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Alyria faisait les cent pas dans le couloir. Cela faisait plusieurs minutes qu’elle faisait face à cette porte, et n’avait toujours pas réussi à rassembler le courage suffisant, ou la volonté de l’ouvrir. Elle avait encore le choix : elle pouvait partir, prendre une navette pour Coruscant directement, prétexter l’urgence, et elle savait que Lorn comprendrait. Une fois qu’elle aurait tourné la poignée, qu’elle serait entrée, il n’y aurait plus de possibilité de fuite : il faudrait trancher, prendre une décision, et arrêter de faire semblant de ne pas connaître la réalité. Un simple geste pouvait changer sa vie, qui était déjà bien chamboulée, et altérer à jamais la relation qu’elle entretenait avec l’épicanthix. L’interrogation était donc simple : était-elle prête à faire ce pas, ce saut dans l’inconnu ?

En quelques heures, la maîtresse d’armes avait l’impression que toute son existence avait basculé. Le choc au moment d’apprendre sa nomination surprise au poste de Ministre avait été rude, sans compter la gestion de l’armée et de la retraite de Byss. C’était bien simple : elle venait de passer toute une journée sans avoir eu une once de répit, pas une seconde pour se poser. Et si elle franchissait cette porte, ce n’était pas ce qui risquait d’arriver.

Au fond, tout ce jour, elle l’avait passé à parlementer, à s’expliquer, à tempêter : d’abord pour tenter de convaincre le sorcier sith d’arrêter ces diableries afin d’éviter de tous les tuer, puis face aux deux acolytes de la Dame Noire pour les convaincre de coopérer, puis face au nouveau chancelier pour obtenir une explication quant à sa soudaine lubie de la bombarder ministre, et enfin face au Conseil pour leur expliquer une situation qui avait dû passablement les surprendre… 

Alyria était lasse, mais en même temps, une part d’elle-même se disait que finalement, tant qu’à remettre en cause son existence, autant le faire entièrement. Et elle l’avait promis à son ami : quand elle aurait sa réponse, elle viendrait le trouver. Elle le lui avait juré sur le vaisseau les ramenant vers Ondéron : elle allait lui parler ce soir-là. Alors qu’est-ce qui l’empêchait de le faire ? L’appréhension, évidemment. Parce que là, elle n’allait pas faire un compte-rendu de bataille, négocier une reddition ou encore défendre sa position, non, la duelliste allait se dévoiler, tout bousculer dans sa vie privée. Soudainement, il n’était plus question de défendre la paix, ou la République, de représenter qui que ce soit. Le service des autres, ou alors l’éclaircissement d’une action face à une autorité supérieure n’entrait plus en ligne de compte pour justifier ses actes. Non, pour une fois, ce qu’elle déciderait s’accomplirait en son nom propre, avec comme motivation première une envie personnelle. C’était un changement absolu de paradigme, une nouveauté dans l’équation de sa vie qu’elle avait oublié d’introduire depuis de nombreuses années.

Depuis Yrine, la trentenaire avait toujours mis sa vie privée entre parenthèse, comme finalement l’essentiel des jedis, préférant se consacrer au bien commun. Et cependant, en l’embrassant, Lorn lui avait ouvert une porte qu’elle avait pensée fermée pour le restant de son existence. Jamais, depuis presque quinze ans, Alyria n’avait été troublée par les affres pourtant communs de l’amour ou des sens. Elle avait simplement mis de côté cette part d’elle-même, et n’en avait pas été gênée.

Pendant les semaines qui avaient précédé Byss et après leur entrevue du parc, la maîtresse d’armes avait réfléchi, fait son introspection, sans doute plus qu’elle ne l’avait jamais de toute sa vie. Elle n’avait pas mis beaucoup de temps à s’avouer que Lorn l’intéressait. Après tout, quand ils étaient jeunes, elle n’avait pas été la dernière à remarquer l’épicanthix. Mais cela s’était arrêté là. Le questionnement était infiniment plus profond, elle l’avait dit elle-même : une simple aventure ne l’intéressait pas. Elle savait que le code ne l’interdisait pas, mais si elle avait fait sans pendant quinze ans, il y avait une raison.

Elle savait l’Ordre plutôt tolérant ces dernières années à propos des unions de jedis, ayant vu quelques histoires acceptées, et parfois même des enfants en naître. Sa propre conception des relations et du code l’avait toujours poussé à adopter une vision plus libérale que certains. Cependant, comme elle l’avait souvent théorisé, pour qu’une telle relation fonctionne, elle devait obéir à des conditions strictes : la confiance absolue dans les capacités de l’autre, et la volonté de mettre l’Ordre, le bien commun au-dessus des sentiments. Or, toute l’interrogation résidait dans ce simple fait : en serait-elle capable maintenant, avec l’âge et l’expérience, et avec Lorn ?

L’avantage d’être amis depuis aussi longtemps ne lui avait pas échappé ici : elle avait toujours su parfaitement quand intervenir ou pas, et s’ils formaient un duo réputé, c’était aussi pour leur capacité à travailler aussi bien seuls qu’en connexion parfaite. Et en cela, l’incursion de ce Darth Nero et finalement leurs combats sur Byss lui avaient apporté la réponse qu’elle cherchait : oui, ils sauraient toujours faire face, et ne pas se laisser emporter par leur affection commune.

Restait donc l’ultime question, la plus importante : et elle, vraiment, que ressentait-elle ? Y avait-il plus que de la simple amitié ? Avait-elle eu un développement inconscient chez elle, et est-ce que ce baiser avait pu faire office de catalyseur, de révélateur ?

Elle se souvenait d’un proverbe qui disait que parfois, on trouvait l’amour là où on s’y attendait le moins, et surtout sans le chercher. Il lui était tombé dessus d’un coup, offert, et elle n’avait su que dire. Et puis un soir, brusquement, comme une illumination, alors qu’elle pensait à tout autre chose, elle avait compris, et la vérité l’avait heurté de plein fouet : il n’y avait pas que de l’amitié entre eux, c’était évident, presque palpable, cela allait au-delà.

Pourquoi alors ne s’en était-elle pas rendu compte plus tôt ? Pourquoi avait-elle eu besoin que Lorn révèle ses sentiments pour agir à son tour ? Sans doute pour une raison simple : l’autocensure, la volonté de ne pas voir une possibilité aux potentialités vertigineuses et capable de changer sa vie, de la remettre en cause profondément. Et en cela, l’épicanthix ne l’avait pas aidé : en effet en raison de l’imperméabilité de son esprit, elle n’aurait jamais pu lire ces sentiments, les ressentir, et il s’était toujours montré d’une grande discrétion, d’où sa surprise première : elle n’avait rien vu… Ou avait préféré ne rien voir, le résultat revenant finalement au même.

Et pourtant, au milieu de toutes ces réflexions, de toutes ces certitudes, le doute demeurait : était-ce la bonne décision ? Ne devait-elle pas au contraire oublier cela et remiser ses sentiments dans le coin de sa tête et de son cœur qu’ils n’auraient jamais dû quitter ? C’eut été la voie la plus sûre peut-être… Et un regret, une interrogation pleine de « et si » qui l’auraient assailli sans cesse.

Alyria avait passé sa journée à combattre, à parlementer, à s’expliquer. Ne pouvait-elle enfin faire quelque chose pour elle, qui n’aurait rien à voir avec la survie de la République, de la paix, de l’Ordre ? Pour une soirée, elle voulait agir pour elle, pour quelque chose qui ne concernerait que sa vie privée.

Et puis, elle devait la vérité à Lorn au moins. Ils devaient discuter de cela, de ce peut-être qui flottait désormais autour de leur relation. Elle tenait à savoir comment il envisageait les choses, afin qu’ils se mettent d’accord, ou au moins tout simplement qu’ils en parlent. Oui, voilà, c’étiat cela le plus important : faire taire les doutes, les attentes, être enfin parfaitement francs l’un envers l’autre. Alors seulement, ils pourraient décider en conscience du chemin à emprunter, et des conditions pour le faire. Du reste, le guerrier devait se poser des questions après tout ce qui était arrivé et qui concernait sa nouvelle vie publique cette fois… Pour cela aussi, il méritait une explication.

Arrêtant de tourner en rond, Alyria prit sans doute l’inspiration la plus profonde de toute sa vie, avança la main, et toqua à la porte. Voilà, les dés étaient jetés, plus question de reculer. Après un moment, elle entendit Lorn lui dire qu’elle pouvait entrer. C’était la dernière opportunité de fuir, de choisir un autre destin…

Elle ouvrit la porte, puis une fois à l’intérieur, la referma soigneusement à clé. Pas question que quiconque vienne interrompre ce moment. Il serait à eux, et à eux seuls. La maîtresse d’armes observa un instant le colosse, puis finit par dire, brisant le silence qui menaçait de s’installer :

« Je viens de sortir de mon entretien avec le Conseil… Il fallait que je leur explique de vive voix ce qui vient de se passer. »

Se sentant plus à l’aise sur ce sujet, elle développa son explication :

« Je ne sais pas quelle mouche a piqué notre nouveau chancelier, mais apparemment, il a décidé subitement que je ferais une parfaite Ministre de la Défense… Si j’avais pu imaginer que notre entretien d’il y a quelques mois déboucherait sur un truc pareil… C’est… complètement dingue.

En fait, si, je pense savoir ce qu’il lui a pris, à vrai dire, j’ai eu une discussion avec lui durant notre voyage de retour sur Ondéron par holo. Il doit penser que c’est un moyen d’avoir une voix mesurée, apolitique, qui lui servira pour équilibrer son gouvernement de coalition entre tous les animaux politiques que compte la Rotonde. Et qu’au vu de mes états de service, personne ne contestera trop fort cette nomination…

Le calcul est habile, et pour être honnête, je n’ai pas trop le choix : je dois accepter. Sinon, comme la composition de ce gouvernement a déjà été annoncée, cela donnera une image désastreuse de l’Ordre… Et il est temps que nous ayons un regard de l’intérieur sur la politique du Sénat et de la République…. J’aurais juste préférer éviter que ce regard soit le mien.

A ton avis… J’ai fait le bon choix ? »

Jamais au cours de ces dernières heures, elle n’avait osé poser la question à voix haute, mais là, elle avait besoin d’entendre une voix sincère la rassurer. Alors seulement elle pourrait faire l’autre choix qui l’attendait, et qu’elle allait devoir aborder maintenant.

Tentant de rassembler son courage, elle tenta une petite boutade pour détendre l’atmosphère :

« Au moins, on dirait que tu ne vas pas être seul sur Coruscant. »

Puis d’une voix douce, avec une émotion clairement perceptible, elle finit par dire :

« Mais, à vrai dire, ce n’est pas pour cela que je suis venue. Je crois qu’il est temps qu’on parle… De nous. »

Elle s’arrêta là, attendant la réaction de Lorn, ses réponses à ses premières interrogations. Elle savait que peu importe les décisions prises, cette nuit serait à l’image de cette journée : déterminante pour sa vie, et porteuse de résolutions aux conséquences puissantes. La seule différence, c’est que cette nuit allait n’être de porteuse de sens que pour eux deux. Et elle appréciait ce changement. Pour une fois, elle serait actrice de sa propre existence, de sa propre vie. 
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Les derniers jours avaient été assez compliqués pour le jeune homme qui, au moment de rentrer dans ses quartiers assez spartiates, déposa ses vêtements pour aller se décrasser dans la douche. En laissant l’eau couler sur son corps il aurait espéré que cela allait le laver de la souillure de Byss et de tout ce qu’il avait pu voir d’obscur et de corrompu, malheureusement il n’arrivait pas à se sortir ces images de sa tête et restait là dans sa douche, immobile et silencieux, fermant les yeux pour faire paix dans son esprit. Finalement, après quelques dizaines de minutes, il se décida à sortir de la douche en enfilant le premier pantalon venu et c’est à moitié vêtu qu’il rentra dans sa chambre pour se rendre compte que sa camarade l’y attendait.
Depuis combien de temps était-elle là ? Oh, cela n’avait que peu d’importance, l’important était de la voir en bonne santé et, surtout, de la voir se remettre en question. Elle était surprise de sa nomination – ce qui n’était pas étonnant – et demandait son avis à son camarade qui appréciait ce geste. Même avec ses nouvelles responsabilités maître Von n’oubliait pas ses amis, c’était une chose appréciable. Simplement vêtu d’un pantalon, une serviette négligemment jetée sur son épaule, le garçon s’avança et répondit :

« Tu lui as fait forte impression, on dirait. Et puis, quoi qu’il en dise, même s’il compte changer les choses il a tout de même besoin de l’Ordre à ses côtés et ne peut se permettre de nous tourner le dos. Parmi tous les mêmes de l’Ordre, tu étais la plus désignée pour ce poste. Tu as du tempérament et tu es rodée aux rouages de la politique et de la diplomatie, ceux-là même avec lesquels je suis si peu à l’aise.

Tu seras la voix de l’Ordre. Tu auras de nombreux opposants, j’en suis sûr, mais je suis aussi certain que tu t’en sortiras bien. Tu as fait le bon choix. Je ne voyais personne d’autre à ce poste. »


Bien sûr qu’il avait confiance en sa camarade, cela ne faisait pas l’ombre d’un doute, mais sa dernière phrase était encore plus vraie par le fait que, n’aimant pas les diplomates et les politiciens qui maniaient l’art de la langue de bois avec une habilité redoutable, il les évitait systématiquement. Du coup, de par son aversion pour les discussions de ce genre et les ronds de jambes ennuyeux au possible, il y avait certains de ses pairs qu’il évitait au sein de l’Ordre car ils étaient de ce genre-là. Mais, à sa grande surprise, si sa camarade pouvait être comme ça de temps à autres, elle était celle qui ressemblait la moins à une diplomate telle qu’on se l’imaginerait. Sportive, fougueuse, n’ayant pas peur de dire directement ce qu’elle pensait lorsque le besoin se faisait sentir, c’était ce côté direct qui avait plu au jeune maître qui, avec le temps, avait fini par accepter et s’habituer à ce petit côté diplomate.
Après tout, lui-même se savait parfois difficile à supporter à cause de son caractère cassant et trop direct, là où les jedis devaient normalement faire preuve de tempérance et d’empathie, il pouvait donc au moins faire preuve de concessions et accepter que sa camarade soit expérimentée dans un art qu’il n’appréciait guère : cela venait de ses origines et, malheureusement, on ne choisissait pas toujours sa famille. Vous connaissez l’expression avec le cheval et le naturel qui revient au galop, non ? Donc vous saisissez le sens de mes paroles.

Réunis par leur talent pour le combat au sabre-laser, leurs caractères et styles de combats opposés avaient créé le duo le plus improbable qui soit mais qui, à la surprise générale, donnait de très bons résultats. D’un côté vous aviez une fine demoiselle, diplomate à ses heures et au style de combat privilégiant la finesse et la dextérité, tandis que d’un autre côté vous aviez un colosse qui, en plus d’être rustre et trop honnête pour son propre bien à ses heures, possédait un style de combat basé sur la dextérité et la force brute en se basant sur son physique puissant. Qui aurait-il cru que ce duo aurait une chance de fonctionner ? Qui aurait pu parier que ces deux individus, si différents, finiraient par s’entendre en se trouvant un point commun ? Leurs maîtres, peut-être, et encore…rien n’était moins sûr.

Les choses changeaient, le jeune maître en avait bien conscience et voir son amie poser un pied sur la scène politique lui faisait comprendre toute l’ampleur du changement, le forçant à se poser une seule question : changerait-il, lui aussi ? Et si oui, quelle direction devrait-il prendre ? Il ne le savait pas, il n’arrivait pas à voir au-delà de son rôle de maître d’armes car c’était la seule chose qu’il ait connue, il n’arrivait pas à voir vers où il pouvait se diriger car devenir maître était la seule chose qu’il ait jamais voulu…c’était la chose à laquelle tous les padawans aspiraient. Membre du Conseil ? Ce n’était pas à lui de le dire. Devenir professeur ? Il l’était déjà, dans un sens. Parcourir la galaxie pour percer les mystères de la Force ? C’était une quête égoïste et sans fin, alors qu’ici les gens pourraient avoir besoin de lui.

Ce n’était pas encore aujourd’hui qu’il trouverait la réponse à sa question…peut-être lui faudrait-il demander conseil à celui qui le connaissait mieux que personne : son maître.

Bientôt la conversation dériva sur un sujet qui concernait déjà plus le jeune homme, à savoir son départ pour Coruscant. En effet maître Berryl avait mis en place un projet qui consistait à reconstruite le Temple jedi de Coruscant - en ruines – afin de regagner leur place sur cette ville-planète et de mettre en branle le changement dont ils avaient besoin. C’était une bonne chose et cela donnait à certains chevaliers un objectif, une raison de se sortir les doigts des fondements et de se rendre utile pour l’Ordre comme pour la galaxie.
Malheureusement le jeune maître, avec certains de ses pairs, allait encadrer ce projet et, dans l’idée qu’il s’en faisait, allait plus servir de chaperon qu’autre chose.

Certains maîtres aimaient bien s’occuper des jeunes, il ne disait pas le contraire, mais Lorn n’était pas de ceux-là quand cela sortait de son domaine de compétence qui était l’enseignement du combat au sabre laser. Se frottant l’arrière de la tête, le jeune homme ne put masquer un soupir tout en répondant :

« Ahlala, ne m’en parle pas. Devoir chaperonner tous ces padawans et ces chevaliers en mal d’action, ça va être une vraie partie de plaisir. Je ne te dis que ça. Mais bon, ce projet aura au moins le mérite de vouloir faire bouger les choses, ça prendra du temps de regagner notre place sur Coruscant mais maître Berryl a au moins fait le premier pas.»


Mais bientôt, comme s’il s’y attendait, le jeune homme s’adossa à l’un des murs de sa chambre lorsque sa camarade lui révéla que les sujets précédemment évoqués n’étaient pas les sujets qu’elle souhaitait principalement aborder. Depuis que, la veille, elle avait annoncé au maître sa volonté de discuter d’un sujet, il avait immédiatement deviné de quel sujet il s’agissait. Avait-il besoin de se préparer à cette discussion ? Non, sa camarade savait ce qu’il ressentait pour elle et n’avait pas besoin de le répéter sans cesse, cependant maître Von voulait peut-être lui donner une réponse et entamer plus sérieusement cette discussion.
Empoignant la serviette déposée sur son épaule droite, le garçon se remit à essuyer les quelques gouttes d’eau présentes sur son cou et sa nuque tout en répondant :

« Je l’avais bien deviné. J’imagine que les derniers évènements t’ont donné à réfléchir.»

Quelques secondes plus tard, une fois sa tâche à présent terminée, il plia sa serviette en deux, la faisant reposer autour de son cou, avant d’ajouter :

« Es-tu arrivée à une conclusion ? »

Elle avait eu tout le temps de réfléchir à ce qu’elle pensait ou ressentait – ou du moins était-ce ce que pensait le maître d’armes –, il ne lui restait donc plus qu’à prendre son temps pour arriver à formuler ses pensées de façon claire. Rien ne pressait, le jeune homme n’avait pas l’intention de quitter ses quartiers de toute façon. D’un simple geste de la main il invita la demoiselle à s’assoir là où elle le désirait : sur le lit impeccablement bien rangé ou sur une chaise sur le dossier de laquelle était empilés les vêtements que portait Lorn que Byss. Bon d’accord…ce n’était pas un choix très équitable mais sa chambre était exigüe, sans décoration d’aucune sorte, et surtout sans beaucoup de sièges car il ne recevait jamais d’invités.
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Les paroles de Lorn agirent comme un baume apaisant sur l’esprit d’Alyria. Après Byss, elle avait agi, fait face afin de ne pas créer un esclandre mal venu malgré la fatigue et la surprise, et elle avait continué toute la soirée, s’accordant à peine quelques minutes de pause pour se laver et se changer, avant de filer rendre compte aux instances dirigeantes de l’Ordre, les doutes assaillants son esprit tandis qu’elle tentait de défendre, d’expliquer sa position. Et en quelques mots, comme toujours, son ami venait de chasser les nuages qui obscurcissaient ses pensées avec ces paroles sincères, qui lui réchauffaient le cœur. D’ailleurs, le compliment comptait double venant de lui : elle savait que Lorn détestait tout ce qui avait trait à la politique, et si elle devait être honnête, la maîtresse d’armes s’était demandé comment l’épicanthix allait réagir face à cette nomination inattendue. Mais comme à chaque fois, il l’avait accepté et su trouver les mots justes. Leur relation avait cette dynamique si particulière qu’ils étaient tous deux capables de conforter l’autre sans cacher parfois leur désaccord.

Et puis, quelque part, Alyria était heureuse de savoir que finalement, ministre ou pas, elle restait la même à ses yeux, et acceptait ses compliments avec chaleur, car ils étaient sans doute les seuls qu’elle recevrait à ce propos et dont la véracité n’était pas à remettre en doute. En fait, elle était même un peu gênée de recevoir tant d’éloges. Au fond, c’était une chose de sourire en entendant ce que l’on savait être de basses flagorneries, mais souvent, les compliments venant de vos amis vous surprenaient toujours, et cela les rendait encore plus précieux.

Se passant les mains dans ses cheveux pour masquer un peu sa gêne, Alyria lâcha un petit rire et répondit :

« Ah ah, oui, à n’en pas douter… Enfin, si à chaque fois que je rencontre un politicien, je suis nommée ministre, je crois que j’ai du souci à me faire.

Mais merci. Vraiment. Je sais que tu n’aimes pas trop… Tout ce tintamarre politique, alors je suis contente que ça ne change rien entre nous. Et puis, au moins, si j’aurais des opposants… Apparemment, j’aurais un soutien très confiant en ta personne. »

Elle avait achevé sa tirade avec un grand sourire, et continua sur un ton plus sérieux :

« Tu sais, tant que j’ai le soutien de mes amis … C’est ce qui compte. Le reste, ce ne sont que des félicitations de pacotille qui n’ont de valeur que le temps d’une déclaration. C’est pour ça aussi que ce que tu me dis est si important pour moi, sincèrement. Je ne m’imagine pas faire face à tout ce qui m’attend sans ton appui. "

Alors qu’elle achevait sa phrase, Alyria releva la tête pour croiser le regard de Lorn, et se rendit alors compte de l’état vestimentaire de son ami, ou plus exactement de son dévêtement présent. Tout occupée à discuter et un peu gênée par ses compliments, elle n’y avait pas fait attention au départ. C’était assez normal au demeurant : il lui était arrivé du temps de leur jeune âge d’entrer dans le dortoir des garçons sans frapper, et plus tard de venir discuter avec l’épicanthix et de rentrer sans faire trop attention, et la réciproque était également vraie. Tant que leur relation était strictement, purement amicale et parfaitement platonique, la question de la pudeur ne s’était jamais vraiment posée, surtout avec l’âge venant et les hormones refluant, tous deux se concentrant sur la conversation sans s’attarder sur un aspect physique. Cela ne voulait pas dire qu’ils étaient aveugles au charme éventuel de l’autre, mais simplement l’occultait car ce n’était tout simplement pas important, comme si l’absence ressentie d’ambiguïté quant à leur amitié rendait toute tentative d’érotisation du corps superflue.

Sauf que maintenant, cette fameuse ambiguïté était là, et soudainement, la maîtresse d’armes pouvait regarder son ami d’enfance non pas, justement, comme un vieux camarade, mais comme un potentiel… Eh bien autre chose, qu’il ne tenait qu’à eux de définir. Et cette prise de conscience changeait toute sa perception habituelle.

Sans pouvoir s’en empêcher, Alyria laissa son regard s’attarder sur le torse musculeux de l’épicanthix, qui venait manifestement de sortir de la douche, à en croire les quelques gouttes d’eau restantes qui parsemaient sa peau, semblables à un halo diffus, et bien sûr la serviette reposant négligemment sur son épaule. Elle savait pertinemment que l’homme était bien fait de sa personne, mais entre le savoir et le ressentir, il y avait un pas qu’elle venait manifestement de franchir inconsciemment. L’atmosphère lui paraissait soudain bien plus intimiste, et bien plus électrique, une sensation qu’elle n’avait pas ressenti depuis presque dix ans se diffusant traîtreusement dans son corps.

Cependant, la maîtresse d’armes n’était plus une adolescente en proie aux tourments de cet âge délicat, mais une adulte affirmée dotée d’un contrôle d’elle-même en acier. Aussi elle se ressaisit après ces quelques instants de flottement, déterminée à mener à bien cette conversation sans se laisser distraire comme une vulgaire gamine. Elle et Lorn valaient mieux que cela.

Le fait que l’épicanthix aborde la question du Temple lui permit de retrouver une certaine contenance, et ne put retenir un rire cristallin de s’échapper de ses lèvres en entendant la description de Lorn concernant ses futures activités, aussi elle finit par répondre après avoir calmé son accès d’hilarité :

« Crois-moi, j’échange quand tu veux un ou deux padawans et chevaliers turbulents contre l’ensemble de la Rotonde… Et je ne te parle pas du gouvernement en lui-même… Un vrai nid de vipère. Redjilic et Janos se détestent, apparemment, Janos a planté Keyien lors des débats de l’élection… Et je vais devoir travailler avec Keyien tiens… Joie… J’en trépigne d’impatience. Et voilà que je parle de politique… Décidément, on dirait que la fonction m’habite déjà... »

Puis elle ajouta plus sérieusement tout de même :

« Néanmoins, pour canaliser tout ce joli monde, surtout les gardiens… Tu devrais peut-être suggérer d’organiser en coopération avec la police de Coruscant des opérations d’assainissement des bas-fonds. Avec tous les gangs qui pullulent, il y aura de quoi s’occuper, et des renforts jedis ne seraient pas trop. Sans compter que la population sera sans doute heureuse de voir enfin de l’aide apportée. »

Et voilà qu’elle échafaudait déjà des plans d’entraide entre jedis et forces armées républicaines… Chassez le naturel décidément… 

Cependant, elle n’était pas venue pour parler de la République, du gouvernement, ou du Temple de Coruscant. Non pour une fois, son sujet de préoccupation était purement personnel, et les concernait eux deux, et uniquement eux deux. Comme le disait Lorn, il était évident que les derniers événements l’avaient fait réfléchir. Ou plus exactement, ils lui avaient apporté certaines certitudes, et le reste venait de l’introspection faite en amont pendant toutes ces semaines. Elle avait pensé, réfléchi, médité, et imaginé. Oui, imaginer ce qu’il se passerait si elle répondait de manière positive, ou même de manière négative. Elle avait voulu garder la tête froide jusqu’au bout, afin de tout analyser. Certains auraient dit que les sentiments ne marchaient pas à la manière d’un problème à résoudre, et elle était en partie d’accord. Mais il ne s’agissait pas que de cela pour des jedis, mais de tout ce qui allait avec ces sentiments. Les reconnaître, puis les accepter était la première étape, parfois considérée par les gens du commun comme la plus dure. Mais Alyria avait connu les affres de la passion sans règles, et savait qu’en raison de leur statut respectif, et de leurs dons, ils ne pouvaient faire comme les personnes non sensibles à la Force. C’eut été plus simple, certes, mais trop dangereux à ses yeux : elle avait fait l’expérience douloureuse de ce que les relations pouvaient apporter de terrible à un jedi, et il était hors de question qu’un tel fait se reproduise. Alors oui, elle était arrivée à une conclusion… Qui n’était en elle-même qu’une prémisse.

S’asseyant sur le lit suite à l’invitation de Lorn, elle fit signe de faire de même et prendre la place à ses côtés. Une fois cela fait, Alyria prit une profonde inspiration, et commença à dire doucement, le regard fixé droit devant elle :

« Depuis ce moment dans le parc… J’ai beaucoup réfléchi en effet, comme je te l’avais promis. A ce que je ressentais, évidemment. Mais pas seulement.

Nous sommes des jedis. Des maîtres. J’aimerais que tout soit simple, que tout soit une affaire naturelle de sentiments mutuels… Sauf que ce n’est pas le cas, et tu le sais aussi bien que moi.

C’est pourquoi, avant de te donner une réponse, peu importe sa teneur, je devais méditer sur ma propre vision de notre code, et des règles en vigueur. L’Ordre n'interdit pas les… aventures dirons-nous, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit, nous le savons tous deux. C’est autre chose. Et cet autre chose, je l’ai déjà connu, et je sais ce qu’il advient quand les conditions ne sont pas réunies. 

J’ai donc réfléchi à cela aussi, profondément, afin de savoir précisément ce que je considérais comme ces fameuses conditions. J’y avais déjà pensé d’un point de vue purement théorique évidemment, et au fur et à mesure des semaines, j’ai tenté d’affiner ma pensée.

L’intrusion de ce Darth Nero et les événements de Byss ont démontré que même en cas de gêne, nous pouvions conserver notre efficacité, mettre les non-dits de côté, et ce fut incroyablement réconfortant. Mais il faut penser à après : que se passera-t-il quand ces non-dits auront été éventés, déclarés ? Nous devrons toujours mettre l’Ordre avant nous. C’est une condition indispensable à mon sens. Le devoir primera.

Est-ce que nous en serions capables ? Là est toute la question, et il faut pourtant la trancher.

A partir de là découlent évidemment d’autres facettes de la même interrogation, souvent plus pratiques… Comme l’attitude face au Conseil. Que décider ? J’ai connu le secret… A terme, ce n’est pas une solution.

Je sais que ce ne sont pas des préoccupations agréables… Mais je crois que nous devrions y répondre tout de même avant de décider où cela nous mènera. Se laisser porter est grisant mais… Apporte son lot de négativité, et je le sais d’expérience. Je ne désire pas que la même chose nous arrive.

Nous sommes des jedis. C’est un fait. Et nous ne pouvons l’occulter, car sinon, il se rappellera à nous bien assez tôt. »

Ce n’était sans doute pas la réponse attendue, mais c’était la sienne, et à vrai dire, Alyria parlait d’une manière grave, profonde, vibrante, qui ne pouvait se comprendre qu’au regard de son passé. Elle ne laisserait pas les mêmes erreurs se reproduire. 

Cependant, même si elle pensait que finalement, son monologue avait rendu l’explicitation de ce qu’elle pensait superflue, elle ressentit le besoin de le dire, de le confirmer tout de même à son ami. Elle le lui devait, et justement, il était temps de faire parler ces fameux non-dits. Elle enleva le gant recouvrant sa main droite et, avec une infinie délicatesse, recouvrit la main de Lorn avec la sienne, entrelaçant doucement leurs doigts. Puis elle tourna son visage vers lui, et plongeant son regard émeraude dans les prunelles cyan de l’homme, elle finit par déclarer :

« Je partage tes sentiments Lorn. »

Et elle ajouta dans un murmure :

« Disons que j’avais sans doute besoin d’un électrochoc pour m’en rendre compte… Comme ton baiser. »
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Les jeunes d’aujourd’hui étaient si obnubilés par la course à la performance qu’ils en oublier de travailler les fondamentaux avant de viser le sommet, ils finissaient donc par construire une tour sur des fondations qui étaient tout sauf stable. Et que se passait-il lorsqu’un bâtiment stable était confronté à une tempête ou un tremblement de terre ? Il finissait irrémédiablement par s’effondrer comme un château de cartes. Quelle était la base alors ? Apprendre à se connaître, bien évidemment. Il était illusoire d’espérer grandir sans passer par une case obligatoire, à savoir gérer ses propres problèmes de caractère ou bien arriver à les accepter et à ne plus les laisser guider sa personne. Le jeune maître, par exemple, avait toujours été turbulent et indiscipline, insolent et impatient, mais son maître avait réussi à canaliser ce trop-plein d’énergie pour le mettre à contribution et faire de lui l’homme qu’il était aujourd’hui.
Bien sûr il était toujours aussi insolent, mais aujourd’hui cette insolence s’était transformée en honnêteté cachée derrière une certaine patience et un mutisme que les années avaient mis à rude épreuve. Il se savait rustre et cassant, mais il savait aussi quand il devait mieux se taire plutôt que de lancer la première chose qui lui passerait par la tête. Ainsi, quand sa camarade lui annonça être soulagée que sa nouvelle nomination ne change rien à la façon dont Lorn la percevait, ce dernier répondit franco :

« Je sais reconnaître mes défauts et le manque total de diplomatie est de ceux-là. Mais je peux comprendre que tu sois familière avec ce domaine-là, je l’ai toujours compris et ton nouveau titre ne changera rien à tout ça. Nous sommes tous amenés à suivre notre propre voie, après tout, et la tienne t’a menée sur la scène politique. »

Ainsi, quand sa camarade lui annonça être de nouveau soulagée d’avoir le soutien de son ami de toujours, ce même ami ne put s’empêcher de sourire en coin avant de lâcher un :

« Tu n’as même pas besoin de le dire, tu sais que tu auras toujours mon soutien. Je croyais que tu l’avais compris depuis le temps ! »

Elle enchaîna ensuite sur un autre sujet, avouant que la plupart du temps les louages et compliments pouvaient paraître vides de sens, en fonction de la personne qui émettait ces paroles enjôleuses. Réagissant à cela, le garçon répondit alors :

« C’est pour ça que je n’aime pas la politique. Je n’aime pas devoir discerner le vrai du faux quand quelqu’un me complimente…c’est sans doute parce que je dis toujours ce qui me passe par la tête, sans trop me soucier de l’impact qu’ont mes mots.»

Peut-être était-ce parce qu’il n’aimait pas se prendre la tête ou parce qu’il était franc de nature, mais le jeune homme avait toujours dit ce qu’il pensait en se fichant totalement des conséquences, il n’appréciait donc guère ceux qui se forçaient à cacher leurs véritables pensées derrière de vaines paroles aussi fausses que vides de sens. Son attitude n’était pas très appréciée au sein de l’ordre, pas jugée digne d’un professeur qui devait parler avec déférence et sagesse à ses élèves…mais est-ce que cela le fit changer pour autant ? Bien sûr que non.
Mais malgré son nouveau rôle qui lui ouvrait de nouvelles possibilités, la demoiselle ne pouvait pas cacher que, par moments, elle aurait tout donné pour remplacer ses discussions interminables par des cœurs avec des padawans turbulents. Souriant à cette idée, le garçon répondit alors, en levant les yeux au ciel…enfin au plafond :

« Oh, non merci. Je suis très bien avec mes gamins turbulents et indisciplinés. »

Le domaine dans lequel il avait le plus de patience, le seul avec lequel il avait de la patience à vrai dire, était bien le domaine de l’enseignement du maniement du sabre laser car s’il avait eu la patience de maîtriser autant de styles différents et de les approfondir, il devait tout de même avoir la patience d’enseigner aux autres…logique, n’est-ce pas ? Néanmoins le sujet revint sur la politique, la demoiselle citant des noms qui étaient quasiment tous inconnus aux oreilles de son camarade. Ce dernier, ne faisant même pas semblant de connaître ces noms, sourit lorsque son amie se rendit compte que son naturel de politicienne revenait au galop, avant de lui répondre :

« Oh, tu sais, ça ne me dérange pas d’en parler avec toi, du moment que tu ne me présentes pas à tes nouveaux collègues. Si tu veux que je te donne mon avis sur certains points, tu sais où me trouver. »

Parler avec elle ne l’avait jamais dérangé, quel que soit le sujet abordé, et s’il devait lui donner des conseils ou avis sur la politique – même s’il n’y connaissait quasiment rien – alors il ferait de son mieux pour que son avis se montre aussi constructif qu’utile. Mais bien vite ces pensées furent chassées lorsque la demoiselle proposa au jeune homme une idée qui le plongea dans un état pensif pendant quelques instants. Semblant sur le point de se prendre le menton entre ses doigts pour se donner un air plus sérieux qu’il ne l’avait, le garçon pesa le pour et le contre pendant quelques instants avant de finalement répondre :

« Les gens qui vivent dans les bas-fonds sont désespérés mais je pense que le temps n’a pas suffi à leur faire oublier l’espoir que symbolisent les jedis. Les voir se battre main dans la main avec les forces de l’Ordre, pour s’occuper de la vermine…ça devrait être le premier pas vers le regain de notre place sur cette planète. J’en parlerai à maître Berryl et aux autres maîtres lorsque nous y seront.»


Bien sûr qu’il était d’accord avec l’idée mais il n’était pas l’instigateur de ce projet, le mot de la fin ne lui revenait donc pas totalement. Mais alors que ce sujet disparaissait au loin, le jeune homme sentit dans l’atmosphère le changement qui lui faisait dire qu’un sujet des plus sérieux était sur le point d’être abordé. La serviette toujours sur les épaules, le garçon vint donc d’assoir à côté de la demoiselle, passant devant elle avant de poser ses fesses à droite du lit. Se penchant en avant, les mains jointes sur ses genoux, le garçon ferma les yeux en écoutant les mots de son amie.
Se rendait-il compte, en se penchant ainsi, que la demoiselle aurait le loisir de voir son dos ? Oh non ce n’était pas ce que je voulais dire. En effet, même s’il avait tendance à l’oublier, son os était bardé d’un nombre incalculables de cicatrices comme autant de symboles de son passage par l’esclavage ? Des blessures qui, faute d’avoir été traitées à temps, furent mal soignées et dont les traces ne disparaîtraient jamais. Non, en vérité il avait oublié ce petit détail de son anatomie et, même lorsqu’il se pencha pour poser ses mains sur ses genoux, il ne réalisa pas le spectacle que son amie aurait devant ses jeunes yeux. Mais le mal était désormais fait.
Au lieu de s’appesantir là-dessus, le garçon écouta son amie lui préciser toute l’importance qu’elle accordait à l’Ordre, lui rappelant que l’Ordre passerait toujours avant elle…et donc lui.
Ne souriant pas, écoutant attentivement les paroles d’Alyria, le garçon répondit alors :

« L’Ordre est notre vie. Notre passé, notre présent et certainement notre avenir. Je ne me vois pas lui tourner le dos du jour au lendemain ou me mettre à désobéir au Conseil pour des motifs personnels, si c’est cela qui t’inquiète. »

Son maître et l’Ordre tout entier lui avaient tendu la main…pensait-elle vraiment qu’il laisserait son cœur prendre le dessus sur la dette éternelle qu’il avait ? Lorn espérait vraiment que non. Il replongea alors dans un mutisme qui lui était coutumier, savourant les paroles de son amie qui savoir avoir savamment étudié la question avant de frapper à la porte du maître d’armes. Ce dernier, une fois le speech de la demoiselle, réfléchit longuement avant de répondre :

« Si nous en parlons à maître Don et aux autres, nous savons tous deux qu’ils nous conseilleront de mettre fin à tout ceci. Ils le feront car ce serait la solution la plus simple…mais, tu l’as dit toi-même, rien n’est jamais simple.

Je ne vais pas cacher ce que je ressens si on me le demande, mais l’important pour le Conseil, nos pairs, les chevaliers et nos élèves c’est que nous soyons toujours capables de faire notre travail. On a bien vu que c’était le cas, notamment sur Byss. »

Il devait être capable de laisser son cœur de côté lorsqu’il endossait son rôle de jedi, de gardien, de mentor, de maître d’armes et de maître. Le reste du temps ? Il devait avoir la liberté d’avoir une vie privée, d’aimer ce que ou ce qu’il avait envie d’aimer : tout simplement. Sa camarade lui annonça alors la seule chose qu’il avait envie d’entendre, la chose si plaisante à ses oreilles qu’il semblait qu’un gigantesque poids fut enlevé de ses épaules. Soupirant discrètement de soulagement, ses émotions tout à fait perceptibles à travers la Force, le garçon écouta son amie lui dire qu’elle avait eu besoin de son baiser – dans le parc – pour la faire avancer. Ni une ni deux, il se retourna alors et lui demanda, un sourire au coin des lèvres :

« Celui-ci, tu veux dire ? »

Entourant délicatement le doux visage de son amie de sa puissante main droite, le garçon s’approcha et, à l’image de l’évènement du parc qui avait laissé la demoiselle abasourdie, déposa un doux baiser sur les lèvres de la demoiselle. Il n’était plus question ici de la surprendre ou la prendre au dépourvu en lui montrant quelque chose qu’elle n’attendait pas, il s’agissait ici de tester ses dernières paroles concernant ses sentiments et de confirmer ces derniers.
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Un baiser, à tout prendre qu’était-ce ? Une promesse murmurée d’un peu plus près, une préface menant à une poésie des corps, une prémisse annonciatrice d’un changement. Tout cela, évidemment, se retrouvait dans la plupart des baisers, a fortiori dans cette catégorie bien particulière du premier échangé entre deux personnes, tout du moins dans sa version où les deux partenaires se répondaient l’un l’autre, désireux de céder à la suavité de l’instant. Ce qui était précisément le cas maintenant.

Dans le parc, trop surprise par ce mouvement inattendu, Alyria n’avait même pas réagi, restant stupéfaite, incapable de bouger. Evidemment, les circonstances étaient toutes autres à présent. Rien que l’atmosphère en elle-même semblait le susurrer dans la nuit d’Ondéron. Certes, il y avait encore beaucoup à dire, à discuter, à mettre au point, mais la trentenaire se refusait à briser ce moment. Il y avait presque une impression de sérénité qui se dégageait du tableau se dessinant sur le lit de cette chambre étroite, presque un bref instant d’éternité après cette folle journée.

Pendant quelques secondes, Alyria se contenta donc de savourer le contact des lèvres de l’épicanthix, comme un explorateur respire doucement le parfum de la terre qu’il vient de découvrir après les prémisses parfois déconcertantes de l’atterrissage. Pas de surprise, pas de recul, pas de peur, et surtout, pas de question : juste une sensation enivrante et douce. Cependant, bientôt, comme mue par un instinct trop longtemps occulté, oublié, la maîtresse d’armes sut qu’il n’était plus question de recevoir, mais aussi de montrer qu’il n’y avait pas que des mots derrière ce qu’elle avait exprimé tantôt.

Alors, doucement, la trentenaire prit le contrôle du baiser, et se décida à briser la chasteté délicate des premiers instants pour mener un ballet plus sensuel : elle passait de la promesse à sa réalisation, emportant son partenaire dans une danse où se mêlaient désir et tendresse. Certes, tout ne pouvait être parfait, les premiers baisers échangés entre deux êtres l’étaient rarement, il fallait s’adapter, trouver l’autre, mais malgré les petites maladresses, il finissait souvent par se dégager de ces quelques moments une sensation de découverte délicieuse. Et c’était exactement le cas à ce moment précis, Alyria essayant d’exprimer par ses actions ce qu’elle avait dit, et même plus.

Seulement, la trentenaire ne désirait pas non plus se laisser emporter par ce déluge de nouvelles sensations, ne sachant que trop bien les enchaînements qui pouvaient se faire en de telles positions. D’abord, ils devaient convenir d’une conduite à tenir face à l’Ordre, et après, après seulement…

Lentement, pour ne pas en perdre les derniers charmes, la sang-mêlée rompit le baiser, se détachant doucement de l’étreinte de son partenaire. Elle resta là un petit moment, à reprendre son souffle, puis se rassit correctement.

Sans doute que d’autres auraient considéré ce qui venait de se passer comme un point de retour, et auraient tout simplement jeté aux orties toute pensée d’organisation et de précaution, profitant simplement plus avant des plaisirs de l’amour sans se soucier des conséquences et de leur statut de jedi. Sauf qu’Alyria n’était guère ce genre de personne, et avait passé l’âge, à son humble avis, de se laisser dominer par ses désirs au point d’en oublier toute prudence ou toute réfléxion. Elle n’était plus cette jeune adulte au jugement obscurci le temps d’une nuit, et savait que si ce qui venait de se dérouler confirmait désormais plus que clairement la nature de leur lien, et surtout son évolution, ce n’était pour autant une raison pour se jeter tête baissée vers l’inconnu, car alors seul l’échec les attendrait.
 
Préférant néanmoins que ces premiers mots soient plus agréables à entendre qu’une reprise un peu froide sur l’Ordre, elle ne put empêcher un sourire joyeux de s’épanouir sur son visage, avant de dire :

« Oh, sans doute… Même s’il se peut qu’à l’avenir, j’ai besoin que tu me rafraîchisses encore la mémoire de temps… »

Le sous-entendu était on ne peut plus explicite, et ses yeux verts pétillaient en prononçant cette phrase. Oui, Alyria espérait vraiment que cette soirée serait le début solide d’un nouveau chemin à deux, et non une fin en queue de poisson, ou alors un entre-deux d’incertitude. Mais cela il était temps de le résoudre maintenant, et pour cela, elle devait répondre à ce qu’avait dit Lorn avant de l’embrasser.

Inspirant profondément, elle fit le vide momentané dans son esprit, reprit contenance et dit doucement, mais avec conviction :

« Contrairement à toi, je ne suis pas sûre que les maîtres du Conseil nous demanderait de rompre toute relation… Car ils auraient pu le faire lors des précédents de ces dernières années, mais n’ont jamais pris ce genre de décisions.

Aucune règle n’a été émise officiellement à ce sujet. Et quand on regarde les antécédents… Maître Caldin était au Conseil était au Conseil et a eu des jumeaux tout en conservant son siège, les chevaliers Shein et O’Syl ont eu aussi un enfant, et j’ai entendu quelques rumeurs comme quoi certains chevaliers ayant révélé une liaison avait eu l’autorisation de la poursuivre, sous quelques conditions évidemment.

Sans compter que de ce que je sais, certains des membres qui y siègent dorénavant ont des positions souples, notamment Gabriel. Disons que nos visions des relations au sein de l’Ordre ne sont guère éloignées, de ce que j’ai pu retirer de nos échanges. »

A ce moment, les révélations que son ami lui avait faire lors de leur nuit commune d’insomnie lui revinrent en mémoire. Non, elle savait que leurs visions se rapprochaient, et leurs années d’amitié faisaient qu’elle présupposait qu’à titre personnel, il ne jugerait pas. Evidemment, en tant que maître de Conseil, c’était autre chose évidemment, une donne différente.

Se reconcentrant sur son sujet principal, elle enchaîna :

« Je suis tout à fait d’accord avec toi après sur l’importance de pouvoir réaliser ce que l’on attend de nous. Et en effet, Byss a confirmé cet état de fait. Même si à l’époque, il n’y avait finalement rien de… Comment dire… Enfin, j’aurais pu décider de ne rien faire à ce propos. Néanmoins, c’est une indication précieuse.

Historiquement, suivant les époques, certains jedis ont pu entretenir des relations amoureuses avec l’accord du Conseil, et c’est de fait le cas actuellement. Cela peut changer, car jusqu’à présent, nous avons eu des décisions au cas par cas. Mais en l’état actuel des choses, c’est un élément important. Et si on remonte dans les annales de l’Ordre, les demandes étaient souvent claires. Deux jedis doivent, pour entretenir une relation stable, être capable de se détacher suffisamment de l’être aimé, et de faire passer leur devoir avant tout, ainsi évidemment, de manifester certaines dispositions pour ne pas se laisser tenter par les sentiments néfastes qui peuvent être les corollaires de l’amour.

Nous avons un avantage là-dessus : nous nous connaissons depuis des années, tout le monde le sait au Temple. Notre amitié ne fut jamais un obstacle, et notre tandem est reconnu pour son efficacité. Le tout est d’être sûrs qu’une évolution comme celle-ci ne remettra pas cela en cause, et de le montrer.

Par ailleurs, nous sommes des maîtres, ce qui assure une certaine expérience, et normalement, la reconnaissance implicite d’une capacité à se contrôler, à servir l’Ordre, que n’ont pas forcément les padawans ou les chevaliers, dont la jeunesse n’aide guère dans ce genre de cas.
Voilà ce que nous pouvons dire dès à présent. Mais cela ne constitue pas pour autant un gage de sécurité immédiat. Le glissement vers l’obscur peut se faire de manière insidieuse, hélas.

Concrètement, nous devons nous poser clairement une question : que faire au cas où la vie de l’autre serait menacée ? Bien sûr, on ne peut pas le savoir maintenant. Mais c’est pour ça qu’à mon sens, il est important d’édicter une règle qui s’appliquera peu importe les circonstances : ne pas placer la vie de l’autre avant l’Ordre, ou une mission. Et avec les conséquences qu’une telle décision implique. Pour moi, c’est un point central. Je suis prête à l’accepter. Et toi ?»

Alyria était devenue mortellement sérieuse. Plus question de douces plaisanteries ou de petites taquineries. Là, les implications de ce qu’elle venait étaient claires : jamais ne risquerait d’autres vies, ou la sienne, si on lui donnait l’ordre direct de ne pas secourir son compagnon, si cela allait à l’encontre de la mission qu’on lui avait demandé. En clair : elle mettrait jusqu’au bout son devoir avant sa vie privée.

Seulement, elle n’avait pas fini, car au final, il lui fallait trancher ce qu’elle avait énoncé au tout début de sa tirade. Et elle le fit :

« Quant au Conseil… Nous ne pourrons nous cacher éternellement. Et je ne le désire pas. A vrai dire, s’il était possible d’offrir toutes les garanties dès à présent, je me présenterais devant eux, ou au moins devant un des membres pour leur dire la vérité.

Cependant, nous devons faire face à un choix, car je t’avoue que j’exclus complètement l’idée de ne rien dire ou d’attendre d’être pris sur le fait. Soit nous disons tout maintenant, sachant que nous n’aurons pas toutes les réponses qu’ils désireront à fournir, soit nous attendons un peu, afin de donner à cette relation une… Comment dire… Période d’essai, de test, je n’ai pas mieux à offrir comme termes, afin de nous assurer que nous pouvons offrir les garanties que l’on attend de nous, et de s’assurer que nous sommes capables de faire face aux changements. Alors, forts de cette résolution, nous nous présenterons devant le Conseil, sachant qu’on pourra nous reprocher d’avoir attendu.

Rien d’autre ne me vient à l’esprit. Après, je ne sais pas ce que tu en penses, ni ce que tu préférerais. »

A son sens, Alyria avait plus que fait comprendre sa position. D’un côté, il lui paraissait un peu dur de poser des conditions ainsi, mais de l’autre, elle les voyait comme une nécessité absolue avant de franchir définitivement le pas et de s’engager sur une pente difficile, où la chute était facile, et qui nécessitait donc un maximum d’engagement et de sécurité.

Elle resta donc un long moment après cela sans rien dire, attendant que Lorn réponde et expose son avis sur les questions soulevées. Cependant, une image s’imprima dans son esprit, que l’importance de la conversation avait momentanément chassé, mais qui n’avait pas manqué de la surprendre. Aussi, elle finit par demander d’une voix un peu hésitante :

« Je sais que cela n’a rien à voir avec la conversation que nous sommes en train d’avoir mais… Je ne peux pas m’empêcher de… Les marques, sur ton dos… Enfin, je les avais déjà vues quand nous étions jeunes, ou après les entraînements, mais à la lumière de ce que tu m’as dit sur ton enfance… Elles datent du temps où tu étais… »

Les mots se coincèrent dans sa gorge. Quand elle était jeune et qu’elle avait l’habitude d’entrer dans la chambre de son ami sans frapper forcément, ou après les entraînements parfois, il lui arrivait d’entrapercevoir ces marques, mais le garçon s’était toujours débrouillé pour cacher leur étendue, et elle-même n’avait jamais osé poser de questions, se disant que ces stigmates étaient les marques de quelque mission ratée. Mais en voyant cela aussi clairement que maintenant, avec en mémoire les révélations faites quelques semaines plus tôt, leur origine trouvait une explication bien plus sombre.

« … dans l’arène ? »

Alyria acheva sa phrase après un long moment, ayant cherché comment formuler la chose avant d’opter pour ces trois mots qu’elle détesta presque immédiatement. Mais il fallait qu’elle sache. Après tout, comment fonder une relation stable et éclairée si elle ne connaissait pas toutes les parts d’ombre de son partenaire ?
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Pourtant sans vraiment grande expérience sur le sujet, le jeune homme laissa marcher son instinct qui lui signala que c’était le moment opportun pour tenter une approche un peu plus personnelle et, à sa grande surprise, la demoiselle ne sembla pas détester ce geste. Comment le su-t-il ? Quand la même demoiselle prit les devants et qu’il se laissa faire, profitant de cette danse de ses lèvres contre celle de cette déesse à la crinière de feu. Nul mot n’était nécessaire pour comprendre que la situation était différente de la fois précédente et que, aujourd’hui, l’un comme l’autre étaient décidés à aller de l’avant. Pendant plusieurs secondes qui parurent être une éternité, les deux amants s’embrassèrent et s’enlacèrent avec passion et tendresse jusqu’à ce que le moment soit venu de s’écarter, avant que les choses n’aillent plus loin et ne dégénèrent en quelque chose d’autre…quelque chose qui les empêcherait très certainement de finir la conversation qu’ils étaient en train d’avoir. Ai-je vraiment besoin de vous faire un dessin sur le sujet ? J’espère vraiment que non…car je suis très mauvais dessinateur.
Réagissant à la petite phrase de sa demoiselle qui tentait de désacraliser ce moment et de détendre l’atmosphère, le jeune homme répondit immédiatement avec un petit sourire en coin :

« Ce sera avec plaisir. »

Plaisir…même si c’était bien là ce dont il s’agissait, mettre un terme sur cette sensation était assez étrange pour le jeune homme qui n’était pas familier avec ce terme. Il faisait parfois des choses par envie ou par devoir mais le plaisir ne faisait que rarement partie de l’équation, vous voyez ? Le plaisir menait à la passion, à la colère et à d’autres émotions dont il était censé avoir le contrôle total : le plaisir n’avait jamais été une donnée à prendre en compte…jusqu’à maintenant.
Sa camarade et désormais amante, bien plus à l’aise que lui lorsqu’il s’agissait de tisser des liens avec d’autres personnes, semblait certaine que d’autres jedis – jusqu’au Conseil – étaient bien plus souples dans leur vision d’une relation entre deux jedis. Ne connaissant ce Gabriel que de nom, sans vraiment avoir eu l’opportunité de beaucoup discuter avec lui, le maître d’armes ne put que répondre :

« Pour cela, je te fais confiance là-dessus. Maître Don mis à part, je ne suis pas assez familier avec les membres du Conseil pour connaitre leurs positions sur le sujet. Et puis, de toute façon, quand bien même ils ne demanderaient d’y mettre un terme : que pourraient-ils faire ? Exclure deux maîtres, deux maîtres d’armes serait sans précédent dans l’histoire de l’Ordre. Ils tenteraient plutôt de nous raisonner et de faire appel à notre sens du devoir et des responsabilités. »

Des jedis avaient été bannis de l’Ordre auparavant, c’était de notoriété commune, mais les bannir pour empêcher une relation d’aller plus loin ? De mémoire, Lorn ne se souvint pas que cela ait déjà été fait auparavant. Est-ce que cela allait commencer avec eux deux ? Il ne pensait pas.
Écoutant sa camarade lui expliquer son point de vue sur la question, le garçon prit son temps pour écouter avant de finalement répondre :

« Du moment que nous faisons notre travail, sans faillir, ils n’auront aucune raison de s’opposer ouvertement à tout ceci. Je ne pense pas que ce soit de l’arrogance que de dire que nous savons bien mieux à quoi nous nous exposons que deux padawans se découvrant l’un l’autre. »

Il était ici question de contrôle, de self-control et qui mieux que des maîtres pouvaient, au sein de l’Ordre, être capable du plus grand des contrôles sur leurs émotions ? Ce n’était pas de l’arrogance que de dire qu’ils étaient capables de contrôle, ce le serait s’ils finissaient par se persuader capable de contrôler des choses qui les dépassaient. Bientôt la demoiselle établit la plus claire des règles, à savoir faire passer l’Ordre avant la vie de l’autre et, réfléchissant à la question, le garçon répondit le plus honnêtement possible :

« Si le choix est en mon pouvoir, je ne sacrifierai jamais volontairement la vie d’un jedi pour sauver la mienne, que ce soit ta vie ou celle d’un autre. Mais comme le choix nous est rarement donné, je ferais passer mon devoir avant tout le reste, comme je l’ai toujours fait. J’espère simplement ne jamais en arriver à une telle situation. »

Réfléchissant à ce qu’il venait de dire, il s’autorisa à afficher un petit sourire qui sentait bon l’amertume avant de rajouter :

« Le sacrifice fait partie de notre voie, malheureusement. »

Reprenant la conversation sur un ton un peu plus sérieux, il était temps pour le duo d’aborder un sujet épineux à savoir le moment où ils allaient avouer au Conseil leur relation. Ne sachant pas vraiment sur quel pied danser quant à la décision que prendrait ledit Conseil, le maître resta attentif aux propos de sa camarade qui pensait que c’était nécessaire de laisser un peu de temps passer pour tester la force de cette relation. Prudent ? Sans doute, cela n’était pas étonnant venant d’Alyria mais peut-être était-elle la voix de la raison. Débarquer devant le Conseil et lancer de but en blanc que leur relation devrait être acceptée ? Trop risquée.
Laisser du temps et des épreuves tester la solidité et l’efficacité du duo ? C’était la proposition d’Alyria et Lorn lui répondit donc :

« Je ne désire pas plus que toi me cacher du Conseil, comme un enfant ayant fait une bêtise et préférant éviter de se faire punir par ses parents. Le moment venu je ferais face au conseil. Mais si tu penses qu’attendre un peu est nécessaire, qu’il faille mettre à l’épreuve cette relation pour tester sa solidité, malgré ce que nous avons pu démontrer sur Byss et avec ce Darth Nero, alors je m’y plierai. J’espère simplement que ces garanties seront suffisantes aux yeux du Conseil. »

Puis, alors que le jeune homme s’était levé pour réfléchir aux propos qu’il venait de lancer, il fut interpelé par la demoiselle qui lui rappela quelque chose qu’il avait tendance à oublier. Portant la main gauche à son dos, le fait de palper les irrégularités de ce dernier lui rappela soudainement qu’il avait des cicatrices à ce niveau. Il s’étonna de l’avoir oublié et lança :

« Ah, ça ? Ce n’est pas grand-chose. »

Marchant dans l’espace réduit de sa chambre, il posa sa main droite sur son menton afin de réfléchir à la manière dont il allait présenter les choses. Ce n’était pas simple d’expliquer ces choses-là sans tomber dans le dramatique ou le mièvre : il n’avait pas vraiment envie de plomber l’ambiance. Affichant alors un sourire comme une façade pour masquer réellement ce qu’il pensait ou ressentait, il expliqua alors la raison de ces marques.

« Disons que je n’étais pas vraiment l’employé du mois et que, là-bas, leur méthode pour motiver le personnel était assez…directe. C’est amusant de voir que, malgré toutes les évolutions technologiques dont nous disposons aujourd’hui, le fouet reste une des armes favorites des tortionnaires. Comme quoi…les classiques restent indémodables. »


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L’espace d’un bref instant, d’une fugitive pensée, Alyria se demanda quelle pourrait être sa vie en dehors de l’Ordre, en cas de bannissement, possibilité évoquée par Lorn. Et la réponse lui vint de manière brutale, froide, et tellement évidente : rien. Oh bien sûr, elle ne serait pas seule dans ce cas, mais… Sa vie était celle d’une jedi, le Temple représentait son foyer, sa famille, ses souvenirs. Si elle ne pouvait se résumer à son statut de jedi, la maîtresse d’armes ne pouvait nier que c’était une part trop importante d’elle-même pour s’en dissocier et vivre sereinement.

Et elle décida d’exprimer ce point de vue d’une voix douce :

« Sans doute qu’en effet, avant d’en venir à de telles extrémités, nous aurions le choix entre partir, ou rompre toute relation au nom de la raison et du devoir. Et le devoir passerait avant tout, comme de juste. »

Avait-elle besoin d’expliciter ce que cette phrase lourde de sens sous-entendait ? Non, elle n’en avait pas le sentiment. Lorn comprendrait. Alyria ne pouvait imaginer sa vie hors de l’Ordre, et elle savait que confrontée à un choix sans appel entre vie privée et statut de jedi, elle choisirait de rester une jedi. Peu importe le prix à payer, les sacrifices à faire. Telle était la voix de ceux qui rejoignait les rangs des utilisateurs du côté lumineux. Elle comprenait que beaucoup soient ceux le trouvant trop élevé. Il eut été mensonger de prétendre le contraire. Mais de grands pouvoirs appelaient de grandes responsabilités… Et les responsabilités elles-mêmes appelaient des devoirs importants. Cercle vertueux pour les uns, vicieux pour les autres, à vrai dire, là n’était pas la question : il fallait apprendre à renoncer pour avancer sur la voie des jedis quand il devenait nécessaire de trancher. Alors, même si la maîtresse d’armes espérait ne pas avoir à faire ce choix, elle savait qu’en s’engageant sur cette voie, elle aurait cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête, et qu’il faudrait être prêt à en assumer toutes les conséquences.

Lorn venait de le résumer simplement, avec une voix dans laquelle perçait une pointe d’amertume : les sacrifices faisaient partie de leur voie. Cependant, il n’y avait aucune acrimonie dans la sienne quand elle répondit tout à fait sereinement :

« En effet. Il est nécessaire de les faire pour comprendre ce pourquoi nous nous battons… Et nous assurer de la sécurité des autres, même s’ils ne comprennent pas forcément nos raisons d’agir ainsi. »

Il n’était jamais aisé de se résigner à sacrifier beaucoup de choses sans rien avoir en retour, hormis de la méfiance, parfois une pointe de reconnaissance, mais jamais plus. La sensibilité à la Force était de ce point de vue autant un don qu’une malédiction, car elle mettait à l’écart des autres. Ses utilisateurs voyaient le monde différemment, et tous pouvaient le sentir, le savoir. C’était autant une possibilité merveilleuse qu’un fardeau. Mais les années lui avaient appris à l’assumer, et même à en apprécier les menues compensations, même si pour cela, elle devait apprendre à envisager le pire pour s’y préparer.

Elle déclara donc :

« Comme toi, je préférerais ne pas avoir à faire ce choix. Peu importe dans quelle situation. Et surtout face à un danger mortel. Mais, pour avoir déjà été confrontée à un moment pareil… Je connais le résultat qui vient en faisant le mauvais choix. Alors je ne peux pas m’empêcher de m’assurer que les choses seront différentes, et de mon côté comme du tien.

Je sais que ce n’est pas forcément comme cela qu’on envisage les premiers mots prononcés après s’être trouvé, les premières décisions à deux… Mais j’avoue que pour l’avoir expérimenté, je préfère que l’on soit d’accord… Si le pire devait se produire. Et ta réponse me rassure sur ce point. »

Alyria avait forgé son expérience des affres que l’amour pouvait apporter aux jedis dans le sang et l’obscurité : ce jour-là, il y avait quinze ans, elle avait fait le mauvais choix, parce qu’elle ne s’y était pas préparé, parce qu’elle n’en avait pas accepté l’éventualité. Plus jamais elle ne réitérerait la même erreur. Elle avait mûri et surtout, pensé, réfléchi et accepter complètement le poids de ses décisions, de ses actes, et de ce qu’ils pouvaient entraîner. Voilà quelle était la différence entre hier et aujourd’hui, entre la réussite et l’échec d’une relation.

« Sans doute que notre avantage sur des personnes plus jeunes vient de notre expérience, et de notre contrôle… Mais aussi sans doute de notre capacité à accepter toutes les éventualités, à envisager les sacrifices à faire au nom du devoir. Consentir à une fin, quelle qu’elle soit… Je me demande si ce n’est pas une signification comme une autre de ce fameux Il n’y a pas de mort, il n’y a que la Force… »

Puis, sentant qu’elle dérivait vers des terrains un peu trop philosophique pour cette soirée, elle ajouta avec un sourire un peu forcé :

« Navrée, je m’égare un peu… Je réfléchis sans doute trop… Et en même temps, dans pareille situation, je me dis que c’est la chose à faire. »

Analyser, encore et toujours, réfléchir, soupeser… C’était une telle habitude en elle qu’Alyria ne pouvait s’empêcher de le faire en toutes circonstances, et à vrai dire, elle avait l’intime conviction que si cela ne menait pas à un sujet de conversation particulièrement léger, de telles précautions étaient nécessaires. Oui, la légèreté pouvait attendre…

Au moins Lorn était d’accord avec son idée, et cette perspective lui arracha un sourire cette fois sincère, et elle ne doutait pas que l’epicanthix saurait parfaitement faire la différence. Il la connaissait trop bien pour se laisser berner aussi facilement. Elle finit par répondre donc :

« Je ne sais pas si nous pourrons présenter des garanties satisfaisantes. Mais nous essayerons. Après tout, savoir concilier des vies aussi différentes que celles qui vont être les nôtres après ce soir… Toi à restaurer le Temple, et moi à diriger les armées… Et qui sait ce à quoi nous pourrons être confrontés dans les semaines, les mois à venir ?

Nous avons prouvé que nous étions capables de mettre nos questionnements de côté sur Byss et avec la visite de ce sith. A nous de montrer que nous pouvons faire de même quand la situation est sûre, et les circonstances difficiles.

Parce que si nous nous présentions maintenant… Déjà que je viens d’être nommée ministre, certes sans avoir rien demandé, mais le résultat reste le même, alors ajouter cela immédiatement… Tu viens de prendre une padawan…Non, cela ferait trop, et je pense qu’il faut que nous voyions si nous arrivons à surmonter ce changement, en tant que jedis, individuellement d’une part, et à partir de maintenant… Ensemble. »

Voilà qui était dit, acté.

En entendant Lorn parler de son passé d’esclaves, Alyria sentit sa gorge se nouer. Elle sentait que par ses mots, sa dérision, l’homme tentait de minimiser ce qui lui était arrivé. Mais la maîtresse d’armes ne pouvait pas détacher ses yeux de ce dos martyrisé. Comment pouvait-on survivre à cela en tant qu’enfant ? Encore une réminiscence, si cela était nécessaire, du fait qu’ils ne venaient pas du même monde, avaient vécu leurs jeunes années pré-Ordre jedi de manière tellement différente.

Et pourtant, les meurtrissures dans sa propre chair, Alyria en avait subi. Elle ne comptait plus ses propres cicatrices, son visage et sa main en étant les témoins les plus marquants. Mais elle les avait subi en tant qu’adulte, sûre de son appartenance à l’Ordre, et avait été victime de ce choix de demeurer loyale envers et contre tout aux jedis et aux préceptes qui lui avaient été enseigné. La différence était évidente, douloureusement flagrante.

Incapable de se retenir, la trentenaire se leva et enlaça doucement le torse de son amant par derrière, et elle posa doucement ses lèvres sur l’une des cicatrices hautes. Peu importait ces marques, elles faisaient partie de Lorn, et la sang-mêlée voulait lui montrer qu’il n’avait pas besoin de se cacher derrière des paroles rassurantes avec elle.

Se détachant après un bref moment, elle envoya valser le gant blanc qu’elle portait à sa main droite, et entreprit silencieusement de tracer les contours de ces cicatrices une à une, laissant faire son instinct. C’était sa réponse, sa manière d’exprimer ce qu’elle ressentait.

Au bout d’un moment, elle finit par dire :

« Les echanis ont tendance à penser que le contact physique nous permet de lire dans les pensées de l’autre. C’est ce qui explique l’art du combat echani entre autre. Je n’appartiens à cette espèce qu’en partie, mais j’ai souvent trouvé que cet adage se vérifiait dans de nombreux cas. Je ne peux pas lire dans ton esprit… Mais rien ne m’empêche de tenter de comprendre ce que tu as vécu de cette manière. »
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Le jeune homme savait bien que viendrait un jour où il aurait un choix crucial à faire, comme choisir entre la vie d’une personne ou de plusieurs autres, mais cette idée semblait si lointaine qu’il ne désirait pas y accorder de l’importance. Devrait-il choisir entre l’amour et la devoir ? Il choisirait le devoir, bien entendu, mais l’idée d’avoir à faire un tel choix était tout sauf plaisante.

« Évidemment. Mais j’espère ne pas en arriver là. »

La demoiselle évoqua alors les sacrifices faits par les jedis, les sacrifices dont les autres n’auraient sans doute jamais conscience mais qui représentaient la voie du côté lumineux de la Force. Pensif à ce sujet, le garçon finit par répondre alors :
« Nous sacrifions ce qui nous ralentit pour continuer d’avancer, pour continuer de maintenir un équilibre précaire dans une galaxie qui n’en a même pas conscience. Aussi ingrat que soit ce boulot, quelqu’un doit le faire…mais parfois j’aimerais que nous n’ayons pas à tout sacrifier pour cet idéal. Pas toi ? »

Écoutant toujours sa camarade lui exposer son point de vue sur l’un des préceptes des jedis, celui niant la mort au profit de la fusion avec la Force, le jeune maître se mit à réfléchir comme pour peser ses mots avant de finalement répondre :

« En théorie nous acceptons tous que nous aurons un jour à rejoindre la Force, mais la plupart des jeunes amoureux ne peuvent concevoir que ce soit l’autre qui rejoigne la Force. Ce vide amène la colère, la frustration et on sait où mène ce chemin pour l’avoir déjà emprunté. Nous savons ce qu’il y a au bout du chemin et c’est ce qui fait la différence. »

Vint ensuite le sujet des garanties que le duo allait devoir présenter au Conseil pour exposer sa bonne foi et sa détermination à faire leur devoir contre vents et marées et, lorsque la demoiselle évoqua le petit séjour de Lorn sur Coruscant, ce dernier ne put masquer un sourire amuser tout en répondant :

« Je préfère ne pas trop penser à ce qui m’attend là-bas, je sens que je risque d’être déçu. Pour le reste…laissons le temps suivre son cours et nous verrons bien, le moment venu, ce qui décidera le Conseil. Il est inutile de se triturer l’esprit davantage. »

Debout dans sa chambre, laissant son esprit vagabonder en de sombres lieux où il ne s’était pas aventuré depuis bien trop longtemps, le contact charnel de son amante l’extirpa immédiatement de ces ténèbres, comme une main tendue à travers l’eau pour l’empêcher de se noyer. Attrapant cette main, il releva la tête en sentant le contact de sa bien-aimée contre son dos à jamais marqué par ses erreurs du passé. Elle désirait le comprendre par le contact physique car c’était ainsi que les echanis pensaient pouvoir lire dans les pensées de l’autre. Aussi singulière que soit cette pratique, le garçon la respectait mais ne désirait pas pour autant embrumer l’esprit de la demoiselle avec des souvenirs qui faisaient partie du passé.
Posant ses mains sur les siennes, il s’autorisa alors à prendre une bouffée d’air avant de lui répondre :

« Tu n’as pas besoin de comprendre ce que j’ai vécu, je n’ai nullement envie de t’implanter de sombres souvenirs dans ton esprit. C’est une période de ma vie qui m’a permis d’en apprendre beaucoup sur moi-même et ce dont j’étais et suis encore capable…certes, cet apprentissage ne s’est pas fait en douceur, mais je le vis bien quand même. »
Comme tous les jedis il avait appris à faire paix avec lui-même et à accepter son passé comme une étape de sa vie, sans pour autant s’y accrocher comme une bouée de sauvetage au milieu d’une tempête. S’accrocher à ces souvenirs n’était pas toujours une bonne chose, il le savait bien même s'il avait toujours eu un peu mal à tourner la page. S’autorisant finalement un soupir, le garçon répondit par :

« Malheureusement mon peuple n’a pas une telle vision des choses, pas de croyance particulière quant à l’art du combat. Mais si tu cherches vraiment à comprendre cette période de ma vie, il n’y a qu’un seul souvenir qui vaut la peine d’être gardé. »

Sur ces mots, le garçon posa ses mains sur celles de son amante et mis fin à cette douce étreinte, non sans regret, avant de se rapprocher de ce qui semblait être une table de chevet à droite de son lit. S’asseyant sur le bord de ce dernier, le garçon ouvrit un tiroir et y plongea la main, dégageant quelques affaires sans importances avant d’en sortir un petit objet métallique de forme arrondie. Monté en pendentif grâce à une fine mais solide chaîne métallique, cet objet semblait avoir pris la poussière, comme s’il n’avait pas été sorti de ce tiroir depuis des lustres. Soufflant dessus, Lorn enleva toute la poussière qui révéla la véritable nature de cet objet comme était une version miniature d’un projecteur d’hologramme.

Posant cet objet au creux de sa paume droite grande ouverte, le garçon fixa cet objet pendant un instant avec une lueur de nostalgie dans les yeux parce qu’il savait ce qu’il représentait réellement. Puis, afin quelques secondes d’un silence sans doute embarrassant, il releva les yeux vers sa camarade avant de lui montrer l’objet et de lui dire :

« Bon, normalement je ne devrais pas l’avoir, mon maître m’a toujours mis en garde contre le fait de le conserver mais je n’ai jamais pu accepter de m’en séparer. Ce n’est pas digne d’un maître, je sais, tu vas probablement me faire la morale là-dessus d’ailleurs. Quoi qu’il en soit, de mémoire, à part maître Torm, tu es la première à qui je le montre. J’espère que tu sauras garder le secret. »

Pressant un petit bouton sur le côté de l’appareil, le jeune homme fut soulagé de voir que l’appareil fonctionnait encore lorsque ce dernier s’alluma pour laisser apparaître au-dessus de lui la forme holographique miniaturisée d’une famille. Un homme se tenait là, fort, grand et fier accompagné de sa femme toute menue mais dont le visage semblait capable d’éclairer la galaxie toute entière. Dans ses bras la demoiselle tenait un enfant qui ne devait pas avoir plus de 5 ans tandis que, aux pieds du père, se trouvait un petit garçon au sourire radieux. C’était une famille normale mais si le jeune homme avait cette image en sa possession alors cela ne pouvait signifier qu’une seule chose…la demoiselle comprendrait-elle ?

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Se sacrifier pour l’idéal ? Une noble tâche, parfois lourde à porter. En un sens, Alyria comprenait ce que Lorn voulait dire. Quel jedi, à un moment de son existence, n’avait pas été amené à penser la même chose ? Quel homme ou femme de l’Ordre n’avait pas soupiré, tempêté, face à une concession à faire, demandée par le code ou le Conseil ? Aucun, tous avaient connu ce genre de moments, la maîtresse d’armes ne faisait pas exception.

Généralement, ce type de questionnement était particulièrement fort à l’adolescence, ou dans les premières années de la vingtaine, quand les illusions se heurtaient à la réalité de l’existence de jedi en dehors du Temple, ou quand les premières émotions fortes surgissaient. Sans compter ceux qui, détectés tardivement, rejoignaient l’Ordre avec les souvenirs remplis d’une famille aimante et aimé. Mais de fait, sacrifier tout espoir d’une vie de famille, pour beaucoup, toute vie personnelle, demandait une abnégation constante. Etre toujours sur le contrôle, accepter un rôle ingrat de protecteur que beaucoup dénigrait, lire la peur sur les visages… Comprendre la beauté du renoncement pour servir un idéal plus grand que soi exigeait des années d’expérience et une maturité qui ne venait que plus tard. 

Pourtant, à son âge, avec le temps, et un certain vécu, allié il est vrai à un manque d’attaches extérieures au Temple, Alyria avait fini par percevoir les dessous de telles décisions, et à les accepter pour ce qu’elles étaient : les marques de la voie des jedis, et du côté lumineux. Qui avait dit que ce chemin était facile, et immédiatement gratifiant ? Pas elle, en tout cas. Mais elle ne le regrettait pas forcément. Ce qu’elle tenta d’expliquer à Lorn.

« Bien sûr, idéalement, sans mauvais jeu de mot, ce serait plus simple sans ces sacrifices. Mais le côté lumineux est justement exigeant, et demandant un engagement aussi fort que nous le suivons. C’est vrai, on n’en voie pas immédiatement les fruits. Pourtant, je trouve que plus le temps passe, et plus je me rends compte de la nécessité de ces sacrifices. Ils nous donnent la force d’avancer, font comprendre ce que l’on tente d’éviter à la galaxie.

Nous n’avons pas choisi nos dons. Mais, au moins, nous pouvons tenter de les utiliser à bon escient, sans mettre en danger les autres par notre propre volonté, nos propres envies. C’est sans doute un mal nécessaire pour un bien plus grand que nous. 

J’aime préserver ce que je peux d’activités purement personnelles, évidemment. Si je n’avais pas été jedi, j’aurais pu le faire plus abondamment bien sûr. Mais ce n’est pas le cas. Alors je préfère l’accepter pleinement plutôt que de me demander si un autre chemin ne serait pas mieux. »


Constat dur, pas forcément agréable, un peu froid, elle en avait pleinement conscience. A vrai dire, en s’entendant parler ainsi, Alyria se rendit compte que malgré ses trente-quatre ans, elle réfléchissait avec l’expérience d’une personne plus âgée, comme quelqu’un qui a trop vu la vie et a appris à savourer le temps présent. Aussi elle ajouta pour tempérer un peu ce jugement :

« Je préfère apprécier les moments agréables qui me sont accordés. De cette manière, il est infiniment plus aisé d’accepter, et même d’apprécier notre mission. Savoir se contenter de peu, du temps présent, c’est un bon moyen de tenir à distance les regrets et les questions, cela sans perdre de vue l’équilibre et le monde autour. »

Voilà qui était presque une application concrète à la vie de tous les jours d’un mélange que certains auraient jugé hétérodoxe entre Force Vivante et Force Unificatrice, soit un reflet finalement assez fidèles du positionnement philosophiques d’Alyria. Elle avait pensé chaque aspect de sa vie en accord avec sa vision du code, sa compréhension de la mission des jedis et son appréhension de la Force. Et c’était sa position souvent médiane au sein de l’Ordre sur de nombreux sujets qui offrait le résultat sur sa vie, et sa personnalité. En un sens, cela expliquait sa capacité à faire des compromis, à s’intéresser à l’extérieur sans renier ses principes premiers, tout en étant capable de trancher au moment opportun. 

Ce qui expliquait également son positionnement quant aux relations, et à sa capacité à y renoncer si jamais cela devait être fait. Du coup, elle en profita pour compléter les paroles de Lorn en y mettant même une pointe d’humour pour atténuer la sévérité de ses précédentes paroles :

« D’une certaine façon, il est encore heureux que nous ayons quelque avantage en matière de contrôle par rapport à des adolescents… Sinon, l’Ordre aurait du soucis à se faire. Mais en effet, connaître les dangers inhérents à ce genre de choses, c’est se prémunir. Tout comme être capable de trancher, de mettre la raison avant les sentiments, le bien commun avant son propre bien. »

Le reste en effet, ne pouvait être décidé en un claquement de main, ou quelques mots et serments. Ils avaient établi des règles, ils s’y plieraient, dans une stricte séparation entre vie privée et vie publique et dans le respect du code, et quand viendrait le jour de trancher, ils se tiendraient prêts.

« En effet, nous ne pouvons que tenter de montrer que cette relation respecte en tout point le code et est acceptable pour le Conseil et l’Ordre. Mais comme tu le dis, à la fin, nous ne serons pas les maîtres de cette décision. Cela dit, nos futurs actes pourront en partie la déterminer. Et déjà, se fixer des bases et des limites claires permet d’avoir une ligne de conduite claire, à mon sens. »

Sentant bien les doutes de son partenaire quand à son travail futur sur Coruscant, et désireuse de raffermir sa détermination, elle ajouta :

« Ne pars pas défait. Après tout, être le seul maître en plus de Maître Berryl te permettra de trouver une nouvelle place dans l’Ordre. J’ai entendu quelques murmures des plus jeunes dans les couloirs. Déjà la nouvelle de Byss s’est répandue. Tu dis souvent que nous sommes les boucliers de l’Ordre. 

Maintenant, il est grand temps que nous aidions à le construire et à le guider, car ainsi, nous contribuerons autrement à sa défense. 

Et prendre des responsabilités aussi fortes séparément et les mener à bien ne fera que solidifier notre demande auprès du Conseil. »


Si les deux jedis devaient prouver que rien n’altérait leur travail en duo, il leur faudrait également montrer qu’ils étaient parfaitement aptes à mener des entreprises délicates chacun de leur côté. C’était en cela que la présence au Temple de Lorn pour sa reconstruction et son avenir de ministre était aussi primordiaux. Quelle meilleure façon d’éprouver leur attachement au code, à la lumière ?

C’était d’ailleurs cela qui la motivait à tenter de comprendre le passé traumatisant de son amant. Elle voulait l’aider, apporter un peu de clarté dans ses pensées, et tandis qu’elle traçait la carte des cicatrices de Lorn sur le dos de celui-ci, les mémorisant presque, elle faisait appel au sixième sens du peuple de son père pour tenter d’appréhender ses souffrances, et elle sentait confusément une tristesse profonde, sombre, à travers ce toucher. Elle n’était pas aussi douée que les vrais echanis en raison de son sang-mêlé pour cela, et c’était peut-être sa sensibilité à la Force qui rendait la chose efficace, mais elle trouvait la manière symbolique. A défaut de pouvoir fusionner son esprit avec celui de l’épicanthix pour apaiser ses tourments à cause de la résistance innée de son espèce, elle pouvait se rapprocher de lui par ce biais.

« Je sais bien que tu ne désires pas cela. Mais il me semble important d’essayer de comprendre, pour essayer d’apaiser justement ces sombres souvenirs, comme tu dis. Après tout, il est parfois plus simple d’avoir le soutien d’un être aimé pour éclairer ces passages de nos vies.

Et pour être franche… Je ne sais pas, peut-être qu’en étant capable de te comprendre, notre relation en ressortira plus forte. »

Apparemment, l’argument parut faire mouche, puisque Lorn se détacha d’elle, brisant leur contact, et se mit à farfouiller dans sa table de nuit. Il en ressortit ce qui ressemblait à première vue à un pendentif. En s’approchant, Alyria put constater qu’à l’origine, l’objet était une sorte de holoprojecteur. Qui, au vu de l’air soudain empli de mélancolie de son amant, devait avoir une valeur sentimentale toute particulière à ses yeux.

Ne répondant pas tout de suite au propos de Lorn, car elle aurait bien été incapable de le faire au vu de l’émotion qui la submergea brièvement et de son incapacité à trouver tout simplement les paroles adéquates, elle se contenta de regarder ce portrait de famille. L’image était petite, mais elle avait l’impression de discerner dans ces visages quelque chose des traits de l’épicanthix. Et le bambin dans les bras de la femme devait être… Oui c’était forcément ça.

S’asseyant doucement aux côtés de son partenaire, Alyria prit une profonde inspiration et demanda simplement :

« Ce sont tes parents … et ton frère n’est-ce pas ? »

Evidemment, que c’était eux. Ça ne pouvait être qu’eux. Mais face au silence qui s’était abattu sur la chambre, la trentenaire essayait désespérément de trouver quelque chose à dire, de verbaliser l’évidence. Posant sa main droite sur l’épaule de Lorn dans un geste réconfortant, elle finit par dire :

« De toute façon, si je te faisais la morale, ça ne servirait pas à grand-chose… Je me trompe ? »

Elle ajouta ensuite :

« Du reste, je serais mal placée pour le faire sans doute. Je n’ai jamais eu réellement à me séparer d’une famille unie. Ma vie avec mes parents n’étaient pas celle d’une famille. Alors, je ne peux pas vraiment savoir ce que c’est. Ou plutôt, je peux le comprendre, mais je ne saurais pas trouver les mots qui viennent avec l’expérience de cet attachement en particulier. »

Cherchant un moyen d’exprimer plus avant sa pensée, elle s’arrêta un instant, et finit par dire :

« Cela dit. J’ai trouvé une famille au Temple, des personnes qui pouvaient comprendre ce que je ressentais quand je parlais de mes dons, qui partageait cette habilité unique. Alors peut-être que ça ne remplace pas forcément parfaitement les liens du sang… Mais en le vivant comme cela, j’ai toujours trouvé que beaucoup de jedis atténuait peu à peu leurs attachements précédents. »

Bougeant sa main pour couvrir le holoprojecteur et celle de Lorn au passage, Alyria la serra avant de déclarer :

« En tout cas, pour moi, mes amis du Temple forme ma famille. »

Puis dans un souffle : 

« Et tu y as toujours occupé une place très importante. Quoique un peu différente maintenant, bien sûr. Mais ce sera toujours le cas, peu importe ce qu'il arrive.»
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Le jeune maitre n’était pas obtus et n’avait pas un avis très arrêté sur les choses, il était content d’échanger son point de vue avec quelqu’un quand il pensait que cela en valait la peine, mais force était de constater que certains de ses pairs avaient l’art de l’endormir avec des tirades aussi longues qu’assommantes. Ainsi, il en était arrivé à esquiver certains maîtres et à arrêter d’échanger aussi souvent qu’il avait pris l’habitude de le faire au tout début de son ascension au rang de maître. Triste, n’est-ce pas ? Mais même avec tous les efforts du monde il n’arrivait pas à s’intéresser aux dialogues qui s’éternisaient, c’était plus fort que lui. Mais avec la femme qui se dressait à ses côtés c’était autre chose, il ne pouvait pas expliquer pourquoi mais il trouvait un intérêt à parler de choses inintéressantes pour peu qu’il le faisait avec elle et uniquement elle…étrange, n’est-ce pas ?
Il parlait aisément des valeurs de l’Ordre et du devoir d’un jedi, chose qu’il n’avait pas fait depuis qu’il était tout jeune padawan, pour vous donner un ordre d’idée, mais il le faisait bien volontiers car il aimait échanger avec cette femme. Le sacrifice…un sujet familier à de nombreux jedis et ceux qui n’y connaissaient rien finiraient forcément par y goûter tôt ou tard, c’était malheureux mais c’était un des prérequis de cette voie : tout dans la vie d’un jedi, jusqu’à sa vie, passait avant le bien du plus grand nombre. S’il devait sacrifier sa vie pour sauver toute une population, il le ferait sans sourciller car telle était sa voie. Mais cela ne l’empêcherait pas pour autant d’évaluer ses options en choisissant la plus efficace et la moins risquée…mais parfois les choses n’étaient pas aussi simples.

« Je sais bien que ce que nous faisons est juste, que c’est la chose à faire. Nous sacrifions nos vies pour le bien du plus grand nombre, c’est ce qui fait la valeur de nos actes. Nous nous battons pour que d’autres puissent vivres quelques jours de plus en paix, la Force nous a choisis pour cette importante tâche, je n’ai aucun doute là-dessus. Il y a juste des jours où je me demande ce que cela aurait donné si nous n’avions pas fait ces sacrifices…mais je doute que le résultat m’aurait plu. »

La demoiselle semblait avoir réfléchi à son avenir avec le jeune maître d’armes, bien plus que ce dernier ne l’avait fait et il s’en rendait alors compte. Elle avait une vision très claire de son avenir, de sa future relation avec le jeune homme ainsi que de sa place au sein de l’Ordre…combien de temps était-elle restée à plancher sur tout cela ? Mystère, mais Lorn aurait bien voulu le savoir.
Que pouvait-il dire de son côté ? Apprécier les moments agréables, pour lui, s’étaient résumés à s’entraîner au sabre et à se reposer dans les jardins du temple : il était un homme aux désirs simples. Quand sa camarade lui expliqua sa vision des choses sur le fait de profiter de l’instant présent et du peu qu’elle avait sans céder à un certain égoïsme, il répondit alors :

« J’imagine que oui. »

Sur le coup il n’aurait pas su quoi dire de plus mais cela ne le gênait pas plus que ça d’être à court de mort, il savait bien que sa camarade ne le blâmerait pas pour cela. Soupirant face à son impossibilité de décrire clairement ses pensées, il pensa utile de préciser une chose importante :

« Même si je râle souvent sur le nombre de sacrifices que nous devons faire pour les autres, les autres qui n’ont pas conscience de cela, je n’imaginerai pas un seul instant céder à mes caprices et mettre en danger autrui. »

Il avait beau râler et se demander pourquoi c’était à lui de tout sacrifier et pas aux autres, il ne lui viendrait jamais à l’idée de faire les choses autrement et de goûter à la part égoïste de lui. Pourquoi ? Parce qu’il n’avait pas été élevé ainsi, parce que son maître ne l’avait pas forgé pour qu’il pense de cette façon : si le sang était le prix qu’il devait payer pour que la galaxie reste en paix un jour de plus, c’était un prix qu’il payerait bien volontiers. Il n’en serait jamais autrement.
La discussion embraya rapidement sur le sujet de Coruscant et le garçon se rendit compte qu’il s’était mal exprimé sur le sujet, comme cela arrivait souvent à force de sortir la première chose qui lui passait à travers la tête. Il repris donc ses propos en expliquant à sa camarade que :

« Oh non, je connais l’importance de ce boulot. Je doute simplement d’être un bon baby-sitter pour tous ces jeunes padawans en mal de sensations fortes et de reconnaissance. Je suis bon pour enseigner les autres à se défendre, mais pour ce qui est de la discipline…disons que je ne suis pas vraiment le meilleur modèle à suivre. Non ? »

Oh, bien sûr, lors des missions officielles ou des entraînements il pouvait aisément paraître froid et autoritaire lorsque le besoin s’en faisait sentir. Mais qu’en était-il en réalité ? Était-il toujours le garçon turbulent qu’il était dans sa jeunesse, ou avait-il fini par mûrir et acquérir la patience nécessaire à son rôle ? Parfois il avait encore un peu de mal à le dire, peut-être que sa camarade pourrait l’aider à trouver un début de réponse.
Le sujet revint ensuite au passé du jeune homme et, même si sa camarade souhaitait simplement et sincèrement connaître les aspects les plus sombres de son passé, le garçon lui posa une question simple :

« À ton avis, quel est le point le plus important ? Comprendre celui que j’étais ou celui que je suis aujourd’hui ? »

Les deux étaient liés, cela ne faisait aucun doute, mais pouvait-on vraiment le blâmer pour éviter à son aimée les détails sombre et sanglants d’un passé auquel il ne s’accrochait plus depuis longtemps ? Ce n’était qu’une pièce du puzzle de sa vie, une pièce parmi beaucoup d’autres.
Homme complexe au possible, le jeune homme ne s’accrochait pas à ce qu’il avait pu faire d’horrible par le passé mais il s’accrochait bien volontiers aux visages de ses proches qui semblaient revivre devant lui, grâce à ce petit appareil. Il savait que ce n’était qu’une illusion, bien entendu, mais les revoir fit naître un sourire franc et nostalgique sur son visage.

« Exactement. Je dois être trop têtu pour mon propre bien, je sais que je ne devrais pas garder une telle relique du passé, mais je ne désire nullement que le temps finisse par effacer leurs visages de ma mémoire. Ils sont une pièce du puzzle qui constitue mon existence, les oublier serait comme oublier qui je suis ou d’où je viens. »

Lorn ne pouvait pas se définir comme seulement un jedi car il avait eu une vie avant l’Ordre, il était sans doute le seul à ne jamais oublier ce fait. Il avait été un fils, un ami, un esclavage et un guerrier avant de goûter au côté lumineux de la Force, il ne pouvait simplement pas oublier ces passages de sa vie de sa propre mémoire. Le jeune maître savait que sa camarade ne pourrait pas le comprendre car elle, comme beaucoup d’autres, était arrivée très jeune ici. Il répondit donc :

« Ça ne fait rien, je suis un cas un petit peu à part puisque j’étais trop vieux en arrivant. Je n’aurais pas été accepté si maître Torm n’avait pas autant insisté. Normalement il est censé être bien plus facile pour un nouvel arrivant d’oublier ces choses-là…parfois je me demande si, malgré ses remontrances, maître Torm n’a pas tacitement accepté que je me souvienne de mon passé. Il devait savoir que, du fait de mon âge, je ne pourrais pas oublier. »

Soupirant en se frottant la tête, le garçon ajouta :


« Je me pose sans doute trop de questions. »

Reposant l’objet sur la table de chevet, comme s’il n’en n’avait désormais plus besoin, le garçon répondit à sa camarade :

« C’est un autre genre de famille, dont je me sens plus proche que ma précédente, dans un sens. Il n’est pas nécessaire de remplacer les liens du sang. Si je n’oublie pas d’où je viens, je ne vais pas pour autant subitement tourner le dos à l’Ordre pour embrasser mon ancienne vie. Ma place est ici. »

S’approchant de sa camarade, il posa sa main sur son doux visage avant de conclure par un :


« Mais ça, j’espère que tu l’avais compris, même avant que je ne te montre ça. »

Bientôt le jeune maître approcherait son visage de celui de son aimée et l’embrasserait de nouveau pour conclure cette discussion, bientôt il pourrait enfin se laisser aller l’espace d’un instant, il pourrait oublier ses responsabilités et oublier l’investissement auprès du Conseil que lui demanderait cette relation naissante. Il avait envie de ne plus penser à rien d’autre à cet instant-là.
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Il était amusant de constater à quel point les êtres pouvaient changer au contact de l’autre. Lorn et Alyria en étaient le parfait exemple. Comment expliquer que ces deux jedis a priori si dissemblables s’apprécient autant ? Au départ unis par une passion commune pour le maniement du sabre-laser, quasiment du même âge, ces deux faits n’étaient pourtant pas suffisants pour expliquer une amitié aussi durable et profonde que la leur. Après tout, des jeunes gens aimant les arts des armes, il y en avait d’autres dans leur génération au Temple, et ils ne s’étaient pas liés de la même façon.

Certains auraient appelé ce phénomène étonnant l’alchimie des caractères, ce miracle des relations entre les individus, qui faisaient que deux individus se trouvaient un jour et commençaient à se fréquenter pour le simple plaisir de voir l’autre, d’échanger avec lui. Voilà ce qui était arrivé pour nos deux protagonistes : la sévérité de l’une s’apaisait au contact du deuxième, et cet homme de peu de mots finissait par émettre de vraies tirades une fois lancé par sa camarade, occasionnant un changement significatif pour tous ceux les connaissant, et qui en avait laissé plus d’un pensif.

Ainsi, quand Alyria entendit son amant évoquer sa capacité à râler, elle ne put s’empêcher de sourire. C’était vrai, l’épicanthix était l’élément bouillonnant, à vif de ce duo, alors qu’elle préférait l’analyse en amont et le suivi des règles. Et cependant, suivant les sujets, leurs positions s’inversaient, dans une symphonie presque parfaite de leurs âmes et personnalité. Alors, oui, les contraires, dans ce cas précis, s’attiraient. Pourtant, assez souvent, la trentenaire s’était demandée s’ils étaient réellement ces contraires : la vérité était autre part. Ils étaient des miroirs inversés, se correspondant tout en tendant vers des directions opposées, avec des systèmes de pensées différents, mais qui, in fine, reflétaient la même chose. Et c’était cela, la clé de leur relation, l’explication du mystère de l’amitié. Ils s’étaient choisis non pas pour ce qu’ils avaient en commun ou ce qui les distinguaient, mais bel et bien pour ce qu’ils s’apportaient.

Aussi elle répondit doucement, de sa belle voix grave :

« En effet, la réponse n’aurait sans doute rien de très agréable. Mais tant mieux si nous n’avons pas la même chose, si je préfère évacuer cette question et que toi tu y réfléchisses de temps en temps. Nous n’avons pas besoin de penser de la même façon. A vrai dire, le fait de raisonner différemment, c’est ce qui fait notre force, notre complémentarité. Arriver aux mêmes conclusions, par des chemins dissemblables… 

Belle métaphore de nos vies respectives, n’est-ce pas ? »

Au-delà de l’aspect poétique du moment, il fallait reconnaître que cette assertion ne manquait pas de lucidité.  Ils n’avaient pas évolué en même temps, et pourtant toujours sur une voie similaire, tout en divergeant. Toutes ces petites choses, ces détails, les avaient menés à cet instant de leur vie. Y avait-il du hasard ? Peut-être évidemment. Mais cependant, il se dégageait de leur passé comme une sorte de ligne directrice qu’elle n’arrivait pas à ignorer. Etait-ce son imagination ? Sa volonté de trouver un terreau autrement plus fort, plus solide, que la simple attirance réciproque ? Indubitablement.

Alyria en était là de son vagabondage intellectuel quand Lorn évoqua à nouveau ses doutes par rapport à Coruscant. Et comme un écho à ce qu’elle venait finalement d’énoncer dans le sanctuaire de son esprit, elle sut qu’à ce moment, elle devait être celle qui apaiserait l’autre, échangeant les rôles, comme de juste. Donner confiance, encourager l’épicanthix, telle était sa mission de camarade, d’amie et d’amante. Rien ne pouvait changer cela. Il était temps que son partenaire laisse ses questionnements liés à son passé plus délicat au sein de l’Ordre que le sien, et se considère enfin comme ce qu’il était : un maître respecté et respectable, et un modèle pour de nombreux jeunes initiés.

« Je crois qu’ils ne trouveront pas de meilleur modèle de discipline, Lorn. »

Une phrase simple, qui tranchait avec son style habituel, faite pour marquer, pour témoigner, pour persuader et convaincre. Elle parlait avec la confiance absolue de la personne qui sait, qui a observé et en a tiré une conviction inébranlable.

« Au contraire, avoir connu cette difficulté à accéder au contrôle prôné par l’Ordre te rendra sans doute bien plus à même d’aider ces jeunes et de les canaliser. Il est bon de rappeler que tout ne vient pas par une sorte de don inné, nous devons travailler pour arriver au niveau que nous avons aujourd’hui. La discipline ne s’hérite pas, elle s’acquiert. En cela, tu es le meilleur modèle possible à suivre, et sans doute l’interlocuteur parfait pour ces padawans. Après tout, ton rôle ne sera pas seulement de les surveiller, mais aussi et surtout de les inspirer, de leur montrer une voie au sein du Temple. 

Quel plus bel exemple que celui qui a dû lutter pour y arriver, et est à présent l’un des fers de lance de l’Ordre ? »

Puis elle conclut paisiblement :

« Tu es fait pour ce rôle. Je le sais, le Conseil le sait. Et je suis sûre qu’au fond de toi, tu en es convaincu. Sinon, tu ne te serais pas proposé pour endosser ce rôle. »

Oui, tous deux n’étaient plus les jeunes gens qu’ils avaient été un jour, pour le meilleur comme pour le pire. En l’occurrence, pour son ami, elle ne voyait qu’une évolution positive. Le garçon turbulent était devenu un homme calme et posé, une figure de l’Ordre respectée pour son savoir dans les armes. Quelles preuves supplémentaires fallait-il donc pour s’en convaincre ? Il serait le roc du Temple de Coruscant, elle n’en doutait pas une seconde. Après tout, il était déjà le sien.

Alors finalement, peut-être qu’au gré de ces réflexions, elle venait de trouver la réponse à la nouvelle question que l’épicanthix venait de poser, comme une anticipation instinctive. Après tout, elle le connaissait en effet sans doute mieux que quiconque, le Lorn d’aujourd’hui. C’était celui qu’elle avait appris à aimer autrement que comme un simple compagnon d’armes.

« Je crois que je viens de répondre à ta question. Je te connais pour ce que tu es maintenant, c’est évident. Mais peut-être que savoir qui tu étais avant est une manière d’explorer un pan de ta personne qui m’était jusque-là inconnu.

Comprendre complètement, je ne le pourrais sans doute jamais. Essayer, en revanche, je le peux, et très sincèrement, je n’arrêterais sans doute pas. »

Alors, Alyria plongea son regard émeraude dans le cyan de son amant, et déclara :

« Je ne veux pas être uniquement avec le Lorn d’aujourd’hui. Je veux être avec celui que tu étais avant, comme avec celui que tu deviendras, avec ses réussites et ses fêlures, de même que tu connais aussi bien mes échecs que mes plus beaux moments. Elles forment un tout. Et c’est ce tout que j’aime. Pas seulement la partie facile, non, ce serait trop simple, et mensonger. Mais également le moins beau, parce qu’au final, il éclaire les épreuves surmontées, et j’aime cette nouvelle lumière, ce nouveau tout.»

Elle ajouta :

« C’est pour cela que j’apprécie que tu me montres ce portrait de famille. »

Y avait-il besoin d’en dire plus ? Non. La maîtresse d’armes estimait avoir été suffisamment claire dans ses dires, et cette déclaration la gênait, comme pouvait en attester la légère rougeur sur ses joues. Alyria n’avait guère l’habitude de tels élans lyriques, elle qui était ordinairement si compassée. Mais là, elle en avait ressenti la nécessité, et quelque part l’envie, de dire ce qui pouvait encore rester en suspens.

La trentenaire n’avait jamais pensé à ce qu’il se serait passé si le Conseil avait refusé de la former : après tout, elle avait sept ans, presque huit, quand elle était arrivée au Temple, conséquence de sa naissance sur Hapès qui l’avait fait passer hors des mailles du filet républicain. Au fond, il est vrai qu’elle était une enfant plutôt calme, et la manifestation pratique de son don nécessitait des mesures. Mais dans un cas comme Lorn, infiniment plus douloureux… Oui évidemment, la question se posait bien plus.

« Je ne sais pas, après tout, quand je suis arrivée, j’avais plus de sept ans, c’est tard aussi. Bon, cela dit, c’était plus parce que j’étais né en dehors de l’espace républicain qu’autre chose…

Tu sais, je ne pense pas que les maîtres s’attendent à ce que les plus âgés parviennent à oublier leur passé. C’est impossible. Il faut simplement parvenir à s’en détacher, à le mettre derrière soi, à ne plus se laisser affecter par ce dernier. On ne peut pas balayer d’un mot plusieurs années d’existence. On peut simplement apprendre à vivre loin. A se défaire de ces liens. »

Ce qu’elle avait fait elle-même. Bien que ce n’eut pas été très compliqué de par sa propre histoire familiale : entre une mère absente et un père sur une autre planète, sa conception de la famille au sens strict du terme n’avait jamais réellement rencontré la définition commune. Et Alyria avait toujours été infiniment plus heureuse au Temple que sur Hapès. Mais tout le monde n’était pas dans son cas somme toute très particulier.

En entendant Lorn dire qu’il se posait trop de questions, Alyria ne peut s’empêcher d’éclater d’un rire franc, sonore, de ceux qui vous prenaient subitement, qu’on ne pouvait pas contrôler, parce qu’il était franchement comique que l’épicanthix presque mot pour mot ce qu’elle avait dit peu de temps auparavant. Incapable de parler pendant deux bonnes minutes, elle parvint finalement à se calmer, et réussit à dire entre deux hoquets :

« Pardon, désolée, c’est juste que… A nous deux, on fait une belle paire de questionneurs devant l’éternel quand même ! »

Puis elle ajouta avec un sourire malicieux :

« Même si tu me connais, je vais dire qu’on ne se pose jamais trop de questions. »

Redevenant enfin un peu plus sérieuse, Alyria ajouta à la remarque de Lorn, un simple :

« Bien sûr. Et à partir de maintenant, nous formons aussi une famille, en quelque sorte. Même si elle ne risque pas de s’agrandir. »

Enfin en tout cas, de son point de vue, il n’en était pas question. Ils étaient des jedis, ce qui résolvait amplement le problème, qui n’avait même pas besoin d’être développé plus amplement de son point de vue. Ils feraient attention à ce que cela n’arrive pas.

Aussi elle conclut posément :

« C’est sans doute pour le mieux. »

Voilà qui pouvait résumer l’ensemble de cette discussion : se satisfaire du temps accordé, dans la limite des possibles, en écartant ce qui semblait déraisonnable. Ce n’était pas forcément le plus doux ni le plus romantique, mais c’était ainsi, et Alyria ne l’aurait pas forcément changé. Elle aimait que les choses soient claires dès le départ, avoir une ligne de mire. Dorénavant elle en avait une.

Plus de questions, tout était dit. Elle n’avait rien à ajouter pour sa part. Du moins en parole. La journée avait été rude, la soirée riche en émotions diverses, en décisions fortes. Il était temps, pour un bref moment, de laisser les soucis de côté, de s’accorder un instant privé, sans questions justement, sans pensée.

« Je crois… que tout est dit. »

Après ces paroles, Alyria pouvait faire un choix : se lever et partir dans sa propre chambre avant son départ le lendemain pour Coruscant ou bien rester.

Elle décida de rester.

Alors, à son tour, comme Lorn l’avait au début de leur conversation, elle approcha son visage de celui aux traits fins de son amant, et joignit leurs lèvres pour un baiser annonciateur de bien d’autres changements. Certes doux, il n’en disait pas moins autre chose : il racontait l’amour et le désir, l’envie de voyager vers de nouveaux horizons. 

Ce baiser dessinait une autre destination pour cette nuit, tout simplement.
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Certaines personnes pouvaient passer leur vie sans jamais connaître l’amour et, contrairement aux croyances populaires, ne pas ressentir ce fameux « vide » pour autant, vivant leur existence comme si de rien n’était sans se soucier un seul instant de ce à côté de quoi ils étaient en train de passer. Mais une vie privée d’amour avait-elle moins de valeur, moins d’importance qu’une vie qui connaissait la valeur de ce sentiment ? Les jedis savaient bien que non car malgré leur volonté à ne jamais s’attacher à qui que ce soit, ils avaient bien compris que chaque vie avait une valeur égale à celle de n’importe quelle autre. Du plus grand criminel jusqu’à la forme de vie la plus primitive qui soit, chaque vie était précieuse aux yeux des jedis qui, en plus d’être les garants de la paix et de l’équilibre dans la galaxie, étaient également les plus fervents défenseurs de la vie sous toutes ses formes.
Le jeune homme, comme tous ses pairs, avait fait face à de nombreuses formes de vie et, qu’elles soient agressives ou totalement pacifistes, il s’était toujours efforcé de les traiter avec dignité et équité. Qu’avait-il récolté en retour ? Un peu de reconnaissance, un peu de mépris et beaucoup d’injustice. Mais s’en était-il jamais plaint ? Avait-il déjà éprouvé le besoin profond de laisser au placard son rôle de protecteur pour se demander ce qu’il voulait, personnellement ? Non, et pourtant il aurait eu bien des occasions de le faire. Il n’avait pas besoin de l’avoir vécu pour reconnaître l’amour quand il le voyait se balader sous son nez, il n’avait pas besoin qu’on lui dise ce qu’il ratait pour en ressentir l’amertume et la frustration : il avait simplement besoin que quelqu’un lui dise qu’il avait le droit de penser à lui de temps en temps sans dévier de son rôle. Mais malheureusement il savait bien que personne ne viendrait car les jedis étaient censés abandonner toutes idées personnelles et égoïstes au profit de la nouvelle voie qui s’ouvrait devant eux. Personne ne viendrait l’aider…il devrait donc prendre cette décision lui-même et, ce jour-là, dans le jardin, il avait décidé de franchir ce pas.

Il ne savait pas où tout cela le mènerait mais, pour une fois dans sa vie, il avait fait le choix de laisser son cœur le guider plutôt que sa raison et son enseignement de jedi. Pour une fois ? Oui, car il avait toujours été prudent et avait toujours pesé le pour et le contre avant de prendre une décision qui allait à l’encontre de tout ce que son mentor lui avait appris : il n’était certainement pas aisé de tourner le dos, ne serait-ce qu’un instant, à ses croyances les plus profondes.
Mais aujourd’hui l’heure n’était plus aux incertitudes car dans son appel désespéré le jeune homme avait trouvé un écho chez sa partenaire de toujours, aujourd’hui il n’était plus l’heure de se questionner à coup de « si » mais bien d’établir un fait : lui et elle étaient plus bien que des amis, ils s’aimaient le plus simplement du monde et ne pouvaient pas faire comme si de rien n’était plus longtemps. Malheureusement, comme expliqué plus tôt, ils ne pouvaient pas simplement s’abandonner à cet amour qui finirait irrémédiablement par les consumer, ils devaient faire preuve de bien plus de contrôle et de sagesse que cela : ils étaient des maîtres de l’Ordre Jedi après tout !
L’espace d’un instant le garçon aurait voulu savoir ce que cela ferait de s’abandonner à cet amour mais, comme toujours, la voie de la raison personnifiée par sa camarade était là pour lui remettre les pieds sur terre. Il avait un rôle à remplir, l’un des rôles les plus importants qu’il était donné à un être vivant d’endosser dans cette galaxie : il n’y avait pas de place pour de l’égoïsme à l’état pur !

Plusieurs minutes durant ces deux individus discutèrent et confrontèrent leur point de vue jusqu’à ce que, finalement, la demoiselle vont rassurer le jeune homme en lui disant qu’il était bien plus discipliné qu’il ne voulait bien le croire. Les mots suivants ne furent rien de plus qu’une douce mélodie aux oreilles du maître, une chanson dont les paroles ne vantaient que ses mérites et son contrôle. Manquant presque de rougir devant cette tirade, le jeune maître s’autorisa un sourire avant de répondre sur un ton amusé :

« Attention à ce que tu dis tout de même, tu ne voudrais pas flatter mon égo plus que nécessaire. »

Comme toujours il usait là de l’humour comme une parade afin de masquer ce qu’il ressentait réellement, préférant donner un ton un peu plus léger à cette conversation plutôt que d’ouvrir son cœur encore plus qu’il ne l’avait déjà fait jusqu’à maintenant. Mais bientôt la conversation se réorienta sur un sujet que le jeune homme avait lui-même amené, à savoir son propre passé. À tous - excepté son maître et les membres du Conseil à l’époque – il avait caché les souvenirs de sa douloureuse vie par crainte de ce qu’ils pourraient penser de lui autant que pour les protéger de ces pénibles souvenirs. Personne d’autre que lui n’avait à vivre avec ça dans sa tête, personne d’autre que lui n’avait à se réveiller en sueur devant le souvenir du visage agonisant de son frère cadet : personne d’autre que lui n’avait à porter tout cela.
Mais aujourd’hui était entrée dans sa vie une personne qui voulait tout savoir sur lui, des bons moments comme des très mauvais et, malheureusement, Lorn n’arrivait pas à se résigner à lui ouvrir cette partie de sa mémoire. Se renfrognant l’espace d’un instant, il baissa la tête d’un ton grave et répondit :

« Quand nous rejoignons l’Ordre nous laissons derrière nous ce que nous étions, pour recommencer une nouvelle vie et c’est bien mieux ainsi. Celui que j’étais, avant, était capable de faire couler le sang de sa propre famille pour survivre un jour de plus, c’était un meurtrier en puissance. C’est assurément un pan de ma personnalité que je ne veux plus jamais revoir faire surface. Cette partie de moi est toujours là, tapie dans l’ombre, au plus profond de moi, mais la méditation et les enseignements de l’Ordre permettent de la tenir à l’écart et c’est bien mieux comme cela. »

S’autorisant une courte pause afin que sa camarade puisse enregistrer toutes ces informations, il conclut cette tirade par :

« Le jour où elle refera surface sera le jour où j’échouerai en tant que jedi. Ce sera le jour où je n’aurais plus ma place au sein de l’Ordre. »

La discussion était close car pour l’heure le jeune homme ne voulait pas revenir sur le sujet, il n’embrouillerait pas l’esprit de sa bien-aimée avec des visions qui l’empêcheraient de dormir paisiblement la nuit. Rebondissant sur la phrase de sa demoiselle qui avouait qu’ils faisaient la paire à se questionner de la sorte, le garçon répliqua par :

« Ce n’est pas plus mal ainsi. Je préfère me triturer le cerveau et me remettre en question plutôt que de prendre ma situation pour acquise. Prudence est mère de sureté. »

Mais désormais l’heure des questions était révolue, ils avaient suffisamment discuter de ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire dans les temps à venir qu’ils en avaient presque oublié de profiter de l’instant présent. Les deux êtres se rapprochèrent finalement l’un de l’autre et, dans un souffle, Lorn murmura à sa partenaire de toujours :

« Maintenant détends-toi et autorise-toi à ressentir les choses. »

Lentement le jeune homme se rapprocha de sa compagne et, alors que leurs lèvres se rejoignaient dans une fête des sens et des émotions, il laissait doucement glisser sa main gauche le long de son dos, autorisant ses doigts à caresser délicatement le dos de la demoiselle aussi délicatement que s’il avait eu peur de le briser. Son autre main grimpant jusqu’au visage de la demoiselle, le jeune maître se rapprocha petit à petit de son lit juste devant lui, invitant la demoiselle à s’y installer plus confortablement.
Enfin ils avaient un moment pour eux, enfin ils pourraient profiter de cette nuit pour s’abandonner, durant quelques instants, à cet amour rayonnant.
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Pendant un bref instant, Alyria se contenta de savourer ce nouveau baiser, un très léger se dessinant sur ses propres lèvres, ce que son amant ne pouvait manquer de percevoir, en entendant ses derniers mots. Si on comparait la maîtresse d’armes en ce moment à ce qu’elle avait l’habitude de montrer au monde extérieur, on pouvait raisonnablement penser qu’elle était clairement détendue, ou plus exactement, en confiance, libre d’être elle-même et ce dans toutes les fibres composants sa personne.

Alors que, ses sens s’éveillant peu à peu dans un délicieux tourbillon, la demi-echani goûtait sans entrave aux lèvres de l’épicanthix dans une danse à la sensualité aisément perceptible, elle perçut la main de son partenaire voyager dans son dos, avec une délicatesse agréable. Mais elle ne désirait pas forcément qu’il se restreigne, aussi la jedi attira son amant contre elle, tentant de trouver une position relativement confortable malgré l’étroitesse du lit sur lequel tous deux se trouvaient. Après quelques ajustements et un début de fou rire après s’être cognée le coude contre le mur, Alyria reprit son sérieux.

Les jeunes amants avaient souvent une vision idéalisée de ces premiers moments d’intimité au sein d’un couple. L’expérience lui avait donné une façon de voir un peu plus réaliste : l’amour connaissait lui aussi ses petits moments de flottement, ses rires gênés dus à un mouvement inattendu, mal négocié. Cela n’enlevait rien à la beauté de l’étreinte, au contraire, il y avait un certain charme dans ses débuts pas toujours parfaits au premier abord, mais dont le souvenir lui, l’était.

Aussi, histoire de ne pas laisser cette pause se prolonger, la sang-mêlée en profita pour inverser leurs positions, et fit courir ses lèvres sur le visage de Lorn, descendant vers sa tempe et son épaule, avant de revenir à sa bouche doucement, sans se hâter, décidée à explorer pas à pas, ou plus exactement baiser à baiser. Quel intérêt de se presser, ils avaient tout leur temps, toute la nuit, et, même si elle ne voulait pas envisager cette éventualité pour le moment, tant que leur avenir n’était pas fixé, approuvé, sorti de sa clandestinité, peut-être, oui peut-être, une partie de leur vie. D’autres fois sans doute, le temps leur serait compté, où ils préféreraient s’abandonner dans l’ivresse rapidement. Mais pas ce soir.

Remontant vers l’oreille de son partenaire tout en laissant ses mains parcourir librement le torse devant elle, Alyria lui souffla :

« A toi de ressentir maintenant. »

Bougeant légèrement pour lui faire face, elle plongea son regard émeraude dans les yeux cyans de Lorn, essayant d’y faire passer tout ce qu’elle ressentait à cet instant, un maelstrom difficile à décrire, car combinant diverses facettes de sa personnalité, de sa compréhension de leur lien… Amour, désir, affection, un mélange évident, saupoudré évidemment d’un soupçon d’incertitude, qui s’effaça cependant bien vite. La gardienne unit à nouveau leurs lèvres, laissant son instinct la guider.

Commença alors la lente danse des amants, qui se découvraient doucement, à leur rythme, la pièce se peuplant peu à peu de silences complices et de quelques bruits murmurés au creux de la nuit. Jambes mélangées, corps enlacés et souffles entremêlés, ils se laissaient aller à la douce poésie des sens.

L’espace de quelques secondes fugitives, Alyria se dit que même dans ces instants pourtant nouveaux, leurs personnalités respectives, et leur amour de la confrontation amicale ressortaient dans un cocktail enivrant et familier. Tous deux aimaient l’affrontement, le contact, et cela ressortait avec éclat de leur comportement respectif, et faisant briller la vérité de leur lien, soit une tendresse profonde, évidente, et qui paraissait presque naturelle, mais qui ne niait pas leur individualité et leurs caractères bien affirmés.

Cependant, un mouvement brusque de sa main la fit revenir assez brutalement à la réalité. Mue par le désir, elle n’avait pas fait attention comme à son habitude à l’impulsion qu’elle mettait dans ses gestes avec sa prothèse, et venait donc par inadvertance d’appuyer assez fort sur l’épaule de Lorn. Si elle savait qu’il était suffisamment solide pour ne pas sentir grand-chose, elle se sentit coupable d’avoir perdu ainsi le contrôle, et surtout, les doutes qu’elle s’était forcée de tenir à l’écart jusqu’à maintenant surgir dans son esprit avec force : c’était peut-être idiot, de s’arrêter maintenant, pour cela, mais c’était plus fort qu’elle. Alyria détestait cette prothèse, qui la perturbait toujours dans les pires moments, et à cet instant, elle la voyait comme une ennemie, et comme un rappel détestable de ce qu’on lui avait arraché. 

Se raclant un peu la gorge après s’être un peu redressée, appuyée sur ses coudes, elle demanda, le feu aux joues :

« Pardon, je suis désolée, je ne t’ai pas fait mal ? »

Puis elle ajouta d’une voix incertaine :

« Tu … euh… préfères que je l’enlève peut-être ? La prothèse je veux dire… »

Immédiatement, la trentenaire se maudit intérieurement pour avoir ainsi briser l’harmonie de leur moment ensemble. Au moins, elle avait la confirmation, s’il y avait besoin qu’il y en ait une, que décidément, les jeux amoureux ne se passaient souvent pas comme prévu, et qu’il fallait parfois faire face à quelques désagréments.

Laissant échapper un rire nerveux, Alyria ne put s’empêcher de penser que décidément, elle n’était pas vraiment la plus douée pour se détendre et oblitérer toute idée parasite de sa tête. Même si la connaissant, Lorn devait bien se douter que la question de la main métallique viendrait forcément à un moment donné sur le tapis : il connaissait mieux que quiconque la part de fragilité qui se cachait derrière le masque contrôlé que se plaisait à afficher la maîtresse d’armes.

C’était dans ces moments d’intimité, d’exposition complète, que la Main brisée laissait apparaître toutes ses fêlures et ses failles. Et même si elle ne l’avait pas dit à voix haute, la question de son intégrité la hantait, l’empoisonnait. En se découvrant ainsi, elle permettait à de vieilles blessures ignorées de ressurgir au grand jour… Pour mieux guérir sans doute, et enfin avancer définitivement libérée, prête à s’accepter en prenant l’autre à témoin.
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C’était assez étrange de se dire qu’après tout ce temps passé ensemble ces deux êtres étaient devenus bien plus prochaines pendant ces derniers jours que durant tout le reste de leur longue vie. Bien sûr rien de tout cela n’avait été prémédité et le jeune homme n’avait même pas prévu d’avoir une réponse positive de la part de sa camarade, mais les choses avaient évoluées de telle façon que ces deux êtres se trouvaient à présent dans la même pièce, l’un des deux à moitié nu s’il fut utile de le rappeler. Mais tout aussi sages que pouvaient être ces deux jedis, il n’y avait pas de manuel décrivant les étapes à suivre dans ce genre de moment, ils devaient simplement se contenter d’y aller au feeling au suivant leur instinct et, malheureusement, cet instinct n’était pas exempt d’erreurs.
Un peu comme s’ils se découvraient l’un l’autre sous un jour nouveau après des années passées côte à côte, les deux êtres se laissèrent aller et consommèrent leur intimité le plus simplement du monde, sans réfléchir, laisser leurs sens s’éveiller et leurs bouches parler. Oh non ils n’étaient pas vraiment à l’aise et cela se ressentait dans les petits rires gênés qui fusaient çà et là, démarrant au moindre geste un peu maladroit de l’un ou de l’autre, mais cela faisait aussi partie du jeu des premiers instants où la maladresse prenait parfois le pas sur le désir et l’amour. Ce n’était pas bien dramatique et le fait de voir ces deux êtres rire de leur maladresse, malgré leur âge et leur adresse au maniement du sabre laser, prouvait bien qu’ils n’avaient pas perdu de leur autodérision avec le temps. Deux maîtres d’armes, contrôlant chacun de leurs gestes à la perfection, en arrivaient à faire preuve de maladresse en se cognant comme deux enfants découvrant un jeu. Amusant, non ?

Prenant les rennes pour commencer, le jeune home s’approcha de la demoiselle et joint ses propres lèvres aux siennes dans un ballet des sens qui sembla suspendre le temps tout autour d’eux et, ouvrant les yeux, le jeune homme se rendit compte que sa compagne n’avait jamais été aussi belle – à ses yeux – qu’en cet instant précis. Elle était timide, gênée et cela ne la rendait que plus précieuse et désirable car dans ce cadre intime elle se débarrassait enfin de ce masque qu’elle arborait en permanence, tout comme lui en portait un. Il ne s’agissait ici plus de faire bonne figure, de séduire ou plaire à autrui, de paraître plus calme et serein qu’il n’y paraissait en réalité. Ici ces deux êtres pouvaient être eux-mêmes et s’exprimer librement sans crainte du regard de l’autre, chacun savait que l’autre l’aimait pour ce qu’il était, rien de plus et rien de moins : dans ces conditions ils n’avaient rien à craindre de leur maladresse passagère. Bientôt la demoiselle mit plus de force que nécessaire dans sa main, pressant l’épaule du jeune homme qui n’aurait sans doute pas réagi sur la demoiselle ne s’était pas platement excusée. Souriant en portant sa main à son doux visage afin de la rassurer, le jeune homme lui répondit calmement :

« Pas du tout, ne t’inquiète pas pour ça. »

Il savait que malgré le temps passé elle était restée gênée par la présence de cette main qui n’en n’était pas vraiment une, mais comment aurait-il pu l’en blâmer pour ça ? Il ne pouvait qu’essayer de deviner ce que cela faisant d’avoir une fausse main attachée à soit en permanence, il se rappelait que sa compagne avait mis du temps à s’y habituer, il ne pouvait pas lui demander de l’enlever car ce serait comme rejeter cette part d’elle. Posant son autre main libre sur ladite prothèse, le garçon plongea ses yeux cyans dans les prunelles de sa bien-aimée tout en lui soufflant :

« Bien sûr que non. Elle fait partie de toi, dans un sens, et je te veux toute entière. »

Que pouvait-il rajouter de plus ? Bien vite il se rapprocha de la demoiselle et déposa sur ses lèvres un autre baisé qui, cette fois-ci, était plus passionné que le précédent comme s’il espérait y noyer le souvenir de cette prothèse qui avait jailli de l’esprit de cette beauté à la crinière de feu. Il voulait lui faire tout oublier pour cette nuit, il voulait qu’elle passe une nuit paisible et intense pour qu’elle se réveille le lendemain avec le sourire aux lèvres. Oui elle était nerveuse mais lui l’était tout autant, il arrivait simplement à faire plus facilement semblant de tout avoir sous contrôle alors qu’il ne faisait qu’improviser au fur et à mesure. Caressant le cou de la demoiselle du bout de ses doigts alors qu’il continuait de l’embrasser comme s’il désirait que ce moment ure pour l’éternité, le maître n’eut pas besoin de s’ouvrir à la Force pour continuer à sentir la tension de sa camarade. Il la sentait à travers sa peau et ses lèvres pour ainsi dire. C’est ainsi que, se détachant tout doucement de sa bien-aimée, le jeune homme se leva du lit avant de lui conseiller :

« Relax, respire profondément. Tout va bien te passer, d’accord ? Nous avons toute la nuit pour nous, pas besoin de précipiter les choses.»

Se levant le jeune homme s’approcha du régulateur de lumière et en baissa l’intensité afin de créer une atmosphère un peu plus douce et tamisée, créant l’environnement qu’avaient besoin ces deux tourtereaux. Se tournant vers sa camarade en souriant, il soupira un instant avant de lâcher un :

« Regarde-moi. C’est moi qui te dis de te détendre alors que ma nervosité doit se sentir d’ici. Je ne trompe personne.»

Fermement les yeux en prenant une profonde inspiration pour faire paix dans son esprit, usant des techniques qu’il connaissait pour se relaxer, les épaules du garçon se relâchèrent comme si elles venaient d’être libérées d’un poids, avant que Lorn ne se dirige de nouveau vers sa couchette. Sans un mot, sans un bruit, le garçon posa sa main droite sur l’épaule de la demoiselle, la poussant gentiment en arrière afin de l’incité à s’allonger totalement. S’avançant à son tour, surplombant la demoiselle sans pour autant s’affaler sur elle, le garçon laissa aller son imagination. Déposant un baiser sur le front de la demoiselle, il se recula, embrassant ensuite ses lèvres avant de descendre le long de son cou et de sa gorge, laissant ses doigts caressant les courbes du corps de sa partenaire de toujours. Était-il aux commandes ? En partie oui, pour le moment en tout cas.

La nuit était à eux, nul besoin de précipiter les choses. La vie était à eux.
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Toutes ces dernières années, le poids du doute avait pesé sur l’esprit d’Alyria, aussi sûrement que sa main métallique au bout de sa main. Il l’avait envahi, s’insinuant sournoisement dans les méandres les plus secrets de son être, dans les recoins les plus intimes de ses souvenirs, ternissant une personnalité autrefois joyeuse pour en faire un être plus dur, plus sec… Et qui se cachait derrière ce masque de glace pour que personne, et surtout pas elle-même, ne puisse dire qu’en vérité, la Main brisée n’était pas qu’une métaphore, mais bel et bien une triste et froide réalité.

Oh, en apparence, elle restait cette redoutable guerrière, diplomate sereine et maître attentive que tout le monde connaissait. Mais au-delà, son estime d’elle-même avait été réduit en miettes, sa confiance dans ses capacités, dans son futur avait été soudain balayé : ses certitudes en fait, réduites en miettes par un simple coup de sabre. Alors elle avait commencé à douter. Mais elle venait à présent de s’en rendre compte : ce n’était point de ce doute absolu dont elle souffrait, mais au contraire du doute salvateur, celui qui permet de détruire pour mieux reconstruire. Il lui fallait simplement trouver le déclic, le moment d’acceptation.

Et c’est dans les yeux de son amant qu’elle le trouva, dans sa voix ce soir-là, dans ses mots sincères qu’il venait de prononcer avec cette foi inébranlable que contiennent toujours les paroles amoureuses. Pour la première fois depuis un long moment dans son existence, Alyria contemplait ce qu’elle était non pas dans ses souvenirs ou ceux d’un autre, mais ce qu’elle était aujourd’hui, aux yeux de quelqu’un qui l’aimait entièrement, à l’instant. Passé et présent, il l’acceptait, il la voulait ainsi… Et au fond, elle n’y avait pas tout à fait cru. Idiote ? Oui un peu… Mais aussi inquiète, en proie à ce maudit doute qui la tourmentait tant, et qui venait de s’apaiser brutalement.

L’effet fut instantané. Soudain, mêlées dans une sorte de cri de renaissance intérieure aussi profond que formidable, l’ancienne Alyria et la nouvelle se confondirent, et alors ses incertitudes disparurent. Elle était la Main brisée, mais elle était la descendante du peuple echani et des beaux hapiens, elle était la diplomate et la duelliste, l’amie… Et l’amante. Et elle se retrouvait enfin pleinement dans ses yeux cyans qui la contemplaient avec ce qu’elle percevait comme du désir, et qui était tellement plus.

Pourtant, il restait cette tension dans les airs qui n’avait pas grand-chose à voir avec ses vieux démons, mais bien sur une question pragmatique, et au fond, bien plus en phase avec la situation actuelle. Alors qu’elle sentait les lèvres de Lorn parcourir sa gorge avec une ferveur qui assécha sa gorge soudainement, la maîtresse d’armes ne put s’empêcher de penser à ce qui arriverait si cette nuit ne confirmait pas leurs sentiments. Et immédiatement, l’inquiétude soudaine, futile, puérile, sur ce manque d’expérience qui n’avait pas lieu d’être, mais qui s’accrochait à son esprit, l’empêchant de se laisser aller pleinement à l’ivresse du moment.

Et une fois de plus, ce fut Lorn qui tenta de la rassurer, alors qu’il devait sans doute être parcouru par les mêmes questionnements. Alors que la lumière se tamisait, que l’ambiance se faisait décidément plus intimiste, la demi-echanie était confrontée à un choix : dire adieu à ses inquiétudes, ou s’y accrocher, quitte à perdre beaucoup cette nuit-là. Ce n’était pas un choix conscient à effectuer, plus un mouvement soudain de l’âme qui s’abandonnaient aux nuages sombres la tourmentant inutilement pour voler de ses propres ailes et rejoindre un autre esprit qui l’attendait.

Les paroles de l’épicanthix furent le déclencheur. Avait-elle le droit de laisser ses propres insécurités prendre le dessus, quand son ami était traversé des mêmes doutes ? Non, elle avait été égoïste, à ne pas penser à ce que devait aussi traverser son compagnon à cet instant. Et puis au fond, qu’importait que le moment ne soit pas parfait, qu’ils ne soient pas eux-mêmes parfaits ? Ils n’avaient pas besoin de l’être. Parce que dans leur mémoire, plus tard, ce moment, s’il était sincère, le serait forcément. Et Alyria avait rarement été aussi sincère au cours de son existence qu’à ce moment, où plongeant son regard une nouvelle fois dans celui de son amant, tandis qu’ils s’allongeaient sur ce lit, témoin silencieux de leurs errements et de leurs découvertes nocturnes, elle tentait de lui communiquer l’intégralité de ce qu’elle ressentait.

Puis d’une voix douce elle finit par dire :

« Parce que je ne suis pas nerveuse peut-être ? Je ne sais pas de quoi demain sera fait, ni même cette nuit. Mais tu m’as fait réaliser une chose : je n’ai pas besoin de faire semblant, car ma façade ne te trompe pas.

C’est pareil pour toi. Alors… »

Elle fit une pause, avant de rapprocher ses lèvres de celles de Lorn et de lui souffler avant de l’embrasser :

« Viens. »

Pas besoin d’en dire plus, l’intention était suffisamment claire. Scellant une nouvelle fois leurs lèvres dans un baiser particulièrement ardent, Alyria attira son amant à elle, et bientôt, leurs corps rejoignirent la danse sensuelle de l’amour. La demi-echanie sentait les doigts de l’épicanthix parcourir son corps, et elle se décida à faire de même, et cette fois-ci, de façon bien plus appuyée, donnant autan qu’elle recevait.

Leurs mains se firent plus aventureuses, leurs bouches plus taquines, et au fur et à mesure qu’ils se découvraient dans le silence enivrant de la nuit, seulement déchirés par quelques gémissements étouffés, leurs vêtements les quittèrent, jetés distraitement aux quatre coins de la pièce, futiles remparts de tissus entre leurs corps avides de se rencontrer.

Le contact fut comme un choc électrisant.

Suivant en cela les croyances du peuple de son père, Alyria avait toujours considéré le contact physique comme un moyen de connaître l’autre, notamment en combat. Mais, n’ayant pas vécu au cœur de la civilisation echanie, elle n’avait jamais pris conscience des implications d’une telle manière de penser, et surtout d’appréhender l’autre. A présent, elle les comprenait, ou plutôt, elle les ressentait pleinement, dans une réminiscence de ce qu’elle avait pu connaître il y avait des années de cela, mais où aveuglée par la passion seule, elle n’avait pas pris le temps de simplement d’éprouver cette soudaine plénitude ardente qui l’envahissait.

Le désir, évidemment, phénomène normal, presque attendu en de telles circonstances, le plaisir aussi, venaient l’envahir, mais elle conjuguait désormais ces deux émotions au pluriel. Il n’était pas question uniquement de sa propre félicité, mais de celle qu’elle percevait palpiter sous la chair chaude et douce de son partenaire. Soudain, dans des flashs puissants, elle comprenait ce que son amant éprouvait intimement, et se laissait guider par ces impressions pour guider ses propres impulsions.

Ce fut un ballet unique, irrésistible, qui les prit rapidement dans son mouvement, et ils commencèrent l’ascension que seule peut permettre l’amour. Et, enfin, alors que leurs lèvres ne se quittaient plus, que leur respiration erratique se faisait sifflante, la déferlante vint, dans une volupté sublime, délicieuse.

L’acmé de l’amour les enveloppa. 
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Cela pourrait sans doute vous paraître évident mais, comme tous ses pairs, il fut un temps où le jeune maître d’armes fut bien différent de celui qu’il était aujourd’hui, si bien que l’on aurait beaucoup de mal à croire que cette personne qui se tenait là était la même que le garçon turbulent, insolent et colérique qu’il était dans sa prime jeunesse. Oui, plus que pour beaucoup de ses camarades la vie avait laissé une marque indélébile dans l’esprit du jeune garçon qu’il était et cette marque allait sans doute réagir le reste de son existence. Le poids de la culpabilité l’avait tellement accablé pendant toutes ces années que le seul moyen qu’il avait trouvé pour s’en débarrasser, l’espace d’un instant, c’était en libérant la frustration et le trop plein d’énergie emmagasiné dans son corps. Oh bien sûr ce n’était pas la méthode la plus recommandable que cela le poussa à se montrer plus violent que nécessaire, notamment dans les séances d’entraînement, mais malheureusement c’était la seule méthode qu’il connaissait car personne ne lui avait jamais appris à faire autrement. Les padawans et apprentis, même très jeunes, étaient censés maîtriser leurs émotions très rapidement mais Lorn fut l’un des seuls pour qui cette étape fut particulièrement difficile.
Était-ce par ce qu’il n’arrivait pas à faire taire le chaos qui régnait dans son esprit, ou était-ce plutôt parce qu’il ne souhaitait pas se calmer ? Céder à sa brutalité naturelle lui conférait – outre le boost d’adrénaline – un sentiment de puissance et d’invincibilité que l’on pourrait qualifier de grisant et qui était malheureusement très addictif. Pourquoi les siths aiment-ils autant la violence à votre avis ?
Tout laissait présager du pire pour l’avenir de ce jeune apprenti qui aurait très certainement été exclu du Temple et renvoyé à sa vie d’avant si son sauveur n’était pas intervenu pour lui montrer qu’il y avait un autre chemin : canaliser son énergie dans la pratique régulière du maniement du sabre-laser. La suite, vous la connaissez ? En revanche, ce que vous savez peut-être moins est que, malgré le temps passé, ce trop-plein d’énergie n’a jamais vraiment totalement disparu. Comment le pourrait-il ? Cela faisait partie de la nature du jeune homme ici présent. Seulement, à la place du garçon turbulent qu’il était, Lorn se mit à arborer un autre genre de masque qui convenait mieux à son nouveau rang de maître et maître d’armes. Dorénavant il arborait le fier et implacable masque du bouclier et du glaive de l’ordre jedi, son principal défenseur, son dernier rempart contre les forces obscures.

Oui, en apparence il restait donc un professeur, un mentor et un modèle pour beaucoup de bretteurs au sein de l’Ordre mais tout le reste de sa personne était savamment cachée derrière ce masque que rien ni personne ne semblait en mesure de retirer. Rien ni personne…sauf elle. Elle voyait clair en lui, elle savait qu’il avait besoin de relâcher la pression de temps en temps en étant simplement lui, sans artifices. Têtu, bourru, parfois grossier, trop franc pour son propre bien, implacable : il était tout cela en même temps et, parfois, il avait simplement envie de lever le masque pour être simplement lui. Mais il ne le pouvait pas, pas dans l’enceinte du temple, pas devant le Conseil, pas devant ses élèves car du fait de son statut des choses particulières et une attitude respectable étaient attendues de lui. Il devait se montrer exemplaire, tout mentor qu’il était, si bien que son moi véritable n’avait que rarement l’occasion de sortir et de s’exprimer. Certains diraient que c’était une bonne chose, que ce nouveau rôle était censé devenir son « nouveau » moi véritable en oubliant l’ancien, mais Lorn n’était pas tout à fait d’accord. Le Lorn jedi et le Lorn homme étaient deux facettes d’une même pièce qui constituait sa personnalité entière, il ne pouvait se résigner à effacer une facette sans quoi la pièce perdrait de sa valeur, perdrait sa vraie nature pour ainsi dire. D’accord, c’est sans doute un peu tiré par les cheveux mais vous voyez l’idée, n’est-ce pas ?

Mais elle, elle était la seule qui avait identifié et accepté les deux facettes de sa personnalité sans détour, sans compromis car elle avait vu le jeune homme grandir et changer au fil des années si bien qu’il ne pouvait laisser planer le mystère avec elle. Elle le connaissait mieux que personne, exception faite de son maître bien entendu mais elle le connaissait sous un aspect différent, dirons-nous. Même s’il faisait cela pour la protéger, d’une certaine façon, le garçon savait qu’il ne pourrait rien cacher à sa partenaire bien longtemps, elle lisait en lui comme dans un livre ouvert et c’était cette transparence qui le faisait se sentir bien en sa présence. Il n’y avait vraiment qu’avec elle qu’il pouvait être parfaitement lui-même.


Bientôt, à la faveur de la nuit, les deux êtres se rejoignirent enfin dans un ballet des corps et des sens pour lequel ils se débarrassèrent de leurs quelques bouts de tissus pour n’apparaître que dans leur plus simple appareil. Au naturel, si l’on peut dire, les deux êtres s’enlacèrent et, se laissant aller au plaisir e au désir grandissant, ne firent plus qu’un et ce pour tout le reste de la nuit. Et enfin la fatigue reprit les rennes et les deux êtres s’endormirent, entièrement nus, sur cette couche avant de se laisser guider vers le pays des songes.
Cela faisait une éternité que le jeune homme ne s’était pas endormi aussi épuisé mais surtout aussi calme et serein si bien que lorsqu’il se réveilla en sursaut et en sueur, comme d’habitude, il fut ramené à la dure réalité qui était que malgré tout le plaisir et l’apaisement qu’il ressentait lorsqu’il était avec sa compagne, la paix intérieur qui lui permettrait de profiter d’un long et profond sommeil réparateur ne semblait toujours pas décidée à pointer le bout de son nez.
Soupirant légèrement, légèrement las de cette situation mais également soulagé de ne pas avoir réveillé à sa compagne qui dormait toujours paisiblement, le garçon se redressa et se leva discrètement de son lit pour aller se passer un peu d’eau sur le visage. Agréablement surpris de voir que, pour une fois, il n’avait pas les traits tirés après un réveil aussi brusque, la surprise fut renouvelée lorsque le maître se rendit compte qu’il était pratiquement le matin et qu’il avait dormi bien plus que d’habitude, et ce malgré ses visions et son réveil en trombe. Pas trop mal, n’est-ce pas ?
Il se sentait bien plus calme et reposé que lors de ses précédents réveils et la présence de cette créature de rêve, toujours endormie sous ces draps, y était sans doute pour quelque chose. S’autorisant à sourire, content de voir que les choses commençaient à être différente pour lui comme pour elle, le garçon se glissa à pas de loup dans la chambre, sous les draps. Posant sa main droite derrière sa tête, sur son oreiller, le garçon se contenta de contempler le plafond de sa chambre en profitant du calme qui régnait et de la sensation de plénitude qu’il ressentait à cet instant. Il était bien, reposé, serein et c’était bien là tout ce qui comptait.

Bientôt sa compagne ne tarderait pas, elle aussi, à se lever et Lorn pourrait s’assurer qu’elle avait passé une bonne soirée et une bonne nuit…ou non, rien n’était certain en ce monde !
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Un rayon de lumière vint chatouiller le visage d’Alyria, qui hésita un instant à ouvrir les yeux. Elle était bien ainsi, reposée, tranquille, à être en paix, allongée sur son lit… Sauf que, à la réflexion, ce n’était pas son lit… Non ? Elle sentait un corps chaud contre le sien, le mur étant juste contre elle de l’autre côté. Alors les brumes du sommeil quittèrent peu à peu son esprit et la nuit précédente lui revint en mémoire, ce qui lui arracha un sourire simplement heureux. Elle ouvrir un œil.

Il lui fallut quelques instants pour reconnaître parfaitement son environnement. La gardienne se trouvait collée contre son amant, une partie de ses cheveux roux en bataille étalées sur le lit, son bras gauche reposant nonchalamment sur le ventre de Lorn, position qu’elle avait dû adopter en remuant pendant la nuit.

Au hasard de leurs ébats nocturnes, son éternel gant blanc qu’elle portait depuis toutes ces années pour couvrir ses mains avaient été jeté au loin, perdu dans la pièce, emporté par leur passion réciproque qui avait trouvé l’espace et le temps pour enfin s’épanouir. C’était une vision très étrange que cette prothèse métallique à l’air libre, appuyée sur le torse musclé de son compagnon, qui ne bronchait pas malgré le contact sans doute peu agréable que provoquait la morsure froide du métal sur la peau nue.

Soudain dans un flash, un souvenir de leur étreinte lui revint en mémoire. Avec une acuité troublante, Alyria se revoyait embrasser Lorn quelques heures plus tôt, leurs corps ondulant au rythme de leur désir grandissant, et à un moment, il avait entremêlé ses doigts avec ceux de la prothèse de la demi-echani, et ce geste pourtant anodin avait eu impact décisif sur elle, un point de non-retour où la sang-mêlée avait définitivement lâché prise pour ne plus faire qu’un avec son partenaire.

Revenant à la réalité, elle laissa ses yeux parcourir le corps de son amant qui dépassait des draps, et aussi ce qui était en dessous et qu’elle devinait sans mal, pour en avoir eu une connaissance intime toute la nuit précédente. Quelque part, la maîtresse d’armes avait encore du mal à croire à ce qui venait de se passer, et en même temps, elle s’était sentie portée, pendant ces heures, comme détachée du monde, à voguer dans un entre-deux délicieux où ne se tenaient que Lorn et elle-même, telles deux âmes fusionnant au cœur de la Force.
La sensibilité à la Force rendait en effet l’acte amoureux, pour peu que l’on laisse l’autre se connecter à soi par l’esprit et par l’aura que l’on pouvait dégager, autrement plus intime qu’un simple rapport avec une personne normale. C’était en effet un sentiment troublant que de ressentir à la fois le plaisir physique personnel que l’on pouvait en retirer, mais aussi au même moment le contentement du partenaire à travers la Force.

La première fois qu’elle avait été confrontée à cela, elle ne maîtrisait pas encore parfaitement les flux de Force, du moins pas aussi bien que maintenant, et Yrine n’y était pas sensible. Elle s’était donc surtout contentée de se concentrer sur le ressenti charnel, et très peu sur le reste. Mais là, à trente ans passés, en tant que maître jedi et avec un autre maître jedi, Alyria avait pu s’ouvrir à une foule d’autres sensations, dans une jonction formidablement intense entre le corps et l’esprit, entre le moi et l’autre.

D’ailleurs à bien y repenser, ce n’était pas la seule différence entre ce moment-là et celui de ses dix-neuf ans. A cette époque qui lui semblait maintenant si lointaine, trop jeune et mal préparée, complètement surprise par la tournure des événements, elle avait pris la fuite au petit matin pour faire ce qui avait fini par ressembler à un véritable marathon, l’Alyria d’alors refusant complètement d’assumer ce qui s’était passé. Inutile de préciser qu’il n’était pas question de faire pareil. Elle avait choisi d’aimer Lorn, complètement, et ce dès le moment où elle avait décidé de franchir la porte de sa chambre pour lui dire qu’elle retournait les sentiments qu’il lui portait. Tout ce qui c’était passé après, leur discussion, leurs échanges, elle l’avait voulu, avait même pris les devants à un moment, et sans précipitation, lucidement.

Pour toutes ces raisons, et encore d’autres qui ne regardaient que les images précieuses qui défilaient devant ses yeux et n’appartenaient qu’à son compagnon et elle-même, uniques souvenirs de ces quelques heures volées à la nuit et à leur vie de devoir, qu’ils devraient retrouver sitôt la porte de la pièce à nouveau franchie, elle se releva légèrement, dégageant au passage de son bras du torse de son compagnon, dans un mouvement lent, presque à regret, et s’appuya sur son coude pour surélever sa tête, avant de lui dire doucement, la voix encore un peu rauque :

« Bonjour, bien dormi ? J’espère que tu n’es pas resté à attendre que je me réveille trop longtemps. »

La question de quoi dire au matin, gérer l’après, en langage courant, était toujours la partie la plus délicate. Pourtant, à cet instant, Alyria ne ressentait aucune gêne, elle n’avait pas hésité dans son choix de mots, qui lui paraissait naturel. Se penchant en avant, elle déposa un léger baiser sur les lèvres de son amant pour lui dire bonjour proprement, et laissa son autre main traîner légèrement sur le corps de Lorn. Puis elle se retira et reprit sa position précédente, enveloppant son compagnon d’un regard pénétrant.

Elle ne savait pas trop comment le dire, si elle devait aborder de manière frontale ce qu’il s’était passé entre eux, aussi elle préféra éviter de briser l’instant, appréciant simplement la tranquillité du moment, où tous deux pouvaient reposer ainsi, sans se soucier du monde extérieur pour quelques minutes encore. Après, il faudrait se lancer dans une nouvelle aventure pour elle, administrer en partie le Temple de Coruscant pour lui. Ils se verraient peu, toujours dans le secret et pour un temps limité. Alyria savait d’ailleurs qu’il lui faudrait de se dépêcher de regagner sa chambre pour se changer avant de prendre le premier transporteur pour la capitale. 

Mais en attendant, elle savourait simplement ce petit moment d’intimité de couple, encore fraîche, qui avait le parfum de la nouveauté et du printemps amoureux : celui d’une renaissance. 
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Les jedis étaient sans cesse à la recherche de la paix intérieur et ne juraient que par la nécessité de l’équilibre, aussi bien dans la galaxie tout entière que dans leurs propres esprits, si bien qu’ils pourraient paraître insensibles aux non-initiés alors qu’ils étaient simplement prudents envers ce qu’ils pouvaient penser ou ressentir. Ce n’était pas par snobisme ou pour se démarquer du reste de la population que ces personnes faisaient très attention à ce qu’elles pouvaient ressentir, elles avaient fait ce choix parce qu’elles savaient à quel point les émotions mal contrôlées pouvaient être destructrice. Colère, jalousie, désespoir, ce n’était là qu’un exemple des émotions qui pouvaient assaillir l’esprit d’un être intelligent et le pousser à agir de façon irrationnelle et dangereuse.
Qu’ils en aient fait personnellement l’expérience ou non, chacun avait expérimenté ou observé les affres de la nature humaine si bien qu’ils devaient lutter de tout leur être pour ne pas devenir l’instrument de leurs émotions, pour garder un semblant de contrôle et d’équilibre dans leurs vies. Certaines personnes voyaient cela comme une manière de ne pas vivre mais de simplement survivre, de se couper de ce que la vie avait de plus beau et d’horrible à la fois, et dans un sens ils n’avaient pas vraiment tort, mais les jedis voyaient plus loin que leurs petites personnes : ils agissaient pour le bien du plus grand nombre avant leur propre personne.
Ainsi le jeune bretteur comme tous ses camarades avait travaillé d’arrache-pied pour maintenir un équilibre entre calme et tempête, pour devenir un modèle de self-control afin que les jeunes générations puissent un jour prendre exemple sur lui, mais malheureusement les choses n’étaient pas aussi faciles d’un individu à un autre. Chaque personne avait son histoire avant d’entrer dans l’Ordre, la vie laissait sa marque sur chaque apprenti et parfois cette marque semblait comme apposée au fer rouge, refusant de partir malgré les efforts pour s’en débarrasser. Lorn était de ceux-là, Lorn était de ceux qui tentaient de vivre avec cette marque au fer rouge du mieux qu’ils pouvaient et, si en journée il arrivait très facilement à donner le change et à paraître maître de lui-même, c’était lorsque la nuit pointait le bout de son nez que ses souvenirs reprenaient le dessus.
Pas une nuit…pas une seule…il n’avait jamais passé une seule nuit paisible depuis ce jour-là, il ne s’était jamais plus réveillé paisiblement. Lors des premiers mois il avait cru devenir fou, il se réveilla en hurlant dans son lit, réveillant ses camarades par la même occasion et s’attirant leurs foudres, mais avec le temps il avait fini par s’habituer à ces souvenirs, à ces cauchemars. Qu’y avait-il de différent d’un cauchemar ? Des visions terrifiantes qui étaient insupportables, cela était commun chez tous les cauchemars mais la seule différence ici était que ces images étaient bien plus personnelles qu’un simple mauvais rêve.

Mais il avait fini par s’y habituer, il avait fini par accepter le fait qu’il ne dormirait jamais du sommeil du juste et c’est ainsi que, même s’ils étaient épuisants, ces rêves étaient devenus une petite routine…une sorte de petit réveil interne. Ainsi, aujourd’hui il s’était encore réveillé avec le goût métallique du sang dans la bouche mais, pour la première fois depuis une éternité, son réveil avait pris du retard…pour ainsi dire. Pour quelqu’un habitué à dormir si peu cette nouvelle ne pouvait qu’être formidable et, sans se bercer d’illusions, elle présageait peut-être d’un avenir un peu plus radieux. Après tout, si dès le premier soir il avait été capable de dormir plus, peut-être que cela ne ferait que s’améliorer au fil du temps, non ? C’était en tout cas une théorie que le maître d’armes garda dans un coin de sa tête.
Ainsi il se réveilla, alla se débarbouiller un peu et revint dans le lit le plus silencieusement possible compte tenu de sa colossale carrure, profitant du beau spectacle qui s’offrait sous les yeux : le réveil de sa bien-aimée. Même au réveil elle était magnifique, au naturel, sans artifice, elle était d’une beauté stupéfiante si bien que le maître ne pouvait détacher son regard du spectacle qui se jouait devant lui. Souriant lorsqu’elle prit enfin la parole pour lui demander s’il avait bien dormi, le garçon ne put que répondre :

« Mieux que je ne le pensais, à vrai dire. Et toi ? »

Valait-il vraiment mieux l’inquiéter dès maintenant avec toutes ces histoires de cauchemars ? Non, il avait bien dormi si on comparait cette nuit aux autres et c’était bien là tout ce que la demoiselle avait besoin d’entendre au réveil. Toujours allongé sur son lit, tourné vers sa chère et tendre, le jeune homme enchaîna avec :

« Malgré ces derniers jours mouvementés et ce qui nous attend à l’avenir, je me sens...détendu. Dans un sens c’est déconcertant. »

Il était calme et serein malgré l’avenir incertain qui lui tendait les bras, il ne savait pas de quoi demain serait fait mais il accueillait l’inconnu avec calme…et la créature de rêve à côté de lui y était sans doute pour quelque chose.
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En sentant le regard de Lorn sur elle, la dévorant presque alors qu’elle émergeait d’un sommeil réparateur, Alyria ne put empêcher un sourire très légèrement flatté d’apparaître sur ses lèvres, ainsi qu’une rougeur délicate de colorer ses joues. Il y avait une différence entre savoir que l’on pouvait être considéré comme attirante et sentir une lueur d’émerveillement et de désir dans les prunelles d’un amant, et à cet instant précis, la maîtresse faisait plus que clairement la nuance.

Son ascendance hapienne lui avait valu la chance d’une génétique avantageuse, et elle n’avait pas mis longtemps à le comprendre au cours de son adolescence puis du début de l’âge adulte, la maturité et les cicatrices avaient contribué à affadir son charme naturel pour offrir un visage strict, froid, que certains avaient qualifié de beauté autoritaire. Le terme correspondait relativement bien. A l’extérieur, son but n’était pas de plaire, mais d’être respectée pour ce qu’elle était, pour ce qu’elle représentait, pour ses compétences, et il fallait reconnaître que les balafres sur sa face avaient fortement contribué à cet état de fait.

Mais pourtant, l’épicanthix avait ce regard, celui de l’homme épris, qui après avoir déshabillé son corps, déshabillait son âme. Elle se sentait à la fois elle-même, et de façon pleine et entière, et un peu différente. Comme si laisser tomber le masque de glace et s’offrir ainsi sans artifice, dans toute la vérité de la nudité matinale, lui avait rendu une part de son caractère d’antan, celui d’une jeune femme aimant plaisanter et profiter de la vie, avec mesure évidemment, comme une jedi, mais qui n’avait pas oublié qu’apprécier les plaisirs nécessaires de l’existence n’avait rien de terrible, et qui surtout le laissait voir au monde extérieur.

Alyria s’était forgée cette carapace qui aux yeux de tous la rendait stricte et d’un calme olympien, et à travers laquelle peu de personnes pouvaient voir. C’était évidemment voulu, une évolution normale, qui finalement se conjuguait à sa prise d’importance dans la hiérarchie de l’Ordre. Mais à cet instant, il n’y avait pas, comme on aurait pu le croire, une vulnérabilité née de l’exposition parfaite de sa personne, Non, au contraire, elle sentait couler dans ses veines comme un feu liquide qui la conduirait à la renaissance une force étrange, et une stabilité enfin complète, car non pas travaillée, mais ressentie.

Alors ce regard, elle le croisa, ses yeux verts plongeant dans ceux cyans de son amant, et elle resta un moment ainsi, sans rien dire, détaillant le visage aux traits fins en face d’elle, les cheveux bruns un peu emmêlés, conséquence de la nuit, la gorge puissante, le torse musclé, et toujours plus bas, encore plus bas… Rien de caché et tant à découvrir, encore et encore, sans se lasser.

Puis la trentenaire répondit simplement, d’une voix rendue rauque par autre chose que le réveil :

« Très bien, je suis en pleine forme… »

Puis, une lueur mutine apparut dans ses yeux, l’onyx de ses pupilles semblant vouloir dévorer l’émeraude de l’iris, et elle acheva dans un murmure :

« … Ce qui vu le peu d’heures passées à réellement dormir, serait presque surprenant. »

Elle attendit un instant la réaction de Lorn, avant de laisser échapper un rire taquin, qu’elle calma cependant assez rapidement. Une sensation de douce euphorie l’envahissait, Alyria se sentait prête à affronter le monde, ses nouvelles fonctions, et ce avec une certitude absolue qui aurait presque pu paraître incongrue. Mais pourtant, c’était comme si au cours de la nuit, toutes ces incertitudes liées à son passé avaient été balayées, pour laisser la place à cette femme déterminée, et pour un court, très bref instant, simplement heureuse avec celui qui partageait à présent son existence. C’était une parenthèse dans le cours trépidant des événements, mais qui pourtant s’inscrivait pleinement, à son avis, dans sa vie de jedi. Elle avait toujours caché ses doutes, et en était désormais libérée. Non, rien ne serait plus comme avant. Et cela, elle le devait à l’amour que lui portait son meilleur ami et désormais amant. Ce n’était point l’aveuglement futile de l’amoureuse transie, mais bel et bien la réalisation tardive mais réelle qu’elle formait un tout, avec ses failles et ses blessures, et qu’elle devait non pas cacher, bannir ses dernières de ses pensées, mais s’en servir au contraire comme d’une force pour faire face aux épreuves qui l’attendait. Voilà d’où venait cette détermination, cette certitude, et ce sentiment lui était infiniment précieux.

Alors elle déclara à Lorn, une expression un peu étrange sur le visage, presque éthérée :

« Je vois ce que tu veux dire… Sans doute que nous avons plus gagné cette part de calme qui nous manquait à tous deux cette nuit… Ce besoin de croire en soi, parce que les autres te considèrent non pas comme tu voudrais qu’ils te voient, mais comme tu es réellement. »

Elle ajouta, la voix toujours basse, mais vibrante :

« C’est ainsi que j’ai l’impression de me voir quand je regarde dans tes yeux. Cela m’aide à me rappeler qui je suis, et non pas qui j’ai cru être. »

A cet instant, la maîtresse d’armes fit un mouvement inattendu, elle roula sur le côté et se positionna au-dessus de son amant, son visage juste en face du sien, entremêlant ses jambes aux siennes sous le drap et lui demanda :

« Regarde-moi encore. Juste un moment. »

Alyria se gorgea de ce regard bleuté, et quand l’envie se fit trop forte, elle déposa ses lèvres sur celles de Lorn, avant d’approfondir le baiser, se laissant guider par le désir de voir la nuit se prolonger un peu, se fondre dans le jour, comme leurs corps peu à peu se confondaient l’un et l’autre, et que la fureur d’aimer les submergeaient une nouvelle fois.

Illuminant leurs soupirs étouffés, le soleil achevait de se lever sur le Temple.

Plus tard, alors que tous deux reprenaient leur souffle, Alyria se laissa tomber de son côté du lit, exhalant un soupir de bien-être. Ils restèrent ainsi sans bouger un bon moment, le rythme de leur respiration respective se calmant progressivement. Mais déjà l’heure approchait où ils devraient se séparer. A moins que…

« Tu retournes sur Coruscant directement non ? Si tu veux, on pourra partager la même navette. »

La demande avait été soudaine, brusque, émise presque sans réfléchir, mais elle faisait pourtant sens. Il était inutile d’affréter deux vaisseaux séparés quand ils avaient la même destination finalement. Etait-ce également un moyen de retarder une séparation longue, qui devrait durer plusieurs mois entrecoupés de rares entrevues aussi brèves que passagères ? Sans doute, évidemment. Mais cela n’affecterait en rien leur travail, au contraire.

Se levant finalement, Alyria se déplaça jusqu’au bout du lit et rabattit finalement les draps pour en sortir, offrant au passage une vue qui ne devait pas être désagréable à son amant, et elle se dirigea vers la salle de bain, avant de se retourner, la main sur la poignée :

« Je vais prendre une douche avant… »

Et elle s’engouffra dans la pièce, se dérobant au regard de son amant, ce regard qui était devenu l’horizon de ses pensées les plus intimes. Ces souvenirs désormais, étaient gravés dans les tréfonds de sa mémoire, pour ne plus la quitter. Jamais. Les épreuves ne manqueraient pas de jalonner le chemin qui s’ouvrait devant elle, mais cette nuit-là, personne ne pourrait la lui enlever. 

Alyria était prête à affronter l’avenir, avec Lorn à ses côtés, et dans ses pensées.
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Anonymous
À force de n’avoir ses draps que pour seule compagnie le jeune maître avait complètement oublié ce que cela faisait de ne pas dormir tout seul – chose qu’il n’avait pas expérimenté depuis son enfance – et de se réveiller avec le visage d’une autre personne juste à côté du sien. Sentir la chaleur d’un autre corps tout contre le sien, plonger les yeux dans ceux d’une autre, il redécouvrait toutes ces sensations et avait littéralement l’impression d’être né de nouveau, ressuscité pour ainsi dire. Oh non ce n’était pas une question de passer à l’acte ou non, de devenir ou redevenir un homme – que cela puisse faire une différence ou non – mais c’était sur le plan émotionnel et sensationnel que tout était bouleversé dans son esprit.
À force de s’interdire de ressentir les choses le jeune maître avait presque fini par oublier ce que cela faisait de ressentir intensément les choses, de laisser sa passion guider le moindre de ses mouvements et de ressentir le plaisir sous toutes ses formes. Il savait ce que ses pairs lui diraient s’ils le voyaient dans sa situation, que ce n’était pas bien, qu’il enfreignait les règles, qu’il glissait sur une pente savonneuse qui ne le mènerait que vers le côté obscur mais à ce moment précis toutes ces leçons n’avaient pas la moindre importance car il était bien, serein, au côté de la femme qu’il aimait. Qu’y avait-il de mal à cela ? Il ne voulait pas se soucier des règles pour le moment mais simplement profiter de ce qu’il avait sous les yeux.
Regardant sa compagne émerger après une nuit de sommeil et…d’autres choses, le jedi sourit en entendant la demoiselle lui dire qu’elle avait bien dormi, à sa grande surprise. Effectivement, après une nuit si agitée on s’attendrait à avoir deux personnes épuisées s’extirper du lit, pas deux adultes frais et dispos comme ils semblaient l’être. À cette déclaration, Lorn ne put que rajouter :

« J’en suis tout aussi surpris que toi. »

Il laissa donc sa camarade lui expliquer son point de vue sur les récents évènements. Rejoignant son avis quant au fait qu’ils avaient tous deux gagné quelque chose en s’ouvrant à l’autre et en laissant leur passion prendre les commandes l’espace d’une nuit, le garçon sourit de plus belle et répondit :

« Ça fait du bien de pouvoir être soi-même avec quelqu’un. De pouvoir souffler, de pouvoir penser ou dire ce que l’on pense sans crainte d’être jugé par l’autre comme nous le serions d’ordinaire. C’est ce qui me manquait, sans doute…pouvoir être moi-même avec quelqu’un, pour quelqu’un. »

Il plongea alors son regard dans les prunelles de sa compagne et, rassuré de savoir qu’elle se sentait un peu plus entière dans les yeux du maître d’armes, la réciproque étant on ne peut plus vraie, le colosse ne put qu’ajouter un simple et franc :

« Merci. »

Une fois encore ils s’embrassèrent et se laissèrent aller à la passion la plus simple et la plus pure, remettant le couvert une énième fois avant de se rallonger sur la couche, le souffle rapide et régulier comme preuve d’un récent effort physique. Insatiables ? Sans doute, mais surtout très endurants. On ne devenait pas maître d’armes en négligeant sa forme physique. Et bientôt la conversation prit une tournure pour le moins inattendue lorsque la demoiselle à la crinière de feu demanda à son colossal ami s’il voulait partager la navette avec elle pour se rendre sur Coruscant. Surpris par cette proposition, Lorn trouva bien vite cette demande raisonnable, sensée et surtout plais ante. Passer un peu plus de temps avec sa bien-aimée avant d’être séparés par les aléas du devoir : autant en profiter jusqu’au bout, n’est-ce pas ? Il répondit alors :

« J’accepte avec joie. Ça m’évitera de devoir me contenter des pilotes comme seuls interlocuteurs. Ils ne sont généralement pas des plus causants. »

Tout cela était donc bien réglé, ils pouvaient maintenant continuer à s’accorder un peu de temps pour tous les deux. Souriant en voyant la demoiselle se diriger vers la modeste salle de bain, le garçon se leva de sa couche et lui emboîta le pas avant de fermer la porte derrière lui. Aucun d’eux ne savait de quoi demain serait fait ni quand ils auraient à nouveau l’occasion d’avoir une soirée rien qu’à eux, leur agenda serait sans doute rapidement rempli, mais ils pouvaient au moins profiter des quelques minutes ou heures qui leurs restaient pour savourer le moment…savourer la proximité avec l’être aimé.
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