle est soit maladive, générée par un manque de confiance en soi extrême, soit issu d'une manipulation psychologique, ou l'individu cherche en réalité à obtenir plus de compliments. Dans les deux cas, j'admets que j'ai parfois du mal à garder ma patience.

Et il en fallait pour ébranler l'impassible Luke, mais lorsqu'il se rappela d'une Padawan de ce genre, un frisson parcourut son échine dorsale. Eva [HJ: Non ce n'est pas le nom de mon élève!] était douée mais très complexée. Même lorsqu'elle réussissait l'exercice mieux que les autres, elle estimait ne pas avoir réussi et se maurigénérait à haute voix. Les autres élèves d'abord attendris peinaient désormais à la supporter, parfois certains, moins bons, se sentaient vexés car si la prestation de la première de la classe semblait modique, quelle note pouvait avoir la leur? Les tensions générées étaient vraiment insupportables, d'autant plus que Luke doutait encore entre un traumatisme et un désir de s'auto-complaire en recevant des compliments destinés à la rassurer par poignées.

- C'est également très dangereux.

Conclut-il simplement en poussant un léger soupir qui accompagna le bruit caractéristique émit par son cher et tendre qui avait bloqué. Pas de souci, Luke décodait à force, de la même manière que l'Ark-Ni avait acquis le pouvoir de ne pas s'endormir face à ses discours. Pire encore, le masochiste semblait les apprécier.

- Je vous donnerai le nom du plat ensuite, je préfère vous laisser découvrir -Signala la quinquagénaire, plus détendue qui s'était piquée (c'était le cas de le dire) au jeu. Luke lui jeta un regard interrogateur mâtiné de suspicion, guidé par le son de sa voix. Il n'avait pas spécialement envie de devoir faire de la réanimation à l'hôtel. Certains plats, lui avaient enseigné sa formation en médecine, pouvaient être dangereux pour des étrangers. Ces avertissements avaient achevé de le rendre frileux à l'idée de se montrer aventurier dans le domaine.- Bon appétit.

Le Consulaire légèrement inquiet ne put s'empêcher de retenir le ton un peu trop joyeux de la femme. Elle s'amusait déjà, pouffant dans son tablier. Lui, choisit de ne pas vexer celui qui savait certainement ce qu'il faisait et entreprit de répondre.

- Ce serait une excellente idée. - Même s'il savait que c'était plus une expression qu'autre chose, Luke avait saisi l'occasion au vol pour ajouter l'apprentissage de l'Ark-Ni à la longue liste de travail personnel qu'il s'imposait. Ce n'était pas une langue répandue certes, mais cette fois-ci, l'affection suffisait en guise de motivation. - Et bien sûr, j'aimerais continuer cette mission. Ses débuts ont été si terribles... Et malgré tout, beaux. C'est égoïste de ma part mais je m'en souviens avec une certaine tendresse bien que je n'oublie pas tous les disparus... Elle nous as permis de... Tu comprends...

Voilà, lui non plus ne savait pas s'expliquer correctement. Un sourire d'excuse plus tard pour cette interlude et le Hapien entamait sa salade tout en hochant la tête. Oui, il voulait continuer.

- Développe? Je suppose que ce n'est pas pour les yeux-lampe en tout cas.

Interrogea-t-il après sa plaisanterie qui lui avait arraché une mimique amusé. En attendant, curieux de savoir en quoi il était Ark-Ni et surtout en quoi non, il abordait une mine concentrée. Cela dit Luke fixait probablement son ami avec une telle intensité qu'il semblait réellement le regarder parce qu'il voulait aussi "voir" ses réactions lorsqu'il goûterait son plat. Vu les simagrées de la serveuse, il était un quart amusé et les trois autres quarts franchement inquiet.
Karm Torr
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- Cool, on dirait qu’y a des larves.

La cuiller de Karm fouillait dans le potage avant d’y goûter et les vers gluants qu’elle ramenait à la surface ne semblait pas le décourager le moins du monde. Une vie d’explorateur lui avait appris à faire preuve d’une tolérance hors du commun pour tout ce qui était susceptible de fournir des protéines et il avait découvert que les habitudes culinaires pouvaient être radicalement différentes, d’une civilisation à l’autre, même quand il n’avait affaire qu’à des humains.

D’abord élevé à la nourriture aseptisée et purement pragmatique qui avait cours dans les vaisseaux ark-ni, puis aux rations énergétiques que Tavaï lui avait imposées pour compenser la faiblesse de son développement musculaire, Karm avait développé, depuis qu’il s’était libéré de la tutelle de son ancienne Maître, une curiosité pour les sensations extrêmes. Une première cuillérée de potage lui fit aussitôt monter les larmes aux yeux.

- Wow.
- On appelle ça le Secret du Palmier. Les petites larves vivent à l’intérieur de l’écorce des arbes à palmes que vous avez dû voir en ville et elles produisent une substance inoffensive mais au goût très particulier, qui sert à décourager les prédateurs.
- C’est trop bon.

La patronne eut un rire léger avant de les laisser à leurs plats. Habitué à la douleur, Karm avait appris à s’en faire une amie. Peut-être y avait-il même en lui les germes d’un masochisme véritable, une disposition de l’esprit du reste assez commune, chez les Jedis, qui s’imposaient des exercices rigoureux que bien des sociétés auraient considéré comme de la pure maltraitance. En tout cas, le goût de potage ne l’avait pas découragé.

- T’es très ark-ni dans le sens où t’es calme, et respectueux des autres, et capable d’entendre leurs opinions diverses. Chez nous, c’est vraiment absolument nécessaire que tout le monde garde son sang-froid dans toutes les situations, sinon, la moindre avarie créerait des catastrophes. Alors les gens sont pas incités à se montrer exubérants ou rien, et on garde ses particularités… Pas pour soi, mais tu sais, discrètes. Comme toi. Toi, tu dis volontiers que t’es un mec sans histoire et soporifique, mais la Force sait que c’est pas vrai. T’es passionné et fervent, compliqué et original, juste, tu l’étales pas devant tout le monde. Et ça, c’est très ark-ni.

A certains égards, on pouvait même considérer que Luke correspondait souvent beaucoup plus à ses standards de l’étrange société nomade qu’à Karm, qui était de toute évidence un marginal au sein de l’Ordre. Un marginal plein de sang-froid, qui ne cherchait pas à faire la révolution, mais qui ne cachait pas pour autant ses opinions fort hétérodoxes. C’était une liberté que l’Ordre, malgré toutes ses traditions, ses structures et ses habitudes, lui avait offerte, et qu’il n’aurait jamais connue parmi les siens.

- Par contre, ton attachement à l’ordre… J’veux dire, les faits que les choses soient ordonnées, hein, pas notre institution… Ton attachement aux protocoles, et tout ça, par contre, c’est vraiment très étranger à ma culture natale. L’esprit ark-ni, ça part un peu du principe que chaque situation est unique, exige des réponses uniques, et une sorte de… Bricolage. Ouais, j’ai lu des traités d’anthropologie qui parlaient de bricolage, et c’est vraiment ça. Y a pas de solution admise ni d’ordre établi chez les Ark-Ni. Y a pas de chefs qui auront toujours raison, ni même de principe pour décider de qui devrait faire quoi. C’est une espèce de négociation permanente avec le réel. Longtemps, j’ai cru que ça, ça avait disparu complètement chez moi, mais en fait, je me rends compte que c’est vraiment profondément ancré. J’ai juste appris à m’adapter un peu à l’Ordre et à ses façons de faire.

Du reste, il n’était pas le seul Jedi à percevoir sa place au sein de l’institution à l’aune de la liberté. Nombreux étaient ceux qui ne suivaient que de loin les directives du Conseil et qui, avec une adhésion stricte au credo Jedi, au Code, à la discipline, n’en menaient pas moins les missions qui leur semblaient bonnes. Ces solitaires n’apparaissaient parfois que rarement aux Temples, même si, au fond, l’on savait pouvoir compter sur eux quand la situation l’exigeait réellement.

- Après, y a aussi...

La voix de Karm se fit un peu hésitante et il s’accorda un moment pour réfléchir. Et pour bien saisir la texture d’une larve contre ses papilles. Décidément, ce potage de feu était fort enthousiasmant et le jus de fruit offrait un soulagement constant aux cuillérées trop épicées. Il reprit le fil de ses réflexions, en espérant ne pas froisser Luke.

- Ben y a le fait que les Ark-Ni sont pas… Disons que le genre, c’est pas trop ça. Euh… Enfin, les mâles ark-ni ne sont pas forcément super virils et tout. Et la plupart des gens réfléchissent jamais au fait d’être homme ou femme, c’est des concepts assez étrangers.

En réalité, avec son entraînement dans une gravité plus exigeante que celle des vaisseaux, et ses muscles plus développés, Karm était probablement l’un des Ark-Ni les plus virils de la Galaxie, et pourtant, on le confondait souvent avec une femme. Il ne cherchait d’ailleurs jamais à reprendre les gens qui lui parlaient au féminin, parce que c’était une considération qui l’indifférait profondément. C’était l’une des raisons pour lesquelles le goût exclusif de Luke pour les hommes lui échappait.

- Et, bon… ‘Fin, tu es aussi… T’es pas un bûcheron velu avec une grosse voix, tu sais ? ‘Tention, c’est pas une critique. Je sais que dans plein de cultures, les mâles doivent être de vrais bonhommes et tout. Et j’aime bien ça aussi, au fond. Mais toi… Toi, tu as cette poésie ark-ni qui joue sur les deux tableaux. J’aime que tu sois fragile, j’aime que tu sois léger, et gracieux, et tes cheveux longs, et tes lèvres. Ta peau douce. Les poètes ark-ni composeraient sur toi les plus belles des chansons amoureuses.

Silence.

Et puis, très timidement, Karm avoua :

- … moi j’ai composé des musiques sur toi...

C’était bien la première fois que l’Ark-Ni disait quelque chose comme ça. Luke avait bien senti, lorsqu’ils maniaient la Force en commun, que les conceptions de son compagnon, les métaphores sur lesquelles il se reposait, étaient toujours sonores et mélodiques, mais jamais Karm n’avait évoqué sa passion secrète pour la musique. Ses instruments étaient restés rangés sous son lit. Il ne savait pas très bien lui-même pourquoi il était resté si discret sur la question avec Luke. Peur d’être ridicule, sans doute. De ne pas être à la hauteur des concerts virtuoses auxquels le Consulaire avait sans doute assisté dans le cadre de ses fonctions diplomatiques.
Luke Kayan
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Luke dut fournir de gros efforts pour adresser à la serveuse - ou au vide tout près d'elle, peu importe.- un sourire poli et intéressé. Ce ne fut que lorsqu'elle parti qu'il libéra une expression de dégoût, discrète mais remarquable. Des larves? Le jeune homme en avait un jour touché par mégarde en jouant dans la nature, et non, il ne supportait pas ces petites visqueuses. Qu'elles restent sous terre si elles étaient si utiles dans la nature mais lui épargnent leur toucher répugnant, leurs mouvements chaotiques dans ses mains, et surtout un goût qu'il présumait horrible. C'était un peu superficiel de sa part, mais cela collait avec le personnage, puisque Luke était vraiment le type de fonctionnaire qui adorait les défis dans son domaine, tout en craignant les autres secteurs. Sa curiosité le poussait parfois à sortir de ses connaissances, comme par exemple l'apprentissage de l'Ark-Ni ou même celle de l'informatique, d'ailleurs il était devenu guérisseur par hasard, mais en question de toucher ou de goût, il faisait bien attention où ses doigts, sa langue se posaient. Sa cécité n'avait fait qu'empirer son appréhension pour ce type de risques inutiles. Décidément, l'adaptation aux coutumes, il était totalement en faveur de l'intégration, ne serait-ce que pour le respect de la population visitée, mais qu'on ne lui offre surtout pas un plat comme le Secret du Palmier.

- S'il te plaît -Commença-t-il sur le ton de la confidence.- Dis-moi qu'il n'y a pas de "secret" dans ma salade.

Retenant un haut-le-coeur, le Hapien posa prudemment sa fourchette, dans le cas où un vers décidait de grimper le long du manche pour se poser sur sa main-Oui parce que tant qu'à faire, ils les servaient sûrement vivants-. Karm, que le Jedi contemplait avec une certaine appréhension désormais, avait raison, ils avaient des points communs, mais aussi de nombreuses différences. En soi, c'était la promesse d'un enrichissement, sachant que ce qui les réunissait était un pilier important.

- J'aime bien l'idée que chacun puisse s'exprimer, négocier , c'est d'ailleurs ce que l'Ordre prône, les Padawans doivent dire ce qu'ils pensent -c'était en partie illusoire, mais Luke ne s'était jamais senti brimé. Sans doute parce que ses questions n'avaient jamais outrepassé le seuil de la norme ou de ce qui était jugé incorrect.- et par la suite, un adulte les corrige. Les maîtres ont un rang plus élevé car ils ont de grandes connaissances, et je pense que la hiérarchie permet aux jeunes d'avoir conscience du chemin qu'il leur reste à parcourir, tout en refrénant leur arrogance.- Sans aînés à qui se confier, à suivre, le blond se serait senti perdu, surtout dans un océan d'opinions où les poissons ignorants étaient parfois ceux qui gigotaient, nageant et virevoltant le plus, avec la prétention de savoir où ils allaient.- Un juste milieu serait parfait. Par exemple, je n'aime pas que mon rang force des apprentis desquels j'ai beaucoup à apprendre, à me parler avec déférence, je préfère effacer les barrières... Mais je considère que Saï Don doit être classé à part, c'est un de nos guides, comme Maître Ekkt. Si personne ne sort du lot, on n'a pas fini d'entendre les gens se disputer pour avoir raison... Les Ark-Nis doivent être si raisonnables et si humbles.

Murmura Luke, rêveur. Il concevait une civilisation comme la leur, pas vraiment féru des grandes révérences, mais l'imaginait mal dans son monde à lui. Les rangs étaient utiles pour guider les plus jeunes, nécessaires afin de remettre en place les turbulents. Y compris lui qui avait parfois dû reprendre des apprentis sur le mauvais chemin. Son rang était le dernier rempart à imposer pour éviter une dispute d'éclater, physiquement dans les cas les plus graves. Il ne comprenait donc pas vraiment comment la société de son ami faisait pour gérer le quotidien avec autant de souplesse, suggérant qu'une fillette de 6 ans pouvait répondre à un ancien. C'était sûrement la preuve d'une immense sagesse que Luke mourrait d'envie de rencontrer.

- Par contre sur l'autre point, nous sommes d'accord et je ne suis pas prêt de changer d'avis, je me sens homme, et je ne serais non pas... Humilié- car être une femme n'est pas une insulte.- mais... Hum... déformé. Je veux dire que le fait d'être un homme marque en partie mon identité. Il arrive que certains ou certaines sentent qu'ils ne sont pas nés dans le bon corps, ils voudraient être femme alors que biologiquement parlant, ils sont hommes ou vice-versa, toutefois l'idée reste la même, ils ont tranché, choisissant une identité. Plus rarement mais quand même, il existe des gens qui revendiquent leur appartenance au troisième sexe, c'est-à-dire qu'ils refusent l’appellation homme ou femme. J'admets ne pas avoir vraiment creusé le sujet, mais je trouve ça aussi étrange que respectable. Moi je ne suis pas spécialement viril, certes, cependant je me sens totalement homme. À ce qu'il paraît, ma race joue sur le physique, et je ne sais pas pourquoi mais je n'ai jamais eu de barbe ni de moustache. Mon apparence -selon divers propos déjà- et mon orientation sexuelles correspondent au stéréotype par pur hasard en fait.

Si Luke avait ces connaissances, c'était parce qu'il l'avait étudié dans un chapitre de médecine intitulé le " la santé du corps, le bien-être de l'esprit." Il avait, comme précisé, trouvé l'idée très bizarre voir un peu saugrenue mais ne s'en était pas offusqué. Sa limite à la tolérance était comme dans de nombreux domaines "tant que ça n'empiète sur la liberté de personne."

- Hey, je ne suis pas fragile!

Fit-il en adoptant un air faussement courroucé. Son visage se détendit et il rit légèrement, s'imaginant avec une barbe et une grosse voix. Jason était plus viril que Karm, sans en arriver au stéréotype décrit par son compagnon, plus jeune, il avait apprécié cette empreinte masculine qui lui manquait. Aujourd'hui, chez l'Ark-Ni, son supposé côté androgyne ne le dérangeait pas du tout. Luke avait besoin que ce soit un homme -il serait incapable d'expliquer son attirance unique lui-même, d'ailleurs personne ne semblait avoir résolu le mystère.- mais au-delà de ça, l'esprit particulièrement, comptait.

- Oh! J'aimerais les écouter!


Luke s'était empourpré comme rarement auparavant, de la même façon, sa voix habituellement douce avait augmenté de volume, bien que cela ne dérange pas les voisins. Il toussota pour faire passer son enthousiasme fulgurant puis planta ses yeux sévèrement en direction de l'Ark-Ni. Après un tel aveu, son ami ne s'échapperait pas. Il avait intérêt à les lui montrer. Désormais très curieux et quoiqu'il en dise, flatté, Luke essayait d'imaginer quel rythme pouvait avoir la balade. Ce serait mieux, il en était certain, que les rares concerts ou opéras auxquels il avait accédé lors de réunions avec de riches sénateurs capricieux.

- Tu sais tous les concepts que tu m'as expliqué m'intéressent vraiment, j'adorerais aller sur ta planète. Pour la mission certes, mais aussi... Pour le reste. Alors j'imagine qu'on ne va pas pouvoir partir "en vacances" comme les civils, cela dit, si l'occasion nous en est donné, je serais honoré. Je ferai tout pour ne pas froisser ta famille et correspondre à vos coutumes.

Dit Luke d'un ton beaucoup plus bas, comme s'il s'appropriait déjà le peu qu'il connaissait de leur culture. Cette promesse n'était qu'une réitération de celle faite sur Vonghaï, déjà sincère mais moins profonde. Aujourd'hui, il y avait bien plus qu'une simple curiosité scientifique.

- Sauf culinaires... Tu m'excuseras.

Acheva le jeune homme avec une autre grimace, persuadé que son ami appréciait les mets spéciaux à cause de sa culture originelle. Peut-être que les Ark-Nis élevaient des vers semblables dans des serres sur leurs vaisseaux? Il prit son verre mais hésita à y tremper les lèvres, attendant d'avoir l'aval de Karm. On ne savait jamais si quelques larves avaient aussi été glissé dans son jus de fruits.
Karm Torr
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- Promis, ton plat a l’air on ne peut plus normal. La boisson aussi. Je te vanterai pas le mien non plus. Mais c’est une expérience culinaire intéressante. Faut dire que quand on échoue en pleine nature sans ration de survie, on apprend à faire contre mauvaise fortune bon coeur.

Ce petit interlude lui permit de trouver le courage d’accepter d’accéder à la requête de Luke.

- Mes instruments sont sur Ondéron. J’ai un… Une sorte de violon ark-ni. Enfin, y a pas de règles très précises mais disons que c’est un instrument à cordes qu’on fabrique avec des chutes de métal et de câble, après des réparations. Ils ont tous un son un peu différent, du coup, c’est quelque chose d’assez personnel. Et puis une sorte de… truc électronique. Difficile à décrire, mais en gros, ça joue avec le magnétisme et le courant, pour faire vrombir. Je te montrerai.

Une pudeur d’artiste l’empêchait de se lancer dans de longues explications : pour la musique, Karm était de ces passionnés qui préféraient s’adonner en secret à leur art que de le montrer à tous. C’était peut-être ce qu’il avait de plus intime et, en quelque manière, de plus fragile. Le souvenir de la culture à laquelle on l’avait arraché et à laquelle il n’aurait jamais souhaité retourner, mais qui continuait à tant l’influencer. Et puis, il y avait tous ces vrais artistes jedis, parmi les Artisans, beaucoup plus talentueux que lui, qui offraient des méditations particulières à travers la musique, la peinture ou la sculpture, la danse souvent, et permettaient d’approcher la Force grâce à la sensibilité esthétique. En comparaison, Karm ne s’estimait pas très impressionnant.

D’ailleurs, quelque peu embarrassé, il s’empressa de changer de sujet.

- J’ai pas de planète, hein, tu sais. En fait, avant de rentrer dans l’Ordre Jedi, j’avais jamais mis les pieds sur une planète. J’ai pas non plus de famille, j’suppose, enfin pas au sens où les gens l’entendraient par ici. Plus une communauté. Enfin, j’avais une communauté, mais les Ark-Ni sont pas exactement réputés par garder le contact avec ceux qui font le choix de vivre à l’extérieur. Le cosmopolite, c’est pas exactement leur marque de fabrique.

Comme il arrivait souvent, Karm était passé de la première à la troisième personne pour évoquer son peuple natal, selon qu’il parlait d’aspects dont il se sentait proche ou au contraire des caractéristiques qui le rebutaient le plus.

- C’est sans doute pas super patriotique de dire ça, mais faut bien avouer que je suis pas fâché de pas avoir grandi là-bas. Ils sont pleins de bons côtés mais c’est un monde étroitement enfermé par les coursives des vaisseaux. J’espère qu’un jour, cette société évoluera vers quelque chose de différent, même si je vois pas trop comment.

Il finit par repousser son potage achevé. La dernière cuillérée lui valut une petite quinte de toux, apaisée par le jus de fruit.

- Après, faut avouer que je me sens pas spécialement républicain non plus. Sur le papier, la démocratie pourquoi pas, mais j’ai pas l’impression que la représentativité marche tellement bien que ça, et je parle même pas du libéralisme économique. Je comprends bien tous les intérêts de la galactisation, pour la technologie, pour la culture, pour le brassage et tout ça, mais la République, ça me paraît souvent une super-structure technocratique assez éloignée des préoccupations du commun. Mais un mal nécessaire, je suppose, surtout pour faire face à l’Empire.

Dans un monde idéal, il aurait aimé que l’Ordre Jedi soit plus pleinement indépendant du monde politique et il ne comprenait toujours pas comment des Jedis avaient pu justifier de se porter à la tête de la République en tant que chancelier. Les Généraux Jedis étaient la limite de ce qu’il parvenait à accepter, en termes d’indistinction entre les deux institutions, et il lui fallait la présence menaçante de l’Empire pour les admettre.

- Parfois, j’ai vraiment peur du moment où l’Empire arrêtera de faire la guerre des armes et se mettra à faire la guerre des idées, parce que je suis pas bien sûr que les politiciens de la République soient tout à fait près à ça. ‘Fin bon...

L’Ark-Ni haussa les épaules, un geste qui échappait probablement à son compagnon.

- C’que j’en dis, moi, j’y connais pas grand-chose à tout ça. C’est de l’analyse de comptoir. Quasi littéralement. Puis c’est pas super joyeux, comme sujet, désolé. Tu veux qu’on aille prendre un dessert ailleurs ? J’ai vu un Hott Délice pas très loin.

C’était une chaine de glaciers dont les magasins standardisés s’éparpillaient un peu partout dans le Noyau, et parfois un peu au-delà.

- Au moins, là-bas, t’es sûr que tu tomberas pas sur quelque chose de suspect. Puis par cette chaleur, une glace, ça fera pas de mal.

Apparemment, son expédition frigorifique de l’après-midi ne l’avait pas découragé.
Luke Kayan
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- J'ai vraiment hâte.

S'enthousiasma Luke en rougissant malgré lui. Un instant rêveur, il touilla sa salade sans y toucher bien qu'il la savait désormais normale, sans trace de lombrics.

- Humpf, je sais. Je connais la faim.

Fit-il sans se défaire de sa voix songeuse, ce qui contrastait particulièrement avec sa phrase. Plongeant dans ses souvenirs, le Hapien se rappela vaguement de la forme du bocal qu'il essayait d'ouvrir de ses petites mains puis via la Force. Sa mère avait pour politique de ne lui offrir aucun repas digne de ce nom, tant qu'il ne l'aurait pas dignement demandé, justement. Alors affublé d'un retard mental dû au manque de soins, le gamin de trois ans ne prononçait toujours que difficilement quelques mots. Il mourrait de faim. Et cela avait continué jusqu'à ses 7 ans, jusqu'à ce qu'on le sorte de cet enfer. Étrange. Le Jedi ne se rappelait pas être capable de se rappeler avec tant de précision de ce fichu pot à gâteau dérobé, qu'il lui fallait désormais ouvrir. Saleté de bocal, il avait dû réussir une fois à y glisser les doigts pour dévorer les mets. Ce jour-là, sa mère ne l'avait pas puni, le félicitant au contraire d'avoir trouvé une autre voie, sibylline, certes, de parvenir à son but. Luke cligna des yeux, effaçant ses souvenirs et le nuage qui avait assombri un instant son regard. Le présent apaisa son coeur qui avait commencé à battre plus vite. Il n'était pas avec Maria, sinon avec Karm, et il pouvait se nourrir.

Avec une joie renouvelée, le Hapien plongea sa fourchette dans la salade qui, sans être un délice absolu, n'était pas mauvaise. En un mot, simple, cela lui convenait.

- Je suis d'accord avec toi. Je pense que l'Ordre devrait se maintenir éloigné de la politique.

Conclut le Jedi sans réellement savoir qu'il venait de résumer le fond de pensée de son ami. Aussi fidèle soit-il à la constitution, le jeune homme ne croyait plus en un pouvoir bon, incapable de céder à la corruption. Il avait vu (et oui bien vu, tant c'était flagrant!) la République utiliser les Jedis ou se retourner facilement contre eux.-Luke n'était pas un anarchiste mais il ne se sentait pas Républicain non plus. Seulement Jedi. Chacun son rôle. Malgré la bonne volonté de la politique, cette dernière ne pouvait qu’entacher la moralité de l'Ordre. Ils étaient si différents.

- Hum. J'y ai cru, tu sais, à l'Utopie, la grande, la belle, d'un pouvoir honnête, mais il y a toujours des brebis galeuses. Tu me diras, les Siths existent en grande partie parce que l'Ordre aussi à ses défauts- Admit-il plus difficilement mais avec le courage de celui qui se veut sincère jusqu'au bout de son raisonnement.- Cela dit, y compris à cette époque je ne comprenais pas ce que les Jedis avaient à faire avec la République. Nous sommes sensés suivre une certaine philosophie, aider tout le monde. C'est bien difficile à mettre en place. Accepter l'égide de qui que ce soit signifie en soi, renoncer à l'égalité que nous prônons tant, et à se concentrer sur l'étude de la Force ou l'aide pure et simple.

Karm avait également raison sur le fait que les choses ne pouvaient pas être blanches ou noires. -pour peu que Luke se rappelle de la première teinte.- ce qui rendait leur conversation presque stérile. Elle ne changerait rien, cela dit, le Hapien aimait échanger avec son ami.

- C'est intéressant, ne t'inquiète pas. On n'est pas forcé de rire tout le temps. Se reposer veut aussi dire discuter de sujets plus lourds, quoi qu’éducatifs.

Jugea le jeune homme, si peu rompu à l'exercice du repos, tandis qu'il se rendait vers le comptoir. Dans le lointain, il entendit le droïd à nouveau faire des siennes, mais ne se sentit guère coupable. Une histoire de robot, s'il n'était pas tueur, ne les concernaient pas vraiment. Enfin ils auraient certes pu essayer de faire quelque chose, mais la directrice s'en remettrait. Pour une fois, Luke mit de côté son sens du devoir si exacerbé, absorbé par leur conversation.

Il régla la note sous le regard curieux de la serveuse qui était revenue après avoir temporairement arrangé le souci "robot" -Luke avait entendu un grand bruit émaner de la cuisine-. Sous son regard fasciné, le jeune homme sortit un portefeuille qui se composait d'un compartiment pour les billets, ayant toutefois de nombreuses séparations. Luke prenait garde à sortir les plus gros billets, tous de la même sorte, puis ceux plus petits après la frontière en tissu. Il faisait glisser sa main sans jamais la relever afin de sentir les faneuses petites barrières de tissu. Quant aux pièces c'était plus simple car Luke connaissait leur taille.

Le glacier Hott Délice se trouvait assez proche, en effet, Luke commanda après beaucoup d'hésitations, un café à emporter. Il ne voulait pas prendre de risque avec une glace, et avait, du reste, jamais goûté à ce met. Ce dernier le "terrifiait" depuis qu'on lui avait raconté comment, indomptable, il coulait de partout. Au moins, avec son couvercle clos et la paille qui surgissait d'un trou, Luke était sûr de ne pas faire de dégâts. Il proposa à son ami de l'amener dans un parc, la nuit tombait déjà. Assis sur un banc, Luke entendit des rires au loin, puis plus proches. Un groupe d'adolescents s'était installé, ignorants, semblait-il, les derniers événements. Étaient-ils courageux comme leur peuple qui avait décidé de continuer à vivre malgré la dernière attaque, ou insensés? Comme eux, remarque. Luke ne leur prêta guère plus d'attention, de toutes façons un peu mal-à-l'aise avec ce genre de groupe dont la dynamique lui avait toujours échappé, lui, protégé dans son cocon personnel puis dans le temple. Au lieu de ça le jeune homme choisit simplement de reprendre la conversation là où il l'avait laissé, Les Ark-Nis.

- Désolé pour la planète, tu m'avais déjà corrigé en plus.- Avec un sourire, le Hapien se souvint exactement de quand: sur l'aller.- mauvaise habitude et puis surtout, c'est si difficile à imaginer. Si cette société évolue autant, elle disparaîtra. Ce n'est pas un phénomène forcément triste cela dit- essaya de se rattraper, le pas doué en tact, sur le coup.- juste simplement signifier une transformation douce, due à une continuité légèrement variable au fil des siècles. Les Ark-Nis sont ce que tu connais, fermés. C'est l'essence de leur société, non? S'ils changent, ils deviendront autre chose que des Ark-Nis. Mais oui, ce serait bien... Beau. Ils s'ouvriraient au monde.

À nouveau rêveur, le Hapien ignora les rires de plus en plus prononcés des sales gosses, en imaginant les Ark-Nis s'ouvrir enfin un peu. Finalement il lui restait encore un peu d'utopie.
Karm Torr
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- Le truc, tu vois, c’est que si les Ark-Ni s’ouvrent au monde, ils vont récupérer le mauvais comme le bon. Et, j’veux dire, c’est une société qui a plein de défauts mais c’est aussi une culture qui est épargnée par beaucoup de préjugés. Sur le sexe, sur l’âge, sur le genre, sur les classes sociales. Sur la raison. Evidemment, je m’en rendais pas compte quand j’étais enfant, et même au début au Temple, ça me sautait pas aux yeux, mais à force de voyager, je vois bien que c’est quelque chose de précieux.

Rares étaient les mondes où les individus prenaient des responsabilités avec l’assentiment collectif sur la foi de leur seul mérite et si, bien sûr, cette culture du consensus devait beaucoup à l’homogénéité, elle n’en ouvrait pas moins des perspectives inédites. Au bout du compte, Karm était peut-être le plus chanceux parmi les siens : il avait profité de ce premier fondement éducatif qui lui permettait d’avoir les idées libres et vastes, et, au sein de l’Ordre, il avait été ensuite confronté à une diversité qui lui avait offert un tempérament plus fort et des envies plus vastes que celles de la majorité des Ark-Ni.

- J’aimerais bien savoir ce que sont devenus les autres Tak-No. Les, euh… Les gens qui ont fait le choix de vivre dans la Galaxie plutôt qu’avec la Flotte. Ils sont pas nombreux mais y a toujours une ou deux personnes par génération. Et comme on en entend plus jamais parler...

Une omerta qui permettait sans aucun doute d’éviter d’éveiller d’autres vocations du même genre.

- … c’est un peu le mystère. Je crois que je suis le seul Jedi ark-ni de l’histoire, déjà, mais en même temps, c’t’un peu normal, vu la difficulté qu’il y aurait à repérer un novice potentiel. Mais y a au moins un chasseur de primes, si je me souviens bien, et une genre de musicienne.Faudrait que je me renseigne. En tout cas...

Les rires des adolescents finirent par interrompre Karm. Le groupe s’était rapproché d’eux sans qu’il y prête vraiment attention. Quatre garçons, auxquels la poussée hormonale de la puberté n’avait pas laissé la pleine possession de leurs facultés mentales. L’un d’entre eux désigna Luke du regard et demanda d’un ton brusque :

- C’est lui qui fait la femme ?

Il faut dire que l’Hapien ne respirait pas exactement la virilité. Karm haussa un sourcil perplexe, parce que cette expression ne lui évoquait évidemment rien.

- Ouais, ‘fin, vu le look, ils font probablement tous les deux la femme.

Des rires gras accompagnèrent ce commentaire d’un gamin de seize ans que la testostérone n’avait pourtant pas encore rendu très masculin. L’Ark-Ni finit par saisir ce qui se jouait là et, après avoir englouti la fin de son cornet de glace, il déclara d’un ton placide :

- C’est super philosophique, votre conversation, là, les mecs, mais perso, j’pense pas qu’on ait le niveau, alors on va voir ailleurs si vous y êtes.

Alors que les deux Jedis se relevaient pour esquiver le conflit, l’un des adolescents lança :

- Ouais, c’est ça, fuyez comme des petites taffioles.
- C’est bon, Jesse, laisse tomber, murmura le premier, qui venait de remarquer le sabre laser accroché à la cuisse de Karm.
- Ben c’est bon, ils vont faire quoi ? Gardiens de la paix et tout ça. Franchement, comment tu veux qu’on se sente en sécurité quand c’est ça qu’on nous envoie ? Moi j’veux des guerriers pas une gay pride.

Toute sorte de répliques acerbes vinrent à l’esprit de Karm mais il n’y avait rien à gagner dans cette confrontation stérile, qu’ils pouvaient éviter facilement en s’éloignant. Il posa la main sur le bras de Luke et souffla :

- Viens, on s’arrache.

Pendant quelques mètres encore, ils furent suivis par les propos désobligeants lancés de loin par Jesse, que ses amis bien plus circonspects finalement, ou en tout cas moins audacieux, avaient réussi à retenir à ses côtés. Ils sortirent du parc sous une passerelle encore entourée par la jungle, comme le reste de la ville, et qui serpentait autant entre les arbres à lianes que les immeubles.

- Ca va…?

Il était facile de deviner à travers la Force que, pour sa part, Karm n’avait guère été affecté par l’incident. Une fois de plus, la résilience psychologique de l’Ark-Ni se manifestait. Au fond, tout ce que cette regrettable conversation montrait, c’était qu’ils avaient eu affaire à des garçons idiots, peut-être même incertains de leurs propres penchants et de leurs propres virilités. Selon Karm, ça n’affectait ni sa relation avec Luke, ni leur propre identité.

- Perso, je considère pas que qui que ce soit fasse la femme, dans notre couple, tu sais. Enfin, j’imagine que j’ai plus ou moins compris ce qu’il voulait dire par là.

Et il commençait à intégrer que, pour Luke, « être un homme » et « être un homme qui aime les hommes » étaient deux catégories signifiantes, quoique problématiques. Ce n’était pas des concepts que Karm appréhendait facilement mais, petit à petit, à force d’efforts, il essayait de cerner la façon dont son compagnon considérait ces questions.

- Je propose qu’on rentre à l’hôtel et on sera tranquille. Ca te va, Luke…?

Il hésita et se laissa aller à un qualificatif qui résonnerait plus avec la culture de son ami.

- Mon ange.

Son ton n’avait pas été fort assuré, parce qu’il craignait d’être ridicule mais la nécessité de témoigner sa tendresse à son ami après leur petite épreuve lui paraissait l’emporter sur toute autre considération.
Luke Kayan
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- C'est du déjà vu.

Concéda Luke en pensant à ses cours d'Histoire. Combien de civilisations, non pas idylliques, contrairement à ce que prétendaient les holofilms manichéens mais certes authentiques, se laissaient corrompre par les conquérants? Bien souvent, après une vague de déchéance s'étendant sur plusieurs siècles, les derniers descendants s'éparpillaient, rejoignant l'endroit qui les avaient détruit en espérant y vivre le rêve du citadin. En réalité, ils s'éteignaient, embrumés par l'alcool et la frustration, dans le plus grands des anonymats. En silence, le Jedi écouta les derniers propos de Karm, souriant faiblement lorsque ce dernier annonça être certainement le seul "Tark-No" Jedi. Il pouvait en être fier, et son peuple aussi devrait l'être, à condition de se rendre compte, premièrement, que leur ancien "citoyen" était devenu un gardien de la paix, et deuxièmement, de saisir ce concept.

- On dit que les Êtres pensants ont la capacité, plus que toute autre espèce, d'apprendre des autres exemples, afin de ne pas réitérer les erreurs, mais je n'en suis pas sûr. Je pense au contraire que nous avons tendance à copier le mauvais.

Annonça tristement le jeune homme, qui reçut un appui inattendu concernant sa théorie. Dès les premiers mots, les traits de Luke se raidirent. Il aurait dû s'en douter que ce jour arriverait, jusque là, Karm et lui avaient été miraculeusement épargné. Plus que blessé, le Hapien s'inquiéta que ces adolescents aient remarqué leur relation. Certes, le physique du blond n'aidait pas, comme il l'avait dit, qu'il fut hétérosexuel n'aurait pas changé grand chose, on lui aurait attribué le rang d'homosexuel à cause d'une certaine androgénie, assez commune chez les Hapiens, si parfaits physiquement. Mais quand même, comment avaient-ils déterminé que? Peu importe, Luke s'apprêta à les corriger, désireux, sans savoir pourquoi, de démonter les propos de ce Jesse. Il n'aurait évidemment pas attaqué, mais l'impulsion bouillonnait en lui. Ce n'était pas de la colère, sinon un genre de... Culpabilité? Il aurait souhaité une occasion de prouver que malgré son apparence, malgré leur relation, Karm et lui faisaient honneur à l'Ordre. Ils savaient défendre et protéger les citoyens, y compris les sales petits idiots comme eux. Cependant, la main posée sur son bras aida Luke à faire le bon choix. Frustré mais raisonné il partit, sous les quolibets du fameux Jesse, retenu par des amis soient plus tolérants, soient plus craintifs à l'idée d'affronter des représentants de la loi.

- Ça va. C'est juste... Fatiguant.

Il détestait que l'on remette le nom de l'Ordre à cause de lui, bien que ce ne soit pas directement sa faute. Présumant que le garçon avait parlé de guerrier en devinant son rang de la même manière que l'avait fait la serveuse, Luke ne chercha pas davantage, plus occupé à se recomposer une apparence neutre. Il ne voulait pas que Karm s'inquiète ou le croit faible... Comme une femme? Possible.

- Hum. Ce n'est pas spécialement la signification au premier degré qui importe. - Expliqua le Hapien avec un petit soupir las. Non dirigé envers le chevalier, évidemment, mais plus envers tous les Jesse de la Galaxie, et un peu lui.- l'idée est de faire mal, de démontrer que l'insulté n'est pas capable d'accomplir des tâches masculines au quotidien, plus que... hum... Ponctuellement. Au fond ça n'a aucun sens et ce n'est pas une véritable insulte. Je connais des femmes qui lui auraient allègrement botté le derrière.

Un maigre sourire destiné à rassurer un Karm pas si altéré se dessina sur le visage du Hapien. Il s'était essayé à un trait d'humour, décidé à ne pas se laisser abattre, bien que cela supposait une plus grande "paranoïa" que d'habitude à propos des démonstrations publiques. Son ami et lui n'étaient pas suffisamment prudents, mais comment le dire à Karm sans le vexer? Est-ce que ce serait comme le rejeter? Luke décida d'être sincère, sachant qu'il ne supporterait pas que leur relation se refroidisse après qu'ils aient pu se parler ouvertement à l’hôpital. Sur le moment, il aurait eu tendance à se cacher en préconisant simplement plus d'attention.- tout le contraire de ce que l'Ark-Ni était en train de faire en l'appelant "mon ange".- mais à long terme, c'était le mieux. Il était donc bel et bien impliqué, jusqu'à la moelle dans cette relation.

- Je ne sais pas si c'est bien ou mal... Que les gens sachent. J'aimerais le cacher, parce que je n'aime pas ces... Situations, qui rarement se terminent aussi simplement, crois-moi. D'autre part, je ne veux pas te faire croire que j'ai honte en ta compagnie, et tu m'importes plus que le regard des autres- ce serait un comble pour moi d'ailleurs.- mais tu comprends que j'ai vraiment du mal à... Ne pas tout faire, actuellement pour qu'on ne nous repère plus. Si je m'écoutais, je me mettrais même à te vouvoyer. Je ne sais pas pourquoi j'agis ainsi et je perds mon sang-froid pour ça, après des années d’entraînement. Et puis, quand je repense à mes agissements je me sens doublement stupide car je perds mon énergie avec des futilités, on dirait que je m'éloigne de mes devoirs, de l'Ordre. Cela me devrait passer largement par-dessus la tète- Un fin sourire effleura ses lèvres à la fin.- cela dit je suis content que tu ne l'aies pas si mal pris, au moins, ça ne t'atteins pas.

Comment faisait-il? L'ignorance rendait-elle vraiment plus heureux?

- Je mérite vraiment ce surnom fleur bleue- commenta-t-il- avec mon attitude de... Et bien oui, de femme!

Concéda Luke mi figue, mi raisin. en singeant les paroles de Jesse. Évidemment ses propos précédents tenaient toujours. Il connaissait des femmes beaucoup plus résilientes que lui. Mais ce n'était pas le premier degré qui comptait vraiment, dans le fond.

Soudain il leva la tête, les yeux braqués sur un point encore heureusement lointain. Les petites ruelles n'étaient pas si nombreuse et le centre-ville fermée. Sans le vouloir, ou peut-être à propos, Jesse et ses amis en quittant eux aussi le parc s'annonçaient au loin, et Luke n'avait pas besoin de voir pour reconnaître cette voix portée par le vent, qui risquait de rester longtemps imprimée dans sa tête. Le jeune Jedi pourrait en profiter pour lui donner une leçon. Au lieu de ça il prit exemple sur son ami et proposa.

- Rentrons.

Il appuyait ainsi les précédents actes de son compagnon, agissant en Jedi. Il ne devait pas laisser ce type de personnes abîmer son sens du devoir ou souiller la réputation de sa famille. Luke fit volte-face, tournant le dos, à temps espérait-il, à ce Jesse, et à tous ceux qui pouvaient encore l'atteindre.

- Une dernière chose, ne m'appelle plus comme ça!

Acheva le jeune Jedi en riant. Son attitude le montrait toutefois touché par l'intention car il pressionna doucement le bras de son ami se disant, mais quand même... "Mon ange"?.
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