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# À votre droite, une fleur, à votre gauche, un saurien géant [Ruron Kukubb] - Dim 11 Fév 2018 - 7:43
— Je veux pas être vexante, hein.
— Hm ?
— Mais ça fait beaucoup de matériel.
— Et ?
— Et alors, tu n’es pas exactement, euh…
Comment dire ça diplomatiquement ?
— Ça sera peut-être lourd.
— C’est gentil de chercher à ménager ma virilité et de pas me dire en face que je suis une crevette.
— T’es pas une crevette, t’es verticalement désavantagé.
L’Ark-Ni esquissa tout de même une moue un brin contrariée, aux côtés de sa collègue de l’ExploCorps, à la perspective de devoir se séparer d’une partie des instruments qu’il avait prévu d’emporter pour sa brève expédition scientifique dans la jungle d’Ondéron. Dans le grand entrepôt de la partie du Temple consacré aux activités du fameux Corps d’Exploration, les deux Jedis entreprirent donc de séparer le nécessaire du superflu.
— Emmène un Padawan avec toi. Elle est où, Soruan ?
— Occupée.
— Et Luke ?
— Quoi, Luke, répliqua Karm, un brin sur la défensive, craignant que son secret eût été éventé.
— Ben vous êtes souvent ensemble, répondit prudemment l’exploratrice.
— En mission.
— Je suis sûre que tu trouveras quelqu’un à embarquer avec toi dans les jardins. Y a toujours des Padawans qui traînent par là-bas.
Et c’est ainsi que, quelques minutes plus tard, un gros sac sur le dos, flanqué de sa collègue qui en tenait un beaucoup plus petit, Karm était à la recherche d’un Padawan à réquisitionner pour partager avec lui les joies d’une exploration tropicale. On en savait beaucoup, sur la jungle d’Ondéron, c’était certain : depuis le temps que le temple s’y était installé, les botanistes de l’Ordre l’avaient parcouru en long et en large. Mais c’était une terre vivante et riche, où tout changeait constamment, et Karm était soucieux d’éprouver par lui-même certaines de ses propres théories.
— Là, un Ithorien. Ça aime les plantes, les Ithoriens.
Karm considéra le Padawan qui se profilait au loin d’un air songeur. La mission ne serait pas dangereuse — enfin, probablement pas — mais elle exigeait somme toute quelques aptitudes solides. Est-ce qu’il ferait l’affaire ?
— Il est pas un peu jeune ?
Les deux Jedis considèrent Ruron un moment en silence, avant de se rendre à l’évidence qu’aucun des deux n’était capable d’estimer l’âge du Padawan. Karm décida de se fier à son intuition et de tenter sa chance malgré tout. Il récupéra le second sac, puisant un peu dans la Force pour pouvoir le porter et, après avoir remercié son amie, s’approcha de l’Ithorien contemplatif.
— Hey, déclara-t-il laconiquement en guise d’introduction, en posant le petit sac à dos aux pieds du Padawan. J’m’appelle Karm, de l’ExploCorps, et j’pars quelques heures pour étudier la végétation de la jungle. J’ai b’soin d’un associé pour porter l’équipement et m’aider avec l’expérience. Ça te tente ?
Comme souvent, l’attitude de l’Ark-Ni n’avait rien de protocolaire. Il s’était adressé au Padawan comme il l’aurait fait avec un Chevalier et, pour être honnête, comme il le faisait aussi avec les Maîtres ou les Sénateurs. Aux yeux de Karm, chacun contribuait à sa mesure à la vie du Temple, qui aurait très bien pu se passer de hiérarchie.
Il réfléchit un instant et entreprit d’exposer les fondamentaux de la petite aventure, pour que Ruron puisse juger en connaissances de cause :
— Ce s’ra un peu fatigant, à cause du trail dans la forêt, et potentiellement chiant par moment, genre, pour les expériences et tout. Mais j’te montrerai des trucs sur la Force, puis des aspects de la survie en milieu sauvage.
Ce n’était pas le discours le plus éloquent qui fût pour convaincre quelqu’un de marcher pendant des heures dans la chaleur tropicale d’Ondéron à éviter les racines assassines de plantes mécontentes et, pourtant, l’occasion de seconder celui qui était en train de devenir l’un des piliers de l’ExploCorps n’était pas du genre de celles que l’on devait laisser passer.
— Ça te branche ?
— Hm ?
— Mais ça fait beaucoup de matériel.
— Et ?
— Et alors, tu n’es pas exactement, euh…
Comment dire ça diplomatiquement ?
— Ça sera peut-être lourd.
— C’est gentil de chercher à ménager ma virilité et de pas me dire en face que je suis une crevette.
— T’es pas une crevette, t’es verticalement désavantagé.
L’Ark-Ni esquissa tout de même une moue un brin contrariée, aux côtés de sa collègue de l’ExploCorps, à la perspective de devoir se séparer d’une partie des instruments qu’il avait prévu d’emporter pour sa brève expédition scientifique dans la jungle d’Ondéron. Dans le grand entrepôt de la partie du Temple consacré aux activités du fameux Corps d’Exploration, les deux Jedis entreprirent donc de séparer le nécessaire du superflu.
— Emmène un Padawan avec toi. Elle est où, Soruan ?
— Occupée.
— Et Luke ?
— Quoi, Luke, répliqua Karm, un brin sur la défensive, craignant que son secret eût été éventé.
— Ben vous êtes souvent ensemble, répondit prudemment l’exploratrice.
— En mission.
— Je suis sûre que tu trouveras quelqu’un à embarquer avec toi dans les jardins. Y a toujours des Padawans qui traînent par là-bas.
Et c’est ainsi que, quelques minutes plus tard, un gros sac sur le dos, flanqué de sa collègue qui en tenait un beaucoup plus petit, Karm était à la recherche d’un Padawan à réquisitionner pour partager avec lui les joies d’une exploration tropicale. On en savait beaucoup, sur la jungle d’Ondéron, c’était certain : depuis le temps que le temple s’y était installé, les botanistes de l’Ordre l’avaient parcouru en long et en large. Mais c’était une terre vivante et riche, où tout changeait constamment, et Karm était soucieux d’éprouver par lui-même certaines de ses propres théories.
— Là, un Ithorien. Ça aime les plantes, les Ithoriens.
Karm considéra le Padawan qui se profilait au loin d’un air songeur. La mission ne serait pas dangereuse — enfin, probablement pas — mais elle exigeait somme toute quelques aptitudes solides. Est-ce qu’il ferait l’affaire ?
— Il est pas un peu jeune ?
Les deux Jedis considèrent Ruron un moment en silence, avant de se rendre à l’évidence qu’aucun des deux n’était capable d’estimer l’âge du Padawan. Karm décida de se fier à son intuition et de tenter sa chance malgré tout. Il récupéra le second sac, puisant un peu dans la Force pour pouvoir le porter et, après avoir remercié son amie, s’approcha de l’Ithorien contemplatif.
— Hey, déclara-t-il laconiquement en guise d’introduction, en posant le petit sac à dos aux pieds du Padawan. J’m’appelle Karm, de l’ExploCorps, et j’pars quelques heures pour étudier la végétation de la jungle. J’ai b’soin d’un associé pour porter l’équipement et m’aider avec l’expérience. Ça te tente ?
Comme souvent, l’attitude de l’Ark-Ni n’avait rien de protocolaire. Il s’était adressé au Padawan comme il l’aurait fait avec un Chevalier et, pour être honnête, comme il le faisait aussi avec les Maîtres ou les Sénateurs. Aux yeux de Karm, chacun contribuait à sa mesure à la vie du Temple, qui aurait très bien pu se passer de hiérarchie.
Il réfléchit un instant et entreprit d’exposer les fondamentaux de la petite aventure, pour que Ruron puisse juger en connaissances de cause :
— Ce s’ra un peu fatigant, à cause du trail dans la forêt, et potentiellement chiant par moment, genre, pour les expériences et tout. Mais j’te montrerai des trucs sur la Force, puis des aspects de la survie en milieu sauvage.
Ce n’était pas le discours le plus éloquent qui fût pour convaincre quelqu’un de marcher pendant des heures dans la chaleur tropicale d’Ondéron à éviter les racines assassines de plantes mécontentes et, pourtant, l’occasion de seconder celui qui était en train de devenir l’un des piliers de l’ExploCorps n’était pas du genre de celles que l’on devait laisser passer.
— Ça te branche ?
Invité
# Re: À votre droite, une fleur, à votre gauche, un saurien géant [Ruron Kukubb] - Jeu 15 Fév 2018 - 14:22
- Le cours sur l'étude de la Force est pour aujourd'hui terminé, rendez-vous cet après-midi dans le centre d'entraînement du Temple pour votre cours habituel sur le maniement du sabre laser. Bon appétit à tous!
La sonnerie retentit. Les élèves se précipitèrent tous vers la sortie. A son habitude, Ruron était le dernier à rassembler ses affaires et à quitter la classe. L'Ithorien ne comptait pas rejoindre le self-service, celui-ci ne proposait pas de plats respectant son régime alimentaire, puis la dernière fois qu'il avait rejoint un groupe à une table, les initiés étaient aussitôt parti, le laissant tout seul. Depuis, il déjeunait toujours dans les jardins du Temple en compagnie des insectes. C'est ce qu'il allait faire aujourd'hui.
Il s'assied sur l'un des bancs du jardin puis sortit de sa sacoche un bocal remplit de fourmis-mouches. Il dévissa délicatement le couvercle puis saisit une grande portion d'insectes qu'il porta aussitôt non à l'une de ses deux bouches, mais à un orifice central en dessous de sa tête. Le soleil brillait haut dans le ciel, la fraîcheur matinale avait laissé sa place à la chaleur tropicale de l'après-midi. La journée allait donc se révéler plutôt agréable.
En pleine dégustation, Ruron vit un drôle d'individu au loin se diriger vers lui. Il crut à première vue qu'il s'agissait d'un autre padawan par sa taille en dessous de la moyenne et que celui-ci venait lui chercher des ennuis. Mais quand la silhouette se présenta comme membre de l'Explocorp, il comprit immédiatement qu'il s'agissait en réalité d'un Chevalier Jedi.
Néanmoins, son éloquence laissait à désirer ou du moins était peu habituelle pour un Chevalier.
— B-Bonjour Quarm., répondit-il poliment en regardant le petit sac à dos être posé à ses pieds. Un... associé? Maintenant? Il venait tout juste de lui proposer un cours sur la faune et la flore en pleine Jungle d'Iziz.
L'Ithorien réfléchit, le temps de prendre une décision. "Chiant", néanmoins cela ne pouvait pas être plus ennuyeux qu'un cours sur le maniement du sabre laser. Il doutait cependant d'avoir conditions physiques pour pouvoir suivre le Karm dans la Jungle.
Finalement, Ruron hocha la tête. Il n'avait jamais su dire "Non" à quiconque.
— O-Oui, pourquoi pas, dit-il. Mais les professeurs risquent de s’apercevoir de mon absenteïsme cet après-midi, poursuivit-il avec réluctance.
Il attacha le petit sac à son dos, une goutte de transpiration perlait déjà sur son front.
La sonnerie retentit. Les élèves se précipitèrent tous vers la sortie. A son habitude, Ruron était le dernier à rassembler ses affaires et à quitter la classe. L'Ithorien ne comptait pas rejoindre le self-service, celui-ci ne proposait pas de plats respectant son régime alimentaire, puis la dernière fois qu'il avait rejoint un groupe à une table, les initiés étaient aussitôt parti, le laissant tout seul. Depuis, il déjeunait toujours dans les jardins du Temple en compagnie des insectes. C'est ce qu'il allait faire aujourd'hui.
Il s'assied sur l'un des bancs du jardin puis sortit de sa sacoche un bocal remplit de fourmis-mouches. Il dévissa délicatement le couvercle puis saisit une grande portion d'insectes qu'il porta aussitôt non à l'une de ses deux bouches, mais à un orifice central en dessous de sa tête. Le soleil brillait haut dans le ciel, la fraîcheur matinale avait laissé sa place à la chaleur tropicale de l'après-midi. La journée allait donc se révéler plutôt agréable.
En pleine dégustation, Ruron vit un drôle d'individu au loin se diriger vers lui. Il crut à première vue qu'il s'agissait d'un autre padawan par sa taille en dessous de la moyenne et que celui-ci venait lui chercher des ennuis. Mais quand la silhouette se présenta comme membre de l'Explocorp, il comprit immédiatement qu'il s'agissait en réalité d'un Chevalier Jedi.
Néanmoins, son éloquence laissait à désirer ou du moins était peu habituelle pour un Chevalier.
— B-Bonjour Quarm., répondit-il poliment en regardant le petit sac à dos être posé à ses pieds. Un... associé? Maintenant? Il venait tout juste de lui proposer un cours sur la faune et la flore en pleine Jungle d'Iziz.
L'Ithorien réfléchit, le temps de prendre une décision. "Chiant", néanmoins cela ne pouvait pas être plus ennuyeux qu'un cours sur le maniement du sabre laser. Il doutait cependant d'avoir conditions physiques pour pouvoir suivre le Karm dans la Jungle.
Finalement, Ruron hocha la tête. Il n'avait jamais su dire "Non" à quiconque.
— O-Oui, pourquoi pas, dit-il. Mais les professeurs risquent de s’apercevoir de mon absenteïsme cet après-midi, poursuivit-il avec réluctance.
Il attacha le petit sac à son dos, une goutte de transpiration perlait déjà sur son front.
Karm Torr
# Re: À votre droite, une fleur, à votre gauche, un saurien géant [Ruron Kukubb] - Jeu 15 Fév 2018 - 14:57
— Maintenant, ouais. ‘Fin, on est pas à la pièce, tu peux finir ton…
Karm baissa les yeux vers le bocal d’insectes.
— … déjeuner.
D’un coup, il avait toute sorte de questions à poser, sur les insectes, sur leurs valeurs nutritives, sur les différences gustatives, sur la facilité à s’en procurer, sur l’évolution du régime au fil du temps, mais comme son apprenti d’un jour n’avait déjà pas l’air très à l’aise, il jugea plus sage de s’abstenir.
Comme quoi, il n’était pas entièrement dénué de tact.
— C’pas grave, j’te ferai un moment, répondit-il quand l’Ithorien s’inquiéta de ses cours.
Karm lui adressa un sourire désarmant qui sentait la longue habitude de l’école buissonnière. La vérité, c’est qu’il avait eu une Maître très jeune et que l’essentiel de sa formation avait été assurée loin de l’Académie. Son tempérament profondément autodidacte ne lui laissait pas des souvenirs impérissables de l’enseignement qu’il avait reçu dans les cours collectifs. Il avait appris beaucoup sur Ondéron, mais plutôt grâce au genre d’ateliers pratiques qu’il venait de proposer justement à Ruron.
— Pose le sac, finis d’manger, faut pas que tu tournes de l’œil en pleine jungle.
Karm abandonna son propre bardas à côté du banc et s’assit près du Padawan.
— J’dis pas que ça sert à rien, les cours, hein, note. Juste que bon, vaut mieux mettre les mains dans le cambouis. Ou la glaise, en l’occurrence.
Mais on pouvait difficilement s’attendre à un jugement différent de la part d’un membre de l’ExploCorps, dont les spécialistes étaient constamment fourrés sur des planètes lointaines, sauf quand, un peu plus âgés, ils endossaient le rôle d’archiviste ou de bibliothécaire et veillaient à la classification soigneuse des données récoltées pendant les expéditions. Malgré sa petite taille, Karm donnait lui aussi l’impression d’être un baroudeur chevronné, amateur d’aventures plutôt que de salle de classe.
Pendant que Ruron mangeait, Karm fixait les plantes du jardin botanique devant eux. Depuis son aventure avec Luke sur une planète déserte où ils avaient été confrontés à des lianes quelque peu hostiles et où il était parvenu à calmer grâce à la Force cette végétation assassine, Karm essayait souvent de répéter l’exploit, et de mêler son esprit à celui de la végétation. Ses succès n’étaient pour l’heure pas très spectaculaires.
— T’inquiètes, on aura pas nécessairement besoin d’aller très, très loin, commenta-t-il sans détacher le regard d’un bosquet d’herbes médicinales.
C’était que l’Ithorien n’avait pas l’air fort athlétique.
— Mais le Temple surveille de manière régulière comment la flore qui nous entoure réagit à l’intensité de la Force qui se produit quand y a vraiment beaucoup de praticiens. C’est assez instructif, puis ça nous permet d’extrapoler sur la manière dont on peut utiliser la Force pour agir sur l’environnement. C’est utile pour la lutte contre les désastres climatiques, pour les activités de l’AgriCorps, pour la colonisation, ce genre de choses. Sans parler de l’intérêt à proprement parler de la chose, quoi.
Karm n’était pas sûr de pouvoir bien transmettre toute la passion qu’il avait pour le sujet mais au moins, il en parlait avec beaucoup d’enthousiasme. Avec les arts martiaux et Luke, l’observation de la Force vivante était l’une de ses grandes passions.
Il finit quand même par détacher le regard du bosquet, qui ne réagissait définitivement pas à ses appels à travers la Force, pour observer l’Ithorien.
— C’est quoi ton nom, du coup ? J’suis désolé, je connais pas tellement les Padawans, j’suis pas des masses impliqué dans la formation.
Parce qu’il n’était pas très pédagogue — mais il faisait son possible pour progresser.
— Comment ça s’fait que tu manges tout seul ? Les autres doivent être au self, non ?
Karm baissa les yeux vers le bocal d’insectes.
— … déjeuner.
D’un coup, il avait toute sorte de questions à poser, sur les insectes, sur leurs valeurs nutritives, sur les différences gustatives, sur la facilité à s’en procurer, sur l’évolution du régime au fil du temps, mais comme son apprenti d’un jour n’avait déjà pas l’air très à l’aise, il jugea plus sage de s’abstenir.
Comme quoi, il n’était pas entièrement dénué de tact.
— C’pas grave, j’te ferai un moment, répondit-il quand l’Ithorien s’inquiéta de ses cours.
Karm lui adressa un sourire désarmant qui sentait la longue habitude de l’école buissonnière. La vérité, c’est qu’il avait eu une Maître très jeune et que l’essentiel de sa formation avait été assurée loin de l’Académie. Son tempérament profondément autodidacte ne lui laissait pas des souvenirs impérissables de l’enseignement qu’il avait reçu dans les cours collectifs. Il avait appris beaucoup sur Ondéron, mais plutôt grâce au genre d’ateliers pratiques qu’il venait de proposer justement à Ruron.
— Pose le sac, finis d’manger, faut pas que tu tournes de l’œil en pleine jungle.
Karm abandonna son propre bardas à côté du banc et s’assit près du Padawan.
— J’dis pas que ça sert à rien, les cours, hein, note. Juste que bon, vaut mieux mettre les mains dans le cambouis. Ou la glaise, en l’occurrence.
Mais on pouvait difficilement s’attendre à un jugement différent de la part d’un membre de l’ExploCorps, dont les spécialistes étaient constamment fourrés sur des planètes lointaines, sauf quand, un peu plus âgés, ils endossaient le rôle d’archiviste ou de bibliothécaire et veillaient à la classification soigneuse des données récoltées pendant les expéditions. Malgré sa petite taille, Karm donnait lui aussi l’impression d’être un baroudeur chevronné, amateur d’aventures plutôt que de salle de classe.
Pendant que Ruron mangeait, Karm fixait les plantes du jardin botanique devant eux. Depuis son aventure avec Luke sur une planète déserte où ils avaient été confrontés à des lianes quelque peu hostiles et où il était parvenu à calmer grâce à la Force cette végétation assassine, Karm essayait souvent de répéter l’exploit, et de mêler son esprit à celui de la végétation. Ses succès n’étaient pour l’heure pas très spectaculaires.
— T’inquiètes, on aura pas nécessairement besoin d’aller très, très loin, commenta-t-il sans détacher le regard d’un bosquet d’herbes médicinales.
C’était que l’Ithorien n’avait pas l’air fort athlétique.
— Mais le Temple surveille de manière régulière comment la flore qui nous entoure réagit à l’intensité de la Force qui se produit quand y a vraiment beaucoup de praticiens. C’est assez instructif, puis ça nous permet d’extrapoler sur la manière dont on peut utiliser la Force pour agir sur l’environnement. C’est utile pour la lutte contre les désastres climatiques, pour les activités de l’AgriCorps, pour la colonisation, ce genre de choses. Sans parler de l’intérêt à proprement parler de la chose, quoi.
Karm n’était pas sûr de pouvoir bien transmettre toute la passion qu’il avait pour le sujet mais au moins, il en parlait avec beaucoup d’enthousiasme. Avec les arts martiaux et Luke, l’observation de la Force vivante était l’une de ses grandes passions.
Il finit quand même par détacher le regard du bosquet, qui ne réagissait définitivement pas à ses appels à travers la Force, pour observer l’Ithorien.
— C’est quoi ton nom, du coup ? J’suis désolé, je connais pas tellement les Padawans, j’suis pas des masses impliqué dans la formation.
Parce qu’il n’était pas très pédagogue — mais il faisait son possible pour progresser.
— Comment ça s’fait que tu manges tout seul ? Les autres doivent être au self, non ?
Karm Torr
# Re: À votre droite, une fleur, à votre gauche, un saurien géant [Ruron Kukubb] - Dim 5 Avr 2020 - 18:50
N.B. : Ce message clôture un sujet après la disparition de l’autre joueur-se.
Les…
Le gamin se concentrait intensément sur ses pieds, comme s’il avait l’espoir de léviter grâce à la Force.
Les autres m’aiment pas trop. Quand je m’assois avec eux, ils partent.
Karm haussa un sourcil.
(Le gauche.)
Ses souvenirs du noviciat étaient désormais assez incertains, éclipsés par l’intensité de la vie qu’il avait connue après, quand Tavaï l’avait pris comme Padawan, aussi jeune que possible. Il s’était senti isolé, à l’époque, de ça il en était sûr. Loin de tout ce qu’il avait toujours connu, dans un monde étranger et hostile, avec une gravité écrasante, une chaleur étouffante, des maladies à n’en plus finir et une langue qu’il ne comprenait pas.
J’connais ça, fit-il d’une voix douce, en abandonnant son sac pour s’asseoir à côté du gamin.
L’expédition pouvait bien attendre.
C’est vrai ?
Les petits yeux perçants de l’Ithorien s’étaient levés vers lui, pleins d’étonnement, et peut-être aussi un peu d’espoir.
Ben ouais, c’est vrai.
Mais maintenant, tu es, euh… enfin, tu sais…
Hmm… ?
Ben tu te bas et tout, tu fais des missions dangereuses, tu explores des planètes lointaines, c’est un peu… disons… la classe…
Ah.
Karm haussa les épaules.
I’ paraît.
L’Ark-Ni avait bien conscience qu’aux yeux des jeunes du Temple, la vie qu’il menait était infiniment plus glamour que les négociations à n’en plus finir des Consulaires, dont les ramifications échappaient encore largement à des esprits en formation.
T’sais, quand je suis arrivé… Je savais rien. ‘Fin, je veux dire, déjà, je pouvais parler aux autres. Y avait qu’un droïde protocolaire dans tout le Temple assez développé pour connaître ma langue. Personne parle ma langue à part les gens de chez moi, et on est vraiment pas nombreux, et on se mêle pas aux autres. Donc la plupart du temps, sauf pour les rendez-vous avec les maîtres et tout ça, j’devais… Me débrouiller. Et puis…
D’un geste de la main, il embrassa tout ce qui les entourait, les jardins botaniques, le Temple, et par-delà, la canopée inextricable de la jungle d’Ondéron.
Moi, j’étais gamin dans un vaisseau spatial. Jamais j’avais posé les pieds sur une planète avant d’venir ici. Jamais j’avais respiré un air comme ça. J’étais tout le temps… Ouais, malade, et tout me faisait flipper, et marcher c’était hyper fatigant, à cause de la gravité. Donc voilà. J’étais malade, j’étais crevé, je parlais pas la langue. C’était l’horreur. Vraiment l’horreur.
Mais comment on peut grandir dans un vaisseau spatial ? C’est horrible, s’exclama spontanément l’Ithorien, qui ne concevait évidemment pas une vie menée en dehors de l’harmonie avec la nature sauvage.
Aussitôt, son long cou rentra dans ses épaules trapues et il murmura :
Désolé.
T’inquiètes, fit Karm en lui donnant un tout petit coup d’épaule. J’comprends c’que tu veux dire. Maintenant, j’imaginerai pas retourner là-bas, mener ma vie que dans l’espace. Mais voilà, à la base, c’était ça. J’avais pas d’amis parce que j’étais toujours à la ramasse. Hyper différent. Que je pouvais pas très bien communiquer. Ni participer à toutes les activités, à cause des maladies.
Et comment tu t’en es sorti ?
Karm hésita.
La vérité, c’était qu’il ne s’en était pas sorti. Pas vraiment. Tavaï était revenue de mission et elle avait commencé sa formation, le plus souvent loin du Temple, et il avait rarement vu ses camarades. Les classes collectives avaient constitué la partie la plus anecdotique de son apprentissage, et aujourd’hui encore, il avait du mal à se lier aux Chevaliers trop différents de lui. Mais pouvait-il vraiment conter une histoire aussi peu encourageante au jeune garçon ?
J’pense qu’il faut pas avoir peur d’être toi-même. Je sais que ça fait un peu, ben… C’t’une banalité de dire tout ça et tout, bien sûr. Mais tu sais, des fois, on essaie d’imiter les autres pour se fondre dans le moule, mais comme on y arrive pas, on a juste l’air un peu plus bizarre. Tu vois c’que j’veux dire ?
Le Padawan hocha lentement la tête.
Bon, ben, autant être soi-même alors. Parler de ce qu’on aime. Se comporter un peu étrangement s’il faut. Tu seras déjà un peu plus à l’aise et les gens s’intéresseront à toi parce que t’es différent et que… ben que c’est intéressant. Plutôt que de fuir parce que tu les mets mal à l’aise.
Oui, mais peut-être que personne me trouve intéressant…
Genre. Tu as ta propre espèce, ta propre culture, t’es jeune mais j’suis sûr que tu te sens déjà des affinités particulières dans la Force, pas vrai ? Si tu laisses tout ça s’exprimer, ben tu apporteras quelque chose. Que les autres ont pas, qu’ils voudront comprendre et découvrir.
Mais je croyais que pour être un bon Jedi, il fallait savoir surpasser sa culture ? Enfin pas surpasser, supprimer. Euh… Pas supprimer… Sublimer ? Subsumer… ?
Karm sentit son coeur se serrer.
Parfois, la nuit, il rêvait de l’immensité du ciel étoilé, du doux vrombissement des moteurs du vaisseau, et des chants de sa nation.
C’est pas… c’est pas qu’il faut oublier d’où tu viens, répondit-il en s’efforçant de cacher sa mélancolie. C’est qu’il faut adopter l’Ordre comme ta famille. Mais t’as des origines, et ce serait c… ballot de les nier. Faut que t’essaies de trouver le sens qu’elles prennent dans le monde qui est le tien. Moi, par exemple… j’sais pas, disons que ce sont les principes de… ben… ‘fin, c’est difficile à décrire, en vrai, mais disons, les principes égalitaires de mon pays et une sorte de… de bricolage avec tout, de bricolage de la vie, tu vois ? C’est ça que je porte avec moi. À l’intérieur de l’Ordre.
Silence.
Je suis pas sûr de très, très bien comprendre, confessa le Padawan.
Moi, j’suis sûr de pas très, très bien expliquer, répondit Karm du tac-au-tac.
Oh non, désolé, c’est pas du tout ce que je voulais dire !
Relax, j’plaisantais.
Ah bon ?
Les humains étaient décidément indéchiffrables, songea l’Ithorien.
T’sais quoi, tu devrais prendre des leçons avec Envor.
Le Chevalier Qurun ?
Des leçons particulières, j’veux dire, tu dois l’avoir en cours communs, non ?
Je… je suis pas très doué, hasarda le Padawan.
C’pas grave, être doué, ça s’apprend.
Y a un talent inné, quand même, non, pour le sabre ?
J’ai passé mon enfance à éternuer dans les couloirs du Temple, j’peux te dire que j’étais pas destiné à devenir un guerrier.
L’instructeur ithorien qui donnait des cours de sabre laser n’était certes pas le plus populaire du Temple et il passait même pour être un Chevalier particulièrement ennuyeux. Mais il cernerait sans peine, Karm en était sûr, toutes les difficultés qui se poseraient à un Ithorien timide.
Va lui parler, demande lui deux trois cours particuliers, et j’pense que tu y verras plus clair. OK ?
D’accord…, répondit le gamin, un brin dubitatif.
Maintenant, j’t’accompagne jusqu’à la porte de ta salle de classe.
Jusqu’à la porte, fit le Padawan plein d’espoir ?
Pour m’échauffer avant de crapahuter dans la jungle.
Devant tout le monde ?
Y a pas tant de monde que ça devant qui crapahuter, dans la jungle, tu sais.
Non, je veux dire, me raccompagner. Me raccompagner devant tout le monde ?
Ben ouais. Ça te dérange ?
Oh non, c’est plutôt cool, s’exclama spontanément le jeune homme, avant de courber le cou. Désolé…
Sois pas désolé. Allez, viens.
Karm se leva, récupéra son sac à dos et le Padawan et lui prirent le chemin du Temple. En marchant, Karm l’entraîna sur le terrain de la botanique. Pour le faire sourire. Enfin, si les Ithoriens souriraient. Intérieurement, peut-être ? La discussion roula sur la saison des floraisons dans les carrés médicaux du potager et le Padawan s’animait peu à peu, à sa manière, de sorte que lorsqu’ils eurent rejoint ses camarades rangés le long du couloir en attendant l’instructeur du jour, Karm et lui avaient l’air plongé dans une grande conversation, sous les regards étonnés de tous les autres.
Bon, j’te laisse là, on se revoit un d’ces quatre pour cette petite expédition, conclut le Chevalier d’un air dégagé, avant d’adresser un signe à l’Ithorien, puis de se détourner.
Il n’avait pas encore pris le coude du couloir qu’il entendait derrière lui des voix mal étouffées qui soufflaient :
C’est vrai ? Tu vas vraiment faire une expédition avec le Chevalier Karm… ?
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