Ragda Rejliidic
Ragda Rejliidic
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Orbite de Boz Pity,

« Mayday, Mayday. Faucon Pèlerin à Refuge. Je perds de l’altitude, mes stabilisateurs sont HS ! » hurlais Barns Jenkil, les yeux exorbités par la panique, les mains crispées sur ses commandes, tirant sur le manche dans l’espoir de reprendre le contrôle de son cargo en perdition. « Jenkil ? C’est vous ? Tenez bon, nous env… » « Tenir bon ?! Vous vous foutez de ma gueule ?! Ce vieux machin est en train de lâcher, tous les instruments de bord rendent l’âme les uns après les autres ! Je vous envoie mes coor… » Une violente secousse lui coupa la chique, laissant en suspens cette phrase dont la conclusion s’échappait déjà de ses pensées. Bordel ! Si même les éléments s’y mettent ! Devant lui, plusieurs nuages d’une noirceur inquiétante se formaient déjà, tandis que les bourraques gagnaient en puissance… « Jenkil ? Jenkil ? » Machoires serrées, yeux rivés sur le cockpit, la voix semblait comme sortie d’un rêve, lointaine, frôlant à peine sa conscience. « Jen… » Des grésillements insoutenables lui brisèrent soudain les tympans. Il sursauta, beugla « Refuge ?! Vous êtes là ?! Bordel ! Les com’ sont coupées ! De pire en pire ! » Mais alors qu’il pestait à voix haute, plusieurs voyants passèrent du rouge clignotant au vert. La seconde suivante, les vibrations se calmèrent. Un miracle ?! Il tira de nouveau sur le manche, cette fois l’appareil répondit. « D7 ! Je vais nous sortir de là… » Un chapelet de bip plus aigus les uns que les autres s’échappèrent d’une fosse de maintenance éventrée, à l’intérieur de laquelle l’astro-droïde était parvenu à se glisser. Barns ouvrit de larges yeux, avant d’invectiver la boite de conserve/co-pilote/mécano « TU AS FAIS QUOI ?! TAS DE BOULONS SANS CERVELLE ! COMMENT ILS VONT NOUS LOCALISER MAINTENANT ?! » D7-R8 venait tout simplement de shunter les communications et le transpondeur pour redistribuer la puissance vers les circuits ayant souffert du rayonnement ionique. Une longue série de bips graves lui répondirent, insultes difficiles à traduire en langage organique. Pour être vexé, le petit droïde était vexé. Barns soupira, exaspéré. « Que je devrais te remercier ? Oui… Bah non. Je préfère encore me crasher, que de pourrir pendant des jours dans une zone non-cartographiée de la planète, en attendant des secours qui ne viendront jamais PARCE QUE TU AS GRILLE LE TRANSPONDEUR ET LES COMMUNICATIONS ! »

Barns était comme ça : un type sanguin mais pas méchant au fond. Une fois son sac vidé, il recouvra tout son sérieux. Voler à l’aveuglette… Quelle folie. Mais après ce qu'il venait de traverser... Il plissa des paupières, cherchant du regard, au travers de la verrière du cockpit déjà bardées d’insectes juteux écrasés, un endroit où atterrir. Il ne fallait pas être un génie de la mécanique pour comprendre que les bidouilles du droïde ne dureraient qu’un temps… plus que limité. Sous le vaisseau défilait les hautes frondaisons d’un forêt tempérée dense. Difficile d’ici de juger de la nature du sol. Là ! Une clairière ! Au milieu de cette mer de feuillages caduques, une trouée à peine plus large que le vaisseau approchait à vive allure. Barns alluma les repulseurs. Ils hurlèrent. Le Faucon Pèlerin tangua, vibra… Mais obtempéra. Enfin, le Refugien déploya les trains d’atterrissage. Il se posa sans encombre. Sol meuble mais solide… Il n’aurait pu espérer meilleure conclusion à cette succession de catastrophes improbables. Enfin, il souffla, se laissant choir mollement dans son siège, la tête en arrière, les cheveux imbibés de sueur. Quelle aventure ! Mauvais esprit à part… Heureusement que D7 avait été là. Il secoua la tête, refusant de perdre plus de temps en pensées non productives. Le compte à rebours était déjà enclenché : celui de sa survie. « D7, tu ne touches plus à rien ! Je vais rétablir ces foutues communications ! »




Forêt septentrionale de Boz Pity, une demi-heure plus tard,

« Faucon Pèlerin à Refuge… Me recevez-vous ? Faucon Pèlerin à… Fait chier ! » pesta Barns, réprimant l’envie de balancer son comlink contre la paroi la plus proche ! La violence ne résolvait jamais rien lui avait-on dit étant gamin… Conneries ! Allongé dans la fausse technique, il bataillait avec plusieurs centaines de câbles de toutes les couleurs, de toutes les sections, les examinant comme il le pouvait à l’aide d’un tournevis testeur. Rien. Nada. La moitié des composants ne répondaient plus. Même les batteries de secours risquaient de rendre l’âme en cas de fausse manipulation. Dehors, le soleil à son zénith surchauffait le blindage thermique du cargo, augmentant inlassablement la chaleur interne faute de climatisation. Des chants d’oiseaux inconnus commençaient à l’agacer sérieusement ! C’était trop demandé que d’avoir un peu de silence pour se concentrer ?! « D7 ? Tu peux envoyer le jus sur le circuit des condos gyroscopiques ? » demanda-t-il, les yeux rivés sur son datapad, alors qu’il maintenait du bout des doigts, l’extrémité de son tournevis sur le composant dénudé. Une gerbe d’étincelles aveuglantes jaillirent soudain. « Stop ! Coupe ! Tout ! Putain de merde ! C’est n’importe quoi ! » Il explosa, frustré, paniqué à l’idée de crever de faim ou de soif au beau milieu de nulle part ! « Tout ça c’est TA FAUTE D7 ! T’ES LE PIRE MECANO QUE J’AI JAMAIS EU ! » Il tenta de se redresser, mais son front heurta un tuyau. Le gong sonore manqua de l’assommer… Raaaah ! Est-ce que tout devait se liguer contre lui aujourd’hui ?! Qu’avait-il fait à la Force pour que pareille destin lui soit réservé ?! Mais contre toute attente, ce choc fut une révélation. Une idée salvatrice lui sauta au visage. Oui ! S’ils parvenait à shunter la masse générale de la coque, afin de la polariser… Alors il pourrait décupler le signal en se servant de la carcasse comme d'une caisse de résonance magnéto-statique… En théorie ça pouvait marcher… Mais une seule fois. Une telle opération grillerait définitivement toute l’électronique embarquée. Il ferma les yeux, pour se concentrer… Il ne pourrait y arriver seul… « D7 ! C’est bon ! J’ai un plan ! » dit-il, enjoué, s’attendant à un chapelet d’insultes bipées après sa petite crise de nerfs. Mais seul le silence lui répondit. L’avait-il vexé à ce point ? « D7 ? Ecoute mon grand… J’ai peut-être été un peu dur… Mais faut me comprendre, tu vois… » Il fronça les sourcils tandis qu’une bourrasque tiède s’engouffra dans la fosse, soulevant une nuée de poussière qui le firent éternuer. Quelque chose clochait ! Comment le vent avait-il pu ?! Non !

Barns s’extirpa précipitamment de la fosse… Pour réaliser que ses craintes étaient fondées. La rampe déployée laissait entrer l’air extérieur chargé de senteurs inconnues. D7 ! Il avait pris la poudre d’escampette ! Mais qui lui avait fichu entre les pattes un tas de boulons aussi caractériel ! Incroyable ! Le Refugien se redressa, sauta jusqu’à sa couchette dans la cabine attenante au cockpit. Ses mains plongèrent dans son paquetage pour se saisir d’un blaster chargé. Rapidement, il rebroussa chemin jusqu'à la rampe déployée. D’ici, la végétation ne semblait pas aussi dense que vue du ciel. Fougères, herbes hautes, tapis de feuilles mortes au milieu desquelles sortaient de terre d’impressionnants troncs rectilignes aussi haut que des immeubles. « D7 ! Reviens, bordel ! Je t’offrirai un bain d’huile pour me faire pardonner ! » lança-t-il, ne sachant où pouvait bien se cacher son compagnon mécanique. De-ci de-là, des buissons de ronces obstruaient son champ de vision. Que faire… Sortir pour le chercher ?! Hors de question ! « Aller D7 ! Haha, elle est super bonne ta blague… Tu peux sortir de ta cachette, j’ai eu la peur de ma vie, ok ? Rah mais sérieux ! Tu crois que je vais venir te chercher ?! Y’a pas marqué Houndiana Joze sur mon front ! Hors de question que je foute les pieds dans une forêt inconnue, pleine de bestioles inconnues ! Si tu ne reviens pas de suite, on va se faire bouffer tous les deux ! » Il pesta encore de longue minutes…

Lorsque soudain, une série de bip lointains, à peine audibles, lui firent vivement tourner la tête. Il provenait de… heu… Par là ?! Les bip reprirent de plus belle. Barns tendit l’oreille… Qu’est-ce que ce droïde détraqué racontait encore ?! « Comment ça, que je vienne voir ?! C’est quoi cette histoire de statue… T’es pété un boulon mon pauvre ! Reviens ! Ou je… » Où je quoi se demanda-t-il ? Sans D7 impossible de mettre en place sa super idée de la dernière chance… Il n’avait en vérité pas le choix ! « Quand je t'aurais mis la main dessus, tu vas le sentir passer... »

La traversée de la forêt fut sans doute l’une des expériences les plus stressantes que Barns eut vécu. Il sursautait à chaque bruissement de feuille, chaque craquement. Plusieurs fois, il manqua de vider son chargeur sur la silhouette d'une petite créature qui s’enfuyait sur son passage. D7-R8 continuait de l’appeler, le droïde perdait conscience. Mais le Refugien refusait d’accélérer le pas, préférant conserver ses sens en éveil. Enfin, après plusieurs minutes de tension extrême, il émergea de la végétation, au milieu d’une clairière plus petite, pratiquement invisible depuis les cieux car dissimulée sous les frondaisons de plusieurs arbres millénaires la ceinturant de leur masse imposante… Incroyable… Ce qu’il découvrit au milieu de celle-ci le laissa sans voix, bouche bée, il en oublia même cette sensation de danger qui lui nouait les tripes encore quelques secondes plus tôt.

Une statue, représentant une femme aux formes aguicheuses s’élevait là, comme jaillissant des fougères. Un vestige de l’antique civilisation de géants natifs de Boz Pity, ayant disparu depuis des lustres. Seules les ruines imposantes jonchant ce monde témoignaient encore de leur existence… Fichtre, pensa-t-il, il ne les avait pas imaginés ainsi. Mais plus que les formes féminines, ce fut un éclat argenté qui lui attira le regard. Il provenait de l’orbite gauche de la statue. Les reflets du soleil jouaient avec le cristal enchâssé, lui donnant l’aspect d’un liquide argenté en perpétuel mouvement. L’orbite droite, elle, était vide. Barns baissa les yeux. Aux pieds de la sculpture, d’autres éclats brillaient timidement, à moitié dévorés par les hautes herbes. Comme si le second œil, malmené par les intempéries, avait chuté, pour se briser en mille morceaux. Les vents ou les animaux en avaient emporté la plupart. Bars s’agenouilla, ses doigts gantés se refermèrent sur un éclat à peine plus gros que son index, dont les bords émoussé n’aurait su couper quoi que ce soit. Cette couleur argentée l’intriguait au plus haut point… « Et ben mon vieux… » fit-il à l’intention de D7 « T’as un sacré pif… » Il eu du mal à détacher son regard du cristal… Mais lorsqu’il y parvint, il secoua la tête. Retour la triste réalité. « Mais l’urgence reste de rétablir les communications ! J’ai une idée, mais je vais avoir besoin de toi mon bon vieux D7 ! »




Orbite de Boz Pity, Refuge, trois mois plus tard.

Assis autour de la table ronde, les membres les plus éminents de Refuge écoutaient avec attention l’exposé du professeur en géologie Otto Lidenbrock. Devant lui, posé sur la table, l’éclat de cristal argenté tronait fièrement sur un socle transparant.

« … A la suite de quoi, une expédition a été organisée afin de prendre plus d’échantillons. » Il parlait de cette voix nasillarde qui irritait plus d’un de ses interlocuteurs, parmi lequel le Hutt Ragda Rejliidic… Qui bien que silencieux, dominait l’assistance de sa masse informe. « J’ai personnellement supervisé toutes données relevées par le spectromètre de masse… Et les résultats sont catégoriques. Comme les analyses réalisées sur les autres vestiges, il apparaît clairement que les Gargantelles ont construit cette sculpture à l’aide, uniquement, de matériaux trouvés sur Boz Pity… Même si le motif de celle-ci n’a rien de classique… Comme vous le savez, ceux qui ont laissés toutes ces ruines ne possédaient qu’un seul œil, ainsi que huit membres antérieurs… Nous n’avons pas encore trouvé d’explication à cette représentation, peut-être une déesse de la fertilité qui dans leur cultu… »

« Venez en au fait, Lidenbrock. » le coupa net Rejliidic, avachi sur les coussins cramoisis du chariot répulseur lui permettant de déplacer sa masse colossale. « Vos travaux ont coûté une somme astronomique… Alors vos résultats ont intérêts à être à la hauteur de nos espérances. »

« Hmmm. Oui. Bien évidemment. » reprit-il, après avoir réajusté ses petites lunettes rondes pincées sur son nez de fouine. « Tout cela pour dire que cet échantillon, dont la structure est proche de celle des cristaux Adegan, provient de Boz Pity ! »

« C’est tout ?! » l’interrompit de nouveau le Hutt. « Trois mois pour nous dire que ce machin provient d’un trou quelque part sur cette planète ? »

« Non, attendez ! Laissez-moi finir. Ce genre de cristaux ne peuvent se former à l’état naturelle que dans des conditions extrêmes, bien particulières. J’ai donc entrepris une cartographie de l’hémisphère nord depuis l’espace… » dit-il, pressant sur le bouton d’une télécommande activant le champ holographique de la table de réunion. Une sphère bleutée apparue. Boz Pity. Rapidement, un cercle orange se dessina dessus. « Ce que j’ai découvert est stupéfiant ! Sur le plan géologique, je veux dire… La moitié de l’hémisphère nord n’est autre que le cratère d’un super volant éteint depuis plusieurs millénaires. J’estime que ces cristaux ont été formés à l’intérieur de celui-ci, dans sa chambre magmatique, avant d’être projeté un peu partout autour de la planète lors d’une série d’éruptions que peu de mondes ont connus. Ici, là, et là, j’ai repéré trois secteurs prometteurs. Les restes préservés de coulées de laves datant de cette ère. Je ne sais exactement ce que nous découvrirons sur place… Mais j’estime que nos chances de trouver un gisement encore intact de cristaux Lidenbrokiens sont élevées ! »

« Parce que vous leur avez donné votre nom en plus ? Magnifique. » ironisa le Hutt, dont l’exposé commençait sérieusement à l’ennuyer. Il tourna son énorme tête vers les membres éminents réunis autour de la table… Chefs des diverses guildes et corporations, plusieurs sentinelles que Velvet avait jugé bon d’inviter. Depuis que l’on avait découvert que ce petit bout de minerai disposait de propriétés comparables à celles des cristaux utilisés pour la fabrication de sabre laser, certains en avait fait leur priorité… Les coûts investis dans ce projet dépassaient largement le prix qu’il aurait pu obtenir au marché noir pour des cristaux Adegan fraîchement extraits des mines d’Illum. Mais bon. Les Sentinelles rêvaient de dompter le pouvoir de cette pierre aux reflets argentés. Cela le dépassait… Mais si Velvet s’y intéressait… Alors il suivait… En conservant un œil attentif sur les dépenses, bien entendu. « J’imagine que votre conclusion mon cher Otto, c’est qu’il faut le plus rapidement possible monter une expédition ? Très bien… Dites-moi ce dont vous avez besoin, que je puisse chiffrer ça rapidement… »

« Ce n’est pas aussi simple » fit le professeur, jouant avec le col de sa blouse blanche. « Si ces trois coulées de lave ont été préservées, c'est justement parce que elles ne sont pas... facilement accessibles. Le site N°1 n’est autre que le fond d’une crevasse devenue lac… Le Site N°2 a été brisé par la croûte terrestre il y a bien longtemps, formant les parois d’un volcan encore en activité aujourd’hui… Quant au site N°3, il se trouve au niveau du pôle, sous un glacier dont j’ignore encore l’épaisseur… »

« Magnifique. Trois mois de dépenses pour d'aussi bonnes nouvelles. » Malgré ses réticences, il n’était pas le seul à se décider, loin de là. Aussi, il lança : « Le jeu en vaut-il toujours la chandelle ? Parce que je peux toujours faire jouer quelques relations pour dégoter une caisse de cristaux Adegan… Je dis ça, je dis rien… Quoi que nous décisions, moi je vote déjà pour changer le nom de ces cristaux… Autant appeler ça de la Rejliidite tant qu'on y est... » dit-il, levant ses deux énormes yeux globuleux au ciel.
Darth Velvet
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J’inspire doucement, écoutant attentivement les explications du géologue, ponctuées des remarques agacées du hutt à ma gauche. A vrai dire, je rejoins Ragda sur un point, j’aurais aimé une avancée plus probante et un compte rendu plus condensé que les fioritures enrobant son ignorance, qu’il nous dessert d’une voix crispante. Trois mois et des résultats succincts. Pourtant, contrairement à celui qui fut autrefois mon employeur, je le laisse rien paraitre de ma déception, mon visage lisse, dénuée d’une quelconque émotion ne laisse rien transparaitre de ma déception.

Il y a un raclement de gorge dans l’assemblée, et je glisse un regard perçant sur les hommes et les femmes participants à cette réunion. Je passe des uns aux autres, relevant les sentiments arpentant leurs profils, décryptant instinctivement les langages corporels, avant de prendre la parole.

« C’est assez mince comme résultats, Otto. Cependant c’est un début et nous avons tout de même quelques renseignements exploitables. »

Je me lève, approchant du scientifique pour récupérer son pad. Rapidement j’affiche la carte holographique de Boz, faisant apparaitre les sites potentiels.

« Ca l’est Radga. Je ne doute pas une seconde que tu puisses nous avoir une caisse de cristaux sur le marché noir, mais l’avantage de disposer de cette ressource, plutôt rare, sur Boz Pity, c’est que nous n’aurons pas à dépendre d’autres. Notre autonomie est importante, d’une certaine façon, elle est même une protection pour notre colonie. Evidemment, en tant que représentante du Protectorat, cette découverte revêt une importance particulière. Il est évident que la construction de sabre pour les élèves du Nexus s’en trouvera également simplifié, et je sais que le Technocorps trouverait l’usage de tels gisements. Alors oui. C’est important. Nous ne devons pas négliger cette ressource. .

Je m’approche de la projection Holographique, au centre de la table de réunion, une main sous le menton, en pleine réflexion.

« Nous devrions monter une équipe pour vérifier les hypothèses du professeur. Trois ou quatres personnes. Le matériel nécessaire serait limité, et… nous n’avons pas spécialement de délais à respecter. Nous pourrions commencer par le volcan. Les Sentinelles disposent de quelques armures de combat spatial. Elles résistent à des températures extrêmes, disposent d’un système de survie de premier ordre et d’une autonomie en oxygène suffisante.  Si nous ne trouvons rien ou si nous trouvons le gisement, nous aviserons à ce moment-là… Qu’en pensez vous ? » les interrogeais-je en embrassant l’assemblée d’un regard.

Puis j’ajoute, un sourire au bout des lèvres

« Et je vote également pour un autre nom, sans vouloir vous vexer Otto. »

*********

L’organisation d’une expédition a finalement nécessité moins de temps que je ne le pensais. Visiblement, un gisement de cristaux semblable à ceux-ci n’était pas uniquement une aubaine pour le Protectorat. D’un geste assuré, je boucle les harnais de mon armure, clipsant les dernières attaches avec la rapidité que confère l’habitude, avant d’aviser de l’avancement de Félix, en guerre contre la sienne. Felix. Parmi toutes les sentinelles qui ont postulé à cette mission, c’est cet humain charismatique, au visage franc et serein, que j’avais choisis pour m’accompagner, pour des raisons bien différentes que l’accomplissement de notre excursion. Un chef se doit de connaitre ses hommes, leurs forces, leurs failles, leurs savoirs pour leur assigner des missions à la hauteur de leurs capacités. Je n’ai jamais eu l’occasion, jusqu’à présent, de voir Félix à l’œuvre, à vrai dire je n’ai jamais pris le temps de réellement m’entretenir avec lui depuis son arrivée sur Boz, depuis son postulat chez le Protectorat. Pourtant, il avait fait ses preuves sinon jamais il n’aurait intégré les Sentinelles, mais cette évaluation-ci n’émanait pas de moi, et j’aime savoir qui je commande. Oh, je ne mets pas ses aptitudes ou sa loyauté en doute, je suis simplement curieuse de savoir de quel métal il est forgé, de découvrir sous son apparence séduisante et son charme, ce qu’il dissimule.

« Prêt ? Tu as besoin d’aide pour finir d’attacher ton plastron ? » demandais-je en m’emparant de mon casque sans pour autant en couvrir mon visage.

Le ronflement de moteur de la navette s’intensifie un instant noyant sa réponse sous un vrombissement assourdissant, avant de se taire.

« Nous sommes arrivés au point de chute. Voyons si Otto et Ragda sont prêt à nous accompagner au cœur de ce volcan… »

Le sas s’ouvre sur mes mots laissant le passage au professeur harnaché d’équipements scientifique, les joues rougis, et l’air revêche avec à son coté le droide de reconnaissance téléguidé à distance par le hutt.

« Bien si vous êtes tous prêts… allons y. » déclarais-je, la rampe de la navette s’abaissant devant nous.
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L'image de Felix, son hologramme au bichrome bleuté, quasi spectrale, était présent et directement transmit depuis son baraquement. Son reflet était humblement installée dans son siège parmi les sentinelles conviées à la réunion, légèrement courbé en avant pour consulter la cartographie de Boz Pity, son menton en appui sur sa main tel le Penseur s'étant penché sur les cercles infernaux... Il avait l'air grave, toute son attention portée sur les dires des uns et des autres, concentré, son regard noyé dans la pénombre détaillait successivement ses confrères et supérieurs qui, à tour de rôle, prenaient la parole ; les têtes dirigeantes des différentes guildes, femmes et hommes d'influence, de notoriété, de caractère, que l'on reconnaissait sans peine lorsqu'ils se montraient au jour. On les lui avait désigné comme faisant figure d'autorité, et on appuya sur leur rang dès lors qu'il postulat auprès des sentinelles du Protectorat... Mais de si loin, comme s'il s'agissait d'ébaucher le paysage d'une hiérarchie lointaine, ce n'était pas aussi évident d'intégrer chacun de leur visage dans sa mémoire. Sauf celui de Ragda, pour qui il pouvait s'agacer à démêler ce qu'il y avait de trop calculé chez ce Hutt... Cette répulsion instinctive qu'inspiraient de tels commerçants à ceux qui les approchaient et qui savaient tout de leur fourberie, était une des très rares consolations qu'éprouvaient d'être aussi miteux qu'ils l'étaient ceux qui ne vendaient rien à personne... ... ...

Tandis que le géologue continuait d'exposer ses découvertes, Felix eut un bref mouvement de recul, esquivant lentement la main de l'un des petits Fenders qui survint à ses côtés, dans l'espoir de lui attraper quelques mèches cendrées, et de s'y réessayer, et récidiver encore, et encore... Se redressant enfin, il écarta doucement l'enfant d'un revers du bras, toisant ce regard que lui lança son petit neveu, celui-ci entremêlé d'interrogations, lui rappelant qu'il s'était peut-être un peu trop dissout devant la tournure spécieuse qu'avait donné Lidenbrock à la réunion...

Bien qu'auparavant, il se disait que le Refuge pouvait être un endroit semblable à toutes ces stations où erraient jadis les Fender. Un endroit où tout ce qui ne mentait pas était honni, traqué, chassé, vomis d'en haut. La réalité des plus humbles haïe ; à mort. C'était le secret que nombre des systèmes stellaires dissimulaient, dont les territoires de la République , pourrissant jour après jour, et avec ingéniosité... Sur Boz Pity par contre, malgré sa surface désolée, frappée par le trait de la mort, parsemée de cimetières sans nombre, Felix y percevait malgré tout un avenir pour les siens, un second souffle, maintenant qu'il pouvait enfin entendre de leur bouche ses dirigeants s'exprimer sur des questions vitales. Et puis, Velvet effleura un point crucial qui était cher au Cercle des Fender. La vie en autarcie qu'ils avaient connus, ou l'indépendance d'un Refuge capable de subvenir à tous leurs besoins, vivant uniquement de leurs propres ressources. Ou du moins, dans le cas présent, de pouvoir disposer en toute autonomie de cristaux, sans provoquer ou accumuler la moindre dette à l'égard d'une entité extérieure. Il acquiesça donc doucement à ses dires, la voix de la représentante du Protectorat apportant un brin de fraicheur au discours du Professeur ;

- Et nous n'aurions de compte à rendre à personne.

Sauf à ses plus jeunes sœurs... Laly, Lola, Lucy, sortes de Moires chez les Fenders, tricotant leur fil de soie pour habiller la ménagerie tout en bavardant de leur sort et du destin de chacun ; de vraies mémés biscotteuses... Quand il leur expliqua qu'il avait été désigné pour une mission à risque, ses cadettes s'étaient mises à gronder... C'est le chant d'une sirène, et c'est dans les entrailles de la terre qu'elle t'attire, s'était alors exclamée Laly à propos de sa supérieure. Tu ne compte quand même pas accepter ? Et si au fin fond du gouffre tu finissais par être écrasé ? avait ajouté Lola, avant que Lucy ne surenchérisse de concert et à son tour : Qu'est-ce qu'on va devenir, t'y as seulement pensé ?

Felix ne fléchissait pas... Après tout, jusqu'ici il avait offert son appui aux différentes escouades de sécurité patrouillant aux abords du quartier général, ce qui comportait des risques ; dans une moindre mesure, certes, mais semblables. Lui, il pensait qu'il avait plutôt l'air médiocre s'il comparait ses propres faits d'armes à ceux qui l'entourait. Tous, ici, avait déjà pu faire leur preuve, par combativité, astuce ou ancienneté. Sans doute se faisaient-ils tous confiance, mutuellement, contrairement à lui qui, débarquant à peine, avait encore tout à leur prouver. Sinon quoi d'autre si ce n'était qu'il était temps de démontrer qu'ils pouvaient compter sur les Fender ? Le Refuge protégeait les siens et Felix le lui rendrait ; un juste et simple retour des choses.

Silencieux, il se contenta donc d'opiner à nouveau de la tête, en accord avec l'optimisme ambiant lorsque Velvet leur demanda ce qu'ils en pensaient, et que leurs voix s'élevaient pour le confirmer. Et puis, elle n'avait pas tord, ils aviseraient sur le tas ; un déploiement supplémentaire de matériel ne dépendait que de leur découverte une fois qu'ils seraient parvenus sur place.


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- Ah quelle merde...

L'armature de Felix était un poil trop petite, enfilant ses protections dont les jointures semblaient à tout moment pouvoir lâcher, surtout lorsqu'il tira fermement sur la dernière lanière qu'il lui restait à clipser. Enfin, ce genre d'imprévu était coutumier ; partout l'éphémère et partout le risible. Partout l'insulte au cœur, partout la surdité du destin qui choisissait pour délicate cible sa prudence et sa sécurité. Et parmi l'humiliation qui lui était faite, seulement elle, la Mirialan au masque sévère, âpre et pure, consolatrice cruelle. Elle était pourvue d'un regard dont les profondeurs sinistres portaient en elles les marques finement sculptées, à vif, par d'obscurs épreuves. Et cette aide qu'elle proposa, la terrible Velvet... Terrifiante... Parce que captivante.

Des mots qu'il mesurait, puis qu'il récusa amèrement... Il y avait des démons qui rugissaient en dedans, flamboyant dans sa poitrine ; ils l'empêchaient d’approfondir plus avant ses pensées, qu'ils chassèrent aussitôt de son esprit, les enfourchant sans pitié pour les livrer aux fourneaux, au même titre que les sermons des sorcières qu'il avait pour sœurs. Tout songes noyés dans le vrombissement assourdissant des moteurs en phase d'atterrissage, le Fender levant subitement l'index comme pour émettre un temps de suspension. Une pause ; ses iris implorant sa supérieure de patienter ne serait-ce que quelques petites secondes supplémentaires car il se débrouillerait, certain d'y parvenir seul.

Un instant de calme où il expira lentement, son torse se rétractant à mesure qu'il vidait ses poumons, sa lanière s'écoulant en harmonie tout du long de son plastron, enfin suivie du clap caractéristique que fit la détente de son attache... Enfin ! La discrète petite ridule d'un sourire de satisfaction au coin des lèvres vint lui barrer les traits jusque là impavides, maintenant qu'il était fin prêt. Alors renforcé de soulagement, Felix se souleva de son siège, hissant en un même temps son paquetage sur son dos lorsqu'il se déploya de toute sa hauteur, puis s'empara enfin de son casque qu'il coinça sous l'angle de son bras.

- Paré, chef.

Il leva alors sa main libre pour la refermer sur la poignée supérieure de la soute, comme pour s'y amarrer tandis que la navette se posait sur leur point de chute. Une secousse plus tard, le regard de Felix se posa distraitement sur l'équipage, ses yeux s'écrasant soudain d'un étage plus bas sur le petit scientifique à l'air revêche qui s'était mis sur son trente-et-un, ainsi harnaché de ses équipements... Lors de la réunion il avait démontré tant de zèle pour ses découvertes, qu'il pouvait se le représenter comme intérieurement excité par leur odyssée. Felix l'anticipait, à tord ou à raison, pour lui le Professeur avait tout d'un chérubin survolté qu'il leur fallait surveiller de prêt...

La sentinelle l'interpella donc, d'un ton franc et serein, auquel s'entremêlait une chaleur propre à l'humeur des satyres ;

- Lidenbrock... J'espère que vous ne vous empresserez pas de palper la roche comme certains de vos collègues du Technocorp s'en vont toucher les filles, mh ? Aussi séduisants que soient ses cristaux, maintenez le contact visuel avec les membres de l'expédition ; dont vous faites partie, ne l'oubliez pas.

A l'aune du fin sourire en coin lui étirant les lèvres, le sas quant à lui s'était ouvert, la passerelle s'abaissant enfin, laissant le champ libre au Professeur et au droïde. Se dégageant ensuite de la soute, Felix lança un regard entendu pour Velvet, avançant d'un pas dans le vide par delà le flanc de la rampe, pour s'écouler lourdement sur la terre ferme et, de cette façon, se donner l'occasion de vérifier d'un œil l'état des trains d'atterrissage.
Ragda Rejliidic
Ragda Rejliidic
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« Lindenbrock, vous faites une de ces têtes ! Vous n’allez quand même pas vous dégonfler ? » déclama le Hutt, sa large gueule dépourvue de lèvres fendue en un sourire aux dimensions extravagantes. « La Lidenbrockite n’attend que vous ! » Le visage du scientifique se renfrogna davantage, bien que Ragda eut toutes les peines du monde à en distinguer avec précision les traits, derrière cette visière teintée, prévue pour absorber les rayonnements cosmiques en tout genre.

« Cessez donc de vous moquer, Rejliidic ! Au moins, moi, j’ai le courage d’y aller… Contrairement à vous ! » fit-il, sur un ton proche de celui qu’employaient usuellement les enfants pour dire « c’est celui qui dit qui y est ! ». Le Hutt pouffa. Il leva ses deux ridicules petits bras, avant de se trémousser, ce qui eut pour effet d’agiter ses graisseux bourrelets en une succession de vaguelettes écœurantes. « Parce que vous croyez qu’il existe des combinaisons spatiales à ma taille, quelque part dans cette galaxie ?! » Il ricana de plus belle, tandis que le visage de son interlocuteur s’empourprait. Celui-ci leva un index accusateur, prêt à lui répondre sur son ton le plus mordant… Mais il fut coupé dans sa verve haineuse par la voix du pilote, dans son dos :

« Ça serait trop vous demander que d’avoir un peu de silence, bordel ?! Y’en a un qui bosse ici… C’est pas comme si je devais poser cette foutue navette sur un promontoire rocheux au milieu d’un cratère bouillant de lave en fusion ! » Il avait prononcé ces mots, sans même lever les yeux de ses instruments. A ses cotés l’astrodroïde émis une série de commentaires bipées. « Ca va D7 ! » reprit-il, en réponse à son co-pilote. « Lorsque j’aurais besoin d'aide pour me défendre, je te ferai signe… »

« Veuillez nous excuser Barns » lui répondit le Hutt, sarcastique. « Nous ne voudrions effectivement pas que cette navette termine comme votre Faucon-Pèlerin… » A vrai dire, cette histoire lui restait au travers de la gorge. Le cargo n’était plus qu’une épave, tous ses systèmes électroniques définitivement grillés par les bidouilles du Corellien. Ragda pris sur lui, pour ne pas penser aux conséquences financières de la perte d’un vaisseau de transport. Toute l’économie de l’avant-poste dépendant presque exclusivement de l’exportation des plantes médicinales. Et sans cargo, pas d’exportation. Et sans exportation, pas d'économie ! CQFD !

Oui, Ragda s’agaçait rapidement lorsqu’il pensait à la manière dont certains gaspillaient les précieuses ressources de l’avant-poste… C’était d’ailleurs pour cette raison qu’il s’était porté volontaire aujourd’hui. Monopolisation d’une navette, réquisition de trois combinaisons spatiales incroyablement coûteuses. Tout cela n'était pas sans conséquences financières pour Refuge. Et le Hutt comptait bien s’assurer que les investissements engagés dans cette mission ne le seraient en vain. Au moins, le laïus de Barns eut un effet positif : celui de faire taire Lidenbrock. Dans cette combinaison bien trop grande pour son petit gabarit, il peinait à se maintenir en équilibre, alors que la coque vibrait sous le rugissement des répulseurs poussés à leur paroxysme. Ragda, lui, affalé sur son chariot, donnait l’impression d’être devenu un énorme morceau de gelée verdâtre. Ses plis de peau frémissaient au rythme de la navette, tandis que son chariot, fixé au sol grâce à de puissants aimants magnétiques, lui assurait une assise stable. Enfin, une secousse plus violente que les autres précéda l’atterrissage. Barns coupa les moteurs. Le silence succéda aux hurlements des répulseurs.

« Bon. » fit le Hutt, se redressant sur ses coussins cramoisis, afin d’atteindre le tableau de bord de son chariot. « On aura au moins réussi la première étape de cette expédition : poser la navette. » La porte de la soute s’ouvrit dans un sifflement pneumatique, révélant les larges silhouettes des deux Sentinelles en combinaisons spatiales. Cette navette n’avait pas été originellement prévue pour un tel usage. Elle disposait d’un petit poste de pilotage, d’un espace de vie prévu pour deux membres d'équipage, ainsi que d’une soute reconvertie pour le transport de passagers. Au lieu de l’espace usuellement réservé pour le fret s’alignait deux rangées de strapontins. Enfin, tout à l’arrière de l’engin s’articulait une rampe déjà ouverte. Une terrifiante lumière fluctuante, orangée, en jaillissait. Pas de doute, le cratère bouillonnait, tout proche. La chaleur montait rapidement. Déjà Ragda suait à grosses gouttes. Un mucus huileux recouvrait sa peau, imbibait les coussins sur lesquels il reposait mollement. Chacun y alla de sa petite remarque. Mais Lidenbrock obtempéra, sans un mot. Fait notable. Ragda, quant à lui, ne bougea d’un pouce. Enfin, façon de parler, puisque ses petits doigts boudinés virevoltèrent sur les commandes de son engin de reconnaissance téléguidé. A peine plus long qu’un avant-bras humain, celui-ci était équipé d’une série de micro-répulseurs qui lui permettaient de se déplacer avec célérité et agilité, tel un insecte aux dimensions cauchemardesques. Sur l’écran face à lui, il ne perdait une miette des images retransmises par la caméra montée sur l’avant du fuselage.

Ainsi, le trio quitta la navette, tandis que le drone, sous l'impulsion de son pilote, pris un peu d’altitude. Prendre du recul, il faut toujours prendre un peu de recul pensait-il… Ce fut à ce moment que Ragda rouvrit la bouche. « Barns ! » beugla-t-il à l’attention du pilote qui n’avait quitté son siège, procédant aux usuels « check » post-atterrissages. « Fermez cette foutue rampe… Et rallumez la clim ! Il commence à faire une chaleur à crever ! »

Mais l’autre, loin d’être décontenancé par la voix autoritaire de l’énorme gastéropode, répondit sur un ton monocorde, les pensées concentrées sur les résultats de ses analyses. « Je la rallumerai lorsqu’on aura dépassé le seuil critique… Question d’économies d’énergie. » Prenant conscience de ce qu'il venait de dire, il releva la tête, paré d’un sourire triomphant. « Pourtant je croyais que c’était votre rayon… Les économies… » « Hilarant… Je vais vous en foutre moi des économies ! Rallumez cette clim, c’est un ordre ! » « A vos ordre chef ! » Grandes gueules de pilotes pensa le Hutt. A croire que ce trait de caractère insupportable était un prérequis pour apprendre à tenir un manche !

En plus du moniteur retransmettant les images capturées par son drone téléguidé, Ragda disposait de deux larges écrans fixés pour l’occasion aux parois du quartier d’équipage. Ils affichaient en temps réel toute une série de données jugées vitales pour le bon déroulement de l’opération. Relevés des senseurs de la navette, ceux des scanners intégrés aux combinaisons, ainsi que les signes vitaux de leurs passagers. Celles-ci disposaient de tant de capteurs qu’il aurait été possible d’analyser leurs flatulences pour en déterminer la composition de leur repas de la veille… Bien que cette application pratique n’effleura pas le moins du monde l’esprit pourtant retord du Hutt. Il était concentré, si concentré, qu’il en oubliait de cligner des paupières. Ragda n’avait rien d’un débutant en la matière. Peu de monde connaissait son secret : que Fantôme, le pirate information et courtier en données sensibles, et lui ne faisaient en réalité qu’un. Autant dire qu'il nageait entre les lignes de codes comme un poisson dans l'eau.

« Je distingue une étroite corniche à dix mètres devant vous, en contrebas. » fit-il, s’adressant, via comlink courte fréquence, aux membres de l’expédition. « Je vais la suivre avec le drone pour m’en assurer… Mais, déjà, vu d’ici, ça me semble le moyen le plus simple pour se rapprocher du cratère. » Il pressa un bouton. L’affichage changea de couleur, lui retransmettant une nouvelle série d’images commentées par un défilé de chiffres qu’un néophyte aurait pris pour des hiéroglyphes antiques. Ses traits se parèrent d’une moue dubitative. Rien ne lui permettait, d’ici, d’analyser avec précision la nature rocheuse de cette corniche. Il supposait néanmoins qu’une roche volcanique assez solide pour résister à de pareilles conditions extrêmes serait en mesure de supporter le poids cumulé des trois aventuriers. Il ouvrit la bouche pour dire autre chose, lorsque une secousse fit trembler la navette. Ragda laissa échapper un petit cri de surprise. Même Barns, derrière lui, fit un bond. « C’était quoi ça ?! » fit-il, les yeux rivés sur les écrans bien que ne comprenant rien aux données affichées. Le Hutt grimaça. « Secousse sismique. Les senseurs détectent un regain d’activité de 1,7% dans la chambre magmatique sur volcan… Ce n’est sûrement pas grand… » Mais une nouvelle secousse, plus violente que la précédent, lui coupa la chique. La navette tangua. Barns se précipita sur les commandes. Et ce qu’il découvrit, au travers de la verrière du cockpit, lui fila la chair de poule. La plateforme sur laquelle ils venaient d’atterrir commençait à se fissurer. « Merde ! Faut pas qu’on reste là ! Le roche cède sous le poids de la navette… » Ragda lui aussi pesta, avant de contacter le reste de l’équipe, inquiet :

« Le promontoire rocheux est en train de s’effondrer ! On va devoir décoller… Et en trouver un autre plus stable pour se poser. Tout se passe bien en bas ?! »

Ayant suivi la corniche avec son drone pour s'assurer de la viabilité de son plan, il ne distinguait plus les silhouettes de ses acolytes, derrière les épais rideaux de fumées sulfurées rejetées par le cratère en fusion. Pourvu qu'ils ne leur soit rien arrivé... TROIS COMBINAISONS PRESQUE NEUVES !!!
Darth Velvet
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J’ose un regard amusé vers ma sentinelle, arrondissant mes lèvres d’un sourire fugace que je m’empresse de dissimuler au derrière de la visière polarisée de mon casque. Le géologue, lui, ne s’encombre ni d’un sourire, ni d’un rire, arborant une large grimace et un regard suintant les récriminations.

« Comment osez-vous, déblatérer vos sales petites insinuations grivoises ! » commence-t-il, les joues échauffées par la chaleur, et les tempes humides de sueur. « Etre un technocorp ne signifie pas être un gros pervers ou un obséd… »

« Il suffit. » le coupais-je avant que la situation ne s’envenime, en lui calant sur le crâne son casque. « Vous comparerez vos points de vue, lorsque nous serons en sécurité, pour l’heure soyez attentif et cessez de vous disperser avec des futilités. Ça ne va pas être une promenade de santé, alors restez vigilants. »

Nous n’avons pas besoin de dissensions au sein de l’équipe, pas si nous voulons trouver cet hypothétique gisement de cristaux. L’expérience promet déjà d’être périlleuse. Autant je suis assez confiante en ce qui concerne Felix, autant le cas d’Otto m’inquiète. Il est certes indispensable à notre excursion mais son manque d’entrainement risque de nous mettre dans quelques positions délicates. Je soupire. Il sera bien temps d’affronter les complications lorsqu’elles se présenteront. Pour l’heure, je m’approche du scientifique, ôtant de ma ceinture un filin pour nous encorder l’un a l’autre.

« Allons y. Otto, marchez bien dans mes pas. Felix, ferme la marche. »



[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]


Une brise d’air s’engouffre sur le promontoire, drapant le profil chromé de notre navette et nos silhouettes esseulées d’un voile de fumée grise. Un instant, le dessin du volcan disparait derrière cet épais linceul de cendres et de gaz toxiques avant qu’il ne libère une flèche de lave rougeoyante sur un ciel obscurcit par ses sombres nuées. Comme un fanal dans la nuit. Comme une invitation à explorer son cœur et ses pentes. Oui l’endroit est dangereux, cruel et prédateur, mais la vue est simplement à couper le souffle. Magnifique. Mortelle. Pourtant je me surprends à contempler avec rêverie, le lac embrasé en dessous, ses flancs de rocailles obsidiennes, ses pythons rocheux étincelant d’une lueur d’or fondu sous les caresses du feu liquide.

« Je distingue une étroite corniche à dix mètres devant vous, en contrebas.Je vais la suivre avec le drone pour m’en assurer… Mais, déjà, vu d’ici, ça me semble le moyen le plus simple pour se rapprocher du cratère. » grésille Ragda dans mon comlink.

« Bien reçu, nous allons donc essayer de descendre par là, dès que tu nous confirmeras le passage. »

J’avance sur les scories, les pierres de lave durcies crissant sous les semelles de ma combinaison, roulant en traitre pour ronger mon équilibre sans pour autant ralentir jusqu’à l’approche de cette corniche repérée par le hutt. A une ou deux reprises, je sens la corde se tendre à ma taille, et devine le ronchonnement du scientifique maudissant la fourberie de ce terrain accidenté. Je l’ignore, me penchant au-dessus du vide pour mesurer la distance et la viabilité du chemin proposé. En contrebas, à tout juste quatre mètres, peut-être cinq, j’aperçois l’étroit passage. Ce devrait être assez simple de le rejoindre, à la condition que la roche supporte nos poids cumulés.

Otto se penche à son tour, émettant un sifflement strident.


« Oh là ! C’est haut ! Faut trouver un endroit plus accessible ! »

Sa voix monte dans les aigues, stridente, signe évident de son stress palpable. Je me tourne vers lui, offrant derrière ma visière un sourire rassurant

« Ne vous inquietez pas. Felix et moi allons vous aider à desc…. »

Le plus effrayant, dans une secousse sismique, c’est ce son, lugubre et sourd, comme le roulement funéraire d’un tambour qui jamais ne s’arrête. Il martèle le sol au rythme de ses tremblements, long et puissant. Mon sang se fige dans mes veines, glacé malgré la chaleur étouffante.

« Secousse sismique. Les senseurs détectent un regain d’activité de 1,7% dans la chambre magmatique sur volcan… Ce n’est sûrement pas grand… »

Chose ? Mais il ne finit pas sa phrase, et ses mots se dérobent sous une nouvelle réplique, plus forte, plus intense, plus chaotique que la précédente. Elle me projette au sol, et au travers des gants de ma combinaison, je devine la vibration profonde de la terre, sa colère grondant sous la surface et jaillissant du dessous en soubresauts sporadiques. Je n’ai pas vraiment le temps de m’inquiéter pour mes compagnons, de lever vers leurs positions, mes rétines striées d’inquiétude lorsqu’une forte tension m’étreint la taille simultanément aux hurlements d’Otto. Un pan du promontoire, juste là où se tenait quelques secondes avant le technocorp, se détache dans un craquement sinistre, emportant avec lui son invité, tirant brutalement sur notre cordée de survie.

« Merde ! »

Je suis happée à sa suite, vers le vide. Mes doigts ripent sur la rocaille refusant de m’offrir un appui pour freiner mon aspiration vers la falaise et une chute éminente. D’une main je me saisis du piolet à ma ceinture, pour m’ancrer rapidement., stoppant net ma descente aux abîmes.

« Sortez-moi de là ! Borrrrrrrrrrdellllllllll sortez-moi de làààààààààà ! » gémit-il en se balançant au bout du filin.


Ragda Rejliidic
Ragda Rejliidic
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« Merde, merde et merde ! » cracha le Hutt, observant, impuissant, les images ponctuées de neiges électroniques que lui retransmettait en direct son drone. Celui-ci flottait en vol stationnaire à moins d’une dizaine de mètres de la cordée en difficulté. L’expédition virait à la catastrophe ! « Ce n'est pas possible ! » Sur son autre écran, les relevés sismiques ne cessaient de s’affoler à la mesure que la température à l’intérieur du cratère croissait. « Le volcan est en train d’entrer en phase active ! Il n’était pas censé être éteint ?! » Demanda-t-il, question rhétorique, que le pilote, à l’intérieur de son cockpit lui cru adressée :

« J’en sais rien ! Plusieurs milliers d’années ! Un truc comme ça… »
« Barns ! Je suis désolé de vous l’annoncer comme ça… Mais… VOUS PORTEZ VRAIMENT LA POISSE ! »
« Je vais finir par le croire aussi… Je vais finir par le croire aussi... »


Une petite série de bips suraiguës vinrent confirmer cette analyse. Le Corellien pesta dans sa langue natale, les mains rivées sur les commandes. Il luttait contre les éléments pour conserver une altitude stable. A mesure que l’air se chargeait des gaz brûlants rejetés par le cratère, la portance diminuait, le forçant à remonter pour ne pas épuiser les répulseurs déjà surmenés.

« En tout cas, va falloir trouver une solution, et vite ! Je ne vais pas pouvoir tenir bien longtemps ! Nos réserves d’énergies chutent rapidement… »
« Bouclez là, bordel ! Vous m’empêchez de réfléchir ! Autorisation de couper la clim ! Voilà, vous êtes contents ?! »
« Heu… »


Il y avait forcément une solution… Il y avait TOUJOURS une solution. La panique, la précipitation : de veilles ennemies qu’il lui fallait combattre. Seule Velvet semblait s’en sortir plus ou moins, accrochée à l'aide de son piolet au flanc du cratère, la moitié du corps dans le vide. Mais sa position déjà précaire le devenait d’autant plus qu’Otto, toujours relié à elle par un filin de sécurité, continuait de gesticuler, comme pris d’une soudain crise d’épilepsie. Felix, quant à lui, ne répondait plus, mis hors course par l’avalanche de roche volcanique qu’il avait reçu en pleine tête. Il gisait, un peu plus haut que les autres, un bras ballant dans le vide, à moitié enseveli… Si cette vision pouvait donner des sueurs froides, les capteurs intégrés à son armure spatiales retransmettait des constantes vitales rassurantes.

« Barns ! On n'a pas le choix ! Il faut nous rapprocher ! Si on ouvre la soute et qu’on… » commença le Hutt, espérant s’en tirer avec un plan aussi simple. Mais son enthousiasme naissant vu tué dans l’œuf, par un Barns fataliste :

« Impossible ! » répondit-il, incapable de dissimuler la tension nerveuse qui crispait chacun des muscles de son corps, jusqu’à faire naitre des palpitations sous sa poitrine de contrebandier pourtant rodé aux situations à risques. « Si on descend, on est mort ! Il n’y aura plus assez de portance ! Les répulseurs ne pourront compenser ! La navette chutera dans le cratère… Comme un gros fer à repasser ! » Ce fut la seule image qui lui vint à l’esprit. Ragda grimaça, commençant à sentir la panique le gagner. Pour autant, la logique mécanique, froide, impersonnelle, caractéristique de son esprit retord de Hutt continuer de turbiner. Au cours de ses « vies » précédentes, il avait appris à gérer des situations de crise… Il avait même participé à plusieurs batailles spatiales. Il savait pertinemment que tout problème complexe en apparence insolvable se décomposait en une multitude de problèmes plus simples pouvant être soldés séparément. Seule Velvet disposait du self-control nécessaire pour réagir avec efficacité maintenant que Félix ne répondait plus. Mais, handicapée par un Otto paniqué, elle ne pouvait esquisser le moindre geste, au risque d’être précipitée vers le cratère fumant où s’achèverait sa vie dans un « plouf » des plus lamentables. Une fin sordide qu’il ne souhaitait à aucun de ses ennemis… Sauf peut-être la Dame Noire. Oui, elle, elle le méritait.

Ainsi, il lui apparut la première des priorités. Otto.

« Otto ! » lança-t-il dans le comlink, s’exprimant sur la fréquence commune des trois combinaisons spatiales. « Otto ! Vous me recevez ?! »

« Je vais mourir ! Haaaaa ! C'est la fin ! Noooon ! » Il hurlait, pleurait, suppliait toutes les puissances de l’univers de le secourir.

« Otto ! Ot...to ! Merde ! Calmez vous ! C’est Rejliidic ! Je… »
« Rejliidic ?! C’est vous ?! SORTEZ MOI DE LA ! J’VOUS JURE QUE JE RENONCERAI AUX CRISTAUX LIDENBROKIENS ! APPELLEZ LES REJLIIDITE SI CA VOUS CHANTE ! JE M'EN FOUS ! FAITES TOUT CE QUE VOUS VOULEZ, MAIS SORTEZ-MOI DE LA !!! »
« Otto ! STOP ! Calmez-vous ! Vous allez finir par vous décrocher tout seul ! Inspirez… Resp… »
« Facile à dire de là ou vous êtes hein, Rejliidic ! Voilà pourquoi vous ne vouliez pas descendre hein ! Vous le saviez, vous n’avez rien dit ! Vous… »
« Otto… »
« allez ramener vos fesses… inexistantes… pour me sortir de là ! TOUT DE SUITE ! »


Le scientifique perdait complètement la tête, passant en une fraction de seconde de la peur à la colère. Aussi, Ragda décida-t-il de passer aux choses sérieuses. Seule la manière forte pouvait à présent fonctionner.

« Otto. Ca suffit. Je vous laisse dix secondes pour vous calmer. Passé ce délai, j’active l’armement de mon drone et je vous descends. »
« Quoi ?! »
« Neuf. »
« C’est n’importe quoi… Vous n'oserez pas... »
« Huit. »
« Votre drone n’est même pas armé ! »
« Sept. »
« Il n’est pas armé hein ? »
« Six. »
« JE SAIS QU’IL N’EST PAS ARME ! »
« Cinq. »
« Vous me prenez vraiment pour un… Je sais que vous ne... »
« Quatre »
« Rejliidic… »
« Trois. »
« REJLIIIIDIIIIIC ! »
« Deux. »
« OK ! OK ! VOUS AVEZ GAGNÉ ! JE VOUS DÉTESTE ! »
« Un. »


Après ce dernier cri, l’attitude d’Otto changea du tout au tout. Il cessa de s’agiter dans tous les sens, recouvrant ses esprits, même si ses mains ne semblaient vouloir quitter le filin auquel il se raccrochait comme à sa propre vie. Un geste des plus inutiles, car si le harnais devait lâcher, le poids de l’armure spatiale l’entraînerait vers une mort certaine. Enfin, après quelques instants, l’effet pendulaire commença à ralentir, soulageant probablement Velvet accroché au dessus. Le plus drôle dans cette histoire, c’était que le drone n’était effectivement pas armé… Mais ça, ça resterait un secret.

« Velvet, tu me reçois ?! » reprit-il, passant, au problème suivant. « Felix est un peu plus haut. Il est sonné… J’espère qu’il n’a pas bousillé l’armure spatiale, elle coûte un bras ! Essaye de remonter Otto si tu le peux, je vais trouver un moyen de vous sortir de là… »

Des propos rassurant mais qui ne parvenait à dissimuler le vide de ses propres idées. Comment parvenir à les aider d’ici ?! La navette évoluait à plus de cinquante mètres au-dessus d’eux ! Soudain une pensée germa…

« Barns ! On a des cordes supplémentaires ?! »
« Heu… Non… »


… Et mourut aussitôt.

« Sérieusement ?! Comment peut-on partir en expédition avec si peu de matériel ?! »
« Bah… C’est vous qui avez refusé les bons de sortie : restrictions budgétaires... Tout ça… Tout ça...»
« C’est bon, c’est bon… On a compris… »


Un jour, les crédits auront sa peau, pensa la gastéropode, décontenancé par cette prise de décision qui lui avait paru tellement légitime sur le moment. Il pesta, à demi-mot, lorsque soudain, sur son écran, les données s’affolèrent. « Il va y avoir une nouvelle secousse !!! » hurla-t-il, à l’instant même où celle-ci commençait. Cette fois, la navette ne fut prise dedans, lévitant à soixante-dix mètres au-dessus de la lave en fusion devenue un véritable bain bouillonnant… Mais, pour les trois autres, cette nouvelle secousse fut encore plus violente que la précédente.

Ragda manipula avec célérité et précision son drone, afin de prendre de la distance. A mesure que les vibrations s’intensifiaient, un pan entier du cratère se fissurait, déclenchant une véritable avalanche de roches parsemées d’éclats argentés que le Hutt devenant comme était les cristaux tant recherchés. Les fissures devinrent des fractures… Puis dans un grondement assourdissant, toute la crête nord s’effondra sous son propre poids. Et lorsque le calme revint enfin, silence morbide, Rejliidic hoqueta de surprise, alors que les nappes de fumées sulfurées chargées de lourdes poussières se dissipaient :

Il ne restait pratiquement rien du promontoire auquel s’accrochaient les trois aventuriers… Seulement une flèche rocheuse d’à peine dix mètres de large, qui dardait vers un ciel devenu noir. La lave, elle, à présent libérée de son carcan millénaire, commençait à s’écouler dans la vallée, grignotant lentement mais surement sa base fragile. Ce n’était plus qu’une question de minutes avant qu’elle ne tombe à son tour, emportant avec elle les trois âmes désireuses de survivre. Contre toute attente, cette fois, Otto ne céda à la panique… Peut-être était-il même perdu conscience. Ragda n’eut le temps d’analyser ses constantes vitales pour le dire. Au lieu de cela, son regard scrutait les images retransmises par son drone avec une attention toute particulière.

« Velvet… J’ai une idée. » fit-il enfin. « Tu vas voir, c’est un plan complètement fou comme tu les affectionnes… » Elle allait le détester, c’était sûr. « Barns ne veut pas faire descendre la navette à votre niveau… Il fait trop chaud. Alors si on peut pas venir à vous, c'est vous qui allez venir à nous... » Attention, suspens insoutenable. « Si je crash mon drone sur la pointe de la flèche, au dessus de vos têtes, côté nord, la base cédera. Elle basculera, pour finir sa course en s’encastrant contre l’arête sud du cratère qui est encore intacte… » Ca c’était si tout se passait comme prévu. Elle pouvait aussi se brise sous le choc, entraînant ses passagers clandestins dans une chute mortelle. Mais bon… D’après les senseurs, il y avait environ soixante pour cent de chances pour que ça marche… Les statistiques étaient de leur côté ! Il avait, par le passé, gagné des parties de Sabacc moins bien engagées ! « Accrochez-vous solidement… Ca va secouer. » fit-il enfin, en guise de conclusion, coupant le micro pour faire taire les protestations. Il n’avait rien trouvé de mieux. Rien. S’il parvenait à faire basculer la flèche rocheuse comme prévu, celle-ci s’écraserait contre la face sud du cratère, s’improvisant alors comme une rampe à quarante ou cinquante degrés d’inclinaison… Ainsi, le trio pourrait remonter assez haut pour que Barns puisse les récupérer.

« Barns… C’est maintenant qu’on va voir si vous portez vraiment la poisse… »
« Vous me croyez si je vous dis que je croise même les orteils ? »
« Aucune idée. C'est quoi un orteil ? »
« Ah... Oui... Pardon... »


En réalité, la plus terrible des inconnues s’incarnait en Felix, gisant inconscient à demi enseveli sous les gravats. Personne ne pouvait prédire comme ceux-ci réagiraient lorsque la flèche commencerait à chuter. Ils pourraient tout autant lui sauver la vie, que l’entraîner vers les abîmes déchaînés du volcan… Par acquis de conscience, Ragda ralluma le comlink, quelques instants avant de lancer son drone à vive allure contre sa cible :

« Felix… C’est maintenant ou jamais pour répondre… »

Enfin il pressa un ultime bouton. Les répulseurs du drone bourdonnèrent sur des notes de plus en plus graves et sourdes.
Darth Velvet
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Mes doigts se crispent davantage sur le piolet, leurs jointures blanchit sous l’effort alors que le poids du scientifique pèse considérablement à ma taille. Plus il gesticule, oscillant au bout de sa corde, plus il aggrave, sans en prendre conscience, notre équilibre trop précaire. Déjà, je sens ma prise se réduire petit à petit, le métal du pic figé dans la roche, l’ébrécher inexorablement. Elle s’effrite, et l’envie de couper le lien entre ce maudit Otto incapable de sang-froid et moi, me taraude soudainement. Pourtant je ne glisse pas ma lame contre la corde, me contentant de serrer les dents et de bander chacun de mes muscles afin de nous maintenir au-dessus du précipice.

« Velvet, tu me reçois ?! » vitupère la voix de Ragda dans mon casque. « Felix est un peu plus haut. Il est sonné… J’espère qu’il n’a pas bousillé l’armure spatiale, elle coûte un bras ! Essaye de remonter Otto si tu le peux, je vais trouver un moyen de vous sortir de là… »

« Hmmmm… Fais vite… » répondis-je sous l’effort, agacée par cette touche d’évidence qu’il distille à mon oreille comme un conseil avisé.

Le remonter, vraiment ? L’idée ne m’était pas venue à l’esprit ! Je serre les dents, momentanément soulagée que le professeur cesse sa gigue au-dessus du magma et se tienne enfin tranquille. Des gouttes de sueurs perlent sur mes tempes, brouillent ma vue, sous mon effort alors que je devine, sur ma ligne d’horizon, le corps affalé de Felix. Quoi que Ragda fasse, le temps joue contre nous… contre moi....

« Velvet… J’ai une idée. Tu vas voir, c’est un plan complètement fou comme tu les affectionnes… » grésille mon comlink  qui débite à présent les modalité de cette idée farfelue

« Otto… » grinçais-je sous le coup d’une nouvelle secousse « Tu vas devoir t’accrocher… sort tes piolets et prépares toi à les planter pour maintenir ta position dès que je t’aurais remonté… »

Je n’ai pas le temps de patienter, je dois agir sinon la lave finira par nous engloutir, à moins que ce ne soit le stratagème osé du hutt qui ne se charge de nos carcasses. Je ferme les yeux, chassant de mes rétines la vision angoissante du dérapage lent de mon grappin vers les abysses brûlants, chassant de mon esprit les vibrations et la fatigue de mon corps trop sollicité par la contrainte, et me plonge dans la Force pour drainer son énergie. Comme un cataplasme sur mes cellules crispées sous la tension de notre suspension. Comme un regain de puissance capable de propulser le scientifique jusqu’à la plate-forme secouée d’ultimes soubresauts.

Le cri d’Otto vrille mes tympans un court instant, avant que sa réception déplorable contre le sol rocheux ne lui cloue la bouche d’un grognement étouffé. Pour autant il obéit à mes ordres précédents, sans émettre de plainte supplémentaire,

« Accrochez-vous solidement… Ca va secouer. »

Je me hisse sur le rebord dentelé aussi rapidement que possible, faisant fi des explosions en contrebas, délestant notre python rocheux, d’énormes blocs à sa base. Un instant, comme si le temps se suspendait, comme si rien n’avait changé son équilibre, le sol sous nos pieds demeure immobile, stable. Puis doucement, dans un grondement apocalyptique, il vacille. Je cours vers Félix, alors qu’avec une infini douceur, nous chavirons dans cette mer de lave bouillonnante. Je m’empare de son corps inerte, grimaçant déjà à l’idée qu’il me faudra compenser son poids tout en m’assurant de la sécurité d’Otto. Mon bras se glisse sous le sien, calant mon épaule sous son aisselle, sa main pendant autour de ma nuque. Aucune réaction. Je souffle, m’ancrant à mon tour sur le sol tout en resserrant ma prise sur taille de la belle au bois dormant.

« Felix, si tu veux te réveiller c’est maintenant ou jamais… »

Pas de réponse.
La flèche s’écrase soudainement avec violence contre l’arête du cratère, éclatant la roche, brisant sa pointe pour ne laisser qu’un fragile pont de pierres noirâtre susceptible de rompre sous son poids, à n’importe quel instant, le choc en ayant fragilisé la structure minérale.

« Otto, cours ! » ordonnais-je au scientifique, tout en libérant notre cordée afin de ne pas retarder sa fuite.

Il me faut quelques instants supplémentaires pour caler au mieux la sentinelle contre moi et parvenir à avancer. Sa charge me ralentit considérablement, et , sous la semelle de mes bottes, je sens la faiblesse de notre échappatoire, ses craquements, ses crissements, comme un avertissement à sa fragilité. Je serre les dents, accélère, les jambes de Felix dessinant derrière moi, une trainée dans le champs de gravats. Le professeur, lui, grimpe déjà sur le cratère, rejoignant en quelques enjambées rapides, notre vaisseau, alors que je ne suis même pas à mi-chemin.

« Félix… » grognais-je en continuant d’avancer.

Une secousse me déséquilibre momentanément, les vapeurs de souffre et de gaz nous enveloppant d’une brume corrosive. Nous n’y arriverons pas. Je n’y arriverais pas. Pas de cette façon. J’insuffle à mes muscles la puissance de la Force, sentant se tendre sous ma combinaison ma peau. Encore 3 pas… 2 … 1… derrière nous le pont s’effondre, plongeant dans les vagues turgescentes du magma.

« Ramenez nous à la maison.. » soufflais-je, en remontant dans le vaisseau.





Le regard planté sur l’hologramme, je fixe les courbes d’une carte, agacée. Décidément nous jouons de malchance et cette excursion au cœur du volcan pour découvrir un gisement de cristaux ne s’est soldé que par un échec complet, une sentinelle blessée et un scientifique apeuré par la moindre idée de se trouver à nouveau dans une situation similaire.

« Otto ne nous accompagnera pas pour cette expédition Ragda. Il est préférable qu’il reste en arrière et suive l’évolution de la mission depuis un abri sûr. L’obliger à nous suivre n’apportera rien de bon…. A vrai dire, si nous l’écoutions, nous n’irions même pas dans ces montagnes. A croire qu’il a laissé sa curiosité au fond du volcan. J’ai demandé à ce qu’il suive une formation pour le pilotage d’un drône scientifique…  Est-ce que toutes les autres dispositions sont opérationnelles ? Quand penses-tu que nous pouvions lancer cette seconde expédition ? »
Ragda Rejliidic
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Sur l’écran holographique, la masse jadis aussi noire que la mort irradiait d’un rouge intense. Le cratère du volcan ne semblait vouloir cesser de vomir ses entrailles en fusion. En quelques heures seulement, plus de trois cents kilomètres carrés de forêt et de plaine avaient déjà été calcinées. Les senseurs thermiques, placés en orbite, étaient parvenus à capturer ces images au travers l’épais nuage de cendres qui recouvrait toute la région. D’après ces relevés, le pire était passé… Et dans les jours à venir, il faudrait s’attendre à d’intenses pluies de cendres fines. Certains parlaient déjà de la catastrophe écologique du siècle… Mais le ventripotent Hutt ne s’en inquiétait guère. La moitié du globe séparait Refuge de cette fournaise. En vérité, s’il se renfrognait en observant ces images, c’était uniquement parce qu’il se sentait victime d’une malchance incroyable. Fort heureusement, à part quelques contusions et un trauma crânien sans gravité, la petite équipe s’en était sorti en un seul morceau. Même, si à mieux y repenser, il s’en était fallu de peu…

Ragda soupira, préférant conserver un silence presque religieux alors que Velvet s’exprimait. Sa voix trahissait une détermination que rien ne saurait faire plier. Lorsqu’elle avait une idée en tête celle-là…

« Oui, tout est possible. » fit-il, enfin, une phrase vague qui répondait d’un coup un seul à la ribambelle de questions enchaînées avec tant de célérité qu’elles en devenaient difficiles à démêler. « Mais quand même… Ce volcan… Quelle probabilité avions-nous qu'il se réveille sous nos pieds ?! Es-tu vraiment certaine de vouloir continuer cette aventure… » Question rhétorique. La Mirialan ne se laissait pas aussi facilement convaincre. « Je veux dire… Tu ne crois pas que ça pourrait être une sorte de… heu… D’avertissement de la Force ? » La questionna-t-il, son faciès disgracieux se parant d’un hideux sourire sarcastique. Cette manie de voir la Force en toute chose… Cette philosophie l’agaçait autant qu’elle l’amusait. Le pragmatisme du Hutt, tenace, l’empêchait d’embrasser ces idées qu’il jugeait dogmatiques, illogiques, preuve qu’aussi éveillés puissent se prétendre les utilisateurs de la Force, ceux-ci nageaient à la frontière entre réalité physique et fantasme mystique. Le trait d’humour ne fit pas mouche. Comme à son habitude, le visage de Velvet ne laissait filtrer aucune émotion. Ragda se surpris l’espace d’une seconde à regretter la faussement légère Sweety, qui éclatait d’un rire cristallin aux blagues vaseuses de ses confrères Sénateurs aguichés par les courbes athlétiques de son corps sculpté par la nécessité de survivre. Un rôle qu’elle avait tenu pendant des mois, avec une précision proche de la perfection… La froide Velvet, la chaleureuse Sweety… La véritable nature de la Mirialan se trouvait quelque part entre ces deux extrêmes… Le temps aidant, une certaine complicité était née entre les deux êtres dont le seul point commun n’était autre que leur carnation.

Aussi, le Hutt leva les yeux vers le plafond, s’avouant ainsi vaincu. Une reddition sans condition. A quoi bon lutter ? Ragda connaissait ce regard. Ces cristaux : elle les voulait pour Refuge, quel qu’en soient les risques, même si le fait qu’ils ne soient que deux pour en discuter attestaient de sa volonté de ne mettre aucune autre vie que les leurs en danger. Un gage de confiance qui, d’une certaine manière, horrifiait le Hutt. Il n’éprouvait nulle honte à ainsi courber l’échine, déposer les armes. Une attitude bien loin de ses habituelles frasques verbales dont il usait, et abusait, même lorsqu’il se savait avoir tord… Surtout lorsqu’il se savait avoir tord. Non. Lui comme elle détestait tourner autour du pot, perdre leur précieux temps… Et comme il était clair que rien ne pourrait faire revenir la Mirialan sur sa décision de poursuivre l’expédition, Ragda préféra balayer d’un revers de manche mental ses doutes afin de se concentrer sur le vif du sujet. Ses doigts virevoltèrent sur les commandes tactiles de son datapad. L’image statique du volcan déchaîné se mua en une étendue de glace immaculée, aux reflets bleutés. Même depuis l’espace, le jeu des ombres et des reflets solaires attestait de l’irrégularité du relief, succession chaotique au point d’en revenir incroyablement beau, de crevasses et de pics acérés comme les canines d’un prédateur terrifiant. Il suffisait de poser les yeux sur ce panorama pour éprouver l'illusion d'entendre la glace travailler, craquer. Avant d’ouvrir son énorme gueule, Ragda laissa quelques instants à la Velvet pour apprécier la difficulté de ce qui allait les attendre.

« D’après les notes de Lidenbrock, la veine devrait se trouver par ici. » dit-il, zoomant sur un pic rocheux encerclé par de profondes crevasses. «  Barns a passé la zone au crible, il n’a trouvé aucun site d’atterrissage à moins de dix kilomètres… Il faudra descendre en rappel depuis la navette, prier la Force pour que la croûte de glace puisse supporter ton poids… Et trouver un accès vers le cœur de la montagne. Sous le glacier, la roche est truffée de cavités et de tunnels. » Silence éloquent. A coté, le volcan semblait presque une promenade de santé. « Il va me falloir deux bonnes semaines pour préparer l’expédition. Cette fois je vais prévoir large… Hors de question que l’on refasse les mêmes erreurs. Avec notre chance, tout la zone va sombrer dans un blizzard à l’instant même où l’on posera pied sur le flanc de cette montagne. J’ai prévu des vivres, du matériel d’alpinisme. Révision complète des armures spatiales… Ainsi qu’une petite surprise. Je ne t’en dis pas plus… »


****

Deux semaines plus tard, vol stationnaire au dessus du pic enneigé.

« Rejliidic ! Sortez de là bordel ! Cette capsule de sauvetage n’a pas été prévue pour ça ! » hurlait Barn, tout en tambourinant avec force sur le sas pressurisé. De l’autre coté de la cloison étanche, ses poids tonnaient comme un maillet sur un gong. Mais le Hutt s’évertuait à les ignorer. Il avait abandonné son chariot dans la soute, comme l’attestait la traînée de mucus qui remontait depuis l’arrière du vaisseau jusqu’à son flanc babord. Le capsule de sauvetage, dimensionnée d’après de stupides standards humanoïdes ne disposait d’un espace suffisant pour accueillir plus que l’imposant gastéropode. « J'vous jure, si vous... »

« Barns ! Votre gueule ! J'essaye de mon concentrer ! » lui répondait enfin Ragda, ses petites mains enfouies dans une trappe de maintenance démontée dont tombaient en cascade une myriade de câbles de toutes les couleurs. Le pilote pesta, avant de se retourner, cherchant des yeux la personne sensée la plus proche : c’est-à-dire Velvet

« Mais faites quelque chose ! » l’implora-t-il, de ses deux grands yeux trop mouillés pour être sincères. « Il… »

« Barns !!! Laisse Velvet en dehors de tout ça ! C'est entre toi et moi ! Je te l'ai dit : il est hors de question que je reste dans la soute alors que la température extérieure est de moins trente degrés ! »
« Petite nature… »
« Pardon ?! »
« Heu… Je disais : c’est la nature… On est au pôle, c’est normal qu’il fasse aussi… »
« Sauf, que moi, je ne veux pas chopper la mort ! Un Hutt, c’est fragile. Ca aime pas les changements brusques de température ! Et comme à part ici, il n'y a de place nulle part pour mes bourrelets... Et ne cherche pas même à m'en empêcher, je viens de désactiver tous les systèmes. La porte restera verrouillée, un point c’est tout… »
« Quoi ?! On ne touche à rien sans mon autorisation ! »
« Arrêtez de geindre Barns, je sais parfaitement ce que je fais… Je trifouillais déjà des câbles alors que tu n'étais même pas sortir des testi...»


Les échanges auraient ainsi pu durer encore de longues minutes… Mais une voix familière, emprunte d’un dépit non dissimulé, coupèrent net les velléités des deux protagonistes. Celle de Lidenbrock, qui jaillissait du synthétiseur vocal monté sur le drone scientifique. Un appareil similaire à celui qu’avait piloté le Hutt lors de la première expédition.

« Vous comptez arrêter vos gamineries avant la nuit peut-être ? »

Barns leva les yeux au ciel, avant de grogner, puis disparu dans le cockpit. Ragda, les yeux perdus sur l’écran de son datapad, mollement posé entre deux bourrelets lui servant de support, lui répondit simplement :

« Oui, oui, on va y aller... Un peu de patience... De mémoire, vous n'étiez pas aussi pressé de descendre dans le cratère... »
« Rejliidic... »
« Ca va, ca va... Je termine juste de paramétrer R-4GD-4.2 »


Fugitivement, il esquissa un sourire amusé. Lidenbrock disposait d'un ego si surdimensionné qu'il en devenait pathétiquement prévisible. Ragda pressa doucement sur écran de son datapad. Dans la soute, le droide assassin téléguidé, aux allures de protocolaire, répondait aux commandes.

« Vous êtes certains que votre tas de ferraille résistera à ce froid intense ? » demanda Lidenbrock, sceptique comme à son habitude. Ce à quoi répondit Ragda :

« Evidemment ! Ne me prenez pas pour un idiot ! » La question ne l’était en réalité pas. Le droïde humanoïde disposait de quantité de servomoteurs et d’éléments articulés qui risquaient de souffrir en cas d’exposition prolongée au froid. Un aveu que le Hutt se garda bien d’exprimer à voix haute. Énoncer les risques ne feraient que leur porter la poisse !

« De toute manière, on fait comme on a dit : pas de prise de risques inutiles. On fait un tour rapide du site... Et si on ne trouve aucune entrée naturelle vers la veine de cristal, on rentre à la maison. Refuge ne dispose pas des moyens matériels nécessaires pour se lancer dans le forage d’une montagne polaire. »

Encore quelques ajustements…

« Je crois qu’on est bon… » dit-il, avant de se remémorer sa conversion avec Velvet, deux semaines auparavant. « J’allais oublier ! Velvet ? Tu te souviens… La surprise… Je t’épargne la longue, très longue série de négociations et de tractations en tout genre auxquelles j’ai dû me donner corps et âme pour te l’obtenir… »

Alors qu’il parlait, en rajoutant des tonnes, il actionna R-4GD-4.2, afin qu’il se rapproche de la mirialan, un paquet entre les mains.

« C’est un Jet-pack dorsal. Modèle Républicain full option. Adaptable sur n'importe quel type de combinaisons spatiales. Tombé du cargo. Pas d'inquiétudes à avoir : j’ai tous les papiers d’origine. La dernière révision est nickel. Il n’a même pas cinquante sauts au compteur. Avec ça, tu peux faire des bonds de trente mètres… Et aussi faire cuire des saucisses si tu les places juste sous les tuyères… »
Darth Velvet
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Il y a un sourire amusé, dissimulé à la courbure sévère de mes lèvres. Une esquisse, qui, doucement file, étoilant le givre de mon visage comme les craquellements de la glace à la surface d’un lac gelé, sous la pression d’un pas.

« Barns, ne vous inquiétez pas, Ragda est totalement compétant et vous devriez avoir un peu plus foi en lui. » commençais-je laissant filtrer dans ma voix, un léger rayon d’amusement. « Et… je me demande s’il ne prend pas plaisir autant à vous entendre ronchonner, qu’à vos petites querelles… N’est-ce pas Ragda. ?»

Je ponctue ma déclaration d’un clin d’œil complice au hutt, tandis que j’achève de m’harnacher. Filin et pioches robustes pendent à ma ceinture, mon sabre dans un étui au creux de mon dos.

« Espérons que cette fois ci sera moins compliqué que la dernière. Professeur, au lieu de vous préoccuper des détails que Ragda règle, je suggère que vous vous concentriez sur votre tâche. Vous êtes un élément pivot de cette expédition, vous ne pouvez pas vous permettre la moindre erreur. Et j’ai tendance à penser que l’on est beaucoup moins efficace à toujours regarder par sa fenêtre ce que fait son voisin.  Barns, c’est ok pour vous ? »

« Oui chef… »

« Professeur ? »

« Ouais. »

Il est vexé. Probablement.  Je retiens un soupir d’agacement. Autant je peux comprendre l’attitude de Barns vis-à-vis de Ragda, surtout que je ne doute pas un instant, que l’un titille l’autre exagérément, autant le comportement du scientifique me pose une problématique. Sa compétence dans son domaine n’est plus à vérifier, mais son égo surdimensionné ajouté à sa dernière prestation au sein du volcan, me laisse à penser qu’il ne supporte pas d’être dirigé et rejette systématiquement ses erreurs sur les autres. Une conduite contestable, surtout pour des pionniers où la solidarité est un leitmotiv important. 

« Ragda ? »

« Je crois qu’on est bon… »

« Parfait.»

« J’allais oublier ! Velvet ? Tu te souviens… La surprise… Je t’épargne la longue, très longue série de négociations et de tractations en tout genre auxquelles j’ai dû me donner corps et âme pour te l’obtenir… »

Je plisse les yeux, intriguée par cette fameuse surprise, d’autant que j’avais complétement oblitérer cette promesse de ma mémoire. Un instant, j’envisage la teneur de ce cadeau, imaginant tour à tour des éléments d’amures ou d’armes, en passant par des choses plus abracadabrantes jusqu’à ce qu’il me délivre le jet-pack dans les bras tout en m’énumérant ses capacités. J’émet un léger sifflement, ravie.

« Oh Ragda… toi tu sais parler aux femmes… » je ris légèrement, ma main s’envolant vers son épaule dans une accolade chaleureuse. « Ou du moins, me parler à moi. Merci… je sens que ça va m’être utile. »

Si je ne supporte pas la proximité imposée par un individu, celle de Ragda,ne me gêne pas autant. Peut-être parce qu’au fond il n’a rien d’humain et tout d’un hutt, ou peut-être parce que le lien que nous avons tissé s’affranchi de mes angoisses profondes. Mais à son contact, je n’éprouve pas de gêne, pas de colère latente menaçant de rompre mon précieux équilibre.

« Aide moi à l’enfiler, veux-tu ? »

Pourtant, certains avanceraient que c’est un hutt, que le contact avec un être de cette espèce ne peut qu’être répugnant ou au mieux répulsif. Ce n’est pas ce que j’éprouve, mais j’imagine que c’est parce qu’il est à mes yeux un ami, et non pas juste un représentant de sa race.

« Bon, il est grand temps d’y aller. Barns rapprochez nous de la zone cible. »

« A vos ordres ! »

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]


La neige coule du ciel en de gros flocons moutonneux alors que je me pose sur un sol de glace. D’ici, tout est dérive de bleu, de blanc, de gris, acéré d’épines de givre et d’un vent intensément froid. Mes pas crissent sur cette neige dure qui se recouvre lentement d’un nouveau manteau de coton, rendant notre marche plus traitresse encore. Barns, conformément à nos ordres, s’est retiré plus en hauteur, pour ne pas risquer de délivrer sur nous les torrents d’une avalanche déclenchés par la fusion de ses moteurs. Le silence, est, je crois, tout aussi saisissant que la température. Il n’y pas un bruit, pas un chant d’oiseau, juste le craquement de mes semelles sur la glace, et le hurlement spectral du vent entre les congères.

« Professeur ? »

« Normalement vous devez continuer quelques mètres au nord, jusqu’à une formation de glace particulière. Cela devrait ressembler à un couloir avec des murs iceberg. »

Je ne m’enfonce pas réellement, pas encore, dans la fine couche blanche couvrant le gel, et finalement notre marche n’est pas aussi difficile que je m’y attendais. Nous avançons rapidement sous un ciel toujours plus chargé de neige, Le droide de Ragda fermant notre procession et le drone de Lidenbrock, l’ouvrant jusqu’à ce qu’apparaisse enfin, au devant de nous, le défilé.

« Si vous pouviez prendre quelques relevés de cette glace que je puisse l’étudier. Nous n’avons pas su déterminer les raisons d’une telle configuration géologique. C’est extrémement curieux et peu commun, à se demander si c’est de l’eau qui l’on formé, ou une autre matière liquide, à moins que ce ne soit l’œuvre complémentaires d’un ensembl… »

« Professeur, nous aviserons au retour. Contentez vous, s’il vous plait, de nous guider jusqu’au gisement. Vous aviez parler d’une crevasse au milieu de ce défilé. »

« Oui, les images satellitaires laissent penser qu’il y aura une crevasse. Je pense qu’en l’empruntant, vous devriez pouvoir rejoindre un ensemble de grottes qui vous mènerons aux gisements. Evidemment je ne peux pas en être absolument certain en ne me basant que sur ces maigres données. »

« Entendu… alors continuons jusque là… »

Très vite, autour de nous, s’élèvent des remparts d’une glace si belle, qu’elle parait du cristal à la lueur de nos torches. Pure, lisse, transparente. Ma main glisse sur sa surface pâle, dénuée d’aspérités ou de fissures. 

« C’est étonnant… effectivement… comme si, ce n’était pas naturel. »
Ragda Rejliidic
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« Ca n'est pas naturel... » articula lentement Rejliidic alors que ses deux énormes yeux globuleux parcouraient les données récoltées par la dizaine de senseurs qu’intégraient le blindage ébène de son droïde télécommandé. « Je te le confirme Velvet. » La planéité dépassait de loin la précision dont la nature pouvait être capable, même par le plus incroyable des hasards. Pour parvenir à un tel résultat, il avait fallu une terrifiante puissance. « Cette tranchée a comme été taillée à même le glacier, avec de l’équipement de pointe, c’est certain. »

R-4GD-4.2 fit un pas de plus. Sous ses semelles crantées, la neige crissait en se comprimant. Par endroit, du givre translucide la recouvrait. Une couche fine mais suffisamment solide pour faire du sol une véritable patinoire. Avec prudence donc, le Hutt manipula à distance sa marionnette d’acier, afin de la rapprocher de la paroi, jusqu’à ce qu’elle puisse la caresser du bout des doigts. Dans leur sillage, les flocons de neige, alourdis par les températures extrêmes, furent emportés par les bourrasques glacées, révélant une surface si lisse et régulière qu’elle reflétait le droïde comme dans un miroir. « Saisissant » lâcha le Hutt, face à ce spectacle de toute beauté. Sa marionnette s’auréolait d’une myriade de couleurs entremêlées, décomposition improbable du spectre lumineux de l’astre solaire dont les rayons ne parvenait à les réchauffer. Il recula, pour mieux imprimer dans son esprit cette découverte surréaliste.

« Lindenbrock ? » fit-il, incapable de détourner le regard. « Je crois bien que vous avez raison… Ce n’est pas de l’eau à l’état solide… C’est trop lisse pour… » Il fut interrompu par un craquement sinistre, qui provenait du corridor plongé dans la pénombre. « Qu’est-ce que… » commençait-il à se demander, tout en imaginant une centaine de scénarii catastrophes. Mais il fut coupé par un Lidenbrock doté d’une assurance seulement due à la position de son derrière : confortablement assis dans un siège à des milliers de kilomètres de là :

« C’est la musique des glaciers, mon cher Rejliidic. La glace est vivante. Elle bouge, se comprime, se dilate, au rythme des changement de pression, de température, des précipitations… »
« En résumé : tout pourrait nous tomber dessus d’un instant à l’autre ? »
« C’est une manière pessimiste de voir les choses, oui. Même si j’en doute. Cette percée atteste d’une certaine stabilité géologique… Il n'y a aucune trace de fissure récente ou plus ancienne. »


Un nouveau grondement retenti. Plus sourd que le précédent. Immédiatement suivi d’un silence morbide seulement brisé par le mugissement des bourraques chaotiques.

« Vous disiez ? »
« Je… C'est sûrement un effet auditif causé par la réverbération des ondes sonores sur la surface lisse. Le craquement pourrait avoir eu lieu de l'autre coté de la montage, mais nous aurions l’impression qu'il vient juste d'au dessus. Vous ne croyez pas ? »
« Heu... Ce n'est pas à moi qu'il vaut poser la question. C'est vous l'expert. Non ? »
« Si, si. Bien-sûr... »


Pas vraiment rassuré, Ragda fit actionna les commandes, fit lever les yeux à son droïde. La paroi lisse s’élevait sur cinquante mètres. Des milliards de mettre cube d’un matériau gelé dont ils ignoraient tous des propriétés physiques. Il grimaça. Mais il en fallait plus pour décourager l’indomptable Velvet, qui, jamais, n’avait quitté la tête de la colonne. Ils avancèrent ainsi, plusieurs minutes durant, guettant les signes qui indiquant un malheur imminent. Mais à mesure que le temps s’égrainait, lentement, implacablement, leur tension s'émoussait, anesthésiée par un environnement d’une monotonie à l’égal de sa beauté.

« Je m’interroge tout de même… » reprit Ragda, alors que personne n’avait plus prononcé le moindre mot depuis un long moment. Ici, perdu dans cette trouée, seulement éclairée par des torches, il était facile de perdre toute notion d’espace et de temps. Lorsqu’il switchait sur la caméra dorsale de R-4GD-4.2, le Hutt ne parvenait pratiquement plus à percevoir l’entrée du canyon. « Quelqu’un aurait une hypothèse ? Je veux dire… Qui a creusé ça, et quand ?! »
« Les Gargantelle ? » s’avança Linderbrock, faisant preuve d’une soudaine spontanéité, lui qui ne cessait de rabâcher qu’il ne fallait jamais sauter hâtivement aux conclusions incertaines. « Nous savons qu’ils exploitaient des gisements de… » Il hésita. « De ce cristal que nous recherchons. » Le mot Lidenbrokite lui brulait le bout de la langue. « Il pourrait s’agir d’une galerie permettant d’accéder à un filon. Les dimensions semblent correspondre. »

Ragda ouvrit la bouche pour lui lancer une pique sarcastique dont lui seul possédait le secret, mais aucun son n’en sorti. Somme toute, l’idée se tenait. Il ne su trouver, sur l’instant, rien à y redire, malgré qu’une pensée le taraudait. Une petite question au fond de son esprit, qui d’abord lointaine, se fit de plus en plus pressante à mesure qu’il s’enfonçait dans le boyau : Pourquoi les parois semblaient-elles... aussi neuve ? Comme si la glace avait été forée l’avant-veille tout au plus ? Le Hutt s’appréta à la poser à voix haute, lorsqu’un voyant, sur le tableau de bord de son chariot répulseur, se mit à grignoter avec frénésie.

Il grimaça, bourrelets du front froncés. Il tapota sur le cadran, croyant d’abord à une panne. Le froid extrême avait certainement déréglé le thermomètre interne… Mais après une poignée de secondes, il se rendit à l’évidence, alors même que les grondements sourds de la glace qui se brise le ramenèrent à la réalité.

« On a un problème. » balanca-t-il, de but en blanc, comme à son habitude, sans prendre de gants. « Le mercure indique que la température est en hausse depuis plusieurs minutes. Nous sommes passés de -39° à -27°. Et ça s’accélère… Je me demande si nous ne devrions pas… » Il ne termina jamais cette phrase. Un immense bloc de glace, aussi large qu’un croiseur stellaire, ou presque, se détacha de la paroi derrière eux, leur interdisant toute retraite par la voie qu’il venait d’emprunter. Il entraîna avec lui une avalanche de fragments plus petits, qui dévalèrent la pente dans un roulement de tambour si assourdissant que Ragda fut contraint de couper les haut-parleurs. Barns sorti en trombe du cockpit, en alerte, l’œil vif, le souffle court. Il tambourina sur la cloison verrouillée de la capsule de sauvetage dans laquelle opérait le Hutt.

« Qu’est-ce qui se passe ?! J’ai entendu comme un… »
« TA GUEULE BARNS ! »
« Okey…. »
fit-il lentement, avant de comprendre qu’il n’obtiendrait réponse à sa question. « Si on me cherche hein… » Il vit volte-face, les traits tirés par un rictus colérique, avant de retourner d’où il venait. Ragda lui ralluma le son.

« Velvet ?! Velvet ?! »

L’avalanche avait levé un véritable brouillard givrant. Son droïde continuait de relayer les images… Mais elle était comme nimbées d’un voile blanc, opaque. Impossible de voir à plus d’un mètre, un mètre cinquante. « Bordel ! Lindenbrock ?! » Aucune réponse. Le droïde buta sur un objet solide. Les restes éventrés de la sonde que pilotait le géologue. « Merde… »

C’est alors que Ragda remarqua des volutes se former dans la brume. Chassées par un souffle régulier qui semblait provenir des entrailles de la trouée. Instinctivement, il s’avança dans cette direction. La température monta encore d’un cran. Il sursauta, lorsque son comlink se mis à grésiller. La voix déformée du professeur lui vrilla tympans. En tout et pour tout, l’humain n’eut le temps de dire que trois mots avant que sa sonde ne rende définitivement l’âme :

Geyser de glace.
Darth Velvet
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 Mes doigts folâtrent d’une caresse légère, la glace lactescente alors que la neige craque sous mes bottes. Elle est irisé de gel, et la buée autour de ma bouche s’échappe en volute dans un silence monacale. Il y a quelque chose de magnifique dans cet endroit, entre ses hauts remparts polaires scintillants de givre comme s’ils se couvraient d’une poussière de cristal, quelque chose qui, par sa grandeur et sa magnificence, nous rends plus humbles. Je n’ose ouvrir les lèvres, de peur de briser cette sérénité, cette ambiance presque sacrée, souillée du bruit de mes pas et de mon souffle.

Mon comlink grésille de la voix du Professeur, de celle de Ragda, elles qui me paraissent si incongrues dans ce couloir de glace. Déplacées même. Peut-être est-ce pour cette raison, que je peine à aviser d’un grondement suave, de ce genre de craquement lugubre qui rappelle celui des os que l’on broie.

« On a un problème… »

J’abaisse la visière de mon casque, autant par sécurité que pour recueillir les informations des capteurs de ma combinaison et du drone. Mais il est trop tard. Trop tard pour agir au moment où j’assimile l’information alarmante de la sonde de température et de la confirmation du hutt. Trop tard pour m’extraire de ce défilé, de cette nasse mortelle qu’un bloc géant s’effondre juste sur nos talons soulevant dans sa chute, une nuée de poudreuse aux éclats effilés.

« Velvet ! Velvet » hurle une voix à mes oreilles.

« Je suis là. Tout est ok. »

J’ai la saisissante intuition que la porte d’un piège mortelle s’est abattue, que la cage de froid referme ses mâchoires hivernales sur nous, avide de nous dévorer entre ses bras blancs. L’impression d’urgence coule dans mes veines d’un feu inquiet, alors qu’un linceul volatile de neige en suspension, me drappe entièrement.

« Ragda, Lidenbrock, j’ai besoin de données. Tout de suite ! »

Je ne vois nulle trace de l’un ou de l’autre au travers de ce nuage de neige dressé en brouillard givrant. Les faisceaux des torches se réverbèrent contre sans parvenir à le percer et, durant cette longue minute où je ne reçois plus aucun signal de localisation de personne, je me sens aussi perdue, aussi isolée qu’une capsule de survie naviguant à la dérive dans l’immensité spatiale. J’avance à l’aveugle, ravalant cette émotion qui étouffe mon cœur sous un carcan glacé. Mais il n’y a rien, ou plutôt personne juste un murmure qui perce le silence obsédant de la brume sur la fréquence de mon communicateur.

« Geyser de glace… »

Mon regard s’agrandit derrière mon casque. La mise en garde surgit, encore une fois, un instant trop tard. Comme une longue respiration saccadée déchirant en lambeaux de brouillard, la brume reflue dans un grondement terrifiant de monstre oublié. Je peux juste élever un bouclier de Force en toute hâte, entre moi et cette chose menaçante surgissant soudainement. Mon aura s’étend, puisant instinctivement dans l’Ether pour se dresser contre les émanations du geyser, la vapeur et les gaz combinés, les esquilles tranchantes de gel qui se figent autour de moi, en pluie d’épingles acérées.

Je glisse sous cette poussée, tombe à genoux, incapable de demeurer ancrée sur la banquise avant de sentir brutalement dans mon dos, le bloc de glace refermant la trachée de glace. Prise en étau. Prise au piège. Je résiste. Ma mâchoire se crispe et la sueur perle à mes tempes. Mon corps, lui, se déchire sous la pression exercée, mes muscles menacent de se rompre et mes poumons refusent d’aspirer un peu d’oxygène. Puis tout s’arrête aussi soudainement que cela avait commencé. Incapable de reprendre mon équilibre sous cette libération instantanée et inattendue, je chois, face contre glace, endolorie et haletante.

« Ragda… tu me reçois ? » toussotais-je

Je me relève, dressant un bilan mental de mes blessures, notant les alarmes qui s’affichent sur l’interface holographique de ma combinaison. Il y a maintenant, entre moi et le chemin que nous suivions, comme une congère en forme de dôme, de coquille brisée, comme le dessin givré de l’empreinte de mon bouclier, figé dans le gel et le froid.

« En tout cas je comprends mieux pourquoi cet effet de couloir…. Il serait intéressant de savoir si ce geyser est stable ou instable et d’estimer le temps et sa fréquence de cycle. » déclarais-je en actionnant mon jet pack pour passer l’obstacle et rejoindre le droide du hutt.

Il ne semble pas avoir souffert du geyser, ou du moins ne présente pas d’anomalie physique sur le métal argenté, qui, sous un rayon de soleil moribond, projette un éclat blanc.

« Ton droide me parait intact, Ragda, tu penses pour voir continuer ? J’aimerais autant qu’on sorte rapidement de ce goulot avant de renouveler l’expérience… »

Après une rapide confirmation de son départ, nous nous remettons en mouvement, abandonnant derrière nous les restes glacés de la sonde le Lidenbrock. Décider d’avancer sur la crête aurait été une possibilité, après tout grâce au hutt, je pouvais m’élever par-dessus le défilé de glace pour éviter la portée d’un nouveau Geyser, mais cette décision ralentirait inévitablement notre progression, et tout en ne garantissant en rien la stabilité de la couche neigeuse. Ici, au moins, dans ce couloir, nous sommes parfaitement conscients du danger, et le guettons avec toutes les précautions de mise.
Les minutes s’égrènent lentement, à mesure que la température augmente doucement et que nous progressons jusqu’à ce que notre chemin soit bloqué par une large faille balafrant notre chemin.

« Lidenbrook, dites-nous, où se trouve le gisement par rapport à notre localisation »

Traverser le trou ne sera pas réellement compliqué avec notre équipement, mais j’envisage aussi la possibilité de nous laisser couler vers ce puis et les profondeurs de la montagne, les cristaux se trouvant plus probablement dans ses entrailles qu’à l’air libre dans une traverse excavée par les rejets d’un geyser de glace.

« 1 km au Nord/est avec un dénivelé de 300 mètres environ. »

« Très bien… alors nous descendons » souriais-je en me laissant tomber dans la faille d’un grondement de jetpack
Ragda Rejliidic
Ragda Rejliidic
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Une terreur indicible submergea les humeurs givrées du Hutt. Un voile opaque, aussi lourd qu’une chape de plomb qui déforma ses traits pourtant déjà hideux. Bouche entrouverte, langue pendue, frétillante. Une écume chargée de bulles se formait à la commissure de ses lèvres inexistantes. Ses yeux, exorbités, devenus des billes jaunes-orangées, menaçaient de s’échapper de leurs orbites. Un cri rauque s’échappa de son gosier. Inintelligible, méconnaissable, sa voix rocailleuse se répercuta en échos innombrables à l’intérieur de la capsule de sauvetage transformée en QG opérationnel.

Ainsi figé dans l’horreur, seulement accompagné de ces échos, Ragda ne parvenait à esquisser le moindre geste. Ses yeux, rivé sur l’écran de son datapad, dévoraient avec une précision macabre la succession d’événements s’opérant en bas, dans les glaces séculaires de Boz Pity, sur le toit de ce monde recolonisé depuis si peu. Les secondes s’étiraient comme ces ficelles que l’on déroule sans fin, officiant dans son esprit comme autant d’heures, usant ses pensées, limant sa concentration, détruisant ses espoirs. Mais, en réalité, la scène n’avait duré qu’un claquement de doigt. Un jet de gaz tiède, chargé de cristaux de glaces proches du point de fusion, avait été projeté dans leur direction, avec une force dont seule mère nature était capable. Une fraction de seconde, à peine le temps d’imprimer cette image sur une rétine. Puis le droïde fut emporté, éjecté, projeté. Ses yeux-caméra se couvrirent de givre. L’image retransmise se flouta, puis disparu sous les éclats multicolores d’une lumière crue décomposée comme dans un prisme. Enfin, tout devint noir. Absolument noir. Des ténèbres synonymes de mort.

L’énorme Hutt suait à grosses gouttes. Le mucus épais dégoulinait de ses bourrelets, avant de tomber au sol, autour de son chariot répulseur, dans une série de clapotements visqueux. Enfin, il parvint à cligner des paupières; à recouvrir l’usage de ses mâchoires, puis du reste de son corps. La catastrophe avait eu beau se passer à plusieurs centaines de mètres sous ses pieds, en son sein, il eut l’impression d’avoir vécu lui-même. Son corps douloureux accusait les effets du stress, de la peur, de la surprise, de la terreur. Plusieurs frissons parcourent sa peau épaisse, irradiant depuis son échine dorsale humide… Mais une fois le flottement passé, Ragda recouvra l’intégralité de ses facultés. Il s’était toujours considéré comme résiliant au stress, condition sine qua non de sa réussite en politique galactique. Ainsi, bien qu’il ait pu se laisser submerger face à l’horreur de la scène qui s’était déroulée en direct sous ses yeux, il disposait des capacités nécessaires pour rebondir, avec efficacité.
 
Il ignora le fourmillement de ses extrémités pour pianoter avec une célérité accrue par l’urgence sur les commandes tactiles de son droïde télécommandé. Il lança un diagnostic éclair, aussi complet que possible afin de prendre pleinement conscience de l’étendu des dégats… Et les premiers résultats lui arrachèrent un soupir de soulagement. Les fonctions vitales réagissaient, ainsi que les servomoteurs des jambes et des bras. Pour autant, son acharnement refusait de porter ses fruits. Les senseurs indiquaient une assiette improbable, R-4GD-4 se trouvait penché à près de soixante degrés de la position verticale usuelle… Et l’impossibilité de la corriger indiquait clairement qu’il avait été pris dans les glaces, recouvert d’une croûte suffisamment épaisse pour lui interdire tout mouvement. Ce constat ne l’affola pas, au contraire. Avant d’envoyer sa marionnette arpenter les terres parmi les plus inhospitalières de la planète, Ragda s’était assuré de disposer des gadgets nécessaires pour parer à toutes les éventualités. Surtout après ce qui s’était passé dans le cratère du volcan. Ainsi, d’un geste expert, il activa les filaments chauffants qui parcouraient le revers des plaques blindées protégeant les organes vitaux du droïde. La température monta d’abord très lentement… Mais alors que le Hutt esquissa l’ombre d’un doute, celle-ci s’emballa. Les haut-parleurs restituèrent des craquements devenues trop familiers : ceux de la glace qui se brise. Et moins d’une minute plus tard, un bras émergea du sarcophage gelé. Puis un autre. Une tête. Enfin, ses deux pieds furent libérés. Sous les semelles crantées, la substance liquide semblable à de l’eau se solidifia rapidement. Ragda actionna sa marionnette avant qu’elle ne soit de nouveau entravée. Un pas, deux pas. Un nuage de neige électronique brouillait légèrement les images retransmises… Soit les caméras avaient été endommagées, soit l’antenne de transmission à l’intérieur du crane robotique peinait à fonctionner dans des conditions aussi extrême. Difficile à dire. Il s’en occuperait plus tard.

Il ouvrit la bouche pour tenter de rétablir les communications lorsque la voix de Velvet grésilla à ses oreilles. Il modifia quelques réglages pour lui rendre ses sonorités habituelles.

« Oui, Velvet, je suis là, je… »

Le reste de sa phrase mourut dans sa gorge avant même d’être parvenu à s’en extraire.  Le dôme de glace qui se dressait devant sa marionnette semblait tout sauf naturel. Un œuf de givre, brisé, comme si une explosion s’était retrouvée figée dans l’espace et le temps. Immédiatement, il reconnut l’œuvre des pouvoirs de la Mirialan, qui avait certainement payé le prix fort pour parvenir à s’en sortir. Il espérait que cette mésaventure ne l’avait pas poussé hors de ses limites, car il aurait été difficile de la secourir ici, au fond de la gorge lisse creusée par les vomissures chroniques du geyser de glace. Mais cette inquiétude mourut dans l’œuf – c’était le cas de le dire – alors qu’une gerbe de flammes s'en échappa. Elle le rejoignit d’un bon de jetpack. Sa combinaison semblait elle aussi intacte. Ils avaient frisé la catastrophe, mais s’en sortait plus qu’honorablement comme tenu des circonstances. Seul Lidenbrock manquait à l’appel. Son drone, pulvérisé, gisait non loin, éventré, ses entrailles électroniques éparpillées un peu partout.

« Les fonctions principales sont au vert. R-4GD-4 en a vu d’autres... On n'a pas fait tout ce chemin pour déjà le rebrousser ! On continue ! »

Un élan d’optimisme et de motivation qui ne parvenait à exorciser un sentiment d’urgence dicté par la nouvelle configuration de leur environnement. Impossible de faire marche arrière, le canyon était obstrué par un bloc de glace bien trop épais pour être creusé ou déplacé. Il y avait fort à parier qu’une prochaine irruption le chasserait de là, réouvrant le passage… Mais rien ne leur garantissait qu’ils y survivraient. Non. Ils ne disposaient plus que d’une option : continuer, pour trouver rapidement un moyen de s’extraire de cette cheminée horizontale.

A chaque pas, la progression devenait plus hasardeuse. La température continuait de monter lentement… Mais Ragda ignorait s’il s’agissait d’une bonne ou d'une mauvaise nouvelle. Les souffles chauds pouvaient à tout moment rendre le sol ou les parois cassantes. D’ailleurs, celles-ci devenaient toujours plus lisses et translucides à mesure qu'ils progressaient. Pareilles à des miroirs. Se faisant face, elles se renvoyaient mutuellement leurs reflets, démultipliant à l’infini les silhouettes des protagonistes. Des millions de Velvet marchaient en tête, suivi de millions de droïdes ébènes, faussement protocolaires.

Mais la progression fut stoppée après une poignée de minutes seulement. Une crevasse. Que faire : descendre, la traverser ? Ragda détestait devoir se prononcer, faire un choix, sans disposer des éléments nécessaires pour prendre la bonne décision. Même lorsqu’il jouait aux cartes, qu’il pariait, il calculait au mieux les risques. Velvet, elle, agissait avec plus d’instinct. Probablement une faculté qu’elle avait développée par la nécessité de survivre. Elle posa une question, puis pris sa décision. Ragda obtempéra en silence. Il manœuvra son droïde pour l’approcher le plus près possible de la déchirure, puis inclina son buste. Large de trois mètres maximum, elle semblait s’enfoncer dans les entrailles de la terre. Quelques volutes de fumée aux relents soufré en remontaient périodiquement. Un sentiment de claustrophobie naissant lui noua les intestins… Mais sa logique implacable de Hutt lui fit prendre conscience du bien fondé de cette décision : cette descente les mettrait hors de porté de la prochaine eruption du geyser. R-4GD-4 fit un pas de plus. Son pied se figea au dessus du vide… Puis il écarte les bras, et en fit un second. Il chuta, à la verticale… Mais Ragda activa aussitôt les répulseurs intégrés aux semelles de sa marionnettes. Le chute devint aussitôt une descente plus ou moins contrôlée. Velvet agissait de même, équipée de son jet-pack, à deux mètres sur sa gauche, légèrement en contrebas.

Pendant des secondes si monotones qu’elles parurent des heures, la paroi de glace défila à vive allure devant les yeux-caméra du droïde… Mais si subtilement que Ragda ne le remarqua immédiatement, celle-ci laissa place à une roche noire, torturée, d’origine volcanique… Puis soudain, plus rien. Ragda cligna des yeux, secoua la tête, cru même à une panne matérielle. Son écran n’affichait que des ténèbres. Rien d’autre… Mais dès qu’il fit pivoter la tête de sa marionnette, il identifia la traînée de flammes laissée par Velvet. Ils s’étaient éloignés de trente bons mètres ! Comment était-ce possible ?! L’image prêtait au doute, au questionnement : ils semblaient tout deux flotter dans un néant immatériel…

« Velvet… » fit-il, ne sachant plus quoi penser. « Je vais allumer les torches… »

R-4GD-4 disposaient de deux lampes frontales, serties dans les plaques de blindage de ses épaules. Le Hutt pressa un bouton… Et aussitôt la scène devint encore plus surréaliste…

Ils flottaient… Non. Ils chutaient dans une grotte si grande que leurs deux silhouettes paraissaient immobiles, comme suspendues à une toile invisible. Des mousses multicolores recouvraient le dome fendu au dessus de leur tête… Et sous eux bouillonnaient plusieurs lacs aux couleurs vives, produits d’une géothermie insoupçonnée. Sur leurs rives s’étiraient des bosquets de champignons gargantuesques sous lesquels les ombres chinoises dissimulaient une faune seulement trahi par le reflet de leurs yeux rendus brillants par la lumière crue.

Il y eu un crépitement. Non un sifflement. R-4GD-4 tourna la tête, juste à temps pour capter la silhouette floue d’une créature volante, pareille à une chauve-souris filiforme, qui planait grâce aux courants ascendants crées par les lacs d’acides surchauffés.

« Qu’est-ce qui se passe ?! » pesta Lidenbrock, brisant un silence quasi religieux. On pouvait aisément se perdre dans l’observation de ce monde fantasmagorique et pourtant bien réel. « Allo ?! Y’a quelqu’un ?! »
« Oui, oui, on est là, tout va bien ! Bordel de merde, que c’est beau ! »
« De quoi ?! Vous avez trouvé les cristaux ?! »
« Non, le pays des merveilles… »
« Hein ?! Rejliidic, si c'est encore une de vos… »
« Chut ! Merde ! Attendez. Je vous envoie une vidéo… »


Impossible de retransmettre en temps réel sur une si grande distance, surtout depuis les entrailles de la montage… Mais Ragda enregistra quelques secondes de leur descente interminable, afin de les compresser et de les envoyer via mail directement au bureau de Lindenbrock. On ne pouvait pas faire plus rudimentaire…

« Ouah ! » fit-il, après quelques minutes, tel un gamin devant un paquet cadeau plus gros que lui. « Un biome troglodyte en zone géothermale sulfurée, surtement composé d'une multitude d'espèces extrêmophiles parfaitement adaptées à leur environnement ! Incroyable ! Et au pôle ! Boz Pity est décidément étonnante ! »
« Lidenbrock ! Il veut vraiment dire quelque chose votre charabia ?! Vous êtes aussi biologiste ?! Ou vous ne faites que répéter bêtement ce que vous venez de lire sur l'holonet ?! »
« Cessez vos sarcasmes Rejliidic... J'ai plus de diplômes que votre carcasse ne comporte de bourrelets. »
« Vous voulez vraiment parier... »

Mais à mesure qu’ils s’approchaient du sol aux allures spongieuses, des inquiétudes gagnaient le Hutt. Qu’allaient-ils trouver en bas ? Les cheminées fumantes qui s’élevait ci et là, certaines hautes de cinquante mètres, était-elles des geysers menaçant d'exploser ? Et puis… Question la plus importante : comment allaient-ils faire pour sortir de là ?! La voûte recouverte de mouse s’élevait déjà si haut que les ténèbres la dévoraient malgré l’éclairage des lampes torches. Impossible de sauter jusque-là en jet-pack ! Merde !

« Lidenbrock… » dit-il, avec un sérieux effrayant. « On va vraiment avoir besoin de vous… J’essaye de vous retransmettre autant d’images que possible, ainsi que des données de géolocalisation… On va essayer de trouver les cristaux… Mais… Bordel de merde : trouvez-nous une sortie pendant ce temps ! »
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