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« Laz’ziark, Ress. »

Le secrétaire à l’air passablement énervé leva le nez de son bureau, avant de retourner sur son écran et de grommeler :

« Ca s’écrit comment ? »

« Comme ça se prononce. »

La phrase avait été dit avec un grand sourire innocent, ce qui ne manqua pas de redoubler la fureur du fonctionnaire mal luné et perdu dans ses archives, pour la plus grande satisfaction de la sénatrice qui patientait depuis bientôt trois heures dans le hall de la Chancellerie et commençait à en avoir assez. Déjà, il avait fallu passer le premier barrage sécuritaire, celui dont elle avait l’habitude. Puis le second lui avait donné du fil à retordre, le commandant de la petite escouade armée étant persuadé qu’il avait affaire à une dealeuse s’étant introduite dans le bâtiment. Aussi Ress avait été emmenée devant ce petit bonhomme débordé sans se départir de son air stoïque, mais en maudissant intérieurement cette bande d’incapables qui lui faisait perdre son temps en raison de leurs préjugés pathétiques… Si jamais elle ratait son rendez-vous capital à cause d’eux, elle ne manquerait pas de contacter la première feuille de chou locale pour écrire un éditorial carabiné sur les dysfonctionnements majeurs de la Sécurité Intérieure et le caractère manifestement douteux du recrutement !

Mais alors qu’elle allait perdre patience, la délivrance vint, comme le gratte-papier bougon relevait ses lunettes légèrement tout en reconnaissant d’un air ennuyé :

« Ah oui, vous êtes bien notée. Navré, avec les derniers événements nous sommes plus prudents et… »

« Mais je n’en doute pas, votre zèle procédurier est tout à fait… admirable. »

Le tout avait été prononcé avec un ton sarcastique du plus bel effet, qui n’échappa pas au sous-fifre en face d’elle, dont le faciès simiesque se mit à rougir violemment sous l’effet du reproche à peine dissimulé. Sur ce, Ress le planta là et franchit donc enfin la porte menant aux intérieurs du bâtiment. Là, un nouveau sas de sécurité l’attendait, et après avoir encore une fois patienté un long moment, elle put enfin pénétrer dans l’antichambre où les rendez-vous attendaient.

S’asseyant sur l’un des divans rouges disposés pour les invités, elle constata avec un brin d’ironie que leur réputation de confort n’était pas usurpée : sur ce point, ses collègues de la Rotonde n’avaient pas tort. Un bon mot à l’intérieur du Sénat voulait même qu’on s’occupait du fessier des sénateurs avant de leur donner une bonne fessée quand ils iraient se plaindre auprès des Ministres. Elite républicaine ne rimait pas forcément avec intelligence et finesse humoristique…

Croisant ses mains devant elle, la balosar laissa traîner son regard d’encre sur son environnement et les personnes qui se trouvaient désœuvrées à attendre leur tour exactement comme elle. Il y avait là un kel’dor imposant drapé dans un long manteau noir et qui la toisait du regard, le son lourd de son respirateur résonnant désagréablement dans la salle. A ses côtés, un ugnaught grognait tout en croisant et décroisant nerveusement ses mains devant lui, tout en essayant de se plaindre à propos des multiples demandes de rendez-vous qu’il avait adressé à la Ministre de l’Industrie avant de se voir accordé celui-ci. Pendant un bref instant, la tentation de se mêler à la conversation fut particulièrement forte, afin de tromper l’ennui, mais le regard noir du kel’dor fit taire rapidement le visiteur porcin, qui laissa échapper un gargouillis étranglé peu ragoûtant.

Enfin, la délivrance vint, et une voix éthérée sortit d’un haut-parleur fixé au mur pour annoncer :

« Madame Laz’ziark, pour le bureau du Ministre Leto Vorkosigan. »

Ress se leva alors, n’adressant pas un regard pour ses deux compagnons d’attente, et s’engouffra dans le couloir qui la mènerait vers ledit bureau. Arrivée devant la porte, elle passa machinalement une main dans ses cheveux noirs afin de les lisser une dernière fois, bien qu’ils soient parfaitement attachés dans sa queue de cheval serrée, avant de tirer sur sa veste de tailleur pour l’aplanir. Elle était fin prête, et présentable. Ses antennes fièrement dressées sur sa tête, témoignage de son appartenance à la race balosar, elle toqua puis entra.

Le bureau était dépouillé, ce qui était plutôt normal. Au fond, ministre c’était le travail le plus précaire de toute la République : nommé et révoqué sur commandes, à la marge de manœuvre limitée par les idioties du prédécesseur et les budgets déjà votés, voués à encaisser les erreurs et à ne jamais voir les lauriers de leur travail… Un véritable sacerdoce. Enfin ou un tremplin, mais Ress doutait qu’un maître jedi voit ce genre de poste comme la porte vers un avenir plus radieux, plus puissant : il était même probable que sa vision soit plus celle d’un fardeau temporaire qu’autre chose, du moins si les impressions qu’elle avait eu en rencontrant des années auparavant les membres de cet Ordre, y compris son propre fils, pouvaient être généralisables à l’ensemble des jedis.

Le ministre en tant que tel lui fit immédiatement plus penser à un général d’armée qu’à la personne en charge de veiller au bon fonctionnement de la justice au niveau fédéral. Entre la cicatrice faciale et la taille imposante, il y avait de quoi être légitimement impressionnée… Ou pas, quand on avait l’habitude de faire au minimum quatre tête de moins que l’ensemble des autres races. Relevant la tête pour fixer le Falleen, la sénatrice lui tendit la main, ou plus exactement la leva suffisamment haut pour qu’il évite de se pencher afin de la lui serrer, comme l’avocate lui arrivait à la taille, ou plutôt, au vu des circonstances, au bureau…

« Enchantée, Monsieur le Ministre. Je suis Ress Laz’ziark, sénatrice en exercice de Balosar, mais ça, vous le savez déjà. »

Du moins, s’il lisait les noms de ses rendez-vous…

« En revanche, vous devez probablement vous demandez pourquoi j’ai demandé à vous voir, je me trompe ? »

Sans doute pas. S’asseyant dans le siège à côté d’elle, elle fit attention à se tenir parfaitement droite, autant par soucis d’éducation que pour une raison beaucoup plus triviale : éviter d’avoir ses pieds qui ne touchaient pas le sol, ce qui avait tout de même tendance à réduire considérablement la crédibilité de n’importe qui. Elle laissa un peu de temps passer, fixant le Ministre Vorkosigan de son regard d’encre sans concession ni aggressivité particulière, puis commença ses explications :

« En tant qu’avocate, j’ai été amenée à fréquenter de très près le système judiciaire républicain, que ce soit au niveau fédéral ou bien en arpentant les juridictions planétaires. Autant dire que je peux vous apporter des connaissances de terrain précieuses, et j’espère que vous serez plus réceptifs que certains de vos prédécesseurs à certains… faits sur lesquels beaucoup préfèrent fermer les yeux, par confort ou idéologie sécuritaire. »

La dernière partie de sa phrase était relativement risquée, elle le savait. Après tout, Ress parlait à celui qui avait présenté au Sénat la fameuse loi Patriote et son tour de vis sévère sur les questions de Sécurité Intérieure. A vrai dire, que ce soit le Ministre de la Justice, censé garantir l’impartialité des instructions et être le garant de la Loi qui ait été en charge de présenter de telles mesures l’avait profondément gênée, encore plus que le contenu en lui-même, nécessaire certes, mais qui à ses yeux de juriste avertie présentait certaines failles de fond. En vérité, sa position avait peu ou prou été celle de la délégation de Bakura, l’une des rares à avoir osé questionner certaines points du projet.

« Ne pensez pas que je viens vous chanter les mérites d’un système miracle ou remettre en cause les lois passées dernièrement. Le premier n’existe pas, et pour le reste, parfois nécessité fait loi, si vous me passez l’expression, je suis bien placée pour le savoir. »

Ca… Entre sa vie personnelle de balosar et le travail harassant pour sortir sa planète natale de la pauvreté endémique qui la frappait, il n’y avait pas de doutes sur le fait que Ress connaissait douloureusement, intimement, cet adage et sa force destructrice. Non pas qu’elle en approuvât pour autant l’extension à tous les problèmes, ni sa durée dans le temps.

« Cependant… Depuis quelques années, j’entends parler d’étendre nos forces de sécurité, extérieures et intérieures… Mais jamais sur l’après. Sur ce qui se passe une fois la guerre menée, le crime résolu.

C’est assez paradoxal, vous ne trouvez pas ? »


Question rhétorique, posée à dessein. Enfin, la sénatrice arrivait au point qui lui tenait à cœur.

« Qui s’est intéressé aux problèmes dans nos prisons ? A la surpopulation et aux conditions déplorables de détention des détenus de droit commun, pas ceux qui font la une des journaux ? »

Allusion limpide à un sith désormais bien connu de tous…

« Qui a émis l’idée que les problèmes de sécurité dans nos centrales venaient d’abord du système, et non simplement de la violence de condamnés soi-disant sauvages ? Qui a pointé du doigt le fait que passer des lois sans possibilité de les appliquer pour des gouvernements planétaires pauvres ou débordés conduira sur le long terme non pas à une réduction, mais au contraire à une explosion de la délinquance ? »

Elle fit une pause dans sa longue tirade qui se révélait de plus en plus enflammée à mesure que les minutes passaient. Braquant son regard noir sur le falleen, Ress lâcha d’un ton lourd, emphatique :

« Personne. Et c’est précisément pour cela que je suis venue. La justice ne se fait pas uniquement contre les criminels, mais bien souvent avec eux. Punir est une chose. Sacrifier un gamin de vingt ans à peine qui n’a jamais rien connu d’autres que les cartels et l’argent facile au prétexte de la sécurité en est une autre. »

D’une voix considérablement radoucie, elle conclut :

« J’ai vu beaucoup d’histoires comme cela. Peut-être que sans la chance d’avoir pu quitter Balosar quand j’étais jeune, j’aurais suivi la même destinée.

J’espère que vous trouverez le temps d’écouter quelques-unes de mes propositions pour que la Justice ne soit pas seulement, dans notre République qui se prétend porteuse de valeurs comme l’égalité ou la liberté, un instrument de punition aveugle, mais au contraire une main généreuse qui sait aussi bien châtier que gracier. »
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Leto s’enfonça dans son fauteuil au dossier incurvé et suivit distraitement des yeux le flux textuel des informations politiques qui défilait de bas en haut sur deux écrans situés sur la gauche de son bureau. Contrairement à bon nombre de ses prédécesseurs, Leto considérait le Sénat un peu comme un animal dont les réactions pouvaient être maitrisables, comprises, voire même anticipées. D'autres Ministres de la Justice avant-lui faisaient beaucoup plus attention aux détails et ne juraient que par une politique dont les problèmes locaux pouvaient déclencher des désastres d'ampleur galactique. Les gens normaux, quant bien même pouvaient-ils être fichtrement intelligents, étaient bien souvent obligés de se baser sur leurs analyses et leurs observations, les faits qui leurs étaient rapportés et le déroulement des évènements. Leto avait cet avantage si unique d'être Jedi et de ressentir plus que de penser, pour ne pas avoir à réagir plutôt qu'agir.

Son bureau était en parti encombré de moniteurs qui le tenaient informé des évènements quotidien de quelques soixante dix mondes de la République, parmi ceux le plus dignes d'intérêt dans l'histoire républicaine contemporaine. Émeute alimentaire sur Atzerri. Attentat religieux sur Dorin. Guerre civile sur Ord Mantell. Les offensives et contre-attaques multiples de bataille des prix interminables et les ondulations des courses à l'innovation. Conflits ethniques et procès médiatiques dont il avait lui-même parfois la charge. Tout cela suivi en temps réel par un réseau de communication étriqué. Le privilège ministériel lui permettait de surveiller les échanges internes des agences de presse en compagnie des services de la sécurité intérieure, des consortium financiers et même, depuis quelques mois, les courriers privés de certains Sénateurs suite aux révélations fracassantes de feu Janos.

Mais de tout cela, Leto était las. Il leva doucement sa main droite vers son menton et soutint sa tête pour ne pas qu'elle bascule sur le côté, le Jedi, même si possédant de fabuleux pouvoirs, manquait cruellement de sommeil depuis plusieurs jours. Mais ce n'était pas la fatigue qui lui faisait perdre sa patience et son énergie, c'était son environnement professionnel, la destiné à laquelle il avait dut se plier. Si prêt d'un an auparavant, il avait sut prendre le problème à bras le corps et marquer sa volonté, aujourd'hui, il était éreinté de faire face aux complaintes des Sénateurs et des différents acteurs animant le compartiment complexe de la justice à l’échelle galactique. Cette fois-ci, sa différence qui l'opposait à ses prédécesseurs pouvait jouer en sa défaveur. Si d'autres, moins réceptifs voyaient en leurs collègues et fréquentations que des êtres binaires avec qui il fallait traiter de telle ou telle façon pour arriver à ses fins, Leto, de part sa nature de Jedi profondément ancré dans la Force Vivante ne pouvait s'empêcher de voir les Sénateurs comme des êtres vivants et luminescent dans la Force.

Il pouvait sentir les angles de leurs vanités et de leur petites obsessions mesquines comme si il effleurait du bout des doigts la texture érodée d'une pierre ancestrale. En surface, tous ou presque paraissaient policés et lisses, ordonnés et honnêtes, parfaits pour faire bonne figure face aux caméra de l'Holo-net. Mais plus le temps passait, et plus Leto découvrait par l’intermédiaire de la Force ou tout simplement par de simple constations et heureux hasards les aspérités parfois profondes et tranchantes de la personnalité de certain.

Parfois, au bout d'une harassante journée, il avait la désagréable impression de n'être qu'un garde-fou face aux ambitions démesurées et à l'égoïsme forcené de ce qui constituait la caste d'élite politique de la République. Il devait jongler avec les exigences égocentriques, à peine dissimulées en requêtes officielles des un et des autres et son pourcentage de temps passé à réfléchir, élaborer et imaginer des solutions et les appliquer pour remanier un système judiciaire défaillant était en fin de compte bien mince. Décevant.

Pourtant, il ne se doutait pas encore que la rencontre prochaine pourrait bien embaumer sa journée toute entière, déjà si morose.

Il vit pénétrer d'un pas assuré mais paradoxalement claudicant, contrastant avec un accoutrement dont la sobriété n'avait d'égal que l’élégance, une femme dont plusieurs de ses traits lui sautèrent aux yeux instantanément. Ses petites antennes frontales, tout d'abord, lui firent deviner qu'il s'agissait là d'une Balosar, bien qu'il n'en ai jamais rencontré jusqu'alors. Aucune chance de se tromper, de toute façon, puisqu'il avait vu sur son écran qui il devait recevoir à cet instant. Seconde chose notable, ses vêtements, dont la coupe et la taille semblaient être calculés au millimètre prêts, appuyant de concert avec un maquillage discret et un visage naturel un caractère authentique, volontaire et courageux. À l'opposé de bien trop de Sénatrices aux costumes ostentatoires et à l'apparence si artificielle et si endimanchée qu'on aurait put les confondre aisément avec des comédiennes érotiques … La dernière chose qu'il put remarquer de prime abord, et ceci encore plus à mesure que la femme s'approchait de son interlocuteur fut sa petite taille, si bien que lorsqu'elle fut arrivée devant lui, le Falleen n'avait guère le choix que de regarder le sol pour pouvoir contempler son hôte. Sa main, fine mais ferme se glissa dans celle, froide et rugueuse du Jedi et à cet instant, quelque peu décontenancé, il craignit d'avoir laissé s'échapper un brin d’appréhension, de peur de broyer les doigts de la dame par inadvertance. Idiot, mais véridique. Leto désigna d'une main, paume ouverte à Ress le siège situé à ses côtés, avant de lui-même prendre place.

Elle se présenta, chose toute aussi inutile dans ce genre de circonstance où tout deux savaient très bien à qui ils s'adressaient, que nécessaire, pour installer une sorte de conformisme et de protocole de politesse. Avant qu'elle ne puisse allez plus loin, Leto se pencha devant son moniteur principal et tapota deux fois sur son clavier.

- « Madame Laz’ziark, avec un k ? Oui, bien sur. » Souffla Leto. Il avait regardé son interlocutrice en penchant légèrement la tête, les yeux animés d'une drôle d'étincelle, comme si à cet instant précis, il avait dut jeter son regard au dessus de la monture d'une paire de lunette imaginaire. Une paire de lunette aux verres en forme de demi-lune, tel les vieux professeurs d'art et de littérature des universités de Naboo et d'Alderaan. Il corrigea ensuite l'erreur d'orthographe du nom de la Sénatrice qui figurait dans sa base de donnée avant de lui procurer toute son attention.

Aussitôt, la femme d'âge incertain fit étalage d'un bas-goûts exceptionnel, qui seyait à merveille à son statut. Aussi, son intonation de voix très modulable, le rythme de son discours et la nature de ses propos furent étrangement contrastés, comme une subtile alchimie donnant naissance à un argumentaire saisissant bien que probablement incomplet. Passionnée, mais affable et humaine, elle faisait aller ses idées non sans les accompagner de son ressenti profond, sans aucune gêne ni honte, afin d'ajouter un poids considérable et une valeur authentique à sa tirade. Une véritable oratrice au charisme et à la force intérieure palpable, Leto en fut convaincu au bout de quelques minutes. Le Falleen avait croisé ses doigts noueux devant son menton, ses griffes noires, qu'il avait habitude de tailler court pour une question de convenance lui donnant une étrange apparence de prédateur en train de patienter jusqu'au moment opportun où il devrait bondir sur sa proie. Mais ce n'était qu'une façade, ceux qui le connaissaient bien auraient put témoigner qu'en réalité, malgré son immobilisme et son silence pesant, derrière son visage de marbre et sa carrure impressionnante qui ne frémissait pas d'un cheveux, le Maître Jedi était en train de voir son âme réchauffée par une douce lumière. Celle de l'espoir, son esprit attisé par l'intérêt, le mystère, l'intrigue. Enfin quelqu'un qui venait à lui pour s'adresser au Ministre de la Justice et qui avait quelque chose d'intéressant à lui proposer. Par la Force, enfin, ils auront mis le temps !

Leto se pencha à nouveau devant son moniteur central et ouvrit un canal de communication directement relié au dispositif d'appel de son secrétaire, à l'extérieur du bureau. Dans un petit microphone, celui-ci répondit :

- « Que puis-je pour vous monsieur le Ministre ?

- Brakassé, veuillez annuler touts mes rendez-vous de cette après-midi.

- Mais, monsieur, vous devez recevoir monsieur le Sénateur Strasus-Nhak à quatorze heure... ! Réagit aussitôt l'autre.

- Plus aujourd'hui. Insista le Falleen.

- Sauf votre respect monsieur, il sera furieux, vous le connaissez, il est parfaitement irritable ces derniers temps.

- Je n'ai que faire des querelles idiotes de monsieur Strasus-Nhak, cela fait déjà quatre fois ce mois-ci que je le reçois, je ne suis pas là pour jouer les médiateurs dans des histoires de mœurs à dormir debout. Conclut fermement Vorkosigan. Le Sénateur dont il était question était en pleine instance de divorce, une abracadabrante histoire d'adultère qui avait éclatée au grand jour, un impact médiatique incroyable et une vague déferlante désastreuse s'étant écrasé sur les affaires connexes et la réputation du politicien qui s'était empressé de venir demander quelques conseils d'ordre juridique au Falleen.

- Bien monsieur, comme vous voudrez. La communication fut interrompue, et une fois le canal coupé, le grossier personnage derrière son bureau grommela : satané Jedi, que je les déteste !

Leto, une fois avoir interrompu la communication fit se joindre le bout de ses dix doigts pour former une sorte de triangle devant son visage en appuyant ses coudes sur son bureau.

- J'entends votre requête madame la Sénatrice, d'ailleurs, je vous félicite d'être venue à moi car vous êtes assurément la seule ces derniers temps qui m'évoque quelque chose d'intéressant. Son sourcil droit s’arcbouta. C'est vrai, vous me posez là un problème de fond réellement important, ça me change des stupides algarades égoïstes des un et des autres. Mais force était de constater qu'il ne fallait pas oublier l'évidence. Malheureusement, je ne suis qu'un homme de transition. J'ai passé les six premiers mois de mon mandat à clore les dossiers principaux déjà existants et à essayer d'éviter les catastrophes d'ingérence de mon prédécesseur, avec tout le respect que je lui dois. Vous devez avoir conscience que si nous opérons un travail de longue haleine à ce sujet, il se pourrais bien que je ne sois pas en mesure de conclure notre collaboration car je ne serais plus en fonction. »

Il était enfin temps de prendre position. Même si Leto ne s'en était jamais réellement caché, il avait préféré rester relativement discret sur le sujet. Aujourd'hui, il voulait user de l'influence qu'il lui restait pour un certain temps afin de jouer au jeu des politiques sur leur propre terrain, à savoir l'image. En tant que Jedi avant tout, et depuis plusieurs mois, il s'était demandé comment il pourrait être utile à son Ordre ainsi qu'au peuple qu'il avait juré de servir et protéger. Il avait désormais trouver une solution, une qui n'était pas parfaite mais qui était envisageable et bonne pour le long terme. Le ralliement de Kashyyyk a la République était une première étape, la réforme nécessaire du système carcéral républicain en serait une autre pour convaincre le peuple que les Jedi sont utile à la galaxie. Car si une guerre contre les Sith se profilait à l'horizon, les Jedi auraient besoin du soutient de la République, et inversement, à n'en point douter. Et quand bien même bon nombre de Jedi estimaient n'avoir aucun compte à rendre à quiconque, Leto commençait à penser qu'il était de bon ton d'entamer une stratégie de ''réconciliation'', ou de ''reconquête'' de l'opinion public. Il en allait peut-être de la survie de l'Ordre.

Outre ce constat assez égoïste, il fallait bien reconnaître que la Sénatrice venait avec des intentions louables auxquelles un Jedi ne pouvait répondre que par l'affirmatif. Et elle avait raison. Les Sith causaient peut-être beaucoup de problème, mais ils étaient minoritaires, à travers la galaxie toute entière, il y avait bien plus de criminels et délinquants lambdas. Et dans le lot, beaucoup trop de victimes d'injustice, il fallait y remédier. Leto se redressa en s'appuyant sur le dossier de son siège et décida d'interpeller Ress pas de façon tout à fait innocente.

- « La situation de Balosar est des plus préoccupantes à ce sujet, d'ailleurs, je me trompe ? Dit-il en prenant bien soin de porter dans sa voix un soupçon de cordialité, afin de signifier à la Sénatrice qu'elle pouvait se sentir en confiance et écoutée avec le Falleen. Et si nous commencions par là ? » préconisa-t-il.


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La plupart des sénateurs voyaient les jedis au mieux comme des êtres plutôt bons mais naïfs et donc incapables de faire de la politique, au pire comme une secte de fanatiques armés. Cela signifiait simplement qu’ils n’avaient jamais eu affaire à un certain nombre des membres de cet Ordre. De son expérience, Ress avait appris plusieurs leçons salutaires qu’elle appliquait à tous, sans distinction : ne pas se fier aux apparences, et encore moins aux idées préconçues. Certes, elle n’était pas exempte de jugements trop hâtifs, et avait tendance à appliquer bon nombre de préjugés à certains milieux républicains, surtout ceux qu’elle avait passé sa vie à combattre d’ailleurs. Disons simplement qu’il y avait parfois trop d’animosité naturelle pour que la bonne foi parvienne à se faire entendre.

Cependant, au niveau des jedis, agacée des années plus tôt par l’incurie des pouvoirs publics républicains incapables de reconnaître que des centaines d’individus nés citoyens comme eux s’étaient fait massacrés à cause de leur appartenance à une organisation basée sur le sol même de la République, concernée personnellement en raison de la sensibilité à la Force de son propre fils, la sénatrice avait une vision exceptionnellement neutre au sein de la Rotonde. D’une certaine façon, elle n’avait strictement aucun avis préconçu envers ce dernier, voir à la rigueur une sympathie due au travail altruiste de ces ermites des temps modernes. Au moins eux utilisaient les dons reçus à la naissance pour les autres, pas comme tous ces fils et filles de qui vivaient sur leur tas d’or et ne songeaient qu’à accroître leur petit plaisir personnel.

Cela dit, elle devait reconnaître que l’idée de jedis fin politiciens la laissait légèrement perplexe, notamment en raison de leur propension à clamer leur envie de ne surtout pas se mêler des affaires de ce bas-monde. Difficile d’être doué dans quelque chose quand on ne veut pas se retrouver en son cœur, à moins d’y être contraint. Mais Leto Vorkosigan venait de prouver que ce type de jugement était profondément erroné.

A vrai dire, l’avocate était même particulièrement embêtée par sa question. Evidemment qu’elle avait sa propre planète en tête au moment d’entrer dans ce bureau, dire le contraire aurait été mentir. Néanmoins, elle aurait apprécié que la question vienne sur le tapis plus tard, et de son fait. Là, elle avait l’impression de se retrouver sur la défensive, à n’être qu’un ersatz mieux intentionné de ses collègues qui ne faisaient que quémander des avantages pour leur propre monde sans se soucier des problèmes des voisins.

Non, Ress valait mieux que cela, du moins c’était ce que lui soufflait sa haute opinion d’elle-même et de ses capacités. Balosar ne serait qu’un exemple, un point d’appui, en aucun la fin de son discours. Tout du moins, elle se plaisait à le croire, même si une voix au fond d’elle, infiniment plus cynique lui soufflait que tout cela n’était que de jolis mensonges, et qu’elle venait d’abord et avant tout pour désengorger le système carcéral en ruine de sa propre planète, et qu’elle se servait d’une question plus globale pour servir ses propres intérêts. Peut-être était-ce vrai. C’était même sans doute le cas. Mais elle pouvait toujours tenter de se convaincre du contraire.

Le temps pressait. Elle devait répondre. Trois options s’offraient à elle : noyer le poisson, ce qui serait aussi inutile que contreproductif, s’engager sur la voie dégagée par le Falleen, au risque de manquer de hauteur de vue, ou bien évacuer la question et revenir à un niveau plus global. Ce fut ce qu’elle choisit.

« Balosar n’est qu’un symptôme de problèmes bien plus grand. J’ai passé l’essentiel de ma vie à voyager à travers la République, excepté ces six dernières années, évidemment. Le problème n’est pas local, mais bien global.

Une vie ne suffira pas à assainir la criminalité, alors, si vous m’offrez six mois, je les prends tout de même. »


Elle le regarda avec attention, et lâcha soudainement :

« A vrai dire, c’est précisément parce que votre temps à ce poste est compté que vous êtes intéressants. Vous n’êtes pas un politique, donc vous n’avez pas de poste à récupérer ici, rien. A la rigueur, des responsabilités au sein de votre Ordre, mais pas d’intérêts particuliers à défendre. Même pas votre poste.

Donc vous n’avez rien à gagner à refuser de m’écouter, puisque vous n’avez rien à gagner de fait… hormis une meilleure image éventuelle pour l’organisation à laquelle vous appartenez. Donc les calculs d’argent et de popularité sénatoriale ne risquent pas de vous intéresser. Enfin, ils ne devraient pas. Parce que vous aurez beau faire, jamais les sénateurs ne vous accepteront comme l’un des leurs. »


Avec un sourire amusé, elle lui souffla :

« L’honnêteté rigoureuse fait trop peur pour ça. »

Quel intérêt de se montrer aussi crue avec le Ministre ? Aucun, a priori. Simplement, Ress tenait à ce que les choses soient claires entre eux : elle se moquait qu’il soit là pour quelques semaines ou mois. Elle voulait de l’efficacité. Et tenait à le lui faire comprendre.

« Sauf que ce n’est pas parce que vous m’écoutez que vos supérieurs prendront le risque de cautionner une politique visant uniquement quelques planètes.

Voilà pourquoi je préfère parler au niveau fédéral, et non pas simplement en tant que représentante et gouverneure de Balosar. Une réforme ne peut se faire qu’ainsi, et je tiens à son impartialité.

Je déteste les faveurs accordées par principe aux … amis qu’ont certaine sénateurs ou ministres. Donc si ça ne vous dérange pas, je n’évoquerais ma propre planète qu’une fois que nous en serons au cas par cas pour décider d’un budget à accorder éventuellement aux mondes les plus en difficultés. »


Sortant un datapad miniature de sa poche, elle le tendit au Falleen pour qu’il le connecte à son holo-écran de bureau, ajoutant :

« Vous trouverez une liste des établissements carcéraux fédéraux les plus inquiétants, compilés en fonction du taux d’évasion, de récidives et de mutineries de ces dernières années. Ce sont les chiffres de votre Ministère et de celui de la Sécurité Intérieure, compilés sur ces dix dernières que j’ai pu trouver aux archives générales.

J’y ai joint les enquêtes de différents journaux de toutes sensibilités que j’ai pu trouver, ainsi que des sources non-officielles venant des barreaux de ces planètes. Certains ont été difficile à convaincre, je ne vous le cache pas, et il est évident que beaucoup ont tenté de minimiser les faits. Cela dit, c’est une échelle. »


Avoir ses entrées chez les avocats avait tout de même quelques avantages, de même que traiter des dossiers judiciaires long de plusieurs centaines de pages donnait une sérieuse habitude de compilation de données pour fournir des arguments solides.

« Ci-joint, vous trouverez également les planètes aux taux de criminalité les plus forts.
Comme vous voyez, Balosar figure en excellente position. »


Doux euphémisme… Enfin, de toute manière, ce n’était pas une surprise. Il voulait avoir la situation sur Balosar, il l’avait.

« Et comme vous pouvez le constater, la corrélation entre récidive, mutineries et plaintes pour mauvais traitement ou contre d’autres tenus, comme montrés dans le rapport des barreaux d’avocat est très forte.

J’ajoute à titre personnel que les récits des récidivistes quant à leurs séjours dans certaines prisons fédérales suffirait à donner des envies d’évasion à l’âme la plus pure de la galaxie. »


Elle ajouta avec un léger rire :

« Peut-être même à un jedi. »

Reprenant son sérieux, Ress conclut finalement :

« Je vous laisse en tirer les conclusions qui s’imposent. »
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Ress Laz'ziark était une belle plante, petite mais vivace, aux couleurs chatoyantes et variées, métaphore de son caractère passionné et riche de tant de nuance. Mais force était de constater qu'elle était aussi épineuse, voire même vénéneuse pour les imprudents qui s'en saisirait avec maladresse ou irrespect. Elle était forte et exigeante, directe mais droite et juste. C'est ce qu'avait réussi à comprendre Leto au bout de ces quelques minutes d’entretien. Ress avait parler de budget, la réalité de la situation ne lui échappait donc pas. Pour mettre en place des réformes, des projets, faire changer les choses, il ne fallait pas se contenter de bonne volonté, il fallait de l'argent. Par chance, le Ministère de la Justice en bénéficiait un peu plus que l'exercice précédent, et Leto comptait bien prendre parti de cela.

Il visionna la liste des dossiers et documents fournis par l'avocate sur son moniteur principal. Balosar y figurait effectivement, au milieux de système et planète tel que Ord Mantell, secouée par des guerres civiles et des insurrection de gravités variables depuis plusieurs décennies. Il y avait aussi Metellos, rivale de toujours de Coruscant. Ultra industrialisée et dont la construction de la société était semblable à celle de la capitale galactique, mais dont la corruption au sein des instances judiciaires et des forces de l'ordre réduisait en poussière tout les records les plus fous. Il y avait Velga, célèbre en particuliers pour sa lune Velga Prime, Leto devinait que les ressortissants incarcérés étaient en bonne partie des arnaqueurs, des voleurs ou des délinquants boursiers puisque c'était une vaste zone touristique très prisée et recouverte d'hôtels luxueux et de casinos. Enfin, parmi les planètes qui avaient retenues l'attention du Jedi, il y avait Corulag. Connue pour être une société énormément basée sur la bureaucratie et l'administration, les Corulans formaient depuis des siècles des générations entières de fonctionnaires d'élite de la République. Les Corulans étaient hautains et fiers, car nombre de familles pouvaient s'enorgueillir d'avoir servi durant des millénaires dans les nombreux rouages de la complexe civilisation galactique.

Leto soupira une fois avoir survolé l'intégralité des dossiers. Ress n’exagérait pas, les chiffres fournis, bien qu'il en ai repéré certains de pas tout à fait exacts, selon lui, étaient alarmant. Et c'est surtout le nombre et la variété de monde concernés par le problème des centres carcéraux en perdition qui avait de quoi inquiéter. La Sénatrice semblait déjà avoir en tête quelques axes pour agir et tenter de changer les choses. Elle évoquait les conditions difficiles des séjours dans bons nombres d'établissements pénitentiaire, corroborer par des enquêtes, des graphiques et des statistiques de toutes sortes que le Jedi avait put voir quelques secondes auparavant. Cela lui semblait un bon début pour commencer à agir. Ce qu'il fallait, c'était un problème concret afin de pouvoir envisager autant de solution simple à mettre en œuvre, et efficace.

- « La réforme, si réforme il y a et si on peut appeler cela comme tel, doit être globale, vous avez raison. Mais les décisionnaires dont je fais parti peuvent être convaincus si nous leurs donnons des mesures concrètes à appliquer facilement et dès à présent, avec un budget et des plans de financement précis. Il se leva. Les bureaucrates ne sont rien de plus que des hommes et des femmes à qui ont auraient privés l'ouïe et la vue, tant que nous ne leur prouvons pas le bien fondé de nos projets et que nous ne les rassurons pas sur la nécessité absolue de telles actions, ils ne voteront pas pour. Il arriva à hauteur de la Sénatrice pour lui rendre son datapad après avoir prit soin de faire une copie de son contenu et continua. Heureusement, le Ministère de la Justice a sut faire des économies depuis quelques cycles. Les dépenses des exercices précédents ont put être rattrapées par une gestion plus logique du budget. Je n'ai, par exemple pas accepté de continuer à fournir une enveloppe à certain centres d'incarcération afin qu'ils continuent à s'équiper en armement de pointe en dépit de matériel de soin et de sécurité destiné aux détenus. La centrale d'Il Avali, sur Druckenwell est déjà mieux équipée en fusil blaster et armure de combat pour ses employés que certaines sections de l'armée elle-même. Cependant, l'isolation thermique de certain block de détention est digne d'un favelas de Bonadan. Je vous laisse imaginer ! Bonadan était une planète industrielle polluée à l'extrême de la Bordure Extérieure, qui pouvait tirer vanité de ses usines démentiellement grandes et de ses innombrables spatioports de catégorie galactique. Mais dont les conditions de travail étaient désastreuses, sont taux de mortalité à cause d'un environnement peu sur et d'une pollution excessive avait depuis bien trop longtemps atteint des sommets et des troubles civils divers ne cessaient de mettre à mal le peuple. Si pour les gens honnêtes et utiles à la société les conditions de vies sont incroyablement mauvaises, je vous laisse imaginer la catastrophe pour de simples prisonniers. Pourtant, il y a encore tant à faire. Reprit le Falleen. Sur Ryloth par exemple, qui est très éloignée du Noyau, les détenus ne peuvent bénéficier de nourriture de qualité décente car ne disposant pas de systèmes de conservation et de préparation adéquats. Le voyage reliant Ryloth aux principaux mondes fournisseurs de nourritures tel que Chandrila et Alderaan sont couteux, si bien que leurs centres d'incarcération bénéficient très rarement de nourriture saine. Le taux de mortalité dans la centrale de Ryloth dut à la malnutrition est effrayante. »

Leto s'était un soupçon laissé emporter par sa verve, voici enfin un sujet qui lui tenait à cœur en sa fonction de Ministre de la Justice, de quoi marier à la perfection sa philosophie de Jedi et son devoir de représentant des lois et des égalités à travers la République. Son discours avait été mené avec éloquence, l'intonation de sa voix variant sensiblement pour y ajouter force et véracité, sans même qu'il ne s'en soit rendu compte. Voilà qui pouvait être la preuve que ce que disait le Jedi était réellement ce qu'il pensait, sans stratégie ou tactique de politique et de beau parleur. Il y avait tant à dire, tant de problèmes à soulever et à mettre en lumière à ce sujet. Madame Laz'ziark ne voulait pas abuser de ses privilèges pour porter la triste Balosar au-dessus des autres ? Et bien soit, il suffisait d'écouter Vorkosigan quelques minutes pour avoir une liste interminable de problèmes sur tout autant de mondes et de secteurs plus ou moins éloignés de Coruscant. Balosar n'était, effectivement, pas la seule préoccupation de ce très grand projet qui commençait à se dessiner entre les deux personnages.

- « Je penses avoir saisi le cœur de votre pensée, et je dois avouer qu'il ne fallait en réalité pas grand chose pour me convaincre. Je ne suis pas là pour jouer, supputer et faire de faux semblants, j'espère qu'il en est réellement de même pour vous. Déclara très solennellement le Jedi. Je vous propose de réunir nos ressources et nos services afin de travailler sur l'élaboration d'action. Déterminons ce qui est le plus urgent à faire, établissons des plannings précis et des budgets stricts et nous iront convaincre ensemble à qui de droit d'agir. »

La proposition du Ministre était on ne peut plus claire, la Sénatrice n'avait plus qu'une décision simple à prendre, marcher main dans la main avec le Falleen pour aller jusqu'au bout de sa volonté, ou rien. Cela serait compliqué, rien ne se ferait dès le lendemain, aussi bien lui que elle s'en rendait sûrement compte, mais les plus grandes entreprises naissaient tout d'abord avec des choix et des volontés fermes.

Leto autant que Ress semblaient en avoir, il suffisait d'avoir le courage et l'ambition de s'en servir !

Invité
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Tandis que Leto Vorkosigan parlait, Ress ne pouvait s’empêcher de penser que parfois, les jedis étaient un peu prévisibles. Pas de la mauvaise manière selon elle, mais la balosar comprenait pourquoi leur enthousiasme de justiciers pouvait agacer ses chers collègues. La plupart auraient signé toutes les demandes d’armement possibles et imaginables en un battement de cils. Après tout du moment que l’ordre régnait… C’est que les résultats étaient là non ?

Pour autant, l’avocate avait souvent l’impression que les membres de l’Ordre avait une vision qui restait, même pour les plus expérimentés, un peu trop optimiste sur la nature du pouvoir et de ses serviteurs. Certains, à l’inverse, auraient dit qu’elle était trop cynique. C’était possible. Mais les années lui avaient appris à voir les choses pour ce qu’elles étaient, à savoir laides et désagréables, et non pour ce qu’elle désirait qu’elles soient. Des illusions, elle ne s’en faisait aucune, tout simplement. Cela ne l’empêchait de croire fermement en ses idéaux, de les défendre passionnément. Mais sans doute avec moins de naïveté qu’à ses débuts, quand elle croyait qu’un rapport seul pouvait faire bouger une situation, pourvu qu’il soit juste. La vérité était nettement moins reluisante. Ce qu’elle ne put s’empêcher de dire au jedi quand ce dernier eut fini son discours.

« Si je puis me permettre… Croyez-moi, le bureaucrate n’est en rien une créature malheureusement aveugle qui ne demande qu’à être illuminée. La plupart sont formatés pour ignorer ce qui serait dérangeant de voir. Ils savent ces problèmes. Cela fait des années que des associations diverses et variées pointent ces ennuis. A chaque mutinerie, le problème revient sur le tapis… Et ce sont les mêmes affectations de budget qui sont faites. Chaque pétition ne récolte rien d’autre qu’une lettre polie… Quand elle récolte quelque chose.

J’entends bien ce que vous me dites. Vous ne jouez pas. Moi non plus. Mais nous allons devoir jouer selon leurs règles… Ou bien nous passer de leur approbation. La méthode vous appartient. »

Néanmoins…

« Cela dit, sans doute que pour votre assise, il vaudrait mieux éviter de vous mettre toute l’administration à dos. Ce qui signifie qu’il va falloir passer d’abord par la base, puis par le sommet. Et éventuellement… Sauter le milieu. Vous ne les convaincrez pas, même avec les meilleures intentions, les arguments les plus poussés… Ce projet sera coûteux politiquement et financièrement. Vous ne trouverez que peu de haut-fonctionnaires près à le soutenir, surtout qu’il est innovant. En revanche, les directeurs et inspecteurs eux… Possiblement.

Sans compter les juges de la Cour Suprême. Etant donné que cela touchera prioritairement leur juridiction, un avis favorable sera nécessaire… Même symboliquement.

Normalement, il faudrait des lustres avant qu’une requête parlementaire de ce type n’arrive devant eux… Mais vous pouvez la faire passer comme requête ministérielle d’urgence pour avis préventif avant examen d’un projet de loi. Dites que vous voulez être sûr de la conformité constitutionnelle… Je rédigerais l’ébauche personnellement. Ce ne sera pas la première fois. »


Après tout, c’était son domaine de prédilection, et cela, même ses adversaires politiques le reconnaissaient, en grinçant des dents certes, mais tout de même. Parfois, elle se demandait si prendre la tête de la Commission sénatoriale pour la Justice ne serait pas le meilleur moyen de mettre à profit ses connaissances. Les autres, elle se morigénait en sachant qu’elle préférerait les Affaires Sociales, certes nettement moins glorieuses, mais plus adaptés à sa carrière politique. Puis elle se souvenait de son influence proche du néant, et revenait sur terre. Ces postes-là, seuls les plus nantis des gros partis les obtenaient. Et elle n’était pas encore prête à céder sur son indépendance. Pas encore du moins.

Pour le reste…

« Concernant les problèmes de ces planètes, elles sont assez… disons… hélas, prévisibles. Bonadan n’est qu’une cousine éloignée de Vulpter ou Balosar. A titre personnel, je m’y suis sentie presque chez moi, quand j’y suis allée pour une affaire syndicale… La pollution de Balo-city a presque failli me manquer même. Pas assez de particules toxiques dans l’air. »

Chassez le sarcasme, il revient au galop.

« Quant à Ryloth… Disons simplement que j’espère que leur récente conversion à l’ultra-capitalisme galactique va aider à… Oups, pardon, c’était lui qui faisait précisément que les cours sont abominablement élevés pour les planètes de la Bordure en raison des surcoûts liés à l’acheminement et au manque de force sur les marchés. Comme c’est dommage… »

Voilà qu’elle en devenait amère. Quoiqu’elle ne fut pas dans le faux, et c’était bien ça le pire. Que le ministre lui pardonne sa manière ironique de présenter les choses.

« Tout ça pour dire une chose : nous avons un plan d’action. Premièrement, voir la Cour. Deuxièmement, commencer à sonder les différents dirigeants pénitentiaires… Et planètes dans le besoin. Les grands de cette galaxie ont tort de sous-estimer le poids de leurs petits voisins. Unis dans une cause commune, ils constituent une force non négligeable… Ce sont vers eux qu’il faut se tourner. Vers Bonadan, Vulpter… Balosar, aussi, car leurs dirigeants seront plus à mêmes d’accepter la construction d’éventuels nouveaux espaces carcéraux sur leur territoire. Je peux déjà me porter garante du soutien de ma collègue de Vulpter. »

Elle le regarda droit dans les yeux, avant d’ajouter :

« Inutile de préciser que le mien est acquis. D’abord parce que je vous ai proposé ce projet, que j’y mettrais toutes mes ressources en terme de liens avec les divers milieux judiciaires.
Et accessoirement, parce que j’ai un besoin vital de faire rénover mes propres prisons. C’est un fait de toute manière que je n’ai pas cherché à vous cacher dès le début de cet entretien. »


Charge à lui de comprendre et d’acter qu’il ferait le nécessaire dans le cadre de ce grand projet. Elle avait des idéaux, mais aussi une planète à représenter.

« Pour vous répondre… Je joue, évidemment, comme tous les sénateurs… Comme vous sans doute, au moins en partie. Sinon vous ne seriez pas à ce poste. Mais vous comme moi, nous jouons dans les règles. Et nous jouons avec un but qui nous dépasse.

Peut-être que c’est la différence mineure… Et majeure, selon les points de vue. »
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