Karm Torr
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— Mais si, mais si, on remplit totalement le formulaire, assura Karm, avant de compléter, à mi-voix, une fois qu’on sera dans le speeder.

L’Ark-Ni avait aussi l’habitude des formalités. Préparer une expédition géographique sur une planète inconnue, c’était beaucoup de paperasse. Il fallait convaincre le Conseil de l’intérêt du projet et de la sécurité relative des explorateurs, établir un budget, le faire approuver, réaliser parfois quelques appels d’offres pour compléter le matériel, établir une route prévisionnelle — et ensuite, au retour, il y avait les rapports et le catalogage.

Mais dans le feu de l’action, les circonstances exigeaient que l’on prît des raccourcis. Alors qu’il s’installait au volant de l’un des speeders du Temple, Bip rappliqua sans attendre, bien décidé à rappeler sa promesse à son maître.

— On dirait qu’on va avoir un chaperon.
— BIIIIIP.
— C’est parti.

L’engin s’éleva pour s’engouffrer bientôt dans la dense circulation du monde-capitale.

— Pour une fois qu’on finit pas dans les bas-fonds, remarqua Karm, avec une pointe d’inquiétude.

Les beaux quartiers, Luke s’y fondrait beaucoup mieux que lui. Peu à peu en tout cas, les speeders qui les entouraient changeaient d’allure, à mesure qu’ils approchaient des tours stylisées où les notables de Coruscant, tout là-haut, loin de la masse grouillante des niveaux inférieurs, et plus près de la lumière naturelle, menaient une existence largement séparée de celle des gens du commun.

C’était là que l’on trouvait les politiciens galactiques, les hauts administrateurs de la République, les patrons qui avaient eu du succès. Les véritables super-riches vivaient encore ailleurs, bien sûr : la ville-monde, dans son architecture comme dans sa société, était soigneusement hiérarchisée. En tout cas, aux modèles bon marché qui pullulaient quelques dizaines de niveaux en contrebas avaient succédé les lignes racées des berlines confortables.

— On arrive, commenta Karm, alors qu’ils s’approchaient des coordonnées indiquées par Bip. Excelsior. C’est un genre de copropriété de luxes, je pense. On est tout en haut des étages médians, y a des jardins et tout, c’est pas l’opulence parfaitement indécente mais les gens du coin ont clairement pas à se plaindre.

Au fil des semaines, Karm avait appris à décrire ce qu’il voyait à son ami, pour que Luke ait une idée même vague de l’endroit où ils mettaient les pieds. Le speeder se posa en douceur sur une place libre, dans une vaste avenue bordée d’arbres régulièrement taillés. En plein milieu de la journée, il régnait là un calme relatif : la plupart des habitants devait être au travail. Les Chevaliers descendirent de speeder.

Quelques mètres plus loin, selon leur datapad, ils se tenaient à l’endroit exact où le speeder d’Ekkt avait émis pour la dernière fois. La place était déserte.

— L’avantage avec les bourgeois, c’est qu’ils aiment leur sécurité. C’est bardé de caméras de surveillance.

Direction l’immeuble le plus proche. La plaque d’identification des Jedis scannée par la porte d’entrée suffit à leur ouvrir l’accès et Karm se dirigea droit vers la réception, tenue par le dernier modèle des droïdes d’accueil.

— Bienvenue à Excelsior 300, je suis Majordome, que puis-je faire pour vous ?
— Jedis. On aimerait consulter les caméras de sécurité extérieure de la résidence.
— Bienvenue, Chevaliers. La sécurité de nos résidents est essentielle pour nous. Avez-vous un mandat de justice ?
— Disons que c’est assez urgent.
— La vie privée de nos résidents est essentielle pour nous. Il vous faudra revenir avec un mandat.
— On demande pas à voir l’intérieur en même temps.
— Les protocoles sont les protocoles.

Damned.
Karm était plus habitué aux opérations d’extraction, qui se passaient d’autorisation, et aux planètes désertes qu’à la gymnastique juridique de la civilisation. Un peu déstabilisé, l’Ark-Ni jeta un regard incertain à Luke. Il murmura à l’oreille de l’Hapien :

— Je crois qu’on touche plutôt à ton domaine de compétences. De mon côté, j’vais passer un coup de fil à la police du quartier, voir si des fois ils ont pas des informations sur notre speeder volatilisé.

Karm s’éloigna de quelques pas pour activer son comlink, tout en promenant le regard sur le hall impeccable de cette résidence de standing. Qu’est-ce que le Trandoshan avait bien pu venir faire dans le coin ? Débusquer un contact haut placé de Noctis ? Négocier en particulier avec le sénateur d’un monde frontalier pour poursuivre son enquête aux portes de l’Empire ? Rendre visite à l’administrateur d’une entreprise pharmaceutique pour lui soutirer des informations sur sa mystérieuse et providentielle concurrence ?
Luke Kayan
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Luke descendit du speeder, retenant un grognement de satisfaction, il n'avait jamais apprécié chevaucher ces engins peu confortables qui le privaient en plus de son unique véritable repère: le bon vieux plancher des Éopies. Heureusement, la description de Karm égayait légèrement la vision de Luke, bien qu'il peine à réellement se faire une idée. Il avait oublié comment le luxe se différenciait du bas de gamme, si ce n'était, souvent, par l'odeur ou les pas sur le marbre, se perdait dans les jardins et ignorait tout du concept de balcons sur lesquels de jolis pots de fleurs siégeaient fièrement. Toutefois, grâce à son ami, l'esprit et l'imagination du jeune homme s'étaient aiguisés, il avait trouvé ses propres références et comparaisons, dessinant des paysages toujours plus complexes qui disposaient de leurs caractéristiques personnelles.

Penser au "luxe" fit surgir l'idée des bruits qui se répercutaient sur des dalles d'excellente qualité, des immeubles silencieux bien isolés et beaucoup de preuves à portée de mains sans être pour autant disponibles. Les caméras de surveillance étaient légions, mais elles étaient encore mieux gardées qu'un holofilm pour moins de 18 ans face à des pré-pubères curieux de 12 ans.

- Ils apprécient leur sécurité et leur privacité

Souligna Luke, ce qui n'était pas forcément un bon point pour eux, et il nul besoin d'expliquer la nuance, cette dernière s'afficha rapidement sous la silhouette d'un majordome droïd coincé, bardé de manières impeccables et d'un esprit têtu au possible. Obtenir leurs données au nom de la sécurité galactique ne serait pas simple. Leur nombril comptait avant tout. Luke était encore en train de dessiner leur situation dans sa tête, se répétant les paroles de Karm pour leur trouver du sens lorsque le premier obstacle surgit.

- D'accord.

Depuis le temps, le Jedi commençait à bien connaître l'Ark-Ni, il savait devoir le laisser agir à sa façon, se dérober face aux costumes parfaitement agencés, aux airs pincés afin de fouiller plus en profondeur. Karm avait besoin d'évoluer dans son monde, à sa manière et Luke lui faisait confiance, et c'était sensément réciproque, raison pour laquelle il devait également s'atteler à sa tâche. Luke demanda à voir un être organique, tout d'abord le robot s'y refusa, prétextant que tous les employés étaient occupés, mais il trouva la parade en demandant à ce que Majordome montre à Bip où ce dernier pouvait se recharger. Le petit R2 n'en avait pas besoin vu son système d'auto-génération, mais il était ravi de déjà pleinement participer à la mission, consistant actuellement à distraire le réceptionniste mécanique. Règle 34 du parfait petit Consulaire, toujours chercher à communiquer avec un organique, les droïds étant inflexibles et souvent plus têtus. Excelsior 300 s'éloignait à peine avec le petit compagnon couleur soleil de Luke que Jorell Picks le remplaça, Luke essaya de le convaincre de la même façon que Karm, en exposant la situation, mais il se heurta à un mur. Finalement, certains humains semblaient dotés des mêmes capacités émotives que leurs collègues à boulons. Le Hapien n'insista donc pas, il haussa les épaules, poussa un soupir résigné, toujours sur le seuil de la résidence- L'hôtel Galactic Avenue- et confirma les propos implacables du quinquagénaire vêtu d'une redingote impeccablement accordée avec son pantalon de velours.

- Vous avez bien raison, je vous félicite pour votre zèle, la vie privée des résidents est décidément bien protégée ici, attendons le mandat.

L'employé zélé qui s'apprêtait à répliquer vertement se trouva totalement pris au dépourvu lorsque le second Chevalier l'approuva sans même chercher à discuter. Ses épaules s'affaissèrent en même temps que la barrière protectrice qu'il avait érigé rien qu'en les voyant débarquer. Comme la majorité des gens évoluant dans cet environnement privilégié -et encore, ils n'étaient pas dans les zones outrageusement riches comme l'avait souligné Karm- Jorel Picks faisait davantage confiance à son cercle fermé de sécurité, à leurs caméras payées rubis sur ongles plus qu'à la police locale, et à la police locale davantage encore qu'aux Jedis. Ces prêcheurs de l'austérité marquaient son territoire de marbre, le salissant de reproches implicites, les deux cultures choquaient habituellement sans vergogne, il était donc très surpris que "l'arrogant" membre de l'Ordre Jedi ne cherche pas à discuter et se plie aux règles de sa communauté. Tout à coup désœuvré, le majordome toussota avant de proposer à Luke d'entrer. La cécité de ce dernier lui sautant enfin au visage acheva de le tranquilliser. Ce n'était pas ce blondinet d'apparence docile qui allait prétendre aller aux toilettes pour trouver la salle de surveillance et visionner en cachette les vidéos. Luke attendit 5 bonnes minutes, installé dans son siège, tandis qu'il sentait l'impatience et l'agacement de Monsieur Picks poindre.

- Est-ce que vous avez de quoi vous défendre?

Demanda tranquillement Jorell soulagé que le silence pesant s'efface répondit sans hésiter.

- Comme vous semblez le savoir, nous avons un excellent système de surveillance.

Répliqua-t-il, étonné de la question distraite du Jedi et apparemment sans fondement. Il se méfiait encore d'un éventuelle ruse mais commençait à s'étonner qu'on lui ait envoyé le stagiaire inexpérimenté du coin, ou l'handicapé mental en tout cas.

- J'ai dit, vous défendre, pas surveiller.

Le quinquagénaire grogna avant de se reprendre par le biais d'un toussotement aristocratique -si aristocratique que puisse être un toussotement.-. Le Jedi n'était pas si idiot que cela enfin de compte, mais lui non plus, il appela un droïde pour amener le thé et les petits gâteaux de rigueur dans un tel bâtiment. L'homme commençait à se dire que le droïd du Chevalier prenait curieusement beaucoup de temps pour se brancher à une source d'alimentation, mais sa propre réponse toute faire, confectionnée par son cerveau préparé à cela le distrait de cette pensée absurde. Ici, c'était absurde. Personne n'avait envie de sauter les règles de sécurité, les gens étaient polis, travailleurs et respectueux, surtout les Jedis. Arrogants mais certainement pas des filous, et encore moins celui-ci.

- Évidemment. Nous disposons d'un système d'alarme faisant appel à une société de sécurité, la meilleure, qui envoie ses agents en renfort.
- Hum je vois. En combien de temps pourraient-il être là?
- Moins de 5 minutes.
- Ah. Ça va nous poser un problème.
- Comment ça un problème? C'est un délai d'intervention très court.  
- Oh oui oui. Comparé à la moyenne, il est admirable mais je ne suis pas sûr qu'un criminel suffisamment dangereux pour que deux chevaliers Jedis se déplacent ne soit d'accord.
- Vous bluffez.
- Non. Je suppose. Voyez-vous, on aime aussi la sécurité à l'Ordre Jedi, nous calculons donc soigneusement les risques, les statiques, les chances, les pourcentages... Or ce qui nous ennuie présentement c'est qu'il y en a un assez élevé concernant une transaction d'on ne sait trop quoi, avec on ne sait trop qui. La seule chose dont on est certain est que si quelque chose devait se produire, ce serait au centre. Nous sommes bien au centre, non? Ah et que cette personne est très dangereuse, au point d'arriver à faire ce quelque chose en moins de 5 minutes, et bien sûr avant que le mandat n'arrive et que votre tour ne se termine. Mais ça ne reste qu'un pourcentage, et il est très faible. Attendons l'autorisation.

Jorrell évalua le jeune Jedi, puis soupirant l'homme se dirigea vers la réception, interpella le Chevalier de mauvaise grâce et le conduisit dans la chambre de surveillance. Un gâteau à la cannelle à demi- grignoté dans la main, Luke salua gentiment, presque moqueusement le réceptionniste humain, ainsi que le droïd qui revenait, le crâne prêt à exploser et l'huile tournée par le babillage incessant de Bip. Il discuta brièvement avec le garde, bien moins guindé et protecteur que Monsieur Picks et obtint ce dont il avait besoin. En sortant, il appela silencieusement son ami, via la Force, après avoir rejoint le hall. Sans mot dire de prime abord, il lui tendit la puce contenant les informations.

- Il n'y a pas de sons, si riche soit la résidence, il y a des impayés et la communauté risque la banqueroute. Mais selon le garde, on y voit bien un homme de race reptilienne -habillé en civil.- échanger quelques mots avec un humain de sa taille, un vrai colosse. Quadragénaire, barbe grise. Ekkt a donné une enveloppe et en a reçu une autre en échange. Je pense qu'il a donné rendez-vous à son informateur ici pour brouiller les pistes et éviter l'habituel rencontre dans les quartiers mal famés. Il est ensuite parti en direction de la sortie de la ville qui donne sur un autre endroit similaire, voir encore plus huppé mais on ne peut être sûr de rien. Les caméras n'ont pas une très grande portée et il aurait pu tourner.

L'homme que recherchait le Reptile était peut-être un de ces mafieux aimant vivre dans le luxe, ou alors lui aussi cherchait à brouiller les pistes? Et si Ekkt était beaucoup plus avancés qu'ils ne le croyaient, qu'il flairait déjà LE gros poisson?

- En tout cas, il est venu ici par ses propres moyens, et librement. L'homme barbu ne l'a pas attaqué, il est reparti dans la direction opposé. Voici une photocopie, on ne voit pas très bien son visage mais selon le garde il a quand même un physique particulier et quelques signes distinctifs.


Le Hapien tendit la capture d'écran en couleurs à son ami.  
Karm Torr
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— On se doute qu’il se fond pas dans la population, commenta Karm en considérant la capture d’écran où l’on voyait le contact d’Ekkt, avant d’empocher la puce et de quitter le hall du bâtiment. Les flics du coin ont pas exactement été prolixes mais je crois que c’est surtout parce que y a pas grand-chose à raconter. Quartier calme, deux ou trois cas de violences domestiques, et le dernier retentissement judiciaire, c’était un type qui s’est fait coffré récemment par le Trésor Public pour fraude fiscale.

Assis sur le siège conducteur du speeder deux places, Karm lança la recherche de reconnaissance faciale. Quelques secondes plus tard, l’appareil affichait ses résultats.

— Bon, notre géant barbu s’appelle Big Bob. On suppose que c’est pas son nom de naissance. Selon la base des Sentinelles du Temple, il s’occupe de la sécurité privée de la famille Varren. Et euh… ‘Tends, une seconde. Ah, voilà. Famille Varren. Mafia. Contrebande, contrefaçon, trafic de faux documents, entreprises de construction frauduleuses. Genre monopole renforcé à grands coups d’intimidation. Des Corelliens qui se sont installés sur Coruscant. Apparemment, Big Bob fournit de temps en temps quelques infos à l’Ordre, parce que Maître Qong aurait sauvé la vie de sa sœur dans une affaire sur une station spatiale.

Karm relèva les yeux, pensif.

— C’est bien un truc de Sentinelles, ça, j’suppose, de garder une trace de qui connaît qui parmi les gens qu’ils sauvent, histoire de se faire des contacts. J’veux dire, moi, j’me suis fait des amis et tout, de fil en aiguille, mais il n’empêche que je sais pas si machin chose qui s’est pas fait dévorer par un genre d’ours sauvage sur telle planète ait le frère de truc bidule qui deale des carabines blaster sur Tatooine. Faudrait peut-être que je m’y mette. Enfin bref.

Comme toujours depuis plusieurs mois, le jeune Chevalier cherchait tous les moyens de s’améliorer, pour être finalement à la hauteur de l’ambition qu’il s’était proposée : devenir un Maître Jedi. Il se promit d’être plus consciencieux dans la gestion de ses contacts et d’entretenir le réseau des gens qui lui étaient redevables à travers la Galaxie, un réflexe fort peu naturel cependant, pour tout Jedi qui avait appris avant toute chose le sens du sacrifice personnel.

— J’me vois mal débarquer chez des mafieux pour leur demander s’ils ont pas croisé notre Trandoshan favori, cela dit, et…
— Qu’est-ce que vous fabriquez là, interrompit dans les comlinks des deux Jedis la voix gutturale du Trandoshan. ?
— Ekkt ! Vous êtes vivant.
— Démarrez.

Karm obtempéra sans poser de questions — un exploit, parce que des questions, il en avait vraiment beaucoup — et le Trandoshan se mit à leur dicter au creux de leurs oreilles toute une série d’indications. Comment avait-il su où ils se trouvaient ? Et où avait-il appris à pirater des fréquences de comlink ? Karm avait sans doute dû rater les classes d’espionnage dans sa formation de Padawan.

Au bout d’un quart d’heure, ils finirent par débarquer derrière un entrepôt de meubles, dans une zone commerciale assez bourgeoise des environs. Le reptile les attendait entre deux bennes de déchargement, les bras croisés. Karm souffla :

— Il a pas l’air exactement ravi.

D’un autre côté, les expressions d’un Trandoshan pouvaient être difficiles à déchiffrer. Les deux Chevaliers rejoignirent le Maître.

— On a cru que vous étiez en danger, se justifia préventivement l’Ark-Ni.
— Si j’étais en danger, j’aurais appelé à l’aide.
— Ben ça dépend, mettons qu’on vous ait ligoté tout nu au fond de la cale d’un… OK, je la ferme.
— Je suis en train de suivre une piste. Un de mes contacts m’a assuré qu’il connaissait un comptable spécialisé dans le blanchiment d’argent qui s’occuperait de certaines affaires de Darth Noctis sur le territoire républicain. Apparemment, notre Seigneur Sith continue à prospérer à travers des sociétés écrans et des prêtes-noms. Mais le comptable est singulièrement difficile à localiser. Je n’ai que le nom de l’un de ses autres clients potentiels, un Twi’Lek qui trafique des épices. J’ai rendez-vous ce soir.
— Mais pourquoi vous êtes pas rentré au Temple ?

Le visage d’Ekkt se fit sombre.

— Au fil de sa carrière, Noctis a corrompu déjà plusieurs Jedis.
— Vous pensez qu’il a des agents à l’intérieur du Temple ?
— Vous êtes bien placé pour savoir, Karm, que même des Jedis très respectés peuvent se révéler peu recommandable.

L’allusion à la Maître traîtresse qui l’avait éduqué suffit à plonger le jeune homme dans le silence.
Luke Kayan
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Entre le mafieux uni à l'Ordre, les grands barbus facilement reconnaissables et les fraudes, Luke sentait ses jolies impressions sur le monde s'égratigner, et son esprit, se perdre. Il était pour l'instant, une paire de mains se retenant à la selle du speeder prêt à décoller. Point. L'appel d'Ekkt en personne ne fit qu'ajouter de la tension, le Hapien dû d'ailleurs faire de terribles efforts pour ne pas lancer entre ses mâchoires serrées un accusateur et jouissif "tu vois, je t'avais dit qu'il fallait attendre!". Ce serait aussi bas que stupide et inutile, d'autant plus que lui aussi commençait à s'inquiéter pour le lézard. Désormais sa froide colère se dirigeait vers le Jedi, c'était une colère relativement inoffensive, de fonctionnaire dérangé alors qu'il rangeait sa pile de papiers, de travailleur ponctuel, respectueux du protocole au possible désirant gronder celui qui avait inquiété tout le monde en n'appelant pas. Les comlinks aux fréquentations protégées n'étaient pas faits pour les Banthas.

La conduite à vive allure sur le speeder parmi les autres véhicules ou les ruelles permit de semer néanmoins, un peu de l'énervement de Luke. Il n'avait jamais été très vindicatif y compris à l'adolescence de toutes manières, et savait ce qui était vraiment important ou non. C'était au fond ce détail qui le différenciait des habituels hommes d'administration sans vie et bien souvent sans coeur. Désormais inquiet quant à savoir ce que l'Ombre avait découvert, le jeune homme descendit prudemment du véhicule, arrivé à destination. Il sentit un frisson parcourir son échine lorsque son ami lui décrivit un Trandoshan mécontent. De façon diffuse, le Hapien pouvait sentir la Force s'agiter, mais si peu, c'en était déroutant, mais logique à la fois, en effet Ekkt était un maître Jedi particulièrement discret vu la branche où il exerçait. Il maîtrisait donc extrêmement bien ses émotions, et surtout les manifestations habituellement laissées par ces dernières.

- C'est vrai. Le protocole suggère que lorsqu'un Jedi ne peut pas se rendre à un rendez-vous en pleine mission, il doit utiliser la fréquence cryptée ouverte pour l'occasion. Sans quoi, les autres Jedis ont pour ordre d'ouvrir une enquête de disparition au bout de 24h, certes, dans votre cas nous avons devancé le délai, mais c'est dans le protocole. Nous nous sommes vraiment inquiétés!

Fit courageusement Luke pour couvrir les épaules de Karm, lequel s'était certes, un peu précipité, tout en ayant raison. Ekkt aurait très bien pu être prisonnier de Big Bob - même si ce dernier semblait être son informateur.- ou n'importe quel gosse de riche qui s'ennuyait et avait décidé de semer la pagaille dans les beaux quartiers, façon remix du Parrain: un Hutt célèbre qui avait longtemps évolué et terrorisé Coruscant à une époque lointaine. Cette figure emblématique du crime avait recouvré la vie dans un holofilm non moins célèbre, bien que les Hutt passant peu à l'écran, les réalisateurs l'avaient remplacés par un Humain à l’espérance de vie inexplicablement longue. Bref, Le reptile n'avait pas le droit d'être fâché et...

Le cerveau de Luke bugua instantanément. Il posa sans aucune erreur de distance, ses yeux dans ceux de l'Ombre, accrochant ses petites prunelles sombres de son propre regard, clair et lumineux quoiqu'éteint. Il y brillait une étincelle indéchiffrable, comme si le Hapien attendait la prochaine phrase pour collaborer ou exploser. Oui, exploser , s'il venait à l'idée d'Ekkt d'impliquer Saï ou le Conseil dans une quelconque affaire de corruption. Depuis que le Jedi connaissait Karm et surtout ce qui s'était produit avec Tavaï, il n'était plus si naïf et saisissait que certains des leurs avaient de mauvaises intentions. Toutefois, le jeune homme n'admettait pas que les plus hauts représentants de l'Ordre puissent tomber si bas, eux si sages, si savants, leurs guides. Ils ne pouvaient pas se laisser avoir par un piège si grossier qu'y compris des yeux aveugles le verraient devant leur nez. Agiter la fortune ou la promesse de puissance devant un maître Jedi ne le ferait que sourire ou se fâcher, dans le pire des cas. C'était évident. Ils avaient tout pour eux, même lui en tant que Chevalier, qui voudrait perdre cela? Avoir cette relation avec Karm l'avait déjà terrifié car Luke ne se sentait pas apte à vivre hors de sa chère communauté -bien qu'il avait dit à l'Ark-Ni de ne pas le lâcher si le Conseil venait à en exiler un des deux à cause de leur amour et qu'il tiendrait sa promesse.-. C'était ridicule, de la folie pure.

- Si vous avez des soupçons, il faut en parler à Saï Don. Il est très occupé mais prêterait l'oreille à ce genre de problème disons, prioritaire.

La voix de Luke avait été plus sèche qu'il ne l'aurait souhaité, mais après avoir admis que cette éventualité était possible -hors Conseil et grands maîtres.- on ne pouvait pas demander au jeune homme d'aller contre ses convictions d'une voix douce et le visage guilleret. Le regard planté dans celui de l'Ombre, le jeune homme semblait prévenir, même si venant d'un proche-humain d'un mètre 70 à peine, aveugle et fluet la menace semblait ridicule pour un Jedi expérimenté, flirtant sans cesse avec les frontières de la légalité, armé d'un corps gigantesque et d'un esprit beaucoup plus affiné. Cela dit, le Hapien était une véritable plaie quand il s'y mettait, il n'assénait pas de gros coups mais continuait d'égratigner sans relâche, pendant des années s'il le fallait, il éplucherait les dossiers du possible hérétique, cherchant à le faire tomber pour trahison.

Pour le moment, il avait choisi son clan en demeurant ici. Sa présence, le fait qu'il accepte d'écouter démontrait que le Consulaire n'irait pas avertir le Conseil seul en pleurnichant tel un rapporteur. Luke n'était pas de ce genre, si fidèle soit-il au Temple. Considérant le cas de Tavaï, il acceptait les soupçons du Lézard bipède, du moins de l'écouter et le croire, jusqu'à preuve du contraire. Du moment qu'Ekkt n'impliquait évidemment pas Saï ou le cercle restreint du Conseil envers qui le Jedi avait toute confiance.

- Est-ce qu'on sait avec qui communique Noctis, et on est sûr que ce ne sont pas des agents doubles qui jouent son jeu? Mais ça je suppute que vous l'avez malheureusement confirmé avant d'en parler à qui que ce soit- Luke n'était pas stupide, il savait qu'Ekkt était compétent et droit, raison pour laquelle il acceptait quoiqu'à grande peine ce qu'il aurait vu comme une ineptie, une paranoïa ou attaque gratuite venant d'un autre.- Y a-t-il moyen d'entrer dans le cercle? De se faire passer pour un corrompu? Un intéressé éventuellement?

Cela paraissait lourdement difficile, Noctis devait choisir attentivement ses taupes, et surtout ne pas en accepter beaucoup. Il imaginait les suspicions de part et d'autres, entre le Sith et les Jedis assombris, ce devait être un vrai ni de vipères, la relation la plus malsaine qui soit. L'anecdote du Seigneur Noir appréciant la chair masculine revint en tête du Hapien qui se demanda si, par amour plus que par appât du gain, un Jedi n'aurait pas décidé de trahir sa communauté, auquel cas ils avaient un véritable problème car la passion entraînait l'aveuglement et dans certains cas, une fidélité à toute épreuve. L'éventuel charmé ferait tout pour satisfaire son "maître", alimenter ses projets sans rien chercher en contrepartie qu'une affection probablement simulée de la part du Hapien maléfique. Les accords commerciaux frauduleux étaient beaucoup plus faciles à rompre, et les promesses de pouvoir davantage encore, mais l'amour... L'Amour, le blond en savait quelque chose à son propre désarroi et inquiétude, un être qui aimait pouvait finir par faire des choses dont on ne l'aurait jamais cru capable auparavant.

- Que pourrions-nous faire, Karm et moi? Concrètement?

C'était une question importante, parce que si Luke éprouvait le désir d'aider le Trandoshan et qu'il savait que les accusations allaient le tourmenter, une autre partie de lui avait envie de tourner les talons, rentrer au Temple et oublier cette histoire. Il fallait bien que sa cécité le serve positivement parfois, non? Qui pourrait lui reproché de ne rien avoir vu, ou de ne pas vouloir le faire? Bon d'accord: Lui. Le blond ne se pardonnerait pas de laisser Ekkt dans le besoin surtout si ce dernier avait raison au final. Décidément, ce Noctis commençait à lui chauffer sérieusement les oreilles.  

D'une vague de Force, Luke lança un encouragement muet à son ami, silencieux depuis l'évocation de Tavaï la traîtresse, c'était aussi un peu pour lui que le jeune homme acceptait de prêter l'oreille à ce qui semblait être une hérésie. Parce qu'il savait que c'était vrai, que Karm avait vraiment subi tout cela. Impossible de nier l'impensable. De la même manière, ces nouveaux traîtres, peut-être lié à de pauvres Padawans devaient évoluer surtout en-dehors du Temple, sans quoi Saï les auraient rapidement démasqué, car Luke ne doutait pas des extraordinaires capacités de son mentor, étant, certes, peu objectif à cet égard.
Karm Torr
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— Du calme, Luke, du calme. Du calme et de la pondération.

Le Trandoshan pour sa part affichait une sérénité à toute épreuve.

— Je ne dis pas qu’il y a, à l’heure qu’il est, nécessairement des Jedis corrompus au service de Noctis au sein de notre Ordre. Mais il y a des Inquisiteurs qui le servent qui étaient jadis des Chevaliers respectables. Discrets, effacés, mais respectables. Ce précédent m’oblige à ne pas écarter l’éventualité que d’autres esprits aient été troublés par les arguments d’un Seigneur Sith tel que lui.

Karm, pour sa part, le concevait sans peine. Il imaginait fort bien que l’un de ces Padawans inexpérimentés que l’Ordre envoyait sur des théâtres d’opération où la violence de la guerre secouait les cœurs et tordaient les chairs pouvait avoir eu bien du mal à résister à l’angélique beauté d’un Seigneur Sith qui n’avait pas le type de l’homme maléfique défiguré par sa noirceur dont on se serait spontanément méfié.

— Du reste, les Ombres ont toute discrétion pour déployer les mesures de contre-espionnage que nous jugeons nécessaires au sein de l’Ordre et je ne vais pas alourdir la charge de travail de Maître Don pour quelque chose qui fait, hélas, partie de mes tâches ordinaires.

C’était une curieuse sensation que de considérer que ce qui leur paraissait exceptionnel, extraordinaire, même, à eux les deux Chevaliers qui ne croisaient des Siths qu’en de rares occasions, formaient le quotidien d’autres Jedis au sein de l’Ordre. Jamais Karm n’aurait été capable de mener cette vie toute en suspicion et en jeu de masques. Jamais il n’aurait été capable d’interroger un autre Jedi avec la méfiance qu’avaient témoigné pour lui les Ombres réunies pour enquêter sur son cas, après la trahison de Tavaï.

— Alors du coup ? Parce que bon, concrètement, je crois pas que Luke et moi, on soit les candidats idéaux pour débusquer des espions. L’ancien Padawan de Saï Don totalement dévoué à l’Ordre d’un côté, le petit soldat de toutes les batailles de l’autre…
— Le petit soldat qui a été formé par une renégate, qui professe des idées hétérodoxes et que certains considèrent comme un guerrier beaucoup trop attaché à l’art du combat pour être un vrai Jedi… ?

Pour le tact, on repassera.
Karm plissa les yeux.

— Vos propres collègues m’ont lavé de tout soupçon.
— Je n’étais pas en train de vous accuser, Karm. Mais de souligner que vous feriez un candidat idéal pour interagir avec des traîtres éventuels. Ils auraient bien des raisons de croire que vous puissiez être sensible à leur case. Ils auraient tort mais il n’empêche.
— Hmouais, si vous m’aviez déjà vu en train d’mentir, vous envisageriez pas de faire de moi un agent infiltré.
— Les gens ont souvent des ressources qu’ils ne se soupçonnent pas. Ceci étant dit, Luke, vous êtes vous aussi un cas intéressant.

De toute évidence, le Trandoshan avait passé une partie de son temps à se documenter sur ses deux nouvelles recrues. Karm avait l’impression d’être un pion sur l’échiquier de l’Ombre. C’était souvent le cas, quand on était Chevalier : les hautes sphères de l’Ordre employaient leurs ressources sans toujours mettre les Chevaliers et les Padawans dans la confidence de leurs plans d’ensemble.

— J’ai été contraint de demander de l’assistance à un contact pour comprendre un peu mieux la psychologie de Noctis et notamment ses… hm. Goûts. Je dois avouer que les romances humaines m’échappent et particulièrement celles de cet ordre-là. Non que je les condamne, naturellement…

Il adresse aux deux amants un regard entendu.

— Bref, je cherchais à établir quelques profils types des conquêtes de Noctis. C’est toujours un excellent moyen d’infiltration. Et il me semble que, Luke, vous conviendriez fort bien. Il faudrait réunir des circonstances favorables, vous construire une identité d’emprunt, mais je crois que si l’on vous plaçait de la bonne manière sur le chemin de notre cible, il cherchait certainement à vous séduire et…
— Oui, bon, du coup, le Twi’Lek qui trafique des épices, là, interrompit un Karm un peu irrité à la perspective que l’on envoie son cher et tendre convoler avec un Hapien pur sang probablement infiniment plus charismatique que lui.
— Hé bien, s’il nous donne des informations sur les entreprises de Darth Noctis, alors nous pourrions mettre en place un piège. Pour infiltrer l’un d’entre vous, ou vous deux, à l’intérieur de son organisation. Pas pour une mission à long terme. Mais pour le localiser, transmettre un état des lieux et planifier une extraction.
— Y a sans doute des Ombres qui feraient ça bien mieux que nous. Des gens entraînés pour ça. J’vois mal comment Luke pourrait se faire passer pour je sais pas quoi, sans qu’un Seigneur Sith se rende compte de sa sensibilité à la Force, du Côté Lumineux, de tout ça.
— Oh, je doute que cela rebute notre cible. Quand on se fait appeler le Corrupteur, c’est qu’on a un goût certain pour les innocents. Luke, vous êtes un Hapien, vous correspondez à l’idéal de fragilité apprécié par Noctis, vous êtes un défi pour tout corrupteur, et si j’en crois votre dossier, l’infiltration ne vous est pas entièrement étrangère. J’aimerais que vous considériez sérieusement cette éventualité.
Luke Kayan
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Luke ouvrit de grands yeux, lesquels exprimaient une telle surprise en cet instant, qu'il aurait été facile de croire qu'ils avaient recouvré leur faculté. Plantés dans les mirettes de l'Ombre ou plutôt du fou, ils le jugeaient désormais d'un air absolument ahuri. Luke n'avait jamais été très expressif, et ceci c'était davantage atténué avec la cécité ainsi que sa formation pour diverses infiltrations. S'il était tout à fait d'accord avec Ekkt par rapport aux ressources insoupçonnées- fut un temps, on lui aurait évoqué l'idée d'apprendre à soigner et à infiltrer qu'il aurait éclaté de rire.- le jeune homme l'était moins en ce qui concernait l'exploitation illimitées de celles-ci.

- Pardon? Vous voulez que je joue le prostitué?

C'était sorti tout seul. Rarement, le Jedi s'était senti aussi humilié. Ce n'était pas parce qu'il était homosexuel et apparemment en couple qu'il était le candidat idéal pour faire ce genre de boulot. Celui proposé à Karm était douloureux, certes, puisqu'il concernait son sombre passé, mais lui, on le prenait surtout pour son physique et ses préférences sexuelles. C'était outrageant. Le jeune homme dut se forcer au calme, une chose rare chez lui.

- Maître Ekkt, j'en sais à peu près autant que vous dans le domaine de la séduction.

Répliqua-t-il d'un ton tranquille qui parvint à le satisfaire. Il expulsa une bouffée d'air sous forme de soupir pour rassembler la Force autour de sa personne en un halo léger mais protecteur, de façon toute à fait inconsciente. D'une part, il se contrôlait comme Maître Don lui l'avait enseigné, usant de ses capacités de diplomate, de l'autre la Force venait à son secours comme toujours, lorsque le stress l'envahissait. Et présentement, les perspectives proposées commençaient vraiment à l'inquiéter. Il n'aimait pas l'idée d'envoyer Karm en appât, tel le parfait petit soldat noirci, éclaboussé par les cendres de son ancienne maîtresse, et détestait l'idée de jouer la chose fragile qui pourrait attirer Noctis. D'autant que le Hapien disait vrai, il n'avait rien d'un séducteur. Le chevalier turquoise et lui s'étaient rapprochés grâce au naufrage, au fait de parler et de traverser des épreuves ensemble. Luke n'avait jamais fourni d'efforts pour se montrer attirant, il avait simplement été lui, et même Karm était plus expressif que sa personne lors de leurs moments de tendresse. Le chevalier demeurait plutôt distant, froid, il lui fallait vraiment être à l'aise pour commencer à se libérer, or face à un Seigneur Sith, il serait tout sauf à l'aise, et puis il avait la notion de fidélité, lui, et de limite d'infiltration.

- En imaginant que j'accepte, comment est-ce que je me débrouille pour repousser Noctis sans griller ma couverture s'il m'entraîne dans sa chambre? Non parce que je suis complètement dévoué à l'Ordre, mais passer dans le lit de quelqu'un, non.

Luke avait entendu parler du travail polémique des Ombres, certaines se prostituaient au nom de la lumière, pour réussir leur mission mais il ne se sentait pas de taille à accepter des choses d'un Seigneur Sith amouraché de sa personne et craignait de tout faire rater si les choses débordaient. En songeant à la mission, le Hapien pensait que cela faisait partie de son travail d'essayer, qu'il pourrait se prêter au jeu, mais il se pensait incapable de tenir le masque si Noctis allait trop loin.

Le jeune homme se sentait honteux de s'opposer systématiquement, mais il n'était vraiment pas certain que cette mission soit une bonne idée, si soulagé soit-il que le Trandoshan n'accuse plus directement le Conseil.

- Et enfin, je sais que les Ombres, afin de se protéger, ont l'habitude de lâcher la personne lorsque sa couverture est grillée. Si Karm se fait prendre, il sera pris pour un traître par le Temple et personne ne lèvera le petit doigt pour lui.

- Non, j'ai prévu le coup, je m'engage à parler en son nom. D'ailleurs comme je sais que vous aimez les rapports, une fois n'est pas coutume, j'ai pris le soin et le risque d'en rédiger un. S'il devait arriver quelque chose, quoique ce soit, les bonnes personnes sauront où le trouver, afin d'y avoir toutes les explications concernant cette mission. J'ai vraiment besoin de vous. Karm, vous êtes bien plus capable que ce que vous croyez, regardez, vous l'avez bien convaincu de venir alors que c'est contre le protocole non?

Un sourire épineux apparut sur les lèvres du lézard, il semblait vouloir les dévorer tout cru, mais son aura plus lumineuse que lorsqu'il les avait reçu semblait montrer que sa colère avait disparu. Luke se demanda un instant s'il ne les avait pas attiré exprès en ces lieux malgré ses simagrées du début. Sinon comment leur aurait-il demandé tout ceci? Avait-il finalement prévu de leur communiquer les propositions au Temple ou attendait-il de pied ferme que les deux Jedis le recherchent, était-ce une autre épreuve et d'ailleurs, comment savait-il que Karm était l'instigateur de ces recherches ayant tourné court? Le Hapien avait les nerfs en pelote, ayant l'impression confuse qu'on lui faisait l'honneur d'une grande confiance, mais aussi d'être le jouet de l'Ombre. On leur faisait hériter du rôle dont personne ne voulait tout en maquillant la chose sous d'excellents hospices. Le coup du "on a vraiment besoin de vous, vous êtes le plus qualifié pour cela", Luke le connaissait après avoir rangé des archives pendant des semaines et des semaines.

- Si Noctis se rend compte que j'ai été séquestré à l'Académie Sith à 13 ans pendant des mois, il saura qu'on n'a pas pu me corrompre... De même que le côté obscur m'affaiblit et finit par me tuer. En aucun cas je ne serais une recrue idéale.

- Qui a parlé de recrue Luke? Pour cela nous avons Karm qui, sans vous vexer, de part ses compétences guerrières et son passé les intéressera bien plus. Vous auriez le rôle d'une nouvelle conquête, un caprice sur le court, le moyen ou le long terme, peu importe comment vous voit Noctis, puisque nous vous ferions rapidement sortir de là. Le but est qu'il vous voit. Et je ne doute pas que le défi lui plaira d'autant plus. Vous semblez résistant à la séduction -dans les deux termes, du côté lit et obscur selon vos propos.- Or d'après mon contact, cet homme aime les défis. Je doute qu'une femelle ou un mâle facile ne l'attire. De plus, qui dit jeu de séduction signifie prendre son temps. Voilà qui règle le souci de la chambre, je doute qu'il vous y amène dès le premier soir.

Le reptile fronça les sourcils puis croisa ses bras écailleux.

- Cela dit, le risque demeure, au moins de premières approches-encore une fois j'ignore comment cela fonctionne chez vous.- et vous devrez être capable de maintenir les apparences.

- Moi ce qui m'intéresse, c'est que la réputation de Karm soit protégée, c'est clair? Il a vécu l'enfer quand on l'a soupçonné et je sais ce que c'est par le biais de Maître Don également suspect à une époque.

- Comme je vous l'ai dit, je m'y engage personnellement, vous ai-je menti une seule fois?

Le jeune homme failli répondre qu'il ne savait pas, que probablement cette mise en scène pour les entraîner sur Coruscant à sa recherche, sa colère et gêne tombées trop rapidement lui semblaient passablement suspectes mais le jeune homme choisit de se taire, il s'était suffisamment opposé à un supérieur. Malgré la folie qu'on lui demandait, Luke avait toujours inscrit en lui le respect aux aînés. Il était donc en proie à un véritable conflit intérieur, bien loin de l'impétuosité des Ombres, de leurs jeux tordus pour démêler le vrai du faux, de la fin justifie les moyens. Maître Don, son référent, serait-il d'accord pour ça?  

- Karm, pour vous infiltrer, nous pourrions organiser une fausse trahison... Un combat y compris contre moi, dans lequel je perdrais par exemple. Nous pourrions vous fournir des informations assez sensibles -et malheureusement réelles car Noctis n'est pas stupide, il se rendrait vite compte que vous lui apportez des preuves inutiles.-que vous m'auriez volé. Vous, Luke, vous interviendriez plus tard afin que les deux événements ne paraissent pas liés. J'avais pensé à une soirée de gala ou à une mission diplomatique. Il serait facile de remplacer le Chevalier prévu pour la garde rapprochée ou les négociations. De plus, il y a pléthore de possibilités car Noctis est sociable, une soirée organisée ou un rendez-vous hasardeux dans un des établissements favori de notre cher ami Sith. Alors, qu'en dites-vous Chevaliers? Tout a été bien pensé. Qu'est-ce qui pourrait aller mal?  

Il leur proposait des plans et les laissaient éventuellement les modifier. Comme c'était gentil de sa part. D'un regard, Luke lui fit saisir qu'il devait s'éloigner-un exploit d'expression le concernant.- et le reptile accepta. Impassible, il attendait sans sembler se préoccuper de savoir si les deux Jedis allaient ou non accepter. Avait-il d'autres dindes à envoyer pour se farcir cette mission en réserve? Ou était-il vraiment persuadé que celles-ci allaient accepter? Luke ne savait lire dans son esprit et ceci le gênait considérablement. Il se tourna vers son ami, attendant son verdict, habitué à suivre lorsque de telles décisions, si lourdes devaient être prises. C'était son petit côté fonctionnaire, il avait de la volonté mais vraiment du mal à se décider, à sortir de ses sentiers mais avait confiance en Karm.
Karm Torr
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Silence.

Karm, les mains enfoncées dans les poches, les cheveux argentés lui barrant le regard, fixaient le mur couvert de graffitis en face d’eux, dans l’allée derrière l’entrepôt, loin de la curiosité du Temple et des Siths. Luke jeté en pâture à la concupiscence d’un Hapien beaucoup trop séduisant pour être honnête, lui à nouveau couvert d’opprobre aux yeux de ses frères et de ses sœurs, la perspective n’avait rien de riant.

Et néanmoins…

— Si c’est ce qui lui semble le plus approprié…

Sa voix n’était pas enthousiaste. Il releva le regard vers son compagnon.

— J’aimerais bien être autre chose que…

Qu’un guerrier, éclaboussé par les frasques de Tavaï, en qui en voyait le candidat idéal pour interpréter le violent et le corrompu. Il avait pourtant travaillé d’arrache-pied pour se bâtir une autre réputation au sein de l’Ordre. Pour être considéré avant tout pour ses talents d’explorateur. Presque un scientifique. Mais les anciennes habitudes avaient la vie dure.

— Toi, tu devrais être relativement en sécurité. Si les dossiers qu’on a lu sur Noctis sont vrais, ils traitent ses conquêtes comme la prunelle de ses yeux. Je sais pas si ça le rend plus rassurant ou plus flippant mais en tout cas, j’le vois mal te forcer à quoi que ce soit. Et puis Ekkt doit avoir l’habitude. C’est un Maître, il est vachement respecté, il sait forcément ce qu’il fait.

Il y avait quelque chose d’un peu inquiétant à confier l’élaboration d’un plan qui reposait tant sur les désirs homosexuels de Proches-Humains à un lézard géant que l’on imaginait mal bingewatcher Queer as a Corellian ou The Bounty Hunter and the Prince sur l’Holonet, certes, mais les états de service de Maître Ektt étaient irréprochables et Karm n’était pas du genre à se défiler devant la difficulté.

Il se retourna donc vers le Trandoshan et hocha lentement la tête.

— Excellent. Je vais partir en quête de ce fameux Twi’Lek. Retrouvons nous plus tard au Temple. Profitez de ce temps libre pour trouver un monde frontalier qui puisse servir de théâtre à notre petite comédie.

*

L’image de Noctis flottait au-dessus du bureau, dans la chambre de Karm.
Il était beau.
Il était vraiment très beau.

Le jeune homme jeta un œil à Luke.
Depuis plusieurs heures, ils étaient plongés dans les fiches techniques sur les mondes qui orbitaient entre l’Empire et la République, sur les calendriers mondains des différentes capitales, sur les profils des politiciens, à la recherche du cadre idéal pour leur apparente défection.

— Je crois qu’on peut utiliser Tavaï, murmura finalement l’Ark-Ni, ce serait beaucoup plus… naturel. Je m’enfuis avec des secrets militaires pour le compte de son organisation, Ektt me poursuit, je parviens à m’échapper de justesse, j’échoue à la frontière impériale, dans une zone sous l’influence de Noctis, je demande l’asile en désespoir de cause, on me mène à lui et, faute de pouvoir reprendre contact avec Tavaï, je me range temporairement à ses côtés. J’aurais moins l’air du fidèle soudainement converti au Côté Obscur et plus celui de l’allié de circonstance, mais ce sera vachement plus crédible. Et ensuite, toi… Toi, tu peux partir à ma recherche et te faire capturer quelques jours plus tard, dans la même région. Il croira pas que tu aies trahi l’Ordre pour le Côté Obscur mais si c’est un si grand romantique, j’suppose qu’il sera enclin à imaginer que tu veuilles vouloir me rejoindre par amour. Et ça minimise en tout cas le nombre de mensonges et de faux-semblants. Ensuite, tu peux faire mine d’être séduit par là.

Ni Ekkt, ni Luke ni Karm n’avait l’air de vouloir envisager la possibilité que Noctis se prenne d’intérêt pour l’Ark-Ni plutôt que pour le Hapien. Karm n’avait presque aucune expérience de l’infiltration et s’il pouvait certes se faire passer pour un guerrier en cavale, en puisant dans certains aspects de ses missions d’explorateur solitaire, si la situation se présentait, il aurait du mal à jouer les jolis coeurs. Que savaient-ils vraiment des goûts du Seigneur Sith ? Et s’il ne s’intéressait ni à l’un, ni à l’autre, de quelque manière que ce fût ?

Karm poussa un soupir.

— Sérieux, j’sais pas comment ils font. Vivre tout l’temps comme ça. Comment… J’suis angoissé rien qu’à l’idée des situations dans lesquelles tu vas te r’trouver, et angoissé à l’idée de devoir donner le change. Un coup, je me dis que tout ça est trop gros et qu’il le croira jamais, un coup j’me dis qu’on en fait pas assez et que y a aucun moyen qu’il daigne se pencher sur notre cas. Mais Ekkt a l’air si sûr de lui…
Luke Kayan
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Lorsque Karm poussa un soupir, Luke le retint d'une main posée sur le bras.

- Mine d'être séduit. On est bien d'accord, Karm. Je te serai toujours fidèle, quoiqu'il arrive.

Crut bon d'ajouter le Jedi en appuyant ses propos d'une légère onde de force et en imprimant ses doigts dans la chair de son ami, comme une pince, bien douce cela dit, puisqu'il relâcha rapidement son étreinte et tarda à se séparer, glissant pour devenir caresse flottante jusqu'à l'épaule de l'Ark-Ni.

- Mais je ne pense pas que se servir de notre relation soit une bonne idée. Vraiment pas. Premièrement cela pourrait le rebuter.- Un peu naïf, le Hapien était sûr que même un vilain Sith n'avait pas envie de passer derrière un amant fixe. Il se désintéresserait d'une proie non seulement lumineuse, mais aussi fermement amoureuse.- deuxièmement et surtout, on parviendrait juste à s'attirer des ennuis, à lui donner l'idée de faire du mal à l'un des deux pour faire chanter l'autre et je ne sais pas jusqu'à quel point je serais capable... De faire passer la mission devant. Quant à Tavaï, penses-tu que ça en vaille la peine? Si elle est en contact avec lui, elle lui crachera tôt ou tard si ce n'est fait, que son ancien Padawan l'a trahit, et que tu n'as jamais été sensible à sa cause. Mais tu la connais mieux que moi, alors si tu penses que c'est jouable par là, on tente. C'est vrai que ça ajoute du réalisme à l¡idée.

Le jeune homme se demandait où était l'Amaran sournoise, était-elle à la tète d'une organisation complice avec Noctis? Croisait-elle souvent l'homme? Si c'était le cas, jouer les adeptes fidèles pourrait se révéler être un échec cuisant.

- Moi non plus. Je ne pourrai pas.

Souffla le Hapien devenu une boule de nerfs qui peinait à se contenir, une chose exceptionnelle dans son cas. Le placide Luke avait du mal à supporter cet état qui ne lui était pas le moins du monde commun. Il faut dire que les enjeux étaient énormes, et intérieurement il s'inquiétait un peu de savoir jusqu'à quel point Karm résisterait à d'éventuelles éclaboussures. Si certains membres de l'Ordre le croyaient obscurci et si Ekkt avait menti, ou si son témoignage ne suffisait pas, il y aurait de quoi s'énerver, perdre patience et foi. Son ami ne chuterait-il pas vraiment ? Il était si sensible à la déception, et si blanc Luke pensait son cher Ordre, il n'omettait pas, au fond de lui même, la possibilité d'une grande bavure, d'une immense injustice qui les sépareraient pour de bon. Luke n'avait aucune envie de réellement repêcher son ami au fond de la noirceur. Et lui, que ferait-il si Noctis n'appréciait pas sa compagnie ou justement l'appréciait de trop? Si amoureux des dossiers bien confectionnés soit-il, le Hapien savait qu'il y avait des infimes différences entre ce que révélait les données accumulées et la réalité, surtout en ce qui concernait des êtres aussi complexes que l'ancien Jedi. Il ne comprenait pas pourquoi Ekkt comptait sur deux simples Chevaliers ayant déjà échoué dans le fond de la prison. Cette fois, en cas de désastre -Karm était devenu très sombres, dominateur et Luke avait simplement, failli mourir.- les secours tarderaient à venir. Luke était de moins en moins convaincu qu'ils feraient l'affaire, d'autant plus si la nature de leur relation se révélait. Il savait trop bien comment fonctionnait le chantage, y compris Maître Don s'y était plié en venant le sauver, laissant la porte ouverte aux ennemis à cause de lui.

- Si on le fait vraiment, je veux que tu saches que quoique tu vois, entendes ou puisse interpréter, je te serai toujours fidèle, à toi et à l'Ordre comme je te l'ai dit... Mais également que tu ne dois pas intervenir. La mission avant tout.

Acheva le blond avec conviction. Il savait, en principe, risquer moins que Karm. Sauf si le Seigneur Sith le piégeait, devinant son petit jeu, l’entraînait dans un recoin en faisant mine de mordre à l'hameçon pour le faire prisonnier, le torturer ou le tuer. Le Consulaire était littéralement mort de peur à l'idée de couper toute chance de sauvetage, mais il savait qu'il devait en être ainsi.

- Je t'en supplie, Tam. Ne sombre pas. Quoiqu'il advienne, je crois en toi, et toi, tu dois croire en la lumière.

Il savait combien ce serait difficile et que si lui risquait la mort, pure et dure, Karm pouvait courir, voler vers une autre fin, une agonie. Ce serait alors l'enterrement de Tam qui s'annoncerait. Si les Siths parvenaient à le convaincre que le Temple l'avait mal traité, se servait de lui -comme l'Artefact dans la prison, en sachant que de véritables êtres plein de duplicité étaient autrement plus convainquant.- son ami pourrait sombrer, mais il espérait au moins que ses derniers mots s'imprimeraient dans l'esprit du Chevalier Turquoise et le retiendraient. Il avait vraiment envie de croire que Karm en était capable, parce qu'il était clairement autre chose "que" ces trois points de suspension laissés perchés dans le vide.

- Tu es bien plus. Tu es autre chose que... Mais les Siths ne le savent pas. Nous. Ekkt. Moi. Si et le Conseil. Ils ont confiance en toi, moi j'ai confiance en toi.

Répéta le Hapien en délaissant ses fiches techniques pour se planter devant le Jedi. Il lui offrit une onde de lumière qui effleura son corps puis s'insinua dans son esprit, doucement mais fermement, cherchant à s'enfoncer jusque dans ses os, sa chaire, comme pour former une poche d'énergie à garder pour plus tard, lorsque son ami aurait besoin d'y puiser.

- Je me répète un peu là. Bravo l'éloquence le Consulaire. Non mais franchement, je pense chaque mot que je dis.

Cette mission pouvait achever de les unir, leur donner un équilibre valable pour "toujours" ou en finir tout court avec eux. Lui était bien décidé à ce que cela n'arrive pas. Malgré ses doutes, le stress que lui provoquait parfois son cher et tendre beaucoup plus aventurier que sa personne, Luke avait rarement été aussi heureux dans sa vie, aussi complet. Il n'avait pas l'intention que cela change.

Le silence régnait désormais dans leur petite chambre, si ce n'était les pales du ventilateur qui émettaient un ronronnement régulier, ainsi que les écouteurs de Luke, à travers lesquels un "bip" indiquait les mondes répondant le mieux à leur critère de recherche. Il était probablement temps de s'y remettre. Au final, ils l'avaient accepté, cette mission.
Karm Torr
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L’insistance avec laquelle Luke soulignait qu’il devait résister au Côté Obscur froissa un peu l’Ark-Ni. Son ami croyait-il que la chose ne fût pas évidente pour lui ? L’estimait-il si prédisposé à la trahison ? Le jeune homme fixa Luke un moment, sans rien dire, comme à son habitude, avant de murmurer :

— Je saurai me débrouiller.

Et puis il se remit au travail. Les mondes s’enchaînaient. C’était au moins une tâche à laquelle il était habitué, même si, d’ordinaire, il examinait plutôt les données naturelles, géologiques, biologiques, que la situation politique et diplomatique des planètes qu’il passait en revue, pendant de longues heures, à la recherche de l’endroit idéal vers où monter une expédition. Le soir était déjà bien avancé quand le Gardien décréta :

— Viens, on va manger.

Karm prêtait aux repas une attention scrupuleuse. Son intérêt était physiologique bien plus que gastronomique. Il fallait s’entretenir et pour s’entretenir, il fallait de l’énergie. Dans les couloirs du Temple, aux côtés de Luke, il murmura :

— J’suis pas faible, tu sais. J’suis tout aussi déterminé que toi, dans ma dévotion à l’Ordre.

Après un regard en biais à Luke, il conclut :

— Enfin bref, on fera ce qu’il faut et on le fera bien.

Le mess du Temple était pleine. Sur Coruscant, il était toujours plein. Le Temple fourmillait d’une activité qui ne dormait jamais : quand certains allaient se coucher, d’autres se réveillaient. Les espèces nocturnes se mêlaient aux espèces diurnes. Il y avait des recherches et des enquêtes qu’on ne faisait que la nuit. Bientôt installés en tête-à-tête à une table libre, près des immenses baies vitrées qui laissaient apercevoir au loin le vaste Sénat Galactique, les deux Jedis purent commencer leur repas.

Le datapad de Karm ne tarda pas cependant à vibrer.

— C’est Ekkt. Il confirme qu’on va pouvoir passer à l’étape suivante bientôt. Il a dû obtenir ce qu’il voulait du Twi’Lek.

Karm ne savait pas s’ils devaient vraiment s’en réjouir. Il y eut un silence et puis Karm déclara soudain :

— Tavaï est dans la Bordure Extérieure, à l’opposée de l’Empire.

Le jeune homme reposa sa fourchette.

— Elle mène une guérilla là-bas contre des avant-postes républicains. Probablement pour se sécuriser un petit territoire et pouvoir bâtir durablement des opérations de plus long terme. Y a des Sentinelles qui sont chargées de surveiller tout ça, j’ai vu quelques rapports. On m’a demandé si je voulais bien essayer d’infiltrer mais j’ai dit que je me sentais pas de le faire. C’était un peu…

Après avoir cherché ses mots, il haussa les épaules.

— J’sais pas. Lâche, je suppose.

Mais il se voyait mal berner son ancienne Maître et il n’était pas sûr de ses propres réactions en la revoyant. Il avait eu pour elle une admiration et un respect malsains, parce qu’il s’y mêlait la peur de nouvelles maltraitances, une sorte de soumission psychologique qu’il avait pu confondre pour de l’affection et même de l’amour, et l’idée d’affronter à nouveau cette réalité l’intimidait beaucoup trop pour qu’il se lançât dans l’aventure.

— Mais en tout cas, aucune chance qu’elle soit en contact avec Noctis. Le but de Tavaï, c’est l’annihilation de l’Empire. C’est de forcer la République à prendre des mesures radicales et autoritaires. De se plonger dans une guerre totale. Tavaï est pas corrompue. Elle est fanatique. J’sais franchement pas ce qui est pire.

Et Noctis, lui, qu’est-ce qu’il était ? Les dossiers réunis à son sujet ne permettaient guère de cerner ses motivations profondes. Ses choix paraissaient calculés, alors il n’était probablement pas l’un de ces fous furieux qui sombraient dans le Côté Obscur à cause d’une grande détresse ou d’une grande colère. Certainement, il avait accumulé, au sein de l’Empire, une grande richesse et un grand pouvoir. Etaient-ce, à ses yeux, des fins en soi, ou des instruments pour autre chose ? Fanatique ? Corrompu ?

— ‘Fin bref. J’suppose qu’il est inévitable que toute organisation complexe comme l’Ordre, avec tant et tant de gens, donne naissance de temps à autre à des traîtres et des transfuges. Faut se dire que c’est au moins le signe qu’on est pas victime d’un lavage de cerveau. Mais bon…

L’Ark-Ni reprit ses couverts pour achever son repas.

— Ektt nous donne rendez-vous en dehors du Temple dans deux heures. Tenue de civil, qu’il dit.

Voilà qui tombait bien : des tenues de civil, Karm n’avait presque que ça.
Luke Kayan
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- Non. nous le sommes. Face à un Seigneur Sith, excuse-moi, mais nous sommes tous les deux faibles.

Répliqua Luke sur le même ton avant de se murer dans un silence prudent. Il ne voulait pas se fâcher avec Karm au seuil de cette mission impensable, mais la sensibilité de son ami le contrariait passablement. Ce dernier paraissait toujours décidé à ne pas le croire de son côté alors que Luke lui avait déjà démontré sa confiance. Il avait estimé son avertissement mâtiné de tendresse justifié après les déboires de la prison, ce qui l'amenait d'ailleurs à toujours s'interroger sur le bon sens d'Ekkt. Envoyer deux Jedis particulièrement faibles vis-à-vis de l'obscurité, chacun à sa manière semblait stupide, et non, l'excuse des préférences sexuelles ne suffisait pas, ni celle du passé de Karm. Le jeune homme savait que certaines Ombres se prostituaient littéralement et qu'elles n'avaient aucun mal à feindre aimer le même sexe qu'elles. À un moindre niveau, il avait déjà fait semblant de se sentir attiré par une ennemie. Le Hapien n'arrivait pas à mettre le doigt dessus, mais quelque chose clochait. Quant aux contacts noirs justifiant une corruption, il y avait pour cela pléthore d'ombres disposant d'étranges liens, avec en prime, peu de possibilité d'être découvert, moins en tout cas que deux Jedis dévoués à l'Ordre. Aussi dévoués l'un que l'autre comme l'avait signalé Karm.

Luke repoussa son assiette à demi finie, il n'aimait pas gaspiller mais quand il était inquiet ou agacé -à priori les deux pour le coup- ça ne passait pas. Malgré son désir de partager ses doutes quant au sain justement de leur aîné reptile, le jeune homme garda ses pensées pour lui. Loin de croire que ce dernier les utilisait, il était plutôt persuadé que ce dernier avait trop travaillé, trop réalisé d'exploits pour prendre la pleine mesure des véritables capacités d'un Gardien et d'un Consulaire. Il s'était toutefois retenu à cause de son éducation: Ekkt possédait de nombreuses recommandations élogieuses, ses faits d'armes étaient reconnus, Luke lui devait donc obéissance.

- Tu as eu raison.- Reconnut le blond sans chercher à approfondir, Karm avait-il sainement jugé ne pas pouvoir le faire, ou avait-il eu peur? La seconde raison ne serait pas reprochable. En fait, c'était plutôt l'imbécile qui avait eu l'idée d'envoyer l'ex-Padawan de Tavaï dans ses griffes qui devrait se sentir coupable. Corrompu, fanatique ou normal, un maître connaissait son apprenti par coeur. Karm aurait été directement repéré.- Je pense que Maître Ektt et les Ombres en général voient des complots partout.

Renchérit Luke, bien qu'il admettait -preuve en était, il était demeuré aux côtés du reptile et de l'Ark-ni.- que certains traîtres faisaient leur nid au sein de leur si beau, si grand Ordre. Le jeune homme se leva de la table pour se diriger vers la chambre. Il savait que ne pas avoir terminé son plateau était une erreur en soi, mais il était incapable d'y songer, son coeur battait à cent à l'heure et il lui fallait toute sa maîtrise pour offrir un visage toujours aussi calme. Une fois dedans, le blond se changea, choisissant une des peu de tenues qu'il avait -contrairement à Karm, il affectionnait particulièrement sa tenue rassurante de Jedi, ample et discrète selon lui.- optant pour un jean propre et une chemise blanche, le tout surmonté d'une veste grise simple mais bien coupé, ce qui lui donnait l'air d'un étudiant de bonne famille mais détendu. Lui et la mode de toutes manières... Il se contentait de passer les doigts sur l'étiquette pour savoir ce qui allait ensemble - pour cet ensemble tout préparé, chaque accessoire contenait deux lignes parallèles en relief.- et hop, il enfilait selon les circonstances. C'était évidemment l'étape la plus facile.

- Karm, je suis désolé si j'ai dit quelque chose qui t'as fait croire que je te crois inférieur. Tu sais bien que ce n'est pas vrai, que j'ai confiance en toi.

Mais... Mais... Il y avait ce petit mais justifié par ce qui s'était produit dans la prison, et Luke avait simplement voulu s'assurer que leur lien perdurerait. Pour une fois qu'il s'était montré romantique, au bon moment en plus, puisque ces paroles, ces promesses seraient peut-être ce qui devrait surgir dans leur esprit à l'instant critique. Les Ark-Nis étaient très compliqués, et plus précisément celui-ci , tout écorché, sur la défensive. C'était ce qui faisait sans doute son charme.

- De toutes manières, je n'aime pas cette mission, il y a quelque chose qui ne me plaîs pas. Au-delà de ce qu'on est sensé faire et qui est évidemment risqué, anormal, contre-nature, mal organisé, précipité. Tout ce que tu veux. Derrière l'ombre, il y a encore d'autres ombres, mais je suis incapable de les déterminer. Ce doit être mon esprit paranoïaque, mais sois prudent. Et je ne te le dis pas parce que je te crois faible!

Acheva le jeune homme en haussant un peu le ton, histoire d'anticiper un quelconque reproche. Cette mission leur mettait les nerfs à vif, c'était donc logique qu'ils soient sur leurs gardes, prêts à bondir sur leur voisin. C'est dans cette ambiance un peu électrique que les deux Jedis retrouvèrent le Trandoshan, sans cérémonie, Luke tendit une copie de ce qu'il avait trouvé.

- Voici les propositions de Mondes - il tendit [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien] où quelques points avaient été surlignés par les bons soins de Bip-  Il y a Botajef, c'est pile à la frontière entre les mondes partisans de l'Ordre et des Siths, quoique penchant du deuxième côté, exactement pareil pour Ord Cestus, Phindar est plus connu mais plus enfoncé dans les terres ennemies, ou encore Columex, très proche de la "ligne", cependant partisan Jedi.

Résuma le jeune homme en demandant à ses collègues de tourner la page pour expliquer ce qu'il avait déjà plus ou moins appris par coeur. À défaut de sa vue, sa mémoire fonctionnait à merveille.

- Ord Cestus est chaud mais surtout désertique, ce qui est un avantage en ce qui concerne d'éventuels civils, il y a moins de risques de débordements, sauf que débarquer par là, un endroit totalement inintéressant est aussi plus suspect. Phindar est un monde tempéré où l'on trouve des installations de technologie avancée, pratique pour lire des informations volées, surtout que le monde en soi est discret. En ce qui concerne Columex, je pense que c'est trop axé Jedi et qu'aucun Sith ne pourrait "accorder asile" justement à un fuyard, puisque c'est hors de son territoire. On a donc principalement deux choix, dont les caractéristiques géologiques sont drastiquement différentes. À vous de voir, c'est vous l'expert.

Acheva Luke, un peu sèchement, décidant qu'il éprouvait de moins en moins de sympathie pour l'Ombre sans être capable de déterminer pourquoi. Probablement parce que ce dernier avait indirectement accusé des Jedis hauts placés d'être des corrompus et parce qu'il l'envoyait jouer les prostitués de luxe dans la gueule d'un Seigneur Sith sans être certain que le plan ne fonctionne. Si Noctis avait vu d'anciennes holonews il pourrait éventuellement reconnaître Luke, l'apprenti de Saï Don, sans parler de son passage sur Korriban. Il y avait décidément beaucoup de "si" et de risques, mais Ektt ne semblait pas s'en rendre compte. Abnégation et fidélité totale pour l'Ordre, expliquant que leurs vies -incluant la sienne- n'importaient pas, ou inconscience pure et dure? Le Hapien hésitait.

- Et si cela ne fonctionne pas pour X raison? Vous avez prévu un plan d'exfiltration, j'imagine.


Évidemment, n'est-ce pas? Car si mourir au nom de ses idéaux ne gênait pas outre-mesure le Hapien -en-dehors de la peur naturelle de quitter le monde terrestre.- il préférerait que son sacrifice soit utile et ne se perde pas dans un monde frontalier sans répercussion. Être applaudi, non? Mais servir la cause, un minimum! Et surtout, surtout , il tenait à ce que Karm soit un minimum couvert, aussi débrouillard, fort, incorruptible soit-il.
Karm Torr
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— Non, c’est moi. C’est moi qui suis désolé. J’ai réagi trop vivement.

Pour un Ark-Ni, en tout cas. Fidèle à sa culture natale, Karm se précipitait en tout cas sur l’occasion d’aplanir les dissensions et de résoudre la dispute. La solidarité et la diplomatie étaient au coeur de la vie des Ark-Ni, et les mouvements d’humeur étaient le plus souvent fort mal considérés.

— Moi aussi, je doute, en vrai. C’est pour ça, ça m’a stressé.

Ce fut sans doute pour se consoler que Karm laissa donc son regard s’égarer sur le corps de Luke alors que celui-ci se changeait. Il fit ensuite de même et ils prirent le chemin de leur lieu de rendez-vous. Les inquiétudes de son compagnon, il les partageait, mais le désir de faire toute la lumière sur les événements de Belsavis, et l’idée qu’ils pourraient peut-être mettre à mal même une toute petite partie de l’Empire Sith, étaient trop précieux pour qu’il se permît de remettre en question les méthodes de l’Ombre.

Une heure plus tard, donc, le Trandoshan pouvait hocher lentement la tête.

— Phindar, donc. Direction l’astroport.

Cette fois-ci, même Karm jugea que l’affaire était précipitée. Maître Ekkt avait-il sur la situation des informations qu’il ne leur communiquait pas et qui le poussait, après une longue enquête où il avait fait preuve jusque là d’une patience à toute épreuve, à mettre en branle en quelques heures un plan qui avait surgi soudain au détour d’une réelle de Coruscant ? L’Ark-Ni scrutait en silence le profil du reptile, évidemment indéchiffrable. L’aura calme du Trandoshan devait lui inspirer confiance. Sans doute.

Leur speeder garé dans les immenses parkings de l’astroport, après avoir contourné les formalités douanières grâce à leur statut de Jedi, ils embarquèrent sur un petit vaisseau de croisière qui devait les emmener jusqu’à Taris, d’où ils loueraient un vaisseau pour Phindar. La première partie du voyage se déroula dans un silence relatif, la présence d’autres voyageurs ne permettant guère de s’étendre sur les détails de la mission. Ekkt conservait une attitude imperturbable, affairé sur son datapad, et Karm, pour sa part, essayait d’envisager tous les aspects du rôle qu’il se proposait d’interpréter.

La conversation reprit dans l’astroport de Taris, alors qu’ils attendaient que leur navette de location fût prête.

— Je me suis fait passer auprès du Twi’Lek pour un trafiquant d’armes. Un homme sans idéologie, un profiteur de guerre, simplement, qui cherchait de nouveaux canaux pour écouler sa marchandise. Karm pourra facilement se présenter comme un client, avec son expérience militaire, pour le compte de Tavaï.

Pendant un instant, l’Ark-Ni se prit à se demander si ce n’était pas précisément Tavaï qui, dans toute cette histoire, intéressait Ekkt. Quoi de mieux que la corruption apparente de son ancien Padawan pour faire sortir l’Amarane de ses nouvelles forteresses de la Bordure Extérieure ? Mais non. Il devenait paranoïaque, lui aussi, avec toutes ces histoires.

— Quant à vous, Luke, hé bien… Vous serez un prisonnier. Un Jedi retenu en otage, comme une assurance-vie par un redoutable Trandoshan. Noctis a une passion pour les jeunes gens en détresse.

Il fallait bien reconnaître que le physique d’Ekkt lui permettait d’interpréter sans difficulté le criminel menaçant.

La navette était prête. Ils se mirent en route. Pendant les quelques heures du nouveau trajet, ils établirent les détails de la mission. Ekkt et Karm se donneraient rendez-vous dans un entrepôt de la capitale. Ekkt contacterait les Siths pour dénoncer Karm, un renégat jedi qui chercherait à détourner des armes impériales pour le compte de sa propre guérilla. Un client trahi par le Trandoshan pour s’attirer les faveurs des autorités locales. Le Twi’Lek, pour échapper à l’Ordre, sur Coruscant, lui avait donné quelques contacts qui ne manqueraient pas de faire remonter l’information jusqu’à Darth Noctis.

Pendant les deux à trois jours qui suivraient, le Trandoshan se promènerait dans la ville pour mener diverses affaires sans grande importance, avec son prisonnier hapien à ses côtés. Il espérait que ce serait suffisant pour susciter la curiosité de Noctis. Quand la double infiltration serait complète, Ekkt ferait mine de se retirer pour rejoindre l’espace républicain, mais continuerait à orbiter secrètement autour d’une géante gazeuse du système. Là, il serait rejoint par d’autres Ombres spécialisées dans l’exfiltration, qui couvrirait la fuite des deux Jedis sous couverture, quand la nécessité s’en ferait sentir.

En attendant, ils resteraient en contact par des messages codés laissés sur le Deep Holonet. C’était un plan dangereux, sans doute, mais simple et qui n’exigeait pas de Karm et de Luke qu’ils interprètent des personnages trop éloignés d’eux-mêmes. Quand leur navette se posa finalement sur Phindar, Karm était ainsi dissimulé dans la soute. La nuit tombée, bien après Luke et Ekkt, il sortirait discrètement de l’astroport, pour faire croire qu’il était arrivé par ses propres moyens.
Luke Kayan
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Luke se renfrogna, Ekkt n'avait pas répondu à sa question, fallait-il y voir un non, du pur dédain pour ce signe de "lâcheté", ou une faute d'inattention? Le blond oscillait entre les deux premiers cas, sachant que les Ombres étaient généralement courageuses au point d'être folles. Oui, parfaitement, ce n'était peut-être que de vils préjugés entre castes -dont il avait d'ailleurs discuté longuement avec Karm sur Belsavis.- mais il allait finir par croire qu'Ekkt incarnait la mise en pratique de ceux-ci, l'incarnation même de la tête brûlée, le comble pour un sang-froid. Sachant qu'il n'obtiendrait rien de plus, le jeune homme se tu, choisissant de se murer dans le silence. Au moins, Karm et lui ne s'en iraient pas fâchés après que chacun eût présenté son point de vue accompagné d'excuse, ce qui rassurait un peu Luke, le comblant d'une certaine reconnaissance envers son ami, lequel acceptait le dialogue contrairement à un certain reptile.

Franchement, il n'arrivait pas à déterminer si la mission était beaucoup trop clichée, trop simple ou trop complexe pour que Noctis tombe. Le coup de la princesse gardée par le dragon, dans les rues à défaut de la tour, certes. Cela semblait si ridicule que le Seigneur Sith croirait peut-être que les Jedis ne seraient pas capables de tomber aussi bas? Peu ravi de se séparer de l'Ark-Ni, le Consulaire dût en plus lui dire au revoir silencieusement, par le biais d'une onde de Force qu'il prit soin de rendre vraiment discrète. Au fur et à mesure que sa relation avec le reptile se dégradait, Luke se réfugiait dans le mutisme vis-à-vis de lui. Pour l'instant il lui fallait obéir, toutefois il n'allait pas rester complètement passif.

Toujours inquiet vis-à-vis de l'exfiltration dont les Ombres se défaisaient souvent en lançant un "je ne le connais pas", tel la queue d'un reptile, le jeune homme notait scrupuleusement tout ce qu'ils faisaient, y compris les heures de repas ou les endroits qu'il pouvait identifier. En soi, ce n'était pas très différent de ce qu'il faisait habituellement, en bon amoureux des rapports clairs, précis au point d'en être ennuyeux voire suspect. Qui avait l'idée de passer des soirs entiers à rédiger, revoir les points, annoter les moindres détails? On aurait dit un criminel qui préparait soigneusement son alibi. Le Conseil connaissait Luke cependant, en fait tous ceux qui le connaissaient savaient son obsession pour la paperasse, alors évidemment, le Trandoshan ne s'en formalisa guère bien qu'il n'aimait pas laisser, quant à lui, de traces écrites, sous prétexte qu'un ennemi pourrait tomber dessus. Hormis cette habitude d'Ombre, le fait que le langage braille lui soit inconnu devait aussi l'agacer, car il aurait beau fouiller -si l'envie lui prenait.- le Jedi ne saisirait pas les séries de petits trous percés soigneusement par le Hapien qui préférait le papier à la dictée sur Datapad.

De toutes manières peu causant lui aussi, le Reptile ne critiqua guère l'attitude si discrète du Consulaire. Il vaquait à ses affaires, l'emmenant souvent tel un prisonnier, une main pinçant son bras, comme le ferait un valide pour aider un aveugle... Ou un preneur d'otages pour s'assurer que sa proie ne fuirait pas, du moins pour des yeux et des oreilles avisées.

Luke ne chercha pas à contacter Karm malgré sa terrible envie, il ne voulait même pas s'y risquer lorsque le Trandoshan n'était pas présent car cela représenterait un risque considérable pour le second infiltré. Sans savoir où il en était dans sa progression, Luke laissait filer les heures puis les jours, toujours presque aussi silencieux aux côtés de son faux geôlier. Finalement, il jouait à merveille son rôle de prisonnier. Malgré sa confiance envers le Maître, précisément parce que c'était un Maître Jedi, Luke ne se sentait aucune affinité avec lui, il avait la sensation de croire en lui uniquement parce qu'il appartenait à l'Ordre et que son poitrail était perclus de médailles invisibles.

- Est-ce qu'il y a des nouvelles sur Deep Holonet?

Demanda le Jedi d'une voix aussi détachée que possible, sachant que c'était Ekkt qui avait accès aux messages tant pour les envoyer que pour les recevoir. Le Trandoshan secoua la tête négativement, Luke poussa un léger soupir, tout en se réprimandant intérieurement, c'était trop tôt, il s'était montré impatient et beaucoup trop attaché. Qu'écrirait le reptile dans son rapport à leurs propos? S'ils survivaient...

Deux jours après la supposée infiltration de Karm sur Phindar par ses propres moyens, Ekkt et Luke se "promenaient" dans les ruelles, notamment une riche allée prometteuse, lorsque le Hapien se tourna vers une vitrine. Il semblait laisser ses prunelles glisser dans la rue au rythme d'une créature invisible, incapable de les détacher d'une course visible pour lui seul. Un pincement dans la Force, infime, le fit cligner des yeux.

- Là-bas

Il pointa un endroit du menton, geste surprenant pour un aveugle mais très précis et surtout discret. Bien entendu, vu les individus louches dont toute société recelait, Luke pouvait avoir désigné un simple Sensible à la Force au coeur noir -formé ou pas.- mais l'aura lui avait semblé puissante, tout en étant voilée à la fois. Le regard peu distrait par le paysage et son lien avec la Force lui permettaient en général de détecter ce genre de faille dans la lumière, il était dans ces cas-là comme un chien au flair incorruptible, surpassant les maîtres. C'était, cela dit, son seul vrai atout car pour le reste, il avait dû demeurer passif, obéissant envers le Trandoshan, totalement incapable de lire en lui.

L'Homme au sang-froid tourna des yeux beaucoup plus efficaces et inquiétants que ceux de Luke. Ils étaient en plein soleil, et pourtant une ombre voilait déjà le regard du prédateur qui fouillait les alentours, à la recherche de ce qu'avait bien pu détecter Luke. Noctis? Alors qu'ils avaient pour le moment, laissé tomber l'idée du gala, ce serait inespéré, sans doute faudrait-il se contenter d'une âme égarée ou au mieux de l'un de ses sous-fifres.
Absalom Thorn
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— Vous avez l’air de vous porter mieux.

Dans la suite qui servait de prison à Karm — et il y avait certes dans la Galaxie bien des prisons plus inconfortables —, l’Ark-Ni opposa le même regard placide et le même mutisme qu’il avait eus jusque là pour Darth Noctis, depuis que les Acolytes du Seigneur Sith lui aient été tombés dessus, après que Maître Ekkt l’avait dénoncé. Il s’était défendu, il avait été blessé, et depuis, l’Hapien veillait avec une sorte de douceur inquiétante à son rétablissement.

Plus que l’aura sombre de l’ancien Jedi, c’était sa beauté, sa beauté presque obsédante, qui intimidait l’Ark-Ni. Il sentait confusément qu’elle n’était pas naturelle, que même les miracles génétiques des Hapiens ne l’expliquaient pas entièrement, et qu’elle devait être nourrie, encore, par la puissance du Côté Obscur, mais parfois, le soir, quand il fermait les yeux, pour essayer de dormir d’un sommeil léger et prudent, il avait l’impression de voir encore les lèvres, les cheveux, les mains de Noctis.

C’était une corruption, une corruption orchestrée sciemment par l’ennemi, et il y résistait de tout son être.

*

— Et si pour une fois tu t’abstenais de secourir tous les oisillons tombés du nid ?

Sur l’hologramme qui flottait au-dessus du bureau de Noctis, la mine de l’Inquistrice Sith était contrariée. L’Hapien haussa les épaules qu’il avait jolies, comme Karm avait pu le remarquer.

— Que veux-tu, j’ai l’amour du théâtre. Et je m’en voudrais de ne pas rendre les honneurs à leur comédie. De Belsavis à Naboo, de Naboo à Coruscant, de Coruscant à Phinder, ces deux garçons sont d’une remarquable ténacité.
— Et le Trandoshan ?

Darth Venenous connaissait bien Maître Ekkt : ancienne Sentinelle elle-même, avant que Noctis ne la corrompre, elle avait pu collaborer plusieurs fois avec l’Ombre.

— Assurément un excellent candidat pour notre petit projet.

Venenous soupira.

— Comment avancent les recherches ?
— Nous avons réduit à une trentaine de profils potentiels, en fonction des aptitudes. On se penche désormais sur l’aspect pratique.
— Excellent. Tiens moi au courant.
— Bien sûr, Maître.

*

Un brouillard venait d’envahir les rues de la capitale. Sombre, épais, impossible à percer, il troublait tous les sens. Ekkt se pencha à l’oreille de Luke et murmura :

— Que la Force soit avec vous.

C’était le moment. Des tirs de blaster résonnèrent. Bruits de sabres lasers. Une seringue dans le cou de Luke. Bientôt, c’est l’inconscience.

*

— Bonjour, Luke.

La voix de Noctis était douce, chaleureuse. Presque comme une caresse. Il se pencha pour pousser un gobelin d’eau contre les doigts de l’autre Hapien.

— Vous devez avoir la gorge sèche. Je crains que ce ne soit un effet secondaire de l’anesthésiant que nous avons dû vous injecter pour vous soustraire la vigilance de Maître Ekkt.

Il employait le véritable nom de l’Ombre, et non le pseudonyme auquel celui-ci avait eu recours, pour se faire passer pour un marchand d’armes. Voilà qui n’était pas bon signe. Pourtant, Luke était libre de ses mouvements et confortablement installé dans le fauteuil d’un petit salon.

— Vous avez en tout cas fait preuve de beaucoup de courage en acceptant de seconder un plan dont je ne suis pas encore très sûr de comprendre tout à fait les tenants et les aboutissants. Il faut bien avouer que votre ami, le Chevalier Torr, n’a guère été coopératif, mais je suis enclin à lui pardonner son silence, tant il est charmant, même quand il ne parle pas. J’imagine que vous n’avez hélas jamais eu la chance de voir ses yeux, mais c’est un spectacle fascinant. Tout à fait fascinant en effet.

Le Seigneur Sith se releva de son propre fauteuil.

— L’une de mes proches collaboratrices s’est farouchement opposée à ce que je vous laisse arriver aussi loin mais si ce qu’on m’a dit de Karm Torr est vrai, je crois que je n’aurai pas fait un médiocre profit, en le laissant venir jusqu’à moi. Mais enfin, reposez-vous, Luke, reposez-vous. Nous ne sortirons pas de l’hyperespace avant un moment. Je crains que Maître Ekkt ne monte inutilement la garde derrière sa planète déserte.

Et les portes du salon du destroyer impérial se refermèrent hermétiquement derrière Noctis, laissant Luke seul à méditer ces pensées empoisonnées.

Deux passerelles plus bas, le Seigneur Sith pénétrait dans la chambre de l’Ark-Ni.

— Votre ami nous a rejoint. Une beauté saisissante. Fragile et androgyne.
— Luke, ne put s’empêcher de murmurer l’Ark-Ni.
— Lui-même. Et maintenant qu’il est parmi nous, j’espère que vous vous montrerez plus loquace. Au risque de paraître insistant, j’aimerais beaucoup entendre ce que vous avez à dire à propos d’H’olgan Tavaï.
— Où est-ce que vous nous emmenez ?
— Plus en retrait, au sein de l’Empire. Loin des frontières. C’est mal fréquenté, vous savez, les frontières. Ceci étant dit, si vous me parlez de Tavaï, je ferai le nécessaire pour que vous soyez reconduits en territoire républicain, avec Luke, si toutefois vous en formuliez le souhait. Songez que vous ne trahiriez pas l’Ordre, en m’entretenant d’une femme qui l’a trahi elle-même, et qu’il n’y a pas d’apparence que vous puissiez m’aider à former une nouvelle alliance, tant elle est éloignée d’avoir des sympathies pour l’Empire.

En attendant, la porte de la chambre de Luke s’ouvrit à nouveau, pour laisser entrer un esclave d’une vingtaine d’années, un humain à la peau sombre et au corps sculpté, l’un de ces innombrables éphèbes qui gravitaient autour de Darth Noctis.

— Notre Seigneur m’a demandé de bien vouloir pourvoir à vos besoins, Chevalier. S’il vous manque quoi que ce soit, n’hésitez pas.
Luke Kayan
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Le corps rebelle, refusant de lui obéir, Luke s'effondra rapidement bien qu'il ait tenté d'invoquer la Force pour empêcher l'anesthésiant d'agir, malgré l'inévitable, malgré le but recherché. Des heures plus tard, les muscles encore assoupis, le jeune homme se réveilla avec une telle soif qu'il pensa d'abord se retrouver dans le désert d'Ord Cestus. Que s'était-il passé? Le lézard avait-il finalement choisi cet endroit pour la mission? La mission? Où en était leur plan? Des bribes lui revinrent en mémoire, bien peu furent nécessaires pour aligner les éléments.

La mission la plus courte de la Galaxie. Il savait. Noctis connaissait l'identité d'Ekkt laissé derrière, et il était au courant de l'existence d'un plan. Perdu. Quelque chose de froid toucha ses mains que le Jedi rétracta par automatisme. Seuls les réflexes du Seigneur Sith permirent au verre de survivre à une probable chute. Luke s'était automatiquement engoncé sur son siège, attendant vaillamment, mâchoires serrées, des coups qui ne venaient pas. Selon les souvenirs affluant de Korriban, ce n'était pas normal. Noctis était un vilain, il était sensé le frapper, l'humilier, non? Rien de tel ne se produisit, le Chevalier fut loin de s'en sentir rassuré.

Le nom de son ami lui fit lever la tête, beaucoup trop rapidement à son goût, il planta ses yeux vairons sur la silhouette du Hapien, naturellement insensible à son charme, aidé par sa cécité et l'agacement qu'il sentait poindre. De quel droit parlait-il du regard de Karm?

- Le Chevalier Torr est un professionnel, et je le suis aussi. Vous n'obtiendrez rien de nous.

Se contenta de répondre le jeune Jedi - alors qu'il aurait rêvé d'hurler un pathétique "laissez-le tranquille".- d'une voix rendu grave par l'endormissement de ses cordes vocales. Il résista jusqu'au départ de l'homme pour se jeter sur son verre d'eau. En attendant, il ne cilla que très rarement, les yeux toujours plus précisément vissés dans ceux de leur ennemi. Non seulement Karm semblait être celui qui intéressait davantage l'être noir, mais en plus, il avait l'air d'être au courant pour leur relation, vu ses propos "déplacés" sur ses yeux, ses menaces voilées. Du moins Luke le prenait ainsi. Au moins Ekkt n'était pas mort, mais celui qui n'avait pas daigné répondre à sa question, accepterait-il de les exfiltrer?

Qu'avait-on dit à ce mégalomane de Karm? Serait-il possible qu'une partie de la mission ne soit pas totalement à l'eau encore, ou pensait-il réellement pouvoir le manipuler? Luke y compris doutait un peu, parce que la puissance de Noctis ne faisait aucun doute, malgré ses sens encore endormis. Quant à son intelligence, Luke craignait qu'elle ne dépasse facilement celle de ce maudit Trandoshan, ou encore la sienne, après tout ne s'était-il pas jeté dans cette folie?

Le Hapien décida qu'il tenterait quand même de faire parler Noctis, mais pour l'heure, encore faible et ne sachant rien de l'Ark-Ni -sinon qu'il avait vraisemblablement capturé vu les détails mentionnés par son aîné.- Luke préférait se taire. À ce petit jeu là, c'était sûrement lui le plus fort: la patience. L'esprit bloqué, le Jedi s'auto-protégea, préparé aux coups, comme lorsqu'il était enfant face à sa mère, ou sur Korriban, mais la maltraitance n'arrivait toujours pas. Un peu dérouté, il suivit inutilement du regard le départ de l'homme que tout le monde disait absolument magnifique, y compris Karm.

- Je suppose que ça n'inclut pas les plans du vaisseau? - Ironisa Luke, contaminé par l'humour Ark-Ni. Quoiqu'il avait toujours été un peu piquant en mission, sous la pression. - Et encore moins les clés de la cellule de mon collègue. Non?

Soupira le jeune homme en laissant l'éphèbe apparut de nulle part prendre son verre. Celui-ci la tête basse se contenta de récupérer le bien, tandis que Luke en profitait pour projeter son aura sur lui et glaner des informations. Était-il Sensible? Incorruptible? Le diplomate cherchait la moindre faille psychologique -et un esclave était sensé en avoir beaucoup. Un esclave, un serviteur ou un apprenti, qu'en savait-il vraiment? Noctis, le roi du théâtre aurait-il été jusqu'à payer les services... d'un employé?- afin d'y insérer ses mots, le tout sans agressivité évidemment.

- Merci. Comment vous appelez-vous? Et où sommes-nous?

Demanda-t-il poliment bien qu'il ait déjà un doute à cause d'une légère sensation de balancement, usant d'une méthode simple mais fréquemment utilisée par les Consulaires sur des personnes brisées, leur réclamer une identité pour faire surgir d'anciens souvenirs en eux, des souvenirs de liberté et d'orgueil. Pour le moment cela dit, le Hapien cherchait surtout à savoir s'ils étaient dans des appartements ou dans un vaisseau, sur Phindar ou dans un recoin perdu de la Galaxie, tout en établissant un contact plus personnel avec l'homme.

Les pensées de Luke filant naturellement vers Karm le poussèrent à lancer une Onde de Force dans les couloirs, espérant atteindre son ami. C'était un appel bref mâtiné d'une tendresse impossible à complètement contrôler, pour le situer, pour s'assurer qu'il était bien en vie, tout en agissant comme s'il avait encore l'espoir fou que Noctis ne soit pas au courant de leur relation. Ils étaient... Des professionnels.
Karm Torr
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— Je veux le voir.
— Vraiment ?
— Vous allez nous tuer, de toute façon, alors qu’est-ce que ça change ?
— Vous tuer, moi ? C’est mal me connaître, Karm. C’est très mal me connaître.

Il y avait eu une pointe de tristesse dans la voix du Hapien — et d’une tristesse qui avait l’air parfaitement sincère. Comme de quelqu’un qui se serai senti injustement méjugé.

— Je n’aspire qu’à trouver les moyens de vous rendre la liberté, à vous et à votre ami, tout en m’assurant de conserver la mienne, et de survivre à votre rencontre. J’imagine que vous êtes venus là, l’un comme l’autre, pour me capturer ou me tuer. Vous seriez surpris de l’habitude que l’on peut finalement prendre, d’être constamment l’objet du complot des autres.
— J’vais essayer de pas me laisser envahir par la compassion mais j’peux rien promettre.
— Certes.

Noctis parut rester un moment perdu dans ses pensées puis il se releva.

— Venez, nous allons retrouver votre ami.

Ami. Quel terme ambigu. Qu’est-ce que Noctis savait de leur relation ? De toute évidence, il les avait surveillés depuis qu’ils avaient commencé à se mêler de ses affaires. Ce n’était pas surprenant, maintenant qu’il y réfléchissait bien. Avait-il étudié soigneusement leurs dossiers ? Leurs tempéraments ? Leurs habitudes ?

Karm emboîta le pas à l’Hapien. Il fit son possible pour graver dans son esprit la disposition du vaisseau, alors qu’ils passaient de passerelles en coursives et d’escaliers en ascenseurs, même si le destroyer impérial était au fond assez similaire des plans qu’il avait pu étudiés par le passé. Il finit par s’intéresser beaucoup plus à celles et ceux qui le croisaient : des soldats impériaux, des ingénieurs, des scientifiques, deux ou trois Acolytes Siths, qui tous témoignaient pour le Seigneur non la peur soumise à laquelle Karm s’était attendu, mais bien plutôt une déférence respectueuse.

C’était la première fois que l’Ark-Ni rencontrait un Seigneur Sith. Il en avait aperçu de loin, sur les champs de bataille, bien protégés par des rangées de séides prêts à se sacrifier pour la grandeur de quelque lointaine figure tutélaire. Mais jamais de près. Il avait manqué d’imagination. Il s’était représenté des tyrans cruels, une noirceur oppressante, une violence de tous les instants, ou subtile, ou brutale.

Noctis, c’était autre chose. De la patience. De la politesse. De la douceur, même. Les traits angéliques jouaient beaucoup, sans aucun doute, mais tout dans l’attitude du jeune Seigneur évoquait le raffinement d’une aristocratie cultivée plutôt que la sourde fureur de la vieille noblesse guerrière. Il y avait de l’ombre, bien sûr, de l’ombre toujours, mais comme un parfum entêtant et nuancé.

— Or’n, Chevalier, je m’appelle Or’n. Or’n Katir de la maison de Spharox. Et nous sommes sur…

Les portes de la suite s’ouvrirent pour laisser apparaître Noctis, et Karm.

— Monseigneur.
— Merci, Or’n. Je sais que tu as fort à faire, c’était très aimable de prendre un peu de temps pour t’occuper de notre invité.
— Vos désirs sont des ordres, murmura l’esclave d’un ton qui laissait entendre que parmi ces désirs, tous n’étaient pas chastes, à qu’à ceux-là, il obéissait d’autant plus volontiers.

Noctis lui adressa un sourire bienveillant et le jeune homme se retira.

— Bien.

Karm tâcha de contenir son inquiétude en observant Luke. Le jeune Consulaire ne paraissait pas avoir été trop éprouvé par Noctis. Les Seigneurs Siths n’étaient-ils pourtant pas censés être de grands amateurs de torture ? Une fois de plus, l’Ark-Ni posa sur leur geôlier qui s’installait avec sa grâce habituelle dans l’un des fauteuils de la chambre un regard où la méfiance se mêlait à la perplexité.

— Il semblerait que vous ayez un certain nombre de questions à propos de Belsavis et du rôle de mon organisation dans les événements qui s’y sont déroulés. A défaut de me livrer pieds et poings liés à la République pour y faire l’expérience de ce qui y tient lieu de système judiciaire, je suppose que je peux au moins répondre à quelques-unes de ces questions, maintenant que nous sommes en sécurité, en territoire impérial. Et une fois que votre curiosité sera satisfaite, chacun pourra aller de son chemin.
— Ah parce que vous allez nous relâcher comme ça, par pure bonté d’âme ?
— A moins que vous ne décidiez de rester, évidemment. C’est après tout ce pour quoi on vous a envoyé ici, n’est-ce pas, Karm ?
— Pour ? Que je reste près de vous ? J’pense pas non.
— Pour voir si vous resteriez. Il y a quelques années, une Sentinelle proche de Maître Ekkt a rejoint mes rangs. Elle a jugé qu’engoncé dans la politique républicaine, l’Ordre Jedi avait cessé d’être une institution à la recherche des mystères de la Force et de l’excellence personnelle, pour devenir une réserve d’esclaves au service des intérêts privés des grands capitalistes galactiques qui infestent les hautes sphères républicaines.
— D’esclaves ?
— Vous ne touchez pas de salaire, que je sache ?
— Ouais, on est des volontaires.
— Les volontaires ont des droits civiques. Le droit de fonder une famille, d’avoir des biens, de donner leur avis, de voter. Quand on travaille gratuitement en étant privé de ses droits et retenu loin des siens, c’est qu’on est un esclave.

Silence.

— Quoi qu’il en soit, cette jeune femme m’a rejoint, pour poursuivre ses propres centres d’intérêt, et Ekkt a, depuis, semble-t-il, développé une sorte d’obsession pour les trahisons à l’Ordre Jedi. Je suppose que c’est le propre de toute organisation autoritaire que de finir par développer une méfiance de tous les instances contre ses membres. Quoi qu’il en soit, si je ne m’abuse, Karm, Maître Ekkt vous a envoyé à moi pour vous tester, persuadé, j’imagine, que l’entraînement que vous avez reçu vous destine à l’obscurité. S’il avait vraiment voulu infiltrer mon organisation, j’ose espérer qu’il eût fait preuve de plus de subtilité.
Luke Kayan
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La Force coula dans ce que Luke ignorait être les entrailles d'un vaisseau, mais qu'elle atteigne son but ou s'éteigne au coin d'une coursive importait peu, puisque Karm vint à lui. Il avait à peine eu le temps d'incliner légèrement la tête et de répondre un "enchanté Or'n" que l'action venait à lui. Connaissant son ami, le Hapien imagina que ce dernier avait réussi à s'échapper à la barbare pour venir le délivrer, aussi s'apprêtait-il à faire un de ces sprints qu'il ne savait pas faire, avant de déchanter: Narcisse était avec lui. Au moins l'Ark-Ni paraissait entier et plutôt en forme. Franchement, Luke ne comprenait pas du tout sa manière de fonctionner et cela le mettait d'autant plus mal à l'aise. Il ne correspondait à aucun profil type étudié tout au long de sa carrière, ni même dans le bonus de formation généreusement offert par la police de Coruscant lors de son infiltration en tant que Junkie dans les bas-fonds. Quoique, si, il y avait une personne qui ressemblait à Noctis, en beaucoup moins fine, élégante et intelligente, mais quand même. Aleema. Il avait treize ans, était prisonnier et donc désespéré, elle disait mépriser les autres Siths, être différent. C'était elle qui l'avait menée dans la vallée de la mort de Korriban. Elle qui l'avait le plus torturé.

- Je ne doute pas que Monsieur Or'n touche au moins le Smic et soit inscrit à la sécurité sociale.

Répliqua-t-il d'un ton calme, songeant que malgré le respect évident du jeunôt pour son maître, il était impossible que cet homme reçoive un salaire fixe. Tout n'était qu'incertitude dans cet antre de folie saupoudrée d'une ambiance beaucoup trop feutrée. Luke essayait de coller à la tranquillité ambiante malgré 'inquiétude qui bouillait dans ses veines, tandis que son cerveau cherchait à saisir "pourquoi". Quel était l'intérêt de Noctis de prendre le risque de réunir Karm et Luke? Dans le meilleur des cas, il les sous-estimait. Il faut dire que sous la houlette du Trandoshan, tous deux avaient l'occasion de briller... Par leur manque de talent. Se faire avoir par un Sith visiblement au courant de tout, et de plus encore, on atteignait les sommets du ridicule. Comment être crédible après ça?

- Et vous, quel degré de subtilité pensez-vous avoir en essayant d'être gentil de la sorte? J'en ai connu, des gentils Siths.

Vu la tournure de la phrase de Luke, on comprenait qu'il ne pensait pas un seul instant que Noctis était vraiment sympathique, ou alors s'il l'était, qu'il avait des intérêts particuliers. En fait, ça coulait de source, parce que sinon, nul doute que son Ordre l'aurait radié, et sans Finiquito. Toutefois, le consulaire se rendait compte de l'intelligence de son aîné. Sa manière de changer les mots, d'introduire des doutes, rien que cette expression "des esclaves".

Le jeune homme lança cependant une légère onde à Karm. Le Seigneur semblait s'adresser plus particulièrement à lui, et s'il appuyait ainsi sur des failles de son passé, c'était peut-être qu'il était convaincu de pouvoir le convertir, ainsi, la mission n'était pas toute à fait fichue. Lui n'avait probablement aucune chance de séduire cet homme, mais il se promit d'essayer de l'adoucir suite à son petit numéro de courageux Jedi. C'était presque cliché: l'inaccessible, le droit, le pur chevalier qui sans le voir, finissait par courber l'échine plus bas encore que l'apprenti le plus noir.

- Pourquoi suivez-vous les idéaux Siths? Vous semblez plutôt différents, et parlez en faveur de l'indépendance: le salaire, la famille tout ça. Ça ne correspond guère à l'idéologie de votre Ordre. Justement. Et je ne pense pas que vos collègues soient en faveur de votre proposition étonnamment honnête. Relâcher des Jedis? Ça pourrait vous valoir des soucis ça, à moins qu'il n'y ait autre chose de beaucoup plus subtil derrière cet arrangement, à long terme, ou que sais-je...

Plus tranquille, prêt à discuter visiblement, le jeune homme avait interrogé l'Apollon d'un ton diplomate, cherchant à le confronter à ses propres mots. Les Siths ne devaient pas payer de salaire non plus, ni offrir de vacances. Cependant, il fallait avouer que le blond avait peu d'idées sur le long terme. Karm et lui étaient à la merci du grand vilain aux faux airs pacifistes. Sans plan. Surtout que c'était vrai, Ekkt avait été tout, sauf subtil, mais de là les tester? Ne l'avait.il pas déjà fait à la prison? C'était vraiment trop tordu et ça allait trop loin, même pour une Ombre. Le Tramdoshan s'était sûrement fait avoir en beauté, normal, ces Ombres, elles se croyaient toujours plus malignes.
Absalom Thorn
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— Gentil ?

Noctis esquissa un sourire.

— Je ne suis pas gentil. Je ne suis simplement pas un psychopathe non plus. J’imagine que c’est extrêmement décevant. Vous auriez sans doute préféré que je vous foudroie d’éclairs en éclatant d’un rire machiavélique, avant de vous promettre une mort lente et douloureuse. Que voulez-vous, la réalité est souvent beaucoup plus prosaïque.

Appuyé contre mur, Karm essayait de se remémorer le chemin qu’ils avaient parcouru pour atteindre la luxueuse cellule de Luke, et d’estimer l’endroit où se trouvaient les chasseurs que le destroyer transportait sans aucun doute. Tenter une évasion pendant que le vaisseau était en hyperespace était parfaitement inutile mais dérobé un chasseur, voilà qui n’était peut-être pas impossible.

Il fut tiré de ses réflexions par la réaction de leur hôte quand Luke évoqua les soucis qu’il pourra avoir avec les Siths : un rire, insouciant, léger, mélodieux. Beaucoup trop mélodieux. Karm avait la gorge sèche. Il s’était habitué à la beauté de Noctis sur les hologrammes, en étudiant son dossier, mais ceux-ci ne rendaient pas justice à la sensualité du Seigneur Sith, appuyée par le Côté Obscur.

— Je crois que je survivrai à ces complications politiques. Vous vous faites de l’Empire, je le crains, une idée très autoritaire. C’est typique de la République que d’imaginer qu’entre la démocratie à sa façon et la tyrannie pure et simple, il n’y a pas de juste milieu. En réalité, les structures du pouvoir sont beaucoup plus souples ici qu’elles ne peuvent l’être sous la bureaucratie de Coruscant. Loin de moi l’idée de prétendre que la paix ou la liberté règnent partout. Mais disons que l’Empire est une confédération de nations sous l’autorité d’une souveraine, quand la République est une entreprise géante normalisée depuis ses quartiers généraux.
— C’est dingue, quoi, genre, vraiment trop injuste, on vous fait une sale réputation alors que vous êtes quasiment des hippies qui tenez une coopérative vegan.
— Vous savez, quand un Sénat d’élites ploutocratiques prend à Coruscant des décisions pour un fermier de la Bordure, qui n’est représenté que par la voix d’un sénateur de système perdu au milieu de la multitude, ces décisions ne paraissent pas moins autoritaires à cet homme que ne le sont les décisions impériales.

Un argument qui ne peut que faire mouche, chez un localiste convaincu comme Karm, qui partageait ces convictions avec la plupart des Ark-Ni. De son point de vue, la République était une entité lointaine, et par conséquent viciée, une structure trop technique et trop complexe pour jouir jamais de la légitimité qui venait de la souveraineté populaire.

— Vous n’ignorez sans doute pas que, Padawan, j’ai commencé ma carrière comme diplomate parmi les Consulaires Jedis. C’est à cette époque que j’ai commencé à concevoir une désaffection profonde pour la République, quand j’ai vu comment on employait cet Ordre Jedi, censément humble, censément réservé, comme un instrument politique pour faciliter les relations diplomatiques, c’est-à-dire rapprocher les puissants d’avec les puissants, et quand j’ai vu avec quelle facilité les politiciens de la République pouvaient fermer les yeux sur les vicissitudes des gens du commun, pour le bien des relations interplanétaires, comme si cette entente de pure forme avait perdue tout contenu et comme si l’union républicain était devenue une fin en soi, plutôt que le véhicule du progrès social. L’Empire est un système profondément imparfait, à n’en pas douter, mais il a au moins le mérite de laisser plus de pouvoir entre les mains des acteurs volontaires issus de leur propre communauté et de ne pas couvrir d’un vernis hypocrite la réalité d’un monde imparfait.
— Faut avouer que c’est facile de laisser leur indépendance aux gens quand on liquide tous les opposants.
— Liquider les opposants ? Et selon vous, ça arrive souvent ? Vous avez souvent des rapports de ce genre de choses en provenance de l’Empire ? Beaucoup de transfuges qui réclament la protection de la République ? Beaucoup de mondes qui se rebellent pour rejoindre le Sénat ? Il me semble que ce qui se produit, c’est plutôt l’inverse. Je n’ose même pas évoquer le nombre de Jedis qui se convertissent à l’Empire, pardon, qui sombrent du Côté Obscur, comme on aime à dire au Conseil, qui est incommensurablement plus grand que celui des Siths qui se convertissent à l’Ordre.
— Ouais, ben c’est pas les habitants de Belsavis qui ont crevé à cause de votre virus qui sont prêts de se convertir à l’Empire.
— Pas plus que la République ne sera soutenue par les innombrables malades que les géants de l’industrie pharmaceutique se refusent à traiter gracieusement. Toute recherche médicale exige des sacrifices. Les miens sont consentis à cause de la nécessité scientifique, les vôtres à cause des profits : je vous laisse juger laquelle de ces deux valeurs il convient de préférer du point de vue moral.
Luke Kayan
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- Si la République et l'Ordre se sont en effet rapprochés, parfois trop je ne vais pas le nier, il ne faut pas exagérer, les Jedis sont indépendants. Nous sommes allés défendre ces mondes principalement parce que l'Empire les attaquaient et que des civils avaient besoin de nous. Je suis les idéologies de l'Ordre et non ceux politiciens, et je pense pouvoir dire de même sans me tromper de mon collègue.

Le jeune homme coula un regard dans le vide, mais tout proche de l'endroit où se trouvait Karm. Et si ses yeux semblaient presque indifférents, une onde naquit au sein de la Force, puissante mais exclusive. S'il n'avait pas pu s'empêcher de la laisser bondir vers l'Ark-Ni, le jeune homme espérait au moins être parvenu à la cloisonner pour que seul le concerné puisse y ressentir toute son inquiétude et affection.

- Ces actes sont répréhensibles et punis par la loi. Je ne vais pas défendre la République, mais précisons un peu, ces industries pharmaceutiques sont composées d'individus qui décident d'agir contre l'éthique et les lois pour leur propre profit, pas la République, et si c'est le cas, si tout un pan est effectivement concerné comme cela a pu arriver, on appelle ça de la Corruption... Et elle est fortement réprimandée une fois découverte. Par l'Ordre, je peux vous l'assurer!

Luke se sentait profondément agacé mais surtout inquiet, car Noctis était persuasif. Il serait d'autant plus difficile de jouer le changement en douceur, passer de son côté sans qu'il ne devine le subterfuge. À partir de quand les deux Jedis pouvaient-ils espérer faire semblant de douter de leur dévotion? Devaient-ils, en coeur, se laisser "convertir"? Luke imagina faire passer Karm par le biais d'une dispute entre collègues à propos d'une mission ayant mal tournée et reflétant exactement les problèmes dictés par le Seigneur Noir, mais c'était également risqué. Ils n'en avaient pas parlé avant, ni élaboré de plan, or cette improvisation là était à l'égale de la corruption, un pan noirâtre dont ils risquaient de perdre le contrôle. Pour le moment donc, ne restait guère que l'option de... Discuter. C'était vraiment paradoxal vu leur situation.

- Parce que c'est beaucoup plus facile de se laisser aller à ses passions, à ses vices que d'y résister, le côté sombre est comme l'entrée dans un magasin de promesses, richesse, pouvoir, désirs, alors que justement, l'Ordre se veut beaucoup plus austère. Qui aurait envie, de prime abord, de vivre avec le strict minimum? Les bénéfices se voient à long terme, et pour reprendre votre argumentation, je connais beaucoup plus de Siths qui ont purement et simplement sombrés, pas d'un côté ou de l'autre, sinon mentalement. Quant à l'Empire comme chance pour acquérir le pouvoir, une communauté, une confédération de nations, j'ai fait un tour dans votre Académie, et je suis peut-être aveugle, mais pas sourd. Chaque jour, j'entendais le cri d'apprentis sacrifiés, d'esclaves assassinés et j'ai été moi-même torturé. Comment appelle-t-on un lieu où celui qui élève la voix contre le souverain tout puissant se fait trancher la gorge? Une dictature, une tyrannie simplement.

Luke sentait qu'il n'arriverait pas à avoir le dernier mot avec Noctis, beaucoup plus expérimenté malgré son jeune âge, un génie de sa génération. Cependant il voulait aussi gagner du temps. Incapable de se situer correctement, le Jedi espérait que Karm trouverait une sortie, puis un moyen de le lui communiquer par la suite. Désormais, Luke comprenait qu'ils étaient dans un vaisseau, quoique ce dernier devait être gigantesque pour grouiller autant de vie comme le lui révélait son aura qui envahissait les lieux, librement, de façon un peu incontrôlée car ses dons s'étaient réveillés avant son corps, encore un peu endormi par l'anesthésie. Le rire mélodieux du Hapien lui parut aussi beau qu'effrayant. Cet homme était-il vraiment réel? Comme pouvait-on posséder autant d'atouts? Karm risquait de définitivement être charmé, et lui? Qui savait, Luke était protégé de l'aspect physique de Noctis, mais il trouvait à chaque fois plus le trentenaire remarquablement intelligent. Si cela avait fait partie de son tempérament, il aurait été jusqu'à envier une telle capacité de discourir.

- Mais soyons clairs et précis, pourquoi nous racontez-vous tout ça? Espéreriez-vous que deux petits chevaliers rejoignent votre magnifique communauté hippie? Parlez sincèrement, après tout, nous sommes entre gens raisonnables semble-t-il, autant en profiter.

Le Hapien se demandait si le trentenaire jouait jusqu'au bout, aimait simplement s'écouter parler -et il parlait bien, le bougre.- ou s'il croyait vraiment que l'un des deux, voir les deux pouvaient se convertir. Voilà qui leur laisserait une minuscule chance de le tromper. Cela n'allait pas être simple, premièrement parce que les rôles allaient probablement changer, Noctis se montrant plus intéressé par Karm, physiquement et mentalement -du moins c'était l'impression que le Consulaire avait, suivant ses précédentes paroles sur ses magnifiques yeux fluorescents, ou son passé.- deuxièmement parce qu'ils n'avaient rien de prévu, et que si le Seigneur sombre connaissait déjà une partie de leur plan initial, il pouvait parfaitement avoir découvert leur rôle. Comment séduire quelqu'un qui savait déjà que tout n'était que mensonges, servant les desseins d'un Reptile pas très malin qui s'était fait avoir, au même titre que deux chevaliers encore plus bêtes d'avoir accepté. Leur vie allait-elle s'arrêter après que Noctis ait pu déblatérer toutes ses idées, les aient abreuvé de ses croyances. Cela existait aussi, des criminels qui souhaitaient convaincre autrui qu'ils avaient raison avant de les assassiner. Surtout pour s'auto-convaincre.  
Absalom Thorn
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La porte de la chambre s’était ouverte à nouveau et une femme d’une cinquantaine d’années était venue se pencher à l’oreille de Noctis pour lui murmurer quelque chose. Le Hapien fit plusieurs questions dans une langue que Karm ignorait et puis il s’adressa de nouveau à eux :

— Je vous prie de bien vouloir m’excuser mais une affaire m’appelle ailleurs. A moins que Karm ne veuille regagner ses quartiers, je propose que vous demeuriez ici en attendant que nous puissions reprendre le fil de notre conversation.

Sans réponse de la part de l’Ark-Ni, Darth Noctis se contenta de hocher la tête et d’emboîter le pas à la militaire qui était venue le chercher. Il était rare qu’on lui laisse le loisir d’une conversation ininterrompue pendant de longues heures et il y avait toujours des interludes faits de décisions à prendre, des rapports à consulter et de conseils à prodiguer. La gestion d’une organisation à la fois républicaine et impériale, légale et criminelle, politique et scientifique, spirituelle et économique ne laissait guère de temps libre mais tous ces problèmes complexes satisfaisaient l’intelligence du jeune Seigneur, qui y découvrait toujours des occasions de s’améliorer, et des défis nouveaux à relever.

Après que les portes se furent refermées, Karm suivit pendant un moment encore l’aura obsédante du Sith, qui s’éloignait dans les coursives du vaisseau, avant de se détacher de son mur et d’observer :

— J’imagine que la chambre est bardée de caméras et de micros.

Il aurait voulu pouvoir parler à coeur ouvert avec Luke, mais c’eût été profondément imprudent. Comment communiquer, dans de pareilles circonstances ? Ils pouvaient certes s’échanger des impressions par la Force, mais ces sentiments généraux n’auraient jamais la précision d’un langage véritable, seul adapté à l’élaboration de projets d’évasion.

Karm s’assit sur le bord du lit, à côté de Luke, et se pencha à l’oreille de l’Hapien, pour murmurer, très bas :

— Pas possible de s’évader avant la sortie de l’hyperespace. L’idéal serait d’attendre d’être sur une planète. Ici, si on chope un chasseur et qu’on se rend compte qu’il a pas son propre hyperdrive, on sera super mal barrés.

L’infiltration lui paraissait entièrement irréaliste, mais c’était peut-être parce qu’il avait peur de ne pas s’y retrouver. Beaucoup de ce que Noctis leur disait résonnait avec ses propres convictions sur la République et les critiques de leur geôlier rencontrait ses inquiétudes à lui. La beauté de Noctis était un autre problème. Karm s’en voulait de l’avoir remarquée, et d’en être ému. Il avait beau essayer de se raisonner en songeant que ce n’était qu’une affaire d’hormones, sur lesquelles il n’avait pas de contrôle, et que c’était une réalité physiologique qui ne serait suivie d’aucune conséquence, l’Ordre Jedi les avait tant mis en garde contre la magie des Siths qu’il s’attendait à tout instant à ce que Noctis ne l’envoûte avec un enchantement aphrodisiaque.

— Pour l’instant, il paraît pas décider à nous zigouiller ou quoi. Alors on peut prendre notre mal en patience, voir ce que ça donne et aviser une fois qu’on a…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’un soubresaut annonça la sortie du vaisseau de l’hyperespace. Noctis leur avait laissé entendre que le voyage serait long et ils étaient bien forcés d’en déduire que, à moins que l’homme ne leur ait menti, cette escale-là était imprévue. Karm tendit l’oreille mais, tout ark-ni qu’il était, deviner la situation du vaisseau aussi grand, bardé de stabilisateurs en tout genre, rien qu’à l’oreille, n’était pas aussi facile qu’avec une petite navette.

— J’crois qu’on est en train de se caler sur une trajectoire orbitale. Pas sûr.[/color]

Les portes s’ouvrirent une nouvelle fois sur un militaire fondorien encadré par deux autres soldats. Karm commençait à remarquer que la plupart des gens qui entouraient Darth Noctis étaient des humains ou des proches-humains.

— Suivez-nous.

Comme s’il se rappelait soudain des instructions qu’il avait reçues à l’égard de la politesse, le Fondorien rajouta après un temps :

— S’il vous plaît.

Les gardes encadrèrent les deux Jedis et, pendant un moment, Karm eut l’espoir qu’ils pourraient s’enfuir. Mais d’autres militaires étaient constamment présents et, quelque doué qu’il fût au combat, une évasion eût été irréalisable. On les conduisit donc jusque dans l’un des vastes hangars de décollage, puis à l’intérieur d’une navette. Celle-ci ne tarda pas à décoller. Par les petits hublots, les deux Jedis purent bientôt voir se profiler une planète essentiellement océanique. Ce ne fut qu’après être rentré dans l’atmosphère qu’ils y découvrirent des océans parsemés d’innombrables atolls.

La navette se rapprocha rapidement de l’un d’entre eux, composé d’une dizaine d’îles. Sur chacune d’entre elles, on apercevait des bâtiments. La plus grande était occupée par un vaste complexe moderne, dont il était difficile de déterminer la fonction, mais ce fut vers l’une des plus petites que la navette se dirigea finalement. Là, une immense villa donnait sur un océan paradisiaque. La navette se posa sur un petit tarmac et le Fondorien fit signe aux deux jeunes gens de descendre.

En bas de la rampe les attendait un Twi’Lek au physique avenant. Tout à fait le genre de jeunes hommes à graviter autour de Darth Noctis.

— Je suis Skill, le maître d’hôtel.

Il ressemblait plutôt à un surfeur qu’à un domestique de luxe.

— Le Seigneur Noctis vient de me prévenir que nous aurions des invités.

Derrière eux, la navette décollait, sans que les militaires ne l’eussent quitter. Les deux Jedis étaient apparemment seuls avec Skill, sauf à considérer les quelques robots domestiques qui épaulaient le Twi’Lek dans ses fonctions. Au demeurant, toute mesure de sécurité eût été probablement superflu : l’île n’offrait aucun autre moyen de transport et pouvait fort bien faire office de prison. Luxueuse. Et paradisiaque.

— Je peux vous faire visiter. Il m’a dit qu’il serait retenu pendant quelques heures sur l’île principale mais qu’il nous rejoindrait probablement plus tard.

La perspective avait l’air d’enthousiasmer Skill.
Luke Kayan
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- Ah tu vois, tout ça ce n'est que du vent, dès qu'on creuse, il part.

Se moqua Luke, un brin bravache sans savoir pourquoi, surtout que la situation ne se prêtait pas à la légèreté. Mais justement, peut-être avait-il inconsciemment besoin de détendre l’atmosphère... Ou de prouver à son compagnon que Noctis n'était pas si parfait? Le Hapien n'était pourtant pas jaloux de nature, jugeant que si quelqu'un l'aimait autant que lui appréciait le concerné, il n'y avait aucune preuve à donner ou à faire. Il n'était, par exemple, aucunement charmé par le Sith, totalement réfractaire à d'éventuelles tentatives de séduction -du moins il aimait le croire- simplement parce que remettre en question sa relation avec l'Ark-Ni tenait de l'utopie. Le jeune homme était donc persuadé, sensément en tout cas, que c'était pareil pour Karm. Alors pourquoi est-ce que cela lui tenait tant à coeur de démontrer que le Seigneur Noir ne valait pas autant qu'il voulait le faire croire? Sans doute son petit côté diplomate mis à mal par le beau parleur. C'était toujours difficile, même pour quelqu'un d'aussi modeste et de peu compétitif comme Luke, de se retrouver face à meilleur que soi. Oui ce devait être cela, sans oublier l'agacement que lui procurait leur interlocuteur qui s'échappait avec l'excuse facile d'avoir des affaires à régler. Ces gens qui plantaient des idées dans la tête des autres, suggéraient, puis s'enfuyaient une fois que les racines s'installaient le frustraient beaucoup. Malheureusement ici, le cas était encore plus difficile car le Hapien avait la sensation inquiétante que Noctis était réellement parti régler des affaires, et qu'il aurait vraiment eu la réponse à ses questions. En fait, c'était certainement le Sith qui les manipulaient, ou du moins, tenait les rênes de la mission. Quelle mission, cela dit. Karm et lui étaient à la merci du trentenaire, condamnés à attendre de voir ce qui allait se passer comme l'avait sagement proposé le Chevalier Turquoise.

- On s'arrête déjà?

Rejoignant les pensées de son ami qu'il exprima à haute voix, Luke sentit ses muscles se tendre, il se releva, prêt à faire face à des tueurs éventuels. Il ne se laisserait pas assassiner si facilement. Pourtant, une fois de plus, aucun coup ne vint, sinon une prière d'accompagner une nouvelle voix. Les deux Jedis suivirent le Fondorien, et tandis que Karm admirait le paysage dans la navette, Luke qui y était naturellement insensible ne cessait de retourner les questions dans sa tête, ajoutant quelques centaines d'autres par seconde à celles déjà existantes.

En bas, ce n'était ni une exécution, ni un combat en duel, pas même l'enfermement au fond d'une cellule moisie qui les attendaient, sinon un maître d'hôtel. Aussitôt le jeune homme se demanda si "Skill" savait se battre. Probablement, car il imaginait mal Noctis ne prendre aucune mesure de sécurité, outre ce Twi''Lek accueillant. Il croyait rêver... Alors que Karm et lui se demandaient si prendre des vacances comme des civils, un jour, serait agréable, on les faisaient débarquer sur une ce qui semblait être une île. Ou du moins, de ce que l'aveugle pouvait déduire du bruit de l'eau accompagné de senteurs marines, un territoire en bord de mer.

Luke s'inquiétait davantage, cela dit, de l'apparente bienvenue totalement décalée, que si on lui avait ferré les chevilles ou les poignets pour l'envoyer d'un coup de pied dans une cellule. Tout ceci était anormal, plus qu'anormal, et le Chevalier ne trouvait aucun profil correspondant à celui de Noctis dans son apprentissage, sachant qu'il avait été l'étudiant le mieux noté de sa promotion concernant le droit ou le profilage. Pourquoi aucun de ses cours théoriques ne pouvait voler à son secours?

- Autant accepter. - Glissa Luke à Karm sur le même ton employé par ce dernier pour lui signifier la présence logique de micros et de caméras alors qu'ils étaient encore dans la "chambre", isolés.-

Si le Hapien pouvait à peine s'accrocher à son apprentissage, il ne perdait aucune occasion de le tenter. Skill étant leur seule référence en ces lieux, les deux jeunes gens avaient tout intérêt à établir un bon contact avec lui, un peu comme Luke avait tenté de le faire avec O'rn. Comme le présumé esclave ou serviteur avait trop rapidement disparu de son champs d'action, le Hapien allait "s'attaquer" à Skill, et cela commençait par le contenter, essayer de lui donner confiance en ayant l'air de tout, sauf hostile. Le Jedi savait que ce dernier leur ferait visiter ce qui l'intéressait, ce qu'on lui avait autorisé à montrer et ils risquaient de ne rien apprendre d'intéressant, mais le but était réellement de se faire apprécier -dans la mesure du possible- par le maître d'hôtel.

- Avec plaisir, je vous remercie.

Fit Luke sur un ton aussi détaché que possible, jouant le rôle totalement décalé de touristes. En cet instant, malgré son aspect calme, il aurait voulu prendre la main de Karm, discuter avec lui ouvertement, se rassurer, car cette mission se déroulait exactement comme ils ne l'avaient pas prévus. L'idée des caméras et des micros le freina toutefois. S'il avait fallu de longues heures de patience pour lui expliquer le concept de "voir" les actions de quelqu'un sur un écran, en décalage, et que cela pouvait être compromettant, le Jedi avait fini par saisir l'idée. Suffisamment toujours pour éviter de faire des gestes étranges, dont, malheureusement ceux qui permettraient à Noctis de savoir, pour eux.

Le blond regretta amèrement de ne pas pouvoir écrire à Karm, y compris quand ils seraient seuls. L'Ark-Ni ne maîtrisait pas le braille -à moins qu'il ait un talent caché- et lui ne lisait bien évidemment pas les caractères normaux. De la même façon qu'il ne parlait pas la langue de son ami. Tous deux auraient dû s'y mettre songeait-il, parce que cette langue très peu connue -pour laquelle les traducteurs ne devaient pas pulluler- et cette écriture que si peu de gens savaient lire auraient été parfaits. Maintenant, ils étaient bloqués plus qu'autre chose.

- C'est parfait! Alors commençons par la réception.

Et il les entraîna vers le luxueux complexe vide, ce qui le rendait d'autant plus gigantesque. Quelle était cette farce? Luke suivait difficilement mais attentivement les deux hommes, calquant son aura sur celle de Karm afin de ne pas se prendre un poteau ou se cogner le pied contre une roche émergeant du sable. L'avoir près de lui dans une telle situation inquiétante et ne pas pouvoir le toucher, ni pour se rassurer était une torture.
Karm Torr
Karm Torr
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Skill était un jeune homme particulièrement loquace. Alors qu’il les guidait de pièce en pièce, dans cette villa maritime décorée avec goût, qui paraissait bien n’avoir d’autres fonctions que de servir de pied-à-terre pour les visiteurs occasionnels du Seigneur Sith, il répondait volontiers aux questions des Jedis, d’abord innocentes, et ensuite plus précises. Karm en venait même à se demander sur leur guide savait qu’ils étaient deux prisonniers.

— Il se passe quoi, sur l’île principale, au fait ?
— Là maintenant, aucune idée. Une urgence. Enfin, ça ne doit pas être une urgence très urgente, ce n’est pas comme si ça avait explosé ou quoi.
— Et de manière générale ?

Le jeune homme haussa les épaules.

— C’est un genre de centre de recherches, je crois. Biologie marine ou quelque chose comme ça.

Il esquissa un sourire d’excuse.

— Je ne suis pas un scientifique, désolé.
— Y a pas de mal.
— Et donc là, c’est la pièce préférée du Seigneur Noctis.
— Une bibliothèque, précisa Karm à l’intention de Luke.

Une grande bibliothèque, ouverte sur un balcon qui donnait sur l’océan. Karm s’approcha des rayonnages pour lire les titres sur la tranche des holodisks ou des ouvrages imprimés.

— Economie, sciences politiques, linguistique, encore économie, mathématiques, statistiques. Il ne fait pas beaucoup dans la fiction ou le divertissement, pas vrai ?
— Il travaille beaucoup, confirma Skill, mais bon, théoriquement, il vient ici pour se reposer. C’est parfois difficile de l’arracher à ses études mais je sais être, euh… Convaincant.

Les lekkus du jeune homme se croisèrent et se décroisèrent et Karm réprima un haussement de sourcil. Il n’eut en tout cas aucun mal à deviner le genre de divertissements que Skill proposait à son maître.

— Et c’t’une bonne situation, ça, maître d’hôtel… majordome… j’sais pas comment on dit ?
— Ouais, c’est trop cool ! Euh. Je veux dire. C’est vraiment très agréable. J’aime beaucoup l’océan et puis même quand il n’est pas là, il y a souvent des visiteurs. Comme vous.
— Des visiteurs, hein.
— Oui bon…

Skill eut l’air gêné.

— Vous êtes des visiteurs un peu prisonniers, c’est ça ?
— Un peu beaucoup, même.

Il y eut un silence embarrassé et puis Karm remarqua :

— On dirait que ça t’effraie pas beaucoup. T’as pas peur qu’on te prenne en otage pour faire pression ou je sais pas trop quoi ?
[color=purple]— Ben…

Skill regarda Karm comme s’il avait un sérieux grain.

— … non, pas vraiment.

Le Twi’Lek les conduisit sur le balcon. L’air chaud des tropiques portait à eux les parfums de la plage. Quelque part, non de loin, il devait y avoir des arbres et des fleurs sauvages.

— Y a pas tellement de moyens de sortir de l’île, puis en plus, les gens, en général, ils évitent de trop chercher des problèmes avec Noctis. Puis de toute façon, les prisonniers qui viennent ici, en général, c’est plutôt des gens… Je ne sais pas trop, mais enfin, disons, plutôt des prisonniers diplomatiques. Quelque chose comme ça.
— Et ça arrive souvent ?
— Non, pas tellement. Je vous montre vos appartements.

Karm suivit le Twi’Lek en silence. Etait-il possible que Noctis n’ait souhaité qu’opposer à leur enquête une sorte de démonstration de force relativement pacifique, pour les dissuader d’aller plus loin, avant de les relâcher pour de bond ? Le Seigneur Sith avait après tout la réputation d’être un partisan de la trêve entre l’Empire et la République. Peut-être leur capture et leur remise en liberté serait pour lui une manière de promouvoir sa position diplomatique. Ce ne serait pas gentil. Juste pragmatique.

— Vous voulez une seule chambre ou deux ? Parce que j’ai préparé ça un peu dans la précipitation et je ne savais pas très bien comment ça allait se passer, alors bon… Je dis pas ça pour vous offenser, hein, c’est juste que parfois on accueille des couples fugitifs qui sont opprimés chez eux à cause de leurs préférences et… euh… Non mais je parle trop.
— Deux chambres ce sera bien.

Un robot-ménage émit une série de bips approbateurs, avant de se mettre au travail.

— Alors, vous venez d’où ? Vous faites quoi dans la vie ? C’est vraiment très houleux entre vous et le Seigneur Noctis ou vous pensez que ça se réglera rapidement ? Parce que bon, je dois bien avouer que tant qu’à faire, si on peut éviter les éclats de voix… Enfin, il ne crie jamais mais si on peut éviter que les gens soient mécontents, c’est plus sympathique. Quand il est contrarié, il passe son temps à ruminer, c’est déprimant.

Entendre un jeune Twi’Lek jovial aux airs innocents décrire son quotidien quasi-conjugal avec un génie du mal était pour le moins perturbant.
Luke Kayan
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- Ne vous inquiétez pas, nous ne voulons pas de dispute.

Répondit Luke qui tentait de ne pas recourir aux raccourcis faciles en songeant que Skill semblait vraiment simple, basique, superficiel. Jusqu'à maintenant, rien ne s'était passé comme prévu, du moins le peu qui avait été prévu par l'impétueux Ekkt. Ses propres profilages s'avéraient faux, s'écartant toujours plus de la réalité, il fallait donc agir en adéquation avec le personnage, mais sans s'attendre à quelque chose de fixe. Étant donné le caractère méticuleux de Noctis, Luke s'imaginait mal qu'il ait laissé à un idiot doublé d'un peureux, les clés de son hôtel particulier. Le Twi''Lek précieux pouvait cacher des capacités de combat, ou des ressources intellectuelles insoupçonnées. Pour l'instant, par le biais de cette simple phrase accompagnée d'un geste d'apaisement -les deux mains ouvertes, paumes vers le sol.- le jeune homme montrait leur volonté d'une cohabitation pacifique. La conversation semblait avoir lieu dans un autre espace temps, complètement déphasé par rapport à la réalité, mais Luke essayait de ne pas se démonter. Lui aussi essaya de faire parler le majordome, en douceur.

- Combien de temps restent... Les invités en général?
- Oh, cela dépend, une quinzaine de jours, parfois plus, parfois moins. Ceux qui agacent le Seigneur Noctis partent plus vite, mais quoi de plus normal, n'est-ce pas? Qui voudrait de belligérants dans sa demeure?
- Savez-vous où est-ce que ces invités vont lorsqu'ils quittent la résidence?
- Oh ça ce n'est pas de mon ressort. Moi je les accueille de mon mieux, je fais en sorte qu'ils soient à leur aise, le reste ne me regarde pas. Ce sont des affaires personnelles ou économiques ou politiques. Qu'en sais-je, mais il ne me viendrait pas à l'idée d'avoir l'outrecuidance de déranger le Seigneur Noctis dans ses affaires, encore moins de lui demander des comptes.

Mains levées vers l'interlocuteur en signe de barrière. Ce "arrête-toi là", le Consulaire ne pouvait le voir, mais il le sentit dans la tension des cordes vocales de Skill, dans sa manière d'achever la phrase, sur un ton plus grave détonnant avec sa voix chantante, quelque peu maniérée. Luke stoppa la discussion, laissant son ami demander deux chambres. L'idée était excellente, même si le Hapien la regrettait quelque part. C'était dans ce genre de moment où son caractère distant s'effaçait pour laisser place au jeune homme fragile, handicapé, qui nécessitait de l'aide et de l'affection. Évidemment, en bon Jedi il ne les réclamait jamais à haute voix, mais ses démonstrations se faisaient plus chaudes, il était plus proche et plus doux, aimant se lover contre la poitrine rassurante de l'Ark-Ni. Cependant, le bon moment pour cette recherche au trésor qu'était le réconfort était loin, bien loin. Pour l'instant, les deux Jedis devaient en apprendre plus sur Skill et Noctis, en supputant que le Twi''Lek ne leur tissait pas une jolie toile de mensonges.

- Voici donc les chambres. - Expliqua l'éphèbe, visiblement ravi d'avoir des invités aussi peu récalcitrants, l'un d'eux ayant même démontré son désir d'être "affable" avec Noctis, ou du moins tout faire pour ne pas le fâcher.-

- Merci. Dites-moi, vous tenez l'endroit seul, ici?

- Les droïdes m'aident, mais oui et ce sont de grosses responsabilités.

- J'imagine bien, tout comme j'imagine que vous ne devez pas être un simple employé aux yeux du Seigneur Noctis. Confier à quelqu'un l'entièreté d'une telle structure implique une grande confiance.

- Évidemment, le Seigneur Noctis est très... Sociable, enfin cela dépend des moments, lorsqu'il étudie mieux vaut ne pas le déranger, c'est un érudit, un innovateur. Une personne réellement incroyable. Mais ce que je disais donc, il est sociable, mais c'est vrai que lui et moi avons une relation... Particulière.

Se rengorgea l'homme. Luke signa qu'il le croyait d'un hochement de tête puis se tu, laissant leur hôte se baigner dans sa fierté. Si les conversations s'achevaient sur cette note toujours positive, ils pouvaient se le mettre dans la poche, du moins en partie et du moment que cela ne contredise pas directement les ordres de Noctis, au vu de l'admiration incommensurable que Skill lui portait. Le Jedi n'arrivait pas à saisir l'étendue du charisme du trentenaire, il en était aussi fasciné qu'inquiet. Si Karm n'avait pas pu résister à l'artefact pendant un moment, qu'en serait-il avec le Hapien? Lui-même ne se sentait pas si attiré que ça par l'homme, mais il savait que moins d'expérience l'auraient rendu moins réfractaire à se laisser couler dans ses jolies paroles et belles convictions. Luke ne s'estimait pas plus intelligent ou fort que l'explorateur -au contraire- mais il savait que le Seigneur Sith avait plus de poids avec ses arguments pour convaincre son ami. Le vécu de ce dernier, ses idées mais aussi le fait qu'il voit- bien que Luke ne comprenait pas le concept de séduction par le visuel, on avait essayé de lui expliquer, lui saisissait juste que ça marchait, point.- le rendaient possiblement plus sensibles. Heureusement, le Chevalier était loin d'être aussi manipulable que Skill semblait l'être, démuni jeunôt de 20 ans, éphèbe probablement sans études ou peu, isolé de tous et de toutes sur son île paradisiaque. Luke savait qu'ils devaient profiter pour asséner de nombreuses questions au Twi''Lek avant le retour de Noctis. Contre ce dernier, les talents de diplomate de Luke ne pouvaient rien faire. Non seulement le Hapien paraissait totalement insensible au sensé charme du jeune Jedi, mais il avait l'air d'ignorer ses paroles la majorité du temps. En fait, cela ne l'étonnerait guère que celui-ci les sépare afin de mieux séduire l'Ark-Ni. Luke devait essayer de reprendre le rôle qui lui avait été attribué, mais comment faire changer de sentiments à son personnage sans que ce ne soit trop brusque, trop visible?

Lorsque Skill les laissa seul, le Hapien s'assit à côté de Karm, sur le rebord de son lit pour souffler a son ami.

- Il n'a pas l'habitude de prisonniers non-diplomatiques. Skill je veux dire. Soit il ment, soit il est extrêmement bien protégé, soit il te sous-estime. Nous sous-estime
-car c'il n'était pas guerrier dans l'âme, Luke restait un bon combattant par le biais de la Force, un monde auquel curieusement, le Twi''Lek ne paraissait pas sensible. Ou alors c'était un maître de la Force qui occultait sa présence en son sein.- Qu'est-ce que tu proposes? On agit maintenant, sachant que Noctis n'est pas là? Ou on prend le risque d'attendre son retour, ce qui nous permettrait, cela dit, de mieux connaître notre environnement?

Luke parlait si bas qu'il lui semblait avoir appris par la force des choses, le secret des Ark-Nis qui ne haussaient jamais la voix. Il osait espérer que ce ton, fatiguant à emprunter à chaque instant, aurait au moins l'avantage de tromper les possibles caméras et micros.

- Pour l'instant, une petite promenade semble le plus indiqué.

Ajouta le Jedi d'un ton légèrement plus haut et détaché. Ils n'avaient rien à faire d'autre en même temps et Noctis devait logiquement s'y attendre... Qu'ils visitent l'île, plus pour se repérer que par ennui d'ailleurs. Luke espérait toutefois que l'arrogant sous-estimait les capacités d'explorateur de Karm, apte à trouver comment la scientifique s'était échappée de la prison de Belsavis, par le biais de champignons. Il serait capable de trouver des plantes fournissant de l'oxygène pour s'enfuir à la nage ou de calculer la force des courants. Luke n'en doutait pas une seconde, s'il y avait un échappatoire, son ami le trouverait, mais Noctis en doutait-il, lui? Et avaient-ils réellement intérêt d'avorter la mission - ce qu'il en restait du moins.- sans rien tenter? Luke pour sa part commençait à croire qu'Ekkt était mort, ou que s'il était vivant, il ne les exfiltrerait pas, ni n'assumerait le désastre qu'était cette mission. Il se tairait et continuerait sa petite vie d'Ombre en embobinant d'autres chevaliers naïfs pour sa prochaine Vendetta. Plus il y repensait, plus le Jedi se sentait utilisé et pensait qu'ils avaient été stupides de se reposer sur ce maître pourtant compétent. La réussite avait du lui monter au cerveau et il s'était cru plus malin que Noctis. Le tout saupoudré un peu d'impatience et voilà comment les deux chevaliers avaient été fait prisonniers. Il ne restait plus qu'à espérer que le Seigneur Noir commette la mème erreur d'arrogance.

Luke avait envie de prendre la main de Karm mais il se retint, ne s'autorisant qu'un bref effleurement que l'on supposait aisément du au hasard. Il soupira, admettant silencieusement être un peu perdu et très chamboulé malgré le contrôle dont il faisait encore preuve.
Absalom Thorn
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[color=#00ccff]— Pas d’vaisseau, pas d’bateau{/color], souffla l’Ark-Ni à son tour. Si on tente quelque chose maintenant et qu’on se retrouve coincés sur l’île…

Comme souvent, il ne finit pas sa phrase, parce que la suite lui semblait évidente. S’évader sans moyen de locomotion, c’était s’exposer à un échec quasi certain, et sacrifier une occasion qui serait probablement unique. Il lui semblait plus sage d’attendre que Noctis revînt et de tenter de s’emparer, à un moment ou un autre, de son vaisseau. Si toutefois on pouvait tenir pour sage un plan aussi audacieux.

L’Ark-Ni laissa échapper un soupir. Pour l’analyse du tempérament de Noctis, il se reposait à vrai dire beaucoup sur Luke. Son ami était plus habitué que lui aux discussions et aux négociations, aux enquêtes et à la politique, et en cela, sans aucun doute, beaucoup plus fin psychologue. Karm avait beau ne pas être obtus, il ne se sentait pas à la hauteur des mondanités qui formaient étrangement l’essentiel de cette mission d’infiltration.

Comme Noctis était absent, il se laissa pour la première fois aller à chercher la présence de Luke dans la Force et à y mêler la sienne. Il avait tenté, mais difficilement, de contenir son inquiétude, pour se faire calme, et rassurant, et déterminé, mais il espérait puiser autant de courage chez Luke qu’il ne voulait en apporter au Hapien. Ils se levèrent finalement et, Skill étant soudainement introuvable, entreprirent de visiter l’île par leurs propres moyens.

La villa, immense certes, en couvrait l’essentiel. Le reste était un vaste parc, plutôt sauvage, mais d’un désordre entretenu, et des larges plages de sable fin. Sur la plage, Karm estima qu’ils étaient probablement loin de tout micro.

— Pas d’embarcadère. C’est bien une prison. Une prison de luxe mais une prison quand même.

Le regard de l’Ark-Ni fouillait l’horizon. S’ils devaient s’enfuir par leurs propres moyens, le plus simple était encore de tenter de rejoindre l’île principale, à quelques kilomètres de là à la nage. Sans connaître la faune océanique de la planète, c’était un pari dangereux, mais ils pouvaient commencer par demander à Skill s’il était prudent de se baigner. Une fois sur une île plus vaste, il y avait meilleur espoir de trouver un moyen de transport — et certainement d’en apprendre plus sur les recherches que Noctis y menait apparemment.

— Si le mec tient parole et qu’il finit par nous relâcher, ça aura été officiellement la mission la plus chelou de ma vie… Ah.

Karm effleura la main de Luke du bout des doigts.

— On dirait qu’il revient.

Un speeder venait de s’élever de l’île principale. Le soir, déjà ? Karm leva les yeux vers le ciel. Deux soleils commençaient à approcher de l’horizon, sans que la température en fût vraiment affectée. Il tourna les talons et prit la direction de la petite piste d’atterrissage. Il n’avait aucune impatience à retrouver leur hôte mais il était curieux d’observer de près les protocoles d’arrivée des transports. La petite barge était en train d’atterrir quand ils se présentèrent. La rampe descendit, Noctis apparut, sans aucune escorte, et le vaisseau décolla à nouveau sans attendre, pour le plus grand déplaisir de Karm : il avait compté sur lui en guise de porte de sortie.

— Ah, vous êtes là, s’exclama Noctis. Navré de vous avoir faussé compagnie mais nous avons eu des problèmes inattendus avec nos cultures. Mes ingénieurs pensaient d’abord à un sabotage, mais il semblerait que les complications soient toutes naturelles. Skill n’est pas là ?
— A l’intérieur.

Le Seigneur Sith parut inquiet un instant, avant de se diriger vers la villa.

— Et vous cultivez quoi, exactement ?
— Des algues nutritives, pour assurer l’alimentation sur des planètes essentiellement océaniques et les rendre plus habitables. Des greffes, quelques retouches génétiques, ce genre de choses. C’est un travail minutieux et d’assez longue haleine, dont je ne prétends pas connaître tous les tenants et aboutissants scientifiques, mais mes phytogénéticiens sont très optimistes.
— Moi qui croyais que vous développiez une super-arme ou je sais pas quoi…
— Navré de vous décevoir. Mais enfin, vous savez, l’Empire doit aussi fonctionner normalement. Nourrir les gens, développer les transports, renforcer son économie. Comme n’importe quel Etat. Ah ! Te voilà !

Skill avait fait son apparition au détour d’un couloir. Il vint aussitôt se loger dans les bras de Noctis, qui l’accueillit par un long baiser. Karm détourna pudiquement le regard. Une brève conversation s’ensuivit en twi’leki, dont Karm ne comprit que des bribes. Quelque chose à propos d’une maladie, au sujet de laquelle Skill entreprenait de rassurer son amant. Noctis finit par hocher la tête et par préconiser du repos. Se pouvait-il que l’île fût, avant d’être une prison, le cadre d’une cure médicale pour Skill ?

— Les droïdes vont préparer le repas, reprit Noctis en basic, à leur intention, mais je propose de prendre un verre sur la terrasse, afin de profiter encore du soleil, et de discuter des conditions de votre départ.

Et c’est ainsi qu’ils se retrouvèrent à prendre l’apéritif avec un Seigneur Sith. Skill s’était éclipsé dans sa chambre, pour s’étendre, après un nouveau baiser guère décent, et les droïdes s’activaient aux fourneaux.

— Vous avez, j’imagine, un plan pour vous infiltrer dans mon organisation, l’espoir de me tirer les vers du nez, et que sais-je encore. Vous ne seriez pas les premiers et vous ne serez pas les derniers. Beaucoup de mes semblables adoptent à l’égard de semblables intrusions une politique répressive radicale mais je ne suis pas sûr que ce soit une attitude saine sur le long terme. Il viendra nécessairement un temps où l’Empire et la République signeront une vraie trêve solide, et cette trêve sera suivie d’une paix, et alors toute la violence réciproque du passé sera un frein à une entente future.

Noctis contemplait l’horizon. Voilà des années désormais qu’il travaillait à cette paix fragile, et à chaque fois, il lui semblait que la réalisation en était un peu plus lointaine. L’Empire était enfermé dans ses logiques militaristes et l’Ordre en proie aux extrémistes en tout genre. Pour un économiste comme lui, qui croyait que la stabilité était le ciment du développement des planètes, la situation en devenait presque intolérable. Il continuait à espérer cependant que le pragmatisme finirait par triompher.

Et Karm commençait à se demander si Ekkt ne les avait pas envoyés là précisément comme des diplomates. Une première approche cachée, qui préserve à la fois la réputation de Noctis et de l’Ordre Jedi, mais puisse jeter les bases d’une accalmie future, en sondant les dispositions des uns et des autres.
Luke Kayan
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Il y avait donc une trop grande distance entre les bandes de terre pour nager, Luke fut déçu mais pas surpris. Noctis paraissait imprudent jusqu'à un certain point. Il avait ses propres notions de sécurité que son apparente arrogance devait fragiliser un peu. Rien qu'un peu. C'était un narcissique, mais un narcissique intelligent. Pour l'instant donc, c'était les deux Chevaliers qui se retrouvaient comme des imbéciles à contempler le soleil se coucher. Surtout que l'un d'eux en était complètement incapable. Pour autant le jeune homme ne perdait pas totalement espoir, Karm et lui étaient ensemble, sans compter qu'ils pourraient peut-être agir plus tard, si Noctis voulait encore les garder en vie.

Luke répondit aussitôt à Karm, soulagé de sentir sa présence. Si ce dernier pensait qu'ils pouvaient communiquer à travers elle sans danger- ou du moins relativement sans danger.- inutile de s'en priver, et de toutes manières, impossible de le faire. Il fit passer ses propres sensations à travers ce lien silencieux qui les unissaient, au-delà de la Force d'ailleurs. Évitant d'envoyer ses propres préoccupations, le jeune Jedi confectionna avec soin une onde chaude, vibrante qui se voulait rassurante. Ils étaient ensemble. Tout irait bien. Était-ce niais? Peut-être. Sans doute. Mais qu'importe, c'était vrai. Tous deux étaient réunis sur la plage assombrie par une nuit qui s'approchait inexorablement. Deux nuits, en fait, puisque déjà Noctis approchait.

- Je confirme. Cela chamboulerait aussi tout ce que j'ai pu apprendre.

Confia le jeune homme, cachant difficilement son égarement, surtout à l'encontre du Hapien dont il commençait toutefois à définir des traits de caractère. Restait ensuite à épurer, découvrir le vrai du faux, ce qui ne serait pas une mince affaire. Arrogance, sincérité -si étrange cela puisse paraître, l'homme semblait l'être.- dévotion, érudition. Autant de caractéristiques qui en faisaient un être complexe, le plus compliqué des grands vilains, ce qui n'arrangeait guère Luke -ou n'importe quel Jedi.- désirant voir, le plus souvent, le vilain Sith brandir son arme écarlate en accompagnant le vrombissement de celle-ci d'un rire sardonique.

Le jeune homme sentit vaguement le lien qui unissait Noctis à Skill, il les devinait proches sans être capable, autrement que par associations d'idées et de circonstances, de vraiment définir la nature de leur relation. Sans saisir un traître mot de ce qu'ils racontaient. - En bon diplomate, Luke en maîtrisait finement trois ou quatre et plus grossièrement deux, mais il ignorait tout de celle utilisée présentement.- le Hapien se sentit frustré de seulement saisir quel était ce langage: du Twi''Leki. Soit c'était secret mais Noctis comptait sur leur ignorance, ce qui le rendait davantage arrogant... Ou érudit car il avait pu étudier leur dossier encore plus à fond que Luke ne le pensait, soit il n'y avait rien d'important dans leur discussion, soit c'était une mise en scène. Théâtral, un terme que Luke avait oublié d'attribuer à Noctis, pourtant majeur, lequel se dessinait chaque fois plus, par le biais d'actions totalement ahurissantes comme cet apéritif. Comprenant que le Seigneur Sith n'avait pas fait tout cela pour les empoisonner, Luke se risqua à tremper ses lèvres dans son cocktail qui sentait le kiwi. Sans alcool. Déduction ou connaissance trop parfaite de ses hôtes? Luke sentit un nouveau pic d'inquiétude poindre, mais il tâcha d'oublier le détail pour écouter l'homme.

- Ce serait désirable. - Avoua le jeune homme d'un ton prudent, saisissant sa chance de montrer qu'il s'adoucissait envers Noctis. Cela dit, c'était également sincère. Quel diplomate ne rêverait pas d'en arriver à la paix avec un aussi grand ennemi.- Mais une trêve fut déjà signée par le passé, et elle fut rompue parce que les Siths, notamment l'une d'elles, passa les frontières de la République pour y commettre des méfaits contraire aux droits les plus élémentaires du citoyen. Il faudrait donc, avant de songer à formaliser ou même songer à un quelconque rapprochement, un certain alignement sur la manière dont les États traitent leurs gens, comme vous le dites. La torture dont je fus témoin sur des mineurs à l'Académie, ou pardonnez-moi d'y faire référence, mais la propagation d'un virus, y compris dans un but scientifique, ne saurait être toléré. Comprenez-moi, la République devrait aussi faire des concessions, mais pour l'instant, ce serait surtout à l'Empire de changer son système. D'autres États répressifs ont demandé d'entrer dans la République ou du moins d'obtenir un accord, et ce dernier ne s'est soit, jamais signé à cause des conditions politiques et sociales, soit s'est brisé à la suite d'une série d'infractions de la part de l'État demandeur. Je ne fais que vous énoncer les règles principales pour n'importe quel type de pacte. Toutefois... Je ne reste qu'un simple Chevalier Consulaire. Pourquoi ne pas avoir cherché à aborder des représentants de la République hauts placés, ou... Des maîtres plus expérimentés? Voire le Temple lui-même? Nous avons déjà reçu un Seigneur Sith par le passé, aux portes du Temple. Selon nos règles, sa non-agressivité lui permit d'exposer sa demande auprès de nous, il fut écouté et parti sans être inquiété. Ce fut d'ailleurs, tout comme vous, un ancien Padawan, Darth Nero de son nom.

Luke ne précisa pas que c'était lui qui avait été chargé de recevoir le Sith. Malgré des difficultés à cause de l'émanation de fragments obscurs intenses, il s'en était bien sorti, grâce à l'aide de Saï, Alyria, Lorn et Evengellyne. De ce fait, le Hapien ne se considérait pas apte à négocier avec Noctis, il y avait de plus hautes instances pour se faire, et Luke était donc étonné que le trentenaire, semblant savoir parfaitement ce qu'il voulait et quand n'ait pas encore pris contact avec l'Ordre, à moins que ce soit classé secret. Le jeune homme n'était qu'un chevalier encore une fois, on ne lui disait pas tout. Pour son propre bien.

- Quant à vos conditions, justement, quelles seraient-elles? En ce qui concerne la non-agression, vous avez déjà notre parole, pourvu que vous ne montriez directement ou indirectement, aucune intention de vous en prendre à notre intégrité physique ou morale. Pareillement pour d'éventuelles représailles sur les nôtres ou des civils en notre présence.

Énoça Luke qui mourrait d'envie de prendre la main de Karm sur son accoudoir. Noctis ne verrait rien, sous la table, n'est-ce pas? Évidemment c'était impossible, et pas seulement parce que la notion de discrétion de Luke était déformée.- Petit, il avait tendance à penser qu'être devant le maître en question sans faire de bruit suffisait à le cacher de sa prochaine leçon de sabre. Il avait finalement appris plus ou moins que disparaître derrière quelque chose était aussi une condition pour "se cacher".- Ils ne devaient céder aucun terrain, surtout personnel, à Noctis.
Karm Torr
Karm Torr
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— Je ne peux qu’admirer votre conviction sincère dans la volonté de la République à se battre pour imposer ses principes moraux et politiques mais je crains fort que, dans les circonstances actuelles, vous ne découvriez des politiciens plus prompts à protéger leurs intérêts économiques que le consensus moral. La situation est sans précédent. Jadis, la République a été une institution galactique qui traitait avec telle ou telle planète isolée et pouvait, dans ces circonstances, imposer à peu de frais ses volontés. Désormais, la République est un Etat amputé de la moitié de son territoire, qui capitule planète après planète et tente tant bien que mal de survivre aux pressions aussi bien intérieures qu’extérieures. Vous êtes bien placé pour le savoir, n’est-ce pas, Karm ?
— Ouais, ‘fin, moi, la politique, c’est pas trop mon truc, hein…
— Il n’empêche pas que votre ancienne Maître a bien l’intention de grignoter un petit territoire sur la Bordure Extérieure et les multiples défaites républicaines favoriseront inévitablement l’indépendance de secteurs entiers, la constitution de Seigneurs locaux, la formation de ces zones-tampons qui sont toujours les produits inévitables de l’affrontement entre deux super-puissances. Quand viendra le moment de signer une trêve, la République sera préoccupée bien plutôt par la préservation de la sécurité aux frontières et la réouverture des routes de commerce hyperspatial que par les droits des personnes.

Voilà qui n’avait rien d’enthousiasmant.

— Du reste, vous savez, pour beaucoup d’observateurs extérieurs, les Jedis sont l’organisation la plus mal placée pour se poser en défenseur des droits.
— Parce que… ?
— Parce que l’Ordre est l’une des rares institutions d’ampleur galactique à se reposer lourdement sur des enfants-soldats.

Et il était vrai que les Guerriers Siths étaient souvent plus âgés que les Padawans — la faute, bien sûr, moins aux principes moraux de leurs Seigneurs qu’à un certain sens du pragmatisme et à la sélection féroce sur Korriban, qui écrémait beaucoup des plus jeunes. Qui plus est, nombre de Seigneurs, comme Noctis, préféraient recruter par eux-mêmes des individus qu’ils formaient aussi par leurs propres moyens, que de prendre le risque d’abandonner leurs futurs fidèles à des influences étrangères, à l’Académie.

— Entendons-nous bien, poursuivit l’Hapien d’un ton tranquille, je suis le premier à regretter l’instabilité d’une partie des grands de l’Empire et ma position à l’encontre du climat guerrier est bien connue de tous. Et comme vous, je doute que l’organisation académique de Korriban soit le terreau le plus fertile pour l’étude de la Force ou la formation d’une élite politique.
— Pourtant, la peur et la violence sont les chemins du Côté Obscur. De c’qu’on m’en a dit, Korriban, c’t’une autoroute.

Le regard du Hapien se plongea dans celui de Karm, qui dût faire des efforts considérables pour ne pas détourner les yeux.

— Il y a bien des chemins à travers la Force. La mortification a bonne presse, chez les Jedis, qui se l’infligent à eux-mêmes sous couvert de sobriété et d’abnégation, ou chez les Siths, qui l’inflige à leurs inférieurs, par la violence, et assurément les douleurs et les privations sont des moyens sûrs et faciles de forcer l’âme à se détacher des réalités immédiates et à épurer ses sentiments, soit par le calme démissionnaire des Jedis, soit par la colère aveugle des Siths, mais il y a d’autres voies, plus riches et plus subtiles, plus prometteuses et plus essentielles. La passion, la curiosité, l’amour de la beauté, la volonté de savoir, sont tout autant des chemins du Côté Obscur. L’organisation de Korriban répond pour l’heure à l’exigence d’une efficacité pour ainsi dire quantitative. Ma vision est plutôt aristocratique.

Ni l’une ni l’autre n’étaient faites pour séduire Karm, qui se contenta de hausser les épaules. Qu’on y aille à pieds ou en bateau, l’enfer était toujours l’enfer.

— Bref. Quoi qu’il en soit, je ne vous ai pas choisis pour négocier et, rassurez-vous, je parle à beaucoup d’autres personnes.

Une manière d’insinuer qu’il avait des contacts hauts placés au sein de la République et de l’Ordre Jedi.

— Mais enfin, vous êtes venus à moi et plutôt que de vous exécuter sommairement ou de vous renvoyer à l’envoyeur, il me semblait opportun de me pencher avec vous sur ces questions. Après tout, votre réputation vous procède. Une réputation modeste, certes, mais suffisante pour éveiller mon intérêt. Luke Kayan, le Padawan du grand Saï Don, vibrant d’une connexion d’une rare intensité à la Force, roc lumineux, perpétuellement à la recherche de la manière la moins spectaculaire d’exploiter son immense potentiel. Karm Torr, le sabreur prodige, Padawan éduqué quasi à la Sith, toujours aux avant-postes des guerres républicains, qui a soudain des scrupules et se reconvertit dans l’exploration. Et voilà que vous surgissez tous les deux à Belsavis, que Luke veille au chevet de Karm, que vous dînez tête-à-tête, que vous partagez une chambre d’hôtel, que vous vous faufilez jusqu’à mon artefact. N’est-ce pas là de ces hasards providentiels que tout élève de la Force se doit d’écouter ?
— Ouais, ou alors, on était juste au mauvais endroit au mauvais moment, intervint Karm, qui n’avait pas son pareil pour couper les envolées lyriques. Mais si vous tenez tant à discuter de façon diplomatique pour, genre, prouver vos bonnes intentions ou je sais pas quoi, vous pouvez commencer par nous relâcher et ensuite, on se revoit en terrain neutre. C’est difficile d’être super convaincu par votre côté agneau innocent quand on est prisonniers.
— Oh, si vous voulez partir dès maintenant, je peux faire appeler le speeder…
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