Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
Le petit claquement sec, aussi anodin que discret, d'une pochette plastifiée qui se referme avait pourtant l'honneur de signer la fin de mission de Yun et de Luke. Tous deux venaient de rendre le dossier, copié et compilé en archive holographique-sous forme de témoignage-. Malgré son côté procédurier, le jeune homme avait dû redoubler d'attention pour ne pas faire d'erreur dans les envois tant il était fatigué. Il faut dire que les deux nouveaux collègues avaient eu une grosse journée, sans compter les questions qui continuaient d'affluer dans la tête parfois un peu trop pensante du blond. Difficile pour lui de se dépêtrer des noms des fautives. C'était un véritable mêli melo dramatique qui se jouait dans son cerveau, présentement farouchement opposé à sa mémoire. En effet, si Ysanne lui était logiquement plus familière, l'aura de l'autre lui semblait plus parlante, et dire que c'était une illustre inconnue pour lui, contrairement à la Padawan traîtresse qui avait quitté le Temple.

Enfin bon, quand Luke aurait accès à son ordinateur, spécialement conçu pour lui, il pourrait vérifier tout cela. Craignant et espérant ce moment à la fois, le jeune homme consentit à fermer un peu les yeux dans le navette qui les ramenaient sur Ondéron. Cependant, le voyage fut bien plus bref que prévu, à moins qu'il ne se soit endormi trop tard... Toujours est-il qu'il n'avait pas pu réellement se reposer, mais qu'importe, les voilà arrivés chez eux. Une bouffée de satisfaction et de reconnaissance envahirent le Hapien qui transmit sa sensation à Yun via la Force. Que c'était bon d'avoir un chez-eux accueillant, d'autant plus rempli d'une famille bienveillante que l'ex-Sith n'avait sans doute jamais espéré avoir jadis. Particulièrement satisfait, le Chevalier parvint à évinscer un peu les éternelles auto-critiques qui le taraudaient concernant la mission, bien qu'ils l'aient rempli d'ailleurs. Il savoura les odeurs du parc que son nez entraîné parvenait à distinguer avec plus de finesses que les autres humains. D'un pas digne, supposant que Yun le suivait, le jeune homme résista au désir de s'enfermer dans sa chambre pour dormir. Néanmoins, le Conseil était occupé à recevoir d'autres revenants de Coruscant ou encore d'Argauu, il était impensable de s'y rendre pour donner une version détaillée de leur étrange mission, oui, encore une fois. Du coup, il ne restait plus qu'à trouver un bon endroit pour se reposer mais aussi, mine de rien, faire un debrieffing. Yun savait déjà que Luke était content de lui, d'ailleurs, le blond estimait même que c'était lui qui avait réellement dénoué l'affaire. Du coup, il n'avait plus grand chose à dire à ce propos, mais mieux valait rester accessible au cas où si le nouveau Padawan de Saï Don avait des questions. Sans compter que le Hapien sentait inconsciemment qu'ils avaient bien des choses à se dire. Mais par quoi commencer ? Ni lui ni l'ancien Siths ne semblaient bavards, et bien que la mission les aient indubitablement rapprochés -tout du moins, seon Luke.- cela ne les rendait pas plus loquaces pour autant.

Décidé à faire le premier pas, le Chevalier s'inspira des apprentis courant dans les couloirs pour trouver un échappatoire. La cantine. C'était un excellent moyen de se ravitailler tout en se détendant un peu, histoire de parler dans un lieu moins formel. Bon, Luke ne se reposait pas vraiment dans un tel lieu étant donné son handicap, mais il savait le mérite psychologique qu'avait un bon repas pour délier les langues, même la sienne d'ailleurs. Il se souvenait avoir réussi à vaincre sa timidité, plus jeune, face aux autres grâce aux conversations offertes sur un plateau -littéralement.- Proposer une pomme à son copain de table, entamer un discours sur la Force-qui faisait inexplicablement fuir ses camarades au bout du deuxième paragraphe...- commenter les devoirs. Bref, cet endroit était parfait également pour effacer la barrière qui subsistait encore entre Yun et lui, même si contrairement à d'autres Chevaliers entêtés, Luke ne forcerait pas son cadet à le tutoyer. Il n'aimait pas spécialement l'idée d'être pris pour un "mentor" -surtout qu'il estimait n'avoir que peu servi durant la mission- mais aimant également l'ordre et le respect de la hierarchie, il savait que cela pouvait rassurer l'Epicentrix. Néanmoins, ça ne les empêchait effectivement pas de se rapprocher, enfin, si le géant brûlé était d'accord.

-Allons manger un peu, veux-tu ?

Proposa le Hapien en signalant la cantine du bout d'un menton qui indiquait plutôt le mur à côté de la porte, tout en restant compréhensible. C'était sa façon de se rendre accessible, de s'ouvrir à Yun.

-Alors, qu'as-tu pensé de cette mission ?

Commença tranquillement Luke, choisissant une question générale qui lui permettrait d'aiguiller ses prochaines interrogations. Tout en sachant que le jeune homme n'était pas non plus en train de tester son cadet. C'était le Padawan de Saï, pas le sien. En réalité, derrière cette formalité aimable se cachait surtout un sincère intérêt pour Yun, ainsi que de la curiosité. En effet, derrière ses airs distants, le Hapien avait toujours été curieux, ayant un grand penchant pour les histoires... Un détail que Maître Don avait su exploiter à l'époque et qui n'avait jamais vraiment disparu, bien que le blond soit élitiste et se rapproche surtout des gens qui en valaient réellement la peine.

Yun le comprendrait-il ? Tendrait-il la main vers cette opportunité à double-tranchant -car Luke accepterait aussi de se dévoiler, c'était les règles du jeu?-. Déciderait-il d'entrer dans cette cantine ? Avait-il seulement assez "faim" pour ça.
Invité
Anonymous
Enfin. Voilà le seul mot qui résonnait dans la tête de Yun quand ce dernier posa le pied sur la navette censée le ramener vers Ondéron. Il en avait soupé d’Arkania et de son climat polaire, mais aussi et surtout de ces réunions ridicules que lui et le Chevalier Kayan avaient dû endurer après avoir mis en fuite les agitatrices auxquelles ils avaient été confrontés.

Les policiers envoyés pour les suivre avaient été retrouvés plusieurs heures après leur départ assommés avec leurs propres armes, mais aucun départ suspect n’avait été signalé à l’astroport local. Il paraissait évident que ces deux-là devaient s’être réfugiées chez un complice, mais les jedis avaient dû laisser l’enquête aux locaux afin de… s’occuper de paperasses. Encore. A croire que l’Ordre était là pour servir d’oreilles attentives à toutes les organisations les plus bornées de la République, tellement incapables de s’entendre qu’il fallait une association tierce pour les forcer à poser leurs derrières respectifs sur une chaise pour entendre les arguments des uns et des autres… Mais sinon, pas d’inquiétude, les choses reprenaient leur cours, les politiciens étaient toujours aussi incompétents, et le Temple vilipendé. La routine aurait dit l’épicanthix. Au moins le gouvernement arkanien avait eu la décence de les remercier pour leur efficacité, l’officiel qu’ils avaient protégé leur promettant une décoration dont les deux hommes n’avaient sans doute que faire, et promettant de les aider si d’aventures ils en avaient besoin. Sauf que les promesses n’engageaient que ceux qui y croyaient, et le padawan n’était pas vraiment d’un naturel très confiant : pour lui, sitôt la crise passée, ce politicard comme les autres aurait tôt fait de leur tourner le dos et d’oublier qu’il était à deux doigts de se faire dessus quelques heures auparavant.

Autant dire que son apport lors de la réunion qui avait suivie s’était borné au strict minimum. Par honnêteté, il avait tenu à rapporter les griefs de la population, et point final. De toute façon, au vu des regards mi- dégoûtés, mi- fascinés que lui avaient lancé les personnes présentes, le jeune homme n’avait eu qu’une envie : en finir au plus vite et quitter cet endroit dès qu’il le pourrait. Globalement, c’était Luke qui avait fait l’essentiel de leur travail à partir de l’instant où les deux siths avaient déguerpi, le colosse retrouvant ce qu’il préférait le plus : le silence.

L’heure de la délivrance avait fini par venir et avec un léger soupir de soulagement, Yun se cala sur le siège qui lui était réservé dans la navette, laissant Luke rédiger leur rapport pendant qu’il fermait les yeux et se laissait aller à un petit somme réparateur. L’ancien apprenti estimait qu’il avait bien mérité quelques heures de repos après toutes ces péripéties.

Quand il rouvrit les yeux, l’épicanthix se rendit compte qu’il avait dormi comme une masse pendant tout le trajet, et que la jungle d’Ondéron s’étendait sous ses yeux, comme il venait de se réveiller quelques minutes seulement avant l’atterissage. Et enfin, le Chevalier Kayan et lui-même purent se dégourdir les jambes sur le tarmac du hangar jedi. Ils étaient de retour chez eux.

Cette impression de familiarité retrouvée ne cessait d’étonner Yun. Déjà, il s’était fait la même réflexion à son retour de Lorrd, ce sentiment de joie simple à revoir les murs blancs du Temple le laissant un peu pantois. C’était une nouveauté pour lui : jamais il n’avait eu l’impression de revenir chez lui en voyant les dunes poussiéreuses de Korriban ou les glaces de Ziost. Peut-être parce qu’il n’avait pas choisi d’aller dans ces deux endroits, qu’il ne s’y sentait pas lié par une sorte de serment personnel. Ce lieu représentait sa nouvelle vie, celle qu’il avait empruntée de son plein gré, et dont il était fier.

Laissant le Chevalier Kayan entamer les procédures de retour de mission, il attendit sagement à ses côtés que ce dernier finisse, puis le suivit sans mot dire à travers les couloirs du Temple, contemplant avec un sentiment de profond apaisement les portes familières, les jedis en bures ou en tenues plus spéciales qui déambulaient, seuls ou en groupe… Il adorait surtout la lumière qui venait éclairer l’édifice quand la nuit tombait, car elle était douce, sans ostentation, presque comme si l’Ordre voulait donner une impression de naturel à ce qui ne l’était pas.

Soudain, l’hapien s’arrêta, et Yun manqua trébucher pour faire de même éviter et éviter de lui rentrer dedans. Il ne donnait pas cher de la peau du frêle Chevalier si ce dernier recevait son imposante masse de muscles sur la figure. Sa proposition le surprit un peu, mais le grondement de son estomac lui rappela à cet instant précis qu’un repas ne serait pas de trop pour apaiser sa faim, aussi il acquiesça et répondit simplement, d’une voix rauque à cause du long moment passé sans parler :

« Comme vous voulez. »

Lui tenant la porte, il laissa entrer l’aveugle puis s’avança à sa suite. Ses yeux balayant le self, il faisait la liste mentale de ce qu’il désirait commander quand une nouvelle question le sortit de sa plaisante contemplation gourmande. Alors qu’il mettait distraitement un second petit pain sur son plateau, Yun répondit dans un grognement peu amène :

« J’en pense que j’espère ne plus jamais avoir à remettre les pieds sur cette planète. »

Yun, la délicatesse même… Sentant qu’il avait peut-être été un peu trop franc sur ce coup-là, et tout en se servant une portion généreuse de viande, il ajouta :

« Ne vous méprenez pas… J’ai accompli ce que Maître Don attendait de moi… Mais la République devrait se débrouiller seule pour résoudre ce genre de problèmes politiques, ou s’en prendre à ses dirigeants.

Garder des bâtiments ? Pourquoi pas. Devoir jouer les nounous de la Force pour éviter qu’un peuple n’étripe ses dirigeants atteints de surdité ? Non. »


Après avoir complété son assiette avec des légumes connus pour leur apport nutritif, il conclut :

« Navré pour ma franchise. Ce n’est sans doute pas la réponse que vous attendiez. »
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
La réplique de Yun claqua dans l'air, catégorique. Contrairement à ce que l'on pourrait s'attendre du dévoué Luke, il ne s'en irrita pas. En fait, la franchise et l'énergie de l'Epicantrix eurent même le mérite de lui arracher un de ses rares sourires. Encore une fois, les gens avaient tendance à lui prêter un tempérament antisocial ou blasé, ce qui les poussaient à craindre ses réactions, prendre des gants ou simplement l'éviter. Pourtant, on lui avait aussi enseigné à aimer autrui. Luke était donc timide tout en restant ouvert d'esprit, un minimum lorsqu'on avait un penchant pour la philosophie comme lui. Ses réactions toutes calculées, sa gestuelle digne, son vocabulaire châtié qui tendaient à prédominer sur sa spontanéité étaient dûes à lla tempérance, un des piliers de son éducation.

Loin d'oublier cependant une prime jeunesse bien proche du présent, le jeune homme se souvenait avoir eu une époque de rébellion où il avait dévoilé -enfin- à Saï un certain caractère. Trop docile auparavant, le Hapien n'avait étonamment pas échappé à l'adolescence, se montrant rebelle quoique vu son niveau très léger, tout restait relatif comparé à d'autres. C'était le dos bien droit, avec un soupir timide et des arguments posés que Luke avait tenté d'échapper à la voie des Diplomates qui lui semblait alors aussi inutile qu'hypocrite. Il s'était insurgé avec douceur, patience mais entêtement contre les galas et autres mondainités où un Jedi n'avait absolument aucune raison d'être, sans compter la prise de parti que leur Ordre dénonçait normalement.

-Au contraire, je préfère l'honnêteté à l'hypocrisie, de plus je te comprends. A moi aussi, ce genre d'interventions me paraissais surréaliste et contraire à notre code de surcroît, sachant que nous sommes sensés rester neutre. Pour autant, j'ai appris avec le temps que si les lignes de la théorie sont nettes, celles de la théorie sont plus floues. Derrière cette diplomatie d'apparence ennuyeuse, nous permettons à ceux qui doivent agir de le faire. Sans compter que parfois, ce travail de fond qui permet de désamorcer une "bombe" avant même de dégainer les armes, ce qui rentre complètement dans nos idéaux en revanche.

Expliqua patiemment le Hapien, pas certain que son cadet saisisse du premier coup mais comptant cependant sur le temps. Du moment que la leçon soit intégrée, bien que cela doive être dans plusieurs années, elle valait la peine. Tâchant toutefois de retenir sa langue car il connaissait sa tendance à s'emporter quand on parlait des idéaux Jedi ou de la Force, Luke avait essayé de bien résumer. Le vrai maître de Yun était justement Saï Don, et il ne voulait pas donner l'impression d'être un de ces supérieurs rébarbatif, là n'était pas son rôle.

-Si tu as des questions ou d'autres remarques, n'hésite jamais -L'encouragea d'ailleurs le blond avant de lui-même poser une questions qui l'intéressait au plus haut point.-Et comment va ta formation ?

Le Hapien était très curieux quant à la réponse de l'Epicantrix. Il soupçonnait que Saï s'en "voulait" de ne pas avoir pu l'emmener d'avantage sur le terrain, tant à cause de son emploi surchargé que son âge -bien que celui-ci ne semblait pas l'affecter.-. Surtout que d'après ce qu'il savait -il s'était quand même renseigné un minimum- Yun était un apprenti à forte carrure et plus porté sur le physique que la diplomatie, d'ailleurs ses paroles venaient de le prouver. Un futur Jedi gardien au caractère presque totalement contraire à celui de Luke. Une expérience passionnante mais certainement épuisante. Pour sa part, le Hapien avait très envie de connaître l'ex-Sith dont il admirait la reconvertion. Concernant d'autres repentis, il ne savait pas comment il réagirait, surtout si ces derniers avaient déjà commis d'énormes crimes, seulement l'histoire de Yun était différente, il n'avait jamais eu le choix, mal né. C'était une sorte d'enlèvement, le sort s'était acharné sur lui et il avait décidé de changer son destin, c'était formidable, et lui-même ignorant le courage qui le caractérisait-et dont il avait eu l'occasion de faire preuve lors de son enlèvement- se demandait ce qu'il en aurait été de lui si la vie l'avait autant maltraité. Certes, sa mère l'avait rendu aveugle à force de lui taper dessus, mais ça n'avait rien à voir avec la pression de la Force Obscure, aussi physique que psychologique. Pas moyen ou si peu de s'échapper. Un constat qui rendait l'acte de bravoure de Yun encore plus respectable. Pourquoi donc les autres refusaient de l'intégrer totalement ? Risquant de nourrir d'avantage sa bête sombre au lieu de l'éliminer totalement ? De ce côté là, le Chevalier était déçu par les commentaires de couloir de certains. Sa tempérance l'avait poussé à ne pas réagir mais il avait plus d'une fois eu envie de leur sauter dessus pour leur rappeler que Saï savait parfaitement ce qu'il faisait. Une trace de cette ancienne impétuosité qu'on lui associait si difficilement.
Invité
Anonymous
Tout en écoutant Luke lui répondre, Yun scanna la cantine pour espérer trouver une place libre, et finit par repérer une table à l’écart, au fond à droite, aussi il s’engouffra dans la brèche, slalomant entre les personnes en train de manger leur dîner pour finalement déposer son plateau et s’asseoir, faisant fi des regards curieux ou peu amènes qui le suivaient. Un certain nombre de chevaliers présents semblaient suivre le nouveau duo des yeux avec intérêt, comme s’ils s’imaginaient que l’ancien et le nouveau padawan de Maître Don étaient en train de parler d’une affaire de la plus haute importance. Après tout, leur succès sur Arkania ne mettrait peut-être guère de temps à se répandre.

Attaquant son assiette avec appétit, Yun savoura avec délice le morceau de viande qu’il venait d’avaler et qui venait combler son estomac affamé. Bon sang, il n’y avait pas à dire, manger un bon repas simple faisait partie des petits plaisirs de la vie qui avaient tendance à le dérider momentanément. Alors qu’il était occupé à nettoyer le contenu de son plat, il laissa donc l’hapien dérouler sa pensée, se contentant d’un bruit de mastication enthousiaste comme seule réponse. En même temps, il pouvait réfléchir à ce que son interlocuteur venait de dire et préparer sa réplique.

Ce n’était pas qu’il donnait tort à son aîné sur le fond… Mais simplement qu’il estimait que leur présence sur Arkania ne rentrait pas dans le cadre d’une telle description. C’était sans doute pour cela que malgré les apparences, il ne se voyait pas dans le rôle d’un gardien. Il voulait aider l’Ordre, pas protéger des officiels qui lui cracheraient au visage sitôt le dos tourné. C’était peut-être important, il ne le niait pas. Mais cela ne lui conviendrait sans doute pas totalement. Qu’est-ce qui serait mieux alors ? Il ne savait pas trop, mais pensait qu’il avait le temps de le découvrir.

Ayant déjà fini son assiette, Yun laissa un peu de temps à son vis-à-vis pour commencer son repas, se demandant ce qu’il allait bien pouvoir répondre. Prendrait-il le risque de jeter de l’huile sur le feu ? Il ne voulait pas faire une mauvaise impression à l’ancien padawan de son maître, paraître buté ou vindicatif. Pour autant, sa franchise légendaire et sans fard lui intimait de poser la question qui lui brûlait les lèvres. Au bout d’un moment, il se décida :

« J’en ai une. Ne croyez-vous pas que dans ce cas, les jedis seraient plus pris au sérieux s’ils étaient envoyés en tant que médiateur, et non de garde d’un camp ou l’autre ? Parce que ce n’est pas étonnant si ces deux filles ont réussi à exciter la foule contre nous au début. Nous avions plus l’air de miliciens à la solde d’un chef apeuré que d’une force bienveillante et neutre… »

Tant pis s’il creusait sa propre tombe, au moins il avait dit ce qu’il pensait, point final. Sentant la tension poindre, Yun inspira un bon coup et se leva pour aller se resservir une nouvelle fois, son estomac toujours pas rempli, puis il se rassit en face du frêle chevalier. Il soupira finalement, et murmura :

« Je sais que la théorie et la pratique sont deux choses différentes. Je le sais mieux que personne. »

Référence implicite à ses années en tant que sith ? A sa trahison ? A son intégration douloureuse ? Un peu des trois.

« C’est juste que je trouve dommage que l’Ordre ne mette pas plus en valeur ses actions pour aider ceux qui en ont le plus besoin. »

Phrase plus sibylline qu’il n’y paraissait, mais Yun jugea le blond suffisamment fin pour qu’il n’ait pas besoin de développer plus avant sa pensée. Il était temps désormais de passer à la suite, à savoir reprendre une conversation sur un sujet moins… enlevé. Après avoir englouti sa seconde portion de viande du soir, Yun entreprit donc de s’expliquer quant à sa formation.

« Elle se passe… Bien je pense. Enfin, sinon, je doute que Maître Don m’aurait envoyé sur Arkania sans lui pour me superviser, non ? »

Le raisonnement lui paraissait logique. Il ne savait jamais trop quoi dire quand on lui posait cette question. Après tout, il était difficile de s’évaluer, non ? Pour lui, il travaillait et essayait de progresser comme il pouvait, et il avait l’impression que l’autonomie accordée par Maître Don était une preuve de confiance, mais peut-être que c’était sa façon de procéder habituellement avec ses élèves.

« J’essaye simplement… de m’améliorer. »

En quoi aurait-on pu demander ? Telle était la question, et Yun ne donnerait pas la réponse aisément. Probablement parce qu’il n’en connaissait pas l’étendue lui-même. Gêné d’avoir autant parlé, il chercha un moyen de rendre la parole à son interlocuteur, et finit par interroger :

« Vous n’avez pas encore pris de padawan vous-même, Chevalier Kayan ? »
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
-Je comprends.

Dans un premier temps, ce fut l'unique réponse à laquelle eut le droit Yun. Pensif, Luke avait replongé en arrière, dans des souvenirs pas si lointain où il ressemblait à son comparse. Lui-même Padawan à l'époque, il s'était posé des questions équivalentes, aujourd'hui encore d'ailleurs, ces dernières continuaient de le titiller. Cependant, en accouplant sa mémoire à la distance acquise accumulée ces dernières années, Luke se sentait apte à mieux comprendre, à moins qu'il ne se soit simplement résigné, et que ce soit en tant que robot formaté qu'il s'exprime. Tout en espérant ne pas trahir l'idéal Jedi, le Hapien se pliait d'avantages à ces règles hors des règles, comme s'il acceptait son sort, parce que c'était son rôle. Pourtant, le temps où il était un peu trop idéaliste mais d'autant plus vivant n'était pas si vieux. Etait-ce réellement une bonne chose de chercher à convaincre Yun ? Voir lui-même ? En tout cas, tempérer son cadet était bel et bien son devoir.

-Ce n'est pas aussi simple.

Le jeune Jedi grimaça simultanément à ses propres mots, la Force savait qu'il détestait cette phrase toute faite, aussi pratique qu'impersonnelle, mais il n'empêche qu'elle restait véridique. Rester objectif à toute heure était quasiment impossible, pour se faire, il faudrait être en droïd. Et encore, ceux-ci avaient une programmation définie par des êtres bien subjectifs, compter ceux plus évolués, comme Bip, qui avaient leur propre penchant-dans une certaine mesure.- Bref, rester indépendant tout en intervenant pour aider autrui était un contresens, une oxymore et Luke avait fini par le saisir.

-Nous sommes une institution se voulant indépendante, mais loin d'être neutre. Notre but est d'être "bon", d'aider les innocents, ce qui fait de nous des personnes subjectives ayant forcément un bord à servir. Malheureusement, dû au contexte, aux faits communs voir isolés qui changent sans cesse la donne, le chemin le plus droit, le plus clair et concis nous est inaccessible. La République dépend de nous, mais c'est surtout vrai dans le sens contraire puisque nous avons choisi ce camps. Elle le sait, et nous impose parfois certaines missions qui s'entrechoquent avec nos idéaux. Comme devenir garde du corps alors que nous vouons normalement notre vie à servir une communauté et non une entité... C'est un des nombreux exemples que je pourrais fournir, mais concentrons-nous sur ce dernier. Bien, maintenant, imagine que nous puissions ne pas obéir. Il se trouve que cette personne a beaucoup d'influence, d'où le fait qu'il soit choyé de la République... Elle peut donc se venger en brisant un accord, ou en créant justement un désaccord, qui pourait dégénérer en guerre. Nous n'avons pas le pouvoir de changer toutes les choses, seulement de persuader les bonnes personnes de le faire. Les patrons bien que réticents, que nous avons protégé du Chaos sur Arkani étaient prêts à écouter la population... Si les employés les avaient délogé, nous aurions eu le droit à un procès du peuple, autrement dit un massacre. De plus, qui aurait remplacé ce dit patron ? Combien de temps cela aurait-il prit ? Les révolutionnaires sont parfois ceux qui assoient et durcissent la dictature. Sans compter l'installation, le changement... Et les innombrables victimes qu'auraient causé l'anarchie inévitable du dit changement.

Luke ne savait pas vraiment s'il s'expliquait bien, se remémorer de ses cours d'éthique était simple pour lui qui avait toujours les nez-enfin plutôt les doigts- plongées dans des études de toutes sortes même si son cursus était fini. Néanmoins, les ressortir de manière pédagogique et concise l'était moins. Comment offrir une image satisfaisante à une personne lorsqu'on avait de l'image un concept flou, émanant d'un passé branlant ? Le Hapien avait intégré ses leçons à sa manière, sans couleur, sans représentation imagée justement, il ne savait donc pas s'il parvenait à toucher Yun qui n'avait certainement pas profité de ces classes dans son passé.

-J'essaye de me dire que nous étions du côté des plus faibles, physiquement toujours. Cette fois, les agresseurs étaient ces deux femmes accompagnée d'une foule en colère souhaitant répandre le sang. Je ne te dis pas qu'à l'avenir ceux que nous avons soutenu vont réellement les écouter, mais dans ce cas, nous serons aussi là pour intervenir en la faveur de ce que nous avons "combattu". Nous retrouverions ainsi notre neutralité. Nous sommes donc aptes à changer de "camps" au nom de la justice, pour faire face au danger immédiat, d'où qu'il vienne.

Conclut Luke en reprenant sa fourchette pour picorer un peu dans son plat. Emporté par sa passion pour la théorie imbibée cette fois d'un dilemme philosophique et éthique hautement intéressant, il avait oublié sa faim. Néanmoins, le blond se força à avaler un bout de viande suffisamment tendre pour qu'il ait pu la couper facilement- asperger l'ancien Sith de sauce après avoir si joliment discouru aurait tôt fait de salir sa crédibilité.-

-Si tu avais la direction de cette mission, comment aurais-tu réglé le problème ?

Demanda-t-il finalement après un temps de réflexion visant à choisir la question la plus habile, celle qui lui permettrait d'apprendre à connaître Yun.
Invité
Anonymous
En entendant la longue tirade que le Chevalier Kayan lui servit, oubliant même de répondre à la question qu’il avait tenté de glisser pour changer de sujet sans beaucoup de subtilité, Yun sentit qu’il avait touché un point sensible, et pendant un bref instant, se demanda s’il était de bon ton de répliquer et de plonger dans un débat sans fin, quitte à se mettre à dos l’ancien padawan de son maître.

De fait, l’épicanthix n’était pas un théoricien, encore moins un grand rhétoricien. Oui, il savait parler. Bien même, il en avait fait la démonstration sur Arkania justement. Mais il détestait ça. Il avait horreur de ces joutes qui n’avaient jamais de fin et se terminaient fatalement par la volonté d’écraser son adversaire pour marquer un point et prouver une bonne fois pour toute qu’on avait raison. Le débat, pour peu que les protagonistes soient un peu passionnés et aient des vues opposés dégénéraient toujours. C’était presque une loi universelle.

Alors il se contenta de hocher la tête aux bons endroits sans rien dire de plus, son visage impénétrable alors qu’il fixait sans broncher le hapien parti dans un discours certes intéressant, mais que le garçon trouva par moment un peu trop… idéaliste. Avait-il perdu ce bel emportement, cette foi dans l’idée que tout pouvait se régler par la discussion ? La vérité était pire encore : il ne l’avait jamais vu réellement. La violence n’était certes pas la solution, jamais. Pour autant, elle était indubitablement efficace, quoique pas pour tout le monde.

Devait-il alors croire les assurances du jedi en face de lui ? Une part de lui en avait envie, terriblement. L’autre était persuadé que seule la peur avait motivé la soudaine écoute de ces patrons, justement. Comme le fait que l’Ordre avait choisi le camp de la République. Yun tenait farouchement à leur indépendance, car il avait vu les ravages de l’immixtion des personnes sensibles à la Force dans la direction ou le conseil d’un Etat. Non pas que certains jedis ne pouvaient pas s’y révéler doués. Simplement, l’Ordre devrait poursuivre d’autres buts, voilà tout, et ne pas se dire au service de la République. Ils étaient alliés, et non les serviteurs de cet Etat ingrat et englué dans sa fatuité. Mieux valait cependant éviter de le dire ainsi…

Du tac-au-tac, Yun répondit sans même réfléchir à la question finale du jedi :

« Je ne l’aurais pas accepté. »

Voilà qui était dit. Froidement, brutalement, sans ambages. Mais qu’importe.

« Du moins, pas en ces termes. »

Il convenait d’adoucir quelque peu son avis maintenant, afin que le Chevalier Kayan ne prenne pas la fuite en courant. Yun savait qu’il critiquait ouvertement une décision du Conseil, mais maintenant qu’il avait la possibilité de dire le fond de sa pensée sans crainte de se faire ouvrir le crâne d’un coup de sabre, il n’allait pas s’en priver.

« Vous savez pourquoi ces gens ont été si facilement convaincus par les premiers arguments de ces femmes ? Parce qu’ils étaient juste. Nous étions là pour protéger un camp, et du point de vue de n’importe quel imbécile, cela ressemble à s’y méprendre à une prise de parti, et non à une volonté de jouer les médiateurs de façon crédible.

Soit il fallait convier l’ensemble des chefs de camp dans un endroit neutre, sous notre supervision, pour montrer notre indépendance, soit refuser de servir de gardes et faire comprendre que la sécurité passerait pas les forces fédérales, tout en acheminant tout ce beau monde en salle de réunion.

Là, nous aurions déjà eu le mérité d’être réellement des médiateurs et d’agir correctement. Parce que ce que ces gens ont promis sous la menace de la peur, ils n’hésiteront pas à l’oublier une fois l’orage passé. Ils n’ont aucune raison de nous écouter. Tout comme ces gens n’avaient aucune raison de nous faire confiance… Et je le regrette. »


S’enflammant un peu, il serra son poing et siffla :

« Physiquement, les gens du commun voient les jedis comme ceux qui enlèvent leurs enfants, combattent les siths et … Protègent des sénateurs. C’est réducteur, triste, ce que vous voudrez… C’est la vérité.

Ce qu’il faudrait, c’est mettre en valeur les actions de l’Ordre pour aider les plus faibles, nos recherches médicales de pointe, nos travaux de sécurité, nos productions alimentaires… Et non pas notre assimilation à une confrérie de guerriers alliés à des sénateurs cupides.

Voilà comment on peut aider les plus faibles. En les protégeant. En leur portant assistance. Ou éventuellement en servant d’arbitres. Pas de chiens de garde. »


Son jugement était dur, sans appel, tranché. Yun croyait sincèrement dans la mission des jedis. C’est pourquoi il regrettait infiniment de les voir conspués, de voir leurs véritables actions occultées. L’Ordre faisait ainsi le jeu de ses détracteurs, alors qu’il fallait au contraire essayer de montrer qu’ils défendaient véritablement le bien, ou alors à défaut se détacher au moins des structures politiques douteuses. Le peuple, voilà ce qui importait. Le pouvoir matériel résidait dans ce dernier. Si son adhésion manquait, alors jamais ledit pouvoir ne pourrait perdurer, et une opposition naîtrait. C’était précisément ce que les siths et leurs rêves d’Empire n’avaient pas compris. C’était aussi, selon Yun, ce qui les perdraient, ainsi que leur soif de… pouvoir. Comme si tout devait être ramené à ce mot unique. Comme s’il devait apprendre, même verbalement, à s’en détacher.

« Je n’ai pas votre expérience en tant que jedi. Mais je sais ce que leurs ennemis disent d’eux.

Je n’aime pas que l’on critique l’Ordre juste pour le plaisir, c’est ce qui m’a poussé à agir sur Arkania. Mais je me dois de savoir pourquoi ces critiques ont eu autant d’écho.»
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
Intéressant, voir bluffant. Le colosse dont les pas lourds résonnaient sur le sol marbré savait aussi imposer ses mots. Loin d'être raciste ou aveuglé par les stéréotypes, il avait tout de même toujours pensé que les gens tendaient à avoir un don ou l'autre, pas les deux. Yun lui semblait posséder le pouvoir de la voix et du physique, autant dire que la nature l'avait gâté à défaut de son histoire qui n'était qu'un brouillon ensanglanté. Décidément, le destin était bien facétieux, et aujourd'hui, il présentait au jeune chevalier, un ex-sith plus justiciers que certains Jedis du Temple. A un tel point d'ailleurs que le "Philosophe" en resta bouche bée, appréciant le débat sans trouver de réponse. Allait-il devoir jeter l'éponge ? D'un côté, le Hapien aimerait beaucoup en venir à cette conclusion, car le fait qu'il perde indiquerait qu'il y avait réellement une porte de sortie pour eux, la véritable voie de l'objectivité et de la sagesse.

-Tu as raison. Oui, parfaitement, je reconnais que nous nous sommes trompés. Si seulement nous pouvions prendre d'avantage de temps avant l'urgence pour discuter de ce qu'il faut faire ou non. Malheureusement, nous sommes tenus de négocier avec les supérieurs, et je ne parle des Maîtres, sinon de la République qui n'entend rien de notre philosophie. Non pas bêtise, sinon parce qu'ils n'ont pas été formés... Trop de gens à la tête, mais il faut aussi que cela demeure une démocratie.

Luke avait beaucoup de défauts, il était casse-pied voir carrément chiant par moments, au point que l'on menaçait les Padawans de le faire venir leur parler de sa théorie sur les différentes manières de percevoir la Force selon le lieu et les personnes -sa thèse quasiment finie même s'il faudrait sûrement la retoucher.- s'ils ne se couchaient pas de suite... Il était aussi moralisateur, procédurier, mais au moins, l'arrogance n'était pas de son apanage. Capable d'accepter la critique, le jeune homme avait fini par avouer à un Padawan qu'il avait raison, malgré "l'expérience" manquante, d'ailleurs il ajouta même quelque chose à ce propos, lui donnant cette fois tort.

-Non tu te trompes en ce qui concerne l'expérience. Je pense que tu en as plus que moi qui ne connaît qu'un côté de la barrière. Certes... Fut une époque, j'ai également séjourné dans l'Académie Sith mais j'étais alors trop jeune et probablement effrayé.

Avoua-t-il non sans une certaine honte, se souvenant avoir hésité entre continuer à appeler son Maître par-delà l'espace via la Force ou à se taire pour lui éviter de tomber dans un piège. Finalement il avait hurlé à travers des Ondes mysttiques désespérées, Saï était intervenu et le Temple avait été attaqué. Jamais Le Hapien ne s'était pardonné cette erreur, celle d'un enfant de 13 ans oubliant son devoir; bien qu'il sache parfaitement qu'obéir à ses principes théoriques l'auraient mené à la mort. Aujourd'hui néanmoins, il était là, assis devant Yun, une fourchette à la main.

-En fait, ce fameux problème de temps s'ajoute à l'éthique, l'urgence et l'obligation de choisir de sauver la majorité... Malheureusement, sachant qu'une minorité représente parfois une majorité, nous ne savons plus qui sauver. Présentement, un renversement des patrons aurait pu permettre à l'une de ces deux leaders de prendre la tête, sachant qu'elles sont probablement Siths, et pas de celles qui se repentent. Être contre le "peuple" pour lui assurer une stabilité loin d'être idéale mais de loin la meilleure pour le moment.

Le jeune homme réfléchit un instant avant de proposer une solution qui pourrait les ramener en arrière. Il était impossible d'entièrement réparer ce qui avait été fait, mais d'y revenir pourquoi pas, et cette fois, avec l'étiquette de l'Ordre, pas celui de la République.

-Tu sais, nous devrions rouvrir le rapport pour y insérer tes remarques, même si je doute que cela puisse changer du jour au lendemain, ne rien faire serait nous condamner définitivement à l'immobilisme. Je peux aussi demander un suivi d'enquête en me servant de la liste de doléances du peuple pour ne pas fermer le dossier. Ainsi, nous pourrions, débarassés de l'urgence, nous atteler à enquêter sous tous les angles possibles, surtout que nous avons désormais la confiance du gouvernement.
Invité
Anonymous
« Je… Vous êtes sûr ? Oui, ça pourrait être… bien. »

Etre cité dans un rapport officiel ? Avoir son avis de néophyte complet écrit, consigné, analysé ? Mieux, ou pire, c’était selon, avoir réussi à convaincre un Chevalier, son supérieur de revoir sa copie en intégrant des remarques dites entre la poire et le fromage, et ce, au sens littéral du terme au vu du lieu où ils se trouvaient actuellement ? Yun avait du mal à en croire ses oreilles. Certes, il n’y avait que les imbéciles pour ne pas changer d’avis. Mais quand même… Il devait reconnaître que sans forcément prendre le hapien pour obtus ou buté, il s’était attendu à être entendu, mais pas réellement écouté. Ou tout du moins, pas autant.

Voilà le genre de situations auxquelles il n’était guère habitué. Sur Korriban, son avis avait autant d’importance que la fiente d’un chien kath. Son maître décidait, évidemment, et il avait compris que s’interposer était inutile. Peut-être que le seigneur sith n’avait pas pensé que sa démonstration électrique aurait un tel impact sur son disciple, mais toujours est-il que son apprenti ne s’était plus jamais opposé à lui, même pour ne serait-ce que suggérer une modification bénigne de plan, d’analyse… Rien du tout. Et au milieu de la masse d’initiés du côté obscur avides de faire leurs preuves qui arpentaient les couloirs noirs de l’Académie, entre les instructeurs dont la plupart étaient aussi imprévisibles que dangereux, il n’allait pas prendre le risque de dire un mot de travers, surtout avec sa maudite manie de discuter tout ce qu’on lui assénait comme une vérité inébranlable. Donc, il s’était contenté de protester dans sa tête, bien à l’abri derrière les barrières mentales dont la nature l’avait pourvu, et n’avait jamais rien dit non plus pour questionner les enseignements qu’il avait reçu. Il avait suivi le mouvement, acquiescé au bon moment, et intérieurement, tout réfuté méthodiquement. Peut-être que sa désertion avait surpris, du coup. Il n’était pas un apprenti rebelle, loin de là. Plus diligent que l’épicanthix, du moins en apparence, c’était même difficile à trouver. Enfin, il n’en savait rien. Il n’aimait pas penser à ce que l’Ordre sith pouvait bien dire sur lui à cette heure. Les traîtres à Ynnitach engendraient des traîtres à la cause sith ? Oui, ça sonnait comme un bon discours de propagande. Mieux valait qu’il ne sache pas la vérité, de toute façon.

Cependant, cette petite pensée personnelle lui permit de réfléchir plus avant à ce que venait de dire le Chevalier Kayan au sujet de son expérience. Certes, si on le comparait à la plupart des jedis de son âge, il en avait beaucoup vu. Trop vu, en fait. Il y avait de quoi rendre fou n’importe qui, et Yun savait au fond de lui-même que sans la protection offerte par son esprit infranchissable, il aurait dû plier entièrement, ou mourir. Il n’y avait pas d’autre alternative. Etait-ce réellement une expérience dont il pouvait se vanter ? Qu’il pouvait mettre à profit ? D’un point de vue pragmatique, évidemment. Mais cela dit… Etait-ce quelque chose qui pouvait être étendu à d’autres ? Qui pouvait être considéré réellement comme profitable ? Il en doutait.

Mais il comprenait cet état d’esprit. Yun était un cas particulier, rare, et une mine d’informations sur des aspects dont les jedis entendaient beaucoup parler, sans forcément le voir véritablement. Et la première confrontation, quand elle venait, si elle venait, était rarement d’une quelconque aide pour comprendre les ressorts du côté obscur, la vision qu’il avait de l’autre versant. Cela dit, il avait toujours beaucoup de mal à faire comprendre à ses pairs qu’ils devraient tous être heureux de ne pas avoir subi ce que lui avait enduré, qu’ils avaient eu la chance d’être libres, heureux. Oui, il en connaissait beaucoup pour son âge et son rang. Il regrettait que ce soit le cas.

« Vous avez déjà été sur Korriban ? »

L’épicanthix ne savait pas qu’il partageait ce point commun avec le blond en face de lui. Cependant, ce n’était pas si improbable en y pensant : réussir à prendre en otage le padawan d’un maître du Conseil, quelle victoire potentielle, quel moyen de pression parfait… Quelle horreur. Au moins, il y avait peu de chances que la même chose se reproduise avec lui : la mort serait préférable, et de toute manière, il doutait qu’en cas de capture vivant, les siths le laissent en vie. Les traîtres ne bénéficiaient d’aucune pitié, et il n’en attendait aucune. Il avait fait son choix en conscience.

« Ça n’a pas dû être agréable. Vous n’auriez pas aimé y rester toute votre vie, j’imagine ? »

La réponse était évidente. Et c’était pour cela que Yun avait posé cette question, précisément.

« Moi non plus. Ce que j’y ai appris n’a pas d’importance. Ce n’est pas vraiment une expérience dont on peut se vanter. A moins que vous soyez intéressés par les meilleurs moyens de torturer quelqu’un pour lui faire avouer ses complices ou les ressorts de la domination mentale. »

Il avait dit cette phrase sur un ton brutal, sans concession. En fait, il en avait même trop dit, mais peu importait : oui, il avait été un bourreau, et un dévoué, connaissait parfaitement tous les ressorts de la douleur que l’on peut infliger à autrui, et ce qu’on peut en retirer. Son maître qualifiait cette… capacité d’art. Yun y voyait une boucherie, mais là encore, il n’avait pas donné son avis. Mieux valait éviter.

« Je persiste à croire que l’expérience d’une vie en communauté, dans un espace libre, avec des amis, des professeurs qui n’ont pas droit de vie ou de mort sur vous… Vaut toutes les expériences de l’obscur du monde.

Ainsi, on sait pourquoi on se bat, ce que l’on risque de perdre. Sinon, on se contente de frapper, sans penser, juste… Parce que ça nous fait exister. »
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
- Les choses doivent être décrites comme elles se sont passées. Tu les as vécu, y a participé, donc tes propos ont toute leur raison d'y être. Surtout qu'elles sont loin d'être illogiques.

Annonça simplement Luke pour fermer la conversation. Il était pour lui évident que Yun devait être cité, en plus de témoigner également. Le mieux serait d'ailleurs que tous deux écrivent leur propre rapport avant de le mettre en commun. Toutefois, le blond se tu, se rappelant brièvement du surnom dont on l'affligeait dans les couloirs. Le "somnifère" abreuvait ses pairs de longs discours philosophiques, mais il les étouffait également avec son amour pour la paperasserie. L'art de bien faire, de tout justifier, quitte parfois à s'enfoncer comme un grand. Saï en savait quelque chose après avoir transpiré le jour de sa nomination, lorsque son ancien Padawan avait décidé d'avouer sa relation amoureuse. Au final, sa curieuse et certes, un peu masochiste honnêteté avaient confirmé sa maturité aux yeux des membres du Conseil, néanmoins, il va sans dire que parfois, les responsables hiérarchiques apprécieraient que le blond se relâche. Avec ses rapports faits et refaits, il donnait plus de travail à l'administration que n'importe qui, faisant suer, grogner les greffiers, pleurer les secrétaires. Bref, mieux valait rester simple, éviter d'insister sur un détail sans importance. Il écrirait le rapport et signalerait justement les mérites et remarques de son cadet.

- J'y ai vécu quelques semaines, en effet. Malheureusement je n'ai guère eu le temps de faire du tourisme.

Plaisanta à demi le Chevalier en se rappelant de la voix rauque, presque désincarné du Seigneur Noir. Son aura soufflant avec insistance sur la sienne, fragile bougie blafarde. Le jeune Jedi n'avait pas non plus oublié que Saï s'était éloigné du Temple par sa faute.

- C'était lors de la Grande attaque du Temple. Plusieurs Padawans ont été enlevé. Je ne sais pas comment mon... Notre maître avait retrouvé ma trace, toujours est-il qu'il est venu pour me sauver, rejoint par Jacen Loran, un Jedi devenu Gris. Malheureusement c'était un piège pour éloigner le chef du Conseil. Le Temple fut donc attaqué en parallèle.

A 13 ans, le Hapien avait pensé à cacher sa présence, passer pour mort comme tout Jedi devrait le faire, se sacrifier pour la multitude. Cependant, il n'en avait pas eu le courage, et lors de ses plus sombres moments, du haut du toit de l'académie, il lançait des appels à travers la Galaxie. Bien sûr, il y avait peu de chance pour que ses ondes parviennent jusqu'au Temple, mais il était en revanche probable qu'à son arrivée sur Korriban, Saï reçoive le signal.

- Sans l'ombre, quelle valeur aurait la lumière ? Au moins, cette triste expérience, tout comme ce qui me concerne, a du vous apprendre à mieux apprécier encore les belles choses. Le noir dit-on, fait ressortir les couleurs qu'on appose sur lui, les ombrant savamment. Ces amis que nous avons ici comptent tellement que j'ai fini par saisir que l'attachement n'est pas toujours une faiblesse. Notre cher code ne doit pas être pris au strict sens du terme, le tout étant de savoir où est notre devoir.

D'abord très traditionaliste, Luke s'était ouvert, certainement grâce à Jason et quelques relations savamment postées sur son chemin par ses aînés soigneux. La joyeuse Catherine, et plus jeune, des travaux en tandem avec des apprentis différents à lui, heureux de vivre, pour ne pas dire délurés. Un Jedi totalement distant ne savait pas vraiment non plus pour quoi il se battait, où lorsqu'il croyait le savoir, risquait d'en devenir extrémiste.

- Ta lumière que l'on dit grise me semble plus brillante que certains. Ceux -là qui oublient les doux détails si petits dont tu viens de me décrire l'importance. J'ai toujours eu confiance en Maître Don, mais je comprends d'autant plus son choix aujourd'hui.

Un sourire effleura les lèvres de l'aveugle Il s'était certes inquiété de voir son vieux mentor s'embêter avec un nouvel apprenti, néanmoins, il l'avait toujours accepté. Yun était un de ces rares anciens Siths sérieusement repentis. Il avait été une victime comme lui, juste bien plus longtemps, ce qui forçait d'avantage encore l’admiration de Luke pour cette personne, et son "mépris" pour les ex-Siths défendant leur violence derrière leur passé. Aux yeux du jeune Jedi, aucune blessure ne justifiait qu'on en inflige à d'autres. Petit à petit, il s'endurcissait face à ceux qui bravaient la loi et refusaient le droit chemin. Sa patience s'effritait, il donnait une chance mais pas deux. Yun n'était qu'une preuve de plus que son nouveau chemin était le bon.
Invité
Anonymous
« Je vois. Au cas où la question se poserait, je n’ai pas participé à l’attaque du Temple. Mon ancien maître, si. Il en parlait assez souvent comme d’un grand fait d’armes, de l’acmée de la vengeance sith sur l’Ordre jedi. »

Darth Mantis avait été un admirateur sincère de Darth Synia, et un de ses suivants les plus ardents. Après sa disparition, il avait rapidement compris que sa position était devenue précaire au sein des siths, surtout avec l’ascension de Darth Ynnitach qu’il n’avait jamais soutenue. Certes, il s’était fait discret, mais en sous-main, Yun ne doutait pas un instant qu’il ait tenté d’agir pour l’empêcher de prendre le pouvoir … Et il était également persuadé qu’il l’avait payé de sa vie. Ironiquement, en assassinant ce rival, l’Impératrice avait libéré des chaînes de la peur un vulgaire apprenti sans importance à l’époque qui avait désormais tout le loisir d’abreuver l’autre camp de détails et informations sur cet Empire qu’il avait déserté avant de le voir officialisé, mais dont il avait observé les germes des années durant.

Pour le reste, il ne savait guère quoi répondre au Chevalier Kayan, sur l’essentiel du moins. Bien sûr qu’il n’avait pas tort. En théorie. Et pourtant en pratique … Il n’avait pas appris à apprécier la lumière au contact de l’ombre. Il avait rejeté cette dernière pour embrasser la première, empruntant un chemin singulier, presque unique, quand la voie normale était d’embrasser l’ombre après avoir connu la lumière, car elle savait être plus attirante, plus doucereuse … En un sens, l’obscurité avait pour les jeunes âmes aventureuses la luminosité d’un phare aussi aveuglant que puissant, déchaînant leur imagination et les confortant dans leurs jugements à l’emporte-pièce. Soudainement, les paroles de vieux fous prudents ne comptaient plus face au reflet de sa propre jouissance : le désir animal se confondait avec l’onanisme du pouvoir en un cercle concentrique de la corruption. Comment résister ? Il fallait être de ces individus que la domination sur autrui répugnaient, qui n’aspiraient qu’à la tranquillité, capable de s’interroger sur leurs motivations, leur destin, et de prendre des décisions contraires à ce que leur propre bien aurait suggéré. Rares étaient ceux capables de le faire … Et d’une certaine façon, c’était assez compréhensible.

Néanmoins, Yun fronça ses sourcils en entendant l’hapien parler en des termes aussi légers du code jedi. Pour un rigoriste aussi farouche que lui, on tenait là une hérésie de premier ordre. L’espace d’un instant, il se demanda quoi dire. Inspirant profondément, il tenta de calmer la réplique acerbe qui lui venait aux lèvres en un réflexe ordinaire, presque pavlovien, puisqu’il détestait prodigieusement voir des enfants gâtés remettre en cause des enseignements millénaires. Mais Luke n’avait pas la réputation d’un iconoclaste, c’était même tout l’inverse. Pourquoi donc un être comme lui, modèle du jedi parfait, finalement, pour bon nombre de padawans, tiendrait des propos semblables ? Voilà qui l’intriguait quelque peu, la curiosité tempérant donc heureusement son agacement primaire et viscéral.

« S’attacher revient à laisser une ouverture possible à des adversaires. Rester froid est impossible, et guère souhaitable. Mais le détachement est nécessaire. Car c’est en rompant ces liens que l’ennemi fait le plus mal. »

Yun n’avait pas envie de continuer davantage sur le sujet, et il venait de faire comprendre à son interlocuteur que si ce dernier tenait tant à avoir un débat là-dessus, il se retrouverait confronté à un traditionnaliste qui aurait pu faire se pâmer Maître Brock en personne. L’ancien sith, plus conformiste que le parfait jedi ? Il y avait de quoi s’amuser de ce retournement de situation, au fond, et lui-même n’était pas insensible à cet aspect pour le moins paradoxal de leur conversation, même s’il n’en laissa rien paraître, arborant toujours cet air distant, impassible qu’il avait habituellement. Cependant, un léger sourire apparut sur ses lèvres en entendant les derniers mots du chevalier, et l’espace d’un instant, son expression se fit plus douce, plus amicale, moins neutre, tandis qu’il inclinait discrètement sa tête pour remercier silencieusement son interlocuteur pour son compliment, avant de chuchoter :

« J’espère que son choix était le bon. »

Avant d’ajouter :

« Nous avons tous une part de lumière en nous. Certains décident simplement de l’oublier … Et d’autres la teintent sans le savoir.

Le gris ne me dérange pas. Je n’aspire pas à la pureté. »


Puis de conclure, son expression étrangement rêveuse alors qu’il se levait pour déposer son plateau et terminer définitivement ce repas :

« Je ne crois qu’à la justice. »
Luke Kayan
Luke Kayan
Messages : 3119
Eclats Kyber : 0
- Le détachement est la capacité à savoir où sont ses priorités lorsque cela est nécessaire, à défaire ce qui a été fait, rompre soi-même le lien, idéalement, il n'a pas besoin d'être le synonyme de l'isolement. L'attachement est au fond, aussi nécessaire qu'inévitable, ne serait-ce qu'entre un Maître et son Padawan, bien que tous deux savent que leur devoir prime sur tout.

* Même si Maître Don a dérogé à toutes ces règles en venant me sauver... Et que je le ferai probablement pour lui. Juste Lui.*

Répliqua doucement Luke qui comprenait les réactions de Yun, pures bien qu'il s'en défende. Lui aussi avait été traditionaliste, et il continuait d'ailleurs de valoriser cette voie. Pour autant, son maître allié à quelques autres aînés ainsi que la vie elle-même s'étaient chargé d'assouplir son caractère. Le jeune homme prenait simplement garde à s'assurer que ses proches savaient ce qu'il était et où irait d'abord sa loyauté. Égoïste ? Parfaitement en un sens, mais c'était un égoïsme consenti, d'ailleurs souvent partagé, surtout par ses amis Jedis. Catherine par exemple, il en était persuadé, le laisserait mourir pour sauver des civils. Lui-même devrait consentir à renoncer à Jason en cas de conflit d'intérêt. Théoriquement, c'était évidemment plus simple à accepter qu'à appliquer, néanmoins le Hapien savait posséder assez... D'attachement justement au Temple pour y parvenir. Au final, qu'ils le veuillent ou non, tous étaient attachés, y compris Yun à ces nouveaux principes qu'il venait d'embrasser. C'était une réaction normale, semblable à la sienne lorsque sorti de son marasme, le jeune Jedi avait utilisé le code comme une bouée de sauvetage, un guide pour ne jamais retomber dans ses "travers".

- Même si ce corps avait été présent lors de l'attaque du Temple, ta remarque demeurerait juste. Tu n'es plus le même. Là-bas, ça n'aurait pas été toi.- La rédemption ? Luke y avait toujours cru, simplement, il la donnait moins facilement aujourd'hui. Bien sûr, cela n'effaçait pas les actes passés de son vis-à-vis, surtout pour ce dernier qui devait être tourmenté par ses souvenirs. Cependant, la page était tournée et pour de bon. Luke ne s’octroierait pas le droit de se servir un jour de cette dite attaque ou d'une autre à laquelle aurait participé le nouveau Padawan de Saï. Yun était Jedi, le Hapien en était d'autant plus sûr que c'était Saï qui l'avait déterminé en le choisissant pour achever sa formation.- Le gris peut être pur.

Comme pour les teintes d'un vêtement, les couleurs de l'esprit pouvaient être décidées, résistantes à l'eau, aux changements de température ou tâchées, cédant petit à petit sous le poids d'une autre couleurs. Le blanc était le plus difficile à maintenir, se salissant à la moindre occasion, tandis que le noir ne reculait devant aucune éclaboussure, projetant lui-même sa couleur à la conquête du terrain. Pour autant, même lui pouvait se laisser influencer par son frère ennemi, s'adoucissant malgré lui jusqu'à obtenir un gris uniforme mais non moins brillant. Harmonieuse, l'aura de Yun ne parvenait pas totalement à occulter sa couleur passée, pourtant, Luke la trouvait suffisamment stable pour lui accorder sa confiance, ainsi qu'un sourire à la sortie de la cantine. Une sensation étrange restait coincée dans sa gorge, comme un brin d'inquiétude. Qu'avait pensé le nouvel apprenti de Saï de sa personne ? Rapporterait-il à ce dernier leur rencontre suivant cette mission où le gris avait brillé l'emportant sur le blanc un peu fade ? Le "colosse" avait un don, un charisme spécifique qui, sans doute, avait ébranlé la réputation d'incorruptibilité de Luke. Avait-il noté de reproches ? Non plutôt un répondant savant, preuve des capacités de ce Padawan particulier. Mais après tout qu'importe, un Jedi vivait pour donner le meilleur de soi, sans aspirer à être le meilleur de tous. Saï tenait entre ses mains ridées l'esquisse d'une grande promesse. Cette gerbe grise qui pourrait les réchauffer ou les brûler.

- La justice devrait être mère de tous les Jedis, mais aussi des citoyens et plus simplement des êtres dits pensants en général. Beaucoup s'en sont écartés, moi-même parfois je crains que ma subjectivité n’entache la justice. Là réside notre devoir, rappeler son rôle de mère à ceux qui l'ont oublié ou renié, et découvrir sa véritable définition.

Pour un jeune Jedi fougueux, accepter qu'on laisse sortir un coupable évident en conditionnelle voir acquitté était particulièrement douloureux alors que le criminel s'était défendu en utilisant la justice des hommes. Et que dire de celle de la nature tuant d'office les handicapés, les fragiles que les hommes les plus sensibles s'efforçaient de sauver ? Il y avait une définition Juste de la Justice, mais il fallait toute une vie et bien plus pour réellement la trouver. Yun, Luke, leur génération en général, avaient-ils seulement une chance de la lire un jour ? Où devraient-ils l'écrire ?

- Bonne journée.

Un dernier sourire fiché sur les lèvres, Luke rangea son plateau après avoir retrouvé sans mal la pile de vaisselle sale, fourbu d'habitude. Il ne se retourna même pas, marchant d'un pas décidé, laissant toutefois traîner derrière lui, une onde de Force chaleureuse et douce, comme un parfum inodore néanmoins reconnaissable entre tous.
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
skin made by
© jawn