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Korriban... à l'instant où les moteurs de l'As-de-Pique se coupèrent et que les portes du spatioport de Dreshdae se refermèrent derrière nous, je ressentis un frisson de peur en pensant à ce que nous allions tenter d'accomplir. Depuis combien de temps n'étais-je plus venu ici ? Une décennie au moins, mais à l'époque j'y venais en tant qu'apprenti pour apprendre et découvrir les secrets du côté obscur. Rien de tel désormais, il me faudrait m'y infiltrer comme un voleur en espérant que personne ne comprendrait les véritables raisons de ma venue.

Revenons un peu en arrière...

Quelques semaines plus tôt, Romy et moi avions été capturés puis férocement torturés par un cyborg du nom de Cyb' dans sa base secrète d'Ilum. Ayant réussi de justesse à nous libérer, nous n'avions toutefois pas pu vaincre Cyb' qui s'était enfui à bord d'un mystérieux vaisseau sith. Pourquoi et comment notre ennemi s'était-il retrouvé en contact avec un adepte du côté obscur ? Voilà ce que nous ignorions, voilà ce qui nous amenait sur Korriban. Un jour où l'autre, tous les siths passaient en ce lieu qui faisait frémir jusqu'aux plus braves jedis, nous espérions donc que Cyb' y était également venu afin d'y rencontrer son allié et que nous pourrions ainsi réussir à retrouver sa piste.

Simple à dire, malaisé à faire. Korriban ne constitue pas le club de vacances idéal et les étudiants de l'académie sont amateurs du meurtre gratuit auprès des malheureux civils qui leur passent sous la main. Impossible toutefois pour moi d'y reparaître à visage découvert alors que tous ici devaient m'y croire mort, impossible pour Romy de s'y aventurer seule sans risque de devenir la proie de quelques jeux cruels. Voilà pourquoi nous avions décidé de nous travestir : ayant récupéré sur Nar Shaada une armure et un casque que j'avais recouvert d'une épaisse cape noire, je pouvais passer pour un maître sith et espérer que personne ne viendrait me renifler de trop près. Beaucoup de siths passaient par Korriban sans y demeurer, et la prudence imposait de ne pas se mêler de leurs affaires. Bien évidemment, si un maître de l'académie nous tombait dessus, la situation risquait de vite dégénérer.

Quand à Romy, elle devait jouer le rôle d'une esclave à mon service, statut quelque peu humiliant mais qui la protégerait efficacement : personne n'oserait importuner l'esclave d'un seigneur sith sans l'accord de son propriétaire. L'autre avantage constituait en la possibilité de me suivre partout sans que sa présence ne surprenne les autres résidents des lieux. Cela imposait hélas à mon amante de ne porter aucune arme visible, bien que deux couteaux aiguisés se trouvaient discrètement cachés dans ses bottes.

Je me présenterai sous le nom de Darth Narjaak. Quand à toi, nous utiliserons juste un prénom... hmm... Julia ? Surtout ne parle pas, les esclaves ne sont pas censés faire preuve d'initiative ici. Mais gardes les yeux et les oreilles en éveil, Korriban dépasse tout ce que tu as pu connaitre à Nar Shaada.

Nous échangeâmes un baiser avant que je n'enfile mon casque, conscient que nous risquions de nous jeter dans la gueule du loup. Si la chance était avec nous, nous trouverions des informations à Dreshdae sans devoir nous rendre à l'académie même.

Korriban ne ressemblait pas à Nar Shaada, aucun gang suffisamment organisé ne régnait sur le monde du crime grâce à des informateurs auprès desquels nous aurions pu monnayer les réponses à nos questions. A regret, nous avions donc convenu avec Romy de tenter notre chance auprès de la corporation Czerka, une entreprise dont la moralité plus que douteuse de ses dirigeants lui avait permis de s'installer à Dreashdae depuis déjà plusieurs siècles. Bien que travaillant avec les siths de l'académie, la Czerka ne se laissait guider que par ses profits, nous laissant espérer que certains employés seraient corruptibles sans trop d'efforts.

Tout en nous rendant à la cantina, je constatais que la population de Dreashdae était toujours aussi miteuse que dans mon souvenirs : mercenaires en vadrouille cherchant à se faire oublier des forces républicaines, escrocs et voleurs en tout genre, déportés et victimes de la guerre... cette misère me rappela les bas-fonds de la lune des contrebandiers en quasiment pire car des groupes de novices de l'académie menaient parfois des raids meurtriers en ville juste pour "s'amuser", selon eux. Je ne me prétendais pas un parangon de vertu, mais j'aurais applaudi si une flotte républicaine avait rasé cette sinistre colonie.

A la cantina, je fis la connaissance d'un cathar nommé Asn'or, employé de la Czerka, qui noyait sa morosité dans l'alcool tout en reluquant la danseuse twi'lek qui se trémoussait sur scène, vêtue d'une tenue plus que minimaliste. Nous l'avions dégoté dans un salon annexe de la salle principale, fréquenté uniquement par les employés de la Czerka dont Asn'or semblait ce soir-là le seul représentant. Quelques verres, des émanations de phéromones et une petite persuasion de Force lui firent vite avouer qu'il jalousait ses supérieurs et ne se contentait pas du poste subalterne dans lequel on le confinait. Une fois lancé sur le sujet, il devenait vite inépuisable.

...ouais, ces crétins du bureau central, ils croient quoi, hein ? Que les déchargements c'est facile ? Ils savent juste poser leurs fesses sur un siège molletonné alors que c'est moi qui doit organiser le spatioport. Les entrepôts sont trop petits, les systèmes moisis et...
Donc vous savez tout ce qui se passe au spatioport ?
Et comment ! Tous les vaisseaux, c'est moi qui gère l'appontage, ouais ! Et vous croyez qu'ils m'en remercieraient, là haut ? Pensez-donc, trop occupés à leurs petites querelles de préséance.
Et les passagers doivent toujours s'enregistrer ?
Oh que oui, vous êtes sévères là-dessus, vous autres siths. Nom, race, origine, on enregistre tout, en particulier s'ils doivent ensuite entrer à l'académie.

Mon masque cacha le sourire ravi qui étira mes lèvres. Nous avions déniché la perle rare pour notre plan. La danseuse ayant fini son numéro et étant retourné dans la salle principale, je profitais que nous étions seuls tous les trois pour proposer à Asn'or une somme rondelette en échange d'un accès aux fichiers des voyageurs transitant par le spatioport. Le cathar se hérissa, moins de colère que de peur à l'idée de transgresser les règles, mais il finit par admettre l'idée comme possible tout en négociant âprement le prix demandé.

Et si votre esclave nous offrait une petite danse pendant qu'on discute du prix ? Y'a des tenues dans les loges, elle peut en emprunter.

Le regard furibond que Romy m'envoya avant d'aller se changer me fit comprendre qu'elle n'allait pas en rester là et que nous aurions droit par la suite à une petite explication, Mais qui veut la fin veut les moyens, non ? En voyant Romy arriver sur scène vêtue d'une tenue qui laissait peu de place à l'imagination, j'en eus le souffle coupé. Le cathar aussi d'ailleurs, qui en bavait presque d'envie et accepta avant même la fin de la danse de nous laisser accéder aux ordinateurs de la Czerka contre une somme assez rondelette mais sans doute moins élevée que celle qu'il aurait exigée sans cette session de danse. Je ne devrais sans doute pas avouer cela, mais je profitais moi aussi du spectacle sans chercher à trop accélérer la négociation. Quitte à me faire engueuler ensuite, autant que j'en ai eu pour mon argent !

Bref... n’épiloguons pas, je sens déjà le regard noir de Romy peser sur moi.

Une fois mon "esclave" rhabillée, nous sortîmes de la cantina à la suite d'Asn'or, qui nous emmena jusqu'au spatioport. Les droïdes de gardes ne nous inquiétèrent pas du fait de la présence de notre guide dont les accréditations autorisaient l'entrée. Par chance, aucun autre employé de la Czerka ne se trouvait sur place et nous pûmes arriver à la salle contenant le terminal central sans difficulté. Asn'or pianota sur la console de commande pour la déverrouiller puis m'en laissa l'accès tout en regardant d'un œil inquiet autour de lui.

Faites vos recherches, mais vite.

Acquiesçant, je commençais à fouiller dans la base de données en filtrant par caractéristiques biologiques tandis que Romy regardait par-dessus mon épaule. Et là, bingo ! Une entrée datant de moins d'un mois indiquait clairement qu'un cyborg dont la description correspondait en tout point à Cyb' s'était enregistré à partir d'un vaisseau cargo corellien en provenance de la bordure extérieure. Plus intéressant encore, aucun enregistrement ne correspondait à son départ, confirmant que notre ennemi avait du se rendre à l'académie pour y rejoindre son maître. Par contre, le lendemain les enregistrements indiquaient le décollage d'une vaisseau de patrouille de classe Mante D5 que je désignais du doigt à Romy... car c'était très exactement le modèle de vaisseau que nous avions vu sur Ilum. Téléchargeant les données sur un datapack, je n'entendis que trop tard la porte s'ouvrir et une voix s'exclamer.

Qu'est-ce que vous faites ici ? Asn'or, qui sont ces gens ?

Romy et moi nous retournâmes d'un bond. Dans l'embrasure de la porte se tenait un humain portant lui aussi l'uniforme de la Czerka. Au vu de ses galons, il ne s'agissait pas d'un subordonné que notre allié cathar aurait pu renvoyer sous un prétexte futile. Merde !

C'est.. euh, le superviseur a demandé un audit et... bredouilla Asn'or en palissant.
Quoi ? Je n'ai jamais entendu parler de ça. On va clarifier cette histoire.

A l'instant où l'inconnu se saisit de la radio qu'il portait à la ceinture pour donner l'alerte, je laissais la colère m'envahir. En d'autres lieux sans doute aurais-je réagit différemment en tentant de le neutraliser, mais sur Korriban je résistais plus difficilement à l'attrait du côté obscur lorsqu'il m'offrait des solutions aussi simples qu'efficaces. Tendant le bras, je saisis dans une poigne télékinésique l'intrus et lui brisait la nuque dans un craquement sec assez écœurant. Asn'or regarda le corps inerte s'effondrer au sol avant de se tourner vers moi.

Mais... vous l'avez...

Il n'eut pas le temps de dire un mot de plus, la lame de mon sabre-laser jaillit de sous ma cape pour le décapiter d'un seul coup.

Désolé.

A ma grande honte, je dois avouer que j'avais malgré tout pris plaisir à ces exécutions sommaires. Décidément le climat de Korriban ne me valait rien et une partie de moi répugnait à laisser Romy voir mon côté plus sombre. Mais peut-être comprendrait-elle pourquoi je l'avais mise en garde avant notre arrivée sur ces lieux, tant sur le plan physique que psychique.

La Czerka croira que ce sont les siths de l'académie qui sont derrière cette affaire, et s'arrangera pour l'étouffer. Finissons vite de télécharger les données et fichons le camp.

En matière de sortie discrète, nous venions de louper totalement notre coup. Si les couloirs s'étaient avérés vides de tout ennemi, un groupe de gardes de la Czerka nous attendait à l'extérieur. Aussi surpris que nous, ils se reprirent rapidement et nous ordonnèrent de nous arrêter, le respect dû envers les siths n'étant malgré tout pas absolu. Les seigneurs de Korriban disposaient d'une alliance avec la corporation, alliance qui leur garantissait l'autonomie dans leurs installations. Sans doute devaient-ils croire que nous étions des siths de l'académie désobéissant aux consignes.

De nouveau la rage m'envahit et je sentis l'envie de dégainer ma lame pour tailler bras et jambes dans cette masse de minables qui osait nous retenir, mais je réussis péniblement à retenir ma furie pour me contenter de leur envoyer une vague de Force qui les fit tomber comme un gros jeu de quilles. Attrapant Romy par le bras, je commençais à courir comme un dératé dans les petites ruelles autour de la base, bousculant sans vergogne les miséreux qui s'y pressaient ou les marchands qui tentaient de vendre leur camelote.

Fort heureusement nos poursuivants finirent par nous perdre, à moins qu'ils n'aient renoncés à affronter un sith dans des ruelles étroites. Revenus à bord de l'As-de-Pique, je pus enfin enlever mon masque et respirer plus librement. Une fois de plus nous avions frôlé la catastrophe tout en l'évitant par miracle, à croire que la Force veillait sur nous.

Bon ben... mission accomplie. En tout cas nous avons l'identifiant du vaisseau qui nous intéresse.

Je regardais Romy, qui était tout aussi essoufflée que moi.

Ce serait trop dangereux de tenter d'entrer dans la zone sith du spatioport. Entrons l'identifiant du vaisseau dans le navigateur de bord, nous le prendrons en filature dès qu'il décollera. Si Cyb' l'a utilisé, ce vaisseau nous mènera surement à la base de son maitre.