Je n’arrête pas de taper avec mes doigts sur le guidon du speeder, impatiente d’arriver enfin à destination. Enfin, j’ai obtenu ma première mission en tant que Chevalier Jedi et pas n’importe laquelle qui plus est : retrouver un autre Chevalier, Zane Loran. Ce dernier est parti pour Ilum et depuis, pas de nouvelles depuis des semaines. Le Conseil est furieux, je ne connais pas toute l’histoire, mais il va falloir que je le ramène, par la peau du cou s’il le faut, m’enfin bon, je ne me vois pas traîner un Jedi probablement plus grand et plus fort que moi jusqu’à Ondéron alors qu’on est pas du tout dans les parages. Ilum, pas de problème, je connais. C’est là-bas que j’ai récolté les cristaux pour mes deux sabres, sauf que je ne m’attendais pas du tout à tomber sur des traces, une piste en somme, qui m’a menée à Myrkr. Je ne connais pas du tout les planètes autour, pourtant je me suis renseignée rapidement sur la zone, je ne suis jamais allée sur aucune des planètes autour. Bon, d’un côté, je n’ai pas non plus voyagé des masses durant mon apprentissage, peut-être et certainement que je le ferai plus maintenant. Ce qui va être tellement génial, découvrir des endroits que je n’ai jamais vu autrement que sur des hologrammes et encore !

Secouant la tête pour ordonner un tant soit peu mes pensées, je me reconcentre sur la tâche que l’on m’a confiée. Premièrement, retrouver Zane, ensuite le ramener à Ondéron. Sa piste m’a menée à Myrkr, dans la forêt où j’ai emprunté un speeder. Les arbres passent à une telle vitesse sur les côtés qu’ils en deviennent flous. Bon, je n’ai jamais été extrêmement douée pour tout ce qui est pilotage, pourtant j’ai de bons réflexes alors autant les utiliser pour aller à la vitesse maximale sans me prendre un arbre. Parce que vu où j’en suis, que ce soit le début de ma vie de Chevalier ou bien tout ce que j’ai fait pour mener à bien cette mission, ce serait con que je me crash maintenant. Surtout avec toutes les rumeurs que j’ai entendues à propos des bestioles qui vivent dans cette forêt particulièrement dangereuse pour les Jedi. Et très vite, j’arrive vers l’endroit où j’avais senti les vibrations dans la Force pour la première fois lors de mon arrivée sur la planète. C’était difficile au début puisque la signature était faible, surtout une signature que je ne connais pas, et j’ai mis de nombreuses heures avant de déterminer l’endroit où cette personne pourrait se trouver. Surtout que le contrôleur de cette zone d’atterrissage n’avait pas l’air d’avoir vu de Jedi récemment, ce qui est étrange, puisqu’en général, notre présence n’est pas facile à ignorer, que ce soit à cause de nos armes si uniques et symboliques de notre Ordre que par les longues capes que nous portons en général pour se fondre dans la masse. C’est d’ailleurs l’une de ces capes que je porte actuellement, sauf qu’avec la vitesse, ma capuche brune est repoussée vers l’arrière, révélant mes cornes de Togruta. Avec mes traits violets et les bijoux qui en pendent, je dois bien faire tache en plein milieu de la forêt.

Plus je m’approche de l’endroit en question et plus je sens la présence d’animaux, ces fameuses bestioles ennemies des Jedi, les Vomskrs. Sauf qu’elles semblent… disparaître ? S’éteindre ? Je ne saurais dire et je décide d’arrêter mon speeder à cinq cents bons mètres de là histoire d’évaluer d’abord la situation. J’ai beau être rarement discrète à cause du moulin à paroles que j’ai à la place de la langue et de mes bijoux qui font parfois du bruit lorsque je me déplace trop brutalement, je sais pourtant rester tranquille quand il le faut. C’est une compétence qu’il a fallu que j’apprenne pour pouvoir surprendre les autres au Temple en essayant de leur faire peur. Mais cela remonte à bien longtemps la dernière fois que j’ai fait peur à quelqu’un de cette manière. Je pose pied à terre, cache mon speeder derrière un tronc renversé et replace ma capuche sur ma tête, mes cornes relevant le tissu comme si ma tête faisait trois fois la taille normale. J’ai toujours trouvé que j’ai l’air ridicule comme ça, mais les couleurs vives de mon corps se doivent parfois d’être cachées. À pas de loups, je m’approche de l’endroit d’où proviennent des grognements et le bruit typique d’un sabre laser en action. C’est à ce moment-là que je passe à côté de la carcasse de l’un des canidés noirs empalé sur un arbre. Plus loin se trouve un autre, tranché en deux et je fronce les sourcils ainsi que le nez. Je n’approuve pas de ces méthodes, tout être vivant devrait être respecté, sauf en cas de survie, ce qui est le cas ici. Pourtant je n’irai pas jusqu’à transformer de la self-défense en un spectacle macabre de ce genre.

Me glissant entre les arbres et écartant les feuilles des buissons sur mon chemin, je sens alors un mouvement brusque dans ma direction. Certains disent que je suis capable de sentir ces mouvements et les éviter grâce à mes réflexes, d’autres disent que je me sers de la Force pour le faire, d’autres encore pensent que mes cornes et lekkus permettent de ressentir les vibrations des choses les plus proches. Franchement, je ne me suis jamais vraiment posée la question. Rapidement je dégaine mon sabre jaune de la main droite, le plus long, mais pourtant pas assez long d’après certains standards Jedi. Ma lame dorée entre en contact avec celle bleue d’un Jedi encapuchonné et bien décidé à me tuer. Dans l’ombre produite par la frondaison des arbres, on dirait presque un Sith avec son visage masqué et sa détermination. Il y a tellement de haine en lui, que je recule d’un pas alors que la lumière dorée de mon sabre vient éclairer la partie basse de son visage. « Zane ? Chevalier Zane Loran ? Je suis Myra Tylanor, aussi Chevalier. Ma mission fut de vous trouver. » Autant mettre les choses à plat dès le début. Et puis peut-être qu’il se calmera un peu de la sorte ? Je garde néanmoins ma capuche pour l’instant. Pas que je n’aime pas ma race, au contraire même, j’en suis extrêmement fière, surtout fière qu’une nouvelle Togruta appartienne à l’Ordre et ai dépassé le rang de Padawan. C’est plus pour lui faire la surprise plus tard, bien que mes lekkus avant détruisent déjà ma couverture ainsi que la couleur de ma peau et les marques blanches sur mes bras. Mais bon, peut-être qu’il ne s’en est pas encore rendu compte ?

Nos deux lames s’entrecroisent, produisant les étincelles typiques d’un combat de sabres laser. Je sens toute sa haine, tout ces sentiments négatifs qui s’enchaînent et forment un tourbillon désastreux dans son esprit, le rapprochant de plus en plus du côté obscur. J’ai peur. Mais je n’ai pas peur de lui, j’ai peur pour lui. Mon côté maternel et le fait que je ferai tout sans hésiter pour aider mes semblables me pousse à continuer de le combattre. Je dois trouver un moyen de l’aider. Ce n’est que lorsque je me présente qu’il commence à faiblir, comme si m’a voix était parvenue à toucher la part de bonté en lui, la part lumineuse. Il recule alors que ses traits s’apaisent malgré l’obscurité qui les cache partiellement. Je sais en cet instant que j’ai réussi à l’atteindre, qu’il y a une chance et que je suis en train de le ramener. Du moins, j’ai fait le premier pas. Mais en même temps, c’était comme s’il était soudain pris d’une crise de je ne sais quoi, comme s’il était en train de lutter intérieurement contre les ennemis dans sa tête. Je ne peux rien faire pour lui pendant qu’il affronte ses chimères, malheureusement. Tout ce que je peux faire c’est l’empêcher de me faire du mal ou bien de s’en faire à lui-même. Il tombe à genoux avec un bruit sourd, son sabre glissant de ses mains lorsqu’il porte ses dernières à sa tête comme pour l’empêcher d’exploser. Il tremble de partout et je me mords les lèvres en détournant légèrement le regard. Je déteste voir les autres souffrir et encore plus lorsque je ne peux absolument rien faire pour les aider. Alors en attendant qu’il se bat conte peu importe ce qui ou quoi l’agresse, je range mon sabre doré et récupère le sien, le gardant précieusement jusqu’à ce qu’il revienne.

Pendant quelques instants, il semble être complètement ailleurs. Ses yeux injectés de sang voient pourtant ils sont aveugles, du moins à ma présence et à l’environnement qui l’entoure et ils finissent par se fermer. Il est certainement en train d’avoir une vision, le genre de visions que la Force nous fait expérimenter pour diverses raisons, bien souvent pour nous préparer pour le futur, cependant cela peut aussi être une partie du passé qui nous est révélée ou bien rappelée. Je ne sais ce qu’il voit, mais cela n’a pas l’air d’être agréable. Au bout d’un moment pourtant, je fini par me lasser et vu qu’il n’ira nulle part dans cette condition, je m’assois sur le sol, l’observant silencieusement, le menton placé dans ma main. Après de longues minutes qui me semblent être une éternité, il finit par pousser un grognement et fronce les sourcils, ce qui me fait me lever. Gardant tout de même un bon mètre de sécurité au cas où ça lui prendrait de vouloir m’étrangler ou me sauter dessus, je le regarde se redresser. Toute trace de colère et de haine semble avoir disparu et maintenant il ressemble enfin à un Chevalier Jedi tout à fait normal. Il se relève alors sans me quitter des yeux et je lui lance un petit sourire avant qu’il ne prenne la parole pour la première fois. Il fait au moins une tête de plus que moi, mais bon, je suis habituée à mon mètre cinquante-cinq. Une fois qu’il s’est présenté, je fronce mes marques blanches faisant office de sourcils. Comment ça la mission devra attendre ? Qu’est-ce qu’il veut dire par là ? Son changement m’étonne grandement. Il place sa main sur mon épaule et ses paroles me font autant trembler que son regard de glace. Il est toujours aussi froid et distant ?

Une fois qu’il a fini de parler, je place ma main gauche sur celle qu’il a posée sur mon épaule et lui sourit. « Relax Zane, je vais t’aider. Ma mission est de te trouver et de te ramener à Ondéron, mais personne n’a dit que je ne pouvais pas me perdre un peu en chemin. » J’ajoute un clin d’œil alors que je retire doucement sa main. Je lui redonne ensuite son sabre laser et enlève ma capuche, soupirant d’aise lorsque le tissu n’est plus sur mes montrals. « Et le Conseil est particulièrement furieux et inquiet, t’auras des explications à fournir en rentrant ! Sinon, tu as un plan, j’imagine ? Parce que je dois t’avouer que là tout de suite, en pleine forêt m’étant complètement inconnue, je ne sais pas par où aller pour trouver cet… peu importe ce que tu cherches à retrouver. Et puis si ça permet de te sauver, allons-y ! » Je n’ai pas envie de le voir souffrir de nouveau et il est temps de régler cette histoire une bonne fois pour toute avant qu’une « crise » pareille ne se reproduise. Et puis je ne peux pas résister à l’appel d’aide de l’un de mes semblables, c’est juste plus fort que moi. D’un côté c’est mon côté sensible et de l’autre c’est mon côté maternel, faut pas chercher plus loin. Et puis il n’a pas non plus l’air d’être le genre à se laisser facilement mener, y’a qu’à voir son regard qui fait littéralement froid dans le dos. Mais au moins, il n’est pas entièrement insensible, j’en ai eu la preuve il y a quelques instants. Et cela va rendre mon boulot nettement plus simple que si le mec était qu’une armoire à glace dénuée de sentiments. Surtout que sans lui, je ne peux pas compléter ma mission, alors autant l’accompagner là où il veut que je l’accompagne. Glissant rapidement ma main sur son épaule, j’ajoute « T’inquiète pas, je promets de garder un œil sur toi jusqu’à te ramener au bercail en un seul morceau. Mais il serait peut-être temps qu’on bouge, parce que je n’ai pas spécialement envie de tomber sur d’autres de ces bestioles. » J’indique les cadavres au sol d’un hochement de tête avant de retirer ma main, attendant qu’il donne la direction.

Je ne peux que rigoler lorsqu’il m’annonce fièrement qu’il a deviné ma race. Il est vrai que ce n’est pas évident parfois et pourtant son enthousiasme et sa joie me font plaisir. Cela fait un sacré contraste avec l’espèce de monstre qu’il était quelques instants plus tôt et je suis ravie de voir qu’il possède aussi ce côté amical. Cela signifie que tout n’est pas perdu, d’ailleurs je n’ai jamais pensé que tout est perdu, car il reste toujours de l’espoir quelque part. Mais je ne peux retenir mon rire clair et léger, comme un carillon, s’échapper de mes lèvres foncées. Je rejette légèrement la tête en arrière durant ces cours instants d’amusement, la tresse de perles glissant le long de ma joue droite se balançant avec mon mouvement. Je finis pourtant par reprendre mon sérieux au bout d’un court moment. « Tu m’as l’air d’être un connaisseur en Togrutas dis donc ! On pourrait avoir des conversations sympa là-dessus, mais plus tard. Et j’imagine que tu n’as pas du en rencontrer beaucoup avec des couleurs aussi chatoyantes ! » Je dois avouer que je compense largement la pâleur de ma peau par ces couleurs vives dont j’ai toujours été fière. La plupart de mes congénères Shiliens ont la peau orange ou rouge foncée, bien plus foncée que moi. Leurs lekkus sont d’ailleurs bien plus adaptés au camouflage, tirant souvent dans les tons bleus, gris ou rouge pâle. Mais bon, j’ai toujours fait dans la différence et je préfère être un perroquet dans un océan de moineaux.

Je ne peux que me sentir honorée lorsqu’il enlève brièvement sa capuche. Je suis le genre de personne à ne pas trop aimer me cacher sous une quelconque cape, mais je sais que c’est le refuge de beaucoup de Jedi, surtout ceux au passé obscur ou bien ceux qui arborent des cicatrices particulièrement voyantes. Il semble appartenir à ces deux catégories. Il existe de nombreuses façons de prouver son respect entre Jedi, notamment le fait de s’incliner devant un Maître par exemple, mais je trouve que notre échange de révélation de visages correspond aussi à ce genre de situation et je suis contente qu’il m’ait montré son visage, ne serait-ce qu’une fois. Je ne proteste pas lorsqu’il remet en place sa capuche, je n’aime pas juger les autres, surtout pour tout ce qui touche au physique.

Il m’annonce ensuite son plan ou plutôt son absence de plan ce qui me fait froncer mes pseudos-sourcils. Mais plus il développe son explication, plus je me calme. Bon, pas de véritable prévision, mais au moins, le but est bien clair et c’est l’essentiel. J’ai tendance à croire de nombreuses fois que la Force agit sur les choses, mais j’ai aussi légèrement tendance à croire que l’on peut pousser la Force à intervenir. Mais bon, ce genre de discussion tombe plutôt dans la philosophie ou bien c’est une question de principes et je ne suis pas venue sur Myrkr pour discuter de ça, même si je suis certaine que cela pourrait donner de grands débats au sein du Conseil. Conseil avec lequel Zane n’a pas l’air d’être en grande harmonie. Il est vrai que j’ai déjà vu des Jedi désobéir au Conseil, après tout ce dernier ne peut pas avoir la science infuse, et puis cela ne concerne que Zane et le Conseil, je ne vais pas me mêler de cette histoire. Une fois que ma mission sera complétée et que j’aurai fait mon rapport, ce sera tout, mais il est vrai qu’un lien avec Zane se sera certainement tissé et ce n’est pas pour me déplaire.

Ce n’est que lorsqu’il commence à mentionner les différentes bestioles de cette planète que je me rends compte qu’il a raison : je ne ressens plus la Force autour de moi. Je ne pensais pas que ça pourrait être un sentiment si désagréable. Je peux toujours sentir les vibrations autour de moi grâce à mes montrals, mais le reste m’est inconnu et je n’aime pas cette sensation. Mais cela pourrait s’avérer un bon entraînement, certes dangereux, mais tout de même : d’un côté les Vornskrs qui sont particulièrement friands des utilisateurs de la Force et de l’autre les Ysalamaris qui coupent carrément tout lien avec la Force. C’est donc avec plaisir que je hoche la tête lorsqu’il mentionne mon speeder. « Tu as raison, ne restons pas là. » Je lui indique de me suivre et je refais le chemin inverse que j’ai pris pour le trouver. Cinq cent mètres plus loin, je retrouve mon speeder, caché derrière un tronc couché. Je grimpe dessus et l’invite à monter derrière moi. Premièrement, parce que c’est mon speeder et deuxièmement parce que je prends nettement moins de place, dans le sens où je suis bien plus petite que lui. Et suffisamment grande pour atteindre les pédales, alors tout va bien. Une fois qu’il est monté, je rallume le moteur et vérifie que Zane est bien accroché pour pas qu’il s’envole avec la vitesse de l’engin. Glissant à travers la forêt, je m’éloigne de l’endroit du carnage, jusqu’à sentir de nouveau la Force. « Alors, où est-ce qu’elle te dit d’aller la Force maintenant ? »

Alors que nous sortons progressivement de la zone où la Force est bloquée, je continue d’augmenter la vitesse, souhaitant sortir de ce piège mortel le plus rapidement possible. C’est ma première mission en tant que Chevalier Jedi, je n’ai pas l’intention d’en faire aussi la dernière. Zane est bien accroché derrière moi et je le sens puiser dans la Force avant qu’on arrive dans une clairière où l’espace est bien dégagé. Comme un signe, Zane me dit de m’arrêter à cet endroit-là et je m’exécute, ralentissant progressivement jusqu’à atteindre l’arrêt complet et de stopper le moteur. Il descend et je fais de même quelques secondes plus tard. « Ça marche. » Je réponds simplement à son conseil. Il est vrai que me poser un peu ne me fera pas de mal, surtout que je n’ai pas pris une seule minute pour me reposer depuis que j’ai quitté le temple sur Ondéron. Passer par Ilum n’a pas été simple et tous ces voyages enchaînés m’ont quand même bien fatiguée, si ce n’est l’esprit c’est déjà le corps. Je m’installe en face de Zane dans l’herbe drue, tout d’abord en tailleur comme lui, ne sachant pas vraiment quoi faire alors qu’il médite. Je ne me sens pas vraiment d’humeur à méditer alors je me mets à observer la vie tout autour. Tout d’abord les insectes qui volent, le cri d’un oiseau lointain me parvient ensuite, mais toujours aucune trace de Vronskrs ce qui n’est pas plus mal. Ce n’est pas pour tuer les bestioles de ce genre que j’ai développé le pouvoir de les comprendre. Dans ce genre de situation lorsque tout ce qu’il reste à faire c’est d’attendre, il faut que je me trouve quelque chose à faire, sinon je vais finir par devenir folle. Alors je me mets à observer les nuages en m’allongeant sur le sol. La diversité de toutes les planètes de notre galaxie offre de nombreuses possibilités pour l’observation du ciel autant le jour que la nuit. Admirer les formes des différents nuages et essayer de leur donner une histoire fut toujours l’une de mes choses favorites à faire depuis toute petite. Je me souviens avoir remarqué que sur Shili les nuages prennent plutôt la forme d’animaux alors que sur Ondéron ce sont des personnages de différentes races et statuts. Ici sur Myrkr, c’est un peu un mélange des deux, voir même carrément axé sur la flore.

Et c’est là que je sens que Zane recommence à trembler et à transpirer, mais avant que je n’ai le temps de faire ou de réfléchir à quoi que ce soit, il s’approche de moi, s’assois à ma gauche et pose sa main droite sur la mienne. Et c’est lorsque nos peaux entrent en contact que je perçois sa vision comme si elle était mienne. Je vois tout ce qu’il est en train de voir, le Conseil, leurs commentaires, un autel avec des colonnes autour… Toutes les images s’accélèrent alors que je fronce mes pseudo-sourcils, ne voulant pas fouler un territoire qui n’est pas le mien, ne voulant pas partager ses souvenirs alors qu’il ne se rend certainement pas compte de ce qu’il fait. Mais aussi vite que tout a commencé, tout s’arrête et j’ouvre brutalement les yeux. Rien n’a changé, tout est là dans la clairière, les herbes autour de nous, le speeder non loin, la souche d’un arbre coupé il y a longtemps… Seul Zane a changé de place et il s’en rend compte au moment où lui aussi ouvre les yeux. Sa voix me parvient, teintée de honte et je soupire en retirant le plus doucement possible ma main. « Oui, j’ai tout vu. C’était comme si tu voulais que je vois. La partie avec l’artefact était utile, mais ton souvenir devrait rester le tien et seulement le tien. » Je ne me lance pas plus sur le sujet, devinant que c’est certainement un sujet sensible. Je suis encore trop jeune et inexpérimentée pour prendre un Padawan, mais il est vrai que si l’occasion se présente un jour, je souhaiterai bien transmettre mes connaissances à un élève. Je n’arrive pas à imaginer ce que ça doit être que de se voir ce droit, ce privilège, refusé. Si Zane veut en parler, je suis toute ouïe, mais il ne m’a pas l’air d’être le genre de gars à partager la moindre de ses pensées et états d’esprit.

Je me mets ensuite debout, enlève la poussière de mes vêtements d’un geste rapide et plonge ensuite mon regard dans celui de mon partenaire du moment. « J’ai bien vu à quoi ressemble cet autel et je pense aussi qu’il se trouve sur cette planète, mais je ne saurai dire où il se trouve précisément. En speeder quand je suis passée avant de te trouver, je n’ai rien vu de tel. Mais quelque chose me dit que tu as déjà une idée derrière la tête, je me trompe ? » Y’a qu’à voir son regard, il est peut-être généralement dénué d’expression, distant et glacial, ce qui en rajoute une couche à tout son mystère lugubre qui l’entoure avec sa capuche rabaissée, mais il est loin d’être stupide. Ça m’a l’air d’être dangereux ce que l’on s’apprête à accomplir et c’est peut-être un piège, mais je ne vais pas attendre pour le découvrir. Je remonte sur le speeder, prête à rallumer le moteur dès qu’il sera prêt à partir. Pour l’instant, à part garder un œil sur lui s’il replonger de nouveau dans cet état de souvenirs ou bien de colère, je ne peux pas faire grand-chose, c’est lui qui indique le chemin. Mais après tout, c’est lui qui veut absolument retrouver cet objet, alors pour l’instant, je me contente de le suivre. Parce que je lui ai promis que je l’aiderai et je ne compte pas rompre ma promesse et ensuite parce que le ramener en un seul morceau fait partie de ma mission à laquelle je ne compte pas faillir. Pas comme à Coruscant il y a déjà plus de six ans.

Je ne dis rien lorsqu’il me fait son speech sur son passé, l’écoutant avec attention et surveillant le moindre changement d’émotion sur son visage, observant ses gestes, essayant d’analyser son comportement. Mais après quelques secondes je me détends lorsque je me rends compte qu’il n’est pas sur le point de retourner dans une explosion de colère comme certainement ce qui l’a poussé à tuer avec autant de morbidité et cruauté cette meute de Vronskrs. Je finis par hocher la tête à ses paroles et attends qu’il me rejoigne sur le speeder. Ce n’est que lorsque le moteur fonctionne de nouveau et que nous filons vers la ville, là où l’objet se trouve d’après lui. Ce n’est qu’en zigzaguant entre les arbres, les ronflements du moteur noyant ma tête, mon regard concentré sur la route et les sentiers devant nous, que je prends la parole. « Si tu veux que je connaisse ton passé, viens m’en parler au lieu de me montrer des souvenirs. Je maintiens que les souvenirs doivent rester de l’ordre du privé, mais je n’ai rien contre un résumé de ces dits souvenirs. Je serai là pour t’écouter si tu en as besoin ou envie. » Je me mords ensuite les lèvres, mes petites dents blanches et pointues se détachant un instant sur le rouge foncé, presque pourpre de ma bouche. « J’ai déjà entendu parler du Chevalier Loran, mais ce que pensent et disent les autres ne m’intéresse pas. Je tiens à me faire mon propre avis sur la personne. C’est comme avec l’apparence physique, je me fiche royalement de ce que les autres peuvent penser, sinon je ne porterai jamais ma tenue que certains Jedi trouvent vulgaire et provocante. » Je ne sais s’il m’a entendue avec le bruit du moteur, mais je ne compte pas me répéter.

Nous arrivons enfin dans la ville et j’arrête le speeder que je gare sur le côté, un peu à l’extérieur de la ville. Je remets ma capuche et suis Zane à travers les différentes ruelles. Une odeur vient pourtant très vite me chatouiller les narines et je m’arrête auprès de mon compagnon. « Partir à la recherche de cet objet est une chose, se laisser crever de faim en est une autre. Je ne sais pas toi, mais moi j’ai la dalle ! Ça fait un moment que je n’ai pas mangé. » Depuis que je suis partie d’Ondéron en fait, même lors de mon passage sur Ilum je n’ai rien bu ni mangé donc ça commence à faire pas mal d’heures. Je donne un coup de coude joueur à Zane. « Allez viens, c’est moi qui régale ! » Je sors quelques crédits de ma poche et m’achète une brochette de je ne sais trop quelle viande ainsi que quelques fruits et une bouteille d’eau. Puis j’attends que Zane choisisse et je paie pour nous deux. Je mange tout en marchant, c’est tout de même un sacré changement par rapport à la nourriture du réfectoire au temple d’Ondéron.

Je suis contente que Zane accepte ma proposition de se remplir l’estomac. Il est vrai que sinon nous ne tiendrons pas longtemps, surtout qu’il a l’air de ne pas avoir mangé depuis pas mal de temps, peut-être aussi longtemps que moi. Je souris face à son enthousiasme et essaie de me creuser la tête pour répondre à sa question. « Aucune idée, je demanderai au cuisiner la prochaine fois, mais c’est sûr que ça nous ferait un sacré bon changement ! » J’en dirai peut-être deux mots aux autres Jedi, ce serait cool si on pouvait varier au moins un peu la nourriture, surtout que je suis sûre qu’on aurait de quoi varier à Ondéron. Nous prenons ensuite place dans un petit bar et je ne refuse pas la liqueur que commande Zane. C’est réglo, j’ai payé la bouffe, il paie la boisson. On forme une bonne équipe jusque-là, mais c’est pas vraiment sur de la nourriture que l’on va voir si notre duo fonctionne du tonnerre ou pas. Et là vient la question fatidique qui vient tout de suite me replonger dans le passé. C’est vrai que la balance des connaissances que l’un a à propos de l’autre n’est pas équilibrée, j’en sais bien plus sur lui qu’il n’en sait sur moi. Je me rends compte que je me suis bien calmée depuis que je suis devenue Chevalier, avant j’aurai immédiatement enclenché mon moulin à paroles. Je prends une petite gorgée de ma liqueur lorsqu’elle nous est servie avant de passer une main rapide sur mon lekku gauche, j’ai enlevé ma capuche en entrant dans le bar, par pur respect, on m’a toujours dit d’enlever ce que j’ai sur la tête quand j’entre dans un bâtiment.

« Et bien, officiellement, je suis devenue Chevalier il y a une semaine, peut-être un peu plus. Sinon, j’ai quitté Shili quand j’avais quatre ans. Depuis, je n’ai eu aucun contact avec mes parents. Pendant longtemps je n’ai pas cherché à les recontacter, mais lorsque je m’y suis enfin décidée, je n’ai pas réussi à les revoir. » Je fais taire cette note mélancolique sur la fin de ma phrase en reprenant de plus belle sur un ton plus enjoué. « Je suis devenue Padawan quand j’avais onze ans. Je n’ai pas eu beaucoup d’aventures en dehors du Temple, j’ai passé beaucoup de temps à m’entraîner, surtout pour maîtriser le Jar’Kai, même s’il m’est arrivé d’aller à Coruscant, Naboo ou autre. Je ne sais pas si tu faisais attention à ce qui se disait dans les couloirs, mais on me faisait souvent référence en tant que moulin à parole et j’étais aussi connue pour avoir toutes sortes d’idées à la con. » Je baisse légèrement les yeux en laissant échapper un rire clair, oui, j’en ai fait des conneries en étant Padawan, mais je ne regrette rien. Je reprends une nouvelle gorgée alors que je sens la température monter légèrement. Peut-être est-ce dû à l’alcool ou au fait que nous sommes en intérieur, mais j’ai souvent du mal à supporter ce genre de cape, voilà pourquoi je l’enlève habituellement en entrant quelque part, sauf que ça permet généralement de cacher mes sabres laser et je n’ai pas particulièrement envie d’attirer plus l’attention qu’avec mes montrals chatoyants. Surtout que je ne vois d’autre Togruta nulle part. Mais Zane a l’air d’être préoccupé par autre chose, une personne derrière moi et pour ne pas sonner l’alerte je ne me retourne pas. « Qu’est-ce qu’il y a ? » Je préfère demander avant.